SYLVIE NOREAU

ÉTUDE DE L’UTILISATION DES QUINTES PARALLÈLES DANS LA MUSIQUE FRANÇAISE DE PIANO ENTRE 1880 ET 1940

Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval dans le cadre du programme de maîtrise en musique pour l’obtention du grade de Maître en musique (M. Mus.)

FACULTÉ DE MUSIQUE UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC

2012

© Sylvie Noreau, 2012 i

Résumé

L’interdiction des quintes parallèles fait figure de loi immuable dans les études d’harmonie et de contrepoint, souvent imputée au fait qu’elles créent de l’ambiguïté tonale. Cependant, les cas de transgression de cette règle dans la musique de piano en France sont nombreux entre 1880 et 1940, période de foisonnement de styles et d’évolution tonale. Ce mémoire s’intéresse à l’utilisation de cet élément dans la musique pour piano à cette époque. Après une brève définition et un bref historique de la problématique, il expose les différents aspects de la règle telle qu’elle est énoncée dans plusieurs traités et dresse un portrait de la musique de piano et de l’évolution de la tonalité en France entre 1880 et 1940. Il propose ensuite un classement des types de quintes parallèles, puis l’applique au répertoire étudié.

En conclusion, le mémoire aborde le rôle et l’impact des quintes parallèles sur le langage pianistique.

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Abstract

The prohibition of parallel fifths seems to be an unassailable law in the study of harmony and counterpoint, often attributed to the fact that they create tonal ambiguity. However, there are many instances of this rule being transgressed in piano music in France between

1880 and 1940, a period marked by the proliferation of styles and tonal evolution. This dissertation focusses on the use of this element in the piano music at the time. Following a brief status quaestionis and historical survey, it presents the different aspects of the rule as stated in several treatises and draws a picture of piano music and the evolution of tonality in France between 1880 and 1940. It then proposes a typology of parallel fifths and applies it to the repertoire in question. In conclusion, the role of parallel fifths and their impact on the pianistic language are discussed.

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Remerciements

Lorsque j’ai discuté pour la première fois d’un sujet de mémoire sur les quintes parallèles avec mon directeur de recherche, je m’attendais bien honnêtement à ce qu’il tente de me dissuader, qu’il me dise que je ne pourrais rien faire avec un sujet pareil. Je le proposais uniquement pour m’enlever cette obsession de la tête, pour pouvoir passer à autre chose.

Quelle ne fut pas ma surprise de le voir me répondre avec enthousiasme que c’était un sujet envisageable et approprié pour un mémoire de maîtrise! J’allais enfin pouvoir étudier cette règle qui a fait rager plusieurs de mes condisciples et qui moi, me fascinait depuis le cégep!

J’ai rapidement découvert que ce sujet que je croyais circonscrit était au contraire

étonnamment vaste et riche. Cinq ans plus tard, plusieurs questions ont trouvé des réponses, qui sont consignées dans ce mémoire, mais plusieurs des réponses ont soulevé de nombreuses autres questions qui alimenteront certainement mes réflexions dans les prochaines années.

Je ne peux passer sous silence la contribution de nombreuses personnes sans qui je n’aurais jamais pu mener à bien cette entreprise. Tout d’abord, Monsieur Paul Cadrin, mon directeur de recherche, qui a su me faire évoluer comme musicologue, parfois même malgré moi, en me donnant des conseils judicieux qui, parce qu’ils ne m’apportaient pas toujours exactement la réponse comme je l’attendais, m’obligeaient constamment à chercher plus loin par moi-même. Que dire de son savoir, qui a été pour moi une source considérable d’enrichissement! Merci également pour la disponibilité malgré un horaire ultrachargé! Ensuite, mes condisciples et mes professeurs qui, par leur air ébahi et leurs nombreuses questions à l’énoncé de mon sujet de recherche, m’ont obligé à constamment me remettre en question et m’ont aidée à clarifier mes idées. Une pensée également pour les iv membres du comité d’évaluation de mon projet de mémoire qui, par leurs questions et leurs suggestions, m’ont permis de clarifier le sujet de mon mémoire.

Ma famille a également été une source constante de soutien et d’encouragement.

Merci à mes parents, Jean et Nicole, qui ont su trouver les mots pour m’encourager dans les moments difficiles, m’écouter et m’aider à clarifier mes idées, même si le sujet de mon mémoire n’entre pas dans leur champ de compétences. Merci également pour le soutien technique! De même, mes beaux-parents, Dominic et Francine, qui bien qu’eux non plus ne soient pas musiciens, se sont toujours intéressés à ce que je faisais et m’ont soutenu. Merci aussi à Michelle, François, Véronique et Sébastien pour les encouragements! Et merci aux amis pour leur compréhension et leur sollicitude. Et le dernier, mais non le moindre, l’homme qui partage ma vie, mon amoureux, Éric, pour sa formidable compréhension et son soutien dans ce très long et difficile périple qu’est la rédaction d’un mémoire de maîtrise. Merci d’avoir enduré sans plaintes les longues heures de travail, les nombreux contretemps et mon désintéressement prolongé pour tout ce qui ne se déplace pas en quintes! Merci d’avoir pris soin de moi durant tout ce temps et d’avoir toujours gardé confiance en mes capacités. v

Table des matières

Résumé ...... i Abstract ...... ii

Remerciements ...... iii

Table des matières ...... v Liste des tableaux ...... vii Liste des exemples ...... ix

Introduction ...... 1 Problématique ...... 2 Objectifs ...... 5 Méthodologie ...... 5

Chapitre 1 : Les quintes parallèles du Xe au XIXe siècle ...... 12 1.1 Définition ...... 12 1.2 Historique ...... 13

Chapitre 2 : Les quintes parallèles dans les traités d’harmonie, de contrepoint et de composition aux Xe et XIXe siècles en France ...... 21 2.1 Énoncés de la règle générale ...... 24 2.2 Conditions particulières d’application de la règle ...... 27 2.3 Exceptions possibles à la règle ...... 34 2.4 Explications et justifications de la règle ...... 58

Chapitre 3 : La musique de piano au tournant du XXe siècle : esthétiques et état du langage tonal ...... 65 3.1 La musique de piano en France entre 1880 et 1940 ...... 66 3.2 Évolution de la tonalité du XIXe au XXe siècle en France ...... 72 3.2.1 Définition de la tonalité ...... 73 3.2.2 Tonalité classique ...... 75 3.2.3 Tonalité romantique ...... 76 3.2.4 Debussy, l’impressionnisme et la tonalité ...... 77 3.2.5 La tonalité au XXe siècle ...... 82

Chapitre 4 : Les types de quintes parallèles dans le répertoire ...... 87 4.1 Quintes parallèles en cas isolés ...... 88 4.1.1 Quintes parallèles « apparentes » ou « réelles » ...... 88 4.1.2 Quintes parallèles « cachées » ou « ambigües » ...... 90 4.2 Quintes parallèles en cas multiples (séries) ...... 92

Chapitre 5 : Les quintes parallèles dans la musique française de piano entre 1880 et 1940 ...... 96 vi

5.1 Principaux types de quintes parallèles dans la musique française de piano entre 1880 et 1940 ...... 103 Quintes parallèles cadentielles ...... 104 Quintes parallèles dans la résolution d’accords dissonants ...... 108 Quintes parallèles causées par une erreur dans la conduite des voix ...... 114 Quintes parallèles par croisement ...... 116 Quintes avec notes ornementales ...... 119 Quintes parallèles créant un enrichissement de la texture ...... 134 Quintes parallèles structurelles ...... 158 Quintes parallèles créant des effets particuliers ...... 163 Quintes en notes ornementales ...... 166

Conclusion ...... 170

Annexe 1 : Traités d’harmonie, de contrepoint et de composition étudiés dans la recherche ...... 177

Annexe 2 : Liste des œuvres consultées contenant des quintes parallèles ...... 179

Annexe 3 : Liste des œuvres consultées ne contenant pas de quintes parallèles ...... 209

Annexe 4 : Proportion d’exemples de chaque type de quintes parallèles par compositeur (pourcentage) ...... 221

Bibliographie ...... 223

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Liste des tableaux

Tableau 2.1 – Interdiction des quintes parallèles dans les traités ...... 25 Tableau 2.2 – Tolérance des quintes parallèles concernant les retards ...... 43 Tableau 2.3 – Tolérance de quintes parallèles dans la résolution de l’accord de sixte augmentée avec quinte (sixte allemande) ...... 53 Tableau 2.4 – Tolérance de quintes parallèles dans la résolution des accords de neuvième ...... 55 Tableau 2.5 – Tolérance de quintes parallèles dans la résolution de divers accords dissonants ...... 56 Tableau 2.6 – Traités justifiant l’interdiction des quintes parallèles par leur mauvais effet sonore ...... 59 Tableau 2.7 – Traités justifiant l’interdiction des quintes parallèles par l’ambiguïté tonale ...... 62 Tableau 3.1 – Principaux courants esthétiques présents dans la musique de piano en France entre 1880 et 1940 ...... 66 Tableau 4.1 – Types de quintes parallèles dans le répertoire ...... 87 Tableau 5.1 – Nombre d’œuvres analysées par compositeur et nombre d’œuvres contenant des quintes parallèles ...... 97 Tableau 5.2 – Nombre d’œuvres analysées selon la décennie de composition ...... 100 Tableau 5.3 – Nombre d’œuvres analysées selon la forme ...... 101 Tableau 5.4 – Proportion de chacun des types de quintes parallèles dans les œuvres étudiées ...... 103 Tableau 5.5 – Œuvres contenant des quintes parallèles simples sur les cadences ...... 106 Tableau 5.6 – Œuvres contenant plus d’une paire de quintes parallèles sur les cadences ...... 108 Tableau 5.7 – Œuvres comportant des séries d’accords de septièmes avec des quintes parallèles ...... 112 Tableau 5.8 – Œuvres comportant des séries d’accords de neuvièmes avec des quintes parallèles ...... 112 Tableau 5.9 – Œuvres comportant des séries d’accords de onzième ou de treizième avec des quintes parallèles ...... 113 Tableau 5.10 – Œuvres où les compositeurs utilisent le croisement créant des quintes parallèles ...... 118 Tableau 5.11 – Œuvres présentant des quintes sur temps forts successifs, séparées par des notes intermédiaires ...... 121 Tableau 5.12 – Œuvres présentant des quintes acceptables sur temps forts successifs, car séparées par des notes intermédiaires formant une harmonie distincte (changement d’accord) ...... 122 Tableau 5.13 – Œuvres contenant des quintes parallèles créées par des notes de passage ...... 124 Tableau 5.14 – Œuvres contenant des quintes parallèles séparées par des notes de passage ...... 124 Tableau 5.15 – Œuvres contenant des quintes successives séparées par des broderies .... 128 Tableau 5.16 – Œuvres contenant des quintes parallèles créées par une ou des broderie(s) ...... 129 Tableau 5.17 – Œuvres contenant des quintes parallèles créées par des appoggiatures.... 130 viii

Tableau 5.18 – Œuvres contenant des quintes parallèles séparées par des appoggiatures ...... 130 Tableau 5.19 – Œuvres contenant des quintes successives avec retard ...... 132 Tableau 5.20 – Œuvres contenant des quintes successives avec syncope ...... 133 Tableau 5.21 – Œuvres contenant des quintes parallèles avec anticipation ...... 134 Tableau 5.22 – Œuvres contenant des quintes à la basse ...... 136 Tableau 5.23 – Œuvres contenant des quintes à la basse accompagnées d’une octave ..... 140 Tableau 5.24 – Œuvres contenant des quintes à la basse accompagnées de la dixième .... 141 Tableau 5.25 – Œuvres contenant des quintes à la basse accompagnées de la septième .. 141 Tableau 5.26 – Œuvres contenant des quintes à la basse accompagnées d’une neuvième (deux quintes superposées) ...... 141 Tableau 5.27 – Œuvres contenant des accords parallèles à la basse ...... 144 Tableau 5.28 – Œuvres contenant une doublure de la mélodie en quintes parallèles ...... 146 Tableau 5.29 – Œuvres contenant une doublure de la mélodie à la quinte et à l’octave ... 147 Tableau 5.30 – Œuvres contenant une doublure de la mélodie à la quinte et à la neuvième (deux quintes superposées) ...... 147 Tableau 5.31 – Œuvres contenant une doublure de la mélodie à la quinte et à la septième ...... 147 Tableau 5.32 – Œuvres contenant une mélodie harmonisée en accords parfaits parallèles ...... 148 Tableau 5.33 – Œuvres contenant des quintes parallèles enrichissant la texture dans les voix intérieures ...... 152 Tableau 5.34 – Œuvres contenant des accords parfaits parallèles enrichissant la texture dans les voix intérieures ...... 153 Tableau 5.35 – Doublure de la basse et de la mélodie à la quinte pour créer une texture de masse ...... 155 Tableau 5.36 – Combinaison de séries d’accords pour enrichir la texture ...... 155 Tableau 5.37 – Combinaison de quintes à vide et d’accords pour enrichir la texture ...... 155 Tableau 5.38 – Œuvres comportant des quintes parallèles avec ajout ou retrait de voix ...... 157 Tableau 5.39 – Œuvres comportant des quintes structurelles par doublure de la mélodie à la quinte (2 voix) ...... 159 Tableau 5.40 – Œuvres de Debussy contenant des quintes structurelles en accords parfaits ...... 160 Tableau 5.41 – Œuvres comportant des quintes structurelles en accords ...... 163 Tableau 5.42 – Œuvres présentant des quintes parallèles créant un effet de cloches ...... 164 Tableau 5.43 – Œuvres présentant des quintes sur temps faibles ...... 168

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Liste des exemples

Exemple 1.1 – Organum parallèle à la quinte, Musica enchiriadis...... 13 Exemple 1.2 – Organum avec des intervalles variés : Alleluia – Justus ut palma, mes. 8-11...... 15 Exemple 1.3 – Debussy, Estampes, n° 2 : « Soirée dans Grenade », mes. 33-36...... 18 Exemple 2.1 – Quintes parallèles fautives avec notes intermédiaires, Savard (60)...... 27 Exemple 2.2 – Changement de position ne permettant pas de sauver les quintes parallèles, Dubois (26, 27)...... 28 Exemple 2.3 – Accord de septième de dominante ne permettant pas de corriger l’effet des quintes parallèles, Caussade (132)...... 28 Exemple 2.4 – Quintes parallèles fautives créées par des notes de passage, Richter (120)...... 29 Exemple 2.5 – Notes de passage ne permettant pas de sauver les quintes parallèles, Rimski-Korsakov (56)...... 29 Exemple 2.6 – Quintes parallèles fautives créées par des broderies, Reber (190)...... 30 Exemple 2.7 – Broderie ornant la suspension et formant une quinte retardée, Reber (188)...... 30 Exemple 2.8 – Appoggiature ne permettant pas de sauver les quintes, Reber (183)...... 31 Exemple 2.9 – Retard ne permettant pas de sauver les quintes, Reicha (136)...... 31 Exemple 2.10 – Retard amenant des quintes parallèles fautives, Caussade (178)...... 32 Exemple 2.11 – Croisement des voix n’annulant pas l’effet des quintes parallèles, Reber (26)...... 33 Exemple 2.12 – Quintes parallèles sauvées par un nombre suffisant de notes intermédiaires, Émile Durand (77)...... 35 Exemple 2.13 – Quintes parallèles acceptables amenées par des notes ornementales, Caussade (250)...... 35 Exemple 2.14 – Quintes parallèles acceptables, car séparées par un changement de position dans plusieurs parties, Barbereau (72)...... 36 Exemple 2.15 – Quintes parallèles acceptables, car séparées par un changement d’accord, Lavignac (43)...... 36 Exemple 2.16 – Quintes parallèles acceptables créées par une note de passage, Reicha (135)...... 37 Exemple 2.17 – Quintes parallèles acceptables créées par une série de notes de passage simultanées doublées à l’octave, Reber (204)...... 37 Exemple 2.18 – Quintes parallèles acceptables créées par la broderie d’un retard, Dubois (222)...... 38 Exemple 2.19 – Quintes parallèles acceptables créées par une broderie en trille, Émile Durand (197)...... 38 Exemple 2.20 – Quintes parallèles acceptables formées par une broderie et une note réelle, Reber (189)...... 39 Exemple 2.21 – Quintes consécutives par demi-tons (broderie), Reber (190, tiré de Gluck, Armide)...... 39 Exemple 2.22 – Quintes parallèles séparées par une appoggiature, Gilson (vol. 1 : 187)...... 40 Exemple 2.23 – Quintes parallèles créées par une appoggiature, Gilson (vol. 1 : 188)...... 40 x

Exemple 2.24 – Appoggiature permettant de sauver les quintes (broderie sans la première fraction de la note principale), Reber (193)...... 41 Exemple 2.25 – Appoggiature expressive longue permettant de corriger l’effet des quintes, Émile Durand (490)...... 41 Exemple 2.26 – Quintes parallèles acceptables par mouvement de syncope, Bazin (30)...... 42 Exemple 2.27 – Quintes retardées acceptables, Dubois (138)...... 42 Exemple 2.28 – Quintes acceptables par mouvement oblique, Caussade (46)...... 45 Exemple 2.29 – Quintes anticipées acceptables, car la suppression de la syncope les feraient disparaître, Savard (62)...... 45 Exemple 2.30 – Quintes formées en tout ou en partie par les parties intermédiaires...... 46 Exemple 2.31 – Quintes parallèles atténuées par la relation de tierce entre soprano et basse, Gilson (vol. 1 : 215)...... 47 Exemple 2.32 – Quintes parallèles acceptables dans les voix graves d’une harmonie espacée, Vinée (93)...... 47 Exemple 2.33 – Quintes parallèles dans les positions intermédiaires d’accords brisés, Émile Durand (80)...... 48 Exemple 2.34 – Harmonie par mouvements chromatiques contraires contenant des quintes parallèles acceptables, Vivier (131)...... 48 Exemple 2.35 – Quintes parallèles disjointes, Reber (69)...... 49 Exemple 2.36 – Quintes parallèles disjointes acceptables par la bonne disposition des voix et la présence de notes communes, Émile Durand (509)...... 49 Exemple 2.37 – Quintes parallèles disjointes acceptables par le mouvement contraire ou oblique des notes intermédiaires ou un saut de seconde dans la partie la plus haute, Barbereau (73) ...... 50 Exemple 2.38 – Quintes parallèles dans une cadence conclusive vers l’accord de tonique complet, Rimski-Korsakov (82)...... 51 Exemple 2.39 – Quintes parallèles en répétant la même phrase avec une autre distribution de voix, Reicha (139)...... 51 Exemple 2.40 – Quintes acceptables sur temps faibles successifs, Rimski-Korsakov (66)...... 52 Exemple 2.41 – Quintes parallèles dans l’harmonie figurée, Riemann (31)...... 52 Exemple 2.42 – Quintes au grave imitant le son des cloches, Gilson (vol. 1 : 21, tiré de Sibelius, Karélia, Suite II, op. 11 : « Ballade », mes. 93-100)...... 57 Exemple 4.1 – Quintes parallèles cadentielles...... 88 Exemple 4.2 – Quintes parallèles apparaissant lors de la résolution de dissonances...... 89 Exemple 4.3 – Quintes parallèles résultant d’une erreur dans la conduite des voix...... 90 Exemple 4.4 – Johann Sebastian Bach, Choral, n° 34 : « Erbarm’ dich mein, o Herre, Gott », mes. 10-12...... 91 Exemple 4.5 – Quintes parallèles avec notes ornementales...... 92 Exemple 4.6 – Quintes parallèles utilisées comme enrichissement de la texture...... 93 Exemple 4.7 – Quintes parallèles structurelles...... 93 Exemple 4.8 – Quintes parallèles créant un effet de cloche : Vincent D’Indy, Tableaux de voyage, op. 33, n° 5 : « Le Glas », mes. 1-4...... 94 Exemple 4.9 – Quintes parallèles en notes ornementales ...... 95 Exemple 5.1 – Séverac (1908), Baigneuses au soleil (Souvenir de Banyuls-sur-mer), mes. 60-61 ...... 105 xi

Exemple 5.2 – Alain (1932), Mythologies japonaises AWV 28 : « Variation n° 5 », mes. 4 ...... 107 Exemple 5.3 – Honegger (1919-1920), Sept pièces brèves, n° 3 : « Très lent », mes. 3-4 ...... 109 Exemple 5.4 – Debussy (1914), Berceuse héroïque, mes. 51-53 ...... 109 Exemple 5.5 – Satie (1914), Sports et divertissements : « Le bain de mer », dernière ligne ...... 110 Exemple 5.6 – Satie (1887, rév. 1911), Trois sarabandes, n° 3, mes. 50-53...... 111 Exemple 5.7 – Milhaud (1920-1921), Saudades do Brasil, livre 2, n° 8 : « Tijuca », mes 33-35 ...... 111 Exemple 5.8 – Kœchlin (1915-1916), Paysages et marines, op. 63, n° 4 : « Le chant du Chevrier », mes. 8-9 ...... 112 Exemple 5.9 – Debussy (1911-1913), Préludes, livre 2, n° 2 : « Feuilles mortes », mes. 8-11 ...... 113 Exemple 5.10 – Durey (1924-1928), Dix inventions, op. 41a, n° 10 : « Très animé », mes. 35-38 ...... 113 Exemple 5.11 – Ibert (1924), Les rencontres, n° 4 : « Les bergères », mes. 41-42 ...... 114 Exemple 5.12 – Poulenc (1922, rév. 1939), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes. 25-28 (Chester Music) ...... 115 Exemple 5.13 – Poulenc (1921), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes. 25-28 (La revue musicale) ...... 115 Exemple 5.14 – Poulenc (1921), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes. 34-36 (La revue musicale) ...... 116 Exemple 5.15 – Poulenc (1922, rév. 1939), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes. 34-36 (Chester Music) ...... 116 Exemple 5.16 – Roussel (1904-1906), Rustiques, op. 5, n° 2 : « Promenade sentimentale en forêt », mes. 45-46 ...... 117 Exemple 5.17 – Milhaud (1920-1921), Saudades do Brasil, livre 2, n° 8 : « Tijuca », mes. 24-28 ...... 118 Exemple 5.18 – Ibert (1916), Pièce romantique, mes. 85-87 ...... 118 Exemple 5.19 – Auric (1940), Trois impromptus, n° 3 : « Impromptu en ré majeur », mes. 29-33 ...... 120 Exemple 5.20 – Franck (1884), Prélude, choral et fugue, op. 21, mes. 212-213 ...... 120 Exemple 5.21 – Hahn (1894), Portraits de peintres, n° 3 : « Anton van Dyck », mes. 16-18 ...... 122 Exemple 5.22 – Franck (1887), Prélude, aria et finale, op. 23 : « Aria », mes. 39-42 ..... 123 Exemple 5.23 – Poulenc (1935), Suite française d’après Claude Gervaise, ...... 123 FP 80, n° 3, mes. 52-57 ...... 123 Exemple 5.24 – Chaminade (1914), Caprice-impromptu, op. 153, mes. 147-150 ...... 124 Exemple 5.25 – Satie (1897-1919), Carnet d’esquisses et de croquis, n° 3 : « Notes », mes. 2 ...... 126 Exemple 5.26 – Poulenc (1935), Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80, n° 3, mes. 52-57 ...... 127 Exemple 5.27 – Chabrier (1880-1881), Dix pièces pittoresques, n° 5 : « Mauresque », mes. 23-24 ...... 129 Exemple 5.28 – Roger-Ducasse (1919), Arabesque, no 2, mes. 34-35 ...... 129 Exemple 5.29 – Roger-Ducasse (1917), Esquisses, n° 1, mes. 8-11...... 131 xii

Exemple 5.30 – Ibert (1916), Pièce romantique, mes. 94-96 ...... 131 Exemple 5.31 – Satie (1907), Nouvelles pièces froides, n° 3 : « Sur un pont », mes. 11-14 ...... 132 Exemple 5.32 – Debussy (1890, rév. 1905), Suite bergamasque, n° 1 : « Prélude », mes. 4-6 ...... 133 Exemple 5.33 – Aubert (1903), Lutins, op. 11, mes. 62-73 ...... 135 Exemple 5.34 – Decaux (1907), Clair de lune, n° 3 : « Le cimetière », mes. 53-56 ...... 139 Exemple 5.35 – Milhaud (1923), Rag-caprice, n° 2 : « Romance », mes. 30-34 ...... 139 Exemple 5.36 – Auric (1941), Neuf pièces brèves, n° 6 : « Sicilienne », mes. 16-19 ...... 142 Exemple 5.37 – Séverac (1908), Baigneuses au soleil (Souvenir de Banyuls-sur-mer), mes. 4-6 ...... 142 Exemple 5.38 – Kœchlin (1915-1916), Paysages et marines, op. 63, n° 4, mes. 4-6 ...... 143 Exemple 5.39 – Casadesus (1924), Prélude, op. 5, n° 24 : « Doux et tranquille », mes. 1-7 ...... 145 Exemple 5.40 – Milhaud (1922), Rag-caprice, no 1, mes. 14-18 ...... 148 Exemple 5.41 – Ravel (1911), Valses nobles et sentimentales, n° 7, mes. 51-54 ...... 150 Exemple 5.42 – Kœchlin (1913-1919), Les heures persanes, op. 65, n° 1 : « Sieste avant le départ », mes. 1 ...... 150 Exemple 5.43 – Ibert (1924), Les rencontres, n° 4 : « Les bergères », mes. 21-24 ...... 151 Exemple 5.44 – Debussy (1909-1910), Préludes, livre 1, n° 1 : « Danseuses de Delphes », mes. 11-14 ...... 152 Exemple 5.45 – Poulenc (1920, rév. 1939), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes 19-22 ...... 154 Exemple 5.46 – Milhaud (1920-1921), Saudades do Brasil, livre 1, n° 5 : « Ipanema », mes. 9-14 ...... 154 Exemple 5.47 – Chausson (1896), Quelques danses, op. 26, n° 4 : « Forlane », mes. 129-130 ...... 156 Exemple 5.48 – Poulenc (1920, rév. 1926), Suite FP 19 : 1er mouvement, mes. 1-3 ...... 159 Exemple 5.49 – Vierne (1918), Solitude, op. 44, n° 1 : « Hantise », mes. 1-7 ...... 160 Exemple 5.50 – Debussy (1911-1913), Préludes, livre 2, n° 10 : « Canope », mes. 1-4 ...... 160 Exemple 5.51 – Debussy (1909-1910), Préludes, livre 1, n° 10 : « La cathédrale engloutie », mes. 31-35 ...... 161 Exemple 5.52 – Debussy (1911-1913), Préludes, livre 2, n° 7 : « La terrasse des audiences du clair de lune », mes. 31-32 ...... 162 Exemple 5.53 – Debussy (1903-1904), Masques, mes. 360-367 ...... 162 Exemple 5.54 – Ravel (1904-1905), Miroirs, n° 5 : « La vallée des cloches », mes. 26-28 ...... 164 Exemple 5.55 – Debussy (1911-1913), Préludes, livre 2, n° 7 : « La terrasse des audiences du clair de lune », mes. 42-45 ...... 165 Exemple 5.56 – Satie (1917), Sonatine bureaucratique, mes. 113-116 ...... 165 Exemple 5.57 – Roger-Ducasse (1914-1915), Variations sur un choral : « 8e variation », mes. 150-152 ...... 166 Exemple 5.58 – Roussel (1904-1906), Rustiques, op. 5, n° 2 : « Promenade sentimentale », mes. 45-46 ...... 167 Exemple 5.59 – Schmitt (1907), Pupazzi, op. 36, n° 6 : « Atys », mes. 25-27 ...... 168

Introduction

On croit souvent que l’interdiction des quintes parallèles ne préoccupe réellement que les auteurs de traités et les professeurs d’écriture, pour embêter les pauvres étudiants. Quelle ne fut pas ma surprise de constater que plusieurs musicologues ont discuté de cette question dans leurs travaux ou ont même analysé leur sujet à travers cette problématique! Francis

Edward Gladstone (1845-1928) en a fait l’objet d’une communication, publiée par la suite dans le Journal of the Royal Musical Association en 1882. Il y donne quelques explications sur les raisons qui, selon lui, justifient l’interdiction, discute de certains cas particuliers, expose et critique des exemples du répertoire1. Maud Gilchrist Sewall (1871-1960) recense les propos de plusieurs auteurs à propos de la dimension historique, de la pertinence et de la justification de l’interdiction des quintes parallèles dans un article publié en 19262. Paul

Gilson (1904-1963) en fait une étude assez détaillée dans Quintes, octaves, secondes et polytonie : étude documentaire sur l’art musical en 19223. Il y fait une mise en contexte historique de l’interdiction, recense les propos de plusieurs auteurs de traités, présente des exemples du répertoire et explique des situations admissibles et non admissibles. Wanda

Therese Farah aborde la question des quintes parallèles dans sa thèse en 1985 pour décrire l’expression du contrepoint dans la musique 4 . Après un résumé de la problématique particulière des quintes parallèles (historique, justifications, principaux auteurs), elle la situe dans la question du parallélisme prise dans son ensemble, qui, bien qu’engendrant dans certains cas une dissolution du contrepoint, peut servir un but compositionnel.

1 Francis Edward Gladstone, « Consecutive Fifths », Journal of the Royal Musical Association 8 (6 mars 1882) : 99-121. 2 Maud Gilchrist Sewall, « Hucbald, Schoenberg and Others on Parallel Octaves and Fifths », Musical Quarterly 12 (1926) : 248–65. 3 Paul Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie : étude documentaire sur l’art musical (Bruxelles : Schott, 1922). 4 Wanda Therese Farah, « Microcounterpoint », dans « The Principle of Counterpoint and its Expression in Music, Dance and Cinema », 65-139 (thèse de doctorat, University of Texas at Austin, 1985). 2

Geoffrey Chew (1989) étudie le rôle des structures en quintes parallèles sur la cohérence tonale dans l’œuvre de Claudio Monteverdi (1567-1643)5. Matthew Shirlaw (1873-1961) aborde même, dans un article de 1949, la controversée question de l’aspect esthétique des quintes parallèles, le fait qu’elles « sonnent bien ou mal »6. Après avoir exposé divers exemples, il ne peut conclure qu’à l’absence de raison scientifique assez solide pour justifier une interdiction ou une permission sur la seule base des qualités esthétiques.

Johannes Brahms (1833-1897) en a fait un recueil, Oktaven und Quinten, qui a aussi été l’objet d’études par Robert T. Laudon, Paul Mast et Heinrich Schenker (1868-1935)7.

Brahms regroupe dans cette anthologie plusieurs exemples de quintes parallèles qu’il a recensés dans le répertoire de ses prédécesseurs comme de ses contemporains, auxquels il appose à l’occasion un jugement (correct, bon, mauvais, erreur), cherchant à différencier la nature des types de progression en se basant surtout sur des critères esthétiques (l’écoute plutôt que l’observation).

Problématique

La raison évoquée le plus souvent par les théoriciens pour expliquer l’interdiction des quintes parallèles est l’ambiguïté tonale, en d’autres mots le fait que, en se déplaçant à distance de quinte, deux voix semblent évoluer dans deux tonalités distinctes. Au tournant du XXe siècle, transgresser l’interdit des quintes parallèles a certainement eu un rôle à jouer dans l’évolution du système tonal. En effet, bien que cette règle ait été tenue pour immuable jusqu’à récemment dans l’histoire, et ce, même en composition libre, les

5 Geoffrey Chew, « The Perfections of Modern Music : Consecutive Fifths and Tonal Coherence in Monteverdi », Music Analysis 8, 3 (octobre 1989) : 247-273. 6 Matthew Shirlaw, « Aesthetic – and Consecutive Fifths », Music Review 10 (1949) : 89–96. 7 Johannes Brahms, Oktaven und Quinten u.a., facsimile commenté par Heinrich Schenker (Vienne, 1933); Robert T. Laudon, « The Debate about Consecutive Fifths : A Context for Brahms’s Manuscript ‘Oktaven und Quinten’ », Music & Letters 73, 1 (Février 1992) : 48-61; Paul Mast, « Brahms’s Study, Octaven u. Quinten u. a., with Schenker’s Commentary Translated », dans Music Forum 5 (1980) : 1-196. 3 compositeurs des XIXe et XXe siècles ont utilisé des quintes parallèles dans leurs œuvres.

Sur cette infraction aux règles, les opinions des musicologues divergent : Charles Kœchlin

(1867-1950) affirme que les enchaînements de quintes ne sont pas illogiques au point de vue tonal et que les harmonies ne sont jamais rudes (et considère notamment les quintes parallèles comme de précieuses ressources pour l’écriture de la fugue libre)8, alors que

Reginald Owen Morris (1886-1948) affirme qu’elles nuisent à l’indépendance des voix (ce qui les rendraient donc inutilisables dans l’écriture de la fugue) et que cette tradition est trop bien ancrée pour que les compositeurs osent y déroger9. Si Chew, dans l’article cité précédemment, aborde bel et bien la question de la cohérence tonale, il limite cependant sa réflexion à la musique de l’époque de Monteverdi, laquelle précède l’apparition de la tonalité moderne. Qu’en est-il trois siècles plus tard? Est-ce que les compositeurs se servent des quintes parallèles pour faire évoluer le langage tonal, et, si oui, comment? Ce sont les questions auxquelles je tenterai de répondre.

Pour les besoins de cette étude, il est nécessaire de restreindre l’étendue de la recherche. J’ai donc décidé de me pencher sur les compositeurs français actifs entre 1880 et

1940, et particulièrement sur la musique de piano. Ce dernier choix s’explique par le fait que, à toutes les époques depuis la fin du XVIIe siècle, ce répertoire a été un témoin privilégié de l’évolution stylistique des compositeurs. Il est donc raisonnable de penser que l’utilisation de quintes parallèles s’inscrira bien dans cette recherche stylistique 10 . La fourchette de dates correspond à une période particulièrement mouvementée de l’histoire de

8 Charles Kœchlin, « Les tendances de la musique moderne française », dans Encyclopédie de la musique et dictionnaire du Conservatoire, vol. 2, Technique, Esthétique et Pédagogie, sous la direction d’Albert Lavignac et de Lionel de La Laurencie (Paris : Delagrave, 1922), 77. 9 Reginald Owen Morris, Foundations of Practical Harmony & Counterpoint (Westport, Conn. : Greenwood Press, 1980), 146-147. 10 Voir Susan Bradshaw, « Keyboard Music. III. Piano Music from c1750. 6. The Growth of Pianism », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 17 juin 2010). 4 la musique et, en particulier, de l’évolution de la tonalité, des débuts de l’impressionnisme

(1880) au déclin du néoclassicisme (1940). Ces deux courants importants représentent bien les extrêmes entre lesquels l’époque est partagée : d’un côté, l’expression de l’atmosphère, la sensation procurée par un objet ou une situation; de l’autre, une réappropriation des règles anciennes tout en conservant les acquis du siècle présent. Cette période est également traversée par d’autres courants tels que le romantisme, le symbolisme, l’expressionnisme, l’exotisme et le sonorisme, autant de tendances qui manifestent bien le foisonnement d’idées qui l’anime. Cependant, ce foisonnement est également traversé par une constante : la rébellion contre l’enseignement des traités, notamment contre l’interdiction des quintes parallèles. Le choix de la France comme objet d’étude s’explique principalement par l’importance que prend ce pays dans la vie musicale de l'époque. De nouveaux courants musicaux émergent de France, comme l’impressionnisme, qui est particulièrement intéressant pour notre sujet d’étude, notamment par son représentant le plus connu, Claude

Debussy (1862-1918). Selon Robert Winter, Debussy a eu une influence majeure dans le développement du jeu pianistique au XXe siècle, en particulier avec la Suite pour le piano

(1901), dans laquelle il mélange habilement trois siècles de tradit

ions11. Debussy est également connu pour son mépris des règles, spécifiquement de l’interdiction des quintes parallèles dont sa musique pour piano fourmille d’exemples. Il apparaissait donc tout indiqué comme point de départ de la recherche, et étendre l’étude à ses compatriotes en était la suite logique, tout en permettant de le situer dans son contexte.

De plus, selon Michel Fleury, l’écriture ou la composition au clavier suggère de nouvelles

11 Robert Winter, « Pianoforte [piano]. II. Piano Playing. 3. 20th Century », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 17 juin 2010). 5 manières de formuler ou d’enchaîner les accords, notamment en mouvements parallèles12.

Est-il nécessaire d’ajouter que mon choix a été marqué par une attirance personnelle particulière pour le répertoire français de cette époque, attirance qui s’est avérée largement justifiée par les données objectives de l’histoire de la musique, comme nous venons de le voir?

Objectifs

Cette recherche vise principalement à définir le rôle des quintes parallèles dans le langage tonal français au XXe siècle en étudiant les types d’utilisation de cet élément dans la musique de piano. Cette étude nous permettra de dresser un portrait de la pratique des compositeurs français dans ce domaine et d’en déterminer l’importance dans le style d’écriture pianistique de l’époque. La définition du rôle des quintes parallèles dans le langage permettra d’évaluer l’impact sur la musique française de piano de l’application ou de la transgression de la règle les interdisant.

Méthodologie

La méthodologie utilisée pour cette recherche s’articule autour de deux grands axes, soit l’enseignement des traités à propos des quintes parallèles, d’une part, et, d’autre part, l’étude des caractéristiques de leur emploi dans le répertoire choisi. Je donnerai d’abord une définition de ce qu’il faut entendre par quintes parallèles, puis je dresserai, au chapitre 1, un bref survol des façons d’en expliquer l’interdiction, à l’aide notamment des travaux de

François-Joseph Fétis, Francis Edward Gladstone, Charles Kœchlin, Maud Gilchrist

12 Michel Fleury, L’impressionnisme et la musique (Paris : Fayard, 1996), 128. 6

Sewall, Matthew Shirlaw, Richard S. Parks, William Drabkin et Wanda Therese Farah13.

J’exposerai ensuite dans le chapitre 2 le contexte théorique entourant la question en

étudiant des traités d’harmonie, de contrepoint et de composition français des XIXe et XXe siècles, afin de déterminer la place qu’elle y occupe et les principaux aspects qui la composent (le lecteur trouvera la liste des traités étudiés à l’annexe 1). Je considérerai

également dans mon étude certains traités d’auteurs non français, mais qui ont été traduits et utilisés en France à cette époque. Le choix des traités à l’étude est basé en partie sur le contenu de l’article sur les théories harmoniques de Lucien Chevaillier (1883-1932) dans l’Encyclopédie de la musique et dictionnaire du Conservatoire dans lequel il recense et commente les principaux traités qui ont marqué l’éducation des compositeurs français14.

Les traité cités dans cette étude sont ceux dont il est raisonnable de croire qu’ils ont exercé une influence sur les compositeurs à l’époque, parce qu’ils sont l’œuvre d’auteurs français antérieurs ou contemporains, ou d’auteurs étrangers traduits et publiés en France. Selon toute vraisemblance, ce sont les traités qui ont servi à la formation des compositeurs dont nous étudierons les œuvres. Sur les 31 traités examinés, huit sont d’origine étrangère à la

France : cinq sont belges, trois sont allemands et le dernier est russe. Les dates de parution s’étendent de 1802 à 1938, la première année étant celle de la première édition du traité de

13 François-Joseph Fétis, Traité complet de la théorie et de la pratique de l’harmonie, contenant la doctrine de la science et de l’art, 9e éd. (Paris : Brandus et Dufour, 1867); Gladstone, « Consecutive Fifths »; Kœchlin, « Les tendances de la musique moderne française »; Sewall, « Hucbald, Schoenberg and Others on Parallel Octaves and Fifths »; Shirlaw, « Aesthetic – and Consecutive Fifths »; Richard S. Parks, Eighteenth-Century Counterpoint and Tonal Structure (Englewood Cliffs, N. J. : Prentice-Hall, 1984); William Drabkin, « Consecutive Fifths, Consecutive Octaves [Parallel Fifths, Parallel Octaves] », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 19 novembre 2008); Farah, « Microcounterpoint ». 14 Lucien Chevaillier, « Les théories harmoniques », dans Encyclopédie de la musique et dictionnaire du Conservatoire, vol. 2, Technique, Esthétique et Pédagogie, sous la direction d’Albert Lavignac et de Lionel de La Laurencie, 519-590 (Paris : Delagrave, 1922). Cet ouvrage, contemporain de la période étudiée, possède un caractère exhaustif qui en fait un témoin privilégié pour l’étude en cours. Le contenu de la recherche a été limité par la disponibilité de certains documents. Cependant, compte tenu de l’importance et de l’influence des ouvrages consultés, il est raisonnable de penser que l’absence de certains documents n’affecte pas la validité des conclusions auxquelles je parviens. 7

Charles-Simon Catel (1773-1830), qui est resté longtemps en usage au Conservatoire et, par conséquent, a nourri la formation d’un grand nombre de musiciens. On peut présumer que les ouvrages antérieurs à ce traité n’étaient plus usités entre 1880 et 1940. À l’autre extrémité de l’échelle temporelle, les traités les plus récents (1927, 1930, 1931 et 1938) ont sans doute eu une influence plus réduite, mais ils témoignent de la persistance des règles, malgré l’évolution tant de la pensée que de la pratique. Pour terminer l’étude de la pratique des quintes parallèles, je définirai au chapitre 4 les différents types de quintes parallèles qu’on retrouve dans la musique en me basant sur des informations recueillies dans les traités étudiés et aussi en me référant, entre autres, aux travaux de Gladstone, Morris,

Gilson, Parks, Chew et Laudon15. Les caractéristiques des différents types s’appuieront en général sur des éléments objectifs et des critères techniques présents dans les œuvres.

Cependant, il faudra tenir compte, dans certains cas, de critères plus subjectifs, de l’ordre de l’esthétique (expression) ou des intentions du compositeur, puisqu’ils influencent la classification des exemples et qu’il aurait été insensé de les mettre de côté sous prétexte d’objectivité.

En ce qui concerne l’étude des caractéristiques du répertoire choisi, présentée au chapitre 3, je dresserai d’abord un portrait sommaire de la musique de piano en France entre 1880 et 1940 en décrivant brièvement les tendances, les caractéristiques, les courants esthétiques, les influences et le contexte socioculturel de cette époque. Je traiterai ensuite de l’évolution de la tonalité de l’époque classique jusqu’au XXe siècle en France afin de rendre compte de l’utilisation et de la perception du matériel tonal à l’époque qui nous occupe. Ceci sera réalisé entre autres à l’aide des travaux de Charles Kœchlin, Carl

15 Gladstone, « Consecutive Fifths »; Morris, Foundations of Practical Harmony & Counterpoint; Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie; Parks, Eighteenth-Century Counterpoint and Tonal Structure; Chew, « The Perfections of Modern Music »; Laudon, « The Debate about Consecutive Fifths ». 8

Dalhlaus, Arnold Whittall, Jacques Viret, Nicolas Meeùs, Danièle Pistone, Françoise

Gervais, Michelle Biget, Michel Faure, Yves Defrance, Michel Fleury, Henri Gonnard et

Bryan Hyer16.

Le lecteur pourra s’étonner que nous ne tentions pas de retracer la progression dans l’usage des quintes parallèles au sein de la période étudiée, et d’en examiner les liens avec l’évolution du langage tonal. Bien que la chose ait été tentante, le contexte historique foisonnant dans lequel nous avons placé la recherche nous contraint à y renoncer. En effet, la multiplication des courants, qui se chevauchent et se superposent, rend le concept d’évolution difficile à appliquer dans le cadre qui est le nôtre, puisque cette évolution n’est en aucun cas linéaire. L’évolution de la pratique des compositeurs pris individuellement aurait pu aussi être abordée, mais comme le choix des œuvres n’a pas été fait en fonction d’une représentativité chronologique, fût-elle partielle, pour chaque compositeur, les

16 Kœchlin, « Les tendances de la musique moderne française »; Carl Dahlhaus, et al., « Harmony », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009); Arnold Whittall, « Harmony », dans The Oxford Companion to Music, sous la direction de Alison Latham, Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009); Jacques Viret, « Les langages musicaux du XXe siècle », dans Maurice Emmanuel, L’histoire de la langue musicale, (Paris : Laurens, 1981), 2 : 641- 660; Nicolas Meeùs, « Polyphonie, harmonie, tonalité », dans Musiques, une encyclopédie pour le XXIe siècle, vol. 2, Les savoirs musicaux, sous la direction de Jean-Jacques Nattiez (Arles : Actes sud; Paris : Cité de la musique, 2003), 116-133; Danièle Pistone, « Les conditions historiques de l’exotisme musical français », Revue internationale de musique française 6 (novembre 1981) : 11-22; idem, La musique en France de la Révolution à 1900 (Paris : H. Champion, 1979); idem, « Le symbolisme et la musique française à la fin du XIXe siècle », Revue internationale de musique française 32 (1995) : 9-51; idem, « L’impressionnisme musical et l’esprit de fin-de-siècle », Revue internationale de musique française 5 (juin 1981) : 13-19; Françoise Gervais, « Qu’est-ce que l’impressionnisme musical », Revue internationale de musique française 5 (juin 1981) : 9-19; idem, « Debussy et la tonalité », dans Actes du Colloque Debussy et l’évolution de la musique au XXe siècle (Paris : Éditions du Centre National de Recherche Scientifique, 1965), 95-107; Michelle Biget, « Les réminiscences romantiques dans la musique française de piano au début du XXe siècle », Revue internationale de musique française 15 (novembre 1984) : 67-75; Michel Faure, Musique et société, du Second Empire aux années vingt. Autour de Saint-Saëns, Fauré, Debussy et Ravel (Paris : Flammarion, 1985); Yves Defrance, « Exotisme et esthétique musicale en France. Approche socio- historique », Cahier de musiques traditionnelles 7 (1994) : 191-210; Fleury, L’impressionnisme et la musique; Henri Gonnard, La musique modale en France de Berlioz à Debussy (Paris : H. Champion, 2000); Brian Hyer, « Tonality », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009). 9 conclusions que nous pourrions en tirer ne seraient pas suffisamment appuyées pour prétendre à une validité scientifique.

La dernière partie du mémoire, soit le chapitre 5, sera consacrée à une étude critique des deux grands axes. Je ferai d’abord état des principaux types de quintes parallèles présents dans la musique de piano entre 1880 et 1940. Pour ce faire, j’ai examiné quelque

900 œuvres composées pendant cette période par de près de 60 compositeurs français (on trouvera la liste des œuvres contenant des quintes parallèles à l’annexe 2, et la liste des

œuvres n’en contenant pas à l’annexe 3 17 ). La consultation d’articles d’encyclopédie consacrés à des compositeurs français (et comportant une liste de leurs principales œuvres) a d’abord orienté mes choix. Une recherche méticuleuse à travers l’International Music

Score Library Project [en ligne] m’a permis de découvrir certains compositeurs et œuvres moins connus. Enfin, des guides spécialisés, tels que ceux de Maurice Hinson, Guy Sacre et

François-René Tranchefort, se sont avérés utiles pour compléter la recherche18. Le choix des compositeurs et des œuvres étudiés s’est effectué dans un souci de couvrir un large

éventail de diversité, autant des œuvres marquantes que des œuvres moins connues, sans toutefois prétendre à une exhaustivité inaccessible. J’ai volontairement mis de côté les transcriptions pour piano et les œuvres à quatre mains, dont les particularités d’écriture auraient pu interférer dans l’analyse et la complexifier. J’ai tenté de consulter au moins une

œuvre de chaque compositeur que je sélectionnais, souvent davantage pour valider si la présence ou non de quintes parallèles était répandue dans sa pratique. Lorsque c’était possible, je consultais en priorité la ou les œuvres les plus significatives du compositeur

17 Les dates biographiques des compositeurs étudiés ne seront mentionnées que dans ces annexes pour éviter de surcharger le texte. 18 Maurice Hinson, Guide to the Pianist’s Repertoire, 3e éd. (Bloomington: Indiana University Press, 2001); Guy Sacre, La Musique de piano, 2 vol. (Paris : Robert Laffont, 1998) ; François-René Tranchefort, Guide de la musique de piano et de clavecin (Paris : Fayard, 1987).

10 selon des articles d’encyclopédie ou des monographies spécifiques que j’ai pu consulter.

J’ai aussi pris soin d’examiner certains recueils marquants de l’époque comme l’Album des

Six et À l’exposition. Je dois souligner ici la richesse documentaire rendue accessible à la fois par les collections de musique de la Bibliothèque de l’Université Laval et par l’International Music Score Library Project [en ligne]. Certains compositeurs qui ont commencé à être actifs à la fin de la période concernée ont été volontairement mis de côté, comme Olivier Messiaen (1908-1992), Georges Migot (1891-1976) et André Jolivet (1905-

1974), considérant que les œuvres qu’ils ont écrites à cette époque reflètent davantage l’influence de leurs prédécesseurs que leur véritable style personnel qui se développera en dehors de notre période d’étude. Chaque occurrence de quinte découverte dans une œuvre a fait l’objet d’une analyse selon les critères définissant chacun des types de quintes. Des exemples marquants ou particuliers serviront d’illustration et de support au propos, et des tableaux montreront l’importance de chaque type. Le lecteur pourra s’étonner à l’occasion de voir certains exemples représenter un type de quintes plutôt qu’un autre. Il faut être conscient que les catégories que nous avons établies ne sont pas étanches, certains critères laissant place à l’interprétation, et que les œuvres sont parfois très complexes. L’expérience acquise par l’observation d’un grand nombre d’exemples nous donne une certaine assurance dans l’identification, mais plusieurs cas resteront toujours discutables. Dans mon

étude de l’importance de chaque type, on ne trouvera malheureusement pas de statistiques précises sur la fréquence ou l’importance de tel ou tel usage. En effet, les œuvres sont de longueur, de notoriété et d’influence très variables, d’une part, et, d’autre part, l’échantillon n’est pas également représentatif pour tous les compositeurs. La définition même de l’objet de recherche, soit les différentes catégories de quintes parallèles, rend impossible une comparaison systématique basée sur des données quantitatives. Il est en effet difficile de 11 comparer entre eux, par exemple, des compositeurs qui utilisent des quintes parallèles en série (sur plusieurs mesures) avec des compositeurs qui les utilisent en paires, parfois à une seule reprise, parfois à plusieurs reprises. La comparaison des différents tableaux entre eux donnera une idée de l’importance de chaque type par rapport aux autres, et nous établirons un rapport de proportion d’exemples trouvés dans chacune des catégories, mais l’interprétation statistique de cette donnée sera très limitée. Suite à cette analyse, je tenterai en conclusion de définir le rôle des quintes parallèles en me basant sur les types les plus utilisés par les compositeurs ou ceux ayant eu l’impact le plus significatif. Ces observations me permettront également d’évaluer l’importance du phénomène au sein du style d’écriture de l’époque et son incidence sur l’évolution de la musique française de piano.

Armé tous ces outils, nous sommes maintenant en mesure de nous attaquer à cette recherche, en commençant par l’origine de cette problématique

Chapitre 1 Les quintes parallèles du Xe au XIXe siècle

Pour amorcer notre étude, nous allons nous pencher sur la question des quintes parallèles en général, établissant la définition qui nous suivra tout au long de notre parcours et dressant un bref historique de cette interdiction.

1.1 Définition

William Drabkin, dans le Grove Music Online, définit les quintes parallèles comme le redoublement de la ligne mélodique d’une partie par une autre à un intervalle de quinte juste1. On trouve déjà dans cette définition des éléments qui, nous le verrons, permettront de comprendre en partie pourquoi les quintes parallèles sont frappées d’interdiction. De son côté, Richard S. Parks définit plus simplement les quintes parallèles comme deux voix allant dans la même direction, en partant d’une quinte vers une autre quinte2.

Dans les différents traités et ouvrages consultés, les auteurs utilisent diverses expressions pour désigner les quintes parallèles : « quintes consécutives », « quintes directes », « quintes successives », ou plus simplement « des quintes ». Le présent mémoire utilisera ces divers synonymes, qui se rapporteront tous à la définition qui précède, à l’exception du terme « quintes directes », qui sera évité, sauf dans le cas de citations textuelles, afin ne pas créer de référence ambiguë aux quintes uniques atteintes par mouvement semblable, appelées aussi « quintes directes ».

1 William Drabkin, « Consecutive Fifths, Consecutive Octaves [Parallel Fifths, Parallel Octaves] », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 19 novembre 2008). 2 Richard S. Parks, Eighteenth-Century Counterpoint and Tonal Structure (Englewood Cliffs, N.J. : Prentice- Hall, 1984), 22. 13

1.2 Historique

Les quintes parallèles n’ont pas toujours été interdites dans l’écriture musicale. Les musiciens du Moyen Âge, qui ne reconnaissaient que l’octave, la quarte et la quinte juste comme consonances, n’ont pu qu’envisager ces intervalles pour l’accompagnement des mélodies, même si cela entraînait l’accompagnement d’un mode par un autre. Les premiers essais d’harmonie étaient donc composés d’une mélodie doublée entièrement à la quinte juste (ou à la quarte juste). C’est ce que les auteurs nomment généralement « organum »

(exemple 1.1). Arnold Schoenberg (1874-1951) fait remarquer que le chant par quartes ou quintes correspond exactement aux exigences des registres de la voix humaine, chacun des registres se trouvant à environ une quinte de distance de ceux qui lui sont adjacents3.

Exemple 1.1 – Organum parallèle à la quinte, Musica enchiriadis4.

Dans son traité, le moine Hucbald de Saint-Amand (v. 840 ou 850-930) suggère qu’un redoublement à la quinte enrichit la couleur de la ligne musicale en amplifiant la sonorité du chant5. Selon Wanda Therese Farah, pour juger de l’opinion d’Hucbald, il faut se replacer dans son contexte musical où l’harmonie n’était pas aussi développée que de nos jours 6 . Il ne faut donc pas, comme Willy Pastor (1867-1933), croire Hucbald

3 Arnold Schoenberg, Traité d’harmonie, traduit de l’allemand et présenté par Gérard Gubisch (Paris: J.-C. Lattès, 1983), 97. 4 David Fenwick Wilson, dir., Music of the Middle Ages : An Anthology for Performance and Study (New York : Schirmer Books, 1990), 38. 5 Hucbald de Saint-Amand, « De Institutione », dans Hucbald, Guido and John on Music, sous la direction de Claude Palisca (New Haven : Yale University Press, 1979), cité dans Wanda Therese Farah, « Microcounterpoint », dans « The Principle of Counterpoint and its Expression in Music, Dance and Cinema » (thèse de doctorat, University of Texas at Austin, 1985), 78. 6 Farah, « Microcounterpoint », 87. 14

« extrêmement mauvais musicien »7, mais comprendre qu’il ne trouve pas nécessairement les quintes parallèles « belles », mais bien « meilleures » que la monodie stricte8. Des auteurs tels que August Wilhelm Ambros (1816-1876) et Raphael Georg Kiesewetter

(1773-1850) sont tellement convaincus de l’inefficacité des quintes parallèles et de leur pauvre valeur esthétique qu’ils vont même jusqu’à douter que des œuvres complètement doublées à la quinte aient été jouées ou même aient existé en dehors d’essais cachés dans les monastères9. Ils remettent en cause les écrits d’Hucbald, lesquels assurent que les quintes consécutives sonnent « douces et plaisantes à l’oreille »10.

Cependant, d’autres auteurs comme Lucien Chevaillier (1883-1932) et François-

Joseph Fétis (1784-1871) affirment qu’il existe plusieurs types d’organa qui utilisent des intervalles plus variés et des mouvements autres que parallèles11. En effet, dès la fin du

IXe siècle, un système d’organum s’est développé, « où l’unisson, la tierce majeure, la quarte et la quinte étaient tour à tour employés dans l’harmonisation du chant, par des successions de mouvements parallèles ou contraire des voix »12 (exemple 1.2).

7 Willy Pastor, « The Music of Primitive Peoples and the Beginnings of European Music », Annual Report of the Smithsonian Institution (1912), 694, cité dans Farah, « Microcounterpoint », 87. « extremely bad musicians ». Les traductions sont de l’auteur. 8 Farah, « Microcounterpoint », 81. 9 Maud Gilchrist Sewall, « Hucbald, Schoenberg and Others on Parallel Octaves and Fifths », Musical Quarterly 12 (1926) : 249; René Lenormand, Étude sur l’harmonie moderne (Paris : Le monde musical, 1912), 12. 10 Matthew Shirlaw, « Aesthetic – and Consecutive Fifths », Music Review 10 (1949) : 91. « sweet and pleasant to the ear ». 11 Lucien Chevaillier, « Les théories harmoniques », dans Encyclopédie de la musique et dictionnaire du Conservatoire, vol. 2, Technique, Esthétique et Pédagogie, sous la direction d’Albert Lavignac et de Lionel de La Laurencie (Paris : Delagrave, 1922), 521; François-Joseph Fétis, Traité complet de la théorie et de la pratique de l’harmonie, contenant la doctrine de la science et de l’art, 9e éd. (Paris : Brandus et Dufour, 1867), xxxiij-xxxiv. 12 Hucbald de Saint-Amand, « Musica enchiriadis, c. XVIIIi », dans Gerbert, Script. Eccles. de Musica, tome I, 170, cité dans Fétis, Traité complet de la théorie et de la pratique de l’harmonie, xxxiv. 15

Exemple 1.2 – Organum avec des intervalles variés : Alleluia – Justus ut palma, mes. 8-1113.

Les théoriciens ne s’entendent pas sur l’origine de la règle. Selon Serge Gut, la première interdiction, sans grande application pratique toutefois, vient du Tractatus de Discantu de l’Anonyme XIII (XIIIe siècle), qui invoque leur perfection pour les interdire (Gut rappelle que c’est grâce à cette même perfection que le parallélisme a d’abord été accepté)14. Selon

William Drabkin, le premier théoricien à interdire les quintes parallèles est plutôt Johannes de Garlandia (fl. v. 1270-1320) dans Optima introductio in contrapunctum (autour de

1300)15. Et William Hayman Cummings (1831-1915), lors de la conférence de Francis

Edward Gladstone (1845-1928) le 6 mars 1882, affirme que c’est John Dunstable (v. 1390-

1453) qui les aurait interdites parce qu’elles sont trop jolies, « de sorte que les anciens auraient été comblés par la douceur de la quinte16 ». Selon Dunstable, les anciens les trouvaient particulièrement douces, trop parfaites, et comme l’harmonie ne contenait que des quintes et des octaves, ils ont cru préférable de devoir trouver autre chose pour éviter que tant de perfection et de douceur ne distraient les auditeurs de la fonction liturgique de la musique. René Lenormand (1846-1932), de son côté, mentionne que Johannes de Muris

(v. 1290-v. 1355) est très explicite sur le sujet au début du XIVe siècle17. Gioseffo Zarlino

13 Wilson, dir., Music of the Middle Ages, 47. 14 Serge Gut, « La notion de consonance chez les Théoriciens du Moyen-Âge », Acta Musicologica 48, 1 (janvier-juin 1976) : 27; Anonyme XIII, Tractatus de Discantu, dans Charles-Edmond-Henri de Coussemaker, Scriptorum de musica medii aevi, tome III (Paris, 1869; réimpression, Hildesheim : Georg Olms, 1963), 497. 15 Johannis de Garlandia, Optima introduction in contrapunctum pro rudibus, dans Coussemaker, Scriptorum de musica medii aevi, tome III, 12; Drabkin, « Consecutive Fifths, Consecutive Octaves ». 16 Francis Edward Gladstone, « Consecutive Fifths », Journal of the Royal Musical Association 8 (6 mars 1882) : 114. « so that the ancients could be really cloyed with the sweetness of the fifth ». 17 Lenormand, Étude sur l’harmonie moderne, 12. 16

(1517-1590) s’est également préoccupé de l’origine de cette règle, sans grande précision toutefois, ayant écrit dans ses Instituzioni harmoniche en 1558 que les anciens compositeurs interdisent deux quintes consécutives (de même que les octaves et les unissons), car ils considèrent que l’harmonie doit provenir de choses diverses, discordantes et contraires les unes des autres plutôt que de choses semblables18. Les auteurs commencent déjà à cette époque à introduire la notion de variété dans l’harmonie, élément sur lequel se basent plusieurs arguments justifiant l’interdiction des quintes parallèles.

Selon Charles Kœchlin (1867-1950), compositeur et théoricien français, l’introduction de la tierce amenant des sonorités nouvelles et le développement de l’art contrapuntique, notamment l’écriture en imitation, pourraient expliquer en partie pourquoi les compositeurs se sont détournés des mouvements parallèles, alors considérés comme massifs et monotones19 :

Lorsqu’on eut l’idée, au Moyen-Âge, d’ajouter la tierce aux accords de quintes, peut-être prit- on goût davantage à la tierce et moins à la quinte. Et, lorsque dans le même temps l’on commença de concevoir des parties chantantes où, d’une voix à l’autre, des thèmes s’imitaient en se répondant (ébauche de la fugue), il fut assez naturel, il fut même nécessaire de procéder autrement que par les anciens mouvements parallèles […] Les quintes successives se firent plus rares; comme elles ne furent plus à la mode, les théoriciens s’empressèrent de les juger mauvaises20.

Kœchlin évoque donc aussi la notion de variété, laquelle se trouvait déjà dans certains types d’organa mentionnés précédemment, et qui prit de plus en plus d’ampleur avec le temps.

Philippe de Vitry (1291-1361) a, quant à lui, énoncé la règle suivante : « Deux consonances

18 « Vietavano di poi gli antichi compositori il porre due consonanze perfette di uno istesso genere, o specie, contenute ne i loro estremi da una proportione istessa, l’una dopo l’altra; movendosi le modulationi per uno, o per più gradi; come il porre due, o più unisoni, o ver due, o più ottave, o ver am enter due, o più quinte, & altre simili; me ne i sotto spot i es sempi si vede. Conciosiache molto ben sapeunao, che l’harmoni a non può nascere, se non da cose tra loro diverse, discordanti & contrarie; & non da quelle, che in ogni cosa si convengono. » Gioseffo Zarlino, Le instituzioni harmoniche (Venise, 1558, réimpression New York : Broude, 1965), 176; Gioseffo Zarlino, The Art of Counterpoint; part three of « Le istitutioni harmoniche », traduit de l’italien par Gui A. Marco et Claude V. Palisca (New Haven : Yale University Press, 1968), 59. 19 Charles Kœchlin, « Les tendances de la musique moderne française », dans Encyclopédie de la Musique et Dictionnaire du Conservatoire. Technique, Esthétique et Pédagogie, sous la direction d’Albert Lavignac et de Lionel de La Laurencie (Paris : Delagrave), 73. 20 Kœchlin, Traité de l’harmonie, vol. 1 (Paris : Eschig, 1927-1930), 14. 17 parfaites ne peuvent se suivre; plusieurs consonances imparfaites ne doivent se suivre qu’en cas de nécessité21 ». Ce n’était donc pas qu’une question de quintes (ou de consonances parfaites), mais bien de parallélisme en général, de variété dans les mouvements des parties.

L’avènement du mouvement contraire a donc contribué, avec l’élégance et la variété qu’il apportait, à diminuer l’intérêt envers les mouvements parallèles. Toutes ces nouveautés ont donc forcé le développement de règles d’écriture qui ont de moins en moins permis de faire des quintes parallèles. Schoenberg résume le tout en attribuant l’origine de cette règle à l’évolution de l’harmonie22.

Par ailleurs, la présence d’une « quinte imparfaite » parmi les sept quintes contenues dans une gamme diatonique est un autre élément qui a certainement contribué à diminuer l’intérêt des compositeurs pour l’harmonisation à la quinte. En effet, les compositeurs devaient toujours garder à l’esprit cette précaution d’éviter le triton, le « diable en musique », ce qui pouvait se traduire par l’évitement, dans la mélodie, de la note pouvant créer le triton, ou par un arrêt momentané du parallélisme. La variété ainsi obtenue a pu devenir de plus en plus prisée, et les compositeurs ont délaissé peu à peu les mouvements parallèles, qui devaient paraître plus monotones.

Dans la théorie et la pratique « d’école », l’interdiction stricte des quintes parallèles perdure jusqu’à nos jours. Par contre, dans la pratique « libre », on dénote de nombreux

écarts à toutes les époques. Toutefois, vers la fin du XIXe siècle, le mouvement prend un peu plus d’importance. À l’époque impressionniste, les compositeurs Debussy et Ravel font du parallélisme un de leurs éléments de langage. Ils insèrent des mouvements parallèles en

21 « Debemus etiam binas consonantias perfectus seriatim conjunctas ascendendo vel descendendo, prout possumus, evitare ». Chevaillier, « Les théories harmoniques », 522. Traduction de la source. 22 Schoenberg, Traité d’harmonie, 95-99. 18 grande quantité dans leurs œuvres, souvent plusieurs suites d’accords contenant à l’occasion l’intervalle de quinte (exemple 1.3).

Exemple 1.3 – Debussy, Estampes, n° 2 : « Soirée dans Grenade », mes. 33-36.

Françoise Gervais parle même chez Debussy de « mélodies d’accords », lorsqu’il délaisse l’harmonie fonctionnelle pour densifier et colorer une mélodie à l’aide d’accords dont toutes les voix se déplacent en mouvements parallèles23. Plusieurs autres compositeurs ont aussi utilisé le parallélisme d’accords, de façon plus ou moins importante selon le cas, comme Ibert, Kœchlin, Poulenc et Séverac. Le parallélisme devient ainsi un élément caractéristique du langage musical de cette époque. Cet élément d’écriture convient bien à la philosophie de l’impressionnisme, qui recherche une façon subtile de dire les choses. En effet, selon une opinion répandue, l’utilisation de quintes parallèles rend la perception tonale difficile, ce qui pourrait contribuer à créer dans l’imaginaire des compositeurs et des auditeurs le « flou » typique aux œuvres impressionnistes. Dorel Handman affirme :

Il n'y aura plus d'articulations nettes; des auditeurs à l'esprit peu délié auront le sentiment que l'œuvre commence n'importe où et finit n'importe comment; de tels reproches furent faits également aux tableaux impressionnistes qui ne respectaient plus le cadrage traditionnel. Qu'on ne se méprenne point. Ce n'est pas pour imiter la peinture de son temps que Debussy évite tout ce qui pourrait paraître « géométrique », brouille les traces, adopte une écriture vaporeuse, splendidement sensorielle. La raison est ailleurs : un ouvrage ne doit pas « avoir l'air écrit ». Imprécision gardienne du mystère, « voile volontaire » [...]24

23 Françoise Gervais, « La notion d’arabesque chez Debussy », Revue musicale 241 (1958), 14-15, cité dans Michel Fleury, L’impressionnisme et la musique (Paris : Fayard, 1996), 79. 24 Dorel Handman, « Impressionnisme », dans Encyclopédie de la musique, sous la direction de François Michel (Paris : Fasquelle, 1958-1961), 2 : 526. 19

Les impressionnistes accordent aussi de l’importance au son pour lui-même, à la beauté intrinsèque du son, donc moins à la relation des sons entre eux, contrairement aux tenants de l’harmonie tonale fonctionnelle, par exemple. Cette nouvelle optique dans la composition a ouvert la porte à davantage de parallélisme, ce qui, selon Leon Dallin (1918-

1993), a joué un rôle essentiel dans la libération de la conduite des voix et dans l’émergence de nouveaux concepts d’organisation tonale. Bien qu’à première vue il puisse sembler contradictoire qu’un phénomène liant les voix entre elles libère la conduite des voix, il n’en est rien : les quintes parallèles, en liant les voix entre elles, se trouvent tout de même à libérer la conduite des voix de certaines autres règles (résolution ou prédominance du mouvement contraire, par exemple). Dallin explique ce phénomène par le fait que les mouvements parallèles tendent à réduire la valeur fonctionnelle des accords et il met l’accent sur l’aspect « coloriste » de l’harmonie, caractéristique propre à l’impressionnisme25. Dans le cas de la quinte, la dimension « coloriste » est accentuée par le fait que c’est une consonance parfaite; elle apporte donc toujours le même type de couleur sonore, peu importe la tonalité ou le mode utilisé, par opposition aux consonances imparfaites qui peuvent être majeures ou mineures selon les cas. Ce type d’harmonie peut se comparer en partie aux premiers essais d’organums, quand les compositeurs cherchaient un moyen d’enrichir la mélodie, mais n’utilisaient pas les règles d’harmonie des modernes.

Les compositeurs impressionnistes ont en quelque sorte rejeté ces règles, et en cherchant autre chose, sont revenus au point de départ. On pourrait presque parler d’un mouvement de retour à l’organum, qui bien que considéré par plusieurs comme un archaïsme, pourrait

être devenu un élément du style de cette époque, et que l’on doit en partie à l’influence de

25 Leon Dallin, Technique of Twentieth Century Composition : A Guide to the Materials of Modern Music (Dubuque : W.C. Brown, 1974), 118. 20 la facture d’orgue, où, dans les jeux de mutation et de mixture de l’orgue romantique, la quinte est très présente26.

Ainsi, l’énoncé de la définition et de l’historique des quintes parallèles nous a permis de comprendre l’origine de cette problématique et servira de point de départ pour en expliquer les effets sur le langage pianistique de l’époque étudiée.

26 Bengt Hambraeus, « Aristide Cavaillé-Coll, Charles-Marie Widor : the Organ and the Orchestra », dans Donald Mackay, dir., L’orgue à notre époque: Papers and Proceedings of the Symposium held at McGill University, May 26-28, 1981 (Montréal: McGill University, 1982), 185-192.

Chapitre 2 Les quintes parallèles dans les traités d’harmonie, de contrepoint et de composition aux XIXe et XXe siècles en France

Après avoir décrit l’historique de l’interdiction des quintes parallèles au chapitre 1, il importe maintenant d’étudier en détail cette règle présente dans la majorité des traités d’harmonie, de contrepoint et de composition au XIXe et au moins jusqu’à la fin de la première moitié du XXe siècle1. Pour ce faire, nous avons consulté 31 traités publiés à cette

époque (29 auteurs différents). On en trouvera la liste complète à l’annexe 1, de même que les références bibliographiques des traités et les dates biographiques des auteurs2. À l’aide d’exemples et de citations tirés de ces traités, nous illustrerons les similitudes et les différences dans la présentation de cette règle.

La liste des traités étudiés se compose de 23 traités d’harmonie, six traités de contrepoint, un traité de composition et un traité dont le titre évoque à la fois l’harmonie et la composition. Les dates de publication s’échelonnent de manière à peu près égale tout au long de l’intervalle 1802-1938, avec entre un et trois traités par décennie, à l’exception de la décennie 1830 qui n’en contient pas, des décennies 1860 et 1900 qui en contiennent quatre et de la décennie 1910 qui en contient cinq. Les auteurs sont majoritairement français (dont un tchèque naturalisé français, Reicha, et un italien ayant obtenu la citoyenneté française, Cherubini), mais on compte également quatre belges (Gevaert, Fétis,

Vivier et Gilson), trois allemands (Jadassohn, Riemann et Richter) et un russe (Rimski-

Korsakov), qui comptent parmi les théoriciens les plus importants de leur pays et de leurs

époques respectifs. La plupart des auteurs des traités étaient aussi compositeurs (23 sur 29)

1 Curieusement, un ouvrage inspiré de la méthode Gallin [Philippe-Marc-Antoine Geslin, Cours analytique de musique ou méthode développée du Méloplaste (Paris : De Geslin, 1825)] ne fait pas mention de l’interdiction des quintes parallèles. Tout porte à croire qu’il est le seul à suivre cette voie. 2 Les autres références à ces traités figurent entre parenthèses dans le texte. Dans le cas de deux ouvrages d’un même auteur, une note sera ajoutée pour clarifier de quel ouvrage il s’agit. 22 et/ou professeurs (20 sur 29). Par leur enseignement, certains auteurs ont pu s’influencer les uns les autres, notamment Reicha qui a enseigné à Barbereau et Reber; Bazin qui a eu pour

élèves Savard, Lavignac, Dubois et Émile Durand; Gevaert qui a enseigné à Gilson; Richter qui a compté Jadassohn parmi ses élèves; et Dubois qui a enseigné à Jacques Durand.

L’influence sur les compositeurs que nous étudierons au chapitre 5 est aussi plausible de par les relations professeur/élève que nous pouvons observer : Reicha a enseigné à Gounod et Franck; Savard a enseigné à Chaminade; Émile Durand a eu pour élèves Debussy et

Pierné; Lavignac a compté dans ses classes Debussy, D’Indy, Pierné et Schmitt; Kœchlin a enseigné à Poulenc, Tailleferre et Sauguet; et Caussade a eu pour élèves Alain, Auric et

Boulanger. Le Grove Music Online décrit cinq des auteurs de traités comme des musicologues (Gevaert, Fétis, Riemann, Lavignac et Kœchlin) et six autres comme des théoriciens (Catel, Cherubini, Jadassohn, Vinée, Richter et Reicha). Deux des auteurs proviennent de milieux extérieurs à la musique : Derode est historien et Chevé est médecin.

Quatre agissent comme chefs d’orchestre (Bazin, Cherubini, Savard et Jadassohn), trois comme éditeurs (Cherubini, Jacques Durand et Riemann), deux comme critiques musicaux

(Fétis et Riemann) et trois comme organistes (Wachs, Dubois et Dupré). Certains traités ont

été désignés comme manuel officiel dans les conservatoires, notamment ceux de Catel, de

Reicha, de Cherubini et de Richter. Le désir de renouveler la théorie anime plusieurs auteurs; c’est le cas de Reicha (qui voulait enseigner l’usage contemporain, et selon qui la théorie devait être justifiée par la pratique3), Gevaert (dont l’ouvrage a été précédé par une

3 Peter Eliot Stone, « Reicha, Antoine », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 8 juin 2012). 23 réforme fondamentale en enseignement de la part de l’auteur4), Cherubini (qui définit son approche comme celle du contrepoint strict moderne 5 ), Fétis (qui souhaitait résoudre l’opposition entre les enseignements découlant de la tradition de Rameau et ceux découlant du traité de Catel 6 ) et Gilson (qui bien qu’affichant du respect pour la rhétorique conventionnelle et la syntaxe traditionnelle, prônait l’inexistence de règles absolues 7 ).

D’autres traités étaient plutôt animés par une volonté de mettre en valeur les traditions, comme celui de Bazin qui a été écrit en réaction aux tendances modernes et libérales de

Franck8. Certains traités ont acquis une renommée intéressante : le traité de Reber a connu plusieurs éditions, le traité de Catel a été populaire par ses traductions en Allemagne, en

Italie et en Angleterre et le traité de Richter a connu 36 éditions et a été traduit en neuf langues. Les principes de Cherubini sont même devenus la théorie officielle du contrepoint en France au XIXe siècle9. Richter et Catel ont conçu des traités s’adressant d’abord aux débutants, conçus pour être simples et pratiques, alors que d’autres, comme Fétis, Riemann et Gilson, par exemple, ont écrit des ouvrages dans lesquels s’insère une certaine philosophie de la tonalité ou de la musique en général.

4 Anne-Marie Riessauw et Jean Hargot, « Gevaert, François-Auguste », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 8 juin 2012). 5 Michael Fend, « Cherubini, Luigi », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 8 juin 2012). 6 Robert Wangermée et al. « Fétis », dnas Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 8 juin 2012). 7 Henri Vanhulst, « Gilson, Paul », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 8 juin 2012). 8 Gérard Streletski, « Bazin, François-Emmanuel-Victor », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 8 juin2012). 9 Fend, « Cherubini, Luigi », dans Grove Music Online. 24

2.1 Énoncés de la règle générale

Tous les auteurs étudiés s’entendent pour interdire les quintes parallèles dans les exercices de contrepoint de style rigoureux, de même que dans les études d’harmonie et dans les premiers essais de composition. Ils interdisent les quintes strictement parallèles (lorsque les deux voix vont dans la même direction), mais souvent aussi les quintes successives par mouvement contraire (quinte suivie d’une douzième et inversement, aussi appelées

« quintes antiparallèles »)10. Certains auteurs étendent l’interdiction à la composition en style libre, qui doit tout de même, selon eux, se rapprocher de la pureté du style rigoureux.

Afin de bien situer les auteurs les uns par rapport aux autres, nous présentons dans le tableau 2.1 l’énoncé de la règle chez chacun d’eux. On pourra remarquer par la suite que, pour certains, il s’agira de l’unique mention qu’ils auront dans ce chapitre.

Derode et Wachs ne figurent pas dans ce tableau. Wachs n’énonce simplement pas la règle générale, mais l’affirme toutefois dans des cas plus précis auxquels nous reviendrons plus loin. Le cas de Derode est un peu différent. Il refuse explicitement d’énoncer une règle interdisant les quintes parallèles, puisqu’il devrait en établir ensuite une liste d’exceptions et d’applications. Il compte plutôt sur le fait que l’élève sait qu’il ne doit pas faire suivre des accords n’ayant pas de relations11, et que lorsque la convenance de relation existe, la présence de quintes n’a plus d’importance (Derode : 218-219).

10 Par souci de concision nous ne traiterons pas de ce type de quintes dans le présent mémoire. 11 Selon Derode, deux tons ou deux accords sont relatifs lorsqu’ils ont une ou plusieurs notes communes (Derode : 145). 25

Tableau 2.1 – Interdiction des quintes parallèles dans les traités12 Auteur Citation Catel L’emploi du mouvement direct, pour les consonances parfaites[,] produirait des quintes et des octaves de suite, soit directes, soit cachées, ce qu’il faut éviter avec soin (p. 4). Reicha Il s’agit, dans l’emploi de ce mouvement [semblable], d’éviter avec adresse de faire des Quintes […] de suite, tant réelles que cachées entre deux parties quelconques (p. 29). Barbereau Deux quintes justes, […] consécutives, sont défendues entre deux Parties qui marchent par mouvement direct (p. 26). Chevé Ainsi, par cette première variété de mouvement semblable [mouvement parallèle], on devra renoncer à prendre […] les intervalles de deuxième qualité [quarte, quinte, octave et leurs redoublements], toujours plus ou moins compromettant pour la tonalité, quand on en met deux de même nom l’un à côté de l’autre; ce qui arrive quand on les prend par la variété de mouvement semblable dont nous nous occupons (p. 241). Bazin Dans le mouvement harmonique direct de deux parties, il ne faut pas faire entre ces deux parties, la succession simultanée […] de plusieurs quintes (p. 27). Gevaert [succession des accords] Les successions […] de quintes ne peuvent pas s’employer entre les mêmes parties par mouvement égal (p. 19). Reber L’effet de DEUX QUINTES JUSTES CONSÉCUTIVES, […], est plus mauvais encore que celui [d’une seule quinte juste atteinte par mouvement direct] Les infractions à la règle précédente produisent ce qu’on nomme généralement quintes […] défendues. […] Dans les cas de deux quintes justes […] consécutives on dit simplement qu’il y a deux quintes […] (p. 15). [de l’harmonie à plus de quatre parties réelles] §313 […] Deux quintes justes consécutives […] sont toujours défendus lorsqu’[elles] ont lieu par mouvement semblable (p. 120). [contrepoint – style rigoureux] Deux quintes justes consécutives, […], sont proscrites (p. 270). Cherubini On ne doit jamais faire succéder plusieurs consonnances [sic] parfaites de la mème [sic] dénomination, à telle élévation que ce soit. Par conséquent deux quintes et deux octaves de suite sont défendues. Cette défense est applicable à toute sorte de composition rigoureuse, à deux parties, comme à plusieurs (p. 5). Deux quintes de suite, par mouvement direct, sont toujours défendues entre toutes les parties (p. 11). Fétis [contrepoint simple de première espèce] Deux quintes, soit en montant, soit en descendant, annoncent deux tons différents; cette observation a suffi [pour] les faire proscrire (Traité du contrepoint et de la fugue : p. 4). Savard On ne doit pas faire de suite, entre les mêmes parties, deux consonances parfaites de même nature, c’est-à-dire : deux quintes ou deux octaves, surtout par mouvement direct (p. 59).

12 Les auteurs cités dans les tableaux seront toujours présentés en ordre chronologique de parution des traités. Les passages en italique, gras ou souligné dans les tableaux ou les citations du texte sont de la source. 26

Auteur Citation Émile Il est défendu de faire de suite, deux ou plusieurs quintes justes […] par le Durand mouvement direct […]. Cela s’appelle faire des quintes […] consécuti[ves] (p. 12). Jadassohn [composition à 8 voix] L’élève remarquera qu’aucune voix n’est conduite avec une autre […] en quintes parfaites parallèles (p. 116). Rimski- Les quintes […] parallèles […] sont strictement défendues à l’élève (p. 14). Korsakov Vivier On ne peut faire entendre dans les mêmes parties deux quintes […] successives (p. 46). Rahn l’oreille n’accepte pas deux repos différents, et repousse par conséquent une succession de quintes justes différentes par mouvement direct (p. 35). Les quintes justes par mouvement direct sont interdites, non seulement dans l’harmonie serrée, mais aussi dans l’harmonie large, quelque soit le nombre de parties que l’on écrive (p. 36). Nous avons dit […] qu’une suite de deux ou de plusieurs quintes justes, par mouvement direct, produisent [sic] un mauvais effet (p. 43). Riemann les quintes consécutives entre deux voix sont mauvaises (p. 29). Ratez Éviter les quintes […] consécutives entre les mêmes parties (p. 6). Lavignac Lorsque deux parties procèdent par mouvement harmonique direct, il est très mauvais et absolument défendu qu’elles fassent entendre consécutivement deux quintes justes (p. 41). Vinée Nous en venons à parler de la règle qui interdit à deux parties de se mouvoir parallèlement en quintes justes. […] À deux parties, l’emploi de deux quintes de suite sera bien rarement justifié (p. 92). Richter Lorsque, entre deux accords, il n’y a aucune note commune, les voix marchent librement, de telle sorte pourtant, qu’elles ne puissent donner lieu à des quintes […] avec une autre voix (p. 13). Le mouvement fautif des voix, indiqué ci-dessus, par les mots […] quintes parallèles, ne peut résulter que du mouvement direct (p. 14). Cette faute existe de même pour toutes les voix (p. 15). Lenormand Elles sont défendues, disent les traités d’harmonie actuellement en usage (p. 11). Jacques Les règles scolastiques interdisent la succession des accords comportant des Durand intervalles de quinte se suivant (p. 21). Gilson Mais il ne fut plus toléré que les accords se succédassent en produisant des quintes […] parallèles (vol. 1 : p. 13). Dubois Il est défendu de faire, entre deux parties quelconques, deux quintes […] consécutives, […] par mouvement direct (p. 13). Kœchlin Même interdiction pour deux quintes justes consécutives, par mouvement direct (Traité de l’harmonie, vol. 1 : p. 13). Entre deux parties données, les quintes […] immédiatement consécutives sont interdites, sans exception (Précis des règles du contrepoint : p. 2). Caussade Deux quintes justes […] sont proscrit[e]s entre deux mêmes parties (p. 22). Dupré [quintes consécutives] sont défendues, ainsi qu’en harmonie, par mouvement direct (p. 3).

27

2.2 Conditions particulières d’application de la règle

Plusieurs auteurs énoncent des conditions particulières à surveiller dans l’application de la règle. La première situation généralement évoquée est la présence de notes intermédiaires ne permettant pas de corriger l’impression désagréable des quintes parallèles. Rahn (44) l’évoque en ces termes :

Lorsque, entre 2 parties faisant entre elles des fautes de quintes […], il y a une ou plusieurs notes intermédiaires, celles-ci n’empêchent pas du tout la faute d’exister […] Il en serait absolument de même si, au lieu d’une seule note intermédiaire, il y en avait plusieurs (croches, doubles croches, etc….) la faute ne disparaitrait pas.

Cherubini (14, 20) et Rimski-Korsakov (66) tiennent des propos similaires. Lavignac (92), quant à lui, ajoute le principe suivant :

§216. Il en est de même, dans la composition instrumentale, à l’égard de traits d’un genre quelconque, gammes diatoniques ou chromatiques, accords brisés ou arpégés, mélangés de notes étrangères à l’harmonie et revêtant par là un caractère purement ornemental, même s’ils ont une longue étendue. Ils sont impuissants à dissimuler la présence d’une harmonisation défectueuse, parce qu’en supprimant les notes ayant [un] caractère purement mélodique, il resterait des quintes […] consécutives.

Lorsque les notes intermédiaires ont un rôle purement mélodique et ornemental, ce sont donc les notes qu’elles ornent, généralement et surtout celles sur les temps forts, qui comptent dans l’examen des quintes parallèles, comme l’expriment Bazin (29),

Savard (60), Lavignac (92), Dupré (12-13), et tel qu’illustré par l’exemple 2.1.

Exemple 2.1 – Quintes parallèles fautives avec notes intermédiaires, Savard (60)13.

13 Les exemples contenus dans ce chapitre ont été numérisés et adaptés à partir des différents traités cités (entre autres les numéros d’exemples originaux ont été enlevés à quelques endroits afin d’éviter de la confusion, et certaines mises en page ont été modifiées pour une meilleure visibilité). Parfois seul un extrait de l’exemple a été reproduit afin d’éviter toute surcharge dans la présentation. 28

Selon certains de ces auteurs, les notes intermédiaires doivent former une harmonie distincte pour éliminer l’effet désagréable des quintes (nous y reviendrons). Ainsi, un simple changement de position des notes de l’accord entre les deux quintes ne suffirait pas

à effacer l’effet des quintes selon Reber (26), Émile Durand (77), Dubois (26) et Caussade

(46), comme on peut le voir à l’exemple 2.2. Il pourrait même en créer dans certains cas, selon Émile Durand (79) et Dubois (26-27).

Exemple 2.2 – Changement de position ne permettant pas de sauver les quintes parallèles, Dubois (26, 27).

De même, l’ajout d’une septième à l’accord de dominante n’apporte pas assez de variété à l’harmonie pour être acceptable selon Richter (16), Dubois (77) et Caussade (132), car il ne constitue pas un accord à fondamentale différente (exemple 2.3).

Exemple 2.3 – Accord de septième de dominante ne permettant pas de corriger l’effet des quintes parallèles, Caussade (132).

De même, plusieurs auteurs précisent que les notes ornementales peuvent aussi créer, entre elles et avec des notes structurelles, des quintes parallèles fautives. Lavignac résume bien 29 cette pensée, que partagent également Reber (190), Dubois (186) et Caussade (249) : « il est inadmissible que les notes d’ornement forment soit entre elles, soit par leur mélange avec les notes essentielles, des groupements défectueux » (Lavignac : 93).

Certains auteurs font des distinctions entre les différents types de notes ornementales et énoncent des règles particulières pour chacun d’eux. Tout d’abord, les notes de passage, lesquelles doivent être soumises aux mêmes lois que les notes structurelles selon Catel (19), Savard (246) et Richter (120), et ne doivent donc pas créer de quintes parallèles. Richter (120) mentionne d’ailleurs que l’emploi de notes de passages remplissant les intervalles disjoints entre deux accords peut transformer des quintes cachées en véritables quintes parallèles, et donc rendre fautif un enchaînement correct au départ

(exemple 2.4).

Exemple 2.4 – Quintes parallèles fautives créées par des notes de passage, Richter (120).

Émile Durand (54) et Rimski-Korsakov (56) affirment, quant à eux, que les notes de passage ou les accords de passage ne permettent pas de sauver les quintes (exemple 2.5).

Exemple 2.5 – Notes de passage ne permettant pas de sauver les quintes parallèles, Rimski-Korsakov (56).

Ensuite, en ce qui concerne les broderies, Rimski-Korsakov (60) énonce dans ses règles que, lors d’ajout de broderie, les quintes parallèles sont toujours à éviter; 30

Reber (190), lui, affirme que « dans ses rapports avec les notes accidentelles, la broderie doit, en général, être soumise aux lois ordinaires qui concernent la pureté de réalisation exigée pour les notes intégrantes de l’harmonie » (exemple 2.6).

Exemple 2.6 – Quintes parallèles fautives créées par des broderies, Reber (190).

Reber (188) évoque également, comme Émile Durand (507), la broderie ornant certaines suspensions qui est considérée dans beaucoup d’écoles comme formant une quinte retardée, et dont le mauvais effet est davantage ressenti dans les mouvements lents ou en valeurs longues, ce qui ne s’applique plus en valeurs très courtes (exemple 2.7). Selon Reber (188),

« la faculté de se servir de la broderie, en pareil cas, est donc soumise à l’appréciation du goût ».

Exemple 2.7 – Broderie ornant la suspension et formant une quinte retardée, Reber (188).

Reber (183) et Émile Durand (489) émettent aussi des restrictions concernant les appoggiatures14. Émile Durand (489) énonce ses restrictions en ces termes :

14 Reber (177) définit l’appoggiature comme un ornement (consonant ou dissonant) qui précède sa note principale, et dont on trouve deux sortes : « l’appoggiature expressive qui occupe momentanément la place de la note principale et sur laquelle l’exécutant doit appuyer, et l’appoggiature faible qui n’est qu’une note non 31

En principe, une appoggiature ne peut sauver […] deux quintes […] consécutives formées par les notes réelles de l’harmonie. Pour être correct, il faut pouvoir supprimer toute appoggiature sans qu’il en résulte aucune faute de ce genre [exemple 2.8].

Exemple 2.8 – Appoggiature ne permettant pas de sauver les quintes, Reber (183).

Dans la catégorie des notes ornementales, le retard fait généralement l’objet d’une

étude à part, bien que nous le mentionnions précédemment en lien avec les broderies, puisqu’il est davantage d’ordre rythmique que mélodique. Plusieurs auteurs comme

Reicha (136), Reber (117), Cherubini (23), Savard (62), Émile Durand (342), Richter (98),

Dupré (15) et Caussade (176), considèrent qu’un retard entre les quintes ne corrige pas leur mauvais effet (exemple 2.9).

Exemple 2.9 – Retard ne permettant pas de sauver les quintes, Reicha (136).

Lavignac (76) l’explique en ces termes :

accentuée venant s’appuyer contre une autre note. » Émile Durand (190, 486) la décrit comme une note étrangère à l’harmonie, à la seconde supérieure ou inférieure, majeure ou mineure, (consonante ou dissonante), précédant sa note principale, ordinairement sur un temps fort ou la partie forte du temps, ou sur un temps faible mais plus accentuée que la note principale (appoggiature expressive ou véritable appoggiature). Elle peut également être sur un temps faible et être non accentuée (semblant s’appuyer sur sa note principale), c’est alors une appoggiature faible (qu’on peut trouver par exemple sous la forme de petites notes barrées). 32

il ne faut pas oublier que la note dite retard est par elle-même étrangère à l’accord, et n’a pas la puissance voulue pour séparer […] deux quintes; on doit donc la supprimer par la pensée, et examiner si, en son absence, l’enchaînement serait régulier; dans le cas contraire, on doit le considérer comme tout aussi fautif avec le retard que sans lui.

Caussade (178) apporte de plus une précision selon laquelle les quintes consécutives

« provenant du retard lui-même sont toujours défendues. » Il faut noter toutefois que dans l’exemple « mauvais » qu’il présente, le retard n’est pas résolu avant la venue de l’accord suivant (exemple 2.10).

Exemple 2.10 – Retard amenant des quintes parallèles fautives, Caussade (178).

Les silences, au même titre que les notes ornementales, ne permettent pas non plus d’éviter la faute, selon Reicha (141) et Reber (31). Ce dernier précise même que cela s’applique quelle que soit la durée et la place qu’ils occupent dans la mesure.

Les auteurs s’attardent ensuite en général à certaines dispositions particulières des voix qui n’effacent pas l’effet des quintes parallèles. Plusieurs auteurs laissent notamment entendre que les quintes parallèles sont plus fautives lorsqu’elles sont placées dans les voix extrêmes. C’est le cas entre autres de Chevé (249), de Reber (68), de Dubois (27), ainsi que de Gilson dans une étude publiée en 1922 15 . Reicha (127) mentionne que la règle interdisant les quintes parallèles s’applique également dans le cas d’accords brisés, que l’on doit ramener en position d’accords plaqués pour vérifier cet aspect : « Pour traiter les accords brisés convenablement, il faut se les représenter comme étant plaqués, si dans ce

15 Paul Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie; étude documentaire sur l’art musical (Bruxelles : Schott, 1922), 18. 33 dernier cas, ils sont vicieux, ils le seront de même étant brisés. La même règle s’applique aux accords brisés accompagnés d’une basse. » De même, certains auteurs comme Reber

(26) n’admettent pas le croisement des voix comme moyen d’éviter les quintes parallèles, car l’oreille en ressent encore l’effet (exemple 2.11).

Exemple 2.11 – Croisement des voix n’annulant pas l’effet des quintes parallèles, Reber (26).

Émile Durand (343), quant à lui, n’applique cette condition qu’aux notes aiguës des deux parties qui se croisent, lesquelles ne doivent pas former de quintes parallèles avec une autre partie.

Finalement, certains auteurs mentionnent que l’intervalle séparant les deux quintes contribue également à en accentuer le mauvais effet. Riemann (30-31), entre autres,

énonce :

Il est d’autre part foncièrement inexact que des quintes se succédant par degrés disjoints soient plus mauvaises que par degrés conjoints : au contraire, la similitude du mouvement mélodique rend dans ce dernier cas l’impression de la confusion des deux voix encore plus sensible.

Dans le même ordre d’idée, Vinée (111) affirme que l’effet le plus dur est la succession conjointe (surtout à trois parties en position serrée) et que la lourdeur des quintes « devient encore plus formelle lorsqu’elles sont isolées de tout autre élément, à moins qu’en durée brève elles ne constituent un arpège représentatif d’une tenue dissonante. » Riemann (30-

31) ajoute également que les quintes parallèles sont plus intolérables dans une suite 34 d’accords de même modalité, que si elles se produisent par degrés disjoints et entre accords de modalités différentes.

2.3 Exceptions possibles à la règle

Les auteurs ont, pour la plupart, inséré dans leurs traités une ou plusieurs sections présentant des situations où les quintes parallèles sont permises ou, à tout le moins, « plus tolérables ». Certaines de ces situations variant d’un traité à l’autre, elles entrent parfois en conflit avec des situations interdites par d’autres auteurs. La question des notes ornementales est notamment un cas où les opinions divergent particulièrement. Nous avons présenté plus tôt les cas où les auteurs considèrent les quintes parallèles comme fautives; maintenant voici les cas où elles sont permises.

Plusieurs auteurs indiquent une quantité de notes ornementales devant séparer les quintes pour permettre d’en atténuer le mauvais effet. Parfois la quantité est imprécise, comme chez Lavignac (44), qui mentionne seulement qu’elles doivent être séparées par plusieurs notes dans les deux parties. D’autres auteurs apportent davantage de précision :

Bazin (29) affirme qu’il faut au moins quatre notes intermédiaires, Émile Durand (77) et

Kœchlin (Précis de contrepoint : 3) permettent les quintes séparées par au moins l’équivalent d’une mesure entière (exemple 2.12), et Dupré (11, 13) émet des règles similaires en affirmant que les quintes sont sauvées par l’équivalent d’une ronde, par deux blanches en deuxième espèce ou par quatre noires en troisième espèce. 35

Exemple 2.12 – Quintes parallèles sauvées par un nombre suffisant de notes intermédiaires, Émile Durand (77).

Caussade (250) accepte des quintes si la deuxième comporte une note étrangère (ou deux), mais limite cela à la durée d’un même accord et en exclut des quintes qui apparaîtraient entre la basse et le ténor (exemple 2.13).

Exemple 2.13 – Quintes parallèles acceptables amenées par des notes ornementales, Caussade (250).

Certains changements de position de l’accord entre les deux quintes, s’ils sont assez importants, permettent, selon certains auteurs, de corriger les quintes parallèles ou de rendre l’effet des quintes parallèles moins désagréable. Barbereau (72), notamment, accepte les quintes parallèles si un changement de position intervient dans plusieurs parties

(exemple 2.14). Selon Savard (61), l’effet des quintes peut être atténué « par un changement de position dans plusieurs parties pendant la durée des notes intermédiaires.

Dans ce dernier cas, l’une des deux parties entre lesquelles existent les quintes […] doit faire un saut de quarte, au moins. » Dubois (27), comme nous l’avons déjà énoncé, affirme 36 que les quintes parallèles résultant d’un changement de position ou d’état de l’accord sont fautives, mais il tempère sa position en ajoutant : « à moins que la place que telle position occupe dans la mesure, ou la durée relative des diverses positions ne fasse disparaître le mauvais effet des quintes. »

Exemple 2.14 – Quintes parallèles acceptables, car séparées par un changement de position dans plusieurs parties, Barbereau (72).

Barbereau (72), Bazin (30), Savard (61), Émile Durand (77) et Lavignac (43) acceptent les quintes, peu importe la distance ou leur importance, si les notes qui les séparent impliquent un changement d’accord (exemple 2.15).

Exemple 2.15 – Quintes parallèles acceptables, car séparées par un changement d’accord, Lavignac (43).

Encore une fois, les règles divergent selon les types de notes ornementales. Nous avons vu précédemment que Catel (19), Savard (246) et Richter (120) n’admettaient pas les quintes produites par une ou des notes de passage. Toutefois, Reicha (135) et Reber (201) 37 les tolèrent (exemple 2.16), de même que Dupré (12), ce dernier précisant cependant que c’est la seconde quinte qui doit être produite par une note de passage.

Exemple 2.16 – Quintes parallèles acceptables créées par une note de passage, Reicha (135) 16.

Reber (203) évoque aussi ce qu’il appelle une « licence » présente dans la musique instrumentale :

En procédant par le mouvement direct, les notes de passage simultanées ayant simultanément la même durée, qu’elles soient diatoniques ou chromatiques, ne peuvent être disposées qu’en rapports de tierces […] ou de sixtes […] ou de quartes accompagnées par une partie inférieure formant des sixtes avec la partie supérieure […]. Pourtant, dans une série de notes […], on double quelquefois, à l’octave, chacune des trois parties […], et, quoique cela produise une suite de quintes, l’effet n’en est pas dur lorsque le mouvement est rapide; cependant on ne voit cette licence que dans la musique instrumentale [exemple 2.17].

Exemple 2.17 – Quintes parallèles acceptables créées par une série de notes de passage simultanées doublées à l’octave, Reber (204).

Finalement, Richter (122), bien qu’interdisant a priori les quintes avec notes de passage, mentionne qu’on en trouve dans « les ouvrages les mieux écrits », mais qu’il ne faut pas y attacher trop d’importance, car elles ne sont pas considérées comme fautives.

16 Mentionnons toutefois que ce ut que Reicha désigne comme une note de passage est en réalité une broderie. 38

En ce qui concerne les broderies, nous avons évoqué plus tôt les auteurs considérant que les broderies de retard forment des quintes retardées, mais Dubois (222) et

Caussade (229) les tolèrent aisément (exemple 2.18), et ce dernier l’explique ainsi :

Il en est de même pour deux quintes successives, lorsque la seconde quinte résulte de la broderie d’un retard (ou d’une dissonance quelconque) avant sa résolution. En effet, l’impression est alors très nette du véritable caractère, sans importance aucune au point de vue harmonique, de la […] seconde quinte.

Exemple 2.18 – Quintes parallèles acceptables créées par la broderie d’un retard, Dubois (222).

Émile Durand (197), qui n’accepte pas la broderie de retard, tolère toutefois une exception en ce qui concerne les broderies en général :

Lorsqu’une note principale et l’une de ses broderies, ou toutes les deux, se succèdent rapidement et plusieurs fois de suite, comme des battements de trille, l’attaque d’un nouvel accord peut coïncider avec celle d’une broderie. Ces sortes de dessins permettent aussi de faire des quintes consécutives, dont l’une est formée par une note essentielle et une broderie, et l’autre par deux notes essentielles [exemple 2.19].

Exemple 2.19 – Quintes parallèles acceptables créées par une broderie en trille, Émile Durand (197).

Reber (189), qui comme nous l’avons dit précédemment, soumet l’usage de la broderie à l’appréciation du goût, sait tout de même être un peu plus explicite sur ce qui peut être acceptable : 39

La réalisation des broderies, par rapport aux notes intégrantes de l’harmonie qui frappent simultanément avec elles, est, en général, assez indépendante. Ainsi, dans le cas de deux quintes justes consécutives, il suffit que l’une ou l’autre de ces deux quintes soit formée par une broderie d’une part et par une note réelle d’autre part, pour qu’il n’y ait point de faute […] car, ainsi qu’on l’a dit […], la note brodée est considérée comme si elle était tenue [exemple 2.20].

Exemple 2.20 – Quintes parallèles acceptables formées par une broderie et une note réelle, Reber (189).

Reber (190) mentionne une autre situation particulière :

les trois quintes consécutives par demi-tons, loin de produire mauvais effet, ont un charme tout particulier; chacune des deux parties qui concourent à ces quintes renferme alternativement une broderie et une note réelle de l’harmonie, de manière que l’une des deux notes de chaque quinte est toujours une broderie; en d’autres termes, il n’y a pas ici de quintes réelles [exemple 2.21].

Exemple 2.21 – Quintes consécutives par demi-tons (broderie), Reber (190, tiré de Gluck, Armide).

Reber (190) fait remarquer que :

ces libertés de réalisation ne sont bonnes qu’avec des broderies d’une durée courte ou, au moins, moyenne, et que dans un mouvement très lent, ou avec des valeurs longues, elles produisent souvent des effets très mauvais; c’est pourquoi il est préférable de les interdire à l’école, quelle que soit d’ailleurs la durée de la broderie.

Du côté des appoggiatures, Gilson (vol. 1 : 188, 293) accepte d’emblée les quintes parallèles qui pourraient résulter de leur utilisation, que ce soit les quintes séparées par une 40 appoggiature (exemple 2.22), de même que celles créées par ce type d’ornement (exemple

2.23). Le type d’appoggiature utilisé par Gilson dans ses exemples est toujours consonant, du moins pour cette partie de son traité (il mentionne toutefois qu’il existe une autre catégorie d’appoggiatures qui engendre des dissonances)17.

Exemple 2.22 – Quintes parallèles séparées par une appoggiature, Gilson (vol. 1 : 187).

Exemple 2.23 – Quintes parallèles créées par une appoggiature, Gilson (vol. 1 : 188).

Caussade (217) tolère quant à lui des quintes consécutives si la deuxième comporte une appoggiature, mais recommande toutefois d’éviter de le faire à découvert. Si, a priori,

Reber (183) et Émile Durand (489) ne considèrent pas l’appoggiature comme suffisante en soi pour sauver le mauvais effet des quintes parallèles, ils reconnaissent toutefois certaines occasions où l’utilisation de cet ornement pourrait rendre les quintes plus acceptables.

Reber (193) mentionne une situation dans laquelle l’appoggiature « peut être considérée

17 Les caractéristiques générales de l’appoggiature énoncées par Gilson dans son traité (vol. 1 : 186-187) sont en lien avec les définitions de Reber et d’Émile Durand que nous évoquions précédemment. 41 comme une broderie où la première fraction de la note principale […] a été supprimée; c’est pourquoi les deux quintes […] ne sont pas dures » (exemple 2.24).

Exemple 2.24 – Appoggiature permettant de sauver les quintes (broderie sans la première fraction de la note principale), Reber (193).

Émile Durand (490) adoucit quant à lui la règle « à l’égard de certaines quintes consécutives qui, peu dures par elles-mêmes, sont rendues meilleures par l’adaptation d’une appoggiature expressive longue à la seconde quinte » (exemple 2.25).

Exemple 2.25 – Appoggiature expressive longue permettant de corriger l’effet des quintes, Émile Durand (490).

Du côté des retards et des syncopes, les avis sont partagés. Certains auteurs y voient une situation exceptionnellement tolérable, avec des conditions précises à respecter, alors que d’autres considèrent le retard ou la syncope comme des moyens efficaces de « sauver » les quintes. Bazin (30) et Vinée (93-94) font partie de cette seconde catégorie, car ils considèrent les quintes parallèles acceptables sans aucune condition lorsqu’elles sont faites 42 par un mouvement de syncope (exemple 2.26). Lavignac (44) est aussi du même avis, bien qu’il ait énoncé clairement qu’il n’admettait pas le retard.

Exemple 2.26 – Quintes parallèles acceptables par mouvement de syncope, Bazin (30).

Barbereau (73), Riemann (205-206), Gilson (vol. 1 : 280, 287-288, 351) et Dubois (138) acceptent quant à eux les quintes retardées (Riemann et Gilson les permettent aussi en suite), les trouvant même généralement harmonieuses (exemple 2.27).

Exemple 2.27 – Quintes retardées acceptables, Dubois (138).

Certains des auteurs au sujet desquels nous avons dit qu’ils ne reconnaissent pas l’utilisation du retard pour sauver les quintes présentent cependant des exceptions que nous avons consignées dans le tableau 2.2. 43

Tableau 2.2 – Tolérance des quintes parallèles concernant les retards Auteur Citation Exemple(s) Reicha La note prolongée […] est ici note réelle de l’accord de septième dominante dans son premier renversement; il ne représente donc pas [celle] qui lui succède; c’est par cette raison que les exemples suivants sont bons, quoiqu’il y ait en apparence une suite de Quintes retardées (p. 136). Reber Cependant, les quintes sous- entendues sont tolérées lorsqu’elles sont formées par une partie intermédiaire et par la partie supérieure, et que la suspension est placée dans la partie intermédiaire ou bien encore, lorsqu’elles sont formées par deux parties intermédiaires, et la Basse en atténue la dureté (p. 132). Savard Dans le style libre les quintes retardées sont quelquefois tolérées sous cette face, c’est-à-dire entre la première et la deuxième partie (vol. 1, p. 190).

44

Auteur Citation Exemple(s) Émile Cependant, il est bon d’éviter des Durand quintes […] qui ne sont que RETARDÉES par la basse; à moins qu’elles ne soient faites en valeurs longues ou dans un mouvement lent. Les quintes retardées par l’une des parties supérieures sont plus acceptables (p. 78)

On a vu que deux quintes sont tolérées entre les parties supérieures, lorsque la deuxième de ces quintes est retardée. Cette règle autoriserait une suite de quintes retardées […] Cependant, il est bien préférable de disposer ces accords […] de manière à avoir une suite de quartes retardées au lieu d’une suite de quintes.

NOTA – Lorsqu’un retard a été résolu, il peut être considéré comme n’ayant pas existé; son effet est nul au point de vue des enchaînements d’accords qui succèdent à sa résolution (p. 353). Richter il ne faut pourtant pas rejeter d’une – manière absolue les suites de deux quintes […] résultant d’un retard. Le goût et l’expérience peuvent, seuls, fournir des données positives en cette matière (p. 98).

On peut remarquer que Reber (132) présente exactement le même exemple que

Reicha dans la section précédente (136; exemple 2.9), le premier pour illustrer une situation qu’il juge acceptable, et le second pour illustrer une situation où les quintes parallèles sont fautives. Cela démontre bien le clivage qui pouvait exister entre les différents points de vue des auteurs à cette époque, lesquels pouvaient être diamétralement opposés.

Caussade (46), de son côté, parle de mouvement oblique comme préparation de la seconde quinte, sans employer les mots « retard » ou « anticipation » : « Deux quintes successives peuvent être suffisamment atténuées par un mouvement oblique de l’une des 45 deux parties qui les forment. Mais ce mouvement oblique doit s’effectuer assez tôt pour pouvoir constituer une sorte de préparation suffisante de la seconde quinte »

(exemple 2.28).

Exemple 2.28 – Quintes acceptables par mouvement oblique, Caussade (46).

Émile Durand tient un propos similaire en utilisant les mots « syncope » et « anticipée »18, et Savard (62) tolère des quintes anticipées (dont il trouve fréquemment des exemples chez les auteurs les plus classiques), car selon lui la suppression de la syncope les ferait disparaître (exemple 2.29).

Exemple 2.29 – Quintes anticipées acceptables, car la suppression de la syncope les feraient disparaître, Savard (62).

Barbereau mentionne que les quintes anticipées sont tolérées dans l’harmonie non concertante, mais que les syncopes de la basse appartiennent au style concertant

(Barbereau : 73). Il n’admet toutefois pas, lorsqu’il y a suspension dans les voix supérieures, que deux quintes soient séparées par une sixte (Barbereau : 290).

18 « Deux quintes sont permises, lorsque la seconde quinte est amenée par un mouvement oblique formant syncope, parce qu’alors cette seconde quinte se trouve préparée ou anticipée. Mais encore faut-il que la préparation en soit suffisante. » Émile Durand, 79. 46

Pour quelques auteurs, une certaine disposition des voix peut aussi atténuer l’effet des quintes parallèles. En effet, selon Richter (98), « il faut faire observer que l’effet désagréable qu’elles produisent, peut être, en partie, atténué par la disposition des voix. »

Reber (68) est plus précis :

Le mauvais effet des quintes […] défendues est plus ou moins atténué lorsque ces intervalles sont formés par les parties intermédiaires, ou même par l’une des parties extrêmes et une partie intermédiaire; mais on doit toujours éviter d’y faire concourir les deux parties extrêmes à la fois.

Ce point de vue est partagé par Lenormand (20) et par Gilson (vol. 1 : 100-101), ce dernier mentionnant toutefois dans son étude ultérieure que les quintes sont très apparentes lorsque le soprano est impliqué19 (exemple 2.30).

Exemple 2.30 – Quintes formées en tout ou en partie par les parties intermédiaires20.

Les relations des parties entre elles créent également des situations où les quintes parallèles sont acceptables selon certains traités. Gilson (vol. 1 : 215), par exemple, évoque des situations où la relation de tierce entre le soprano et la basse atténue l’effet des quintes parallèles (exemple 2.31).

19 Voir aussi Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 17-18. 20 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 17. 47

Exemple 2.31 – Quintes parallèles atténuées par la relation de tierce entre soprano et basse, Gilson (vol. 1 : 215).

Vivier (130-131) remarque également « qu’elles peuvent quelquefois avoir lieu dans une suite d’accords liés par une ou plusieurs notes communes ou lorsque l’une des notes de la deuxième quinte a été entendue dans l’accord précédent. » Et Riemann (30) mentionne quant à lui :

On est également moins intransigeant sur la question des quintes consécutives, que l’on admet sans aucune objection lorsqu’elles sont dissimulées par une dissonance ou par le mouvement contraire, c’est-à-dire lorsque le manque de richesse de la disposition vocale (car un tel parallélisme produit, tant qu’il dure, l’impression qu’une des voix manque) est compensé pour l’auditeur par d’autres moyens d’intérêt. Pourtant il subsistera toujours une faute de style dans la succession de deux quintes justes entre parties réelles; aussi l’élève doit-il s’interdire cette pratique d’une façon formelle dans ses travaux d’école.

Vinée (92-93) va dans le même sens en affirmant :

À quatre parties et plus, la plus grande facilité pour le mouvement contraire dans les autres parties rend admissible bien des successions qu’on eût proscrites autrefois. […] Et même une suite de quintes conjointes au grave, leur place harmonique naturelle, dans une harmonie espacée telle que la suivante, nous paraîtrait d’un excellent effet de plénitude, grâce au seul mouvement contraire de la partie supérieure [exemple 2.32].

Exemple 2.32 – Quintes parallèles acceptables dans les voix graves d’une harmonie espacée, Vinée (93).

48

Vinée est appuyé en ce sens par Lenormand (19) qui prétend que les quintes parallèles se pratiquent plus facilement dans les parties les plus graves, sous certaines conditions toutefois. Émile Durand (80) mentionne aussi que

Les positions intermédiaires d’un accord brisé ont d’autant moins d’importance, au point de vue d’une réalisation correcte, qu’elles tombent sur une partie plus faible de la mesure ou du temps. C’est pourquoi, deux quintes […] peuvent être tolérées, la première n’occupant qu’une position intermédiaire sans importance [exemple 2.33].

Exemple 2.33 – Quintes parallèles dans les positions intermédiaires d’accords brisés, Émile Durand (80).

Quant à l’intervalle séparant les quintes, on peut constater que les avis sont partagés.

Certains auteurs considèrent que des quintes parallèles procédant par demi-tons chromatiques sont acceptables : Vivier (131), Rahn (137, 160), Lenormand (20) et Gilson21 sont du nombre, et le premier l’énonce en ces termes :

Il est à remarquer que les quintes procédant par demi-tons chromatiques sont d’un effet plus agréable que celles qui franchissent l’intervalle du ton. […] Lorsqu’on écrit l’harmonie à plus de quatre parties réelles marchant par mouvements chromatiques contraires, le mauvais effet des quintes successives disparaît ou se fait moins sentir que dans l’harmonie à trois ou quatre parties [Vivier : 131; exemple 2.34].

Exemple 2.34 – Harmonie par mouvements chromatiques contraires contenant des quintes parallèles acceptables, Vivier (131).

21 Ibid., 20. 49

D’autres prétendent plutôt que, plus elles sont disjointes, plus elles sont acceptables.

Reber (69) est notamment de cet avis : « Deux quintes justes sont d’autant moins défectueuses qu’elles sont plus disjointes » (exemple 2.35).

Exemple 2.35 – Quintes parallèles disjointes, Reber (69).

Émile Durand (509) adopte le même point de vue et en reconnaît l’utilisation dans le style libre lorsqu’elle est accompagnée d’une bonne disposition des voix. À cet égard, il fait remarquer que dans les exemples qu’il présente, l’une des notes formant les quintes est toujours commune aux deux accords qui s’enchaînent (exemple 2.36). Lenormand (20) va dans le même sens en acceptant des quintes par mouvement disjoint avec des notes communes.

Exemple 2.36 – Quintes parallèles disjointes acceptables par la bonne disposition des voix et la présence de notes communes, Émile Durand (509).

Barbereau (73) accepte les quintes qui procèdent mélodiquement par quarte ou par quinte

« si les notes intermédiaires amènent les mouvements contraire ou oblique ou un saut de 50 seconde dans la Partie la plus haute, au moment de l’émission du deuxième accord. »

(exemple 2.37)

Exemple 2.37 – Quintes parallèles disjointes acceptables par le mouvement contraire ou oblique des notes intermédiaires ou un saut de seconde dans la partie la plus haute, Barbereau (73)

Émile Durand (510) mentionne aussi que dans le style libre se pratiquent des quintes parallèles par degrés conjoints, mais que ces « licences » nécessitent une grande expérience et sont donc interdites à l’école. Et selon Gilson, « les effets de quintes parallèles sont seulement désagréables dans les successions en secondes et […] ils sont très acceptables dans les successions en tierces et en quartes ou quintes22 ».

La disposition des quintes entre les phrases est aussi un élément qui amène des exceptions. Reber (69) et Reicha (139) acceptent tous deux l’enchaînement entre le dernier accord d’une phrase ou d’une section et le premier accord de la phrase ou de la section suivante. Reber (69-70) mentionne même que ces « licences sont quelquefois d’un effet saisissant, surtout lorsqu’on attaque, dans un ton différent, chaque phrase, ou même chaque membre de phrase, quelque court qu’il puisse être », en prenant toutefois bien soin de mentionner que ces licences ne peuvent être tolérées à l’école. Rimski-Korsakov (82) amène un point de vue similaire en acceptant deux quintes justes consécutives « dont la deuxième se trouve immédiatement après un point d’orgue. » Il ajoute que les quintes

22 Ibid., 18. 51 parallèles sont aussi possibles dans les cadences conclusives ayant pour but l’accord de tonique complet (exemple 2.38).

Exemple 2.38 – Quintes parallèles dans une cadence conclusive vers l’accord de tonique complet, Rimski-Korsakov (82).

Reicha (139), quant à lui, spécifie qu’on peut faire deux quintes de suite « en répétant la même phrase soit dans une autre octave, soit avec une autre distribution de parties ou dans un autre ton » (exemple 2.39).

Exemple 2.39 – Quintes parallèles en répétant la même phrase avec une autre distribution de voix, Reicha (139).

Certains auteurs considèrent que la disposition métrique des quintes à l’intérieur d’une mesure peut les rendre acceptables, notamment l’importance de l’emplacement des quintes, si elles sont placées sur des temps forts ou des temps faibles par exemple.

Bazin (30), Rimski-Korsakov (66) et Lavignac (43) acceptent les quintes sur les temps faibles successifs, le dernier mentionnant toutefois que les puristes savent les éviter

(exemple 2.40). 52

Exemple 2.40 – Quintes acceptables sur temps faibles successifs, Rimski-Korsakov (66).

D’autres considérations rythmiques amènent les compositeurs à accepter les quintes parallèles. Riemann (31), par exemple, leur trouve un bon effet dans l’harmonie figurée, car

« dans des cas pareils il faut bien se dire que l’oreille n’a pas l’impression d’une succession, mais bien celle d’une disposition rythmique intéressante des éléments d’un seul et même accord » (exemple 2.41).

Exemple 2.41 – Quintes parallèles dans l’harmonie figurée, Riemann (31).

Le croisement est considéré par quelques auteurs comme un moyen d’éviter les quintes parallèles, Reicha (123) affirmant même qu’on y est quelquefois forcé. En réalité, elles sont ainsi évitées pour l’œil, mais pas nécessairement pour l’oreille, à moins d’avoir affaire à deux timbres très distincts permettant de distinguer la marche de chaque voix, soit par des voix contrastantes ou des instruments de timbres différents, comme le mentionnent

Reber (116) et Kœchlin (Précis de contrepoint : 2). Reber rappelle que, sur les instruments

à clavier, cela produit deux quintes consécutives fautives23.

23 Nous ne présentons pas ici d’exemple, car dans les deux cas les auteurs présentent des exemples comportant des octaves parallèles, ce qui ne s’applique pas à notre étude. 53

Les quintes parallèles les plus largement admises sont celles qui apparaissent lors de résolutions naturelles d’accords dissonants. Les auteurs considèrent que l’effet bénéfique de repos amené par la résolution compense l’effet désagréable des quintes (on perd la sonorité rude des quintes dans la sonorité de la dissonance). Les accords le plus souvent cités sont la sixte augmentée avec quinte, c’est-à-dire la sixte allemande (tableau 2.3) et la neuvième de dominante (tableau 2.4). Les auteurs mentionnent également à l’occasion d’autres types d’accords dissonants (tableau 2.5).

Tableau 2.3 – Tolérance de quintes parallèles dans la résolution de l’accord de sixte augmentée avec quinte (sixte allemande) Auteur Citation Exemple Barbereau [accord de neuvième mineure avec quinte diminuée produisant l’agrégation de sixte augmentée avec quinte] Les deux quintes successives […] produites par la résolution des fonctions de quinte et de neuvième sont […] (b) tolérées dans le deuxième renversement, entre la Basse et une Partie intermédiaire seulement [k]; on a plus souvent recours, dans ce cas au retranchement de la neuvième à la fin de la durée de l’accord; on double alors la septième [a, b] (c) permises dans le troisième renversement entre les deux Parties médiaires [l, m]; plus rarement entre une de celle-ci et la supérieure (p. 253). Savard Quelques auteurs tolèrent même les deux quintes provenant de la résolution immédiate de cette dernière agrégation F sur l’accord de dominante (p. 227).

Rimski- [dérogations à la règle rigoureuse du Korsakov mouvement des parties] e) Deux quintes justes formées par la résolution de l’accord de quinte et sixte augmentée (p. 82).

54

Auteur Citation Exemple Rahn En résolvant l’accord de sixte augmentée avec quinte sur l’accord de dominante, on ne peut éviter la faute de deux quintes justes consécutives défendues. D’ailleurs, la succession de ces deux accords, l’un de sixte augmentée avec quinte, et l’autre, l’accord parfait majeur sur la dominante, offrant 4 attractions [4 attractions : 4 parties différentes qui franchissent chacune la petite distance de demi-ton diatonique] [, elle] produit l’harmonie la plus riche, la plus puissante qu’il soit possible d’obtenir malgré les deux quintes justes qui s’y trouvent; aussi ces deux quintes sont-elles tolérées par la tradition, admises par tous les théoriciens et surtout pratiquées par tous les compositeurs (p. 160). Richter La résolution naturelle se fait sur la dominante, mais elle produit toujours une suite de deux quintes parallèles. Ces deux quintes qui, d’ailleurs, ne sont pas très dures, peuvent être évitées, soit par la résolution anticipée de la quinte […] ou par un mouvement de la quinte sur la tierce d’où résulte un accord de sixte augmentée simple. Plus souvent encore, la suite de quintes est évitée par le retard simultané de la quinte et de la tierce, pendant que la sixte augmentée et la basse suivent leur marche ordinaire ce qui produit un accord de sixte et quarte qui précède la résolution définitive (p. 86).

Dubois [suppression de la fondamentale] Ces deux quintes, très douces, sont généralement usitées, en évitant toutefois d’y faire participer la partie supérieure. […] N.B. A propos des deux quintes signalées plus haut; répétons qu’elles sont généralement tolérées, même à l’école, et que la meilleure

manière de les employer est de les placer, comme ici, dans les deux parties graves (p. 126).

55

Tableau 2.4 – Tolérance de quintes parallèles dans la résolution des accords de neuvième Auteur Citation Exemple Barbereau [neuvième de dominante] Ces deux quintes peuvent être admises sans inconvénient dans la réalisation au piano du troisième renversement et de sa résolution (t). N.B. Dans les exemples t et q de la figure précédente, les quintes consécutives ne sont point amenées […] par la reproduction des mêmes fonctions; cette circonstance, jointe à la prépondérance de la tierce mi placée dans la Basse, peut contribuer à expliquer la tolérance de l’oreille dans l’exemple t (p. 181). [accord de neuvième majeure sur le deuxième degré] La quinte de cet accord peut descendre et former deux quintes consécutives avec la résolution de la note neuvième, lorsque l’accord de neuvième est suivi d’un accord de septième à la quinte inférieure (p. 186- 187). Gilson [1er renversement de l’accord de neuvième de deuxième dominante sans fondamentale] Les exemples l) et z) contiennent des quintes parallèles rejetées des classiques (vol. 2 : p. 84- 85). [2e renversement de l’accord de neuvième de deuxième dominante sans fondamentale] N.B. L’exemple n) (avec quintes parallèles) est rejeté par les classiques (vol. 2 : p. 86). [3e renversement de l’accord de neuvième de deuxième dominante sans fondamentale] En bb) et cc) il y a 2 quintes parallèles assez apparentes (cc moins que bb) (vol. 2 : p. 87). Il va de soi que le procédé employé pour résoudre chromatiquement les 7mes et 9mes s’applique également à l’accord V9 privé de fondamentale = 7me de 9 er sensible V 3s, ou au 1 renversement de 9 me me 9 la VV = 7 du 4 degré VV 3s, ou au er 9 me 1 renversement de la IV +R = 6 degré 9 mélodique du mode mineur IV +3+RS (vol. 2 : p. 94-95). 56

Auteur Citation Exemple Dubois [9e mineure] On remarquera que les quintes produites ici par le deuxième renversement ne sont pas dures. On peut les pratiquer avec prudence. (p. 126).

Tableau 2.5 – Tolérance de quintes parallèles dans la résolution de divers accords dissonants Auteur Citation Exemple Vivier Deux quintes successives peuvent être tolérées dans les parties intermédiaires, même sans liaison, lorsque la seconde quinte a lieu dans l’accord de quarte et sixte de la dominante (p. 131).

Vinée En d et en g les successions de quintes seraient tolérables, le mouvement de résolution des composantes de l’intervalle dissonant {la si} prédominant par sa nature (p. 150). À vrai dire, ce cas est un de ceux où les successions de quintes seraient le mieux tolérées [suites de septièmes ou neuvièmes par quinte descendante à la basse] (p. 185). Gilson La succession IV5+-V amène forcément des quintes parallèles, esquivables (vol. 1 : p. 333).

Certains auteurs tiennent à rappeler les vertus artistiques des quintes parallèles pour créer des effets expressifs. Kœchlin (Traité de l’harmonie, vol. 2 : 230-233) a notamment relevé dans son traité plusieurs exemples pris dans les œuvres de compositeurs tels que

Gounod, Lalo, Franck et Bizet, qui se sont servis des quintes parallèles dans ce but.

Lenormand (13-18) présente aussi des exemples entre autres de Debussy, Kœchlin, Saint-

Saëns, Fauré, Séverac, Beethoven et Schumann, et mentionne que les quintes peuvent se pratiquer quand le compositeur a un but déterminé, mais il les défend dans les cas de maladresse d’écriture (Lenormand : 20). Gilson (vol. 3 : 128-134) a fait de même dans son 57 traité, où il donne des exemples tirés des œuvres de Glazounov, MacDowell, Strauss,

Bruneau, Delmas et Puccini. Gilson (vol. 1 : 21) évoque aussi des effets plus précis pour lesquels peuvent servir les quintes parallèles, notamment les successions constantes de quintes au grave que les modernes utilisent pour imiter les sons des cloches (exemple 2.42).

Exemple 2.42 – Quintes au grave imitant le son des cloches, Gilson (vol. 1 : 21, tiré de Sibelius, Karélia, Suite II, op. 11 : « Ballade », mes. 93-100).

Riemann (31-32), de son côté, évoque le renforcement des sons par des quintes ou des douzièmes consécutives, fréquent dans la musique de piano ou d’orchestre, mais rappelle que de tels redoublements ne doivent pas être considérés comme des parties réelles. Il cite d’ailleurs l’effet très bon des jeux auxiliaires de l’orgue qui renforcent toute une série de sons au moyen d’octaves et de douzièmes24.

Finalement, Vivier (130-131), Lavignac (93) et Jacques Durand (21) mentionnent, sans être précis, qu’il existe des situations où les quintes peuvent être possibles et de bon goût. Ils en appellent alors à l’expérience et à l’instinct artistique du compositeur et recommandent la prudence ou l’abstention à l’école, ou si on recherche la pureté du style.

24 Rieman ne donne ici aucun exemple que nous pourrions reproduire pour appuyer ses dires. 58

2.4 Explications et justifications de la règle

Certains auteurs s’appliquent à énoncer dans leurs traités une justification possible à la règle interdisant les quintes parallèles. Parfois cette justification est courte et peu appuyée, mais certains s’efforcent tout de même d’étayer leur point de vue d’explications auxquelles ils espèrent donner un caractère scientifique plausible. Comme il existe parfois de petites subtilités dans les différents propos, nous reproduirons les explications de tous les auteurs sous forme de tableau pour permettre au lecteur d’en avoir une vue d’ensemble.

La plupart des auteurs justifient l’interdiction par le fait que les quintes parallèles sonnent mal, que cet enchaînement n’est pas agréable à entendre, qu’elles sonnent dur, creux, affreux. Cela ressemble parfois à un jugement de valeur, à une affirmation sans véritable fondement, mais certains avancent des explications un peu plus étoffées. S’il est vrai que tous mentionnent, à un endroit ou à un autre de leur traité, et plus ou moins directement selon le cas, le « mauvais effet » des quintes, dans la plupart de ces cas, l’expression « mauvais effet » revêt pour ces auteurs le sens de fautif, un concept qui n’a pas lieu d’être ici et qui peut être en lien avec des justifications différentes. Par exemple, un auteur pourrait dire que les quintes produisent un mauvais effet parce qu’elles causent de l’ambiguïté tonale, ce qui n’est pas à proprement parler un problème de son désagréable.

Seront notés ici uniquement les « mauvais effets » en lien avec une sonorité désagréable justifiant l’interdiction, dans un contexte général (tableau 2.6). 59

Tableau 2.6 – Traités justifiant l’interdiction des quintes parallèles par leur mauvais effet sonore Auteur Citation Reicha On ne sait pas encore pourquoi des quintes de suite par mouvement semblable produisent un mauvais effet; il faudrait, pour se l’expliquer, connaître au juste l’influence physique qu’exerce la succession des Sons, des Intervalles, des Accords et des gammes sur l’oreille; mais cette influence n’étant pas connue, et ce qu’on pourrait dire sur cette matière ne présentant que des hypothèses, nous nous abstiendrons d’en parler. […] En proscrivant dans les traités les quintes […] par mouvement semblable, on n’a dû avoir d’autre but que d’en éviter le mauvais effet; ainsi donc, quand elles cessent d’être désagréables à l’oreille, la défense n’a plus de cause légitime (p. 132). Chevé Nous dirons même, de manière plus générale, que les élèves qui commencent l’étude de l’harmonie doivent suivre, dans toute leur rigueur, la règle que nous venons d’établir, relativement au mouvement semblable; c’est le meilleur moyen d’éviter de faire de l’harmonie plate, sans couleur, à tonalité perpétuellement douteuse et pleine d’accords de mauvais choix. Plus tard, quand la pratique les aura rendus plus forts, ils arriveront à reconnaître que deux quintes consécutives ne blessent pas toujours l’oreille […] et ils sauront quand il convient de ne plus suivre la règle avec tant de vigueur (p. 245). Reber En général, la quinte défendue est une dureté, elle est incohérente (p. 16). Savard Les quintes produisent un effet dur et désagréable (p. 59). Rahn l’oreille n’accepte pas deux repos différents […] La succession de ces deux accords […] qui se trouvent à côté l’un de l’autre dans la gamme, et entre lesquels il n’y a point de note commune produit une harmonie dure, désagréable à entendre, et que la tradition interdit (p. 35). Ratez Cette succession est prohibée en raison de sa dureté (p. 4). Lavignac Deux quintes de suite produisent une grande dureté. Deux octaves donnent un sentiment de pauvreté harmonique, ce qui est facile à comprendre, puisque par leur fait le nombre des parties se trouve réduit, deux voix se doublant mutuellement. La dureté des quintes est moins aisée à expliquer. Mais elle existe, c’est un fait indéniable, et il faut absolument les éviter (p. 42). Gilson Les successions constantes de quintes au grave communiquent au passage suivant une saveur un peu rude et primitive, se rapprochant du barbare organum (vol. 1 : p. 21). Dubois La raison est que les quintes produisent un effet de dureté (p. 13).

Le mauvais effet sonore est parfois le seul argument d’un auteur pour justifier la règle.

Cependant, aucune propriété physique ne le justifie, ce qui fait que Kœchlin (Traité de l’harmonie, vol. 1 : 14) ose tout de même affirmer qu’il en trouve le son charmant, ou à tout le moins d’un effet propice à certaines situations:

les quintes successives sont rarement dures et « creuses » (surtout aux voix); leur sonorité est souvent excellente. Les artistes modernes en ont usé de la façon la plus heureuse; et fussent- 60

elles creuses ou dures, il pourrait se rencontrer des cas exigeant ces sortes de sonorité plus âpres.

Ceci a pu conduire à en permettre occasionnellement l’utilisation. Souvent perçues comme une question de goût, ces affirmations sont parfois dues à une recherche de pureté ou de variété dans l’écriture. L’utilisation du style sévère, qui passe par l’observation la plus stricte des règles, est considérée par certains comme le seul moyen d’obtenir la pureté dans la réalisation de l’harmonie. Et même le style libre ne semble pas y échapper, car selon

Richter (12), les licences qu’on y amène doivent être justifiables comme des exceptions à la règle et non comme des infractions.

Le manque de variété dans les successions de quintes parallèles peut également s’expliquer par le fait que la quinte est un intervalle juste (consonance parfaite), contrairement aux tierces et aux sixtes qui sont majeures ou mineures (plus grandes ou plus petites) selon le cas (à l’intérieur d’une même suite non modulante). Les consonances parfaites sont aussi considérées généralement comme des points de repos et de stabilité, et comme la musique se doit d’être en mouvement, il ne faudrait pas en faire trop de suite pour ne pas arrêter le mouvement. La tradition et l’éducation ont également pu créer ces opinions négatives face au son des quintes parallèles, comme l’exprime Vinée (92) :

C’est la forteresse traditionnelle des harmonistes d’école, à laquelle on serait presque tenté de garder un certain respect d’antiquaire, en présence des assauts furieux portés par tant de jeunes, prompts à se tailler un facile renom de hardiesse en violant ses vieux remparts, souvent, il faut bien le dire, avec aussi peu de nécessité que de vergogne.

Une autre raison souvent évoquée pour expliquer l’interdiction des quintes parallèles est le fait que deux voix se déplaçant à intervalle de quinte évoluent dans deux tonalités différentes. Dans un contexte où la clarté du sens tonal était très importante, une telle perception entraînait évidemment l’évitement des quintes parallèles, et l’émission d’une règle aussi stricte pour l’étude de l’harmonie (tableau 2.7). Chevaillier cite à ce propos 61

Toussaint-René Poisson (1797-1861), dans l’Harmonie dans ses plus grands développements, qui interdit les deux quintes consécutives comme donnant l’impression de deux tons différents25.

D’autre part, Kœchlin (Traité de l’harmonie, vol. 1 : 14) réfute complètement cette explication. Pour justifier sa position, il analyse l’enchaînement d’un accord de ré mineur et d’un accord de do majeur tous deux en position fondamentale :

On dit : la ré donnent l’impression du ton de sol, sol do celui du ton de do. Mais c’est bien tiré par les cheveux; on dirait aussi bien, en ne considérant que des tierces : ré fa donne l’impression de Ré mineur, do mi celle de Do majeur. D’ailleurs ré fa la est en do et non en sol!

Riemann (29-30), quant à lui, affirme que l’interdiction des quintes parallèles vient du fait que ces dernières détruisent l’indépendance des voix :

Les octaves consécutives, c’est-à-dire la marche parallèle de deux parties en octaves, doivent être évitées comme contraires à l’existence propre et à l’indépendance de chacune des voix. Pour la même raison les quintes consécutives entre deux voix sont mauvaises. Cette interdiction se justifie entièrement par l’examen de la nature même de l’harmonie à quatre parties et en général de l’écriture à voix réelles […]. L’identité de sons en rapport d’octave ressortira tout d’abord; une voix donnant d’une façon continue l’octave d’une autre renforcera la sonorité de celle-ci, mais n’existera pas en tant que partie réelle. De même une voix marchant à la quinte ou à la douzième d’une autre se confondra d’assez près avec cette dernière pour n’avoir plus une existence propre bien marquée.

25 Toussaint-René Poisson, Harmonie dans ses plus grands développements (Paris : l’auteur, 1838) cité dans Lucien Chevaillier, « Les théories harmoniques », dans Encyclopédie de la musique et dictionnaire du Conservatoire, vol. 2, Technique, Esthétique et Pédagogie, sous la direction d’Albert Lavignac et de Lionel de La Laurencie (Paris : Delagrave, 1922), 569. 62

Tableau 2.7 – Traités justifiant l’interdiction des quintes parallèles par l’ambiguïté tonale Auteur Citation Chevé Enfin, quant aux intervalles de deuxième qualité, quinte, quarte, octave, quinzième, nous avons vu, à l’analyse des accords, que ce sont surtout ces intervalles qui compromettent le ton et le mode, particulièrement les octaves, les quintes et les quartes. C’est donc par crainte de compromettre la tonalité, et non pour ne pas blesser l’oreille, que l’on ne prendra pas ces intervalles par mouvement semblable et conjoint tout à la fois. On évitera dès-lors ces intervalles toutes les fois que le ton ou le mode seraient compromis par leur emploi (p. 245). Fétis Lorsqu’un ton est établi, l’oreille s’y accoutume et l’on ne peut en sortir brusquement sans la blesser. Or, de tous les intervalles, celui qui prononce le ton avec le plus de vigueur est la quinte juste. Deux quintes, soit en montant, soit en descendant, annoncent deux tons différents; cette observation a suffi pour les faire proscrire (Traité du contrepoint et de la fugue : p. 4). Cherubini Une suite de quintes forme discordance, parce que la partie supérieure marche dans un ton, en même tems [sic] que la partie inférieure marche dans un autre (p. 5). Vinée Historiquement, les suites de quintes et de quartes justes à découvert furent pourtant au Moyen-Âge le procédé fruste des premiers et barbares essais de successions harmoniques. Or, on ne saurait nier que, même dissimulées au milieu d’une harmonie à parties nombreuses, les successions de quintes produisent un effet de lourdeur incontestable. La raison en est simple. Le déplacement direct de l’élément essentiel de stabilité dans une tonalité vers un élément semblable susceptible de servir au besoin de support à une tonalité différente doit nécessairement produire une sensation d’effort, de résistance. Réciproquement, l’observation ordinaire de la règle peut donner au discours harmonique un tour aisé et élégant non à dédaigner. Quant à lui reconnaître un caractère absolu, personne n’oserait plus le soutenir (p. 92). Richter Il est plus difficile d’expliquer pourquoi les quintes sont défendues, quoiqu’on soit bien convaincu de la nécessité de les défendre. Voici quelques observations à ce sujet. Chaque accord est par lui-même un tout complet. De quelque manière qu’il soit formé, il est circonscrit entre la fondamentale et la quinte comme en un cercle. (L’addition d’une septième ne peut rien changer à ce principe). Or, les enchaînements harmoniques n’existant que par la marche d’un accord sur un autre; il est certain que deux accords enfermés dans leurs limites, quinte contre quinte, ne peuvent être attirés l’un vers l’autre, et qu’ils se trouveront, au contraire, n’avoir aucun rapport (p. 15- 16). Dubois Il est également indéniable que les quintes consécutives proscrites comme donnant la sensation de deux tonalités différentes superposées s’accommodent fort bien de la conception de la polytonie (p. 242).

Il est intéressant de sortir brièvement du cadre de la période étudiée pour observer les arguments invoqués par des auteurs plus récents pour justifier l’interdiction des quintes parallèles. Parmi eux, Heinrich Schenker, Reginald Owen Morris et Wanda Therese Farah 63 ont repris l’explication sur la conduite des voix26. Harold Owen justifie cette explication en décrivant les consonances parfaites comme passives, stables, sans tension (par opposition aux dissonances qui sont actives, moins stables et fortes en tension)27. L’ambiguïté du parallélisme en général, et des quintes en particulier, provient du fait que l’oreille a du mal

à distinguer la note de référence entre les deux voix parallèles. Comme la quinte est un

élément de stabilité et de repos et, qui plus est, un élément caractéristique d’une tonalité donnée, le fait de se déplacer en mouvement parallèle de quinte demande un effort particulier de l’auditeur pour en suivre le cheminement. Le parallélisme en général fait paraître une voix plus importante que l’autre, étant donné que son mouvement dépend exactement de la première. L’assimilation du rapport de quinte au rapport d’octave (donc au redoublement de la note principale) serait dû en partie au phénomène acoustique des harmoniques (qui adjoint à chaque son l’octave et la douzième supérieure) rendant la distinction des deux sons plus difficiles. Et lorsque ce rapport se produit deux ou plusieurs fois de suite, la deuxième voix devenant indiscernable, on a l’impression d’une perte de la polyphonie ou d’une dissolution du contrepoint. Comme dans le cas de l’ajout de mixtures

à l’orgue, où bien qu’elles soient souvent présentes, on ne prend pas toujours conscience des quintes parallèles (certains auditeurs peuvent les confondre dans la masse sonore); les théoriciens affirment que des quintes parallèles font confondre la deuxième voix avec l’unisson. Arnold Schoenberg soutient toutefois que dans le cas des mixtures de l’orgue, on entend toujours les quintes parallèles, puisque même si selon certains elles ne sont pas

26 Heinrich Schenker, Counterpoint: A Translation of Kontrapunkt, traduit de l’allemand par John Rothgeb et Jürgen Thym (New York: Schirmer Books, 1987), 1 : 135; Reginald Owen Morris, Foundations of Practical Harmony & Counterpoint (Westport, Conn. : Greenwood Press, 1980), 146; Wanda Therese Farah, « Microcounterpoint », dans « The Principle of Counterpoint and its Expression in Music, Dance and Cinema » (thèse de doctorat, University of Texas at Austin, 1985), 72. 27 Harold Owen, Modal and Tonal Counterpoint : From Josquin to Stravinsky (New York : Schirmer Books, 1992), 22. 64 perçues comme telles, elles sont tout de même perçues « comme une plénitude sonore, un renforcement de l’acuité du son, de son intensité », ce qui constitue selon lui l’effet d’une modification sonore, qui ne peut être perçue que par cette modification sonore elle-même28.

Ce survol de la présence de la règle dans les traités nous a permis de mettre en

évidence plusieurs aspects qui seront nécessaires à notre étude. En effet, les nombreux cas d’exception que nous venons de présenter ouvrent la voie à une utilisation consciente par les compositeurs. Il en va de même pour les raisons justifiant l’interdiction, qui, selon le contexte que nous étudierons au chapitre suivant, pourraient inciter les compositeurs à transgresser la règle.

28 Arnold Schoenberg, Traité d’harmonie, traduit de l’allemand et présenté par Gérard Gubisch (Paris : J. C. Lattès, 1983), 92-93.

Chapitre 3 La musique de piano au tournant du XXe siècle : esthétiques et état du langage tonal

Pour définir le rôle des quintes parallèles dans la musique de piano entre 1880 et 1940, il faut en comprendre le contexte historique et stylistique. Bien que cette période soit difficile

à synthétiser, nous tenterons tout de même de la décrire en termes généraux, puis nous en expliquerons les principaux courants stylistiques et nous tracerons finalement les grands traits de la tonalité en France au XXe siècle.

La musique française entre 1880 et 1940 est en pleine effervescence. Selon Norbert

Dufourcq (1904-1990), c’est vers une révolution que l’on va, que l’on court. L’école française prend son essor et se libère de ses chaînes entre 1880 et 1910, puis se renouvelle pour régner sur l’art européen de 1910 à 19401. Dufourcq décrit la musique française comme un art mesuré, recherchant l’équilibre, s’épanouissant dans l’ordre, un art classique, intellectualiste, épris de clarté et fait de fine sensibilité. La musique française est aussi un art humain, avide de liberté et de couleur. Fantaisiste, sans doute, mais elle recherche le vrai dans l’émotion. C’est une musique objective, mais qui laisse la place à l’imagination; elle ouvre la porte à un monde de rêves2. En particulier, selon Jean Gallois, « on constate un véritable foisonnement des œuvres et des tendances et un éclatement des esthétiques »3 de l’orée du XXe siècle à la Première Guerre mondiale. D’après Richard Taruskin, le modernisme français des alentours de 1880 tend à minimiser, voire à éliminer tout ce que les Allemands tentaient d’exagérer, soit le contenu émotionnel et psychologique 4. Ces

1 Norbert Dufourcq, La musique française (Paris : Picard, 1970), 287. 2 Ibid., 397-398. 3 Jean Gallois, « La musique française au début du XXe siècle », dans 150 ans de musique française, 1789- 1939, Actes du Colloque organisé par François Lesure (Arles : Actes Sud, 1991), 141. 4 Richard Taruskin, « Getting Rid of Glue. Satie, Debussy, Fauré, Ravel, Lili Boulanger », dans The Oxford History of Western Music (New York : Oxford University Press, 2005), 4 : 60. 66 descriptions, quoiqu’un peu sommaires, donnent quand même une idée de la perception de la musique de cette époque, qui est très diversifiée. Cette perception peut s’expliquer par l’étude des différents courants et influences qui l’ont traversée.

3.1 La musique de piano en France entre 1880 et 1940

Plusieurs courants esthétiques se sont succédés, côtoyés ou chevauchés entre 1880 et 1940 en France. Le tableau 3.1 présente une définition et une chronologie des principaux courants qui ont exercé une influence sur la musique de piano.

Tableau 3.1 – Principaux courants esthétiques présents dans la musique de piano en France entre 1880 et 1940 Courant Période Définition Romantisme 1830-19005 Le romantisme met l’accent sur l’individualité. L’artiste est invité à s’exprimer lui-même pour révéler le monde. On considère les œuvres musicales comme des entités indépendantes, avec leur sens propre, sans être nécessairement caractéristiques d’un genre ou d’un style. Le romantisme se caractérise par l’importance accordée à la virtuosité et par une prédilection marquée pour des thèmes tels que le héros, l’identité nationale, un retour au passé, l’évocation de paysages lointains et la mise en valeur de la sensibilité, de la subjectivité, de l’amplification et de l’exagération de l’émotion6. Symbolisme Fin du XIXe Le symbolisme désigne « les manières selon lesquelles des siècle et éléments musicaux peuvent d’une certaine façon être reliés à début du des phénomènes extramusicaux : les mots d’un poème, un XXe siècle7 objet de la nature ou une personne ou un état émotionnel8.». Par contre, il ne suffit pas qu’une œuvre soit inspirée d’un poème ou d’un tableau symboliste pour qu’elle soit étiquetée comme telle, il faut que les caractéristiques stylistiques (attrait pour la nouveauté, les demi-teintes, l’irisation et le statisme, la liberté, la nuance, la suggestion, l’ésotérisme, entre autres) s’allient à la présence de symboles extramusicaux9.

5 « Romantic(ism) », dans The Oxford Dictionary of Music, 2e éd. rév., sous la direction de Michael Kennedy. Oxford Music Online, (consulté le 28 mai 2010). 6 Jim Samson, « Romantiscism », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 28 mai 2010). 7 Richard Langham Smith, « Symbolism », dans The Oxford Companion to Music, sous la direction de Alison Latham. Oxford Music Online, (consulté le 28 mai 2010). 67

Courant Période Définition Impressionnisme 1880 à 1920 L’impressionnisme est l’art de mettre en lumière la sensation environ10 que procure à l’artiste un objet ou une situation. L’artiste doit évoquer l’atmosphère, l’ambiance qui entoure l’objet davantage que l’objet lui-même11. L’impressionnisme est un art de perception, de sensation. Il est aussi un art de la mobilité (du mouvement) et un art de la lumière12. Expressionnisme 1908-192013 Paul Griffiths le définit ainsi : « Un mouvement artistique préoccupé par l’impitoyable expression des émotions troublantes et déplaisantes, souvent avec une violence stylistique qui peut impliquer de pousser des idées jusqu’à l’extrême ou d’aborder le sujet avec une parodie incisive14. »

8 Ibid. « the ways in which musical elements may in some way be connected to extra-musical phenomena: the words of a poem, a natural object, or a person or emotional state. » Toutes les traductions sont de l’auteur. 9 Danièle Pistone, « Le symbolisme et la musique française à la fin du XIXe siècle », Revue internationale de musique française 32 (1995) : 20-27. 10 Plusieurs auteurs font remonter le premier emploi du terme dans le domaine musical à une critique du secrétaire de l’Académie des Beaux-Arts au sujet de l’envoi de Rome Printemps de Debussy en 1887 [Stefan Jarocinsky, Debussy. Impressionnisme et symbolisme (Paris : Le Seuil, 1970), cité dans Pistone, « L’impressionnisme musical et l’esprit de fin-de-siècle », Revue internationale de musique française 5 (juin 1981) : 13; Taruskin, « Getting Rid of the Glue », 76; Christopher Palmer, Impressionism in Music (Londres : Hutchinson, 1973), 25]. Par contre, Jann Pasler mentionne que Pierre-Auguste Renoir (1841-1919) parle à (1813-1883) dès 1882 des « Impressionnistes en musique » en référant peut-être aux Pièces pittoresques (1880-81) de Chabrier. Pasler affirme également que la popularité de ce courant commence à s’estomper après 1904-1905, lorsque le style de Debussy change et que les critiques réclament un retour à l’ordre classique [Jann Pasler, « Impressionnism », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009)]. Danièle Pistone, quant à elle, situe l’amorce du déclin de l’impressionnisme à la Première Guerre mondiale, lorsque Jean Cocteau (1889-1963) fustige, dans Le Coq et l’arlequin (1918), le « climat flou propice aux oreilles myopes (…), la grâce féminine et le léger brouillard neigeux taché du soleil impressionniste », mais elle mentionne également que Camille Mauclair (1872-1945) annonce la fin de l’impressionnisme en 1905 [Jean Cocteau, Le Coq et l’arlequin, rééd. (Paris : Stock, 1979), 56; Camille Mauclair, La revue bleue 3 (1905) : 49-53 et 82-84; cités dans Pistone, « L’impressionnisme musical et l’esprit fin-de-siècle », 13]. 11 Arthur Eaglefield Hull, Modern Harmony (Augener, 1920), 114, cité dans Michel Fleury, L’impressionnisme et la musique (Paris : Fayard, 1996), 30. 12 Sabine Bérard, Musique, langage vivant. 3. Analyses d’œuvres musicales du XXe siècle (Paris : Zurfluh, 1998), 158; Françoise Gervais, « Qu’est-ce que l’impressionnisme musical », Revue internationale de musique française 5 (juin 1981) : 11; Pistone, « L’impressionnisme musical et l’esprit fin-de-siècle », 18. 13 Paul Griffiths, « Expressionism », dans The Oxford Companion to Music, sous la direction de Alison Latham, Oxford Music Online, (consulté le 28 mai 2010). 14 Ibid. « An artistic movement concerned with the ruthless expression of disturbing or distasteful emotions, often with a stylistic violence that may involve pushing ideas to their extremes or treating the subject matter with incisive parody. » 68

Courant Période Définition Néoclassicisme 1920-194015 Arnold Whittall le définit comme un mouvement stylistique dans lequel les compositeurs « ramènent les formes équilibrées et les procédés thématiques clairement perceptibles des styles anciens pour remplacer ce qu’était, pour eux, les gestes de plus en plus exagérés et l’absence de forme définie du romantisme tardif16. » Le néoclassicisme diffère d’un retour aux styles anciens par le fait que les compositeurs ne cherchent pas à « imiter » le style classique ou à le parodier, mais s’approprient certaines techniques et certains traits stylistiques du classicisme qu’ils réinterprètent dans une perspective résolument moderniste. Exotisme 1830-193017 Ralph P. Locke le décrit comme l’« évocation d’un lieu, d’un peuple ou d’un milieu social qui est (ou est perçu) profondément différent des normes locales acceptables dans ses attitudes, coutumes et valeurs18. » L’exotisme s’inscrit dans la recherche d’une liberté nouvelle pour les compositeurs et répond à une volonté de dépaysement sonore momentané, lequel doit s’appuyer sur des traits stylistiques intégrés profondément dans la musique19. L’exotisme se distingue ainsi de simples influences étrangères qui ne font que rappeler le pays d’origine par l’utilisation de formules connues plaquées dans une œuvre20.

15 Arnold Whittall, « Neoclassicism », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 5 mai 2010). Michel Faure, quant à lui, situe la naissance du néoclassicisme en 1917, année de composition du Tombeau de Couperin de Ravel et de la Symphonie classique de Serge Prokofiev (1891-1953), mais ne semble pas pouvoir attribuer une véritable période de déclin à ce courant [Michel Faure, « Du néo-classicisme musical en France entre les deux armistices de Rethondes », dans XXe Siècle – Images de la musique française, textes et entretiens réunis par Jean-Pierre Derrien (Paris : G.I.E. Musique et Promotions (SACEM – S.D.R.M.) & Éditions Papiers, 1986), 32]. 16 Whittall, « Neoclassicism ». « A movement of style in the works of certain 20th-century composers, who, particularly during the period between the two world wars, revived the balanced forms and clearly perceptible thematic processes of earlier styles to replace what were, to them, the increasingly exaggerated gestures and formlessness of late . » 17 Yves Defrance et Pistone distinguent plusieurs vagues d’exotisme entre 1830 et 1930 : l’Orient (culminant vers 1880 pour s’éteindre dans les années 1920), le Maghreb (1830 à environ 1900), l’Espagne (débute à l’époque de l’impératrice Eugénie Montijo et de l’expédition d’Espagne (1823) pour culminer dans les années 1872-1892), la Russie et le monde slave en général (à partir de 1890, et surtout durant la période des Ballets Russes, 1909-1929), l’Extrême-Orient (après la victoire japonaise de 1905), dans une moindre mesure, l’Afrique et l’Océanie, et une petite vague d’intérêt pour l’Amérique (après la Première Guerre mondiale, laquelle prendra la forme, plus tard, de l’influence du jazz) [Yves Defrance, « Exotisme et esthétique musicale en France. Approche socio-historique », Cahier de musiques traditionnelles 7 (1994) : 198-201; Pistone, « Les conditions historiques de l’exotisme musical français », Revue internationale de musique française 6 (novembre 1981) : 22]. 18 Ralph P. Locke, « Exoticism », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 28 mai 2010). « The evocation of a place, people or social milieu that is (or is perceived to be) profoundly different from accepted local norms in its attitudes, customs and morals. » 19 Pistone, « Les conditions historiques de l’exotisme musical français », 12. 69

Courant Période Définition Sonorisme Tournant du Le terme sonorisme est lié à la musique « qui explore les XXe siècle21 contrastes d’instrumentation, de texture, de timbre, d’articulation, de dynamiques, de mouvement et d’expression comme des éléments de base dans la construction de la forme22 ». Il est généralement associé à la musique polonaise des années 1960-70, mais il peut également être utilisé pour englober une conception large de la notion de sonorité (nouvelles qualités de son du XXe siècle, par exemple). Retour aux Non Le retour aux styles anciens est un mouvement de retour à styles anciens définie, en l’Antiquité, au baroque, au classicisme, au style galant. Les continu compositeurs écrivent de la musique dans le style de ces époques ou des instruments de ces époques, souvent sous forme de pastiches des grands maîtres. On assiste à un retour des genres classiques (forme sonate, menuet, concerto), et à un retour à la tonalité telle qu’employée à l’époque baroque et à l’époque classique. Il faut préciser qu’ici le retour est littéral, contrairement au néoclassicisme qui réinvente les genres anciens.

Au cours de l’époque 1880-1940, la musique française a subi plusieurs influences tant extérieures qu’intérieures selon Kœchlin et Dufourcq23. Tout d’abord, Richard Wagner

(1813-1883) a eu une influence considérable sur la musique française des environs de 1880

à 1910, tant du fait de ses partisans que de ses opposants. Pratiquement élevé au rang de demi-dieu ou profondément détesté, il ne laisse personne indifférent. On l’associe principalement au développement du symbolisme et de l’impressionnisme en France

20 Defrance, « Exotisme et esthétique musicale en France », 192; Martin Kaltenecker, « L’exotisme dans la musique française depuis Debussy », dans XXe Siècle – Images de la musique française, textes et entretiens réunis par Jean-Pierre Derrien, 12. 21 Le sonorisme connaît ses premiers balbutiements vers la fin de la période qui nous occupe. Nous considérons cependant pertinent de mentionner ce courant, puisque faire des variations de timbre est une caractéristique importante de la littérature de piano au tournant du XXe siècle, en quelque sorte une anticipation de ce courant. De même, le colorisme, avec l’utilisation d’anciens accords, de tons inédits et de diaphonie en quarte ou en quintes, est considéré par certains auteurs comme une forme de sonorisme. Voir Faure, Musique et société, du Second Empire aux années vingt. Autour de Saint-Saëns, Fauré, Debussy et Ravel (Paris : Flammarion, 1985), 264-265. 22 Zbigniew Granat, « Sonoristics, sonorism », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009). « that explored contrasts of instrumentation, texture, timbre, articulation, dynamics, movement, and expression as primary form-building elements. » 23 Charles Kœchlin, « Les tendances de la musique moderne française », dans Encyclopédie de la musique et dictionnaire du Conservatoire, sous la direction d’Albert Lavignac et Lionel de La Laurencie (Paris : Delagrave, 1925), 2.1 : 70; Dufourcq, La musique française, 288. 70

(l’impressionnisme s’étant surtout développé en réaction consciente et systématique contre l’immense popularité de Wagner)24, et ses particularités de langage (harmonie chromatique, leitmotive, dissonances non résolues, séquences) ont influencé le style des compositeurs français 25 . Le culte de Wagner a amené les musiciens français à se détourner de l’enseignement établi : le Conservatoire subit maintenant la concurrence de l’École

Niedermeyer et de la Schola Cantorum qui attirent les musiciens recherchant un enseignement différent26. On note ensuite l’influence de Franck, de 1890 à 1900, qui est présente surtout à travers l’œuvre de ses nombreux élèves et disciples (notamment D’Indy,

Lekeu, Ropartz, Dukas, Pierné et Magnard), à qui il a transmis son idéalisme beethovénien additionné des innovations harmoniques du romantisme tardif. Se rapprochant de la tradition viennoise d’un côté, et de Franz Liszt (1811-1886) et Richard Wagner de l’autre, les œuvres franckistes sont souvent décrites comme massives et imposantes, comme le remarque Martin Cooper à propos de la Sonate pour piano de Lekeu27. À la même époque, la musique de Chabrier influence plusieurs compositeurs, notamment Debussy, Ravel,

Messager et Charles Lecocq (1832-1918), de même que ceux du groupe des Six qui se réclament une filiation marquée avec lui. Selon Robert Winter, ses pièces de piano ont contribué à l’émancipation de la dissonance et au développement de l’intérêt pour les

24 Scott Messing, Neoclassicism in Music. From the Genesis of the Concept through the Schoenberg/Stravinsky Polemic (Ann Arbor, Michigan : UMI Research Press, 1988), 6. 25 Barry Millington et al., « Wagner », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009). 26 Denis Arnold et Richard Langham Smith, « France », dans The Oxford Companion to Music, sous la direction de Alison Latham. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009). 27 Martin Cooper, French Music from the Death of Berlioz to the Death of Fauré (Londres : Oxford University Press, 1951) cité dans John Trevitt et Joël-Marie Fauquet, « Franck », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009). 71 mélodies modales en France28. Poulenc, Milhaud et Auric privilégiaient son côté humoriste, parodiste et son talent de transposition de l’art populaire en grand art29. Fauré, quant à lui, a pu étendre son influence à de nombreux élèves, particulièrement entre 1900 et 1915, ayant d’abord été professeur et ensuite directeur du Conservatoire de Paris à partir de 1905. Il a

également été critique musical au Figaro et membre de l’Institut. Selon Kœchlin, l’influence de Debussy a entraîné, entre 1900 et 1920 environ, l’avènement d’un courant appelé « debussysme », qui se caractérise par un retour à une conception très française de la musique (entre autres, des sonorités moins grandioses et des périodes plus concises) et par une confiance dans les conseils de hardiesse à l’égard des règles, soit en quelque sorte un culte de la beauté pour elle-même, sans égard aux règles à suivre30. Entre 1912 et 1922, l’influence d’Arnold Schoenberg (1874-1951) est présente surtout dans la musique expressionniste : ses pièces pour piano de l’opus 11 fascinaient, entre autres, Milhaud.

Finalement, entre 1910 et 1930, Igor Stravinski (1882-1971) a lui aussi influencé la vie musicale française, en premier lieu par ses ballets et, en second lieu, par le rôle important qu’il a joué dans l’essor du courant néoclassique après son installation en France en 192031.

Selon Susan Bradshaw, il est aussi reconnu pour la qualité de ses transcriptions au piano de ses œuvres orchestrales, qui démontrent un sens inné de l’utilisation des sonorités caractéristiques de cet instrument32.

28 Robert Winter, « 19th Century National Trends », dans Philip R. Belt et al., The New Grove Musical Instruments Series - The Piano (New York : W. W. Norton & Company, 1988), 135. 29 Steven Huebner, « Chabrier, Emmanuel », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009). 30 Kœchlin, « Les tendances de la musique moderne française », 70. 31 Stephen Walsh, « Stravinsky, Igor », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 1er septembre 2010) 32 Susan Bradshaw, « The Growth of Pianism, 1900-1940 », dans Belt et al., The New Grove Musical Instruments Series - The Piano, 139. 72

Le tournant du XXe siècle s’accompagne de plusieurs changements socioculturels :

évolution des structures du milieu musical, notamment par un engagement grandissant de l’artiste dans la société, apparition des techniques d’enregistrement et de diffusion de la musique, et accélération de l’évolution des connaissances et des technologies. Le développement d’une « économie » de la musique a également une influence sur le répertoire, qui, pour plaire à la petite et moyenne bourgeoisie, de plus en plus nombreuse, doit souvent faire preuve de conservatisme33. La production artistique est intense : elle bouleverse et provoque plusieurs scandales et ruptures, citons par exemple Le Sacre du printemps (1913) de Stravinski, Parade (1916-1917) de Jean Cocteau (1889-1963) et Satie, les Concerts salade (1921-1925) de Wiéner, les Chansons madécasses (1925-1926) de

Ravel, et la création de la Société musicale indépendante (1909), entre autres. L’évolution du langage et des esthétiques est exceptionnelle, les courants se multiplient34.

3.2 Évolution de la tonalité du XIXe au XXe siècle en France

Afin de déterminer le rôle des quintes parallèles dans le langage tonal, il convient d’en connaître les principes et les caractéristiques. Pour ce faire, nous allons d’abord définir le concept de tonalité et ensuite en tracer l’évolution jusqu’au seuil de la période étudiée. Le lecteur pourra s’étonner de ce que nous remontions jusqu’à l’époque classique pour expliquer une période postérieure bien définie dans le temps, mais les auteurs que nous aborderons dans ce chapitre ont certainement eu une influence sur les auteurs de traités que nous avons étudié au chapitre 2. Il nous apparaît donc important qu’ils figurent dans cette section afin d’apporter un éclairage sur l’origine de certains aspects de la règle. Citons par

33 Sylvain Caron, François de Médicis et Michel Duchesneau, Musique et modernité en France, 1900-1945 (Montréal : Les Presses de l’Université de Montréal, 2006), 11-12. 34 Ibid., 8-9. 73 exemple Jean-Philippe Rameau (1683-1764), dont le traité et les enseignements ont influencé Fétis, car ce dernier a entrepris des études plus poussées de l’harmonie pour comprendre l’incompatibilité qu’il avait remarquée entre les enseignements qu’il a reçu de

Jean-Baptiste Rey (1734-1810), un disciple de Rameau, et le Traité d’harmonie de Catel35.

3.2.1 Définition de la tonalité

Utilisé par Alexandre-Étienne Choron (1771-1834) en 1810 pour décrire l’arrangement de la dominante et de la sous-dominante au-dessus et en-dessous de la tonique, et ainsi marquer la différence entre l’organisation moderne et l’organisation ancienne de la musique36, le terme tonalité a été sujet à interprétation par plusieurs auteurs jusqu’à ce jour, notamment Jean Le Rond d’Alembert (1717-1783), Jérôme-Joseph Momigny (1762-1842) et François-Joseph Fétis (1784-1871)37. L’auteur Brian Hyer le définit ainsi dans le Grove

Music Online :

Une des principales catégories conceptuelles dans la pensée musicale occidentale, le terme réfère le plus souvent à l’orientation des mélodies et harmonies à travers une classe de hauteur de référence (ou tonique). Dans le sens le plus large possible, cependant, il réfère aux arrangements systématiques des phénomènes des hauteurs et des relations entre elles38.

35 Robert Wangermée et al., « Fétis », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 8 juin 2012). 36 Brian Hyer, « Tonality », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009). 37 Jean Le Rond D’Alembert, en 1752, « suggère que la tonalité se construit par la résonance des trois degrés principaux du “mode” (c’est-à-dire de la tonalité), les premier, quatrième et cinquième degrés de la gamme du ton ». Selon Nicolas Meeùs, ce point de vue est l’un des premiers de ceux qui situent entièrement les fonctions tonales dans les accords, plutôt que dans leur enchaînement, et qui font de la tonalité une structure statique. Jérôme-Joseph de Momigny, quant à lui, cherche, en 1803-1806, « à affirmer l’unité tonale en soutenant que toutes les notes de la gamme du ton peuvent se trouver dans une seule série harmonique. » Cette conception, qualifiée de naturalisme excessif, ne donne pas la tonique comme fondamentale de la série, mais bien la dominante. [Nicolas Meeùs, « Polyphonie, harmonie, tonalité », dans Musiques, une encyclopédie pour le XXIe siècle, sous la direction de Jean-Jacques Nattiez (Arles : Actes sud; Paris : Cité de la musique, 2003), 2 : 130-131]. François-Joseph Fétis a défini la tonalité en 1844 comme « l’essence des rapports nécessaires, successifs ou simultanés, des sons de la gamme » [Carl Dahlhaus et al., « Harmony », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009)]. 38 Hyer, « Tonality ». « One of the main conceptual categories in Western musical thought, the term most often refers to the orientation of melodies and harmonies towards a referential (or tonic) pitch class. In the broadest possible sense, however, it refers to systematic arrangements of pitch phenomena and relations between them. » 74

Hyer ajoute également que certains voient la tonalité comme un terme générique pouvant désigner à la fois la musique basée sur les huit modes dits « ecclésiastiques », et les complexes majeur-mineur de la « common practice », mais il note toutefois que l’utilisation la plus commune du terme est certainement pour « désigner l’arrangement des phénomènes musicaux autour d’une tonique de référence dans la musique européenne des alentours de

1600 à 191039. » Roger Scruton, Jacques Viret et Françoise Gervais développent des points de vue similaires40.

Pour les besoins de cette recherche, nous proposons une définition personnelle : la tonalité englobe l’ensemble des relations des notes entre elles, tant au point de vue harmonique que mélodique, de même que dans leurs liens à un degré de référence appelé tonique. Dans un sens plus large, la tonalité s’applique à la structure d’une œuvre dans son ensemble, dans le choix des cadences et des modulations, par exemple, pour assurer l’unité de l’œuvre.

39 Hyer, « Tonality ». « is to designate the arrangement of musical phenomena around a referential tonic in European music from about 1600 to about 1910. » 40 Roger Scruton définit la tonalité (avec le terme anglais « key ») comme une organisation particulière autour de la tonique, selon laquelle les autres notes sont en relation avec elle, et tout le système est organisé en fonction d’autres tonalités possibles. La tonalité a ainsi pour effet de garder la mélodie et l’harmonie en relation étroite et constante [Roger Scruton, The of Music (New York: Oxford University Press, 1997), 248]. Jacques Viret, quant à lui, présente une définition élargie du concept de tonalité : « Mode de perception musicale selon lequel tous les sons sont compris, à une échelle d’observation donnée, par rapport à une finale conclusive unique, réelle ou virtuelle. » [Jacques Viret, « Les langages musicaux du XXe siècle », dans Maurice Emmanuel, L’histoire de la langue musicale, (Paris : Laurens, 1981), 2 : 642.] Françoise Gervais va encore un peu plus loin : « La tonalité n’est pas constituée seulement par une note principale placée à la base d’une gamme diatonique. Son principe essentiel réside dans le rapport de chaque fondamentale harmonique (exprimée ou sous-entendue) avec l’accord construit sur la tonique, et, quel que soit le trajet de ces fondamentales, dans la direction de leur marche vers la tonique, même dans le cas où ce but ne serait pas atteint. Le discours musical s’assimile ainsi à un vaste “acte de cadence”. » [Gervais, « Debussy et la tonalité », dans Actes du Colloque Debussy et l’évolution de la musique au XXe siècle (Paris : Éditions du Centre National de Recherche Scientifique, 1965), 97.] 75

3.2.2 Tonalité classique

L’utilisation de la tonalité à l’époque classique est synonyme de clarté; il ne doit pas y avoir d’ambiguïté dans la référence à la tonique. Des conventions sont établies, dérivant de la perception que tous les accords sont différents et que combiner différentes sélections de notes de la gamme crée différents degrés de stabilité et d’instabilité, de consonance et de dissonance41. Jean-Philippe Rameau, entre autres, a contribué à bâtir les codes qui ont régi l’harmonie à cette époque. Ses règles décrivaient surtout la distinction entre consonance et dissonance, comment passer de l’une à l’autre, les cadences, la construction des phrases musicales et leur agencement dans la forme des œuvres. L’une des règles les plus connues est l’interdiction des quintes parallèles, ce qui favorise l’indépendance des voix dans le contrepoint, et dont l’application en harmonie montre l’interdépendance de ces deux

éléments42. Hyer rapporte que, d’après Fichte et Hegel, l’organisation harmonique de la musique classique peut être comprise comme une relation dialectique dans laquelle la dominante s’oppose à la tonique. De ce fait, la relation entre la dominante et la tonique entrerait dans une logique de contraste semblable à l’opposition entre dissonance et consonance, tension et résolution ou thèse et antithèse, appelant une synthèse. La forme sonate, particulièrement répandue à l’époque classique, en est un bon exemple lorsqu’elle est écrite dans une tonalité majeure, par sa modulation à la dominante et sa reprise à la tonalité d’origine (qui en représente ainsi la synthèse)43. Les modulations à cette époque

étaient régies par des codes connus de tous, dont le but était de leur donner un sens44. Hyer résume bien l’esprit de cette époque : « À cause de cette logique musicale quasi objective,

41 Whittall, « Harmony », dans The Oxford Companion to Music, sous la direction de Alison Latham, Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009). 42 Ibid. 43 Hyer, « Tonality ». 44 Faure, Musique et société, du Second Empire aux années vingt, 261. 76 la musique classique donne l’apparence de pouvoir être universellement intelligible à tous les auditeurs au sein de son aire culturelle45. »

3.2.3 Tonalité romantique

Au XIXe siècle, les notions d’originalité et d’individualité étaient au cœur des préoccupations des compositeurs, et cela avait des répercussions jusque dans leur conception de la tonalité et de l’harmonie. L’application de ces deux concepts était donc en constante évolution. Les compositeurs se mettent à utiliser des accords pour leur « effet de surprise » (là où on ne les attendait pas, d’une nouvelle façon ou avec certaines modifications), mais utilisent des accords qui demeurent tout de même « intelligibles » dans le système tonal, par exemple un accord de septième de dominante dont la quinte est augmentée, ou la transposition de la neuvième une octave plus bas. Le souci d’originalité amène également les compositeurs à chercher de nouveaux moyens de complexifier les accords sur les différents degrés de la gamme, de nouveaux types de chromatismes et de nouvelles façons d’utiliser les dissonances, tout en demeurant dans un contexte tonal46. En fait, les romantiques n’innovent pas réellement sur le plan du matériel musical, mais plutôt dans l’utilisation qu’ils font des ressources de l’harmonie classique. On remarque

également des modulations plus nombreuses et dans des tonalités plus éloignées qu’à l’époque classique. Hyer mentionne que l’intérêt dans la musique romantique est sur le particulier, le concret, le sensuel et le dépendant :

En portant attention à ces harmonies inhabituelles, la musique s’attarde sur le moment présent et distrait l’auditeur des relations tonales plus larges. En même temps, le chromatisme motivique déstabilise la précieuse coordination entre les dimensions mélodiques et

45 Hyer, « Tonality ». « Because of this quasi-objective musical logic, Classical music gives the appearance of being universally intelligible to all listeners within its cultural reach. » 46 Dahlhaus et al., « Harmony ». 77

harmoniques qui caractérisaient la musique classique, libérant la musique de l’obligation de terminer sur la tonique d’origine47.

Il cite également Ernst Kurth (1886-1946) à propos de la prédilection esthétique pour les sonorités sensuelles et les progressions frappantes dans la musique du romantisme tardif.

Selon lui, cela a mené à ce qu’il appelle un « effet absolu », « où les harmonies chromatiques se dressent comme des figures opposées à un terrain diatonique davantage normatif48. » En général, les références à la tonique deviennent de plus en plus ambiguës et occasionnelles. En effet, la combinaison de plusieurs types d’harmonies chromatiques tend

à occulter la référence à la tonique et oblitère la distinction entre une figure chromatique et son « substrat diatonique » (« diatonic ground »)49. Bref, la tonalité romantique recherche davantage l’émotion que la pureté de réalisation, ce que recherchait la tonalité classique.

3.2.4 Debussy, l’impressionnisme et la tonalité

Au tournant du XXe siècle, Debussy est une figure marquante de l’évolution de la tonalité.

Dans l’œuvre de ce compositeur, la mélodie retrouve une certaine indépendance face à l’harmonie. Viret va même jusqu’à parler d’une prépondérance qui peut expliquer plusieurs innovations dans l’ordre harmonique, comme le parallélisme qui est une façon d’envisager l’harmonisation comme un enrichissement de la sonorité50. Gervais parle dans certains cas

47 Hyer, « Tonality ». « In drawing attention to these unusual harmonies, the music tarries over the present moment and distracts the listener from large-scale tonal relations. At the same time, motivic chromaticism destabilizes the careful coordination between the melodic and harmonic dimensions that characterized Classical music, freeing music from the requirement to close on the original tonic. » 48 Ernst Kurth, Romantische Harmonik und ihre Krise in Wagners « Tristan » (Berne, 1920), cité dans Hyer, « Tonality ». « where chromatic harmonies stand out as figures against a more normative diatonic ground ». 49 Kurth nomme trois types d’harmonies chromatiques (qui sont selon lui caractéristiques de « l’altération style ») : altération de l’accord, où une note de l’accord est haussée ou abaissée d’un demi-ton; le déplacement mélodique, où une note voisine dissonante remplace une note régulière de l’accord; et la progression chromatique, où le chromatisme modifie l’intervalle de progression de la basse entre les harmonies. Kurth, Romantische Harmonik und die Krise in Wagners « Tristan », cité dans Hyer, « Tonality ». 50 Viret, « Les langages musicaux du XXe siècle », 644. 78 de mélodies d’accords51. Debussy utilise des successions d’accords consonants (parfois des triades en position fondamentale) et des accords dissonants (par exemple des accords de septième ou de neuvième) auxquels il donne pratiquement le statut de consonances52. Il utilise ainsi des techniques qu’on en est venu à identifier avec l’harmonie impressionniste : notamment, l’emploi de mouvement parallèle pour créer une atmosphère particulière (qui

échappe à la tyrannie du majeur-mineur); et la libération de l’obligation de préparer et résoudre les accords de septième et de neuvième. À l’époque impressionniste, la mise en

œuvre d’harmoniques éloignées (jusqu’à la treizième harmonique) permet, selon Viret,

« l’intégration d’intervalles traditionnellement définis comme dissonants à une structure de base tonalement simple et consonante53. » Debussy et les autres impressionnistes utilisent le timbre et l’harmonie comme les peintres impressionnistes utilisent la couleur : par taches juxtaposées 54 . On parle beaucoup de coloration pour la musique impressionniste dans l’utilisation des sons, des accords, des timbres. Michel Fleury cite par exemple le cas de l’accord de neuvième de dominante auquel les compositeurs de la deuxième moitié du

XIXe siècle ont accolé une vocation descriptive et suggestive, l’associant à certaines valeurs affectives et atmosphériques (volupté amoureuse, calme de la nature non dépourvu d’une note sensuelle, sérénité et mystère d’un autre monde) 55 . Le timbre à l’époque impressionniste subit un affinement de ses métamorphoses romantiques, selon Michelle

Biget, par une surenchère dans la sollicitation des registres et des niveaux dynamiques

51 Gervais, « La notion d’arabesque chez Debussy », Revue musicale 241 (1958) : 14-15, cité dans Fleury, L’impressionnisme et la musique, 79. 52 Fleury, L’impressionnisme et la musique, 88. 53 Viret, « Les langages musicaux du XXe siècle », 648. 54 Faure, Musique et société, du Second Empire aux années vingt, 265. 55 Fleury, L’impressionnisme et la musique, 75. 79 extrêmes, de même que par l’opulence sonore et la multiplication des agrégations dissonantes56. Debussy cherche à s’émanciper des règles et des étiquettes.

Selon Donald N. Morrison et Robert Mueller, le concept de tonalité dans la musique impressionniste est basé sur des « piliers tonaux » tels que : des centres pseudo- traditionnels (progressions d’accords diatoniques et triades, réminiscence des modes majeur-mineur), des sonorités et des progressions autres que majeures-mineures (motifs modaux, modes mixtes, sonorités exotiques), des septièmes et des neuvièmes de différentes sortes comme entités individuelles, et même des structures ambiguës (accords augmentés, sonorités de la gamme par ton, structures dissonantes parallèles). Ces sonorités servent de forces organisationnelles et aident à procurer la direction et l’unité tonale par leur variation et leur réapparition. L’organisation tonale dépend alors de l’équilibre et de l’interaction d’effets sonores indépendants plutôt que des relations tonales 57 . Debussy adopte une approche semblable en utilisant, pour structurer ses œuvres, une conception personnelle des principes de permanence et de différence, comme le souligne Gervais. Pour le principe de permanence, elle mentionne entre autres les répétitions et les parallélismes internes, les notes pivots, les notes pédales, les dessins pédales, les motifs constants, les harmonies longues et les symétries mélodiques. Pour le principe de différence, selon elle, Debussy utilise souvent les variations et les commentaires avec inventivité dans les domaines mélodique, harmonique, spatial, dynamique, rythmique, phonétique, ainsi que les contre- chants et les prolongations de thèmes qui sont des éléments nouveaux greffés sur des

56 Michelle Biget, « Les réminiscences romantiques dans la musique française de piano au début du XXe siècle », Revue internationale de musique française 15 (novembre 1984) : 68. 57 Donald N. Morrison, « Influences of Impressionist Tonality on Selected Works of Delius, Griffes, Falla, and Respighi. Based on the Concept Developed by Robert Mueller » (thèse de doctorat, Indiana University, 1960), f. 6-7. 80

éléments préexistants58. Dans sa recherche, Debussy a également commencé par « noyer » la tonalité, c’est-à-dire juxtaposer un passage tonal avec un passage non tonal. D’autre part, dans les œuvres où il affirme la tonalité, il met généralement en évidence la tonique et les notes principales de l’échelle, à l’exception toutefois de la dominante. Par l’absence de son opposée, la tonique perd un peu de sa prestance et se rapproche davantage d’une « finale » ou même dans certains cas d’une « note principale momentanée ». Parfois cette note ne s’apparente ni à un premier, ni à un cinquième degré, ou est totalement insoupçonnée avant les dernières notes. Toutes ces affirmations amènent Gervais à conclure que « non seulement le besoin de la présence d’une tonique n’est plus éprouvé, mais que l’existence de cette tonique n’est pas nécessaire à la cohésion et à la continuité du discours 59 . »

Debussy a donc contribué par diverses techniques à affaiblir la rigidité du système tonal, permettant ainsi à d’autres compositeurs de s’en libérer.

Debussy a également contribué à diminuer l’intérêt envers la tonalité classique par son utilisation, dès les années 1880, des gammes anhémitonique, pentatonique et octotonique, jusqu’à en faire des éléments à part entière de son langage60. En effet, selon

Yves Defrance, en utilisant des échelles non européennes, Debussy, comme d’autres compositeurs de cette époque, ne souhaite plus uniquement un effet de dépaysement sonore, mais s’inscrit dans un mouvement général de volonté d’universalité dans la musique61. C’est notamment le cas d’Auguste Chapuis (1858-1933), qui utilise une échelle orientale (l’échelle à double seconde augmentée62) dans sa Suite pour le piano sur la

58 Gervais, « Debussy et la tonalité », 103. 59 Ibid., 98-100. 60 Kaltenecker, « L’exotisme dans la musique française depuis Debussy », 12 61 Defrance, « Exotisme et esthétique musicale en France », 202. 62 Serge Gut, « L’Échelle à double seconde augmentée : origines et utilisation dans la musique occidentale », Musurgia 7, 2 (2000) : 41-60. 81 gamme orientale, mais dont le style franckiste l’emporte sur l’allusion lointaine63. Chez

Debussy, c’est surtout l’influence russe qui s’est fait sentir, de laquelle il aurait développé son goût pour les modes anciens et orientaux, pour les colorations vivantes, et un certain dédain pour les règles académiques64. Et selon Ferdinand Brunetière (1849-1906), la mode de l’Extrême-Orient a aidé l’Occident à évacuer l’éthique chrétienne, influençant ses rêves de mystère, de luxe et de libido en liberté dès la fin du XVIIe siècle65. Michel Faure ajoute à ce propos que « le pentatonisme est l’une des gammes les plus primitives et que ce pentatonisme altère notre musique à l’instant même où notre bourgeoisie redécouvre le paganisme66. » L’intérêt des compositeurs français pour leur , de même que pour celui des provinces françaises a aussi pu contribuer à modifier leur conception de la tonalité67. Par contre, l’intégration dans le langage musical français de plusieurs formes d’exotisme nécessitait d’abord l’évolution du système tonal pour refléter de façon optimale ces nouvelles échelles68. L’ouverture sur ces diverses cultures étrangères aux traditions savantes exercera donc une influence déterminante sur le vocabulaire, et même sur la syntaxe tonale des compositeurs de l’époque. Le cadre de la tonalité classique ne peut plus

être pris pour acquis, bien qu’il reste toujours un arrière-plan sur lequel se dessinent les nouvelles pratiques.

63 Pistone, « Les conditions historiques de l’exotisme musical français », 19. 64 François Lesure et Roy Howat, « Debussy, Claude », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 8 novembre 2009). 65 Ferdinand Brunetière, « L’Orient et la littérature française », dans Études critiques sur l’histoire de la littérature française, 8e série, 6e éd. (Paris : Hachette, 1922; reprise d’un article du 1er octobre 1906), 183, cité dans Faure, Musique et société, du Second Empire aux années vingt, 245. 66 Faure, Musique et société, du Second Empire aux années vingt, 245. 67 Voir Faure, Musique et société, du Second Empire aux années vingt, 250-253; Defrance, « Exotisme et esthétique musicale en France », 195-198, 203-207. 68 Pistone, « Les conditions historiques de l’exotisme musical français », 15. 82

3.2.5 La tonalité au XXe siècle

Carl Dahlhaus situe la fin de la tonalité harmonique (classique et romantique) en 191069. Le

XXe siècle est le théâtre de changements importants. Le courant néoclassique, bien qu’empruntant à la tonalité classique tantôt certains de ses matériaux, tantôt certains

éléments de sa syntaxe, fait évoluer les principes de consonance et de dissonance, ce qui contribue au développement d’autres innovations harmoniques : modalité, polytonalité, jazz. Comme le souligne Faure, « la consonance et le diatonisme ont beau demeurer fondamentaux, on les oblitère de broderies, de notes de passage et de notes ajoutées, de rencontres polyphoniques, de superposition de quintes ou de tonalités, afin de multiplier les frottements de secondes70. » Il ajoute également que les compositeurs néoclassiques

remettent en honneur les procédés de l’écriture rigoureuse et [les] adaptent à une harmonie dépassant l’horizon tonal. Grâce à eux, la fugue cesse d’être une forme d’école. Grâce à Honegger, Kœchlin, Milhaud, Ravel, Roussel, Stravinsky, l’écriture polyphonique participe à l’émancipation des dissonances. Parallèlement, elle permet à l’esthétique néo-classique [sic] de gagner son pari, qui est de remettre à sa place la sensibilité71.

L’utilisation croissante du chromatisme à la fin du XIXe siècle, bien qu’enrichissant le système tonal, a aussi fini par contribuer à son éclatement.

Selon Dahlhaus, les trois principaux aspects de l’harmonie au XXe siècle sont : sa perte d’importance comme un facteur dans la composition, l’émancipation de la dissonance

(reconnaissance de la dissonance pour ce qu’elle est, sans nécessité d’une consonance pour la résoudre ou la justifier; un facteur qui menait directement à l’atonalité) et la construction de systèmes individuels. Pour les compositeurs, la fonction structurelle de l’harmonie n’étant plus assez solide pour établir une continuité musicale de longue durée, le rythme, le

69 Dahlhaus et al., « Harmony ». 70 Faure, « Le néo-classicisme musical en France entre les deux armistices de Rethondes », 34. 71 Faure, Du néoclassicisme musical dans la France du premier XXe siècle (Paris : Klincksieck, 1997), 299. 83 contrepoint et le timbre supplantent l’harmonie dans cette fonction72. La musique de piano joue en ce sens un rôle particulier. Selon Biget, les œuvres pianistiques composées après

1880 contribuent à une remise en cause des schémas formels et des réflexes harmoniques : le détail, l’élément individuel, la moindre dimension reçoivent des fonctions sémantiques73.

Le piano réinvente le contrepoint qui, de motivique à l’époque classique et romantique, devient un contrepoint de plans sonores74. Biget ajoute : « En réalité, une polyphonie active et parfois bitonale peut naître non des accords intrinsèques, mais des situations respectives des mélismes sur le clavier, autrement dit par antagonisme des plans mélodiques75. » De plus, l’aspect compartimenté (collage, parenthèse, individualisation de petits épisodes mis bout à bout) que les compositeurs donnent aux pièces de piano, les variations de sonorités systématiques, de même que la rédaction pianistique qui tend à réaliser une palette orchestrale en miniature, sont, selon Biget, de moins en moins compatibles avec une conception tonale de la forme (un trajet harmonique clair à court et à long terme) : « Les modifications de la qualité sonore sont d’abord réservées aux modifications de l’état tonal, puis affectées à des cellules trop brèves pour avoir le temps de se transformer en source d’information harmonique : on aboutit là à une esthétique du moment musical76. »

Dans leur recherche d’extension de la tonalité, les compositeurs se sont également tournés vers la modalité, influencés en partie par la restauration du chant grégorien par les

Bénédictins de Solesmes dans la seconde moitié du XIXe siècle et par leur éducation77.

72 Dahlhaus et al., « Harmony ». 73 Biget, « Les réminiscences romantiques dans la musique française de piano au début du XXe siècle », 67. 74 Ibid., 72. 75 Ibid., 71. 76 Ibid., 74-75. 77 L’École Niedermeyer enseigne le plain-chant depuis 1853 [y ont étudié, entre autres, Fauré, Eugène Gigout (1844-1925) et André Messager (1853-1929)], la Schola cantorum enseigne les modes depuis 1896 et le Conservatoire les introduit dans son programme en 1909. Henri Gonnard, La musique modale en France de 84

D’abord envisagée dans un intérêt pour le passé ou comme une façon d’intégrer des

éléments étrangers dans la musique tonale, la modalité aux XIXe et XXe siècles est davantage une façon de modifier les fonctions harmoniques tonales pour obtenir un effet particulier, plutôt qu’un véritable système d’harmonie. Henri Gonnard évoque trois contextes particuliers d’utilisation de la modalité : le contexte religieux, l’aspect populaire et l’évocation du passé, et l’exotisme78. Danièle Pistone considère que la montée de la modalité est très significative sur le plan de l’évolution de la tonalité.

Employées pour créer une atmosphère dans la musique religieuse surtout, ces phrases modales sont d’abord de simples placages, des citations mélodiques non suivies par l’harmonie; puis elles envahiront le langage vertical, aux cadences d’abord, avant de baigner tout le tissu polyphonique79.

La modalité des XIXe et XXe siècles diffère de celle du XVIe siècle parce qu’elle met l’accent sur les relations entre les accords plutôt que sur les mouvements mélodiques. Les modes sont vus comme des variantes du majeur-mineur, au lieu de former chacun un système particulier. Dahlhaus en fait ainsi une innovation harmonique du XIXe siècle80.

Martin Kaltenecker affirme que le renouvellement du langage tonal par les modes est un fait typiquement français, mais annoncé par plusieurs tendances de l’harmonie romantique, comme les enchaînements d’accords contraires à la syntaxe tonale 81 . On en retrouve plusieurs exemples dans le répertoire pour piano, tels que « Mauresque » des Dix pièces pittoresques de Chabrier, le premier mouvement de la première Sonatine et le premier mouvement de la deuxième Sonatine de Maurice Emmanuel (1862-1938), le « Menuet » de la Petite suite, le « Prélude » de la Suite bergamasque, l’« Hommage à Rameau » de la

Berlioz à Debussy (Paris : H. Champion, 2000), 20-21; Faure, Musique et société, du Second Empire aux années vingt, 24. 78 Gonnard, La musique modale en France de Berlioz à Debussy, 123-135, 137-150, 151-157. 79 Pistone, La musique en France de la Révolution à 1900 (Paris : H. Champion, 1979), 177. 80 Dahlhaus et al., « Harmony ». 81 Kaltenecker, « L’exotisme dans la musique française depuis Debussy », 21. 85 première série d’Images, et les préludes « La fille aux cheveux de lin » et « Canope » de

Debussy.

En terminant, mentionnons brièvement d’autres courants du langage tonal présents au XXe siècle, qui bien que marginaux à cette époque, ont pu jouer un rôle dans l’élaboration du langage des compositeurs étudiés. Nous avons effleuré précédemment la polytonalité, qui consiste à faire évoluer les différentes voix dans plus d’une tonalité à la fois (donc de superposer plusieurs tonalités). On parle aussi de bitonalité lorsqu’il n’y a que deux tonalités en jeu82. Viret mentionne également la polymodalité, lorsqu’on combine des modes différents83. Il y a aussi la polyharmonie qui « consiste dans la dissociation d’un agrégat harmonique en deux ou plusieurs blocs superposés, articulés sur autant de fondamentales distinctes84. » Viret partage le point de vue de Kœchlin qui, dès 1923, voit dans la polytonalité et la polyharmonie l’évolution naturelle de la tonalité, qui peut s’interpréter comme l’extension des classiques « notes étrangères à l’harmonie 85 . » Le dodécaphonisme se développe également dans la deuxième décennie du XXe siècle. Sa conception des douze sons égaux est une façon pour les compositeurs d’organiser de manière rigoureuse l’atonalité, car lorsqu’elle est prise de façon systématique, elle consiste

« à abolir volontairement toute hiérarchie entre les sons musicaux et à leur assurer une

82 « Harmony », dans The Oxford Dictionary of Music, 2e éd. rév., sous la direction de Michael Kennedy. Oxford Music Online, (consulté le 23 novembre 2009). 83 Viret, « Les langages musicaux du XXe siècle », 644. Voir aussi Polytonalité / Polymodalité. Histoire et actualité, textes réunis et édités par Michel Fischer et Danièle Pistone, Série Conférences et Séminaires, n° 21 (Paris : Observatoire musical français, Université de Paris-Sorbonne, 2005). 84 Viret, « Les langages musicaux du XXe siècle », 649. 85 Kœchlin, « Évolution de l’harmonie », dans Encyclopédie de la musique et dictionnaire du Conservatoire, sous la direction d’Albert Lavignac et de Lionel de La Laurencie (Paris : Delagrave, 1925), 2.1 : 697-710; Viret, « Les langages musicaux du XXe siècle », 649-650. 86

égalité structurelle aussi totale que possible86. » C’est en quelque sorte l’aboutissement ultime de l’évolution de la tonalité au XXe siècle : pouvoir en sortir, échapper à ses règles.

Par cette étude de la musique au tournant du XXe siècle, nous avons établi le contexte dans lequel ont été composées les œuvres que nous étudierons au chapitre 5 : l’étude des différents courants stylistiques nous a renseignés sur les intentions des compositeurs et leur philosophie, et l’étude de l’évolution de la tonalité nous a permis de comprendre comment le langage qu’ils utilisent est devenu ce qu’il est. Il ne reste plus maintenant qu’à définir les types d’usage des quintes parallèles et à en analyser la présence dans le répertoire pour être en mesure de définir le rôle des quintes parallèles dans le langage musical.

86 Viret, « Les langages musicaux du XXe siècle », 642.

Chapitre 4 Les types de quintes parallèles dans le répertoire

Après analyse de l’historique des quintes parallèles, de leur présence dans les traités et du contexte historique entourant l’époque choisi, et avant d’analyser des cas de quintes parallèles dans la musique française de piano entre 1880 et 1940, nous allons définir les principaux types de quintes parallèles susceptibles de se retrouver dans le répertoire en général.

On peut retrouver des quintes parallèles un peu partout dans le répertoire, de façon plus ou moins perceptible selon la situation. Certaines occurrences font partie des exceptions admises à la règle par certains théoriciens, d’autres en sont par contre une transgression intentionnelle. On peut les diviser en plusieurs catégories, selon les modalités de leur présentation, leur position formelle et métrique, et leur valeur symbolique. Le tableau 4.1 en énumère les différents types, qui seront systématiquement définis au cours des paragraphes suivants.

Tableau 4.1 – Types de quintes parallèles dans le répertoire Présentation Types Quintes parallèles Cadentielles « apparentes » ou Résolution d’une dissonance « réelles » Erreur dans la conduite des voix (accidentelles) Cas isolés Quintes parallèles Croisement des parties « cachées » ou « ambigües » Avec notes ornementales Enrichissement de la texture Structurelles Cas multiples (séries) Création d’un effet particulier Notes ornementales

88

4.1 Quintes parallèles en cas isolés

On nomme quintes parallèles en cas isolés les occurrences de quintes parallèles ne présentant qu’une seule paire à la fois.

4.1.1 Quintes parallèles « apparentes » ou « réelles »

Les quintes parallèles « apparentes » ou « réelles » sont des quintes « à découvert » qui ne sont pas dissimulées par un artifice quelconque. Elles répondent sans équivoque aux définitions générales énoncées au chapitre 1 (p. 12).

Cadentielles

Robert T. Laudon et Rimsky-Korsakov (82) envisagent l’utilisation de quintes parallèles pour mieux orienter la fin d’une progression harmonique, en ajoutant des notes pour augmenter le sentiment de finalité. Laudon considère de même leur présence plus acceptable lors de mouvements chromatiques que lors de mouvements diatoniques1. Les compositeurs partagent son point de vue et utilisent donc des quintes parallèles pour intensifier la texture de la cadence ou accentuer son caractère imposant et grandiose

(exemple 4.1).

Exemple 4.1 – Quintes parallèles cadentielles2.

1 Robert T. Laudon, « The Debate about Consecutive Fifths : A Context for Brahms’s Manuscript “Oktaven und Quinten” ». Music & Letters 73, 1 (Février 1992) : 5. 2 Les exemples contenus dans ce chapitre ont été, sauf exception, composés par l’auteur à l’aide du logiciel Print Music. 89

Résolution d’une dissonance

Les quintes parallèles sont aussi parfois le résultat de la conduite naturelle des voix. Selon

Richard S. Parks, on ne peut ici leur trouver une explication de l’ordre de la texture ou de l’orchestration3. Généralement, on les retrouve lorsque la résolution naturelle d’un accord le commande, par exemple pour un accord de neuvième de dominante ou de sixte allemande. Les compositeurs les placent alors dans les voix intérieures, ce qui, combiné à l’attrait de la dissonance, a pour effet d’en atténuer la perception (exemple 4.2).

Exemple 4.2 – Quintes parallèles apparaissant lors de la résolution de dissonances.

Erreur dans la conduite des voix (accidentelles)

Certaines occurrences de quintes parallèles doivent être envisagées comme la conséquence d’une erreur dans la conduite des voix. On présume alors qu’il s’agit d’une maladresse ou d’une distraction du compositeur ou du copiste, car aucun élément ne semble justifier leur présence. En pareil cas, il peut également exister des variantes entre différentes versions,

éditions ou copies manuscrites, qui viendront mettre en doute l’intention réelle du compositeur puisqu’il n’est pas toujours possible de savoir qui du compositeur, du copiste ou de l’éditeur aura fait les changements (exemple 4.3).

3 Richard S. Parks, Eighteenth-Century Counterpoint and Tonal Structure (Englewood Cliffs, N. J. : Prentice Hall, 1984), 182-183. 90

Exemple 4.3 – Quintes parallèles résultant d’une erreur dans la conduite des voix.

4.1.2 Quintes parallèles « cachées » ou « ambigües »

Les quintes parallèles « ambigües » sont celles qui ont été dissimulées par un artifice quelconque du compositeur (elles ne sont pas à découvert). Elles sont aussi sujettes à interprétation : selon l’analyse qu’ils en font, certains pourraient ne pas y voir de parallélisme fautif, alors qu’à l’audition, elles sont perceptibles. L’inverse est aussi vrai : l’analyse pourrait voir une faute là où l’oreille la perçoit difficilement.

Croisement des parties

Les quintes par croisement des parties surviennent surtout dans le contrepoint à plusieurs voix, lorsqu’une voix grave passe momentanément au-dessus de la voix qui lui est supérieure ou inversement. Les quintes parallèles sont alors théoriquement inexistantes au sens des traités parce qu’elles ne surviennent plus dans les mêmes voix, mais l’oreille pourrait les percevoir sur un instrument à clavier par exemple (où il n’y a pas de variantes de timbre entre les voix). Pour éviter leur effet potentiellement désagréable, les compositeurs les utilisent le plus souvent dans les voix intérieures et sur les temps faibles

(exemple 4.4, mes. 11), aussi dans des textures denses et très distinctes les unes des autres, ou accompagnées de dissonances. 91

Exemple 4.4 – Johann Sebastian Bach, Choral, n° 34 : « Erbarm’ dich mein, o Herre, Gott », mes. 10-124.

Avec notes ornementales

Les quintes parallèles sont souvent adoucies par l’ajout de notes ornementales comme la note de passage, l’appoggiature, le retard et certains types de broderies. Les compositeurs se permettent donc de les utiliser ainsi dans leurs œuvres. Le caractère de « transgression d’une règle » est moins présent dans ce type de quinte vu les nombreuses exceptions dans les traités et la distance qui sépare les deux quintes (et qui parfois suffit à un compositeur ou à un auditeur pour « oublier » qu’il y aurait eu là matière à erreur). On peut considérer comme faisant également partie de cette catégorie les paires formées par une quinte en notes structurelles et une quinte en notes ornementales. Selon Gilson, « l’effet revêche des quintes parallèles est atténué et même tout à fait effacé par l’adjonction d’une dissonance dans le second accord5. » Cette affirmation porte à croire que l’ajout de notes étrangères à l’harmonie permettrait de faire des quintes parallèles mieux acceptées par l’oreille, ce qui devrait se refléter dans le répertoire (exemple 4.5).

4 Johann Sebastian Bach, Chorale Harmonisations, BWV 1-438 (Leipzig: Breitkopf und Härtel, n.d.[1878]). 5 Paul Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie; étude sur l’art musical (Bruxelles : Schott, 1922), 27. 92

Exemple 4.5 – Quintes parallèles avec notes ornementales.

4.2 Quintes parallèles en cas multiples (séries)

On nomme quintes parallèles en cas multiples (séries) les occurrences où on retrouve plus de deux quintes successives.

Enrichissement de la texture

Selon Laudon, lorsque les quintes parallèles sont utilisées pour enrichir la texture, la conduite des voix est alors peu liée aux quintes parallèles, en ce sens que l’on pourrait, dans la majorité des cas, supprimer une des deux voix formant le parallélisme et conserver tout de même une logique dans la conduite des voix. On peut retrouver ce type de quintes autant dans une écriture pour orchestre complet que dans une écriture pianistique très texturée6.

C’est le même procédé que l’ajout de mixtures ou de jeu de mutation à l’orgue, mais qui, appliqué à d’autres instruments ou à l’orchestre, doit être noté. Les quintes sont alors utilisées comme doublure, comme renforcement de la première voix. Dans le grave, elles produisent un effet acoustique analogue à une doublure à l’octave inférieure. Elles peuvent aussi servir à créer des contrastes lors de répétition de segments ou de phrases

(exemple 4.6).

6 Laudon, « The Debate about Consecutive Fifths : A Context for Brahms’s Manuscript ‘Oktaven und Quinten’ », 50. 93

Exemple 4.6 – Quintes parallèles utilisées comme enrichissement de la texture.

Structurelles

On considère des quintes parallèles en cas multiples comme « structurelles » lorsqu’elles font partie d’une série d’accords parallèles. Elles s’apparentent aux quintes utilisées pour enrichir la texture, mais elles sont particulières dans le sens que c’est l’ensemble de l’harmonie qui est parallèle, cette dernière n’obéit plus aux règles habituelles de conduite des voix. On parle parfois même de mélodie d’accords (exemple 4.7).

Exemple 4.7 – Quintes parallèles structurelles.

Création d’un effet particulier

Il arrive parfois que certaines occurrences de quintes échappent à une classification rigoureuse selon des critères objectifs, mais que ce soit plutôt l’intention expressive qui l’emporte. Les quintes parallèles en série sont ainsi utilisées par les compositeurs modernes pour créer des effets particuliers, notamment pour créer de l’exotisme, donner l’impression 94 du folklore ou un effet archaïque (retour à l’organum)7. Elles peuvent donner de la couleur ou un effet net et froid, par exemple8. Dans la musique de piano, on utilise fréquemment les basses en quintes : « elles évoquent plus ou moins la résonance des cloches 9 »

(exemple 4.8). Les quintes parallèles sont également utiles dans la mise en valeur d’un texte : Ebenezer Prout (1835-1909), par exemple, en a utilisé pour traduire musicalement le texte « Stiffened hand yet grasping shield » (« La main raidie saisit encore le bouclier ») de sa cantate Alfred (pour créer une impression de raideur)10. Les quintes parallèles peuvent apporter une originalité ou une excentricité à la musique de certains compositeurs qui sauraient bien les utiliser. Ce sont souvent les indications d’expression, le titre ou un texte accompagnateur qui nous renseigneront sur l’effet recherché par le compositeur.

Exemple 4.8 – Quintes parallèles créant un effet de cloche : Vincent D’Indy, Tableaux de voyage, op. 33, n° 5 : « Le Glas », mes. 1-4.

Notes ornementales

On retrouve parfois des séries de quintes parallèles en notes ornementales pour « remplir » l’harmonie entre deux temps forts, par exemple en notes de passage ou en broderies. Ces

7 Les mêmes considérations pourraient s’appliquer, quoique plus rarement, à des cas isolés de quintes parallèles. 8 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 23. 9 Ibid., 28. 10 Francis Edward Gladstone, « Consecutive fifths », Journal of the Royal Musical Association 8 (6 mars 1882) : 112. 95 quintes ne sont pas toujours considérées comme fautives, pensons à la licence permise par

Reber (203, exemple 2.16), puisqu’elles ne se composent pas de notes harmoniques et qu’elles sont généralement sur des temps faibles (donc non accentuées). Elles sont un peu moins bien acceptées lorsqu’on considère également dans ce type de quintes des séries qui comprendraient à la fois des notes structurelles et des notes ornementales (exemple 4.9).

Exemple 4.9 – Quintes parallèles en notes ornementales

Nous avons ainsi défini les principaux types de quintes parallèles qu’on peut retrouver dans le répertoire et qui nous serviront à classifier les exemples trouvés dans les œuvres étudiées.

Nous avons tenté d’être le plus précis et le plus simple possible dans l’énoncé des caractéristiques, mais il est évident que la compréhension de la pratique des compositeurs laisse parfois place à l’interprétation théorique. Au chapitre 5, l’analyse d’exemples du répertoire français pour piano composés entre 1880 et 1940 contribuera à illustrer plus en détail chacun de ces types de quintes dans un contexte réel et nous fournira les données nécessaires pour définir le rôle des quintes parallèles dans le langage pianistique.

Chapitre 5 Les quintes parallèles dans la musique française de piano entre 1880 et 1940

Dans le chapitre 4, nous avons énoncé différents types de quintes parallèles susceptibles de se retrouver dans la musique de piano entre 1880 et 1940. Nous allons maintenant discuter de la place que chacun de ces types occupe dans le répertoire étudié. Cette étude nous permettra de donner un aperçu de l’importance de ce phénomène à l’époque choisie. Nous allons tout d’abord présenter l’échantillon d’œuvres analysées et les tendances que nous pouvons en dégager. Ensuite, nous reprendrons chacun des types de quintes exposés dans le tableau 4.1 (p. 87) pour en illustrer l’importance dans le répertoire étudié.

Il est difficile de quantifier l’importance des quintes parallèles dans la musique de piano entre 1880 et 1940. Cependant, l’envergure de la recherche réalisée dans le cadre de cette étude (900 œuvres d’environ 60 compositeurs1) permet de dégager des conclusions qui, sans prétendre à un caractère scientifique exhaustif, représentent certainement les tendances les plus significatives. Tout d’abord, l’utilisation de quintes parallèles est un

élément d’écriture extrêmement répandu. En effet, nous en avons trouvé au moins un exemple chez chacun des compositeurs étudiés, à l’exception de Gounod, Reger et

Stravinski, pour lesquels nous n’avons analysé qu’une seule œuvre, ce qui est peu représentatif. Le tableau 5.1 donne la liste des compositeurs étudiés avec le nombre d’œuvres analysées, de même que celles parmi lesquelles on trouve des quintes parallèles.

1 On trouvera en annexes les listes des œuvres étudiées, de même que leur date de composition et l’adresse bibliographique des partitions consultées. 97

Tableau 5.1 – Nombre d’œuvres analysées par compositeur et nombre d’œuvres contenant des quintes parallèles2 Compositeur Total d’œuvres Œuvres avec quintes parallèles analysées Nombre Proportion(%) Satie 142 75 53 Debussy 57 52 91 Poulenc 49 36 73 Kœchlin 48 48 100 Milhaud 46 37 80 Schmitt 45 41 91 D’Indy 38 20 53 Dupont 24 23 96 Pierné 26 17 65 Casadesus 24 21 88 Alain 24 13 54 Ravel 24 20 83 Roger-Ducasse 23 16 70 Auric 21 15 71 Chaminade 21 15 71 Fauré 20 14 70 Bonis 18 14 78 Chrétien 17 8 47 Saint-Saëns 16 12 75 Roussel 16 11 69 Chabrier 15 11 73 Hahn 15 10 67 Sauguet 15 5 33 Honegger 14 9 64 Séverac 13 13 100 Ropartz 12 9 75 Ibert 11 8 73 Vierne 11 6 55 Durey 11 5 45 Laparra 10 5 50 Aubert 9 5 56 Ferroud 8 7 88

2 À des fins statistiques, pour ce tableau et les suivants, nous avons considéré comme une œuvre toute partie, subdivision ou mouvement d’une œuvre ayant un caractère fermé sur lui-même (pouvant donc théoriquement être joué séparément). Il était en effet surprenant de considérer Le Tombeau de Couperin de Ravel comme une seule œuvre (6 mouvements) lorsqu’on considère de même Togo d’Alain (pièce d’à peine une page). Ce qui nous amène tout de même à comparer individuellement les Douze petits chorals de Satie (quelques mesures à peine chacun) au prélude Ce qu’a vu le vent d’ouest de Debussy (7 pages), mais les statistiques ont leurs limites. Les tableaux contenus dans ce chapitre présenteront uniquement les noms de famille des compositeurs. On trouvera les noms complets, les années de naissance et de mort aux annexes 2 et 3. Pour ce tableau et les suivants, la colonne « Proportion » représente le pourcentage d’œuvres contenant des quintes parallèles dans le nombre d’œuvres analysées pour la catégorie en cours (dans ce cas-ci, le total d’œuvres analysées pour un compositeur donné), toujours arrondie à l’unité près. 98

Compositeur Total d’œuvres Œuvres avec quintes parallèles analysées Nombre Proportion(%) Lekeu 8 7 88 Magnard 7 7 88 Françaix 6 5 83 Grovlez 5 5 100 Chausson 5 4 80 Enesco 4 3 75 Decaux 4 2 50 Boulanger 3 3 100 Franck 3 2 67 Messager 3 2 67 Tailleferre 2 2 100 Tansman 2 2 100 Delannoy 2 1 50 Mihalovici 2 1 50 Casella 1 1 100 Dukas 1 1 100 Oswald 1 1 100 Hoérée 1 1 100 Hubeau 1 1 100 Huré 1 1 100 Ladmirault 1 1 100 Rosenthal 1 1 100 Martinu 1 1 100 Wiener 1 1 100 Gounod 1 0 0 Reger 1 0 0 Stravinski 1 0 0 Total 912 657 72

On remarquera à la lecture de ce tableau que pour un nombre assez important de compositeurs (17 sur 59), nous n’avons analysé qu’une ou deux œuvres, ce qui ne nous permet pas réellement de tirer des conclusions sur l’utilisation qu’ils peuvent faire des quintes parallèles, outre le fait que nous avons peut-être eu de la chance de tomber dans presque tous les cas sur des œuvres qui en contenaient. Par contre, pour d’autres compositeurs, le nombre important d’œuvres que nous avons analysé nous permet de croire qu’il pourrait s’agir d’un véritable élément de style, notamment chez Kœchlin, Debussy,

Schmitt, Poulenc et Milhaud pour qui nous avons analysé entre 46 et 57 œuvres chacun et dont plus de soixante-dix pourcent des œuvres analysées contiennent des quintes parallèles 99

(même cent pourcent chez Kœchlin). Il faut mentionner dans ce groupe également Satie, pour qui nous avons analysé un nombre impressionnant d’œuvres (142), et qui pendant l’analyse nous laissait croire à une utilisation massive des quintes parallèles, mais qui, lorsqu’on y regarde de près, ne les utilise que dans environ une œuvre sur deux. Deux

éléments peuvent expliquer ce fait : les dimensions parfois très courtes des œuvres de Satie, qui font qu’on peut en analyser plusieurs sans quintes très rapidement, et le fait que dans ses œuvres plus imposantes, Satie utilise souvent les quintes parallèles à profusion, ce qui n’est pas représenté dans le présent tableau et qui nous a donné cette impression de départ.

La proportion d’œuvres contenant des quintes parallèles est aussi très élevée chez Séverac, pour qui nous avons analysé treize œuvres qui contenaient toutes des quintes parallèles. Les compositeurs étudiés, et les œuvres sélectionnées, sont pour la plupart répertoriés dans des ouvrages de références sur le répertoire pianistique, soit ceux de Maurice Hinson, Guy

Sacre et François-René Tranchefort3 (91% des œuvres et 86% des compositeurs ont au moins une mention dans un de ces ouvrages). On peut donc dire que note étude s’appuie sur des œuvres et des compositeurs dont la contribution au langage musical a été établie par des spécialistes. Notre souci de couvrir un large éventail nous a aussi menés à certains compositeurs moins connus et reconnus, tel que Chrétien, Hubeau, Huré, Laparra et

Messager, que nous avons intégré à l’étude dans l’espoir de les faire connaître ou de leur découvrir un intérêt particulier. Nous avons également analysé certaines œuvres moins connues de compositeurs mentionnés dans certains ouvrages, comme celles de Bonis, peu mentionnées dans les ouvrages (quatre œuvres mentionnées dans un seul ouvrage de référence sur dix-huit œuvres analysées au total).

3 Maurice Hinson, Guide to the Pianist’s Repertoire, 3e éd. (Bloomington : Indiana University Press 2001); Guy Sacre, La musique de piano : dictionnaire des compositeurs et des œuvres (Paris : Robert Laffont, 1998); François-René Tranchefort, Guide de la musique de piano et de clavecin (Paris : Fayard, 1987). 100

Les dates de compositions des œuvres étudiées reflètent assez bien l’ensemble de la période étudiée, même si ce n’était pas une préoccupation de premier ordre dans leur sélection. Le tableau 5.2 montre le total d’œuvres analysées selon leur décennie de composition, auquel nous avons superposé les différents courants stylistiques en vigueur lors de ces périodes.

Tableau 5.2 – Nombre d’œuvres analysées selon la décennie de composition4 Décennie de Total Œuvres avec quintes Courants stylistiques composition d’œuvres Nombre Proportion analysées

1880-1889 92 60 65

1890-1899 106 80 75

Romantisme

1900-1909 173 138 80

-

Sonorisme

Symbolisme

Exotisme Expres

1910-1919 262 181 69 Impressionnisme

sionnisme

1920-1929 146 111 76

-

styles anciens aux

1930-1939 111 72 65

sicisme Néoclas

1940-1944 15 9 60 Retour

1972 (rév.) 3 3 100

Inconnu 4 3 75

On constate donc à la lecture de ce tableau que le nombre d’œuvres analysées selon la date de composition suit une courbe ascendante jusque dans la décennie 1910 et ensuite une courbe descendante. Le cœur de la période étudiée est ainsi bien représenté. Les dates de composition des œuvres se trouvent également assez bien réparties entre les périodes d’influences des principaux courants que nous avons étudiés au chapitre 3 (p. 66). Il est

4 À des fins de classement, lorsqu’une œuvre ou un groupe d’œuvres a été composé sur plusieurs années, ou encore a fait l’objet d’une révision, nous avons considéré l’année la plus récente comme l’année de composition. 101 intéressant de noter que pour chacune des années de composition prise individuellement, nous avons presque toujours trouvé plus d’œuvres contenant des quintes parallèles que n’en contenant pas, sauf pour les années 1882, 1915, 1923, 1934, 1938 et 1943 où la tendance s’inverse. Les proportions d’œuvres contenant des quintes parallèles sont également assez semblables d’une décennie à l’autre, bien que le nombre d’œuvres analysées varie. Notre

échantillon tend donc à confirmer que l’utilisation de quintes parallèles dans la composition

était bien présente tout au long de la période étudiée.

L’échantillon d’œuvres analysées comprend un grand nombre de formes diverses, comme nous pouvons le constater dans le tableau 5.3. Cette variété illustre la richesse du répertoire pianistique de cette époque, mais comme les exemples de quintes parallèles de notre échantillon sont répartis dans les diverses formes de façon presqu’uniforme, il est difficile de tirer des conclusions sur la présence des quintes en lien avec la forme des

œuvres, surtout que les proportions les plus petites de présence de quintes parallèles correspondent dans tous les cas à des formes où nous n’avons analysé que peu d’œuvres.

On peut toutefois remarquer en consultant le tableau que la présence de quintes parallèles n’est pas que l’apanage des formes libres ou nouvelles, mais que les compositeurs les utilisent également dans les grandes formes classiques comme la suite ou la sonate.

Tableau 5.3 – Nombre d’œuvres analysées selon la forme Forme de l’œuvre Total Recueils/ Œuvres avec quintes d’œuvres regroupements Nombre Proportion Recueils de préludes 54 5 (54 œuvres) 47 87 Suite 42 11 (41 œuvres) 29 69 Sonatines 43 12 (43 œuvres) 34 79 Valse 33 3 (22 œuvres) 23 70 Esquisse 28 4 (27 œuvres) 10 36 Danse 21 2 (13 œuvres) 16 76 Sonate 19 5 (18 œuvres) 18 95 Hommage à un compositeur 18 1 (6 œuvres) 17 94 102

Forme de l’œuvre Total Recueils/ Œuvres avec quintes d’œuvres regroupements Nombre Proportion Variations 15 1 (11 œuvres) 9 60 Choral 14 1 (12 œuvres) 3 21 Nocturne 12 2 (6 œuvres) 10 83 Impromptu 11 11 100 Improvisation 10 1 (10 œuvres) 7 70 Romance 10 1 (6 œuvres) 6 60 Invention 10 1 (10 œuvres) 4 40 Barcarolle 9 8 89 Pastorale 8 2 (6 œuvres) 7 88 Prélude 7 7 100 Pièces romantiques 7 6 86 Études 7 5 71 Sarabande 6 1 (3 œuvres) 6 100 Caprice 6 6 100 Gnossienne 6 1 (3 œuvres) 3 50 Rêverie (rêve) 5 1 (2 œuvres) 4 80 Arabesque 4 4 100 Clair de lune 4 2 50 Française 4 1 (3 œuvres) 2 50 Fantaisie 3 3 100 Gymnopédies 3 1 (3 œuvres) 2 67 Mazurka 3 2 67 Menuet 3 2 67 Souvenir 3 2 67 Bourrée 3 1 33 Mouvements perpétuels 3 1 (3 œuvres) 1 33 Novelette 2 1 (2 œuvres) 2 100 Berceuse 2 2 100 Pavane 2 2 100 Feuillet d’album 2 2 100 Ballade 2 1 50 Scherzo 2 1 50 Promenade 2 1 50 Habanera 2 1 50 Recueils de pièces variées 380 59 (380 œuvres) 268 70 Non classées ou formes peu 82 60 72 présentes

103

5.1 Principaux types de quintes parallèles dans la musique française de piano entre 1880 et 1940

Les principaux types de quintes parallèles décrits au chapitre 4 (p. 87) ne se retrouvent pas en quantités équivalentes dans la musique française de piano entre 1880 et 1940. Le tableau 5.4 donne un aperçu des proportions dans lesquelles on retrouve chacun de ces types.

Tableau 5.4 – Proportion de chacun des types de quintes parallèles dans les œuvres étudiées Types de quintes Pourcentage Cadentielles 8 Résolution d’une dissonance 3 Erreur dans la conduite des voix 0,10 Croisement des parties 1 Avec notes ornementales 23 Enrichissement de la texture 55 Structurelles 4 Création d’un effet particulier 3 Notes ornementales 4

On remarque ainsi une proportion marquée d’exemples de quintes créant un enrichissement de la texture dans l’échantillon étudié, de même que pour les quintes parallèles avec notes ornementales, dans une moindre mesure toutefois. On constate aussi que les quintes en cas multiples sont présentes dans une proportion plus importante que les quintes en cas isolé. Il faut mentionner ici que les proportions ont été établies à partir d’un nombre d’exemples

(occurrences différentes de cas de quintes parallèles) et non en fonction de la taille des exemples (une paire de quintes séparées par une note de passage ou une série de quintes à la basse sur vingt mesures compte chacun pour un exemple). Bien qu’imprécise, comme toute tentative de statistiques dans ce contexte (tel que nous l’abordions dans l’introduction, p. 10), cette façon de faire nous donne tout de même une idée globale de la situation. Dans 104 les sections subséquentes du présent chapitre, nous allons présenter des exemples de chacun des types de quintes pour illustrer la place qu’ils occupent dans le répertoire. Nous utiliserons pour ce faire des tableaux et des exemples qui ne pourront malheureusement ne donner qu’un aperçu des résultats de la recherche, puisqu’avec plus de 2000 exemples répertoriés, il est impossible de les consigner tous dans ce mémoire. Nous voulons donc prévenir le lecteur que les tableaux qui suivent ne sont en aucun cas exhaustifs et présentent ainsi les exemples les plus représentatifs que nous ayons pu trouver. La quantité d’exemples présents dans les tableaux se voudra représentative des proportions énoncées plus haut, mais le nombre d’exemples présentés pourra également varier selon la complexité du type de quinte décrit et l’intérêt des exemples pour la recherche.

Chez la plupart des compositeurs, lorsqu’ils font usage de quintes parallèles dans une

œuvre, ce n’est généralement pas de manière isolée : on en retrouve à plusieurs reprises, et parfois sur plus d’une mesure à la fois. On voit chez certains un mélange des types de quintes parallèles dans une même œuvre, mais souvent le compositeur va plutôt utiliser le même type à répétition. Dans plusieurs cas, on peut trouver une explication à la présence de ces quintes parallèles qui n’a rien à voir avec les règles dictant la conduite des voix

énoncées dans les traités de contrepoint ou d’harmonie. On trouvera à l’annexe 4 un tableau représentant les proportions d’exemples de chaque type retrouvés chez chacun des compositeurs.

Quintes parallèles cadentielles

Les compositeurs de musique française de piano entre 1880 et 1940 utilisent assez régulièrement des quintes parallèles (8% des exemples) pour mettre en relief leurs cadences, comme le permet, dans le cas de cadences conclusives, le traité de Rimski- 105

Korsakov (82)5 étudié au chapitre 2 (p. 50). Les quintes parallèles cadentielles se présentent généralement de manière isolée (en paires), quoiqu’un exemple puisse à l’occasion contenir plus de deux occurrences ou être précédé d’une série ayant une autre fonction. Ce type de quintes a une fonction intimement liée aux questions de structure et de texture. Séverac, par exemple, en utilise dans Baigneuses au soleil, alors qu’au moment de la cadence, il double la basse à la quinte (mes. 61) et fait précéder cette cadence d’une série de quintes parallèles dans les mêmes voix (exemple 5.1).

Exemple 5.1 – Séverac (1908), Baigneuses au soleil (Souvenir de Banyuls-sur-mer), mes. 60-616

Plusieurs compositeurs utilisent les quintes parallèles sur les cadences, comme en témoignent les exemples contenus dans le tableau 5.5. Les mesures entre parenthèses représentent des mesures reprises à l’identique.

5 Les références aux traités étudiés au chapitre 2 seront présentées de la même façon que dans le chapitre correspondant (p. 20). Le lecteur en trouvera les notices complètes à l’annexe 1. 6 Les exemples présentés dans ce chapitre ont été numérisés et adaptés (mise en page, annotations) à partir des partitions étudiées. Le lecteur en trouvera les références à l’annexe 2. 106

Tableau 5.5 – Œuvres contenant des quintes parallèles simples sur les cadences7 Compositeur Œuvre Mesure(s) Aubert Sillages, op. 27, n° 1 2, 28 Casadesus Prélude, op. 5, n° 5 16 Chabrier Dix pièces pittoresques, n° 1 143 Chabrier Dix pièces pittoresques, n° 7 81-82 (92-93) Chabrier Dix pièces pittoresques, n° 9 33 (34, 139, 140), 37 (38) Chaminade Callirhoë, op. 37, n° 3 71-72 Chrétien Sonatine, n° 2 : 1er mouvement 41-42 Chrétien Valse berceuse 73-74, 141-142 Debussy Ballade slave 44 Debussy Children’s Corner, n° 4 49 Debussy Images, livre 1, n° 2 64 Debussy Préludes, livre 1, n° 4 29-30 Debussy Préludes, livre 1, n° 12 88-89 Debussy Préludes, livre 2, n° 6 33 Debussy Suite bergamasque, n° 2 4-5 D’Indy Petite sonate dans la forme classique, op. 9, n° 1 8 (132) D’Indy Petite sonate dans la forme classique, op. 9, n° 2 23 D’Indy Schumanniana, op. 30, n° 1 29-30 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 4 14 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 7 109-110 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 1er mouvement 202 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 8 1 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 11 15 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 14 24 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 4 2 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 10 37-38 Ladmirault Hommage à Fauré 16 Lekeu Sonate, n° 4 1-2 Milhaud L’album de Madame Bovary, op. 128b, n° 5 10 Milhaud L’album de Madame Bovary, op. 128b, n° 7 20-21 Milhaud Mazurka 35-36 Milhaud Printemps, livre 1, op. 25, n° 1 28-29, 54 (55) Milhaud Suite, op. 8, n° 3 30-31, 35-36 Pierné Album pour mes petits amis, op. 14, n° 3 14 (42) Poulenc Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80, 40-41 n° 2 Poulenc Les soirées de Nazelles, FP 84, n° 7 12-13 Ravel Gaspard de la nuit, n° 2 32-33 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 3 36-37, 53 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 4 2 (94), 15-16 (107-108), 20 (112), 22-23 (114-115) Ravel Le tombeau de Couperin, n° 5 61

7 Par souci de concision, les tableaux suivants dans ce chapitre ne contiendront que les titres abrégés des œuvres mentionnées (on omettra les sous-titres et les titres de sections lorsqu’ils ne sont pas absolument nécessaires). Le lecteur en trouvera les références complètes à l’annexe 2. 107

Compositeur Œuvre Mesure(s) Ravel Miroirs, n° 4 228 Ravel Pavane pour une infante défunte 11-12 Ravel Valses nobles et sentimentales, n° 6 22, 28 Roger-Ducasse Impromptu 130-131 Roger-Ducasse Sonorités 19 (89), 21 (91) Ropartz Musiques au jardin, n° 3 5 (22) Saint-Saëns Suite, op. 90, n° 4 72-73 Satie Danses gothiques, n° 5 1re ligne (2e ligne, 3e ligne, 7e ligne), 3e ligne Satie Danses gothiques, n° 6 2e ligne, 3e ligne Satie Danses gothiques, n° 7 1re ligne (2e ligne), 2e ligne Satie Douze petits chorals, n° 1 16-17 (23-24) Satie Prélude de la porte héroïque du Ciel 3e ligne, 5e ligne, 7e ligne, 9e ligne, 11e ligne Satie Trois nocturnes, n° 1 35-36 Satie Trois sarabandes, n° 1 101-103 Satie Trois sarabandes, n° 2 15 (37), 47, 71-72 (91-92), 95-96 Satie Trois sarabandes, n° 3 44-45 (49-50, 69-70, 74-75), 92-93, 96, 98-100 Sauguet Pièces poétiques pour enfants, livre 2, n° 11 14 Schmitt La retardée, op. 90, n° 3 2-3, 4-5, 44-45, 46-47 Schmitt Ombres, op. 64, n° 1 12-13 Schmitt Pupazzi, op. 36, n° 6 30-31, 70-71

Dans certains cas, les compositeurs utilisent deux paires de quintes pour enrichir la texture aux cadences, comme Alain dans Mythologies japonaises AWV 28 : « Variation n° 5 » (mes. 4, exemple 5.2).

Exemple 5.2 – Alain (1932), Mythologies japonaises AWV 28 : « Variation n° 5 », mes. 4

C’est un procédé utilisé aussi par d’autres compositeurs comme l’illustre le tableau 5.6.

108

Tableau 5.6 – Œuvres contenant plus d’une paire de quintes parallèles sur les cadences Compositeur Œuvre Mesure(s) Aubert Sillages, op. 27, n° 1 28-29 Decaux Clair de lune, n° 3 5-7, 13-14, 32-33 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, ° 7 3 Satie Trois nocturnes, n° 1 16 Schmitt La retardée, op. 90, n° 3 41-42

Quintes parallèles dans la résolution d’accords dissonants

L’apparition de quintes parallèles dans la résolution d’accords dissonants se présente assez peu souvent dans le répertoire de piano entre 1880 et 1940 (3% dans notre échantillon).

Bien que les traités pour la plupart admettent cet usage (Savard : 227, Rimski-

Korsakov : 82, Dubois : 126, Richter : 86, Rahn : 160, Gilson, vol. 1 : 333, Gilson, vol. 2 :

84-87, 94-95, Vivier : 131, Vinée : 150, 185), les compositeurs ne semblent pas profiter outre mesure de cette tolérance. On remarque bien quelques cas où l’apparition d’un accord dissonant appelle une résolution qui entraînerait des quintes parallèles, mais cette résolution n’est pas toujours conforme à l’enseignement des traités et même quelquefois complètement absente. Honegger offre un exemple de ce type de quintes dans la troisième de ses Sept pièces brèves (mes. 3-4, exemple 5.3). Il y utilise plusieurs accords de neuvième qu’il enchaîne en mouvement chromatique. Les quintes parallèles se retrouvent dans les voix les plus graves de ces accords, ce qui, comme nous l’avons vu au chapitre 2 (p. 92), est suggéré notamment par Vinée (92-93) et Lenormand (43). 109

Exemple 5.3 – Honegger (1919-1920), Sept pièces brèves, n° 3 : « Très lent », mes. 3-4

D’autres œuvres présentent toutefois des enchaînements dont la disposition des voix se rapproche davantage des résolutions régulières comportant des quintes parallèles. C’est le cas de la Berceuse héroïque de Debussy qui nous donne un exemple d’enchaînement entre un renversement d’accord de neuvième mineure et un accord parfait mineur (exemple 5.4).

Les quintes parallèles sont dissimulées dans les voix intérieures, ce qui est recommandé par les traités étudiés au chapitre 2, p. 46 (Reber : 68, Lenormand : 20, Gilson, vol. 1 : 100-

1018).

Exemple 5.4 – Debussy (1914), Berceuse héroïque, mes. 51-53

Satie quant à lui résout un renversement d’accord de neuvième majeure sur un accord de septième mineure dans « Le bain de mer » de Sports et divertissements (exemple 5.5). Les

8 Voir aussi Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie; étude documentaire sur l’art musical (Bruxelles : Schott, 1922), 17-18. 110 quintes parallèles sont ici disposées dans les voix supérieures, ce qui est peu recommandable selon les règles de certains traités (Dubois : 126, Vinée : 92-93, 185).

Exemple 5.5 – Satie (1914), Sports et divertissements : « Le bain de mer », dernière ligne

Le peu d’exemples de quintes parallèles résultant de la résolution d’accords dissonants dans le répertoire étudié s’explique probablement par le fait que les compositeurs de cette époque ne cherchent plus nécessairement à résoudre les dissonances

à tout prix (comme nous l’avons vu au chapitre 3, p. 78). On voit donc apparaître des suites d’accords dissonants dans lesquelles sont camouflées des quintes parallèles. Riemann (30) et Gilson mentionnent que l’ajout d’une dissonance peut atténuer l’effet des quintes parallèles en distrayant l’oreille par une autre sonorité9 (chapitre 2, p. 47). Les compositeurs poussent le procédé plus loin en amenant non pas une seule, mais souvent plusieurs dissonances. Ce sont le plus souvent des suites de septièmes ou de neuvièmes, que Vinée

(185) considère comme les enchaînements les plus tolérables lorsqu’elles se déplacent par quintes descendantes à la basse (chapitre 2, p. 56). Satie en donne un exemple dans la troisième Sarabande, où il fait entendre une succession de deux accords de neuvième par quinte descendante, où toutes les voix sont parallèles, avec les quintes à la basse (mes. 52-

53, exemple 5.6).

9 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 27. 111

Exemple 5.6 – Satie (1887, rév. 1911), Trois sarabandes, n° 3, mes. 50-53

Les compositeurs les utilisent aussi en successions espacées à d’autres intervalles. Milhaud nous en donne un exemple dans « Tijuca » (mes. 34-35) du deuxième livre Saudades do

Brasil, où il enchaîne une série d’accords de septième sans résolution, en mouvements de secondes ascendantes (exemple 5.7). Les quintes sont cette fois-ci dans l’aigu, plus apparentes que lorsqu’elles sont dans d’autres voix.

Exemple 5.7 – Milhaud (1920-1921), Saudades do Brasil, livre 2, n° 8 : « Tijuca », mes 33-35

Kœchlin utilise non seulement la septième et la neuvième, mais également la onzième, toutes parallèles, se succédant principalement par tierces ascendantes, dans le no 4 (mes. 8-

9) de Paysages et marines (exemple 5.8). Les tableaux 5.7, 5.8 et 5.9 présentent d’autres exemples d’œuvres où les compositeurs utilisent des séries d’accords de septièmes, de neuvièmes, de onzièmes et de treizièmes. 112

Exemple 5.8 – Kœchlin (1915-1916), Paysages et marines, op. 63, n° 4 : « Le chant du Chevrier », mes. 8-9

Tableau 5.7 – Œuvres comportant des séries d’accords de septièmes avec des quintes parallèles Compositeur Œuvre Mesure(s) Debussy Jeux 588-589 Debussy Pour le piano, n° 2 39-41 Debussy Préludes, livre 1, n° 4 40 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 5 22 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 6 5 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 7 1 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 2 27 Milhaud Saudades do Brasil, livre 2, n° 8 3-4, 19-20 Ravel Miroirs, n° 4 206-207 Satie Trois sarabandes, n° 3 44 (49, 69, 74) Séverac Baigneuses au soleil 6 (19, 116, 129)

Tableau 5.8 – Œuvres comportant des séries d’accords de neuvièmes avec des quintes parallèles Compositeur Œuvre Mesure(s) Debussy L’isle joyeuse 14 Debussy Pour le piano, n° 2 51-53 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 4 8 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 2 6 Magnard Promenade, op. 7, n° 7 24 Milhaud Caramel mou 43-44 Milhaud Saudades do Brasil, livre 2, n° 9 10-11, 11-12 Milhaud Saudades do Brasil, livre 2, n° 11 3-11, 13-15, 17-24 Poulenc Trois pastorales, FP 5, n° 3 14-17, 25

113

Tableau 5.9 – Œuvres comportant des séries d’accords de onzième ou de treizième avec des quintes parallèles Compositeur Œuvre Mesure(s) Accord Kœchlin Les heures persannes, op. 65, n° 5 9 11e Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 3 32 11e Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 3 44-45 13e Milhaud Saudades do Brasil, livre 2, n° 7 30-31 13e Roger-Ducasse Variations sur un choral (5e variation) 84 13e

Les compositeurs utilisent également d’autres dissonances pour camoufler la sonorité des quintes parallèles, notamment des notes ajoutées. Debussy nous donne un exemple où la note ajoutée, en plus de créer la dissonance, crée les quintes parallèles dans le prélude Feuilles mortes (mes. 8-10, exemple 5.9).

Exemple 5.9 – Debussy (1911-1913), Préludes, livre 2, n° 2 : « Feuilles mortes », mes. 8-11

Durey, de son côté, atténue la sonorité de quinte à vide en y introduisant lui aussi une note dissonante dans la dixième de ses Dix inventions (mes. 36 et 38, exemple 5.10).

Exemple 5.10 – Durey (1924-1928), Dix inventions, op. 41a, n° 10 : « Très animé », mes. 35-38

114

Certains compositeurs, comme Ibert, peuvent introduire une « dissonance visuelle » dans l’enchaînement de deux quintes. En effet, celui-ci, dans le quatrième mouvement des

Rencontres, fait succéder un accord de sol+ majeur à une superposition mi – faX – si

(mes. 41). Le faX qui forme, visuellement, un intervalle de seconde augmentée avec la note qui lui est inférieure, forme à l’audition un intervalle de tierce tout ce qu’il y a de plus consonant, surtout sur un instrument à tempérament égal comme le piano (exemple 5.11).

Exemple 5.11 – Ibert (1924), Les rencontres, n° 4 : « Les bergères », mes. 41-42

Quintes parallèles causées par une erreur dans la conduite des voix

Les quintes parallèles résultant d’une erreur dans la conduite des voix sont les plus difficiles à justifier, et par conséquent, les moins présentes dans notes étude (0,1%). Il n’est pas aisé de juger des intentions réelles d’un compositeur, si on ne peut pas lui demander directement. L’envergure de cette recherche ne nous a pas permis de trouver beaucoup de cas, mais nous pouvons tout de même en mentionner un qui nous a paru douteux. Il s’agit du Cinquième impromptu de Poulenc dont nous avons pu consulter deux éditions (La revue musicale, 1921, et Chester Music, 1922, rév. 1939) qui présentent en deux endroits des variantes au chapitre des quintes parallèles. Tout d’abord aux mesures 27-28, l’édition

Chester indique clairement trois quintes parallèles dans les voix intérieures (exemple 5.12) 115 alors que La revue musicale intercale une sixte entre les deux quintes, ce qui élimine le parallélisme (exemple 5.13).

Exemple 5.12 – Poulenc (1922, rév. 1939), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes. 25-28 (Chester Music)

Exemple 5.13 – Poulenc (1921), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes. 25-28 (La revue musicale)

L’édition Chester étant postérieure à la publication de La revue musicale et qualifiée d’« édition révisée », on peut donc déduire que le changement vient de là, mais comme il n’est fait mention d’aucun correcteur ou réviseur, on ne sait pas si cette décision est le fait du compositeur, de l’éditeur ou d’une tierce personne. L’inverse se produit à la mesure 34 :

La revue musicale note deux quintes parallèles dans les voix intérieures (exemple 5.14) et l’édition Chester n’en contient pas (elle ne contient même pas le même contenu mélodico- harmonique, exemple 5.15). Il faut mentionner que l’édition Chester contient au total deux mesures de moins que le supplément de La revue musicale. 116

Exemple 5.14 – Poulenc (1921), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes. 34-36 (La revue musicale)

Exemple 5.15 – Poulenc (1922, rév. 1939), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes. 34-36 (Chester Music)

Quintes parallèles par croisement

Les quintes parallèles par croisement se retrouvent à l’occasion dans la musique de piano entre 1880 et 1940. Selon les auteurs Reicha (123), Reber (116) et Kœchlin (Précis des règles du contrepoint : 2), étudiés au chapitre 2 (p. 52), le croisement est une technique d’écriture permettant de rendre les quintes parallèles tolérables, car, d’un point de vue visuel, les quintes ne sont pas dans les mêmes voix. Par contre, Reber (26) et

Émile Durand (343) émettent des réserves quant à l’efficacité de ce moyen (chapitre 2, p. 33), surtout qu’à l’audition, sur un instrument comme le piano, la sonorité de quintes parallèles est indéniable. Les avis sont donc partagés, et c’est peut-être ce qui explique 117 qu’on ne retrouve pas beaucoup de quintes parallèles par croisement dans la musique de piano (les propriétés de l’instrument en sont probablement aussi responsables). Roussel en donne un exemple dans le deuxième mouvement de Rustiques, où l’artifice du croisement est cependant atténué par la présence de quintes parallèles « normales » (exemple 5.16).

Exemple 5.16 – Roussel (1904-1906), Rustiques, op. 5, n° 2 : « Promenade sentimentale en forêt », mes. 45-46

Milhaud présente un cas particulier de l’utilisation du croisement dans la huitième pièce

(mes. 24-28) du deuxième livre Saudades do Brasil. Il place des quintes successives sur les premiers temps de cinq mesures, mais comme il croise la voix de basse par-dessus la voix de ténor tenue en blanche, il fait également entendre des quintes sur le deuxième temps de chaque mesure (exemple 5.17). En réalité, il s’agit ici simplement de l’arpègement d’un accord de neuvième qui fait entendre une superposition de deux quintes. Le croisement est purement visuel, d’autant plus que la blanche au début de chacune des mesures ne peut être véritablement tenue, puisqu’elle doit être réarticulée pour faire entendre la note de la voix inférieure. 118

Exemple 5.17 – Milhaud (1920-1921), Saudades do Brasil, livre 2, n° 8 : « Tijuca », mes. 24-28

Ibert nous présente aussi un exemple d’utilisation d’une forme de croisement, mais où les quintes parallèles ne sont en aucun façon camouflées ou ambiguës (les deux quintes ont une voix qui croise), dans les mesures 85 et 87 de la Pièce romantique (exemple 5.18).

Exemple 5.18 – Ibert (1916), Pièce romantique, mes. 85-87

D’autres compositeurs utilisent aussi le croisement pour camoufler des quintes parallèles, comme en témoigne le tableau 5.10.

Tableau 5.10 – Œuvres où les compositeurs utilisent le croisement créant des quintes parallèles Compositeur Œuvre Mesure(s) Alain Romance, AWV 34 8-9 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 3 6 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 14 11 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 15 13 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 12 11 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 3 7 Kœchlin V (Hommage à Fauré) 4 Roger-Ducasse Arabesque, n° 2 39 (40) Roger-Ducasse Barcarolle, n° 2 16 (133), 76 Roger-Ducasse Esquisse, n° 4 11-12 Roger-Ducasse Variations sur un choral (10e variation) 202-203 Roussel Sonatine, op. 16, n° 1 51-52 Schmitt Musiques intimes, livre 2, op. 29, n° 1 32 Séverac Le chant de la terre, n° 1 20-22 119

Quintes avec notes ornementales

Un moyen utilisé par les compositeurs pour contourner la règle interdisant les quintes parallèles est de séparer les quintes par des notes ornementales ou de faire des paires de quintes combinant notes ornementales et notes structurelles. Elles sont le plus souvent présentées en paires, mais il n’est tout de même pas rare de les retrouver en série, parfois en changeant de type de note ornementale entre les différentes paires. Et dépendant des auteurs, ces quintes seront ou non acceptables dans le style rigoureux, selon la situation.

Dans notre échantillon, les quintes avec des notes ornementales sont les deuxièmes plus nombreuses, dans une proportion de 23% du total des exemples.

Discutons d’abord de l’ajout de notes intermédiaires en général. La plupart des auteurs de traités étudiés au chapitre 2 (p. 34) s’entendent pour dire qu’il faut au moins l’équivalent d’une mesure entière pour « sauver » des quintes parallèles, donc des notes intermédiaires en nombre suffisant et/ou d’une durée assez longue pour « faire oublier » la première quinte (Lavignac : 44, Bazin : 29, Émile Durand : 77, Kœchlin, Précis des règles du contrepoint : 3, Dupré : 11, 13). Ceci sous-entend également (et est même clairement

énoncé par certains comme Émile Durand [77] et Kœchlin [Précis des règles du contrepoint : 3]) qu’on ne peut pas faire entendre des quintes au même moment durant deux ou plusieurs mesures successives, en particulier sur des temps forts, ce que, bien sûr, les compositeurs de musique de piano entre 1880 et 1940 n’ont pas toujours respecté. En effet, plusieurs compositeurs utilisent des quintes sur les premiers temps durant deux ou durant plusieurs mesures successives. C’est le cas d’Auric dans le troisième Impromptu, où la basse et le soprano forment un intervalle de quinte sur le premier temps durant quatre mesures successives (mes. 29-32). Les quintes sont ici séparées par de simples 120 changements de position, en plus des notes ornementales, ce qui, selon Reber (26), Émile

Durand (77), Dubois (26) et Caussade (46), n’est pas suffisant pour en atténuer l’effet. Et elles sont d’autant moins justifiables selon Reber (68), Dubois (27) et Gilson, car elles surviennent entre les voix extrêmes10 (exemple 5.19).

Exemple 5.19 – Auric (1940), Trois impromptus, n° 3 : « Impromptu en ré majeur », mes. 29-33

Les compositeurs utilisent aussi à l’occasion des quintes sur les temps fort et semi-fort d’une même mesure. Franck, par exemple, les place sur le premier et le troisième temps de la mesure 213 du Prélude, choral et fugue, op. 21 (exemple 5.20). De plus, il utilise ici des notes étrangères dissonantes pour créer ses quintes, ce qui contribue à les rendre plus acceptables selon Riemann (30; chapitre 2, p. 47)

Exemple 5.20 – Franck (1884), Prélude, choral et fugue, op. 21, mes. 212-213

Le tableau 5.11 nous offre d’autres exemples où les compositeurs placent des quintes sur des temps forts successifs.

10 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 18. 121

Tableau 5.11 – Œuvres présentant des quintes sur temps forts successifs, séparées par des notes intermédiaires Compositeur Œuvre Mesure(s) Aubert Lutins, op. 11 137 Auric Gaspar et Zoé : « Zoé pleure tout bas » 5-8 Auric Neuf pièces brèves, n° 1 66-67 Chaminade Écossaise, op. 151 139-140 Debussy Suite bergamasque, n° 2 4-5 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 12 77-78 D’Indy Petite sonate dans la forme classique, op. 9, n° 1 153-154 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 1er mouvement 201-202 Franck Prélude, choral et fugue, op. 21 213, 266-269 Grovlez Valse-caprice 89-91 Hahn Premières valses, n° 2 54-55 Honegger Sept pièces brèves, n° 7 73-74 Milhaud Printemps, livre 1, op. 25, n° 1 23-25 Milhaud Suite, op. 8, n° 2 16 Milhaud Suite, op. 8, n° 3 22 Satie Carnet d’esquisses et de croquis, n° 12 8 Sauguet Nuit coloniale sur les bords de la Seine 30-31, 46-47 (72-73) Schmitt Pièces romantiques, op. 42, n° 5 15-16 (40-41) Tansman Berceuse 16-22 Vierne Solitude, op. 44, n° 2 132

Des auteurs de traités étudiés au chapitre 2 (p. 36), entre autres Barbereau (72), Bazin (30),

Savard (61), Émile Durand (77) et Lavignac (43), affirment toutefois qu’il serait possible de faire deux quintes plus rapprochées, si elles sont séparées par une harmonie distincte, un accord étranger. Les exemples précédents ne répondaient pas à cette condition, mais certains compositeurs présentent, quant à eux, des exemples qui y répondent et qui seraient donc tout à fait acceptables selon ces traités, comme Hahn dans son troisième Portrait de peintres « Anton van Dyck » (mes. 16-17, exemple 5.21). On en retrouve d’autres exemples dans le tableau 5.12. 122

Exemple 5.21 – Hahn (1894), Portraits de peintres, n° 3 : « Anton van Dyck », mes. 16-18

Tableau 5.12 – Œuvres présentant des quintes acceptables sur temps forts successifs, car séparées par des notes intermédiaires formant une harmonie distincte (changement d’accord) Compositeur Œuvre Mesure(s) Chausson Paysage, op. 38 28-29 Chausson Quelques danses, op. 26, n° 4 68 Debussy Préludes, livre 1, n° 8 14-15 D’Indy Schumanniana, op. 30, n° 1 22-24 Fauré Barcarolle, op.104/2, n° 10 53-58 Franck Prélude, aria et finale, op. 23 40 (187) Poulenc Suite, FP 19, n° 1 37 (39, 104, 106) Satie Trois nocturnes, n° 1 22 Schmitt Soirs, op. 5, n° 3 5, 9

Voyons maintenant des exemples d’utilisation propres à chaque type d’ornement.

Les notes de passage dans la musique de piano forment souvent avec des notes structurelles des enchaînements de quintes parallèles, ce qui selon Reicha (135) et Reber (201) était très admissible, mais était rejeté par Catel (19), Richter (120) et Savard (246), comme nous l’avons vu au chapitre 2 (p. 36 et 29). Franck nous en donne un exemple dans l’aria du

Prélude, aria et finale, mesure 39, où une note de passage chromatique forme un intervalle de quinte suivi d’un second intervalle de quinte sur la note structurelle subséquente à la basse (exemple 5.22). 123

Exemple 5.22 – Franck (1887), Prélude, aria et finale, op. 23 : « Aria », mes. 39-42

Poulenc nous en fournit aussi plusieurs exemples dans sa Suite française d’après Claude

Gervaise, FP 80, entre autres dans le troisième mouvement, où c’est une quinte formée de deux notes de passage qui suit une quinte formée de notes structurelles (mes. 53, exemple 5.23). On trouve dans le tableau 5.13 d’autres exemples où les notes de passage créent des quintes parallèles avec les notes structurelles.

Exemple 5.23 – Poulenc (1935), Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80, n° 3, mes. 52-57

Sur la question des notes de passage entre les quintes parallèles, bien que Rimski-

Korsakov (56) et Émile Durand (54) affirment que les notes de passage ne permettent pas d’atténuer les quintes parallèles (chapitre 2, p. 29), les compositeurs se sont tout de même permis d’en utiliser dans leurs œuvres. Chaminade en donne un exemple dans le Caprice-

Impromptu, op. 153 (mes. 149, exemple 5.24) 124

Tableau 5.13 – Œuvres contenant des quintes parallèles créées par des notes de passage Compositeur Œuvre Mesure(s) Alain Mythologies japonaises, AWV 28 : « variation n° 1 » 3 D’Indy Petite sonate dans la forme classique, op. 9, n° 2 12 D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 1 57 Dupont La maison dans les dunes, n° 6 19-23, 208-212 Françaix Cinq portraits de jeunes filles, n° 1 46, 67 Françaix Scherzo 48 Honegger Sept pièces brèves, n° 5 11 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 3 2, 3 Magnard Promenades, op. 7, n° 2 50-51 Poulenc Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80, n° 3 53 Poulenc Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80, n° 7 33-34, 109 (112) Ravel Jeux d’eau 29-30, 73-74 Roger-Ducasse Arabesque, n° 1 42-43 Roger-Ducasse Arabesque, n° 2 18-19, 36 Roger-Ducasse Chant de l’aube 1 Schmitt Musiques intimes, livre 2, op. 29, n° 1 21

Exemple 5.24 – Chaminade (1914), Caprice-impromptu, op. 153, mes. 147-150

L’utilisation des notes de passage entre les quintes parallèles est une situation assez courante, comme le montre les nombreux exemples du tableau 5.14. C’est d’ailleurs un des sous-types que nous avons répertorié le plus souvent dans les quintes avec notes ornementales avec environ 15% des exemples.

Tableau 5.14 – Œuvres contenant des quintes parallèles séparées par des notes de passage Compositeur Œuvre Mesure(s) Alain Mythologies japonaises, AWV 28 : « choral » 2 Alain Togo, AWV 3 2 premières rondes Aubert Sillages, op. 27, n° 1 46 Auric Neuf pièces brèves, n° 2 5 Bonis Prélude en la bémol majeur, op. 51 29 Bonis Viviane, op. 8 137 Casadesus Prélude, op. 5, n° 5 5 (6) 125

Compositeur Œuvre Mesure(s) Casadesus Prélude, op. 5, n° 10 38-39, 45 Casadesus Prélude, op. 5, n° 12 29-30 Casella Ricercare sul nome B.A.C.H., op. 52 19-20 Debussy Préludes, livre 2, n° 9 31-34 Delannoy Dîner sur l’eau 35 D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 1 267, 271 D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 3 246-247, 260 Dupont La maison dans les dunes, n° 5 30 Dupont La maison dans les dunes, n° 6 131-132, 134-136 Fauré Huit pièces brèves, op. 84, n° 4 25 (27) Fauré Nocturne, op. 119, n° 13 34, 152 Hahn Premières valses, n° 1 38-39 Honegger Trois pièces, n° 2 1-2 (14-15, 48-49) Ibert Toccata sur le nom d'Albert Roussel 39-40 Ibert Pièce romantique 15 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 3 6 [noires 15 et 16] Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 13 5 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 12 7 Ladmirault Hommage à Fauré 21-24 Magnard Promenades, op. 7, n° 2 35-36 Milhaud Printemps, livre 1, op. 25, n° 3 17-18 Milhaud Suite, op. 8, n° 2 33 Milhaud Le tour de l’exposition 23-24, 25-26 Milhaud Saudades do Brasil, livre 2, n° 7 2-3 (6-7) Poulenc Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80, n° 1 3-4 (7-8, 40-41, 44-45), 27 Poulenc Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80, n° 7 63-64 (119-120) Ravel Miroirs, n° 3 1-10, 14-20, 134-137 Ravel Miroirs, n° 4 11 Ravel Jeux d’eau 75-76 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 2 40, 41 Ravel Gaspard de la nuit, n° 1 61 (62) Roger-Ducasse Arabesque, n° 2 16, 42 (43) Roger-Ducasse Barcarolle, n° 2 83, 85, 135 Roger-Ducasse Barcarolle, n° 3 18 Roger-Ducasse Chant de l’aube 37-40, 71-72 Roger-Ducasse Esquisses, n° 1 15 Satie Gnossienne, n° 3 1re ligne, 2e ligne, 3e ligne, 4e ligne, 5e ligne, 10e ligne, 11e ligne Satie Gnossienne, n° 4 3e ligne, 4e ligne Satie Carnet d’esquisses et de croquis, n° 3 2 Satie Trois gymnopédies, n° 3 6-7 (32-33) Satie Le piège de Méduse, n° 5 Dernière ligne Satie Passacaille 20-22 (56-58, 109-111) Sauguet Nuit coloniale sur les bords de la Seine 59-60 Schmitt Soirs, op. 5, n° 5 9-10, 67-68

126

Il en va de même pour les broderies qui, selon les mêmes auteurs (Rimski-

Korsakov : 60, Reber : 190, Émile Durand : 507), ne permettent pas de corriger l’effet des quintes parallèles (chapitre 2, p. 29). Encore une fois, cela n’a pas empêché les compositeurs de faire ce genre d’enchaînement, comme Satie, dans Carnet d’esquisse et de croquis, n° 3 : « Notes », où à la mesure 2, il sépare deux quintes à la main gauche par une broderie dissonante (exemple 5.25). Satie les accompagne de quintes à la main droite, elles aussi séparées par des notes intermédiaires (arpègement des notes de l’accord).

Exemple 5.25 – Satie (1897-1919), Carnet d’esquisses et de croquis, n° 3 : « Notes », mes. 2

On peut avoir une idée de l’ampleur de cette pratique dans le répertoire étudié en consultant le tableau 5.15.

Tel que discuté au chapitre 2 (p. 29), les quintes parallèles créées par des broderies suscitent des réactions mitigées chez théoriciens Dubois (222), Caussade (229), Reber (90,

188, 189), Émile Durand (197, 507) et Rimski-Korsakov (60). Les compositeurs, quant à eux, se fient peu aux recommandations de ces auteurs et utilisent des broderies comme bon leur semble pour créer des quintes parallèles. Poulenc nous en donne un exemple dans la

Suite française, FP 80, no 3, où il utilise une broderie à l’alto qui forme une quinte avec le soprano (mes. 54, exemple 5.26). 127

Exemple 5.26 – Poulenc (1935), Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80, n° 3, mes. 52-57

Bien que nous n’ayons pas relevé une grande quantité de quintes parallèles créées par des broderies dans la musique de piano étudiée, nous avons tout de même pu en relever quelques autres exemples, qui sont énumérés dans le tableau 5.16.

On retrouve également dans le répertoire de musique de piano des quintes parallèles séparées ou créées par des appoggiatures11. La participation de ce type de note ornementale dans la formation de quintes parallèles fait également l’objet de divergences dans les traités examinés au chapitre 2 (p. 39 et 30) : il est accepté (parfois sous certaines conditions) par

Gilson (vol. 1 : 188, 293) et Caussade (217), mais selon Reber (183) et Émile

Durand (489), les appoggiatures n’enlèvent pas le caractère fautif des quintes. Les compositeurs, quant à eux, en utilisent à l’occasion. La notation de l’appoggiature peut se présenter sous forme de petite note comme dans la cinquième des Dix pièces pittoresques,

« Mauresque », de Chabrier (mes. 23, 24, exemple 5.27) ou en note de taille normale comme dans la deuxième Arabesque de Roger-Ducasse (mes. 34-35, exemple 5.28). Dans le premier cas, l’appoggiature intervient entre les quintes pour les « séparer », et Chabrier ajoute même des silences, qui comme nous l’avons vu, ne permettent pas non plus de sauver les quintes (Reicha : 141, Reber : 31). Dans le deuxième exemple, on remarque que

11 Pour la définition de ce type de note ornementale, on se rapportera au chapitre 2, p. 27. 128 l’appoggiature crée une quinte avec la note inférieure de l’accord, mais que la note structurelle en crée également une avec la note supérieure. Roger-Ducasse utilise également ici le croisement.

Tableau 5.15 – Œuvres contenant des quintes successives séparées par des broderies Compositeur Œuvre Mesure(s) Alain Étude sur un thème de quatre notes, AWV 6 7 Alain Étude sur les doubles notes, AWV 15 26-32 Auric Neuf pièces brèves, n° 6 11 Auric Trois impromptus, n° 2 106-107 Auric Gaspar et Zoé : « mes enfants » 5-6 Debussy Ballade slave 39 (41, 42), 43, 44, 94-98 Debussy Suite bergamasque, n° 2 26 (28) Debussy Préludes, livre 2, n° 5 37-38 Debussy Préludes, livre 2, n° 9 31-34 D’Indy Schumanniana, op. 30, n° 1 27-28 D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 2 34 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 5 4 (28), 5 (29) Dupont La maison dans les dunes, n° 6 59-60, 63-64, 132-134 Fauré Huit pièces brèves, op. 84, n° 3 27 Fauré Barcarolle, op. 104/2, n° 10 19 (20) Franck Prélude, choral et fugue, op. 21 33, 34 Hubeau Variations pour piano 267 Ibert Histoires, n° 2 7-8 (58-59) Ibert Pièce romantique 85 (87) Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 14 12 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 8 5 Laparra Rythmes espagnols, n° 3 : D. 35 (45) Lekeu Sonate, n° 1 15 Magnard Promenades, op. 7, n° 3 11-12 Milhaud L’album de Madame Bovary, op. 128b, n° 12 15, 16 Milhaud L’album de Madame Bovary, op. 128b, n° 13 10 Milhaud L’album de Madame Bovary, op. 128b, n° 8 33-35 Poulenc Pièce brève sur le nom d’Albert Roussel, FP 50 10 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 2 6 Roger-Ducasse Barcarolle, n° 3 81-82 Roger-Ducasse Variations sur un choral (8e variation) 153-154 Roussel Trois pièces, op. 49, n° 3 3 Saint-Saëns Allegro appassionato, op. 70 100, 116-117 Saint-Saëns Les cloches du soir, op. 85 51 Satie Sports et divertissements, n° 1 1re ligne Satie Passacaille 96-97 Schmitt Musiques intimes, livre 2, op. 29, n° 1 25-26, 27-28 Schmitt Pupazzi, op. 36, n° 7 14 Schmitt Soirs, op. 5, n° 4 11 (32) 129

Tableau 5.16 – Œuvres contenant des quintes parallèles créées par une ou des broderie(s) Compositeur Œuvre Mesure(s) D’Indy Petite sonate dans la forme classique, op. 9, n° 2 11 Fauré Nocturne, op. 119, n° 13 148 Hahn Premières valses, n° 5 44 Milhaud Suite, op. 8, n° 4 29 Poulenc Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80, n° 6 7 Ravel Jeux d’eau 29-30, 73-74 Roger-Ducasse Barcarolle, n° 2 99, 100, 106 Roger-Ducasse Chant de l’aube 69-70 Saint-Saëns Album, op. 72, n° 6 225-228

Exemple 5.27 – Chabrier (1880-1881), Dix pièces pittoresques, n° 5 : « Mauresque », mes. 23-24

Exemple 5.28 – Roger-Ducasse (1919), Arabesque, no 2, mes. 34-35

D’autres exemples d’appoggiatures sont présentés dans les tableaux 5.17 et 5.18. La taille des tableaux fera remarquer au lecteur que ce n’est pas un type de quintes très présent dans l’échantillon étudié. 130

Tableau 5.17 – Œuvres contenant des quintes parallèles créées par des appoggiatures Compositeur Œuvre Mesure(s) Auric Trois pastorales, n° 1 1 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 13 3 Milhaud Suite, op. 8, n° 5 49 (50, 55, 56, 61), 62 Ravel Miroirs, n° 4 58 Saint-Saëns Allegro appassionato, op. 70 96

Tableau 5.18 – Œuvres contenant des quintes parallèles séparées par des appoggiatures Compositeur Œuvre Mesure(s) Chabrier Dix pièces pittoresques, n° 5 19-20, 46, 47 Debussy Préludes, livre 2, n° 3 52 Debussy Images, livre 2, n° 3 81 Ibert Les rencontres, n° 3 27-28 (31-32) Ravel Miroirs, n° 2 14 (15) Ravel Miroirs, n° 3 11-12, 21-22

La question des retards en lien avec les quintes parallèles est longuement discutée dans les traités d’harmonie que nous avons présentés au chapitre 2 (p. 31, 42, 42).

Reicha (136), Reber (117, 132), Savard (62, 190), Émile Durand (78, 342, 353),

Lavignac (44, 76) et Richter (98) énoncent à la fois des restrictions et des permissions quant à leur utilisation. Caussade (176) et Dupré (15) les écartent d’emblée, Barbereau (73),

Dubois (138), Riemann (205-206) et Gilson (vol. 1 : 280, 287-288, 351), considèrent les quintes retardées comme acceptables. Chez les compositeurs, il ne semble pas que le retard soit une pratique très courante en lien avec les quintes parallèles. On en retrouve tout de même quelques exemples dans le répertoire, mais les préparations et/ou les résolutions sont souvent en valeurs courtes. Roger-Ducasse nous en donne un exemple dans sa première

Esquisse (mes. 10), où la préparation et la résolution du retard (à l’alto) forment des quintes parallèles avec le soprano (exemple 5.29). Le retard est ici combiné à une autre dissonance

(septième) au soprano, traité en mouvement parallèle avec la basse, cet ajout contribue à camoufler davantage la sonorité des quintes comme Riemann (30) suggère de le faire. 131

Exemple 5.29 – Roger-Ducasse (1917), Esquisses, n° 1, mes. 8-11

Dans le même ordre d’idée, Ibert utilise dans sa Pièce romantique (mes. 96) un retard au soprano qui crée une quinte parallèle avec la quinte du temps précédent (les quintes sont donc « séparées » par la préparation du retard), la première quinte étant, de plus, créée par une appoggiature dissonante, ce qui peut contribuer à en atténuer l’effet comme dans l’exemple précédent (exemple 5.30).

Exemple 5.30 – Ibert (1916), Pièce romantique, mes. 94-96

Le tableau 5.19 présente les autres exemples de quintes successives avec retard que nous avons répertoriés. 132

Tableau 5.19 – Œuvres contenant des quintes successives avec retard Compositeur Œuvre Mesure(s) Aubert Sillages, op. 27, n° 1 39 Bonis Viviane, op. 8 35 Debussy Deux arabesques, n° 1 90 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 3 95-96 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 11 19 D’Indy Petite sonate dans la forme classique, op. 9, n° 2 1 Dupont La maison dans les dunes, n° 3 20-22 Franck Prélude, aria et finale, op. 23 19-20 Hahn Portrait de peintres, n° 3 7-8 Lekeu Sonate, n° 2 98 Magnard Promenade, op. 7, n° 6 82 Roger-Ducasse Variations sur un choral (6e variation) 96 Ropartz Choral varié 66, 71 Satie Douze chorals, n° 1 23-24 Schmitt Soirs, op. 5, n° 9 71-72

La syncope consonante en lien avec les quintes parallèles n’est pas tellement présente dans les œuvres pour piano entre 1880 et 1940, mais elle est généralement mieux acceptée dans les traités que les retards (Caussade : 46, Émile Durand : 79). Satie en donne un exemple dans la troisième de ses Nouvelles pièces froides, dans les voix de basse, dans un mouvement de quinte vers sixte vers quinte (mes. 12, exemple 5.31).

Exemple 5.31 – Satie (1907), Nouvelles pièces froides, n° 3 : « Sur un pont », mes. 11-14

Quelques autres œuvres du répertoire étudié contiennent des quintes parallèles avec syncope comme en témoigne le tableau 5.20. 133

Tableau 5.20 – Œuvres contenant des quintes successives avec syncope Compositeur Œuvre Mesure(s) Chausson Quelques danses, op. 26, n° 2 15 Dupont Les heures dolentes, n° 2 26-27 Franck Prélude, aria et finale, op. 23 99 Ibert Pièce romantique 40 Roger-Ducasse Arabesque, n° 1 8 Saint-Saëns Album, op. 72, n° 6 221-224 Satie Nouvelles pièces froides, n° 3 20 Schmitt Soirs, op. 5, n° 4 3 (5, 24, 26)

L’anticipation est à peine plus répandue dans la musique de piano qu’elle n’est mentionnée dans les traités d’harmonie en lien avec les quintes parallèles; en fait, seul

Savard (62) mentionne directement qu’il considère l’anticipation un peu comme une syncope et Barbereau (73) mentionne que les quintes anticipées sont tolérées dans l’harmonie non concertante. Debussy nous donne un exemple de quintes parallèles dont la deuxième est anticipée dans le « Prélude » (mes. 5-6) de la Suite bergamasque

(exemple 5.32). On trouve d’autres exemples d’œuvres contenant des quintes parallèles avec anticipation dans le tableau 5.21.

Exemple 5.32 – Debussy (1890, rév. 1905), Suite bergamasque, n° 1 : « Prélude », mes. 4-6

134

Tableau 5.21 – Œuvres contenant des quintes parallèles avec anticipation Compositeur Œuvre Mesure(s) Debussy Suite bergamasque, n° 1 5-6 (70-71) D’Indy Petite sonate dans la forme classique, op. 9, n° 2 19, 21 Durey Romance sans paroles, op. 21 24 Fauré Nocturne, op. 119, n° 13 133 Franck Prélude, aria et final, op. 23 9, 43 (47) Ibert Pièce romantique 95 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 4 29-30 (121-122)

Quintes parallèles créant un enrichissement de la texture

Selon le tableau 5.4 (p. 103), le principal type de quintes parallèles utilisé par les compositeurs français de musique de piano entre 1880 et 1940 est sans contredit celui servant à enrichir la texture (55% des cas). C’est le plus souvent la basse qui est doublée à la quinte sur plusieurs mesures, sur une phrase complète, ou même sur plusieurs phrases consécutives (près de 40% des cas de quintes créant un enrichissement de la texture).

Aubert nous donne un bon exemple de l’utilisation des quintes pour enrichir la texture dans ses Lutins, op. 11, où il double la basse en quinte sur 20 mesures (mes. 59-79). Ces quintes dans le grave produisent, comme nous l’avons vu au chapitre 4 (p. 92), un phénomène acoustique semblable à la doublure à l’octave inférieure. Lenormand (20) affirme même que, lorsqu’il se présente une longue succession de quintes aux parties graves, comme c’est le cas ici, « elles cessent de jouer un rôle dans le tissu harmonique. » Comme dans ce cas précis elles s’accompagnent aussi à l’occasion de quintes dans le registre moyen, leur effet sur la texture s’en trouve renforcé. On remarque aussi que les voix graves sont parfois enrichies d’une troisième voix qui ne se déplace pas en mouvement parallèle

(exemple 5.33). 135

Exemple 5.33 – Aubert (1903), Lutins, op. 11, mes. 62-73

Il est intéressant de noter que les degrés sur lesquels reposent les quintes sont pour la plupart séparées par de grands intervalles mélodiques (quarte ou quinte), ce qui les rend acceptables selon les traités de Barbereau (73), de Riemann (30-31) et de Reber (69), de même que dans l’étude de Gilson étudiés au chapitre 2 (p. 49) 12. On remarque donc que cet exemple peut trouver une certaine forme de justification dans les exceptions énoncées par quelques traités.

On peut avoir une idée de l’ampleur de l’utilisation des quintes parallèles à la basse dans le répertoire en consultant le tableau 5.22.

12 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 18. 136

Tableau 5.22 – Œuvres contenant des quintes à la basse Compositeur Œuvre Mesure(s) Alain Togo, AWV 3 Toute la pièce (non divisée) Alain Histoire d’un homme qui jouait de la 26-27 trompette dans la forêt vierge, AWV 69 Alain Tarass boulba, AWV 90 21-44 Auric Trois pastorales, n° 1 43-46, 51-53, 94 (95, 96), 109-111 Bonis La cathédrale blessée, op. 107 3, 7 Bonis Mélisande, op. 109 51-52 Boulanger Trois morceaux pour piano, n° 1 1-4 Casadesus Prélude, op. 5, n° 8 4-7 Casella Ricercare sul nome B.A.C.H., op. 52 27 Chaminade Interlude, op. 152 1-4, 9-13 (33-37, 146-150), 139-141 Chausson Paysage, op. 38 25-26 Chrétien Les lutins 83-85, 95-96, 302-305 Debussy Berceuse héroïque 57-58 Debussy D’un cahier d’esquisses 13-14 (15, 38, 40, 41) Debussy Deux arabesques, n° 2 5-6 (10-11, 62-62, 66-67) Debussy Images, livre 1, n° 3 32-33 (40-41, 142-143, 150-151) Debussy Images, livre 2, n° 1 30-33 Debussy Images, livre 2, n° 3 43 Debussy Préludes, livre 1, n° 3 9-10 (11-12) Debussy Préludes, livre 1, n° 8 24-27 Debussy Suite bergamasque, n° 2 74-75 D’Indy Petite sonate dans la forme classique, 31-34, 39-42, 97-98, 101-102, 105-108, op. 9, n° 4 134-135, 138-139, 142-146, 221, 224- 225 D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 2 34-36 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 7 39-40 (84-85), 94-98 Dupont La maison dans les dunes, n° 2 5-11, 13, 20-21, 34-39, 55-56, 59 Dupont Les heures dolentes, n° 1 1-3 Dupont Les heures dolentes, n° 2 6-7, 26-28, 47-48, 56-57 Durey Romance sans paroles, op. 21 19-21 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 3e mouvement 30-31, 291 Grovlez Deux études d’exécution trancendante, 87-88 n° 1 Honegger Sarabande 14-17, 19-21 Hubeau Variations pour piano 83 Ibert Pièce romantique 28-29 Ibert Toccate sur le nom d’Albert Roussel 5-7 (9-11) Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 1 5, 7-8, 9-10, 11 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 2 9-10, 21 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 4 1, 11, 14-15

Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 5 1, 5, 9-10 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 6 5, 7-13, 15-18, 20-22, 24-26 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 7 1-5 137

Compositeur Œuvre Mesure(s) Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 10 4-5 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 11 8-10, 19-20 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 12 13 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 13 3, 5-8 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 14 1, 6, 11, 13, 23 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 16 2-3, 4, 7-8, 17, 18, 22 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 1 5-14 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 2 6-7 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 3 6 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 4 1-4 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 5 3-5, 7-15 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 7 1-3 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 8 9-10 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 9 2-3 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 10 22-24 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 11 1-19 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 12 1, 3-6, 9-11 Magnard Promenades, op. 7, n° 1 36-38 Magnard Promenades, op. 7, n° 7 146-148 Milhaud L’album de Madame Bovary, op. 128b, 7-8 (17-18) n° 3 Milhaud L’album de Madame Bovary, op. 128b, 1-15, 31-36 n° 10 Milhaud Printemps, livre 1, op. 25, n° 1 16-18 Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 3 21-22 (73-74), 64-66 Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 5 50-53 Milhaud Saudades do Brasil, livre 2, n° 7 35-39 Milhaud Saudades do Brasil, livre 2, n° 9 21-26 Milhaud Suite, op. 8, n° 1 32-33, 39-40, 46-50, 56-57, 59, 61-65 Milhaud Suite, op. 8, n° 3 8-10, 68-71 Milhaud Suite, op. 8, n° 4 73-84 Milhaud Suite, op. 8, n° 5 32-34, 37-39 Poulenc Valse en ut, FP 17 33-36 (37-40) Poulenc Cinq impromptus, FP 21, n° 1 12 Ravel Gaspard de la nuit, n° 2 15-17 Ravel Jeux d’eau 1-2, 11-14 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 1 64, 69 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 4 34-36, 126-128 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 6 6-9, 23-34, 38-42 Ravel Miroirs, n° 2 8-9, 22-25, 27-32 Ravel Miroirs, n° 4 11-17 Ravel Pavane pour une infante défunte 18-19, 25-27 Ravel Valses nobles et sentimentales, n° 1 75-76 Roger-Ducasse Barcarolle, n° 3 18 Roger-Ducasse Chant de l’aube 3-4 (82-83) Ropartz Musiques au jardin, n° 5 16-18 138

Compositeur Œuvre Mesure(s) Ropartz Musiques au jardin, n° 6 19 (104), 22 (107), 36 (121), 40 (125), 61-67, 75, 77, 135, 136-138 Roussel Sonatine, op. 16, n° 1 68-70 Roussel Rustiques, n° 2 15-17 Satie Caresse 13-14 (31-32), 15-17 Satie Carnet d’esquisses et de croquis, n° 2 11 Satie Douze petits chorals, n° 1 4-5 Satie Douze chorals, n° 10 1re ligne Satie Trois sarabandes, n° 1 7 (28), 10-13 (23-25, 31-34), 15-17, 43-53 (59-69), 76-78, 80-85, 88-94 Satie Trois sarabandes, n° 3 56-59 (81-84), 67-68 Schmitt Musiques intimes, livre 2, op. 29, n° 6 68-70, 83-87 Schmitt Nuits romaines, op. 23, n° 1 36-38 Schmitt Ombres, op. 64, n° 1 72-74 Schmitt Pupazzi, op. 36, n° 4 47-50 Schmitt Pupazzi, op. 36, n° 6 7-8 Schmitt Pupazzi, op. 36, n° 8 29-30, 60-63 Séverac Baigneuses au soleil 56-58, 60 Séverac Deuxième impromptu, dans le caractère 90-91 (92-95, 96) romantique Séverac Le chant de la terre, « Prologue » 35-38 Tansman Burlesque 12-13, 22-26, 56-69

Afin d’enrichir davantage la texture, ces quintes parallèles s’accompagnent souvent de doublures parallèles à l’octave supérieure ou inférieure d’une des deux voix formant la quinte ou des voix l’accompagnant le cas échéant, ou s’accompagnent d’une ou plusieurs voix supplémentaires comme la septième, la neuvième ou la dixième de l’accord. Dans le cas de l’octave et de la dixième, l’harmonie n’est pas altérée, la texture acquiert simplement plus de puissance comme dans l’exemple 5.34, où Decaux double la voix de basse de la quinte dans les mesures 53 à 60 de Clair de lune, n° 3 : « Le cimetière ». Dans le cas de l’ajout de la septième ou de la neuvième, l’harmonie se complexifie. Milhaud en donne un exemple dans le deuxième Rag-caprice « Romance », où il présente aux mesures 31 à 33 une série de quintes et de neuvièmes superposées à la basse, donc deux séries de quintes parallèles (exemple 5.35). 139

Exemple 5.34 – Decaux (1907), Clair de lune, n° 3 : « Le cimetière », mes. 53-56

Exemple 5.35 – Milhaud (1923), Rag-caprice, n° 2 : « Romance », mes. 30-34

Les tableaux 5.23, 5.24, 5.25 et 5.26 présentent d’autres exemples où on retrouve des quintes à la basse accompagnées d’une autre voix parallèle. 140

Tableau 5.23 – Œuvres contenant des quintes à la basse accompagnées d’une octave Compositeur Œuvre Mesure(s) Bonis Barcarolle-Étude, op. 43 75-78 Bonis La cathédrale blessée 15, 26 Chabrier Dix pièces pittoresques, n° 3 24-27 Chabrier Dix pièces pittoresques, n° 9 59-61 (163-165) Debussy Estampes, n° 1 89-90 Debussy Images, livre 1, n° 1 17 Debussy Images, livre 1, n° 2 66-68 Debussy Images, livre 1, n° 3 53-54 (57-58) Debussy Masques 147-164 Debussy Pour le piano, n° 2 60-62 Debussy Préludes, livre 1, n° 1 5 (10) Debussy Préludes, livre 1, n° 10 1-5 Debussy Préludes, livre 2, n° 12 61-64 D’Indy Petite sonate dans le style classique, op. 9, n° 4 220, 236-237 Ibert Les rencontres, n° 3 1-12 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 3 5 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 10 3-9 Lekeu Sonate, n° 2 146-147 Lekeu Sonate, n° 4 21-22 Lekeu Trois pièces pour piano : n° 1 13-14 Milhaud Suite, op. 8, n° 3 4-5, 53-57 Milhaud L’album de Madame Bovary, op. 128b, n° 10 36-40 Ravel Miroirs, n° 3 36-37 Roussel Rustiques, op. 5, n° 3 199-202 Roussel Sonatine, op. 16, n° 1 118 (163, 258), 120-121 (165- 166, 260-261), 123-126 (168- 171, 263-266), 128-129 (173- 174, 268-269) 131-133 (176-178, 271-273) Roussel Sonatine, op. 16, n° 2 94-95, 96-98, 103-104 (105-106) Roussel Trois pièces, op. 49, n° 3 57, 58-61 Satie Première pensée Rose-Croix 4e-6e ligne, 7e ligne Satie Danses gothiques, n° 2 2e ligne Satie Trois nocturnes, n° 3 9-10 Schmitt Pupazzi, op. 36, n° 8 64-67 Schmitt La retardée, op. 90, n° 3 80-82 Schmitt Soirs, op. 5, n° 2 44-45, 63-66 Schmitt Soirs, op. 5, n° 7 64-65 Schmitt Soirs, op. 5, n° 9 85-90

141

Tableau 5.24 – Œuvres contenant des quintes à la basse accompagnées de la dixième Compositeur Œuvre Mesure Boulanger Trois morceaux pour piano, n° 1 7-9 Casella Ricercare sul nome B.A.C.H., op. 52 31-39 Chaminade Interlude, op. 152 114-117 Chausson Quelques danses, op. 26, n° 2 10-11, 78 Debussy Suite bergamasque, n° 1 40-41 Debussy Suite bergamasque, n° 2 46-47 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 7 1-6 (20-25), 56-58, 106-108 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 4 4-10 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 8 2-5 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 9 6-8 Magnard Promenades, op. 7, n° 4 41-46, 53-58 Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 5 1-8, 15-20 Ravel Pavane pour une infante défunte 28-32 (68-72) Roussel Des heures passent, op. 1, n° 3 27, 28 Schmitt Pièces romantiques, op. 42, n° 2 7-8 Tailleferre Au pavillon d’Alsace 17-19

Tableau 5.25 – Œuvres contenant des quintes à la basse accompagnées de la septième Compositeur Œuvre Mesure(s) Debussy Préludes, livre 1, n° 8 17-18 Debussy Pour le piano, n° 2 11-12 Ravel Jeux d’eau 75-76

Tableau 5.26 – Œuvres contenant des quintes à la basse accompagnées d’une neuvième (deux quintes superposées) Compositeur Œuvre Mesure(s) Debussy L’isle joyeuse 14 Ravel Miroirs, n° 1 72-74

Pour amplifier l’enrichissement de la texture, on peut également compléter la quinte avec une tierce pour former une série d’accords parallèles. Auric utilise notamment cette technique : on la retrouve dans les voix de basse des mesures 17 à 19 du no 6 des Neuf pièces brèves (exemple 5.36). Les quintes parallèles de cet exemple sont, comme nous l’avons vu précédemment, justifiables selon certains traités par l’utilisation du chromatisme 142

(Vivier : 131, Rahn : 137, Gilson13) et de la combinaison d’une voix extrême et d’une voix intérieure (Reber : 68).

Exemple 5.36 – Auric (1941), Neuf pièces brèves, n° 6 : « Sicilienne », mes. 16-19

S’ils ajoutent une septième à leurs accords, les compositeurs peuvent même créer deux séries de quintes parallèles imbriquées l’une dans l’autre et donnant une imposante texture de masse et de sonorité, comme le fait Séverac dans Baigneuses au soleil (mes. 6).

Si on se fie aux traités de Barbereau (73), Riemann (30-31), Reber (69) et à l’étude de

Gilson examinés au chapitre 2 (p. 49), les quintes peuvent ici être acceptables parce qu’elles sont séparées par de grands intervalles mélodiques14 (exemple 5.37).

Exemple 5.37 – Séverac (1908), Baigneuses au soleil (Souvenir de Banyuls-sur-mer), mes. 4-6

Ce principe peut même aller jusqu’à superposer deux ou trois intervalles de quintes en parallèles, comme le fait Kœchlin dans le quatrième morceau de Paysages et marines

(mes. 4-6), ce qui donne une succession d’accords de onzième en parallèle (exemple 5.38).

13 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 20. 14 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 18. 143

Exemple 5.38 – Kœchlin (1915-1916), Paysages et marines, op. 63, n° 4, mes. 4-6

Cet exemple trouve moins de justification dans les traités puisque les quintes se déplacent par mouvement conjoint, ce qui n’est pas recommandé selon ce que nous avons vu au chapitre 2 (p. 33), entre autres dans les traités de Riemann (30-31), Reber (69), Vinée (111) et dans l’étude de Gilson15. L’enchaînement des deux dernières quintes, par mouvement chromatique, est cependant plus acceptable que les enchaînements précédents, si l’on se fie aux écrits de Vivier (131), de Rahn (137) et de Gilson16 (chapitre 2, p. 48).

L’enrichissement de la texture peut ici aussi être renforcé par une doublure à l’octave. Le tableau 5.27 dresse une liste d’œuvres utilisant des accords parfaits parallèles à la basse pour créer des effets de texture. Les mesures contenant une doublure sont marquées d’un astérisque (*).

15 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 18. 16 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 20. 144

Tableau 5.27 – Œuvres contenant des accords parallèles à la basse Compositeur Œuvre Mesure(s) Bonis La cathédrale blessée, op. 107 8 Chabrier Dix pièces pittoresques, n° 3 3-4* Debussy Estampes, n° 2 117* (118*) Debussy Estampes, n° 3 136-139, 143-144 Debussy Jeux 67-69* Debussy Deux arabesques, n° 2 32-35*, 104-105* Debussy Pour le piano, n° 2 56-58* Debussy Tarentelle styrienne 299-302 (302-306) Françaix Cinq portraits de jeunes filles, n° 5 172-180 Honegger Sept pièces brèves, n° 6 28-30 Kœchlin Le tombeau de Couperin, n° 5 73-74*, 77-78* Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 9 4 Lekeu Trois pièces pour piano, n° 3 8-11 (121-124) Saint-Saëns Album, op. 72, n° 6 244-245 Satie Passacaille 26-27 (62-63, 115-116) Satie Sonatine bureaucratique 121-125 Sauguet Pièces poétiques pour enfants, livre 2, n° 11 3-4 Schmitt Pièces romantiques, op. 42, n° 1 6 Schmitt La retardée, op. 90, n° 3 64-65 Tansman Burlesque 1-7, 9-11

Les compositeurs doublent aussi la mélodie à la quinte pour enrichir la texture, mais moins fréquemment qu’ils ne doublent la basse (c’est-à-dire un peu plus de 20% des cas de quintes enrichissant la texture). Casadesus le fait de façon importante dans le Prélude, op. 5, n° 24 (« Doux et tranquille »), où il double la mélodie à la quinte dans la majeure partie de l’œuvre. En plus d’être étalées sur une longue période, les quintes seraient ici peu acceptables, comme nous l’avons vu au chapitre 2 (p. 33) dans les traités de Riemann (30-

31), de Reber (69), de Vinée (111) et l’étude de Gilson17, parce qu’elles se déplacent le plus souvent par mouvement conjoint, en plus d’être à découvert et davantage mises en évidence par leur position dans les voix aigues (exemple 5.39).

17 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 18. 145

Exemple 5.39 – Casadesus (1924), Prélude, op. 5, n° 24 : « Doux et tranquille », mes. 1-7

En consultant le tableau 5.28, on peut constater qu’en général, les compositeurs utilisent ce type de quintes pour de plus courtes occurrences que dans l’exemple précédent. 146

Tableau 5.28 – Œuvres contenant une doublure de la mélodie en quintes parallèles Compositeur Œuvre Mesure(s) Alain Étude sur un thème de quatre notes, AWV 6 36-41 Alain Petite rhapsodie, AWV 17 45-48 Casadesus Prélude, op. 5, n° 7 9-10 Casadesus Prélude, op. 5, n° 10 40 Casadesus Prélude, op. 5, n° 24 1-15, 19-22, 24-36, 41-61, 84-95 Dukas Prélude élégiaque sur le nom de Haydn 32-33 Dupont La maison dans les dunes, n° 1 24-25, 45-46 Durey Dix inventions, op. 41a, n° 9 7-9 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 1er mouvement 71-72, 158-159 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 2e mouvement 55-56, 74-75 Françaix Cinq portraits de jeunes filles, no 1 46 Ibert Les rencontres, n° 3 71 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 3 4, 6 (noires 39 à 46) Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 9 4 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 10 4 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 11 20 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 13 3 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 15 10 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 16 3, 5-7, 17, 18, 19 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 2 10-11 Milhaud Suite, op. 8, no 1 27-28, 30-31 Milhaud Suite, op. 8, no 2 29-30 Milhaud L’album de Madame Bovary, op. 128b, n° 8 4-6, 13-14 Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 5 63-65 Milhaud Saudades do Brasil, livre 2, n° 8 23 Ravel Miroirs, n° 4 41-42, 172-174 Ravel Valses nobles et sentimentales, n° 8 52-53 Roger-Ducasse Sonorités 28 Roussel Rustiques, n° 2 22-23, 75-76 Roussel Sonatine, op. 16, n° 2 82 (83, 87, 88) Saint-Saëns Les cloches du soir, op. 85 52 Satie Trois nocturnes, n° 2 15

Il arrive également que, comme c’est possible pour la basse, la quinte de la mélodie soit accompagnée de l’octave ou d’une autre voix parallèle, et les tableaux 5.29, 5.30 et

5.31 nous en donnent quelques exemples. 147

Tableau 5.29 – Œuvres contenant une doublure de la mélodie à la quinte et à l’octave Compositeur Œuvre Mesure(s) Aubert Sillages, op. 27, n° 2 57-58, 68-69 Aubert Sillages, op. 27, n° 3 57 (59) Bonis Étude de concert en sol bémol majeur, op. 136 45-46 Boulanger Trois morceaux pour piano, n° 3 33-34 Delannoy Dîner sur l’eau 37-38, 40-41 D’Indy Menuet sur le nom d’Haydn, op. 65 62-63 (68-69) D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63 118-120 Dupont Les heures dolentes, n° 2 40-42 Dupont La maison dans les dunes, n° 6 248-252, 256-258, 260-265 Grovlez Deux études d’exécution trancendante, n° 2 28-29, 93, 94 Grovlez Sarabande 20 Grovlez Valse-caprice 126-129, 139, 168-170 Ibert Les rencontres, n° 3 66-69 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 8 9 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 15 5, 12 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 10 10-15 Ravel Jeux d’eau 21-23, 52, 56 Ravel Miroirs, n° 1 51-52 (53-54) Ravel Miroirs, n° 4 37-38 Roger-Ducasse Sonorités 102-103 Roger-Ducasse Variations sur un choral (5e variation) 79, 81 Roussel L’accueil des muses 4-6 Roussel Trois pièces, op. 49, n° 2 65-66 Roussel Hommage à J.S. Bach 46-47, 48 Satie Cinéma-Fantaisie 13-20

Tableau 5.30 – Œuvres contenant une doublure de la mélodie à la quinte et à la neuvième (deux quintes superposées) Compositeur Œuvre Mesure(s) Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 2 27 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 3 6 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 8 7 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 10 1-3, 5 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 14 6, 10, 11 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 16 13, 22

Tableau 5.31 – Œuvres contenant une doublure de la mélodie à la quinte et à la septième Compositeur Œuvre Mesure(s) Honegger Sept pièces brèves, n° 5 7 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 16 9, 18 Poulenc Les soirées de Nazelles, FP 84, n° 6 70-73 Roger-Ducasse Arabesque, n° 1 60 Satie Le fils des étoiles : « Prélude du 2e acte » 6e ligne, 7e-8e ligne, 12e ligne 148

On retrouve un peu plus régulièrement la mélodie harmonisée en accords parallèles, accompagnée ou non de l’octave. Milhaud illustre bien ce type de quintes parallèles dans les mesures 13 à 19 du Rag-caprice no 1, où chaque note de la mélodie supporte un accord parfait dans cinq mesures consécutives (exemple 5.40). Comme dans certains exemples précédents, la prédominance du mouvement conjoint rendrait ici les quintes parallèles peu acceptables selon certains théoriciens (Riemann : 30-31, Reber : 69, Vinée : 111, Gilson18).

Exemple 5.40 – Milhaud (1922), Rag-caprice, no 1, mes. 14-18

Le tableau 5.32 nous montre bien l’étendue de cette pratique dans les œuvres analysées. Les doublures à l’octave sont encore une fois marquées d’un astérisque (*).

Tableau 5.32 – Œuvres contenant une mélodie harmonisée en accords parfaits parallèles Compositeur Œuvre Mesure(s) Casella Ricercare sul nome B.A.C.H., op. 52 43 Chabrier Dix pièces pittoresques, n° 5 36 (59) Debussy Berceuse héroïque 17-18*, 19-21* Debussy D’un cahier d’esquisses 24* Debussy Estampes, n° 2 33-36*, 51-55, 78-81* Debussy Images, livre 2, n° 2 20-24* Debussy Jeux 226-229 (247-250) Debussy Masques 15-16 (19-21, 40-41, 44-46, 135- 136, 139-142, 283-284, 287-289, 308-309, 312-315), 29-33 (287-301) Debussy Pour le piano, n° 1 161-163* Debussy Pour le piano, n° 2 50-53* Debussy Préludes, livre 1, n° 3 31-33* Debussy Préludes, livre 1, n° 7 7-9*, 21-22*, 59-62* Debussy Préludes, livre 1, n° 10 72-83* Debussy Préludes, livre 2, n° 3 35-41*

18 Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 18. 149

Compositeur Œuvre Mesure(s) Debussy Préludes, livre 2, n° 6 101-102 Dupont La maison dans les dunes, n° 5 49-52 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 1er mouvement 186 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 2e mouvement 109 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 3e movement 28-31 Hahn Premières valses, n° 4 15-16* Ibert Les rencontres, n° 4 57-60* Ibert Les rencontres, n° 5 33-34 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 3 6 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 12 6* Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 4 7*, 9* Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 6 3, 7 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 9 5 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 11 5-6, 10-12, 13, 17 Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 4 51-52* Milhaud Choral 20 Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 6 1-15, 25-39 Milhaud Suite, op. 8, n° 3 18 Milhaud Suite, op. 8, n° 4 54-58 Poulenc Les soirées de Nazelles, FP 84, n° 5 22-23* Poulenc Trois pastorales, FP 5, n° 3 5, 6 Ravel Gaspard de la nuit, n° 2 12-14*, 17-19* Ravel Gaspard de la nuit, n° 3 267-268* (270-271*) Ravel Valses nobles et sentimentales, n° 7 49-50* (140-141*) Ravel Miroirs, n° 1 41-42 Ropartz Musiques au jardin, n° 1 9-10, 82-83 Ropartz Musiques au jardin, n° 6 62, 64, 75, 77, 136-137 Satie Cinéma-Fantaisie 53-56 (169-172), 95-96 Satie Nouvelles pièces froides, n° 3 22 Schmitt La retardée, op. 90, n° 3 9-11, 49-52, 56-57 Schmitt Soirs, op. 5, n° 6 3-4 Séverac Le chant de la terre, « Prologue » 55-57*

On retrouve également des exemples dans lesquels les compositeurs ont utilisé des accords de septième qui contiennent deux quintes justes, par exemple Poulenc dans Trois pastorales, FP 5, n° 3 (mes. 7-9, 14-17, 33-35, 45-48, 53-54, 59-62), Debussy dans le n° 3 :

« Poissons d’or » du deuxième livre d’Images (mes. 81, 83) et Ravel dans Valses nobles et sentimentales n° 7 (mes. 51-54, exemple 5.41). 150

Exemple 5.41 – Ravel (1911), Valses nobles et sentimentales, n° 7, mes. 51-54

Certains compositeurs utilisent de leur côté des triades autres que parfaites, comme

Debussy dans le premier livre de préludes, n° 10 : « La cathédrale engloutie » (mes. 86-87) et Kœchlin dans Les heures persanes, op. 65, n° 1 « Sieste avant le départ » (mes. 1). Ce dernier présente une série de trois accords dont la voix centrale n’est pas à distance de tierce des deux notes de la quinte, mais plutôt à distance de quarte et de seconde

(exemple 5.42)

Exemple 5.42 – Kœchlin (1913-1919), Les heures persanes, op. 65, n° 1 : « Sieste avant le départ », mes. 1

Les compositeurs de musique de piano utilisent également des quintes parallèles ou des accords parallèles dans les voix intérieures pour étoffer la texture ou lui donner un effet de masse. Cette disposition, selon Richter (98), Reber (68) et Gilson (vol. 1 : 100-101), rend les quintes moins apparentes et donc plus acceptables que lorsqu’elles sont dans les 151 autres voix19. Ibert nous donne un exemple de quintes parallèles à vide dans les voix intérieures dans le no 4 : « Les bergères » de la suite Les rencontres (mes. 21-22, reprise à

101-102). L’application est différente d’une doublure de la mélodie, même si, à première vue, elle peut sembler s’en approcher. Les quintes apparaissent ici indépendamment de la mélodie; elles peuvent donc être considérées comme ayant une fonction différente propre

(exemple 5.43).

Exemple 5.43 – Ibert (1924), Les rencontres, n° 4 : « Les bergères », mes. 21-24

On trouve des exemples supplémentaires dans le tableau 5.33.

Évidemment, un enrichissement de la texture peut également s’effectuer avec des accords, ce que Debussy présente deux fois plutôt qu’une dans les « Danseuses de

Delphes » (Préludes, livre 1, n° 1), où il fait entendre deux séries d’accords à l’octave dans les voix intérieures (mes. 11-14, exemple 5.44). Encore une fois, ces deux séries sont indépendantes de la mélodie et de la basse; elles ont donc leur fonction propre. C’est un contrepoint de plans sonores tels que nous l’évoquions au chapitre 3 (p. 83) Cet enchaînement rappelle la « licence » tolérée par Reber (204) que nous avons vu au chapitre 2 (p. 37), concernant des notes de passage doublées à l’octave. Toutefois, les compositeurs insèrent généralement une seule série d’accords parallèles dans les voix; on trouvera une liste d’exemples dans le tableau 5.34.

19 Voir aussi Gilson, Quintes, octaves, secondes et polytonie, 17-18. 152

Tableau 5.33 – Œuvres contenant des quintes parallèles enrichissant la texture dans les voix intérieures Compositeur Œuvre Mesure(s) D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 1 273-274 Dupont La maison dans les dunes, n° 6 137-143, 228 Durey Romance sans paroles, op. 21 46 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 2e mouvement 36 Honegger Sarabande 21-22 Ibert Les rencontres, n° 4 101-102 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 9 4 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 11 19, 20 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 13 6-7 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 2 8-9 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 3 9-10 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 5 10, 18 Milhaud Printemps, livre 1, op. 25, n° 1 52 (53) Milhaud Rag-caprice, no 1 6-8 Ravel Jeux d’eau 62 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 5 53-55 Roger-Ducasse Barcarolle, n° 3 16-17 Satie Quatre préludes posthumes, « Premier prélude du Nazaréen » 14e ligne Schmitt Soirs, op. 5, n° 9 66-67

Exemple 5.44 – Debussy (1909-1910), Préludes, livre 1, n° 1 : « Danseuses de Delphes », mes. 11-14

153

Tableau 5.34 – Œuvres contenant des accords parfaits parallèles enrichissant la texture dans les voix intérieures Compositeur Œuvre Mesure(s) Debussy Préludes, livre 2, n° 2 31-36 Debussy Berceuse héroïque 21-24 Debussy Préludes, livre 2, n° 7 7-8 Françaix Cinq portraits de jeunes filles, n° 2 22-23 (30-31) Françaix Cinq portraits de jeunes filles, n° 5 173-175 (175-177, 177-179, 179-180) Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 12 1 Magnard Promenade, op. 7, n° 5 100-102 Schmitt Soirs, op. 5, n° 10 76-77 Aubert Sillages, op. 27, n° 1 9 (73) Dupont Les heures dolentes, n° 2 13-16 Dupont La maison dans les dunes, n° 3 4-6 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 1 6-7 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 9 3, 7 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 7 1 Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 5 70-72 Milhaud Rag-caprice, no 1 33-34 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 3 38-39 Ravel Valses nobles et sentimentales, n° 8 1-4 Roger-Ducasse Arabesque, n° 2 62 Roger-Ducasse Sonorités 19 (89) Saint-Saëns Album, op. 72, n° 1 15-16 Satie Cinéma-Fantaisie 252-259 Milhaud Choral 25

La superposition de quintes parallèles en valeurs longues dans les voix intérieures est aussi un moyen utilisé par les compositeurs pour créer une texture orchestrale

(notamment en rappelant les notes tenues de certains instruments d’orchestre). Poulenc en donne un exemple dans le Cinquième impromptu, où il fait entendre des quintes superposées (et par le fait même un intervalle de neuvième) sur les premiers temps de quatre mesures successives (mes. 19-22, exemple 5.45). Il est à noter cependant que sur le premier temps de la mesure 19, la quinte inférieure est diminuée. 154

Exemple 5.45 – Poulenc (1920, rév. 1939), Cinq impromptus, FP 21, n° 5 : « Andante », mes 19-22

Très souvent, les compositeurs vont combiner deux ou plusieurs de ces façons d’utiliser des quintes parallèles afin de créer une texture de masse, que ce soit en combinant uniquement des quintes à vide (tableau 5.35), uniquement des accords (tableau 5.36) ou des quintes à vide et des accords (tableau 5.37). Milhaud en fait l’expérience dans la cinquième pièce du premier livre Saudades do Brasil, « Ipanema », où il présente des quintes à vide à la basse et des accords dans les voix intérieures (mes. 9-14). On peut parler ici de deux séries distinctes superposées, car elles ont chacune leur rythme propre. Milhaud y superpose deux harmonies distinctes (exemple 5.46). La consultation des tableaux 5.35,

5.36 et 5.37 montre que ce n’est pas pratique courante, les harmonies sont plus souvent les mêmes ou complémentaires l’une avec l’autre que différentes l’une de l’autre20.

Exemple 5.46 – Milhaud (1920-1921), Saudades do Brasil, livre 1, n° 5 : « Ipanema », mes. 9-14

20 La mention « harmonies complémentaires » désigne une situation où les deux séries ne présentent pas les mêmes notes mais peuvent être combinées pour former un accord intelligible dans le système tonal. 155

Tableau 5.35 – Doublure de la basse et de la mélodie à la quinte pour créer une texture de masse Compositeur Œuvre Mesure(s) Description Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 3 6 Même harmonie Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 5 4-5, 7-9, 18 Même harmonie Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 5 13 Harmonies complémentaires Séverac Baigneuses au soleil 29-30 Même harmonie

Tableau 5.36 – Combinaison de séries d’accords pour enrichir la texture Compositeur Œuvre Mesure(s) Description Alain Prélude, AWV 88 26 Même harmonie Debussy Images, livre 2, n° 2 39, 40, 43, 44-45 Même harmonie Debussy Préludes, livre 2, n° 7 28-30 Même harmonie Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 15 17-18 Même harmonie Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 4 41-42 Harmonies complémentaires Poulenc Cinq impromptus, FP 21, n° 4 1-2 (34-35) Harmonies complémentaires Poulenc Cinq impromptus, FP 21, n° 2 56-59 Harmonies complémentaires Ravel Valses nobles et sentimentales, 21-23, 30, 31-32, Même harmonie n° 8 33, 63-66 Schmitt Ombres, op. 64, n° 3 6-8 Même harmonie Séverac Baigneuses au soleil 56 Même harmonie

Tableau 5.37 – Combinaison de quintes à vide et d’accords pour enrichir la texture Compositeur Œuvre Mesure(s) Description Debussy Berceuse héroïque 56 Même harmonie Debussy Pour le piano, n° 2 19, 50-53 Même harmonie Debussy Préludes, livre 2, n° 9 31-34 Même harmonie Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 4 8-9 Harmonies différentes Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 9 3 Harmonies complémentaires Poulenc Les soirées de Nazelles, FP 84, n° 7 6 Même harmonie Roussel Sonatine, op. 16, n° 2 186 Harmonies complémentaires Satie Trois sarabandes, n° 2 48-49 (50-51, Même harmonie 59-60, 61-62, 76-77, 78-79) Séverac Baigneuses au soleil 27 Harmonies différentes

Une autre façon d’obtenir une texture orchestrale consiste à enchaîner une quinte à vide à un accord parfait ou inversement (soit ajouter ou soustraire une voix). Certains pourraient objecter que les quintes ne sont pas exactement dans les mêmes voix, donc qu’il n’y a pas parallélisme. Toutefois, l’impression de quintes parallèles peut persister, et 156 certains exemples du répertoire nous le prouvent. Par exemple, la pièce « Forlane » des

Quelques danses (op. 26, n° 4) de Chausson illustre bien ce type de quintes, alors qu’à travers une série de quintes parallèles à la basse, le compositeur intercale des accords parfaits (mes. 129 et 130, exemple 5.47).

Exemple 5.47 – Chausson (1896), Quelques danses, op. 26, n° 4 : « Forlane », mes. 129-130

D’autres compositeurs utilisent ce genre d’enchaînement comme le montre le tableau 5.38 157

Tableau 5.38 – Œuvres comportant des quintes parallèles avec ajout ou retrait de voix Compositeur Œuvre Mesures Alain Étude sur les doubles notes, AWV 15 37 Alain Mythologie japonaise, AWV 28 : « variation n° 5 » 1 Alain Prélude, AWV 88 14, 23 Bonis Sévillana, op. 125 19 Bonis La cathédrale blessée, op. 107 10 (11), 68 Chrétien Les lutins 217-218 Debussy Children’s Corner, n° 6 22, 102 Debussy Estampes, n° 2 115-116 Debussy Pour le piano, n° 2 63, 64, 65 Debussy Préludes, livre 2, n° 4 24 D’Indy Fantaisie sur un vieil air de ronde française, op. 99 166, 239-241 D’Indy Petite sonate dans la forme classique, op. 9, n° 2 41-46 D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 2 14-16 (169-171) Dupont La maison dans les dunes, n° 2 39 Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 1er mouvement 237-238 Françaix Cinq portraits de jeunes filles, n° 1 36-37, 51-52 Françaix Cinq portraits de jeunes filles, n° 5 116, 156-157 Honegger Sept pièces brèves, n° 3 16 Hubeau Variations pour piano 62 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 1 11 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 11 15-16 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 14 12 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 16 11, 13 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 2 3 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 5 11-12, 14 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 6 4 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 7 1-3 Kœchlin Paysages et marines, op. 63, n° 8 9-10 Magnard Promenade, op. 7, n° 4 95-96 Magnard Promenade, op. 7, n° 7 141 Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 4 67 Milhaud Suite, op. 8, n° 5 90-91 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 3 125, 127 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 4 1, 61 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 5 33-40, 65-72 Ravel Le tombeau de Couperin, n° 6 71, 233 Saint-Saëns Suite, op. 90, n° 3 64-70 Satie Deux rêveries nocturnes, n° 1 5e-6e ligne Satie Trois sarabandes, n° 1 19-20, 21-22 Schmitt Pièces romantiques, op. 42, n° 1 6 Schmitt Pièces romantiques, op. 42, n° 6 24, 25 Schmitt Ombres, op. 64, n° 1 5 Séverac Les naïades et le faune indiscret 77-78 Séverac Baigneuses au soleil 32 Tailleferre Au pavillon d’Alsace 15-16

158

Quintes parallèles structurelles

Les quintes dites « structurelles » sont très présentes dans la musique de piano entre 1880 et

1940. Elles s’apparentent au type précédent, mais on les distingue par le fait que c’est l’ensemble des voix qui se déplace en mouvement parallèle, donc toute la structure de l’œuvre, dans la lignée des harmonisations parallèles du Moyen Âge, et ce, sans égard aux règles de conduite des voix de l’harmonie tonale. Elles vont aussi à l’encontre des recommandations de Riemann (30) et de Vinée (92-93) vues au chapitre 2 (p. 47), qui suggèrent que les quintes sont acceptables lorsqu’elles sont accompagnées de mouvement contraire dans les autres voix, ou accompagnées de tout autre artifice pouvant détourner l’attention de l’auditeur. C’est le principal type de quintes parallèles qui pourraient entraîner des modulations ou de l’ambiguïté tonale le cas échéant.

Une première façon de créer des quintes structurelles est d’harmoniser la mélodie uniquement à la quinte dans une harmonie à deux voix seulement, à l’image de l’organum.

Ce procédé est peu utilisé dans la musique de piano, surtout pendant un grand nombre de mesures, entre autres parce qu’elle ne permet pas d’exploiter les richesses de l’instrument, mais nous avons toutefois pu trouver plusieurs exemples qui sont consignés dans le tableau

5.39. Poulenc utilise ce type de quintes à plusieurs reprises dans le premier mouvement de la Suite, op. 19. On remarque dans l’exemple 5.48 la présence de quelques notes ornementales à la basse qui ajoutent de la variété, mais qui ne permettent pas d’atténuer la sonorité des quintes parallèles. 159

Exemple 5.48 – Poulenc (1920, rév. 1926), Suite FP 19 : 1er mouvement, mes. 1-3

Tableau 5.39 – Œuvres comportant des quintes structurelles par doublure de la mélodie à la quinte (2 voix) Compositeur Œuvre Mesure(s) Auric Neuf pièces brèves, n° 1 66-67 Casadesus Prélude, op. 5, n° 24 15-19, 22-23, 37-41 Casadesus Prélude, op. 5, n° 6 4-7, 8 Casella Ricercare sul nome B.A.C.H., op. 52 28 Ibert Pièce romantique 83 Kœchlin Les heures persanes, op. 65, n° 11 20 Milhaud Suite, op. 8, n° 5 49 (50, 55, 56, 61), 62 Poulenc Trois pastorales, FP 5, n° 1 2-9 Poulenc Suite, FP 19, n° 1 4-7 (71-74), 21-23 (88-90), 26 (93), 67-70 Poulenc Suite, FP 19, n° 2 1, 2, 9, 19 Saint-Saëns Allegro appassionato, op. 70 43 Satie Sonatine bureaucratique 177-179 Satie Sports et divertissements, n° 19 1re ligne, 2e ligne, 3e ligne Satie Gnossienne, n° 4 1re ligne, 2e ligne, 8e ligne Sauguet Nuit coloniale sur le bord de la Seine 28-29 Schmitt Mirages, op. 70, n° 2 39, 40-41, 42-44, 45-46, 65-67, 69 Séverac Le chant de la terre, n° 1 3-4, 7 Vierne Solitude, op. 44, n° 1 1-7

Il est possible d’accompagner la quinte de l’octave, et de doubler à la quinte plus d’une fois, comme le fait Vierne dans Solitude, n° 1 : « Hantise » (mes. 1-7, exemple 5.49).

Ce genre de quintes structurelles accroît la puissance sonore et met en valeur les ressources de l’instrument. 160

Exemple 5.49 – Vierne (1918), Solitude, op. 44, n° 1 : « Hantise », mes. 1-7

Évidemment, les compositeurs ont aussi élaboré d’autres structures parallèles comprenant des quintes. La plus courante est certainement le recours à des séries d’accords parfaits en position fondamentale, accompagnés ou non de l’octave. Debussy est, entre autres, un grand utilisateur de ces « mélodies d’accords », comme on peut le constater dans le tableau 5.40. Dans le prélude « Canope » (livre 2, n° 10) par exemple, lorsqu’il énonce pour la première fois son thème, ce sont uniquement des accords parfaits qu’il fait entendre, dont la fondamentale se situe à une octave de distance de la voix supérieure (mes. 1-4, exemple 5.50).

Exemple 5.50 – Debussy (1911-1913), Préludes, livre 2, n° 10 : « Canope », mes. 1-4

Tableau 5.40 – Œuvres de Debussy contenant des quintes structurelles en accords parfaits Œuvre Mesure(s) Préludes, livre 1, n° 4 34-36 Préludes, livre 1, n° 6 45-47 (57-58), 51-54 (63-64) Préludes, livre 2, n° 1 49 Estampes, n° 2 116

161

Comme procédé d’intensification, les compositeurs peuvent également allier texture et structure en faisant entendre deux séries d’accords parallèles (doublure de toutes les voix

à l’octave) ou une série d’accords avec une série de quintes à vide (doublure uniquement de la quinte à l’octave) comme dans les préludes « Minstrels » (mes. 51-52 et 55-57) et « La cathédrale engloutie » (mes. 31-42) de Debussy. On remarquera dans ce dernier une note pédale à la basse qui n’affaiblit en rien l’effet structurel du parallélisme (exemple 5.51).

Exemple 5.51 – Debussy (1909-1910), Préludes, livre 1, n° 10 : « La cathédrale engloutie », mes. 31-35

Debussy semble apprécier cette façon de faire, car il l’utilise également dans les préludes du deuxième livre, n° 7 « La terrasse des audiences du clair de lune » (25-27), n° 9

« Hommage à S. Pickwick » (21-26) et n° 10 « Canope » (mes. 4-5, 26-27), et dans le deuxième livre d’Images, n° 2 : « Et la lune descend sur le temple qui fut » (mes. 7-11).

Cependant, il n’y a pas que les séries d’accords parfaits qui intéressent les compositeurs du tournant du XXe siècle. Avec le développement de l’harmonie et l’émancipation de la dissonance, on voit aussi apparaître des séries d’accords dissonants non résolus, comme des accords de septième, des accords de neuvièmes ou des accords avec note ajoutée. Debussy nous en donne un exemple dans le prélude « La terrasse des audiences du clair de lune » (livre 2, n° 7), où il superpose deux accords de septième à distance d’octave (mes. 31, exemple 5.52). C’est en quelque sorte une application de la 162 tolérance de Riemann (30) pour les quintes parallèles dissimulées par une dissonance, une exception que nous avons abordée au chapitre 2 (p. 47).

Exemple 5.52 – Debussy (1911-1913), Préludes, livre 2, n° 7 : « La terrasse des audiences du clair de lune », mes. 31-32

Debussy offre un exemple tout à fait différent en présentant une harmonie toute en quartes et en quintes parallèles superposées dans Masques (mes. 356-367, exemple 5.53).

Exemple 5.53 – Debussy (1903-1904), Masques, mes. 360-367

Le tableau 5.41 présente d’autres exemples de combinaisons de quintes structurelles présentes dans le répertoire étudié. 163

Tableau 5.41 – Œuvres comportant des quintes structurelles en accords Compositeur Œuvre Mesure(s) Type d’accord Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 1er 77-78, 101-102 Accords de 7e, une série mouvement de quintes Ibert Histoires, n° 2 25-27 (77-78), Accords de 7e, deux 79-80 séries de quintes Sauguet Pièces poétiques pour enfants, 13-14 Accords en position de livre 1, n° 4 sixte avec quinte aux voix supérieures Dupont La maison dans les dunes, n° 6 163-171, 179- Accords avec voix 180 ajoutées Milhaud Saudades do Brasil, livre 1, n° 5 27 Superpositions d’accords, harmonies différentes Decaux Clair de lune, n° 3 23-27, 35-53, Deux séries de quintes à 62-64 vide avec octave et sixte

Quintes parallèles créant des effets particuliers

Bien que ce ne soit pas toujours aisé à justifier ou à repérer, les compositeurs utilisent

également les quintes parallèles (généralement en série) pour créer des effets particuliers.

L’effet le plus connu et peut-être le plus recherché est celui des cloches, évoqué par Gilson dans son traité, et qui est obtenu en frappant des quintes à vide. Gilson (vol. 1 : 21) parle surtout de quintes dans le grave, mais les compositeurs réussissent quand même à créer le même genre d’effet avec des quintes dans l’aigu. L’effet de cloches peut être présenté de manière isolé, mais, dans ce cas, il est souvent accompagné d’intervalles de quarte ou de quinte simultanément ou à proximité, ou il est présenté en deux occurrences plus ou moins rapprochées. Ravel illustre bien ce type de quintes dans Miroirs, n° 5 « La vallée des cloches », où il en utilise dans les voix supérieures aux mesures 26-27 (exemple 5.54) et à la basse dans les mesures 31 à 40, dans les deux cas accompagnées de quartes parallèles21.

21 L’intervalle de prédilection de Ravel pour imiter les cloches dans cette œuvre est d’ailleurs la quarte juste, qu’il utilise très souvent en superposition et en mouvement parallèle. 164

Exemple 5.54 – Ravel (1904-1905), Miroirs, n° 5 : « La vallée des cloches », mes. 26-28

On retrouve plusieurs autres exemples de quintes parallèles illustrant des cloches dans la musique de piano, dont quelques-uns sont contenus dans le tableau 5.42.

Tableau 5.42 – Œuvres présentant des quintes parallèles créant un effet de cloches Compositeur Œuvre Mesure(s) Boulanger Trois morceaux pour piano, n° 2 42, 43, 46, 47, 50, 51, 53-54, 55 Debussy Estampes, n° 1 27 (28, 29, 30) Debussy Estampes, n° 2 99, 101-102 (103-104) Debussy Images, livre 1, n° 1 16-17 Debussy Images, livre 1, n° 3 30-31 (38-39, 140-141, 148-149), 53-54 (57-58) Debussy Images, livre 2, n° 1 43, 44, 48 (49) Debussy Préludes, livre 1, n° 10 16 (17, 18) Debussy Préludes, livre 2, n° 2 41-43 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 5 1-6, 18-23, 25-30, 41-46 D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 13 19-24, 94-96 Fauré Huit pièces brèves, op. 84, n° 8 11-14, 29-30 Séverac Le chant de la terre, n° 1 40, 42 Séverac Le chant de la terre, « Intermezzo » 21, 24-25, 68-77 Séverac Le chant de la terre, « Épilogue » 103

L’exotisme peut se mêler aux cloches, si l’effet que créent les quintes parallèles rappelle le gamelan ou les musiques orientales, comme c’est le cas dans « La terrasse des audiences du clair de lune » (Préludes, livre 2, n° 7) de Debussy (mes. 42-43, exemple

5.55) ou dans la « Sarabande » de la suite Pour le piano (mes. 63-65) du même compositeur. Dans ces exemples, l’utilisation du registre aigu et d’un tempo rapide contribuent à renforcer l’effet oriental. 165

Exemple 5.55 – Debussy (1911-1913), Préludes, livre 2, n° 7 : « La terrasse des audiences du clair de lune », mes. 42-45

Certains compositeurs semblent également associer la tristesse à la sonorité des quintes parallèles. Satie, entre autres, dans sa Sonatine bureaucratique, utilise des quintes parallèles sous les commentaires « Combien cela est triste » (mes. 105-106) et « Tout cela est bien triste » (mes. 113-116, exemple 5.56). Dupont, quant à lui, illustre la mélancolie des vagues avec des paires de quintes parallèles aux voix supérieures dans La maison dans les dunes, n° 6 (mes. 1-8, 11-18, 32-39, 112-114, 190-196, 200-207, 221-227).

Exemple 5.56 – Satie (1917), Sonatine bureaucratique, mes. 113-116

Sans en être nécessairement directement responsable, les quintes parallèles sont souvent associées à des sections où les compositeurs recherchent un effet trouble ou confus.

Debussy en utilise, même plusieurs fois, notamment dans le prélude « Les fées sont d’exquises danseuses » (livre 2, n° 4, mes. 11-12) lors d’un moment de danse rapide, et 166 dans un effet de brouillard dans les préludes « Le vent dans la plaine » (livre 1, n° 3, mes.

26) et « La cathédrale engloutie » (livre 1, n° 10, mes. 1, 3, 5, 14-15, 19-20).

Dans ce type de quintes parallèles, l’auditeur prend davantage conscience de l’effet et de ce qui le cause lorsqu’il connaît les titres ou le texte accompagnant une œuvre. Ce type de quinte est donc surtout lié à des éléments extramusicaux, ce qui est confirmé par les exemples tirés de notre étude.

Quintes en notes ornementales

La sonorité de quintes parallèles intéresse aussi les compositeurs de musique de piano entre

1880 et 1940 comme complément à l’harmonie principale, et ils l’utilisent sous forme de notes ornementales, en série, entre les temps forts. Peu recommandé par les traités d’harmonie, ce n’est pas un type de quintes très fréquent dans la musique de piano de l’époque, mais il est tout de même présent. Roger-Ducasse nous en donne un exemple dans la 8e variation (mes. 152) des Variations sur un choral où il répète une broderie de quintes sur toute une mesure (exemple 5.57).

Exemple 5.57 – Roger-Ducasse (1914-1915), Variations sur un choral : « 8e variation », mes. 150-152

Roussel, pour sa part, remplit un deuxième temps de doubles croches en quintes à la basse dans la « Promenade sentimentale » (mes. 46) de Rustiques (exemple 5.58). 167

Exemple 5.58 – Roussel (1904-1906), Rustiques, op. 5, n° 2 : « Promenade sentimentale », mes. 45-46

Les compositeurs peuvent aussi donner l’impression de quintes parallèles en les utilisant sur des temps faibles successifs, impression souvent considérée moins forte que sur les temps forts parce que les notes intermédiaires qui les séparent sont des notes structurelles, donc des notes qui attirent l’oreille. Comme nous l’avons vu au chapitre 2 (p. 51), ce procédé est acceptable selon Bazin (30), Rimski-Korsakov (66) et

Lavignac (43). Jacques Durand (25), Dupré (11, 13) et Kœchlin (Précis des règles du contrepoint : 3) estiment toutefois que les quintes doivent être à plus d’une mesure de distance (sauf quelques exceptions, chapitre 2, p. 34). Les compositeurs se rangent davantage du côté des premiers théoriciens cités puisqu’ils placent souvent des quintes sur des temps faibles successifs, donc à une mesure ou moins de distance. L’utilisation des divers temps faibles est possible, soit au même endroit de mesures successives, sur des temps faibles successifs à l’intérieur d’une même mesure ou sur des temps faibles à divers moments de mesures successives. Schmitt utilise, par exemple, le troisième temps de trois mesures successives dans le n° 6 : « Atys » de Pupazzi, op. 36 (exemple 5.59). 168

Exemple 5.59 – Schmitt (1907), Pupazzi, op. 36, n° 6 : « Atys », mes. 25-27

On trouve d’autres exemples de quintes sur des temps faibles dans le tableau 5.43.

Tableau 5.43 – Œuvres présentant des quintes sur temps faibles Compositeur Œuvre Mesure(s) Description Chaminade Écossaise, op. 151 149-151 2e temps (3/4) Chausson Quelques danses, op. 26, n° 2 23-25 2e temps (3/4) Chausson Quelques danses, op. 26, n° 4 63-64, 66-67 2e-5e temps (6/4) Chrétien Sonatine, n° 2, 2e mouvement 1-3 5e-3e-3e croche (6/8) Chrétien Sonatine, n° 3, 2e mouvement 1-2 (33-34) 4e -2e croche (2/4) Chrétien Sonatine, n° 3, 2e mouvement 10-11 2e temps (2/4) D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 11 11-12 6e-3e croche (6/8) D’Indy Schumanniana, op. 30, n° 2 42 2e-4e temps (4/4) D’Indy Tableaux de voyage, op. 33, n° 3 95-96 2e temps (3/4) D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 2 157 (159) 4e-5e temps (5/4) D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 2 18 3e-5e temps (5/4) D’Indy Sonate en mi majeur, op. 63, n° 2 35-36 2e temps (5/4) Enesco Sonata, op. 24, n° 3 : 1er mouvement 225-226 2e-5e croche (6/8) Franck Prélude, aria et final, op. 23 113-114 3e temps (4/4) Magnard Promenade, op. 7, n° 7 90-92 2e croche de chaque mesure (2/4) Milhaud Suite, op. 8, n° 5 91-94 4e temps (4/4) Milhaud Suite, op. 8, n° 5 122-123 8e-4e croche (4/4) Milhaud Choral 6 2e-4e temps (5/4) Milhaud L’album de Madame Bovary, 11-12, 15-16 2e croche mesure (6/8) op. 128b, n° 11 Milhaud L’album de Madame Bovary, 32-33 6e croche (6/8) op. 128b, n° 4 Pierné Album pour mes petits amis, op. 14, 20 2e-4e croche (4/4) n° 3 Poulenc Les soirées de Nazelles, FP 84, n° 6 14-15 2e-4e-2e croche (2/4) Poulenc Suite française d’après Claude 31-32 6e-8e croche (4/4) Gervaise, FP 80, n° 5 Poulenc Suite française d’après Claude 31 (52, 129, 2e-4e croche (2/4) Gervaise, FP 80, n° 7 135) Poulenc Suite française d’après Claude 19 (35, 56) 2e-4e croche (2/4) Gervaise, FP 80, n° 1 169

Compositeur Œuvre Mesure(s) Description Poulenc Cinq impromptus, FP 21, n° 4 26-27 3e temps (3/4) Ravel Le tombeau de Couperin, n° 4 63 2e-4e croche (2/4) Ravel Valses nobles et sentimentales, n° 1 46-48 3e temps (3/4) Roger-Ducasse Barcarolle, n° 2 70 4e-6e-8e-10e-12e double croche (6/8) Ropartz Choral varié 89 2e-4e temps (4/2) Saint-Saëns Suite, op. 90, n° 1 23 4e-8e double croche (4/4) Saint-Saëns Suite, op. 90, n° 2 127-128 3e temps (3/4) Satie Carnet d’esquisses et de croquis, 5 2e-4e croche (2/4) n° 11 Satie Gnossienne, n° 5 1-3 (15-17, 2e croche mesure (2/4) 24-26, 38-40) Satie Trois nocturnes, n° 1 21 3e-6e croches (12/8) Sauguet Pièces poétiques pour enfants, 5 4e-12e double croche (3/4) livre 1, n° 6 Schmitt Pupazzi, op. 36, n° 1 41-42 2e-4e-2e noire (2/2) Schmitt Pupazzi, op. 36, n° 1 43-45 2e noire (2/2) Schmitt Pupazzi, op. 36, n° 7 14, 26 4e-6e croche (3/4) Schmitt Soirs, op. 5, n° 5 18-19 6e croche (3/4) Séverac Les naïades et le faune indiscret 20-22 2e temps (2/4) Séverac Les naïades et le faune indiscret 135 2e-4e double croche (4/4) Séverac Le chant de la terre, « Intermezzo » 33-34 5e-2e temps (5/4) Tailleferre Au pavillon d’Alsace 37-44 2e-4e-6e double croche (3/8)

Avec ce tour d’horizon des différents types de quintes parallèles dans la musique française de piano entre 1880 et 1940, nous avons pu véritablement constater l’importance que prend chacun de ces types dans le répertoire, tel que mentionné dans le tableau 5.4

(p. 103) et découvrir comment les types de quintes parallèles se matérialisent dans le répertoire. Le fait de savoir que les quintes parallèles enrichissant la texture, les quintes avec notes ornementales et les quintes cadentielles sont les plus nombreuses dans le répertoire, et comment elles se présentent dans ce contexte, nous aidera à définir le rôle des quintes parallèles dans le langage pianistique de l’époque étudiée.

Conclusion

Après l’analyse des différents types de quintes parallèles dans la musique de piano en

France entre 1880 et 1940, nous pouvons tirer quelques conclusions sur l’utilisation de cet

élément dans l’écriture pianistique.

La prémisse de notre recherche entendait définir le rôle des quintes parallèles dans le langage tonal français entre 1880 et 1940. Pour y parvenir, nous avons d’abord survolé l’historique de cette interdiction, ses fondements et la place qu’elle occupe dans les traités d’harmonie et de composition (chapitre 1 et 2). Cette étude nous a confirmé, dans un premier temps, l’omniprésence de cette règle dans les traités étudiés (tableau 2.1, p. 25) et dans un deuxième temps, la possibilité de nombreuses exceptions, lesquelles ont ouvert la porte à des transgressions pures et simples (chapitre 2, p. 34 et suivantes). Au chapitre 3, l’étude du contexte stylistique de l’époque comprise entre 1880 et 1940 et du statut particulier de la tonalité au cours de cette période nous a permis de mettre en relation les quintes parallèles avec les éléments marquants de l’époque et ainsi mieux juger de leur impact. Finalement, la définition de neuf types de quintes parallèles au chapitre 4, et son application à un échantillon de 900 œuvres au chapitre 5, nous a permis de préciser notre compréhension du rôle des quintes parallèles à cette époque. Nous avons ainsi constaté que le phénomène était assez répandu : plus de 70% des œuvres observées contiennent au moins un exemple de quintes parallèles. Cet élément est également répandu chez la majorité des compositeurs (97% de ceux observés), et ne semble pas se limiter à des formes particulières. Notre étude a démontré que le type de quintes le plus présent dans notre

échantillon est celui par lequel les quintes créent un enrichissement de la texture (55% des exemples recensés), suivi des quintes parallèles avec des notes ornementales (23%) et des 171 quintes parallèles cadentielles (8%). Ce qui nous amène à affirmer que le principal rôle des quintes parallèles dans le langage pianistique entre 1880 et 1940 est le développement de la texture et de sonorités nouvelles.

Tout d’abord, abordons la question de la texture. Comme plus de la moitié des exemples se retrouvent dans cette catégorie, il est évident que les quintes parallèles ont une influence dans ce domaine. Pourquoi les compositeurs ont-ils choisi cet élément, particulièrement dans le contexte de la musique de piano? Leur choix s’inscrit dans une démarche logique (bien qu’on puisse la croire intuitive jusqu’à un certain point) : la quinte possède des propriétés acoustiques analogues à celles de l’octave; ainsi elle offre une alternative au point de vue de la texture, plus particulièrement pour créer une texture de masse. À l’image de l’orchestre où on ajoute des instruments pour obtenir un effet de masse, au piano, on ajoute des voix. Le piano offre beaucoup de possibilités en termes de puissance et de sonorité, mais elles sont limitées par certaines contraintes techniques inhérentes à la pratique de l’instrument : on ne peut indéfiniment doubler les voix à l’octave

(la main humaine a ses limites) et la puissance sonore finit également par atteindre son maximum : même en appuyant à cinq doigts sur une touche, elle ne sonnera pas plus fort.

L’ajout de la quinte, qui agit comme doublure de la voix (certains auteurs comme Riemann vont même jusqu’à affirmer qu’on peut la confondre avec l’unisson ou l’octave1) est un moyen tout désigné pour développer la texture dans le répertoire de cet instrument. Cette technique n’est cependant pas si nouvelle : au chapitre 1 (p. 13), nous mentionnions que le moine Hucbald de Saint-Amand suggérait qu’un redoublement à la quinte enrichit la

1 Hugo Riemann, Manuel de l’harmonie, traduit de la 3e édition allemande (1897) par Calvocoressi (Leipzig : Breitkopf & Härtel, 1902), 29-30. 172 couleur de la ligne musicale par l’accroissement sonore qu’il procure au chant2. L’effet

« nouveau » entre 1880 et 1940, est l’application de plus en plus répandue de ce principe à la musique pour piano, instrument dont la facture s’est beaucoup développée dans les années précédant notre période d’étude3.

Ensuite, l’utilisation des quintes parallèles s’inscrit dans la recherche de nouvelles sonorités propre à l’époque étudiée. La recherche de sonorités floues se conjugue bien avec la dureté et la lourdeur des quintes rapportée dans les traités. On peut considérer encore ici les quintes enrichissant la texture, mais c’est surtout les quintes avec des notes ornementales qui sont concernées, auxquelles on peut ajouter les quintes créant un effet particulier et les quintes en notes ornementales. Ces trois types de quintes font l’objet, à divers degrés, de permissions dans les traités d’harmonie. Leur emploi n’est donc pas surprenant outre mesure, on peut même supposer qu’il a été le point de départ d’une utilisation plus importante ou dans d’autres buts, comme la texture que nous évoquions précédemment. En effet, les quintes avec notes ornementales, de même que celles en notes ornementales, s’ajoutent au système déjà en place (notes structurelles). Elles peuvent même résulter d’« erreurs » que les compositeurs auraient finalement conservées, trouvant le son intéressant. Un compositeur qui recherche de nouvelles sonorités peut ainsi être tenté d’adopter cet élément d’écriture, voire à l’intégrer à son style compositionnel. On peut penser que la recherche de sonorités nouvelles jumelée à un retour aux styles anciens comme l’organum ont pu contribuer à populariser l’utilisation des quintes parallèles, surtout dans le cas de quintes créant un effet particulier. Cette sonorité a paru nouvelle, car

2 Hucbald de Saint-Amand, « De Institutione », dans Hucbald, Guido and John on Music, sous la direction de Claude Palisca (New Haven: Yale University Press, 1979), cité dans Wanda Therese Farah, « Microcounterpoint », dans « The Principle of Counterpoint and Its Expression in Music, Dance and Cinema » (thèse de doctorat, University of Texas at Austin, 1985), 78. 3 Edwin M. Ripin et al. « Pianoforte », dans Grove Music Online. Oxford Music Online, (consulté le 7 juin 2012). 173 elle avait un peu été mise de côté avec l’application de la règle interdisant les quintes. Si on ajoute à ça le fait qu’à cette époque, les compositeurs cherchent à prendre leurs distances par rapport aux règles des traités, la table était mise pour une utilisation marquée de cet

élément. Les compositeurs peuvent l’avoir choisi autant pour son côté « ancien » que

« différent ». Ils exploitent donc les quintes parallèles dans leur démarche compositionnelle : effet de cloches, effet confus, notes de passage, broderies, etc. Les quintes deviennent ainsi un élément caractéristique parmi d’autres dans la sonorité de la musique de piano entre 1880 et 1940.

Maintenant que nous avons analysé le rôle des quintes parallèles, ajoutons quelques mots sur l’impact de leur utilisation dans le langage, dont les deux aspects principaux sont l’émancipation des règles et la démocratisation du piano.

Concernant l’émancipation des règles, signalons un paradoxe qui ressort de cette recherche. Dans les chapitres 1 et 2, nous évoquions le fait que l’une des principales justifications des auteurs de traités pour interdire les quintes parallèles est le fait que « ça sonne mal », que « ça sonne dur ». Dans la conclusion, nous affirmons que les quintes jouent un rôle en lien avec la texture et la sonorité. Est-ce à dire que la musique de piano entre 1880 et 1940 sonne mal et dur? Certainement pas. Il y a tout de même lieu de se questionner. Selon moi, les théoriciens ont maintenu des règles sévères dans leurs traités afin de cultiver la rigueur du langage, la pureté du style et éloigner la facilité de « faire n’importe quoi ». Ce fait a pu parfois même contribuer à développer le langage, comme l’affirme Kœchlin : « Cette interdiction était une des difficultés qui incitent les musiciens à trouver des variantes. Elle les contraignit d’assouplir leur style; au besoin, elle les conduisit

à la découverte de nouveaux enchaînements d’accords et leur fit trouver des harmonisations 174 inédites4. » Et selon Arnold Schoenberg (1874-1951), l’interdiction des quintes a toujours semblé posséder quelque chose d’authentique qui a simplement été faussement interprété, soit une certaine peur de la consonance qui a pu pousser les compositeurs des époques antérieures à la nôtre à intégrer dans leurs œuvres ces consonances éloignées que sont les dissonances5. Ainsi, les théoriciens ne recherchent pas tant une sonorité « agréable » qu’une sonorité au « style pur ». Cette recherche de sonorité « agréable » n’est donc qu’un prétexte pour inciter les compositeurs à aller plus loin, prétexte qui au bout du compte a peu de chose à voir avec le concept de « beauté ». De leur côté, les compositeurs réagissent avec leur sensibilité et leur oreille, qui leur commandent l’utilisation de quintes parallèles comme moyen efficace d’enrichir la texture de leurs œuvres, ou parfois comme moyen de créer intentionnellement un effet de « son mauvais » (ou de son « différent », par opposition au son « habituel ») qui n’est pas considéré dans la théorie du style rigoureux.

Certains en trouvent même la sonorité agréable. Nous avons déjà cité Kœchlin qui leur donne raison en trouvant la sonorité des quintes excellente6, et Matthew Shirlaw est du même avis, affirmant que le répertoire moderne donne la preuve que les quintes parallèles sont souvent remarquablement efficaces et parfois même charmantes7.

L’impact de l’émancipation des règles ne s’applique pas seulement à la règle des quintes parallèles proprement dite, mais également aux règles de conduite des voix, et d’indépendance des voix plus particulièrement. La multiplication des parallélismes d’accords et l’émancipation de la dissonance amènent une nouvelle perception de l’harmonie, réinventent les règles. Le parallélisme n’est plus une faute, les dissonances ne

4 Charles Kœchlin, Traité de l’harmonie, vol. 1 (Paris : Eschig, 1927-1930), 14. 5 Arnold Schoenberg, Traité d’harmonie, traduit de l’allemand et présenté par Gérad Gubish (Paris : J.-C. Lattès, 1983), 99. 6 Kœchlin, Traité de l’harmonie, vol. 1, 14. 7 Matthew Shirlaw, « Aesthetic – and Consecutive Fifths », Music Review 10 (1949): 89. 175 sont plus résolues systématiquement. L’utilisation des quintes parallèles n’en est pas la cause directe, mais elle s’inscrit dans la démarche globale. En n’accordant plus autant d’importance à la rigueur dans la conduite des voix, les compositeurs ont mis l’accent sur d’autres éléments, comme la mélodie, le rythme et les dynamiques, qui prennent une importance nouvelle au détriment de l’harmonie. En effet, les compositeurs ne recherchant plus autant à complexifier l’harmonie et à inventer de nouveaux accords ou de nouveaux enchaînements, ils sont entraînés à développer les autres paramètres. Il ne faudrait pas trop généraliser en parlant de cause directe des quintes parallèles sur le langage musical, mais nous pouvons dire que l’utilisation du parallélisme et des quintes parallèles est concomitant aux changements harmoniques de cette époque et que son impact, sans être extraordinaire, est bien réel.

Finalement, l’enrichissement de la texture créée par le parallélisme a contribué à rehausser le rôle du piano comme alternative à l’orchestre. Les quintes rendant possible l’obtention d’un accroissement de texture sans faire appel à de grands moyens, elles ont en quelque sorte démocratisé la pratique de l’instrument. Elles permettent surtout de mettre en valeur l’étendue des possibilités de l’instrument et sa polyvalence. Il existe à cette époque une certaine rivalité entre le piano et l’orchestre, et les nombreuses transcriptions d’œuvres de l’un vers l’autre, notamment chez Ravel et Chabrier, nous montrent bien les liens qui les unissent, et l’influence qu’ils peuvent avoir l’un sur l’autre. Il y aurait ici matière à plusieurs recherches sous-jacentes à notre sujet principal. Par exemple, l’utilisation des quintes parallèles pourrait être étudiée dans le cadre d’une recherche sur la différence entre les versions pour piano et pour orchestre d’une même œuvre, dans le cas où les questions de texture pourraient s’y prêter. Mentionnons aussi l’utilisation de la pédale au piano, souvent laissée à la discrétion de l’interprète ou indiquée de façon sommaire par le 176 compositeur, qui peut contribuer à créer une texture analogue à celle de l’orchestre8. Il pourrait être intéressant de se demander si les compositeurs n’ont pas vu, dans l’effet de résonance, un moyen de camoufler les quintes parallèles (à l’instar des mixtures de l’orgue), ou si la résonance ne crée justement pas davantage de quintes parallèles (ou d’effet de quintes parallèles) à l’audition. Il pourrait de même être intéressant de se pencher sur le rôle des quintes parallèles dans les pièces orchestrales ayant une grande densité de texture, ou de vérifier si les conclusions de ce mémoire pourraient s’appliquer à un autre media, par exemple, la musique pour chœur, où la conduite individuelle de chacune des voix est un élément plus préoccupant que dans le cas de la musique de piano, mais où il est raisonnable de croire que les préoccupations de texture et de sonorité ne sont pas moins présentes.

8 Voir Roy Howat, « Orchestral Thinking and the Pedals », dans The Art of French Piano Music. Debussy, Ravel, Fauré, Chabrier, 279-293 (New Haven : Yale University Press, 2009).

Annexe 1 Traités d’harmonie, de contrepoint et de composition étudiés dans la recherche

Les traités sont présentés par ordre chronologique de parution en France. Les lieux de publication ont été omis pour alléger la présentation.

Auteur Titre du traité Adresse bibliographique Charles-Simon Catel (1773-1830) Traité d’harmonie adoptée par le Conservatoire pour Janet et Cotelle, 1802. servir à l’étude dans cet établissement Anton Reicha (1770-1836) Cours de composition musicale : ou, Traité complet et Gambaro, 1818. raisonné d’harmonie pratique Victor Derode (1797-1867) Introduction à l’étude de l’harmonie ou Exposition Treuttel et Wurtz, 1828. d’une nouvelle théorie de cette science Mathurin Auguste Balthasar Traité théorique et pratique de composition musicale, 2 vol. Schonenberger, 1844. Barbereau (1799-1879) vol. 1 Nanine et Émile Chevé (1804-1864) Méthode élémentaire d’harmonie, vol. 1 2 vol. Chez les auteurs, 1856. François Bazin (1816-1878) Cours d’harmonie théorique et pratique 9e éd. Lemoine, 1857. François Auguste Gevaert (1828- Méthode d’harmonie et d’accompagnement, contenant 2e éd. Cranz, 1857. 1908) tout ce qui est nécessaire pour acquérir en peu de temps et sans le secours d’un maître, une connaissance théorique et pratique de l’harmonie et de la basse chiffrée, par Albert Xennig [pseudo] Napoléon Henri Reber (1807-1880) Traité d’harmonie Gallet et fils, 1949 (1862). Luigi Cherubini (1760-1842) Theorie des Contrapunktes und der Fuge / Cours de Kistner (1835); Paris : Schlesinger, 1864. contre-point et de fugue François-Joseph Fétis (1784-1871) Traité complet de la théorie et de la pratique de 9e éd. Brandus et Dufour, 1867. l’harmonie, contenant la doctrine de la science et de l’art Traité du contrepoint et de la fugue Otoo Zeller Verlag, 1972 (1825). Marie Augustin Savard (1814-1881) Cours complet d’harmonie théorique et pratique, vol. 1 2 vol. 3e éd. Girod, 1868. Paul Wachs (1851-1915) Petit traité pratique de contrepoint et de fugue Hamelle, 1877. Émile Durand (1830-1903) Traité complet d’harmonie théorique et pratique, vol. 1 3 vol. Leduc, 1882. 178

Auteur Titre du traité Adresse bibliographique Salomon Jadassohn (1831-1902) Traité de contrepoint simple, double, triple et Traduit de l’allemand par Mathieu Jodin. 3e éd. quadruple (1883). Breitkopf & Haertel, 1896. Albert-Joseph Vivier (1816-1903) Traité d’harmonie, théorique, pratique, vocale et Lumay, 1890. instrumentale, contenant les principes fondamentaux au moyen desquels on découvre l’origine de tous les accords et les lois de succession qui les régissent Bernardin Rahn (1824-?) Méthode Rahn ou l’harmonie popularisée : méthode Chez l’auteur, 1895. entièrement nouvelle par sa conception, le fond et la forme de ses procédés Hugo Riemann (1849-1919) Manuel de l’harmonie Traduit de la 3e édition allemande (1897) par Calvocoressi. Breitkopf & Härtel, 1902. Émile Pierre Ratez (1851-1934) Traité d’harmonie théorique et pratique Leduc, 1908. Albert Lavignac (1846-1916) Cours d’harmonie, théorique et pratique Lemoine, 1909. Anselme Vinée (1847-1921) Principes du Système musical et de l’Harmonie Hamelle, 1909. théorique et appliquée Nikolaï Andreyevitch Rimski- Traité d’harmonie théorique et pratique Traduit de la 3e édition russe (1893) par Félix Korsakov (1844-1908) Dorfmann. Leduc, 1910. Ernst Friedrich Richter (1808-1879) Traité d’harmonie théorique et pratique Traduit de l’allemand par Gustave Sandré. 9e éd. Breitkopf & Haertel, 1911. René Lenormand (1846-1932) Étude sur l’harmonie moderne Le monde musical, 1912. Jacques Durand (1865-1928) Éléments d’harmonie à l’usage des débutants : suivis Durand, 1919. d’exemples tirés d’œuvres anciennes et modernes Paul Gilson (1865-1942) Traité d’harmonie : en trois volumes Cranz, 1919-1926. Théodore Dubois (1837-1924) Traité d’harmonie théorique et pratique Heugel, 1921. Charles Kœchlin (1867-1950) Traité de l’harmonie, 3 vol. Eschig, 1927-1930. Précis des règles du contrepoint : avec des exemples Heugel, 2000 (1927). (séries complètes) à 2, 3 et 4 parties George Caussade (1873-1936) Techniques de l’harmonie, vol. 1 2 vol. Lemoine, 1931. Marcel Dupré (1886-1971) Cours de contrepoint Leduc, 1938.

179

Annexe 2 Liste des œuvres consultées contenant des quintes parallèles

La colonne « Date » correspond à la date (ou l’intervalle) de composition, ou, le cas échéant, l’année de la première publication de l’œuvre. On y a ajouté la date de révision lorsqu’applicable. Les lieux de publications ont été retirés de l’adresse bibliographique afin d’alléger la présentation. Les entrées ayant la mention (IMSLP) ont été consultées à partir du site International Music Score Library Project, sous la direction d’Edward W. Guo, (consulté entre 15 juin 2009 et le 15 août 2011).

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Alain, Jehan (1911-1940) Togo, AWV 3 1929 L’œuvre de piano, vol. 2. Leduc, 1944. Ecce ancilla Domini, AWV 4 1929 L’œuvre de piano, vol. 2. Leduc, 1944. Étude sur un thème de quatre notes, AWV 6 1929 L’œuvre de piano, vol. 3. Leduc, 1944. Étude sur les double notes, AWV 15 1930 L’œuvre de piano, vol. 2. Leduc, 1944. Petite rhapsodie, AWV 17 1931 L’œuvre de piano, vol. 3. Leduc, 1944. Heureusement, la bonne fée sa marraine y mit bon 1931 L’œuvre de piano, vol. 1. Leduc, 1944. ordre, AWV 23 Mythologies japonaises : « choral et variations », 1932 L’œuvre de piano, vol. 1. Leduc, 1944. AWV 28 Un cercle d'argent, AWV 31 (Trois minutes) 1932 L’œuvre de piano, vol. 1. Leduc, 1944. Romance, AWV 34 (Trois minutes) 1932 L’œuvre de piano, vol. 1. Leduc, 1944. Histoire d'un homme qui joue la trompette dans la 1935 L’œuvre de piano, vol. 2. Leduc, 1944. forêt vierge, AWV 69 Prélude, AWV 88 1936 L’œuvre de piano, vol. 2. Leduc, 1944. Tarass boulba, AWV 90 1936 L’œuvre de piano, vol. 3. Leduc, 1944. Thème varié 1944 L’œuvre de piano, vol. 2. Leduc, 1944. Aubert, Louis (1877-1968) Romance, op. 2 1897 Durand, [1912] Lutins, op. 11 1903 Durand, 1900. Sillages, op. 27 1908-13 Durand, 1913 n° 1 : « Sur le rivage » n° 2 : « Socorry » n° 3 : « Dans la nuit » 180

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Auric, George (1899-1983) Gaspar et Zoé où [sic] L’après-midi dans un parc 1914 W. Hansen Musik-Forlag, 1927. Auric, George (1899-1983) Prélude (Album des Six) 1919 Album des Six : pour piano. Eschig, 1970. Trois pastorales 1919-20 Sirène musicale, 1920. n° 1 : « Vif et rude » n° 2 : « Modérément animé et dans un sentiment très calme » n° 3 : « Très vif et très net » Sonatine 1922 Rouart Lerolle, et cie, 1923. n° 1 : « Allegro » n° 2 : « Andante » n° 3 : « Finale : Presto » Trois impromptus 1940 Eschig, 1970. n° 1 : « Impromptu en ut majeur » n° 2 : « Impromptu en fa majeur » n° 3 : « Impromptu en ré majeur » Neuf pièces brèves 1941 Eschig, 1970. n° 1 : « Réveil » n° 2 : « Romance sans paroles » n° 3 : « Valse » n° 6 : « Sicilienne » Bonis, Mel (1858-1937) Phoebé, op. 30 1897 Trois pièces pour piano. Alphonse Leduc, (1re éd.) 1909. (IMSLP) Barcarolle-étude, op. 43 1899 Œuvres pour piano, vol. 4. Furore Verlag, (1re éd.) 2003. Prélude en la bémol majeur, op. 51 1901 Œuvres pour piano, vol. 4. Furore Verlag, (1re éd.) 2003. Bourrée, op. 62-1 1904 Pavane, Sarabande, Bourrée. Demets, (1re éd.) 1904-1909. (IMSLP) Barcarolle en mi bémol, op. 71 1905 Œuvres pour piano, vol. 4. Furore Verlag, (1re éd.) 2003. Pavane, op. 81-1 1909 Pavane, Sarabande, Bourrée. Demets, (1re éd.) 1904-1909. (IMSLP) 181

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Bonis, Mel (1858-1937) Sarabande, op. 82-1 1909 Pavane, Sarabande, Bourrée. Demets, (1re éd.) 1904-1909. (IMSLP) Salomé, op. 100a 1909 Trois pièces pour piano. Leduc, 1909. (1re éd.) (IMSLP) Ophélie, op. 165 1909 Œuvres pour piano, vol. 1. Furore Verlag, (1re éd.) 2003. Viviane, op. 8 1909 Œuvres pour piano, vol. 1. Furore Verlag, (1re éd.) 2003. La cathédrale blessée, op. 107 1915 Œuvres pour piano, vol. 4. Furore Verlag, 2003. Mélisande, op. 109 1922 Cinq pièces pour piano. Leduc, 1925. (1re éd.) (IMSLP) Étude de concert (en sol bémol majeur), op. 136 1927 Œuvres pour piano, vol. 4. Furore Verlag, 2003. Sevilliana, op. 125 1928 Eschig, 1928. (IMSLP) (1re éd.) Boulanger, Lili (1893-1918) Trois morceaux pour piano 1914 Schirmer, 1918. Réimpression (réédition), n° 1 : « D’un vieux jardin » 1979. (IMSLP) n° 2 : « D’un jardin clair » n° 3 : « Cortège » Casadesus, Robert (1899-1972) 24 préludes, op. 5 : « 1er cahier » 1924 Eschig, 1925. n° 1 : « Léger et fantasque » n° 2 : « Triste et doux. Lent (dans le style d’une berceuse populaire » n° 3 : « Assez lent mais doux et allant – Balancé » n° 5 : (Sur le nom de Ronsard en l’honneur de son 4e centenaire) « Lent et recueilli » n° 6 : « Très léger et assez vif » 182

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Casadesus, Robert (1899-1972) 24 préludes, op. 5 : « 2e cahier » 1924 Eschig, 1925. n° 7 : « Très lent (porté avec profondeur) » n° 8 : « Simplement » n° 10 : « Énergique et sauvage (Assez vite) » n° 11 : « Très lent gravement expressif » n° 12 : « Vif doux et fluide » 24 préludes, op. 5 : « 3e cahier » 1924 Eschig, 1925. n° 13 : « Allant et simple, doux et tendre » n° 14 : « Mouvement de valse (assez animé) n° 15 : « Pas trop vite. Nerveusement rythmé (dans le goût espagnol) » n° 16 : « Pas vite _ Élégamment_Intime » n° 18: « Monotone et lointain » 24 préludes, op. 5 : « 4e cahier » 1924 Eschig, 1925. n° 19 : « Allant, simple et balancé » n° 20 : « Lent et grave » n° 21 : « Joyeux et avec entrain (vif) » n° 22 : « Naïvement (dans le style ancien) » n° 23 : « Rude et bien scandé (mouvement de bourrée) » n° 24 : « Doux et tranquille » Casella, Alfredo (1883-1947) Ricercare sul nome B.A.C.H., op. 52 1932 Roussel, Albert, dir. Hommage à Bach. Revue musicale, 1932. Chabrier, Emmanuel (1841-1894) Dix pièces pittoresques 1880-81 Enoch, n.d. (v. 1881). Probablement n° 1 : « Paysage » scannée d’une réimpression aux éditions n° 2 : « Mélancolie » Dover. (IMSLP) n° 3 : « Tourbillon » n° 5 : « Mauresque » n° 6 : « Idylle » n° 7 : « Danse villageoise » n° 9 : « Menuet pompeux » 183

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Chabrier, Emmanuel (1841-1894) Aubade 1883 Enoch, n.d. (1897). Probablement scannée d’une réimpression aux éditions Dover. (IMSLP) Habanera 1885 Enoch, n.d. (1885). 1re éd. Probablement scannée d’une réimpression aux éditions Dover. (IMSLP) Caprice [1889?] Enoch, n.d. (1897). Probablement scannée d’une réimpression aux éditions Dover. (IMSLP) Feuillet d’album [1889?] Enoch, n.d. (1897). Probablement scannée d’une réimpression aux éditions Dover. (IMSLP) Chaminade, Cécile (1857-1944) Sonata, op. 21 1881 Enoch, 1895. (IMSLP) n° 1 : « Allegro appassionato » n° 2 : « Andante » n° 3 : « Allegro » Callirhoë, op. 37, n° 3 : « Pas des écharpes (Scarf 1888 Smith, Gail, dir. Great Women Dance) » Composers. Creative Keyboard Publications, 1996. Pièce dans le style ancien, op. 74 1893 Enoch, 1893. Six romances sans paroles, op. 76 1894 Masters Music Publications, 1980. n° 4 : « Églogue » n° 5 : « Chanson bretonne » n° 6 : « Méditation » Danse créole, op. 94, n° 1 1898 Enoch, 1898. (IMSLP) Caprice humoristique, op. 113 1904 Masters Music Publications, 2007. Les noces d’or, fantaisie pour piano (d’après 1907 John Church Co, 1908. l’op. 20) Souvenirs lointains, op. 111 1911 Masters Music Publications, 2007. Caprice-impromptu, op. 153 1914 Enoch, 1914. Écossaise, op. 151 1914 Enoch, 1914. Interlude, op. 152 1914 Enoch, 1914. 184

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Chausson, Ernest (1855-1899) Paysage, op. 38 1895 Piano Music : A Collection of Piano Music. Salabert, 1978. Quelques danses, op. 26 1896 Piano Music : A Collection of Piano n° 2 : « Sarabande » Music. Salabert, 1978. n° 3 : « Pavane » n° 4 : « Forlane » Chrétien, Hedwige (1859-1944) Valse berceuse 1905 Leduc, 1905. (IMSLP) Les lutins Avant Ernest Lacombe, (avant 1907). (IMSLP) 1907 Sonatine, n° 1 : « Pastorale » 1921 Sonatines pour piano. Evette & Schaeffer, n° 4 : « Final » 1921. (IMSLP) Sonatine, n° 2 (« Dès l’aurore ») 1921 Sonatines pour piano. Evette & Schaeffer, n° 1 : « Allegretto » 1921. (IMSLP) n° 2 : « Andante » n° 4 : « Trio » n° 5 : « Final » Sonatine, n° 3 (« Joyeuse nouvelle ») 1921 Sonatines pour piano. Evette & Schaeffer, n° 2 : « Andante espressivo » 1921. (IMSLP) Debussy, Claude Achille (1862- Deux arabesques 1888 Durand et Schoenewerk, n.d. (1891). 1918) n° 1 Réimpression, Dover Publications, 1974. n° 2 (IMSLP) Ballade (1re éd. : Ballade slave) v. 1890 Fromont, 1903. 2e éd. Réimpression, (1re éd.), Dover Publications, 1974. (IMSLP) 1903 (2e éd.) Rêverie v. 1890 Fromont, (1905). Réimpression, Dover Publications, 1974. (IMSLP) Suite bergamasque v. 1890, Fromont, 1905. Réimpression, n° 1 : « Prélude » rév. 1905 Publications, 1974. (IMSLP) n° 2 : « Menuet » n° 4 : « Passepied » 1 85

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Debussy, Claude Achille (1862- Danse (1re éd. : Tarentelle styrienne ) v. 1890 Fromont, 1903. 2e éd. Réimpression, 1918) (1re éd.), Dover Publications, 1974. (IMSLP) 1903 (2e éd.) Valse romantique v. 1890 Choudens, (1891). Probablement scannée d’une réimpression aux éditions Dover. (IMSLP) Pour le piano 1894- Fromont, 1901. Réimpression de la 1re éd. n° 1 : « Prélude » 1901 (IMSLP) n° 2 : « Sarabande » n° 3 : « Toccata » Images, série 1 1901-5 Durand, 1905. Réimpression, New York : n° 1 : « Reflets dans l’eau » Dover Publications, 1974. (IMSLP) n° 2 : « Hommage à Rameau » n° 3 : « Mouvement » Estampes 1903 Durand, 1903. (IMSLP) n° 1 : « Pagodes » n° 2 : « La soirée dans Grenade » n° 3 : « Jardins sous la pluie » D’un cahier d’esquisses 1903-4 Schott Frères, 1904. Réimpression, Dover Publications, 1974. (IMSLP) L’isle joyeuse 1903-4 Durand, 1904. (IMSLP) Masques 1903-4 Durand, 1904. (IMSLP) Children’s Corner 1906-8 Durand, 1908. (IMSLP) n° 1 : « Doctor Gradus ad Parnassum » n° 4 : « The Snow is Dancing » n° 5 : « The Little Shepherd » n° 6 : « Golliwogg’s Cake-Walk » Images, série 2 1907 Durand, 1908. Réimpression, Dover n° 1 : « Cloches à travers les feuilles » Publications, 1992. (IMSLP) n° 2 : « Et la lune descend sur le temple qui fut » n° 3 : « Poissons d’or » 186

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Debussy, Claude Achille (1862- Préludes, livre 1 1909-10 Durand, 1910. (IMSLP) 1918) n° 1 : « Danseuses de Delphes » n° 2 : « Voiles » n° 3 : « Le vent dans la plaine » n° 4 : « Les sons et les parfums tournent dans l’air du soir » n° 5 : « Les collines d’Anacapri » n° 6 : « Des pas sur la neige » n° 7 : « Ce qu’a vu le vent d’ouest » n° 8 : « La fille aux cheveux de lin » n° 9 : « La sérénade interrompue » n° 10 : « La cathédrale engloutie » n° 11 : « La danse de Puck » n° 12 : « Minstrels » Préludes, livre 2 1911-13 Durand, 1913. (IMSLP) n° 1 : « Brouillards » n° 2 : « Feuilles mortes » n° 3 : « La puerta del vino » n° 4 : « Les fées sont d’exquises danseuses » n° 5 : « Bruyères » n° 6 : « General Lavine – eccentric » n° 7 : « La terrasse des audiences du clair de lune » n° 8 : « Ondine » n° 9 : « Hommage à S. Pickwick Esq. P. P. M. P. C. » n° 10 : « Canope » n° 12 : « Feux d’artifice » Berceuse héroïque 1914 Durand, 1915. Réimpression, Dover Publications, 1992. (IMSLP) Decaux, Abel (1869-1941) Clair de lune, n° 1 : « Minuit passe » 1900 Clairs de lune. Chapelier, 1913. (IMSLP) Clair de lune, n° 3 : « Le cimetière » 1907 Clairs de lune. Chapelier, 1913. (IMSLP) 187

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Delannoy, Marcel (1898-1962) Dîner sur l’eau 1937 À l’exposition : illustrations musicales. Deiss, 1937. D’Indy, Vincent (1851-1931) Petite sonate dans la forme classique, op. 9 1880 Hamelle, n.d. (1888). (IMSLP) n° 1 : « Allegro energico » n° 2 : « Andante espressivo » n° 4 : « Finale » Schumanniana, op. 30 (Trois chants sans paroles) 1887 Hamelle, n.d. (ca.1890). (IMSLP) n° 1 : « Modéré, sans lenteur » n° 2 : « Assez vite » Tableaux de voyage, op. 33 1889 Leduc, 1920. n° 3 : « Pâturage » n° 4 : « Lac Vert » n° 5 : « Le Glas » n° 7 : « Fête de Village » n° 9 : « Départ matinal » n° 11 : « Beuron » n° 12 : « La Pluie » n° 13 : « Rêve » Sonate en mi majeur, op. 63 1907 Durand, 1908. (IMSLP) n° 1 : « Modéré » n° 2 : « Très animé » n° 3 : « Modéré » Douze petites pièces faciles dans le style classique 1908-15 Henn, 1919. de la fin du XVIIIe siècle, op. 69 n° 11 : « Modéré » n° 12 : « Allegro non troppo » Menuet sur le nom d’Haydn, op. 65 1909 Durand, 1910. (IMSLP) Fantaisie sur un vieil air de ronde française, op. 99 1930 Heugel, 1932. (IMSLP) Dukas, Paul (1865-1935) Prélude élégiaque sur le nom de Haydn 1909 Durand, 1910. 188

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Dupont, Gabriel (1879-1914) Les heures dolentes 1905 Heugel, 1905. (IMSPL) n° 1 : « Epigraphe » n° 2 : « Le soir tombe dans la chambre » n° 3 : « Du soleil au jardin » n° 4 : « Chanson de la pluie » n° 5 : « Après-midi de dimanche » n° 7 : « Une amie est venue avec des fleurs » n° 8 : « La chanson du vent » n° 9 : « Au coin du feu » n° 10 : « Coquetteries » n° 11 : « La mort rôde » n° 12 : « Des enfants jouent dans le jardin » n° 13 : « Nuit blanche – Hallucinations » n° 14 : « Calme » La maison dans les dunes 1909 Heugel, 1910. (IMSLP) n° 1 : « Dans les dunes par un clair matin » n° 2 : « Voiles sur l’eau » n° 3 : « La maison du souvenir » n° 4 : « Mon frère le Vent et ma sœur la Pluie » « Journée de février dans une petite ville » n° 5 : « Mélancolie du bonheur » « Dimanche de Pâques, au large… » n° 6 : « Le soleil se joue dans les vagues » n° 7 : « Le soir dans les pins » n° 8 : « Le bruissement de la mer la nuit » n° 9 : « Clair d’étoiles » n° 10 : « Houles » Durey, Louis (1888-1979) Romance sans paroles, op. 21 1919 Album des Six. Eschig, 1920. Dix inventions, op. 41a (d’après l’op. 35) 1924-28 Éditions musicales transatlantiques, 1980. n° 4 : « Lent et grave » n° 7 : « Modéré » n° 9 : « Modéré (mélancolique) » n° 10 : « Très animé » 189

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Enesco, Georges (1881-1955) Sonata, op. 24, n° 3 1935 Salabert, 1984. n° 1 : « Vivace con brio » n° 2 : « Andantino cantabile » n° 3 : « Allegro con spirito » Fauré, Gabriel (1845-1924) Huit pièces brèves, op. 84 1869- Hamelle, n.d. (1903). (IMSLP) n° 3 : « Fugue » 1902 n° 4 : « Adagietto » n° 5 : « Improvisation » n° 8 : « Nocturne » Impromptu, op. 25, n° 1 1881 Hamelle, n.d. (ca.1880). (IMSLP) Nocturne, op. 33 1881 Hamelle, n.d. (ca. 1883). (IMSLP) n° 1 : « Lento » n° 2 : « Andante espressivo » n° 3 : « Andante con moto » Barcarolle, op. 44, n° 4 1886 Hamelle, n.d. (1886). Réimpression, Dover Publications, 1994. (IMSLP) Valse-caprice, op. 59, n° 3 1887-93 Hamelle, n.d. (1893). (IMSLP) Barcarolle, op. 104/2, n° 10 1913 Durand, 1913. Réimpression, Dover Publications, 1994. (IMSLP) Nocturne, op. 107, n° 12 1915 Durand, 1916. (IMSLP) Barcarolle, op. 116, n° 13 1921 Durand, 1921. (IMSLP) Nocturne, op. 119, n° 13 1921 Durand, 1922. (IMSLP) Ferroud, Pierre Octave (1900- Au parc Monceau 1921 Rouart, Lerolle et Cie, 1925. (IMSLP) 1936) n° 1 : « Chat jouant avec des moineaux » n° 2 : « Sur le banc » n° 3 : « Nonchalante » n° 4 : « Bambins » Sonatine 1928 Durand, 1928. (IMSLP) n° 1 : « Allegro molto e risoluto » n° 3 : « Vivace » The Bacchante Blues (Treize danses) Inconnue Treize danses. Eschig, [197?]. Françaix, Jean (1912-1997) Scherzo 1932 Schott, Eschig, 1935. 190

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Françaix, Jean (1912-1997) Cinq portraits de jeunes filles 1936 Eschig, 1937. n° 1 : « La Capricieuse » n° 2 : « La Tendre » n° 4 : « La Pensive » n° 5 : « La Moderne » Franck, César (1822-1890) Prélude, choral et fugue, op. 21 1884 The Musicians’ Library. Ditson, 1922. Réimpression, Dover Publications, 1976. (IMSLP) Prélude, aria et final, op. 23 1887 The Musicians’ Library. Ditson, 1922. Réimpression, Dover Publications, 1976. (IMSLP) Grovlez, Gabriel (1879-1944) Caprice-impromptu 1902 Concours musical du « Figaro » (1902). Album moderne : pièces pour piano : sélection des œuvres primées. Durand, [1902]. Deux études d’exécution transcendante 1916-19 Durand, 1919. n° 1 : « Naïades » n° 2 : « Kobolds » Sarabande 1921 Nouvelle revue française, 1921. Valse-caprice 1938 Eschig, 1938. Hahn, Raynaldo (1874-1947) Portraits de peintres : pièces pour piano d’après les 1894 Heugel, Leduc, 1896. poésies de Marcel Proust n° 1 : « Albert Cuyp » n° 3 : « Anton van Dyck » n° 4 : « Antoine Watteau » 191

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Hahn, Raynaldo (1874-1947) Premières valses v. 1925 Heugel, 1925. n° 1 : « Avec élégance » n° 2 : « Allegretto con moto » n° 4 : « Valse noble » n° 5 : « Pas vite, simplement (à l’Ombre rêveuse de Chopin) n° 6 : « Assez vite » n° 7 : « Berceuse » n° 10 : « Sans rigueur » Hoérée, Arthur (1897-1986) Fanfare (Hommage à Albert Roussel) v. 1929 Hommage à Albert Roussel : deux mélodies et six pièces de piano spécialement composées à son intention. Revue musicale, 1929. Honegger, Arthur (1892-1955) Trois pièces 1915 Salabert, 1973. n° 2 : « Hommage à Ravel » Sept pièces brèves 1919-20 Éditions de la Sirène, 1921. (IMSLP) n° 2 : « Vif » n° 3 : « Très lent » n° 5 : « Lent » n° 6 : « Rythmique » n° 7 : « Violent » Sarabande (Album des Six) 1920 Album des Six. Eschig, 1970. Hommage à Albert Roussel 1928 Hommage à Albert Roussel : deux mélodies et six pièces de piano spécialement composées à son intention. Revue musicale, 1929. Prélude, arioso et fughette sur le nom de BACH 1932 Hommage à Bach. Revue musicale, 1932. Hubeau, Jean (1917-1992) Variations pour piano 1933 Durand, 1933. Huré, Jean (1877-1930) Sonata, n° 1 1907 Mathot, 1920. (IMSLP) Ibert, Jacques (1890-1962) Pièce romantique 1916 Leduc, 1999. Histoires, n° 2 : « Le petit âne blanc… » 1922 Leduc, 1922. 192

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Ibert, Jacques (1890-1962) Les rencontres… petite suite en forme de ballet 1924 Leduc, 1924. n° 2 : « Les créoles » n° 3 : « Les mignardes » n° 4 : « Les bergères » n° 5 : « Les bavardes » Française «Guitare» pour le piano 1926 Leduc, 1928. Toccata sur le nom d'Albert Roussel 1929 Hommage à Albert Roussel : deux mélodies et six pièces de piano spécialement composées à son intention. Revue musicale, 1929. Kœchlin, Charles (1867-1950) Cinq sonatines, op. 59 : « Première sonatine » 1915-16 Mathot, 1918. Réédition, Salabert, (après n° 1 : « Allegro (non troppo) 1950). (IMSLP) n° 2 : « Andante (Con moto) » n° 3 : « Allegro (Moderato) » n° 4 : « Final (Allegro con moto, scherzando) » Cinq sonatines, op. 59 : « Seconde sonatine » 1915-16 Mathot, 1918. Réédition, Salabert, (après n° 1 : « Molto moderato » 1950). (IMSLP) n° 2 : « Sicilienne » n° 3 : « Andante » Cinq sonatines, op. 59 : « Troisième sonatine » 1915-16 Mathot, 1918. Réédition, Salabert, (après n° 1 : « Allegro moderato » 1950). (IMSLP) n° 2 : « Assez animé » n° 3 : « Allegretto (assez tranquille) » n° 4 : « Final » Cinq sonatines, op. 59 : « Quatrième sonatine » 1915-16 Mathot, 1918. Réédition, Salabert, (après n° 1 : « Menuet » 1950). (IMSLP) n° 2 : « Andante (con moto) » n° 3 : « Intermezzo » n° 4 : « Final » 193

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Kœchlin, Charles (1867-1950) Cinq sonatines, op. 59 : « Cinquième sonatine » 1915-16 Mathot, 1918. Réédition, Salabert, (après n° 1 : « Allegro moderato (pas trop vite) » 1950). (IMSLP) n° 2 : « Andante » n° 3 : « Petite fugue » n° 4 : « Final » Paysages et marines, op. 63 1915-16 Mathot, 1918. (IMSLP) n° 1 : « Sur la falaise » n° 2 : « Matin calme » n° 3 : « Promenade vers la mer » n° 4 : « Le chant du chevrier » n° 5 : « Soir d’été » n° 6 : « Ceux qui s’en vont pêcher au large, dans la nuit » n° 7 : « Soir d’angoisses » n° 8 : « La chanson des pommiers en fleurs » n° 9 : « Paysage d’octobre » n° 10 : « Chant de pêcheurs » n° 11 : « Dans les grands champs » n° 12 : « Poème virgilien » 194

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Kœchlin, Charles (1867-1950) Les heures persanes, op. 65 (posthume) 1913-19 Eschig, 1987. n° 1 : « Sieste, avant le départ » n° 2 : « La caravane » n° 3 : « L’escalade obscure » n° 4 : « Matin frais dans la haute vallée » n° 5 : « En vue de la ville » n° 6 : « À travers les rues » n° 7 : « Chant du soir » n° 8 : « Clair de lune sur les terrasses » n° 9 : « Aubade » n° 10 : « Roses au soleil de midi » n° 11 : « À l’ombre, près de la fontaine de marbre » n° 12 : « Arabesques » n° 13 : « Les Collines, au coucher du soleil » n° 14 : « Le conteur » n° 15 : « La paix du soir au cimetière » n° 16 : « Derviches dans la nuit » V (Hommage à Fauré) 1922 La revue musicale, 1922. (IMSLP) Ladmirault, Paul (1877-1944) Hommage à Fauré 1922 La revue musicale, 1922. (IMSLP) Laparra, Raoul (1876-1943) Rythmes espagnols 1914 Enoch, 1913. (IMSLP) n° 2 : « Tientos » n° 3 : D. « Abalorios » n° 4 : « Caleseras » n° 5 : « Rueda » n° 7 : « Paseo » Lekeu, Guillaume (1870-1894) Sonata 1891 Baudoux, n.d. (1899). (IMSLP) n° 1 : « Très modéré » n° 2 n° 3 n° 4 : « Dans un mouvement plus lent » n° 5 : « noire=noire du Prélude » 195

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Lekeu, Guillaume (1870-1894) Trois pièces 1892 Veuve Léopold Muraille, n.d. (1892). n° 1 : « Chansonnette sans paroles » Réimpression, CeBeDem, 2003. (IMSLP) n° 3 : « Danse joyeuse » Magnard, Albéric (1865-1914) Promenades, op. 7 1893 Durand, n.d. (ca.1894). (IMSLP) n° 1 : « Envoi » n° 2 : « Bois de Boulogne » n° 3 : « Villebon » n° 4 : « Saint Cloud » n° 5 : « Saint Germain » n° 6 : « Trianon » n° 7 : « Rambouillet » Martinu, Bohuslav (1890-1959) Le train hanté 1937 Parc d’attraction : Expo 1937. Eschig, 1938. Messager, André (1853-1929) Menuet, op. 12 1889 Lemoine, n.d. (IMSLP) Mazurka, op. 13 1889 Lemoine, n.d. (IMSLP) Mihalovici, Marcel (1898-1985) Chindia Danse paysanne roumaine 1929 Treize danses. Eschig, [197?]. Milhaud, Darius (1892-1974) Suite, op. 8 1913 Durand, 1914. n° 1 : « Lent » n° 2 : « Vif et clair » n° 3 : « Lourd et rythmé » n° 4 : « Lent et grave » n° 5 : « Modéré animé » Mazurka (Album des Six) 1914 Album des Six : pour piano. Eschig, 1970. Printemps, livre 1, op. 25 1915-19 Eschig, 1920. n° 1 : « Modéré » n° 2 : « Souple » n° 3 : « Doucement » Printemps, livre 2, op. 66 1920 Eschig, 1920. n° 6 : « Calme » 196

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Milhaud, Darius (1892-1974) Saudades do Brasil, op. 67, livre 1 1920-21 Eschig, 1921. n° 1 : « Sorocaba » n° 3 : « Leme » n° 4 : « Copacabana » n° 5 : « Ipanema » n° 6 : « Gavea » Saudades do Brasil, op. 67, livre 2 1920-21 Eschig, 1921. n° 7 : « Corcovado » n° 8 : « Tijuca » n° 9 : « Sumare » n° 11 : « Laranjeiras » n° 12 : « Paysandu » Caramel Mou, op. 68 1920 Eschig, 1921. Rag caprices, op. 78 1922 Masters of Today : Famous Pieces by n° 1 : « Sec et musclé » Modern Masters for Piano Solo. Associated Music Publishers, 1940. Rag caprices, op. 78 1923 Hinson, Maurice. The Century of n° 2 : « Romance » Invention : Piano Music of the 20th century. European American Music Corp, 1996. L’album de Madame Bovary, op. 128b 1933 Enoch, 1934. n° 3 : « Tristesse » n° 4 : « Chanson » n° 5 : « Rêverie » n° 6 : « Le Tilbury » n° 7 : « Romance » n° 8 : « Jeu » n° 10 : « La Saint Hubert » n° 11 : « Soupir » n° 12 : « Dans les bois » n° 13 : « Promenade » n° 14 : « Pensée » n° 16 : « Barcarolle » 197

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Milhaud, Darius (1892-1974) Promenade (Le tour de l’exposition) 1933, À l’exposition : illustrations musicales. rév. 1937 Deiss, 1937. Choral (Hommage à Paderewski) 1941 Lawton, Dorothy, dir. Hommage to Paderewski : Piano Solo. Boosey & Hawkes, 1942. Oswald, Henri (1852-1931) Il neige!… (concours Figaro 1902) 1902 Concours musical du « Figaro » (1902). Album moderne : pièces pour piano : sélection des œuvres primées. Durand, [1902]. Pierné, Gabriel (1863-1937) Quinze pièces, op. 3 1883 Leduc, n.d. (ca.1888) (IMSLP) n° 2 : « Chanson de la grand-maman » n° 5 : « Coquetterie » n° 6 : « Prélude » n° 8 : « À l’église (choral) » n° 11 : « L’escarpolette » n° 13 : « Valse » n° 14 : « Feuillet d’album » n° 15 : « Tarentelle (Souvenir de Naples) » Album pour mes petits amis, op. 14 1887 Leduc, n.d. (1890) (IMSLP) n° 1 : « Pastorale » n° 3 : « La Veillée de l’Ange Gardien » n° 4 : « Petite gavotte » n° 5 : « Chanson d’autrefois » Sérénade à Colombine, op. 32 1894 Enoch, 1895. (IMSLP) Trois pièces formant suite de concert, op. 40 1903 Hamelle, 1920. (IMSLP) n° 1 : « Préludio e fughetta » n° 2 : « Nocturne en forme de valse » n° 3 : « Étude symphonique » Variations en do mineur, op. 42 1919 Hamelle, 1919. (IMSLP) Poulenc, Francis (1899-1963) Trois pastorales, FP 5 1917 Heugel, 2004. n° 1 : « Très vite (gai et très rythmé) » n° 3 : « Vite » 198

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Poulenc, Francis (1899-1963) Trois mouvements perpétuels, FP 14 1918 Chester Music, 1919. n° 3 : « Alerte » Valse, FP 17 (Album des Six) 1919 Album des Six. Eschig, 1970. Suite, FP 19 1920, Chester Music, 1970. n° 1 : « Presto » rév. 1926 n° 2 : « Andante » Cinq Impromptus, FP 21 1920, Five Impromptus for Piano. Chester n° 1 : « Très agité » rév. 1939 Music, 1939. (n° 1 à 5) n° 2 : « Allegro vivace » Album of Six Pieces : For Piano (Medium n° 3 : « Très modéré » Difficulty). Chester Music, 1919-1940. n° 4 : « Violent » (n° 3 seulement) n° 5 : « Andante » La revue musicale 7, supplément du 1er mai 1921. (n° 5 seulement) Promenades, FP 24 1921 Album of Six Pieces : For Piano (Medium n° 1 : « A pied » Difficulty). Chester Music, 1919-1940.

Deux novelettes, FP 47 1927-28 Chester Music, 1930. n° 1 : « Novelette en do majeur » n° 2 : « Novelette en si bémol majeur » Pièce brève sur le nom d'Albert Roussel, FP 50 1929 Hommage à Albert Roussel : deux mélodies et six pièces de piano spécialement composées à son intention. Paris : Revue musicale, 1929. Les soirées de Nazelles, FP 84 1930-36 Durand, 1937. n° 1 : « Le comble de la distinction » n° 2 : « Le cœur sur la main » n° 4 : « La suite dans les idées » n° 5 : « Le charme enjôleur » n° 6 : « Le contentement de soi » n° 7 : « Le goût du malheur » n° 8 : « L’alerte vieillesse » Valse-improvisation sur le nom de Bach, FP 62 1932 Hommage à Bach. Revue musicale, 1932. 199

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Poulenc, Francis (1899-1963) Improvisations, FP 63 Salabert, 2001. n° 1-4, 6 1932 n° 7 1933 n° 8 1934 Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80 1935 Durand, 1935. n° 1 : « Bransle de Bourgogne » n° 2 : « Pavane » n° 3 : « Petite marche militaire » n° 5 : « Bransle de Champagne » n° 6 : « Sicilienne » n° 7 : « Carillon » Ravel, Maurice (1875-1937) Pavane pour une infante défunte 1899 Demets, 1899. (IMSLP) Jeux d'eau 1901 Demets, 1902. Réimpression, Dover Publications, 1986. (IMSLP) Miroirs 1904-5 Demets, 1906. Probablement scannée n° 1 : « Noctuelles » d’une réimpression aux éditions Dover. n° 2 : « Oiseaux tristes » (IMSLP) n° 3 : « Une barque sur l'océan » n° 4 : « Alborada del gracioso » n° 5 : « La vallée des cloches » Gaspard de la nuit 1908 Durand, 1909. Probablement scannée n° 1 : « Ondine » d’une réimpression aux éditions Dover. n° 2 : « Le gibet » (IMSLP) n° 3 : « Scarbo » Valses nobles et sentimentales 1911 Durand, 1911. Réimpression, Dover n° 1 : « Modéré – très franc » Publications (IMSLP) n° 3 : « Modéré » n° 6 : « Vif » n° 7 : « Moins vif » 200

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Ravel, Maurice (1875-1937) Le tombeau de Couperin 1914-17 Durand, 1918. (IMSLP) n° 1 : « Prélude » n° 2 : « Fugue » n° 3 : « Forlane » n° 4 : « Rigaudon » n° 5 : « Menuet » n° 6 : « Toccata » Roger-Ducasse, Jean (1873-1954) Barcarolle, n° 1 1906 Durand, 1907. (IMSLP) Variations sur un choral 1914-15 Durand, 1917. (IMSLP) 5e variation : « Vite » 6e variation : « Très accusé » 8e variation : « Presque lent et très souple » 9e variation : « Vite » 10e variation : « Très lent et très soutenu » Esquisses 1917 Durand, 1918. (IMSLP) n° 1 n° 3 n° 4 Arabesque n° 1 1917 Durand, 1918. (IMSLP) Sonorités 1918 Durand, 1919. (IMSLP) Arabesque n° 2 1919 Durand, 1919. (IMSLP) Barcarolle n° 2 1920 Durand, 1920. (IMSLP) Barcarolle n° 3 1921 Durand, 1922. (IMSLP) Impromptu 1921 Durand, 1921. (IMSLP) Chant de l'aube 1921 Durand, 1921. (IMSLP) Ropartz, Joseph-Guy (1864-1955) Choral varié 1904 Rouart, Lerolle, n.d. (ca. 1920). (IMSLP) Nocturne, n° 1 1911 Dupont – Metzner, 1912. (IMSLP) Musiques au jardin 1916 Durand, 1918. (IMSLP) n° 1 : « Prélude matinal » n° 3 : « Les vieux souvenirs surgissent de l’ombre » n° 5 : « Le jardin au crépuscule » n° 6 : « Rondes et chants » 201

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Ropartz, Joseph-Guy (1864-1955) Nocturne, n° 2 1916 Durand, 1917. (IMSLP) Nocturne, n° 3 1916 Durand, 1917. (IMSLP) Un prélude dominical 1928-29 Senart, 1931. Rosenthal, Manuel (1904-2003) Valse des pêcheurs à la ligne Inconnue Treize danses. Eschig, [197?]. Roussel, Albert (1869-1937) Des heures passent, op. 1 1898 Hamelle, n.d. (ca.1900) (IMSLP) n° 2 : « Joyeuses … » n° 3 : « Tragiques … » Rustiques, op. 5 1904-6 Durand, 1906. (IMSLP) n° 1 : « Danse au bord de l’eau » n° 2 : « Promenade sentimentale en forêt » n° 3 : « Retour de fête » Sonatine, op. 16 1912 Durand, 1912. (IMSLP) n° 1 : « Modéré » n° 2 : « Très lent » L’accueil des muses [in memoriam Debussy] 1920 Durand, 1920. (IMSLP) Hommage à J. S. Bach, op. 46 1932 Hommage à Bach. Revue musicale, 1932. Trois Pièces pour piano, op. 49 1933 Durand, 1934. (IMSLP) n° 2 : « Allegro grazioso » n° 3 : « Allegro con spirito » Saint-Saëns, Camille (1835-1921) Allegro appassionato, op. 70 1884 Œuvres pour piano. Peters, 1974. Album, op. 72 1884 Durand, Schoenewerk, n.d. (1884). n° 1 : « Prélude » (IMSLP) n° 5 : « Chanson napolitaine » n° 6 : « Final » Les cloches du soir, op. 85 1889 Durand & Schoenewerk, n.d. (1889). (IMSLP) Suite, op. 90 1891 Durand, 1892. (IMSLP) n° 1 : « Prélude et fugue » n° 2 : « Menuet » n° 3 : « Gavotte » n° 4 : « Gigue » Souvenir d'Ismaïlia, op. 100 1895 Durand, 1895. Masters Music Publications, n.d. (après 1987). (IMSLP) 202

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Saint-Saëns, Camille (1835-1921) Valse langoureuse, op. 120 1903 Durand, 1903. (IMSLP) Feuillet d'album, op. 169 1921 Durand, 1921. (IMSLP) Satie, Érik (1866-1925) Fantaisie-valse 1885 Piano solo. Salabert, 1989. Trois sarabandes 1887, Rouart, Lerolle, 1911. (IMSLP) n° 1 rév. 1911 n° 2 n° 3 Trois gymnopédies 1888 Baudoux, n.d. (ca. 1896). 2e éd. n° 1 : « Lent et douloureux » Probablement scannée d’une réimpression n° 3 : « Lent et grave » aux éditions Dover. (IMSLP) Gnossienne, n° 5 1889 Piano solo. Salabert, 1989. Trois gnossiennes 1889-91 Rouart, Lerolle, 1913. Probablement n° 3 : « Lent » scannée d’une réimpression aux éditions Dover. (IMSLP) Première pensée Rose+Croix 1891 Piano solo. Salabert, 1989. Gnossienne, n° 4 1891 Piano solo. Salabert, 1989. Quatre préludes : [1892?] Rouart, Lerolle, 1929. (IMSLP) n° 2 : « Prélude d’Eginhard » n° 3 : « Premier prélude du Nazaréen » n° 4 : « Deuxième prélude du Nazaréen » Sonneries de la Rose+Croix 1892 Piano solo. Salabert, 1989. n° 1 : « Air de l’ordre » n° 2 : « Air du grand maître » n° 3 : « Air du grand penseur » Le fils des étoiles 1892, Piano solo. Salabert, 1989. « Prélude du 1er acte : La vocation » rév. 1972 « Prélude du 2e acte : L’initiation » « Prélude du 3e acte : L’incantation » 203

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Satie, Érik (1866-1925) Danses gothiques (Neuvaine pour le plus grand 1893 Rouart, Lerolle, 1929. (IMSLP) calme et la forte tranquillité de mon Âme) n° 1 : « À l’occasion d’une grande peine » n° 2 : « Dans laquelle les Pères de la Très Véritable et Très Sainte Église sont invoqués » n° 4 : « À propos de Saint Bernard et de Sainte Lucie » n° 5 : « Pour les pauvres trépassés » n° 6 : « Où il est question des injures reçues » n° 7 : « Par pitié pour les ivrognes, honteux, débauchés, imparfaits, désagréables et faussaires en tous genres » n° 8 : « En le haut honneur du vénéré Saint Michel, le gracieux Archange » n° 9 : « Après avoir obtenu la remise de ses fautes » Prélude de la Porte héroïque du ciel 1894 Rouart, Lerolle, 1912. (IMSLP) Danses de travers (avant première en forme d’Air à 1897 Piano solo. Salabert, 1989. faire fuir) Pièces froides 1897 Rouart, Lerolle, 1912. (IMSLP) n° 1 : Airs à faire fuir n° 1 : « D’une manière particulière » n° 2 : Danses de travers n° 1 : « En y regardant par deux fois » n° 2 : « Passer » n° 3 : « Encore » Caresse 1897 Piano solo. Salabert, 1989. 204

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Satie, Érik (1866-1925) Carnet d’esquisses et de croquis 1897- Piano solo. Salabert, 1989. n° 2 : « Essais » 1919 n° 3 : « Notes » n° 4 : « Notes » n° 10 : « Songeries vers ‘Jack’ » n° 11 : « Bribes » n° 12 : « Choral » Petite ouverture à danser Avant Piano solo. Salabert, 1989. 1900 Rêverie du Pauvre 1900 Piano solo. Salabert, 1989. The Dreamy Fish [1901] Piano solo. Salabert, 1989. Poudre d'or (Valse) 1901-2 Baudoux, 1902. (IMSLP) Passacaille 1906 Rouart, Lerolle, 1929. (IMSLP) Prélude en tapisserie 1906 Rouart, Lerolle, 1929. (IMSLP) Douze petits chorals 1906-8 Piano solo. Salabert, 1989. n° 1 n° 10 Musiques intimes et secrètes 1906-13 Piano solo. Salabert, 1989. n° 2 : « Froide songerie » «Nouvelles pièces froides» 1907 Piano solo. Salabert, 1989. n° 1 : « Sur un mur » n° 2 : « Sur un arbre » n° 3 : « Sur un pont » Songe-creux v. 1909 Piano solo. Salabert, 1989. Deux rêveries nocturnes 1910-11 Piano solo. Salabert, 1989. n° 1 : « Pas vite » n° 2 : « Très modérément » Les Pantins dansent 1913 Piano solo. Salabert, 1989. Le Piège de Méduse 1913 Éditions de la Vipère, 1939. Réimpression, n° 1 : « Quadrille » Salabert, 1954. (IMSLP) n° 5 : « Un peu vif » 205

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Satie, Érik (1866-1925) Sports et divertissements 1914 Piano solo. Salabert, 1989. n° 1 : « Choral inappétissant » n° 4 : « La comédie italienne » n° 9 : « Le bain de mer » n° 10 : « Le carnaval » n° 11 : « Le golf » n° 19 : « Le flirt » n° 21 : « Le tennis » Les trois valses distinguées du précieux dégoûté 1914 Rouart, Lerolle, 1916. (IMSLP) n° 1 : « Sa taille » n° 2 : « Son binocle » n° 3 : « Ses jambes » Avant-dernières pensées 1915 Rouart, Lerolle, 1916. (IMSLP) n° 2 : « Aubade » Sonatine bureaucratique 1917 Philippo, 1917. (IMSLP) n° 1 : « Allegro » n° 3 : « Vivache » Rag-time Parade 1917 Piano solo. Salabert, 1989. Nocturnes 1919 Rouart, Lerolle, 1919. (IMSLP) n° 1 n° 3 Cinéma-Fantaisie (Entracte symphonique de 1924 Piano solo. Salabert, 1989. «Relâche») Sauguet, Henri (1901-1989) Trois françaises 1923 Rouart, Lerolle, 1925. n° 1 : « Allegro » Pièces poétiques pour enfants, livre 1 1933 Eschig, 1935. n° 4 : « Le juif errant passe » n° 6 : « Le chanteur des rues » Pièces poétiques pour enfants, livre 2 1934 Eschig, 1935. n° 11 : « Jour de fête » Nuit coloniale sur les bords de la Seine 1937 À l’exposition : illustrations musicales. Deiss, 1937. 206

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Schmitt, Florent (1870-1958) Soirs, op. 5 1890-96 Durand, 1911. (IMSLP) n° 1 : « En rêvant » n° 2 : « Gaiety » n° 3 : « Spleen » n° 4 : « Après l’été » n° 5 : « Parfum exotique » n° 6 : « Un soir » n° 7 : « Tziganiana » n° 8 : « Églogue » n° 9 : « Sur l’onde » n° 10 : « Dernières pages » Musiques intimes, livre 1, op. 16 1891- Heugel, 1901. (IMSLP) n° 1 : « Aux rochers de Naye » 1901 n° 2 : « Sur le chemin désert » n° 3 : « Silence troublé (La promenade au Lido » n° 4 : « La passeggiata al Lido » n° 5 : « Dans la forêt ensoleillée » n° 6 : « Chanson des feuilles » Musiques intimes, livre 2, op. 29 1898- Mathot, 1912. (IMSLP) n° 1 : « Cloître » 1904 n° 4 : « Lac » n° 5 : « Poursuite » n° 6 : « Glas » Pièces romantiques, op. 42 1900-8 Chapelier, 1912. (IMSLP) n° 1 : « Lied tendre » n° 2 : « Barcarolle » n° 3 : « Valse nostalgique » n° 5 : « Nocturne » n° 6 : « Souvenir » Nuits romaines, op. 23 1901 Hamelle, 1904. (IMSLP) n° 1 : « Le chant de l’anio » n° 2 : « Lucioles » 207

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Schmitt, Florent (1870-1958) Pupazzi, op. 36 1907 Mathot, 1909. (IMSLP) n° 1 : « Scaramouche » n° 3 : « Damis » n° 4 : « Eglé » n° 5 : « Cassandre » n° 6 : « Atys » n° 7 : « Clymène » n° 8 : « Arlequin » Ombres, op. 64 1913-17 Durand, 1918. (IMSLP) n° 1 : « J’entends dans le lointain… » n° 2 : « Mauresque » n° 3 : « Cette ombre, mon image… » Mirages, op. 70, n° 1 : « À la mémoire de Claude 1920-21 Durand, 1921. (IMSLP) Debussy » Mirages, op. 70, n° 2 : « La tragique chevauchée » 1920-21 Durand, 1922. (IMSLP) IV – Hommage sur le nom de Gabriel Fauré, op. 72 1922 Durand, 1922. (IMSLP) La retardée, op. 90, n° 3 1937 À l’exposition : illustrations musicales. Deiss, 1937. Séverac, Joseph-Marie Déodat de Scènes des champs, n° 1 : « Pastorale » 1896 Trois mélodies et quatre pages (1872-1921) pianistiques inédites. Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 2002. Deuxième Impromptu, dans le caractère romantique 1898 Trois mélodies et quatre pages pianistiques inédites. Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 2002. Le chant de la terre 1899- Édition Mutuelle, 1903. Réédition, Rouart, « Prologue » (L’Âme de la Terre) 1900 Lerolle, n.d. (après 1905). (IMSLP) n° 1 : « Le Labour » n° 2 : « Les Semailles » « Intermezzo (conte à la veillée) » n° 3 : « La Grêle » n° 4 : « Les Moissons » « Épilogue (Le jour des noces) » 208

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Séverac, Joseph-Marie Déodat de Valse métèque 1907 Trois mélodies et quatre pages (1872-1921) pianistiques inédites. Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 2002. Danse du «tonneau» et du «bidon» 1907 Trois mélodies et quatre pages pianistiques inédites. Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 2002. Baigneuses au soleil (Souvenir de Banyuls-sur-mer) 1908 Salabert, 1909. (IMSLP) Les naïades et le faune indiscret 1908-19 Rouart, Lerolle, 1952. Tailleferre, Germaine (1892-1983) Pastorale 1919 Album des Six. Eschig, 1920. Au pavillon d’Alsace (À l’exposition) 1937 À l’exposition : illustrations musicales. Deiss, 1937. Tansman, Alexandre (1897-1986) Burlesque 1925 Treize danses. Eschig, [197?]. Berceuse (Hommage à Roussel) 1928 Hommage à Albert Roussel : deux mélodies et six pièces de piano spécialement composées à son intention. Revue musicale, 1929. Vierne, Louis (1870-1937) Suite bourguignonne, op. 17 1899 Leduc, n.d. (ca 1900). (IMSLP) n° 5 : « À l’Angélus du soir » n° 6 : « Danse rustique » n° 7 : « Clair de lune » Solitude, op. 44 1918 Maurice Senart, 1925. (IMSLP) n° 1 : « Hantise » n° 2 : « Nuit blanche » n° 4 : « La ronde fantastique des revenants » Wiener, Jean (1896-1982) Rêve Inconnue Treize danses. Eschig, [197?]. 209

Annexe 3 Liste des œuvres consultées ne contenant pas de quintes parallèles

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Alain, Jehan (1911-1940) Étude de sonorité sur une double pédale (do et ré) 1929- L’œuvre de piano, vol. 1. Leduc, 1944. 1930 Choral « Seigneur, donne-nous la paix éternelle », 1930 L’œuvre de piano, vol. 1. Leduc, 1944. AWV 14 Lumière qui tombe d'un vasistas, AWV 20 1931 L’œuvre de piano, vol. 2. Leduc, 1944. Dans le rêve laissé par la ballade des pendus de 1931 L’œuvre de piano, vol. 3. Leduc, 1944. François Villon, AWV 27 Il pleuvra toute la journée, AWV 42 1932 L’œuvre de piano, vol. 2. Leduc, 1944. Suite monodique, AWV 65 1934 Hérelle, 1935. n° 1 : « Animato » n° 2 : « Adagio » n° 3 : « Vivace » Nocturne 1935 L’œuvre de piano, vol. 1. Leduc, 1944. Suite facile, AWV 104 1938 L’œuvre de piano, vol. 1. Leduc, 1944. n° 1 : « Final pour une sonatine facile » n° 2 : « Barcarolle » Aubert, Louis (1877-1968) Trois esquisses, op. 7 1900 Durand, 1900. n° 1 : « Prélude » n° 2 : « Nocturne » n° 3 : « Valse » Esquisse sur le nom de Fauré 1922 Hommage musical à Gabriel Fauré : sept pièces de piano sur le nom de Fauré. Durand, 1922. Auric, George (1899-1983) La Seine, un matin (À l’exposition) 1937 À l’exposition : illustrations musicales. Deiss, 1937. 210

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Auric, George (1899-1983) Neuf pièces brèves 1941 Eschig, 1970. n° 4 : « Églogue » n° 5 : « Marche » n° 7 : « Mazurka » n° 8 : « Berceuse » n° 9 : « Polka » Bonis, Mel (1858-1937) Ballade, op. 27 1897 Œuvres pour piano, vol. 4. Furore Verlag, (1re éd.) 2003. Romances sans paroles en sol bémol majeur, op. 56 1905 Lemoine, n.d. (1905). (IMSLP) (1re éd.) Omphale, op.86 1910 Œuvres pour piano, vol. 1. Furore Verlag, (1re éd.) 2003. Desdémona, op. 101 1913 Œuvres pour piano, vol. 1. Furore Verlag, (1re éd.) 2003. Casadesus, Robert (1899-1972) 24 préludes, op. 5 : « 1er cahier » 1924 Eschig, 1925. n° 4 : « Champêtre – Alla breve – très rythmé » 24 préludes, op. 5 : « 2e cahier » 1924 Eschig, 1925. n° 9 : « Avec fougue (vite) » 24 préludes, op. 5 : « 3e cahier » 1924 Eschig, 1925. n° 17 : « Très vite et très brusque » Chabrier, Emmanuel (1841-1894) Dix pièces pittoresques 1880-81 Enoch, n.d. (ca. 1881). Probablement n° 4 : « Sous bois » scannée d’une réimpression aux éditions n° 8 : « Improvisation » Dover. (IMSLP) n° 10 : « Scherzo-valse » Bourrée fantasque 1891 Enoch, n.d. (1891). Probablement scannée d’une réimpression aux éditions Dover. (IMSLP) Chaminade, Cécile (1857-1944) Minuetto, op. 23 1881 Smith, Gail, dir. Great Women Composers. Creative Keyboard Publications, 1996. Pierrette, op. 41 (air de ballet) 1889 Smith, Gail, dir. Great Women Composers. Creative Keyboard Publications, 1996. La Morena, op. 67 (caprice espagnol) 1892 Smith, Gail, dir. Great Women Composers. Creative Keyboard Publications, 1996. 211

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Chaminade, Cécile (1857-1944) Six romances sans paroles, op. 76 1894 Masters Music Publications, 1980. n° 1 : « Souvenance » n° 2 : « Élévation » n° 3 : « Idylle » Chausson, Ernest (1855-1899) Quelques danses, op. 26 1896 Piano Music : A Collection of Piano n° 1 : « Dédicace » Music. Salabert, 1978. Chrétien, Hedwige (1859-1944) Sonatine, n° 1 : « Pastorale » 1921 Sonatines pour piano. Evette & Schaeffer, n° 1 : « Allegro tranquillo » 1921. (IMSLP) n° 2 : « Andante » n° 3 : « Scherzo » Sonatine, n° 2 (« Dès l’aurore ») 1921 Sonatines pour piano. Evette & Schaeffer, n° 3 : « Minuetto » 1921. (IMSLP) Sonatine, n° 3 (« Joyeuse Nouvelle ») 1921 Sonatines pour piano. Evette & Schaeffer, n° 1 : « Allegretto (con grazia) » 1921. (IMSLP) n° 3 : « Scherzo » n° 4 : « Final » Sous les étoiles : « rêverie » 1923 Éditions du renouveau français, 1923. Ailes bleues : « scherzo-valse » 1923 Éditions du renouveau français, 1923. Debussy, Claude Achille (1862- Mazurka v. 1890 Fromont, n.d. (1903). Réimpression, 1918) Dover Publications, 1974. (IMSLP) Suite bergamasque : v. 1890, Fromont, 1905. Réimpression, Dover n° 3 : « Clair de lune » rév. 1905 Publications, 1974. (IMSLP) Children’s Corner : 1906-8 Durand, 1908. (IMSLP) n° 2 : « Jimbo’s [Jumbo’s] Lullaby » n° 3 : « Serenade for the Doll » Préludes, livre 2 : 1911-13 Durand, 1913. (IMSLP) n° 11 : « Les tierces alternées » Decaux, Abel (1869-1941) Clair de lune, n° 2 : « La ruelle » 1902 Clairs de lune. Chapelier, 1913. (IMSLP) Clair de lune, n° 4 : « La mer » 1903 Clairs de lune. Chapelier, 1913. (IMSLP) Delannoy, Marcel (1898-1962) Rigaudon (Treize danses) Inconnue Treize danses. Eschig, [197?]. D’Indy, Vincent (1851-1931) Petite sonate dans la forme classique, op. 9 1880 Hamelle, n.d. (1888). (IMSLP) n° 3 : « Scherzo » Promenade, op. 27 1887 Hamelle, n.d. (c1890). (IMSLP) 212

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique D’Indy, Vincent (1851-1931) Schumanniana, op. 30 (3 chants sans paroles) 1887 Hamelle, n.d. (ca.1890). (IMSLP) n° 3 : « Assez modéré » Tableaux de voyage, op. 33 1889 Leduc, 1920. n° 1 : « Préambule » n° 2 : « En marche » n° 6 : « La poste » n° 8 : « Halte, au soir » n° 10 : « Lermoos » Douze petites pièces faciles dans le style classique 1908-15 Henn, 1919. de la fin du XVIIIe siècle, op. 69 n° 1 : « Andante » n° 2 : « Allegretto » n° 3 : « Allegretto giocoso » n° 4 : « Allegretto » n° 5 : « Assez vif » n° 6 : « Allegretto senza rigore » n° 7 : « Sans lenteur » n° 8 : « Allegro moderato » n° 9 : « Andante con moto » n° 10 : « Modéré » Dupont, Gabriel (1879-1914) Les heures dolentes 1903-5 Heugel, 1905. (IMSLP) n° 6 : « Le médecin » Durey, Louis (1888-1979) Dix inventions, op. 41a (d’après l’op. 35) 1924-28 Éditions musicales transatlantiques, 1980. n° 1 : « Très calme » n° 2 : « Allegretto » n° 3 : « Très modéré » n° 5 : « Tranquille » n° 6 : « Animé et rythmé » n° 8 : « Décidé » Enesco, Georges (1881-1955) Pièce pour piano sur le nom de Gabriel Fauré 1922 Hommage musical à Gabriel Fauré : sept pièces de piano sur le nom de Fauré. Durand, 1922. 213

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Fauré, Gabriel (1845-1924) Huit pièces brèves, op. 84, 1869- Hamelle, n.d. (1903). (IMSLP) n° 1 : « Capriccio » 1902 n° 2 : « Fantaisie » n° 6 : « Fugue » n° 7 : « Allegresse » Barcarolle, op. 26, n° 1 [1881?] Hamelle, n.d. (1883). Réimpression, Dover Publications, 1994. (IMSLP) Valse-caprice, op. 62, n° 4 1893-94 Hamelle, n.d. (1894). (IMSLP) Ferroud, Pierre Octave (1900- Sonatine 1928 Durand, 1928. (IMSLP) 1936) n° 2 : « Allegretto poco rubato » Françaix, Jean (1912-1997) Cinq portraits de jeunes filles 1936 Eschig, 1937. n° 3 : « La Prétentieuse » Franck, César (1822-1890) Danse lente, op. 22 1885 Piano Compositions. Ditson, 1922. (IMSLP) Gounod, Charles (1818-1893) Matinée de mai 1896 L’Illustration, 1896 (supplément musical au n° 2761). Choudens, 1896. (IMSLP) Hahn, Raynaldo (1874-1947) Portraits de peintres : pièces pour piano d’après les v. 1898 Heugel, Leduc, 1896. poésies de Marcel Proust n° 2 : « Paulus Potter » Premières valses v. 1925 Heugel, 1925. « Invitation à la valse » n° 3 : « Ninette » n° 8 : « Pas vite » n° 9 : « La feuille » Honegger, Arthur (1892-1955) Trois pièces 1919 Salabert, 1973. n° 1 : « Prélude » n° 3 : « Danse » Sept pièces brèves 1919-20 Éditions de la Sirène, 1921. (IMSLP) n° 1 : « Souplement » n° 4 : « Légèrement » Scenic Railway 1937 Parc d’attractions : Expo 1937. Eschig, 1938. 214

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Ibert, Jacques (1890-1962) Les rencontres… petite suite en forme de ballet 1924 Leduc, 1924. n° 1 : « Les bouquetières » L'espiègle au village de Lilliput 1937 À l’exposition : illustrations musicales. Deiss, 1937. Petite suite en 15 images 1943 Éditions musicales Hug : Foetisch, 1972. Laparra, Raoul (1876-1943) Rythmes espagnols 1914 Enoch, 1913 n° 1 : « Petenera » n° 3 : A. « Sevillanas » B. « Trianeras » C. « Flamencas » n° 6 : « Solea » Lekeu, Guillaume (1870-1894) Trois pièces 1892 Veuve Léopold Muraille, n.d. (1892). n° 2 : « Valse oubliée » Réimpression, CeBeDem, 2003. (IMSLP) Messager, André (1853-1929) Habañera, op. 11 1889 Lemoine, n.d. (IMSLP) Mihalovici, Marcel (1898-1985) Un danseur roumain 1937 Parc d’attraction : Expo 1937. Eschig, 1938. Milhaud, Darius (1892-1974) Printemps, livre 2, op. 66 1920 Eschig, 1920. n° 4 : « Doucement » n° 5 : « Vivement » Saudades do Brasil, op. 67, livre 1 1920-21 Eschig, 1921. n° 2 : « Botafogo » Saudades do Brasil, op. 67, livre 2 1920-21 Eschig, 1921. n° 10 : « Paineras » L’album de Madame Bovary, op. 128b 1933 Enoch, 1934. n° 1 : « Emma » n° 2 : « Pastorale » n° 9 : « Autographe » n° 15 : « Chagrin » n° 17 : « Dernier feuillet » 215

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Pierné, Gabriel (1863-1937) Quinze pièces, op. 3 1883 Leduc, n.d. (ca.1888) (IMSLP) n° 1 : « Romance sans paroles » n° 3 : « Fantasmagorie » n° 4 : « Marche funèbre » n° 7 : « Fugue » n° 9 : « Menuet vif » n° 10 : « La Marelle » n° 12 : « Cache-cache » Album pour mes petits amis, op. 14 1887 Leduc, n.d. (1890) (IMSLP) n° 2 : « Farandole » n° 6 : « Petits soldats de plomb » Poulenc, Francis (1899-1963) Trois pastorales, FP 5 1917 Heugel, 2004. n° 2 : « Très lent (très triste, rythmé dans la douceur) » Trois mouvements perpétuels, FP 14 1918 Chester Music, 1919. n° 1 : « Assez modéré » n° 2 : « Très modéré » Suite, FP 19 1920, Chester Music, 1970. n° 3 : « Vif » rév. 1926 Les soirées de Nazelles, FP 84 1930-36 Durand, 1937. « Préambule » n° 3 : « La désinvolture et la discrétion » « Cadence » « Final » Improvisations, FP 63 Salabert, 2001. n° 5 1932 n° 9-10 1934 Suite française d’après Claude Gervaise, FP 80 1935 Durand, 1935. n° 4 : « Complainte » Bourrée au pavillon d'Auvergne, FP 87 (À 1937 À l’exposition : illustrations musicales. l'exposition) Deiss, 1937. 216

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Ravel, Maurice (1875-1937) Valses nobles et sentimentales 1911 Durand, 1911. Réimpression, Dover n° 2 : « Assez lent – avec une expression intense » Publications (IMSLP) n° 4 : « Assez animé » n° 5 : « Presque lent – dans un sentiment intime » n° 8 : « Épilogue » Reger, Max (1873-1916) Danse, op. 36, n° 4 1899 Treize danses. Eschig, [197?]. Roger-Ducasse, Jean (1873-1954) Variations sur un choral 1914-15 Durand, 1917. (IMSLP) Choral : « Lentement » 1re variation : « Même mouvement » 2e variation (Variation en ut mineur de Beethoven) : « Décidé » 3e variation : « Vite et léger » 4e variation : « Très lent » 7e variation : « Très lent et très expressif » Esquisses 1917 Durand, 1918. (IMSLP) n° 2 Ropartz, Joseph-Guy (1864-1955) Musiques au jardin 1916 Durand, 1918. (IMSLP) n° 2 : « Un oiseau sur le sable de l’allée » n° 4 : « Un enfant joue » Scherzo 1916 Durand, 1917. (IMSLP) Roussel, Albert (1869-1937) Des heures passent, op. 1 1898 Hamelle, n.d. (ca.1900) (IMSLP) n° 1 : « Graves, légères … » n° 4 : « Champêtres … » Conte à la poupée 1904 Édition Mutuelle, n.d. (ca. 1905) (IMSLP) Petit canon perpétuel 1913 Durand, 1948. (IMSLP) Trois Pièces pour piano, op. 49 1933 Durand, 1934. (IMSLP) n° 1 : « Allegro con brio » Saint-Saëns, Camille (1835-1921) Album, op. 72 1884 Durand, Schoenewerk, n.d. (1884). n° 2 : « Carillon » Réédition, Durand, 1948. (IMSLP) n° 3 : « Toccata » n° 4 : « Valse » Souvenir d'Italie, op. 80 1887 Durand, Schoenewerk, n.d. (ca. 1887) (IMSLP) 217

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Satie, Érik (1866-1925) Valse-ballet 1885 Piano solo. Salabert, 1989. Trois gymnopédies 1888 Baudoux, n.d. (ca. 1896). 2e éd. n° 2 : « Lent et triste » Probablement scannée d’une réimpression aux éditions Dover. (IMSLP) Quatre Préludes : [1892?] Rouart, Lerolle, 1929. (IMSLP) n° 1 : « Fête donnée par des chevaliers normands en l'honneur d'une jeune demoiselle (XIe siècle) » Danses gothiques (Neuvaine pour le plus grand 1893 Rouart, Lerolle, 1929. (IMSLP) calme et la Forte tranquillité de mon Âme) n° 3 : « En faveur d’un malheureux » Gnossienne, n° 6 1897 Piano solo. Salabert, 1989. Pièces froides, n° 1 : Airs à faire fuir 1897 Rouart, Lerolle, 1912. (IMSLP) n° 2 : « Modestement » n° 3 : « S’inviter » Carnet d’esquisses et de croquis 1897- Piano solo. Salabert, 1989. n° 1 : « Airs » (1914) 1919 n° 5 : « Le prisonnier maussade » n° 6 : « Esquisses (Le grand singe) » n° 7 : « Exercices » n° 8 : « Notes » n° 9 : « Harmonies » n° 13 : « Exercices » n° 14 : « Exercices » n° 15 : « Exercices » n° 16 : « Exercices » n° 17 : « Exercices & Sketch montmartois 1 & 2 » n° 18 : « Essais (Arrière-Propos) n° 19 : « Petite danse » Trois gnossiennes 1889-91 Rouart, Lerolle, 1913. Probablement n° 1 : « Lent » scannée d’une réimpression aux editions n° 2 : « Avec étonnement » Dover. (IMSLP) Je te veux [1901?] Piano solo. Salabert, 1989. La diva de l'Empire (Intermezzo américain) 1904 Piano solo. Salabert, 1989. 218

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Satie, Érik (1866-1925) Le Piccadilly (La transatlantique) 1904 Piano solo. Salabert, 1989. Douze petits chorals 1906-8 Piano solo. Salabert, 1989. n° 2 n° 3 n° 4 n° 5 n° 6 n° 7 n° 8 n° 9 n° 11 n° 12 Musiques intimes et secrètes 1906-13 Piano solo. Salabert, 1989. n° 1 : « Nostalgie » Désespoir agréable 1908 Piano solo. Salabert, 1989. Fâcheux exemple 1908 Piano solo. Salabert, 1989. Profondeur v. 1909 Piano solo. Salabert, 1989. Deux choses v. 1909- Piano solo. Salabert, 1989. n° 1 : « Effronterie » 1913 n° 2 : « Poésie » Deux rêveries nocturnes 1910-11 Piano solo. Salabert, 1989. n° 2 : « Très modérément » Deux préludes pour un chien 1912 Piano solo. Salabert, 1989. n° 1 n° 2 Le piège de Méduse 1913 Éditions de la Vipère, 1939. Réimpression, n° 2 : « Valse » Salabert, 1954. (IMSLP) n° 3 : « Pas vite » n° 4 : « Mazurka » n° 6 : « Polka » n° 7 : « Quadrille » 219

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Satie, Érik (1866-1925) Sports et divertissements 1914 Piano solo. Salabert, 1989. n° 2 : « La balançoire » n° 3 : « La chasse » n° 5 : « Le réveil de la mariée » n° 6 : « Colin-maillard » n° 7 : « La pêche » n° 8 : « Le yachting » n° 12 : « La pieuvre » n° 13 : « Les courses » n° 14 : « Les quatre-coins » n° 15 : « Le pique-nique » n° 16 : « Le water-chute » n° 17 : « Le tango » n°18 : « Le traîneau » n° 20 : « Le feu d’artifice » Avant-dernières pensées 1915 Rouart, Lerolle, 1916. (IMSLP) n° 1 : « Idylle » n° 3 : « Méditation » Sonatine bureaucratique 1917 Philippo, 1917. (IMSLP) n° 2 : « Andante » Nocturnes 1919 Rouart, Lerolle, 1919. (IMSLP) n° 2 Sauguet, Henri (1901-1989) Trois françaises 1923 Rouart, Lerolle, 1925. n° 2 n° 3 Pièces poétiques pour enfants, livre 1 1933 Eschig, 1935. n° 1 : « Visite à Schumann » n° 2 : « Le chasseur perdu » n° 3 : « Les cyclistes » n° 5 : « Les pompiers » 220

Compositeur Titre Date Adresse bibliographique Sauguet, Henri (1901-1989) Pièces poétiques pour enfants, livre 2 1934 Eschig, 1935. n° 7 : « Paul et Virginie » n° 8 : « En colère » n° 9 : « L’enfant de troupe » n° 10 : « Souvenir de vacances » Schmitt, Florent (1870-1958) Musiques intimes, livre 2, op. 29 1898- Mathot, 1912. (IMSLP) n° 2 : « Sillage » 1904 n° 3 : « Brises » Pièces romantiques, op. 42 1900-8 Chapelier, 1912. (IMSLP) n° 4 : « Improvisation » Pupazzi, op. 36 1907 Mathot, 1909. (IMSLP) n° 2 : « Aminte » Stravinski, Igor (1882-1971) Étude, op. 7, n° 3 1882 Masters of Today : Famous Pieces by Modern Masters for Piano Solo. Associated Music Publishers, [194-] Vierne, Louis (1870-1937) Suite bourguignonne, op. 17 1899 Leduc, n.d. (ca 1900). (IMSLP) n° 1 : « Aubade » n° 2 : « Idylle » n° 3 : « Divertissement » n° 4 : « Légende Bourguignonne » Solitude, op. 44 1918 Maurice Senart, 1925. (IMSLP) n° 3 : « Vision hallucinante »

221

Annexe 4 Proportion d’exemples de chaque type de quintes parallèles par compositeur (pourcentage)

Cadentielles Résolution Erreur Croisement Avec notes Enrichissement Structurelles Création effet Notes dissonance ornementales de la texture particulier ornementales Alain 2,6 0 0 2,6 30,8 59 2,6 0 2,6 Aubert 14,3 0 0 0 14,3 71,4 0 0 0 Auric 4,6 0 0 0 50 36,4 9,1 0 0 Bonis 4,4 0 0 0 21,7 73,9 0 0 0 Boulanger 0 0 0 0 0 58,3 0 41,6 0 Casadesus 10,3 3,4 0 0 17,2 34,5 17,2 17,2 0 Casella 0 0 0 0 20 60 20 0 0 Chabrier 37,5 0 0 0 31,2 31,2 0 0 0 Chaminade 7,1 0 0 0 14,3 71,4 0 0 7,1 Chausson 0 0 0 0 19 57,1 0 0 23,8 Chrétien 21,4 0 0 0 21,4 35,7 0 0 21,4 Debussy 5,6 4,9 0 0 13,9 51,4 10,4 13,9 0 Decaux 57,1 0 0 0 0 21,4 21,4 0 0 Delannoy 0 0 0 0 33,3 66,7 0 0 0 D’Indy 6 0 0 0 26,5 49,4 0 7,2 10,8 Dukas 0 0 0 0 0 100 0 0 0 Dupont 1,6 0 0 0 28,1 53,1 3,1 7,8 6,2 Durey 0 28,6 0 0 28,6 42,9 0 0 0 Enesco 3,2 0 0 0 16,1 67,7 6,4 0 6,4 Fauré 0 6,2 0 0 62,5 0 0 31,2 0 Françaix 0 0 0 0 33,3 66,7 0 0 0 Franck 0 0 0 0 55,2 31 0 0 13,8 Grovlez 0 0 0 0 27,1 66,7 0 0 6,2 222

Cadentielles Résolution Erreur Croisement Avec notes Enrichissement Structurelles Création effet Notes dissonance ornementales de la texture particulier ornementales Hahn 16,7 0 0 0 58,3 25 0 0 0 Hoérée 0 0 0 0 100 0 0 0 0 Honegger 3,8 15,4 0 0 19,2 61,5 0 0 0 Hubeau 0 0 0 14,3 14,3 57,1 0 0 14,3 Ibert 0 5,4 0 2,7 29,7 51,4 10,8 0 0 Kœchlin 5,8 4,9 0 2,7 7,6 76,8 0,4 0 1,8 Ladmirault 20 0 0 0 60 20 0 0 0 Laparra 0 0 0 0 100 0 0 0 0 Lekeu 26,1 0 0 4,3 26,1 43,5 0 0 0 Magnard 20 12 0 0 24 40 0 0 4 Milhaud 4,7 8,7 0 0,7 20,1 58,4 2 0 5,4 Pierné 50 0 0 0 0 0 0 0 50 Poulenc 4,5 1,1 2,25 0 22,5 42,7 18 0 9 Ravel 10,9 2,3 0 0 26,9 57,7 0 0 2,3 Roger- Ducasse 3,5 3,5 0 5,9 47,1 37,6 0 0 2,4 Ropartz 10,5 2,6 0 0 26,3 57,9 0 0 3,6 Roussel 0 0 0 3,6 14,6 78,2 0 0 3,6 Saint-Saëns 29,2 0 0 0 37,5 20,8 4,2 0 8,3 Satie 16 1,1 0 0 20,9 54,8 3,7 0,8 2,6 Sauguet 7,1 0 0 0 21,4 50 14,3 0 7,1 Schmitt 9,8 0,9 0 0,9 25 49,1 6,2 0 8 Sévérac 4,2 4,2 0 4,2 0 41,7 8,3 25 12,5 Tailleferre 0 0 0 0 0 66,7 0 0 33,3 Tansman 0 0 0 0 14,3 85,7 0 0 0 Vierne 0 0 0 0 25 0 25 0 50

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