ET LES MUROIS " A mon grand-père, Louis GONDRAND, qui m'a appris à connaître et à aimer mon pays. Il m'a transmis sa gaieté et sa joie de vivre ". JEAN GARNIER

LA MURE ET LES MUROIS

Chez l'auteur Rue des Hers - 38350 LA MURE 1988 Première locomotive sur les viaducs de Loulla en 1888 (Collection Jean Garnier). Ce petit train a aujourd'hui 100 ans !

!(" Jean Garnier, 1988 AVANT-PROPOS

Plusieurs livres ont déjà été écrits sur La Mure et le plateau matheysin. Aussi, nous n'avons pas voulu en ajouter un de plus réalisé de la même manière. Ce n'est pas un ouvrage historique que nous vous présentons, mais simplement un recueil de documentations, évitant la répétition fastidieuse des faits ou des événements nationaux. Ce livre n'a d'autre prétention que d'être l'album souvenirs reconstitué par nos soins, l'album de famille de notre siècle, c'est-à-dire d'un passé encore proche où chacun peut retrouver une partie de sa mémoire, d'être le reflet de la vie d'autrefois Nous. avons voulu évoquer les conditions de vie de ceux qui nous ont précédés afin que leurs gestes, leurs coutumes, leurs méthodes, leurs faits divers ne disparaissent à jamais dans l'oubli. On n'a pu mentionner et rassembler tous les événements qui auraient une place dans ce livre tellement la diversité et le nombre sont grands. On a voulu sélectionner quelques anecdotes savoureuses ou quelques faits piquants pour donner un peu de gaieté et de liberté à cet ouvrage. D'autre part, nous avons voulu que le lecteur se promène dans le vieux La Mure et comprenne ce que tel édifice, telle vieille maison, tel coin de rue peut nous raconter. Ce livre sans prétention est une somme d'amour et de patience et en gardant une profonde affection pour notre pays natal, nous avons voulu conserver le souvenir de ce qui fut autrefois. REMERCIEMENTS Nous voudrions exprimer notre reconnaissance envers nos amis, parents, possesseurs de documents, qui ont témoigné de beaucoup de patience et d'intérêt pour la collecte des renseignements, des anecdotes, des événements et faits particuliers, des archives de leur région, ainsi qu'à tous ceux qui ont fait part de leurs observations et conseils. Il nous a fallu beaucoup de documents pour réaliser une sélection, pour conserver et faire connaître ce qui peut être encore retrouvé de notre belle petite ville. Nous remercions particulièrement M. Paul Oddou, M. Léon Gondrand, M. et Mme Denis Laurent, M. Aimé Gras pour leur connaissance approfondie du patois et pour l'aide précieuse qu'ils nous ont apportée. Encore à tous, notre reconnaissance. Pour certains renseignements historiques, nous avons consulté les livres de l'abbé Dussert, du professeur Caillet, de Berthier et de de Marliave. CARTE DES ALPES LE DAUPHINE

Le Dauphiné, province française aux multiples visages, forme une partie importante et caractéristique des Alpes Françaises. Ses limites historiques étaient au nord la Savoie, à l'ouest le Rhône, au sud la Provence et le comté de Nice, à l'est l'Italie. Le Dauphiné a formé les départements de l'Isère, des Hautes-Alpes et de la Drôme. Ce pays est très accessible, malgré son relief, grâce au "Sillon Alpin", aux vallées aérées comme celle de l'Isère, ou très encaissées comme celle de la Romanche ou aux plateaux élevés comme le plateau Matheysin. D'excellentes routes, au tracé parfois hardi, en facilitent l'accès. Pays de la "Houille Blanche", c'est aussi le fief d'un bassin d'anthracite : "Les Houillères du Dauphiné". Le Dauphiné est le domaine de la montagne qui constitue son principal attrait, aussi bien pour le promeneur que pour le skieur et le grimpeur. La montagne est en effet la grande Nature par excellence ; on s'y sent plus éloigné que partout ailleurs des complications souvent malsaines de la civilisation, on y respire un air salubre inconnu de la plaine et des agglomérations citadines, on y jouit de spectacles particulièrement grandioses et émouvants, on y fait sans fatigue des efforts dont on ne serait pas capable en plaine. En un mot, la montagne avec ses charmes enivrants et les souvenirs ensoleillés et précieux qu'elle laisse réunit toutes les conditions pour une vie agréable.

LE PLATEAU MATHEYSIN : UN BASTION EN PLEIN CŒUR DU DAUPHINÉ Le plateau Matheysin et La Mure occupent une situation particulière dans les Alpes oc- cidentales françaises. La se trouve au contact des Alpes du nord et des Alpes du sud, dans le prolongement du sillon alpin séparant' Préalpes calcaires et hautes Alpes cristallines entre, d'une part, l'Oisans et, d'autre part, le Trièves et le Ver cors. Pour accéder à ce plateau traversé par le 45e parallèle (passant à Laffrey), seuil du pays du soleil, on a le choix de deux routes : la R.N. 529 surplombant les rives du Drac et la R.N. 85 (la route Napoléon) qui est le prestigieux et pittoresque "raccourci" entre Paris et la Côte d'Azur. L'altitude se situe entre 850 et 950 m, c'est une altitude idéale pour cette zone de moyenne montagne. Cette région a des frontières naturelles assez nettes : de profondes vallées, telles que la Romanche au nord, le Drac à l'ouest, la Bonne au sud, la Roizonne au sud-est, et des massifs du Grand Serre et du Tabor à l'est. Dans l'ensemble du Massif Alpin, la Matheysine est déjà une région au versant méridional puisque, à son sud, les sommets atteignent à peine 2.800 m (l'Obiou 2790 m). Le climat est à tendance méditerranéenne, assez sec puisque le plateau proprement dit ne reçoit qu'entre 700 et 900 mm d'eau par an. Le vent du nord, "la bise", est le vent dominant qui maintient un air pur, léger et sec, donc très sain. Par beau temps, de nombreuses et agréables promenades permettent d'apprécier la variété des sites, ainsi que la grandeur des paysages que l'on découvre à partir des sommets en particulier. En dehors des circuits routiers, des chemins carrossables, dont le nombre s'accroît chaque année, facilitent généralement l'accès aux points hauts in- téressants. Ceux-ci peuvent d'ailleurs être presque tous atteints pédestrement, relative- ment sans trop de peine, en prenant le temps nécessaire. En été, l'insolation est généralement bonne, la température étant souvent modérée par le souffle de la bise. En hiver, les chutes de neige sont parfois fréquentes, les zones skiables sont surtout destinées à des utilisateurs moyens, ski familial, qui forment la grande masse des skieurs. L'excellente distribution des précipitations neigeuses garantit un enneigement soutenu pendant les mois d'hiver, et la durée satisfaisante du manteau nival de décem- bre à mi-avril, période de pratique des sports d'hiver en général. LIMITES ET TOPOGRAPHIE Le canton est formé : 1°) D'un vaste plateau très fertile d'une largeur variant entre 2.500 m et 4.000 m dans la direction nord-sud, la partie la plus large étant au sud. Partant du village de Laffrey jusqu'à celui de Ponsonnas, sa longueur est de 14 km. 2°) Par le vallon très agréable de Notre-Dame-de-Vaulx avec de belles prairies, paral- lèle et séparé du plateau Matheysin par la montagne des Creys (1.260 m). Il s'étend depuis Laffrey jusqu'à La Motte d'Aveillans. 3°) Par le bassin accidenté de La Motte d'Aveillans, son inclinaison va de l'est à l'ouest face au Vercors. La route de Champ-sur-Drac (R.N. 529), qui dessert ce bassin, est l'une des plus belles de la région. Les nombreux touristes peuvent admirer la grande variété de paysages que l'on revoit toujours avec le même plaisir et la même satisfaction. 4°) Par la vallée du Drac qui part de Ponsonnas en faisant le tour du Senéppi (1.770 m) jusqu'à La Motte-les-Bains. Cette vallée, avec une bonne exposition au midi, est très chaude, on y trouve encore quelques vignobles. Les vins étaient très recherchés et ap- préciés par nos anciens. La Matheysine correspond au canton de La Mure qui est l'un des plus étendus de l'arrondissement de . Il a 19 communes auxquelles il faut lui adjoindre les 2 communes de Laffrey et de St-Jean-de-Vaulx qui appartiennent au canton de Vizille. La Matheysine est une région bien individualisée. Voici les communes avec leur superficie et leur population. LA MURE

La Mure est un agréable chef-lieu de canton situé à 875 m d'altitude, au cœur de la par- tie montagneuse de l'Isère. Gaiement tournée au soleil levant, elle est dominée par une petite montagne appelée Cimon (1.218 m) coiffé d'un béret noir de sapins. Peu de villes ont un panorama aussi grandiose. La vue est très étendue. C'est le soir après le coucher de soleil que les montagnes paraissent les plus belles. Le spectacle est remarquable, avec des teintes exceptionnelles d'or et de pourpre. Comme toile de fond, l'Obiou (2.793 m), le joyau de la Matheysine, est isolé des mon- tagnes voisines, il semble dominer et surveiller les autres sommets, il contemple la situation privilégiée de La Mure dans un cadre des plus pittoresques, d'une merveilleuse beauté, féerique. La Mure est le carrefour de nombreuses routes, de riches vallées qui l'entourent. Son très important réseau routier, en parfait état, la place dans les premiers rangs des centres touristiques du Dauphiné.

Année 1961 : De gaucha à droite : Alain NAUD, Danielle IVOL, Henri BERNARD, Josette VUILLERMET, Claude LACOMBE, Jeanine BAT KO, Pierre BEILLON, Annie CLAVEL. LES MUROIS "La nature exerce sur l'homme une action toute puissante", elle le façonne sous le triple rapport physique, intellectuel et moral. Le Matheysin aime son pays, il aime ses montagnes nues et ses "coteaux frileux" auxquels, malgré tout, il se sent attaché par le magnétisme d'une puissante attraction ; il aime ses torrents et ses lacs, il aime enfin cette nature âpre et pittoresque avec laquelle il sympathise de toute la force de son caractère intrépide, de son intelligence vive et pleine de feu (Dussert). "Le montagnard, dit Xavier de Maistre, s'attache à l'objet qu'il a sous les yeux depuis son enfance et qui a des formes visibles et indestructibles. Dans les montagnes, la patrie a une physionomie ; dans la plaine elle n'en a pas ; c'est une femme sans visage qu'on ne saurait aimer malgré ses bonnes qualités". L'amour du sol natal semble très ancré dans le cœur des Murois, ils n'admettent pas qu'on déprécie ou qu'on méprise la capitale de la Matheysine. Ils ne sentent plus, à force de la parcourir, la dureté caillouteuse de son pavé et la rudesse des vents qui la balayent. La vie est dure dans la montagne, il faut la disputer, par un travail opiniâtre, à un sol trop souvent stérile. "Le bien péniblement acquis est défendu avec âpreté". Le Matheysin se montre d'ordinaire ingénieux, inventif, calculateur, plutôt froid, indifférent et fort peu pitoyable aux disgrâces d'autrui. Chez lui, une certaine bonhomie n'exclut ni la finesse, ni la ruse, ni surtout une malice un peu sceptique, "Matheysin et matois", intelligent et frondeur, il devient facilement arti- ficieux et circonspect. Berthier dit : "Les Matheysins d'origine sont d'un tempérament sans exubérance. Ce sont des esprits positifs, réfléchis, mais opiniâtres. C'est ce qui explique leur amour de la dis- cussion. Le Matheysin est plutôt indépendant, il garde avec ironie ce qu'il sait, il ne dit pas "je pense" mais "je calcule". Il fait partie d'une race intelligente, fière et indépen- dante. Ils ont aussi le culte du coin de terre où ils se sont pour ainsi dire "agrippés" depuis des siècles, en se resserrant, semble-t-il, le plus possible. Cette étude ne vient pas de mon jugement personnel, mais de celui d'anciens écrivains qui avaient bien étudié le caractère du Matheysin. HISTORIQUE DES BATIMENTS PUBLICS

LE CHATEAU DE BEAUMONT Les Comboursier étaient des "guerriers et chasseurs" poursuivant l'ours et le chamois dans les vertes prairies de Comboursière et de la Chaud. C'étaient de simples manants venus s'établir à St Honoré. Ils devinrent notaires, qui pullulaient à cette époque en Dauphiné (fonction peu lucrative et sans prestige), mais qui était un moyen de parvenir à la noblesse. Ils s'enrichirent rapidement pour acheter des seigneuries. Ils avaient à La Mure deux maisons fortes : le château de Beaumont, le château de Monestier (place des Capucins) et une troisième résidence sur l'emplacement de l'hôpital actuel. C'est dans la seconde moitié du XVe siècle qu'Humbert de Comboursier édifia "la maison des Tours" qu'on ap- pelera "le château de Beaumont". Pendant les guerres de religion, lors du siège de La Mure en 1580 par le duc de Mayenne, où tous les bâti- ments furent démolis, Balthazard de Comboursier qui commandait l'armée assiégeante sauva le château de ses ancêtres de la destruction. La famille de Comboursier périclita jusqu'au début du XIXe siècle et essaya, tout d'abord, de le vendre à la ville qui ne le voulut pas à cause de sa vétusté. Il fut acquis par M. de Ravel, ancien garde du roi, qui le céda aux Dames de la Nativité en 1832. Après de grosses réparations, elles s'y installèrent trois ans après, en 1835. Le château n'avait qu'un seul étage, seule la tour sud-est restait de- bout sur les quatre tours initiales (c'est donc la seule authentique au- jourd'hui). Elles établissent un pen- sionnat pour l'éducation de jeunes filles. Elles font construire une chapelle et une aumônerie en 1851, font relever la tour sud-ouest et relever l'aile de la maison qui longe la rue du Le château de Beaumont (photo Jean Garnier) jeu des quilles. Après la séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1906, le château de Beaumont devient une école supérieure de jeunes filles, achetée par la ville qui organisa un pensionnat spécial pour 100 internes. Pendant la dernière guerre, comme le collège avait été décrété "hôpital militaire", plusieurs classes furent transplantées au château ; il devint l'annexe du collège. A partir de Juillet 1959, les deux établissements n'en firent qu'un seul : classique et moderne mixte. Il devint en 1960 lycée nationalisé. Il est intéressant de rappeler que La Mure a possédé trois châteaux : Beaumont, Delphinal et Combourcier. Le château de Beaumont a été con- struit juste devant le château Delphi- nal. Humbert de Comboursier l'a ap- pelé "sa maison des tours" qui était pour ainsi dire la continuation du château Delphinal qui existait encore en 1535. Ce château a été construit au XIle siècle; c'était une simple rési- dence seigneuriale. Son emplace- ment se trouvait dans les jardins Lapérière, entre la rue du Château et la rue du Jeu des Quilles, à la hauteur de la bibliothèque municipale ac- tuelle. Il y avait également, au centre de la place des Capucins, "le grand château du Seigneur" de Monestier Le château delphinal de la Mure (d'Ambel). Ce château fut assiégé en (essai de restitution par Jean Garnier) 1587 par Lesdiguières ; après un siège de 14 jours, il passa tous les défenseurs au fil de l'épée. LA HALLE L'initiative de la construction de la halle revient à Jean 11, en 1309, pour permettre aux gens des campagnes de venir ven- dre leurs produits à La Mure et d'en faire un grand marché. Elle fut détruite une première fois par un incendie. Le 4 février 1413, Jacques de Beaujeu (maître des œuvres Delphinales) ordon- na la réédification avec un mur plein d'un côté, de l'autre des piliers en "pierre bâ- tarde". De nouveau, elle brûla en 1420. Chaque fois, elle fut reconstruite. Des piliers en remplacèrent d'autres ; on renouvela les toits en chaume. Elle eut beaucoup à souffrir pendant les guerres de religion. Ce n'est qu'en 1843 qu'elle fut défini- tivement reconstruite. Les piliers de bois furent remplacés par 30 colonnes mono- lithes provenant des carrières de Laffrey. Le vieux toit recouvert d'une épaisse couche de mousse fut remplacé par un La Halle (lavis de Jean Garnier) toit à 4 pentes. Les Murois peuvent s'énorgueillir d'avoir des halles qui sont l'un des fleurons de notre glorieux passé et qui attirent et provoquent un intérêt admiratif chez le vacancier curieux du passé historique de La Mure et amateur des monuments anciens. A la grande joie de la population, la halle a été nettoyée et ravivée en 1985 (toiture in- térieure repeinte et piliers nettoyés au sable). LA TOUR DE L'HORLOGE Cette tour très modeste n'a pas été construire pour un guetteur chargé de donner l'alarme, car sa construction est relativement récente, en 1720. Elle est toute simple du fait de la misère qui régnait à cette époque. Initialement, ce fut une tour ronde de 2 m 50 de diamètre qui fut construite en 1713 par un dénommé Toscan, légèrement en arrière de la tour actuelle. Cinq ans plus tard, la ville acheta cette "Tour Toscan", la démolit et la reconstruisit en empiétant sur le trottoir. Elle fut terminée en 1720. Une cloche fut mise en 1733, mais la première horloge n'y sera placée qu'en 1764. Ce fut la seule horloge de La Mure jusqu'en 1890. Elle était constamment en réparation et elle décomptait régulièrement ; une maison de Grenoble la changea en conservant la cloche et le marteau de l'ancienne. Une petite fontaine, placée en 1778, se trouve sur le devant de la construction. Une eau très fraîche coule en perma- nence. La Tour de l'Horloge (fusain de Jean Garnier) Cette "Tour de l'Horloge" est maintenant souvent appelée "Beffroi". LA VIEILLE EGLISE La première église qui datait du Moyen-âge était celle du Prieuré ; elle servait d'église paroissiale. En 1579, Lesdiguières la fit démolir en partie pour la construction de la citadelle du Calvaire. Les pauvres paroissiens catholiques demandèrent au duc de Mayenne (qui avait l'intention de faire reconstruire l'église de La Mure) de se servir des pierres qui leur appartenaient de cette citadelle pour commencer à "rebâtir leur église ruinée jusqu'aux fondements". Mayenne donna son accord. La construction date de 1606. Le portail de cette église est très ancien ; il provenait de la citadelle démolie en 1581. Les belles colonnes qui ornent son portail sont celle de l'église primitive ; elles se trouvaient à l'entrée de la citadelle. Le clocher est en tuf (cargneules de St Arey), de même que les sarcophages qu'on a trouvés ; les pierres taillées sont en calcaire du Peychagnard. Pendant la révolution, cette église prit le nom de "Temple de la Raison", puis celui de "L'Etre Suprême". En 1794, la croix de son clocher fut remplacée par le bonnet phrygien. En 1830, on l'agrandit de trois nouvelles arcades. C'est là que se trouve l'autel de la Sainte Vierge. Etant en fort mauvais état, et à la suite de l'édification de la nouvelle église, elle fail- lit être démolie complètement. La const- ruction du deuxième tronçon de la ligne de chemin de fer La Mure-Corps en 1901 contraignit à démolir sa façade et à la diminuer. Un accord entre l'Evêché et la ville, en 1902, permit de la garder et de la restaurer. Actuellement, cette église est vénérée par les catholiques en souvenir du Révérend père Eymard, né et mort à La Mure (1811- 1868). Il fut le fondateur de PInstitutiôn des Prêtres du Saint-Sacrement et de la Congrégation des Servantes du Saint- Sacrement. Il fut canonisé par Jean XXIII à St Pierre de Rome le 9 décembre 1962. On visite sa maison au n° 67 de la rue du Breuil. La Vieille Egise (lavis de Jean Garnier) LA NOUVELLE EGLISE

C'est le 30 mai 1887 que M. Morel, curé-archiprêtre de La Mure, prit l'engagement de faire construire cet édifice sans concours financier de la commune de La Mure, à ses risques et périls, avec ses ressources personnelles ou avec des dons et des souscrip- tions volontaires. Il en ferait don, une fois complètement achevée, à la ville de La Mure. La construction provoqua l'émerveillement des Murois devant la hardiesse des échafaudages qui s'élevaient toujours de plus en plus. L'église fut réalisée en 10 ans.

Vers 1890. Commencement des travaux de la Nouvelle Eglise (Photo Laurent). Pour la description, laissons parler l'abbé Dussert : " La nouvelle église de La Mure est de style roman pur. Le clocher, placé en façade, est couronné par une pyramide aiguë qui s'élève à 60 mètres au-dessus du sol. La flèche, les colonnettes du porche et de la galerie, la rosace, l'entablement, la frise, l'archivolte, les contreforts extérieurs, les corniches, et, à l'intérieur, les fausses galeries, les nervures des arceaux et des voûtes sont en ci- ment comprimé du . L'église a trois nefs avec un large transept formant croix latine ; la grande nef a cinq travées supportées par des colonnes monolithes. Les arètes d'angles, les nervures et les contreforts sont recouverts d'une peinture au silicate qui leur donne le ton pierre. "Les vitraux des nefs latérales représentent, par des scènes bibliques, les dix commandements de Dieu. Enfin les voûtes, d'un vert azuré, produisent par le va- poreux des couleurs un magnifique effet de perspectives ; elles semblent s'élever au-dessus de leur hauteur réelle. "Au chœur, de grands vitraux à proportions gothiques éclairent le sanctuaire ; les arcatures du triforium, qui courent le long de la grande nef, occupent très heureusement la partie comprise entre l'extrados des grandes arcades et le clérestory (fenêtres supérieures). Le mobilier de l'église est en rapport avec l'édifice : le maître-autel, qui a coûté 14.000 francs, a une forme très gracieuse ; il est surmonté par la statue du Sacré-Cœur de Millefaut, en beau marbre blanc ; la table de communion, posée en accolade, ferme le sanctuaire et les transepts ; elle a coûté 4.000 francs et les fonts baptismaux le même prix. On a dépensé jusqu'ici pour cette église la somme considérable de 200.000 francs. " Le 28 novembre 1896, le curé Morel fit venir le Préfet à La Mure pour faire donation de la construction de la nouvelle église à la ville. Mais à cette époque des désaccords sur- girent entre le maire et le curé qui passionnèrent l'opinion publique et firent grand bruit dans les journaux. M. Chion-Ducollet, maire de l'époque, fit une visite à l'église et la trouvant inachevée n'accepta pas cette donation "qui allait causer des frais supplémen- taires à la ville, qui risquait d'endetter ses contribuables et qui était contraire à l'engagement de 1887". Après 4 ans de divergences d'opinion, de désaccords, puis d'arrangements, de concili- ations, tout revint dans l'ordre. L'édifice fut remis à la ville le 23 décembre 1900.

L'HOTEL DE VILLE En arrivant de Grenoble, le voyageur est impressionné par la majestueuse façade de l'hôtel de ville de style Renaissance, avec son perron, son balcon et son horloge, qui forme une superbe toile de fond. Il a été construit sur l'emplacement d'un vieil hôpital de la "place Froide", dont l'une des salles servait de mairie. Comme anecdote, on peut citer celle de Berthier, où en 1767, le jour du tirage au sort, "les sauts que firent les garçons qui avaient tiré le billet blanc provoquèrent l'écroulement du plancher, et que s'il n'y avait pas eu de prompts secours, plus de 100 personnes tombées les unes sur les autres y auraient été étouffées. La maîtresse d'école fut au nombre des sauveteurs et elle reçut une livre pour avoir réconforté les blessés avec son eau de vie". Ce remarquable ensemble a été réalisé en un an, de 1891 à 1892, sous la municipalité Chion-Ducollet. Tous les beaux blocs de "pierre taillée" proviennent des carrières de Versenat. L'architecte a été Jules Besson, un Mûrois d'origine, qui réalisa aussi l'hôpital- hospice en 1907. L'Hôtel de Ville (photo Jean Garnier) LE COLLEGE Afin de remplacer une institution secondaire libre "tombée dans un état lamentable de délabrement", à l'angle sud-ouest de la place des Capucins, le Conseil Municipal pro- posa, en 1882, la construction d'un bâtiment neuf. En 1883, les plans et devis ont été dressés et approuvés.

Le lycée de La Mure (dessin de Jean Garnier) Le maire, M. Chion-Ducollet, s'activa pour faire avancer très vite les démarches, prit des initiatives indispensables afin que les choses aillent très vite. L'inauguration officielle du nouveau bâtiment et de ses dépendances eut lieu le 24 juillet 1888 en présence de M. Deluns-Montaud, ministre des Travaux Publics, du préfet Gérard, du député de la circonscription, M. Guillot, et du Recteur. Il y eut, le même jour, l'inauguration du chemin de fer de La Mure. Avec une population en liesse et une ville extraordinairement décorée, il y eut des fêtes très importantes. La ville était dotée d'un remarquable ensemble avec collège, une E.P.S. de garçons et une de filles (la première disparaîtra en 1944 absorbée par le col- lège et la seconde deviendra, à la même époque, le collège moderne). En 1960, le col- lège est nationalisé et, à la faveur de la réforme en 1961, devient un lycée. En 1955-66, création d'un gymnase. En 1972, création d'une section ski à recrutement national. Grâce à l'Education Nationale, rénovation de la section commerciale avec l'informatique. Création d'un baccalauréat professionnel Mécanique. Il y a actuellement environ 500 élèves. L'HOPITAL-HOSPICE On trouve, en 1665, le premier hôpital situé place Froide à l'emplacement de l'Hôtel de Ville actuel. En 1875, Henri Giroud, directeur des mines de La Mure, fit don de sa mai- son de maître, située rue Neuve, pour y installer un hôpital-hospice. Le local devenant très vite insuffisant, la municipalité envisagea la construction d'un nouvel hôpital- hospice dans la propriété de Mme Vve Reynier, qu'elle cédait rue des Alpes. Il fut terminé en 1907. Les services de médecine et d'hospice furent assurés par des religieuses à partir de 1911. Pendant 40 ans, elles assurèrent les soins aux malades et vieillards ; elles se retirèrent d'une manière définitive le 31 décembre 1952. En 1922, M. de Reneville, Président-Directeur-Général des mines, donna un terrain attenant à l'hôpital pour faire réaliser une maternité. Commencée en 1927, elle fut terminée en décembre 1929, date de son inauguration. Avec un modernisme à chaque époque renouvelé, La Mure peut se flatter avec son ensemble actuel, Hôpital-Hospice et Maison de Retraite, de posséder un ensemble que lui envieraient bien des villes plus importantes. LE TEMPLE A la fin du 16ème siècle, le culte protestant avait lieu dans des maisons particulières. Un clocher en forme de tour se construisit rue du Temple. C'était pour ainsi dire leur premier lieu de ralliement. En 1685, Louis XIV révoquait l'Edit de Nantes ; il y eut une persécu- tion odieuse envers les libertés et les droits reconnus aux protestants ; leur temple fut anéanti. On le reconstruisit au milieu d'un vaste enclos de la propriété Aman (Ros), c'est- à-dire juste derrière celui existant. C'est en 1931 que l'on réalisa le temple actuel en bordure de la place des Capucins. C'est à cette époque, sous la municipalité Ricard que se construisit le Théâtre Municipal. DEUX MAISONS HISTORIQUES Deux maisons ont reçu des hôtes prestigieux : La première est la maison Moïse Duport, en face de la halle, qui a été l'ancienne gen- darmerie et qui appartient maintenant à l'îlot Balme. Louis XIII et Richelieu, qui conduisaient une armée en Italie, couchèrent, le 22 février 1629, dans cette maison. Les habitants de La Mure fournirent des bœufs et des chevaux pour transporter à Embrun les pièces d'artillerie. L'expédition revint victorieuse. Le 1er mai, le Duc Henri Il de Montmorency revint par La Mure et coucha dans cette même maison. La deuxième se trouve au n° 13 de la Grande Rue, en face de la Tour de l'Horloge, celle du maire de l'époque, Pierre-Noé Genevois, qui accueillit le pape Pie VI sur le chemin de l'exil, en route pour Valence. Il était si exténué qu'il y coucha deux nuits, les 3 et 4 juillet 1799. Il devait s'éteindre le 22 août 1799, peu de temps après son arrivée à Valence.

LE TOUR DU MASSIF GRAND SERRE-TABOR, ET LES LACS DE LAFFREY. (65 km.) CIRCUITS AUTOMOBILES AUTOUR DE LA MURE

Nous vous soumettons quelques circuits touristiques autour de La Mure avec plans et de nombreux détails explicatifs qui vous seront très utiles lors de vos promenades avec des parents ou amis pour découvrir ou revoir les beaux paysages ou curiosités de notre pays. TOUR DU MASSIF DU GRAND SERRE-TABOR ET LES LACS DE LAFFREY (65 km) Partir de La Mure par la D.114 et passer par Nantes-en-Rattier (ruines de l'ancien château féodal). La route gravit ensuite le col de Malissol (1105 m), au milieu de mag- nifiques forêts de sapins. On a une belle vue sur le sud de la Matheysine. On atteint le chemin des Crêtes pour aller au Piquet de Nantes et au Tabor. Redescendre sur La Valette (ancienne église datant du XIe siècle dans le cimetière en voie de classement historique, et la grotte de Henri IV où, paraît-il, on fabriquait des pièces de fausse monnaie) et la Basse-Valette (four banal). Suivre la vallée de la Roizonne jusqu'à Lavaldens bordée de montagnes hérissées de pointes "Vallis Dentata" d'où provient son nom et Moulin-Vieux, où on peut aller voir la cascade et la combe de Vaunoire. De Moulin-Vieux, monter à l'Alpe du Grand-Serre, station de sports d'hiver et estivale bien aménagée entre le Taillefer et le Grand-Serre (promenades aux lacs Claret, Poursolet, Fourchu et Brouffier). Du hameau de Jean Poncet, la route descend en direction de la vallée de la Romanche. Au premier carrefour, prendre à gauche la route D.113 en direction de Laffrey qui est un centre de tourisme réputé.

Le lac du Poursolet (photo Jean Garnier) De Laffrey, deux itinéraires pour regagner La Mure : Le premier est la N.85 qui, après être passée à côté de la célèbre Prairie de la Rencontre, longe les trois lacs et regagne La Mure par Pierre-Chatel. Il faut signaler le village de St-Theoffrey avec sa petite chapelle gothique en bordure de la route. Le deuxième itinéraire, un peu plus long, passe par Cholonge, les Thenaux, Villard-St-Christophe, Fugières (accès à la nouvelle station de La Chaud), Tord, des villages matheysins bien sympathiques et La Mure. LE BEAUMONT ET LES VERTES VALLEES (90 km) De La Mure, prendre la route de Gap (N.85) jusqu'à Corps. On aura traversé La-Salle en Beaumont qui est un village formé de différents hameaux agricoles. Tout le long de cette route, belle vue sur le massif de l'Obiou et le lac de St-Pierre. LE BEAUMONT , ET LES VERTES VALLEES ( 90 km )

Corps, bourg médiéval, est le carrefour d'un système de vallées fort étranges à parcourir, le Champsaur, le Devoluy et le Valgaudemar. De Corps, on peut monter au sanctuaire de Notre-Dame de la Salette par une bonne route (au sommet du Gargas, table d'orientation). Au village de La Salette, voir le cimetière canadien de l'accident d'avion survenu en novembre 1950 au pic de l'Obiou. A Corps, visite des vieux quartiers : maison natale des témoins de l'apparition de Notre-Dame de la Salette, promenades au lac du Sautet, à la station familiale de Boustigue. De Corps, prendre la route de Ste-Luce, vous trouverez la carrière de marbre noir, maintenant abandonnée, où fut pris le bloc qui servit à faire le socle du tombeau de Napoléon. Passer St-Michel en Beaumont, délimité par de hautes montagnes verdoyantes, au relief doux et régulier, qui ont donné le nom de Beaumont à ce massif. Prendre la route menant aux alpages du col de Parquetout (1382 m) où l'on a une belle PANORAMA de LA MURE

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