HENRY CHARTIER

NINO FERRER UN HOMME LIBRE

LE MOT ET LE RESTE

HENRY CHARTIER

NINO FERRER un homme libre

le mot et le reste 2018

« Viva la Musica, l’Arte­ e la Libertà! »

Nino Ferrer, « O mangi questa minestra, o salti dalla finestra »

NINO FERRER, ON DIT ­C’EST LE DESTIN

« Faut-il faire dans la vie que ce que l’on a envie de faire ? – Je pense qu’il ne faut faire que ça, alors vraiment si on en a la possibilité, il faut vraiment ne faire que ça. » Nino Ferrer répondant à une question d’un journaliste en 1972 1. Nino Ferrer a passé une grande partie de sa vie d’artiste dans ­l’angoisse de voir sa carrière réduite à quelques chansons, lui qui aspirait à être reconnu pour toute son œuvre. Il se navrait que le public ne connaisse que ses tubes qu’il avait fini par prendre en grippe. Après avoir cherché le succès comme il a cherché « Mirza », avec rage et obstination, il a pesté contre ce chien désormais constamment pendu à ses basques. Il se plaignait que le public ne parvienne pas à décrocher du « Téléfon » (qu’on lui réclamait, bien évidemment, toujours en rappel quand il ne la jouait pas spontané- ment) ou de « Oh ! Hé ! Hein ! Bon ! » et fulminait contre les médias qui ne l’ont invité que pour les réinterpréter. Il gardait rancune à l’indus­trie du disque de lui demander à cor et à cri d’autres « Sud » ou d’autres « Cornichons » et de sous-promotionner ses albums, lui qui se voulait avant tout, justement, un homme d’albums. La musique a été pour Nino une chose sérieuse et être réduit au statut d’amuseur public ne l’intéressait plus à la fin de la décennie 1. Inter actualité de 13 heures, 16 mars 1972, journal présenté par Yves Mourousi.

Nino Ferrer, on dit ­c’EST LE DESTIN 5 soixante. Ce personnage de grand blond avant l’heure, amusant et gaffeur, avec sa silhouette élancée, ses rouflaquettes et son costume cravate, il l’a abandonné à l’entrée des années soixante- dix pour apparaître sous son véritable jour et sa véritable épais- seur : un artiste aussi ténébreux qu’il pouvait être joyeux, aussi passionné qu’ombrageux, habité par une révolte et une mélan- colie profonde. Aristocrate de la musique, tête couronnée des hit-parades, roi Midas transformant en or tout ce qu’il touchait, il est devenu en une décennie prince sans rires en exil dans son causse du Sud où il se donnera la mort après bien des avanies. Sur le point d’être oubliés voilà que ses albums maudits sortent de leur purgatoire. Les anthologies ou autres guides musicaux font désormais une place de plus en plus importante à son œuvre. Nino est enfin reconnu comme un acteur majeur de l’histoire musicale française. Ainsi, Métronomie a progressivement été redécouvert et est devenu pour la critique, un album incontournable au même titre que Histoire de Melody Nelson ou que La mort ­d’Orion. Même chose pour son opus de 1966 Enregistrement public qui obtient le statut de classique 1. Au plébiscite du public pour les tubes de Nino Ferrer, se joint à présent l’approbation des critiques rock. La redécouverte de l’œuvre et la réhabilitation de l’artiste ont commencé. Ce phénomène est, d’ailleurs, loin de se limiter à la où les reprises et hommages se multiplient 2. Un juste

1. Ainsi, Rock français. De Johnny à B.B. Brunes, édité en 2010, qui se présente comme une sélection de 123 albums essentiels, inclut l’album Enregistrement public. La Discothèque parfaite de la chanson française, paru l’année suivante, qui propose 200 albums d’hier et d’aujourd’hui, en plus de ce disque y ajoute Métronomie. Choix identique effectué par le magazine Rolling Stone pour ses 100 disques essentiels du rock français plaçant le premier à la 26e place et le second à la 54e. C’est ce même Métronomie qui est retenu à la 27e place par Les Inrockuptibles dans Les 100 meilleurs albums français, dans son hors-série n° 86 du 25 août 2017. 2. Depuis 2015, ­l’Italie se ré-intéresse à l’enfant du pays. Le monde anglo- saxon s’ouvre également lentement à lui en partant à l’ascension de ­l’Everest Ferrer, par sa face obscure. Ainsi la jeune génération américano-britannique

6 NINO FERRER, UN HOMME LIBRE retour des choses pour ce chanteur qui a été aussi de son vivant, un artiste européen à la renommée mondiale faisant le bonheur des hit-parades allemands, autrichiens, belges, canadiens, espagnols, italiens, luxembourgeois, néerlandais, suisses, vénézuéliens… Mais qu’est-il arrivé à Nino Ferrer et à son œuvre ? Pourquoi celui qui a illuminé les années soixante en recréant un rhythm’n’ à la française, puis qui s’est lancé dans les années soixante-dix, entre deux classiques imparables, dans une musique ambitieuse mélangeant et alternant rock progressif et débridé, guitares plombées et acoustiques a-t-il insensiblement disparu de la scène médiatique ? Pourquoi celui qui a livré tant de succès s’est-il lente- ment effacé ? Nino Ferrer est sans équivalent dans l’univers musical français. Un paradoxe à lui tout seul, car rares sont les artistes à avoir bénéficié tout au long de leur carrière d’une telle notoriété tout en ayant connu une aussi longue traversée du désert. Un cas d’école car peu de musiciens de ce calibre ont choisi de bâtir leur carrière en coupant tous les ponts avec le show-business, en s’exonérant de la charge qui incombe à un artiste populaire. À partir du milieu des années soixante-dix, après dix ans d’une carrière couronnée de succès, en homme libre et révolté qu’il est, il s’est imposé une trajectoire en périphérie du système. À l’acmé de sa popularité où « Mirza » l’a conduit jusqu’au « Sud », consta- tant qu’il lui est impossible de changer le show-biz de l’intérieur,­ il choisit d’agir à la marge. S’affranchissant des maisons de disques, il devient son propre producteur, conservant la mainmise sur l’inté- gralité du processus de création, enregistrant chez lui des chan- sons qu’il a écrites, composées, interprétées, arrangées, enregistrées et mixées, se chargeant même de l’aspect visuel. Il ne laisse à sa maison de disques que la portion congrue : celle de distribuer ses œuvres. Une démarche indépendante, sans concession, ni soumis- sion à l’ordre économique qui préfigure autant qu’elle annonce les mouvements indie rock ou rock alternatif. Cette indépendance,

­s’intéresse non pas à ses tubes mais à des titres méconnus (E. White & Flo ont repris « Looking For You » et The Young Fresh Fellows « NF In Trouble »).

Nino Ferrer, on dit ­c’EST LE DESTIN 7 Nino la paiera au prix fort : une perte substantielle d’audience se soldant le plus souvent par un marasme financier. Sa production des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix est souvent vite expédiée voire ignorée, considérant que les huit albums de Blanat à Concert chez Harry – représentant rien moins que la moitié de sa discographie sur une période couvrant presque deux tiers de sa carrière – ne méritent tout au plus qu’une mention polie 1. C’est pourtant, par bien des d’aspects, sa période la plus intéressante. Certes, elle ne comporte ni tube ni succès, mais elle est constituée de disques hors norme. Une production rebutante qui a de quoi tenir à l’écart le public, désappointer les plus fidèles du cénacle. Pourtant ces disques doivent être regardés pour ce qu’ils sont : les stigmates d’une lutte d’indépendance jusqu’au-boutiste contre les modes et les diktats de l’ordre pop. Si le rock c’est l’authenticité et la marginalité assumée, alors ces albums en sont l’expression la plus pure, donc la plus imparfaite : de la musique rauque’n’roll à l’authenticité brute voire brutale, une production poil à gratter qui irrite plus souvent qu’elle ne charme. Cette écla- tante manifestation de liberté aurait dû, au moins, à défaut de charmer les foules, s’attirer la sympathie des médias indépendants. Il n’en a rien été. Au contraire, ces disques hétérodoxes lui ont été reprochés, à l’instar de son départ pour le Quercy pris trop souvent pour un exil. De ce fait, il est devenu le chanteur “très province”, préten- dant enregistrer en dehors des studios et des musiciens de la capi- tale. Une bête curieuse à une époque où cela ne se faisait pas. Sur le plan de sa carrière, cette prise de recul a été délétère car ses disques et ses concerts ont été accueillis avec circonspection quand ce n’est pas avec condescendance. Lui qui ne voyait dans les chansons de ses débuts que des tubes a écrit des standards qu’il a légués à l’histoire de la chanson et

1. Voir sur ce point la notice qui lui est consacrée dans Le dictionnaire du rock paru aux éditions Robert Laffont sous la direction de Michka Assayas. Voir également l’article publié dans Le dictionnaire Larousse de la chanson mondiale depuis 1945, v° Ferrer, Nino.

8 NINO FERRER, UN HOMME LIBRE qui sont ancrés dans la mémoire collective. Mais il laisse aussi et surtout derrière lui une œuvre riche et complexe, parfois surpre- nante toujours intéressante. Ses chansons interpellent par leur actualité, leur étonnante fraîcheur, leurs trouvailles mélodiques ou la hardiesse de leurs arrangements. Tour à tour contrebassiste de , chanteur comique, importa- teur d’un rhythm’n’blues à la française qui n’a pas à rougir de la comparaison avec ses modèles américains, créateur de tubes et de standards repris désormais à l’envi, musicien continental lancé à l’assaut du rock progressif puis du rock anglo-saxon, anima- teur facétieux et populaire d’émissions de télévision du samedi soir en Italie, éleveur de chevaux, peintre, acteur etc. L’artiste et l’Homme­ ne se laissent pas emprisonner dans une formule ­lapidaire, forcément réductrice, pas plus que son œuvre qui se révèle touffue, éclectique. Une vie, un parcours et une œuvre apparemment désordonnés qui ont en réalité une ligne de force, la liberté : celle de faire et de ne pas faire, celle de marcher à contre-courant si le cœur vous en dit, celle de n’écouter que ses envies en faisant fi des modes, des exigences du show-business, des attentes du public ou des impératifs écono- miques. Un parcours d’homme libre et révolté qui l’a mené des sommets des hit-parades à des échecs commerciaux cuisants, toujours avec la même envie et la même fougue. Un créateur de disques passé de la grande distribution à l’artisanat, en mettant toujours autant d’ardeur à les produire. Celui qui a clamé dans les années soixante qu’il voulait être noir puis, à l’entrée des années soixante-dix, qu’il voulait être rock, a été tout au long de sa vie un être libre. Une liberté radicale qui l’a conduit à ne faire que ce qu’il voulait quand il le voulait et qui s’est exprimé jusque dans son dernier geste.

Nino Ferrer, on dit ­c’EST LE DESTIN 9

­L’ÉTRANGER

Né comme Christophe Colomb à Gênes, Nino Ferrer est parti comme lui rencontrer son destin à l’autre bout du monde dans une île lointaine qui valait bien San Salvador. Et à défaut d’avoir découvert ­l’Amérique, il a découvert par le jazz la musique, son Amérique à lui, un continent qu’il a mis une vie à défricher.

Agostino Arturo Maria Ferrari, plus connu sous le nom de Nino Ferrer, voit le jour de l’autre côté des Alpes, le 15 août 1934, où le fascisme règne depuis 1922. Son père Pierre Ferrari, citoyen italien, est issu de la bourgeoisie génoise. Sa mère qu’il qualifiait de « jeune fille du bout du monde belle comme le jour qui ne rêvait que d’art, de littérature, de théâtre 1 », vient d’une famille française partie s’installer en Nouvelle‑Calédonie en 1860. C’est dans cette île lointaine qu’ils se sont connus. L’archipel, découvert par le navigateur britannique Cook en 1774, est devenu officiellement français en 1853 sous l’impulsion de Napoléon III désireux de faire de ­l’Empire une puissance colo- niale. Dès cette date, les premiers colons français viennent s’ins- taller bientôt rejoints par les prisonniers car, depuis son ouverture en 1864, le bagne de Nouvelle-Calédonie est préféré à celui de Guyane. Cohabitent ainsi bagnards et « colons libres ». La Nouvelle-Calédonie est avec ­l’Algérie une colonie de peuplement.

1. Legras, Marc, « Nino Ferrer. L’irréparable », Chorus n° 25, automne 1998, pp. 13‑14, spéc. p. 13.

­L’ÉT RANGE 11 C’est pourquoi les gouvernements français n’auront de cesse que d’encourager les départs pour ce territoire situé à 18 000 kilomètres de la mère patrie. En 1873, la découverte de gisements de nickel favorisera également l’arrivée massive d’immigrants. Assez rapi- dement, l’exploitation individuelle des filons cède la place à de “grosses entreprises”. En 1878 est créée la Société Le Nickel (SLN) contrôlée majoritairement par la famille Rothschild et spécialisée dans l’exploitation du minerai. Au début des années trente, c’est encore ce précieux minerai qui conduit un jeune Italien sur cette île, car c’est pour occuper le poste de directeur d’une usine appartenant à la SLN que le docteur en chimie Pierre Ferrari débarque en Nouvelle‑Calédonie. Il fait la connaissance de celle qui deviendra son épouse et que tout le monde surnomme Mounette. Les deux amoureux convolent en justes noces le 17 février 1933 et la mère de Nino opte pour la nationalité de son mari. Ainsi, Nino, malgré ses racines maternelles françaises, détiendra très longtemps la seule nationalité italienne. Sa venue au monde en Italie n’est due qu’à la faveur d’un voyage effectué dans la vieille Europe. Trois mois après sa naissance, la famille Ferrari regagne la Nouvelle‑Calédonie. Nino, enfant unique, y coule des jours heureux durant ses cinq premières années. Une superbe maison, des domestiques, une vie faite de mondanités entre gens de la haute société : les Ferrari mènent une vie enchanteresse. Si la vie dans l’île est idyllique pour la plupart des Caldoches et des Européens, elle est tout autre pour les Kanaks, spoliés de leurs terres et cantonnés dans des réserves. La France ne les considère pas comme des citoyens à part entière et les soumet au Code de l’indi- génat qui leur impose un régime qu’on qualifierait d’apartheid 1.

1. Les différents gouvernements se succèdent sans qu’aucun trouve scandaleux que, dans le pays des Lumières et des droits de l’Homme,­ subsistent ces dis- positions semblant venir d’un autre âge et pourtant instituées par la vénérée IIIe République. Pas même la Grande Guerre, où de nombreux Mélanésiens sont enrôlés, ne vient changer les mentalités. Au demeurant, on comprend mieux qu’en 1931, la France ait exhibé des Kanaks sous l’étiquette « Homme anthropophage de Nouvelle-Calédonie » à l’occasion de l’Exposition­ coloniale

12 NINO FERRER, UN HOMME LIBRE En 1939, les Ferrari se rendent de nouveau en France pour les vacances. Sur le vieux continent la tension est à son comble. Les accords de Munich signés en septembre 1938, par lesquels les démocraties ont abdiqué devant les prétentions ­d’Hitler, n’ont pas éteint l’inextinguible soif de conquête du Führer. Le 1er septembre 1939, l’Allemagne­ envahit la Pologne. Le 3 septembre, la France et la Grande-Bretagne déclarent la guerre à l’Allemagne.­ Débute alors cette « drôle de guerre » durant laquelle rien ne se passe jusqu’au déferlement des blindés allemands en mai de l’année suivante. C’est au moment où la France est acculée à cette étrange défaite que ­l’Italie choisit de lui déclarer la guerre le 10 juin 1940. Ce coup de poignard dans le dos venu de l’autre côté des Alpes restera gravé dans la mémoire de bien des Français et aura, des années plus tard, des conséquences sur l’intégration du jeune Nino dans la métropole. Surprise par la guerre, la famille Ferrari se trouve dans l’impossi- bilité de retourner en Nouvelle‑Calédonie. Elle parvient cependant à gagner ­l’Italie fasciste, s’installe à Rome, puis finalement rejoint la vieille maison familiale des Ferrari, Il Crosio, située à Stazzano entre le Piémont et la Ligurie pour toute la durée de la guerre. Les temps sont durs d’autant plus que le père de Nino est très souvent absent car il travaille à la construction d’une usine en Albanie, pays envahi par ­l’Italie le 8 avril 1939. Dans cette demeure, Nino, entouré de la famille de son père, suit les cours dispensés par sa mère. Plus tard, il racontera à sa manière cette période de sa vie : « Quand j’étais petit je n’étais pas grand et il y avait la guerre partout. Les circonstances de la vie firent de moi un enfant solitaire dans une campagne désertique 1… » internationale de (parmi eux se trouvait l’arrière grand-père de l’ancien international de football Christian Karembeu) et en ait échangé temporaire- ment quelques-uns contre des animaux à un cirque allemand. Il faudra attendre 1946 pour que le Code de l’indigénat soit aboli, et 1957 pour que l’ensemble des Kanaks obtienne le droit de vote. 1. Ferrer, Nino, Textes ?, Le Seuil, coll. « Point virgule », préface Nino Ferrer, postface Thierry Jullien, p. 11.

­L’ÉT RANGE 13 Le régime fasciste s’effondre en 1943, le maréchal Badoglio signe la capitulation le 3 septembre et ­l’Italie poursuit la guerre aux côtés des Alliés. Mussolini, retenu prisonnier par le nouveau régime, est libéré par un commando SS. Il institue dans la zone du nord et du centre de l’Italie­ encore contrôlée par la Wehrmacht, la République de Salò qui se maintient jusqu’en avril 1945. La famille Ferrari, réfugiée dans le nord de ­l’Italie, subit donc la présence fasciste jusqu’au bout. À la fin de la guerre, le père de Nino perd son emploi. Espérant trouver une situation plus réjouissante en France, les Ferrari s’instal­lent à Paris en 1947. Le pays est alors en pleine reconstruc- tion, les tickets de rationnement ont toujours cours et la crise du logement est dramatique. Si la métropole en a fini avec la guerre, une autre a débuté en décembre 1946 en Indochine. Nino a 13 ans et est envoyé dans une pension de jésuites. Ressortissant d’un pays qui a été, durant la guerre, ennemi de la France, il se retrouve en proie à la bêtise et au racisme quotidien émanant tant de ses cama- rades de classe que des professeurs en soutane. Cet apprentissage de la « bassesse humaine » le marquera durablement. Il poursuit sa scolarité dans les meilleurs collèges et lycées de la capi- tale (Janson de Sailly, Henri IV, Saint‑Louis…) fréquentant ainsi la bourgeoisie parisienne à laquelle il appartient culturellement mais plus financièrement car dans cet après-guerre la famille Ferrari a perdu cette aisance qu’elle connaissait en Nouvelle-Calédonie. Vers l’âge de 15 ans, il commence à dessiner puis à peindre, passion qu’il conserve jusqu’à sa mort. C’est également à cette période qu’il écrit ses premières chansons, notamment « L’arbre noir » gravée sur un vinyle en 1979. Au début des années cinquante, alors que les ondes véhiculent les voix d’une nouvelle génération de chanteurs (Juliette Gréco, Georges Brassens, Gilbert Bécaud…), c’est le jazz qui retient toute l’attention du jeune Nino. Sur son poste à galène, il passe ses nuits en pension à écouter cette musique fraîchement débarquée avec les troupes américaines. Son premier contact avec elle se fait par l’intermédiaire­ de l’orchestre de Jacques Hélian alors en pleine

14 NINO FERRER, UN HOMME LIBRE gloire et de Yvonne Blanc. D’ailleurs, le premier disque qu’il achète est Train bleu, joué par celle considérée alors comme la meilleure pianiste française de jazz de l’après‑guerre 1. Adolescent mal dans sa peau, appartenant à une famille bourgeoise déclassée et déra- cinée, la musique est un moyen de s’évader : « Ça m’a permis de décoller vers un autre monde », confiera-t-il 2. Dès lors, Nino Ferrer souhaite lui aussi s’y mettre et après s’être essayé à beaucoup d’instruments – clarinette, trompette, trom- bone, banjo –, il jette son dévolu sur ce dernier et surtout sur la contrebasse qu’il troquera, plus tard, contre une guitare basse Fender après sa découverte du rhythm’n’blues. Nino insistera sur l’influence positive qu’a eu cet instrument sur sa formation : « La basse, ça a été très important pour moi. Je suis illettré en matière de musique, mais de jouer de la basse, ça m’a appris à décom- poser les harmonies, ça m’a permis finalement de composer et […] d’arranger­ 3. » Il appartient à cette confrérie des chanteurs, compositeurs et bassistes d’exception comptant dans ses rangs des membres aussi prestigieux que Paul McCartney, Brian Wilson, Roger Waters ou encore Sting passé également par la contrebasse. Le jazz est une des grandes rencontres musicales de sa vie : il lui apporte le swing, l’art de l’improvisation. Comme le laisse deviner son œuvre, les goûts musicaux de Nino étaient fort éclec- tiques. Influencé par la musique entendue chez lui, il a gardé une tendresse particulière pour certains chanteurs d’avant-guerre tels le duo formé par Jacques Pills et Georges Tabet, Mireille, Jean Nohain, Jean Sablon ou encore Charles Trenet. La musique clas- sique est également importante, particulièrement celle de Mozart et de Rachmaninov. Puis viendront Georges Brassens et Léo Ferré qu’il admirait. Il s’abreuvera à toutes les sources de la musique qu’elle vienne d’Europe ou du continent américain. Attentif aux

1. Même si Boris Vian considérait pour sa part que ce n’était pas du jazz : Vian, Boris, Chroniques de jazz, Le livre de poche, 1998, p. 226. 2. La bonne mémoire, France Inter, 3 novembre 1986. 3. Cité dans Bonnieux, Bertrand, « Nino Ferrer, une voix inétouffable », Écouter voir n° 88, avril 1999, pp. 4‑11, spéc. p. 10.

­L’ÉT RANGE 15 ­mouvements musicaux naissants, il succombera aux charmes de la bossa nova d’Antônio­ Carlos Jobim et de João Gilberto. Puis ce seront les Beatles, les Doors, Santana, Blood Sweat & Tears, Dr. John, et à la fin des années soixante-dix, Jacques Higelin dont il soulignera l’influence déterminante dans sa manière d’aborder l’écriture. Sans oublier l’importance de la musique noire américaine qu’il s’agisse du blues, du jazz (Louis Armstrong, le Modern Jazz Quartet entraîné par John Lewis) ou plus tard du rhythm’n’blues (, ). Pour l’heure il poursuit ses études car, dans sa famille, il n’est pas question de devenir musicien sauf à être concertiste classique mais la porte lui est fermée car il ne sait pas lire la musique. Quant à devenir chanteur, c’est inenvisageable dans le milieu dans lequel il évolue et pourtant le jeune homme ne se rebelle pas : « Je viens d’un milieu bourgeois mais je n’étais pas en révolte contre ma famille. Parce que c’était tous des gens merveilleux, nobles d’esprit, généreux et cultivés 1. » Étonnante déclaration pour un artiste qui signera un fameux « Blues anti-bourgeois ». D’ailleurs, il affirme en 1967 : « Je suis bourgeois dans le sens où j’aime les beaux meubles et les belles maisons et bien manger aussi, mais je ne crois pas être du tout bourgeois en esprit 2. » En 1953, celui qu’il faut encore appeler Nino Ferrari fait la rencontre de Richard Bennett dans un bar de la place de l’Odéon,­ La Phaluche. Le premier est alors en propédeutique à la Sorbonne tandis que le second est en première au lycée Louis‑le‑Grand. Bennett est impressionné par le banjo de Nino et ses faux airs de Van Gogh avec sa barbe blonde et sa pipe. Après avoir parlé de jazz, Nino propose au jeune apprenti batteur de venir enregistrer avec lui un disque à gravure directe Pyral. C’est le début d’une indéfectible amitié. Paris est à l’époque la capitale européenne du jazz et Saint- Germain-des-Prés son épicentre car un grand nombre de musiciens

1. Propos recueillis par Philippe Lefait in Le journal de la nuit, Antenne 2, 25 novembre 1994. 2. Émission diffusée sur Radio Nice Côte d’Azur,­ le 21 août 1967.

16 NINO FERRER, UN HOMME LIBRE noirs américains après‑guerre, fuyant la ségrégation raciale de leur pays, trouvent en France des oreilles attentives et un public de connaisseurs passionnés par cette musique venue de l’autre côté de l’Atlantique.­ Ainsi, à l’instar de Sidney Bechet, Bud Powell ou encore Miles Davis, beaucoup se rendront en France dans le bouil- lonnement des caves germanopratines où les Américains, secondés par d’excellents musiciens du cru (Pierre Michelot, René Urtreger, Eddy Louiss, Maurice Vander, Martial Solal et tant d’autres), émer- veilleront un public VIP de choix (Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Boris Vian et Juliette Gréco notamment). Dans cette ferveur de Saint-Germain, les deux amis vont déve- lopper leur passion pour cette musique et commencer à jouer le jazz Nouvelle-Orléans – celui d’Armstrong­ notamment – dans la rue, principalement au jardin du Luxembourg et sous le Pont Neuf. Nino, pour des raisons pratiques, s’accompagne bien souvent au banjo. Même si cette musique commence à être détrônée par le bebop et le cool jazz, la démarche s’avère pourtant lucrative et le groupe – qui s’appellera bientôt les Dixie Cats – monté notamment avec Stéphane Guérault, le cousin de Bennett, envisage sérieuse- ment de vivre de la musique. Par la suite, ils se feront engager par le Club Montpensier au Palais‑Royal. Nino n’en est pas encore là et c’est une autre rencontre qui retient son attention, car le 25 mai 1953, à 18 ans, il fait la connaissance de Claire, une jeune fille d’un an son aînée, dont il tombe éperdument amoureux. Débute alors un an d’une romance passionnée avant la séparation. Loin de la simple passade, cette histoire le marquera durablement et lui inspirera les chansons « Un an d’amour (C’est irréparable) » et « Claire » dont les enregistrements s’effectueront bien plus tard. Après la rupture, Nino, au bord du gouffre, songe tour à tour à se suicider, à s’engager dans la Légion étrangère pour partir en Indochine alors en guerre, ou encore à devenir explorateur. Il opte finalement pour cette voie mais, sur les conseils avisés de ses parents, poursuit ses études et s’inscrit en lettres à la Sorbonne. Il intègre dans le même temps la troupe de théâtre universitaire.

­L’ÉT RANGE 17 Durant cette période, il continue à se produire avec les Dixie Cats de Richard Bennett. Le groupe se rode progressivement, prend de l’assurance et remporte en 1956 un concours organisé par la revue Jazz Hot pour les orchestres amateurs. Il gagne le droit de jouer à la Salle Wagram lors de La grande nuit du jazz. La formation s’illustre surtout lors des bals organisés par les grandes écoles. Ainsi en 1958, elle participe à l’animation d’une soirée organisée par Polytechnique. Le groupe n’hésite pas à partir jouer en province et notamment au printemps 1958 sur la côte normande au casino de Dieppe. Durant ces années, les Dixie Cats passent également au Vieux-Colombier, ce temple du jazz Nouvelle-Orléans où l’on peut voir parfois Sidney Bechet, Claude Luter ou Boris Vian. Alors que le guitariste Sacha Distel vient de quitter les rivages du jazz pour ceux de la chanson, Ferrer et sa formation continuent inlassablement à se produire dans tout ce que Paris compte de salles. L’année 1959 débute comme s’est achevée la précédente, en jouant dans un grand nombre de bals d’étudiants (bal du notariat, boom HEC…). Les Dixie Cats accompagnent même le prestigieux trompettiste américain de jazz Bill Coleman. Ce dernier, né dans le Kentucky en 1904 et mort à Toulouse en 1981, est alors un musicien respecté. Sa carrière, commencée à l’âge de 14 ans, l’a conduit à jouer et enregistrer avec quelques-uns des plus grands instrumentistes de l’époque : le pianiste Fats Waller, le guitariste Django Reinhardt, les saxophonistes Coleman Hawkins et Lester Young ou encore Count Basie. Avec lui, les Dixie Cats entrent au studio des Champs‑Élysées le 23 janvier 1959 pour graver un super 45-tours dont le titre prin- cipal est « Blues For Teddy » couplé avec « Jef And Stef » / « When The Saints Go Marching In… ». Même s’il ne s’agit que d’un disque réalisé pour des bals d’écoles, c’est le premier véritable enregistrement auquel participe Nino Ferrer. La formation est alors composée en plus de Bennett, de Jeff Mariette au trombone, Stéphane Guérault à la clarinette et de Patrick Joubert au piano. Le groupe récidive l’année suivante avec « Garden-Party chez

18 NINO FERRER, UN HOMME LIBRE les vétos » pour ­l’École nationale vétérinaire de Maisons-Alfort, puis un autre pour ­l’École centrale et un dernier dans lequel ils reprennent le « Blueberry Hill » immortalisé par Fats Domino. L’animation de soirées étudiantes n’est pas réservée à d’obscures formations mais à des musiciens confirmés et il n’est pas rare de croiser sur scène des jazzmen en pleine ascension tel que Claude Bolling. Commençant à être connu dans le milieu, ils sont choisis par la marque Selmer pour une publicité parue dans le magazine Jazz Hot d’avril 1959. Le noyau dur du groupe est alors composé de Richard Bennett à la batterie, de son cousin Stéphane Guérault à la clarinette et de Nino Ferrer à la contrebasse. Au gré des fluctuations, les Dixie Cats compteront en leur sein des membres prometteurs : le futur cinéaste François Leterrier (Les Mauvais Coups avec Simone Signoret, Goodbye Emmanuelle avec Sylvia Kristel ou encore Les Babas-cool), le futur parolier Gilles Thibaut (alors au trombone avant d’écrire pour le gotha de la chanson française), le composi- teur de musiques de film François de Roubaix (à la clarinette), ou encore Gérard Pisani (au saxophone avant de former plus tard le groupe Martin Circus). Parallèlement à cette activité musicale, il obtient sa licence de lettres axée sur l’ethnologie et l’histoire des religions et effectue un stage au Musée de l’Homme.­ Puis il part dans l’Yonne­ à Arcy-sur- Cure avant de rejoindre l’Espagne dans la grotte del Pendo près de Santander faire des campagnes de fouilles sous la direction du professeur Leroi-Gourhan, archéologue et historien spécialiste de la Préhistoire. Le soir, il distrait les archéologues en chantant avec sa guitare. Pour fêter la fin de ses études, sa grand-mère, sentant ses derniers mois venir, lui offre en 1959 un voyage en Nouvelle-Calédonie afin qu’ils puissent se retrouver une dernière fois. Alors que dans le même temps beaucoup de jeunes Français sont envoyés en Algérie pour participer à une guerre qui ne veut pas dire son nom, Nino Ferrer ­l’Italien y échappe et peut donc partir en toute quiétude à la rencontre de son enfance. Il quitte la France le 1er août et en profite

­L’ÉT RANGE 19 pour effectuer le tour du monde en bateau, faisant notamment escale en Guadeloupe, à Panama ou encore en Polynésie française. Lorsqu’il débarque en Nouvelle‑Calédonie, sa grand-mère mater- nelle est morte. Il met cependant son séjour à profit pour rencontrer sa famille et renouer avec les paysages de ses premières années. Il participe même à des fouilles avec des archéologues néo-zélandais sur ­l’Île des Pins située au sud-est de la Grande Terre. De retour à Paris à l’été 1960, Nino s’aperçoit que les perspectives qui s’offrent à lui en tant qu’archéologue sont peu réjouissantes. De nouveau en proie à un certain désarroi, il envisage un temps de devenir représentant de commerce. Puis, grâce à une relation, il se voit proposé un poste à ­l’Unesco. Après réflexion, il refuse cet emploi car il ne lui permettrait plus de faire de la musique. Il se donne alors deux à trois ans pour percer comme musicien. C’est donc finalement sans regret qu’il met un terme à sa carrière d’arché­ologue : « Ça n’était pas mon truc, indépendamment de l’aspect matériel, des salaires de misère 1 » confie-t-il plus tard. En 1972, sur le plateau de Denise Glaser, il reviendra sur cette période- là : « Pendant tout ce temps-là j’écrivais des chansons, mais je ne pensais pas les exploiter, vous savez, je viens d’une famille, d’un milieu, où ça ne se fait pas, enfin, on ne devient pas chanteur… Alors je faisais des chansons juste parce que ça m’amusait. Et puis, peu à peu, je commençais quand même à gagner ma vie, j’ai fini mes études. Puis j’ai laissé tomber. J’avais fait des études absurdes, je suis archéologue figurez-vous, préhistorien 2. » Bennett, qui a eu recours pendant son année d’absence à des contre- bassistes remplaçants, lui offre de reprendre sa place au sein des Dixie Cats, ce qu’il accepte et la formation continue notamment d’accompagner Bill Coleman « un type merveilleux, vraiment 3. » Mais pendant son tour du monde l’univers musical a profondément évolué. Alors que l’année précédente, avant de quitter la France

1. Legras, Marc, « Nino Ferrer, trente ans d’amour… irréparable », Chorus n° 7, printemps 1994, pp. 26‑30, spéc. p. 27. 2. Glaser, Denise, Discorama, 2 juillet 1972. 3. Ibid.

20 NINO FERRER, UN HOMME LIBRE il pouvait entendre sur les ondes « Petite fleur », à son retour le jazz Nouvelle-Orléans n’en finit pas d’agoniser depuis la mort de Sidney Bechet et c’est la « nouvelle vague » de Richard Anthony qui l’accueille. Avec retard, l’Hexagone­ a pris en marche le train du rock’n’roll. Ironie de l’histoire, l’un des précurseurs français de cette musique – si on met de côté les disques parodiques sortis sous le pseudonyme de Henri Cording et réalisés par le trio Boris Vian, Henri Salvador et Michel Legrand –, Danyel Gérard, a été initié à la guitare par Nino Ferrer lui-même ainsi que le confie le chanteur au chapeau : « On se retrouvait avec des copains dans un café de Saint-Germain-des-Prés. Et un jour, alors que je venais d’acheter ma première guitare, j’ai rencontré un type qui m’a proposé de m’apprendre à en jouer. C’était Nino Ferrer 1. » Finalement l’élève a pris de l’avance sur le maître dans la conquête des hit-parades, mais ce n’est que partie remise et le malheureux Danyel Gérard, suite à son départ pour la guerre d’Algérie,­ sera détrôné par Johnny Hallyday, porte‑étendard d’une génération naissante pas encore appelée yé-yé (il faudra attendre un article du sociologue Edgar Morin paru dans Le Monde du 6 juillet 1963 pour que cette expression fasse son apparition), qui en 1960 remporte un succès colossal avec son 45-tours « Souvenirs, souvenirs ». Toute une série de chanteurs s’engouffre alors dans la brèche ouverte par Danyel Gérard, Johnny Hallyday et Richard Anthony. Ce mouvement a pris Nino Ferrer et les Dixie Cats par surprise. Hypnotisés par le jazz, ils n’ont rien vu venir du bouleversement musical et culturel, et lorsque les yé-yés arrivent, ils sentent qu’il est presque déjà trop tard. Le choc est rude. Des gamins d’à peine 20 ans deviennent des vedettes en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. Ferrer et ses comparses mesurent le fossé béant qui s’ouvre entre eux et cette génération avec laquelle ils ont presque dix ans d’écart. Ils pensaient se construire une carrière sur le long terme en posant au fur et à mesure des jalons à coups de concerts, les voilà contraints d’évoluer ou de disparaître. La claque est énorme car,

1. Jouffa, François & Barsamian, Jacques, Vinyl Fraise. Les années soixante, éd. Michel Lafon, p. 36.

­L’ÉT RANGE 21 pour les yé-yés, ces jeunes gens de 26 ans font figure de « vieux » appartenant à une autre génération, un autre monde. Ces fils de bourgeois fréquentant les milieux sélects du jazz se retrouvent d’un coup ringardisés, balayés par la vague, condamnés à voir les autres réussir.

22 NINO FERRER, UN HOMME LIBRE LE MALENTENDU

La décennie soixante importe en France le rock’n’roll. Nino Ferrer et les Dixie Cats se retrouvent face à une problématique simple : évoluer ou périr. Cette mutation passe inévitablement par la prise en compte de la vague de fond yé-yé et par le passage du ternaire (le jazz) au binaire (le rhythm’n’blues et le rock’n’roll). Délétère pour le groupe, cette conversion sera décisive pour Nino. Après plusieurs tentatives infructueuses, le succès tant attendu va finir par arriver avec le cata- clysmique « Mirza » en 1966. Débutera alors un lustre doré où les tubes se succéderont, en installant durablement une image d’« amu- seur public » qui deviendra vite pesante pour cet artiste complexe, multiple et torturé. Avec les années soixante et le succès, naîtra un malentendu qui ne disparaîtra jamais et sera lourd de conséquences pour la suite de la carrière de Nino Ferrer.

Bien décidée à suivre l’évolution des modes, la formation se résout à contrecœur à passer progressivement du jazz au rhythm’n’blues au début des sixties. Les Dixie Cats, rebaptisés RB RB (pour Richard Bennett Rhythm’­n’Blues), sont approchés par un orga- nisateur de tournées pour faire la première partie des Chaussettes noires. La seule condition posée est que le groupe devienne plus rock. Les Dixie Cats embauchent alors deux guitaristes (Danny Marane et Dean Morton) et deux chanteuses qui viennent grossir les rangs d’une formation composée de Richard Bennett à la batterie, Nino à la basse, Stéphane Guérault au saxophone ténor et Paul Rakotonirina à l’orgue.

LE MALENTENDU 23