u Focus Foc s us ocus Foc F d’une pensée et d’une action communes” Les contre-performances des campagnes (1). Pour notre part, à la liste de ceux devant subir en priorité une formation, d’information et de prévention nous ajouterons les journalistes. En effet, pour que la lutte aboutisse, il faut que tout J.P. de Mondenard* le monde ait vraiment envie de jouer le jeu et, bien sûr, dans le même camp. Or, à Lorsqu’éclate une affaire de dopage, chacun (pouvoirs publics et chaque affaire de dopage, il y a trop de dis- cordance entre les avis, les règlements des dirigeants) y va de son couplet : “Dans les plus brefs délais, une fédérations et les sanctions. Le tout favori- sant sans conteste la désinformation et, par campagne d’information sera faite sur les méfaits du dopage et corollaire, l’apologie du dopage. l’utilisation des produits interdits.” En ce qui concerne le volet Pour mettre en place une prévention efficace, il est clair qu’il faut faire l’effort d’une préventif et éducatif de la lutte antidopage proprement dite, réflexion sur les facteurs favorisants le l’histoire, en la matière déjà ancienne, est un éternel recommen- dopage. On ne peut décidément s’arrêter sur des causes “superficielles” comme cement. En effet, le premier colloque européen d’Uriage consa- celles qu’invoquent, par exemple, ceux qui cré au dopage, date déjà des 26 et 27 janvier 1963 et réunis- affirment qu’en raison de la longueur de la liste des produits visés, ils ne peuvent se sait scientifiques, pharmacologues, médecins et journalistes spor- soigner. À cette excuse trop facile, nous pré- tifs, pratiquants de haut niveau et sportifs professionnels, afin, férons la superposition de deux causes bien différentes dans leur nature comme dans les annonçaient-ils, d’éradiquer le dopage ! remèdes qu’elles suggèrent. L’une, profonde et fondamentale, liée à ses structures ances- Du surplace qui dure depuis 1981 trales : la multiplication des épreuves qui éprouve de plus en plus tous les champions ; “Dans la catégorie de ceux qui font semblant de participer à l’effort commun d’éducation des l’autre, plus circonstancielle mais jouant un sportifs sur le dopage, on trouve en bonne place l’imposant “Manuel d’éducateur sportif ”. Déjà rôle aggravant surtout dans les disciplines les en 1981, j’avais stigmatisé les carences de cet ouvrage, sorte de bible officieuse préparant aux plus exigeantes : un encadrement paramédi- très officiels brevets d’État. À l’époque, j’écrivais : “En cinq cent vingt pages, il passe au crible cal inapte et dangereux. tous les tenants et aboutissants du sport mais n’accorde que soixante six lignes au dopage, dont À propos des cadences infernales entretenues près de la moitié à la seule législation !” Aujourd’hui, en 2000, alors qu’on doit en être à la 10e par les dirigeants, les organisateurs de édition publiée et qu’il a grossi de près de 400 pages, on comptabilise toujours le même nombre courses et les employeurs, Marcel Tinazzi, de lignes qu’il y a dix-sept ans. D’ailleurs, rien n’a changé non plus en ce qui concerne les textes l’ex-président de l’Union nationale des législatifs où on en est toujours à la loi Herzog, votée en 1965 et, bien sûr, dans la liste des prin- coureurs professionnels (UNCP), stigmati- cipaux agents dopants, les auteurs omettent les hormones peptidiques (hormone de croissance, sait déjà il y a une quinzaine d’années la érythropoïétine, etc.). dérive des stakhanovistes du coup de pédale : Ce n’est vraiment pas très sérieux d’autant plus qu’il est quasi certain que les deux pages et “Avant tout, le mal dont souffre le vélo, soixante-six lignes n’ont jamais été vérifiées depuis 1981, puisqu’on peut lire “En , le c’est qu’il y a trop de courses. Le calendrier congrès d’Oriage”, alors que c’est bien sûr Uriage, près de , qui a accueilli les 26 et est trop embrouillé. Et, à la sortie, les cou- 27 janvier 1963, tous les concernés – journalistes sportifs, médecins, toxicologues, athlètes, reurs sont trop fatigués. Le dopage, on n’en etc. – pour débattre et trouver d’éventuelles parades à cette importante dérive de la compéti- parlerait pas s’il y avait trois courses par an. tion. Fait aggravant, on retrouve le même texte à peu de chose près dans le livre de Gérard er e Les coureurs sont prisonniers du système. François consacré au brevet d’État d’éducateur sportif 1 et 2 degré et publié en 1994 par le Ils courent toute l’année, ils sont fatigués, ils même éditeur. sont prisonniers de leurs employeurs, du Au total, on a du mal à croire que ces gens-là sont vraiment soucieux d’informer les éduca- teurs auxquels ces ouvrages sont destinés en priorité. On peut également avoir des doutes sur calendrier des courses et, pour suivre, ils sont l’actualisation des autres informations.” parfois obligés de tricher. Voilà, nous sommes Propos recueillis par P. Depostis enfermés dans un système stupide” (2). Les chiffres ont donc leur mot à dire. Ainsi,

En premier lieu, il faut, sur le plan de la formation et l’éducation était libellée ainsi : prévention, accélérer la recherche en diété- “Le congrès d’Uriage attire l’attention sur tique, entraînement, musculation et récupé- le fait qu’un travail rentable ne pourra se ration afin d’apporter des réponses pra- réaliser que si, dans la formation des uni- * Médecin du sport. Le Dr J.P. de Mondenard tiques aux entraîneurs et aux sportifs. Le versitaires, des médecins, des éducateurs et vient de publier “Dopage, l’imposture des per- deuxième point essentiel qui abordait l’in- des entraîneurs, on retrouve la possibilité formances”, aux Éditions Chiron.

35 u Focus Foc s s ocus ocu Henri Pélissier,F vainqueur du Tour de être décelées Fà l’occasion des contrôles anti- sportifs, de leur dire ce qui est utile, ce qui France 1923, avait trente jours de courses dopage habituels, réalisés tant à l’occasion est nuisible ? Et puisque nous parlons de annuels à son programme, alors que des compétitions que des entraînements. Et, cyclisme, la Fédération française – qui sait Bernard Vallet affirme avoir atteint 225 jours plus que jamais, des actions de prévention et bien encaisser les millions de l’organisa- de courses en 1985, ce qui fait tout simple- d’éducation doivent être mises en œuvre à tion des championnats de France – la FFC, ment une progression de 750 % ! Autre tous les niveaux” (3). Toujours à la même donc, nous dira-t-elle combien elle a orga- chiffre à méditer : l’aîné des Pélissier, en époque, dans l’Orléanais Cyclisme, il en nisé de causeries de propagande, combien dix-huit années de courses profession- résume les points essentiels : “Il faut amélio- elle a réalisé de films éducatifs sur l’entraî- nelles, a effectué 52 000 km en courses, rer la prévention et l’information, mettre en nement et l’hygiène sportive ? C’est bien alors qu’Eddy Merckx, cinquante ans plus œuvre des moyens de contrôle plus élaborés, joli de sévir maintenant alors qu’on n’a tard, en treize saisons, a roulé 400 000 km mener une chasse sans merci contre les pour- jamais rien fait de constructif auparavant” à l’avant du peloton. En clair, cela veut dire voyeurs, biologistes, chimistes et médecins (6). En mai 1977, Olivier Dussaix, alors que, pendant que le premier parcourait 1 km complices” (4). Un an plus tard, Laurent président de la FFC, et Jean-Pierre Soisson, à 25 km/h, le champion bruxellois en faisait Brochard, l’un des protagonistes de l’affaire secrétaire d’État à la Jeunesse et aux 10 à 37 km/h ! Tant que sera entretenu un Festina du Tour 1998, est interrogé sur cette Sports, avaient signé un accord qualifié milieu aussi favorable à l’excès, il sera vain question par Sport et Vie : “Depuis que vous d’historique par La France Cycliste, le de compter sur une prise de conscience des pratiquez le cyclisme de haut niveau, avez- journal de la FFC (7). Dans cette conven- principaux intéressés. Peut-on espérer une vous reçu, ne serait-ce qu’une fois, une infor- tion entre les deux parties, l’État promettait véritable prise de conscience des dirigeants mation sur le sujet ?” Réponse de Brochard : un effort sans précédent en faveur de son devant leurs responsabilités ? Et envisager “Non, jamais. C’est vrai que ça manque. encadrement ainsi que de son équipement. l’effort d’éducation qui doit en sortir ? Il Dans les petits clubs, ce serait bien de passer En contrepartie, la fédération s’engageait avec n’est pas utile d’énumérer ici la liste des le message de temps en temps. À mon avis, l’aide de ce dernier à assurer entre autres : mesures indispensables. Chaque fédération ce n’est pas quelque chose qui se pratique – une éducation sportive des jeunes depuis agite plus ou moins régulièrement le hochet très souvent” (5). la catégorie des prélicenciés ; d’un encadrement sinon professionnel, du Si l’on en croit Abel Michéa, journaliste à – à poursuivre son action sur le plan médical moins parfaitement compétent. L’Humanité à la fin des années 1960, cette dans le domaine de l’information, des exa- carence au niveau de la pédagogie anti- mens approfondis et des contrôles ; Essentiel : améliorer l’informa- dopage n’est pas récente : “Mais qui prend – à veiller particulièrement à ce que ses tion et la prévention la peine d’éduquer sur ce sujet les jeunes comités régionaux appliquent avec effica-

Les méthodes de formation existent. La Le prix de la lutte et de la prévention volonté de les appliquer beaucoup moins. En pratique, on trouve des fédérations de 1987 : 2,5 millions de francs pointe comme celle du et, en regard, En 1987, Christian Bergelin, alors secrétaire d’État chargé de la Jeunesse et des Sports, par- d’autres fédérations qui en sont encore au tait en guerre contre le dopage. Un budget de deux millions et demi de francs avait été affecté Moyen Âge. à la lutte antidopage, les deux tiers de cette somme étant destinés à la prévention. Celle-ci En dehors de la prévention (calendrier, enca- comprenait des actions auprès des professionnels de la santé, de l’encadrement sportif et drement médico-technique, suivi médical), auprès des sportifs eux-mêmes, par l’intermédiaire de dépliants, d’affiches, d’autocollants et l’information et l’éducation doivent bien sûr d’un slogan : “Dopage, dégage !” trouver leur place. Or, depuis le début des 1997 : 12 millions années 1960 et la mise en place de la lutte • “En arrivant au ministère, j’ai constaté que le budget affecté à la lutte contre le dopage avait antidopage, ces deux axes incontournables diminué chaque année depuis 1990. J’ai enclenché un mouvement contraire pour revoir à la n’ont eu qu’un rôle très marginal. Prenons hausse les moyens sur ce dossier primordial” (Guy Drut, France), ministre de la Jeunesse et l’exemple de la Fédération française de des Sports de mai 1995 à mai 1997, JDD, 04.02.1996). cyclisme (FFC). Au début de l’année 1997, • Le 20 décembre 1996, lors d’une conférence de presse, Guy Drut annonce que le budget de Daniel Baal, son président, part en guerre la lutte antidopage qui, pour l’année écoulée était de 3,5 millions de francs, passera à 12 mil- contre le dopage. Il utilise les publications des lions en 1997. comités régionaux pour faire passer un mes- sage de fermeté où il insiste sur l’éducation, 2000 : 115 millions l’information et la prévention. • “La plus grosse partie des moyens supplémentaires que le ministère a décidé de consacrer Par exemple, dans Normandie Cyclisme, il à cette lutte en 1998 sera affectée à l’information des sportifs et à celle de leur entourage. en résume les points essentiels : “Il Lorsqu’on arrive au contrôle positif, il est déjà trop tard, le mal est fait” (Marie-George Buffet, convient donc parallèlement de maintenir le France), ministre de la Jeunesse et des Sports depuis mai 1997, Le Figaro, 06.01.1998) dispositif répressif actuel et de le renforcer. • Dans une communication au conseil des ministres, Marie-George Buffet a annoncé que, au Les recherches doivent être poursuivies afin cours de l’année 2000, le gouvernement allait consacrer 115 millions de francs à la lutte anti- que toutes les substances interdites puissent dopage et à la protection des sportifs (source : Le Quotidien du Médecin, 5.05.2000).

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cité les termes de la présente convention. à ses risques et ses alternatives, s’affirme Si l’on se réfère à ce qui se passe aujour- clairement : 75 % des minimes, 81 % des Antibiotiques, vitamines d’hui, l’ “accord historique” ne l’a été que cadets, 89 % des juniors et espoirs expri- et dopage : un tenace amalgame sur le papier. Une bonne vingtaine d’an- ment cette volonté. Cette demande de for- nées plus tard, sous la pression des affaires mation s’oriente en priorité en direction de Vingt-cinq pour cent des Français croient de dopage qui éclaboussent le milieu l’encadrement fédéral des clubs, des comi- que les médicaments anti-infectieux (antibio- cycliste et ternissent son image, la FFC va tés départementaux et régionaux. Signalons tiques) figurent sur la liste des substances se lancer bien timidement dans des actions que le travail sur lequel s’est appuyé le doc- interdites en compétition. antidopage. Malheureusement, si l’on en teur Calvez a été réalisé par Yannick En 1994, une enquête d’opinion grand public, croit la mobilisation des clubs, il est peu Thibaudeau, en 1999, dans le cadre de la lancée par la Commission médicale du probable que l’on enregistre un change- préparation d’un diplôme universitaire Comité national olympique et sportif français ment dans les comportements déviants. En “Toxicomanie et dopage” à la faculté de (CNOSF) a montré de façon surprenante que, effet, une expertise a été menée en 1999 au médecine de l’université d’Angers. trente ans après les débuts de l’action anti- sein du comité des Pays de la Loire afin de dopage, ils sont encore 25 % à penser que les vérifier la réalité des actions de prévention antibiotiques figurent sur les listes de produits Les médecins ne sont prohibés. Apparemment, parmi ce quart de la des clubs auprès de leurs jeunes licenciés : pas les derniers ! population figurent certains journalistes. Déjà minimes, cadets, juniors, espoirs. Les en 1978, dans le mensuel de course à pied résultats de cette enquête sur la campagne Courir, les docteurs Michel Iniguez et Pierre antidopage lancée début 1999, ayant Dans le monde sportif associatif, les diri- Sagnet avaient souligné l’ignorance de ceux consisté à adresser à tous les présidents de geants du cyclisme français sont loin d’être qui avançaient l’argument de l’impossibilité club un cédérom et un livret et à convier les les seuls à faire ce constat d’échec. de se soigner efficacement avec des antibio- comités régionaux à faire des réunions En 1994 une enquête d’opinion grand public, tiques à cause du contrôle antidopage : “Les d’information, ont été présentés lors du lancée par la Commission médicale du bronchites et les sinusites sont relativement congrès de la FFC le 25 février 2000 à Comité national olympique et sportif français fréquentes chez le jeune adulte. Là aussi, les Draguignan (Var). C’est le Dr Alain (CNOSF) a montré de façon surprenante que antibiotiques provoquent la guérison en Calvez, président du Comité régional des trente ans après les débuts de l’action antido- quelques jours et l’entraînement peut Pays de la Loire mais aussi de la commis- page, 50 % des personnes interrogées reprendre sans risque. Pour y avoir renoncé, sion médico-sportive et sécurité de la FFC, croyaient encore que les vitamines étaient des l’illustre , victime d’une qui en a dressé le bilan dans le journal fédé- substances proscrites et 25 % continuaient à bronchite dans les Alpes, dut se contenter ral La France Cycliste (8). Si 65 % des penser que les antibiotiques figuraient sur les d’une très moyenne 19e place au classement clubs ont répondu au questionnaire adressé, listes rouges des produits prohibés (9). Fait général du 1975. Certains, 53 % des présidents de club, une courte encore plus significatif, une campagne de sen- nous l’avons de nos yeux lu, ont voulu faire majorité, déclarent avoir assisté à une sibilisation sur les agents dopants auprès croire abusivement que les antibiotiques étaient des produits interdits entraînant des réunion d’information sur la prévention du d’étudiants américains avait non pas découra- contrôles antidopage positifs. Il n’en est rien.” gé mais plutôt favorisé la consommation (10). dopage au cours des douze derniers mois. Plus récemment, dans un ouvrage consacré Concernant les documents adressés par la Autre constat préoccupant : les médecins, qui à l’ascension mythique de l’Alpe d’Huez FFC, 28 % ont été conservés par les prési- sont, avec les enseignants, les interlocuteurs (“Le grand roman de l’Alpe d’Huez”. Éd. dents, donc hors-circuit, 40 % ont été prêtés à les mieux placés pouvant faciliter l’éducation Romillat, 1995 ; 191 : 54), Jean-Paul un dirigeant ou à un coureur, 31 % ont été des jeunes sur le corps et la santé, semblent Vespini – journaliste au quotidien Le confiés pour préparer une réunion. Chiffre peu aptes à jouer correctement ce rôle. Provençal et correspondant du mensuel consternant : 81 % des présidents admettent Rappelons à ce sujet qu’une étude effectuée Vélo contribue lui aussi à entretenir le ne pas avoir prévu d’organiser une réunion en 1985 sur un échantillon d’étudiants en mythe du contrôle positif aux antibiotiques. d’information. Seulement, 31 % étaient dis- médecine et en pharmacie a révélé que 42 % L’histoire se passe toujours dans le Tour de posés à accueillir des intervenants pour la des premiers et 48 % des seconds prenaient, France mais deux ans plus tard, en 1977, mise en place de telles réunions. au moment de leurs examens, des excitants et avec comme acteur principal Eddy Merckx, La grande majorité des jeunes coureurs des tranquillisants (11). Lorsqu’ils seront ins- quintuple vainqueur de la Grande Boucle : déclare être peu informée sur les risques du tallés dans leur vie professionnelle, on peut “Dès les premiers lacets du col de la dopage. Plus de 70 % ont une connaissance facilement prévoir le comportement qu’ils Madeleine, Eddy Merckx, victime d’une personnelle acquise à 30 % par la télévision adopteront face à leurs patients ou clients, intoxication alimentaire (au céleri-rave !) et la radio et entre 36 et 50 % par leurs lec- qu’ils soient sportifs ou non. au cours de la journée de repos à Fribourg, tures ou les discussions entre eux. En De même, tout le monde sait que le tabac accusa le coup. Il n’avait pas pu se soigner convenablement, les médicaments les plus revanche, le rôle des clubs et des stages tue, les médecins en particulier. Pourtant, efficaces se trouvant sur… la liste des pro- n’intervient qu’à hauteur de 10 % ; 58 % 35 % de ces derniers fument ! En vingt duits interdits. Toujours le doping qui pla- des minimes, 62 % des cadets et 62 % des ans, le nombre de femmes enceintes qui nait comme un aigle au-dessus de sa proie. juniors et espoirs ont la sensation de n’être fument pendant la grossesse a doublé. En Pointé en queue de peloton, le Belge s’ac- pas pleinement informés. Une volonté 1972, 10 % des femmes fumaient et 41 % crocha désespérément.” d’être mieux formé, par rapport au dopage, arrêtaient pendant leur grossesse (12).

37 u Focus Foc s us ocus Foc F ment eux-mêmes bien éduqués et formés Commentaire sur ces idées fausses avec des messages de consensus. Cela, bien sûr, nécessite une volonté politique au plus “Rappelons que, le plus souvent, l’intoxication alimentaire (autres noms : gastro-entérite, haut niveau de l’État avec l’implication acti- toxi-infection, indigestion) est due à un germe (virus ou bactérie) contenu dans un aliment ve des ministères de la Santé, de l’Éduca- souillé et qui a été ingéré. Les aliments responsables sont le plus souvent crus (légumes) ou cuits mais ayant reposé plusieurs heures à l’air libre (viande, charcuterie) ou des fruits de mer. tion, de la Jeunesse et des Sports. Si tel est Les symptômes initiaux sont, en général, des nausées et des vomissements, suivis de diar- le cas, cela démontrera que le dopage est rhées avec des selles molles ou liquides qui, quelquefois, contiennent du pus ou du sang. Les enfin réellement considéré comme une autres symptômes sont des douleurs abdominales, la perte d’appétit et l’asthénie. Il est évi- priorité de santé publique. En associant dent que dans de telles conditions, il est difficile de gravir un col avec les meilleurs. l’éducation à la prévention et à la répres- Habituellement, les symptômes diminuent au 2e jour d’évolution et disparaissent le troisième sion, il sera alors possible d’entrevoir la ou le quatrième jour. Le traitement associe : le repos au lit, la suspension de l’alimentation soli- marginalisation du fléau. de pendant vingt-quatre heures, la réhydratation par administration de liquides abondants, des médicaments antispasmodiques, antiémétiques, antidiarrhéiques, antiseptiques intestinaux et antibiotiques, si la cause est infectieuse. Lorsque les symptômes diminuent, le patient peut Les ministres y croient commencer à prendre des aliments semi-liquides et faciles à digérer. La totalité des remèdes que nous venons de citer – antibiotiques compris – ne contiennent • Pierre Mazeaud (France), ministre de la aucune substance prohibée et, pourtant, on continue à nous asséner que l’on ne peut pas se Jeunesse et des Sports de 1973 à 1976 : “C’est soigner quand on est sportif de compétition. Ce discours apparemment porte ses fruits, par une politique d’éducation, donc de pré- puisque 25 % des Français croient toujours que les antibiotiques sont des substances figurant vention, que l’on réglera la question du sur la liste rouge. Que font les pouvoirs sportifs qui, depuis des lustres et à chaque tintamar- dopage (et en instituant par ailleurs un sys- re médiatique consécutif à une affaire de dopage, annoncent des actions itératives d’informa- tème répressif sévère pour exclure définiti- tion et de prévention… Visiblement, elles sont peu efficaces, surtout lorsqu’on apprend par la vement les athlètes convaincus de dopage)” même enquête du CNOSF citée plus haut que 50 % des Français (et donc parmi eux des ath- (in : “Sport et Liberté”, , Denoël, lètes ou des parents d’athlètes) croient que les vitamines sont des substances interdites !” 1980, 230 p : 180). Propos recueillis par P. Depostis • Alain Calmat (France), ministre de la Jeunesse et des Sports de 1984 à 1986 : “Aux Assises de la médecine du sport à Rennes, une Vingt ans plus tard, ce sont 24,5 % des nous l’avons souligné plus haut, ils appar- commission dopage s’est surtout intéressée à femmes qui fument et seulement 30 % d’entre tiennent au corps médical. l’information et à la formation des cadres et des sportifs. Elle a également établi des for- elles qui arrêtent pendant la grossesse. La prévention la plus efficace passe par une mulations pour un meilleur contrôle en res- modification beaucoup plus profonde du ponsabilisant un peu plus les fédérations. Apprendre à gérer son corps comportement de l’individu, et cela dès Toutes ces réflexions sont actuellement à l’enfance. À cet âge, la santé est un mot l’étude. Il en sortira des mesures concrètes dès l’enfance creux. Ils ne savent même pas que la vie a dans quelque temps” (L’Équipe Magazine, une fin. Il faut modifier toute l’éducation 28.09.1985 : 80). Plusieurs études l’ont démontré (football des enfants et leur apprendre à connaître, à • Christian Bergelin (France), secrétaire d’É- américain, cyclistes du Tour de France), les gérer leur corps. Ce dernier doit être consi- tat à la Jeunesse et aux Sports de mai 1986 à substances dopantes favorisant la suractivi- déré comme un partenaire et non comme un mai 1988 : “Sans action de dissuasion éduca- té provoquent des effets délétères sur le plan adversaire. Parmi les éducateurs potentiels, tive durable, il n’y a pas de lutte antidopage santé et pourtant, comme l’a bien résumé le professeur d’EPS nous paraît le plus apte fructueuse” (AFP, 06.05.1987). Daniel Baal : “J’ai le sentiment profond que à remplir cette mission. Il peut expliquer à • Roger Bambuck (France), ministre des Sports de mai 1988 à mai 1991 : “La lutte la santé n’est, de loin, pas la préoccupation l’enfant de manière concrète pourquoi, lors- contre le dopage nécessite l’effort de tous. La essentielle d’une majorité de sportifs de qu’il court, il transpire, a soif, s’essouffle, répression sans éducation ne sert à rien. haut niveau” (13). De son côté, le cycliste etc. Si les gens connaissaient mieux leur L’éducation concerne les sportifs, les entraî- Erwann Menthéour, le premier coureur mis corps, ils ne prendraient pas n’importe quoi. neurs qui doivent travailler avec le corps médi- en arrêt de travail pour cause d’hématocrite Au total, mieux on connaît son corps, cal” (Impact Médecin, 03.09. 1988). au-dessus du seuil légal de 50, confirme mieux on sait s’en servir et moins on a envie • Marie-George Buffet (France), ministre de que la crainte des effets secondaires des de le dérégler en abusant de drogues aux la Jeunesse et des Sports depuis mai 1997 : “Je drogues de la performance n’est pas un élé- constants effets secondaires. Face à ce bilan, souhaiterais surtout que les fédérations n’at- ment incitant au respect des règles : “Il est il est clair que le concept de l’éducation et tendent pas le contrôle positif pour intervenir complètement irréaliste de parler de santé à de l’information doit être entièrement mais qu’elles développent dès maintenant une un gamin qui gagne 100 000 francs par repensé. Pour notre part, nous estimons que campagne de prévention et d’information vers mois. Lui dire que le dopage menace son les campagnes d’information ont peu de leurs sportifs comme vers leurs cadres. Dans le domaine de l’information, l’État a égale- intégrité physique ? Il va vous rigoler au chance d’aboutir si, en dehors des sportifs ment une responsabilité. Nous éditons actuel- nez” (14). Le constat est évident : la et du public, l’ensemble des concernés – lement une brochure en direction des plus connaissance d’un risque ne modifie pas le entraîneurs, officiels, experts, professeurs jeunes” (Le Figaro, 06.01.1998). comportement des gens même si, comme d’EPS et médias – ne sont pas préalable-

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Un tryptique obligé des campagnes antidopage Références bibliographiques

• Dr Giorgio Di Prampero (Italie), université de Milan : “Il est préférable de lutter contre le 1. Médecine, éducation physique et dopage par une propagande efficace parmi les athlètes, leurs instructeurs et… les médecins” sport (organe officiel de la Société fran- (L’Équipe, 10.11.1967). çaise de médecine du sport). – Premier • Dr Pierre Dumas (France), médecin fédéral de la FFC : “Il faut en effet reconnaître que la dis- colloque Européen sur le doping. suasion par l’éducation a échoué. Un grand nombre de coureurs qui sont habitués à prendre Uriage 26-27 janvier 1963. – Méd. des risques considérables dans les courses sont souvent prêts à jouer aussi avec leur santé et Ed. Phys. Sport, 1964, 38, n° 1 : 13- considèrent encore le risque des médicaments comme un autre” (L’Équipe, 28.06.1979). 65. • Raphaël Géminiani (France), cycliste professionnel depuis 1946 : “En réalité, si l’on veut lut- 2. Schaller G. Marcel Tinazzi : “Est-ce ter contre l’abus d’excitants, en ce qui concerne les sportifs, il faut éduquer les jeunes, leur qu’on va se défoncer la santé pour rien ?”. démontrer que cet abus peut entraîner des conséquences dangereuses” (Géminiani R. “J’en ai de ces Tours dans ma musette...” (propos recueillis par Robert Ichah). Miroir Sprint, 1955, – L’Équipe Magazine, 1984 ; n° 185, n° 480, 22 août : 3). 10 mars : 54-7. • Antonin Magne (France), cycliste professionnel de 1926 à 1939 1972 : “Nous avons un 3. Normandie Cyclisme, 11.02.1997. grand rôle à jouer, la presse, les éducateurs, me semblent être un barrage plus sérieux que les 4. Orléanais Cyclisme, 09.04.1997. gendarmes” (Miroir du Cyclisme, 1967, n° 92, octobre, p 14). 5. Sport et Vie, 1998, n° 48, mai-juin : • Jacques Marchand (France), journaliste : “Le contrôle n’est qu’un élément de la lutte anti- 45. dopage, il n’est pas un remède à lui seul. C’est dans une action plus profonde et plus noble 6. Miroir du Cyclisme, 1967 ; n° 91, que la répression qu’il faut rechercher le remède en faisant appel à l’éducation” (L’Équipe, septembre : 31. 21.12.1967). 7. La France Cycliste, 1977 ; n° 1538, • Dr Patrick Nédelec (France), médecin de l’équipe GAN : “À la Fédération française de 19 mai : 1. cyclisme, il n’y a même pas de politique d’éducation des jeunes coureurs et de formation des 8. La France Cycliste, Comité directeur cadres contre le dopage” (JDD, 10.11.1996). fédéral du 25.02.2000. – La France • Raymond Poulidor (France), cycliste professionnel de 1960 à 1977 : “Pour les jeunes, l’édu- Cycliste, 2000, n° 2090, 24 mars : 14. cation, la surveillance sont à la base de tout. Hélas ! on procède à l’envers. C’est un peu 9. CNOSF, Livre blanc sur la lutte anti- comme les parents qui bien souvent ne s’occupent de leurs enfants qu’à partir de leur majo- dopage. Paris : éd. CNOSF, 1994. rité” (Miroir du cyclisme, 1967, n° 92, octobre : 12-13). 105 p : 102. • Germain Simon (France), président de la FFC de 1979 à 1989 : “L’expression ‘contrôle anti- 10. Bosworth E et al. Steroïdes anabo- dopage’ me révolte. Je préfère qu’on parle de lutte antidoping. C’est peut-être mon côté édu- lisants et athlètes universitaires (en cateur qui surnage, mais je crois également, à ce propos, à l’influence des mots. Il faut inten- anglais). Med Sci, Sports Exercice sifier les réunions d’information. Il faut faire passer l’éducation des coureurs avant la répres- 1989 ; 20 (suppl. 2) : 53. sion. Les informer des dangers qu’ils courent. Les persuader que la vie commence seulement 11. Mercier M, Herbert A, Renaud A. quand leur carrière se termine. Il faut arrêter toute la publicité qu’on fait sur ce grave problè- Enquête en milieu étudiant sur la me, essentiellement au détriment des cyclistes d’ailleurs” (Vélo, 1980, n° 149, décembre : 43). consommation de médicaments pen- • Yannick Stopyra (France), ex-international, responsable du centre de préformation de dant la période d’examens. Les Cahiers Madine à Bordeaux : “Le comportement des joueurs de demain se prépare aujourd’hui. Les de la Prévention, 1989, n° 2 : 79-96. éducateurs ont donc un énorme rôle de prévention à jouer. Il nous appartient, à nous tous, 12. Le Quotidien du Médecin, de proposer aux jeunes des valeurs saines. Il faut aider nos jeunes à s’armer psychologi- 11.06.1998 : 11. quement afin que, demain, ils soient capables de résister à la tentation du dopage” (Le 13. Le Dauphiné Libéré, 14.05.1999. Sport, 1999, n° 5, février : 16). 14. L’Humanité, 21.05.1999. Brève s Brèv es Donner envie d’arrêter proche des fumeurs, sur l’ar- rève rèv es rêt, ses difficultés, mais aussi B B Près de deux-tiers des fumeurs (58,4 %) souhaitent s’arrêter, mais sur les motivations et les moyens d’y arriver. “Chaques jour passé un sur dix seulement y parvient chaque année. Ainsi, 76,1 % des sans fumer est une victoire sur le tabac”, est donc la phrase clef de fumeurs réguliers ont déjà arrêté de fumer pendant au moins une- la “livraison” de la campagne 2000 lancée de nouveau par le CFES semaine. Devant un tel constat, et la CNAMTS. Un guide pratique, J’arrête de fumer, des méthodes les pouvoirs publics ont décidé pour y arriver,a été édité à 2 millions d’exemplaires. Il est disponible de poursuivre, pour les trois ans partout en France dans les Caisses d’assurance maladie, les comités à venir, leur programme de pré- départementaux et régionaux d’éducation pour la santé, les phar- vention engagé depuis 1997 macies et les cabinets de médecins généralistes. autour de l’arrêt du tabac. Ils l’enrichissent, cette année, d’un CFES : 2, rue Auguste-Comte, BP 51, 92174 Vanves Cedex. discours encore plus positif et [email protected] 39 Brève s Brè ves