La planète des singes Planet of the apes de Franklin F. Schaffner FFICHE FILM Fiche technique

USA - 1968 - 1h52

Réalisateur : Franklin F. Schaffner

Scénario : Michael Wilson Rod Serling d’après le roman de Pierre Boulle

Maquillage : John Chambers

Costumes : Morton Haack Résumé Musique : Jerry Goldsmith Une mission de quatre astronautes améri- comme une race inférieure, les chassent et cains navigue à travers l’espace. Le but est les utilisent comme cobayes pour leurs de gagner une planète dans la constella- expériences scientifiques. Désormais, Interprètes : tion d’Orion. Après 18 mois à bord du vais- seule la bienveillance d’un couple de Charlton Heston seau, l’équipage atterrit en catastrophe sur savants, Zira et Cornelius peut sauver une planète inconnue. Seuls trois hommes Taylor… (George Taylor) ont survécu au voyage, dont le colonel Roddy McDowall George Taylor. Le compteur indique qu’ils (Cornelius) sont en l’année 3 979. Au hasard de leur marche, les cosmo- Kim Hunter nautes se retrouvent face à des hommes (Zira) sauvages, incapables de leur adresser la Maurice Evans parole… et qui sont poursuivis par une armée de singes à cheval, munis de lances. (Zaius) Tous les trois se retrouvent au milieu d’une James Whitmore véritable chasse à l’homme, dont seul (le président de l’assemblée) Taylor parvient à réchapper. Il est embar- qué de force vers une cité où les singes ont pris le pouvoir et, considérant les humains

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Critique ses valeurs qui permet alors de mieux montre de préoccupations et d'attitudes apprécier leurs portées différentes, mais dangereusement humaines. A l’origine, la réalisation de La planète qui se prolonge à un point tel qu'à la fin Le contenu didactique du film est alors des singes n’aurait pas dû échoir à le fantastique simple, imposé et démen- bien plus complexe et ambigu que Franklin F. Schaffner mais à… Blake ti à ses différents niveaux, se disperse prévu. Il ne s'agit pas seulement, Edwards, le réalisateur de Diamants dans le film, se retrouve où on ne l'at- comme le début du scénario pourrait sur canapé et de La panthère rose. tendait plus et mine de ce fait tout ce nous le laisser croire, d'une simple C’est même ce dernier qui, selon la qui nous est donné à voir et dont, désor- transposition permettant de mieux criti- légende, aurait eu la vision du plan final, mais, on ne peut que douter. quer les hommes en les observant sous avec le producteur Arthur P. Jacobs : Planet of the Apes tente ainsi la syn- un jour nouveau, celui d'une société de déjeunant dans un restaurant thèse des deux principales tendances de primates. Et pourtant la première appari- d’Hollywood, leur regard à tous les deux Franklin Schaffner jusqu'à présent : La tion des singes en serait révélatrice. Je se serait porté sur la statue de La réflexion politique, la méditation sur le pense à ces merveilleuses scènes de la Liberté, qui ornait un des murs du “déli- pouvoir, thèmes principaux du Best capture des hommes pourchassés par catessen” ! Le devis d’Edwards étant Man ; mais aussi ce goût pour le mer- ces chevaliers noirs, singes lancés au jugé trop élevé, Sidney Pollack fut alors veilleux, le délire visuel, les sentiments galop à travers les plantations, maîtri- envisagé. Mais lorsque Charlton Heston exacerbés, bref, tout ce romantisme fré- sant l'espace et les fuyards apeurés, s’enthousiasme pour le scénario, il exige nétique qui donnait tant de valeur à son puis ramenant leurs victimes esclaves que Franklin F. Schaffer, qui venait de le remarquable War Lord. vers des demeures moyenâgeuses. diriger dans Le seigneur de la guerre, Malgré son décor de science-fiction, Michael Wilson et Rod Serling ne négli- soit choisi comme metteur en scène. Or I'ouverture du film est proprement fan- gent certes pas le pittoresque de ce on ne refuse rien à la superstar de Ben- tastique, c'est la pénétration progressi- parallélisme entre singes et hommes. Hur et des Dix commandements… ve d'individus humains dans un espace Les séquences suivantes, au village des Après cette superproduction, le réalisa- étranger. Trois cosmonautes débarquent singes, exploitent encore ce principe - teur, qui ne participe pas aux suites de involontairement sur une planète où de manière un peu statique d'ailleurs, La planète des singes, s’attaque à règne en maître une civilisation de car l'intrigue est alors délaissée au pro- des projets ambitieux, notamment les singes ayant repoussé l'homme dans les fit du simple inventaire des situations célèbres Patton (1970) et Papillon forêts sauvages ou tenté de l'apprivoiser inversées imaginables : par exemple (1973). dans des zoos ou des muséums d'histoi- l'existence d'une religion simiesque et Dossier de presse re naturelle. Mais le didactisme voulu de son Dieu ayant créé le Singe à son du film tempère vite cette débauche d'ir- image, du racisme existant entre singes, rationnel utilisant Charlton Heston, le orangs et chimpanzés, de zoos où l'on héros, comme son point fixe et son peut observer des hommes en cage tout nécessaire faire-valoir. Les singes juste bon à imiter les singes, etc. La Comme tout vrai film fantastique, paraissent plus humains que les parabole ne reste pourtant pas à ce Planet of the Apes ménage une hommes mêmes. Sur leurs modèle, ils niveau : bientôt, I'étrange résistance des confrontation permanente entre des élé- normalisent presque leurs attitudes et singes à reconnaître l'espèce humaine, ments proprement merveilleux, irréels, leurs modes de vie. Par ailleurs l'huma- témoigne, avec la sagesse nouvellement et certains paysages ou certaines situa- nité de cette planète affirme sans équi- soupçonnée du docteur Zalus, leur chef, tions humaines immédiatement analy- voque sa bestialité. L'action ne peut d'une juste méfiance à l'égard de l'hom- sables. Le film joue par conséquent de alors se nouer entre Charlton Heston et me. Celui-ci, sur le plan de la fable, s'in- leurs oppositions et réactions réci- ses compagnons singes qu'à la ren- carne donc à nouveau dans les êtres proques. Mais Planet of the Apes est contre de civilisations humaines et humains eux-mêmes et non plus dans également une œuvre d'anticipation et, simiesques. Charlton Heston s'est coupé les singes analogiquement transposés. à ce titre, se présente comme une fable du genre humain, qui avait choisi les Dès lors, Charlton Heston et ses compa- - dans la mesure où l'on peut dire plus voyages interplanétaires à seule fin de gnons singes, s'ils dirigent encore l'ac- généralement que la science-fiction est quitter la terre, ce n'est pas un hasard tion par leur fuite au bord de la mer, la forme moderne du roman philoso- s'il est finalement l'unique rescapé du près de la grotte et de la zone interdite, phique. La vocation de ce film est donc vaisseau spatial. Par ailleurs Cornélius se rejoignent au centre et à l'écart d'un aussi de dérouter pour mieux et Zira sont également chassés de leur débat dont les pôles antagonistes sont convaincre, dans un retournement de village et poursuivis pour avoir fait constitués par le docteur Zalus d'une

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part et l'espèce humaine en général (…) Voici que surgissent les maîtres de Dans ce monde l'homme n'est plus le d'autre part. L'ultime rebondissement du la planète : des singes bardès de cuir, seigneur, mais un objet d'études, un film précise les positions respectives, fin armés de fusils et de filets, qui chassent cobaye sans droits : les thèmes de brutale découvrant l'Objet dont le sym- l'homme, le tuent, le capturent. Taylor science-fiction exploités dans les pre- bolisme un peu trop significatif est com- (Charlton Heston) est séparé de ses mières séquences s'enrichissent de don- pensé par son admirable présentation : deux compagnons : blessé à la gorge, il nées philosophiques, d'allégories poli- lent travelling sur les parois de la Statue est sommairement soigné puis enfermé tiques. On y verra au gré de son humeur de la Liberté, en contrejour, non encore dans une cage, parmi les hommes. une réflexion sur le racisme, le génoci- identifiable, découvrant en contrebas Stupéfait, il découvre alors une étonnan- de, la guerre du Vietnam, I'égoïsme Charlton Heston chevauchant sur le riva- te société, dominée par les gorilles et d'une société sur-développée refusant ge, puis contrechamp brutal et explicatif les orang-outans. Civilisation hétérocli- d'entendre les cris des peuples pauvres. disparaissant aussitôt pour mieux nous te, mélange d'objets, de rites, de lois qui La civilisation des singes est le reflet, à restituer Heston en gros plan, héros semblent provenir des siècles passés et peine déformé, de la nôtre. définitivement seul et exclu du genre rappellent étrangement certaines étapes Avec l'aide de Zira et de Cornélius, humain dont il maudit la juste destinée. de l'aventure humaine. Taylor réussit à s'échapper et retourne Malgré le talent de Wilson et Serling (et Les singes ont tout naturellement dans la «zone interdite» qu'il a traversée l'existence originale du roman de Pierre découvert la cruauté, le racisme, au début de son aventure. Au fond d'une Boulle), le film n'est donc pas réductible I'intolérance, le fanatisme religieux, les caverne, ils découvrent des objets fami- à son scénario dont la complexité du pratiques médicales douteuses, le liers : une paire de lunettes, une poupée propos frise parfois la confusion. Ce mépris des races inférieures (la race qui dit «maman»… Rejoint par Zaïus, serait méconnaître le travail de Franklin humaine en particulier). Fable cruelle, Taylor obtient sa liberté, il s'éloigne vers Schaffner, premier maître d'œuvre et sous le masque du singe, nous recon- l'inconnu «que trouvera-t-il là-bas ? seul réalisateur de cette Planet of the naissons l'homme et ses égarements. demande Zira, - «Sa destinée», répond Apes. C'est bien la richesse visuelle du Sa blessure l'empêchant de parler, Zaïus… Le dernier plan du film nous film qui souligne d'abord et fait ressentir Taylor essaie en vain de signifier qu'il montre Taylor découvrant… Ies restes le démesuré de certaines situations. est différent des humanoïdes bestiaux de la statute de la Liberté à demi- Ainsi la première découverte de la pla- qui occupent les cages voisines. enfouie sous les rochers : d'un coup, nète par les cosmonautes, leur longue Quelque peu agacés par les habituelles tout s'éclaire : cette planète était bien la marche à travers le désert, joue-t-elle conventions du cinéma (les singes Terre qu'ils avaient quittée depuis 2000 sur le principe de plans de différentes galactiques parlent anglais et se condui- ans, la Terre détruite par la bombe, ses grosseurs dont la présence des trois sent vraiment comme des humains), habitants redevenus ce qu'ils étaient à hommes permet seule l'attribution de nous suivons les efforts de Taylor : l'origine, les singes ayant pris la relève l'échelle, au milieu d'un chaos de roches menacé de castration, il parvient enfin à et pourchassant, avec raison l'homme, déchiquetées, de canyons trop connus intéresser deux jeunes savants : Zira et ce «fourrier de la mort». Rarement un qui nous semblent cependant étran- Cornélius qui ont remarqué son compor- film ne nous avait offert une telle gers… (…) tement ; la parole lui revient : il va pou- «chute», une relecture aussi passionnan- Si, après The War Lord, Planet of the voir convaincre puisqu'il sait parler ; te : ce que nous prenions pour de naïves Apes n'est donc plus une surprise, c'est mais, transféré devant un tribunal qui conventions devient réalisme scrupu- bien tout à l'honneur de Franklin rappelle étonnament les tribunaux leux ; chaque élément choquant devient Schaffner qui témoigne, malgré la ecclésiastiques du Moyen Age, il est l'une des pièces d'un puzzle que nous Griffe, de la permanence d'une sensibi- humilié, dénudé, baillonné, vivement n'avions su prévoir et reconstruire, aveu- lité bien particulière et s'affirme comme combattu par l'un des chefs de la collec- glés que nous étions par l'assurance de un des nouveaux auteurs les moins tivité : le Docteur Zaïus qui, pour des rai- notre supériorité et de l'irréversibilité de indiscutables du cinéma hollywoodien. sons que nous devinons mal, refuse notre évolution : la bombe explose et Frédéric Vitoux avec obstination de le considérer autre- tout est à recommencer ; les brutes stu- Positif n°96 - Juin 1968 ment que comme une bête puante, pides sont les arrière petits-neveux des méprisable et malfaisante : la fable par- technocrates et des cosmonautes. vient à son apogée : I'incrédulité et le Partis d'éléments conventionnels (les mépris que l'homme affiche vis-à-vis de voyages interplanétaires, le space nos “frères” inférieurs se retourne opéra, les civilisations disparues), les contre lui-même. scénaristes ont réussi tout au long d'un

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récit parfaitement articulé à enrichir Le réalisateur Filmographie constamment notre réflexion ; les tech- niciens et en particulier les maquilleurs Après de solides études, il a beaucoup The Stripper 1963 ont déployé des prodiges de virtuosité travaillé à la télévision et son style s'en Les loups et l’agneau pour recréer un monde déroutant, mais ressent. Ses premiers films rendaient un réel, des personnages «non humains» son insolite : amours d'une strip-teaseu- The best man 1964 possédant une personnalité attachante : se et d'un jeune garçon (The Stripper), Que le meilleur gagne La planète des singes est une réussi- droit de cuissage (The War Lord), te, un film chaleureux et intelligent. Bien thème du double transposé dans le The war lord 1965 que cette idée soit en passe de devenir domaine de l'espionnage (La griffe), Le seigneur de la guerre le raton laveur de la critique, il n'est pas sans oublier un bon documentaire sur la inutile de rappeler à propos de cette politique américaine (The Best Man). The double man 1967 réalisation que c'est souvent par le biais Vint l'heure des best-sellers. De La pla- La griffe de productions “commerciales” que les nète des singes à Papillon, de cinéastes américains expriment le plus Patton à la révolution russe, Schaffner Planet of the aper 1968 utilement leurs doutes et leurs se tira d'affaire avec aisance, montrant La planète des singes angoisses. un métier solide. ll revint à l'insolite Jacques Zimmer avec un portrait d'Hemingway vieillis- Patton 1970 Image et Son n°221 - Novembre 1968 sant (L’île des adieux) et The Boys from Brazil qui nous apprend que le 1971 fameux docteur Mengele ayant prélevé des cellules vivantes sur Hitler les a Papillon 1973 injectées à 94 femmes allemandes dont les maris doivent mourir au même âge Island in the stream 1977 que le père du Führer pour que puissent L’île des adieux s'épanouir 94 nouveaux Hitler. (…) Jean Tulard The boys from Brazil 1978 Dictionnaire des réalisateurs Ces garçons qui venaient du Brésil

Sphinx 1980

Yes, Giorgio 1982

Lion heart 1986

Welcome love 1989

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