Les Rites Funéraires Dans L'afrique Du Nord Chrétienne Du 3 E Au 5E Siècle
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UNIVERSITÉ DE STRASBOURG ÉCOLE DOCTORALE 270 EA 4377 THÈSE présentée par : Justin ZANGRÉ Soutenue le : 29 juin 2016 pour obtenir le grade de : Docteur de l’université de Strasbourg Discipline/Spécialité : Théologie Catholique LES RITES FUNÉRAIRES DANS L’AFRIQUE DU NORD CHRÉTIENNE DU 3 e AU 5 e s. à la lumière des œuvres de Tertullien, Cyprien, Lactance et Augustin THÈSE dirigée par : Monsieur FAIVRE Alexandre Professeur, Université de Strasbourg Madame VINEL Françoise (directrice 2013-2016) Professeur , Université de Strasbourg RAPPORTEURS : Madame BERTRAND-DAGENBACH Cécile Professeur, Université de Lorraine Monsieur JEANJEAN Benoît Professeur, Université de Bretagne Occidentale AUTRE MEMBRE DU JURY : Monsieur CHAPOT Frédéric Professeur, Université de Strasbourg REMERCIEMENTS Nos études universitaires ont été un bonheur immense grâce aux professeurs et étudiants croisés sur le chemin du savoir. L’immersion dans ces années de satisfaction a été possible par le concours d’hommes et femmes auxquels nous adressons notre très profonde gratitude. A ma très chère Maman dont l’amour, l’abnégation, les bénédictions et la présence maternels m’ont toujours donné des ailes et du zèle pour la route de vie Aux Responsables ecclésiastiques de l’Archidiocèse de Ouagadougou qui nous ont fait confiance et nous ont permis de mieux nous outiller pour le service de l’Église et de la société Aux Autorités ecclésiastiques de l’Archidiocèse de Strasbourg qui ont facilité notre parcours académique, grâce à leur sens élevé de l’accueil dans un élan de solidarité active et généreuse Aux guides de valeur qui nous ont permis d’acquérir les moyens et les clés qui permettent d’entrer dans le temple exaltant de la recherche scientifique A Monsieur Alexandre Faivre dont les compétences et la rigueur méthodologique nous ont propulsé vers un mieux-être intellectuel. Nous lui souhaitons dans son état actuel, la force et la persévérance pour continuer la route. Nous lui serons reconnaissant toute notre vie pour le goût de la recherche qu’il nous a donné comme un héritage paternel que nous partagerons tant que nous vivrons. A Madame Françoise Vinel qui a accepté de prendre le train en marche jusqu’à son terminus. Sa disponibilité a été un apaisement ; son sens de la motivation un véritable tremplin pour nous Aux membres du jury, Madame le Professeur Cécile Bertrand-Dagenbach, et Messieurs les Professeurs Frédéric Chapot et Benoît Jeanjean qui ont accepté d’examiner notre travail A toutes celles et ceux de tous horizons qui ont apporté leur pierre précieuse à notre édifice intellectuel Toute ma profonde gratitude fraternelle avec ces mots à l’adresse de tous : « Vivite ad multos et faustissimos annos ! Estote beati semper !» INTRODUCTION GÉNÉRALE La célébration de la mort est une donnée universelle constatable dans toutes les cultures et les religions. Si le culte funéraire est une constante dans la vie des peuples, les pratiques liées à ce culte peuvent être spécifiques aux groupes humains, sociaux et religieux. Nous avons choisi de porter notre regard sur la célébration de la mort en Afrique du Nord chrétienne du 3 e au 5 e siècle. Nous nous intéressons spécifiquement au culte funéraire des chrétiens dans un environnement païen et chrétien. Notre objectif est d’analyser les renseignements que nous fournissent les premiers auteurs africains chrétiens que sont Tertullien, Cyprien, Lactance et Augustin, sur la façon dont les chrétiens célébraient la mort des leurs. Cette perspective d’approche de la mort et de ses pratiques fonde la formulation du sujet qui guidera le présent travail : « Les rites funéraires dans l'Afrique du Nord chrétienne du 3 e au 5e siècle. À la lumière des œuvres de Tertullien, Cyprien, Lactance et Augustin ». Il nous paraît important de faire deux remarques préliminaires sur le sujet tel que nous l’avons formulé. D’abord, il peut paraître étonnant que le choix des auteurs chrétiens de l’Afrique du Nord ne prenne pas en compte Arnobe de Sicca Veneria en Tunisie, maître de Lactance, intéressé par la question du ritualisme païen. La raison est que nous avons préféré l’élève au maître du fait de la plus grande abondance de ses écrits qui nous donnent plus de matière pour notre approche. Cependant, nous faisons occasionnellement référence à Arnobe à chaque fois que cela est utile à notre analyse 1. De plus, nos quatre auteurs, bien qu’ils soient Africains, ne nous renseignent pas sur le culte des morts dont l’Afrique du Nord aurait le monopole. Ils livrent des informations qui prennent aussi en compte ce qui se vit dans la société et dans l’Eglise africaine multiculturelle et plurielle. Les rites 1 Infra, p. 97-100 ; 167 ; 239 ; 283. 1 funéraires dans paganisme et dans le christianisme sur le sol africain ne sont pas fondamentalement différents de ceux d’Italie par exemple, et les renseignements des auteurs païens de la littérature latine nous éclaireront tout au long de notre parcours. Il est évident que le culte des morts dont Tertullien, Cyprien, Lactance et Augustin nous informent est largement célébré par l’ensemble des habitants de l’Empire romain et de ses colonies d’Afrique du Nord. Notre période d’étude est marquée par la présence du paganisme, du judaïsme et du christianisme. Par souci de délimiter notre approche, nous ne prenons pas en considération la distinction identitaire entre chrétiens et juifs, entre croyances païennes et croyances judéo-chrétiennes en Afrique du Nord. La référence au judaïsme est surtout perceptible à travers la question de la crémation et de l’inhumation 2 et quelques allusions rapides que permettent des passages bibliques auxquels nous nous référons. L’antériorité du paganisme a pétri les mentalités, façonné la culture et imprégné la célébration des funérailles. Les chrétiens qui vivent dans ce milieu païen ou qui en sont issus portent un héritage incontestable. Dans ce contexte de coexistence complexe du christianisme et du paganisme, comment les chrétiens ont-ils célébré leurs morts ? Avaient-ils des pratiques ou des rites funéraires propres ou célébraient-ils leurs morts comme le faisaient les païens ? Si l’héritage cultuel du paganisme est indéniable, les chrétiens l’ont-ils passé au crible de leur idéal de vie pour instituer, au moins progressivement un culte funéraire qui puisse correspondre à leur identité ? Afin d’apporter des réponses à ce questionnement, nous nous fondons principalement sur les œuvres de Tertullien 3 , Cyprien 4 , Lactance 5 et Augustin 6 . Ils nous fournissent des 2 Infra, p. 160-164. 3 Sur la vie de Tertullien, nous nous inspirons de l’œuvre de HENNE P., Tertullien l’Africain , Paris, Cerf, 2011, p. 29-52. Tertullien, fils de centurion de la Proconsulaire, est né entre 150 et 160, à Carthage. Cette datation se fonde sur ses grandes œuvres qui couvrent la période 197- 220 environ, telles que Aux nations et l’ Apologétique (197) qui cristallisent sa défense du christianisme contre le paganisme; Sur le témoignage de l’âme (entre 197-200); Ad Scapulam (212). Homme dissipé dans sa jeunesse, selon ses propres dires, il fréquentait les spectacles dont il témoigne dans ses œuvres: « Nous avons vu naguère sur la scène Attis mutilé, votre fameux dieu des Pessinotes, et un autre, brûlé vif, qui avait pris la figure d’Hercule. Nous avons ri aussi, dans les intermèdes de midi, de Mercure qui éprouvait les morts avec le fer rouge ; nous avons vu le frère de Jupiter, armé d’un marteau, emmener les cadavres des 2 renseignements sur les pratiques funéraires en milieu païen et chrétien. Ils se prononcent sur les rites funéraires païens en qualité d’hommes pétris de la foi chrétienne et d’écrivains. Les renseignements qu’ils livrent pour la plupart se situent dans le cadre général d’une apologie pour la foi chrétienne. Seul Augustin consacre un traité au culte funéraire, le De cura pro mortuis gerenda , écrit vers 421-422 en réponse à une question de son ami Paulin de Nole. gladiateurs » ( Apologétique XV, 5, Paris, Les Belles Lettres, 2003, p. 36). Sa conversion intervient à l’âge adulte, alors qu’il était jadis du nombre des railleurs du christianisme, de ses vérités dont celle sur la résurrection (Idem, Apologétique XVIII, 4). Tertullien confiera avec amertume : « J’aime mieux ne pas tout dire que tout remémorer » ( Spectacles , 19, 5). Homme de grande culture, maniant aussi bien le latin que le grec, il a mis sa science au service du christianisme, pour la défense de ses convictions contre le paganisme. 4 Cyprien est né entre 200 et 210 d’une famille païenne. Il reçoit des enseignements de grammairien et de rhéteur; avant sa conversion vers 245, il professa comme maître de rhétorique. Évêque en 249 de la Proconsulaire Carthage, il exerça sa charge épiscopale pendant la persécution de Dèce et en période de peste (249-251). Ses nombreuses lettres adressées aux responsables ecclésiastiques et aux chrétiens fournissent des renseignements précieux sur la vie de l’Église et des chrétiens à Carthage. Pour une approche de la correspondance de Cyprien nous pouvons nous référer à DUQUENNE S. J., Chronologie des lettres de S. Cyprien. Le dossier de la persécution de Dèce , Bruxelles, Société des Bollandistes, 1972. 5 Lactance est né vers 240 et mort vers 320. Il fut disciple d’Arnobe de Sicca Veneria (Numidie) auteur lui-même de l’ Adversus nationes ou l’ Adversus gentes en sept livres composés entre 300 et 311. Lactance s’est converti au christianisme à l’âge adulte. Il a tenté un compendium de la doctrine chrétienne. Dans les Institutions divines (entre 305 et 313), il se comparait même à Tertullien dont il dit qu’il a essayé dans sa production littéraire « de répondre aux accusations, ce qui consiste uniquement à se défendre et à nier » (Institutions divines , I, 4, 3).