Le Monde Du Théâtre Dans L'oeuvre June N
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.. Le monde du théâtre dans l'oeuvre dramatique de Jean Anouilh" June N. Beard Département de lanque et littérature françaises McGill Universi ty , Montréal March 1989 A thesis submitted to the Faculty of Graduate Studies and Research in partial fulfillment of the requirements for the degree of Master of Arts. @ June N. Beard 1989 ( Je dois beaucoup de remerciements, pour sa bienveillance et sa collaboration directoriale, à M. Giuseppe Di stefano, professeur à l'Université McGill. Qu'il me soit également permis d'exprimer ma gratitude profonde à M. Maurice Descotes, professeur à la Faculté des Lettres de l'Université de Pau, France, qui par son enseignement et ses ouvrages a été pour moi le guide le plus précieux dans mes études avancées en littérature française et l'inspiration de mes efforts académiques. Ce sont l'assistance et le conseil sage de ces deux professeurs qui m'ont permis de réaliser cette thèse. J.N. B. i ( RESUME En examinant les différentes pièces dans lesquelles Jean Anouilh met en scène des gens de théâtre, cette thèse analyse la conception que se fait Anouilh de l'oeuvre dramatique, depuis son élaboration par l'auteur jusqu'à sa présentation sUL la scène et sa réception par le public. Elle commence par une introduction aux différents contacts que le dramaturge a établis avec le monde du spectacle. Ensuite, l'analyse présente les divers intervenants qui animent la scène et elle établit la caractérologie particulière des gens de théâtre aussi bien que l'image que se fait Anouilh de "l'illusion théâtrale". En outre, l'étude confronte la thèse du "Paradoxe sur le comédien" selon Diderot avec les idées de Anouilh. Elle évoque enfin le rôle du masque et le concept de l'illusion opposée à la réalité, et s'achève en répondant à la question: "La vie dramatique, est-elle plus vraie que la vraie vie?" { ii ABSTRACT By examining the different plays in which Jean Anoui Ih puts people of the theatre on stage, this thesis analyses the concept of dramatic work, trom its eJ.aboration by the author to its presentation on stage and its reception by the public. It begins with an introduction to the different contacts that the playwright established with the theatrical world. The analysis then presents the various players who animate the stage and it establishes the particular characterology of the theatre' s participants as weIl as Anouilh's image of "theatrical illusion. Il Furthermore, the study contrasts oiderot's thesis on the "Paradox of the actor" with the ideas of Anouilh. Finally, i t evokes the role of the mask and the concept of illusion versus reality and concludes in responding to the question: "Is dramatic life truer than true life?" .,. iii ( PREFACE L'EVOLUTION DU THEATRE FRANCAIS AU XXe SIECLE L'oeuvre dramatique de .lean Anouilh s'insère dans un vaste répertoire des pièces françaises qui ont connu un succès éblouissant au niveau national aussi bien qu'international. Aujourd 'hui la vie dramatique fleurit en France, non seulement à Paris mais à Lyon, à Nancy, à Toulouse, à Saint-Etienne, bref dans tous les coins du pays. Que ce soit dans le cadre traditionnel des théâtres qui suivent le calendrier strict de la saison théâtrale ou dans celui des festivals d'été en plein air, des cafés-théâtres, ou des arènes, la vie dramatique française prospère. Or ceci n'a pas toujours été le cas. En remontant au début du XXième siècle et en abordant un examen de l'évolution de la vie dramatique en France, on découvre une période de rénovation qui a considérablement modifié le panorama du theâtre. Connaître ce panorama permet de déterminer le milieu artistique qui a et fasciné et façonné le jeune Anouilh. En examinant ensui te les débuts de ce dramaturge on ,, 1 découvre davantage les origines de son goût pour le monde du - spectacle, ce monde qui demeure au coeur de maintes de ses pièces et dont il a fait un tableau à la fois exact et caricatural. Jean Anouilh s'y trouve tout à fait à l'aise. Il le dépeint avec précision, avec humour, et avec une aisance étonnante. Le théâtre devient réel chez lui; si réel en fait qu'il nous amène à poser la question "La vie du spectacle est elle plus vraie que la vraie?" * * * Avant la première guerre mondiale le théâtre frança is était dominé par le "théâtre du boulevard." Il est vrai qU'au XIXième siècle le rom~ntisme, qui avait échoué, en 1843, avec la chute des Burgraves de victor Hugo, a connu une brève renaissance inattendue grâce surtout à l'oeuvre d'Edmond Rostand. Pourtant, malgré le grand succès de son Cyrano de Bergerac, le néo-romantisme au théâtre s'est doucement éteint de façon définitive. Le théâtre naturaliste, qui a évolué chez certains écrivains en un théâtre à thèse, a figuré aussi dans la production dramatique de cette époque. Toutefois la sociéte mondaine s'intéressait moins aux grandes idées des dramaturges qU'aux thèmes légers qui leur accordaient une évasion hors de la vie quotidienne, d'où le "théâtre du boulevard." 2 C'était un théâtre plaisant, sentimental, agréable mais sans profondeur. Presque toujours lié à l'amour, ce théâtre faisait souvent le tableau des passions, dans le cadre d'un tableau de moeurs. On regardait des pièces bien construites dont le thème était facile à prévoir: la bourgeoisie, le triangle éternel (elle, lui, l'autre), des drames domestiques qui, en se tenant assez près de la réalité, manquaient d'une certaine poésie. L'oeuvre des symbolistes -celle de Maurice Maeterlinck par exemple- a voulu créer un théâtre poétique sans pourtant réussir tout à fait. A la prédominance du "théâtre du boulevard" s'ajoutait le triomphe du vaudeville, qu'a perfectionné Feydeau, entre autres. Or, au début de la guerre de 1914, les théâtres de la France ont été fermés. A leur réouverture, on a joué des pièces patriotiques et des pièces de délassement qui étaient appelées à maintenir le moral de tous. C ' éta i t l'époque de Sacha Guitry, dont les pièces étaient divertissantes quoique, une fois encore, fort peu profondes. Le genre léger s'est perpétué dans l'esprit des habitués du Boulevard. Bref la vie dramatique française avait grand besoin de renouvellement. Entre 1919 et 1939 plusieurs hommes de théâtre se sont efforcés d' Y parvenir: Lugné-Poe, qui a fondé le théâtre de l'Oeuvre et a découvert Jean Sarment, Crommelynck, Steve Passeur et Salacrou; Georges Pitoeff, l'apôtre russe qui a f 3 monté des pièces de Pirandello, d'Ibsen, de strinberg, de Shaw " et de Gide; Louis Jouvet, qui, à la Comédie des Champs-Elysées et à l' Athénée, est devenu l'interprète par excellence de Gil."audoux et qui ad' ailleurs engagé le jeune Anouilh comme secrétaire; Gaston Baty, fondateur de la Chimère, qui a porte son attention sur la mise en scène beaucoup plus que sur le texte; Charles Dullin, qui a créé à l'Atelier des pièces de Salacrou, de Jules Romains et de Passeur ... chacun a joue un rôle important da.1S l'évolution du théâtre français. C'est pourtant Jacques Copeau qui a tenu le rang capital car c'est lui qui a lancé le mouvement de renouvellement recherché. * * * Avant même la guerre de 1914, Jacques Copeau, homme de lettres, critique, acteur directeur, dramaturge, avait préparé en France la révolution théâtrale qui avait com:nencé en Europe à la fin du XIXième siècle. Dès son début cette révolut ion a dépassé les limites nationales: on parlait partout de Stanislavsky, de Nemirovi tch et de Danchenko de Moscou; de Reinhardt de Berlin, d'Eiler et de Fuchs de Munich; de l'Anglais Gordon Craig; du Suisse Adolphe Appia; et des Français Antoine et Jean Anouilh et Lugné-Poe. Cependant l'impact provoqué par ces hommes sur le théâtre parisien (un théâtre que l'on considérait quand même comme assez sophistiqué) a été d'abord négligeable. Ce n'est qu'à partir 4 des années 1920, avec la transformation du climat culturel à Paris (illustré en grande partie par les efforts prodigieux de Copeau et de ceux qu'il a inspirés) que le théâtre français s'est engagé dans une des étapes les plus riches de son évolutionl . Copeau a abordé le théâtre avec de solides principes. En réaction contre les décors somptueux que les Ballets Russes ont mis en vogue avant 1914 aussi bien que contre les décors du style naturaliste, Copeau a cherché un retour à l'austérité de la scène nue; il a rejeté le cul te de la vedette; il s'est fait le défenseur de l'importance du texte. En créant l'Ecole du Vieux-Colombier pour former sa troupe d'acteurs et en insistant sur la discipline, la dignité, et la fierté du métier (trois qualités que l'on retrouve chez Jean Anouilh), Jacques Copeau a rénové non seulement le théâtre, mais l'art du jeu lui-même. Il a fait reconstruire l'intime théâtre du Vieux- Colombier en un style architectural qui a permis le rapprochement des spectateurs avec la scène; il a modernisé les techniques de l'éclairage; il a tâché de réconcilier la 1 i tterature et la scène en remontant les grandes oeuvres du passé comme celles de Molière qui ava ... .:!nt été auparavant le domaine exclusif de la Comédie-Française. Bref il serait 1 Germa ine Brée. Twentieth Century French Literature, Trans. Louise Guiney, (Chicago: University of Chicago Press, 1983), p. 220. 5 difficile de mentionner une innovation théâtrale qui n'ait pas été soit prévue soit inspirée par Jacques Copeau.