Patrick ANDRE

SAUVETAGE ARCHEOLOGIQUE A

MISSIRIAC. .

Les terres de la Croix

en BERMAGOUET.

Novembre 1976

1

Fig. 1,1

Plan de situation. 1- sauvetage de 1976 2- Trésor de Bermagouët (193*0 3- Killiaire de Tetricue trouvé lors des recher- ches de 1976.

Fig. 1,2.

Extrait cadastral.

a- sauvetage de 1976 b-(autres vestiges c-)supposés.

Photo 2.

Le secteur de Berma- gouët, après remem- brement. Observation aérienne P.ANDRE et K.Clément Octobre 1976. Patrick ANDRE

RAPPORT de SAUVETAGES

ARCHEOLOGIQUES.

- MORBIHAN. Commune de ISSIRIAC.

- Lieu-dit / BERi-ÎAGOUET. Terres de la Croix. Parcelle n° 27.

- Propriétaire : Mie M. DESHAYES. 56 faubourg Ste Anne. 56 - KALESTROIT.

- Exploitant : M• RAFFLEGEAU. Le Couédic. 56-. JSSIRIAC.

- Autorisation de sauvetages n° 12 de M.le Directeur de Bretagne des Antiquités historiques, du 22 octobre 1976.

- Intervention en novembre 1976•

- Responsable : Patrick ANDRE. Correspondant des Antiquités historiques.

- Rapport transmis en Janvier '977. Les "terres de la croix", en issiriac, occupent le versant Sud d'une colline que^limite de l'Oust, sur le territoire voisin de alestroit. Récemment remembré, ce secteur est aujourd'hui divisé en parcelles géométriques qui n'ont rien conser- vé de l'ancien paysage agraire. Au Nord de la parcelle n° 27, à deux mètres de la clôture, une petite zone paraissait rebelle à toute culture ; la charrue y peinait, sans raison apparente, jusqu'au jour où 1 ■ .Rafflegeau, exploi- tant, la vit exhumer une grande dalle demi-circulaire -^le fond de la vasque dont nous parlerons plus loin)- qu'il transporta alors dans sa ferme. M.Orhan, professeur à Saint-Julien en ilalestroit eut l'occa- sion de la voir et , voulant en savoir plus, étudia de plus près le secteur d'où elle avait été arrachée. Ayant mis au jour des pans de murs, M* Orhan prévint les Antiquités historiques en Octobre 1976» Profitant de l'absence momentanée de culture, un sauvetage y fut réalisé. Compte tenu de la situation des vestiges en limite de parcelles (ïautre parcelle appartenant à un autre propriétaire), et aussi des difficiles conditions climatiques de cette période particulièrement pluvieuse, les recherches se sont limitées à la zone actuellement menacée, soit les 30 mètres carrés bouleversés par la charrue et que M.Orhan avait commencé à étudier avant de nous a peler. Douze demi-journées de travail collectif ont permis, avec l'aide d'élèves de et la compréhension bienveillante de I . RAFFLEGEAU, d'étudier en détail le site et aussi d'en prospecter les environs dtans l'hypothèse de recherches futures. L • EDIFICE : UN PETIT BALNEAIRE PRIVE

- v. Fig. 2, et photographie n° 3.

L'édifice exhumé,et fouillé en novembre 1976 , est un balnéaire de pèiiiej dimensions, dépendance d'une villa in- connue à ce jour. Les recherches ont permis de mettre en évidence : 1°- en A.Une large ouverture de 1,15 m limitée au Nord par un muret fait de cinq assises de briques et qui, à L'est, se prolon- ge au delà du secteur fouillé. Les parois de ce passage sont faites de briques disposées en encorbellement, qui, plus haut, devaient donc destiner un arc en plein cintre. En cet endroit, le sol présente une teinte noirâtre qu'il ne possède pas ailleurs. On peut donc, selon toute vraisemblance, imaginer ici l'emplace- ment partiel du foyer extérieur, peutêtre protggé par un auvent s'ap- puyant sur un muret, et la voûte d'entrée de l'air chaud dans l'hypo- causte B, 2°- en B, se trouvent les bains chauds avec hypocauste à pilettes. C'est une pièce carrée de 2,30 m de côté, munie au Sud d'une entrée de 0,65 m. Le quart Nord-Ouest de cette pièce est encore occupé par plusieurs pilettes de briques, de trois types différents : - au centre deux pilettes accolées, composée chacune de trois briques rectangulaires (0,20 sur 0,35 ni) séparées par un lit d'un cen- timètre d'argile blanche. Ces pilettes sont fixées au mur Ouest par un blocage de fragments de briques. - à l'angle Nord-Ouest, deux pilettes de cinq carreau» de terre cuite de 0,20 m decÔté. Entre ces deux ensembles et le mur se trou- vaient une très grande quantité de bobines de terre cuite, entières ou brisées, permettant de ménager un espace entre le mur et lft.cloisony par lequel s'échappaient les gaz chauds ( v. ci-dessous). - vers le centre enfin, une pilette composée de disques de terre- cuite. Cette partie de 1'hypocauste est donc relativement bien conservée. Il possède encore un fragment de l'aire de béton qui cons- tituait le sol t épais de six centimètres, il était fait d'une couche de mortier rouge entre deux couches plus claires. 4

Le reste de la pièce B est dépourvu d'éléments de suspen- sura. Toutefois, à l'extérieur de cette pièce, dans l'angle Sud du secteur fouillé, on remarque un amoncellement de briques rec- tangulaires paraissant disposées sans ordre. Peut-être s'agit-il là d'éléménvs^ de cet hypocauste qui y ont été jetés à une date indéterminée.

3°- en Gt se trouvait la vasque en béton de tuilot qui avait attiré l'attention de l'exploitant sur le site. Elle est de forme approximativement demi-circuààire et mesure 1,57 m de diamètre sur 1 m, (photographie n° . Epaisse de 0,15 m, et limitée par un bourrelet, elle occupe le fond d'une abside demi- circulaire faisant saillie sur la façade Sud des thermes. Le mur est fait de moSllons qui reposent éur des assises de tegulae. Un épais joint de mortier emplit l'espace entre la vasque et le mur circulaire. L'eau était évacuée par un orifice ménagé sur le côté de la vasque et était rejetée à l'extérieur de ce balnéaire par un tuyau fait de deux imbrices opposés.(Photographie n° 5)» Un étroit passage, de 1,TD m. ouvrait sur ce disposi- tif en abside. Le mur Ouest est flanqué, en contrebas et à l'in- térieur d'une bordure servant à supporter un sol dont ne subsiste plus aucun élément.

Si la façade Sud et Ouest de ce balnéaire semblent avoir été intégralement dégagées, il n'en est pas de même pour la partie Nord, trop proche de la limite de parcelle pour avoir été étudiée. On se bornera donc pour l'instant à attirer l'atten- tion sur deux points : - au Nord de la pièce B, un sol bétonné semble exister ; il y aurait donc là une autre pièce, ce qui n'est pas surprenàant pour un établissement de bains. On remarquera toutefois qu'il n'existe pas de passage dans le mur pour l'air chaud. S'il s'agit du tepidarium (B étant le caldarium), il était chauffé par une autre provenance. - à l'angle Nord-Est de la zone fouillée, le mur semble se prolonger par un début d'arc de cercle. On peut imaginer un bâti- ment à double abside, tel celui étudié il y a quelques années à DRAIN, dans le haine et Loire. c ooÇi a: 1ÏÏ3E3CÎÎZI

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J r "P. A - O «I i 'I'T U Figure 2 . Les thermes de Bermagouët en MISSIRIAC. Etat au I.XII 197< tuiles, briques et pilettes d'hypocauste. ' l ' I i I ' LE MATERIEL.

A- Outils en fer . - v. fig. n° 3.(A B C D ).

Très peu de matériel a été recueilli lors de recherches. Cette coonstatation, fréquente lors de la fouille de thermes est ici particulièrement vraie: Aucun tesson de céramique , aucune monnaie. Toutefois, dans le tuyau d'évacuation de la vasque, se trouvaient quatre outils en fer et un aiguisoir qui y avaient été ca« chés après que les thermes eurent cessé d'être utilisés. L'outil A n'est pas sans poser certains problèmes d'iden- tification. Long de 0,1? m il présente l'aspect d'un coin métallique muni à la base d'un anneau demi-circuààire et d'une goupille à l'«K- trémité recourbée. Mais aucune trace d'usure ni de martelage n'est visible sur la section carrée de ce coin. Nous proposons d'y voir un enclumeau dont certains modèles sont encore aujourd'hui utilisés pour battre les faux et les faucilles ; ce type aurait été destiné à être enfoncé dans un madrier, et non dans la terre O), selon le schéma suivant, suggéré par un paysan de la région de Missiriac qui a autrefois possédé un outil similaire :

Les outils B,C,D appartiennent à la famille des instruments destinés à travai 1er le bois. C est un ciseau à douille fermée, D une gouge à douille ouverte (2).

B- Bobines en terre cuite, -v. fig. n° 3» ( E F G ).

Le sol de l'hypocauste a fourni une très abondante série de rouleaux de terre cuite dont certains ressemblent très 9-

exactement à des bobines. Les exemples E et F (fig. 3)» hauts de dix et siK centimètres, sont les modèles les plus fréquents. L'axe de la plupart des exemplaires retrouvés possédait encore sa tige de fer. Ces rouleaux de terre cuite permettaient (3) de laisser libre, dans le mur des thermes, un espace entre ce dernier et la cloison par où s'effectuait le passage de l'air chaud, et jouait ainsi le rôle du boisseau. Très près de iiissiriac, des modèles de ce type ont été trouvés à La Boissière, en .

Le dessin H enfin représente un fragment d'une petite plaque de schiste sur laquelle est gravé un cercle comportant six rayons. Figure 3 • Les thermes de iermagoftet en ; ISSIRIAC» A - Dm Outils en fer. E - F. Eléments du système rie chauffage. H» Plaque de schiste décorée. 3

CONCLUSION.

Les thermes de i ISSIRIAC s'intègrent dans une série bien connue de petits balnéaires à abside. Ceux de Monteneuf (^), à quelques kilomètres d'ici, en sont la réplique. De même un édifice identique a été fouillé en (959 à DRAIN, dans le Maine et Loi! Il cmmportait une vasque de même type (5). Ce bâtiment témoigne bian évidemment de la présence d'un domaine , inconnu jusqu'alors. La maison d'habitation ne doit pas être très éloignée ; les exploitants agricoles nous ont signalé la présence, à proximité, de nombreuses tuiles que les labours ramènent périodi- quement à la surface des champs : - sur la même parcelle 27, à environ cinquante mètres au S.O. en -b sur la figure 1,2. -sur la parcelle voisine :5, à cinquante mètres au Nord, où en dépit des travaux de remembrement on distingue encore un bombement caractéristique, en -C sur le même plan.

Les recherches de 1976 éclairent par ail- leurs quelques découvertes anciennes effectuées dans ce secteur. En 193^, était notamment exhumé ( V. point 2 sur fiG, 1,1) à trois cents mètres au nord le trésor de Bermagouët comportant 12088 monnaies de Trébonien - Galle à Probus, aujourd'hui conservé au musée de Caraac (6 Plus récemment, également à proximité , au lieu-dit la Côte de la bataille, étaient trouvées desmonnaies éparses, notamment un antoninianus de QUIETUS , frappé à Antioche ( R.I.C. V,2, n°9,p.583).

Enfin, au cours des prospections dans le secteur, liées à ces recherches, était découverte, le long de la voie romaine, dite chaussée d'Ahès, une borne milliaire en place, dédiée à Tétricus le fils. Cette borne, en cours d'étude, (V.point 3 plan 1,1), confirme l'importance de cette voie venant du territoire des Andes et se diri- geant vers le noeud routier de et Carhaix. Il est remarqua- ble précisément que cette borne se trouvas, au point sensible que constitue le franchissement de l'Oust, ici limite de cités entre les

Vénètes et IgR 34=gili*nnn. curin

Patrick ANDRE Janvier 1977 Notes bibliographiques.

(1) - Touring club de ; Groupe d'archéologie antique. La quincailWn'e antique, notice technique n° 15, plache XVI, n° 56,57,58.

(2) - Id; notice 14, planche VI, n° 25, 47. kSt (3) - Id, notice 16, planche XL, n° 18-19. -R.SAN^UER• Chronique d'archéologie antique et médiévale (1973) du bulletin de la Société d'archéologie du Finistère, 197^,p. 31-32. - des rouleaux de ce type, jadis signalés par P.du Châtelier au Bois de la roche en Commana, Finistère, «ont aujourd'hui conservés au musée de Rennes (P.du Châtelier, 1907» p.105, et Bulletin Société archéol.du Finistère, 1899, p. V75). - le dessin G de la planche 2 est emprunté à A. TERNINCK, 1'Artois souterrain, Arras, 1975f t. II, p. 130.

(4) Rapport de sondages archéologiques effectués en 1968 à La Boissière, en Honteneuf, Morbihan, par I..Marcel ORHAN

(5) . L.Pape. Annales de Bretagne, i960, p. 67.75-.

(6) Procès verbaux du Bulletin de la /société polymathique du Morbihan, 1934, p. 18. ' Catalogue du Musée de , p. 191, n° 234-2. On a proposé pour Rermagouët l'étymologie suivante : Bré : colline, et Magouër les murailles. Phbbos R.COUTANT. Cannes.