Le Dévonien Supérieur De La Montagne Noire
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1/12 Le Dévonien supérieur de la Montagne Noire : ses calcaires griottes, sa carrière de Coumiac avec sa dalle à goniatites et son GSSP Frasnien- Famennien, Saint-Nazaire-de-Ladarez et Cessenon-sur-Orb, Hérault 17/06/2019 Auteur(s) : Pierre Thomas Laboratoire de Géologie de Lyon / ENS Lyon Publié par : Olivier Dequincey Résumé Goniatites, faciès calcaire griotte et clou d'or (Global boundary Stratotype Section and Point) de la base du Famennien (Dévonien terminal) au Sud de la Montagne Noire. Source - © 1983 Pierre Thomas Figure 1. Vue globale sur des strates redressées (et inversées) de calcaire griotte du Famennien (Dévonien terminal, 372 à 359 Ma) au Puech de la Suque (Saint-Nazaire-de-Ladarez, Hérault). Localisation par fichier kmz du Puech de la Suque. https://planet-terre.ens-lyon.fr/ressource/Img645-2019-06-17.xml - Version du 07/04/21 2/12 Source - © 1983 Pierre Thomas Figure 2. Vue de détail sur des strates redressées (et inversées) de calcaire griotte du Famennien (Dévonien terminal, 372 à 359 Ma) au Puech de la Suque (Saint-Nazaire-de-Ladarez, Hérault). Nous publions cette semaine un article de Michel Faure sur la géologie de la Montagne Noire (cf. La géologie anté- permienne de la Montagne Noire (Sud du Massif Central)). Dans la première partie consacrée aux roches sédimentaires constituant le versant Sud de la Montagne noire, Michel Faure cite un calcaire noduleux rouge, dit « calcaire griotte », daté du Dévonien supérieur. Dans la notice de la carte Saint Chinian au 1/50 000, le BRGM décrit ainsi la série du Dévonien supérieur : d5-h1a : Dévonien supérieur (Frasnien—Famennien—passage au Carbonifère ?). Calcaires noduleux et griottes. Cette formation qui passe en continuité au Carbonifère, comporte au mont Peyroux les éléments suivants (de bas en haut) : a) argilites siliceuses à nodules calcaires et jaspes noirs ; b) calcaire argileux rouge à rose bien lité, avec hardground et enduits de fer et de manganèse ; c) minces niveaux de calcaire noir bitumineux fétide ; d) calcaires noduleux, griottes : au sommet, calcaire amygdalaire à matrice de calcaire argileux ou d'argilite ferrugineuse, contenant des amandes calcaires enrobées d'un filet hématitique. La base est bien stratifiée et présente des joints à oxydes de fer et de manganèse qui pourraient correspondre à des hardground ; e) calcaires noduleux gris à matrice de calcaire sombre contenant des taches calcaires, blanches ou roses, à contours diffus. L'ensemble est massif mal stratifié. Les niveaux a, b, c, représentent le Frasnien, d, e, le Famennien et le passage au Carbonifère. La série est en général bien datée avec une succession complète de Conodontes, Trilobites abondants, Bivalves, Brachiopodes dans le Frasnien ; Conodontes, rares Trilobites, Céphalopodes (Goniatites et clyménies) dans le Famennien. Les calcaires noduleux sont fréquents dans le Dévonien supérieur de la Montagne Noire. Ils sont constitués de nodules de calcaire entourés d'un réseau anastomosé d'argile, très souvent ferrugineuse. Suivant son induration et le type d'altération-érosion, cette argile ferrugineuse est moins ou plus érodée que les nodules calcaires, et se retrouve soit en saillie soit en creux. Quand ces calcaires noduleux sont rouges, ils sont appelés « calcaire griotte » à cause de leur ressemblance avec un clafoutis aux cerises. En Montagne Noire, les nodules sont souvent roses à rouges, et le réseau anastomosé d'argile ferrugineuse ocre ou rouge foncé. On appelle souvent ces calcaires « marbres griotte » même s'ils ne sont pas métamorphiques, car ils sont susceptibles d'un beau poli. Rappelons que si les géologues réservent le terme de marbre aux calcaires métamorphiques, les “marbriers” appellent “marbre” toute roche qui devient décorative une fois polie, que ce soit une roche sédimentaire, magmatique, métamorphique… Ces calcaires griottes ont d'ailleurs été abondamment utilisés comme “marbre”, aussi bien dans des sites prestigieux comme le château de Versailles et le Trianon (dans ces cas, ils venaient de carrières de la Montagne https://planet-terre.ens-lyon.fr/ressource/Img645-2019-06-17.xml - Version du 07/04/21 3/12 Noire), que dans des lieux moins royaux et plus populaires, comme le centre commercial de la Part-Dieu à Lyon (cf. Étudier les bélemnites et leur phragmocône dans le centre commercial de la Part-Dieu (Lyon, Rhône), dans ce cas, ils viennent du Sud de l'Espagne). En France, on trouve des calcaires griottes dans le Jurassique briançonnais (cf. Le "marbre griotte" jurassique supérieur du Briançonnais, dit "marbre de Guillestre", et ses ammonites) et, à cause de la célébrité des Alpes et de la méconnaissance qu'ont beaucoup sur la géologie du reste de la France, certains pensent que ce faciès est rare et qu'on ne le trouve en France que dans le Jurassique briançonnais. Rien qu'en France, il existe au moins deux régions/époques où ce faciès s'est déposé : le Jurassique supérieur briançonnais donc, et le Dévonien supérieur du Sud de la France (Montagne Noire, versant Nord des Pyrénées). Ce sont toujours des calcaires marins, pélagiques, déposés à une profondeur relativement importante (> 100 m). La genèse des nodules n'est pas toujours très claire, et trois modes de formations (non incompatibles) sont proposés. 1. Il s'agirait de nodules engendrés directement par des phénomènes biologico-sédimentaires, avec concentration de carbonates autour de restes d'organismes (céphalopodes en particulier), d'accumulations bactériennes… 2. Il s'agirait de couches plus ou moins continues de calcaires et d'argiles, mais couches plus ou moins disloquées juste après la sédimentation par des instabilités gravitaires, des séismes… En effet, la boue calcaire a un comportement plus cohésif et plus “cassant” qu'une boue argileuse ; et cette boue calcaire est en générale plus dense que la boue argileuse. Vibrations (séismes), glissement sur une pente… peuvent fractionner les couches de boue calcaire, et la boue argileuse, moins dense et plus ductile, peut remonter dans les fractures. On parle d'origine par fissuration-pénétration. 3. il s'agirait de couches plus ou moins continues de calcaires argileux et d'argiles calcaires, des phénomènes de diagenèse exagérant la ségrégation et la séparation argile-carbonate pour engendrer des nodules de carbonate presque pur au sein d'argile presque pure. Les observations sur le terrain montrent que les mécanismes 1 et 2 ont sans doute joué au Dévonien supérieur du Sud de la France : souvent le cœur des nodules est occupé par un fossile, le plus souvent de goniatite (ammonoïdé du Paléozoïque supérieur), et souvent la géométrie de détail des niveaux est compatible avec une origine par fissuration-pénétration, et ce n'est pas étonnant. Le Dévonien terminal s'est déposé sur une plateforme calcaire stable (la marge du Gondwana pré-hercynien) en train de s'approfondir et de devenir un bassin flexural carbonifère au pied des chevauchements hercyniens qui progressaient vers le Sud. Dans une première partie (photographies 1 à 8) nous vous montrons des photos de faciès “classique” des calcaires griottes de Montagne noire, photographies prises sur le terrain en 1983, ou photographies d'échantillons ramenés à Lyon. Photographies et échantillons proviennent du Puech de la Suque (Saint-Nazaire-de-Ladarez, Hérault, localisation par kmz du Puech de la Suque). Dans une deuxième partie, nous vous montreront 13 photographies associées à la carrière de Coumiac (Cessenon- sur-Orb, Hérault, localisation par kmz de la carrière de Coumiac), carrière située à 4,5 km au Sud-Ouest du Puech de la Suque dans les mêmes étages du Dévonien supérieur. Outre le calcaire griotte “ordinaire” et d'autres calcaires du Dévonien supérieur, cette carrière abrite un « mur de goniatites » et un GSSP (Global boundary Stratotype Section and Point) matérialisant la base du Famennien (372,2 ± 1,6 Ma). On peut noter que la Montagne Noire abrite deux autres GSSP encadrant celui de Coumiac, ceux de la base du Frasnien (382,7 ± 0,8 Ma) et de la base du Tournaisien (358,9 ± 0,4 Ma), alors que les trois étages concernés ont leurs stratotypes historiques en Belgique. https://planet-terre.ens-lyon.fr/ressource/Img645-2019-06-17.xml - Version du 07/04/21 4/12 Source - © 1983 Pierre Thomas Source - © 1983 Pierre Thomas Figure 3. Détail sur une strate de calcaire griotte du Figure 4. Détail sur une des goniatites de la figure Puech de la Suque (Hérault). précédente dans un calcaire griotte. On voit que certains nodules montrent une Comme souvent chez les ammonoïdés, l'intérieur de la structuration interne : structure apparemment coquille est calcitisée (cf. Les ammonites calcitisées du concentrique ou en spirale. Ce sont des goniatites (de Toarcien – Aalénien inférieur des Monts d'Or lyonnais). petite taille) plus ou moins intactes et bien conservées. On y devine les cloisons internes caractéristiques des céphalopodes. Source - © 2019 Pierre Thomas Figure 5. Extérieur d'un échantillon ramassé en 1983 au Source - © 2019 Pierre Thomas Puech de la Suque. Figure 6. Section coupée et polie de l'échantillon de Bien que le contraste des couleurs soit plus faible que calcaire griotto de la figure précédente. sur les photos précédentes, on reconnait des goniatites dans nodules. Cet échantillon a été coupé, et la photo On voit très bien des sections de goniatites. On peut suivante est celle de la section plane de l'autre côté de noter la belle couleur rouge des coupes polies de ce l'échantillon. calcaire griotte, ce qui explique son utilisation comme “marbre”. Photo 2019 https://planet-terre.ens-lyon.fr/ressource/Img645-2019-06-17.xml - Version du 07/04/21 5/12 Source - © 1983 Pierre Thomas Figure 8. Affleurement du Puech de la Suque montrant un des mécanismes possible de la nodularisation : la fissuration-pénétration. Source - © 2019 Pierre Thomas Après le dépôt d'alternances de boues calcaires et argileuses, les couches de boues calcaires ont tendance à Figure 7.