DOSSIER DE PRESSE CONTACT PRESSE / PHOTOS / ACCRÉDITATIONS Dominique Trémouille [email protected] / 06 87 17 44 80 Damien Besançon [email protected] / 06 87 22 38 70

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#27

au 17 février du 26 janvier 2018

BILLETTERIE 01 46 87 31 31 billetterie ouverte à partir du 1er décembre 2017 Rejoignez-nous ! www.sonsdhiver.org Sons d’hiver - domaine départemental Chérioux 4 route de Fontainebleau - 94407 Vitry s/Seine cedex administration : 01 41 73 11 65 PROGRAMME SONS D'HIVER 2018

p.01 p.03 Vendredi Samedi 26 Jan. 20h30 27 Jan. 20h30 LE KREMLIN-BICÊTRE CACHAN ECAM Théâtre Jacques Carat IN ORDER TO SURVIVE NAÏSSAM JALAL QUEST OF THE INVISIBLE + Hamid Drake WILLIAM PARKER NEW ORGAN QUARTET MIKE REED QUARTET + ONJ Olivier Benoit "THE CITY WAS YELLOW, THE CHICAGO SUITE"

p.05 p.07 p.09 Dimanche Lundi Mardi 28 Jan. 16h 29 Jan. 19h 30 Jan. 20h30 CHOISY-LE-ROI PARIS 6E ARCUEIL Théâtre Paul Eluard Columbia Global Centers Espace Jean Vilar

URSUS MINOR THE BRIDGE #14 CHAD TAYLOR / invite Crescent Moon JAMES BRANDON LEWIS DUO P.O.S with DJ ANDER OTHER THE BELL CHES SMITH / CRAIG TABORN / MAT MANERI

p.11 p.13 p.15 p.17 Vendredi Samedi Dimanche Mardi 02 Fév. 20h30 03 Fév. 20h 04 Fév. 17h 06 Fév. 20h45 ALFORTVILLE FONTENAY-SOUS-BOIS PARIS 7E MAISONS-ALFORT Le POC Salle Jacques Brel Théâtre Claude Lévi-Strauss Théâtre Claude Debussy au musée du quai Branly MICHEL PORTAL/ HUBERT DUPONT Jacques Chirac ROBERTO NEGRO SOLO "EXPLORE, EXPLOVE" DANIEL HUMAIR / SYLVAIN LUC BRUNO CHEVILLON TRIO DAVID MURRAY "ENJAZZEMENT LIBRE" et LES FRÈRES CHEMIRANI INFINITY QUARTET MIKE REED'S FLESH & BONE CIE LUBAT DE GASCONHA feat. Saul Williams + Luther François / Alfred Varasse

p.19 p.21 p.23 p.25 Mercredi Vendredi Samedi Mardi 07 Fév. 20h30 09 Fév. 20h30 10 Fév. 20h 13 Fév. 20h PARIS 14E VILLEJUIF VITRY-SUR-SEINE IVRY-SUR-SEINE Théâtre de la Cité internationale Théâtre Romain Rolland Théâtre Jean-Vilar Théâtre d'Ivry-Antoine Vitez SONS OF KEMET HA NOI DUO & FRIEND SCLAVIS / PIFARÉLY / . BIG SATAN COURTOIS TRIO SOWETO KINCH TRIO "CREOLE SPIRITS" BAND OF DOGS OMAR SOSA & STEVE LEHMAN SÉLÉBÉYONE + Otomo Yoshihide JACQUES SCHWARZ-BART

p.27 p.29 p.31 Jeudi Vendredi Samedi 15 Fév. 20h30 16 Fév. 20h 17 Fév. 20h VINCENNES CRÉTEIL CRÉTEIL Auditorium Jean-Pierre Miquel Maison des Arts Maison des Arts STEPHAN OLIVA SOLO CARL HANCOCK RUX TRIO BIG DADDY WILSON BAND BREATH & HAMMER JEFF MILLS ERIC BIBB MIGRATION BLUES KRAKAUER-TAGG DUO et ÉMILE PARISIEN PLAY COLTRANE BAD FAT + Napoleon Maddox

PRATIQUER L’EXCÈS DU SENSIBLE

Au contact de la beauté, la musique nous dit quelque chose d’indicible que seules les correspondances poétiques saisissent. Un festival est alors une véritable oasis. Les formes artistiques y cristallisent les affects et les états existentiels les plus profonds. Formes inattendues sans cesse au travail. Travail du rythme, des timbres et résonnances, du mouvement des esthétiques, des mélodies et des voix. Illuminations des sons. Tout se joue en direct durant l’instant éphémère du concert. Boycott des habitudes établies. Confrontation étincelante. Il faut en soit beaucoup de liberté et donc de sincérité pour y parvenir. Ne pas être devenu un artiste inoffensif et neutralisé. Ne pas céder au superficiel pour plaire "vite fait, bien fait". Pratiquer l’excès du sensible. Tutoyer le risque pour contrer la médiocrité. Dans ce programme 2018, nous vous invitons à rencontrer des musiciens qui disent ce quelque chose de poétique, d’indispensable de notre monde incertain. Ses passions, doutes, fantaisies, douleurs, peurs, rages, rires, colères, espoirs et tendresses. Les musiciens fabriquent les sons de la vie. Trente et un orchestres, venus du monde entier et de France, vont se présenter sur scène durant ces trois semaines musicales. Trois semaines pour prendre le temps de l’écoute attentive sans précipitation ou massification consumériste. Le jazz et l’improvisation, dans leurs formes contemporaines en "créolisation" avec des musiques du monde ou le meilleur du ou bien l’improvisation rock-noise-électro, "free" ou tout autre son nouveau sans appellation, se croisent ici. Une ébullition intense des musiques dans leur unité et diversité. Et même lorsqu’elles ont les délicatesses troubles de l’élégie, ces musiques sont déterminées car elles ne cèdent en rien sur le sens de l’artistique. Elles nous convoquent au réveil de l’imagination et de l’énergie libérée. Pied de nez de la beauté à l’utilitarisme ambiant de nos temps techno-financiers.

Fabien BARONTINI

Vendredi 26 Janvier | 20h30 | Le Kremlin-Bicêtre______ECAM

À tout seigneur, tout honneur. Avec cette formule consacrée, il s’agit de saluer le compagnonnage qui unit William Parker et Sons d’hiver depuis tant années – à tel point qu’il n’est pas exagéré de soutenir que ce musicien fait partie de la mémoire et de l’identité de ce festival. On se souvient peut-être que William Parker a offert un duo de tempérament(s) avec Joëlle Léandre en 2009, et un autre de glace et de feu avec Cooper-Moore en 2012. Qu’il a prêté son assistance toujours mirifique à plusieurs triangulations bienveillantes et libertaires (le plus souvent en compagnie de son alter ego Hamid Drake) : celle avec Joe Morris en 2006, celle avec Beans en 2007, celle avec Kidd Jordan et cette fois-ci Milford Graves en 2008 (le contrebassiste est d’ailleurs revenu au sein du quintet du premier en 2009 et au sein du quartet du second en 2014), celle avec Peter Brötzmann en 2015. On n’est pas prêt d’oublier non plus sa participation avec Fred Anderson et Kidd Jordan, en 2006, ni sa contribution durant la même édition de Sons d’hiver à Declared Enemy, le projet que Matthew Shipp a consacré à Jean Genet. William Parker était là, quand le quartet de David S. Ware Quartet tourna une dernière fois en 2007. On le vit aussi avec The Turbine ! en 2014. Et pour couronner le tout, il a régulièrement été invité à la tête de ses propres ensembles : les deux dernières fois, ce fut avec son quartet augmenté de James Spaulding et de Billy Bang en 2010, et avec son orchestre transculturel Universal Tonality en 2012. Il a longtemps supervisé à Sons d'hiver la soirée annuelle partagée avec le Vision Festival – sa propre institution alternative, à New York, depuis 1996. Il a publié, en langue française, l’un de ses recueils de pensées et d’histoires, le Sound Journal. Il a animé des ateliers pour jeunes musiciens, et concouru à des discussions publiques sur les rapports entre musique et engagement, art et politique, en présence notamment d’Akua Njeri et de Fred Hampton, Jr., la veuve et le fils du charismatique Black Panther. Il a participé à la création d’un colloque international sur l’improvisation… Le destin de William Parker se confond avec l’histoire contemporaine de la musique créative dans le Lower East Side, à New York, aux États-Unis, en Occident et ailleurs. Contrebassiste autodidacte et impénitent, disciple à ses heures de Wilbur Ware, de Jimmy Garrison ou de Richard Davis, il est aussi un joueur de trompette, de shakuhachi, de zintir, de guembri, de kora, de balafon, de dumbek, de gralle… William Parker a grandi musicalement dans les lofts de New York au milieu des années 1970, où il a adhéré à trop d’ensembles, depuis Muntu, Commitment et Other Dimensions in Music, pour qu’il soit possible ici de les recenser. Sur son parcours, il a souvent croisé la route de Bill Dixon, Don Cherry, Rashied Ali, Sunny Murray, Roscoe Mitchell ou Amiri Baraka. Jusqu’à ce que sa participation au Cecil Taylor Unit le fasse connaître sur la scène européenne, et que l’amitié qui le liait au contrebassiste allemand Peter Kowald, l’un des pères de la free music, lui ouvre les portes de l’Internationale des Improvisateurs. Cet homme comme les autres est d’abord et avant tout un rassembleur d’esprits et d’énergies. Il a parrainé le Vision Festival (dont il faut donner le nom entier : Vision for the 21st Century Arts Festival – Vision for a Just World), en redistribuant des forces accumulées depuis des années et des siècles dans la musique qu’il libère et la philosophie qu’il délivre.Extrait : « Je définis le musicien en décomposant le mot lui-même : le muse-physicien. Il y a à la fois l’aspect artistique, tous les mythes liés à la muse, et l’aspect scientifique du physicien. Car la musique n’a pas été inventée par l’homme, elle existait bien avant son apparition. Je pense à la définition que les Soufis ont donné de la musique : elle englobe toute la beauté sur Terre… La symétrie de la nature est grande ouverte, sa logique est fascinante. Quand vous écoutez les oiseaux, les chutes d’eau et les criquets, vous vous dites : « Maintenant, je sais d’où vient l’avant-garde ! » J’ai toujours dit que si vous pouviez suspendre un saxophone dans les airs et y faire souffler le vent, celui-ci ne jouerait pas du bebop ! Vous entendriez un son qui se dissipe, puis revient… vous entendriez le chaos et la beauté et la structure. N’est-ce pas ce que les musiciens dits d’avant-garde jouent ? Je m’inspire donc de cette beauté. La musique est faite de sons, et les sons de vibrations. Ces vibrations créent des tonalités qui sont comme des portes ouvrant sur un monde que l’on pourrait appeler le « Tone World ». C’est en visitant cet autre m onde que les hommes se découvrent, progressent et changent. » On pourrait comparer William Parker à un autre contrebassiste surdimensionné : Charles Mingus.

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Pour cette soirée d’ouverture exceptionnelle, William Parker propose deux programmes spécifiques avec deux de ses principaux ensembles.

IN ORDER TO SURVIVE William PARKER - contrebasse | COOPER-MOORE - piano | Rob BROWN - saxophone alto Hamid DRAKE - batterie

Voilà un quart de siècle qu’il convoque quand le besoin s’en fait sentir In Order to Survive, cellule d’intervention et d’alerte à géométrie variable où, à ses côtés et ceux des fidèles Rob Brown et Cooper-Moore, ont défilé le tromboniste Grachan Monchur III, le trompettiste Lewis Barnes, le saxophoniste Assif Tsahar, les batteurs Denis Charles et Susie Ibarra – et désormais Hamid Drake… Au programme ce soir : Criminals in the White House since 1776… Une série de compositions corrosives initialement conçues en 2001, après la douteuse élection de George Bush Jr., et récemment actualisées lors de l’alarmante élection de Donald Trump. Mais si l’histoire a une fâcheuse tendance à se répéter, la musique d’In Order to Survive aurait plutôt tendance à progresser contre vents et marées, à s’aventurer même dans un environnement hostile. On sait de quoi le quartet est capable, de quelles prouesses et de quelles apothéoses, passant d’une bouleversante berceuse à une profusion ahurissante de voix et de cris, semant et labourant des thèmes porteurs, rayant et polissant toutes les surfaces mélodiques sans jamais desserrer l’étreinte rythmique…. Au même titre que l’harmolodie d’Ornette Coleman, la musique de William Parker tend à réaliser l’utopie couvant sous les sources de chaleur humaine de l’orchestration, à la lumière des singularités, devant et derrière les densités de l’improvisation collective vécue comme une redéfinition du bien commun. Tonalités, timbres et rythmes se parent et se déparent comme autant d’axes d’un monde qui attend toujours sa transformation, qui la pressent déjà dans la musique.

WILLIAM PARKER NEW ORGAN QUARTET William PARKER - contrebasse | COOPER-MOORE - claviers | James BRANDON LEWIS - saxophone ténor Hamid DRAKE - batterie

On retrouvera les mêmes ou presque dans l’Organ Quartet, à ceci près que le jeune et fougueux James Brandon Lewis remplace l’acide et captivant Rob Brown au saxophone et, surtout, que Cooper-Moore passe à l’orgue soulful sur lequel il a longtemps officié à l’église. Leur programme, The Language of Cosmic Truth, en apparence plus éthéré, plus désinvolte, promet de faire un sort aux flambées fraternelles et aux grooves telluriques. Avec le ténor de James Brandon Lewis, William Parker fait claquer les portes et les fenêtres dans la Maison Musique. Avec l’orgue fantasque de Cooper-Moore, il déplace les meubles dans la Maison Musique. Avec la batterie surabondante d’Hamid Drake, il fait danser les jambes et les langues dans la Maison Musique. Leurs pouvoirs télékinésiques ne sont soumis qu’au jugement de l’émotion. Ne serait-ce pas, en puissance, l’accomplissement de tout ce vers quoi cette musique a toujours tendu : la parfaite égalité dans le plus grand partage ? Cette année, William Parker, citoyen du Tone World, est citoyen d’honneur de Sons d’hiver.

Espace Culturel André Malraux (ECAM) - 2, place Victor Hugo - 94270 Le Kremlin-Bicêtre ☎ 01 49 60 69 42 / www.ecam-lekremlinbicetre.com TARIFS : 20 € / 15 € ABONNÉ SONS D'HIVER + TR / 9 € moins de 26 ans M ligne 7 - arrêt Le Kremlin-Bicêtre. Le théâtre est à 5 minutes de la station. BUS lignes 47, 131, 185, 323 - arrêt Le Kremlin-Bicêtre métro VALOUETTE ligne 1 - arrêt Espace Culturel André Malraux ; ligne 6 - Hôpital de Bicêtre !A Porte d'Italie, prendre RD7 sur 650 mètres, direction Villejuif. À la hauteur de la station de métro, tourner à droite (avenue Eugène Thomas), puis 1re rue à gauche au feu (rue Jean Monnet). VELIB’ 2 stations à 150 mètres du théâtre PARKING GRATUIT (3 premières heures) au sous-sol du centre commercial Okabé (Attention : après 22h30, suivre fléchage sortie de nuit).

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Samedi 27 Janvier | 20h30 | Cachan ______Théâtre Jacques Carat

NAÏSSAM JALAL "QUEST OF THE INVISIBLE" / HAMID DRAKE / Création Naïssam JALAL - flûte, nay, voix, compositions | Leonardo MONTANA - piano Claude TCHATMITCHIAN - contrebasse Invité : Hamid DRAKE - percussions

Pour s’aventurer vers l’invisible, ils viennent tous d’ici et d’ailleurs, ils ont tous des identités multiples. Naïssam Jalal est née à Paris de parents syriens et a vécu au Caire et à Beyrouth. Leonardo Montana est né à La Paz de parents colombiens et anglais, mais il est brésilien et a grandi à la Guadeloupe. Claude Tchamitchian est né à Paris d’un père arménien et d’une mère française, et il a longtemps habité à Tanger avec ses grands-parents. Hamid Drake est né en Louisiane dans une famille afro-américaine, mais aussi choctaw, avant de s’établir à Chicago et dans le monde entier. Et autant d’origines n’épuisent pas le sujet, ne disent pas tout. Il y a aussi les chemins parcourus. Surnommée « The Lady Flute on the Groove » par Rémy Kolpa Kopoul, Naïssam Jalal a d’abord étudié réglementairement au Conservatoire et s’est dissipée avec la fanfare funk Tarace Boulba. Son insatiable curiosité l’a très vite conduite à Damas, où elle s’est initiée à la flûte nay au Grand Institut de Musique Arabe. Elle a prolongé ses recherches auprès du maître égyptien, le violoniste Abdu Dagher. Au Caire, elle a participé à la création de nombreux groupes et s’est produite dans tout le Proche-Orient avec le joueur de oud Hazem Shaheen… Lorsqu’elle revient en France, en 2006, riche de tant d’apports et d’influx, ce n’est donc pas pour « s’installer », mais pour rayonner. Pour continuer les traversées du miroir entre champs esthétiques. Comme le prouvent ses expériences avec l’internationale des rappeurs : le Libanais Rayess Bek, les Palestiniens Osloob et ceux de Katibeh 5, les Américains Napoleon Maddox et Mike Ladd… Du rap au jazz contemporain, en passant par le tango ou l’afrobeat, Naïssam Jalal se joue de toutes les catégories, auprès de la crème des musiciens africains de la scène parisienne, comme des grands noms du jazz français et international, et de la musique arabe. Sans oublier son quintet Rhythms of Resistance. Mais la quête de l’invisible ? Naïssam Jalal rappelle que la musique est le seul art qui ne repose pas sur le sens visuel, et qu’elle entretient une relation particulière au temps : elle est éternellement éphémère, constamment dépassée. Depuis toujours et dans toutes les régions du monde, elle a été le moyen artistique privilégié pour communiquer avec l’invisible, accéder à la transe et à l’extase mystique. Et la flûtiste s’en est nourrie, elle a fréquenté le dhikr de Cheikh Yassin Al Touhami au Caire, s’est imprégnée de l’univers du joueur de bansouri Hariprasad Chaurasia comme de la tradition gnawa du Maroc, où elle a séjourné à de nombreuses reprises, mais aussi du jazz mystique qu’ont pu initier des artistes comme Alice ou John Coltrane… « Je n’appartiens pour ma part à aucune de ces traditions, précise-t-elle. Pourtant, ma musique, qu’elle soit ou non liée à la présence de Dieu dans mon esprit, peut me mener et mener l’auditeur à une forme de transe dans l’oubli de soi. Dans ce nouveau répertoire, j’ai voulu aller plus loin dans la connexion à l’invisible, pour exprimer mon amour de la vie, ma reconnaissance envers cette force invisible qui m’a fait naître, qui me fait vivre, qui me lie aux autres, à la nature et au monde dans ce qu’il a de grand et de splendide. » Pour porter et transporter ce répertoire, Jalal, Montana, Tchamitchian et Drake se sont postés à la croisée des musiques mystiques extra-occidentales et du jazz modal. Le silence y possède une place centrale, le rythme mène toujours vers les formes répétitives et hypnotiques de la transe, parfois la voix vient prêter main forte aux instruments pour entrer en contact avec l’Invisible en le nommant, les thèmes sont d’une grande simplicité, ou d’une grande complexité. Une quête qui oscille entre contemplation et exaltation, silence et musique. Et qui s’affirme tout autant politique : « Aujourd'hui, dans un monde dirigé par l'argent, la place laissée à la spiritualité est toujours plus étroite. Par ailleurs, l'injustice grandissante des sociétés capitalistes et l'autoritarisme des différentes formes de gouvernements (des fausses démocraties aux dictatures les plus sanguinaires) poussent les hommes vers des visions toujours plus radicales de leurs identités et/ou de leurs religions. Une radicalisation qui elle aussi étouffe cette spiritualité salutaire dont nous avons besoin pour garder les bras ouverts, la connexion à l’invisible qui nous lie à l’autre. Il me semble donc essentiel de tout faire pour au contraire cultiver cette spiritualité dans cette forme artistique toute particulière qu’est la musique. »

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MIKE REED QUARTET + ONJ OLIVIER BENOIT "THE CITY WAS YELLOW: THE CHICAGO SUITE" / Création Mike REED - compositions, arrangements, batterie | Greg WARD, saxophone alto Tim HALDEMAN - saxophone ténor | Jason ROEBKE - contrebasse ONJ : Jean DOUSTEYSSIER - clarinettes | Alexandra GRIMAL - saxophone ténor | Hugues MAYOT - saxophone alto Fidel FOURNEYRON - trombone | Fabrice MARTINEZ - trompette, bugle | Sophie AGNEL - piano Paul BROUSSEAU - claviers | Éric ECHAMPARD - batterie Depuis sa création en 1986, l’Orchestre National de Jazz aura vu défiler un certain nombre de personnalités au poste de directeur artistique. Le mandat d’Olivier Benoit, onzième directeur de l’ONJ, se termine en 2018 sur une ultime dérive urbaine, en résonance transatlantique au cycle Europa qu’il a mis en place depuis 2014. Car si ce cycle s’est développé comme un road trip sonique circulant en Europe de ville en ville et de scène en scène, offrant à chaque étape un soundscape impressionniste/expressionniste, aux énergies créatrices de Paris, Berlin, Rome et Oslo, son point d’orgue se situera de l’autre côté de l’Océan Atlantique. C’est à l’issue d’un voyage à Chicago, organisé par l’ONDA en novembre 2016, qu’Olivier Benoit a imaginé ce projet inédit, conçu en concertation avec le réseau franco-américain The Bridge. Le guitariste a choisi de confier l’orchestre et l’écriture d’un programme à l’un des musiciens les plus emblématiques de la métropole du Midwest, pour une création kaléidoscopique au diapason des nombreuses facettes de la Windy City, rebaptisée Yellow City en référence aux couleurs que lui font prendre les lumières de la nuit : le batteur, compositeur et chef d’orchestre Mike Reed. Ce musicien- polytechnicien s’est progressivement distingué à travers une œuvre mêlant subtilement manières de faire chicagoanes et expérimentations tous azimuts, conscience historique et recherche affranchie. Soit le contrepoint exact, issu d’une autre branche du même arbre musical, d’Olivier Benoit, dont la démarche a toujours exploré ces territoires très peu répertoriés sur les cartographies officielles des musiques actuelles où le rock (pour le son et l’énergie), le jazz (pour l’interaction collective et la plasticité du geste musical), le domaine contemporain (pour le souci de la forme, la précision et la sophistication du langage), et l’improvisation libre non idiomatique (pour ses modes d’organisations horizontaux et sa fondamentale immanence) échangent leurs propriétés. Embrayant sur le thème de la découverte et de l’exploration d’un paysage humain et musical, d’une ville et de sa communauté de musiciens, Mike Reed a eu l’idée d’une suite tuilant de nouvelles pièces et certaines œuvres revisitées de compositeurs et d’ensembles phares de Chicago au cours des 40 dernières années. Œuvres tirées du "Chicago Real Book" qu’il a récemment supervisé en puisant dans les répertoires et les univers d’Hal Russel, Fred Anderson, Ed Wilkerson, Ernest Dawkins, Rob Mazurek, Ken Vandermark, David Boykin, Nicole Mitchell, Tortoise, Jim O’Rourke… Pour donner corps à cette suite, Mike Reed a appelé en renfort de l’ONJ les membres de son quartet post-bop de prédilection : People, Places & Things. La méthode de Mike Reed ? L’arrangement instantané et collectif à partir d’une série de modules construits, qui permet à chaque membre d’un orchestre de retravailler une matière première, quitte à la déformer. Le batteur est un fervent partisan de la musique incarnée, d’une structuration par les interventions individuelles et les interactions de groupe. C’est en respectant l’identité spécifique d’un ensemble et de chacun de ses membres, en leur permettant de se réapproprier les propositions de jeu, que cet ensemble en retour spécifiera la composition qui est offerte à ses manipulations et à ses remaniements. Une méthode héritée d’un travail de recherche sur les modes de construction élaborés par Sun Ra en répétition, et déjà utilisée sur Empathetic Parts, une précédente suite arrangée instantanément et collectivement par son ensemble Loose Assembly et leur invité spécial Roscoe Mitchell, au moyen d’une série de signaux et d’indices ouverts à l’interprétation. Cette création s’insère à sa manière dans un temps long qui, outre l’immense histoire musicale de Chicago, souvent illustrée à Sons d’hiver, a été scandé par les activités du réseau The Bridge depuis 2013. Projet réalisé en partenariat avec l'ONJ et The Bridge ______Mike Reed : Batteur, compositeur, chef d’orchestre et dévoué présentateur des arts à Chicago, Mike Reed s’est imposé comme une force constructive: créateur/directeur du Pitchfork Music Festival, où alternent conscious rap, rock alternatif, free folk, nu soul et musiques du monde ; co- responsable de la programmation du Chicago Jazz Festival, propriétaire et directeur du centre des arts de la scène Constellation, "serre" où fleurissent, à côté de la danse, du théâtre ou du cirque, le jazz, les musiques improvisées, la musique expérimentale et classique contemporaine, ainsi que du club plus intimiste, et repaire de pirates, Hungry Brain. Ses classes, Mike Reed les a faites au sein de l’Association for the Advancement of Creative Musicians, où il a fréquenté les pionniers Fred Anderson, Roscoe Mitchell et Wadada Leo Smith, et dont il a été vice-Président de 2009 à 2011. Avec des membres de la nouvelle génération de musiciens de l’AACM, Nicole Mitchell et Tomeka Reid, il a créé le trio coopératif Artifacts, qui est venu s’ajouter à ses propres formations : le quintet d’improvisation étendue Loose Assembly, l’octet Living by Lanterns associant jeunes musiciens créateurs de Chicago (tels Jason Adasiewicz ou Joshua Abrams) et de New York (tels Mary Halvorson ou Ingrid Laubrock). Mais c’est son quartet post-bop People, Places & Things qui a le plus tourné et enregistré, collaborant déjà avec de nombreux musiciens invités comme Julian Priester, Ira Sullivan, Art Hoyle, Craig Taborn ou Matthew Shipp… Autant de raisons qui font que, en 2010, Mike Reed a été désigné “Chicagoan of the Year” par le Chicago Tribune.

Théâtre Jacques Carat - 21 avenue Louis Georgeon - 94230 Cachan ☎ 01 45 47 72 41 / www.theatrejacquescarat.fr TARIFS : 20 € / 12 € ABONNÉ SONS D'HIVER + TR ! RER B - station Arcueil-Cachan BUS 162, 184, et 187 - arrêt Mairie de Cachan " À Porte d'Orléans, prendre N20 et suivre les panneaux Cachan centre ville puis Théâtre Jacques Carat PARKING GRATUIT les soirs de spectacles avenue Dumotel. Dans la limite des places disponibles. 4 Dimanche 28 Janvier | 16h | Choisy-le-Roi ______Théâtre Paul Éluard

URSUS MINOR invite CRESCENT MOON / Création Tony HYMAS - claviers | Grego SIMMONS - guitare | François CORNELOUP - saxophones baryton et soprano | Stokley WILLIAMS - batterie, chant Invité : Crescent MOON - rap

Ursus Minor invite pour ce nouveau projet le rappeur de Crescent Moon du groupe Kill the Vultures. Ce quartet, si on utilise le vocable jazz, ou groupe, si on utilise le vocable rock ou hip hop, aura quinze ans d’existence à l’occasion du concert de Sons d’hiver. Ursus Minor a été fondé en janvier 2003 pour une séance d’enregistrement à Paris suivi d’un double concert à Sons d’hiver. La longévité de cet orchestre international s’explique tant par l’originalité artistique et le désir qui réunit les musiciens. Pas simple dans les faits de faire se réunir régulièrement des musiciens vivant en France, Angleterre, États-Unis (Minneapolis), il faut donc une force artistique qui soude tout cela. C’est durant l’année 2000 que Tony Hymas, pianiste et compositeur, et Jean Rochard (producteur de nato) ont eu l’idée de cet ensemble qui pourrait accueillir des invités provenant de tout horizon musical. Avec Hymas, le saxophoniste François Corneloup, les guitaristes Jef Lee Johnson, Mike Scott et Grego Simmons, les batteurs Dave King et Stokley Williams en ont été le cœur. Musiciens de jazz ou de rock, de hip hop, poètes, chanteuses soul… Une musique riche de multiples influences, seule, pouvait réussir cette gageure. Une multitudes d’invités différents durant ces quinze ans : Boots Riley, Dead Prez, Jeff Beck, Ada Dyer, D’de Kabal, Spike, , Eyedea, deM atlaS, Desdamona, Dominique Pifarély, Le Bénéfice du Doute , Bernat Combi, Kristoff Krane, Eyedea, La Rumeur… Ursus Minor emprunte au jazz sa capacité sophistiquée à produire des compositions soignées et des improvisations collectives inouïes. Mais le flux musical du quartet se ressource en abondance et permanence aux influences énergiques, chaleureuses ou hyper-expressionnistes du funk, de la soul music, du rock et du hip hop. Ursus Minor réussit l’alchimie de toutes ses influences, c’est ce qui en fait à la fois son mystère et son intérêt artistique. L’orchestre déploie une musique qui sonne l’urgence face au monde et ses enjeux cruciaux à l’exemple de son dernier album « What Matters Now », dénonciation certes ici présente mais aussi urgence de joie, de dépassement heureux et utopique. Après tout, le nom d’Ursus Minor est le nom d’une constellation vue par Tony Hymas et Jean Rochard dans le beau ciel étoilé d’une nuit d’été dans les Pyrénées au festival de Luz Saint-Sauveur. Sons d’hiver s’est toujours appliqué depuis 2003 à suivre le travail de cet ensemble hors norme, audacieux et à la pertinence salutaire et indispensable. Cinq invitations à Ursus Minor furent donc données dans des contextes toujours différents en fonction des invités (2003, 2004, 2006, 2010, 2012). Pour ce nouveau rendez-vous, les Ursus Minor ont choisi un invité qui d’emblée éveille la curiosité et l’intérêt, intrigue et aiguise le désir : Crescent Moon. Rappeur de Minneapolis du duo Kill The Vultures*, il excelle pour commenter le monde des mégapoles urbaines. Impressions, sentiments et émotions content la beauté d’un monde désenchanté face au cauchemar contemporain. Son flow est fondé sur des rythmes lancinant et hypnotiques, des visions poétiques extrêmement travaillées se transformant en hallucinations fascinantes d’une grande habilité textuelle. Il est aussi à l’aise sur des rythmes chaloupés jazz-funk que sur des beats nets et directs. Tout cela promet une rencontre au sommet dont Ursus Minor a le secret. ______* dernier album paru : « Carnelian » 2015.

5 P.O.S with DJ ANDER OTHER / 1re en France P.O.S - voix | DJ ANDER OTHER - DJing

P.O.S est le nom d’artiste de Stephon Alexander, né à Minneapolis le 18 août 1981. La capitale du est l’une des villes nord-américaines les plus créatives dans de nombreux domaines musicaux. L’une des qualités de cette ville (formant avec sa voisine St Paul les Twin Cities, le long des berges du Mississippi) réside dans le fait que musiciens de rock, de folk, de jazz ou de hip hop s’y côtoient, se connaissent et travaillent souvent ensemble. La scène rap, notamment, y est particulièrement riche tel que le label Rhymesayers en apporte la preuve, ainsi que son festival, le Soundset Festival. Au début des années 2000, P.O.S fonde avec sept autres rappeurs, producteurs et DJs, le collectif hip hop Doomtree qui élargira encore la gamme d’expressions de ce qui se trame en ville… À l’origine, P.O.S écoute beaucoup de rock. Sa culture musicale est faite de punk, de hardcore, de grunge, avec des groupes comme Refused, Minor Threat ou Kid Dynamite. Il débute d’ailleurs son activité de musicien, à la fin des années 1990, comme chanteur et guitariste de groupes locaux tels Building Better Bombs ou Marijuana Deathsquads. Puis, il s’intéresse plus précisément au rap et, avec Doomtree, s’y consacre totalement. De cela naîtra une succession de disques passionnants dont « Ipecac Neat » et « Audition ». En 2009, le label Rhymesayers produit « Never Better », album marquant qui donne à P.O.S. une plus grande notoriété dans le monde du hip hop alternatif. Il participe alors à l’AfroPunk festival de Brooklyn, collabore au travail d’artistes comme Kristoff Krane ou Grieves. En 2012, il est malheureusement obligé d’arrêter ses activités artistiques pour raisons de santé. Obligé de quitter la scène musicale pour un temps, P.O.S. reprend les concerts petit à petit et, en janvier 2017 sort un formidable album : « Chill, dummy ». Qui l’amène à donner à Sons d’hiver son premier concert en France. Sa musique, que l’on peut donc caractériser d’afro-punk, est un subtil mélange de rock et de hip hop. P.O.S. soigne particulièrement les beats : quatre ans de travail pour les rythmes de « Never Better ». Les parties instrumentales sont assurées par un guitariste très rock et un dj très innovant. Les textes sont aussi particulièrement travaillés par cet artiste qui est une sorte de philosophe punk futuriste usant de chants puissants, voire hurlés, pour exprimer son propos radical. Ces bombes lyriques inspirées de son observation de la vie quotidienne peuvent surprendre par un ton âpre mais plein d’espoir. Dès lors, tout s’apaise, car P.O.S. porte une joie féroce, habitée d’une farouche envie de vivre. C’est cette fameuse rage de vivre qu’il recherche dans le rock et dans le rap. Sa musique peut se décrire par la formule : énergie + de la beauté + de la rage + de l’espoir.

Théâtre Paul Éluard - 4 avenue de Villeneuve Saint-Georges - 94600 Choisy-le-Roi ☎ 01 48 90 89 79 / [email protected] / www.theatrecinemachoisy.fr TARIFS : 20 € / 14 € ABONNÉ SONS D'HIVER + TR ! RER C - arrêt Choisy-le-Roi. Sortie côté Seine, remonter la passerelle et traverser la Seine, le théâtre se trouve à droite. BUS lignes 182, 103 - arrêt Pont de Choisy RER D - arrêt Créteil Pompadour + TVM - arrêt Pasteur " À Porte de Bercy, prendre A4, puis A86, direction Créteil et prendre sortie 23, direction Melun-Sénart. Au carrefour Pompadour, suivre S 9, puis Choisy-le-Roi sur la N186, au 7e feu, serrer à droite et tourner à gauche sous l'auto-pont. Le Théâtre se trouve tout de suite à droite.Ou sortir du périphérique quai d’Ivry, direction Ivry, puis direction Alfortville, passer le pont, tourner à droite, suivre la Seine rive droite jusqu’à Choisy-le-Roi. Dans Choisy, passer sous l’auto-pont, le théâtre est à droite.

6 Lundi 29 Janvier | 19h | Paris ______Columbia Global Centers

THE BRIDGE #14 Keefe JACKSON - saxophone ténor, clarinette basse | Dave REMPIS - saxophones alto et baryton Christine WODRASCKA - piano | Didier LASSERRE, Peter ORINS - batteries, percussions

Au commencement était la musique libre. Et le goût de l’aventure. Si vous vous êtes déjà demandé comment une nouvelle équipe de musiciens improvisateurs fait concrètement pour se stabiliser, alors même qu’ils ont décidé d’œuvrer dans l’instabilité, celle-ci vous attend au tournant. Car il s’agira de la première prestation d’un quintet international entendant se vouer et se dévouer à l’improvisation libre, totale et collective, et qui a de très sérieuses raisons pour cela. L’une d’entre elles serait que Keefe Jackson, Dave Rempis, Christine Wodrascka, Didier Lasserre et Peter Orins ont répondu à l’appel de The Bridge, réseau transatlantique qui met en relation improvisateurs d’ici et de là-bas, de France et des États-Unis, au gré de formations toujours mixtes et hybrides et dont Sons d’hiver est partenaire depuis son lancement en 2013. Une autre raison, non des moindres, est que pour ces cinq musiciens l’improvisation est une méthode et une philosophie. Quand la musique découle strictement des actions, interactions directes entre les joueurs, sans la médiation d’un leader d’une partition ou d’une structure, seules comptent les forces en présence et la création collective, à laquelle elles aboutissent incessamment au gré de leurs transactions in situ et en temps réel. Le fonctionnement interne, l’agilité fonctionnelle, d’un tel groupe d’individus, à la fois mobile, tactique et opérationnel, a certainement des résonances politiques, évoquant par exemple le concept d’intelligence en essaim mis en avant par Michael Hardt et Antonio Negri : on se singularise en s’éprouvant, en se sollicitant et en se bouleversant mutuellement, par réciprocité positive ou négative, en (se) jouant de tous les rapport de forces entre une pluralité de sujets reconnus comme tels. On (se) joue aussi de la répartition des rôles et des fonctions en exerçant un esprit critique et une imagination créatrice justement débordants : on invente et ajuste, construit, déconstruit et reconstruit ensemble et en permanence… Si l’interaction de groupe constitue elle-même la structure de la musique, ce sont donc les membres de ce groupe, les cinq forces en présence, qui peuvent le mieux nous renseigner sur ce qui nous attend au tournant. Dave Rempis et Keefe Jackson sont tous deux Chicagoans d’adoption et ils se côtoient fréquemment dans de multiples ensembles. Le premier est arrivé en ville en 1993, non sans avoir poursuivi une formation d’ethnomusicologique au Ghana, dont se ressent son Percussion Quartet où ses orageux saxophones soufflent sur la braise de rythmes intenables. Mais c’est au sein du Vandermark 5 qu’il s’est fait connaître, avant de se lancer dans ses propres projets comme The Engines, Ballister ou le trio qu’il forme actuellement avec Joshua Abrams et Avreeayl Ra. Sans compter son implication comme organisateur de concerts, dans cette lignée de musiciens activistes dont s’enorgueillit Chicago. Le second est arrivé en ville en 2001, et a presque immédiatement fait valoir son ténor rigoureux auprès de tout ce que la Windy City compte de flibustiers, de Jeb Bishop à Jason Adasiewicz, et de Mike Reed à Tomeka Reid. On peut l’entendre raisonner et déraisonner au sein des Fast Citizens, orchestre dont chaque membre est leader à tour de rôle, de son big band Project Project et de Likely So, septet de saxophonistes et de clarinettistes du Midwest et d’Europe centrale qui résulte du programme Chicago Luzern Exchange. Un autre Bridge… De l’autre côté, du côté de Toulouse et d’ailleurs, Christine Wodrascka a fait du piano une terre sauvage que l’on peut explorer mais pas coloniser. Toutes celles et ceux qui sont partis en expédition avec elle (Sophie Agnel, Raymond Boni, Jean-Luc Cappozzo, Jacques Di Donato, Hamid Drake, Jean-Yves Evrard, Fred Frith, Gerry Hemingway, Daunik Lazro, Joëlle Léandre, Paul Lovens, Ramon Lopez, Didier Petit, Bernard Santacruz, Fred Van Hove...) se souviennent encore d’une implacable expérience. Quant à Didier Lasserre et à Peter Orins, du côté de Bordeaux et du côté de Lille, s’ils jouent ensemble au sein de Trouble Kaze, c’est aussi parce qu’ils s’attirent comme des contraires : la présence de l’un se fait parfois à peine sentir, tant les lignes de tension qu’il ouvrage relèvent de contractions et de croissances extraordinaires, comme ont pu le constater ses partenaires Beñat Achiary, Jean-Luc Cappozzo ou Jean-Luc Guionnet, ou les membres de l’austère et brûlant trio qu’il forme avec Daunik Lazro et Benjamin Duboc, parmi tant d’autres. En comparaison, Peter Orins excelle à tordre et à détordre les rythmes avec Toc, formation free-rock progressive, comme avec les projets franco-vietnamien (Hué/Circum) ou franco-japonais (Kaze) auxquels il participe. D’autres Bridges… Jusqu’à Chicago où sa route a déjà croisé celle de Keefe Jackson et de Dave Rempis. Comme ce dernier d’ailleurs, Orins est autant actif qu’activiste, tête pensante de plusieurs hydres lilloises, dont les orchestres et collectifs Circum, le Crime et Muzzix. Les présentations sont faites. Ne reste plus qu’à entamer les débats et à se laisser porter ou emporter… The Bridge est soutenu par le Ministère de la Culture et de la Communication, la SACEM, le FCM, l'ONDA, la SPEDIDAM, l'ADAMI, l'Institut Français et Intencity ! www.acrossthebridges.org

! Concert suivi d'une rencontre avec les musiciens

7

Columbia Global Centers | Paris - 4 rue de Chevreuse - 75006 Paris http://globalcenters.columbia.edu/paris ENTRÉE LIBRE DANS LA LIMITE DES PLACES DIPONIBLES. RÉSERVATION CONSEILLÉE AU 01 46 87 31 31 M - ligne 4 - arrêt vavin 8 Mardi 30 Janvier | 20h30 | ARCUEIL ______Espace Jean Vilar

re CHAD TAYLOR / JAMES BRANDON LEWIS DUO / 1 en France Chad TAYLOR - batterie, vibraphone | James BRANDON LEWIS - saxophone ténor

Les fondamentaux : saxophone et batterie. Le(s) souffle(s) et le(s) rythme(s), la voix et la pulsation dans tous leurs états et dans toutes leurs dynamiques, l’esprit et le corps répartis entre les deux instruments bien sûr, body & soul. Deux hommes qui s’admirent mutuellement (et que l’on a déjà distingués parmi les jeunes prodiges du ténor et du drum set). James Brandon Lewis, parce que Chad Taylor a joué avec certains de ses héros saxophonistes : Fred Anderson et Roscoe Mitchell. Leur duo s’inspire d’ailleurs ouvertement de prestigieux précédents : John Coltrane et Rashied Ali, Dewey Redman et Ed Blackwell. Chad Taylor raconte quant à lui leur première rencontre, et comment James Brandon Lewis fit taire ses réticences, en un récit-vérité tout à fait révélateur de la manière avec laquelle se nouent parfois les liens les plus solides entre musiciens : « Quand j’ai d’abord entendu parler de James, par Cooper- Moore, je me suis montré prudent, voire sceptique… Je me posais quantité de questions. D’où vient-il au juste ? Quelles sont ses intentions ? Est-ce qu’il connaît l’histoire de cette musique ? Est-ce que ce gars peut vraiment jouer ? Il est un peu jeune pour jouer cette musique. Peut-être traverse-t-il juste une phase. J’ai compris que la seule manière d’en avoir le cœur net serait d’accepter de faire un concert en duo avec lui. Au cours des cinq premières minutes de jeu, j’ai obtenu des réponses à chacune de mes questions. James est de l’étoffe des musiciens vers lesquels j’ai été attiré toute ma vie : Fred Anderson, Matana Roberts, Nicole Mitchell, Jeff Parker ou Rob Mazurek. C’est un musicien créateur et un libre penseur, un original. Il a son propre son, une voix unique et une vision. Et depuis, chaque fois que nous nous sommes produits ensemble, nous avons pénétré dans des mondes qu’aucun de nous n’avait encore visité. James me tire toujours vers les sphères de créativité les plus élevées. La connexion à l’intérieur de notre duo s’est révélée si inspirante que nous avons décidé que ce ne serait pas une simple opportunité, ou un projet à part. À deux, nous formons un groupe. » James Brandon Lewis, désigné par Sonny Rollins en personne comme l’un de ceux qui importent aujourd’hui a un abattage digne de son auguste aïeul : ça roule, déroule, déferle, projette et élabore aussi, avec un dynamisme galvanisant, parfois comparable au flot et aux inflexions d’un MC. Plutôt qu’un crédo, Lewis a gardé de son éducation religieuse une forme d’idéalisme salutaire et un goût aussi sûr que soulful pour accompagner les possédées du gospel, telles les chanteuses Dorinda Clark Cole et Albertina Walker. Formé par Benny Golson, Charlie Haden et, surtout, Wadada Leo Smith, qui lui a fait appréhender le continuum de toutes les musiques créatives, et leur pouvoir transformateur, il s’est installé à New York en 2012 pour s’exposer avec William Parker et avec les improvisateurs liés à la scène du Vision Festival, dont Cooper-Moore. Prenant ses propres initiatives, fondant trio après trio, sa formule privilégiée, lançant avec le poète Thomas Sayers Ellis le collectif de musiciens et de poètes Heroes Are Gang Leaders, participant au groupe de recherche Dark Matter qui essaye de traduire en musique les phénomènes invisibles dont on repère néanmoins la trace grâce à leurs effets gravitationnels… Puis, il y a le batteur du Chicago Underground, que Pharoah Sanders, Charles Gayle, Jemeel Moondoc, Marc Ribot et donc Cooper-Moore, sur la Côte Est, se sont disputés depuis qu’il est arrivé du Midwest où il s’était formé auprès des grands noms de l’AACM (ainsi que de Joe Chambers, Lewis Nash ou Pheeroan Aklaff). Son crible de cadences cliquetantes sur les peaux, ses tresses de cymbales haletantes, règlent et dérèglent en permanence une horlogerie de virevoltes qui a peu d’équivalent. Un duo épiphanique.

9 CHES SMITH / CRAIG TABORN / MAT MANERI "THE BELL" Ches SMITH - batterie | Craig TABORN - piano | Mat MANERI - violon

Ce trio né du hasard et de la nécessité nous propose une musique rien moins que fascinante. Ce qui aurait dû n’être qu’une confrontation ponctuelle, entre improvisateurs se livrant à leur jeu favori, s’est révélée tellement prometteuse que leur association s’est instantanément cristallisée autour de son initiateur, Ches Smith, qui en raconte la genèse : « J'avais un plan à New York, on m'avait demandé de proposer quelque chose de différent. J'ai eu l'idée d'inviter Craig, et puis je me suis mis à réfléchir avec qui d'autre j'aimerais jouer, et c'est le nom de Mat qui s'est imposé. Voilà à quoi s'est limitée la conception du projet. Ça ne devait être que le concert d'un soir à l'origine... Je n'avais aucun désir de former un nouveau groupe à cette époque, mais la combinaison a tout de suite fonctionné. J'ai compris aussitôt que je devais continuer avec cet orchestre. Le premier concert était entièrement improvisé, mais à partir de ce moment-là j'ai commencé à écrire pour le trio. Mon idée était d'introduire le minimum d'écriture dans le processus. Je ne voulais pas entraver, de quelque façon que ce soit, le processus de l'improvisation – parce que ce qui se jouait spontanément entre nous était incroyable. » On ne se serait pas forcément attendu à une telle démarche, à un univers aussi introspectif, proche de la musique de chambre, de la part d’un batteur parmi les plus en vue de la nouvelle scène new-yorkaise, où il s’est fait connaître pour son style survolté – frappeur trépidant, imprégné autant de jazz que de punk et de metal, qui a chauffé à blanc des météorites comme Mr. Bungle ou Ceramic Dog (avec Marc Ribot), et propulsé certaines équipées sauvages de John Zorn, Darius Jones ou David Torn. Capable d’agir seul pour proposer une « musique micro et polytonale version hardcore », ou pour former These Arches, groupe abrasif de « skronk power free-jazz » avec Tim Berne, Tony Malaby, Mary Halvorson et Andrea Parkins. Ce serait pourtant négliger le fait que Ches Smith, personnalité complexe comme tout créateur qui se respecte, tient également Thelonious Monk et Terry Riley en haute estime – ce pourquoi, peut- être, il a imaginé avec We All Break une version jazz des traditions rythmiques liées au vaudou haïtien. Ou que, dans sa Californie natale, il fut l’élève de musiciens contemporains comme le percussionniste William Winant et les compositeurs Pauline Oliveros et Alvin Curran. Ou encore que ses participations au trio de Mary Halvorson et au Snakeoil de Tim Berne l’ont montré sous d’autres demi-jours, maître de toutes les demi-teintes. Une personnalité complexe qui s’est donc entourée de deux personnalités du même mauvais genre, mais de très haute musicalité : l’altiste byzantin Mat Maneri, fils du promulgateur de la microtonalité en jazz, et partenaire de Cecil Taylor comme de Matthew Shipp, de Barre Phillips comme de Joëlle Léandre, de Joe Morris comme de Kris Davis. Et Craig Taborn, certainement le pianiste le plus secret et le plus prisé de la scène new-yorkaise, dispensant avec parcimonie son art contrapunctique auprès de personnalités choisies, tels William Parker et Dave Holland, tels Roscoe Mitchell et Chris Potter.

Espace Jean Vilar - 1 rue Paul Signac - 94110 Arcueil ☎ 01 46 15 09 77 TARIFS : 14 € / 8 € ABONNÉ SONS D'HIVER + TR ! RER B - arrêt Arcueil-Cachan. Prendre la sortie située à l’arrière du train (sortie 1 - rue du Dr Gosselin) " À porte d’Orléans, prendre la RD920 (ex-RN20). Aux portes d’Arcueil, prendre à gauche, direction Arcueil-Laplace. L’espace Jean Vilar est situé en haut d’un escalier de pierre. 10 Vendredi 02 Février | 20h30 | Alfortville ______Le POC

PORTAL / HUMAIR / CHEVILLON TRIO Michel PORTAL - saxophone, clarinettes, bandonéon | Daniel HUMAIR - batterie Bruno CHEVILLON - contrebasse

Portal, Humair et Chevillon en concert, trois immenses balises à l’horizon du jazz, c’est une affiche qui sonne comme un appel à de somptueuses réjouissances musicales, vivantes et surprenantes. Comme l’incarnation même de ce que signifie « art musical ». Michel Portal et Daniel Humair ont à leur actif plus de cinquante ans de carrière, de coups de génie et de frasques. Une densité de rencontres et d’expériences tout simplement exceptionnelles au gré desquelles ils sont intervenus sur les fronts les plus avancés de l’invention et de la modernité artistique contemporaine. Ils appartiennent à la catégorie des "Giants of Jazz" et autres superlatifs qui ne suffisent pourtant pas à rendre compte de leur véritable stature, ni de la somme de musiques qu’ils portent en eux, qu’ils sont toujours prêts à offrir dans le jeu sans cesse recommencé de la rencontre live. Daniel Humair s’est installé à Paris à la fin des années 1950, commençant alors une série impressionnante de collaborations : Don Byas, Barney Wilen, Lucky Thompson, Dexter Gordon, Chet Baker, Jackie McLean, Eric Dolphy… Au début des années 60, il fonde un trio marquant avec Martial Solal. En 1968, c’est le fameux trio HLP avec Eddy Louiss et Jean-Luc Ponty. Il s’intéresse au free jazz en jouant avec Don Cherry ou Anthony Braxton… Et ce ne serait que le début d’une longue énumération, dans laquelle il ne faudrait certes pas oublier le trio Kühn/Humair/Clark, et l’esprit chercheur toujours éveillé qui a fait d’Humair un compagnon de toutes les nouvelles générations de musiciens : , Christophe Monniot, Tony Malaby, Bruno Chevillon, Vincent Peirani, Émile Parisien… Durant la même période, Michel Portal a jonglé avec la musique classique (Brahms, Mozart, Boulez, Berio, Kagel) et le free jazz (participant à l’album « Free Jazz » de François Tusques), sautant d’une création avec Karlheinz Stockhausen à un concert avec le Celestrial Communication Orchestra d’Alan Silva, créant en 1971 le Michel Portal Unit qui a marqué les esprits pour longtemps, se renouvelant sans cesse au fil du temps. Collaborations avec Bernard Lubat ou Louis Sclavis, rencontres avec Ambrose Akinmusire ou Hamid Drake, longs détours par Minneapolis. Portal témoigne d’une activité créative sans cesse en ébullition et en questionnements. Une activité créatrice qui porte en elle une philosophie de la musique : « La conversation, selon Daniel Humair. L’écoute totale qui résulte du non-positionnement de l’ego. Personne ne tire la couverture à lui. Chacun joue au service des autres, tient éveillé le réflexe de lui répondre. » Pour Michel Portal : « Je suis juste quelqu’un qui peut aller sur scène et inventer des situations »… Et en repensant à une rencontre avec Max Roach : « Quand il a fait une impro pour moi, j’avais l’impression que je volais. Chaque fois que j’étais un peu paumé, j’avais l’impression qu’il y avait un raz de marée qui arrivait et qui m’aidait à remonter la pente et repartir dans un autre voyage. C'est ce que je cherche en musique : les gens qui ont envie de donner. Il faut avoir plein de liberté en soi pour cela. » Tel Bruno Chevillon qui, lui, appartient à la génération des années 80. Soit le bassiste parfait pour dialoguer avec la forte musicalité et personnalité du batteur et du clarinettiste/saxophoniste. Son immersion totale dans des projets à grande portée artistique, auprès de Sclavis, , Elliot Sharp, Marc Ducret et bien autres, l’ont préparé à la confrontation avec ces deux « géants ». Son jeu sous haute tension rythmique et, en même temps, emprunt de décontraction, sa vélocité et sa réactivité en font l’interlocuteur parfait, avec l’élégance et la puissance de la batterie de Daniel Humair, et la fantaisie, l’insatiable quête de beauté de Michel Portal.

11 MIKE REED'S "FLESH & BONE" / 1re en France Mike REED - batterie | Greg WARD - saxophone alto | Ben LAMAR GAY - cornet Tim HALDEMAN - saxophone ténor | Jason STEIN - clarinette basse | Jason ROEBKE - contrebasse Marvin TATE - voix | Kim ALPERT - vidéo

Voici les faits : « Le 4 avril 2009, en République tchèque, mon quartet People, Places & Things s’est trouvé projeté en plein rassemblement néo-nazi. Nous venions à peine d’entamer une tournée européenne, et nous devions effectuer un changement de train dans la petite ville de Přerov pour nous rendre en Pologne. Des centaines de skinheads ont encerclé la gare et leur attroupement a explosé en bataille de rue avec des chiens dressés, des gaz lacrymogènes, la police anti-émeute, et nous : deux musiciens noirs américains et deux musiciens blanc américains essayant de sauver nos peaux. Huit heures plus tard, sous escorte policière armée, nous avons finalement pu quitter le pays… » Précisions qui ont leur importance : le changement de train à Přerov n’était initialement pas prévu, et inutile. Il avait pourtant été recommandé par un contrôleur possiblement complice. Un bataillon de skinheads réussit à monter dans le train suivant pour Varsovie et y traqua les musiciens « étrangers ». Il a fallu plusieurs années à Mike Reed (né en Allemagne, d’un père afro-américain et d’une mère indonésienne) pour surmonter ce traumatisme. Ce n’est qu’en septembre 2015 qu’il se sentit prêt à passer à l’action artistique. Avec son quartet et plusieurs invités, dont le chanteur/poète Marvin Tate dans le rôle de l’orateur onirique, le batteur de Chicago décida alors de s’extraire de son environnement habituel et d’aller trouver refuge à La Nouvelle-Orléans, au berceau de tant de musiques bienfaisantes, afin d’œuvrer à un programme retraitant créativement les données de cette sinistre affaire, ses tenants et ses aboutissants. Soit la question de la race, et la question de l’altérité, et la question de l’étrangeté – mais de l’étrangeté à soi-même comme de l’étrangeté pour les autres : ce que les autres pensent que nous sommes, ou représentons, et ce que nous-mêmes croyons être, nos luttes intestines pour correspondre à des modèles rassurants, qui nous « authentifient », nos contradictions... Et puis encore : la question de l’ailleurs dans lequel nous précipite parfois l’existence, la question du danger et de l’insécurité, réels et/ou ressentis… « Le fait que les idées nationalistes, avec leurs boucs émissaires habituels, soient en train de ressurgir sur une telle échelle est tout simplement terrifiant, diagnostique Reed. Le côté sensationnaliste de notre mésaventure ne résume pas tout. L’intolérance religieuse comme l’augmentation des attaques contre les populations de couleur, dans leurs rapports avec les forces de l’ordre, caractérisent bien sûr une nouvelle phase dans la longue histoire des inégalités en Amérique et partout dans le monde, mais je pense aussi que de nombreux jeunes gens de couleur et de Blancs progressistes ont éprouvé les affres de ce que c’est qu’être différent en découvrant les vérités profondes que les récentes élections présidentielles aux États-Unis ont dévoilées… Le croquemitaine avec lequel vos parents vous effrayaient existe pour de bon. » En novembre 2015, « Flesh & Bone » fut présenté une première fois à l’Art Institute of Chicago, avant que le septet ne passe en studio quelques mois plus tard et enregistre la matière d’un disque qui a fait l’objet d’un intense travail de montage et de condensation. Pour aller à l’essentiel et à l’incommensurable. On se demandera peut-être comment une musique peut rendre compte de tels événements et de telles extrapolations, en dehors des prises de parole toujours distanciées et décalées de Marvin Tate, à juste titre. C’est là qu’il s’avèrera utile de reconsidérer le propos même de People, Places & Things : situer la musique, telle qu’elle a été créée par certains hommes, en certains lieux, dans certaines conditions. Le quartet et ses invités ont développé une approche féline, scrutatrice et véloce, de ce que c’est que d’évoluer ensemble. Des circulations d’énergies. Chaque composition est abordée de manière constructive (on expose les thèmes qu’il y a à exposer, on tient les rythmes qu’il y a à tenir) et déconstructive (on cherche en elle ce qui pourrait la faire dévier et différer), sans l’ironie facile des post-modernes, plutôt avec les voluptés rauques et remuantes de Duke Ellington et de Charles Mingus. Et ce blues souverain… L’alto fuselé de Greg Ward, le ténor téméraire de Tim Haldeman, la clarinette basse emportée de Jason Stein et le cornet narquois de Ben Lamar Gay s’enlacent et s’écorchent. La contrebasse à souder de Jason Roebke et la batterie sèche et diffuse de Mike Reed forment un vivier de contrecoups et de relances. Tout est affaire d’arrangements communs, de réciprocités contradictoires, de l’imbrication des parties plus ou moins collectives à l’enchaînement des contributions plus ou moins individuelles qui les traversent, de l’emboîtement des séquences aux déboîtages des solos, pris à la volée. L’exercice de la liberté en musique, envers et contre tout – à l’opposé pratique des attroupements fascistes.

Biographie de Mike Reed. Voir concert du 27/01 (p.4) Avec le soutien de l'Onda – Office National de diffusion artistique. Dans le cadre d'une tournée en France. Le 30/01, Penn Ar Jazz, Brest / 01/02, Le Petit Faucheux, Tours

Le POC d'Alfortville - Parvis des Arts - 94140 Alfortville (Le Parvis des Arts se situe dans l'angle des rues Marcel Bourdarias et Joseph Franceschi) ☎ 01 58 73 29 18 / www.pole-culturel.fr TARIFS : 22 € / 17 € TR / 15 € ABONNÉ SONS D'HIVER ! RER D - gare Maisons-Alfort/Alfortville (5mn à pied) M ligne 8 - arrêt École Vétérinaire + BUS 103, 217 - arrêt Mairie " À Porte de Bercy, prendre Nancy Metz puis prendre A4. Sortie Porte de Charenton. Par la A86, prendre sortie Carrefour Pompadour. PARKING GRATUIT au niveau du 82, rue Marcel Bourdarias 12 Samedi 03 Février | 20h | Fontenay-sous-Bois ______Salle Jacques Brel

HUBERT DUPONT "EXPLORE, EXPLOVE" / Création Hubert DUPONT - basses, fx | Denis GUIVARC’H - sax, live electronics Tosha VUKMIROVIC - clarinettes, kaval, fx | Pierre MANGEARD - batterie | Patrick CHARTOL - VJ’ing

Avec le projet "Explore, Explove", Hubert Dupont ouvre un nouveau volet de son travail d’explorateur artistique, soucieux de tous les possibles et insoucieux de tous les interdits. Acrobate des nouveaux langages et des jeux de contraintes. Excellent contrebassiste apprécié sur la scène française et européenne, Hubert Dupont ne conçoit pas pour autant son rôle de musicien comme simple « instrumentiste ». Il compose, crée des orchestres, des espaces de rencontres entre différentes musiques, différentes pratiques artistiques, différentes traditions et modernités. S’il est bel et bien le contrebassiste d’un des orchestres français les plus respectés et les plus anciens (Kartet, avec notamment Guillaume Orti et Benoît Delbecq : 28 ans d’existence !), il mène des projets tous azimuts. En 2016, il crée "Golan" avec des musiciens palestiniens, syriens, tunisiens et français, après avoir créé "VoxXL" en 2013, avec le rappeur Mike Ladd et le griot Ibrahima Diassé. Dans "Explore, Explove", on part à la rencontre de l’univers virtuel de l’artiste plasticien Patrick Chartol pour un concert débridé ou un "show psychedelic-jazz". Chartol est passé maître dans la manipulation des images de synthèse, de la peinture et des vernis, des lumières et des plexiglas, des films qui se transforment, des photos qui s’animent de couleurs inouïes et des allers-retours entre ces techniques multiples. Son VJ’ing live est une expérience inclassable bénéficiant de sa pratique de peintre, d’images par ordinateur, de la vidéo et des musiques électroniques (compositions de musiques de films pour Assayas, Sébastien Simon…). La musique reste dans le sillon que trace Hubert Dupont depuis plusieurs années : jazz et musique de l’est méditerranéen mais aussi de l’électronique savamment dosée. D’où l’invitation donnée ici à Tosha Vukmirovic, musicien multi-instrumentiste (kaval, flûtes, clarinettes, saxophones) axé sur les musiques des Balkans et la musique improvisée, jouant notamment avec Bratsch et Macha Gharibian. Mais aussi aux jazzmen intrépides Denis Guivarc’h et Pierre Mangeard. Hubert Dupont et Patrick Chartol nous promettent ainsi un voyage-surprise poétique : des villes réelles ou fantasmées… La vie des océans ou celle des anneaux de Saturne… L’acoustique, l’infrabasse, le bruit furtif des clicks, les géométries improbables, les fulgurances des solistes, les nuances rigoureuses… se croisent, entrent et sortent, jaillissent de la pénombre. La musique d’Hubert Dupont trouve à l’écran le reflet de ses folles couleurs mélodiques, de ses règles d’or rythmique et énigmatique, de ses folklores imaginaires.

13 COMPAGNIE LUBAT DE GASCONHA "ENJAZZEMENT LIBRE" / LUTHER FRANÇOIS / ALFRED VARASSE Bernard LUBAT - claviers, voix, batterie | Fabrice VIEIRA – guitare, voix, bruits Thomas BOUDE - guitare | Jules ROUSSEAU - guitare basse | Louis LUBAT - batterie Raphaël QUENEHEN - saxophones Invités : Luther FRANÇOIS - saxophone ténor | Alfred VARASSE - percussions

Depuis quelques années, la Compagnie Lubat travaille en Martinique avec des artistes antillais. En mai et juin dernier, une résidence "Lyannaj", ou tournée-laboratoire, s’y est déroulée. La Cie Lubat y a joué avec des musiciens du cru, en tout lieu et tout terrain. Notamment avec le saxophoniste et flûtiste Luther François (dont l’association Nomad Martinique a permis cette rencontre) et le percussionniste Alfred Varasse (chanteur et joueur de tambour bélé). En retour, Bernard Lubat a invité les deux hommes à la 40e Hestajada d’Uzeste Musical en août dernier. Une réciprocité d’échanges entre les deux lieux du monde, qui s’est développée au cours des trois ou quatre dernières années. Cette rencontre est surtout le résultat d’une réflexion artistique et culturelle. Qui fréquente régulièrement l’Hestajada d’Uzeste Musical sait à quel point les débats philosophiques, théoriques et intellectuels y sont aussi importants que les concerts. L’un ne va pas sans l’autre. Les moments de réflexion et de musique s’éclairent mutuellement. Comme le dit Lubat : « Quand on pense, on improvise… penser, ça s’apprend… penser sur la pensée et s’y risquer à l’action émancipation. » À Uzeste, on croise des intellectuels comme Roland Gori, George Didi-Huberman, Fabien Granjon... En 2006, la 29e Hestajada avait même pour invité d’honneur l’écrivain Édouard Glissant. D’origine martiniquaise, le poète et théoricien du Tout-monde a développé des idées (dont la théorie de la créolisation développée dans ses ouvrages Poétique) en connivence totale avec les pratiques artistiques développées par Bernard Lubat. Pour Glissant, la créolisation « est la mise en contact de plusieurs cultures ou au moins de plusieurs éléments de cultures distincts, dans un endroit du monde, avec pour résultante une donnée nouvelle, totalement imprévisible par rapport à la somme ou la simple synthèse de ses éléments. » La création artistique se situe dans cette donnée totalement imprévisible et le jazz en est un exemple frappant. Imprévisible pour le plaisir qu’il donne du goût de la découverte, de l’inattendu et des voies de l’imagination retrouvée. Impro-Vision de l’improvisation. Entre Martinique et Uzeste (Nouvelle-Aquitaine), il est prévu d’autres chantiers en 2018 et 2019. Nous aurons donc la chance de pouvoir découvrir la teneure musicale de ces explorations musicales transatlantiques à l’occasion de cette 27e édition du festival Sons d’hiver. Avec Alfred Varasse, maître du tambour Bélé et du chant traditionnel depuis près de trente-cinq ans. Au début des années 80, il travaillait déjà avec des musiciens de jazz. Fait de rythmes issus de chants de travail (le grand son des travaux des champs), de rituels festifs et de veillées mortuaire, le tambour Bélé est habité par le quimbois (vaudou). Il parle d’Afrique et d’émancipation de toutes les formes d’esclavage, il parle de danses et fait danser, de rencontres et fait se rencontrer. Luther François, originaire de Sainte-Lucie, est l’un des musiciens de jazz caribéens les plus importants. Dans les années 1990, il avait d’ailleurs dirigé un big band magnifique : le West Indies Jazz Band. Son jeu de saxophone, ou de flûte, est d’une beauté exceptionnelle : qualité et gravité du son, velouté, soyeux ou énergique, tendu selon les situations ; inventivité mélodique d’improvisations où chaque note est le résultat d’un choix ressenti profondément… Luther François aime à dire que les grands du jazz, de Duke Ellington à John Coltrane, sont des modèles à écouter. S’ils sont inégalables, au moins tracent-ils une exigence d’excellence. Une excellence que Luther François partage certainement. Et que la Compagnie Lubat, dont on connaît le goût pour les musiques riches en contrastes et libres en tous sens, entretient depuis toujours…

Salle Jacques Brel - 164 boulevard Gallieni - 94210 Fontenay-sous-Bois ☎ 01 71 33 53 35 / www.fontenayenscenes.fr TARIFS : 19 € / 12 € ABONNÉ SONS D'HIVER + TR / 8 € moins de 25 ans ! RER A - direction Torcy, Chessy, Marne-La-Vallée - arrêt Val-de-Fontenay ou direction Boissy-Saint-Léger - arrêt Fontenay-sous- Bois, puis bus 124 - arrêt Hôtel de Ville. RER E direction Villiers-sur-Marne, Tournan - arrêt Val-de-Fontenay, puis bus 124 - arrêt Hôtel de Ville " À porte de Bagnolet, prendre A3 direction Charles de Gaulle - Lille, puis A86, direction Fontenay-sous-Bois. A la sortie 19, aller en direction de Fontenay centre. PARKING souterrain gratuit de l’hôtel de ville NAVETTE ALLER/RETOUR AU DÉPART DE PARIS (dans la limite des places disponibles) Renseignements festival : 01 46 87 31 31 14 e Dimanche 04 Février | 17h | Paris 7 ______Musée du quai Branly-Jacques Chirac

SYLVAIN LUC et les frères CHEMIRANI Sylvain LUC - guitare / Keyvan CHEMIRANI, Bijan CHEMIRANI - percussions

Ce trio est l’exemple même de la rencontre réussie entre un musicien de jazz et des musiciens de musique traditionnelle, le résultat d’un art épanoui de la rencontre. Les frères Chemirani ont à vrai dire une longue expérience des échanges entre cultures et traditions multiples. Ici, aucun des sempiternels clichés du jazz-fusion ou du jazz-word : il s’agit d’un véritable espace commun, inventé à l’occasion de ces échanges, avec les instruments qui la composent, leur richesse de timbres, et les individus qui les font rayonner. Les deux percussionnistes ont effectivement de qui tenir. Leur formation musicale a été assurée par leur père, Djamchid Chemirani, maître incontesté du zarb et lui-même élève du maître iranien Hossein Teherani. Technique, connaissance et amour de la musique traditionnelle leur sont prodigués par la pratique assidue du zarb et quelques autres percussions. Nourris d’une culture issue du monde méditerranéen et oriental, ils ont toutefois chacun leur langage propre. Keyvan, l’aîné, est fasciné par l’Inde (le « Paradis des percussionnistes » selon lui), et a travaillé avec Hassan Tabar (mansour iranien), Juan Carmona (flamenco), Kudsi Ergener (Turquie), Pandit Chatterjee (Inde), Erik Marchand (Bretagne)… Mais aussi les jazzmen Omar Sosa, Renaud Garcia-Fons, Louis Sclavis… Bijan Chemirani, lui, a joué avec Ross Daly (musique crétoise et ottomane), Hossein Oumouni (Iran), Socrates Sinopoulos (joueur de Lyra grecque) et les chanteuses Amina Aloaui (musique arabo-andalouse), Houria Aïchi (chant traditionnel du maghreb)… Pour le jazz, Bijan Chemirani a travaillé avec Chico Freeman, Albert Mangelsdorf, Jean-Marc Padovani… Pour former ce trio, Sylvain Luc pouvait donc compter sur deux musiciens très expérimentés, habiles en rencontres plurielles et musicales. Le guitariste a été élevé dans une famille de musiciens, explorant très jeune les possibilités de divers instruments à cordes. Jazzman virtuose, il construit des harmonies sophistiquées et de superbes lignes mélodiques improvisées. Il suffit d’écouter son album en duo avec Richard Galliano, « La vie en rose », en hommage à Édith Piaf et Gus Viseur, pour prendre la mesure de son talent. S’il a été accompagnateur et compositeur pour de nombreux grands noms de la chanson française, le monde du jazz l’a vu côtoyer Al DiMeola, John McLaughlin, Larry Coryell, Wynton Marsalis, Andy Sheppard, Michel Portal, Bernard Lubat, André Ceccarelli, Biréli Lagrène… C’est à partir d’une pratique totalement immergée dans l’acte de jouer pleinement que Sylvain Luc s’est rendu à la rencontre des frères Chemirani. Les sons des zarbs, daf, reqq, tambourin, saz (et aussi du cajon, transfuge du flamenco) provoquent ici des climats multiformes et chatoyants de timbres et de rythmes étourdissants. Le guitariste quitte le classique standard de référence du jazzman. Mise à nue, dépouillée de ces habits habituels, l’improvisation devient plus essentielle, plus brute. Les tonalités modales aidant, se développe une musique dans laquelle la guitare rivalise avec les frappés, les grattés et toutes les manières de faire vibrer les peaux. Lorsque le saz, oud oriental primitif, ajoute les torsades de ses cordes, la musique franchit encore un palier rythmique… Et au cœur de toutes ces variations, s’installe une musique méditative à l’élan spirituel…

15

Théâtre Claude Lévi-Strauss du musée du quai Branly - Jacques Chirac - 37 quai Branly ou 218 rue de l'Université - 75007 Paris ☎ 01 56 61 71 72 / www.quaibranly.fr

TARIFS : 15 € / 10 € ABONNÉ SONS D'HIVER + TR (le billet du concert donne accès aux collections permanentes et expositions en mezzanine le jour du concert) M ligne 9 - arrêt Alma Marceau (traverser le pont) BUS ligne 42 - arrêt Tour Eiffel ; lignes 82, 92, 63 - arrêt Bosquet-Rapp ; ligne 72 - arrêt musée d’Art moderne - Palais de Tokyo (traverser la passerelle) Parking payant accessible au 25 quai Branly. L’accès piéton se fait rue de l’Université, à l’orée du jardin. VELIB’ 1 station quai Branly et 1 station au niveau du 43 avenue Rapp

16 Mardi 06 Février | 20h45 | MAISONS-ALFORT ______Théâtre Claude Debussy

ROBERTO NEGRO PIANO SOLO

Apparu récemment sur le devant de la scène musicale, Roberto Negro ne cesse d’étonner. Ses rares concerts solo ont fait la démonstration d’une approche singulière qui a permis de découvrir l’immensité de son talent de pianiste. On le dit virtuose, tour à tour fougueux et délicat, pratiquant l’art de l’apesanteur ; on dit de lui que c’est un surdoué du toucher, qu’il possède un sens du rythme et du vertige, usant d’humour et de créativité… le tout prodigué avec générosité et émotion. Une certaine idée de l’idéal pianistique. Il faut encore ajouter à cela que Roberto Negro possède une connaissance étendue de nombreux langages musicaux, de Thelonious Monk au free et à la musique contemporaine. Une envergure qui recouvre plus d’un demi-siècle de modernité musicale… Ce talent-là, nous l’avons découvert à l’occasion de la création du collectif de musiciens Tricollectif en 2011. De cette aventure a déjà émergé le quartet La Scala, avec Théo Ceccaldi (violon), Valentin Ceccaldi (violoncelle) et Adrien Chennebault (batterie). Avide de rencontres, de renouvellements et d’expérimentations idiomatiques transgenres, Roberto Negro mène aujourd’hui de front une multitude de projets. Son tout nouveau trio Dadada, avec Émile Parisien et Michele Rabbia, vient d’enregistrer. Mais il y a aussi Garibaldi Plop, avec Sylvain Darrifourcq et Valentin Ceccaldi, le quartet Kimono avec Christophe Monniot… Negro joue avec Michel Portal, avec Louis Sclavis, avec Daniel Humair, et bien d’autres musiciens… Quelles que soient les configurations, il surprend toujours par sa capacité à jongler avec les situations, puisant dans son imaginaire un sens aigu de la répartie musicale, et dans le trésor de formes esthétiques enfouies sous ses doigts un vrai kaléidoscope…

17 DAVID MURRAY INFINITY QUARTET feat. SAUL WILLIAMS David MURRAY - saxophone ténor, clarinette basse | Orrin EVANS - piano | Nasheet WAITS - batterie Jaribu SHAHID - contrebasse Invité : Saul WILLIAMS - poésie, rap

S’il est un musicien dont la carrière a couvert toute l’étendue (l’infinité ?) du champ jazzistique, de la Great Black Music, un musicien à la fois résolument enraciné dans sa culture et radicalement ouvert sur le monde, c’est bien David Murray. Prolifique, le « Saxophone Man » (et clarinettiste basse) a tout fait, exploré toutes les formations, toutes les instrumentations, toutes les associations. Toutes les formations : d’un duo historique avec Randy Weston (le plus africain des pianistes afro-américains) ou mythique avec Milford Graves (le plus africain des batteurs afro- américains), à plusieurs grands orchestres codirigés avec Lawrence D. Butch Morris, James Newton ou Craig Harris, et à quelques opéras en collaboration avec Amiri Baraka, Ishmael Reed ou Blaise Ndjehoya, en passant par un célèbre octet qui a redéfini les lois du genre. Toutes les instrumentations : du trio rollinsien au quartet de clarinettes ou de saxophones, mais aussi en convoquant claviers, guitares et basses électriques pour déborder d’énergie free funk, pour passer une mesure que certaines de ses compositions tentent pourtant d’établir ou de rétablir. Ou encore en réunissant des ensembles à cordes qui semblent étaler les courants sous-marins autour de ce tourbillon fait homme ou saxophone. Ou enfin en multipliant les percussions pour que son ténor aux bottes de sept lieues puisse continuer de chalouper ou d’exorbiter… Toutes les associations : à travers ses hommages à Duke Ellington et à Nat King Cole, à John Coltrane et au Grateful Dead, à Pablo Picasso et à Alexander Pouchkine. À travers de multiples projets insistant, celui-ci sur la composante gospel, celui-là sur la composante r’n’b, ceux-là sur les composantes sénégalaises, martiniquaises, cubaines, avec Cassandra Wilson ou avec Taj Mahal, avec Tony Allen ou avec ?uestlove. À travers l’invitation permanente lancée aux first ladies du jazz contemporain, en duo Aki Takase, en « power trio » avec Geri Allen et Terri Lyne Carrington… Au cours de toutes ces aventures, à côté de tous ces ambitieux desseins, depuis quarante ans, David Murray n’a jamais renoncé à cultiver précieusement la forme canonique du quartet. « Jouer avec piano, contrebasse et batterie, c’est le meilleur moyen, le plus rapide et le plus direct, de faire entendre mes chansons, explique-t-il. J’aime les chansons ; certains musiciens n’aiment pas ça, ils préfèrent travailler les sons, directement. Je n’appartiens pas à cette école, même si je l’apprécie. Ce que j’aime, moi, c’est le format de la chanson : une forme musicale qui puisse se chanter. Le piano se charge de l’harmonie, la contrebasse joue un rôle à la fois harmonique et rythmique. Quant à la batterie, elle apporte cette splendeur qu’est le rythme, avec l’ampleur, l’énergie… c’est elle qui propulse le tout. Ces trois instruments forment un tout, c’est LA formation qu’il faut avoir. » L’Infinity Quartet d’aujourd’hui fait d’ailleurs référence à ses débuts, au Black Music Infinity que l’ex-batteur Stanley Crouch et lui animèrent en Californie au début des années 1970 – et dont ils conservèrent le nom pour ouvrir l’un de ces loft ou pays de cocagne qui agitèrent New York à la fin de la décennie. Après avoir déjà reçu en grandes pompes des chanteurs aussi différents que Macy Gray ou Gregory Porter, l’Infinity Quartet accueille l’incontestable figure contestatrice du spoken word dans tous ses états : Saul Williams. Le film « Slam », primé aux festivals de Cannes et de Sundance, l’avait d’abord rendu célèbre, en reprenant le récit de son ascension sur la scène du Nuyorican Poets Cafe dans les années 1990. Depuis, et qu’il se produise au Louvre et à la Maison Blanche ou qu’il agisse dans les maisons et les écoles de quartier, dans les hôpitaux et les prisons, qu’il côtoie ses alliés naturels ou culturels, tels Nas, Mos Def ou The Roots, tels Nine Inch Nails, Rage Against The Machine ou TV On The Radio, cet homme à l’affût s’efforce d’être l’homme de la liberté sur parole, recueillant l’héritage des preachers et des story-tellers du blues, comme de son prédécesseur et grand ami Gil Scott-Heron. Avec l’Infinity Quartet, sa parole incandescente devrait porter d’autant plus loin. C’est la poétique de l’espace.

Théâtre Claude Debussy - 116 avenue du Général de Gaulle - 94700 Maisons-Alfort ☎ 01 41 79 17 20 / www.theatredemaisons-alfort.org

TARIFS : 22 € / 19 € TR / 14 € ABONNÉ SONS D’HIVER

!RER D - arrêt Maisons-Alfort – Alfortville. Sortie Maisons-Alfort, aller en face puis tourner la 2e à droite avenue du Général de Gaulle. Le Théâtre se trouve sur le parvis de la mairie. BUS 181, 172, 217 " Depuis Paris, prendre l’A4, 1re sortie Maisons-Alfort, tout droit après le pont de Charenton. Le théâtre se trouve au carrefour avenue du Général de Gaulle et l'avenue de la République PARKINGS. 112 av. du Général de Gaulle / 31 av. de la République (SORTIE LIBRE) 18 e Mercredi 07 Février | 20h30 | Paris 14 ______Théâtre de la Cité internationale

SONS OF KEMET - saxophone, clarinette | Oren MARSHALL - tuba Seb ROCHFORD, Tom SKINNER - batteries

Traduit en français, le titre de leur dernier disque ressemble à une recommandation : Tâchons de ne pas oublier ce que nous sommes venus faire ici. Ici, dans l’histoire et dans le monde, puisque ces « fils de Kemet » ont repris à leur compte la théorie de l’anthropologue Cheikh Anta Diop selon qui l’Égypte fut à l’origine une civilisation noire dont le nom attesté, Kemet, proviendrait de la racine kem ou « noir » et désignerait la couleur de la peau de ses premiers habitants, originaires de la vallée du Nil (Shabaka Hutchings porte d’ailleurs le nom d’un pharaon-philosophe nubien). Depuis les années 70, le kémitisme désigne un courant de sensibilité dont les pratiques et les croyances s’inspirent de cette hypothèse, quitte à faire remonter l’ensemble des populations noires à la mythique tribu de Shabazz en proposant une vision à la fois panafricaine et postcoloniale de la communauté internationale. Pour le saxophoniste, adoubé par Marshall Allen du Sun Ra Arkestra, inspiré par les écrivains George Lamming et Octavia Butler, il s’agit aussi d’afro-futurisme, de « poétiser le passé, d’entraîner le passé dans le présent et le futur. Tous ces temps s’accordent. » Ici et maintenant, c’est donc aussi la vibrante scène londonienne ou afro-européenne qui est en train d’expérimenter une nouvelle fertilisation croisée entre soul jazz ou jazz spirituel, électro, grime, tuk de la Barbade, funk et afrobeat, calypso, improvisation libre, dancehall, musique indienne, drum and bass… L’Angleterre n’en est certes pas à son premier brassage depuis les expériences free et indo-jazz du saxophoniste jamaïcain Joe Harriott au tournant des années 60, puis avec les bouleversants réfugiés sud-africains des Blue Notes et du Brotherhood of Breath au tournant des années 70, et avec l’explosion de la diaspora caraïbéenne dans les années 80 et 90, non seulement de la Jamaïque, mais de Trinidad ou de la Barbade, tels Courtney Pine et les Jazz Warriors, Gary Crosby, Orphy Robinson, et tous ceux qui eurent une influence directe et décisive sur Shabaka Hutchings : Steve Williamson, Soweto Kinch ou Anthony Joseph. Il est important de le rappeler à une époque qui a la mémoire écourtée : une continuité existe, des lignées existent. Depuis 2003, avec comme farouche philosophie d’effacer l’artificielle division, construite de toutes pièces, entre ce qui serait expérimental et ce qui serait populaire, l’organisation Jazz Re:freshed a propulsé sur le devant de la scène, notamment lors des séances hebdomadaires enfiévrées du Mau Mau, un bar trendy du West , une nouvelle génération de musiciens. Parmi ceux-ci, Shabaka Hutchings, né à Birmingham, élevé à la Barbade, fait figure d’anti-leader, malgré tous les projets qu’il alimente : Sons Of Kemet depuis 2011, , Melt Yourself Down, Shabaka & The Ancestors… Ici et là, c’est aussi dans la musique, ou plutôt dans un certain rapport au monde qui se joue dans la musique, comme l’ont montré deux autres grandes sources d’inspiration : John Coltrane et Pharoah Sanders. « À un certain niveau, notre devoir est de donner au public ce qu’il veut. À un autre, c’est d’obliger ces attentes à s’ouvrir, pour y mettre autre chose. Et à un autre encore, c’est d’oublier tout ça, et de provoquer l’euphorie. » Sons of Kemet y parvient presque immanquablement, grâce à une formule mathématique et magique : un ténor dionysiaque qui change sans cesse d’angle d’attaque, jusqu’à créer l’illusion de distorsions et de téléportations, un tuba exorbitant qui papillonne, deux batteries aux rythmes entrelacés et survoltés qui se recalibrent en permanence. Le renvoi aux musiques de parade (ou aux formations plus récentes d’Arthur Blythe), contrebalancé par l’exploitation méthodique de modes mineurs, est fait pour galvaniser. La dépense d’énergie est quasiment d’ordre rituelle, mieux que dansante : exaltante. Il s’agit de vivre et de faire vivre une expérience. « Je considère Sons of Kemet comme un groupe qui reste libre d’explorer encore davantage de domaines. La musique est portée par la synergie entre nous, mais elle pourrait aller n’importe où. Nous ne sommes pas obligés de prendre une direction particulière. Nous pouvons laisser notre musicalité aller où bon lui semble. Quand nous jouons live, nous savons très bien quel sera le résultat final : l’hystérie collective. » Vous voilà prévenus.

19 SOWETO KINCH TRIO Soweto KINCH - saxophone, chants, composition | Nick JURD - basse Gregory HUTCHINSON - batterie

En l’espace d’une quinzaine d'années, Soweto Kinch est devenu l’un des musiciens les plus emblématiques de la nouvelle scène jazz londonienne. Il doit certainement sa notoriété aux multiples facettes avec lesquelles il aborde la musique. Tiraillé entre la culture urbaine dans laquelle il évolue, le hip-hop et l’amour du jazz qu’il aime, ses origines (Jamaïque et Barbade), son engagement politique, Soweto Kinch a su réaliser une synthèse dynamique de toutes ces dimensions artistiques, sociales et philosophiques. L’instrumentiste est indéniablement impressionnant – impressionnante aussi la liste des prix qu’il a obtenu en Angleterre – et convainc par un jeu tonique où swing et groove s’entremêlent. Admirateur de Wayne Shorter comme de John Coltrane, Soweto Kinch développe des idiomes embrassant toute l’histoire du jazz moderne, passant avec naturel du bop au free, du modal aux multiples figures des langages contemporains. S’il accompagne son jazz d’une prise de paroles hip-hop, c’est que sa pratique du rap reste fondée dans l’essence énergétique de cette musique. Au fil du temps, il en a fait une expression de plus en plus sophistiquée. Né en 1978 à Londres, Soweto Kinch a grandi dans les quartiers populaires de Birmingham – sources importantes de son inspiration. Dès ses premiers albums, (« Conversations with the Unseen » en 2003 et « A Life in the Day of B19 : Tales of the Tower Block » en 2006), il raconte sa ville, ses quartiers délaissés, dégradés, ses espoirs, et ses couleurs caribéennes. « The New Emancipation », en 2010, s’inscrit dans l’esprit de révolte de la black music. S’inspirant de work songs, il fait un lien entre la mémoire de l’esclavage et le monde contemporain fondé sur la cupidité, le libéralisme débridé (il égratigne au passage l’industrie musicale). En 2013, avec « The Legend of Mike Smith », il donne un tour plus mythologique à ses interrogations, avec des références à la Bible, à la Divine Comédie de Dante, toujours pour critiquer les impasses de la société du spectacle. En 2016, avec « Nonagram », sa musique aborde une construction à partir des séries mathématiques, rejoignant les préoccupations de Steve Coleman ou de Steve Lehman. Le chiffre 7 des sept péchés capitaux et le chiffre 9, sacré chez les égyptiens de l’antiquité, sont au cœur de son travail. Il ne s’agit pas d’ésotérisme mais de visions artistiques qui donnent souffle et consistance à la musique dont la marque de fabrique reste celle d’une urgence, d’une matière âpre et charnelle. La trajectoire artistique suivie par Soweto Kinch depuis plus de dix ans est faite non de ruptures stylistiques mais d’approfondissements musicaux successifs, dont chaque strate ou époque enrichit le discours. Le Soweto Kinch Trio d’aujourd’hui est un groupe dont les concerts sont de saisissants exposés de la richesse de la musique jazz, sans cesse recombinée aux enjeux contemporains.

Théâtre de la Cité internationale - 17 Boulevard Jourdan - 75014 Paris ☎ 01 43 13 50 50 / http://www.theatredelacite.com TARIFS : 24 € / 14 € ABONNÉ SONS D'HIVER+ MOINS DE 30 ANS / 11 € INTERMITTENT+ DEMANDEUR D'EMPLOI + ÉTUDIANT M ligne 4 - arrêt Porte d'Orléans. !RER B - arrêt Cité Universitaire BUS 21, 27, 88 T3A. Arrêt Cité Universitaire. VELIB’ 20 Vendredi 09 Février | 20h30 | Villejuif______Théâtre Romain Rolland

"HA NOI" DUO & FRIEND Nguyên LÊ - guitare | Ngô HÔNG QUANG - instruments traditionnels, chants Prabhu EDOUARD - percussions

Les innombrables rencontres entre jazz et musique traditionnelle offrent la possibilité d’écoutes inédites, de redécouvertes de langages musicaux dépoussiérés, en difractant et recomposant les espace-temps historiques et esthétiques. La guitare électrique et les laptops, symboles patentés de notre modernité, tiennent ici la dragée haute au chant traditionnel multi-phonique, à la vièle Dàn Tre et son résonateur vocal, au Dàn Nhj (vièle à deux cordes), au Dàn Moi (guimbarde), au Dàn Tinh (vièle à trois cordes) et au Dàn Bau (monocorde)… Pour réussir ce mariage des époques et des sensibilités, tout en préservant la continuité des transmissions, il fallait deux grands musiciens : Nguyên Lê et Ngô Hông Quang. Nguyên Lê est un acteur de la scène jazz depuis 1983, lorsque son groupe Ultramarine gagna le premier concours de Jazz de la Défense, reconnaissant d’emblée son originalité. Guitariste de l’ONJ, Nguyên Lê a ensuite joué avec Louis Sclavis, Marc Ducret, Johnny Griffin, Carla Bley, Courtney Pine, Quincy Jones… Son jeu est imprégné des influences les plus diverses, venues du rock (Jimi Hendrix bien sûr, mais aussi le rock progressif des Pink Floyd : musiciens auxquels il a d’ailleurs rendu hommage sur deux superbes albums). Venues des musiques du monde aussi, un terrain d’explorations approfondies : Afrique, Maghreb, Turquie (Safy Boutella, Kudsi Erguner). Né à Paris de parents vietnamiens, double culture aidant, prisant le jeu créatif des identités multiples dont notre culture contemporaine est porteuse, Nguyên Lê explore depuis des années les rapports entre musique vietnamienne et improvisation jazz (notamment au gré de cinq albums réalisés avec la chanteuse Huong Thanh). En 2017, avec la parution de son dix- huitième album « Hà Nôi », il développe une collaboration riche et inventive avec Ngô Hông Quang spécialiste des instruments traditionnels. Professeur au conservatoire de Hà Nôi, musicien issu de la génération post-guerre du Vietnam, Ngô Hông Quang fait partie de ces musiciens traditionnels d’aujourd’hui, ouverts sur les cultures du monde entier. Ici, la modernité ne s’oppose pas à la tradition, mais compose une dynamique originale avec elle. C’est pour cela que les deux hommes n’oublient pas d’interpréter à leur manière quelques morceaux traditionnels, même si "Hà Nôi" est un projet essentiellement constitué de compositions originales. Se développe une magie particulière, celle d’entendre une mélodie écrite par un jazzman et déformée par les inflexions d’instruments venus d’ailleurs ou, à l’inverse, une composition traditionnelle se métisser au jeu soutenu de guitares improvisatrices, portées par les rythmes de ragas indiens qu’impulse Prabhu Edouard. Le blues même n’est pas loin. Voix gutturales ou délicates et aériennes se mêlent à des sons hendrixiens ou à du Miles Davis électrique des années 80. Cette musique est d’une richesse inouïe, une sensation d’espace et de spiritualité s’en dégage voluptueusement. Est-ce vietnamien, jazz, traditionnel, blues, indien, africain, écrit ou improvisé ? Tout cela. Comme avec des fils de soie, les cultures tissent une beauté complexe et multiple.

21 OMAR SOSA & JACQUES SCHWARZ-BART "CREOLE SPIRITS" Omar SOSA - piano, Fender Rhodes, electronics, chants | Jacques SCHWARZ-BART - saxophone ténor Martha GALARRAGA - chants | Moonlight BENJAMIN - chants Gustavo OVALLES, Claude SATURNE - percussions

Creole Spirits dévoile les contrastes de la musique sacrée, entre santeria cubaine et vaudou haïtien, celle qui accompagnait déjà les esclaves dans les cales des bateaux. Musique spirituelle s’il en est, regorgeant d’une énergie vitale et brûlante. Avec ce sextet, Omar Sosa, leader d’un jazz inspiré de la santeria, et Jacques Schwarz-Bart, figure de proue d’un jazz possiblement vaudou, défendent une créolité chargée d’histoire et de mystères. Jacques Schwarz-Bart s’en explique : « La musique sacrée est le seul héritage que les esclaves ont conservé à travers le périple de la traite négrière. Cette musique a maintenu un dialogue entre l’Afrique et ses diasporas qui ne s’est jamais interrompu. Si bien que les prêtres Santero peuvent encore aujourd’hui parler la langue des ancêtres avec leurs homologues béninois, mais aussi brésiliens ou haïtiens. Ces chants innombrables célèbrent les mêmes divinités sous des noms souvent identiques à l'original. Ils constituent une nouvelle bible, une bible musicale, qui est aujourd’hui le socle sous-jacent de la civilisation du nouveau monde. Cette bible, jusqu’ici restée à usage interne, et à travers le langage du jazz, nous souhaitons pouvoir la partager avec le monde. C’est cet héritage que nous avons reconnu chez l’autre, Omar et moi. De ce fait, notre dialogue a commencé bien avant notre rencontre, et je dirai même bien avant notre naissance. » Pour ce faire, les deux leaders se sont entourés de quatre musiciens exceptionnels, deux sont représentants de la Santeria et deux du Vaudou. La Cubaine Martha Galarraga a été pendant cinq ans la chanteuse principale du Conjunto Folklorico National. Elle est spécialiste des chants Yoruba, Congo, Arrarà, Rumba, Son, Mambo… traditions que son père, le maître Lazaro Galarraga, fondateur du Conjunto Folklorico, lui a transmise. La prêtresse vaudou Moonlight Benjamin maîtrise quant à elle à la perfection chants et rites traditionnels haïtiens, musique qui porte la force de la terre, cette force séculaire d’Haïti. Les voix et les chants des deux chanteuses se combinent à merveille et fascinent par leur puissance évocatrice, de la complainte à la transe. Le batteur Claude Saturne, originaire de Jacmel à Haïti, au tempo souple et polyrythmique, a appris auprès des maîtres tambours des cérémonies vaudous les multiples facettes des rythmes de rituel. Le percussionniste Gustavo Ovalles, après des études au conservatoire de Caracas, a travaillé les musiques afro-cubaines et afro-vénézuéliennes, exploré les traditions amérindiennes dépositaires de nombreuses techniques de percussion. La puissance rythmique de cette section de tambours est unique et jubilatoire. Omar Sosa et Jacques Schwarz-Bart peuvent alors insuffler toutes les palettes de couleurs musicales propres au jazz. Le pianiste, grand connaisseur de la culture Yoruba, a acquis depuis les années 1990 une reconnaissance mondiale grâce à sa virtuosité virevoltante, son sens subtil de l’improvisation et des harmonies chatoyantes. Le saxophoniste d’origine guadeloupéenne, formé à la scène néo-soul et jazz new-yorkaise durant ces mêmes années, au langage à la fois précis et lyrique, est évidemment envoutant… L’intensité émotionnelle du projet Creole Spirits s'inscrit ainsi au cœur des traditions afro-caribéennes et de leur vitalité. Une musique qui respecte la force sacrée des rites. Le concert suit la structure d’une cérémonie vaudou et santeria, sélectionnant les chants qui correspondent aux mêmes divinités dans les deux traditions. Une symbiose riche en contrastes passe des prières contemplatives à la transe absolue. La musique sacrée des esclaves nous convoque à une réflexion sur notre monde contemporain et à ses intérêts égoïstement matérialistes. Le sacré rappelle qu’il existe des valeurs supérieures à la médiocrité utilitariste. Le sacré de l’art qui porte en lui l’échange et le partage du sensible humain.

Théâtre Romain Rolland - Scène Jacques Lecoq - 18 rue Eugène Varlin - 94800 Villejuif ☎ 01 49 58 17 00 / www.trr.fr

TARIFS : 19 € / 12 € ABONNÉ SONS D'HIVER + TR M ligne 7 - arrêt Villejuif Paul Vaillant Couturier ! À Porte d’Italie, prendre N7, direction Villejuif puis Villejuif Centre-Ville. AUTOLIB' Une station à 50 mètres du théâtre. 22 Samedi 10 Février | 20h | Vitry-sur-Seine______Théâtre Jean-Vilar

SCLAVIS / PIFARÉLY / COURTOIS TRIO Louis SCLAVIS - clarinettes, saxophones, composition | Dominique PIFARÉLY - violon Vincent COURTOIS - violoncelle

Impossible de rester indifférent à l’écoute du trio Sclavis/Pifarély/Courtois. Ces trois-là, complices jusqu’au bout des ongles et des sons, s’entendent à souhait pour développer une belle connivence et nous bouleverser de manière à la fois tendre et paisible. Leur programme "Asian Fields Variations" se situe dans la continuité de cet ailleurs des grands espaces qu’évoquait déjà le "Silk and Salts Melodies" de Louis Sclavis. La musique du trio respire et, par une éloge de la lenteur, donne le temps d’éprouver la délicatesse des sens. Même dans le cas du thème enjoué Asian Fields, les trois musiciens distillent, disséminent une douce magie, celle qui nous fait palper l’air, le ciel, les ondes du son se propageant dans des territoires immaculés. On pourrait se dire : voilà une musique improvisée qui se ressource au meilleur de la musique contemporaine ou baroque occidentale, brodant aussi sur des musiques traditionnelles du monde et de nulle part. Ce serait juste. L’essentiel cependant suggère une dimension poétique, élégiaque parfois, comme la quiétude et la sérénité que nous ferait éprouver le monde tel qu’il devrait être. Poétique et traversé de méditation, d’écoute respectueuse, de contemplation. Élégiaque : parce qu’il est tout simplement impossible d’entendre tant de beauté, d’intensité esthétique, et de penser au monde réel d’aujourd’hui dans sa course folle à l’autodestruction. « Asian Fields Variations » ou la beauté contre l’horreur… On songe à ce qu’avait écrit Louis Sclavis : « Ceux qui veillent la nuit, ceux de partout et de toutes sortes, ce sont ceux qui éteignent des brasiers aux odeurs nauséabondes dans certaines nuits du monde. » Sclavis, Pifarély et Courtois sont au cœur de la musique créative française depuis plus de trente ans. Pifarély et Sclavis collaborent sur de nombreux projets depuis les débuts même du Sclavis Quintet et l’album « Chine » en 1985 (avec déjà l’Asie comme source inspiratrice). De leur côté, Pifarély et Courtois jouent en duo depuis les années 1990. Et le violoncelliste a rejoint le clarinettiste pour des projets musicaux liés au théâtre à la fin des années 90. Entre temps, Sclavis et Pifarély ont créé l’Acoustic Quartet (déjà une musique improvisée chambriste), Vincent Courtois a participé à l’album de Louis Sclavis « L’affrontement des prétendants » (1999), puis à « Napoli’s Walls », hommage à Ernest Pignon Ernest (2003). Et Pifarély a quant à lui participé au sextet « Ellington On The Air », comme à « Les Violences de Rameau »... On ne compte plus les collaborations mutuelles entre ces trois musiciens ! Leur trio coopératif a été créé il y a une quinzaine d’années. Il a été reconstitué en 2013 pour une rencontre avec la pianiste Aki Takase et, depuis, Sclavis/Pifarély/Courtois ont renouvelé leur répertoire pour nous offrir ce bouleversant « Asian Fields Variations ».

23 STEVE LEHMAN "SÉLÉBÉYONE" / 1re en France Steve LEHMAN - saxophone alto, compositions | HPRIZM - spoken word, electronics Gaston BANDIMIC - spoken word | Maciek LASSERRE - saxophone alto | Carlos HOMS - claviers Chris TORDINI - basse électrique | Damion REID - batterie

Sélébéyone, en wolof, signifie jonction ou confluence – confluence de courants rapprochés par la nécessité naturelle (les accidents du relief) ou par la nécessité humaine (les aléas du destin) mais qui, une fois tressés, forment une nouvelle entité et redirigent les flux, les énergies, les bonnes fortunes. Ici, c’est bien d’une confluence de langues parlées et rappées (le wolof et l’anglais), d’idiomes musicaux et de textures sonores et (le jazz contemporain, le hip- hop new-yorkais ou dakarois, le sound design et les traitements électroniques) et d’origines culturelles (nord- américaines, françaises et sénégalaises), qu’il s’agit. Et sous une forme urbaine exacerbée qui nous parle de la Mega- City de demain, à cheval entre les continents… Tout a commencé en 2006, quand le saxophoniste Maciek Lasserre s’est rendu à New York pour étudier avec Steve Lehman. En retour, en contre-don, le premier fit découvrir au second, déjà porté sur ce domaine de recherche, la nouvelle scène hip-hop sénégalaise à laquelle il était lié, notamment le duo Da Brains. Et de même que Lehman participa au premier disque de Lasserre, en 2011, Lasserre accepta de rendre la pareille à Lehman pour approfondir leur jonction. Première confluence : on laisserait filer leurs sinueux saxophones s’insinuant partout, tels des affluents. Seconde confluence : on engagerait l’un des rappeurs montants à Dakar, Gaston Bandimic, et on l’associerait à l’une des valeurs sûres de l’underground rap de la Côte Est, HPrizm (alias High Priest), le cofondateur d’Antipop Consortium, déjà habitué aux confrontations avec les musiciens créateurs (tels Wadada Leo Smith, Matthew Shipp ou Jamaaladeen Tacuma). Bandimic et HPrizm étant soufis, comme Lasserre, leurs flots charrient avec emphase, avec rage, et avec recueillement aussi, l’évolution contemporaine du mysticisme musulman comme la situation politique au Moyen-Orient, et toutes les problématiques des identités multiples et collectives dans un monde difficilement post-colonial. Troisième confluence : on dédoublerait la section rythmique entre un trio formidablement compact au piano, à la contrebasse et à la batterie. Damion Reid fait partie de cette nouvelle génération de batteurs capables de faire sonner leurs peaux comme les pads d’un MPC. Les sons étant mixés par Andrew Wright, connu pour son travail avec Kendrick Lamar, et ami d’enfance de Lehman. Résultat : la parole fond comme un oiseau de proie, les harmonies ondulent au gré de sifflants solos de saxophones et de samples résiduels, les rythmes hachurés et cassants ralentissent et accélèrent simultanément, jouant avec un étourdissant principe d’incertitude, entre drum set et drum programming… Tout est tellement intriqué qu’il n’est parfois plus possible de distinguer l’acoustique de l’électronique, l’organique du machinique, le symétrique du dissymétrique… « Le hip-hop est comme n’importe quel autre genre musical, précise Steve Lehman. On y trouve de farouches personnalités, des individus davantage orientés vers le marché, et toute une gamme dans l’intervalle. Pour ma part, j’ai toujours gravité vers des artistes comme Company Flow, MF Doom, Pharoahe Monch, Freestyle Fellowship et Antipop, des artistes qui essayent vraiment d’innover à tous les niveaux. Sélébéyone tâche de se couler dans ce moule. Je pense que, indépendamment des milieux musicaux – le jazz, le rap, le classique – la manière avec laquelle nous travaillons le rythme, l’harmonie, le timbre et la forme compositionnelle est aussi singulière et élaborée que dans n’importe quoi d’autre que j’ai fait. ». De fait, celui que le New York Times a qualifié de « penseur musical à la pointe, avec la réputation d’avancer de pied ferme dans le futur », récemment nommé professeur au California Institute of the Arts, ne cesse de s’aventurer entre les genres, de puiser à différentes sources. Celles de ses professeurs Jackie McLean, Anthony Braxton, George Lewis et Tristan Murail. Celles de ses partenaires Vijay Iyer, Tyshawn Sorey, Meshell Ndegeocello et Jason Moran. Celles de son octet all-stars réinventant la musique spectrale, ou de son programme de compositions pour orchestre de chambre. Steve Lehman, à la confluence.

Théâtre Jean-Vilar - 1 place Jean-Vilar - 94400 Vitry-sur-Seine ☎ 01 55 53 10 60 / www.theatrejeanvilar.com TARIFS : 20 € / 12 € ABONNÉ SONS D'HIVER + TR !RER C - arrêt Vitry-sur-Seine, puis bus 180 - arrêt Hôtel de Ville-Roger Derry M ligne 7 - arrêt Porte de Choisy, puis bus 183 - arrêt Hôtel de Ville ; ligne 7 arrêt Villejuif-Louis Aragon, puis bus 180 - arrêt Hôtel de Ville ; ligne 8 - arrêt Liberté, puis bus 180 - arrêt Hôtel de Ville - Roger Derry "Prendre la RD5 à partir de la Porte de Choisy (sorties Bd périphérique : Porte d’Ivry ou Porte d’Italie), puis aller tout droit jusqu’à l’Hôtel de Ville, après la Place de la libération (statue Dubuffet). Le théâtre est situé juste en face. PARKING gratuit sous l’Hôtel de Ville les soirs de spectacle NAVETTE ALLER-RETOUR DEPUIS PARIS (dans la limite des places disponibles) Renseignements théâtre 24 Mardi 13 Février | 20h | Ivry-sur-Seine______Théâtre d'Ivry-Antoine Vitez

TIM BERNE "BIG SATAN" Tim BERNE - saxophone alto | Marc DUCRET - guitare | Tom RAINEY - batterie

Il faut les voir, live, pour les croire. De Big Satan, on s’est plu à dire que si le jazz était un parc d’attraction, ce trio-là serait son grand huit, sa sensation forte. En comparaison, les groupes de métal se la joueraient faciles, et ceux d’improvisation s’afficheraient sans humour. Tout ça pourquoi ? Parce que, indéniablement, incroyablement, le saxophoniste, le guitariste et le batteur maîtrisent à l’extrême l’art de la collision – entre composition et improvisation, entre aplomb et effarement, entre matière grise et instinct. Leur inventivité est phénoménale, leur entente diabolique – et c’est d’ailleurs de cet état de fait que vient le nom du trio. « Jouer de la musique avec Marc Ducret et Tom Rainey est une expérience unique et ahurissante, rapporte Tim Berne. Voilà 29 ans que Marc et moi jouons ensemble, et nous découvrons encore de nouvelles choses. Voilà 36 ans que Tom et moi jouons ensemble, et c’est toujours une aventure époustouflante. Il y a une telle alchimie entre eux qu’ils peuvent aller n’importe où. Et ils aiment particulièrement prendre des risques – ce qui me précipite au cœur du vortex à chaque fois. Parce que chaque fois que nous nous retrouvons, c’est comme un nouveau groupe. » Un nouveau groupe de vingt ans très exactement cette année, sachant que ces trois-là se sont également fréquentés ailleurs, principalement dans l’une ou l’autre des nombreuses formations du saxophoniste. Ducret et Rainey ont fait partie de Science Friction ; le premier a participé à Caos Totale et à Bloodcount ; le second à Paraphrase. Une longue histoire commune dont Big Satan représente en quelque sorte le quartier libre, administré à trois. Ces trois-là, on ne devrait plus avoir à les présenter. Tim Berne, c’est ce brisant saxophoniste alto fauteur de troubles musicaux qui vouait un amour immodéré pour le rhythm’n’blues et la soul de Stax et de Motown, et qui découvrit « Dogon A.D. », le disque et le chef d’œuvre de celui qui allait devenir son mentor, le compositeur de free jazz Julius Hemphill. Cela décida de son orientation musicale. Depuis, de John Carter à John Zorn, et de Paul Motian à Ches Smith, il a fallu compter avec sa contribution, avec son univers de jeu fait de lentes métamorphoses et de brusques clivages, de thèmes comme des incrustations où se raidissent tous les sons et tous les sens, en un pétrissage de l’intensité qui va éclore en paroxysme… Marc Ducret, c’est ce guitariste curseur et couseur de fulgurances, l’ancien autodidacte que se disputèrent d’abord tous les grands noms du jazz en France, d’Andy Emler à Daniel Humair, de Michel Portal à Louis Sclavis, jusqu’au tout premier ONJ, qui préfère désormais s’inspirer de Vladimir Nabokov pour imaginer de nouveaux modes de construction, et dont la clarté d’exécution n’a d’égale que son éventail de perturbations, ses razzias électriques. Tom Rainey, c’est cet impeccable architecte des rythmes qui se préoccupe autant des fondations que des paratonnerres et que l’on trouve enfin à la tête de ses propres formations, après trente ans de bons et loyaux services auprès de musiciens de renom (Dave Liebman, Joe Lovano, John Abercrombie, Ted Curson…), de musiciens d’expérimentation (Anthony Braxton, Ray Anderson, Nels Cline, Mark Helias…), et de musiciens de la nouvelle génération (Tony Malaby, Angelica Sanchez, Kris Davis, Ingrid Laubrock…). Voilà quelles sont donc les ressources à la disposition de ces diables d’hommes : des instruments modelés et remodelés de mille et une manières jusqu’à émettre les sonorités les plus saisissantes, d’interminables débats d’idées musicales qui s’immiscent les unes dans les autres et élaborent les structures les mieux nouées, une perpétuelle énergie d’activation. Ressources grâce auxquelles Big Satan donne libre cours à des improvisations en surpression qui passent du tout au tout, d’un grand moment de détente à un grand moment de détonation, aussi brutale que décisive. Et même Tim Berne, pour leur vingtième anniversaire, se demande bien à quoi s’attendre…

25 BAND OF DOGS / OTOMO YOSHIHIDE / 1re en France Jean-Philippe MOREL - guitare basse, electronics | Philippe GLEIZES - volcanic batterie Invité : Otomo YOSHIHIDE - guitare, platines

Ils jouent à l’arrachée. Engagés et enragés. Construisant pour mieux détruire pour mieux reconstruire. Comme un poltergeist en chambre close ou une émeute en milieu urbain. Dans l’emportement des choses, de la basse et de la batterie, plafond et plancher, ciel et terre. Car si le sens commun veut que la colère soit mauvaise conseillère, aucune musique vivante ne se goûte pleinement sans l’épice des passions. Aucune rythmique ne peut oublier qu’elle a autant pour mission de donner la mesure, de proportionner, que de dynamiser et dynamiter. Et celle-là, celle de Band of Dogs, a déjà sévi à de multiples reprises, dans Dr. Knock, dans Call the Mexicans !!!, dans Kholkhöze Printanium, dans Septik… À ma droite, Jean-Philippe Morel, contrebassiste autodidacte et travailleur extrême des musiques mutantes, qui a trempé dans le jazz, le rock et le métal et n’a cure des étiquettes, des genres et des identités fermées. Pour être exact, il ne jure que par l’ingérence et l’immixtion. Ce qui ne l’a pas empêché de faire sa mue on the bandstand, auprès d’illustres ainés et contemporains tels que, si l’on prend la longue lignée des pianistes : Martial Solal, Eric Watson, Andy Emler, Benoît Delbecq, Bojan Z... Et si l’on prend la longue lignée des saxophonistes : Archie Shepp, Michel Portal, Tony Malaby, Akosh S., Daniel Erdmann… Ni de prendre son destin en main avec son propre label et son propre grand orchestre bariolé, United Colors of Sodom. À ma gauche, Philippe Gleizes, batteur autodidacte et travailleur extrême des musiques mutantes, passé du binaire au ternaire, du rock à l’improvisation, via Miles Davis et John Coltrane (et donc Tony Williams, Jack DeJohnette, Elvin Jones et Rashied Ali). Lui aussi a fréquenté le gratin, dont Portal, Louis Sclavis, Christophe Monniot, Claude Barthélémy, Marc Ducret, et Christian Vander inévitablement. Lui aussi s’est impliqué dans ses propres réseaux, notamment dans les aventures du label Chief Inspector et auprès de son complice de toujours, l’inénarrable Médéric Collignon, avant de lancer des trios coup sur coup : Ank (avec Mathieu Jérôme et Benjamin Duboc), GleizKrew (avec Hugues Mayot et Antonin Rayon), Mother (avec Emmanuel Borghi et Benjamin Duboc). Chez lui, l’énergie est faite pour être dépensée, c’est une question de principe, de générosité. Au centre... Car il y a un centre, mais il n’est jamais occupé par la même personne. Depuis plus de 15 ans que Band of Dogs tourne à plein régime (« lâche les chiens », littéralement), entre rock progressif, électro et improvisation libre, c’est chaque fois avec un troisième membre différent, selon le principe étrenné dans Third Person par Tom Cora, avec lequel Morel a d’ailleurs joué. Pour compléter une liste déjà impressionnante comprenant Fabrice Vieira, Émile Parisien, Vincent Peirani, Aymeric Avice, Marc Ducret, Julien Lourau ou encore Julien Desprez, le bassiste diabolique et le batteur endiablé ont lancé une invitation au grand aventurier de la scène japonaise, de Ground Zero au New Jazz Orchestra : le guitariste, platiniste et électro-acousticien Otomo Yoshihide. Sans doute l’un des expérimentateurs les plus systématiques de notre époque, qui donne sa méthode : « Sans doute la musique que je joue ressemble-t-elle à ma vie. Ou est-elle comme un proche ami. Le jazz aussi est un ami qui m’est cher. Jazz, pop américaine ou japonaise, musique traditionnelle japonaise, électronique et noise music, musique improvisée européenne… C’est pourquoi je les combine, comme en cuisine : il faut faire des mélanges pour trouver de nouvelles recettes. » Il faut se servir de l’épice des passions !

Théâtre d’Ivry-Antoine Vitez - 1 rue Simon Dereure - 94200 Ivry-sur-Seine ☎ 01 46 70 21 55 / http://theatredivryantoinevitez.ivry94.fr

TARIFS : 20 € / 15 € ABONNÉ SONS D'HIVER + TR M ligne 7 - arrêt Mairie d'Ivry (terminus). Par la sortie "Robespierre", suivre la rue Marat sur 50 mètres, prendre à gauche le "Chemin du Théâtre" qui débouche dans la rue Simon Dereure. Par la sortie 3 "rue Marat" (en tête de train) : le "Chemin du Théâtre" est en face. !RER ligne C - arrêt gare d’Ivry-sur-Seine (10 mn à pied, sortie Centre Ville. Prendre l'Avenue Georges Gosnat. Passer l'Hôtel de Ville, prendre la rue Raspail à gauche, puis la 2e rue à droite qui est rue Blanqui. Le Théâtre se trouve au bout de cette rue. BUS : 323, 132, 125, 182 arrêts Mairie d'Ivry Métro ou Hôtel de Ville VELIB’ station n°42010, 1 rue Robespierre "À Porte d'Ivry, de Vitry ou de Choisy, direction Centre ville. Le théâtre est à deux pas de l'hôtel de ville. 26 Jeudi 15 Février | 20h30 | Vincennes______Auditorium Jean-Pierre-Miquel

STEPHAN OLIVA PIANO SOLO

Stephan Oliva est l’un des pianistes contemporains les plus affirmés et les plus passionnants. Son univers poétique, saturé de sérénité, où traits et arabesques sont tracés ou courbés avec discrétion souvent, mais détermination toujours, l’a distingué dès ses premiers instants sur la scène jazz. Né en 1959, doté d’une solide formation classique, il se fait remarquer avec son premier album « Novembre », en 1991, obtenant le prix Django de l’Académie du Jazz. L’essentiel de sa personnalité artistique tient à son jeu inventif, aussi subtil qu’un parfum serait-on tenté de dire : un toucher raffiné sachant atteindre, quand il le faut, le forte et la puissance, sans jamais forcer ou surenchérir ; un inimitable sens de l’harmonie, entre flux et fluidité. Il faut dire que Stephan Oliva a travaillé les approches de Bill Evans ou de Lennie Tristano, ainsi que Paul Motian, instaurant un dialogue imaginaire fait de variations musicales autour de leurs univers respectifs. Passionné de cinéma, de films noirs, le pianiste sait à merveille ce que l’image et la musique créent comme correspondances esthétiques et suggestions émotives. D’où une fascination pour la musique de Bernard Herrmann auquel il a consacré deux albums. D’où de nombreuses musiques de films. Cette démarche d’ouverture aux autres formes d’expressions artistiques l’a également amené à travailler avec la trapéziste – ou danseuse aérienne – Mélissa Von Vépy, à s’inspirer de l’écriture de Paul Auster, à inventer une musique pour accompagner les dessins animés de Winsor McCay. Il aime encore se consacrer au travail avec des voix à la personnalité affirmée (Linda Sharrock, Susanne Abbuehl ou Hanna Schygulla). Par touches successives, Stephan Oliva a établi son propre panthéon fait de symbolisme attirant et de songes vivaces. Pour Sons d’hiver, il prépare un solo nourri de toutes ses histoires artistiques, passées et en devenir, y mêlant souvenirs de cinéma et territoires à parcourir. Son clavier n’a pas fini de se transformer en jardin pour les rêveries de promeneurs solitaires, tous autant que nous sommes.

27 KRAKAUER / TAGG DUO "BREATH & HAMMER" / 1re en France David KRAKAUER - clarinette | Kathleen TAGG - piano

David Krakauer nous propose de découvrir un projet totalement inédit en France : un duo avec Kathleen Tagg, grande pianiste classique et compositrice contemporaine venue d’Afrique du Sud, se produisant dans les salles de concert les plus prestigieuses au monde. Parfait pour un clarinettiste qui est d’abord et avant tout un touche-à-tout de génie ! En tant qu’instrumentiste, Krakauer a la réputation non usurpée d’être un clarinettiste surdimensionné (qui a acquis une solide formation classique, notamment après deux années passées au conservatoire de Paris). Ses solos sont toujours des moments stupéfiants où un jeu débridé et audacieux donne libre cours à sa fantaisie, parcourant vertueusement tous les registres possibles de son instrument, et d’autres inconnus jusque-là. David Krakauer dispense avec générosité une joie de vivre inoubliable, comme un antidote à la morosité, le résultat d’une curiosité toujours sur le vif en quête d’inattendu et de nouveaux plaisirs. Merveilleux interprète de Janáček, Brahms, Schönberg ou Messiaen (notamment la pièce Abîme des Oiseaux), David Krakauer a rencontré dès 1979 le grand maître et clarinettiste de la musique klezmer Dave Taras (1895-1989), descendant d’une grande lignée de musiciens juifs d’Ukraine. Approfondissant alors sa culture yiddish, participant au renouveau de la musique klezmer à New York dans les années 1980 et 90, avec notamment les Klezmatics puis le Klezmer Madness, plus tournés vers le rock, Krakauer est cet insatiable innovateur qui a également créé avec Fred Wesley, le tromboniste de James Brown, et DJ Socalled, le groupe Abraham Inc. Qui a mêlé sa folie à celle du groupe Anakronik… David Krakauer et Kathleen Tagg partagent une quête qui consiste à redéfinir constamment le son et le rôle de leurs instruments. Le projet « Breath and Hammer » dissipe ainsi les frontières du récital ordinaire entre piano et clarinette, en incorporant de nouvelles techniques instrumentales, utilisant même des extraits et des boucles sonores dans un programme conçu par le duo et par leurs « invités », compositeurs venus d’horizons divers : John Zorn (New York), Kinan Azmeh (Syrie), Roberto Rodriguez (Cuba)… Les duettistes ont également apporté leurs propres compositions originales, influencées par les rythmes africains, la musique romantique, le minimalisme et le… klezmer forcément. Ces influences musicales aussi diverses que lointaines s’entrelacent, produisant une forme absolument unique, un art aux multiples facettes qui conjugue les cultures du passé et celles du présent pour ouvrir de nouveaux chemins de traverses musicaux. « Breath and Hammer » est un condensé d’esthétique plurielle. Résolument contemporain, le souffle de la tradition y est omniprésent, sans rien commander. Et il faut une autre dimension encore, celle des vidéos, pour révéler le travail de percussionniste et de bruitiste de la pianiste.

Auditorium Jean-Pierre-Miquel - Cœur de Ville, 98, rue de Fontenay 94300 Vincennes www.vincennes.fr ou achat sur place TARIFS : 20 € / 15 € TR / 10 € ABONNÉ SONS D'HIVER M ligne 1 - arrêt Château de Vincennes !RER A - arrêt Vincennes " À Porte de Vincennes, prendre avenue de Paris sur 1,7 km, puis prendre à gauche Avenue du Château sur 400m, puis prendre à droite Rue de Fontenay. PARKINGS, 168 rue de Fontenay ou 1 avenue de Vorges 28 Vendredi 16 Février | 20h | Créteil______Maison des Arts

CARL HANCOCK RUX TRIO / 1re en France Carl HANCOCK RUX - poésie et musique | FITZ KIRBY - samples, electronics, multi-instruments Chris EDDLETON - percussions

Dès qu’il fut découvert par Nona Hendryx, un soir qu’il dévidait sa « musique soul d’avant-garde de fabrication domestique » sur la scène du CBGB, dans le Lower East Side de New York, l’industrie du divertissement tenta de s’emparer de son personnage et de le reparamétrer. Pour son sens impertinent du bricolage, on voulut en faire quelque chose comme le « Beck noir ». C’est ainsi qu’on le présenta, c’est ainsi qu’on voulut l’écouler. En vain. Car Carl Hancock Rux avait une histoire, et même une conscience historique. Poète, romancier, chanteur, acteur, compositeur, ce touche-à-tout talentueux de la scène afro-américaine actuelle est avant tout un enfant de Harlem et du Bronx, élevé par sa communauté. Dont l’éducation s’est autant faite sur les bancs de la Columbia University, où il étudia la littérature, que sur les tréteaux du Nuyorican Poets Café, parmi la nouvelle génération de poètes des années 1990, dont ses amis Saul Williams et Mike Ladd. Avant d’être un auteur publié, désormais récipiendaire de nombreux prix littéraires, Carl Hancock Rux a chanté dans une chorale gospel (ce qui l’a même conduit à participer à Parable of the Sower, l’opéra que le roman d’Octavia Butler inspira à Bernice Johnson Reagon, la fondatrice de Sweet Honey in the Rock). Et avant que des artistes contemporains ou des compagnies de danse, comme celles d’Alvin Ailey et de Bill T Jones, fassent appel à ses services de compositeur, pour leurs installations ou pour leurs spectacles, Carl Hancock Rux a été travailleur social. Sa carrière de musicien est à l’avenant. S’il a été repéré auprès de Vernon Reid, DJ Spooky, Gerald Clayton ou Burnt Sugar, il a également collaboré avec quelques grands noms du jazz contemporain, tels que Lawrence D. Butch Morris, David Murray, Craig Harris et Leroy Jenkins. Auteur de quatre disques remarqués où il se montre autant chanteur qu’orateur et narrateur, Carl Hancock Rux possède une voix contagieuse, d’une gravité et d’une profondeur bouleversantes, que certains ont située à l’intersection de celles de Jimi Hendrix, de Lou Reed et de Ralph Ellison : effrontément intellectuelle, résolument posée, qui évite les séductions comme les solutions faciles, voire qui sacrifie les idoles, préférant chevaucher le réel et les rythmes. Lui-même a raconté l’expérience : « Au cours de ce processus, il y a une épiphanie, un chœur de rebelles, de mendiants et de déments brailleurs qui ont la révélation vacillante que les paroles de la chanson dans ma tête sont en réalité mes paroles – l’écho de ma voix. » Reflet de sa personnalité multiple, sa « musique soul d’avant-garde de fabrication domestique », animée d’images par Onome Okeh, acoquinée aux samples de Fitz Kirby, également coproducteur, et aux fûts de Chris Eddleton, rassemble le blues, le rhythm’n’blues, le rock psychédélique, la pop futuriste, le jazz d’extrapolation et la musique aléatoire… La Harlem Renaissance ne fait que commencer.

29 JEFF MILLS ET ÉMILE PARISIEN PLAY COLTRANE Jeff MILLS - machines, platines | Émile PARISIEN - saxophone soprano

Cela fait un peu plus d’un an que Jeff Mills et Émile Parisien se sont mis à ourdir la musique d’un duo dont l’existence aurait semblé improbable dans les années 1990. La rencontre de la techno et du jazz instrumental. Sons numériques et sons acoustique, sons de machines et d’instruments. Un couple sonique qui aurait pu ressembler à l’association de la carpe et du lapin, un mariage des contraires, déroutant pour certains habitués des scènes rave ou des scènes jazz, mais dont le pari musical a de quoi ravir. De fait, lorsqu’Émile Parisien (né en 1982 à Cahors, ville de vins, cépage Malbec, et de gastronomie, en plein cœur des Causses du Quercy) fonde dans les années 2000 le quartet qui lui permettra de révéler très jeune son potentiel créatif, Jeff Mills (né en 1963 à Detroit, ville historique de l’industrie automobile US aujourd’hui dévastée, et de la soul music tendance Tamla Motown) est déjà la star mondiale de la techno, invité dans les plus importants house clubs et raves du monde entier. Mais les deux hommes se sont découverts un vaste terrain d’entente dans l’œuvre et le cosmos de John Coltrane, le colosse du jazz moderne, modal, free, ou spirituel… Pour Émile Parisien, « L’angle d’approche qui est apparu est celui de la musique de transe. John Coltrane a atteint cette dimension, et elle correspond parfaitement aux musiques électroniques, qui vont également dans ce sens. Je pense que sa quête, à la fin de sa vie, était d’oublier toutes les notes… Tout laisser de côté pour être totalement libre. Et c’est la raison pour laquelle Jeff et moi pouvons nous retrouver autour de Coltrane » Pour Jeff Mills : « Quand on écoute John Coltrane, on comprend qu’il ne cherche pas à jouer du jazz, il cherche autre chose. Quelque chose qui va au-delà. » Jeff Mills a toujours été un artiste à la recherche de nouveaux espaces expressifs. Déjà célèbre alors que, surnommé The Wizard, il aborde la House Music avec le duo Final Cut, il est rapidement devenu le pionnier de la techno, fondant le label du collectif Underground Resistance en 1990. En 1992, il part pour New York, approfondit son style, et fonde deux autres labels aux directions différentes : « Purpose Makers » pour la danse et « Axis » pour les recherches électro- minimalistes. Sa musique se rapproche de la musique répétitive américaine, flirtant aussi avec la soul et le funk. Et comme si ce n’était pas assez, son duo avec le jeune saxophoniste français explorera un nouvel territoire sonore. Où le son devient primordial, le déroulé du concert se transformant en une surprenante succession de mystères musicaux captivant notre écoute. L’électronique sonne comme une résonnance profonde, comme une cosmique convocation. Avec des gestes vifs, méticuleux et précis, Mills contrôle la console. Les improvisations du saxophoniste sont des échappées serpentines de feux follets, fulgurantes et dynamiques. Mills joue, déjoue et rejoue timbres et textures pour proposer de nouveaux espaces, envoie un enregistrement de John Coltrane (Naima ou Jupiter), remixé avec des rythmes minimalistes, et voilà que Parisien dialogue avec son illustre aîné… Après les concerts spectaculaires donnés à Jazz à Vienne et Jazz à la Villette, nul doute que celui de Sons d’hiver sera l’occasion de parcourir un nouveau chapitre passionnant de l’histoire que nous offrent Jeff Mills et Émile Parisien. Idéal pour revivifier une écoute musicale qui s’installerait dans la routine.

Maison des Arts de Créteil - Place Salvador Allende - 94000 Créteil ☎ 01 45 13 19 19 / www.maccreteil.com TARIFS : 22 € / 13 € TR M ligne 8 - arrêt Créteil-Préfecture. Accéder par le centre commercial par la sortie à droite du métro, traverser le centre commercial, ressortir porte 25 (proche Carrefour même niveau) pour rejoindre la place S.Allende. Le théâtre se trouve alors au bout de la place. ! À porte de Bercy, prendre A4 direction Nancy-Metz, bretelle Créteil-Sénart, puis prendre la direction Créteil-Centre, puis Mont- Mesly / Hôtel de Ville. En venant du Sud-Ouest, aller sur A86, prendre la sortie Créteil Centre et ensuite la direction Préfecture/Hôtel de ville/Maison des Arts. PARKING GRATUIT Hôtel de Ville en contrebas du théâtre. RETOUR GRATUIT EN NAVETTE 2 arrêts: Bastille et Châtelet (dans la limite des places disponibles) 30 Samedi 17 Février | 20h | Créteil______Maison des Arts

BIG DADDY WILSON BAND BIG DADDY WILSON - voix, percussions | Cesare NOLLI - guitare, chant Paolo LAGRAMANDI - basse, chant | Nik TACCORI - batterie, chant

C'est en Allemagne où il était soldat dans une garnison nord-américaine stationnée à Brême, et à plus de trente ans déjà, que Big Daddy Wilson a débuté sa carrière artistique. Pour un jeune Noir issu du Sud des Etats-Unis, s’engager dans l’armée à l’âge de 16 ans était souvent la seule issue professionnelle possible dans les années 1970. Wilson Blount est né et a grandi dans une petite ville agricole appelée Edenton, en Caroline du Nord (la population d’Edenton compte 5000 habitants, dont 55% d’Afro-américains, et 25% qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté…). Wilson, orphelin de père, raconte : « Nous étions très pauvres, mais j’ai eu une très belle enfance. Mes sœurs et moi avons été élevés par ma mère et ma grand-mère. Nous avons vécu une vie simple, nous sommes allés à l’église chaque dimanche, et à l’école les jours de la semaine. J’ai aussi travaillé à l’époque sur la plantation de tabac et dans les champs de coton, j’étais un véritable « Country Boy »… et extrêmement timide. » Wilson a donc grandi en écoutant du gospel et de la country, aiguillonné aussi par un cousin musicien. La poésie fut néanmoins son premier moyen d’expression : « J’écrivais des poèmes et des chansons longtemps avant de commencer à chanter le blues. Mais une chose amusante est que toutes les premières chansons que j’ai écrites avaient, sans que je le sache encore, une forte saveur de blues. Il semble que j’aie eu le cafard bien longtemps avant de savoir ce qu’était le blues ! » C’est en assistant à un concert de blues dans sa ville de garnison que Big Daddy s’est décidé à devenir musicien, ce qui lui permit de se débarrasser rapidement de sa timidité. « J’ai voulu apprendre autant que je pouvais cette nouvelle chose (le blues). J’ai voulu savoir comment y réinjecter la soul, le funk et le gospel de mon enfance. J’ai senti tout de suite que le blues était les racines, la base même de la soul et du funk que j’avais écoutés en grandissant. C’est tellement proche du gospel, comme un frère, comme un cousin germain. » En 2004, il enregistre son premier disque « My Day Will Come », et crée un duo acoustique avec « Doc Fozz » Feld : Back to the roots. Il est d’emblée repéré et soutenu par Eric Bibb qui participe à son album suivant, « Love is the Key », paru en 2009. Big Daddy Wilson est désormais un représentant important de la scène blues qui, comme certains de ces illustres prédécesseurs (Champion Jack Dupree, Louisiana Red, Eddie Boy, Luther Allison) a choisi de s’installer en Europe où il chante le blues avec un naturel, une conviction et une puissance émotionnelle peu communs. Son grain de voix, son registre chaleureux de baryton, offrent un chant désarmant d’un charme irrésistible.

ERIC BIBB "MIGRATION BLUES" / 1re en France Eric BIBB - guitare, voix | Staffan ASTNER - guitare Neville MALCOLM - guitare, contrebasse | Paul ROBINSON - batterie

Longtemps le blues a avancé masqué. Comme il ne faisait pas bon dire ses quatre vérités à une Amérique ouvertement ségréguée et raciste, bluesmen et blueswomen procédaient par sous-entendus, en s’inspirant de leur quotidien, des désordres amoureux, des affaires de mœurs ou des catastrophes naturelles. Ils servaient de chroniqueurs, d’historiens et de moralistes, édifiant leur public en même temps qu’ils le distrayaient. On racontait sa vie, qui est la vie de tous et de tous les jours, en permettant à chacun de faire retour sur les événements à travers un vécu d’hommes et de femmes affranchis qui s’éprouvait et s’assumait enfin en tant que tel, et qui demandait à être entendu, à tous les degrés. Ce double langage, et par conséquent ce double entendre, fut ensuite transposé sur les instruments, ceux du jazz notamment, ce qu’évoque Ralph Ellison quand il écrit : « Mon vieux, si les Blancs comprenaient ce qu’y dis, ils le balanceraient au bout du monde. La trompette, c’est vraiment une langue de pute. ». Depuis les années 1960, cette fonction de chroniqueurs a évolué en même temps que la société et qu’une nouvelle génération de bluesmen, passant de l’implicite à l’explicite. J.B. Lenoir, Taj Mahal, Otis Taylor ou Corey Harris ne s’adressent plus seulement à leurs pairs, mais à l’ensemble des déshérités, et ne se privent plus de faire appel à leur conscience politique. Tel est exactement le cas d’Eric Bibb aujourd’hui, lorsqu’il s’empare avec le répertoire de Migration Blues de la tragédie des réfugiés venus des pays en guerre du monde arabe. « Ce que je ressens aujourd’hui, c'est que les idées négatives parfois exprimées envers nos frères et sœurs appelés « réfugiés » constituent une mauvaise perception de la réalité. En fait, la peur et l’ignorance sont des problèmes bien plus que les étrangers. Les réfugiés sont le plus souvent des êtres humains courageux qui tentent d’échapper à l’horreur. Fuir la guerre et à d’atroces souffrances n’est pas un phénomène nouveau, cela a toujours existé dans le monde entier au cours des siècles. Chaque culture recèle des histoires et des chansons sur ce thème. Tout cela m’a fait penser à la grande migration durant laquelle des millions d’Africains Américains ont fui la ségrégation brutale et la misère économique du Sud rural pour les villes industrielles du Nord. Qu’il 31 s'agisse d’un ex-métayer qui fait du stop entre Clarksdale et Chicago en 1923, ou d’un orphelin d’Alep dans un esquif rempli de réfugiés, c’est toujours le blues de l’émigration. Avec cet album je souhaite nous encourager tous à garder nos esprits et nos cœurs grands ouverts quant à la détresse des réfugiés où qu’ils soient. » Eric Bibb est d’autant mieux placé pour rappeler que nous sommes tous des enfants d’immigrés, qu’il est l’incarnation même du bluesman du 21e siècle. Né à New York et non dans le Deep South, il reste intimement lié à sa communauté grâce à son père chanteur et à son oncle pianiste – nul autre que John Lewis, le cofondateur du Modern Jazz Quartet. Mais aussi grâce à son parrain, le chanteur, acteur et activiste Paul Robeson, l’une des personnalités les plus remarquables du Mouvement des droits civiques. Or c’est par cette même famille qu’il a été ouvert sur le monde, puisque son père était chanteur de folk et non de blues (il présenta Bob Dylan à son fils dès l’âge de 11 ans), son oncle pianiste de jazz et non de blues, son parrain chanteur de spirituals, de standards et d’hymnes révolutionnaires et non de blues. Tous pourtant vivaient le blues, de même qu’ils se sentaient autorisés à se mêler de musique classique, le cas échéant. La musique du rejeton s’en ressent, à la fois d’une grande sobriété et d’une grande sophistication, toujours poignante, établissant des distinctions mais aucune séparation entre le blues natif, comme l’or natif, et des éléments de gospel, de soul, de folk et de country, voire de musique mandingue. Eric Bibb est un bluesman qui a étudié la psychologie et la langue russe, qui s’est installé en France, puis en Suède, puis en Angleterre, sans oublier pour autant de tirer sa révérence au grand ancêtre Bukka White, ni d’inviter Taj Mahal ou Pops et Mavis Staples sur certains de ses projets. Son itinérance est autant celle d’un hobo que d’un citoyen du monde. Pour toutes ces raisons, et parce qu’il ne tient pas en place, Eric Bibb est un bluesman du 21e siècle, qui tient son rôle de vigie.

BAD FAT feat. NAPOLEON MADDOX Napoleon MADDOX - MC | Pierre-Marie HUMEAU - trompette | Marc BROSSIER - trombone Raggy SEVRET - saxophone ténor | Paul GELEBART - sousaphone | Ludo BOZEC, Rémi SAVIN - batteries

La rencontre entre jazz et hip-hop est dorénavant l’une des branches majeures de l’arbre du rap. Dès son apparition à la fin des années 1970 et 80 dans les rues du Bronx, la nouvelle musique a été adoubée par des jazzmen prestigieux, comme Max Roach ou Archie Shepp. Bon nombre de rappeurs considèrent d’ailleurs Gil Scott-Heron ou les Last Poets, qui jouaient avec des musiciens de jazz, comme leurs principaux inspirateurs. Le hip hop a largement puisé dans les racines du jazz et de la musique afro-américaine pour nourrir ses beats et ses samples : Madlib abondamment, OutKast (« Idlewild »), Q-Tip de Tribe Called Quest, Guru's Jazzmatazz, The Roots…. En retour, de nombreux jazzmen ont invité des rappeurs à les rejoindre, tels Steve Coleman, Greg Osby ou Brandford Marsalis… À ce jour, la fanfare Bad Fat (tout un programme : une expression tirée de l’argot des musiciens, signifiant le "gros son", un son puissant, luxuriant et charnel, ancré dans le groove) est constituée de musiciens provenant de groupes liés aux musiques populaires actuelles (funk, r’n’b, dub, reggae, musiques de rue…) comme Zenzile, Malted Milk ou Zéphyrologie. Inutile de préciser que les musiciens de Bad Fat connaissent donc leurs fondamentaux, piochant leurs références autant chez Don Cherry que chez Public Enemy. Ils inscrivent leur démarche dans la foulée des fanfares hip hop contemporaines, tels les Chicagoans de l’Hyptonic Brass Band ou les Néo-Orléanais du Hot 8 Brass Band. C’est donc une longue histoire de la musique que nous compte Bad Fat, une histoire centenaire qui puise ses sources dans le Deep South et le Midwest, le rural et l’urbain, pour les relier aux aspects les plus contemporains. Bien incarnés par le rappeur Napoleon Maddox, originaire de Cincinatti, et réputé pour travailler, au sein de son groupe Is What ?, avec des musiciens de jazz (le batteur Hamid Drake, par exemple), et pour être le beatboxeur de référence du saxophoniste Roy Nathanson. Maddox est un rappeur dont le flow suave et élégant propose un parler-chanter décontracté, aux frontières de la soul. Il aime les projets audacieux comme en témoigne ses opéras-rap « A Riot Called Nina », en hommage à Nina Simone, ou « Twice the first time », en hommage à ses arrières grand-tantes qui furent des personnalités du music-hall américain : les sœurs siamoises Millie et Christine Mckoy. C’est sans réserve que Napoleon Maddox a accepté l’invitation de Bad Fat. Leur musique est la rencontre d’autres musiques nées dans la rue. De Bourbon Street au Bronx, un itinéraire musical qui respire le bonheur de la fête et des rythmes dansants. Une addition de groove, de swing et de flow.

Maison des Arts de Créteil - Place Salvador Allende - 94000 Créteil ☎ 01 45 13 19 19 / www.maccreteil.com TARIFS : 22 € / 13 € TR M ligne 8 - arrêt Créteil-Préfecture. Accéder par le centre commercial par la sortie à droite du métro, traverser le centre commercial, ressortir porte 25 (proche Carrefour même niveau) pour rejoindre la place S.Allende. Le théâtre se trouve alors au bout de la place. ! À porte de Bercy, prendre A4 direction Nancy-Metz, bretelle Créteil-Sénart, puis prendre la direction Créteil-Centre, puis Mont- Mesly / Hôtel de Ville. En venant du Sud-Ouest, aller sur A86, prendre la sortie Créteil Centre et ensuite la direction Préfecture/Hôtel de ville/Maison des Arts. PARKING GRATUIT Hôtel de Ville en contrebas du théâtre. RETOUR GRATUIT EN NAVETTE 2 arrêts: Bastille et Châtelet (dans la limite des places disponibles) 32 PRÉFET DE LA RÉGION

Paris 13 Les Gobelins En partenariat avec

#27

au 17 février du 26 janvier 2018

REMERCIEMENTS MAÏTÉ RIVIÈRE directrice du POC • ALFORTVILLE ELEONORE JOUAN programmatrice spectacles vivants • ARCUEIL Nous remercions vivement ANNETTE VARINOT directrice du C.Cult. Communal de Cachan et pour leur précieuse MAGALI LÉRIS directrice artistique du Th.Jacques Carat • CACHAN coopération tous nos CÉCILE MARIE directrice du Théâtre Paul Eluard • CHOISY-LE-ROI partenaires qui ont JOSÉ MONTALVO directeur de la Maison des Arts • CRÉTEIL participé à l’élaboration BERTRAND TURQUETY directeur de Fontenay-en-Scènes • FONTENAY-SOUS-BOIS de cette 27e édition, CHRISTOPHE ADRIANI directeur du Théâtre Antoine Vitez • IVRY-SUR-SEINE les villes, structures d’accueil, leurs équipes RYAD HANNI programmateur du Hangar • IVRY-SUR-SEINE techniques, administratives, CHRISTINE GODART directrice de l’Espace Culturel André Malraux • LE KREMLIN-BICÊTRE relations publiques, GILLES MACHTO directeur des Théâtres de MAISONS-ALFORT information et accueil. STÉPHANE MARTIN président du musée du quai Branly et les équipes du musée du quai Branly - Jacques Chirac • PARIS 7E MARC LE GLATIN directeur du Théâtre de la Cité internationale • PARIS 14E SÉVERINE C.MARTIN directrice Columbia Global Centers • PARIS 6E ALEXANDRE KRIEF directeur du Théâtre Romain Rolland • VILLEJUIF NATHALIE HOCQUARD directrice du Service de l’Action culturelle de VINCENNES NATHALIE HUERTA directrice du Théâtre Jean-Vilar • VITRY-SUR-SEINE

ÉQUIPE DU FESTIVAL

Présidente MONICA GUILLOUET-GELYS Directeur FABIEN BARONTINI Directeur délégué FABIEN SIMON Administratrice NATHALIE BALLÉE-FADILI - Comptable NATHALIE PAY Responsable Communication ARMELLE BOULLIUNG - Assistée de CATHERINE FLAHAUT-SPICQ Billetterie à venir... Relations Presse iseecolors.fr // DOMINIQUE TRÉMOUILLE / DAMIEN BESANÇON Coordinateur des conférences ALEXANDRE PIERREPONT Direction technique NICHOLAS CHAMPION et toute l’équipe technique.