La Comédie Humaine, Éd
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collection fondée et dirigée par Michel MINARD 260 MAURICE DESCOTES l'image de Louis XVIII dans PARIS — LETTRES MODERNES — 1994 ÉDITION UTILISÉE I, II... Honoré DE BALZAC, La Comédie humaine, éd. Pierre-Georges CAS- TEX (Paris, Gallimard, « Bibl. de la Pléiade », 1976-1981), 12 vol.. À l'intérieur d'un même paragraphe, les séries continues de références à une même source sont allégées du sigle commun initial et réduites à la seule numé- rotation; par ailleurs les références consécutives identiques ne sont pas répétées à l'intérieur de ce paragraphe. Toute citation formellement textuelle (avec sa référence) se présente soit hors texte, en caractère romain compact, soit dans le corps du texte en italique entre guillemets, les soulignés du texte d'origine étant rendus par l'alternance romain / italique ; mais seuls les mots en PETITES CAPITALES y sont soulignés par l'auteur de l'étude. Le signe * devant une séquence atteste l'écart typographique (italiques isolées du contexte non cité, PETITES CAPITALES propres au texte cité, interférences possibles avec des sigles de l'étude) ou donne une redistribution *| entre deux barres verticales| d'une forme de texte non avérée, soit à l'état typographique (calligrammes, rébus, montage, découpage, dialogues de films, émissions radiophoniques...), soit à l'état manuscrit (forme en attente, alterna- tive, options non résolues...). toute reproduction ou reprographie même partielle et tous autres droits réservés PRODUIT EN FRANCE ISBN 2-256-90453-9 SIGLES ET ABRÉVIATIONS B Béatrix [in II] Bo La Bourse [in I] BS Le Bal de Sceaux [in I] CA Le Cabinet des antiques [in IV] CB La Cousine Bette [in VII] Ch. Les Chouans [in VIII] CM Sur Catherine de Médicis [in XI] CV Le Curé de village [in IX] Co/. Le Colonel Chabert [in III] CSS Les Comédiens sans le savoir [in VII] DA Le Député d'Arcis [in VIII] DL La Duchesse de Langeais [in V] DV Un Début dans la vie [in I] E Les Employés [in VII] EHC L'Envers de l'histoire contemporaine [in VIII] F Ferragus [in V] FA La Femme abandonnée [in II] F30 La Femme de trente ans [in II] G Gobseck [in II] GD Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau [in VI] I L'Interdiction [in III] IP Illusions perdues [in V] LV Le Lys dans la vallée [in IX] MC Maître Cornélius [in XI] MD Massimilla Doni [in X] Mém. Mémoires de deux jeunes mariés [in I] MM Modeste Mignon [in I] Muse La Muse du département [in IV] MV Mademoiselle du Vissart [in XII] P Les Paysans [in IX] PB Les Petits bourgeois [in VIII] PC La Peau de chagrin [in X] PG Le Père Goriot [in III] R La Rabouilleuse [in IV] SMC Splendeurs et misères des courtisanes [in VI] SPC Les Secrets de la princesse de Cadignan [in VI] UM Ursule Mirouët [in III] TA Une Ténébreuse affaire [in VIII] V Valentine et Valentin [in XII] Dans une étude antérieure (1967), on s'est appliqué à préciser les images que les grands écrivains du XIX siècle ont données de Napoléon à travers le prisme de sa légende. Le présent travail constitue, sinon un complément, du moins un appendice à cet ouvrage. En effet, il analyse comment, dans La Comédie humaine, Balzac a présenté celui qui fut le successeur direct de l'Empe- reur, Louis XVIII, dont la mission semblait bien devoir être, à première vue, de jeter à bas l'édifice national et européen dont il héritait. I PORTRAIT D'UN ROI A technique romanesque adoptée par Balzac l'a amené à L se garder soigneusement de prendre des grands personnages de l'Histoire pour protagonistes de ses récits : il s'en est expliqué à propos de Cinq-Mars. Ainsi s'écarte-t-il de la manière d'un Hugo présentant de plain-pied Louis XI dans Notre-Dame de Paris ou de celle de Vigny plaçant au premier plan Richelieu et Louis XIII dans Cinq-Mars. Pour ne prendre qu'un seul exemple, le plus significatif, ce n'est que de façon très fugitive qu'il évoque Napoléon : dans Les Mémoires de Samson, La Vendetta, Une Ténébreuse affaire, La Femme de trente ans. En fait, ce ne sont là que des apparitions marginales et, en fin de compte, très brèves. Pourtant, d'une façon ou d'une autre, Napoléon est partout dans La Comédie humaine : par de multiples allusions aux événements du règne; par des références aux faits et gestes de l'Empereur; parce que, encore, le grand homme revit dans la mémoire des Français, même les plus modestes ; enfin parce que, même disparu, il demeure au centre d'une France qu'il a remodelée de ses mains. La personnalité de Louis XVIII n'atteint certes pas à l'enver- gure épique de celle de Napoléon : il n'existe pas de « légende » de Louis XVIII qui déboucherait sur un « mythe ». Mais le personnage est traité de la même manière indirecte et selon la même perspective, à ceci près que la mission historique dévolue au Roi est précisément, à l'origine, de détruire cette nouvelle France conçue par son prédécesseur. Quand, après dix années de règne, Louis XVIII disparaît, le 16 septembre 1824, Balzac a vingt-cinq ans. Il n'a jamais eu l'occasion d'approcher de près le personnage. Il ne peut donc le concevoir que par l'imagination, à travers les gravures, les propos et les témoignages des uns et des autres, à travers les gazettes et les journaux : au second degré. D'autre part, en 1824, dans la société et dans le monde des lettres, Balzac n'occupe qu'une très modeste place. Il n'a signé de son nom ni ses premiers romans ni ses monographies, Codes et Physiologies : c'est en 1829 seulement, avec Le Der- nier des Chouans, qu'il se hasarde à renoncer à l'utilisation des pseudonymes. On ne saurait imaginer ce que ce Balzac de vingt-cinq ans a pu éprouver à l'annonce de la mort d'un Roi qui était si loin de lui. Sur ce point la correspondance ne livre aucune confi- dence puisque, pour cette année 1824, elle se réduit à deux lettres qui lui ont été adressées, de Bourges, par Jean Tho- massy dont il a fait la connaissance vers 1821. On souhaiterait pourtant être en mesure d'avancer quelques conjectures sur l'image que Balzac se faisait de Louis XVIII à partir de ses écrits du moment. Or ce sont précisément ces écrits de 1824 qui font problème. En 1822, amoindri par la maladie, harcelé par le comte d'Artois, son frère, Louis XVIII s'est résigné à former un nouveau ministère au sein duquel la personnalité la plus mar- quante est celle de Villèle, le leader de la droite ultra. La nouvelle équipe gouvernementale s'engage dans une politique de sévère répression de toute tendance libérale. Politique qui allait à contre-courant de celle, tolérante, menée jusque-là par Decazes et approuvée par le Roi qui, prévoyant les risques que ce changement d'orientation ferait courir au pays, n'avait cédé qu'à son corps défendant : « Mon Dieu, que vais-je devenir? Que veulent-ils faire? Que va-t-on m'imposer? » (duc de Richelieu). Or, si l'on se réfère aux premiers romans de Balzac, à partir de L'Héritière de Birague (1822), il est évident qu'il n'éprouvait qu'aversion à l'égard de la politique réactionnaire et cléricale de Villèle. Son bonapartisme diffus aidant, il se trouvait proche des libéraux. Pourtant, au début de 1824, il publie deux curieuses bro- chures (anonymes) : Du droit d'aînesse (février), Histoire impar- tiale des Jésuites (avril). C'était là aborder deux problèmes d'une brûlante actualité qui divisaient la classe politique : les ultras étaient des partisans résolus du rétablissement de ce droit d'aînesse supprimé par la Révolution et, d'autre part, ils souhaitaient ardemment le retour en France de l'ordre des Jésuites, injustement calomnié selon eux. Or, sur l'un et l'autre point, Balzac adopte brusquement le point de vue de la réaction la plus dure. Il en appelle même au Roi pour qu'il rétablisse le droit d'aînesse qui « a le singu- lier avantage sur toutes les autres [institutions] d'être le sou- tien de la monarchie, la gloire du trône et le gage assuré du bonheur des individus et des familles » Sur les Jésuites, même recours au Prince : la « noble famille » des Bourbons « doit recevoir tout le cortège de cette antique dynastie » et, à l'instar de Louis XIV, élever « avec la Confrérie de Jésus la plus puissante barrière qu'un gouvernement monarchique puisse opposer aux révolutions ». Palinodie? conversion sincère ? Dans son étude sur La Pensée politique et sociale de Balzac, B. Guyon s'est longuement penché sur la question Et, s'ap- puyant en particulier sur un passage des Illusions perdues, il arrive à la conclusion qu'il n'y a eu là que fausse « conver- sion » (p. 201 pirouette exécutée « par jeu et par intérêt » : « [...] c'était peut-être simplement par besoin d'argent. » (p. 198 L'hypothèse est acceptable. Si la conversion est « sincère », on peut penser que la disparition du Roi n'a guère dû chagri- ner Balzac, satisfait de voir accéder au trône un comte d'Artois dont le programme politique correspondait à ses nouvelles convictions. Si cette prétendue conversion n'est que le fruit d'un calcul, il a pu éprouver quelque regret de la mort d'un souverain dont les idées correspondaient assez bien à son intime manière de voir du moment. Quoi qu'il en soit, on ne dispose d'aucun indice qui permettrait de penser que la mort du Roi l'a fortement touché.