DOSSIER DE PRESSE

LE 2 SEPTEMBRE AU CINÉMA

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Synopsis

Psychologiquement et affectivement perturbée, Kay éprouve de profondes angoisses dans la vie. Son mariage avec Louis n’arrange que momentanément les choses. Le retour de sa sœur aînée Sweetie, va bouculer l’existence du couple.

Notes de la réalisatrice

« L’expérience des festivals comme Cannes ou ailleurs m’a fait me rendre compte que les gens semblaient apprécier le style de films que j’avais commencé à faire. Ça m’a décidé à essayer de faire un long métrage moderne à petit budget attaché à mon propre style. Je pensais que si nous ne demandions pas beaucoup d’argent, on nous laisserait essayer quelque chose de peu commun. Je me disais qu’il aurait été fantastique de faire un film avec la génération de cinéastes avec qui j’ai grandi. Pour la plupart d’entre nous, ce fut notre premier long métrage. »

JANE CAMPION

Entretien avec

Propos recueillis par Michel Ciment (Cannes, 17 mai 1989) Extraits tirés de Jane Campion par Jane Campion, Michel Ciment, Éditions Cahiers du Cinéma, 2014

« Qu’avez-vous fait pendant ces trois années qui séparent vos courts métrages de Sweetie ? Après la présentation de mes films au Festival de Cannes, j’ai réfléchi à ce que j’allais entreprendre dans la mesure où des possibilités s’ouvraient à moi. Le premier projet que je voulais mener à bien c’était Sweetie, car il me semblait reposer sur le point de vue le plus moderne et le plus provocateur. De plus, il était financièrement réalisable. Je pensais aussi qu’après un film plus « sérieux », ce serait difficile de réaliser Sweetie ! je sens en moi un côté provocateur et cela me plaisait beaucoup d’attaquer ce sujet. J’ai commencé à développer cette histoire avec mon coscénariste Gerard Lee, l’ami qui avait déjà écrit avec moi et qui est quelqu’un de très intelligent. C’était un matériau qu’il connaissait bien, qui nous appartenait à nous deux, et nous étions sur la même longueur d’onde. »

« Avez-vous eu des difficultés pour financer Sweetie ? […] Quant à la production même de Sweetie, elle s’est faite sans trop de problèmes, car le film était très bon marché, moins d’un million de dollars. Le scénario a été écrit dans cette perspective. Il m’a été inspiré par des gens, des événements que j’ai connus. Je procède toujours ainsi, cela me donne ensuite plus d’autorité pour écrire, et même si je m’éloigne ensuite de ces expériences, j’ai toujours une base vers laquelle je peux revenir. Le personnage de Sweetie a été inspiré par un homme mais, pour des raisons familiales, nous avons changé de sexe. Cela m’a déçue au départ, mais j’ai respecté les sentiments de mon coscénariste. Ce que j’aimais dans Sweetie, c’était tout le potentiel qu’il y avait en elle et la façon dont elle s’écroulait. Cela nous arrive à tous. Un jour, nous explorons ce que nous pourrions être, ce jour s’enfuit et c’est trop tard. C’est un personnage poignant et sans espoir. »

« Avez-vous étudié des cas psychiatriques, lu des ouvrages sur le sujet ? Non, pas vraiment. Nous avions des exemples vivants autour de nous. Et nous parlions beaucoup de gens que nous connaissions et qui étaient devenus fous. […] Je ne voulais pas que l’on passe par les obligations narratives habituelles mais que l’on traite davantage des états mentaux ou des émotions. Je voulais parler de la difficulté d’aimer tout en introduisant souterrainement des courants plus sombres. C’est alors que j’ai eu l’idée de la superstition. J’avais aussi envie d’utiliser des métaphores car je pense que les gens pensent beaucoup plus souvent qu’on ne le croit par métaphores et qu’on ne voit pas cela souvent sur un écran. Cela me semblait donner des dimensions supplémentaires au film. »

« Le sujet aurait pu donner lieu à un film misérabiliste. Vous filmez au contraire la laideur et la vulgarité en les stylisant. Le directeur artistique a créé volontairement des décors ternes et moches. Nous avons réfléchi sur les intérieurs en tenant compte du fait que les gens apportent leurs meubles dans les appartements où ils emménagent tout en gardant des objets qui appartenaient aux locataires précédents, si bien qu’il y a un mélange de styles. Ce qui est laid peut être aussi vu avec élégance par la lumière ou le cadrage. C’est une marque de sympathie. C’est plus poignant pour moi qu’un décor « joli », qui offre beaucoup moins de contrastes possibles. »

« Vos cadrages sont étonnants. Sont-ils préétablis ou bien êtes-vous inspirée par le tournage ? […] Au début, j’avais peur que mes cadrages ne paraissent prétentieux, mais je n’ai plus ce sentiment horrible. Ce que je voulais, c’était franchir cette ligne qui permet au cadre de créer le caractère poignant d’une situation comme dans la photographie, qui est un art beaucoup plus aventureux de ce point de vue que le cinéma. Il y a une sensibilité, une sophistication dans la photographie que je ne retrouve pas souvent au cinéma, et je voudrais pouvoir continuer à mener de front cette recherche visuelle et le développement du récit. »

« Y a-t-il des films où vous avez senti une recherche proche de la vôtre, un désir de décrire les états mentaux ? C’est une chose courante en littérature et je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas au cinéma. Il suffit de le vouloir, de désirer l’accomplir, comme David Lynch. On ne découvre pas la vérité juste en développant une intrigue mais en explorant plusieurs niveaux. Je ne désire pas seulement regarder les comportements mais découvrir les pensées et les émotions, comme dans certains romains de Marguerite Duras ou de Flannery O’Connor. […] »

Biographie de Jane Campion

Jane Campion est originaire de Wellington en Nouvelle-Zélande. Elle sort diplômée d’Anthropologie à l’Université Victoria de Wellington, avant d’intégrer l’Australian Film and Television School, où elle réalisa trois court-métrages : Peel, Passionless Moments, et A Girl’s Own Story, son projet de fin d’études.

En 1986, Jane Campion fait sensation au Festival de Cannes : Passionless Moments, A Girl’s Own Story et 2 Friends (un téléfilm qu’elle réalisa en 1985), sont programmé dans la sélection Un Certain Regard. Et Peel remporte la Palme d’Or du Meilleur court-métrage.

C’est en 1989 qu’elle réalise son premier long-métrage, Sweetie, présenté en compétition au 42ème Festival de Cannes. Il assoie les thèmes de prédilection de la réalisatrice qui connaissent de multiples variations dans son œuvre : le désir féminin, l’émancipation d’héroïnes au caractère singulier et souvent marginales, la lutte contre les carcans sociaux, la quête d’identité ou encore le nouveau départ.

Son second long-métrage, Un Ange à ma Table sort en 1990. Ce film remporta le Grand Prix du jury à la Mostra de Venise.

En 1993, Jane Campion réalise son troisième long-métrage, La Leçon de Piano. La cinéaste atteint une renommée internationale en obtenant la Palme d’Or pour ce film. Elle devient alors la première femme à remporter cette distinction, et la seule personnalité à détenir à la fois la Palme d’Or du long et du court- métrage. Les récompenses s’accumulent pour ce film : Prix d’interprétation féminine (Festival de Cannes) et Oscar de la meilleure actrice pour , Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle à la jeune , César du Meilleur film étranger, etc.

En 1996, elle adapte Portrait de Femme de Henry James, avec .

En 1997, Jane Campion préside le jury de la 54ème Mostra de Venise, et attribue le Lion d’Or à Hana-bi de Takeshi Kitano.

Elle réalise ensuite Holy Smoke en 1999 avec Kate Winslet et Harvey Keitel, In the Cut en 2003, un thriller érotique, coproduit par Nicole Kidman, puis Bright Star en 2009.

Présidente du jury de la Cinéfondation et des courts-métrages au 66ème Festival de Cannes, elle reçoit pendant cette édition le Carrosse d’Or de la Quinzaine des réalisateurs au cours d’une séance spéciale où sont diffusés les deux premiers épisodes de sa mini-série , co-produit avec Gerard Lee. Il s’agit d’une série policière, dans laquelle Holly Hunter interprète une gourou.

En 2014, Jane Campion préside le jury du 67ème Festival de Cannes, et attribue avec les autres membres la Palme d’Or à Winter Sleep de Nuri Bilge Ceylan.

Filmographie

1989 - Sweetie

1990 - Un ange à ma table

1993 - La Leçon de piano

1996 - Portrait de femme

1999 - Holy Smoke

2003 - In the Cut

2009 - Bright Star

2013 - Top of the Lake (série TV)

Genevieve Lemon (Sweetie)

Genevieve Lemon est une actrice et chanteuse australienne. Elle commence sa carrière en 1982 avec une apparition à la télévision dans The Young Doctors. Depuis, elle est apparue dans des programmes tels que Rafferty’s Rules, The Flying Doctors, , Always Greener, et plus récemment, Rake.

Elle fit partie des compagnies des Théâtres de Melbourne, et de Queensland. Ses apparitions sur les planches comptent des pièces comme Seaming et The Madras House, mise en scène par Rodney Fisher, The Venetian Twins, Brilliant Lies, Merrily We Roll Along, Piaf, Hanging Man, Priscilla Queen of the Desert - The Musical, Fat Swan, The Pirates of Penzance, The Wharf Revue et The Mouse Trap.

Genevieve Lemon travailla à trois reprises avec Jane Campion : Elle interprète le personnage qui donna le titre du film, Sweetie en 1989, qui lui permit d’atteindre une reconnaissance internationale ; et est au casting de La Leçon de Piano (1993) ainsi qu'Holy Smoke (1999). Plus récemment, Genevieve Lemon illumine par son interprétation de Bunny dans la série télévisée de Jane Campion, Top of the Lake (2013). En 1990, elle reçut le Prix de la Meilleure Actrice à l’Australian Film Critics Awards pour son interprétation dans Sweetie.

Parallèlement, sa carrière s’étend à la musique. Genevieve Lemon illumine par ses performances dans des cabarets : avec le rôle de la professeure de danse Mrs Wilkinson dans Billy Elliot - The Musical pour lequel elle reçoit en 2008 le Green Room Award et le prix Helpmann Award de la Meilleure artiste en premier rôle. Elle est nominée pour le prix du Meilleur Second Rôle Féminin en 2006 à l’Australian Film Institute Awards pour son interprétation dans Suburban Mayhem.

Elle est aussi chanteuse au-delà des planches de théâtre. Son premier album de musique country avec son groupe, Angels in the City, sort dans les bacs en 2006 (un live au Bennelong Point).

Filmographie

Sweetie de Jane Campion - 1989

La Leçon de Piano de Jane Campion - 1993

Billy’s Holiday de Richard Wherrett - 1995

The Well de Samantha Lang - 1997

Holy Smoke de Jane Campion - 1999

Soft Fruit de Christina Andreef - 1999

Le Feu sous la Peau de Paul Goldman - 2006

Chacun son cinéma - 2007 court métrage The Lady Bug de Jane Campion

8 - 2008 court métrage The Water Diary de Jane Campion

The Dressmaker de Jocelyn Moorhouse - 2014

Dans la presse

New York Times - Vincent Canby (06.10.1989)

Après avoir réalisé uniquement quatre courts métrages, Jane Campion, une réalisatrice néo-zélandaise de 34 ans, fait un premier pas spectaculaire vers le long-métrage avec Sweetie, un film assez différent de que vous êtes susceptibles de voir, jusqu’à ce que le prochain film de Campion arrive. Entre autres choses, c’est une histoire d’amour (et de haine) entre deux sœurs qui, rassemblées, pourraient faire une personnalité présentable.

Sweetie semble être un petit film, et il l’est en beaucoup de points, mais il possède une remarquable force et ténacité. C’est drôle, même si l’on ne rigole pas beaucoup, et triste, sans pourtant jamais provoquer les larmes. Au lieu de cela, le film exige d’être pris selon ses propres modestes conditions, sans considération pour les conventions sentimentales présentes dans les autres films. En ses meilleurs aspects, ce film est audacieusement déraisonnable.

Dans un sens, le film Sweetie est très semblable au personnage inhibée de Kay (Karen Colston), le personnage central qui retrace l’histoire occasionnellement en voix-off - parfois, contre son gré, semble-t-il. Kay serait une jeune femme séduisante (elle a un beau visage) si elle n’avait pas cette expression rébarbative. Son esprit est aussi pincé que ses lèvres.

Kay apparaît toujours comme désapprouvant les autres, allant dans des étendues infinies pour repousser des calamités peu vraisemblables et, dans les moments de repos, contrôlant les signaux radios venant de Mars. Kay est la saine d’esprit.

Le drame de l’existence de Kay est sa joyeuse sœur simple d’esprit, Dawn (Genevieve Lemon), surnommée Sweetie, une jolie jeune femme avec un visage d’ange et le corps de quelqu’un qui force trop sur la junk food à chaque opportunité. Sweetie a un sérieux problème de poids. Elle ment aussi, triche, ramasse les hommes au hasard et, généralement, a tout de l’humour libre que Kay refoule de son côté. Depuis qu’elles sont enfants, Sweetie a toujours été la favorite de la famille. Maintenant qu’elles sont toutes les deux adultes, leurs parents continuent d’être gâteux devant Sweetie. Le père, en particulier, encourage la fiction qu’a besoin Sweetie pour devenir une star du show-business.

« Les arbres m’effraient », dit Kay au début du film. « Ils ont des pouvoirs humains ». Elle fait cette déclaration avec une telle finalité que ça ne permet pas de discussion. Kay est à la fois pragmatique et effrayamment mystique. Quand une voyante qui lit les feuilles de thé lui dit qu’elle se mariera avec un homme portant un point d’interrogation sur son front, Kay fait tout pour que cette prophétie devienne réalité.

A une fête de bureau célébrant les fiançailles d’une collègue, Kay remarque que le futur marié a une mèche de cheveux bouclée qui ressemble à un semblant de point d’interrogation. Elle poursuit le jeune homme, Lou (Tom Lycos), jusqu’au parking du sous-sol où, 55 minutes après l’annonce de ses fiançailles, elle lui fait l’amour sous une voiture.

Lou et Kay semblent heureux au début. Comme dit Kay en voix-off, « Lou a fait en sorte qu’il y ait sept plans spirituels, et que l’amour que nous avions se trouve quelque part près du sommet ». Kay n’est pas facile à vivre pourtant. Elle est furieuse quand il plante un jeune arbre dans le jardin. Quand Lou refuse d’entendre ses remontrances, elle sort au milieu de la nuit pour le déterrer. Puis Sweetie débarque, accompagnée d’un pitoyable Bob lubrique, son « producteur ». Leurs incessantes bruyantes cavalcades sexuelles rendent furieuse Kay et intriguent Lou. Pendant une sortie à la plage sans Kay, Sweetie tente de séduire Lou en léchant ses jambes. La nuit suivante, Lou tente de faire fondre une Kay de plus en plus refroidie en léchant sa jambe. Kay lance « j’ai cru qu’un gros escargot était en train de ramper jusqu’à ma chemise de nuit ».

La relation entre Kay et Lou se détériore jusqu’à ce que, à la fin, Kay et Sweetie redeviennent à peu près ce qu’elles étaient avant de quitter leurs parents.

Le style de Mlle Campion a été comparé - sans trop de crédit, à mon avis - à celui de Jim Jarmusch (Stranger than Paradise, Down by Law, Mystery Train). Les deux partagent une affection à l’euphémisme et à l’ellipse, mais ils sont sinon complètement différents. La méthode impassible des films de Jarmusch est drôle, la comédie est limpide.

Le travail de Mlle Campion, même s’il est souvent drôle, est beaucoup plus sombre. Les gens sont physiquement blessés dans Sweetie. Mlle Campion est plus près de David Lynch, réalisateur de Blue Velvet. Elle et M. Lynch partagent ce qui équivaut à une obsession concernant les terreurs de la nature, notamment la vie grouillante qui existe juste en dessous de la surface des choses, que la surface soit le front d’un visage ou une pelouse.

Les films de M. Lynch, quoi qu’il en soit, sont très rococo. Sweetie est aussi fin qu’un dessin animé. Son style visuel détient une luminosité terne, et une efficacité narrative semblable à celle des dessins animés. Les événements se passent et l’histoire suit son cours. Aucune explication psychologique n’est donnée. Les spectateurs doivent digérer eux-mêmes l’information comme ils l’entendent.

M. Lynch fait des mélodrames. Sweetie est une mélo-comédie. En plus de Mlle Colston, Mlle Lemon et M. Lycos, l’excellente distribution inclut Jon Darling et Dorothy Barry, les parents très singuliers de Kay, et Michael Lake, le producteur de Sweetie. Gerard Lee collabora avec Mlle Campion pour le scénario, et Sally Bongers fut la directrice de la photographie. Bravo à tous.

Sweetie est un original.

24 Images - Philippe Elhem (n°44-45, 1989)

Femmes, Famille, Folie

Révélée à Cannes en 1986, via une poignée de courts métrages mémorables (Passionless Moments, A girl’s Own Stoy, Peel qui reçut la Palme d’Or) et un très curieux téléfilm (Two Friends), Jane Campion est venue avec Sweetie, son premier long métrage, amplement confirmer tous les espoirs que l’on avait pu mettre en elle. L’accueil réservé au film, très divisé (il a fait l’objet de spectaculaires rejets), est à bien des égards révélateur : du court au long métrage, il existe une solution de continuité si évidente dans l’œuvre de Jane Campion qu’il ne fait aucun doute que c’est à l’avènement de ce qu’il faut bien appeler un auteur […], que nous venons d’être conviés.

Pour autant Sweetie reste une curieuse entité, à la fois ancrée dans un naturalisme farouche et pourtant comme décalée par le regard particulier que porte la réalisatrice néo-zélandaise sur ses personnages et leur environnement. Rarement, il est vrai, on aura eu le sentiment d’une osmose aussi parfaite entre le regard d’un cinéaste et les cadrages de son film. […] Il n’empêche que, comme le cinéaste de Blonde Vénus, Jane Campion conçoit chaque plan comme une découpe et non comme un moment dynamique. Le film renvoie d’ailleurs à un univers esthétique d’ordre essentiellement plastique, où peinture et photographie se répondent également au sein d’une œuvre qui, si elle frôle constamment et de manière parfois un peu crispante le maniérisme, refuse d’y céder pour autant.

Car loin de se résumer à n’être qu’un pur jeu formel, Sweetie est aussi sujet, histoire, personnages. Il y a chez Jane Campion un goût (et un don) évident pour la narration comme pour la direction d’acteurs. Ceux- ci, contrairement à ce que l’on pourrait croire, sont loin d’être laissés-pour-compte de la mise en scène. Au contraire. Si le dispositif d’énonciation est fortement marqué et, en apparence, contraignant, il n’a, en dernier lieu, pas d’autre justification, d’autre finalité, que celle de se mettre au service des personnages.

Et des personnages, il n’y a justement que ça dans Sweetie : mari, parents, voisins, sœur qui gravitent autour de Kay, jeune femme de plus en plus enfermée dans sa névrose. Hypothèse : et si Sweetie, nouveau conte de la folie ordinaire, fidèle en cela à sa morale cinématographique, était double, nous livrant tout à la fois l’histoire de cette névrose et le récit symbolique de son analyse ? Comme Chabrol et Rohmer parlant d’Hitchcock, on est tenté de dire de Jane Campion qu’elle a su formidablement « manier les vertus, en apparence contraires, de la forme allégorique et du document. La réalité concrète "fournissant" au conte la chair sans laquelle il n’est qu’un pur jeu de l’esprit ». Ainsi Sweetie, sœur aînée de Kay, à la fois son absolu contraire mais aussi son double monstrueux, au-delà de l’approche naturaliste mais nourrie par elle, ne serait rien d’autre que l’expression matérialisée de son inconscient. […]

L’on ne saurait ramener Sweetie aux seuls paramètres de ses interprétations possibles. Tel est en fait la paradoxale richesse du film (par ailleurs drôle et inquiétant) de Jane Campion : c’est l’hétérogénéité de ses éléments mêmes qui, sollicitant l’imaginaire du spectateur, en fait une pure affirmation du cinéma.

Informations sur le film

LISTE TECHNIQUE

Réalisatrice : Jane Campion Producteur : John Maynard Scénario : Jane Campion, Gerard Lee Montage : Veronika Haussler Musique : Martin Armiger Directeur de la photographie : Sally Bongers Décors : Peter Harris Costumes : Amanda Lovejoy Format image : 1:85 - couleurs Format son : Dolby Année : 1989 Nationalité : Australie Langue originale : Anglais Durée : 105 min Visa d'exploitation : 72290 Genre : Drame

LISTE ARTISTIQUE

Sweetie Genevieve Lemon Kay Karen Colston Louis Tom Lycos Gordon Jon Darling

Flo Dorothy Barry Bob Michael Lake Clayton Andre Pataczek

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