RAPPORT DE SONDAGE

EN LA ROCHE-MAURICE (Finistère).

Site n° : 29.237.002 - AH.

Autorisation n° : 93.53.

Responsable : Michel LE GOFFIC

Archéologue Départemental du Finistère.

832a RAPPORT DE SONDAGE

EN LA ROCHE MAURICE (Finistère).

Site n° 29.237.002 - AH.

Autorisation n° 93.53.

Responsable Michel LE GOFFIC

Archéologue Départemental du Finistère.

1 RAPPORT DE SONDAGE

EN LA ROCHE-MAURICE (Finistère).

Site n° : 29.237.002 - AH.

Autorisation n° : 93.53.

Responsable : Michel LE GOFFIC

Archéologue Départemental du Finistère. Naissance d'Hervé VIII de Léon, fils d'Hervé VII et de Marguerite d'Avaugour, au château de la Roche-Maurice. Cet événement fut consigné sur la bible des sires de Léon ("apud Rocham seu Rupem Mauricii") (13). Ce seigneur réside à La Roche-Maurice durant la guerre de Succession derBretagne ainsi que son oncle Erard de Léon, sieur de Frémerville (14).

1363 Dans son testament, Hervé VIII fonde une chappellenie dans la chapelle dédiée à Saint Yves qui existe près du château ("item fundo & creo duas perpétuas Capellanias in capelle Beati Yvonis apud Rocham Morvam") (15). Ce seigneur étant mort sans héritier, sa soeur Jeanne de Léon qui avait épousé Jean I de rohan en 1349, apporte la vicomte dans cette puissante famille.

1374

Guillaume Riou est connétable de La Roche-Maurice (16).

1391 Alain de Rohan confie la garde du château à Hervé Goello et Guéhomar Manfuric lors de son voyage en (17). 1420 Jean V accorde la remise de rachat au vicomte de Rohan après la mort de son père à charge que Tristan de la Lande tienne durant un an les places de Rohan, La Chèze et la Roche- Maurice (17 bis).

1421 A la suite d'un conflit entre des officiers ducaux et ceux du vicomte de Rohan pour la perception de droits sur les vaisseaux qui abordent à le duc ordonne, par un mandement du 28 octobre, que la moitié des trente sols perçus par ses gens sur chaque tonneau de marchandise soient baillés au vicomte "pour iceux mettre et employer à la réparation de son chastel et forteresse de la Roche-Maurice qui est sur port de mer et en danger & lequel a mestier de réparation" (18). Des travaux sont, sans doute, effectués sur le château à cette époque.

1472 Ulcéré par les intrigues de Jean II de Rohan avec Louis XI, François II confisque une première fois plusieurs des châteaux du vicomte dont celui de la Roche-Maurice où il place une garnison sous les ordres de Louis de Rosnivinen (19).

1479 A la mort du précédent, son fils cadet, Guillaume, lui succède dans la charge de capitaine qui rapporte alors trois à quatre cents livres par an (20). Dans un mémoire, Jean II de Rohan décrit ainsi le rôle de la Roche-Maurice : "est-il que de tout temps la seigneurie de Léon a esté emparée d'un très bon fort et grand chasteau fort et puissant de deffense autant et plus que chasteau de Bretagne, nommé La Roche-Morice, qui grandement a servi et peut servir quand le cas en adviendra à la tuition et garde des biens subjets de tout le pays" (21).

1484 Nouvelle saisie ducale : Guillaume de Rosnivinen recouvre la garde du château accompagné de six hommes d'armes gagés chacun à cent sols par mois (22). Le vicomte de Rohan se soumet aux exigences ducales ; Perceval de Lezormel est nommé capitaine du château mais dès 1487, le duc reconfisque la place (23).

1489 En février, Jean II de Rohan reconquiert ses terres à la tête d'une armée françaisequ i occupe Brest (24). Le château de la Roche-Maurice qui sert de poste avancé à cette ville est partiellement démantelé pour empêcher qu'il ne soit utilisé par les troupes ducales.

1491 Charles VIII autorise le vicomte de Rohan à réparer la forteresse toutefois les vassaux de celui- ci refusent d'y faire le guet en 1492 car le château est, disent-ils, trop délabré. Le roi confirme la jouissance du droit de guet à Jean II qui maintient Perceval de Lezormel à son poste de capitaine jusqu'en 1506 (25). Il semble cependant que dès cette époque, le château cesse d'être entretenu comme place de guerre : les réparations qui y sont effectuées concernent plutôt la conversion de la forteresse en prison (les salles basses des tours de l'entrée sont aménagées pour en faire des cachots en 1492) même si, en 1504, le vicomte de Rohan lui consacre encore d'importantes sommes (26).

Fin du XVHe siècle Le château qui a perdu tout rôle militaire est à demi-ruiné ; il est utilisé comme geôle pour la juridiction de la seigneurie de (27).

DESCRIPTION

Le site : les rapports entre le château et le village.

Le château occupe l'extrémité d'un promontoire qui surplombe de plusieurs dizaines de mètres, la confluence de l'Elorn dont la vallée est orientée est-ouest et d'un ruisseau, le Morbic. Le rocher de quartzite très exigu est relié au plateau qui le domine au sud-est par une dépression de terrain, un ensellement, où fut implanté le village de La Roche-Maurice. Le choix du site résulte donc de la présence d'un abrupt escarpé, facile à défendre, même si des versants plus élevés existaient au sud, ce qui ne comptait guère à une époque où la portée des armes de jet n'excédait pas quelques dizaines de mètres.

Cette contrainte du site dut cependant être très vite ressentie, non pas pour l'aménagement du château lui-même mais pour celui de ses annexes. Il semble en effet probable q'une basse-cour fut établie en avant de l'enceinte ; cette bayle abritait les communs, les écuries, les logements des serviteurs et de la garnison qui ne purent tous être édifiés dans la forteresse. Ce type de dispositif correspond bien à l'organisation des châteaux des Xle et Xlle siècles qui comportaient fréquemment des défenses échelonnées en hauteur et en profondeur : donjon (ici ceint d'une chemise), enceinte et basse-cour souvent sommairement défendue par un fossé et une palissade de bois, quelquefois par un rempart maçonné flanquéd e tours. La bayle de La Roche-Maurice ne possédait sans doute pas de retranchements importants car le village qui lui a succédé ne conserve pas dans son parcellaire de traces notables d'un "vallum" ou d'une muraille. Cette localité reste de taille modeste, sa superficie n'excédant pas quelques hectares. La "place du château" (qui pourrait occuper l'emplacement d'anciennes défenses avancées) et l'église en constituaient le centre. Cet édifice, cité dès le XlVe siècle, remplaça la chapelle castrale qui n'avait pu trouver place dans la forteresse. Elle demeura une église tréviale de , grosse paroisse rurahrdont le centre était distant de six kilomètres. La faible importance de ce village qui jouxtait l'un des principaux châteaux des vicomtes de léon résulte à la fois du rôle stratégique de la place, des contraintes topographiques mais aussi de la proximité de Landerneau, cité qui comptait déjà trois paroisses fondées au détriment d'anciennes circonscriptions ecclésiastiques voisines.

La Roche-Maurice était donc un château de superficie restreinte auprès duquel se serraient les habitations de quelques vassaux ainsi que des communs et quelques bâtiments à usage administratif. Les vicomtes ne cherchèrent pas à promouvoir l'essor de cette localité et se contentèrent probablement d'autoriser l'accès de la chapelle castrale aux gens de leur suite comme ils le firent pour l'oratoire de Saint-Julien à Landerneau. Un verger, un moulin et peut- être déjà un pont complétaient l'ossature de ce microcosme au bas Moyen-Age.

Description d'ensemble et état des vestiges

La topographie du site conditionna le plan de la forteresse : les constructeurs du château utilisèrent judicieusement les irrégularités rocheuses de l'éperon dont la principale, une butte haute d'une vingtaine de mètres, servit d'assise au donjon et à son enceinte tandis que sur une deuxième plate-forme moins élevée (cinq à dix mètres) furent édifiés des ouvrages secondaires. Ces deux éminences orientées nord-sud étaient naturellement protégées par des abrupts rocheux au nord et à l'est, et même pour la première à l'ouest et au sud. Celle-ci constituait un réduit autonome qui dominait l'ensemble du château. Le flanc sud de la forteresse, le plus accessible, était barré par un profond fossé et un rempart long d'une cinquantaine de mètres qui reliait la base sud-ouest de la plate-forme occidentale à une grosse tour qui armait la partie sud de la terrasse orientale. Ce dernier édifice, vraisemblablement doublé d'un autre similaire, flanquait l'entrée de la place que défendait un pont-levis.

L'espace intérieur du château était exigu, de l'ordre de trois à quatre mille mètres carrés. La nature du site rendit problématique l'aménagement interne de la place où les conditions de résidence étaient moins favorables que si la forteresse avait été implantée en terrain plat. Ainsi l'escalade de la plate-forme du donjon qui constituait une épreuve pénible pour les assaillants devait aussi être incommode pour les nobles léonards même s'il existait probablement alors des rampes de bois pour en améliorer l'accès. L'espace plat qui se trouvait entre les deux plates- formes abritait sans doute des constructions peut-être des communs alors que d'autres logements s'appuyaient contre la courtine sud en-dessous du donjon auquel était accolé un logis.

L'examen des vestiges nous montre un château ruiné qui servit pendant plusieurs siècles de carrières de pierre pour édifier les maisons voisines. Seul le donjon conserve une dizaine de mètres d'élévation ainsi que les murs est et nord de la chemise : c'est l'image que l'on a du château depuis la vallée. Les vestiges des autres ouvrages paraissent être d'un moindre intérêt pour le visiteur ; ils se réduisent le plus fréquemment à des substructions recouvertes de ronces. Des fouilles menées en 1968 par l'association "Mein Breiz" ont permis de reconnaître une partie de la base de l'importante tour circulaire qui jouxtait l'entrée disparue sous les éboulis qui obstruent également les salles basses de ces deux tours dont on avait commencé le dégagement en 1926 (30).

Description des ouvrages

Le donjon et sa chemise

C'est l'ouvrage le plus ancien du château : il est juché sur la plate-forme la plus élevée au nord- ouest. Orientée nord-sud, celle-ci a une superficie de près de mille mètres carrés ; elle mesure quinze à vingt mètres de largeur. L'ensemble du sommet est circonscrit par une enceinte, une chemise. Le donjon s'élève au sud, en arrière et en surplomb du dispositif d'entrée, disposé au sud-est. Par ses défenses, cette tour participait donc activement à la protection de l'accès le plus vulnérable de la plate-forme et par sa masse il couvrait la petite esplanade ainsi que les bâtiments qui lui étaient contigus au nord. On le bâtit à la verticale de l'abrupt à l'est ce qui obligeait les assaillants à le contourner par l'ouest. Ils empruntaient alors un passage d'une largeur inférieure à deux mètres pour accéder au centre de la plate-forme.

Le donjon est un trapèze presque carré d'une douzaine de mètres de côté qui conserve une élévation de huit à douze mètres. Il délimite une salle intérieure également quadrangulaire (ou plutôt octogonale puisque les angles en sont coupés) de plus de cinq mètres de côté. Il ressort de cet édifice massif, trapu même compte-tenu de son découronnement, une impression de robustesse qui est confirmée par l'épaisseur des murs (deux mètres et demi et même trois mètres pour le mur sud, le plus exposé). Ce caractère est accentué par l'absence d'ouvertures : au niveau actuellement accessible qui correspondrait au premier étage, n'existaient outre la porte qu'une baie de faible dimension également percée dans le mur occidental et un jour- archère qui éclairait chichement l'escalier aménagé dans la muraille au sud-ouest. La paroi orientale est aveugle (elle contenait la cheminée) ; le percement visible dans la muraille nord correspondrait seulement à une niche qui fut altérée lors de la ruine de l'édifice et des consolidations récentes (comme la partie est de la muraille occidentale du donjon remontée avec un mortier de ciment).

L'élévation originale de cet édifice est difficilement reconstituable ; deux niveaux sont encore visibles mais il pourrait bien en avoir existé deux ou trois autres :

- les premières assises des murailles du donjon ne sont plus observables à cause des éboulis qui les cachent ; elles doivent prendre appui sur la roche à environ trois mètres au-dessous du plancher de la salle du premier étage. Une pièce, obscure car trop à la portée des assaillants, fut peut-être aménagée dans cet espace auquel on ne pouvait accéder que par une trappe. Ce rez-de-chaussée abritait probablement un magasin pour les vivres (seule une fouille permettrait de vérifier son existence) (31).

- la porte du donjon s'ouvrait à l'ouest au niveau du premier étage, à plusieurs mètres de hauteur. On y accédait alors grâce à une passerelle en bois escamotable qui reposait sans doute sur le chemin de ronde de la courtine ouest de la chemise. Ce petit pont pouvait être manoeuvré ou tout au moins défendu à partir d'une baie située au-dessus ; l'entrée. Des poutrelles en bois transversales qui s'encastraient dans la paroi renforçaient celle-ci lorsque les vantaux étaient clos. La pièce munie d'une cheminée à hotte et conduit cylindrique, serait, selon certains auteurs, la salle d'apparat où les seigneurs de Léon recevaient leurs vassaux ce qui semble toutefois peu sûr du fait de son exiguité et de son faible éclairage (25 à 30 mètres carrés, moins de 3 mètres de hauteur).

- on accédait du premier au second étage par un escalier coudé, logé dans l'angle sud-ouest de la tour. Cettersalle, identique à la précédente, servait d'appartement selon la disposition d'usage dans les donjons de cette époque. Elle aussi n'était que sommairement éclairée par un profond jour-archère percé au sud-ouest et par une petite baie qui s'ouvrait à l'ouest dans l'escalier, au- dessus de la porte du donjon. Un plancher sur solives en constituait le sol alors que son plafond était vraisemblablement une voûte dont ne subsistent que les retombées formées de lamelles de schistes, posées de chant et grossièrement appareillées.

- cette voûte supportait soit une terrasse crénelée aménagée au sommet de l'ouvrage soit un autre étage d'où l'on accédait aux défenses sommitales de la tour. La première représentation du château ne remonte qu'à 1719, date à laquelle le donjon avait déjà perdu son couronnement et que l'on ne saurait donc reconstituer avec précision. Il est possible que celui-ci ait été volontairement dérasé à une époque reculée pour lui ôter toute valeur défensive ou, plus simplement, pour éviter les chutes de pierres.

La chemise, ou courtine du donjon, épousait les contours du rocher ce qui permit d'y aménager des postes de tir pour la flanquer sommairement. S'appuyant au donjon (côté nord-est) elle dessinait un éperon polygonal au nord avant de longer la paroi occidentale de cette tour. La muraille se prolongeait au sud où elle délimitait un espace de quelques dizaines de mètres carrés en avant du donjon (32). De cette position, les défenseurs pouvaient commodément arroser de projectiles les assaillants qui seraient parvenus à s'emparer de la première enceinte et qui auraient tenté d'attaquer l'ouvrage principal.

Plusieurs portes successives protégeaient l'accès de la plate-forme. L'une d'elles existait sûrement dans la partie sud-est de l'enceinte qui n'est plus visible. Un contrefort qui renforçait la paroi sud du donjon dans l'angle sud-ouest pourrait avoir, par ailleurs, servi de support à une porte disparue lors de l'effondrement de la courtine sud. Les traces d'une autre entrée demeurent visibles contre la paroi occidentale du donjon, à trois mètres de l'angle sud-ouest. Ces vestiges consistent en un piédroit de granit haut d'environ deux mètres qui est surmonté d'arrachements de maçonnerie assez importants qui correspondraient aux restes d'une muraille reliant la courtine au donjon. Le sommet de ce jambage est situé à la même hauteur que l'assise inférieure du montant de la porte du donjon, ce qui signifie que cet accès se trouvait au- dessous de celui du donjon auquel il était perpendiculaire. Ce dispositif d'entrée semblerait toutefois être plus complexe : le premier piédroit est encore surélevé (de l'ordre de deux à trois mètres) par rapport au chemin d'accès actuel et il est précédé de trois cavités carrées superposées (d'environ trente centimètres de côté) où devaient s'encastrer des poutrelles de bois escamotables... Seul un déblaiement et une étude minutieuse permettraient d'expliquer cette construction qui intégrait les accès à la plate-forme et au donjon.

La partie nord de l'ouvrage est également couverte d'éboulis dont l'épaisseur doit atteindre trois ou quatre mètres près de l'angle sud-est du donjon. Au nord, se dresse un éperon polygonal mesurant huit mètres sur quinze dans sa plus grande largeur. On y accède par deux entrées dont l'une donne sur un couloir chichement éclairé par trois petits jours-archères d'inégale dimension. Il menait probablement à une latrine plutôt qu'à une poterne haute (une partie du mur extérieur s'est effondrée). Ce corridor communiquait avec une salle pentagonale d'une vingtaine de mètres carrés qui s'ouvrait aussi sur l'esplanade ; cette pièce, démunie d'autres ouvertures, était surmontée d'un étage planchéié qu'éclairait une baie percée au nord dans le mur épais de deux mètres. A proximité de l'éperon, sur la courtine ouest, existait un saillant grossièrement semi-circulaire qui flanquait la muraille et défendait, peut-être, une poterne haute aménagée dans une anfractuosité du rocher.

Un petit corps de logis occupait en partie l'esplanade entre l'éperon et le donjon. Au pignon nord de celui-ci se voient toujours les traces d'arrachement d'une toiture à deux pentes. Les murs ouest et nord ont disparu (leurs bases seraient enfouies sous les déblais) tandis qu'à l'est ce bâtiment s'appuyait contre la courtine où subsistent au niveau de la cour les brèches de deux baies larges de plus d'un mètre dont les pierres de taille ont été arrachées. Les autres ouvertures prenaient le jour ce ce côté où elles bénéficiaient de la protection de l'abrupt ainsi qu'à l'ouest, en arrière de la courtine. La surface du logis qui comportait sans doute un étage, était d'une centaine de mètres carrés ; il doublait presque la superficie logeable du donjon avec lequel il ne communiquait pas directement.

L'enceinte

Celle-ci comporte trois éléments : la plate-forme orientale, la courtine sud qui reliait cet ouvrage à la base sud-ouest du rocher du donjon et enfin une muraille linéaire, flanquée de contreforts plats, au nord au-dessus de l'abrupt.

La plate-forme orientale est moins élevée et moins vaste que celle du donjon ; elle devait toutefois constituer un puissant réduit, peut-être autonome, sur le tracé de l'enceinte. Elle était ceinte de murailles au nord et à l'est et probablement d'une tour carrée dont on voyait encore les substructions au début du XIXe siècle (33). Une grosse tour circulaire en occupait l'extrémité méridionale.

Cette dernière et une autre semblable située plus à l'ouest encadraient un pont-levis. Elles furent édifiées au XVe siècle lors du remodèlement de l'ancien dispositif d'entrée du château, la partie de l'enceinte la plus exposée aux attaques ennemies. Ces deux tours ainsi disposées formaient un puissant ouvrage dont l'assaillant devait s'emparer avant même d'entreprendre l'attaque du donjon. De plus, elles couvraient de leur masse les habitations situées sur la plate­ forme et dans la petite cour au nord. Plusieurs auteurs se fiant à l'acte du 28 octobre 1421 ont daté leur construction de cette période. Cette référence est incertaine car les vicomtes de Rohan disposaient tout au long de ce siècle des considérables revenus que leur procuraient leurs terres de Léon. Peut-être ces tours ne sont-elles pas antérieures aux années 1470-1490, soit avant, soit immédiatement après les démêlés de Jean II de Rohan avec François II. Un examen approfondi de ces ouvrages et une comparaison avec des édifices contemporains permettraient d'en préciser la datation.

La moitié occidentale de la base de la tour a été dégagée en 1968. De plan circulaire, ou peut- être ovale, elle a un diamètre de plus de quinze mètres. Elle comprend une salle polygonale irrégulière d'une quinzaine de mètres carrés accessibles au nord par un sas de quatre mètres de longueur, fermé par une porte que l'on pouvait barricader de l'intérieur ; ce corridor possédait en outre une minuscule pièce (chambre de veille ou latrine). Dans le mur ouest, large de trois mètres au moins, est aménagé un couloir coudé de 0,70 à 0,80 mètre de largeur. Celui-ci s'ouvre au nord-ouest et il conduit à une trappe, un orifice d'aération, de 80 centimètres sur 50, situé face à une embrasure disparue. Cette ouverture mène à une salle carrée voûtée en berceau de 3,60 mètres de côté qui correspond à l'une des chambres dégagées en 1926. Celles-ci constituaient le ou les étages défensifs de la tour et abritaient probablement de l'artillerie comme en témoigne alors la découverte de boulets. Ces pières furent transformées en cachots à la find u XVe siècle. D'autres galeries existaient plus "au sud" : elles correspondraient soit à la deuxième tour soit à d'autres ouvrages implantés en avant du château (34).

Ces deux édifices formaient, sans doute, l'unique flanquement de la courtine sud dont les seuls vestiges se limiteraient à un mur épais de 1,20 mètre, visible à l'arrière du fossé, à moins que ce rempart n'ait été complètement dérasé. La douve elle-même est totalement comblée face à l'entrée du château et partiellement à l'ouest où elle mesure encore environ quatre mètres de profondeur sur six mètres de largeur. L'enceinte se raccordait à l'angle sud-ouest de la plate­ forme du donjon où elle ne semble pas avoir été défendue par aucun ouvrage en saillie. Un petit parc passablement protégé existait peut-être en contrebas de la courtine ouest du donjon car en cet endroit la pente est assez douce (ce n'est là qu'une hypothèse non vérifîable dans l'immédiat : on y distingue quelques bases de murs).

L'espace ainsi délimité par l'enceinte est assez réduit mais il devait cependant abriter quelques constructions comme des communs, des magasins, des logements ou des écuries dont la présence se révélait être indispensable près de toute résidence seigneuriale. Celles-ci s'élevaient probablement dans la petite cour établie au-dessus de la courtine nord. Elle avait une superficie de quelques centaine de mètres carrés ; on y accédait par un passage large de trois mètres et long de quatre à cinq, percé dans la roche en arrière de la porte du château. D'autres habitations se dressaient en arrière de la courtine sud comme semble l'indiquer la présence de deux murs parallèles épais d'un mètre environ, longs de 10 à 15 mètres et distants de 7,5 mètres. Ces constructions dont l'organisation est encore peu compréhensible (elles sont recoupées par deux murs perpendiculaires dont l'un est en saillie par rapport au tracé du rempart) étaient établies juste en dessous du donjon dans lequel demeurait le seigneur lui- même.

Percements, couronnements, ornementation

Nous abordons là un chapitre difficile car comme le soulignait A. de Kerdrel : "rien de moins caractérisé que ces ruines, pas un mâchicoulis, pas un détail architectonique qui puisse aider à en déterminer la date" (35). La ruine du château et son utilisation comme carrière de pierre ont profondément altéré l'aspect de la forteresse.

Les percements défensifs ont, pour l'essentiel, disparu : on ne peut considérer comme tels les jours-archères de faible dimension qui éclairent l'escalier du donjon et le couloir de l'éperon. Les baies elles-mêmes étaient de taille réduite ; celles du logis accolé au donjon mesuraient intérieurement 1,50 à 1,30 mètre de largeur mais pas plus de 0,80 mètre extérieurement. Les portes d'accès à la salle pentagonale de l'éperon n'excédaient pas non plus 0,80 mètre. Rappelons ici que la porte du donjon, haute d'environ 2 mètres, s'ouvrait à plusieurs mètres de hauteur comme il était d'usage pour ces tours aux Xle et Xlle siècles.

L'ensemble des parties hautes du château a disparu et il sera délicat de déterminer exactement leur aspect si ce n'est par une fouille des abords des murailles pour y découvrir d'éventuels vestiges de toiture. De même le dégagement de la base du rocher pourrait permettre d'y trouver des consoles ou des corbeaux de mâchicoulis. Il est cependant probable qu'à l'origine le donjon et sa chemise n'étaient couronnés que d'un chemin de ronde à créneaux et merlons, sans doute doublé de hourds en bois. Des mâchicoulis sur corbeaux leur furent peut-être substitués au bas Moyen Age ; de tels dispositifs ainsi que des toits en éteignoirs sommaient les tours d'entrée selon toute vraisemblance.

Un des principaux caractères de l'ornementation du château demeurait la rusticité. Les éléments sculptés ou moulurés ont soit complètement disparu ou bien ils sont ensevelis sous les éboulis. La cheminée du donjon à hotte et conduit cylindrique (respectivement 80-90 et 30 centimètres de diamètre) est le seul élément encore visible ; le dégagement de cette tour et du logis qui lui est accolé nous apporterait d'utiles renseignements sur la fonction résidentielle du château aux XlIIe et XlVe siècles.

Matériaux et mise en oeuvre

Trois types de roches furent utilisées dans la construction : le quartzite et le schiste étaient extraits sur place tandis que le granité, utilisé pour les encadrements, provenait d'une carrière plus éloignée. On discerne trois types de parements :

- un moyen appareil irrégulier avec une alternance d'assises de schiste et de quartzite ;

- un moyen appareil assise, allongé assez régulier, plus rare ; composé uniquement de schiste, il est notamment visible dans la pièce pentagonale de l'éperon et surtout dans la tour du XVe siècle dont le dressage des parements fut très soigné (le parement externe de celle-ci est composé de pierres de taille de grande dimension).

- un petit appareil de moellons de schiste allongé (murs auprès de la douve).

Des plaques de schiste couvraient également les couloirs (corridor de l'éperon et escalier du donjon) ainsi que certaines ouvertures ; d'autres purent être utilisées comme dallage. Les linteaux et les piédroits des portes et des baies sont constitués de pierres de taille en granité comme d'ailleurs les chaînages d'angle du donjon.

Le mortier utilisé dans la construction est essentiellement composé de chaux, du moins pour le donjon et la chemise. Cela témoigne du soin apporté dans l'édification de ces ouvrages même si l'appareil en est assez médiocre (du fait de l'utilisation du quartzite, pierre difficile à tailler). Cette chaux pourrait provenir des bancs de calcaire qui affleurent dans la rade de Brest ou bien de Saint-Urbain à une dizaine de kilomètres au sud. La chaux fut mélangée à un sable marin contenant de nombreux coquillages encore visibles. Mais si elle est utilisée dans le blocage des murailles du donjon et de la chemise, son emploi se limita à l'édification des parements et des voûtes dans la tour du XVe siècle où la maçonnerie intérieure des murs est composée de pierres liées à l'argile.

CONCLUSION

Au terme de cette étude, le château de La Roche-Maurice apparaît donc comme une forteresse chargée d'histoire même si celle-ci ne peut être que sommairement retracée.

Son origine notamment demeure problématique : un château, un "roc'h", serait édifié par un vicomte du Faou, Morvan, au Xle siècle puis conquis par les vicomtes du Léon. Cette première forteresse fut probablement détruite par les troupes d'Henri II Plantagenêt entre 1167 et 1179 comme toutes les places de ces seigneurs (36). Les constructeurs du donjon et de la chemise pourraient donc n'être que les vicomtes de la branche cadette de Léon auxquels échut la châtellenie de Landerneau en 1180. Aucun document ne désigne expressément le Roc'h Morvan avant 1263, ce qui est tardif mais non surprenant compte-tenu de la carence des sources archimtiques bretonnes pour les Xle et Xlle siècles.

Les caractéristiques architecturales du donjon et de sa chemise ne permettent pas non plus de leur assigner une date de construction précise. On ne peut que se borner à l'attribuer, comme le fit J. Bazin, du fait de sa forme carrée, aux Xle et Xlle siècles :si on possède des exemples de donjons quadrangulaires des Xle et Xlle siècles (Chateaubriand, Châteauneuf en Ille-et-Vilaine) il en existe d'autres, moins anciens, des XlIIe et XlVe siècles (Hédée, Clisson). Les donjons quadrangulaires léonards qui subsistent sont de deux types :

- Lesquellen en Plabennec et Lamber en sont des donjons sur motte de la find u Xle siècle dont la superficie est sensiblement la même que pour celui de la Roche-Maurice. Ils en diffèrent cependant par leur support (une motte artificielle), par l'emploi d'un mortier d'argile dans les maçonneries et probablement par une élévation moindre.

- Trémazan en est un donjon carré haut d'une trentaine de mètres qui fut élevé à la fin du XlIIe ou au début XlVe siècle. Cette belle construction comporte cinq étages bien éclairés par de nombreuses baies.

L'édification de la tour maîtresse du Roc'h Morvan s'inscrit donc chronologiquement entre celle de ces deux types d'ouvrages, soit vers le Xlle ou le XlIIe siècle. Il conviendrait de définir si ce donjon comportait plus de deux niveaux auquel cas les étages supérieurs disparus situés à plus de dix mètres de hauteur devaient s'ouvrir assez largement à l'extérieur et donc contenir des logements plus spacieux que ceux qui demeurent observables. Un tel édifice correspondrait à une possible imitation des donjons ligériens et normands, (il est toutefois dépourvu de contreforts) et constituerait alors une notable évolution par rapport aux donjons sur motte du Xle siècle dont la faible élévation résultait de la médiocre stabilité de ces tertres.

L'ensemble chemise et donjon est le plus ancien ouvrage du château ; aucune réfection ou reprise notable (comme l'adjonction de tours circulaires) n'y sont visibles ce qui indique bien la valeur de ce réduit (savamment conçu pour l'époque), édifié sur un rocher étriqué, les vicomtes de Léon s'y réfugièrent durant la guerre de Succession de Bretagne ; il était capable de résister à bien des assauts avant l'apparition de l'artillerie à poudre et des boulets métalliques aux XlVe et XVe siècles.

Les principaux aménagements du bas Moyen Age concernèrent l'enceinte conformément à l'évolution de l'architecture militaire à partir du XlIIe siècle. Deux grosses tours circulaires vinrent renforcer le flanc sud-est, le plus exposé, au XVe siècle. Elles assuraient le flanquement du portail à guichet muni d'un pont-levis qui remplaça l'antique accès du château. L'édification de ces défenses montre bien que les vicomtes de Rohan se souciaient de conserver en état, des forteresses pourtant très éloignées de leurs domaines ancestraux et qu'ils y consacrèrent même plusieurs centaines, voire plusieurs milliers, de livres jusqu'à la période du rattachement de la Bretagne à la France. Ces travaux illustrent en outre les prétentions de ce lignage à la fin du XVe siècle où Jean II de Rohan acheva la reconstruction des logis de Josselin et réédifia le château de Pontivy (37). Notes

1. BAZIN, "Le château de La Roche-Maurice". Brest, 1964. Sur l'origine de ce nom voir J. BAZIN, p. 11-12 ; les deux expressions sont utilisées pour désignera château : - Roc'h-Morvan est sans doute la plus ancienne puisqu'elle est employée dès 1263 ("Rupe Morvan"). - La Roche-Maurice demeure actuellement la plus usitée ; c'est le nom même de la commune. Maurice n'est pas la traduction de Morvan ; la chapelle castrale était, dès le XlVe siècle, placée sous le vocable de Saint-Yves dont on ignore s'il a pu succéder à Saint-Maurice. Ce toponyme apparaît en 1341 ("Rupem Mauricii").

2. MIORCEC DE KERDANET, "Le château de la roche-Maurice". Lycée Armoricain. 1823, pp. 346-353.

3. J. BAZIN, "Landerneau. fief urbain des vicomtes de Léon et des vicomtes puis ducs de Rohan, princes de Léon. B.S.A.F.. 1973, pp. 161-198, p. 184.

4. M. JONES, "The defense of medieval Brittany ; a survey of the establishment of fortified towns, castles and frontiers from the Gallo-romain period to the end of the Middle Ages"; Archaeological Journal. 1981, pp. 149-204. Le chapitre sur l'émergence des châtellenies et le début de la féodalité.

5. H. GUILLOTEL, "Les vicomtes de Léon aux Xle et Xlle siècles". M.S.H.A.B.. 1970, pp. 29-51, p. 37. Cette hypothèse au sujet d'une variation de la limite sud du comté de Léon nous a été suggérée par B. TANGUY, Chargé de Rercherches au C.N.R.S., qui l'expose dans "l'histoire du Finistère", à paraître. Qu'il soit ici remercié.

6. DOM MORICE et C. TAILLANDIER, "Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne". 2 volumes, Paris 1750-1756, rééd. Paris 1974, tome 1, p. 105.

DOM MORICE, "Mémoires pour servir de preuves à l'histoire ecclésiastique et civile de Bretagne". 3 volumes, Paris 1742-1746, rééd. Paris 1974.

7. BAZIN (cf. note 3). p. 187.

8. A. LE GRAND, "La vie des saints de la Bretagne Armorique". 1636, 65e éd., , 1901, p. 40-43.

9. MIORCEC DE KERDANET, (Cf. note 2). p. 348. Une mauvaise lecture de la chronique de Robert du Mont a fait dire à cet auteur que Jarnogon livra La Roche-Maurice aux Anglais. Il s'agit en réalité de La Roche-Bernard dont ce Jarnogon était le seigneur. Consulter : DOM MORICE et C. TAILLANDIER, (Cf. note 6). tome 1, p. 113 ; et DOM MORICE, (Cf. note 6). tome 1, 134. 10. DOM MORICE, (Cf. note 61 tome 1, 989. 11. G. DE BOURGOGNE et A. BARTHELEMY, "Anciens évêchés de Bretagne", tome 6, "Bretagne féodale et militaire". Saint-Brieuc, 1879, p. 200.

12. MIORCEC DE KERDANET, (Cf. note 21 p. 349.

13. BAZIN, (Cf. note 11 p. 17, et A RAME, "La bible des sires de Léon"; "Mélanges d'histoire et d'archéologie bretonne". 1855, tome 1, pp. 241-246.

14. DOM MORICE, (Cf. note 61 tome 1, 1531-1532.

15. DOM MORICE, (Cf. note 61 tome 1, 1561-1564.

16. DOM MORICE, (Cf. note 61 tome 2, 70.

17. H. DU HALGOUET, "Répertoire sommaire des documents manuscrits de l'histoire de Bretagne antérieurs à 1789 conservés dans les dépôts publics de Paris", tome 1, Bibliothèque Nationale et Archives nationales, Saint-Brieuc, 1914, p. 81* et 121*.

17 bis H. DU HALGOUET, (Cf. note 171 p. 120.

18. DOM MORICE, (Cf. note 61 tome 2, 1099-1100. Sur le problème des droits de "ports et havres" consulter également les actes suivants : 801, 888, 1083, 1139 et 1603. J. BAZIN, (Cf. note 11 p. 22.

19. DOM MORICE, (Cf. note 61 tome 3, 251.

20. DOM MORICE. (Cf. note 61 tome 3. 387-394.

21. DOM MORICE et C. TAILLANDIER, (Cf. note 61 tome 2 : "Mémoire du Vicomte de Rohan contre le Comte de Laval pour la présséance aux Etats (1479V. pp. CLXI- CLXXXV, p. CLXXIII, articles CLI et CLII.

22. DOM MORICE, (Cf. note 61 tome 3, 458.

Il est capitaine de Saint-Aubin-du-Cormier en 1488. 23. J. BAZIN. (Cf. note 11 p. 23. LE GUENNEC, intervention lors de la séance du 29 novembre 1928 à propos de documents trouvés dans les archives du château du Rohou, B.S.A.F.. 1928, p. XXXIX.

24. Au sujet de la campagne française de 1489 consulter : A.DE LA BORDERDE et B. POQUET, "Histoire de Bretagne"! 6 volumes, Brest-Paris, 1896-1914, tome 4, p. 566-569.

25. J. BAZIN. (Cf. note 11 p. 24. 26. J. KERHERVE, "Château de la Roche-Maurice : travaux à la find u XVe siècle (documents inédits), dans "Monuments et objets d'art du Finistère : études, découvertes, restaurations (années 1981-1982". B.S.A.F.. 1982, pp. 332-336, p. 336.

27. J. BAZJM. (Cf. note 1). p. 25.

28. "La Roche-Maurice : le château", dans le compte-rendu du Congrès de Landerneau de l'Association Bretonne. B.A.A.B.. 1970. pp. 16-19. Le plan qui accompagne cet article est le premier qui fut dressé.

29. Chevalier DE FREMINVILLE, "Antiquités de la Bretagne : Finistère". Brest, 1832, p. 263.

30. Consulter les articles de J. SALAUN dans le journal "La dépêche de Brest", des 18, 19, 21, 22, 23, 24, 28 et 31 mars 1926.

31. L'escalier du donjon ne se prolongeait pas au-dessous du premier étage comme l'a affirmé le chevalier DE FREMINVILLE, (Cf. note 29). p. 263.

32. Le tracé de cette muraille est figuré sur le plan levé par M. Fons de Kort que nous remercions ici de nous avoir reçu et de nous avoir communiqué des notes inédites qu'il a collectées sur l'histoire du château.

33. Chevalier DE FREMINVILLE, (Cf. note 29). p. 263.

34. J. SALAUN, (Cf. note 30). articles du 19 et 23 mars 1926.

35. A. DEKERDREL, "Rapport sur les excursions faites à , à La Roche-Maurice et à pendant le congrès de Landerneau". B.A.A.B.. 1880.

36. DE LA BORDERIE ET B. POQUET, (Cf. note 24). tome 3, p. 275 et 279-280. En 1216, ce flit Pierre Mauclerc qui envahit le Léon et qui chassa Conan de léon (branche aînée) de ses villes et de ses châteaux (Cf. p. 302-303).

37. J.-M. LE MENE, "Châteaux forts du Morbihan". B.S.P.M.. 1913, pp. 137-155 et 1914, pp. 56-91, p. 56-60.

II - SITUATION ET RAISONS DE L'INTERVENTION

Le château de Roc'h Morvan se trouve au bourg de La Roche-Maurice, sur un piton d'orthoquartzite blanc ordovicien (Arenig), dégagé par l'érosion et surplombant le confluent du Morbic et de l'Elorn, 5 km en amont de Landerneau.

Lors de la topographie du site réalisée par le Service Départemental d'Archéologie en 1990, de nombreuses traces de murets ou parements ont été relevés, notamment dans la partie ouest du site, entre le donjon et la route. Les références cadastrales sont les suivantes : Parcelles 992, 993, 22, 996, section A du cadastre de 1982. Les coordonnées Lambert sont : x = 116,850^y = 1 106,800. L'altitude est comprise entre 60 et 80 m.

L'accès au logis et au donjon se faisait par un étroit sentier longeant la façade ouest du donjon. Sous l'effet de l'érosion naturelle et des passages répétés, des éboulements réduisirent progressivement l'assiette du passage qui devint de plus en plus périlleux sur ce site prestigieux, propriété du Département du Finistère et ouvert au public.

II était donc devenu nécessaire d'envisager la fabrication et la pose d'une passerelle en bois et d'une ou deux volées d'escalier pour accéder à l'emplacement de l'ancien logis et à la porte du donjon. Deux plots de béton de 2,50 x 0,50 x 0,50 m devant supporter cet ouvrage, une fouille de contrôle s'avérait nécessaire pour déterminer les emplacements de ces plots sans détruire de vestiges archéologiques ou compromettre la compréhension de substructions probables.

L'intervention a eu lieu du 17 au 30 juin 1993 par le Service Départemental d'Archéologie et la participation, pour le terrassement, de deux ouvriers de la S.A.R. (Société Armoricaine de Restauration) entreprise adjudicataire des travaux de restauration sur l'édifice.

III - LE SONDAGE

La surface fouillée correspond à un rectangle de 10 x 6 m, limité à l'est par la paroi ouest du donjon, au sud par un massif de quartzite aménagé, au nord par un autre affleurement de quartzite à partir duquel part vers le sud une muraille partiellement effondrée. Il est bon de préciser que sur la majeure partie de la surface fouillée le travail a simplement consisté à dégager la couche superficielle d'éboulis recouvrant les structures en place. Dans cette couche superficielle furent trouvés de nombreux tessons de verre de bouteilles actuelles mais aussi de la brasserie SPECK de Brest et LEBOS-DESPINOY Frères de Landerneau, ainsi qu'un fer à cheval, un verre à boire, un étui de balle allemande daté de 1943 et divers détritus.

Les structures mises au jour

1 - L'escalier

Dans la partie sud du sondage deux murs subparallèles, l'un courbe, l'autre à angle obtus (170 grades), conservés sur une hauteur dépassant parfois 2 m et formés de moellons de quartzite maçonnés au mortier de chaux à joints beurrés, limitent un escalier aux marches assez frustes faites de pierres de schiste et de quartzite mal appareillées et reliées par un mortier de chaux maigre. Huit marches ont pu être dégagées sur un dénivelé de 222 cm ce qui donne une hauteur moyenne des marches de 27,75 cm, déterminant ainsi un escalier assez raide à gravir.

Cet escalier qui manifestement permettait l'accès au donjon, devait se poursuivre vers le haut par encore deux ou trois marches avant d'aboutir à un palier donnant sur une porte située parallèlement à la paroi sud du donjon et à environ 2 m de celle-ci. En effet, dans la paroi nord de la "cage d'escalier", en limite du sondage, se remarque un espace aménagé qui ne peut être qu'un logement pour une barre de fermeture d'une porte. Vers le bas cet escalier se termine par un palier. La marche palière est échancrée de telle façon que la porte puisse s'ouvrir à 90° et venir s'appliquer contre la paroi nord. La contre-marche était recouverte d'un enduit de régularisation partiellement conservé. Peut-être en était-il de même pour les autres contremarches. Les jambages de la porte sont en granité sans feuillures et dans le jambage nord est conservé un fragment de fer scellé correspondant à l'emplacement d'un gond. Au-dessus de ce gond, à uamiètre de hauteur par rapport au palier, se trouve un logement de barre de porte d'une dizaine de centimètres de profondeur ; il est en retrait du jambage de 14 cm et, sur l'autre paroi lui fait face le logement d'encastrement, profond de plus d'un mètre destiné à recevoir la barre lors de l'ouverture de la porte. Sous ce logement se trouve deux autres trous à usage non expliqué. Cette porte ouvrait à l'ouest dans une muraille courbe faite de blocs de quartzite et reliant deux massifs de quartzite. Elle a été condamnée par une maçonnerie de plaquettes de schiste reliées par de l'argile. Curieusement, et pour une raison inexpliquée la condamnation sur la face externe de la chemise est bipartite dans le sens vertical sur la partie haute du remplissage. Après la condamnation, la cage d'escalier a été remplie d'un bourrage de sable, pierres et gravats. Au niveau du palier inférieur, devant le comblement de la porte de l'escalier, quelques détritus ont été déversés. On y a recueilli des fragments d'ardoises en schiste bleu, des morceaux de mortier de chaux et d'enduit, de gros charbons de bois, quelques tessons de céramique commune tournée dont un rebord de marmite en onctueuse et des ossements de bovidés, de cervidés (dont un andouiller scié), d'ovi-capridés, d'un grand oiseau non déterminé (ceinture pelvienne), de cuniculidés, une incisive de suidé, une hémimandibule de canidé. Certains ossements montrent des traces de découpe et les os longs des grands animaux sont brisés, sans doute pour en extraire la moelle. Par ailleurs un demi-boulet de granité et deux pierres vraisemblablement utilisées comme projectiles en poliorcétique (pierres de catapulte par exemple) ont été retrouvées parmi les gravats, au fond de la cage d'escalier ainsi qu'un claveau de granité à grain très fin qui provient, peut-être, de la voûte de la porte.

2 - La muraille et le chemisage des affleurements de quartzite

Avant tout il faut noter que les affleurements de quartzite ont été souvent rectifiés lorsque cela était possible de façon à produire des faces verticales ou horizontales contre lesquelles, ou sur lesquelles, viennent s'appuyer les parements de maçonnerie.

La muraille dans laquelle débouche la poterne est épaisse de 2,20 m à la base et 1,50 m au sommet de la partie conservée ; elle a un fruit important et est arquée. Le parement est constitué de blocs de quartzite assises. Au sud de la porte, dans l'épaisseur de la muraille, existe un second parement partiellement conservé et qui correspond vraisemblablement à un état antérieur de la chemise. Devant la porte condamnée se trouve un massif de maçonnerie qui n'a pas été suffisamment dégagé par le sondage pour connaître son rôle et son importance. A 0,70 - 0,80 m au nord de l'ouverture condamnée la muraille fait un angle presque droit pour rejoindre un pointement de quartzite. Ce parement est presqu'entièrément effondré ; il contribuait avec les affleurements de quartzite à maintenir en place l'important blocage et le massif de maçonnerie supportant l'accès à la porte ouest du donjon.

Dans l'angle des deux parements et devant la porte furent découverts des fragments de crânes d'au moins quatre sangliers dont un sujet très âgé, un clou en fer forgé, une feuille de bronze enroulé en cône très pointu, un. fragment de tommette et quelques tessons de poterie dont un fragment de galetière décorée, des tessons de cruches ou pichets en terre cuite rouge et beige bossuée, un rebord de marmite à marli en terre cuite gris-beige, un fond de récipient décoré en poterie onctueuse, un fond de vase en terre cuite blanche à dégraissant très fin. 3 - Le massif de maçonnerie s'appuyant sur la façade ouest du donjon Sous la porte ouest du donjon, un massif de maçonnerie vient rejoindre en sifflet le parement du donjon, faisant un angle de 21 grades. Entre les parements verticaux du massif et du donjon, l'espace est rempli d'un bourrage de pierres sans liant (ni argile, ni terre, ni mortier), sur une longueur de 3 mètres, après quoi un muret étage, maçonné au mortier de chaux, est perpendiculaire au parement du donjon et vient rejoindre le parement du massif. Dans la partie située sous la porte du donjon se voient des arrachements de pierres qui devaient venir reposer sur ce massif de maçonnerie. Dans la partie sud, le massif de maçonnerie est étage et en éventail, suggérant des marches d'escalier. Il n'est d'ailleurs pas interdit de penser qu'un escalier ait existé contre la paroi ouest du donjon compte-tenu qu'il existe trois logettes superposées dans la muraille et que la plus basse est à un niveau inférieur à celui du jambage de porte conservé. La maçonnerie de ce massif est faite de pierres de quartzite et de schiste assisées et reliées par un mortier de chaux assez maigre. Plus au sud, vers l'angle sud-ouest du donjon se trouve un blocage effondré laissé en place mais qui permet toutefois de constater que le parement ouest du donjon se prolongeait, du moins dans sa partie inférieure, au-delà du chaînage d'angle reconstitué qui donne une fausse idée de l'architecture de cette partie du château.

IV - AUTRES INFORMATIONS

Lors du décapage de la couche superficielle de sable et terre mélangés recouvrant les assises supérieures du donjon, dans la la muraille sud et en son milieu, un logement de 0,45 m de darge, 2,10 de longueur et conservé sur une hauteur de 0,30 m, perpendiculaire aux parements, a été mis au jour par les ouvriers de la S.A.R.. Il fut interprété comme étant un logement de poutre destiné à soutenir la voûte du donjon. L'état de conservation de la façade nord du donjon ne permet pas de vérifier ou d'infirmer cette hypothèse. Il est cependant permis de se demander si, au sein de la muraille, ce logement ne s'infléchit pas vers le sud-est et ne vient pas déboucher dans le parement externe. Il s'agirait alors d'un conduit brisé ayant pu servir au passage de pigeons voyageurs. Cette hypothèse expliquerait l'existence de logettes contenant des poteries à large goulot, profondes d'une vingtaine de centimètres et d'un diamètre voisin d' une dizaine de centimètres, que nous avions remarquées autrefois au sommet du parement interne du donjon. Quatre sont conservées mais, compte tenu de leur disposition, une dizaine de ces boulins ont pu exister. La mise en place de pièges à sons, initialement évoquée, semble en effet improblable dans cette partie du donjon.

Pendant l'opération de sondage, M. François MARC, Conseiller Général et Maire de La- Roche-Maurice, nous a confié, pour étude, trois pièces de monnaie découvertes fortuitement au cours de travaux de jardinage en contrebas du château par M. René EMTLY, habitant le Bas-bourg. Leur description est la suivante :

Monnaie en argent

Droit : Buste Louis XV à gauche. LUD.XVD.G.FR.ET.NAVREX A

Revers : BENEDICTUM. 1734.SIT NOMEN (DOMINI). Il s'agit d'1/10 d'écu aux Lauriers, correspondant à dix sols tournois puis à 12 sols à partir de 1726. Diamètre : 22 mm Poids omcieï^r2,948 g. Graveur : JL. Roettiers Atelier : Paris.

Monnaie de cuivre

Droit : Buste de Louis XVI à gauche LUDOV.XVI.D.GRATIA

Revers : blason couronné à 3 fleurs de lys (date) FRANCIA ET NAVARRE

Il s'agit d'un sol du Béarn (1774-1793). Diamètre : 28 à 30 mm Poids officiel : 12,235 g. Graveur : Duvivier.

Monnaie de cuivre

Illisible et indéterminable. Diamètre : 21 mm Poids : 2 g. MINISTERE DE LA CULTURE ET DE LA FRANCOPHONIE PREFECTURE DE LA REGION BRETAGNE

DIRECTION REGIONALE DES AFFAIRES CULTURELLES Service Régional de l'Archéologie

AUTORISATION TEMPORAIRE DE SONDAGE N° 93-53

Valable du 14 juin au 30 juin 1993

Le Préfet de la Région Bretagne conf i e à :

M. LE GOFFIC prénom: Michel

Demeurante- Service Départemental de l'Archéologie organisme : collectivité 1, rue du Gai de Gaulle 29580 à effectuer un sondage archéologique

Département: FINISTERE commune: LA ROCHE MAURICE

Lieu-dit: Le bourg N° de site: 29 1 28 237 AH

Cadastre armée : 1982 Section, parcelles : A (22, 992, 993, 996)

Coordonnées Lambert : Zone : T Abscisse: 116,850 Ordonnée: 1105,800 sur un terrain appartenant à M. : Département du demeurant à : Finistère Cette autorisation est délivrée à la demande de : XkKèrKsei -du Conservateur Régional de l'Archéologie (rayer la mention inutile)

NATURE DU GISEMENT ET PERIODES : Château-fort - Moyen-Age

Lieu de dépôt pour étude: Service départemental lieu de conservation : col 1 ection publ ique de l'Archéologie du Finistère du département

JUSTIFICATION DE L'INTERVENTION : Travaux

Superficie du sondage : .10 m2

ORÌGINE ET MONTANT DES CREDITS EVENTUELLEMENT ATTRIBUES :

CONDITIONS ADMINISTRATIVES COMMUNES : Cette autorisation est délivrée sous réserve de l'autorisation écrite du ou des propriétaires du terrain ou de ses ayants droit, qui devra préciser en particulier la dévolution du mobilier éventuellement découvert. Le titulaire tiendra régulièrement au courant le Service Régional de l'Archéologie de ses travaux et découvertes. En fin de travaux, un rapport en deux exemplaires devra être remis au Service Régional, comprenant plans de situation, photos, etc. *Le Ministère de la Culture et de la Francophonie décline toute responsabilité en cas d'accident pour toutes les interventions autorisées à la demande de l'intéressé.

DESTINATAIRES :

A.F.A.N. Intéressé H JUIN ÌS93 Sous Direction de l'Archéologie Fait à Rennes, le Préfecture Pour Le Préfet de La Région Bretagne Mairie Le Conservateur Régional de l'Archéologie

Gendarmerie Directeur Régional des Affaires Culturelles U Conservateur Régional Archives du Service Régional de l'Archéologie de l'ArchÇok \ FICHE DESCRIPTIVE DE SITE ARCHÉOLOGIQUE

1450/ RECHERCHE EFFECTUÉE

Année Nature de l'opération Auteur Organisme AP ou AH Liii/ ^*Q4(a€ i te Goffî'c n /SP*^; ? /*

AP ou AH

1000/ RÉFÉRENCE I.N.S.E.E. .£,9 / A, I jLX / .¿,5. 7", / ,0,0,/ , , , / • , , / ATT I* Dépt. Arrdt. Canton Commune Site Niveau Struct.

1130/ Sites étendus : Dépt. , , , / Commune , , , , / Dépt. , , , / Commune , , , , /*

//1100/ RÉFÉRENCES ADMINISTRATIVES Département : f ~\ fUVT f\.£ /

Commune : _

Lieu dit : l.£ ftttVJVg^ : / 110/ Nom du site ou adresse : C. H %T € A U = Koc'-H ^tKlAÉ. /

120/ CADASTRE Année : A^%tf I Section(s) et Parcelle(s) : A (_ P) 9 4 ^l^dJy^Â

1140/ POSITION TOPOGRAPHiQUE

Altitude N.G.F. : CO -* V^A 7 Profondeur d'enfouissement : ,

11507 COORDONNÉES LAMBERT Précises JS. 1, Approximatives LJ 2 / Zone Lambert

Abscisse Ax : À 4C f YS~"0 / Ordonnée Ay : ¿1 d P ^ TO Q 7

Abscisse Bx : / Ordonnée By : : /'c

DOCUMENTATION

1200/ Nature du site : en surface CJ 1, hors du sol 23 2, enfoui • 3 /

Type : plein air ^3 1, grotte ou abri LJ 2, immergé • 3 /

État à la découverte : exceptionnel p*Q 1 , structuré O 2 , inorganisé LJ 3 /

État actuel: conservé. 1 , partiellement conservé : 2 r détruit • 3 If

//2000/ Nature des vestiges immobiliers : C HAT E.-fVvJ £t> gjT I*

73000/ Nature des vestiges mobiliers : ; I r /1300/ Grande période chronologique : ft^i V£ N ^ h Q, €- ?( I £. ~> "X V *l Q. SiêT^W. /<

71310/ Attribution culturelle : t*

71320/ Autre élément de datation : / base : : I*

71400/ Degré de protection: • t. • 2, • 3, • 4 /• T M V/. tU[ l?oCTl^

//1700/ Occupation du soi : labouré i 11, prairie • 2, lande ou friche ! I 3, forêt I I 4, bâti I I 5, autre • 6 /* 71800/ Sources : . : f*

1445/ Circonstance de la découverte ou motif du sauvetage : T^AVAU^ —• TUf £ 6 ht /«Al-gV*^ /*

71420/ Propriété du terrain : Etat • 1, Collectivité É 2 Privé • 3 /• $ ly ^ ^ ^ fÇ-

71440/ Conservation provisoire du mobilier : dépôt de fouille L_l 1, autre IsS 2 /

Lieu W<ïte ci p W. >w e. K+ A ) cl A,rc Jte.'o 1 e_ L_£ F/VoU . _/

//1460/ Conservation définitive : inconnue L_J 1, collection.publique S3 2 collection privée [ZZ3 3, autre I I 4 /

Lieu : -h^p-f A. Ç\>oUl# J U fj HI'J TA CE 16 flA-OU /« 71600/ Rédaction du bordereau : auteur L £ 6,0 J Date: l\ ^JIAU. /

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Extrait de la carte I.G.N. au 1/25000 Landerneau 05-16 ouest. Extrait du cadastre de la Roche-Maurice. LA RULHt-NAUKIlt Château JUIN 1993

Maçonnerie

Roche en place (Quartzire)

§|||jf Blocage effondre

Nivellement indépendant.. Les points cotés du plan sont négatifs par rapport au niveau de référence. Le seuil de la porte du donjon, ouvrant sur la façade ouest est à 4,11 m au-dessus de ce niveau de référence.

Plan et coupes des structures mises au jour par le sondage.

Emplacement du sondage par rapport au donjon. Tessons de céramique découverts lors du sondage. 1 : fragment de marmite en poterie onctueuse trouvé sur le palier de l'escalier. 2 et 3 : fragments de galetière en poterie rougeâtre à dégraissant fin riche en muscovite. 4 : rebord de marmite à marli en poterie gris-beige à fin dégraissant bien classé comportant de la muscovite. 5 : fond de vase à pâte blanche et dégraissant très fin. 6 : fond de vase en poterie rougeâtre à dégraissant assez grossier à micas mordorés. 7 : fond de vase ou de plat en poterie onctueuse. Les numéros 2 à 7 proviennent de l'extérieur de la chemise. Tessons provenant de l'extérieur de la chemise. 1 : fragment de vase ou pichet en céramique bossuée assez fruste, de teinte beige à dégraissant grossier (QFM). 2 : bec verseur d'un pichet en poterie rougeâtre.

Vue du site avant le sondage ; certains montants du garde-corps ne sont plus retenus que par la chaîne et sont prêts à basculer dans le vide. Remarquer les arrachements de pierres sous le jambage de la porte perpendiculaire au parement du donjon.

Vue rapprochée montrant que les scellements de certains éléments du garde-fou ont été manifestement réalisés dans des structures médiévales sans sondages préliminaires. Vue prise de l'angle supérieur sud-ouest du donjon et montrant l'escalier et la porte condamnée mis au jour.

Vue plongeante de l'escalier montrant la porte condamnée et les parois non parallèles de la cage d'escalier. Vue de l'escalier, prise du bas. Remarquer l'appareil assez fruste des marches ; il est possible, à l'instar de la parche palière, que les contre-marches aient été revêtues d'un enduit.

Vue du palier et de la marche palière arquée de façon à permettre l'ouverture à angle droit de la porte. Vue rapprochée du mur de l'escalier, à l'angle sud-est de la fouille, montrant l'extrémité ouest d'un logement de barre de porte vraisemblable que l'on a pu sonder sur longueur de 0,85 m. Vue rapprochée, prise au téléobjectif, montrant le détail de l'appareil et la condamnation bipartite de la poterne. Vue, prise du sud, montrant le retour à angle droit de la chemise vers le massif de quartzite

H. Vue générale de la fouille, prise de l'éperon situé au sud-ouest du donjon, montrant le massif de maçonnerie en grande partie effondré et qui devait soutenir les escaliers d'accès au donjon et/ou la courtine menant au corps de logis. Vue du parement conservé du massif de maçonnerie, oblique par rapport à celui du donjon et s'appuyant sur celui-ci. Le blocage, entre ces deux parements est constitué de pierres non jointoyées. Vue, prise du sud, du massif de maçonnerie effondré.

Vue de détail de la partie sud du massif de maçonnerie, H disposé en éventail et en ^ r •" **A "marches". Va LES SOURCES DOCUMENTAIRES

DE L'HISTOIRE DU CHATEAU

DE LA ROCHE - MAURICE

Etude préliminaire

Patrick KERNEVEZ Août 1994 LES SOURCES DOCUMENTAIRES

DE L'HISTOIRE DU CHATEAU

DE LA ROCHE - MAURICE

Etude préliminaire

Patrick KERNEVEZ Août 1994 En prévision d'une campagne de sondages archéologigues gui devraient être menés en 1995, il nous a été demandé d'établir un inventaire préliminaire des sources documentaires concernant l'histoire du château de La Roche-Maurice.

Le présent rapport n'a rien d'une étude exhaustive gui aurait exigé bien plus de temps et des moyens financiers. Notre démarche a donc été simple: nous avons entrepris le recensement de tous les documents et connaissances épars tant archéologigues, gu1historigues ou iconographigues afin d'établir une synthèse provisoire de l'histoire du château.

Nous avons successivement réalisé:

- un inventaire des sources écrites, aveux, mandements, titres, concernant le château et le village de la Roche-Maurice, soit une guarantaine au total, page 2 à 11;

- un index bibliographigue par nom d'auteur, page 12 à 14;

- un répertoire iconographigue des dessins, lithographies, plans et cartes postales, page 15 à 17;

- une synthèse historigue où sont examinées les différentes périodes de l'histoire du château, page 18 à 28;

- nous avons en outre jugé utile de reproduire dans des annexes les articles ou illustrations majeurs, page 30 à 94. LES SOURCES

Cette étude préliminaire a pour objet de recenser les divers actes relatifs au château de La Roche-Maurice conservés dans les dépôts d'archives. Notre but n'était pas de nous livrer à une étude archivistique exhaustive mais de répertorier tous les actes signalés par les divers auteurs cités en bibliographie.

L'examen des liasses 1 E 428 au dépôt des Archives Départementales du Finistère à Brest a ainsi révélé que si elles pouvaient s'avérer être assez intéressantes, leur dépouillement et la transcription des actes exigeraient de nombreuses journées de travail. Il en est de même pour les actes conservés à la Médiathèque ou aux Archives Départementales de Nantes.

Il est toutefois certain que la plupart des actes concernant La Roche-Maurice ont disparu, notamment lors de la destruction du chartrier du duc de Rohan à Blain en 1793. La plupart des archives concernant la principauté de Léon y avaient été réunies depuis le passage de cette vicomte dans les mains des Rohan en 1363. On sait notamment qu'en 1387 le vicomte de Rohan fit quérir des titres à la Roche-Maurice.

Nous avons la chance que dom H. Morice en ait copié plusieurs au XVI Ile siècle et les ait incorporés dans les volumes de ses "Preuves" de l'histoire de Bretagne. Quelques cartons des titres de Blain ont été miraculeusement préservés en 1793 et ensuite placés en dépôt à la bibliothèque municipale de Nantes par M. Bizeul, dont ce fonds porte le nom. Certains de ces originaux concernent La Roche-Maurice. D'autres sont disséminés dans différentes collections publiques ou privées; quelques copies sont également conservées à la Bibliothèque Nationale.

Au total, nous avons recensé deux mentions au XIIle siècle, sept au XlVe siècle, dix-neuf au XVe siècle, six au XVIe siècle, treize au XVIIe siècle, aucune au XVIIIe siècle et deux au XIXe siècle. Ces chiffres permettent déjà de formuler quelques commentaires: - les premières mentions sont tardives, ce qui n'est guère surprenant pour la Basse-Bretagne; - le XVe siècle où le château joue un rôle important est surreprésenté alors que le XVIIIe siècle, quand le château est en ruine, ne l'est pas ce qui pourrait également résulter de l'inégal dépouillement des archives.

DEPOTS D'ARCHIVES PUBLICS

Archives Départementales du Finistère (A.D.F.) Série E: 1 E 428, 1 E 694. Série E dépôt administration: commune de La Roche-Maurice, registres des délibérations du conseil municipal; cadastre de 1811, atlas et états de sections. Série J: 34 J, fonds Le Guennec, commune de La Roche-Maurice. Archives Départementales de la Loire-Atlantique (A.D.L.A.) Série B: B 7, 1694 et 1728.

Archives Départementales du Morbihan (A.D.M.) Série J: fonds de Kerguéhennec, 20 J 224.

Bibliothèque Municipale de Brest

Manuscrits: ms 56, "Choix d'anciens monuments bretons".

Bibliothèque Municipale de Nantes Fonds Bizeul: B 1689, 1697, 1702, 1706, 1711, 1716, 2589. Bibliothèque Nationale (B.N.) ms fr 8269, 22332, 22339, 22340.

Bibliothèque Sainte-Geneviève à Paris Manuscrits: ms 22, "Bible des sires de Léon".

DEPOTS D'ARCHIVES PRIVES

Archives du château du Rohou Deux pièces de 1485 et 1502 (capitaines de La Roche-Maurice).

Archives de Miorcec de Kerdanet, manoir de Kerduden en Trégarantec Aveux des ducs de Rohan de 1693 et 1695.

CATALOGUES DE DEPOTS D'ARCHIVES

HALGOUET (H. DU), "Répertoire sommaire des documents manuscrits de l'histoire de Bretagne antérieurs à 1789 conservés dans les dépôts publics de Paris", tome 1, Bibliothèque nationale et Archives nationales, Saint-Brieuc, 1914.

MAITRE (L.), "Inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790; Loire-Inférieure, tome 1, série B, chambre des comptes de Bretagne", Nantes, 1902.

MOLINIER (A.), "Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France", tome XXII, Nantes, Quimper, Brest; Paris, 1893.

SOURCES PUBLIEES

BLANCHARD R. , "Lettres et mandements de Jean V, duc de Bretagne de 1402 à 1442", 5 volumes, Nantes, 1889-1895.

GESLIN DE BOURGOGNE (J.) et BARTHELEMY (A. DE), "Anciens évêchés de Bretagne", 6 volumes. Tome 6, Saint-Brieuc, 1879.

LOBINEAU (G.A.), "Histoire de Bretagne", volume 2 (pièces justificatives), Paris, 1707, rééd. Paris, 1973. MORICE (H.), "Mémoires pour servir de preuves à l'histoire ecclésiastique et civile de la Bretagne", 3 volumes, Paris 1742-1746, rééd. Paris, 1974.

MORICE (H.) et TAILLANDIER (C), "Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne", 2 volumes, Paris, 1750-1756; vol. 2, p. CLXI-CCVII, "Mémoire du Vicomte de Rohan contre le Comte de Laval pour la présséance aux Etats (1479)".

ROSENZWEIG (L.), "Cartulaire du Morbihan", Vannes, 1895, et B.S.P.M., 1934-1939.

REPERTOIRE CHRONOLOGIQUE

Les actes sont classés chronologiquement avec un bref résumé de leur contenu, le lieu de conservation de l'original, ou des copies qui ont pu en être faites, avec leur cote et, le cas échéant, les références des ouvrages dans lesquels ils ont été publiés ou mentionnés.

1263 Accord par lequel Nuz, fils de Sen, s'engage à garder, au nom de Hervé IV de Léon, le château de Coetmeur en ; il y est stipulé que le vicomte ne pourra pas poursuivre Nuz pour certains objets qui se trouvaient "in Rupe-morvan" lors de la mort de son père, Hervé de Léon, vers 1241, et qui avaient alors disparu. Original détruit faisant partie des titres de Blain (latin); copié par H. Morice au XVIIIe siècle et publié dans le volume 1 des "Preuves", col 989.

1280 (mars) Adjudication de biens à Guillaume de Léon, fils puîné de Hervé de Léon: il y est question de "Rocha Morvani". Titre (latin) des archives de Monsieur de Janzé. Publié par J. Geslin de Bourgogne et A. de Barthélémy, 1879, tome 6, P. 200.

1341 Annotation en latin sur le dernier feuillet de la bible des sires de Léon: naissance de Hervé VIII de Léon au château de La Roche-Maurice, "apud Rocham seu Rupem Mauricii". Original: bible du XlVe siècle conservée à la Bibliothèque Sainte-Geneviève à Paris, ms. 22, fol. 545. Publication et traduction par A. Ramé, 1855, p.242.

1359 (septembre) Lettre de Hervé de Léon à Guillaume du Chastelier, son oncle par alliance: elle est écrite à "la Rochemorice". Titre de Blain copié par H. Morice au XVIIIe siècle et publié dans le volume 1 des "Preuves", col. 1530. 1360 (16 juin) Lettre d'Erard de Léon, frère de Hervé VII de Léon, à son beau -frère, Guillaume du Chastelier: elle est écrite à "la Roche- Morice". Titre de Blain copié par H. Morice au XVIIIe siècle et publié dans le volume 1 des "Preuves", col. 1531-1532.

1363 (31 août) Testament de Hervé VIII de Léon: il fonde une chapellenie dans la chapelle dédiée à saint Yves près du château ("apud Rocham- morvam"). Original (latin): titre de Blain, conservé à la B.M. de Nantes, fonds Bizeul, B. 1702. Copié par H. Morice au XVIIIe siècle et publié dans le volume 1 des "Preuves", col. 1561-1564.

1376 (16 juin) Lettre du vicomte de Rohan relative à des taxes dues à l'abbé de Bon-Repos levées en Léon en 1374 alors gue Guillaume Riou était connétable de La Roche-Maurice. Titre de Blain copié par H. Morice au XVIIIe siècle et publié dans le volume 2 des "Preuves", col. 70.

1387 (25 juin) Ordre d'Alain de Rohan à Hervé Le Heuc, son capitaine à La Roche-Maurice, et Hervé Guillaume, son bailli, de chercher certains contrats relatifs à ses aïeuls les sires de Léon et de les confier à celui gue son père enverra les guérir. Original: titre de Blain, conservé à la B.M. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1706. Mentionné par A. Molinier, 1893, p. 243.

1391 (24 août) Procuration donnée par Alain de Rohan, sire de Léon, à Hervé Goello et Guyomar Manfuric établis comme gardes de La Roche- Maurice . Copie du XVIIIe siècle à la Bibliothègue Nationale, fr 22339, fol 164. Mentionné par H. du Halgouët, 1914, p. 81*.

1407 Lettres patentes autorisant la translation de la foire de La Roche-Maurice, du premier dimanche au premier mardi d'octobre. Mentionné dans un inventaire des titres de l'abbaye de Daoulas datant de 1761, A.D.F. ,série H. Cité par R. Blanchard, n° 980.

1420 (18 mai) Lettre d'octroi, durant 2 années, pour les réparations des villes, forteresses et châteaux du vicomte de Rohan parmi lesguels figure "la Roche Morice". Original à la B.M. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1689. Publié par R. Blanchard, n° 1401 et par Rosenzweig, n° 725. 1421 (28 octobre) Règlement du duc pour les vaisseaux qui abordent à Landerneau: la moitié des droits de ports et havres de Landerneau sera baillée au vicomte de Rohan "pour iceux faire mettre & employer à la réparation de son chastel & forteresse de la Roche-Morice, qui est sur port de mer & en danger & lequel a mestier de réparation". Titre du marquisat de Rosmadec, copié par H. Morice au XVIIIe siècle et publié dans le volume 2 des "Preuves", col. 1099- 1100; extraits dans R. Blanchard, n° 1510.

1425 (16 juin) Prorogation d'octroi pour les ports du vicomte de Rohan: le vicomte continuera à toucher la moitié des droits durant un an et les emploiera à la réparation du château de La Roche- Maurice . Archives des Rosmadec, copie du XVIle siècle conservée à la Bibliothèque Nationale, ms 22340, fol. 112. Publié par R. Blanchard, n° 1631. Acte mentionné par H. Morice dans le volume 2 des "Preuves", col. 1139; il indique en outre que cette décision relative aux droits de ports et havres, déjà reconduite le 16 juillet 1423, le fût encore aux dates suivantes: 3 novembre 1437, 16 août 1441 et 3 juillet 1443.

1429 (31 août) Lettre du duc par laquelle il accorde l'exemption du droit de rachat au vicomte de Rohan après la mort de son père, à condition que Tristan de La Lande tienne durant un certain temps plusieurs places du vicomte parmi lesquelles La Roche- Maurice. Copie à la Bibliothèque Nationale, ms. fr. 22332, fol. 167. Extraits publiés par R. Blanchard, n° 1850 et Rosenzweig, n° 762.

1439 (vidimus 17 juillet) Le duc Jean IV confirme les franchises des habitants de La Roche-Maurice: ils sont exempts de fouage comme par le passé et bénéficient d'un régime fiscal plus avantageux. Original aux A.D.L.A. , série B, franchises. Publié par R. Blanchard, n° 2341.

1439 (23 novembre) Exemption de service militaire pour les gens d'armes préposés à la garde des places du vicomte de Rohan, notamment pour La Roche-Maurice à Yvon le Normant, Olivier Rosnivinen, Guillaume Kerraoul, Guyon Denis, Eon Treanna, Robert Kerraoul, Tangui Guillaume Neuz et Jehan Le Coetdic. Copie du XVIIe siècle; Bibliothèque nationale, ms. fr. 22332, fol. 225.

Publié par R. Blanchard, n° 2387.

1472 (22 novembre) Institution de capitaine de La Roche-Morice pour Louis de Rosnyvinen alors que le duc vient de confisquer les châteaux et châtellenies du vicomte de Rohan. Copie de H. Morice au XVIIIe siècle, publiée dans le volume 3 des "Preuves", col. 250-251.

1473 François II, duc de Bretagne, exempte les habitants de La Roche-Maurice des 12 livres gu'ils lui doivent au titre des aides. Original conservé aux A.D.L.A., B 7 f° 137. Mentionné par J. Kerhervé, 1987, p. 619.

1479 Dans le "Mémoire du Vicomte de Rohan contre le Comte de Laval pour la présséance aux Etats", il est dit "gue de tout temps ladicte seigneurie a estée emparée d'un très bon, fort & grand autre Chasteau fort & puissant de deffense autant ou plus gue chasteau de Bretagne, nommé la Rochemorice, gui grandement a servy & peut servir guand le cas en adviendra à la tuition & garde des biens subjets de tout le pays". Cette affirmation fut confirmée par de nombreux témoins lors de 1'enguête gui suivit. La charge de capitaine valait alors 300 à 400 livres par an; un siège de haute justice est aussi mentionné à La Roche-Maurice. Original copié par H. Morice au XVIIIe siècle et publié dans le volume 2 de l'"Histoire ... de Bretagne", pp. CLXI-CLXXXV, articles CLI et CLII.

1479 (6 et 16 février) Guillaume de Rosnyvinen, fils de Louis de Rosnyvinen, est institué capitaine de La Roche-Maurice par le duc, toujours détenteur des terres et places du vicomte de Rohan. Quelgues jours plus tard, le duc enjoint à son aîné, Alain de Rosnyvinen, gui s'était installé au château, de lui en céder les clefs. Copie de H. Morice au XVIIIe siècle, publiée dans le volume 3 des "Preuves", col. 387. vers 1479-1480 Obligation de Guillaume de Rosnyvinen "capitaine de la place & chasteau de la Roche-morice" envers le duc. Original "au château de Nantes (arm. N. cassette A. n.4.)". Copie de H. Morice au XVIIIe siècle, publiée dans le volume 3 des "Preuves", col. 394, n°51.

1485 (14 février) Le duc, François II, ordonne à Guillaume de Rosnyvinen de résider avec six hommes d'armes au château de La Roche-Maurice dont le capitaine doit lui laisser les clefs. Original dans le registre de la chancellerie commençant le 1er octobre 1484 (Nantes). Copie de l'extrait par H. Morice au XVIIIe siècle; mention dans le volume 3 des "Preuves", col 458.

1485 Mandement de Jean de Rohan, vicomte de Léon, accordant à Perceval de Lezormel, seigneur de Kerloscant, la charge de capitaine de La Roche-Maurice, vacante en raison du décès de Louis de Rosnyvinen. Acte des archives du château du Rohou en Plouézoc'h consulté par L. Le Guennec vers 1928.

1486 (16 décembre) Mandement ducal confirmant le droit de guet exercé à La Roche- Maurice, "chasteaulx, place et forteresse de La Rochemorice". Cité par C. Floquet, 1989, p. 224.

1491 Permission accordée par le roi Charles VIII, au vicomte de Rohan, de rétablir ses forteresses. Copie du XVIIIe siècle à la Bibliothèque Nationale, fr 8269, fol 361. Mentionné par H. du Halgouët, 1914, p. 121.

1492 (12 octobre) Le roi, Charles VIII, confirme la jouissance du droit de guet pour le château de La Roche-Maurice, en dépit de la destruction de ce dernier entreprise par les troupes royales. Les vassaux du vicomte de Rohan doivent continuer à y faire le guet (décision de la cour royale de ). Relaté par D.L. Miorcec de Kerdanet, 1823, p. 352.

1493 (mois de février et 26 avril) Devis d'adjudication de travaux d'un montant de 20 livres et certificat de conformité: travaux de charpenterie effectués sur la porte d'entrée du château et dans les salles basses des tours servant de prison. Perceval de Lezormel est alors capitaine du château. Original conservé aux A.D.M. , 20 J 224, fonds de Kerguéhennec. Publié par J. Kerhervé, B.S.A.F. , 1982, p. 333-335.

1498 (23 novembre) Mandement pour la réparation de la "Maison du jardin" de La Roche-Maur i ce. Cité par C. Floquet, 1989, p. 225. vers 1500 Projet de mémoire du vicomte de Rohan au sujet de la succession des ducs François I et Pierre II: il relate que la place a été démolie par les capitaines du roi lorsque les Français tenaient Brest en 1489-1490. Original: titre de Blain, conservé à la B.M. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1697, fol 5 r&v.

Publié par J. Kerhervé, B.S.A.F. , 1982, p. 333.

1502 Perceval de Lezormel, capitaine de La Roche-Maurice, nomme comme lieutenant à la garde de cette place son neveu, Olivier de Lezormel. Acte des archives du château du Rohou en Plouézoc'h consulté par L. Le Guennec vers 1928. 1504 (22 mai) Mandement de Jean II de Rohan enjoignant à son receveur de Landerneau d'affecter le montant des taxes de lods et ventes perçues par lui aux travaux de réédification alors en cours au château de La Roche-Maurice. Acte rédigé "en nostre chastel de La Roc". Original conservé aux A.D.M. , 20 J 224, fonds de Kerguéhennec. Publié par J. Kerhervé, B.S.A.F. , 1982, p. 335.

1504 Perceval de Lezormel est capitaine du château. Acte mentionné par L. Le Guennec, Dépêche de Brest, 17 jan. 1927.

1549 (13 octobre) Aveu de la seigneurie de Landerneau par le vicomte de Rohan: apparaît en premier lieu "Le chasteau de La Roche morice son jardin et parc, son parc au colombier et les bois tant de haute fustay que taillis... le moulin de la roche... le four a ban du bourg de la roche...". Original: titre de Blain conservé à la B.M. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1716, fol 37.

1571 Aveu et dénombrement de la principauté de Léon par Henri de Rohan après le décès de son père en 1552. Original aux A.D.L.A., B 1694. Mentionné par L. Maître, 1902, p. 403.

1640 (1 août) Abandon des droits de guet du château de La Roche-Maurice par son capitaine, François du Louet, à la vicomtesse de Rohan. Original: titre de Blain, conservé à la B.M. de Nantes, compléments au fonds Bizeul, n° 2589.

1641 (2 août) Aveu pour la principauté de Léon rendu au roi. Copie du XVIle siècle conservée à la B. M. de Nantes, fonds Bizeul, B 1711.

Mentionné par A. Molinier, 1893, p. 250.

1642 Aveu et dénombrement de la principauté de Léon par Marguerite de Rohan après le décès de son père survenu en 1638. Original aux A.D.L.A. , B 1694. Mentionné par L. Maître, 1902, p. 403.

1678 Selon la pancarte des droits et charges du voyer de la seigneurie de Daoulas, ce dernier devait en garder les prisonniers avant qu'ils ne soient pris en charge par les officiers de cette juridiction et menés aux prisons de la Roche-Maurice. Cité par P. Peyron et J.-M. Abgrall, 1910, p. 135, avec pour unique référence "E 125". 1683 - 1684 Papier terrier de la barre royale de Lesneven: déclaration de L. de Rohan-Chabot au sujet des dépendances de la baronnie de Landerneau qui comprenait les châteaux de Joyeuse-Garde et de La Roche-Morice. Original aux A.D.L.A. , B 1728. Mentionné par L. Maître, 1902, p. 413.

1684 Marguerite de Rohan nomme Jean Corran enseigne de Landerneau, Joyeuse-Garde et La Roche-Maurice. Relaté par C. Floquet, 1989, p. 226.

1693 (16 mai) Déclaration des terres, châteaux, fiefs... de Louis de Rohan- Chabot au roi Louis XIV. Original mentionné par J.-M. Guéguen, "Les collections de Kerdanet à Lesneven", B.S.A.F. , 1943, pp. 3-19, p. 19.

1694 Acte du vicomte de Rohan se référant aux lettres d'Alain de Rohan (1391), du duc François II (1486) et du roi Charles VIII (1492): il est question du droit de "guest pour l'établissement de deux gentilshommes gouverneurs au château de La Roche, dont l'un défendra la partie au levant et l'autre côté du couchant". Cité par J. Bazin, B.S.A.F., 1973, p. 184.

1695 (21 juin) Aveu pour la principauté de Léon rendu au roi. Original mentionné par J.-M. Guéguen, "Les collections Kerdanet à Lesneven", dans B.S.A.F. , 1943, pp. 3-19, p. 19. L'acte proviendrait de chez M. Charles Le Bourg, procureur fiscal et receveur des rentes du duc de Rohan.

1695 Aveux rendus par le duc Louis de Rohan-Chabot au roi Louis XIV; ils indiquent que "les châteaux et forteresses de La Roche- Morice et de Joyeuse-Garde ... estoient à demy ruinez, avec leurs tours, douves, fossez, remparts, terrasses, espérons, guérittes, jardins, chapelles et colombiers...". Cité par P. Potier de Courcy, 1842, p.43.

1696 (1 février) Dans un aveu du vicomte de Rohan, il" est stipulé que, selon des lettres de 1336, de brillantes fêtes étaient données par les vicomtes de Léon en leur château de La Roche-Maurice. Relaté par D.L. Miorcec de Kerdanet, 1823, p. 349.

1696 (7 mai) Aveu du duc de Rohan au roi. Original aux A.D.F., 1 E 694. Cité par J. Bazin qui en reproduit quelques extraits, "Landerneau, fief urbain des vicomtes de Léon et de Rohan, rapports entre la ville et son suzerain", SI. Sd., p. 77-79. Nomination par le duc de Rohan de l'écuyer Jean Corran, seigneur de Kergoat, comme enseigne de Landerneau, Joyeuse- Garde et La Roche-Maurice.

Relaté par J. Bazin, B.S.A.F., 1973, p. 184.

1802 (25 août) Louis de Rohan-Chabot vend ses biens de Bretagne à Louis Henri Janzé, notamment "l'emplacement du ci-devant château de la Roche".

Cité par C. Floguet, 1989, p. 226-227.

1814 (22 novembre) Le baron Louis Henri Janzé revend à Alexandre de Rohan-Chabot, duc de Rohan, "l'emplacement du ci-devant château de Laroche". Cité par C. Floguet, 1989, p. 227. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

En dépit de ce que la liste qui suit pourrait laisser présumer, le château de La Roche-Maurice n'a pas donné lieu à de multiples publications. Plusieurs voyageurs du XIXe siècle en ont décrit les ruines et évoqué les légendes comme C.P. de Fréminville ou C. de Keranflec'h. Hormis quelques articles spécifiques comme ceux de D.L. Miorcec de Kerdanet, H. Ursheller ou A. Kernéïs, il faut attendre 1964 pour que J. Bazin lui consacre une monographie. Nous nous en sommes largement inspirés lors de notre mémoire de maîtrise en 1988. Par ailleurs, l'histoire et l'architecture du château ne sont pas évoquées dans les synthèses de R. Grand, A. Mussat ou M. Jones sur l'architecture militaire bretonne.

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BAZIN (J.), "Fondation de la ville de Landerneau au Moyen Age", dans Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, 1963, pp. 8-14.

BAZIN (J.), "Le château de La Roche-Maurice", Brest, 1964.

BAZIN (J.), "Landerneau, ancienne capitale de la principauté de Léon", 2e éd.. Rennes, 1973, p. 210-223.

BAZIN (J.), "Landerneau, fief urbain des vicomtes de Léon et des vicomtes puis ducs de Rohan, princes de Léon", dans Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, 1973, pp. 161-198, p. 183-185.

BOUREAU-DESLANDES (A.-F.), "Recueil de différents traités de Physique et d'Histoire naturelle", 1753, tome 3, p. 62.

"La Bretagne contemporaine", tome 3, Finistère, dessins d'après nature par F. Benoist, textes par A. de Courson, P. Potier de Courcy ... , Paris, 1865, p. 107.

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Bulletin Archéologique de l'Association Bretonne, "Compte rendu du Congrès de l'Association Bretonne à Landerneau les 3, 4, 5 juillet 1970", 1970, pp. 11-27, p. 16-19 avec un plan.

Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, "Procès verbaux, chronique", 1926, pp. LXIII-LXIV, p. LXIII.

Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, "Procès verbaux, séance du 29 novembre", 1928, pp. XXXVII-XL, p. XXXIX, intervention de L. Le Guennec. FLAUBERT (G.), "Par les champs et par les grèves", 1847, rééd. Paris, 1924, p. 175.

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1. DESSINS -LITHOGRAPHIES

Fin du XVIle siècle Dessin en couleur réalisé à la demande du duc de Rohan et conservé au château de Josselin. Reproduction photographique aux services de l'Inventaire à Rennes, n° 87.29. 1261XA.

Vue prise du nord; les ruines du château sont encore fort impressionnantes: terrasse soutenue par des contreforts et armée d'une guérite au nord, pan de mur circulaire avec deux baies superposées au dessus, vestiges de logis avec des cheminées et, à l'est, muraille percée d'une fenêtre surmontant un arc. Il est permis de se demander si le dessinateur n'en a pas rajouté...

Vers 1719 Dessin de A.-F. Bourreau-Deslandes paru dans le "Recueil de différents traités de Physique et d'Histoire naturelle", tome 3 1753. Reproduction par C. Laurent dans le B.S.A.F. , 1964, p. 267 et dans l'ouvrage de J. Bazin, 1964, p. 19 .

Le tracé est peu précis: on distingue la masse du donjon et des pans de murailles correspondant à la chemise percée de baies au nord de celui-ci.

Vers 1830 Dessin de C.P. De Fréminville faisant partie d'un carnet de croquis intitulé "Choix d'anciens monuments bretons". Original conservé à la B.M. de Brest, ms. 56.

La vue est prise de l'est: elle représente le donjon et sa chemise en partie couverts de lierre et le rocher dénudé sur lequel ils se dressent. Comme pour l'illustration précédente, on distingue, au premier plan, des vestiges de l'ouvrage de 1'est.

1836 Lithographie parue dans l'ouvrage de E. Souvestre, "Le Finistère en 1836", Brest, 1838, p. 59. Signée de Augustin Nau, lithographie de Corne et Bonetheau à Brest.

La vue est prise du nord-nord-est, près du pont, elle figure toujours le rocher principal avec les ruines du donjon et de sa chemise.

1837 Dessin reproduit par L. Le Guennec, A.D.F. , fonds 34 J, commune de la Roche-Maurice, publié dans "Le Finistère monumental: Brest et sa région", Quimper, 1981, p. 501. L'auteur du dessin n'a pas été identifié: il pourrait s'agir de C.P. de Fréminville dont L. Le Guennec consulta plusieurs carnets de croguis restés inédits.

Il représente la face ouest du donjon en ruine avec les vestiges de plusieurs petites baies, piédroits et orifices. L'entrée apparaît mal alors gu'une fenêtre à croisée est figurée à la base de la tour, au sud. L'existence de cette baie semble bien hypothétigue depuis les sondages archéologigues pratigués par M. Le Goffic en 1993.

1846 5 lithographies parues dans l'ouvrage de J. Taylor, C. Nodier et A. de Cailleux, "Voyages dans l'ancienne France", tome 2, Paris 1846.

A. par A. Mayer del.et Eug. Cicéri lith., imp. par Lemercier.

Vue intéressante prise du sud-est montrant la masse du rocher et du donjon face au plateau du Léon. Le dessin du donjon est précis.

B. par Eug. Cicéri.

Vue prise du nord-nord-est représentant la rivière et le rocher avec le donjon et sa chemise en ruine: le sommet du donjon est ici moins rectiligne gue sur la lithographie précédente.

C. par Léon Caucherel et Eug. Cicéri.

Vue prise des hauteurs du Pontois, à l'ouest: le rocher, le donjon et la chemise en ruine.

D. par Eug. Cicéri et Bellet, imp. par Lemercier.

Vue prise de la vallée de l'Elorn au nord-nord-est avec une charrette et les prés au premier plan surplombés par le rocher dénudé supportant la silhouette déchiguetée du donjon et de la chemise.

E. par Léon Caucherel et Eug. Cicéri, imp. Lemercier, Paris.

Vue prise de la vallée du Morbic à l'ouest-sud-ouest: elle représente le donjon isolé avec l'ouverture béante de la porte et les vestiges de la chemise, un pan de muraille où apparaissent les vestiges de deux baies.

1865 Lithographie parue dans "la Bretagne contemporaine", tome 3, Finistère, 1865, p. 106. Dessin d'après nature par Félix Benoist, lith. par Jacottet, fig. par Bayot. Elle existe aussi en version colorisée. Vue prise du nord-ouest avec la voie ferrée, le clocher et le rocher du donjon où l'on distingue plusieurs arcs dans les murailles du château.

2. PLANS

1811 Les réalisateurs du plan cadastral communal réalisé à cette époque n'ont pas figuré le tracé des ruines du château dans la parcelle n° 33, section A.

1970 Relevé des vestiges par H. Sicard lors de la campagne de fouilles entreprise par l'Association Mein Breiz et paru dans le Bulletin de l'Association Bretonne, 1970, p. 16. vers 1980 Relevé des vestiges de la plate-forme du donjon et de la chemise par M. Fons de Kort. Inédit.

1988 Copie des deux plans précédents par P. Kernévez, 1988, p. 297 et 299 avec indication du relief, mention des ouvrages conservés et des tracés hypothétiques d'après observations sur le terrain.

1989 Plan et élévation des façades intérieures et extérieures du donjon par les architectes de l'A.T.G.T.O. de Landerneau.

1990 Relevé des vestiges du château, y compris les bases de murs à l'ouest, par M. Le Goffic, Archéologue Départemental. Plan conservé au Service Départemental d'Archéologie.

3. PHOTOGRAPHIES

CARTES POSTALES

Quelques tirages du début du siècle peuvent être intéressants: la végétation est un peu moins dense et quelques pans de murs ont disparu depuis.

Les photographies sont le plus souvent prises du nord-nord-est, avec la gare au premier plan. Une carte postale de la collection Villard (n° 617) présente une vue du sud-est et montre la faible extension du bourg. Une autre (réf. n" 622) nous fait découvrir le donjon et sa chemise vus de l'ouest. On distingue bien le sommet du rocher et un massif de maçonnerie, aujourd'hui disparu, à proximité du réduit nord (reproduction, P. Kernévez, 1988, p. 301). SYNTHESE HISTORIQUE

L'histoire du château de La Roche-Maurice demeure assez mal connue en dépit des informations que nous possédons sur les événements décisifs dont il fut le théâtre. Il servit successivement de:

- résidence seigneuriale pour les vicomtes de Léon au XIIle siècle et au début du siècle suivant;

- principale forteresse pour les vicomtes de Rohan au sein de la vicomte de Léon, tombée en leurs mains par mariage, entre 1363 et la fin du XVe siècle;

prison après le démantèlement des murailles par les troupes françaises en 1489 et une phase de restauration, totale ou partielle, au début du XVIe siècle; cette fonction est attestée jusqu'à la fin du XVIIe siècle;

- les ruines furent ensuite exploitées comme carrière de pierre jusqu'en 1926, année de leur inscription à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques.

Un certain nombre d'interrogations subsistent:

- A qui peut-on attribuer la construction du château qui n'apparaît dans l'histoire qu'en 1263: qui était ce Morvan auquel il doit son nom? Quel rôle joua la forteresse lors de la période féodale, aux Xle et Xlle siècles?

- de même, nous possédons peu d'informations sur le sort du château pendant la guerre de Succession de Bretagne pendant laquelle il servit de refuge aux vicomtes de Léon, partisans de Charles de Blois, alors que tout le Bas-Léon était aux mains des Anglais qui soutenaient Jean De Montfort, l'autre prétendant à la couronne ducale.

- en dernier lieu, les repères chronologiques manquent pour fixer, de manière précise, les étapes de la lente déchéance de la forteresse: a-t-elle été entièrement restaurée après 1490? Aussitôt convertie en prison car devenue inutile pour un seigneur qui n'y résidait pas? Ne fut-elle pas réutilisée lors des guerres de la Ligue, à la fin du XVIe siècle?

Afin d'y répondre, nous pouvons analyser quelles sont les certitudes, les probabilités et les hypothèses concernant les différentes périodes de l'histoire du château.

1. LA FORTERESSE FEODALE: Xle et Xlle siècles.

Si l'on excepte le légendaire seigneur Elorn de la "Vie de saint Riok" et Morvan, le roi des Bretons qui combattit l'empereur Louis Le Pieux vers l'an 800, l'opinion la plus couramment émise est que le château fût construit par un vicomte de Léon nommé Morvan au Xle siècle. J. Bazin (1964, p. 26) rajoutait que le donjon, du fait de sa forme carrée, ne pouvait pas être postérieur au XIle siècle.

En fait il nous faut avouer que, compte tenu de la carence des sources archivistiques bas-bretonnes, on ne sait rien de l'histoire du château avant le milieu du XlIIe siècle: nous ne pouvons guère accorder de crédit aux affirmations de D.L. Miorcec de Kerdanet (1823, p. 348-349) qui relatait qu'Hervé de Léon y vivait en 1130 ou que Jarnogon livra la forteresse à Henri II Plantagenêt en 1177 (Kernévez, 1988, p. 312).

Nous en sommes donc réduits à un certain nombre de conjectures :

- le bâtisseur du château: au XlIIe siècle, la forteresse avait pour nom Roc'h Morvan ("Rupe Morvan" en 1263, "Rocha Morvani" en 1280). Le terme "roc'h" désigne en breton la roche, le château, et est dans ce cas souvent associé à un nom d'homme, celui de son fondateur. Il en est ainsi pour plusieurs châteaux bretons du Xle siècle comme La Roche-Bernard ou La Roche-Derrien. Selon H. Guillotel et B. Tanguy, Morvan ne saurait être un vicomte de Léon car ceux-ci s'appelaient alors Guyomarch ou Hervé. Par contre les vicomtes du Faou avaient pour nom Ehuarn ou Morvan (Kernévez, 1988, p. 289-290). On pourrait ainsi attribuer la construction du château à un vicomte du Faou, Morvan, peut-être celui qui fut battu par Alain Canhiart vers 1030, période qui correspond à l'émergence d'un certain nombre de seigneuries châtelaines en Bretagne.

le choix du site: il résulte de considérations stratégiques et tactiques. En effet, le château se dresse sur le versant sud de la vallée de l'Elorn qui pourrait avoir été la limite nord des possessions des vicomtes du Faou au Xle siècle. Il constituait ainsi un "verrou" sur le haut cours de l'Elorn, face au comté de Léon, non loin de la cité de Landerneau. Il contrôlait aussi un gué, point de passage de l'ancienne voie de Landerneau à . En outre le choix d'un rocher, naturellement escarpé, évita à ses constructeurs d'avoir à élever une motte artificielle pour implanter leur donjon comme c'était alors fréquemment le cas.

- les origines: les vicomtes de Léon et du Faou étaient pareillement avides et batailleurs. Ils semblent en être rapidement venus aux prises et les premiers, dont l'assise territoriale, et donc la puissance militaire, était plus importante supplantèrent les seconds. Ils leur enlevèrent le Roc'h Morvan, la paroisse de Ploudiry et ses trêves dès le Xlle siècle. Ils purent ainsi repousser la frontière de leur comté au sein de la boucle de l'Elorn et ils s'assurèrent en outre la possession de la châtellenie de Daoulas dès le milieu du XIle siècle. En 1163 encore, le vicomte du Faou s'empara d'Hervé de Léon et de son fils et les enferma dans le château de Châteaulin. Délivrés, ces derniers emprisonnèrent à leur tour le vicomte du Faou et son fils dans le château de Daoulas (chronique de Guillaume le Breton). Il est certain que le château de La Roche-Maurice joua un rôle non négligeable lors de ces conflits.

Le milieu du Xlle siècle margua l'apogée de la puissance des vicomtes de Léon; ces grands féodaux, jaloux de leur privilèges, n'acceptèrent pas la mainmise des Plantagenêt sur le trône ducal dans la seconde moitié de ce siècle. A. de La Borderie ( Histoire, tome 3, p. 273-280), gui y voyait avant tout un ardent défenseur de l'indépendance bretonne, raconte gue Guyomarch IV de Léon ne se rebella pas moins de huit fois entre 1167 et 1179. Il fut à chaque fois battu par les troupes de Henri II Plantagenêt: Robert de Thorigny relate gu'en 1167 le plus important des châteaux du vicomte fût brûlé et détruit de fond en comble. En 1179 encore, Robert du Mont indigue que tous ses châteaux furent pris et occupés par les brabançons royaux. On ignore cependant guels étaient ces châteaux, à l'exception de celui de Morlaix. Nul doute gu'à l'issue de ces ravages, celui de La Roche-Maurice ne soit resté intact et n'ait exigé d'importants travaux de restauration ou de reconstruction.

2. LA RESIDENCE SEIGNEURIALE DES VICOMTES DE LEON: 1180 - 1363.

Durant ce siècle et demi de paix relative, le château de La Roche-Maurice accueillit le lignage de la branche cadette des vicomtes de Léon dont il était la principale résidence. La paix ne fut cependant pas toujours absolue comme en témoigne les démêlés des vicomtes de Léon avec le duc vers 1216-1222 et 1240-1260, ou encore la mise à sac de Landerneau par les Anglais en 1296.

En 1180, excédé par les continuelles révoltes du vicomte de Léon, Henri II Plantagenêt scinda le comté de Léon en deux parties gu'il rétrocéda aux deux fils de Guyomarch IV. L'aîné obtint les châtellenies de Lesneven et de Saint-Renan avec le château de Brest. Hervé, le cadet, reçut notamment les châtellenies de Daoudour et de Landerneau, cité gui devint la "capitale" de son fief. Les vicomtes de cette branche cadette choisirent de s'établir à La Roche-Maurice, à guatre kilomètres de là, plutôt gue dans cette agglomération qui n'était pas close de murs, ni même peut-être protégée par un château. La forteresse de La Roche-Maurice devint dès lors la "citadelle" de Landerneau.

Le nom de La Roche-Maurice est cité pour la première fois dans un acte de 1263, ce gui est tardif mais non surprenant pour la Basse-Bretagne où les écrits sont relativement rares avant le XlIIe siècle (ainsi le château de Morlaix n'apparaît- il gu'en 1128, celui de Brest en 1240 et celui de Lesneven en 1351). Il y est fait mention d'objets gui auraient été dérobés à La Roche-Maurice lors de la mort de Hervé III de Léon, soit vers 1241 (H. Morice, Preuves 1, col. 989) . Le nom de La Roche-Maurice n'est mentionné qu'une autre fois avant la fin de ce siècle, en 1280. D.L. Miorcec de Kerdanet (1823, p. 349) relate que, d'après des lettres de 1336 dont il est question dans un aveu de 1696, les vicomtes de Léon y donnaient de brillantes fêtes à la veille de la guerre de Succession de Bretagne. Hervé VIII de Léon y naquit au début de ce conflit, en 1341.

La Roche-Maurice étant devenue leur résidence ordinaire, il est vraisemblable que les vicomtes de Léon eurent soin, à la fin du Xlle siècle ou au début du siècle suivant, d'en renforcer les défenses. Le donjon trapézoïdal, qui selon C. Amiot (1992, p. 56), "présente les caractères d'une réalisation romane certainement tardive" pourrait bien dater de cette période ainsi que les vestiges de la courtine qui l'entourent au nord. Il est certes plus confortable que ceux qui ont pu être observés sur les mottes de Leskelen en Plabennec ou de Lamber en Ploumoguer mais il a aussi été démontré que la tradition des grands donjons quadrangulaires s'est poursuivie en Bretagne jusqu'au XlVe siècle. Cette tour serait ainsi un témoin original et précieux de l'architecture militaire bretonne de cette période. C'est vers la fin du XIIle siècle que les vicomtes de Léon se firent édifier un autre château, Joyeuse-Garde, à la Forest-Landerneau, à six kilomètres à l'ouest de Landerneau. Le choix était ici tout différent: c'était un château-cour, sans donjon, et le rôle résidentiel semble y avoir supplanté la fonction militaire. Si le château de La Roche-Maurice est austère, celui de Joyeuse-Garde paraît être avant tout un manoir, certes puissamment fortifié, établi en lisière d'une forêt servant de réserve de chasse.

Le château généra la création d'un bourg castrai à La Roche- Maurice. Dans son testament, établi en 1363, Hervé VIII de Léon fonda une chapellenie dans la chapelle dédiée à saint Yves, près du château. Il est vraisemblable que celle-ci fût le lieu de culte castrai auquel succéda l'église actuelle, élevée au XVIe siècle, à 150 mètres à l'est du château. Dans un aveu de 1549, il est dit qu'en plus de la forteresse existait à La Roche-Maurice un jardin, un parc, un colombier ainsi qu'un four et un moulin banal. La Roche était jusqu'à cette époque le siège d'une des juridictions de la vicomte de Léon; les fourches patibulaires se dressaient sur une colline, de l'autre côté de l'Elorn. Le développement du bourg fut cependant entravé par la topographie des lieux et par la proximité de Landerneau qui comptait deux églises paroissiales au bas Moyen Age. La Roche-Maurice resta une trêve de la grosse paroisse rurale de Ploudiry.

La période de la guerre de Succession de Bretagne (1341- 1364) reste très mal connue. On sait que les vicomtes de Léon soutinrent la cause de Charles de Blois contre Jean de Montfort. Ce dernier reçut l'appui du roi d'Angleterre auquel il confia la garde du château de Brest à partir de 1342. Les Anglais devinrent alors les maîtres de tout le Bas-Léon: en 1342, Hervé VII de Léon fut capturé non loin de Lesneven, quelques mois après la naissance de son fils à La Roche- Maurice. Sources et chroniques restent muettes sur ce qui advint de La Roche-Maurice alors que l'on sait par ailleurs que des places comme Joyeuse-Garde, Lesneven et Morlaix changèrent plusieurs fois de mains. Cette carence d'informations ainsi gue l'imprécision géographique des chroniques de Jean Froissart ont amené A. Kernéis (B.S.A.B., 1907-1908) à identifier La Roche au "Hainebont" de ces dernières, théâtre de plusieurs sièges. Cette thèse a été réfutée depuis et mérite d'autant plus de l'être gue le nom de la Roche-Maurice est bien attesté en 1341 et 1363. En outre, deux lettres de 1359 et 1360 nous apprennent gue le château était alors la résidence de Erard et Hervé VIII de Léon. En 1363, à la mort de ce dernier, la vicomte échut à sa soeur aînée, Jeanne, gui avait épousé Jean de Rohan en 1349. Il hérita ainsi du château de La Roche-Maurice.

3. LA FORTERESSE DES VICOMTES DE ROHAN: 1363 - XVIe siècle.

Les Rohan étaient une des principales familles bretonnes; leurs fiefs s'étendaient alors essentiellement dans le centre de la Bretagne autour de leurs châteaux de Rohan, La Chèze et Pontivy. La vicomte de Léon était trop excentrée pour qu'ils fassent de La Roche-Maurice une de leurs résidences habituelles; il semble toutefois qu'ils en aient considérablement renforcé les défenses, notamment afin d'affirmer leur suzeraineté sur ces terres.

Plusieurs actes et règlements de la première moitié du XVe siècle nous indiquent gue les receveurs ducaux cherchaient alors à percevoir des droits de "ports et havres" sur les navires gui abordaient dans les ports du vicomte de Léon, en Cornouaille et en Léon. Face aux protestations répétées de son vassal, le duc accepta, en 1421, que la moitié des droits perçus à Landerneau échoit au vicomte à condition qu'il l'utilise pour la réparation du château de La Roche-Maurice qui en avait, semble-t-il, besoin. Cet accord fut prorogé en 1423, en 1425 et peut-être ultérieurement. Ces fonds furent sans doute affectés à la réfection ou à la reconstruction de l'entrée du château, au sud-est, là où se voyaient encore les bases de deux tours rondes au XIXe siècle. Les fondements de celle qui subsiste sont bâtis en grand appareil, ce gui est caractéristigue des belles réalisations du XVe siècle (mais peut-être plutôt de la fin de ce siècle).

La place semble alors être une des plus importantes de Basse-Bretagne: en 1420, le duc accorda au vicomte de Rohan l'autorisation de lever des impôts sur certaines marchandises afin de collecter les fonds nécessaires à la réparation de ses places de Rohan, Josselin, La Chèze, Blain et La Roche-Maurice. En fait, dès ce moment, il semble que le vicomte de Rohan ait décidé d'affecter la totalité des subsides levés en Léon à l'entretien d'un unigue château, celui de La Roche-Maurice, au détriment notamment de ceux de Joyeuse-Garde et de Landivisiau, voire de celui de Landerneau. Peu avant, le duc lui-même avait fait lever sur ses terres en Léon des impôts pour subvenir aux réparations des châteaux de Brest et de Lesneven, à savoir les deux-tiers pour le premier et un tiers pour le second, avant de renoncer à entretenir les murailles de ce dernier vers le milieu du XVe siècle (Kernévez, 1988, p. 242). Le coût des fortifications devenant prohibitif avec le développement de l'usage de l'artillerie, il fallait opérer des choix et renoncer à assurer l'entretien de toutes les places-fortes.

Toujours est-il que le duc, tout comme le vicomte de Rohan, accordait un certain intérêt à la place-forte. En 1429, ce prince lui fit remise du droit de rachat à condition qu'il lui cédât un certain temps la garde des châteaux de Rohan, La Chèze et La Roche-Maurice et, en 1439, il exempta de service militaire les gens d'armes de ces places. En 1479, dans un mémoire, le vicomte de Rohan affirmait que le château de La Roche-Maurice était un des plus puissants de Bretagne et qu'il était utile à la défense du pays. La charge de capitaine rapportait alors 300 à 400 livres à son détenteur.

Jean II, vicomte de Rohan de 1462 à 1516, eut de sérieuses démêlées avec François II, duc de Bretagne de 1458 à 1488, notamment du fait de ses prétentions sur la couronne ducale. En 1472, ulcéré par ses intrigues avec Louis XI, François II confisqua les châteaux du vicomte. Il confia la garde de celui de La Roche-Maurice à Louis de Rosnyvinen auquel succéda son fils Guillaume en 1479. Il occupait encore ce poste en 1485 avant que le vicomte ne récupère provisoirement ses châteaux et ne nomme Perceval de Lezormel comme capitaine de La Roche- Maurice . Après une autre volte-face, Jean II reconquit ses terres à la tête d'une armée française au début de l'année 1489. Les troupes royales qui se retranchèrent dans la place de Brest utilisèrent d'abord le château de La Roche-Maurice comme poste avancé avant d'en démanteler les murailles (sauf une tour semble-t-il) pour empêcher qu'il ne soit utilisé par les troupes ducales qui menèrent une contre-offensive durant le printemps et l'été 1489. Le roi Charles VIII accorda dès 1491 la permission à son zélé serviteur Jean II de Rohan de rétablir ses forteresses et confirma l'année suivante la jouissance du droit de guet contesté par ses vassaux.

4. LA DECREPITUDE ET LA RUINE: XVIe - XIXe siècles.

Le vicomte manifesta donc rapidement le désir de restaurer la place démantelée par les troupes royales en 1489. Il est certain qu'il y fit effectuer des travaux mais on ignore quelle en fut l'ampleur. La place n'avait plus une aussi grande utilité militaire et le vicomte faisait alors réaménager les châteaux de Pontivy et de Josselin où il résidait ordinairement. Le siège de la juridiction fut transféré à Landerneau avant le milieu du XVIe siècle. Dès la fin du siècle suivant, le château, servant de geôle, est en ruine. Les vestiges disparaissent progressivement jusqu'au début du XXe siècle: ils sont exploités comme carrière de pierre.

Entre 1493 et 1504, divers actes indiquent que des travaux étaient en cours à La Roche-Maurice. Si les premiers , vers 1493, furent peu importants et concernèrent essentiellement le pont-levis et l'aménagement de cachots, d'autres en 1498 portèrent sur la "Maison du jardin". En 1504, Jean II y consacra les produits des taxes de lods et ventes perçues dans la juridiction de Landerneau. Perceval de Lezormel resta capitaine de la place au moins jusqu'en 1505. Dans un aveu de 1549, le vicomte de Rohan déclare, en premier lieu, le "chasteau de La Roche morice" ce qui laisserait à penser qu'il est encore en état de défense. En 1640, François du Louet en est capitaine ce qui n'est toutefois pas une preuve que le château soit encore défendable car en 1684, Jean Corran fut nommé enseigne de Landerneau, Joyeuse-Garde et La Roche-Maurice alors que l'on sait par ailleurs que ces châteaux étaient hors d'usage.

De fait, si la ruine n'apparaît certaine qu'à la fin du XVI le siècle quelques indices laissent présumer qu'elle fût plus précoce. En premier lieu, il n'est fait aucune mention de la place lors des guerres de la Ligue. En cette fin du XVIe siècle, le Léon, et notamment Landerneau, furent ravagés. Des combats eurent lieu à Lesneven auprès de l'ancien château; des sièges à Kérouséré en et à Morlaix. Quelques vieilles forteresses servirent de refuge à des nobles ou à des brigands, comme celle du Conquet ou celle de Kermavan en , alors que d'autres comme Penhoat en Saint-Thégonnec furent démantelées. Si, pas plus qu'à Joyeuse-Garde, on ne mentionne à La Roche-Maurice de combats ou de siège n'est-ce pas parce que le château était totalement inutilisable. De même quand le capitaine, François du Louet, renonce au droit de guet en 1640 ne serait-ce pas pour la simple raison que celui ne se justifiait plus et qu'il ne pouvait plus l'exiger des habitants?

En 1678, on apprend que le château sert de geôle pour les prisonniers de la juridiction de Daoulas. Il s'agit probablement des salles situées dans les parties basses du château, au sud-est, c'est à dire celles de l'entrée reconstruite au XVe siècle. En effet, dans un aveu de 1695 il est indiqué que les châteaux de la Roche-Maurice et de Joyeuse- Garde sont à demi-ruinés avec leurs tours, douves, fossés, remparts, terrasses, éperons, guérites, jardins, chapelles et colombiers. Compte-tenu du plan et de la topographie du second, il semble que les termes terrasses, éperons et guérites s'appliquent tout spécialement au site de La Roche-Maurice. Cette description, somme toute bien sommaire, paraît confirmer en partie la représentation de la place réalisée à la demande du vicomte de Rohan dans le courant du XVIle siècle. La ruine progressive expliquerait aussi l'épaisseur des éboulis qui recouvrent l'intérieur du château et les pentes du rocher.

Nous avons peu d'informations sur l'état du château au XVIIIe siècle où la ruine dut se poursuivre: le silence qui l'entoure pourrait démontrer qu'il fût totalement délaissé, même comme prison. On dispose cependant de la première description des vestiges réalisée par A.-F. Bourreau-Deslandes en 1719: il affirme que le château est totalement ruiné et qu'il n'en reste que des souterrains creusés dans le roc, quelques murs très épais et de petites redoutes. Il réalisa alors un dessin des ruines.

Durant la période révolutionnaire et l'Empire, le duc de Rohan émigra et ses biens furent mis sous séquestre en 1792 puis confisqués. Presque ruiné, il dut, en 1802, vendre ses biens de Bretagne au fermier général de son duché, Louis Henri Janzé, qui conserva ceux-ci sous son nom jusqu'au moment où il les revendit à son ancien maître en 1814, notamment "l'emplacement du ci-devant château de Laroche".

A.-F. Bourreau Deslandes fut le précurseur d'une longue série de curieux, d'antiquaires ou d'érudits qui visitèrent le château au XIXe siècle. Ils nous ont laissé d'utiles descriptions de ses ruines:

* en 1823, D.L. Miorcec de Kerdanet évoque avant tout l'histoire du château et reprend la description précédente.

* vers 1829, J.F. Brousmiche relate que le château est complètement ruiné et que seuls les fossés et les bases des tours en indiquent l'étendue tandis que le lierre achève sa destruction.

* en 1832, C. P. de Fréminville est bien plus précis: il décrit d'abord les ouvrages situés sur le rocher le plus élevé, notamment le donjon; selon lui, l'escalier qui s'y trouve se prolongeait inférieurement et donnait accès à un souterrain creusé dans la roche. Il relate ensuite qu'il a pu observer les vestiges de trois tours sur le tracé de ce qu'il appelle l'enceinte extérieure: une tour carrée implantée sur un second monticule rocheux et les bases de deux énormes tours rondes qui défendaient le portail.

* en 1847, G. Flaubert évoque un "nid d'aigle" démantelé dont les ruines sont envahies par la végétation.

* en 1848, P. Potier de Courcy le décrit ainsi: "quelques parties des fondations d'un donjon carré, circonscrit par une enceinte extérieure où l'on remarque encore les ruines de quatre tours, peuvent appartenir à une époque reculée".

* en 1858, C. de Keranflec'h insiste sur le fait que la forme irrégulière de l'ensemble donjon-chemise soit due à l'utilisation des avantages qu'offrait la position naturelle pour la défense. Il indique également que l'emploi de formes angulaires et l'absence de tours de moyen diamètre dans cette partie du château sont une marque d'ancienneté. Il évoque, à l'est, l'existence d'un ouvrage plus récent d'appareil bien plus soigné qu'il compare aux "bastions" de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle. Il note que si de ce côté la roche était à pic, du côté opposé, c'est à dire à l'ouest, où la pente était moins raide, il existait une enceinte en "demi cercle", une espèce de "bayle" joignant l'angle nord-ouest du rocher à celui du sud-ouest. Il termine par l'examen du flanc sud où un fossé barrait l'isthme dans toute sa largeur.

* en 1865, M. Radiguet se contente de reprendre la description de C. P. de Fréminville. La voie ferrée est aménagée en contrebas du château à cette époque.

* en 1880, A. de Kerdrel indique que l'édifice est composé de trop d'éléments hétérogènes et disparates et qu'on y distingue trop peu de détails architectoniques pour déterminer la date de construction du château. Il juge que les ruines ne sont guère anciennes mais qu'elles ont du succéder à un château antérieur. Cette même année, P. Le Guen signale la découverte dans un champ, au pied des ruines, de nombreux boulets en pierre.

* en 1891, H. Ursheller n'y voit qu'un vieux donjon carré aux murs épais, quelques massifs de maçonnerie et des débris de tours de l'enceinte extérieure.

Les descriptions de ces érudits, notamment celles de C.P. de Fréminville et de C. de Keranflec'h, sont d'autant plus précieuses que durant tout le XIXe siècle, en dépit probablement des interdictions de son propriétaire, le duc de Rohan, le château servit de carrière de pierre. H. Bazin (1964, p. 30) indique que des enlèvements de pierre eurent lieu en l'an XII, XIII, ainsi qu'en 1820, 1859 et 1880.

5. LA SAUVEGARDE DES RUINES : le XXe siècle.

Ce n'est que depuis quelques décennies qu'on a pris conscience de l'importance archéologique, architecturale et historique des vestiges du château. Inscrits à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, ils ont été l'objet de consolidations vers 1968 et surtout depuis 1989, année de son acquisition par le Conseil Général du Finistère.

Au fur et à mesure que le château tombait en ruine la municipalité et des riverains semblent avoir essayé de gagner de l'espace à ses dépens notamment avec le nivellement de la place du château ou le percement de la voie communale n°l surplombant la vieille et peu commode rue des remparts. Cet aménagement pourrait avoir entraîné la destruction de structures médiévales en contrebas du donjon, à l'ouest.

Durant le mois de mars 1926, le château fut le théâtre d'une véritable chasse au trésor relatée par J. Salaun dans "La dépêche de Brest". Un particulier, J. Eléouët, ayant entrepris de faire construire une maison au pied des vestiges de la tour circulaire, au sud-est du château, mit à jour l'entrée d'un souterrain à demi-comblé. Dès lors, certains Rochois entreprirent de l'explorer puis de le dégager complètement. Il s'agissait en fait d'un couloir menant à une petite salle voûtée donnant accès, par un autre couloir, à une seconde pièce également voûtée munie d'une bouche d'aération obturée par de grosses pierres. Lors des déblaiements, on recueillit des ossements, des boulets et de la poterie. Les travaux permirent de mettre à jour un escalier d'une douzaine de marches au pied de l'entrée et de dégager, presque complètement, la petite salle. Devant l'afflux des curieux, le propriétaire décida de reboucher l'excavation et, nous dit J. Salaun, d'aménager un accès particulier à partir de sa maison. Lors de ces investigations, un autre "souterrain" fut découvert à une cinquantaine de mètres au sud du premier, vraisemblablement sur la place du château. Ce couloir, orienté sud-ouest nord-est, était large d'un mètre et situé à une faible profondeur; il fut rapidement comblé car il gênait la circulation.

Ces vestiges paraissent être les mêmes que ceux aperçus vers 1719 par Bourreau-Deslandes et dont D.L. Miorcec de Kerdanet nous apprenait, en 1823, qu'ils avaient été bouchés pour éviter des accidents. De la même manière, en 1832, C. P. de Fréminville évoqua le comblement d'un souterrain creusé dans le roc, à l'intérieur du donjon, une vingtaine d'années auparavant. En 1993, lors d'un sondage archéologique M. Le Goffic a dégagé les vestiges d'un escalier reliant la plate­ forme du donjon à une poterne. Il y a tout lieu de penser, compte tenu de la topographie du site, que les passages, "souterrains" et escaliers divers devaient être assez nombreux, notamment pour desservir les diverses terrasses et les postes de défense.

Ceux qui nous sont signalés en 1926 pourraient en fait correspondre à des accès aux salles basses mentionnées dans cette partie du château en 1493. Il s'agirait alors de casemates d'artillerie du XVe siècle destinées à protéger le portail d'entrée. Ce sont peut-être les mêmes que celles qui ont été mises à jour vers 1968 par les membres de l'association Mein Breiz et qui sont toujours discernables au sein de la plate-forme est du château qui domine l'ancienne maison Eléouët. Ces dernières appartiennent indiscutablement aux aménagements défensifs de l'une des deux grosses tours du XVe siècle jouxtant l'entrée du château. Le second "souterrain" pourrait être un conduit d'évasion ou appartenir à un probable ouvrage avancé qui se dressait sur l'emplacement de l'actuelle place du château.

C'est lors de ces investigations incontrôlées que l'on semble avoir pris conscience de l'importance historique des ruines: en mai 1926, les membres du conseil municipal décidèrent de demander leur classement afin "d'attirer de nombreux touristes". Le château fut inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques le 18 octobre 1926.

Il semble toutefois que cette décision n'eût guère de répercussions pour la préservation des vestiges. Ce n'est que vers 1968 qu'une filiale de l'Association Bretonne, la société "Monuments bretons Mein Breiz" entreprit de réaliser quelques travaux de maçonnerie sur le donjon et de déblayer les vestiges de la tour ronde du XVe siècle au sud-est. Dans le même temps, un commis d'architecte, H. Sicard, réalisa le premier relevé des ruines du château. Nous n'avons retrouvé aucune autre information sur ce chantier que celles contenues dans un compte -rendu du B.A.A.B. de 1970. Il semble que, outre le dégagement de la base de plusieurs murs sur la plate-forme est, on ait également entrepris de vider alors l'éperon polygonal au nord du donjon et d'effectuer un sondage entre celui-ci et la tour maîtresse. Divers tas de pierres visibles sur les pentes ouest du château indiquent que, là aussi, on a pu procéder à diverses opérations, à une date indéterminée.

Depuis 1989, date de la cession des ruines par le duc de Rohan au Département du Finistère, plusieurs travaux de consolidation et de mise en valeur des vestiges ont été réalisés. En 1990, les membres du Service Départemental d'Archéologie ont réalisé un relevé topographique ce qui a permis de mettre en évidence l'existence de nombreuses traces de murets ou de parements dans la partie ouest du site, entre le donjon et la route d'accès au bourg. Ils correspondraient aux aménagements intérieurs, voire aux murailles, de l'enceinte en demi-cercle observée à cet endroit par C. de Keranflec'h en 1858. Lors de la réfection des maçonneries du donjon en 1993 et de l'aménagement d'une passerelle d'accès, M. Le Goffic, Archéologue Départemental, a mis au jour, en lisière de la paroi est du donjon, un escalier menant à une poterne condamnée en contrebas de ce dernier ainsi que des vestiges de la chemise qui protégeait cette tour.

CONCLUSION

Le donjon de La Roche-Maurice apparaît ainsi comme étant un intéressant témoin de l'architecture militaire bretonne antérieure à la guerre de Succession de Bretagne. Il est bien entendu indispensable de confirmer ou d'infirmer la période que nous proposons pour sa construction ce qui serait également bienvenu pour l'étude des fortifications bretonnes.

Des fouilles apporteraient d'importantes informations quant à la nature des bâtiments antérieurs des Xle et XIle siècles, voire permettraient de préciser l'époque de l'édification du premier château. On collecterait aussi d'utiles renseignements sur le cadre de vie d'une famille de la haute aristocratie bretonne aux XlIIe et XlVe siècles avec la mise à jour des niveaux d'occupation du logis attenant au donjon et des bâtiments qui se dressaient en contrebas, contre la courtine sud, et au sein de la "basse-cour" occidentale.

Enfin, elles nous renseigneraient sur les travaux réalisés par les vicomtes de Rohan lors de la modernisation des défenses de la forteresse au cours du XVe siècle. Il doit subsister des vestiges des casemates des tours qui encadraient le pont-levis ainsi que de probables défenses avancées au-delà du fossé, en grande partie comblé de nos jours.

Nul doute que le dégagement des ouvrages, visibles ou enfouis, et leur mise en valeur nous permettront d'avoir une perception toute différente de l'architecture du château qu'elle ne l'est aujourd'hui. BILAN

Il est difficile de juger de la valeur d'une étude dont le principal caractère nous semble être son inachèvement. Beaucoup d'interrogations subsistent, un certain nombre de "pistes" ont été incomplètement explorées, les inventaires présentés ne sont nullement exhaustifs, ainsi:

- il conviendrait d'étudier un certain nombre d'actes recensés mais non examinés, particulièrement les aveux de la principauté de Léon mais aussi les actes antérieurs au XVe siècle gui concernent les vicomtes de Léon;

- guelgues ouvrages de la bibliographie n'ont pu être consultés mais il y a sans doute peu à attendre de ce côté, sauf pour ce gui est de l'étude des propriétaires successifs du château et des comparaisons possibles avec d'autres châteaux de la même époque;

- nous avons signalé l'existence de dessins encore mal connus du XIXe siècle: il est vraisemblable gu'il en existe encore guelgues autres dans les dépôts d'archives;

- en ce gui concerne la synthèse historique, nous devons reconnaître que ce sont les fouilles qui apporteront certaines réponses ainsi que quelques surprises. ANNEXES

Extraits des principales descriptions et études consacrées au château de La Roche-Maurice citées en bibliographie:

D.L . Miorcec de Kerdanet, 1823, page 31 à 34

C.P . de Fréminville, 1832, page 35 à 38

C. de Keranflec'h, 1858, page 39 à 42

J. Bazin, 1964, page 43 à 57

P. Kernévez, 1988, page 58 à 70

C. Floquet, 1989, page 71 à 79

Copies des dessins, lithographies et plans cités dans le répertoire iconographique:

Dessin du XVIIe siècle page 80 1719, A.-F. Boureau-Deslandes page 81 1830, C.P. de Fréminville page 82 1836, A. Nau page 83 1837, copie d'un dessin par L. Le Guennec page 84 1846, A. Mayer et E. Ciceri page 85 1846, E. Ciceri page 86 1846, L. Caucherel et E. Ciceri page 87 1846, E. Ciceri et Bellet page 88 1846, L. Caucherel et E. Ciceri page 89 1865, F. Benoist page 90

1811, atlas cadastral page 91 1970, relevé de H. Sicard page 92 1988, copie du plan de H. Sicard par P. Kernévez page 93 1988, copie d'un relevé de Monsieur Fons de Kort par P. Kernévez page 94 Plusieurs siècles après, parut Morvan, prince ou comte de Léon (1}. Charlcmagne avait conquis ce pays (2); CHATEAUX DE BRETAGNE. mais , à sa mort, arrivée en 81 4. les Bretons se soule­ vèrent et reconnurent Morvan pour roi. Ce jeune prince joignait la ruse au courage et aurait donné bien des LE CHATEAU DE LA ROCHE-MORICE (i>. inquiétudes à la France , s'il avait régné plus long-tems. Louis-le-Débonnaire , qui tenait alors les rênes de A M. CHELET. l'empire , sentit toutes les conséquences de l'élection du , Laudaturqne domua longoa qux prospicit ogros. nouveau roi , encore bien que Nigel ait plaisanté sur celte royauté : Rex Mjirinauus adest cognominc dictus conira , . Assez près de l'F.lhorne, et sur la cime d'un rocher, Dici si liccat Rex quia milla regit. s'élève cette belle ruine, au milieu de coteaux, de prairie* et de quelques arbres , faibles restes de la vaste forêt qui Louis eut d'abord récours à la négociation, il envoya l'entourait autrefois. Le poète Ernold Nigel (2) en a lait une ambassade à Morvan : l'abbé Withcar en fut chargé. la description dans les vers suivans : Witbcar partit pour la Bretagne et se rendit près de Morvan au château de la Roche , qu'il connaissait déjà , £.t locus Line svlvis , hinc flumine cinctus aniœno , Scpibus et suleis atque palude si lui. Notus erat sibimet Rcx , domus alquc locus. Intùa opima ilojnui , hioc indè icctirscrat arrais ; Il engagea ce prince à se soumettre à l'empereur , et forte rtpletus erat milite scu yario. lui fît envisager tous les périls auxquels l'exposerait un Hac loca prsccipuè Murmanut amabat , Uli ecrta quics et locus aptus erat. refus : Consulc heu 1 palriic , populo , rojo, consulc cuncto , Mais avant de parler de Murman on Morvan, qui a Consulo seu proli , conjugii que toro. donné son nom au château , je dois faire connaître le L'orateur finissait son discours en rappelant an prinre premier prince qui l'habita. 11 s'appelait le roi Elhorn , breton les malheurs de Turnus , d'Achille , d'Ul3'sse et et vivait en 3i2 , du tems du grand roi Bristokus , mo­ d'Enée; mais le roi Morvan, qui n'avait lu ni son Homère, narque d'Aginense, auquel, dit la Légende , il payait le ni son Virgile , répondit sans tant de rhétorique , à tribut. l'envoyé du prince : « Retournez à votre maître et lui Le grand roi Bristokus , pour appaiser un énorme >» dites que je ne fais point valoir ses domaines ; que je dragon qui ravageait ses états , loi faisait donner , tous » n'ambitionne pas ses états ; qu'il règne en pais sur les samedis, un enfant à la mamelle, que le sort désignait. » la France; mais aussi queMorvan règne sur les Bretons; Le sort tomba sur le fils unique du roi Elhoni, qui. dans » qu'il ne paiera point de tribut , et que si les Français son désespoir , se précipita des guérites de son château » l'attaquent , il saura se défendre. » dans la rivière de Dourdoun (3), qui baignait alors les murs de la place, et cette rivière, perdant son ancien * Pcrgc, 1110 Régi cclcrnna li.rc verba rennrra : Kcc sua rura enlo , ner sua jura volo. nom , prit pour toujours celui d'Elhorne : 11le babcat Krancos , britlonica regimina Murman Elliorn Elliornis nomina fecit aquis ('^}. Rite tenet , censura «ive tributa vetat, Bella eient F ranci , eonfestim bella ciebo ; Ncvc adeo imbcllis dextra noslra mane'. (t) A 3/4 de lieue de Landcrnau , sur la grande route de Alorlaix. Ce château s'anpclle dans le pava liuc'h-Morvan , Jîoc'h-Murisi, Rue h- — n an-herun; ot dans les annales bretonnes, lîocha Mmvani JiocliC- x (1) Le grand-père de Morvan avait été , de sou teins , un preux de Alitrvnn , Ht plus communément la /locht:-Alorice. grand renom ; (2) Ernoldus Nigellus , ou , comme le nomme Lcibuii, Ernold le O Rcx atquc derm Britonnm genlis pîmnr , Noirci , bénédictin d'Aquitaine , écrivait en Siti. Dexlera 011111 s avi nomon ad a-lhra refert. * (3) Pitur-doun , rivière prol'uiide. (u) Domuit et Britones ad occideiitem in c\tre:n.i qnà.îani parle (4) Disait le vieux livre Manuscrit conservé jadis dans les archives super littui Oceani résidentes. Eginliaiil, ad ann. -Su. de Plounocutcr. ' ( 348 ) ( 349 ) Sur cette réponse , Withcar, retourne h la cour et rend vigoureux. Ce nouvel Hercule était né au château de la compte de sa mission a Louis. Ce prince rassemble aussitôt Roche. Guillaume l'Armoricain, Philipp., Vlv. 3 : une armée , ^'avance vers la Basse-Bretagne et vient Qji''r'paganello3 referam , geminosque Leone. ' ' camper sur les limites de la forût de Breziac. Morvan 'a Ro!"^ena, ''ratres Herveyum cum Guidomarcho , 1 ..orum presidio generosa Leonia pollet ? uittc son château , sa femme et ses enfans ; mais avant 1 Aie nuper corani nobis durissima pugno 3e partir, en bon Breton , Tempora fregit equi , mortemque subire coé'git , Potùs pragrandia vasa Ichonoimimque (1) sui patri, nihil ominùs ietu Ferre jubet solito , suscipit atquc bibit. Solius pugni, prœgrandi corpore monstrum , Coràm pâtre suo , morti succumbere fecit. L'armée française était bien supérieure à celle des Bretons. Morvan ne dut pas l'attaquer en plaine , où la Le même auteur , livre 8 : iartie n'eût pas été égale. Il se tint caché dans les forêts Conanusque brevis , qui nunc dominatur Ïes plus épaisses , et n'en sortait que pour surprendre Belligero firitoni, quem terra Leonica nutrit, l'ennemi dans les défilés ouïes détachemens qui battaient Quain pater antè suu. Guidomarchu. , amico la campagne. Cette petite guerre lui réussit quelque tems, Faedere conjunctus Francis , regigni Philippo (2) : mais il fut enfin surpris par un Français nommé Coste, Corpore qui tam fortis eral , quòd fregerit uno qui le tua d'un coup de lance et lui trancha la tête. Prêt Tempii, equi pugno, soloque peremerit ictu à la porter à l'Empereur , Coste fut lui-même mis à l'neposituru ipse suum pi sgranili corpore monstrum , mort par un couver de Morvan. D'autres Français s'em­ Cui pugno duri perfregit vertici, ossa (3). En 1241 , mourut au château de la Roche , l'intrépide parèrent de la dépouille et la présentèrent a Louis. La Hervé-de-Léon , qui , dans son tems , fit la guerre au mort de leur souverain consterna les Breton', qui se sou­ duc Jean Leroux et brûla Quimperlé. mirent et donnèrent des otages. En i35g, Hervé-de-Léon , autre guerrier fameux dans Depuis cette époque jusqu'à l'année ii3o, l'histoire nos annales , écrivait de la Roche Morice des lettres ne dit rien du château de la Roche. affectueuses à son cher et très-cher oncle Guillaume-du- En ii3O, il était habité par Hervé-dc-Léon , preux Chastellier, qu'il priait bien de saluer sa belle tante (4). chevalier ; mais pas des plus polis : car le roi Henri I." La Roche était, à cette époque , un séjour agréanle. l'ayant invité plusieurs fois ;\ le Yenir voir en Angleterre , Les comtes y donnaient des fêtes brillantes, dont on Hervé ne voulut jamais se déranger (i). trouvait la description dans des lettres de 1336 (5) ; En ii77, Henri II, ayant dompté le fongueux Guyo­ mais ces lettres n'existent plus. Nous savons seulement march, comte de Léon , Jarnogon livra le château de la nu'Erard—de-Léon vivait en petit souverain dans son Roche au monarque Anglais , qui y mit garnison. Ce château de la Roche, en i36o; qu'il y avait sa garde , ses Guyomarch est un des plus médians princes qu'on ait âges , son connétable Voici du reste quelles étaient à connus (2). Non content d'avoir chassé l'évêque Hamon , E1 Roche les prérogatives des comtes ou vicomtes de son frère, delà Cathédrale de Léon, il le poursuivit h Léon : toute outrance et le lit massacrer dans les montagnes de 1 « Est-il que de tout temps la seigneurie de Léon a Commanna , où le saint évoque avait espéré trouver uni asile. Guyomarch mourut en 1179, laissant un fils du » esté emparée d'un très-bon fort et grand chasteau fort même nom, homme d'une force prodigieuse, puisque, (r) Barthius corrige ce mot par celui iYIckneumonem et croit que d'un seul coup de poing, il assommait le cheval le plus c'était une espèce de serpent , a grosse tête, avec la queue retroussé. . (•2) Philippe-Auguste. (3) On voit que le poète , en ces deux endroits , ne parle que île (1) Tant* nobilitali, oral, tantii,,,„. si.pcreilii , ut numiuàm Hrnrico Guyomarch , et les historiens bretons ont attribué cette force prodi­ polenti aniKiiim inrfulscntm Amrliam venir*. G.iill. Maliiiesbur liv. 1. gieuse a Conan-lc-Court, son fils. V. Barthius, pag. 165. (aj Ree JJcmu iiincbat, née lioiuinuai verebalur. Robert, de Mon*. (4) Ainicc de Léon.

(5J Dit uu aveu ilu premier février 169G. ( 35o ) ( 35, ) » et puissant de deffense autant et plus que chasteau de 33 endroit joignant le port de Kerhucn , ledit Seigneur. » Bretagne , nommé )a Roche-Morice, qui, grandement* 33 prend les droits de ports et havres et antres droits. » ( t ) *> a servy et peut servir quand le cas en advv^udra à la En 13^6, Guillaume Riou prenait le titre de connétable » tuition çt garde des biens subjets de tout le p'f^ de la Rochc-Moricc. 0T » Auquel chasteau y a eu de tout temps c&"**-îne, En 1391 , Alain , vicomte de Rohan , possesseur de » lieutenant et garde cotidienuement, laquelle câ/itai- ce château ^2) , y établit pour lieutenans et gardes » nerie vaùlt communs ans audit capitaine de trois i Goello Hervé et Guehomar Manfuric, pendant son voyage » quatre cens livres , et mesme n'est le guet en icelle avec le roi. » seigneurie levé qu'en la dixième partie d'icelle Sei- En 1421 , le duc Jean V permit à ce vicomte de per­ » gneurie. cevoir des droits sur les vaisseaux entrant à Landernau , » Auxquels chasteau et capitaine lorsque la mer ou pour en employer le produit à la réparation de son » costé de vers la terre dudit vicomte est prins aucuns châtel de la Roche , qui est sur port de mer et en 3» Morhotz (i) , les preneurs sont subjets sous peine de danger (3). » grosses amendes les apporter et offrir audit capitaine Le 22 novembre 1472 , le «lue François II institua •» qui les pourra prendre et retenir à juste prix pour Louis-de-Rosuivinen, capitaine de la Roche, en l'absence y> ledit vicomte. Et est tout ce vray et notoire au païs du vicomte de Rohan. » et en la partie (2). Ce seigneur ayant disparu subitement de son château, » Auquel chasteau le vicomte a droit de créer et mettre pour passer à la cour de Louis XI , le duc avait pris de » gouverneurs , capitaines -, lieutenans , concierges et là occasion de disposer de la place , de la faire réparer et » portiers avec le devoir de garde et guest tant sur ses d'y nommer un commandant, « destituant dudit office •» hommes en proche qu'arrière-fief qui se levé par les » tous autres qui par avant ces heures y auraient esté » gouverneurs et capitaines establys audit chasteau à d » instituez par le dit vicomte ou ses curateurs. » » raison de 6.' 3. monnoye pour ebacun an sur chacun e » feu , estage et mesnage des dits hommes. Louis-dc-Rosnivinen étant mort en 14?9 » ' duc » Aussi a droit ledit seigneur d'avoir grandes pesebe- donna la garde du château à Guillaume , fds puîné de » ries , tant au dessus du pont de Landernau entre les Louis , « se confiant à plain sur la loyauté et diligence 33 » terres qui relèvent de luy qu'au dessous dudit pout, de ce bien aymé et féal escuyer. » Rosnivinen eut ordre 3» tant de Saulnions, chevrettes , que tous autres poissons de se renfermer dans la place avec six hommes, qui » mesme royaux en la rivière d'Ëlhorne , tant du costé devaient y résider en habit de guerre et à cent sous par » de , Loperchet et Plougnstel en Cornouaille mois chacun. » que de celuy de Léon , que mesme en toutes autres Mais quand on voulut entier dans la place, on en trouva 3> rivières et costés de mer de la dite principauté. Les- les portes bien fermées. Alain-de-Rosnivinen , seigneur » quels pescheurs sont obligés d'apporter audit seigneur, de Kcranc'hoat, prétendant, comme aîné noble, qu'il » ou dans son absence à son capitaine de la Rochc- devait succéder à son père dans le gouvernement de la 3> Morice , les dits poissons royaux en leur payant un Roche , de préférence à Guillaume , son frère cadet , 31 modique prix ; avec la propriété des rivières qui s'était emparé des clefs du château , qu'il ne voulait plus 3» coulent dans l'cstcndue de ladite principauté des isles rendre, malgré l'ordonnance du duc. Il fallut, pour l'y » et islots qui s'y sont formés et par exprès dans la rivière contraindre , avoir recours aux voies judiciaires , et le 3> de Landerneau jusques à la croix qu'on nomme vul- » gairement la croix des Couslumes : jusques auquel (1) Ancien aveu delà principauté de Léon. (1) Du chef de sa mère, Joanne-de-Léon , à laquelle il succéda dans la vicomte de Léon, le iy septembre 1.372. J (1) Morhot approche assez de Morhouc'h, qui est le DOIII breton ilu C3) On dit que celte forteresse est sur port de mer , encore bien marsouin ; mais le marsouin n'est pas un mets friand. que rElhorne ne soit pas navig.iblr en cet endroit , parce qu'on a toujours considéré le château de la Roche comme citadelle et dépeu^ 00 V. D. Morice, hist., loin, a., à la lio , pa3. CLXXIIJ. danee de Landcruatt , qui e.t sur port de mer. ( 35* ) ( 353 ) i6 février 1479 • Alain fut condamné , à la barre de à la Roche d'anciens débris de tours, qui firent l'admi­ Lesneven , à bailler les clefs du chasteàu et les biens y ration de l'ingénieur Deslandes. Ce savant antiquaire crut estans à son frère Guillaume , qui fut mis en possession voir dans les souterrains du château un monument des par Yves-de-Keraudy, receveur du lieu. Celtes. Ces souterrains, qui passaient sous la rivière d'El- Pendant la guerre des Bretons contre Charles VIII, horne, ont été bouchés pour éviter les accidens qu'une des rebelles se rendirent maîtres de la Roche , dont ils imprudente curiosité pouvait occasionner. furent bientôt chassés par les gens du roi, à l'aide du MIORCEC DE KERDANET. sire de Léon ; mais ces derniers ayant d'autres places à garder, dénioJirenJLie-château, dont il ne restait plus JY. B. Cet article doit servir de supplément à ce que qu'une tour en. état de défense. Les vassaux de la prin­ j'ai dit de la Roche , pag. 28 et 2g du petit Voyage au. cipauté, sous prétexte de cette démolition , ne voulaient château de Joyeuse-Garde. A Brest, de l'imprimerie de plus faire le guet. Le vicomte en porta ses plaintes au Michel. (Voyez le dernier n.° du Lycée, page 26t.) v,-Roi, qui, « sur le bon motif que la démolition n'avait esté » faite que pour son service, manda à ses officiers de » Lesneven de faire jouir ledit seigneur du droit de » guet paisiblement et sans trouble, lesquels officiers » firent lire et publier ces lettres aux plaids de leur juris- ANTIQUITÉS. » diction le i 2 octobre 1492. » En 1577, Troïlus-du-Mezgotiè'z s'instituait marquis de la Roche et baron de Joyeuse-Garde ( 1). C'est ce brillant et généreux chevalier qui consola Catherine-de- La Société Académique de la Loire-Inférieure vient Médicis dans le tems où cette princesse , en proie à ses de recevoir, de la part de M. François Rêver, l'un de douleurs , faisait graver sur les colonnes de l'hôtel de ses correspondans, des modèles en plâtre d'un autel Soissons, les emblèmes de son veuvage, des couronnes, taurobolique qui existait, il y a quelques années , sur des trophées , des C et des H entrelacés (2) , des miroirs le Mont-Dol, et dont l'abbé Déric a fait mention dans brisés , des lacs d'amour déchirés. l'Histoire Ecclésiastique de Bretagne , d'après les notes Il parait que Troïlus avait eu un grand procès à. sou­ que lui avait communiquées M. Rêver lui-même. Ces tenir contre le vicomte deRohan, pour les deux titres qu'il modèles , d'un monument qui n'existe plus et qui est portait ; car le registre manuscrit de Blain parle d'un presque entièrement oublié des savans, sont d'autant sac de procédures , mémoires, consultes , lettres , traités dus intéressans, que M. Nadaud, dans la dernière et règlemens échangés entre le marquis de la Roche et Iivraison du Lycée, n'a donné que des renseignemens Mgr.de Rohan , ès-annés i5yi , 1576011578. insuffisans sur ce temple, et que la désignation de Tels sont les documens que j'ai puisés dans l'histoire et pierre trouée qu'il donne à la pierre supérieure du dans quelques vieux titres sur la Roche-Morice , dont le Taarobol, n'en peut donner l'idée. donjon en ruines, et livré au silence , lutte encore avec Ces objets sont accompagnés de quelques autres figures obstination contre la loi du destin. En 1719, il existait en plâtre , représentant des antiquités trouvées par le même savant dans les ruines de Corseul. M. Rêver annonce en même-tems à M. Ri cher, par » unh.rn? , ''? ^ îc"-Roi ',e Terre-îWe. « Citait Py l'entremise duquel il a communiqué ces différens objets <ï,t Z T" ,' q"C '? PlM' «'««l. homme, de Testât ont » «lit que la charge de maréchal de France ou de cou ver.icur de à la Société Académique, qu'il s'occupe de recherches

m0im re Ùe l ŒuL^J" ' , Cdlcs S"'11 Ponvai^esp^, de la sur Duguesclin. Déjà, il a reçu, en fac simile, la copie de l'épitaphe que la ville du Puy conserve du héros » prisonnier en i5ij9. (Entrct.de Furie.) « Les C désignent Catherine; et, les H, Henri II, son époux. Breton. I] va la faire lilhographier, ainsi que celle qu'on voit à Dinan. Ç).° Hervé de Keranraës archer , on lui enjoint 26. °. Jehan Kcrmaydic, vougier. de fournir un homme de/plus. ; 27. ° Jehan Menscoual , idem. 10. ° Yvon de Kerangars , absent, est représenté 28. ° Hamon Bohic, idem. 0 par Jehan Champion , archer. - ••• 29. Paul Kerpescat , archer. 3o.° Nicolas Prigent, vougier. 11. ° Alain de Kerusunan, se présente sans armure 5i.° Morice Gazern , idem. et est semonce. 5a.° Yvon Ca m pi r , idem. 12. ° Jehan de Kerlozrec, archer en Brigandine. 55.° Vincent Kerdignan, se présente sans armure i5.° Guyon de rCergadiou, archer. et est semonce. i4-° Jehan de Keranflech , se présente sans armes 34Jehan Touronce , archer. et est semonce. '-' 55. ° François Talleuc , vougier. J5.° Olivier Duval , archer eu Jorigandine, on 56. ° Jehan Labbé, se présente sans armure et lui enjoint d'avoir un page. est semonce. J6.° Guillaume Tanguy, archer, 57. ! 17. ° Yvon Tanguy , vougicr. " Guyomaich Goëzern , vougier. 18. " Robert Tanguy, absent. 58. ° Jehan Aulrct , sans armes, il est semonce. 5g 0 Éveil Kerangars, est dans le même cas. jg.° Franc >is Kermeleuc , vougier. 20. ° Jcban de Kerdellès,se présente sans armes, 40. ° Brianl le Marhec , vougier. est semonce. 41. ° Hervé Kerbriec , idem. 21. ° Tanguy de la Tour,1 sur mer avec l'amiral 4?..° Jehan Pallicrn , idem. 45." Porsmoguer ; il est représenté à la montre Guillaume Gozcrn , se présente sans armes par Jehan Bleiz, archer, auquel on enjoint et est semonce. d'amener un page. 44.° Aufroy le Veyer, archer en brigandine. 22. " Tanguy Pcnmenhir , vougier. Après quelques jours de repos a Brest, j'en 90, cwt«« 25.° Jehan Bohic , archer, on lui enjoint d'avoir repartis pour aller explorer à une lieue par delà «= Landerneau, le vieux château de la Roche Morice R"c1"' Mor;° un page. (en breton Roc'h Morvan). Cette antique for­ 24." Jehan Kermorganl , vougier. teresse, dont les ruines s'élèvent encore sur la 2 5.° Olivier Guerouk, sans armes, il est semonce. crête d'un roc escarpé, n'était pas comme le

ai dit l'auteur de l'Itinéraire du département du huit pieds d'épaisseur. Du côté du Sud est une Finistère, un repaire de voleurs et de brigands, grosse tour carrée dans laquelle se remarque les elle était le séjour des Rois. C'est dans son enceinte restes d'une salle avec sa cheminée. On voit encore actuellement déserte et silencieuse que les princes dans les angles de cette salle la partie inférieure de Bretagne rassemblaient leur cour belliqueuse de la retombée des voûtes qui soutenaient la et brillante; Morvan , Roi de Léon et Cornouailles plate-forme. mort en 819 , en fut le fondateur et lui a laissé son nom. Sa position inaccessible, sa grandeur, L'escalier par lequel on y montait est pratiqué l'épaisseur de ses murailles , 1 eleva lion de ses dans l'épaisseur du mur. Ce même escalier se tours la rendirent une place importante. Elle prolongeant inféricurement, descendait clans un demeura le chef-lieu et le siège de haute justice souterrain creusé dans le roc vif et que l'on a de la vicomte de Léon jusqu'à la réunion de la comblé il y a une vingtaine d'années. Bretagne à la France. A l'angle opposé à cette tour, on en voit une Rien n'offre un aspect plus romantique que autre de'forme triangulaire et qui est comme les ruines de ce vieux château; le rocher sur suspendue sur la partie la plus à pic du rocher. lequel il est bâti domine une vallée dans laquelle Une troisième tour de figure carrée présente serpente la rivière d'Elorn ; les escarpemens , les ses débris sur un monticule attenant au rocher, pointes de ce rocher, les tours ruinées et cou­ elle parait avoir fait partie de l'enceinte extérieure vertes de lierre qui le couronnent, ont une dont on voit des restes bien marqués du côte âpreté sauvage qui contraste fortement avec le qui donne sur le village de la Roche ; on y riant aspect du paysage environnant. remarque les bases de deux énormes tours rondes Il est assez difficile , d'après ce qui en reste , qui défendaient le portail. de juger quel a été l'ensemble du plan de la La légende de Saint Riok nous apprend une Roche Morice; des pans de murs h demi-écroulés, anecdote fort singulière, dans laquelle le château des massifs de maçonnerie qui se voient 'ça et là de la Roche Morice joue un rôle , cl qui prou­ sur le flanc du rocher du côté de l'Est, semblent verait que celte ciladelle existait bien avant le indiquer qu'il y avait une enceinte extérieure, Roi Morvan ou du moins qu'il en.existait une et que toute la bâtisse placée au sommet n'était très-ancienne sur l'emplacement même où ce que le donjon ou réduit principal du château. prince bâtit ensuite le château dont nous voyons Ce donjon consiste en une enceinte de figure aujourd'hui les ruines : voici cette anccdole, à peu près triangulaire et dont le mur, formé dans laquelle se trouvent mêlées des traditions de larges quartiers de granit et de schiste, a historiques de la plus haute antiquité. Deux célèbres guerriers de la Grande Bretagne, Derrien et Névenlcr étaient chrétiens, ils rirent Kéven 1er et Derrien, et qui vivaient au com­ tous leurs efforts pour consoler et encourager le mencement du quatrième siècle , revenant d'un malheureux Elorn , ils lui promirent que s'il pèlerinage en Orient passaient sur le territoire voulait renoncer au paganisme et embrasser la arrose parla rivière de Dour-Doun* ( eau pro­ vraie religion ils le délivreraient du Dragon. Le fonde ) , laquelle sépare le Léonnais de la vieux seigneur refusa cette proposition , disant Cornouailles armorique ; en . approchant d'une u'il n'abandonnerait jamais la foi ni le culte forteresse qui dominait cette rivière (le château 3e ses pères. Néventer et Derrien le voyant si de la Roche Morice ) , les deux guerriers virent ferme dans cette résolution se bornèrent à lui le seigneur de ce château , nommé Elorn , qui demander la permission d'ériger dans ses domaines se précipitait du sommet d'une de ses tours dans une église où les chrétiens nouvellement convertis la rivière qui coulait aux pieds , ils se hâtèrent pussent se rassembler pour faire leurs oraisons j de le secourir , le retirèrent de l'eau déjà sans Elorn accepta celte condition, et même permit que connaissance et le firent transporter au château. son fils Riok fut élevé dans la religion chrétienne. Ce seigneur ayant été rappelé à la vie leur ex­ pliqua la cause de son désespoir. « Un dragon Les deux guerriers se rendirent donc à la » eilVoyabie , leur dit-il , dévaste la contrée caverne du Dragon qui sortit en poussant des n environnante , dévorant indistinctement les sifïlemens effroyables. 11 était , dit la légende , » hommes et les bestiaux ; pour modérer ses >» long de cinq toises, et gros par le corps » ravages, Bristokus, Roi de Brest, dont je » comme un cheval , sa teste faite comme un » suis le sujet, a fait un accord avec le monstre v coq, retirant fort au Basilic , tout couvert de » moyennant lequel il consent à se tenir en » dures écailles , la gueule si grande que d'un » repos h condition qu'on lui livrera un homme » seul morceau il avalait une brebis. » Derrien » tous les samedis. Le sort désigne la victime ou dont le cheval se cabra a la vue du monstre , » du moins celui qui doit en fournir une , or sauta à terre, l'attaqua, le blessa mortellement, » ce sort est si souvent tombé sur moi que j'ai et l'ayant lié avec son écliarpe le donna h conduire » livré au dragon tous mes domestiques et au jeune Riok qui le mena au château de son » vassaux l'un après l'autre, il ne me reste plus père. De là les deux guerriers se rendirent à » que ma femme et ce jeune enfant âgé de deux Brest , où ils présentèrent le monstre vaincu au » ans , sur lequel le sort étant tombé j'ai préféré Roi Bristok* puis ils s'en furent à Tollcntc où » mettre moi-même un terme à mon existence * N'est-il pas infiniment plus vraisemblable de faire venir » plutôt que de sacrifier celle de mon fils.» le nom de la ville de lîrest eu lïiist de celui du chef Iirislok, prince ('elle qui en était seigneur, que de torturer l'histoire * I! està remarquer que la rivière In Bordogne, au pays et le lanp;a»e pour ie faire venir des mois latip.s Drivâtes

• US ( 266 ) . ( =67 ) ils s'embarquèrent pour retourner dans leur patrie Landerneau, dans la chapelle de Beuzit, un 9»- Tomb«»n après avoir commandé au Dragon de se précipiter très-beau tombeau en Kersanlon , décoré dans d'01iv'" dans la mer , ce qu'il fit , dit la légende, au lieu son contour d'arcades gothiques remplies decus- delaPllae' appelé Poullbeuzanneval , et par contraction sons armoriés. Sur le dessus est la statue couchée Poulbeunzual ( marais où fut noyé la bête) , eu et soigneusement exécutée d'un chevalier revêtu la paroisse de Plounéourtrez. de l'armure du seizième siècle. Ce chevalier n'est point du tout un Montmorency, comme l'ont En mémoire de cette aventure la rivière de cru certaines personnes , mais bien Olivier de la Dour-Doûn prit le nom d'Elorn qu'elle porte Pallue , père de Françoise de la Pallue, héritière encore aujourd'hui. unique de cette terre et de celle de Tréziguidy. Cette dame épousa Troïlus de Monldragon, Sx. ianderneaa. La petite ville de Landerneau , distante d'une seigneur de Hallot, et de ce mariage naquit une lieue du château de la Roche Morice , renferme fille nommée Jeanne de Montdragon , laquelle encore aujourd'hui beaucoup de maisons fort épousa François de Montmorency - Bouteville , anciennes ; une des plus remarquables est celle bisaïeul du maréchal de Luxembourg. de la sénéchaussée bâtie sur le pont qui traverse l'Elorn. Au-dessus de sa porte est une grande La statue d'Olivier de la Pallue est représentée pierre de Kersanlon sur laquelle est scurplée les mains jointes et les pieds posés sur un lion. avec soin , en caractères gothiques carrés, l'ins­ Une cotte de maille paraît au-dessous de ses cription suivante. tassetles et recouvre le haut de ses cuissarts, son épée nue est posée à côté de lui. L'an I5I8 puissant Jacques vicomte de Rolian, comte de Porhoè't , seigneur de Léon , de la En quittant Beuzit, je traversai la forêt de Garnache,' de Beauvoir sur mer et de Blain , Landerneau (Lcmd-Tcrnock, pays deTernock); jîst faire ces ponts et maison au-dessus de celte forêt est souvent indiquée dans les chro­ rivière. .. . par Jean le Guiriec seneschal de niques de la table ronde. A sa sortie, je trouvai

cette ville. les ruines du célèbre château de la Joyeuse- 93. chiie»u Garde, non moins fameux dans les mêmes ebro- de u En revenant a Brest je voulus suivre les bords niques. C'est en ce lieu qu'habitaient Lancclot 3oitaso-G"i'- de la rivière d'Elorn qui se jette au fond de du Lac et la blonde et charmante Yscull, et ce la rade , et sur lesquels j'avais à observer plusieurs château encore existant quoiqu'en ruines est un monumens très-intéressans. D'abord je vis le monument de plus pour prouver que les romans manoir de la Pallue , édifice du quinzième appelés de la t;ible ronde et composés dans la siècle et par conséquent de construction gothique. Bretagne armorique par des bardes armoricains, Ensuite à un quart de Ueue au - dessous de ne sont que d'anciennes histoires qui célèbrent l'enètres cariées très-basses qui la flanquaient, à l'époque Jusqu'à présent ce vieux berceau, d'une des plus no­ où, par suite de la reconstruction presque totale de la bles familles qui aient honoré, la Bretagne et la France, a forteresse d'après les principes de l'ère rayonnante, le lutté avec avantage contre les intempéries des saisons ; donjon cessa d'être isolé et fut engagé dans l'enceinte. mais ce n'est pas sans avoir reçu de profondes blessures. Des escaliers ménages dans l'épaisseur des murailles et Déjà l'angle Sud-Ouest s'est écroulé, et il n'est que trop aujourd'hui impraticables, permettaient de monter aux probable que, dans un avenir peu éloigné, toute cette étapes supérieurs. masse imposante cédera enfin aux vents de mer qui la Les trois premiers sont très-parcimonieusement éclairés battent sans cesse. Il est fort à désirer que quelqu'un des par de petites ouvertures en forme de meurtrière sans archéologues du pays dessine ce curieux donjon dans tous aucune espèce de caractère architectonique; mais le qua­ ses détails avant que celle triste prévision ne vienne â trième est beaucoup moins obscur : sept fenêtres de se réaliser. C. K. moyenne dimension, à linteaux carrés, subtrilobés, sem­ blent avoir éclairé une salle d'honneur, mais elles ont cer­ e tainement été remaniées au xiv siècle. Enfin, deux ou­ II. LE CHATEAU DE LA ROCUE-MAUIUCE ET SES vertures carrées, assez semblables à des créneaux, sont LÉGEXDES. — A une lieue au-dessus de la ville de Lan­ percées dans l'étage en retrait ou chùtclct, et avaient derneau, la rivière d'Elorn coule entre deux chaînes de sans doute pour objcl de permettre aux soldats qui y fai­ montagnes parallèles, au milieu d'une vallée assez large, saient le guet de découvrir la campagne dans toutes les dont le fond est occupé par de. vertes prairies sur directions. lesquelles se dessine comme un long ruban la grande Quant à l'intérieur du donjon , il n'existe pas le route de Rennes à Brest. Des cimes qui bordent la rive moindre détail d'ornementation qui puisse faire présu­ gauche se détache un rameau assez court, mais Irès- mer l'époque de sa construction. De larges niches, ou élevé, qui s'avance dans la vallée comme une sorte de alcôves à voûtes plates, sont disposées deux par deux sur promontoire dont l'extrémité se relève brusquement et chacune des quatre faces du quatrième étage, que j'ai prend la forme d'un mamelon abrupte et granitique supposé avoir été la salle d'honneur. La même disposi­ qui domine le cours de la rivière de la manière la tion, d'ailleurs très-ordinaire dans les monuments de ce plus pittoresque. Si l'on a l'heureuse chance de découvrir genre, se reproduit au cinquième; mais les arcs sont en ce site pour la première fois au moment où le soleil dis­ ogive, ce qui, joint aux traces de reprises que l'on peut paraît derrière les chênes qui l'encadrent, on voit les constater dans l'appareil, ne permet pas de douter que ruines informes qui le couronnent prendre un aspect cette parlift r«#tit été remaniée ;i une époque relativement étrange en présence duquel l'ame la plus prosaïque se sent moderne. entraînée malgré elle dans les régions du merveilleux. L'i­ Si donc l'absence de caractères architeeloniques bien magination fait revivre la lignée de ces fiers comtes de tranchés dans les détails des parties que l'on peut rap­ Léon, qui furent les défenseurs les plus héroïques et les porter à la construction primitive rend bien difficile la plus constants de la nationalité bretonne aux ixe et fixation exacte de la date de ce monument unique en Bre­ xie siècles. Alberl-le-Grand, le naïf et crédule conteur de tagne , la forme générale et l'existence bien constatée nos traditions populaires, n'a pas oublié la Roche-Maurice. d'une galerie supportée par des hourds ne permettent On peut voir dans sa Vie de Saint-Rioc comment, du temps pas de la placer postérieurement à la première moitié du de l'impératrice Hélène, mère du pieux empereur Cons- XHI° siècle. tantin-le-Grand, deux valeureux chevaliers de la Grande- Bretagne, appelés Derricnet Nevenlcr, revenant d'un voyage « luy mit son écharpe au col, et le bailla a conduire a en Terre-Sainte, se trouvèrent à passer près de notre châ­ « l'enfant Riok, lequel le mena au chasleau de son père, teau au moment où son mythologique seigneur, le prince « qui, voyant ceste merveille, remercia les chevaliers et payen Elorn, se précipitait du haut de ses murailles dans « les alla conduire a Brest, ou ils amenèrent le dragon au la rivière, qui, selon le bon Dominicain, doit son nom à « grand étonnement du roy Bristok. De Brest ils allèrent cet événement. Après l'avoir repêché, les preux s'étant en- « à Tolente, lors riche ville, voir le prince Jugonus pere quis du motif qui avait pu le porter à une telle extré­ « de Jubault ou Juballus (que Conan Mériadec défît de- mité, le prince leur raconte comme quoi il y avait « puis) et de là s'allèrent embarquer au havre de Poul- dans le voisinage un monstre qu'on ne pouvait empêcher « beunzual ou leurs navires estoient a l'ancre, cl, ou ils de ravager le pays qu'en le rassasiant de victimes hu­ » commandèrent au Dragon de se précipiter dans la mer. » maines, ce qui avait décidé le roi Bristokus, qui régnait Le parfum exquis de romantisme qu'exhale cette vieille alors à Brest, à ordonner par un édit que chaque samedi légende, extraite sans doute des livres de chevalerie, peut on tirât au sort celui de ses sujets qui devrait lui être servir à éveiller la muse des poètes qui visitent les ruines livré. « Or, ajoute tristement Ic'pauvre Elorn, ce soit est de la forteresse des comtes et des vicomtes de Léon. Ils « si souvent tombé sur moy que j'y ay envoyé tout mon pourront aussi lire avec fruit les nombreuses notes et « monde et ne m'est plus testé que ma femme et ce petit commentaires dont l'a enrichie le dernier éditeur d'Al- « enfant (Rioc) qu'elle tient entre ses bras, âgé seulement bcrt-lc-Granci. Mais l'histoire et l'archéologie proprement « de deux ans sur lequel le sort estant tombé, j'ayme mieux dite n'ont bien certainement rien à y voir. Je les laisserai « eslre suffoqué des eaux que de le livrer a une mort si donc étudier les minutieuses dissertations de cet écrivain « cruelle. » Les deux pieux chevaliers, après avoir inutile­ érudit, rechercher avec lui les royaumes microscopiques ment essayé d'obtenir du mécréant la promesse dé se faire d'Aginense, de Tolente et d'IJly, la situation du château baptiser, s'engagent par commisération à le délivrer du du prince Elorn et la véritable couleur du chapeau monstre, à condition qu'il leur donnerait un terrain pour bigarré qui tenait lieu de diadème au grand roi Bristokus, y hà'ir une église destinée au culte du vrai Dieu, ce qu'il et je rentrerai dans le domaine de la réalité. accepta avec empressement, en leur permettant de plus Le château de la Roche-Maurice a primitivement porté d'instruire dans la foi évangélique sot; fils Riok et tous le nom de Roc'h-Morvan (la Iloche-Morvan), selon l'o­ les membres de sa famille qui y consentiraient. Ils se ren­ pinion de M. de Blois (Biographie Bretonne, verbo LÉON), dirent donc incontinent « en la caverne du Dragon auquel appuyée sur un acte de l'an 12C3, inséré au loin. I des .<( ils firent commandement de la part de J.-C. de pa- Preuves de l'histoire de Bretagne de I). Morice, col. 989. « niisijrn; il sortit donc et son sifflement épouvanta tous C'est un accord par lequel IS'uz, fils de Son, s'engage â « les assistans; il esloil long de cincq toises, et gros par garder, au nom de Hervé IVL" du nom, vicomte de Léon et «. le corps connue un cheval, la leste faite comme un coq, seigneur de la Rdche-Morice, le château de Coetmeur, en « retirant for! au basiticq. tout couvert de dures écailles, la paroisse de Plougourverst, pendant la minorité de « la gueuie si grande que, d'un seul morceau, il avalait une l'héritier, vassal et peut-être parent dudit Hervé. Il y est « brebis, la vc'uc si pernicieuse que, de son seul regard, il stipulé que le vicomte ne pourra pas poursuivre ledit « tuait les hommes. A la vëuc du serpent, Dcrrien mit Nuz pour certains objets qui se trouvaient à la Roche- « pied a (erre, mais son cheval s'effraya si fort, qu'il se Morvun (in rupe Morvan) lors de la mort de son père

a* o Cette description convient admirablement à nombre de d'une manière plus explicite, on ne peut pas douter qu'il forteresses en terre dont on voit les restes en différentes ne s'agisse de la Rochc-Morice, car en 1394 on la trouve parties du territoire occupé par les Bretons dès les pre- ' encore mentionnée 'Sous ce même nom dans les mêmes e mières années, du ix siècle; je citerai particulièrement Preuves, ibid., col. 73. celles de Castennec et de Caslel-Finans dans le Morbihan, Cette étymologic une fois constatée, M. de Kerdanet mentionnées l'une et l'autre par Cayot-Délandre (articles n'a pas hésité à admettre que c'est en ce lieu que se passa Bicuzy et saint Aignan) ; mais il est impossible d'y recon­ en 81i la fameuse scène entre le moine Frank AYilchairc naître la Roche-Maurice ou la Roche Morvan. La consti­ er et le comte de Léon Morvan I , roi suprême des Bretons. tution géologique du terrain sur lequel est assis ce château Il fonde son assertion sur le passage tant de fois cilé du , ne permet pas, en effet, d'admettre qu'il ait jamais pu poëme d'Ermold-le-Noir, dans lequel est racontée l'expé­ être entouré par un repli de l'Elorn ni défendu par aucun dition que Louis-le-Débonnaire fit en Bretagne pour ré­ marais. On est donc obligé de renoncer à y placer l'en­ duire nos ancêtres, qui avaient poussé le cri de liberté trevue de Morvan et de Wilchairc, qui au reste a fort et secoué le joug que Charlemagne leur avait imposé. 1( bien pu avoir lieu partout ailleurs dans le pays des Bre­ y est dit que le moine envoyé par l'empereur pour amener tons. le prince breton à payer le tribut accoutume le trouva dans une forteresse décrite en ces termes : Tout ce que l'on peut légitimement induire de la syno­ nymie des noms de la Roche-Maurice et de la Roche- Morvan, c'est qu'il a dû ses commencements sinon à Mor­ « Est locus hinc sylvis, hinc flumine cinctus amœno, tT van I , du moins à Morvan II, comte de Léon, qui vivait « Sepibus et sulcis atque paîude situs. en 1070, et dont les descendants mâles le possédèrent jus­ « Intus opima domus, hinc inde recurserat amnis, qu'à Hervé VIIIe du nom, vicomte de Léon, qui mourut « Forte repletus erat milite seu vario. sans postérité en 13G3. Alain VIII" du nom, vicomte de « Hais loca prœcipue semper Murmanus amabat ; Rohan,qui avait épousé en 135-9 la soeur dudit Hervé, ap­ « Illi certa quies, et locus aptus erat (1). pelée Jeanne, recueillit sa succession, et la seigneurie de la Roche-Maurice fut possédée par les aînés de sa race jus­ M. de Kerdanet ayant lu à la fin du troisième vers ar- qu'au milieu du xvne siècle, que Marguerite, seule et mis au lieu de amnis, a traduit ce passage d'une manière unique héritière de Henri, premier duc de Rohan, la inexacte, et a cru qu'il pouvait s'appliquer à la position de porta dans la famille Chabot par son mariage avec Henri, ,la Roche-Maurice. Je crois que le véritable sens est celui- sieur de Sainle-Aulaye. ci : ll^st un lieu fortifié par des haies (sepibus), des fos­ Voilà ce que les légendaires et les historiens nous disent sés (sulcis) et un marécage qu'entourent d'un côté une de cette forteresse, et il serait à désirer que l'on pût aussi forêt, de l'autre un beau fleuve. A l'intérieur s'élève tine facilement reconstituer le plan de ses vieilles murailles. riche habitation que le fleuve, revenant sur lui-même, Malheureusement, leur étal de dégradation avancée ne enveloppe dans son repli; elle était remplie de soldats permet de le faire que d'une façon très-conjecturale. La de toutes armes. Morvan avait une prédilection particu­ partie principale du château proprement dit, dont il ne lière pour ce lieu, où il trouvait une demeure commode reste plus que quelques pans de murs, s'élevait, véritable et un asile assuré. nid d'aigle, sur le rocher qui occupe la pointe extrême de la langue de terre dont j'ai parlé en commençant. Sa (1) Je donne ce texte ct'aprt'3 M. A. de Courson, H'.ST. DES PEUPLES forme parait avoir été Irès-inégulière, à cause du soin FRETONS. i 18 e que l'architecte avait pris de suivre toutes les anfractuosi- mières années du xv siècle, et l'importance qu'elle acquit tés du granit, afin d'utiliser pour la défense tous les avan­ à cette époque doit être attribuée aux positions élevées tages de la position naturelle, qui est véritablement for­ que plusieurs de ses membres occupèrent sous nos der­ midable. Les ouvertures qui existent encore ne présentent niers ducs. Dès l'année 1421, Eon ou Yves de Kerouzéré aucun caractère appréciable, mais la grossièreté de l'ap­ était président ou juge universel de Bretagne, et Jean V pareil, nui se compose de moellons schisteux unis par un gratifia de 100 livres de rente son fils Jehan, qui avait le ciment de chaux, l'emploi presque constant des formes litre d'échanson, pour le récompenser du zèle avec lequel angulaires et l'absence de tours de moyen diamètre me il avait travaillé à sa délivrance, lorsque l'année précé­ porteraient à placer la construction de celle partie à une dente il était détenu à Chasleauceaux par les Pcnthièvre époque antérieure au temps de I'archileclure rayonnante. (D. Morice, Preuves, tome II, col. 1094). En 1402, un On voit encore à l'Est, et sur un plan moins élevé, un autre Eon ou Yves fut nommé chambellan parle duc Fran­ ouvrage extérieur dont l'appareil est beaucoup plus soigné çois II (ibid., tome III, col 20). Le nouvel éditeur du Dic­ et qui affecte tiès-sensiblement la forme des bastions de tionnaire d'Ogée (verbo SIBEP.IL) affirme, sans prendre la la fin du xv° siècle et du commencement du xvi°. De ce peine de citer ses autorités, que le seigneur de Kerouzéré coté, la roche étant coupée à pic et inabordable, on n'a obtint, en 1457, la permission de fortifier son manoir, ce pas eu besoin de rendre l'accès plus difficile à l'aide d'un qui du moins n'est pas contredit par le style architcctoniquc double rempart. Du coté opposé la pente du terrain étant des constructions qui subsistent encore. Ce qui est sûr, au contraire moins roide, on avait construit une seconde c'est que les registres de la chancellerie de Bretagne con­ enceinte, dont les traces sonl encore assez reconnaissables, tiennent l'analyse de deux mandements ducaux, relatifs à la et qui, partant de l'angle Nord-Ouest du rocher, allait se foriiljcation de Kerouzéré, l'un de 1459 cl l'autre de 1468. relier à l'angle Sud-Ouest, et enveloppait sa base d'une Celui de 1459 ainsi mentionné : « Permission à Jehan de espèce de demi cercle assez irrégulier, dans lequel il serait « Carouzcray de fortifier sa maison de Carouzcray » (Ch. peut-être possible de retrouver l'équivalent du bayle exté-" dos comptes de Nantes, Inventaire de Turnus Brutus, rieur des châteaux de plaine. f. 2SG). Soit qu'on n'ait pu profiter de suite de cette per­ Enfin, au Sud, un fossé, qui coupait transversalement mission, soit pour toute autre cause, le duc François II la l'isthme dans toute sa largeur, complétait le système de renouvela par lettres du 14 janvier 14G8 (N. S.), ou il défense, autant du moins qu'il est possible d'en juger donnait « Oclroy et licence au sire de Kerouzéré de faire d'après les vestiges informes que le temps et la main des « clorre douver et fossaicr sa maison de Kcrouzcré pour hommes ont laissé parvenir jusqu'à nous. « la seureté d'icelle, en (elle manière et dedans tel temps Je terminerai donc cette notice aussi incomplète que les « que bon luy semblera » (Rey. de la Chancellerie de Bre­ n ruines du monument à la description duquel elle est con­ tagne de 14GS, f. 7 v ). sacrée, en disant que le château de la Roche-Maurice, En 1590, lorsque les sires de Goulainc et du Faouet malgré l'intérêt appréciable qu'il peut offrir aux archéo­ vinrent l'assiéger à la tôle d'un corps de ligueurs, « C'é- logues, mérite surtout d'attirer l'attention des amateurs « tait, dit Ogée, une masse de pierre, flanquée de quatre de la belle et poétique nature animée par les légendes « grosses tours à créneaux et mâchicoulis. » Kcrandraon, r du temps passé. Ç. K. lieutenant do son propriétaire, le s de Boiséon de Coct- nizan, ayant été obligé de se rendre, le château l'ut dé­ III. — LE CUA.TE.VU DE KEIÎOTJZÈIVÊ. — La famille moli d'après les ordres du duc de Mcrcœur (D. Mori.ce, noble de Kcrouzcré ne date dans l'histoire que des pre­ Preuves, t. III, col 1513), et malgré les articles for TABLE DES MATIÈRES

I — DEUX LÉGENDES : Elorn et le Dragon. — Le Roi Morvan est-il le fondateur du château, au 9e siècle ? \ 9

II — Epreuves de jeunesse — La lutte contre Henri II Plantagenet, Roi d'Angleterre 13

III — Sous la longue lignée des Vicomtes de Léon. — La guerre de 100 ans

et la guerre de Succession de Bretagne 15

IV — La France contre le Duché — La Roche sous les Rohan 20

V — Décrépitude et mort 24

VI — Les ruines actuelles peuvent-elles encore révéler la date de construction et l'architecture d'ensemble de la forteresse ? 26

•0 •

UI Audren de Kerdrel — Excursion à la Roche-Maurice — (Association bretonne — 1880) — L'expédition de Louis Le Débonnaire contre la Bretagne en 818 — (Association bretonne — 1881). Urscheller — A travers la Bretagne — La Roche-Maurice — 1891. SOURCES DE LA DOCUMENTATION De la Borderie — Histoire de Bretagne — (1896 - 1914). Favé — Au retour d'une excursion — Bulletin de la Société Archéologique du Finistère — 1894. Delorme — La Roche-Maurice — Bulletin de la Société Académique de Brest OUVRAGES GENERAUX 1903-04. Viollei Le Duc — Dictionnaire raisonné de l'architecture française (1868). Coudurier — De Brest à la côte, vers 1905. Léon Gauthier — La Chevalerie. Kernéis — Le château de Roc'h Morvan d'après les Chroniques de Froissart — C. Enlart — Architecture militaire — 1904. Bulletin de la Société Académique de Brest — 1907-08. J.Levron — Le château-fort — 1963. Bulletin diocésain d'histoire et d'archéologie — 1907. p. 132 — Notice de Daou- las. Jourdan de la Passardière — Topologie des paroisses du Léon — Revue de OUVRAGES PARTICULIERS Bretagne — 1910-14. ErmolclLe Noir — Carmen de rébus gestis Ludovicii Pii (9° siècle). J. Salaun — Découverte de souterrains à la Roche-Maurice — La Dépêche Le Baud— Histoire de Bretagne — 1480. de Brest — 17, 21, 28 mars 1926. A. Le Grand — Vie des saints de la Bretagne Armoriquc — 1636. Le Guennec — Le château de la Roche-Maurice — Dépêche de Brest 17 jan­ vier 1927. D. O.M. Lobineau — Histoire de Bretagne et Preuves — 1717. Assssociation Bretonne — (Bulletin de 1'.) Congrès de Landerneau, 1932. D. O.M. Morice — Histoire de Bretagne et Preuves — 1750-56 — 1742-46. Boureau-Deslandes — Recueil de différents traités de physique et d'histoire F. Menez — Entre la Roche et Pont-Christ — Dépêche de Brest — 1933. naturelle — 1753. Ch. Léger — La forteresse de la Roche-Maurice — Dépêche de Brest 1er Ogèe — Dictionnaire historique et géographique de la Province de Bretagne — novembre 1934. 1778. Chanoine Calvez — Notre-Dame de Lesneven — 1946. Cambry — Voyage dans le Finistère — 1794. Sauban — La Roche — port de mer — Cahiers de l'Iroise n° 4 — 1955. De Kerdanet — Voyage au château de la Roche-Morice (Lycée armoricain — /. Sévellec — La véritable histoire du château de la Roche-Maurice — Cahiers 1823). de l'Iroise n° 2 — 1959. De Fréminville — Antiquités du Finistère — 1832-35 — Le guide du voyageur J. Bazin — Landerneau, ancienne capitale de la Principauté de Léon — 1962 dans le Finistère — 1844. (pp. 101 à 106). E. Souvestre — Le Finistère en 1836. De Courcy — Notice historique de la ville de Landerneau — 1842. Mélanges d'histoire et d'archéologie bretonnes — 1855. T. 1. Daniel — Histoire de Landerneau et du Léonais — 1874. Flaubert — Par les champs et par les grèves.

•a t ICONOGRAPHIE INTRODUCTION

(Documents rares mais de dates relativement récentes) On a beaucoup (1) écrit sur le château de la Roche-Maurice (2) et je pense que la matière en a été à peu près épuisée. Je n'ai donc pas la prétention d'ajou­ e Dessin du début du 18 siècle que fit exécuter Boureau-Deslandes. ter du nouveau aux très nombreuses études faites d'après les rares faits histo­ E. Souvestre — Le Finistère en 1836 p. 59 (I litho). riques qui le concernent. Taylor — Voyage pittoresque et romantique dans l'ancienne France — 1846 Mon dessein est surtout de les rassembler et de les présenter systématique­ (5 lithos). ment dans leur liaison avec l'histoire de France et de Bretagne. Bretagne Contemporaine — 1865 (1 litho). .*.

Posé comme un nid d'aigle à la cîme d'une roche pyramidale (3) vrai château de burgrave (4), il fût, en des temps très lointains, une imprenable et redoutable Abréviations employées pour les auteurs les plus fréquemment cités forteresse.

D L — D O M Lobineau — Histoire et Preuves. Ses ruines dominent de 70 mètres la jolie vallée de l'Elorn et attirent toujours DM — D O M Morice — Histoire et Preuves. les regards admiratifs du promeneur ; elles recèlent pour l'historien et l'archéo­ logue encore bien des mystères. K — De Kerdanet — Voyage au château de la Roche-Morice. D L B De la Borderie — Histoire de Bretagne.

(1) La nomenclature des sources le prouve surabondamment. (2) Anciennement La Roche-Morlce ; le nom breton : Castel Roc'h Morvan. (3) D.L.B., Histoire T. III, p. 89. (4) Flaubert « Par les champs et par les grèves ». t

I

DEUX LÉGENDES ELORN ET LE DRAGON

FONDATION DU CHATEAU PAR LE ROI MORVAN AU IX* SIÈCLE

Dans la vie de Saint Riok (5) Albert Le Grand (6), charmant et naif hagio- graphe de nos saints bretons nous rapporte, d'une plume aussi alerte que pitto­ resque, une légende dont la Roche-Maurice fut le théâtre. Elle est très connue. Je la résume cependant ici.

Deux cavaliers bretons, Néventer et Derrien, reviennent d'un pèlerinage en Terre Sainte. Passant le long du Dour Doun (7), ils sont les témoins d'un étrange et dramatique spectacle. Un homme se jette du haut d'une tour du château et tombe dans la rivière. Les deux pèlerins se précipitent au secours du malheureux qu'ils retirent de l'eau, sain et sauf. Ils apprennent alors qu'il s'agit d'Elorn, sei­ gneur de la forteresse qui a été poussé au suicide par une affreuse perspective. Un I < dragon féroce ravage la région. Il ne se nourrit que de chair humaine. En vue i d'apaiser la faim du monstre le roi du pays a décrété que chaque semaine on tirera au sort le nom de la victime destinée à la sinistre pâture. Le sort est déjà tombé bien des fois sur la famille d'Elorn et sur son entourage. Il ne lui reste plus que son épouse et son jeune fils Riok. Or voici justement que le sort vient de le désigner. Ne pouvant supporter un tel malheur il a voulu mettre fin à ses jours. Néventer et Denien lui promettent, s'il consent à devenir chrétien (car Elorn est païen), de le délivrer de la bête. Elorn refuse mats consent toutefois à fournir un gage. 11 donnera une terre où l'on bâtira une église et fera élever son épouse et son fils

(5) Vie des Saints de la Bretagne Armorique, 1636. (6) Dominicain de Morlaix. (7) Ancien nom de la rivière Elorn. En français : eau profonde. dans la religion chrétienne. Marché conclu. On se rend aussitôt à la caverne du Dans la description du poète apparaît une vaste enceinte où l'on peut orga­ dragon et Derrien lui commande de sortir. Celui-ci, docile, s'exécute et se laisse niser des courses de chevaux et susceptible de recevoir une importante armée. passer une écharpe autour du cou. Le petit Riok conduit le monstre comme un La place forte était défendue par la rivière et des marais mouvants, « tremulae chien en laisse. En cet équipage on se rend à Brest et à Tolente présenter aux paludes », formés par les débordements fréquents du petit ruisseau de Saint- princes de ces ceux villes la prodigieuse capture, puis le cortège se rend au rivage Brandan, affluent de l'Ellé. A la Roche, point de vaste enceinte (l'endroit ne s'y où, sur l'ordre d'un des deux cavaliers-pèlerins, le dragon se précipite dans les prête pas du tout) ; point, non plus, de marécages... flots et se noie. C'est en mémoire de ces faits extraordinaires que l'endroit de la noyade fût appelé « Poul Beuz Ancval », (7 bis) en français « Port où fut noyé la C'est donc au Minez Morvan que le vieux roi breton vécut, se battit et bête », en la paroisse de Plounéour-Trez. Elorn persista dans son idolâtrie mais mourut d'une glorieuse mort, la tempe percée par une flèche franque. C'est là l'église fût bâtie à Plouncventer. Quant à Riok, il devint un Saint. aussi qu'il reçut Witchar, l'envoyé impérial venu de la part de son maître lui réclamer le tribut et qu'il lui fit la fière réponse suivante « Va promptement Inutile de dire que de cette pure légende tien d'historique ne peut être retiré. trouver ton maître et répète lui mes paroles. Je ne veux pas subir sa loi. Qu'il Plusieurs historiens, dont Kerdanci (8) et Fréminville (9) ont affirmé, sans règne sur les français, soit, mais Morvan a le droit de régner sur les bretons sans hésitation aucune, que Morvan, Comte de Léon et devenu par la suite roi des payer de tribut ». Bretons, avait fait bâtir en l'an 800 le château de la Rcche-Maurice, qu'il y Au surplus, la Chronique de Landévennec aujourd'hui perdue mais que avait établi sa résidence, y avait combattu l'Empereur Louis Le Pieux, et y avait l'historien Le Baud avait lue et citée dans son histoire, spécifiait, sur le point qui été tué au cours d'une guérilla. nous occupe, que « Il (l'Empereur) ficha ses tentes en la Province de moindre Ils ont fait école et bien d'autres les ont suivis, à un tel point qu'en 1879, lors Bretagne sur le fleuve Elle en la forêt de Briziac ». du Congrès de l'Association Bretonne de Landerncau on avait annoncé la lec­ ture d'un exposé où l'auteur devait décrire, champ par champ, les évolutions de Remettons donc le roi Morvan à sa place dans le Morbihan au détriment l'Empereur aux abords du château... Redoutant, sans doute, une trop malveil­ de la renommée de notre forteresse de Roc'h Morvan. lante critique, il ne s'exécuta pas et conserva pour lui son précieux document. C'est dans un acte de 1263 (11) que l'on relève son nom pour la première Voici quels étaient les arguments : Morvan était Comte de Léon. La Roche fois. Le document en question concernait une obligation contractée par un cer­ qui appartenait aux Comtes de Léon devait être sa propriété qui avait, ce qui est tain Nus à propos de biens situés « In Rupe Morvan », au rocher de Morvan... naturel, emprunté son nom dont on avait fait Roc'h Morvan... Quelle origine attribuer alors à cette appellation ? Voulut-on commémorer Au siècle dernier, un historien (10) mit fin à cette légende après avoir étudié le nom de l'ancien roi du 91' siècle que la famille de Léon comptait parmi ses de près un document d'une grande valeur historique, puisque contemporain des ancêtres ? Ou, plus simplement, celui d'un Vicomte de Léon, Morvan qui vivait faits. 11 s'agissait d'un poème épique, rédigé au X° siècle, en latin, par un moine au XIe siècle et que certains considèrent comme le bâtisseur de la forteresse ? franc, Ermold Le Noir, et intitulé « Carmen de Rébus Gestis Ludovicii Pii ». L'auteur décrit la résidence du roi Morvan avec des précisions topographiques On donne une autre explication. Le nom de Morvan était, parait-il, assez qui ont permis de l'identifier avec le Minez Morvan, plateau assez élevé, parsemé courant à cette époque. Le château ne fut-il pas construit sur un rocher apparte­ de mottes féodales, voisin de la forêt de Priziac et de la rivière Elle dans le Mor­ nant à un simple particulier s'appelant Morvan, sur le « Rocher à Morvan » bihan. Ermold donne, de cet endroit, des caractéristiques qui ne conviennent comme on dirait vulgairement aujourd'hui. nullement à la Roche mais qui cadrent parfaitement avec le site morbihannais. Je penche pour le nom du Vicomte Morvan du XI1' siècle.

Quant au nom de la Roche-Maurice, on a prétendu que Maurice était la (7 bis) Actuellement Fontir/.val. L'étynioloJïJe donnée par Albert Le Grand est pittoresque mais sans valeur. traduction de Morvan. Dans nos textes anciens, Morvan se traduit par Murma- (8) Voyage au château de la Roche-Moric.e. 1821!. nus, Mormanus, et Maurice par Mauricius. Donc aucune confusion possible. (9) Antiquités du Finistère, 1" partie, 1832. (10) Audren de Kei'di'el, Expédition de Louis Le Débonnaire contre les Bretons en SIS. Bulletin de l'Association Bretonne, 1881, p. 234 à 2G1 .Cité par de la Borderie. Histoire T 2. p. 10. (11) D.M., Preuves, T. I, col 989. C'est dans un acte de 1341 (12) relatant la naissance d'Hervé VIII, dernier repré­ sentant de la famille de Léon, dont nous parlerons ultérieurement, que, pour la première fois, apparaît, en latin, le nom de Roche-Maurice, « Rupem Mauricii... ».

Daniel (13) pense en avoir trouvé l'origine dans la déformation de deux 11 mots bretons : « Meur » grande, devenu « Mor » et « Kiz» ou « Giz », manière, donc château de grande manière, château imposant. Cette explication est souvent acceptée bien qu'invraisemblable.

Je pense, pour ma part, qu'à une certaine époque, un des possesseurs du château, sacrifiant le souvenir des ancêtres, a voulu sanctifier sa forteresse en la ÉPREUVES DE JEUNESSE plaçant sous le vocable de Saint-Maurice, cet officier de Dioclétien, martyr de la Foi, qui est devenu le patron des guerriers chrétiens. RÉSISTANCE A HENRI II PLANTAGENET, Au demeurant, on emploie indifféremment l'une ou l'autre des appellations, ROI D'ANGLETERRE Roc'h Morvan ou Roche-Maurice, cette dernière s'appliquant à la commune.

Comme nous le verrons au chapitre de l'archéologie, le château date proba­ blement du premiers tiers du XII'1 siècle et a peut-être été construit par Hervé II, Comte de Léon, avant la scission du Comté.

Si l'on en croit de Kerdanet, il existait déjà en 1130 puisque cet Hervé II y résidait cette année là.

Au même siècle, Henri II Plantagenet avait atteint une puissance telle qu'elle constituait une grande menace pour le royaume de France. Roi d'Angleterre, il régnait aussi sur plusieurs de nos provinces. La guerre devait en sortir. Quand elle éclata, Henri rencontra en Bretagne un farouche adversaire dans Guiomarch IV, successeur d'Hervé II.

En 1167 les Anglais ravagèrent la Bretagne et s'emparèrent de nombreux châteaux, dont probablement la Roche. Battu en 1167 Guiomarc'h le fut à nou­ veau en 1170 et 1177 (14). On rapporte, qu'au cours de cette dernière campagne, un certain Iarnogon (15) livra la forteresse aux Anglais qui y placèrent une forte garnison.

Au cours d'une nouvelle et ultime campagne, le Vicomte de Léon succomba définitivement. Tous ses biens furent alors confisqués et ses places fortes détruites. La Roche subit vraisemblablement ce triste sort.

(14) D.L.B., Histoire, T. III, p. 275 a 280. (12) Mélanges d'histoire et d'archéologie bretonne. T. I, 1S55. (15) K. (13) Histoire de Landerneau et du Léonnais, 1874. La ruine de Guiomarc'h fut telle, qu'il eut peine, dit-on, à rassembler l'ar­ gent nécessaire à l'achat d'un cheval pour aller à la Croisade, qu'il ne fit d'ail­ leurs pas, car il mourut en 1179 à la veille de son départ.

Un des fils de Guiomarc'h, né et la Roche, était, parait-il, d'une force hercu­ léenne. D'un seul coup de poing, il abattait le cheval le plus vigoureux (16). 111

A la fin de cette guerre la forteresse, pourtant encore toute neuve, avait de profondes blessures à panser. SOUS LA LONGUE LIGNÉE DES VICOMTES DE LÉON, LA GUERRE DE 100 ANS ET LA GUERRE DE SUCCESSION DE BRETAGNE

Geoffroy, fils d'Henri II devint Duc de Bretagne et restitua aux deux fils de Guiomarc'h l'héritage paternel, le Comté de Léon, qu'il prit soin, en vue d'en briser la puissance, de diviser en deux lots.

Hervé 1er, fondateur de la branche cadette reçut dans sa part un certain nombre de chatellenies dont Landerneau, par conséquent aussi la Roche-Maurice où il mourut d'ailleurs en 1203. Il avait épousé Marguerite de Rohan.

Par la suite, la longue lignée des Hervé de la branche cadette dont la puissance ne cessa de s'accroître, (tandis que la branche aînée ruinée vendait une par une ses possessions au Duc de Bretagne) demeura propriétaire du château et plusieurs d'entre eux en firent leur résidence habituelle.

• Le plus ancien texte mentionnant le château, d'une façon un peu voilée sans doute mais néanmoins certaine, est un acte de 1206 (17) signé par Hervé II. Son intitulé débute par ces mots latins « Actum Publiée apud Landergneau ». Quel pouvait-être cet endroit, « auprès de Landerneau », sinon le château de la Roche- * Maurice ?

Par ce document, Hervé faisait donation à l'abbaye de Saint-Mahé de « Très petrata frumenti », trois pérées (mesure de l'époque) de blé, à l'occasion de la translation à l'abbaye du chef de St-Mathieu Apôtre, cérémonie à laquelle il avait lui-même assisté.

(16) K. (17) D.M., Preuves, T. I, Col. 807.

t

VO - 16 — — 17 —

Cet Hervé là devait périr d'une façon tragique. Abandonnant la Terre Sainte, Dernier de la lignée, Hervé VIII, naquit, nous l'avons vu, en 1341 au château malgré les remontrances des Patriarches et de ses compagnons d'armes, il s'em­ de la Roche Maurice. Une annotation du 14e siècle sur la Bible des sires de Léon barqua avec dix mille pèlerins ou croisés. Le 23 novembre 1218, alors que la (21) à la fin de l'Apocalypse, relate cet événement. Au moyen âge, on avait cou­ flotille allait aborder la côte italienne, ¡1 périt dans un naufrage en vue de Brindes tume de mentionner sur les Bibles ou les Livres d'Heures, les faits marquants (Brindisi). survenus dans les familles. C'est le chapelain du château qui la rédigea, en latin comme il se doit. Elle débute ainsi « Anno Dni (domini) M" CCC m0 XLI Dies Hervé III, fils du précédent, 1241 (18). Il avait longue­ meurt à La Roche en Jovis, post translationem Beati Martini, de nocte, quasi per duas leucas (sic) ante ment lutté contre le Duc, Jean Le Roux. Son (ils Hervé IV ne poursuivit pas cette diem, apttd Rocham sett Rupern Maw'tcii fuit nattis Hervetts de Leonia... etc ». guerre sans issue et composa avec l'adversaire en lui payant une amende de dix Voici la traduction du texte intégral : « L'an de Notre Seigneur 1341, le diman­ mille livres. Il avait épousé Mahaut de Poissy, fille de Robin de Poissy, seigneur che après la translation de Saint-Martin, de nuit, deux heures environ avant le de Noyon-sur-Andelle. Le nom de cette seigneurcrie figura jusqu'à la Révolution lever du soleil, naquit à la Roche Maurice, Hervé de Léon issu de parents de la parmi les titres des vicomtes de Léon et des Rohan. plus haute noblesse. Il eut pour père Monseigneur Hervé de Léon et pour mère, Sur Hervé V nous ne connaissons rien qui puisse intéresser le château. Son Madame Marguerite d'Avaugour. C'était du temps que la guerre existait rela­ épouse était une Rohan. Il mourut en 1304. Son fils, Hervé VI, bienfaiteur des tivement au Duché de Bretagne entre Charles de Blois, Seigneur de Penthièvre, abbayes de Daoulas et de St-Mathieu, fonda en 1336, un an avant sa mort, l'hô­ d'une part, et le Comte de Montfort, d'autre part. Hervé fut conçu au retour de pital de Landerneau. la guerre entre nos Seigneurs les Rois de France et d'Angleterre. Puisse-t-il attein­ dre la vieillesse de Mathusalem, être sage comme Salomon, fort comme Samson, Des lettres datant de 1336 (19) (quel dommage qu'elles ne nous soient pas sauvé comme Simon-Pierre. Ainsi soit-il... Ainsi soit-il... » (22) parvenues !) et auxquelles se réfère sommairement un aveu du 1er février 1696, relataient que le château était à l'époque un séjour agréable et que les seigneurs La longévité du jeune Vicomte ne répondit pas aux vœux du pieux chapelain. de Léon y donnaient de brillantes fêtes. Hervé mourut en 1363, à 22 ans donc, à l'abbaye de Prières. Il avait combattu aux côtés de Charles de Blois et avait été pris comme otage lors de l'affaire d'Evran. Hervé VII et sa femme, Marguerite d'Avaugour, habitaient La Roche (c'est là que naquit leur fils, Hervé VIII, dont je parlerai plus loin). On possède de lui deux lettres, écrites à La Roche et datées de 1359, adressées Il fut un des capitaines les plus en vue pendant la guerre de Succession de à son oncle, Guillaume du Chastellier, puis le règlement du douaire de sa mère Bretagne qui mettait aux prises Charles de Blois et Jean de Montfort tous deux en 1355, enfin son testament du 21 août 1363 où il avait stipulé « Item fundo et prétendant au trône ducal. creo duas perpétuas Capellanias in Capella beati Yvonts Apttd Rocham Morvan » (23). Ce dernier document prouve donc qu'il existait une chapelle auprès du Dans ses Chroniques, Froissart raconte en bien des endroits ses faits et gestes. château et non dans l'enceinte, trop étroite. L'église actuelle l'a remplacée ; M fut un des premiers à rallier Montfort (1341) (19 bis). Un blâme à lui infligé au comme son ancêtre, elle est aussi dédiée à saint Yves. siège de Nantes pour une sortie intempestive puis l'ouverture d'une porte de la ville qui semble avoir été une revanche de sa blessure d'amour propre, le con­ Erard de Léon, Seigneur de Trémerville, un oncle d'Hervé VIII, qui fut duisent sous la bannière de Charles de Blois. Au gré du récit incohérent des témoin au procès de canonisation de Charles de Blois en 1371, avait fait de la Chroniques, on le rencontre partout, à Brest, à Auray, à Vannes, à Hennebont, Roche sa résidence habituelle. En 1360 il y vivait en véritable souverain avec une à Carhaix. Il aurait été fait prisonnier trois fois, la dernière, par de Mauny et du garde, des pages, un connétable (24). En 1376 Guillaume Riou remplissait cette Chastel, (Montlbrtistes tous les deux) qui le surprirent dans son sommeil au dernière fonction. petit château de Porleac'h en Trégarantec (20). Emmené captif en Angleterre, il Quel fut le rôle joué par la Roche-Maurice au cours de la Guerre de Succes­ en revint en 1343 et mourut l'année suivante. sion ?.

(18) K. (19) K. (21) Mélanges d'histoire et d'archéologie bretonnes, 1855. T. I, p. 241. (19 bis) Ce point est contesté par D.O.M. Plulnc, Revue de Bretagne et de (2)) Mélanges d'histoire et d'archéologie bretonne, 1855, T. I, p. 241. Vendée, 1871. (23) D.M., Preuves, T. I, Col. 1561-1565. (20) D.L.B., T. Ill, p. 459. (24) K.

O Froissart ne le mentionne pas dans ses Chroniques. Par contre, il y est sou­ vent question de Goy le Forest (Joyeuse Garde). Ce silence a étonné les historiens. La Roche était pourtant une des forteresses les plus importantes du Comté du Léon où des opérations militaires se sont fréquemment déroulées.

Un chercheur, Kernéis (25) a tenté, dans une thèse aussi originale qu'ingé­ nieuse, d'en fournir une explication. Selon lui, il faudrait identifier le « Hainbon » qui revient si souvent sons Ici plume du chroniqueur à la Roche-Maurice, et non à Henneboni du Morbihan. Fin voici l'argumentation. « Hain bon » serait la déformation de deux mots bretons, Henl, Pont, (chemin du pont), du pont de Landerneau s'entend, placé sur le chemin de la Roche, puisqu'à cette époque aucune route existait le long de la rive droite de l'Elorn. A la longue, l'usage s'établit de désigner le château lui-même par le nom du chemin qui y menait. Muni de cette clef, l'auteur arrive à expliquer bien des passages obscurs du récit de Froissart.

Dans mon ouvrage sur Landerneau j'ai tenté de réfuter cette thèse (25 bis).

On pourrait cependant peut être concéder à Kernéis que certains épisodes retracés par Froissait auraient pu se dérouler non pas à Hennebont, mais à la Forêt-Landerneau ou La Roche. Au moment de la levée du siège de Brest en 1386 et la retraite des troupes bretonnes vers l'Est, Froissart écrit : « Et prinrent le chemin de Hainbon ou il n'y a que quatre lieues de la ». Etant donné son man­ que de précision habituel, on peut à la rigueur fixer ce lieu de repli à la Roche. Avec plus de raison, Jourdan de la Passardière (26) parle de Landerneau. A mon sens, les quatre lieues correspondraient mieux à Joyeuse Garde. En lieues breton­ nes, on obtient 18,700 km, en lieues françaises, 17,750 km.

Nous avons vu précédemment qu'Hervé VIII était mort sans laisser d'en­ fants. La famille de Léon n'ayant plus de postérité mâle, c'est Jeanne de Léon, sa sœur, qui, par son mariage en 1363 (26 bis) avec Jehan de Rohan, apporta son riche héritage à la richissime maison de Rohan (27).

La Roche-Maurice passait, par conséquent, dan les domaine de celte der­ nière famille.

(25) Le château de la Roche-Maurice, d'après les Chroniques de Froissart. Bulletin tle la Société académique de Brest, 1907-1908. (25 bis) J. Bazin. Landerneau, ancienne capitale de la Principauté de Léon, pp. 27 et 28. (26) Jourdan de la Passardière, Topologie des paroisses du Léon. (26 bis) D.M. Preuves, T. I, eoi. 1468. (27) D.L.B., Histoire, T. III, p. 83. o nos malveillans et adversaire invadeurs et faisans la guerre a nous, nos pays et jubjés ; qui pour plusieurs felonnies et desloyautez qu'il a commis envers nous, avons prins et saisi en nostre main toutes les terres, chasteaux, forteresses, chatel- lenies et seigneureries que souloit tenir le dit Vicomte en nostre dit pays et aujour­ IV d'hui les prenons et saisissons tant pour lesdites causes que pour deffault des hommages et a icelles chatellenies et seigneuries soit licite et chose convenable mettre et instituer capitaine cl officier tant de justice que autre qui soient gens idoines et a nous feables ; savoir faisons que nous confians a plain de nostre bien-aimé et féal escuyer Loys de Rosnivinen et de ses sens loyauté et bonne dili­ LA FRANCE CONTRE LE DUCHÉ gence icelui pour ces causes et autres a ce que nous mouvans, avons institué et ordonné, instituons et ordonnons par ces présentes Capitaine et garde de la place LA ROCHE-MAURICE SOUS LES ROHAN et chasteau de La Roche Morice. En destituant dudit office tous autres qui para­ vant ces heures qui y auroient este instituez par ledit Vicomte ou ses curateurs ». (31).

En 1372, c'est le Vicomte Alain de Rohan, le fils de Jehan qui devint posses­ A la mort de Louis de Rosnivinen, survenue le 6 février 1479, son fils cadet, seur du château qu'il tenait de sa mère Jeanne de Léon. Pendant un voyage qu'il Guillaume, prend la suite. Le mandement ducal qui le nomme, précise « Et pour fit en France il en confiait la garde à Hervé Goello et à Guéhomar Manfuric (28). ce que cette place est située sur port de mer qu'il est bien requis commettre et avoir gens qui s'en prennent et donnent guarde ». Guillaume « donna pièges Tout au début de son règne, Louis XI engagea la lutte contre les derniers (31 bis) Jehan de Kerloguen Seigneur de Rosempaul et Guillaume de Kerloguen, grands féodaux, dont le Duc de Bretagne. La Régente Anne de Beaujeu et Charles son fils ». (32). VIII continuèrent cette politique. La Bretagne vécut alors une période cruelle­ ment troublée ou français et bretons s'affrontèrent. La guerre mit en vedette Se rendant à la Roche-Maurice pour prendre ses nouvelles fonctions, quelle Jehan II, Vicomte de Rohan, qui dès le commencement des hostilités offrit son ne fut pas la surprise du nouveau capitaine de trouver porte close. Alain, Sire épée au roi de France (3 avril 1470) « Défection qui fit alors le plus de bruit, de Kéranc'hoat, son frère aîné, estimant que la capitainerie lui revenait en tant écrit de la Borderie, la plus pénible pour la Bretagne et la plus précieuse pour la qu'aîné, l'avait devancé et pris possession de la place. Discussions très âpres. France » (29). L'affaire est soumise à la justice de Lesneven. Un arrêt est rendu le 16 février 1479 (33) qui reconnaît les droits de Guillaume et enjoint à Alain de rendre les Rohan avait eu à se plaindre du Duc qui l'avait souvent blessé dans son amour clefs à son frère. La mise en possession fut exécutée par Yves de Kéraudy, Rece­ propre et ses intérêts. En outre, il nourrissait la secrète ambition d'accéder, un veur du lieu. jour, au trône ducal et il pensait trouver auprès du roi le plus solide des appuis. Ce sont ces raisons qui le poussèrent du côté de la France. Prévoyant l'orage, le Outre le prestige, la capitainerie rapportait de 3 à 400 livres par an (34). Duc François II s'empressa de garnir ses forteresses et surtout la Roche-Maurice de gens d'armes (30). Confisqué par mandement ducal du 22 novembre 1472, Dans un document de la même époque, il s'agit du mémoire rédigé contre le château fut pourvu d'un capitaine, choisi par François II, Louis de Rosnivinen. le Comte de Laval, en 1479, en vue de la présidence des Etats de Bretagne, Rohan En voici les termes : « Comme paravant ces heures, tant pour le deffaut du y fait étalage de ses titres, privilèges et seigneurie et souligne l'importance de son Vicomte de Rohan de comparoir et servir en nostre guerre, comme pour ce que château de la Roche-Maurice. « Est il de tout temps ladicte seigneurie (Rohan) sans nos licences et congie il s'en estoit aile hors nostre pays, combien qu'il nous avoit fait serment exprès de nous le faire, que mesme, qui pis est depuis s'est tenu (31) D. de Preuves. T. III, col. 250-261 ; De Courcy, Notice historique de Lander­ neau ; K. (31 bis) Présenta comme garant, caution. (28) K et D.L. Histoire, p. 489. (32) D.L., Preuves, col. 1634 ; D.M., Preuves, T. III, col. 387 ; K. (29) D.L.B., Histoire, T. IV, p. 468. (33) K. (30) D.L., Histoire, p. 714 ; IC ; De Courcy, Notice historique de Landerneau. (34) De Courcy, Notice historique de Landerneau.

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a este emparé d'un très bon fort et grand autre château fort et puissant de deffen.se Il est probable que les ouvrages de fortification de l'Est ont été bâtis cette autant ou plus que chasleait de Bretagne nommé lu Roche-Maurice qui grandement même année, c'est-à-dire en 1421, date du mandement précité. a servi et peut servir quand le cas en adviendra a la tuition et garde des biens subjets et tout le pais » (35). Revenons au Vicomte Jehan que nous retrouvons en Bretagne le 4 décembre 1479 (39 bis), mais enfermé dans la prison ducale de la tour du Bouffay à Nantes. Au surplus, la Roche était le siège de haute, moyenne et basse justice à quatre Il expie l'assassinat, perpétré sur son ordre, d'un prétendant de sa fille. Il n'en piliers — entre lesquels les condamnes à mort, étaient pendus. Le nom d'un lieu sortira que le 5 février 1484 et pour se précipiter à nouveau chez les français, à la dit « Les justices » situé dans k voisinage, en a conservé la mémoire. suite de De Rieux, son neveu (40). Derechef, le Duc installe une garnison'à la Roche et rappelle Guillaume de Rosnivinen, qui reçoit mandement «de choisir L'entretien d'une forteresse de cette importance stratégique avait conduit six hommes non sujets aux armes pour se rendre en habit de guerre au château le Duc à autoriser les Viccm'.cs de Léon à percevoir, en vue d'y pourvoir, des de la Roche-Maurice qui auront chacun 100 sols par mois et commandement au droits sur les vaisseaux et leurs marchandises qui abordaient dans les ports et dit Rosnivinen de s'y tenir et d'y commander et ordre au capitaine dudit lieu de havres de Landerneau. lui laisser les clefs ». (Mandement du 14 février 1484) (41).

Une série de mandements ducaux de 1407 à 1451 (36) marque les épisodes Puis, subite réconciliation avec François II, en 1485. Notre Vicomte en d'une longue querelle entre Ducs et Vicomtes autour de cette imposition. Il est profite pour désigner au commandement de sa forteresse un capitaine de son possible, qu'à l'origine, Léon et Rohan avaient l'habitude de percevoir les droits choix, Perceval de Lezormel. Soumission de peu de durée, car, en 1487, le voici à leur seul bénéfice. Leur produit devenant de plus en plus substantiel tenta le Duc encore du côté des Français. (42) si bien qu'en définitive on aboutit à un partage de la recette. A la suite d'une cuisante défaite militaire dans les rangs de l'armée royale, Le mandement du 28 octobre 1421 prescrit, en effet, que « Les officiers du il négocie à nouveau avec le Duc une réconciliation qui fut, cette fois-ci, une véri­ Duc prélèveront 30 sols, mais en bailleront 15 a nostre dit cousin (Rohan), pour table capitulation (1488) — François 11 l'autorise imprudemment à aller passer iceux mettre et employer, Í'Í la réparation de son chaslel et forteresse de la Roche- deux mois en France sous serment de revenir en Bretagne. Cette promesse, il Maurice qui est sur port de mer en danger et lequel a mestier de réparation » (37). ne la tient pas et le retour en Bretagne il le fait à la tête d'une armée française, qui envahit le Léon (43). Rohan, aidé par les troupes royales, reconquiert son Cette expression de « sur port de mer » que nous avons déjà rencontrée château. (44) peut surprendre, la Roche étant assez éloigné du port de Landerneau. La marée n'y remonte pas. Elle avait déjà servi d'argument à Kernéis (38) pour identifier l'Hainebon de Froissait à la Roche-M au rice par l'intermédiaire de la fausse interprétation d'une donnée géologique (sables coqtiilliers dans la vallée de l'Elorn). Il fallait, pour cet historien, prouver qu'une flotte puisse remonter jusqu'aux pieds du château (dans Froissait, la flotte anglaise venue au secours de Jeanne de Montfort était parvenue sous les murs d'Hennebont).

Kerdanet donne à l'expression un sens exact quand il dit que l'on a tou­ jours considéré le château de la Roche-Maurice comme citadelle et dépendance de Landerneau qui, lui, est port de mer. (39)

(35) D.M.. Histoire, T. II. (39 bis) D.L., Histoire, p. 744. (36) D.M., Preuves. T. II, eol. SOI. SSS, 949-50, 1083, 1 099, 1 100, 1 139, 1 603. (40) D.L.B., Histoire. T. IV, p. 514, nota. (37) D.M.. Preuves, T. II, col. 1 099-1 100. (38) Kernéis. Le château de Roc'li Morvan d'après les chronique de Froissart. (41) D.L., Preuves, Cote 1416 ; D.M., Preuves, T. III, col. 438 Bulletin de la Société académique de Brest, 1907-08. Sauban, La Roche-Maurice, Port (42) D.L.B., Histoire, T. IV, p. 530-531. de mer, Cahiers de l'Iroiso, Nov. 1955. (43) D.L.B., Histoire, T. IV. p. 543. (39) K. (44) De Courcy, Notice historique de Landerneau. f Ul W En 1678, nous apprenons que la forteresse (ô dérisoire destin !) ne servait plus que de geôle. Un acte daté de cette année-là, nous dit, en effet, que le voyer féodé et héréditaire de la terre seigneuriale et chatellenie de Daoulas est « tenu de garder les prisonniers de ladite Cour (Juridiction) jusqu'au lendemain de leur prise à l'heure de prime, et pour lors, lesdits Officiers sont obligés de prendre V dudit voyer lesdits prisonniers pour les mener aux prisons de la Roche-Morlce avec l'aide de quelques habitants de Daoulas » (49).

Marguerite, Duchesse de Rohan, nomme encore en 1694 l'écuyer Jean Corran, Seigneur de Kergoat, enseigne de Landerneau, Joyeuse Garde et La Roche- DÉCRÉPITUDE ET MORT Maurice (50) ; sans doute la fonction concernant ce dernier château n'était-elle que celle d'un gardien de prison.

La forteresse est bien délabrée en 1695 (51). D'après un aveu fourni au roi Ayant d'autres places plus importantes à tenir, les occupants abandonnè­ à cette époque. Il y est précisé que « les chasteaux et forteresses de la Roche- rent la place forte après l'avoir démantelée, sauf une tour de défense. Ceci se Morice et Joyeuse Garde estoient à demi-ruinés avec leurs tours, douves, fossez, passait en 1490 ; mais dès 1491, Charles VI11 autorisait Rohan à réparer son remparts, terrasses, espérons, guerittes, chapelles et colombiers ». château (45). Le fît-il ? 11 est permis d'en douter, car en 1492, ses vassaux se refusaient, en raison de son délabrement, à y remplir leur devoir de guêt. L'affaire Le savant Deslandes, passant par là, en 1719, admirait d'anciens débris de fût portée devant le Roy qui « sur le bon motif que la démolition en avait été tours et pénétrait dans des souterrains qu'il pensait être des ouvrages de faite que pour son service manda à ses Officiers de Lesneven de faire jouir ledit l'époque celtique (52). Seigneur (Rohan) de son droit de guest paisiblement et sans troubles, lesquels Les souterrains, prétend de Kerdanet, passaient sous l'Elorn (!). Ils ont été Officiers feront lire et publier ces lettres aux plaids de leur juridiction » (Sentence bouchés pour éviter les accidents « qu'une imprudente curiosité pourrait occa­ du 12 octobre 1492) (46). sionner ». Ce comblement a été fait en 1812 (53). Les nombreuses volte-faces de Rohan pendant cette période troublée, les Enfin, en 1926, on reparle des souterrains. Un habitant du bourg avait bâti fréquents changements de domination de la place forte, avec ses répercussions une maison au bas du château (côté Sud) au lieu dit « le Toul » c'est à dire le trou. sur la désignation des capitaines, ne permettent pas toujours de dissiper la con­ En construisant un mur de clôture, entre son nouvel immeuble et le pied même fusion qui plane sur le déroulement des faits et, plusieurs historiens ont relevé d'une muraille, il mit à jour un couloir de 5 à 6 mètres, conduisant à deux cham­ quelques contradictions dans des documents concernant cette phase de l'histoire bres bien maçonnées (53 bis). du château. La charge de capitaine dont était encore titulaire Perccval de Lézormel, secondé par son neveu Ollivier comme lieutenant, entre 1502 et 1506 (47) était- (49) Bulletin diocésain d'histoire et d'archéologie, 1907, p. 132, Notice sur Daoulas. elle purement nominale ? Le titre de Marquis de la Roche-Maurice porté en 1577 (60) De Courcy, Notice historique sur Landerneau. (51) De Courcy, Notice historique sur Landerneau. par Troïlus de Mcsgouez, ce qui lui valut un long procès avec les Rohan (48), (62) K. Le Deslandes, auquel de Kerdanet se réfère, est sans doute Boureau- correspondait-il à des fonctions réelles ou était-il simplement honorifique ? On Desllandes, le géologue, auteur d'un ouvrage scientifique publié en 1753, qui, cher­ chant et étudiant des cristaux dans la région de la Roche, en profita pour décrire l'ignore. les ruines : « Le château, écrit-Il, est totalement ruiné. Il n'en reste que les souter­ rains qui sont fort spacieux et creusés dans le roc et qui apparemment servaient Par la suite et pendant de longues années la Roche ne fait plus parler de lui. autrefois de retraite aux vieillards, aux enfants, aux femmes et aux filles lorsque les Bretons de l'Isle (ce sont les Anglais) venaient faire des descentes dans l'Armorique. Il n'en reste encore que quelques murs d'une épaisseur extraordinaire et accompa­ gnés de petites redoutes, telles qu'on le scavolt faire alors, ce qui mettait le château à l'épreuve d'un coup de main. » Boureau-Deslandes avait fait faire un dessin des (45) D.M., Histoire, T. II. ruines « ne les ayant vues nulle part, déclare-t-ll, ni dans l'histoire générale de (46) K. Bretagne, ni dans les mémoires particuliers qui y ont rapport. Je me flatte que ce (47) Le Guennec, « Le château tic la Roche-Maurice », La Dépêche de Brest, du dessein plaise aux curieux et aux amateurs des antiquités celtiques. » 17 janvier 27. (53) K et Fréminvllle, Antiquités du Finistère, 1832. ' (48) K. (53 bis) J. Salatln, Dépêche de Brest, 17, 21, 28 mars 1926. t3

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VI

LES RUINES ACTUELLES PEUVENT-ELLES ENCORE RÉVÉLER LA DATE DE CONSTRUCTION ET L'ARCHITECTURE D'ENSEMBLE ?

Les archéologues demeurent perplexes devant ces ruines. Ecoutons Audren de Kerdrel qui déclarait en 1880 : « Rien de moins caractérisé que ses murs, pas une ouverture, pas un mâchicoulis, pas un détail architectonique qui puisse aider à en déterminer la date. L'appareil (structure générale de la maçonnerie) lui-même ne nous dit rien à cet égard, ou plutôt, il est si confus, il y entre tant d'éléments hétérogènes et disparates, qu'il est difficile de lui assigner une antiquité reculée. La base d'une des tours a seul quelque caractère, mais son moyen appareil ne permet guère de la faire remonter au-delà du 15e siècle et nous inclinons à penser que l'ensemble de la construction n'est pas beaucoup plus ancien... » (54)

Je ne me rallie pas complètement à cette opinion, en ce qui concerne l'an­ cienneté de la construction primitive et, ceci, pour deux raisons : l'une historique, car nous savons par de Kerdanet que le château existait déjà en 1130 puisqu'Hervé II y avait établi sa demeure et que, en 1206, nous l'avons déjà vu, il se trouve mentionné dans un acte ; la seconde est d'ordre archéologique. L'histoire de l'architecture militaire nous apprend que la construction des donjons carrés — et telle est la forme de celui de la Roche — ne dépasse pas les XIe et XIIe siècle, et que, par la suite, on ne bâtit plus que des donjons de forme, en général, cylin­ drique.

La concordance de ces deux arguments nous permet de conclure que le château remonte au moins au XIIe siècle, et plutôt même, au commencement de ce siècle-là.

(54) Association Bretonne, classe d'Archéologie, session de Quitln, 1880. Je pense cependant qu'une telle ancienneté ne doit pas être attribuée à l'en­ ments importants les ont comblés. Seul un déblaiement permettrait de vérifier cette semble mais au seul donjon et à quelques murs de l'enceinte car le château n'a structure, classique dans tous les donjons de cette époque. pas été construit en une seule fois. On l'a progressivement perfectionné et, par Sur le mur Nord du donjon, une trace très nette d'enracinement de toiture à ailleurs, il a été l'objet, après les destructions de la guerre, de réparation fonda­ 2 pentes, indique qu'il y avait là, autrefois, un édifice. Au X111 «-• siècle, la résidence mentales. Quant aux ouvrages qui le flanquent du côté Est, ils dateraient de 1421. du seigneur était habituellement accolée au donjon (56). Etait-ce donc là le logis des Vicomtes de Léon ? L'examen des ouvrages découverts en 1926, la perfection et le fini de leur maçonnerie, dénotent un travail encore plus récent. Il n'existe malheureusement A l'extérieur du mur Sud, traces de contreforts peu saillants, puis, à ses pieds pas de représentation ou de plan du château, à l'époque de son intégrité. La pre­ vestiges de murailles qui constituait la « chemise » de protection du donjon. mière reproduction de ses ruines date du début du I8L' siècle. C'est, nous l'avons Voilà pour le donjon proprement dit. vu, un dessin que fit exécuter le géologue Deslandes. Fréminville a tenté une des­ cription d'ensemble. Voici ce qu'il écrit en 1832-35 (55). Au nord de la forteresse, les racines d'un ouvrage en forme d'éperon, dont les superstructures se sont écroulées, surplombe à pic la butte rocheuse. D'abord le donjon (dont la base subsiste). Au sud, une grosse tour carrée. A l'angle opposé de cette tour une autre de forme triangulaire. Une troisième tour Au Nord-Est, base de tour carrée, prolongée vers l'Est par un ouvrage qui carrée fondée stir un monticule attenant au rocher a du faire partie de l'enceinte paraît attenant. extérieure (ouvrage de flanquement de l'Est). Enfin sur l'enceinte, deux énormes La position stratégique de la Roche était exceptionnelle. Le château surveil­ tours rondes qui défendaient le portail (côté Sud). Voilà bien des ouvrages dont lait, à la fois, deux profondes vallées, celle de l'Elorn au Nord, et celle du ruisseau il est difficile de retrouver, aujourd'hui, un tracé certain. le Morbic, à l'Ouest. Le site de la forteresse peut être comparé à une presqu'île que son isthme raccordait, au Sud, avec les hauteurs dominantes. C'est sur cet Pour me faire une opinion personnelle, j'ai souvent gravi le vieux Roc'h isthme que s'est construite l'agglomération. Morvan. Ce qui m'a tout d'abord frappé, c'est l'exiguitc de cet ensemble forti­ fié qui laisse loin derrière lui les célèbres ruines (à peu près contemporaines) de A l'époque où le château était en service, l'isthme était coupé par un profond Langeais, (donjon de Foulque Nerra), de Bcaugcncy, de Loudun, de Montrichard, fossé qui le défendait du côté Sud. de Talmont, et, chez nous, de Trémazan. C'est probablement sur ce côté que s'élevaient les deux grosses tours dont Il n'est pas contestable que l'édifice central fût le donjon ; de forme à peu parle Fréminville et qui flanquaient la seule porte d'accès. près carrée avec ses murs de 2,50 m. d'épaisseur. La construction en est très gros­ sière : grandes lames schisteuses sommairement liées. A l'intérieur, une salle rui­ Je pense que les « souterrains » comblés en 1812 et redécouverts en 1926 ne née avec retombées de voûtes en ogives, une porte d'entrée, donnant à l'Ouest, sont que tes casemates ou galeries basses d'une de ces tours enfouies sous les ébou- avec son encadrement de pierres taillées et, enfin, un reste de cheminée (côté Est). lemcnts qui, peu à peu, ont comblé le fossé. Cette salle correspondait à la « grand'salle » qui servait, à la fois, de salle à man­ L'artillerie placée dans ces casemates permettait un tir rasant contre l'ennemi ger, de lieu de réunion des vassaux et de tribunal. qui tentait de franchir le fossé. On se ferait une idée exacte de ces galeries en visi­ tant celles du château de Kerjean, parfaitement conservées. La porte précitée s'ouvre très au-dessus du niveau du sol extérieur et devait être, comme d'habitude, reliée par une passerelle en bois à un chemin de ronde En quoi consistent exactement les ouvrages mis à jour en 1926 ? Un couloir qui courait au sommet du rempart de l'enceinte. Les étages supérieurs du donjon et deux « chambres » dont l'une était reliée par le haut à l'étage supérieur de la se sont écroulés. Ils servaient de logement. tour (et non au donjon). Ces chambres-casemates ont probablement été aménagées par la suite pour servir de prisons, car j'ai repéré une sorte de meurtrière aveuglée Au-dessous de la « grand'salle », des étages en sous-sol, un ou deux, proba­ par un mur qui lui fait vis-à-vis. blement creusés à même le roc, servaient de magasin et de prison... Les éboule-

(56) J. Levron. « Le chAtcnu-forl ». (55) Antiquités du Finistère. 1832 et 1S35.

Ul Lors du déblaiement, on a découvert, outre des ossements humains et d'ani­ maux, de nombreux boulets en pierre.

Le Cadastre de la commune indique, dans les environs du château quelques noms suggestifs, comme « le Verger » (2 parcelles) et « le Toul » (2 parcelles aussi). Tout château-fort avait son verger, toujours à l'extérieur des murs. Quant aux « toulous », ils évoquent soit les fossés eux-mêmes, soit des trous apparaissant dans les éboulis des anciens ouvrages, soit plutôt les ouvrages souterrains eux mêmes qui sont situés dans ces parcelles.

Pour accéder au château en venant par le Nord, on franchissait l'Elorn par un gué que le Cartulaire de Landévennec nomme Rodoed-Carn (57) et qui se trouvait probablement au bas des terres de Kergonnèc et non loin défendrait où le ruisseau dont je vais parler se jette dans l'Elorn.

Au bord d'une vallée où coule le ruisseau descendant de Laneuffret, se trouve un lieu dit « les justices » où les Vicomtes avaient, sans doute, dressé leurs sinistres piliers de justiciers.

Quant aux prétendus souterrains reliant le château à des points éloignés, com­ me Landemeau, par exemple, ou passant sous la rivière ! ! ! ce ne sont là que créations imaginaires.

Il me reste, en achevant coite élude, à signaler que le château de la Roche- Maurice a été inscrit en 1926 sur l'inventaire des monuments historiques. II deve­ nait, en effet, urgent de protéger ces belles ruines contre ceux qui les considéraient comme une simple et commode carrière (58) et qu'il appartient, aujourd'hui encore, au Duc de Rohan, résidant en son château de Josselin et que le lils aîné de la maison de Rohan porte le titre de prince de Léon.

Pour tirer bien au clair (ce qui est loin d'être fait), les éléments architecto- niques de la forteresse, il serait souhaitable que des fouilles soient un jour entre­ prises avec l'approbation du propriétaire et sous le contrôle de personnes très qualifiées, travail délicat cl même périlleux tant en raison de l'état précaire des ruines que de leur position sur un massif rocheiLxUlgS escarpé. .w»^..^-

(57) Jourdan do la Passardicie, Topnlogie des paroisses du Léon. Rodoed — Rodocz -- Roudouz (Hué. en breton). (58) Des enlèvements de pierres ont eu lieu notamment en l'an XII, XIII, en 1820. 1859, 1SS0. LL DjMEAIJ DE LA ROCHE -MAURICE Louis Le Pieux au début du IXe siècle, on ne sait si Morvan était un vicomte de

Léon ou plutôt un vicomte du Faou. Cette dernière hypothèse prévaut si l'on

considère qu'aux Xle et Xlle siècles, les premiers s'appelaient Guyomarc'h ou

Hervé tandis que les seigneurs du Faou avaient pour nom Ehuarn ou Morvan (5).

La château de la Roche-Maurice ou Roc'h-Morvan a déjà fait l'objet de plusieurs études: celle de J. Bazin est la plus exhaustive (1). Nous lui empruntons En effet, si au Xllle siècle la forteresse appartient aux vicomtes donc de larges extraits pour cette notice. Celle-ci ne saurait être qu'une courte de Léon, il n'est pas exclu qu'ils s'en soient emparés au cours des deux siècles synthèse en l'absence de nouvelles découvertes. Nous ne pouvons confirmer certaines précédents lors des guerres qui les opposèrent aux vicomtes du Faou. Les pos­ des assertions de Miorcec de Kerdanet (2) qui reposeraient sur des documents que sessions de ces derniers s'étendaient peut-être alors bien plus au nord jusqu'au nous ne sommes pas a même de vérifier. Nous insisterons sur l'origine et la descrip­ haut cours de l'Elorn, frontière naturelle que défendait le Roc'h Morvan. Cet

tion de la forteresse. avant-poste stratégique serait conquis par les vicomtes de Léon qui, forts de

la prise de ce "verrou", accrurent leurs domaines de plus d'une centaine de kilo­

le château est situé à quatre kilomètres à l'est de Landerneau, une mètres carrés, notamment de l'importante paroisse de Ploudiry et de ses trêves. des plus vieilles cités léonardes, ancienne capitale de la vicomte, devenue princi­ La frontière sud-est du comté de Léon fut alors établie sur des limites peu natu­ pauté de Léon. Le Roc'h Morvan serait la citadelle éloignée de cette ville au relles qui demeurèrent les siennes. Les vicomtes de Léon acquirent également à

Moyen Age après que le château qui y existait cessa d'être entretenu; le droit de la même époque (par force ou par union matrimoniale) la châtellenie de Daoulas guet et une partie du droit de "ports et havres" perçus dans cette localité lui qui continua de relever du diocèse de Cornouaille. Ces luttes entre les maisons

étaient affectés (3). de Léon et du Faou persistaient encore en 1163 puisqu'à cette date le vicomte

du Faou s'empara d'Hervé de Léon et de son fils Guyomarc'h et les enferma

La présence d'un relief naturel aisément défendable explique en partie dans la forteresse de Châteaulin (6). Ils en sortirent grâce à l'intervention de

le choix du site du Roc'h Morvan: la forteresse se dresse au sommet d'un rocher l'évêque de Léon, Hamon, fils d'Hervé, et de Conan IV, duc de Bretagne. Le vi­

étriqué qui surplombe la rive gauche de l'Elorn de près de soixante-dix mètres. Ce comte du Faou, son frère et son fils, finirent leurs jours au château de Daoulas, relief constitue un emplacement défensif de premier ordre bien que l'aménagement l'une des principales forteresses des vicomtes de Léon avec Brest, Morlaix, humain de ses abords soit rendu difficile par l'exiguité du plateau: le village qui Lesneven et, très probablement, La Roche-Maurice. s'étend devant la forteresse, au sud, est dominé par les versants d'une colline.

La "voie romaine" reliant Morlaix à Landerneau franchissait le gué de Roded Carn en La première mention du Roc'h Morvan ne date que de 1263; il resta

contrebas du château; c'était un point de passage fréquenté en amont de Landerneau l'une desAdemeures principales des vicomtes rie la branche cadette de Léon iusqu'

jusqu'où les effets de la marée se faisaient sentir. en 1363, date de l'extinction de cette maison, la forteresse occupait une position

centrale qui permettait à ces seigneurs de diriger l'ensemble rie leurs fiefs et

L'origine du château demeure mal connue; au-delà d'un problème de plus particulièrement l'importante châtellenie de Landerneau riche rie trente-cinq

datation se pose celui de sa paternité du fait de son nom et de sa position à pro­ paroisses et trêves. Il couvrait les approches est rie cette ville, la principale

ximité de la frontière sud du comté de Léon, le toponyme "roc'h" désigne fréquem­ rie la vicomte, et de surcroît il se trouvait, à mi-distance entre lesneven, chef ment des châteaux du Xle siècle tandis que Morvan serait le nom de son fondateur. -lieu de la baillie éloigné d'une quinzaine de kilomètres, et Daoulas dont l'abbaye

Les forteresses bretonnes de La Roche-Derrien, La Roche-Bernard et La Roche-Perriou fut relevée par les vicomtes vers 1167-1173. La Roche-Maurice fut également, jusqu'

sont ainsi désignées dans des actes fies Xle et Xlle siècles où l'on apprend à la fois au XVe siècle, le siège de la juridiction do -Ploudiry qui comprenait basse,

l'existence du château et celle de son possesseur (4). On ignore qui était Morvan et moyenne et haute justice; ries fourches patibulaires se dressaient face au châ­

si l'on a depuis longtemps renoncé à l'identifier au roi des Bretons qui s'opposa à teau sur une colline de la rive droite de l'Elorn (7). 293 29'.

rte tout le pays " (21). II. DESCRIPTION

141)4: Nouvelle saisir; ducale: Guillaume de Rosnivinen recouvre la garde

du château accompagne de six hommes d'armes gagés chacun à cent Le site: les rapports entre le château et le village sols par mois (22).

Le château occupe l'extrémité d'un promontoire qui surplombe de

1485: I H vicomte de Rohan se soumet aux exigences ducales; Perceual de plusieurs dizaines de mètres, la confluence de l'Elorn dont la vallée est orientée

l.ezormel est nommé capitaine du château mais dès 1487, le duc re­ est-ouest et d'un ruisseau, le Morbic. Le rocher de quartzite très exigu est re- le confisque la place (23). lié au plateau qui domine au sud-est par une dépression de terrain, un enselle-

ment, où fut implanté le village de La Roche-Maurice. Le choix du site résulte 1489: Fn février, Jean 11 de Rohan reconquiert ses terres à la tête d'une donc de la présence d'un abrupt escarpé, facile à défendre, même si des ver­ armée française qui occupe Brest (24). Le château de La Roche sants plus élevés existaient au sud, ce qui ne comptait guère à une époque où -Maurice qui sert de poste avancé à cette ville est partiellement la portée des armes de jet n'excédait pas quelques dizaines de mètres. démantelé pour empêcher qu'il ne soit utilisé par les troupes du­

cales. Cette contrainte du site dut cependant être très vite ressentie,

non pas pour l'aménagement du château lui-même mais pour celui de ses annexes.

1491: L'harles VIII autorise le uicomte de Rohan à réparer la forteresse Il semble en effet probable qu'une basse-cour fût établie en avant de l'encein­

toutefois les vassaux de celui-ci refusent d'y faire le guet en te: cette bayle abritait les communs, les écuries, les logements des serviteurs

1492 car le château est, disent-ils, trop délabré. Le roi confirme et de la garnison qui ne purent tous être édifiés dans la forteresse. Ce type

la jouissance du droit de guet à Jean II qui maintient Perceval de de dispositif correspond bien à l'organisation ries châteaux des Xle et Xlle siè­

I ezormel à son poste rie capitaine jusqu'en 1506 (25). cles qui comportaient fréquemment des défenses échelonnées en hauteur et en

II semble cependant que dès cette époque, le château cesse d'être profondeur: donjon (ici ceint d'une chemise), enceinte et basse-cour souvent som­

entretenu comme place de guerre; les réparations qui y sont effec­ mairement défendue par un fossé et une palissade de bois, quelquefois par un

tuées concernent plutôt la conversion de la forteresse en prison rempart maçonné flanqué de tours. La bayle rie La Roche-Maurice ne possédait

(les salles basses des tours de l'entrée sont aménagées pour en sans doute pas de retranchements importants car le village qui lui a succédé ne

faire des cachots en 1492) même si, en 1504, le vicomte de Rohan conserve pas dans son parcellaire de traces notables d un vallum uu d une mu­

lui consacre encore d'importantes sommes (26). raille.

I in du XVlle siècle: Le château qui a perdu tout rôle militaire est â demi-ruiné; Cette localité resta de taille modeste, sa superficie n'excédant

il est utilisé comme geôle pour la juridiction de la seigneurie de pas quelque^^res. La "place du château" (qui pourrait occuper l'emplacement

Daoulas (27). d'anciennes défenses avancées) et l'église en constituaient le centre. Cet édi­

fice, cité dès le XlVe siècle, remplaça la chapelle castrale qui n'avait pu trou-

veç^lace dans la forteresse. Elle demeura une église tréviale de Ploudiry, gros­

se paroisse rurale dont le centre était distant de six kilomètres. La faible

importance de ce village qui jouxtait l'un des principaux châteaux des vicomtes

de Léon résulte à la fois du rôle stratégique de la place, des contraintes topogra­

phiques mais aussi de la proximité de Lanriernoau, cité qui comptait déjà trois

•0 t o paroisses fondées au détriment, dus anciennes circonscriptions f;i;i:lt;;>ici:i(.ì'ii 11 :!> VllisinoS.

l£i Kneho-Mnurii.o était itiuit: un eliâfoau di! •uj|>i;i-rit:it> restreinte

auprès duquel se serraient lu:; habitations ili! quelques vassaux ainsi i|iH! des

communs i!L quelques bâtiments à usage administratif, lus vicoml.es nu i:lii!i'i:|ii!

reni pas à promouvoir l'essor du cuLlu localité cl. su coniciil.eroiil probablement

d'autoriser l'accès du la chapelle castrale aux gens du luur suite comme ils lu

firent pour l'oratoire du Saint-Juliun ci landerneau. Lin verger, un moulin peut

-être déjà un pont complétaient l'nssaturu di! eu microcosme au l.as Mnyuu Age.

Description d'unsuiniilt! ul étal dus vestiges

la topographie du situ conditionna lu plan du la Furluiesso: lus

cunsti'uutuurs du château utilisèrent judicieusement lut; irrégularités rocheuses

du l'éperon dont la principale, uno butte haute d'une vimjtainu de niètros, servit

d'assise au donjon et a son enceinte tandis que sur une deuxième plaie renne

moins élevée (cinq à dix mètres) furent édifiés des uuvrayes secondaires. Ces

deux^minenees urientées nord-sud étaient naturellement protégées par dui; Il I .MA I I Al I 1)1 I 'êijlisi!, II! l/illiJUU Ut II! l'h.ìl.l'.llJ VUS (lll abrupts rocheux au nord et à l'est et même pour la première A l'ouest et au IA Kl il Ml MAI imi :i sud est; i!ii arrière plan. I(! plateau du IC'MJI». lu château vu depuis la rivo mini tlu l'I Ioni. sud. Celle-ci constituait un réduit autonume qui duminail l'ensemble du château.

Le flanc sud de la forteresse, le plus accessible, était barré par un profond

fossé et un rempart long d'une cinquantaine du mètres qui reliait la base sud

•ouest de la plate-forme occidentale A une grosse tour qui armait la partie sud

du la terrasse orientale. Ce dernier édifice, vraisemblablement doublé d'un autre

similaire, flanquait l'entrée de la place que défendait un ponl-levis.

l'espace intérieur du château était exiqu. de l'ordre de trois à

quatre mille mètres carrés, la nature du site rendit problématique l'aménagement,

interne de la place où les conditions du résidence étaient moins favorables qui!

si la forteresse avait été implantée en terrain plat. Ainsi l'escalade de la plate

forme du donjon qui constituait uni! épreuve pénible pour les assaillants devait

aussi Être incommode pour les nobles léonards même s'il existait probablement

alors des rampes de bois pour un améliorer l'accès, l'espace plat qui su froiivail.

entre les deux plates-formes abritait sans doute de:; constructions peut-être de:,

communs alors que d'autres logements s'appuyaient contre la courtine sud en

dessous du donjon auquel était accolé un louis.

!

( :i i/\ i i /\i i lit i /\ Kl H :i )i r-o/\t IKII :I puiulanl. plusieurs siècles du carrières Un pierre pour édifier les maisons voisines.

Seul le Uunjiin ennservu une dizaine du mètres d'élévation ainsi que lus murs est

et nord du la chemise: c'est l'image que l'on a du château depuis la vallée, lus

vestiges dos autres ouvrages paraissent être d'un moindre intérêt, pour lu visiteur:

ils se réduisent le plus fréquemment a des substruetions recouvertes de mucus.

Dus fouilles menées en 1968 par l'association "Mein Breiz" ont permis du ruciin-

naître une partie de la base de l'importante tour circulaire qui jouxtait l'entrée

du château à l'est (28). Sun homologue évoquée par Fréminville (29) a totalement

disparue soos les éboulis qui ubstrnent également les salles basses du eus deux

tours dont on avait commencé le dégagement en 1926 (50).

Description des ouvrages

Le donjon et sa chemise

C'est l'ouvrage le plus ancien du château; il est juché sur la plaie

-furme la plus élevée au nord-ouest. Orientée nord-sud. celle-ci a une superficie

de près de mille mètres carrés; elle mesure quinze â vingt mètres de largeur

L'ensemble du sommet est circonscrit par une enceinte, une chemise. Le donjon

s'élève au sud, en arrière et en surplomb du dispositif d'entrée, disposé au sud

-est. Par ses défenses, cette tour participait donc activement à la protection

de l'accès le plus vulnérable de la plate-forme et par sa masse il couvrait la

petite esplanade ainsi que les bâtiments qui lui étaient cuntigus au nord. On le

bâtit à la verticale de l'abrupt à l'est ce qui obligeait les assaillants à le con­

tourner par l'ouest. Ils empruntaient alors un passage d'une largeur inférieure

à deux mètres pour accéder au centre de la plate-forme.

Le donjon est un trapèze presque carré d'une douzaine de mètre:;

de côté qui conserve une élôvatiun de huit à douze mètres. Il délimite uni.' salle

intérieure également quadrarigulaire (ou plutôt octogonale puisque les angles en

sont coupés) de plus de cinq mètres de côté. Il ressort de cet édifice massif,

trapu même compte tenu de son dôcouronnement, une impression de robustesse

qui est confirmée par l'épaisseur des murs (deux mètres et demi et même trois

mètres pour le mur sud, le plus exposé). t:e caractère est accentué par l'absence

d'ouvertures: au niveau actuellement accessible qui correspondrait au premier

étage, n'existaient outre la porte qu'une baie de faible dimension également percée

dans le mur occidental ut un jour-arohère qui éclairait chichement, l'escalier .mie Unguis établi d'après le plan levé par II. SICAKD mi 1968 lit paru liant, li! II.A.A.11. i.'li 19/11 (p. 16). • nago dans la muraille au sud-uuost. la paroi orientate osL aveuglu (ello conLenail. I -1 1 /\ I I Al I Ol I < l H A It -ri/\l JKI I M la cheminee); In pei-cement visible dans la muraille nurd ctirrespondrail :H;i)li!ini!nl. .i

une niche qui Put alteree lors iJu la mine de I'edifice et (Ins consolidations recun

tiis (uomine la partiu est de la muraille uccidentalu du donjon remnntee nvec mi

mortier de cimn.nl).

I'elevation originale de eel edifice est difficilemenl iinDiisLiLoijIili!:

deux niveaux sont encore visiblus mais il pourrait bien en avoir exisle deux on

Lrois autres:

- Lus premières assises dus murailles du donjun no sunl plus

observables a cause des éboulis qui les cachent; elles doivent,

prendre appui sur la roche à environ trois mètres au-dessus du

plancher de la salle du premier étage. Une pièce, obscure car trop

a la portée des assaillants, fut peut-être aménagée dans cet impact;

auquel on ne pouvait accéder que par une trappe, Ce rfiz-do-t:liaussèe

abritait probablement un magasin pour les vivres (seule une touille

permettrait de vérifier son existence) (31).

- ta porte du donjon s'ouvrait à l'ouest au niveau du premier

étage, à plusieurs mètres de hauteur. On y accédait alors grâce a une

passerelle en bois escamotable qui reposait sans doute sur le chemin de

ronde de la courtine ouest de la chemise. Ce petit pont pouvait être ma­

noeuvré ou tout au moins défendu à partir d'une baie située au-dessus de

l'entrée. Oes poutrelles en bois transversales qui s'encastraient dans la

paroi renforçaient celle-ci lorsque les vantaux étaient clos. La pièce,

munie d'une cheminée à hotte et conduit cylindrique, serait, selon certains

auteurs, la salle d'apparat où les seigneurs de Léon recevaient leurs vas­

saux ce qui semble toutefois peu sûr du fait de son exiguïté eL de suu

faible éclairage (2b à 30 mètres carrés, moins de 3 mètres de hauteur).

- On accédait du premier au second étage par un escalier

coudé, lugé dans l'angle sud-ouest de la tour. Cette salle, identique

à la précédente, servait d'appartement selon la disposition d'usage

dans les donjons de cette époque, t.Ile aussi n'èl.aiL que sommaire

ment éclairée par un profond jour-archère percé au sud-ouest et

par une petite baie qui s'ouvrait a l'ouest dans l'escalier, au 'dessus

Croquis établi d'après un relevé effucLut! I>.ji• Monsieur I inis lie Korl. •

GO 30 I

¡i i;

ili! lu puti.e ilu dtihjiin. lin plancher sur sulivus un cnnsliluuil lu -.ni allils nui! son plul'und était vruist.'liililuhleiiliiiil uni! vilûle duiil. nu :.uh

sisluiil. i)ui! los ri.'tniiihêns fnriiièns lin lamelles de schistes, pusèes du er Cliaill !|l'(l!.!.lÙl'l!llll!lll. aPPUI'Ci IIÍ!l!S.

• Celte vuûte supportait suit uni! terrasse crèiiuléu .linón,n|i!t• nu

sumniel ilii l'ouvrage soit, un i iut.ru élayu il'uù l'un accédait aux lié

tensos sominilalns île la tour, la premíele reprosenl.ul.ini i ilu iTi.He.iu

ne reinunLe qu'à 1/1'i, (Iule à laquelle le duitjun avait déjà peiilu :,un

couronnement nue l'un ne saurait, dune recnnsLiLuifr avec précisinii.

Il est possible que celui-ci ail été volontairement llórase à une épi)

que reculée puur lui ûler LunLe valeur défensive un, plus simplement,

pour éviter li!s chutes île pierres.

la chemise, nu enui line du donjon, épousait les cmit.iiurs du rucher ce

qui permit d'y aménager des pastes de tir pour la Manquer seminan muent. S'MP

puyant au riunjun (côté nord-est) elle dessinait un éperon polvyon.il au iinril Il I i IA I I Ml I 1)1 I A Klil.nl MAI IKK I !'i l'Iiil.i!fiimii; ilu diin.jiin vue de l'ouest. avant de longer la parui occidentale de cette tour, la muraille se pi ulnnge.iil. lu iliinjiiii oí. l'épurun iln In chemise avec au sud où elle délimitait un espace du quelques dizaines de mètres cariés en .111 |l|l!lllil!r plnil ll.'S Uf fll!liri!llll!lll.S I lu II II IILM- ilu quarl./ifu

arroser de projectiles les assaillants gui seraient parvenus à s'emparer de la

première enceinte et qui aurait,,! renf¿ n'attaquer l'ouvrage principal.

Plusieurs portes successives protégeaient l'accès de la plate-fui nie

L'une d'elles existait sûrement dans la partie sud-est de l'enceinte qui n'est

plus visible. Un cuntrefort qui renforçait la paroi sud du dunjon dans l'angle sud

-ouest pourrait avilir, par ailleurs, servi de support à une perte disparue luis

de l'effondrement de la courtine sud. les traces d'une autre entrée dementen!

visibles contre la paroi occidentale du dunjon, à trois mètres de l'angle sud iiui-sl.

Ces vestiges consistent un un piédroit de granit haut d'environ deux mètres qui

est surmonté d'arrachements de maçonnerie assez importants qui currespoiidraieiil

aux restes d'une muraille reliant la cnurtine au donjon, le sommet de ce jambage

est situé à la même hauteur que l'assise inférieure du montant de la porte du

donjon, ce qui signifie que cet accès se trouvait au-dessuus de celui du donjon

auquel il était perpendiculaire (cf. illustration). Ce dispositif d'entrée sembler.ul.

toutefois être plus cumplexe: le premier piédruit est encore surélevé (de l'urilie

de deux a Unis mètres) par rappurt au chemin d'accès actuel et il eût précédé

• cri 305 Ml(>

(le trois cavités carrées superposées (d'environ trente centimètres de côté) où La plate-forme orientale est moins élevée et moins vaste que celle devaient s'encastrer des poutrelles de bois escamotables... Seul un déblaiement du donjon; elle devait toutefois constituer un puissant réduit, peut-être autonome, et une étude minutieuse permettraient d'expliquer cette construction qui inté­ sur le tracé de l'enceinte. File était ceinte de murailles au nord et à l'est et grait les accès à la plate-forme et au donjon. probablement d'une tour carrée dont on voyait encore les substructions au

début du XIXe siècle (33). Une grosse tour circulaire en occupait l'extrémité

La partie nord de l'ouvrage est également couverte d'éboulis dont méridionale. l'épaisseur doit atteindre trois ou quatre mètres près de l'angle sud-est du don- jun. Au nord, se dresse un éperon polygonal mesurant huit mètres Cette dernière et une autre semblable située plus à l'ouest enca­ sur quinze dans sa plus grande largeur. On y accède par deux entrées dont l'une draient un pont-levis. Elles furent édifiées au XVe siècle lors du remodèlernent donne sur un couloir chichement éclairé par trois petits jours-archères d'inégale de l'ancien dispositif d'entrée du château, la partie rie l'enceinte la plus exposée dimension. Il menait probablement à une latrine plutôt qu'à une poterne haute aux attaques ennemies. Ces deux tours ainsi disposées formaient un puissant

(une partie du mur extérieur s'est effondrée). Ce corridor communiquait avec une ouvrage dont l'assaillant devait s'emparer avant même d'entreprendre l'attaque salle pentagonale d'une vingtaine de mètres carrés qui s'ouvrait aussi sur l'es­ du donjon. De plus, elles couvraient de leur masse les habitations situées sur la planade; cette pièce, démunie d'autres ouvertures, était surmontée d'un étage plate-forme et dans la petite cour au nord. Plusieurs auteurs se fiant à l'acte planchêié qu'éclairait une baie percée au nord dans le mur épais de deux mètres du 28 octobre 1421 ont daté leur construction de cette période. Cette référence

A proximité de l'éperon, sur la courtine ouest, existait un saillant grossièrement est incertaine car les vicomtes de Rohan disposaient tout au long de ce siècle semi-circulaire qui flanquait la muraille et défendait, peut-être, une poterne des considérables revenus que leur procuraient leurs terres de Léon. Peut-être haute aménagée dans une anfractuositê du rocher. ces tours sont-elles pas antérieures aux années 1470-1490, soit avant soit immé­

diatement après les démêlés de Jean 11 de Rohan avec François II. Un examen

Un petit corps de logis occupait en partie l'esplanade entre l'éperon approfondi de ces ouvrages et une comparaison avec des édifices contemporains et le donjon. Au pignon nord de celui-ci se voient toujours les traces d'arrache­ permettraient d'en préciser la datation. ment d'une toiture à deux pentes. Les murs ouest et nord ont disparu (leurs bases seraient enfouies sous les déblais) tandis qu'à l'est ce bâtiment s'appuyait La moitié occidentale de la base de la tour a été dégagée en 1968. contre la courtine où subsistent au niveau de la cour les brèches de deux baies De plan circulaire, ou peut-être ovale, elle a un diamètre de plus de quinze larges de plus d'un mètre dont les pierres de taille ont été arrachées. Les autres mètres. Elle comprend une salle polygonale irrégulière d'une quinzaine de mètres ouvertures prenaient le jour de ce côté où elles bénéficiaient de la protection carrés accessible au nord par un sas de quatre mètres de longueur, fermé par de l'abrupt ainsi qu'à l'ouest, en arrière de la courtine. La surface du logis qui une porte que l'on pouvait barricader de l'intérieur; ce corridor possédait en comportait sans doute un étage, était d'une centaine de mètres carrés; il doublait outre une minuscule pièce (chambre de veille ou latrine). Dans le mur ouest, large presque la superficie logeable du donjon avec lequel il ne communiquait pas de trois mètres au moins, est aménagé un couloir coudé de 0,70 à 0,80 mètre de directement. largeur. Celui-ci s'ouvre au nord -ouest et il conduit à une trappe, un orifice

d'aération, de 80 centimètres sur 50, situé face à une embrasure disparue. Cette

L'enceinte ouverture mène à une salle carrée voûtée en berceau rie 3,60 mètres rie côté qui

correspond à l'une des chambres dégagées en 1926. Celles-ci constituaient le ou

Celle-ci comporte trois éléments: la plate-forme orientale, la courtine les étages dôfensifs de la tour et abritaient probablement de l'artillerie comme sud qui reliait cet ouvrage à la base sud-ouest du rocher du donjon et enfin en témoigna alors la découverte rie boulets. Ces pièces furent Iraniform ées en une muraille linéaire, flanquée de contreforts plats, au nord au-dessuáde l'abrupt. cachots à la fin du XVe piècle. D'autres galeries existaient plus "au sud"; elles correspondraient soit à la deuxième tour soit à d'autres ouvrages implantés en 307 511H

avant du château (3'.). considérer comme tels les jours-archères de faible dimension qui éclairent I'

escalier du donjon et le couloir de l'éperon. Les baies elles-mêmes étaient de

Ces deux édifices formaient, sans doute, l'unique Manquement de taille réduite: celles du logis accolé au donjon mesuraient intérieurement 1,50 à

la courtine sud dont les seuls vestiges se limiteraient à un mur épais de 1,20 1,30 mètre de largeur mais pas plus de 0,80 mètre extérieurement. Les portes d'

mètre, visible a l'arrière du fossé, à moins que ce rempart n'ait été complète­ accès à la salle pentagonale de l'éperon n'excériaient pas non plus 0,80 mètre.

ment dérasé, la douve elle-même est totalement comblée face à l'entrée du Rappelons ici que la porte du donjon, haute d'environ 2 mètres, s'ouvrait à plu­

château et partiellement à l'ouest où elle mesure encore environ quatre mètres sieurs mètres de hauteur comme il était d'usage pour ces tours aux Xle et Xlle

de profondeur sur six mètres de largeur. L'enceinte se raccordait à l'angle sud siècles. -ouest de la plate-Forme du donjon où elle ne semble pas avoir été défendue

par aucun ouvrage en saillie. Un petit parc passablement protégé existait peut L'ensemble des parties hautes du château a disparu et il sera déli­

-être en contrebas de la courtine ouest du donjon car en cet endroit la pente cat de déterminer exactement leur aspect si ce n'est par une fouille des abords

est assez douce (ce n'est là qu'une hypothèse non vêrifiable dans l'immédiat: des murailles pour y découvrir d'éventuels vestiges de toiture. De même le déga­

on y distingue quelques bases de murs) gement de la base du rocher pourrait permettre d'y trouver des consoles ou des

corbeaux de mâchicoulis. Il est cependant probable qu'à l'origine le donjon et sa

L'espace ainsi délimité par l'enceinte est assez réduit mais il devait chemise n'étaient couronnés que d'un chemin de ronde à créneaux et merlons,

cependant abriter quelques constructions comme des communs, des magasins, des sans doute doublé de hourds en bois. Des mâchicoulis sur corbeaux leur furent

logements ou des écuries dont la présence se révélait être indispensable près peut-être substitués au bas Moyen Age; de tels dispositifs ainsi que des toits

de toute résidence seigneuriale. Celles-ci s'élevaient probablement dans la petite en éteignoirs sommaient les tours d'entrée selon toute vraisemblance. cour établie au-dessus de la courtine nord. Elle avait une superficie de quelques

centaines de mètres carrés; on y accédait par un passage large de trois mètres Un des principaux caractères de l'ornementation du château demeurait et long de quatre à cinq, percé dans la roche en arrière de la porte du château. la rusticité. Les éléments sculptés ou moulurés ont soit complètement disparu ou

D'autres habitations se dressaient en arrière de la courtine sud comme semble bien ils sont ensevelis sous les êboulis. La cheminée du donjon à hotte et conduit

l'indiquer la présence de deux murs parallèles épais d'un mètre environ, longs cylindrique (respectivement BO-90 et 30 centimètres de diamètre) est le seul

de 10 à IS^et distants de 7,S mètres. Ces constructions dont l'organisation est élément encore visible; le dégagement de cette tour et du logis qui lui est accolé encore peu compréhensible (elles sont recoupées par deux murs perpendiculaires nous apporterait d'utiles renseignements sur la fonction résidentielle du château dont l'un est saillie par rapport au tracé du rempart) étaient établies juste en auxXIlle et XlVe siècles. dessous du donjon dans lequel demeurait le seigneur lui-même.

Matériaux et mise en oeuvre Percements, couronnements, ornementation

îrois types de roches furent utilisées dans la construction: le

Nous abordons là un chapitre difficile car comme le soulignait quartzite et le schiste étaient extraits sur place tandis que le granit, utilisé

A. de Kerdrel: "rien de moins caractérisé que ces ruines, pas un mâchicoulis, pas pour les encadrements, provenait d'une carrière plus éloignée. On discerne trois

un détail architectonique qui puisse aider à en déterminer la date" (35). La ruine types de parements: du château et son utilisation comme carrière de pierre ont profondément altéré

l'aspect rie la forteresse. - Un moyen appareil irrégulier avec une alternance d'assises

de schiste et de quarzite; les percements dêfensifs ont. pour l'essentiel, disparu: on ne peut 309 511)

Un moyen appareil assise, allongé assez régulier, plus rare; seigneurs (36). les constructeurs du rionjon et rie la chemise pourraient donc

composé uniquement de schiste, il est notamment visible dans la n'être que les vicomtes de la branche endette de Léon auxquels échut la châtel-

pièce pentagonale de l'éperon et surtout dans la tour du XVe siècle lenie de Landerneau en 1180. Aucun document ne désigne expressément le Roc'h

dont le dressage des parements fut très soigné (le parement externe Morvan avant 1263, ce qui est tardif mais non surprenant compte tenu de la ca

de celle-ci est composé de pierres de taille de grande dimension). rence des sources archivistiques bretonnes pool' les Xle et Xlle siècles.

- Un petit appareil de moellons de schiste allongé (murs auprès Les caractéristiques architecturales du donjon et de sa chemise ne

de la douve). permettent pas non plus de leur assigner une date de construction précise. On

ne peut se borner comme le fit J. Bazin à 1' attribuer, du fait de sa forme carrée,

Des plaques de schiste couvraient également les couloirs (corridor aux Xle et Xlle siècles: si on possède des exemples bretons de donjons quadran-

de l'éperon et escalier du donjon) ainsi que certaines ouvertures; d'autres purent gulaires des Xle-Xlle siècles ( Chateaubriand. Châteauneuf en Ile-et-Vilaine) il

être utilisées comme dallage. Les linteaux et les piédroits des portes et des baies en existe d'autres, moins anciens, des Xllle et XlVe siècles (Hêdée, Clisson). Les

sont constitués rie pierres de taille en granit comme d'ailleurs les chaînages donjons quadrangulaires lêonards qui subsistent sont de deux types:

d'angle du donjon.

- Lesquelen en Plabennec et Lamber en Ploumnguer sont des

Le mortier utilisé dans la construction est essentiellement composé donjons sur motte de la fin du Xle siècle dont la superficie est sen­

de chaux, du moins pour le donjon et la chemise. Cela témoigne du soin apporté siblement la même que pour celui de La Roche-Maurice. Ils en diffôrenL

dans l'édification de ces ouvrages même si l'appareil en est assez médiocre (du cependant par leur support (une motte artificielle), par l'emploi d'un

fait de l'utilisation du quartzite, pierre difficile à tailler). Cette chaux pourrait mortier d'argile dans les maçonneries et probablement par une élé­

provenir des bancs de calcaire qui affleurent dans la rade de Brest ou bien de vation moindre. Saint-Urbain â une dizaine de kilomètres au sud. La chaux fut mélangée à un sable marin contenant de nombreux coquillages encore visibles. Mais si elle est utilisée - Trémazan en Landunvez est un donjon carré haut d'une

dans le blocage des murailles du donjon et de la chemise, son emploi se limita trentaine de mètres qui fut élevé à la fin du Xllle ou au début du

a l'édification des parements et des voûtes dans la tour du XVe siècle où la ma­ XlVe siècle. Cette belle construction comporte cinq étages bien

çonnerie intérieure des murs est composée de pierres liées à l'argile. éclairés par de nombreuses baies.

L'édification de la tour maîtresse du Roc'h Morvan s'inscrit donc

III. CONCLUSION chronologiquement entre celle de ces deux types d'ouvrages, soit vers le Xlle

ou le Xllle siècle. Il conviendrait de définir si ce donjon comportait plus rie deux

Au terme de cette étude, le château de La Roche-Maurice apparaît niveaux auquel cas les étages supérieurs disparus situés à plus de dix mètres

donc comme une forteresse chargée d'histoire même si celle-ci ne peut être que de hauteur devaient s'ouvrir assez largement à l'extérieur et donc contenir des

sommairement retracée. logements plus spacieux que ceux qui demeurent observables. Lin tel édifice cor­

respondrait à une possible imitation des donjons ligériens et normands (il est

Son origine notamment demeure problématique: un château, un "roc'h", toutefois dépourvu rie contreforts) et constituerait alors une notable évolution

serait édifié par un vicomte du laou, Morvan, au Xle siècle puis conquis par les par rapport aux donjons sur motte du Xle siècle dont la faible élévation résultait

vicomtes de Léon. Cette première forteresse fut probablement détruite par les de la médiocre stabilité de ces tertres. troupes d'Henri II Plantagenêt onLre 116? eL 1179 comme toutes les places de ces 3-11 SI2

l 'ensemble chemise et donjon est le plus ancien ouvrage du château; Notes aucune réfection ou reprise notable (comme l'adjonction de tours circulaires) n'y sont visibles ce qui indique bien la valeur de ce réduit (savamment conçu pour l'époque), édifié sur un rocher étriqué, les vicomtes de Léon s'y réfugièrent 1. J. BAZIN, "Le château de La Roche-Maurice", Brest, 196'.. durant la guerre de Succession de Bretagne; il était capable de résister à bien Sur l'origine de ce nom voir J. BAZIN, p. 11-12; les deux expressions sont des assauts avant l'apparition de l'artillerie à poudre et des boulets métalliques utilisées pour désigner le château: aux XlVe et Xve siècles. - Roc'h-Morvan est sans doute la plus ancienne puisqu'elle est employée dès 1263 ("Rupe Morvan").

Les principaux aménagements du bas Moyen Age concernèrent l'enceinte - La Roche-Maurice demeure actuellement la plus usitée; c'est le nom conformément a l'évolution de l'architecture militaire à partir du XlIIe siècle. même de la commune. Maurice n'est pas la traduction de Morvan; la chapelle castrale était, dès le XlVe siècle, placée sous le voca­ Deux grosses tours circulaires vinrent en renforcer le flanc sud-est, le plus ble de saint Yves dont on ignore s'il a pu succéder à saint Maurice exposé, au XVe siècle. Elles assuraient le flanquement du portail à guichet muni Ce toponyme apparaît en 1341 ("Rupem Mauricii"). d'un pont-levis qui remplaça l'antique accès du château. L'édification de ces 2. MIORCEC DE KERDANET, "Le château de La Roche-Maurice", Lycée Armoricain, défenses montre bien que les vicomtes de Rohan se souciaient de conserver en 1823, pp. 346-353. état des forteresses pourtant très éloignées de leurs domaines ancestraux et 3. J. BAZIN, "Landerneau, fief urbain des vicomtes de Léon et des vicomtes puis qu'ils y consacrèrent même plusieurs centaines, voire plusieurs milliers, de livres ducs de Rohan, princes de Léon", B.S.A.F., 1973, pp. 161-198, p. 184. jusqu'à la période du rattachement de la Bretagne à la France. Ces travaux 4. M. JONES, "The defense of medieval Brittany: a survey of the establishment illustrent en outre les prétentions de ce lignage â la fin du XVe siècle où Jean II of fortified towns, castles and frontiers from the Gallo-Roman period to the de Rohan acheva la reconstruction des logis de Josselin et réédifia le château end of the Middle Ages", Archaeological Journal, 1981, pp. 149-204. de Pontivy (57). Le chapitre sur l'émergence des châtellenies et le début de la féodalité.

5. H. GUILLOTEL, "Les vicomtes de Léon aux Xle et Xlle siècles", M.S.H.A.B., 1970, pp. 29-51, p. 37.

Cette hypothèse au sujet d'une variation de la limite sud du comté de Léon nous a été suggérée par B. TANGUY, Chargé de Recherches au C.N.R.S., qui l'expose dansTl'histoire du Finistère" à paraître. Qu'il en soit Ici remercié.

6. DOM MORICE et C. TAILLANDIER, "Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne", 2 volumes, Paris 1750-1756, rééd Paris 1974, tome 1, p. 105.

DOM MORICE, "Mémoires pour servir de preuves à l'histoire ecclésiastique et civile de Bretagne", 3 volumes, Paris 1742-1746, rééd Paris 1974.

7. J. BAZIN, (cf. note 3), p. 187.

B. A. LE GRAND, "La vie des saints de la Bretagne Armorigue", 1636, 5e éd., Quimper, 1901, p. 40-43.

9. MIORCEC DE KERDANET, (cf. note 2), p. 348.

Une mauvaise lecture de la chronique de Robert du Mont a fait dire à cet auteur que Jarnogon livra La Roche-Maurice aux Anglais. Il s'agit en réalité de La Roche-Bernard dont ce Jarnogon était le seigneur. 313 314

Consulter: DOM MORICE et C. IAII.LANDIER, (cf. note 6), tome 1, p. 113 ; 24. Au sujet de la campagne française de 1489 consulter: et OOM MDRICF. (cf. note 6), tome 1, 13'.. A. DE LA BORDERIE et B. POQUET, "Histoire de Bretagne", 6 volumes, Brest 10. DOM MORICE, (cf. note 6). tome 1, 989. Paris, 1896-1914. tome 4, p. 566-569.

11. G. DE BOURGOGNE et A. BARTHELEMY, "Anciens évèchés de Bretagne", tome 6, 25. J. BAZIN, (cf. note 1), p. 24. "Bretagne féodale et militaire", Saint-Brieuc, 1879, p. ZOO. 26. J. KERHERVE, "Château de La Roche-Maurice: travaux à la fin du XVe siècle 12. MIORCEC DE KERDANET, (cf. note 2). p. 349. (documents inédits), dans "Monuments et objets d'art du Finistère: études, découvertes, restaurations (années 19B1-1982", B.S.A.F., 1982, pp. 332- 336, p.336. 13. .). BAZIN, (cf. note 1), p. 17; et 27. J. BAZIN, (cf. note 1), p. 25. A. RAME, "La bible des sires de Léon", Mélanges d'histoire et d'archéologie bretonne", 1855, tome 1, pp. 241-246. 28. "La Roche-Maurice: le château", dans le compte rendu du Congrès de Landerneau de l'Association Bretonne, BTÂ.A.B., 1970, pp. 16-19. 14. DOM MORICE, (cf. note 6), tome 1, 1531-1532. Le plan qui accompagne cet article est le premier qui fut dressé. 15. DOM MORICE. (cf note 6), l.ome 1, 1561-1564. 29. Chevalier DE FREMINVILLE, "Antiquités de la Bretagne: Finistère", Brest, 1832, p. 263. 16. DOM MORICE, (cf. note 6), tome 2, 70. 30. Consulter les articles de J. SALAUN dans le journal "La dépêche de Brest", 17. H. DU HALGOUET, "Répertoire sommaire des documents manuscrits de l'histoire des 18, 19. 21, 22, 23, 24, 2B et 31 mars 1926. de Bretagne antérieurs à 17B9 conservés dans les dépôts publics de Paris , tome 1, Bibliothèque nationale et Archives nationales, Saint-Brieuc, 1914, 31. L'escalier du donjon ne se prolongeait pas au-dessous du premier étage comme p. 81* et 121*. l'a affirmé le chevalier DE FREMINVILLE, (cf. note 29), p. 263.

17 bis. H. DU HALGOUET, (cf. note 17), p. 120. 32. Le tracé de cette muraille est figuré sur le plan levé par M. Fons de Kort que nous remercions ici de nous avoir reçu et de nous avoir communiqué des 18. DOM MORICE, (cf note 6), tome 2, 1099-1100. notes inédites qu'il a collectées sur l'histoire du château.

Sur le problème des droits de "ports et havres" consulter également les actes 33. Chevalier DE FREMINVILLE, (cf. note 29), p. 263. suivants: 801, 888, 1083, 1139 et 1603. 34. J. SALAUN, (cf. note 30), articles du 19 et du 23 mars 1926. J. BAZIN, (cf. note 1), P. 22. 35. A. DE KERDREL, "Rapport sur les excursions faites à La Martyre, à La Roche 19. DOM MORICE, (cf. note 6), tome 3, 251. -Maurice et à Pencran pendant le congrès de Landerneau , B.A.A.B., 1880, pp. 381-392, p. 385. 20. OOM MORICE, (cf. note 6), tome 3, 387-394. 36. A. DE LA BORDERIE et B. POQUET, (cf. note 24), tome 3, p. 275 et 279-280. 21. DOM MORICE et C. TAILLANDIER, (cf. note 6), tome 2: "Mémoire du Vicomte de Rohan contre le Comte de Laval pour la présséance aux Etats (1479)", pp. En 1216, ce fut Pierre Mauclerc qui envahit le Léon et qui chassa Conan de CLX1-CLXXXV. p. CI.XX1II, articles Cl 1 et CLII. Léon (branche aînée) de ses villes et de ses châteaux (cf. p. 302-303).

22. DOM MORICE, (cf. note 6), tome 3, 458. 37. J.M. LE MENE, "Châteaux forts du Morbihan", B.S.P.M., 1913, pp. 137-155 et 1914, pp. 56-91, p. 56-60. II est capitaine de Saint-Aubin-du-Cormier en 1488.

23. J. BAZIN, (cf. note 1), p. 23.

L. IE GUFNNEC, intervention lors de la séance du 29 novembre 1928 à propos de documents trouvés dans les archives du château du Rohou, B.S.A.F., 1928, p. XXXIX. mité de celle-ci) et indique qu'elle appartenait, « dès avant 1763 à M. de Kerouartz ». Cet édifice subsiste actuellement au n° 9 de la place du général de Gaulle (ou du marché), et abrite le salon de thé « A la duchesse Anne ». Son pignon couvert d'ardoises est magnifique et la façade est datée « 1664 », près de la porte. En 1779, Landerneau est toujours capitale de la princi­ pauté de Léon — une des plus importantes seigneuries de Bre­ tagne, puisqu'elle donne le droit au duc de Rohan Chabot, son propriétaire, de présider aux Etats, alternativement avec le LA ROCHE MAURICE baron de Vitré. Le titre de prince de Léon continue d'être porté par l'héritier du duc. Le château connu sous le nom de La Roche-Maurice (ou Le 7 fructidor an X (25 août 1802) le duc de Rohan vend La Roche Morice) était appelé jadis Roch'Morvan. D'autre ses biens de Bretagne à M. Janzé, et parmi ceux-ci : « 4° Le part, nous sommes enclins à nous rallier — au moins partiel­ domaine de Léon, consistant dans les objets suivans, savoir : lement — à l'avis que M. A. Kernéis a émis à son sujet en à Landerneau, une halle, les anciens batimens, l'auditoire, 1909 : La Roche Maurice correspond très probablement au la prison et un moulin abandonné ». Le baron Janzé rétro­ « Hainebon » cité dans les « Chroniques » rédigées par Frois­ cède au duc, par acte du 22 novembre 1814 : « Io tous les sait entre 1369 et 1400, et qui couvrent les années 1325 à 1400. biens immeubles et droits qui composent le domaine de Léon, En effet, le Hainebon de Froissart est une place fortifiée. consistant, savoir à Landerneau les anciens batimens, une Il ne peut donc s'agir d'Hennebont, près de Lorient qui, à halle, l'auditoire, la prison et un moulin abandonné ». Ces l'époque, était privée de ses fortifications depuis 1247. D'autre actes ne comportent aucune mention de l'actuel Hôtel de part, les distances (citées par Froissart) de Hainebon par rap­ Rohan. port à Brest et à d'autres lieux correspondent approximative­ ment avec l'emplacement de La Roche Maurice, mais sont incompatibles avec celui d'Hennebont, dans le Morbihan. M. * * Jégou, auteur d'une histoire de Lorient, est également de cet avis. Landerneau se trouve dans le Finistère, sur le bord de Le présent historique du château de la Roche Maurice est l'Elorn, à l'intersection des routes nationales N. 12 Brest- donc — en partie — basé sur cette identité de lieux. Guingamp et N. 170 Quimper-Brignogan. Le château de Landerneau était très faible et ne consti­ tuait pas une défense efficace. C'est la raison pour laquelle la ville, qui est le siège du fief de Léon, était protégée par deux autres forteresses, l'une à quatre kilomètres en amont D'après la légende de Saint Riok, rajeunie par M. Edouard sur un gué de l'Elorn : La Roche-Maurice — l'autre en aval : Vallin au XIXe siècle, il semble qu'une autre forteresse avait Joyeuse-Garde, à la Forêt-Landerneau, qui surveillait l'accès déjà existé en ce lieu en des temps très lointains. M. Vallin du petit port de Landerneau. écrit, vers 1850 : « Deux guerriers de la Grande Bretagne, Néventer et Der- rien, qui vivaient au commencement du IV' siècle, passant un jour près de la rivière de Dour-Doun (eau profonde), qui Certains auteurs ont attribué la fondation du château au sépare le Léonais de la Cornouaille-Armorique, virent le sei­ comte de Léon, Morvan, élu roi des Bretons en 814, d'où le gneur de la forteresse (de Roch 'Morvan) qui dominait cette nom de Castel Roch'Morvan. rivière s'y précipiter d'une de ses tours. Ils se hâtèrent le secou­ Il est vraisemblable que cette origine supposée constitue rir, le retirèrent de l'eau et le firent transporter au château. une erreur de lieu. Il est beaucoup plus probable que la forte­ « Rappelé à la vie, ce seigneur leur raconta que le pays resse fut érigée au XIe, ou au début du XIIe siècle, par un étant ravagé par un dragon qui dévorait indistinctement les vicomte de Léon, nommé également Morvan. La forme même hommes et les bestiaux. Bristokus, roi de Brest, avait alors' du donjon carré confirme l'époque de la construction. D'après fait avec le monstre un accord moyennant lequel on lui livre­ Kerdanet, le châtau existait en 1130, époque où le comte Hervé rait tous les samedis un homme tiré au sort. Mais le seigneur II de Léon y résidait. Elorn avait été choisi tant de fois qu 'il avait successivement Par la suite les Anglais ravagent la Bretagne en 1167, au livré au dragon tous ses domestiques et vassaux, si bien qu 'il moment où Guyomarch IV est comte de Léon. Ses terres sont ne restait plus que sa femme et son fils Riok. Aussi, ne vou­ envahies. Il est de nouveau battu en 1170. Puis le château de lant pas voir périr les seuls êtres qui lui fussent chers, il avait la Roche Maurice est pris en 1177 par les Anglais, qui y pla­ préféré se donner la mort. Néventer et Derrien consolèrent cent une garnison. Guyomarch IV, ruiné, meurt deux ans plus cet infortuné et lui promirent de le délivrer du dragon s'il vou­ tard, au moment de partir pour la croisade. lait que son fils Riok embrassât la religion catholique. Elorn Quelques temps après, Geoffroy II Plantagenet, duc de y ayant consenti, les deux guerriers se rendirent à la caverne Bretagne de 1181 à 1186, restitue le Léon aux fils de Guyo­ du dragon, qui sortit en poussant des cris effroyables. Il était, march, mais divisé en deux parties. C'est le cadet, Henri Ier dit Albert le Grand, « long de cinq toises, gros par le corps (époux de Marguerite de Rohan) qui reçoit Landerneau et ses comme un cheval, sa teste faite comme un coq, retirant fort forteresses. Le château a souffert des combats passés et il est au basilic, tout couvert de dures écailles, la gueule si grande possible qu'il soit alors restauré. Henri de Léon y meurt en que d'un seul morceau il avalait une brebis ». Derrien le blessa 1203. mortellement, et, l'ayant lié avec son écharpe, il le donna à Un acte signé en 1206 par son fils Hervé II est parvenu conduire au jeune Riok, qui le mena au château de son père. jusqu'à nous et mentionne un château près de Landerneau : De là, les deux guerriers se rendirent à Brest, et présentèrent « actum publiée apud Landergneau » — certainement la le monstre au roi Bristokus, puis ils partirent pour Tolente, Roche-Morvan. où ils s'embarquèrent pour l'Angleterre, après avoir com­ Hervé III de Léon meurt au château en 1241, après avoir mandé au dragon de se jeter dans la mer, ce qu'il fit au lieu vivement combattu le duc Jean Ier le Roux. appelé « Poulbeuzanéval », aujourd'hui Pontusval (marais où Puis un autre acte daté de 1263 stipule expressément le fut noyée la bête), en la paroisse de Plounéour-Trez. En château : « in rupe Morvan » (au rocher de Morvan). mémoire, de cette aventure, la rivière de Dourdoun prit le nom Hervé V de Léon meurt en 1304. Son fils Hervé VI fonde, d'Elorn, qu'elle porte encore aujourd'hui ». en 1336, un hôpital à Landerneau, avant de disparaître à son tour en 1337. * Peu après, Roch'Morvan prend le nom de La Roche * * Morice, comme en fait foi l'acte de naissance du futur Hervé Vin de Léon : « L'an de Notre Seigneur 1341, le dimanche après la translation de Saint Martin, la nuit, deux heures environ avant le lever du soleil, naquit à la Roche-Morice, Hervé de Léon, Alors le siège reprend et bientôt les vivres et les muni­ issu de parents de la plus haute noblesse. Il eut pour père Mon­ tions commencent à manquer, si bien que la garnison envi­ seigneur Hervé de Léon et pour mère Madame Marguerite sage une reddition lorsqu'un jour Jeanne de Flandre « aper­ d'Avaugour. C'était du temps que la guerre existait relative­ çoit du haut d'une des tours de la forteresse un certain nombre ment au duché de Bretagne entre Charles de Blois, seigneur de navires qui, après avoir traversé la rade de Brest, pénè­ de Penthièvre, d'une part, et le comte de Montfort, d'autre trent dans la rivière d'Elorn... Ces bâtiments amènent 6 000 part ; Hervé fut conçu au retour de la guerre entre nos sei­ archers commandés par Gautier de Mauny, gentilhomme du gneurs les rois de France et d'Angleterre. Puisse-t-il attein­ Hainaut ». Ce renfort met en déroute les troupes de Charles dre la vieillesse de Mathusalem, être sage comme Salomon, de Blois qui se replient sur Auray. fort comme Samson, sauvé comme Simon Pierre. Ainsi-soit- il ». Cet acte est traduit d'un texte en latin qui porte la men­ tion : « aput Rocham seu rupem Mauricii ». Le père du nouveau-né, Hervé VII, participe activement En 1355, Hervé VIII de Léon séjourne à la Roche où il à cette guerre de succession de Bretagne, dans le parti de Mont- s'occupe du règlement du douaire de sa mère. fort, puis pour celui de Charles de Blois. Le 15 janvier 1358, Raoul de Cahors s'engage par écrit La comtesse de Monfort et son fils passent l'hiver à « travailler à ramener sous l'autorité du roy les châteaux de 1341-1342 au château de la Roche-Maurice. Puis, le printemps Hen bont (La Roche Maurice) et de Brest... ». revenu, Charles de Blois décide d'aller attaquer la place de Les archives conservent deux lettres écrites à La Roche la Roche Maurice ou « Hainebon, parce que puisque le sire en 1359 par Hervé de Léon, âgé de 18 ans, adressées à son Montfort était en prison, s'il pouvait prendre la ville, le châtel, oncle Guillaume du Chastellier. la comtesse et son fils, il auroit tôt sa guerre affinée ». En 1360, Erard de Léon, seigneur de Trémerville, oncle En juin 1342, Charles de Blois et ses troupes mettent le d'Hervé VIII, réside habituellement au château de la Roche- siège devant la forteresse, après plusieurs tentatives d'inves­ Maurice, avec « une garde,' des pages, un connétable ». tissement sans résultat. Le 13 juin, la comtesse Jeanne de Mont­ Le 21 août 1363, Hervé VIU de Léon, qui n'a que 22 ans, fort sort du château et va — « à la tête de 300 cavaliers — est gravement malade et il rédige au château un testament qui mettre le feu aux tentes du camp de Charles de Blois. Pour­ stipule : « item fundo et creo duas perpétuas capellanias in suivie par un grand nombre de cavaliers rassemblés par Louis capella beati Yvonis apud Rocham Morvan ». Hervé VIII d'Espagne, maréchal de l'ost de Charles de Blois, elle ne peut meurt peu après — sans postérité mâle — à l'abbaye de Prières. rentrer dans la ville et doit prendre une autre direction, sui­ Le Léon revient alors à sa sœur aînée, épouse du vicomte vie par son escorte. Si s'en alla autre chemin, droit par devers Jean Ier de Rohan depuis 1349. Le Léon appartient désormais le chatel de Brest qui sied à trois lieues de là ». (La distance à la Maison de Rohan. citée par ce texte de Froissait confirme l'identité Hainebon-la Roche Maurice). * Cinq jours plus tard, Jeanne de Montfort quitte Brest « entour mie nuit, et s'en vient, à soleil levant, et chevauchant, droit à l'un des côtés de l'ost », et reprend « le chatel de Hai­ nebon » à la grande joie de ses troupes. Les soldats de Char­ les de Blois contre-attaquent, mais sans succès. Le 4 novembre 1371, un traité entre le roi d'Angleterre et le duc Jean IV de Bretagne prévoit qu'une garnison anglaise va être placée au château. Puis, en mai 1373, du Guesclin « chevaucha à tout son grand host devers le châtel et la ville de Hainebont où il y avait six vingt Anglais qui la tenoient ; et les y avoit laissés le Comte de Salebrin quand il y fut, n 'avoit point six jours ». Du Guesclin prend le château qu'il confie à deux capitaines bretons avant de gagner Nantes. En 1375, le duc Jean IV, aidé par des soldats anglais, reprend la place et décime la garnison laissée par du Guesclin. L'année suivante, Guillaume Riou est connétable de la Roche Maurice. En 1377, le capitaine de la place se nomme Morice de Treziguidy. Il est remplacé — en 1379 — par Henri Le Parisy. * * *

La paix revenue, le château devient un des séjours ordi­ naires des vicomtes de Rohan. Le premier acte connu, dont les Rohan sont à l'origine en tant que propriétaires de la for­ teresse, est signé d'Alain VIII de Rohan et de Léon, et daté du 4 janvier 1409. Un texte du 18 mai 1420 nous apprend qu'à ce moment il est urgent de venir en aide aux villes, forteresses et châ­ teaux de La Roche-Maurice, ainsi qu'à ceux de Blain, La Chèze, Josselin, Rohan... « de présent moult besogneux... et de très grande nécessité d'habillemens de défense ». Un mandement daté du 28 octobre 1421 prescrit que « les officiers du duc prélèveront 30 sols, mais en bailleront 15 a nostre dit cousin (Rohan), pour iceux mettre et employer à la réparation de son chastel et forteresse de la Roche-Morice qui est sur port de mer en danger et lequel a mestier de répa­ ration ». Il est probable que la partie est de l'enceinte est édi­ fiée à la suite de ce mandement — en même temps que des restaurations sont apportées aux parties existantes.

221 A partir de 1470, sous le règne de Louis XI, et jusque « CLI — Est-il que de tout temps ladicte seigneurie a esté vers 1498 — fin du règne de Charles VIII - la place va chan­ emparée d'un très bon, fort et grand autre chasteau fort et ger plusieurs fois de mains au cours des luttes engagées par puissant de deffense autant ou plus que chasteau de Breta­ les rois de France contre le duc de Bretagne François II. Le gne, nommé La Roche-morice, qui grandement a servy et peut 3 avril 1470, le vicomte Jean II de Rohan se range aux côtés servir quand le cas en adviendra à la tuition et garde des biens du roi de France. subjets de tout le païs. Le 24 mai 1472, le duc qui craint une invasion de la Bre­ « CLII — Auquel chasteau y a eu de tout temps et a capi­ tagne par les troupes françaises, nomme le comte de Laval taine, lieutenant et garde cotidiennement, laquelle capitaine­ lieutenant général de toute la Bretagne. Le maréchal de Rieux rie vault communs ans audit capitaine de trois à quatre cens commande les troupes et « garnit les frontières de gendarmes, livres et mesme n 'est le guet en icelle seigneurie levé qu 'en sur tout... la Roche Morice...etfit raccomoder les chemins ». la dixième partie d'icelle seigneurie. Le 22 septembre 1472, Louis de Rosnivinen, seigneur de « CLIII — Auquel chasteau et capitaine lors que la mer Keranchoat, chambellan du duc François II, est nommé « capi­ ou costé devers la terre dudit Vicomte est pris aucuns morhotz, taine et garde de la place et chasteau de la Roche Maurice », les preneurs sont subjets sous peine de grosse amende les saisi sur le sire de Rohan, allié des Français. apporter et offrir audit capitaine qui les pourra prendre et rete­ En 1479, la justice seigneuriale des Rohan est transférée nir à juste prix pour ledit Vicomte. Et est tout ce vray et notoire du château à Landerneau. au païs et en la partie ». Le 6 février de la même année, à la mort de son père, Les 27, 28, 29 et 30 avril 1479, durant l'enquête qui « Guillaume, fils du dict Loys de Rosnyvynen » est nommé s'ensuit, Jean de Rostrenen, âgé de 72 ans, « dépose qu'en capitaine de la Roche Morice : « Et puisque cette place est ladite seigneurie de Léon y a un autre beau chasteau fort et située sur port de mer où il est bien requis commettre et avoir puissant de deffense, autant que chasteau qui soit audit Duché gens qui s'en prennent et donnent guarde, ce que faire de Bretagne, mais qu 'il y avoit gens de deffenses et vivres, lequel chasteau est nommé La Rochemorice, lequel chasteau désirons... ». peut servir à la tuition et gardes des biens et subjetz du païs Quelques jours plus tard, Guillaume arrive sur les lieux d'environ, et dit qu'à iceluy chasteau a eu de tout temps à pour prendre ses fonctions, mais la forteresse est déjà occu­ sa cognoissance capitaine, lieutenant et garde, et que la capi­ pée par son frère aîné, Alain, sire de Keranchoat, qui pense tainerie en vault comme il a ouy dire notoirement de 3 à 400 que cette place, qui rapporte 400 livres par an, lui revient de livres... ». droit. Guillaume porte sa plainte devant la justice qui fait droit à sa requête par un arrêt du 16 février. Peu après, le receveur * Yves de Kéraudy met Guillaume de Rosnyvynen en posses­ * * sion de ses fonctions. A ce moment survient l'affaire de la préséance entre le vicomte Jean II de Rohan et le sire de Laval. Le « Mémoire » Dom Lobineau écrit : « Guillaume de Rosnevinnen, fils rédigé par Rohan cite plusieurs fois la Roche Morice : de feu Louis, en son vivant capitaine de la place et château « CXLHI — Outre est-il qu 'en ladicte seigneurie ledit vicomte de la Roche-morice eveschéde Léon, capitaine de ladite Roche­ a toute haute, moienne et basse justice, pour faire punir tous morice, donna pièges à Jehan de Kerloguen seigneur de delictz, fors faux monnoyeurs, et pour la grandeur d'icelle sei­ Rosempaul et Guillaume de Kerloguen son fils... le 26 may gneurie y a cinq sièges et juridictions diverses, sçavoir, le siège 1480 ». Des réparations sont alors effectuées dans la forteresse. et juridiction de la Rochemorice... Le 5 janvier 1484, Jean II de Rohan sort de la prison nan- taise où il est enfermé (sur ordre du duc et accusé d'assassi­ Un mandatement daté du 25 avril 1493 décide de com­ nat) depuis plus de quatre ans. Aussitôt il rejoint le parti du mencer la restauration de la place. Un second, du 23 novem­ roi de France. Le duc François II signe alors un mandement bre 1498, est intitulé : « Maison du jardin, réparation d'icelle ». qui ordonne la saisie du château de la Roche Maurice par Guil­ Un autre mandement, daté du « 23° jour de may l'an mil laume de Rosnyvynen. Celui-ci reçoit du duc un mandement cinq cents quatre » et « donné en nostre chastel de la Roche » qui lui ordonne « de choisir six hommes non sujets aux armes par Jehan II de Rohan, ordonne « de rediffier battir et fortif- pour résider en habit de guerre au chasteau de la Roche- fier nostre place et chastel de la Roche Morice ». Morice, qui auront chacun cent sols par mois ; et comman­ Après cette restauration, le silence se fait sur l'histoire dement audit de Rosnyvinen de s'y tenir et d'y commander, du château, dont la vocation militaire s'estompe malgré les et ordre au capitaine dudit lieu de lui en laisser les clefs. travaux entrepris. Donné à Rennes le 24 janvier 1484 ». Le titre de capitaine y devient d'ailleurs plus honorifique Puis, le 4 septembre suivant, le duc et Jean II se réconci­ que guerrier et, devant s'absenter fréquemment du château, lient. Le vicomte donne alors le commandement du château Perceval de Lezormel nomme — le 26 novembre 1502 — son à son ami Perceval de Lezormel. neveu, Olivier de Lezormel, comme adjoint et lieutenant de Un acte ducal daté du 16 décembre 1486 confirme que son poste. Celui-ci exercera cette fonction jusqu'en 1506. le guet existe à ce moment à la Roche Maurice : « Tout ainsi En 1572, le roi Charles IX érige le vicomte de Léon en qu 'il a et joist à ses chasteaulx, place et forteresse de La principauté. Jusqu'à la Révolution, c'est l'héritier des Rohan Rochemorice... ». qui, traditionnellement, portera ce titre. En 1487, Jean II se range à nouveau du côté de la France En 1577, Troilus de Mesgouez porte les titres de comte contre le duc de Bretagne — qui confisque une fois encore de Kermoullec et de la Joyeuse-Garde et marquis de Coetar- la Roche-Morice. En 1488, Rohan revient en Bretagne à la moal et de la Roche-Morice. Le vicomte René II de Rohan- tête d'une armée royale française et réoccupe son château de Gié l'accuse d'usurpation de titre et un long procès s'ensuit. la Roche. Le duc François II meurt le 9 septembre 1488 et Quinze ans plus tard — en 1592 — ce qui subsiste du châ­ sa fille Anne devient alors duchesse de Bretagne. teau est pillé par le ligueur Guy Eder de la Fontenelle. Cet avènement n'arrête pas la lutte. Les troupes de Char­ Puis c'est à nouveau le silence autour de la forteresse — les VIII guerroient toujours en Bretagne. Mais le roi décide que Marguerite de Rohan cite pourtant dans un aveu du 8 août d'abandonner La Rochemorice afin de concentrer ses troupes. 1642. Avant de partir — en 1490 — la garnison française démantèle la forteresse — « sauf une tour de défense ». * L'année suivante, le roi autorise Rohan à restaurer le châ­ teau. Il semble que l'on abandonne bientôt ce projet, puisqu'en 1492 le droit de guet est contesté par les vassaux à cause du En 1672, après avoir visité la région, Jouvin de Roche- mauvais état de la place. Le 12 octobre, le roi décide « sur fort parle des « belles prairies que l'on côtoie en allant à La le bon motif que la démolition en avait été faite que pour son Roche où il y a château ». service manda à ses officiers de Lesneven de faire jouir ledit A ce moment, l'édifice est assurément en fort mauvais seigneur de son droit de guest paisiblement et sans troubles, état et, en 1678, il ne sert plus que de prison : « Le voyerféodé lesquels officiers feront lire et publier ces lettres aux plaids et héréditaire de la terre seigneuriale et chatellenie de Daou- de leur juridiction ». las » est « tenu de garder les prisonniers de ladite cour jusqu 'au lendemain de leur prise à l'heure de prime, et pour lors, lesdits officiers sont obligés de prendre dudit voyer les tant dans les objets suivans ; savoir... à la Roche, commune dits prisonniers pour les mener aux prisons de la Roche-Morice de la Roche... l'emplacement du ci-devant château de la avec l'aide de quelques habitants de Daoulas ». Roche... ». En 1684, peu avant sa mort, Marguerite de Rohan nomme Puis, le 22 novembre 1814, le baron Louis Henry Janzé l'écuyer Jean Corran, seigneur de Kergoat, « enseigne de Lan- revend à Alexandre de Rohan Chabot, duc de Rohan, « tous derneau, Joyeuse-Garde et La Roche-Maurice ». les biens immeubles et droits qui composent le domaine de Un aveu rendu par le duc Louis Ier de Rohan Chabot au Léon, consistant, savoir... à Laroche, commune de Laroche... roi Louis XIV en 1695 indique que « les chasteaux et forte­ l'emplacement du ci-devant château de Laroche... ». resses de La Roche-Morice et Joyeuse-Garde estoient à demi- A ce moment, les souterrains qui — d'après Miorcec de ruinées avec leur tours, douves, fossez, remparts, terrasses, Kerdanet — passaient sous l'Elorn, sont bouchés pour éviter espérons, guerittes, chapelles et colombiers ». d'éventuels accidents « qu'une imprudente curiosité pourraient En 1719, la ruine est totale et le savant Deslandes en occasionner ». voyage dans la région ne retrouve à la Roche-Maurice que En 1832-1835, le chevalier de Fréminville décrit les ves­ des « débris de tours » et des souterrains qu'il attribue à l'anti­ tiges de la place forte : « D'abord le donjon. Au sud, une grosse quité celte. tour carrée. A l'angle opposé de cette tour une autre déforme Au début du XIXe siècle, ce qui subsiste du château sert triangulaire. Une troisième tour carrée fondée sur un monti­ de carrière. D'ailleurs, à ce moment, le 7 fructidor an X (25 cule attenant au rocher a dû faire partie de l'enceinte exté­ août 1802) Louis Antoine Auguste de Rohan Chabot vend ses rieure (est). Enfin sur l'enceinte, deux énormes tours rondes biens de Bretagne à Louis Henri Janzé — et, parmi ceux-ci : qui défendaient le portail (sud)... ». « Le domaine de Léon, dont les trois chefs lieux sont Lander- En 1843, les continuateurs d'Ogée indiquent que « les rui­ neau, Daoulas, Coetmal, département du Finistère, consis- nes sont situées dans un site très pittoresque, assises sur des rochers abrupts qui dominent de 200 pieds la route de Brest à Paris en l'endroit ou elle traverse l'Elorn ». *

* * Quatre ans plus tard — en juin 1847 — le jeune Gustave Flaubert parcourt la Bretagne à pied avec son ami Maxime du Camp. Il décrit les lieux dans son livre « Par les champs et par les grèves » : « Le château de la Roche-Maurice était un vrai château de Burgrave, un nid de vautours au sommet d'un mont. On y monte par une pente presque à pic, le long de laquelle des blocs de maçonnerie éboulés servent de marches. Tout en haut, par un pan de mur fait de quartiers plats posés l'un sur l'autre et où tiennent encore de larges arcs de fenêtres, on voit toute la campagne : des bois, des champs, la rivière qui les sépare LA ROCHE-MAURICE en se répandant au milieu. les ruines du donjon, (photo C. Floquet -1981). « Un fragment d'escalier mène à une tour démantelée. D'ailleurs, M. Jehan Bazin a parfaitement décrit l'état Ça et là les pierres sortent d'entre les herbes, et la roche se actuel de ce qui reste du château. Ecoutons-le : montre entre les pierres. Il semble, parfois, qu'elle a d'elle- « Ses ruines dominent de 70 mètres la jolie vallée de même des formes artificielles, et que la ruine, au contraire, l'Elorn et attirent toujours les regards admiratifs du plus elle s'éboule, revêt des apparences naturelles et rentre promeneur... dans la matière. « Il n 'est pas contestable que l'édifice central fut le don­ « D'en bas, sur un grand morceau de muraille monte un jon ; déforme à peu près carrée avec ses murs de 2,50 mètres lierre ; mince à sa racine, il va s'élargissant en pyramide ren­ d'épaisseur. La construction en est très grossière : grandes versée et, à mesure qu 'il s'élève, assombrit sa couleur verte lames schisteuses sommairement liées. A l'intérieur, une salle qui est claire à la base et noire au sommet. A travers une ouver­ ruinée avec retombées de voûtes en ogives, une porte d'entrée, ture dont les bords se cachaient dans le feuillage, le bleu du donnant à l'Ouest, avec son encadrement de pierres taillées ciel passait ». et, enfin, un reste de cheminée (côté est). Cette salle corres­ pondait à la « grand salle » qui servait, à la fois, de salle à * manger, de lieu de réunion des vassaux et de tribunal. * * « La porte précitée s'ouvre très au-dessus du niveau du sol extérieur et devait être, comme d'habitude, reliée par une En 1867, d'après le Guide-Hachette, on peut encore voir passerelle en bois à un chemin de ronde qui courait au som­ « quelques parties du donjon carré, circonscrit par une met du rempart de l'enceinte. Les étages supérieurs du don­ enceinte extérieure où sont les restes de quatre tours... Ces jon se sont écroulés. Ils servaient de logement. ruines couronnent des rochers abrupts qui s'élèvent au-dessus « Au-dessous de la « grand salle », des étages en sous- de la route, à l'entrée d'un pont jeté sur la rivière d'Elorn ». sol, un ou deux probablement creusés à même le roc, servaient En 1860, Vincent Audren de Kerdrel visite les ruines de magasin et de prison... Les éboulements importants les ont « sans ouverture, ni mâchicoulis », et indique qu'elles sont comblés. Seul un déblaiement permettrait de vérifier cette struc­ « placées dans une position de nid d'aigle ». ture, classique dans tous les donjons de cette époque. En 1906, Hervé de Halgouët nous dit que le titre nomi­ « Sur le mur nord du donjon, une trace très nette d'enra­ nal de prince de Léon « a heureusement survécu et qu'il reste cinement de toiture à deux pentes, indique qu 'il y avait là, encore l'apanage de l'héritier principal des ducs de Rohan ». autrefois, un édifice. Au XIIIe siècle, le logis du seigneur était En 1926, divers ouvrages annexes du château sont décou­ habituellement accolé au donjon. Etait-ce donc là la demeure verts. C'est en bâtissant une maison au sud du château et à des vicomtes de Léon ? son pied, au lieu-dit « le Toul » (le trou), qu'on met à jour « A l'extérieur du mur sud, traces de contreforts peu sail­ un couloir de 5 à 6 mètres de long, qui débouche sur deux lants, puis, à ses pieds, vestiges de murailles qui constituaient pièces « bien maçonnées ». M. Jehan Bazin pense que ces la « chemise » de protection du donjon. Voilà pour le donjon « souterrains » ne sont que des « casemates ou galeries bas­ proprement dit. ses d'une de ces tours enfouies sous les éboulements qui, peu « Au nord de la forteresse, les racines d'un ouvrage en à peu, ont comblé le fossé... l'une était reliée par le haut à forme d'éperon dont les superstructures se sont écroulées, sur­ l'étage supérieur de la tour. Ces chambres-casemates ont été plombe à pic la butte rocheuse. aménagées par la suite pour servir de donjon... Lors du « Au nord-est, base de tour carrée, prolongée vers l'est déblaiement, on a découvert, outres des ossements humains par un ouvrage qui paraît attenant. et d'animaux, de nombreux boulets de pierre ». « La position stratégique de la Roche était exceptionnelle. Le château surveillait, à la fois, deux profondes vallées, celle BIBLIOGRAPHIE de l'Elorn au nord, et celle du ruisseau, le Morbic, à l'ouest. Le site de la forteresse peut être comparé à une presqu 'île que VINCENT AUDREN DE KERDREL : Ex.cursion à La Roche-Maurice - Asso­ ciation Bretonne - Prud'homme, Saint-Brieuc - 1880 son isthme raccordait, au sud, qvec les hauteurs dominantes. H. URSCHELLER : A travers la Bretagne - La Roche-Maurice - 1891 C 'est sur cet isthme que s'est construite, l'agglomération. DELORME : La Roche-Maurice - Bulletin de la Société Académique de Brest « A l'époque où le château était en service, l'isthme était - 1903-1904 coupé par un profond fossé qui le défendait du côté sud. A KERNEIS : Le château de Roch'Morvan (La Roche-Morice) d'après les Chro­ « C'est probablement sur ce côté que s'élevaient les deux niques de Froissait - Bulletin de la Société Académique de Brest 1907-1908 - Imprimerie Commerciale de La Dépêche, Brest - 1909 grosses tours dont parle Fréminville et qui flanquaient la seule JEHAN BAZIN : Le château de La Roche-Maurice - Presses Libérales du Finis­ porte d'accès ». tère, Brest - 1964. Le château de La Roche-Maurice - Association Bretonne - Les Presses Breton­ * nes, Saint-Brieuc - 1971 JEHAN BAZIN : Landerneau, ancienne capitale de la principauté de Léon — * * Seper, Rennes - 1973 La Roche-Maurice se trouve dans le Finistère Nord à proximité de Landerneau, au nord de la route D. 164 qui relie Landerneau à Sizun et — et sur la rive gauche de Elorn l'Elorn. La masse imposante des ruines de la forteresse qui défen­ dait jadis la ville de Landerneau domine toujours la vallée de l'Elorn, du haut d'un piton de rochers abrupts, à quatre kilo­ mètres en amont de Landerneau. L'endroit appartenait à l'actuel duc de Rohan qui l'a cédé récemment au Département du Finistère. L'Association « Mein Breiz » y a entrepris des fouilles méthodiques et une Associa­ tion locale de défense du château a été créée pour en protéger les vestiges. Cette Association a également procédé récem­ ment à divers travaux de consolidation et le classement parmi les Monuments Historiques a été demandé. Les ruines sont actuellement facilement accessibles par le côté sud ou côté agglomération. Elles sont placées à une centaine de mètres au nord-ouest de l'église. On voit d'abord les vestiges bien apparents de la grosse tour ronde de l'est, puis on accède au pied du donjon carré perché sur le roc. Un escalier aménagé dans l'épaisseur du mur à l'angle sud-est est encore partiellement utilisable. De là on peut gagner l'éperon nord d'où l'on a une vue grandiose sur la vallée de l'Elorn et toute la région. LA ROCHE MA URICE (d'après H. Sicard).

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Croquis établi d'après un releva effectué par Monsieur Tons de Kort.