Sabine Devieilhe RAPHAËL PICHON PYGMALION 2 MOZART the WEBER SISTERS Sabine Devieilhe Soprano Pygmalion Raphaël Pichon Direction
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MOZART THE WEBER SISTERS Sabine Devieilhe RAPHAËL PICHON PYGMALION 2 MOZART THE WEBER SISTERS Sabine Devieilhe soprano Pygmalion Raphaël Pichon direction L’envie d’enregistrer Mozart n’est pour moi ni originale, ni récente. D’où me vient depuis mon plus jeune âge le sentiment d’être en terrain connu ? Pourquoi sa musique est-elle évidemment celle que je souhaite adresser au néophyte autant qu’au connaisseur ? C’est ce que j’ai réalisé en découvrant la relation unique qui le lie avec les sœurs Weber. Lorsque Mozart compose ses premières pages pour Aloysia et le rendez-vous manqué de leur tournée en Italie, il s’inscrit dans un art du bel canto encore très empreint de la pyrotechnie baroque. Mozart aime le spectacle. Il joue avec la typologie vocale de la jeune Aloysia qui lui permet d’offrir au public des vocalises flamboyantes, des suraigus sensationnels. Si nous retenons souvent cette utilisation extrême de la tessiture, nous savons au fond de nous que l’essence de son art est ailleurs : dans l’affect. Qu’est-ce qui nous fait fondre dans ces lignes que nous mémorisons parfois après une écoute seulement ? L’évidence du sentiment. Lire entre les notes et donner à entendre le théâtre, comme note d’intention du compositeur, voilà où se place le défi de l’interprète. Par notre rencontre avec les sœurs Weber, femmes et dédicataires ayant tellement compté dans sa vie, nous tentons de tracer un portrait de Mozart amoureux. SABINE DEVIEILHE 3 I PROLOGUE : LA CONFIDENCE NAÏVE, OU L’ATTENTE 1 Les petits riens k 299b : Ouverture 3:20 2 Ah, vous dirais-je maman Pantomime Pantalon und Colombine k 446 : Andante 2:54 Réalisation : Vincent Manac’h 3 Dans un bois solitaire k 308 3:20 4 Pantomime Pantalon und Colombine : Adagio 1:16 Reconstitution : Vincent Manac’h II ALOYSIA, MIA CARISSIMA AMICA 5 Alcandro lo confesso… Non so d’onde viene k 294 9:03 6 Vorrei spiegarvi, oh Dio k 418 6:43 7 Popoli di Tessaglia… Io non chiedo, eterni dei k 316 10:10 8 Nehmt meinen Dank k 383 3:25 III JOSEPHA, OU L’ENTRÉE DANS LA LUMIÈRE 9 Adagio k 410, en fa majeur pour 2 cors de basset et basson 1:37 10 Schon lacht der holde Frühling k 580 7:35 11 Die Zauberflöte k 620 : Der Hölle Rache 2:41 12 Thamos, König in Ägypten k 345 : n°5 Allegro vivace assai 3:23 IV PER MIA CARA COSTANZA 13 Die Zauberflöte : Marsch der Priester 2:56 14 Solfeggio k 393 n°2 en fa majeur 2:53 Réalisation : Vincent Manac’h 15 Messe en ut mineur k 427 : Et incarnatus est 11:00 72:26 4 RAPHAËL PICHON SABINE DEVIEILHE 5 6 PYGMALION RAPHAËL PICHON direction 1er violons Violoncelles Cors Cecilia Bernardini, solo Tom Pitt Anneke Scott Gabriel Grosbard Antoine Touche Joe Walters Varoujan Doneyan Cyril Poulet Trompettes Katya Polin Paul Carlioz Serge Tizac Satomi Watanabe Contrebasses Julia Boucaut Cyrielle Eberhardt Thomas de Pierrefeu Julie Friez Trombones Yann Dubost Stefan Legée 2nds violons Flûtes Abel Rohrbach Louis Créac’h Jean Bregnac (solo) Franck Poitrineau Béatrice Linon Anne Thivierge Yoko Kawakubo Timbales Yuna Lee Hautbois Antoine Siguré Paul-Marie Beauny Jasu Moisio (solo) Pianoforte & Orgue Sandrine Dupé Shai Kribus Arnaud de Pasquale Altos Clarinettes Jérôme van Waerbeke Nicola Boud (solo) Pierre Vallet Fiona Mitchell Josèphe Cottet Bassons Kate Goodbehere Evolène Kiener (solo) Augustin Humeau 7 MOZART THE WEBER SISTERS En quête de nouvelles opportunités professionnelles, Mozart a vingt-et-un ans lorsqu’il frappe à la porte des Weber vers la fin de l’année 1777. Fridolin Weber, chef de cette humble famille de Mannheim, est copiste, souffleur de théâtre et chanteur (basse). Il place la musique au cœur de l’éducation de ses quatre filles Josepha, Aloysia, Constanze et Sophie. Un coup de foudre total et immédiat : Mozart tombe profondé ment amoureux de la jeune Aloysia, à peine âgée de dix-sept ans et dotée d’une voix aux capacités exceptionnelles, et il se lie définitivement avec ce nouveau foyer dont l’histoire est désormais intime ment liée à son propre destin. Décrite par son père Leopold comme « le personnage principal de la tragédie qui se joue entre [Wolfgang] et [sa] famille », la rencontre d’Aloysia et des Weber fait germer chez Mozart l’étincelle d’une volonté pressante de liberté, d’émancipation d’un noyau familial extrêmement exclusif et protecteur, au sein duquel Leopold continue de lui dicter sa route. Symbole de l’éveil amoureux du compositeur, la famille Weber sera dorénavant présente dans toutes les étapes des quatorze années restantes de la vie de Mozart : un premier et terrible chagrin d’amour avec Aloysia, un mariage avec la jeune Constanze, mais aussi une découverte déterminante dans le développe ment de ce compositeur au cœur du siècle des Lumières : la Franc-maçonnerie. Josepha y tiendra bientôt l’un des rôles les plus emblématiques. Trois femmes, trois muses, trois voix, comme au tant de visages d’un com positeur trouvant le chemin de sa liberté dans l’inspiration de l’être aimé, et nous permettant un voyage au cœur de certaines pages vocales les plus boule versantes, hardies et périlleuses, naïves ou tourmentées, d’un des compositeurs ayant le mieux dépeint le sentiment humain. I PROLOGUE – LA CONFIDENCE NAÏVE OU L’ATTENTE Un premier amour comme une flèche, et une fascination telle que Mozart se fait pressant : Aloysia est une cantatrice, certes encore en devenir, mais pour Wolfgang déjà « exceptionnelle ». S’il écrit très vite de nombreuses pages pour sa muse, Aloysia travaille sans relâche avec le compositeur en ce début d’année 1778. Ces longues séances de travail forgent au fur et à mesure son goût et son savoir- faire : ornements, cadences, et même apprentissage des sonates pour piano du jeune Wolfgang. 8 Face à cette fougue amou reuse et musicale, l’autorité paternelle a toute fois tranché : nulle question de laisser Mozart entre prendre de tournées avec son Aloysia, lui qui depuis peu aspirait ardemment à l’emmener à ses côtés sur les grandes scènes italiennes. C’est donc seul avec sa mère que Wolfgang, pressé par son père de trouver enfin un poste et des commandes à la hauteur de son passé de prodige, partira à Paris en mars 1778. La jeune cantatrice n’a pas dévoilé son cœur. Débutant par une chorégraphie représentant « l’Amour pris au filet et mis en cage », le Ballet des Petits riens – écrit tel un cadeau pour le chorégraphe français Jean-Georges Noverre en juin 1778 – et représenté à Paris, nous permet d’entendre une ouverture saisissante de fraîcheur et de verve. Ainsi, un puissant tutti débutant dans les premières mesures illustre le goût déjà prononcé du compositeur et du public français pour la « turquerie » et annonce les premières notes du chœur des Janissaires de l’Enlève ment au Sérail. Plus loin, des volutes thématiques des violons nous permettent à leur tour d’entendre les premiers germes des airs du futur Figaro des Noces. Malgré ces efforts, Paris ne fait qu’entrouvrir ses portes au jeune compositeur, qui se voit obligé 1. En 1783, Mozart se souviendra sûrement de ce thème évocateur cher à de continuer à avoir de nombreux élèves, écrivant pour leur apprentissage différentes variations ses yeux en écrivant une Pantomime sur Pantalon & Colombine pour le lundi gras sur des thèmes ou chansons populaires. C’est dans ce cadre que naîtront plus tard les variations de cette année-là, où Aloysia tiendra sur la chanson populaire « Ah, vous dirais-je maman », illustration naïve des premières conquêtes elle-même le rôle de Colombine, son mari Joseph Lange celui de Pierrot, et amoureuses. Pour cette chanson publiée en 1774 sous le titre « La Confidence naïve », nous nous Mozart celui d’Arlequin. Notons que la sommes prêtés au jeu d’imaginer un accompagnement directement inspiré des variations parisiennes tradition veut qu’Arlequin cocufie Pierrot, 1 mari de Colombine ! L’un des thèmes, du compositeur. un Andante, reconstitué par le Dr Franz Quelques semaines avant son départ pour Paris, Mozart avait composé l’une de ses rares ariettes Beyer d’après la partie de premier violon qui nous est parvenue et qui nous sert ici en langue française, sur des vers d’Antoine Houdar de La Motte, « Dans un bois solitaire » k 308, de ritournelle, semble être comme un première expression pour le compositeur de la vertu amou reuse, célébrant en filigrane celle de son écho lointain du thème français. (Esquisses de la Pantomime K 446) Aloysia immaculée. Dans la tonalité rare de la bémol majeur, cette mélodie est une véritable petite 2. En miroir, derrière notre ariette en scène drama tique, installant une atmosphère trouble et inquiète, et qui malgré une prosodie française langue française, un autre extrait de la Pantomime de 1783, ici un court de Mozart quelque peu maladroite, reste l’un des premiers joyaux de sa production de lieder. Ici Adagio bouleversant de simplicité l’Amour est « redoutable », punissant de ses flèches l’amant trop curieux.2 intitulé « Colombine ist ganz traurig » (Colombine est très triste) et annonçant, Aloysia dirige tous les mouvements de son cœur et, dans ce Paris qu’il exècre, l’exil est une lui, le dépouillement de la plainte attente insupportable pour le jeune compositeur. La mort soudaine de sa mère le 3 juillet 1778 ne d’une Barberine des Noces de Figaro (reconstitution : Vincent Manac’h). trouble qu’à peine une correspondance passionnée. Le retour en terres germaniques se fait impérieux. 9 II ALOYSIA, MIA CARISSIMA AMICA Le verdict tombe, et Mozart doit prendre le chemin du retour, après avoir appris de son père la promesse d’un poste à Salzbourg auprès du prince-archevêque Colloredo.