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Québec français

Comment François Gravel a écrit certains de ses livres Monique Noël-Gaudreault

Nouvelles technologies et enseignement Number 114, Summer 1999

URI: https://id.erudit.org/iderudit/56205ac

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Publisher(s) Les Publications Québec français

ISSN 0316-2052 (print) 1923-5119 (digital)

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Cite this document Noël-Gaudreault, M. (1999). Comment François Gravel a écrit certains de ses livres. Québec français, (114), 108–109.

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Comment François Gravel a écrit certains de ses livres

PROPOS RECUEILLIS PAR MONIQUE NOËL-GAUDREAULT

Tintin, , et les autres... désordre le plus com­ Enfant, François Gravel était abonné au plet. La plupart du journal de , dans lequel il dévorait temps, il ne devine la les aventures de Johan et Pirlouit, de fin qu'une fois la pre­ Gaston Lagaffe, de Lucky Luke et de mière moitié écrite, Spirou lui-même. Il a assisté, ébahi, à la mais il n'a encore naissance du : c'était l'appa­ aucune idée de la façon rition de la couleur et de la fantaisie dans dont il va y parvenir. une vie qui avait été jusque-là en noir et L'ordinateur constitue blanc. Il doit beaucoup à Franquin, et il y un outil efficace pour réviser et la fonc­ samment de variations dans le rythme - a un peu de Zorglub (le savant fou et tion « déplacement » lui sert souvent. le lecteur ne doit jamais s'endormir ! déconnecté) dans son personnage de Quand il a trouvé son rythme de croisière, François Gravel recherche la simplicité, la Klonk. il arrive à rédiger une page par jour. fluidité, le naturel. Un peu plus tard, il a eu un coup de Chaque page sera lue, relue et rerelue ad cœur pour Bob Morane et son ennemi nauseam. Certains ont tendance à rajouter Les soirées du hockey... indéfectible, l'Ombre jaune. S'il a ensuite de l'information quand ils révisent. Lui, L'écrivain a été « coach » au hockey pen­ lu les classiques (Maupassant, Balzac, au contraire, passe plus de temps avec les dant des années et il a un fils qui a été Hugo), il a toujours gardé un doux souve­ ciseaux qu'avec la plume. gardien de but. Il a longtemps caressé nir de ses lectures d'enfance. Les premières pages seront réécrites l'idée d'un roman sur le hockey, particu­ Maintenant, il aime bien se plonger plus souvent que les autres, parce qu'il lièrement pour traiter de ces parents qui parfois dans un roman de Margaret relit son texte à partir du début presque à hurlent des insanités dans les estrades. Atwood, de Julian Barnes, de Robertson chaque fois. Il lit les mots à voix haute L'idée du roman Zamboni lui est venue un Davies, de Somerset Maugham ou de dans sa tête, pour s'assurer qu'il y a suffi­ jour où il regardait passer la machine du David Lodge. Il avoue avoir un faible pour même nom. Deux enfants les Anglais, particulièrement s'ils savent admiraient la machine, le distiller un soupçon d'humour. nez collé sur la baie vitrée... « Pourquoi ne Pas de plan, mais un pas entrer dans cette ordinateur machine à rêver ? » Quand il démarre, il a un En deux minutes, il personnage dans la tête, une avait trouvé le titre de situation, une atmosphère, mais i son roman, le thème (les ne rédige pas de plan - il trou adultes qui projettent verait ennuyeux de savoir à leurs rêves chez leurs l'avance où il s'en va ! Le enfants) et l'ambiance. premier jet s'écrit dans la Une histoire d'émotion, fébrilité. Les mots et les donc, à laquelle se mêle phrases se bousculent, dans le un peu de fantastique...

108 QUÉBEC FRANÇAIS Une histoire vraie une suggestion de Dominique Demers. le faire entrer dans un autre monde, L'idée de Klonk remonte à son enfance, François Gravel adore inventer des son monde à lui. S'il travaille à son alors qu'il vivait dans une famille de six histoires de Klonk et le faire progres­ ordinateur trois ou quatre heures par enfants. Les disques d'Elvis Presley, le ser dans le monde de l'étrange. jour, il continue à écrire en lavant son téléviseur, les disputes des grandes automobile, en se promenant, ou sœurs... Il y avait toujours du bruit Correspondances même en donnant ses cours d'écono­ dans la maison. Un jour qu'il lit des Bob Le roman Kate, quelque part est aussi mie ! Cela ne lui pèse pas, bien au Morane — trois nouvelles aventures avec issu d'une vieille idée qui a fini par contraire : il se demande comment ils l'Ombre jaune ! —, il dépose son livre sur aboutir. Il avait une scène de départ - font pour occuper leurs journées, ceux sa table de chevet et entend, pour la une rencontre sur le mont Saint-Hi­ qui n'écrivent pas... première fois de sa vie, le silence. Il laire, un autobus scolaire - qu'il a Il avoue qu'il accepte volontiers panique : tout le monde est-il mort ? Est- proposée à certains auteurs, dans le but d'être dans la lune, même que c'est une ce la fin du monde ? Il se lève, va voir de rédiger un roman à quatre mains. partie essentielle de son travail. Citant l'heure : deux heures du matin ! Ce n'était D'échec en échec, l'histoire a fini par se un auteur français : « Il ne faut jamais pas son entourage qui avait disparu, transformer en une double histoire perdre de vue qu'un écrivain assis dans c'était lui ! Des années plus tard, ce d'amour : celle de Jean-François, qui une chaise longue, un verre de scotch souvenir donnera naissance à Klonk, celui écrit des lettres d'amour à Kate, son à la main, c'est quelqu'un qui tra­ qui disparaît en lisant des livres. amoureuse de l'autre extrémité de l'île, vaille »... Juré pour le prix du Gouverneur géné­ et celle de Michel, qui écrit des ral, il doit lire une centaine de romans lettres comme on lance des bou­ jeunesse qui mettent invariablement en teilles à la mer dans le but de scène des jeunes. Pourtant, lorsqu'il trouver son âme sœur. De version Cauchemar était enfant, il lisait des romans qui en version, le roman est devenu mettaient en scène des adultes... Pour­ moins cynique, plus doux, plus... Klonk quoi ne pas faire vieillir Klonk et son amoureux. comparse ? Devenus adultes, ne pour­ raient-ils pas vivre des aventures où Le mot de la fin règne la fantaisie la plus totale, dans Avant-hier, François Gravel s'est lesquelles il pourrait cependant aborder surpris lui-même à avoir le sourire certains thèmes « lourds » — la mort, fendu jusqu'aux oreilles en écri­ par exemple, dans Le cercueil de Klonk, vant une nouvelle aventure de ou l'amour dans Un amour de Klonk ? Le Klonk. Écrire, c'est ce qu'il préfère. prochain Klonk portera sur l'astrologie — Une phrase, un mot suffisent pour

QUELQUES ŒUVRES DE FRANÇOIS GRAVEL

Zamboni, Montréal, Boréal, 1990. Prix M. Christie. Deux heures et demie avant Jasmine, Montréal, Boréal, 1991. Prix du Gouverneur général. Granulite, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Bilbo »,1992. Klonk, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Bilbo », 1993. Prix Alvine-Bélisle. Lance et Klonk, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Bilbo », 1994. Le cercueil de Klonk, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Bilbo », 1995. Un amour de Klonk, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Bilbo », 1995. Guillaume, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Gulliver », 1995. Mention spéciale Prix Saint-Exupéry (). Le match des étoiles, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Gulliver », 1996. Le cauchemar de Klonk, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Bilbo », 1997. Klonk et le mouillé, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Bilbo », 1997. Kate, quelque part, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Titan + », 1998. Klonk et te treize noir, Montréal, Québec/Amérique, Coll. « Bilbo », 1999.

QUÉBEC FRANÇAIS ÉTÉ 1999 NUMÉRO 114 109