53 ASCENSIONS ET AVENTURES EN MONTAGNE CHOISIES Par Pierre-André TOUTTAIN PRÉFACE De Claude METTRA ILLUSTRATIONS De Georges BEUVILLE
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COLLECTION Trésor des Jeunes CENT ET UN CONTES Préface de Maurice Fombeure DEUX CENT CINQUANTEPréface de René POÈMES Poirier DE FRANCE SOIXANTE-QUINZE AVENTURES VÉCUES DEPréface LA deTERRE, Pierre MacDE Orlan,LA MERde l'Académie ET DU Goncourt CIEL CENT VINGT HISTOIRES DE BÊTES Préface du Dr F. Méry IMAGES ET ÉPISODES DE CENT GRANDES FIGURES FRANÇAISES Préface de Georges Duhamel, de l'Académie française CENT CINQUANTE AVENTURES DE CHASSE ET DE PÊCHE Préface de François Edmond Blanc SOIXANTE RÉCITS DU NOUVEAU MONDE Préface de A. t'Serstevens CINQUANTE EXPLOITSPréface de Etienne ET RÉCITSLalou SPORTIFS CINQUANTE-CINQ HISTOIRES EXTRAORDINAIRES FANTASTIQUESPréface de Marcel ET INSOLITESAymé SOIXANTE-CINQPréface VOCATIONS de Luc Bérimont DE MUSICIENS SOIXANTE-DIX BEAUX MÉTIERS Préface de Charles Vildrac CINQUANTE-SEPT AVENTURES, VOYAGES ET COMBATS SUR MER Préface de Georges-G. Toudouze, de l'Académie de Marine QUATRE-VINGT-CINQ RÉCITS ET AVENTURES DE L'AIR Préface de Didier Daurat CINQUANTE-DEUX NOUVELLES ET RÉCITS POUR ELLES Préface de Marianne Monestier Des premiers voyages au Mont-Blanc à la conquête de f Annapurna 53 ASCENSIONS ET AVENTURES EN MONTAGNE CHOISIES par Pierre-André TOUTTAIN PRÉFACE de Claude METTRA ILLUSTRATIONS de Georges BEUVILLE GRUND PARI S « Sans doute, d'autres iront-ils affronter des pics peut-être moins hauts, mais plus redoutables encore. Lorsque le dernier aura succombé, comme hier sur les Alpes et aujourd'hui sur les Andes, il restera à conquérir les faces et les arêtes. Non, au siècle de l'aviation, le terrain de jeu des meilleurs grimpeurs n'est pas prêt de trouver ses limites. » Lionel TERRAY (Les Conquérants de l'Inutile) Aux futurs 64 conquérants de l'inutile". P.-A. T. PRINTED IN FRANCE PRÉFACE L ES éditeurs de musique avaient jadis, une coupable prédilection pour ces ensembles contradictoires appelés « pots- pourris » où, par exemple sur le thème commun de la valse, voisi- naient Chopin et Vincent Scotto, Mozart et Waldteufel, au grand mépris des lois mêmes qui inspirèrent différemment chacun de ces compositeurs et qui voulaient que certaines œuvres fussent écoutées avec attention, les autres étant seulement destinées à créer un climat propre à la danse. Un tel péril guette toujours les auteurs d'anthologies et dans le vaste domaine de la montagne, qui touche à presque tous les aspects de notre humaine condition, la tentation était grande de multiplier les textes littérairement valables, sans se préoccuper du lien profond qui pouvait exister entre eux, sans par conséquent tenter de montrer tout ce que l'expérience de la montagne pouvait avoir d'irremplaçable, d'irré- ductible à toute autre expérience, tout ce qui fait que l'amateur de montagne (terme qui n'a guère de sens avant le xxe siècle) semble appartenir à une humanité singulière, à une franc- maçonnerie qui a ses rites et ses lois et qui réclame de ses fidèles une vocation et des sacrifices. Cette tentation Pierre-André Touttain l'a ignorée parce qu'en choisissant l ensemble des textes qui constituent le présent volume, il a voulu surtout mettre en évidence, au delà des lieux communs qui célèbrent la solitude et la grandeur des cimes invincibles, ce rapport secret qui noue entre l'homme et la montagne une fami- liarité qu'aucun danger, qu'aucun désastre ne parviennent à rompre. La trace qu'il a suivie, c'est celle de l'antique combat entre l'homme et la nature, combat inégal au reste, que nos semblables ont longtemps refusé et qu'aujourd'hui beaucoup abordent sans en connaître toutes les règles. Aussi a-t-il retenu surtout, dans une littérature abondante et parfois plus soucieuse des prouesses individuelles que de vraies conquêtes de l'homme, tout ce qui lui a semblé témoigner d'une véritable passion, et l'on voudra bien donner ici au mot passion son sens premier, qui définit tout ce qu'un être peut supporter de difficile et de douloureux venant de l'objet de son désir, sans pour autant cesser d'être par lui fasciné. L'enjeu de ce combat c'est la forme suprême de la joie. Les « Conquérants de l'Inutile », pour reprendre la belle image de Lionel Terray, obéissent à un besoin mystérieux, celui de monter au plus haut du ciel, d'accéder en un lieu où la lumière est plus pure, l'air plus léger, celui de s'accorder au rythme profond de l'univers; la plénitude à laquelle ils accèdent, après avoir connu une tension physique et nerveuse extrême, est celle-là même que nos ancêtres médiévaux cherchaient à connaître en élevant vers le firmament les flèches gothiques, qui à l'époque, apparurent comme autant de défis aux servitudes de la matière et aux lois de l'équilibre physique. Lorsque les architectes du XIIe et du XIII* siècle lancèrent à des hauteurs jusque-là inac- cessibles les fragiles entassements de pierres qui devaient de très loin annoncer aux fidèles les maisons de Dieu, ils virent dans leurs édifices moins le triomphe de nouvelles techniques que celui de la volonté et de l'audace. Ils étaient à la recherche d'une exaltation toute semblable à celle qui anime aujourd'hui les voyageurs de l'abîme, car ils savaient déjà, comme l'écrira Goethe plus tard dans « Wilhelm Meister », « qu'il n'est guère de véritables jouissances qu'au point où commence le vertige ». Ce vertige il est d'ordre physique d'abord parce qu'au cœur de la montagne, comme au sommet des grands sanctuaires, l'homme est affronté directement à l'immensité. Mais il est aussi d'ordre spirituel et il traduit l'ivresse sans limites de celui qui s'enfonce dans un chemin de plus en plus solitaire et qui, en s'éloignant des hommes, pénètre dans l'intimité minérale de la terre, inti- mité qui fait que le marcheur s'enfonce dans la montagne comme on s'enfonce dans une grotte ou un labyrinthe. En se perdant en elle, en laissant se refermer sur lui toutes les dimensions de la montagne, son infinité, son silence, son obscurité ou son éblouis- sement, le voyageur est habité par la certitude d'errer dans la matrice même de la nature et par là d'approcher le vrai secret de la création. Les anciens le sentaient si bien qu'ils avaient fait de leurs sommets des lieux sacrés, entourés d'interdits où nul ne pouvait impunément pénétrer comme le prouvent les mésa- ventures d'un certain Prométhée qui s'était avancé assez loin, près de la haute demeure des divinités pour dérober une parcelle de feu mais qui expia longuement son audace, cloué sur un rocher que hantaient les oiseaux des cimes. Et l'image même de la montagne interdite, traversant les diverses mythologies où l'I da, refuge des dieux hellènes se confond, avec le Sinaï où Moïse eut la révélation de la Loi, nous la retrouvons intacte, identique à sa fonction première dans le modèle du roman moderne, dans « le Château » de Kafka, où nous voyons un pitoyable arpenteur, nommé K. tenter vainement d'être admis dans la cité mystérieuse qui domine le village, comme un sommet étincelant dans sa neigeuse et inaccessible clarté surplombe la vallée bourdonnante d'activités quotidiennes et de médiocres soucis. Cette hantise de la montagne que nous retrouvons à toutes les époques de l'histoire, depuis la construction des pyramides, cimes artificielles où les pharaons-dieux imitent les œuvres de la nature, jusqu'aux plus récentes expéditions conçues par les alpi- nistes modernes pour vaincre cette même nature dans ce qu'elle a de plus hostile, traduit en effet une des entreprises les plus délirantes de l'imagination humaine, celle d'accéder, par une sorte de magie supérieure à une véritable éternité. Car la mon- tagne est par excellence un univers que le temps n'atteint point. La neige des hautes altitudes est le domaine d'une virginité immuable, les fantastiques parois rocheuses sont le masque immo- bile d'un monde à jamais pétrifié d'où toute ride, toute méta- morphose sont absentes. C'est cette virginité, c'est cette pétri- fication qu'inconsciemment recherche tout aventurier des sommets. En s'enfouissant dans les mystères diurnes et nocturnes où semblent s'ouvrir de nouvelles portes de la perception où tout, bruit, odeur, vision, semble s'ordonner selon une tonalité inatten- due et pleine d'envoûtements, l'homme participe à un mouvement qu'aucune servitude, aucune dégradation ne saurait atteindre. Il abandonne sa modeste et périssable histoire pour coïncider tout à coup avec la grande histoire de la vie, pour épouser toutes les formes d'une gigantesque géologie inaccessible à la destruction et à la mort. Au terme de cette identification avec la terre, loin des rumeurs et des ambitions quotidiennes, le montagnard acquiert un singu- lier sentiment de puissance. Comme l'écrit Samivel : « Ces mon- tagnes couchées autour de moi en cercle, j'avais cessé peu à peu de les considérer comme des ennemis à combattre, des femelles à fouler au pied, ou des trophées à conquérir afin de me fournir à moi-même et de fournir aux autres un témoignage de ma propre valeur ». Commencée par un défi l'aventure alpine s'achève par un rêve de domination souveraine. Au sommet de la mon- tagne, nous veillons sur le monde comme le phare veille sur la mer. Ce que les textes ici rassemblés nous proposent, c'est de quoi rêver sur ces entreprises singulières où l'homme, après avoir dominé sa propre énergie, se nourrit de l'espoir de dominer d'une certaine manière l'énergie de la nature. Claude METTRA G. Rébuffat Face nord des Grandes Jorasses T i A face nord des Grandes Jorasses? Elle est difficile et surtout elle est belle.