Les frères Caudron

René Caudron Alphonse Caudron 1884 - 1959 1882 - 1915

Adrienne Bolland dans la légende

Femme d'exception, Adrienne Bolland qui, aujourd'hui, repose au cimetière de Donnery fut une pionnière de l'aviation. Par son courage et son dévouement elle s'est illustrée, sans jamais rechercher une gloire qu'elle savait éphémère.

Une vocation précoce. "Je m'ennuyais, j'avais besoin de faire quelque chose...Je me suis dit : ça c'est une carrière peu encombrée. J'ai peut-être une chance de m'en sortir". Et voilà comment Adrienne Bolland a toujours raconté la naissance de sa vocation de pilote. Nous sommes alors à l'automne 1919. Elle quitte sans regret sa solitude campagnarde pour gagner et se présente chez Caudron, célèbre constructeur d'avions en affirmant : "Je veux voler". Impressionné par sa volonté, il l'encourage à passer le brevet de pilote qu'elle obtient au début de l'année 1920. Dans la foulée, elle franchit la Manche à bord de son avion le 25 août, étant alors la seconde femme seulement à réussir ce périlleux voyage. Mais c'est le survol de la Cordillère des , exploit qu'elle réalise le 1er avril 1921qui permet à Adrienne Bolland d'occuper aujourd'hui une place à part dans l'histoire de l'aviation. L'heure des exploits. Seule à bord de son Caudron, un G3 du type 1913, une vraie "cage à poule" de 80 CV qui plafonnait à 4 000 m, elle décolle de Mendoza pour rejoindre du Chili où elle arrive environ 4 heures plus tard. "Quand ils m'ont vu arriver, expliquait-t-elle, les Chiliens n'en croyaient pas leurs yeux. Il faut dire que je devais avoir bonne mine : j'étais en chaussettes, enveloppées dans de vieux journaux et j'avais le visage en sang. Sans pare- brise à 4 250 m pendant plus de quatre heures, le sang avait fait éclater les vaisseaux du nez et des lèvres. J'aurais pu avoir une syncope. Je n'y ai même pas pensé." La route qu'elle venait d'ouvrir devait être suivie plus tard par Mermoz, Guillaumet, Saint- Exupéry et les pilotes de l'Aéropostale. Les années suivantes, courant le monde, elle vole dans de nombreux meetings aériens, parvenant en 1923 à Orly, à réaliser plus de 200 loopings en 72 minutes, record mondial féminin de la spécialité. Femme courageuse, indisciplinée, volontaire et batailleuse, elle s'illustre pendant la Seconde guerre mondiale, par son action dans le "réseau Castille" sous l'occupation allemande. "La gloire est éphémère, disait-elle, elle tient à peu de chose. Ce qu'il faut, c'est réussir. La vie ne vaut la peine que si l'on réussit quelque chose de valable". M.V.

Adrienne Bolland en 5 dates 1895 : Naissance à (Val de Marne). 1919/1920 : Début dans l'aviation. 1er avril 1921 : Traversée de la Cordillère des Andes. 1923 : Record mondial féminin de loopings. 1975 : Adrienne Bolland est inhumée à Donnery. François Durafour pose son Caudron G3 sur le massif du Mont -Blanc (4331 m) en 1921 Tiré du site : Pionnair-GE.url

Le Genevois François Durafour réalise l’exploit impensable, soit de se poser à 4.331m sur le massif du Mont-Blanc, du 1e coup, sans assistance, et à décoller de là aidé par quelques alpinistes en juillet 1921. Devenu ainsi immortel, comme les neiges du sommet de l’Europe, Durafour ne parlera du sujet qu’avec modestie. Il faudra attendre 30 ans pour qu’un semblable essai soit à nouveau pratiqué. Et quand le monde cite un exploit suisse daté des pionniers, c’est à celui-ci qu’il pense en 1er. François Durafour s’apprête à un départ très risqué depuis le Dôme du Goûter à 4.331m sur le massif du Mont-Blanc. Henssler va lancer le moteur alors que Rouyet et Orset retiennent le Caudron G3 avant que son moteur ne soit au maximum : un seul essai possible, mais réussi !

Le sommet de l’Europe, nargue piétons, marins et aviateurs

Il y a quelque temps que François Durafour songe à se poser en avion dans le massif du Mont- Blanc qu’on observe souvent en vol depuis Paris. Par exceptionnel beau temps, le Cdt Cousteau citait aussi que dans sa jeunesse il le voyait parfois depuis le sommet de la Tour Eiffel ! L’élément décisif pour Durafour intervient lors du 1er vol avec passager sur Genève—Paris, le 1e juillet 1920, avec ce sommet blanc éclairé de soleil qui est leur point de mire depuis un moment. A l’arrivée, le passager et journaliste du "Journal de Genève" Paul du Bochet dit à Durafour, "Si nous montions là-haut !" Sans s’en douter, il a touché une corde sensible. "Pourquoi pas, c’est une éventualité à étudier" dit le pilote. Les 2 hommes se mettent alors à préparer minutieusement une audacieuse expédition. Les principaux obstacles sont la densité de l’air, peu porteuse à cette altitude, et le rendement du moteur. A l’époque on ignore complètement le comportement d’un appareil qui décolle à 4.000m d’altitude. Avec le conseil d’amis, Durafour entreprend l’étude du problème. Il cherche d’abord un nouvel avion capable d’une telle performance mais ne trouvera pas mieux que son léger Caudron G3 biplan qui n’est pas équipé de skis mais de simples roues. Aujourd’hui personne ne s’aventurerait là-bas avec un tel appareil, même amélioré ! Durafour : "Le relief du Mont-Blanc que vous trouvez à l’Université de Genève me fut de la plus haute utilité et le fils Vallot me fournit des renseignements indispensables car je dois vous dire que je ne suis pas alpiniste et que je ne suis jamais monté au Mont-Blanc. Je crois d’ailleurs que si j’en avais fait l’ascension, l’idée d’une telle entreprise ne me serait même pas venue ! Mais ma décision fut prise : j’atterrirai en planant au-dessus des Grands Mulets, sous la cabane Vallot." Il va ensuite régler toutes les formalités officielles. Le lieu d’atterrissage étant choisi, les dispositifs de signalisation définis, une équipe sera aussi sur place sur le Mont-Blanc. P. du Bochet, aidé d’amis dont Emile Gos, photographe et poète de la montagne, le journaliste Philippe Latour, sont partis sur les névés du Dôme du Goûter à 4.327m pour préparer le repérage et le balisage d’une petite zone d’atterrissage. Elle est équipée d’un poste de signaux optiques qui communiquera avec Chamonix puis, par relais téléphonique, avec Genève. La 1e tentative aérienne est faite le mardi 20 septembre 1920. Décollant de Saint-Georges, Durafour emporte du Bochet en passager. Comme le décollage depuis le Dôme s’annonce plus difficile que l’atterrissage, le passager emmène tout un équipement d’alpiniste pour le cas où il devrait redescendre à pied, allégeant ainsi l’appareil en vue de son départ face au vide. Sur le Dôme, attendent plusieurs hommes dont le Français Henri Brégeault du Club Alpin (CAF) et le Dr Thomas. Mais avec ses 80cv, le Caudron G3 plafonnent à 4.000m et ne peut atteindre le col du Dôme. Ils font 3 tentatives sans succès et sont contraints à l’abandon et à rentrer. Toute la journée des cameramen attendront cet avion sur le Dôme. Déçus, ils en seront pour leurs frais et leurs fatigues. L’éditorial du célèbre journal "l’Auto" du 14 octobre dira : "Cette tentative ne servira qu’à déranger une équipe de guides à la recherche du malheureux aviateur." Mais Durafour, n’a pas dit son dernier mot, avec sa ténacité et son cran habituel, il prépare un 2e essai

Une préparation complexe avec l’aide et la présence de nombreux amis

Durafour : "Je décide donc de recommencer, tout seul cette fois afin de diminuer le poids, mais comme la saison est déjà fort avancée, il me faut remettre mon projet à l’été suivant. L’organisation du second raid, pour être plus minutieuse, n’en est pas moins très silencieuse car je préfère, en cas d’échec, que l’affaire passe inaperçue !" En 1921 Durafour gonfle son moteur Gnôme et Rhône. L’ancien pilote de guerre se rend auprès de René Caudron pour qui il avait réceptionné tant d’avions et le lui demande : c’est d’accord ! On remplace le moteur de 80cv par un moteur rotatif 9 cylindres de 120cv. "J’avais maintenant un avion, mais aucune notion de montagne !" René Vidart, l’aviateur de Divonne, dont Durafour fut le mécano en 1910, lui offre une nouvelle hélice, un modèle Chauvière "intégrale", plus allongée, adaptée aux vols à haute altitude (1.300 t/min). Durafour la montera lui-même. Durafour : "Le 20 juillet le temps parait calme. J’organise mon raid. Et 10 jours plus tard, je décide de tenter l’impossible." Le vendredi 29 juillet, à Chamonix toutes les dispositions sont prises. Hermann Dutoit, député genevois, doit indiquer l’emplacement d’atterrissage au retour du Dôme, est secondé par Eugène Trollux envoyé spécial de la Tribune de Genève. Une colonne de montagnards monte aussi, en parallèle et à pied, vers le refuge Vallot, dans le massif du Mont- Blanc. Partie du pavillon de Bellevue, elle grimpe à la Tête-rousse, la cabane du Goûter étant inhabitable. Ses buts : préparer une piste d’atterrissage, prévenir Chamonix par signaux optiques des conditions atmosphériques de façon à prévenir Lausanne d’où décolle Durafour et, bien sûr, pour accueillir l’aviateur à son arrivée, l’aider à repartir et immortaliser l’exploit. Hélas, parmi eux, un unique cinéaste est venu en vêtements d’été, qui retarde tout le monde et doit abandonner le groupe. Les autres alpinistes sont l’avocat Marcel Brunet du Conseil administratif de la ville et président de la Fédération montagnarde, Louis Casaï futur président du Conseil d’Etat, Eugène Henssler, Camille Comte et Georges Werron qui agitera un grand drapeau à croix blanche pour guider le pilote.

Le massif du Mont-Blanc et le lieu d’atterrissage de Durafour. Ils quitteront le refuge le samedi 30 à 3h du matin afin d’être à temps pour l’arrivée de Durafour. Mais ils resteront bloqués à la Tête Rousse par une tempête qui s’est déclenchée la veille. Ils seront encore dans les séracs quand le Caudron se fait entendre et devront forcer le pas ! Depuis leur position, ils verront l’avion foncer directement sur le Mont-Blanc, disparaître derrière les derniers séracs du Dôme, puis plus rien ! Que s’est il passé, que vont-ils trouver ?

De La Blécherette (VD), un vol matinal et un atterrissage exceptionnel de Durafour

Durafour, 3.000h de vol, est présent à 5h du matin avec son mécano et Péthoud, directeur de l’aérodrome de La Blécherette (Lausanne). Contrôles d’usage (magnéto Lavalette, bougies Oleo, huile Castral), 35L d’essence, des gestes précis et sûrs, une poignée de main à chacun, puis il embarque à bord du G3, décollant à 6h10 vers Thonon-les-Bains : "Le 30 juillet 1921, la matinée s’annonçant belle et calme, je monte dans mon avion sans attendre les indications téléphoniques qu’on doit me transmettre de Chamonix et, je m’efforce de prendre de l’altitude, ce qui n’est pas chose facile jusqu’à 1.000m. Je suis parti de Lausanne avec le ferme espoir de me "poser" et je veux réussir." Le téléphone de Chamonix viendra peu après l’envol et Pethoud annoncera le départ de l’aviateur genevois. A Thonon, Durafour oblique légèrement pour prendre de la hauteur et met le cap sur le massif convoité. "Au-dessus du lac d’Anterne, j’aperçois un avion posé. Qui est-ce ? C’était simplement le zinc de mon ami Nappez qui survolait le Mont-Blanc en hydravion. Victime d’une panne, il a dû amerrir sur le lac..." "Ca gaze, la carburation est bonne. En 15’ grâce à mon hélice, je suis à 3.000m. Quelques minutes plus tard je regarde mon altimètre. Il marque 5.300m. Il est 6h38’. En 28’ j’ai atteint l’altitude nécessaire. Me trouvant face au Mont-Banc, je commence à couper les gaz et à regarder l’endroit de mon atterrissage. Mieux vaut prendre du large afin d’éviter d’être plaqué contre une paroi par un remous inattendu. A 7h10 je double 2 fois le sommet tant convoité. Puis après quelques secondes je me rabats, mais un violent remous secoue mon Caudron et me jette vers une crevasse prête à m’engloutir. Le plus mauvais moment de toute ma carrière d’aviateur !" dira- t-il plus tard. Il redresse son appareil "L’appareil reprend son équilibre à temps et je viens me poser sur le dôme du Mont-Blanc, au milieu d’un champ de neige, sans plus de secousse que sur un aérodrome, et ceci sans patins ni crampons !" Il a cherché à découvrir le terrain balisé et sa banderole rouge, sans le trouver. Boucle serrée au- dessus de la vallée d’Arve, un passage encore sur le col du Dôme, une crevasse bien connue des alpinistes qui borde la forte pente du col et l’aviateur redresse. Mais où se poser ? Que va-t-il trouver : de la neige fraîche ou de la neige dure ? L’orage s’est-il abattu à cet endroit durant la nuit ? Mais ayant reconnu le lieu prévu, il décide malgré tout d’y d’atterrir, ignorant bien sûr, le sort de ses amis alpinistes. Il vire au-dessus du grand Plateau sous la cabane Vallot et prend son terrain dans le sens nord-est-sud-ouest, évite habilement une énorme crevasse, moteur au ralenti, entre doucement en contact avec la neige glacée et roule sans heurt sur ce terrain moelleux. Les pneus s’enfoncent dans la neige dure, un léger froufrou ! L’avion est freiné par le sol montant en pente douce jusqu’à la paroi dominant le glacier de Miage italien. Il se pose à 7h15’ et "anneige" d’une manière impeccable à son 1e essai. L’avion s’immobilise, Victoire ! C’est la technique qu’utiliseront tous les pilotes de montagne dans 33 ans. "C’est ainsi que je prends contact avec cette neige, heureux d’être arrivé sur le sommet du fameux Dôme du Mont- Blanc. Je ne sais si la difficulté que je prévoyais a rendu mon atterrissage particulièrement réussi. Un vrai atterrissage de concours !" Mais sur une telle pente, un danger menace : la glissade. Le Caudron est instable et il est perché sur de hautes roues. Le moteur est tenu en marche, reste chaud et tient l’avion dans la pente. Le G3 est à 4.331m d’altitude, sur la grande arête occidentale du Mont-Blanc, à 470m du sommet, dans une dépression nommée Col du Dôme, entre le Dôme du Goûter (4.303m) et le rocher, à 200m, sur lequel sont construits l’observatoire Vallot et le refuge des Boucs (4.362m). Le pilote est seul dans ce désert de glace, seul à prendre tous les risques. Au-dessus : des séracs, au-dessous : des crevasses où des dizaines d’avions pourraient s’engouffrer. S’il n’avait pas aperçu des hommes au loin, qu’il a pris pour ses amis genevois, il ne se serait pas posé, le raid aurait été reporté. Un comité d’accueil imprévu mais composé d’amis français

Durafour : "Pas de publicité, aucun journaliste, seuls quelques amis sont au courant. Je suis ému comme jamais je ne l’ai été, même pas pendant la guerre..." Tout à coup il entend des appels et se tourne du côté des voix. Sont-ce ses amis ? "A peine descendu de mon "baquet", heureux d’être arrivé sur le sommet du fameux dôme du Mont-Blanc, je vois arriver vers moi un alpiniste ; c’est Henri Bregeault, secrétaire général du CAF, de Paris qui me photographie aussitôt à côté de mon avion. Durafour lui demande une attestation de son exploit. "Il me donne sa carte sur laquelle il écrit ces mots : "Henri Brégeault, secrétaire général du Club alpin français a photographié François Durafour, atterrissant au col du Dôme le 30 juillet 1921 à 7 heures 15 minutes, atterrissage réussi en tout point, exploit remarquable." Curieuse retrouvaille imprévue de cet ami qui avait déjà tenté d’aider Durafour l’année précédente et a tout de suite reconnu son avion en vol. Il a couru pour ne pas rater l’atterrissage. Ses photos feront le tour du monde. Accompagnant Brégeault, Paul Rouyer, membre de la section des Alpes Maritimes, ainsi que leur porteur Léon Orset. Ils sont montés la veille avec 8 guides et porteurs de Saint-Gervais, au refuge de l’aiguille du Goûter pour y faire effectuer des réparations. Ils ont décidé ce matin de pousser jusqu’au sommet du Mont-Blanc pour exécuter un relevé topographique et ont vu l’avion se poser depuis le Dôme. Durafour s’étonne : "Où donc est le cinéma ? - Mais vous voyez bien qu’il n’y a personne ! - C’est impossible, j’ai rendez vous avec 2 opérateurs, ils doivent être à l’observatoire Vallot ; allons-y, c’est à 5 minutes d’ici, n’est-ce pas ? - Mettons en vingt. - Voulez vous m’y conduire ? - Très volontiers, mais vous n’êtes pas équipé ; nous allons vous encorder." Mais, de crainte qu’un coup de vent ne fasse capoter l’avion ou l’emporte, les alpinistes creusent des sillons devant les 4 roues du train d’atterrissage, et, poussent l’appareil, engageant les roues dans les trous, jusqu’au moyeu, afin de le tenir plus solidement au sol. Ils enfoncent encore jusqu’au fer leurs 3 piolets et y arriment l’appareil avec une corde. L’avion est ainsi amarré solidement. Ils ne trouvent personne au refuge Vallot qui est fermé et retournent rapidement au col, souhaitant décoller avant que le soleil ne ramollisse trop la neige. Le temps va changer. "Dépêchons-nous, si vous ne repartez pas au plus tôt, vos roues enfonceront et l’envol deviendra impossible aujourd’hui ! On prend encore des photos puis avec l’aide des alpinistes on met l’appareil en position de départ, ce qui n’est pas facile étant donné l’état de la neige et l’altitude non propice à de tels travaux. La direction du vent, assez faible d’ailleurs, ayant été déterminée, les 4 hommes se livrent à des manœuvres assez délicates pour la solidité du bâti, en sortant les roues de leurs ornières. Ils entreprennent la tâche plutôt pénible de traîner l’appareil de 350kg jusqu’au versant du col dominant le Grand Plateau et la vallée de Chamonix. Ceci afin que l’aviateur puisse disposer du plus long terrain d’envol possible et pouvoir décoller en toute sécurité avant d’avoir atteint le rebord du côté Miage, sinon, au bout du fossé, c’est la grande culbute ! Durafour commande la manœuvre ; lui et Brégeault poussent les plans inférieurs, alors que Rouyer et Orset soulèvent l’arrière et portent les patins sur l’épaule. Ils font 20m, puis s’arrêtent essoufflés. Ils repartent. La neige mollit de plus en plus, les roues s’enfoncent dans la croûte glacée qui crisse et gémit. Ils parcourent à grand-peine une centaine de mètres et Durafour, prudent, ne trouve pas encore le champ suffisant. Heureusement voilà du renfort : l’équipe des 4 Suisses arrive, joyeuse, au pas accéléré, 30’ après l’atterrissage, agitant le drapeau suisse. Les hommes sont heureux de voir Durafour vivant et saluent son exploit à une telle altitude. "Oui, l’affaire avait été bien préparée, mais le temps et les imprévus ont voulu que l’on se passe de ces préparatifs bien fragiles ! En aviation, c’est toujours la même chose, il n’y a que le sol à retrouver !" Le soleil monte, il faut reprendre la manœuvre. A sept, les alpinistes repoussent le G3 à l’extrémité du terrain, non sans peine, car la neige continue à mollir et tout travail de force est très pénible à cette altitude. Le vent se lève. "Levez davantage les patins ! Obliquez vers la gauche, halte ! C’est bon ! Décollage : un seul essai possible, sur glace, entre les crevasses, face au vide

Puis Durafour serre la main de ses aides bénévoles et monte dans sa carlingue, prêt à tout. Inspection rapide du moteur et des commandes. Rouyer et Orset maintiennent les ailes, pendant qu’Henssler, le plus costaud, essaye de mettre le moteur en marche. "Coupé- contact- coupé- contact..." Il ne se fait pas trop prier, grâce à une injection d’éther dans les cylindres rendant le mélange plus inflammable. Une intense émotion gagne la petite troupe qui assiste à 4.300m à l’un des plus grands exploits de l’aviation. Le moteur convenablement réchauffé, il est 7h55, Durafour crie "lâchez tout". Moteur plein gaz, c’est tout à coup une brusque pétarade, le fuselage frémit, et bientôt le G3 roule à toute vitesse sur la pente glacée. Il dérive légèrement. "Avant 8h, je risque la manœuvre la plus critique de toute l’expédition : le décollage. Celui-ci fut angoissant et effrayant ... J’ai bien cru à 25m de l’abîme, que j’allais faire capoter volontairement l’appareil tant mes chances de décoller paraissent minimes. C’est à cet instant précis que l’avion s’élève." Un formidable remous le secoue brutalement ; dessous c’est le précipice italien d’une profondeur de 2.000m. "puis mon avion est poussé ou plutôt lancé dans un ravin bordé de parois de glace, je vais être broyé, mais mon Caudron se cabre, puis c’est le vide et l’envolée ; je suis sauvé !". Il s’élève enfin au-dessus du Col, sur lequel le suit son ombre, et file droit vers le glacier de Miage, plonge légèrement vers l’Italie pour prendre de la vitesse, vire près de l’aiguille de Bionnassay. "Le moteur tourne splendidement, l’appareil monte lentement, mais régulièrement, enfin je passe à 30 mètres au-dessus de l’arête.". Durafour revient au-dessus du Dôme pour faire des signes et montrer que tout va bien, sous les hourras, puis débute sa majestueusement descente en spirale vers Chamonix. "On me donnerait un million pour recommencer un départ semblable que je n’accepterais pas !" Dans la manœuvre, Durafour a perdu de vue la vallée de l’Arve et se trouve un instant égaré dans un gigantesque cirque glaciaire. Pendant qu’il s’occupait du moteur, il a passé sans se douter le col du Midi et se trouve au-dessus des séracs du Géant. Quand on tient un fleuve, se dit-il, il n’y a qu’à descendre le cours pour aboutir sûrement à la mer, et c’est ainsi qu’il atteint la Mer de Glace, pour passer au-dessus du Montenvers, survoler la vallée de l’Arve, la descendre jusqu’aux Houches et remonter ensuite pour se pose près de Chamonix. Quant aux 2 cordées d’alpinistes, elles iront fêter l’exploit au sommet du Mont-Blanc à 9h30. Cette 5e ascension de Brégeault restera pour lui un souvenir inoubliable.

Le G3 et Durafour s’apprêtent à décoller. Le G3 de Durafour au pieds du sommet du Mont-Blanc.

On notera les roues et l’absence de skis sur ce frêle biplan. Caudron G3 du Museu Aeroespacial Rio de Janeiro

Moteur Anzani 100 ch / 10 cylindres 1914, conception du GIII

Les frères Caudron avaient déjà à leur actif quelques 20 machines réalisées en 5 ans d'expérience lorsqu'ils conçurent le Caudron GIII en 1914. Ce biplan monomoteur à bord duquel pilote et observateur opéraient à l'intérieur d'une courte nacelle, connut un assez rapide succès. A la déclaration de guerre, il équipait déjà une escadrille française. Commandé en grande série, il devint durant les deux premières années du conflit l'un des appareils les plus employés pour les missions de reconnaissance ou de réglage de l'artillerie. Solide et fiable mais non armé, il jouissait d'une bonne réputation chez les pilotes des escadrilles C11, C17, C18 et C30 qui en étaient dotés. Sa vulnérabilité face aux chasseurs adverses devint cependant trop manifeste et il fut retiré du front dans la deuxième moitié de 1916. A mesure qu'ils étaient éloignés des opérations, les G III étaient dirigés vers les écoles de pilotage. Plusieurs milliers de pilotes alliés l'utilisèrent pour leur formation et, parmi eux, ceux du Corps Expéditionnaire américain qui en reçurent 192 de 1917 à 1918. 2450 G III avaient été construits en , 233 en Angleterre et 166 en Italie. Après la guerre de nombreux exemplaires furent cédés aux pilotes civils. C'est avec l'un d'eux que Védrinnes réussit, en 1919, à se poser sur le toit des galeries Lafayette, que Mme de la Roche établit la même année un record du monde d'altitude féminin avec 3900 m et enfin qu'Adrienne Bolland franchit la cordillère des Andes en 1921.

Caractéristiques du Caudron G III Type d'avion : Reconnaissance Equipage: 2 (pilote et observateur) Constructeur : Caudron Envergure: 13.40 m Pays : France Longueur: 6.40 m Année du premier vol : 1914 Hauteur: 2.50 m Surface alaire: 27 m©˜ Masse à vide: 420 kg Masse maximal au décollage: 710 kg Autonomie: 4 heures Distance franchissable: 300 km Vitesse de croisière: 80 km/h Vitesse maximale: 110 km/h Plafond opérationnel: environ 4 000 m Motorisation: 1 moteur à piston Gnôme Rhône rotatif de 80 ch Armement: aucun La maquette Construction Michel Boudineau Envergure 90 cm Longueur 50 cm Poids sans accu. 155 grs Poids en vol 175 grs Surface portante 13,50 dm2 Charge alaire 13 grs / dm2 Vitesse 1,5 à 2 m / s Moteur CDR re-bobiné et re-aimanté Hélice pour le vol 7 x 5 APC E Accu. lipoly 7,4 / 310 mAh Radio 3 servos, gamme 4 grs 1 récepteur HYPERION TSR4 1 variateur YGE4-BL Echelle : environ 1:15 Recouvrement Papier Japon “early bird” Temps de construction Environ 250 heures Base de travail Plan MRA, documents trouvés sur le NET.

Construction : La construction, hormis l’hélice, est complètement personnelle.Les matériaux utilisés sont, le balsa, le carbone, le papier, l’aluminium, et le plastique. - Le balsa est utilisé pour la structure et quelques petits morceaux de la décoration. - Le carbone est utilisé pour les axes de roues et quelques éléments de décoration. - Le faux moteur est un empilement de rondelles en plastique retravaillé pour gagner du poids, le carter est en balsa. - Le pilote est en mousse recouverte de cuir, le visage a été thermo-formé sur un jouet en plastique. - Les commandes et les haubans sont en tresse nylon.. - Le manche à balai est actif avec la commande de profondeur. Quelques exemples :

Jonc plastique

Carter en balsa Empilement de rondelles plastique

Tube aluminium Papier Japon

Fil nylon

Samba

Rayons en tresse kévlar Tube aluminium

Les peintures utilisées, sont de la marque Humbrol. Le vernis “Chêne clair” est du Syntilor “Aspect Bois Ciré”.

CAUDRON G3 Quelques mots sur la construction des Caudron G3. Informations provenantdu livre : LES AVIONS CAUDRON par André Hauet

Commentaires sur les Caudron G2 et G3.

Les derniers G2 furent déjà équipés du moteur Le Rhône; contrairement à ce que l’ on pourrait croire, ce détail n’est pas primordial dans l’appellation et l’identification du G3. Il semble bien que de 1913 à 1914, début de la guerre inclus, les “G” ont évolués en voilures, selon les emplois et, en ce qui concerne les biplaces de l’armée, en accroissant peu à peu l’envergure...... Lorsqu’il a été décidé, au cours de la guerre 1914-1918, de faire fabriquer des Caudron par des licenciés, on c’est aperçu...qu’ il n’y avait pas de plans à jour chez Caudron. Des dessins furent alors faits à partir d’appareils construits.On en a probablement profité pour optimiser les détails en vue d’une construction en série, ce qui pourrait expliquer les légères différences dans le temps. Note sur le gauchissement du Caudron G3.

Compte tenu des plan “trois vues” parus dans certaines revues anglo-saxonnes, il semble bien que les ailerons ne sont apparus que très tardivement et probablement bien après 1918. Lorsque le concours des avions-école a été organisé en 1921, le jugement rétrospectif du STAé sur les avions encore utilisés en école en 1918 a été très clair : “ Le G3 et ses défauts “ C’est un appareil à ailes souples.L’aile souple n’est plus utlisée en aviation.Son emploi, en donnant de la dureté de main, ne développe pas la finesse de l’élève-pilote dans la manoeuvre de gauchissement. La réaction n’est pas instentanée.Enfin, sa fabrication et sa réparation sont coûteuses et difficiles. Il est donc vraisemblable que chez Caudron, tout en préparant le C.27 à cet emploi, on ne construisit plus que quelques G3 à ailerons pour les civils. Les frères René et Gaston Caudron avaient conçu des aéroplanes pendant plus de cinq ans déjà lorsqu'ils réalisèrent leur Caudron G3 (ou GIII), en mai 1914. Cet appareil avait été précédé par une vingtaine de machines différentes produites à environ 150 exemplaires, toutes versions confondues, leur nouvelle production ayant de nombreux points communs avec le Type B. Construit à Rueil, le G3 était un sesquiplan dont le contrôle latéral était assuré par gauchissement de l'aile. Ce n'est en effet que sur les derniers modèles que ce système fut remplacé par des ailerons sur le plan supérieur . L'observateur et le pilote prenaient place en tandem dans une courte nacelle à l'avant de laquelle se trouvait le moteur. Le Rhône rotatif de 80 ch. Quelques machines reçurent d'autres propulseurs rotatifs (Gnôme ou Clerget) de même puissance. La double dérive était supportée par quatre poutres, dont les plus basses faisaient office de patins d'atterrissage. Le train principal se composait de deux paires de roues, montées à l'extrémité avant des deux poutres inférieures. Le G3 dérivait de son prédécesseur immédiat le G2 monoplace qui avait connu ses heures de gloire dans les meetings aériens en 1913 et au cours des premiers mois de 1914. Conçu pour l'Aéronautique militaire française, le G3 servait au sein de l'escadrille C-11, basée à Montmédy et rattachée à la IVe armée lorsque la guerre éclata en août 1914. Commandé en grande série, cet appareil fut construit par Caudron dans la nouvelle usine de Lyon et à Issy-les-Moulineaux pendant les premiers mois du conflit. En outre, il fut produit par d'autres entreprises, sans que les frères Caudron réclament le moindre droit au titre de leur licence, ce qui en dit long sur leur patriotisme. Le G3 se révéla solide et fiable, qualités qui amenèrent le ministère de la Guerre français à le maintenir en première ligne en 1914, à une époque où tous les autres types d'avions alors en service, sauf quatre, êtaient relégués aux écoles. Il fit une belle carrière et, bien qu'il ne fût pas armé, demeura très populaire auprès des équipages. Cependant, les mois passant, sa vulnérabilité s'accentua et il dut être en fin de compte retiré du front au milieu de l'année 1916. Au total, 2 450 Caudron G36 furent réalisés pendant les hostilités, dont 1 423 par Caudron. Il convient d'y ajouter les 233 appareils construits par la British Caudron et les 166 sortis de l'usine AER d'Orbassano, près de Turin. L'aviation italienne utilisa le G3 en grand nombre pour la reconnaissance jusqu'en mars 1917. Les appareils assemblés en Grande Bretagne furent employés pour l'observation et la reconnaissance, le Royal Flying Corps britannique montant même des mitrailleuses et des bombes légères sur quelques uns dentre eux pour attaquer les troupes allemandes ; 124 machines furent prises en compte par le RFC et 109 par le Royal Naval Air Service, qui les réserva dès le départ à l'entraînement mais les fit aussi participer, au cours des premiers mois de la guerre, à quelques tentatives infructueuses dinterception des dirigeables ennemis. Les principales versions du G3 mises en oeuvre au cours de la guerre furent le Cau 3 A.2 de réglage d'artillerie employé par les Alliés sur le front occidental, en Russie et au Proche-Orient le Cau 3 D.2, avion d'entraînement à double commande et le Cau 3 E.2, une version standard d'entraînement équipée d'un moteur rotatif . Le nombre d'appareils affectés aux écoles augmenta au fur et à mesure du retrait des machines déployées en première ligne. Plusieurs milliers de pilotes alliés effectuèrent leurs premiers vols sur cet avion tout comme certains membres du corps expéditionnaire américain en France, qui en reçut 192 exemplaires entre 1917 et 1918. Un avion d'entraînement un peu particulier le Cau 3 R.1, dérivé du modèle de base, ne fut employé que par les Français et les Américains. Le préfixe R signifiait " rouleur ", l'appareil étant utilisé en configuration monoplace avec une grande partie de l'entoilage des ailes enlevé pour éviter le décollage. Réservé exclusivement à la formation au sol il devint très vite familier aux élèves des écoles de pilotage. La dernière version majeure fut le Cau 3.12, sur lequel le moteur rotatif de 80 ch avait été remplacé par un propulseur en étoile Anzani de 100 ch (75 kW)

Caudron G3 (1921)

Constructeur Caudron Envergure 13,40 m Longeur 6,40 m Poids total 708 kgs Vitesse 112 km / h Moteur Anzani 100 hp Montée à 2000m 18 minutes Montée à 3000m 32 minutes Autonomie 4 heures