Extraits de presse

La barbe d’Olympe de Gouges et autres objets de scandale, Eli Flory

Presse écrite

Ouest-France, 6 mars 2015 Pour Eli Flory, une femme libre est scandaleuse

Quand une femme est- elle scandaleuse ?

Une femme devient scandaleuse quand elle déroge aux règles imposées à son sexe. Et que cette insoumission fait du bruit. Aujourd'hui, personne ne dirait de Marie Curie qu'elle est scandaleuse. Elle l'a été, bien malgré elle, car elle s'est illustrée dans un domaine alors réserve aux hommes. Sarah Bernhardt, elle, a bien compris comment faire parler de soi contre la morale d'une époque. Joséphine Baker aussi était une exploitante du scandale. Elle était consciente d'être un peu hors- normes.

Les femmes que vous avez choisies sont principalement des femmes libres. Et donc scandaleuses d'après la société ?

Tout dépend de la société où les femmes évoluent. Pour certaines, on a oublié le parfum de scandale. Olympe de Gouges était une vraie pure et dure scandaleuse à cause de son combat pour les femmes. Aujourd'hui, elle n'apparaît plus comme scandaleuse. Elle est même récupérée pour illustrer une forme de combat contre les inégalités entre les hommes et les femmes. Une femme scandaleuse est une femme qui se démarque de la doctrine d'une époque. C'est une combattante. De nos jours, pour être scandaleuse, il faudrait sortir de la norme. Or, la norme va dans le sens de l'émancipation des femmes, même s'il y a encore beaucoup de combats à mener. La liberté est quelque chose qui n'est jamais acquis.

Le groupe russe Pussy Riot, les Femen, les Chiennes de garde... sont-elles scandaleuses ?

Je me suis posé la question. J'avais travaillé sur des notices, aussi bien pour les Pussy Biot que pour les Femen. Je ne les ai pas introduites dans mon livre. Je n'étais pas assez aguerrie sur le sujet pour traiter de ces femmes-là. Bien d'autres femmes, d'autres époques, ne sont pas dans le livre, bien qu'elles aient fait scandale. L'existence des Femen, des Chiennes de garde n'est pas un scandale. Elle est plutôt rassurante. J'aborde le MLF (Mouvement de libération de la femme) dans mon livre. Il faudrait un MLF dans tous les pays du monde.

Quel message souhaitez-vous apporter à Quimperlé ? Je ne suis pas une fille de message. C'est une forme d'énergie que je veux apporter à chacun et chacune. Je conçois tout à fait qu'un homme puisse être féministe. Je pense même que l'avenir du féminisme, c'est l'homme. Qu'est-ce que c'est être femme aujourd'hui, en France, ou a 200 km, ou encore plus loin ? Si toutes les femmes du monde avaient un accès à l'éducation libre, laïque, et la gestion du plaisir et des naissances, elles pourraient s'émanciper. C'est dans ce sens-là maintenant que j'ai envie de travailler. La guerre des sexes est dépassée. Montrer ce qu'est la voie de la liberté, c'est s'émanciper de la question du genre. Ça marche aussi pour les hommes. La liberté viendra des femmes. La liberté progresse quand les minorités se rebiffent. Et les femmes appartiennent encore à une de ces minorités. À chaque fois que le monde a avancé, c'était grâce une révolte des minorités. Recueilli par Béatrice Griesinger.

Nord-Eclair, 17 juin 2014

Un livre

LA BARBE D'OLYMPE DE GOUGES ET AUTRES OBJETS DE SCANDALE

Eli Flory

On les connaît pour leurs excès, leurs coups de gueule, la trace qu'elles ont laissée dans l'histoire. Brigitte Bardot, Jeanne d'Arc, Mata Hari... Scandaleuses ? Provocatrices ? Ici l'auteure (une femme !), montre que ces grandes dames le sont devenues souvent par hasard. Loin des biographies monotones, ces petites anecdotes - souvent très drôles -, associées aux objets du scandale se dévorent.

Une bouffée d'oxygène ! C. DY

Femme actuelle, mai-juin 2014

La Barbe d'Olympe de Gouges et autres objets de scandale

Elles s’appellent Catherine de Médicis, Brigitte Bardot, Marie Curie, Jeanne d'Arc, Agnès Sorel, Mata Hari, Zelda Fitzgerald…

Elles ont traversé les siècles, les milieux, les métiers comme reine, actrice, scientifique, sainte, courtisane, espionne, romancière. Leur point commun ? Un combat incessant contre les préjugés et les biens pensants de leur époque.

On a aimé…

Ces 56 femmes, a priori très différentes, plus ou moins connues, sont croquées de façon condensée, mais très vivante.

Lectures, mai 2014

Ayant acquis une signification un peu vague, le terme de « scandaleuses » utilisé pour désigner certaines femmes concerne en fait des femmes plutôt inclassables Au-delà des siècles, des cultures et des frontières elles se sont lancées dans des voies particulières qui les mettaient en rupture avec les mentalités de la société dans laquelle elles vivaient Sous ce qualificatif, Eli Flory a rassemblé des personnages bien différents tels que Jeanne d'Arc ou Marie Curie, Brigitte Bardot ou Agnès Sorel, Catherine de Médicis ou Zelda Fitzgerald et bien d'autres Ces femmes si différentes ne sont pas nécessairement des provocatrices mais toutes ont manifesté un activisme les concernant personnellement. En commentant l'existence et les actes de ces « scandaleuses », Eli Flory met en résonance des personnalités féminines qui, sans avoir pu se connaître ou se côtoyer, ont eu en commun des comportements indépendants qui allaient à l'encontre des normes du temps. V S

Cosmopolitan, avril 2014

Des actions, des idées pour que la Journée de la femme dure toute l’année.

RESPECTER Coco Chanel, Brigitte Bardot ou Mae West : toutes ont été jugées scandaleuses parce qu’elles comptaient bien vivre comme elles l'entendaient. Dans « La Barbe d'Olympe de Gouges », illustré par Vaïnui de Castelbajac, Eli Flory brosse ces personnages avec une plume aussi vive, libre et réjouissante que son sujet.

Sophie Hénaff

Le Parisien Magazine, 7 mars 2014

Essai

Filles à scandale

Une amante promue au rang de souveraine ? Enceinte de Charles VII, Agnès Sorel (vers 1422- 1450) passa du statut de dame de compagnie à celui de maîtresse, puis de conseillère, à mesure qu'elle s'arrondissait, le roi ne jurant plus que par le ventre rebondi, les épaules et la courbe de ce sein illégitime. Enhardie par cet amour, la belle porta des hennins de plus en plus protubérants Ces chapeaux pointus avaient été mis à la mode par Isabeau de Bavière (1371-1435) « pour masquer sa calvitie », dirent les mauvaises langues, « pour défier Dieu », prédirent les autres. Ces coiffes ont-elles porté malheur à Agnès, morte avant 30 ans après avoir donné au roi une quatrième fille ? Elles font en tout cas partie, à côté de la pipe de George Sand ou des bolides de Françoise Sagan, de ces accessoires scandaleux répertories par Eli Flory dans une réjouissante rétrospective de l'audace féminine.

Isabelle Spaak

Jeanne Magazine, mars 2014

Et aussi le coup de cœur de Jeanne : La barbe d’Olympe de Gouges et autres objets de scandale d’Eli Flory. http://www.jeanne-magazine.com/le-magazine/2014/03/05/zoom-sur-les-pages-livres-de- jeanne-magazine_701/

Madame Figaro, 21 février 2014

ICÔNES POUR TOUS

De Ninon de Lenclos, alias « Notre Dame des Amours », à George Sand, que Flaubert appelait « Chère maître », une écrivain qui n'a pas la langue dans sa poche revolver aligne une galerie de femmes sensass, activistes du moi, qui nous rendent fières d'appartenir au même genre, bon ou mauvais !

Élisabeth Quin

La Marseillaise, 9 février 2014

Femmes. Elles ont assumé leur nature originelle, avant d'être reines, savantes, saintes, criminelles, ou pop stars.

Je serai moi ou personne

Elles sont plus de cinquante à avoir fait désordre, école, des affaires, le ménage, ou mauvais genre. En un mot, elles sont « femmes » et participent à La Barbe d'Olympe de Gouges (et autres objets de scandale) – un livre écrit par Eli Flory et illustré par Vaïnui de Castelbajac. Il nous est impossible, bien entendu, de citer toutes ces dames. Aussi commençons-nous cet article en demandant pardon aux oubliées. Parmi celles qui font désordre : Christine de Suède, aux jupes relevées et au verbe haut ; Catherine de Russie, pour laquelle le plaisir l'emportait sur le devoir ; Sœur Sourire et son bégayant "Dominique, nique, nique". Parmi celles qui font école : Ninon de Lenclos, "au cerveau sexy et à la parole aphrodisiaque" ; Madame de Tencin, dont le lit fut son terrain de jeu favori ; Marie Curie, traitée de putain pour une lettre qu'elle aurait écrite à Paul Langevin, ancien élève de son défunt époux. Parmi celles qui font des affaires : Agustina Otero qui, de Belle et riche, a fini fouillant les poubelles ; Mata Karl, qui se rendit à la mort comme à un dîner mondain, avant que d'envoyer un baiser au peloton d'exécution ; Madame Claude, grande prêtresse de la et "label de qualité comme le sont les médailles d'or aux poulets fermiers". Parmi celles qui font des scènes : Isadora Duncan, étranglée par son écharpe de soie, captive des roues de son Amilcar Grand Sport ; Mae West, dont le popotin se plut à tanguer tel "un canot de sauvetage arrimé à un cargo par temps de gros grain"; Joséphine Baker, qui réussit à grimacer sans s'enlaidir et à s'ensauvager sans perdre son élégance. Parmi celles qui font des histoires : George Sand, accro au chibouk, au narguilé et à la pipe philippine ; Simone de Beauvoir, classée par Mauriac dans la liste des "connes pédantes et piaillantes, qu'il faudrait mettre dans une garderie d'enfants à torcher les derrières et à vider des pots" ; Françoise Sagan, qui brisa "l'omertà dans un milieu où l'on ne se soucie que du qu'en-dira-t-on et de sa respectabilité". Parmi celles qui font tapisserie : Agnès Sorel, amante promue au rang de souveraine, et dont "les hennins rivalisèrent avec les flèches des clochers" ; Coco Chanel, cette Mademoiselle bien décidée à libérer la femme d'une mode qui la transformait en "paquet-cadeau" ; Mary Quant, grâce à laquelle la jupe, devenue mini, "ne balaie plus les trottoirs mais les préjugés".

Celles qui font le ménage : La Voisin, dont le "carnet-clients" contenait près de quatre mille noms d'amateurs de poison ; Violette Nozière qui, pour avoir demandé à ses parents d'avaler des tubes de Soménal, entra dans l'Histoire par la porte de la cour d'assises ; Sada Abe, la geisha dont le sexe tranché de son amant fut une relique sacrée.

Parmi celles, enfin, qui font mauvais genre : Rosa Bonheur, peintresse (Eh oui ! le mot existe. Si l'écrivain Jean Lorrain n'était pas mort depuis plus de cent ans, il vous le confirmerait), peintresse, disions-nous, animalière, au sexe indéfinissable et pour laquelle le mariage était pire que le joug sur l'échiné des bovins ; Coccinelle et Maud Marin dont le transformisme, même s'il n'émane point des travaux de Lamarck et de Darwin, prouve que rien n'est immuable.

Vous savez quoi ? Nous avons bien ri. À lire.

A-Marie Mitchell

Livres Hebdo, 7 février 2014

Les scandaleuses

Eli Flory tourne des compliments à quelques femmes remarquablement libres. « Elles font », au choix, « des histoires », « le ménage », « mauvais genre », « tapisserie », « école », désordre », « des affaires » ou des scènes » : sous ces catégories fantaisistes, l'agrégée de lettres Eli Flory a regroupé, brouillant -, les lieux et les époques, des spécimens précisément hors catégorie, une soixantaine de femmes « scandaleuses » que l'auteure, qui souligne la plasticité de la notion, définit ainsi : « Ces femmes ont en commun de s'être lancées dans la vie sans autre filet que cet activisme du moi dont chacune a usé à sa façon ». « À l’inverse de la provocatrice, la scandaleuse vit pour elle et non au travers du regard des autres ». Femmes monstrueuses de liberté, à l'image de la révolutionnaire Olympe de Gouges, l'auteure de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, pasionaria de l'égalité qui estimait qu'une femme qui avait le droit de monter à l'échafaud devait avoir celui de monter à une tribune.

Sagan, Colette, Beauvoir, Bardot, Chanel… - certaines croisées dans l'imposant Dictionnaire universel des créatrices récemment publiées aux éditions des Femmes (I) - côtoient des échevelées plus obscures : Coccinelle, « née femme avec un sexe d'homme », Marguerite de Porete « clergesse laïque » brûlée le 1er juin 1310 en place de Grève, Valtesse de la Bigne… Nombre d'entre elles partagent la caractéristique d'avoir repoussé les frontières de leur sexe, comme Christine de Suède qui « en rendant les distinctions indistinctes troubl[ait] le genre ». Eli Flory ne se contente pas de rédiger de sèches notices biographiques mais offre à ces femmes de véritables compliments élégamment tournés, façon chanson de geste, ponctués par les illustrations de Vaïnui de Castelbajac, où chacune de ces glorieuses est associée à un objet totem ou à un élément fétiche qui signent leur identité : le mobilier pornographique de Catherine II de Russie, le lit à baldaquin de Frida Kahlo, le répertoire de Grisélidis Réal, la salamandre de Zelda Fitzgerald ou la Dyane rouge de Gabrielle Russier, coupable d'avoir aimé un garçon qui n'était pas de son âge et qui, avant d'ouvrir le gaz, a télégraphié a son avocat ces derniers mots : « Merci. Vive le soleil. Antigone. »

Véronique Rossignol

Internet

Onirik.net, 10 juin 2014

On arrive souvent à dire que les femmes ont aussi eu leur place dans l’Histoire mais que seul les grands hommes se distinguent de celle-ci.

Le livre qu’on tient ici entre ses mains n’est pas un roman mais plutôt un catalogue de femmes qui ont marqué leur temps, qui ont fait parler d’elles. On connaît parfaitement certains noms, d’autres beaucoup moins, mais on se fait néanmoins un plaisir de les découvrir. En effet ce livre est divisé en plusieurs thèmes, nous avons celles qui font désordres, celles qui font des affaires, celles qui font mauvais genre et beaucoup d’autres. On retrouve dans la plupart d’entre elles un fondement de la femme actuelle, une pierre à un édifice, à une émancipation. Sur un texte qui peut faire un peu moins d’une page jusqu’à deux ou trois, on découvre la vie d’une de ces femmes. Elles font scandales dans leur genre, elles sont des femmes qui ne se laissent enfermer par des dictâtes et frayent leur chemin. Les textes sont bien écrits, on suit une vie en quelques mots et ces mots semblent justes.

Cet ouvrage se lit de différentes manières, on peut le découvrir par touche, une femme aujourd’hui, une suivante le lendemain, ou bien toutes l’une à la suite de l’autre. On apprend certaines anecdotes et faits historiques, on nous donne une vision de la femme dans différentes sociétés et époques. Cet ouvrage est aussi très intéressant de ce niveau-là.

Toute la culture.com, 8 mars 2014

Affublées à tort du qualificatif fourre-tout de « scandaleuses » par leurs détracteurs, ces femmes qui ont toujours bravé les interdits dérangent car elles ont la fâcheuse habitude de vivre pour elles-mêmes et non pour les autres…Fidèles à elles seules, inclassables, elles ont de tout temps dérangé l’ordre moral, outré hommes et femmes tout autant que fasciné leurs contemporains.

Car si la femme libre de toutes entraves sociales et familiales scandalise et fait couler l’encre, elle est aussi objet de désir, de convoitise et fait chavirer les cœurs, masculins et féminins. Une dichotomie qui rejoint la conception ancestrale de la féminité : une chose mystérieuse et inaccessible qui effraie tout autant qu’elle attire. Et lorsqu’elle sort des sentiers battus, qu’elle s’affranchit du regard de l’homme, elle devient le bouc émissaire idéal, le Mal incarné.

Eli Flory parcourt les siècles et nous raconte comment le mobilier classé X de Catherine II de Russie, les contraceptifs d’Aspasie, le répertoire de Grisélidis Réal, la pipe de Georges Sand, les cheveux courts de Mathilde de Morny et bien d’autres « objets de scandale » ont outré et cloué au pilori des femmes d’exception. Que ce soit par leur façon de considérer leur propre condition féminine, par leur sexualité assumée, leur mépris des conventions et leurs amours désobéissantes, chacune a su, à sa manière, suivre le fil de son existence avec courage et détermination. Certaines l’ont payé du bûcher ou de la guillotine, d’autres ont subi trahison et lynchage public.

En huit chapitres aux titres évocateurs tels que « Elles font désordre », « Elles font tapisserie », « Elles font des scènes » ou « Elles font mauvais genre », l’auteur passe au crible pas moins de 56 personnalités féminines qui ont marqué l’Histoire. Des tableaux courts qui ne suivent aucun ordre chronologique et qui vous baladent de l’une à l’autre avec comme seul fil rouge celui de la liberté. La liberté de se battre pour ses convictions, de vivre selon sa propre loi sans se soucier du qu’en-dira-t-on, la liberté de refuser l’oppression, tout simplement. Une tâche bien difficile quand on est née sans pénis… même en 2014.

Fascinant et rigoureusement documenté, mêlant la petite histoire à la grande, le livre d’Eli Flory est une véritable mine d’or. Un livre revigorant qui tombe à pic dans le contexte si sombre de recul terrifiant du droit des femmes que l’Europe connaît aujourd’hui. Un beau cadeau à offrir pour faire un joyeux pied de nez à la fameuse « Journée de la femme »…

Eve le blog, 24 février 2014

Trois bouquins qui font du bien… Au leadership au féminin !

Portraits décoiffants de femmes de tête : La barbe d’Olympe de Gouges… Et autres objets de scandale, d’Eli Flory – Alma éditeur

Olympe de Gouges au Panthéon ? Si c’est pour se souvenir que parmi ―les hommes‖ à qui la patrie (voire l’humanité, allons-y franchement) doit reconnaissance, il y a aussi des femmes, pourquoi pas ! Mais gare à l’enterrement de première classe, car selon l’écrivaine Eli Flory, les plus flamboyantes des figures féminines de l’histoire sont aussi des contre-institutionnelles, des provocatrices et des inattendues… Bref, des scandaleuses ! Qu’elles fassent de la politique ou des affaires, de la danse ou de la haute couture, l’œil de biche à la caméra, la voix de velours derrière le micro, du cabaret en tutu de banane, de la peinture ou des recherches en blouse blanche, les Scandaleuses d’Eli ont toutes, un jour ou l’autre, dit haut et fort ―Je suis et vais être moi-même‖ ! Un leitmotiv qui forcément résonne avec celui du Programme EVE. Narrés d’une plume alerte, manifestement libérée de l’injonction de se conformer à un style convenu pour exprimer sa propre voix d’auteure, les destins éblouissants de ces femmes modèles et contre-modèles à la fois constituent assurément une lecture réjouissante.

Marie Donzel http://www.eveleblog.com/actualite/trois-bouquins-qui-font-du-bien-au-leadership-au-feminin- 4/

Terres de femmes, janvier 2014

« LE SOLEIL NI LA MORT NE SE PEUVENT REGARDER FIXEMENT »

Alma éditeur cherche des talents. C’est ce qu’annonce, sur la Toile, le bandeau de la maison d’édition. Avec Eli Flory, et sa très décoiffante « galerie de portraits », La Barbe d’Olympe de Gouges et autres objets de scandale, la recherche est aboutie. Talentueuse, Eli Flory l’est assurément. Son dernier livre, qui allie avec brio fond et forme, se lit dans la jubilation. On rit des trouvailles de cette « scandaleuse » new-style, qui ose rajeunir et vivifier, dans une écriture quelque peu délurée mais nonobstant très tenue, nos chères icônes, sans pour autant vouloir les faire entrer de force dans un Panthéon post-moderne exclusivement réservé à la gent féminine. « Pas question, écrit Eli Flory en préambule, d’entrer dans ce livre comme dans un mausolée au fronton duquel serait inscrit « Aux grandes dames l’Humanité reconnaissante ».

Que l’auteure se rassure, après cette première de couverture percutante par son côté « flashy », la porte non dérobée par laquelle je suis entrée dans cet étrange gynécée, c’est la table des matières. Elle donne le ton. Elle signe l’envol. La déclinaison anaphorique des huit titres est, à elle seule, irrésistible. « Elles font désordre / Elles font école / Elles font des affaires / Elles font des scènes / Elles font des histoires / Elles font tapisserie / Elles font le ménage / Elles font mauvais genre ». Et la curiosité est happée illico par le défilé des égéries dont l’auteure porte le flambeau et pour lesquelles elle a tant « aimé écrire ».

Pour chacun des chapitres, en effet, s’égrènent des noms de femmes. Certains plus connus que d’autres. Mais qu’importe. Elles sont là, présentes, à égalité sous la plume vive d’Eli Flory. Femmes de lettres et de sciences, artistes, reines et cousettes, empoisonneuses et nonnains, dames de cour et putains, entremetteuses et espionnes… Elles traversent le temps et se côtoient dans l’aventure à laquelle elles ont été conviées. La Voisin voisine avec Violette Nozière et Catherine de Médicis. Lee Miller s’interpose entre Frida Kahlo et Mary Quant. Simone de Beauvoir trouve place entre Zelda Fitzgerald et François Sagan. Catherine II de Russie précède Olympe de Gouges qui précède Rosa Parks qui précède Billie Holiday… De cette joyeuse farandole, surgissent, comme au plus fort des grandes « manifs de 68 », les objets fétiches brandis par chaque révolutionnaire. On pourrait aussi penser, plus sagement, à ces puzzles pour enfant, dans lesquels il faut attribuer à chaque personnage l’objet qui le caractérise. Ainsi de la « barbe » pour Olympe de Gouges, de l’épée pour Ninon de Lenclos ; des voiles pour Isadora Duncan, de la toison pour Joanna Hiffernan, des cheveux courts pour Mathilde de Morny et des boules presse- papiers pour Colette ; de la pipe pour George Sand, de la guitare pour Sœur Sourire, de la lyre pour Sappho. Et pour Billie Holiday, un bien « étrange fruit ». Un chapitre se clôt avec Gabrielle Russier et sa Dyane ; un autre avec Brigitte Bardot et ses bébés phoques. Le dernier avec Maud Marin et son Dalloz. La liste est loin d’être close. Car elles sont cinquante-six à mener la sarabande. Et à entraîner le/la lecteur(trice) dans leur joyeux tohu-bohu. Car même si la mort est présente, crimes-suicides-sang-bûcher-poisons-échafaud… (les morts sont tout aussi variées que les vies et les attributs de chacune), Eli Flory s’arrange pour faire de l’écriture un véritable plaisir. Le style est vif, alerte, enlevé, enjoué. Le travail sur la polysémie, constant. L’érudition de la jeune agrégée de lettres, permanente. Dans un double « Effeuillage indicatif » — ouvrages généraux/ouvrages particuliers —, l’auteure dresse la liste des œuvres consultées et lues afin d’entrer au plus proche en connivence avec ses dames.

Optant pour la brièveté et pour la rapidité du trait, l’auteure choisit de passer de l’une à l’autre de ses inspiratrices, faisant fi de tout souci chronologique. De sorte que les chapitres se suivent sans se ressembler. Chaque tableau est un tableau vivant, souvent cruel. Mais souvent aussi croustillant. Ainsi de ce final du chapitre quatre qui donne son titre au livre et coiffe l’ensemble des dames, « La barbe d’Olympe de Gouges » : Prison ne rime pas pour elle avec bâillon. Du fond de sa geôle, elle parvient encore à faire afficher dans un pamphlet dénonçant les conditions de son incarcération. Le 2 novembre 1793, à l’aube, elle est jugée, sans l’avocat qu’on lui a refusé, et condamnée à mort par le Tribunal révolutionnaire pour avoir rédigé des écrits « attentatoires à la souveraineté du peuple ». De son côté, elle a fait son testament : « Je lègue mon cœur à la patrie, ma probité aux hommes, mon âme aux femmes. » Le lendemain, elle monte sur l’échafaud. Les hommes qui voulaient offrir à cette femme une « lame à raser la barbe » en ont trouvé une à sa mesure. Robespierre, avant d’y passer à son tour, teste sur elle le couperet de la guillotine. La prophétie d’Olympe se réalise : « Il n’y a qu’au pied de l’échafaud que les hommes et les femmes sont égaux. » Au dernier moment, la révolutionnaire, qui a tout autant la passion de la coquetterie que celle de l’égalité, réclame un miroir : « Dieu merci, mon visage ne me jouera pas de mauvais tours ! » Un témoin anonyme le confirmera : « Jamais on n’avait vu tant de courage réuni à tant de beauté. »

Retour à la première de couverture, dessinée par Vaïnui de Castelbajac, artiste à qui l’on doit — dans un style bon enfant et plutôt naïf — toutes les illustrations de l’ouvrage. Une bouche rouge- baiser émerge d’une inquiétante barbe noire. Alliant dans un même ovale (celui d’un visage rendu invisible par la surabondance du poil) mâle et femelle, cette illustration transgenre annonce — implicitement — ce qui, chez ces dames, a provoqué l’esclandre. Toutes à leur manière, avec les armes disponibles à leur époque, se sont battues pour conquérir la liberté revendiquée par leur sexe. Et le sexe, c’est bien connu, a « ses raisons que la raison ne connaît pas ». Du moins la raison des hommes. N’est-ce pas elle qui dicte à l’encyclopédiste Pierre Larousse sa définition de la femme comme étant « la femelle de l’homme » ? Ou à Norman Mailer ses accusations contre Simone de Beauvoir : « Ma femme a lu Le Deuxième Sexe en 1950 et cela a détruit mon mariage. » Les exemples fourmillent, qui vont dans le même sens. Les pires propos contre les femmes étant tenus par François Mauriac.

Ainsi, pouvoir et sexe mènent-ils la danse. Ninon de Lenclos n’hésite pas, tout juste âgée de onze ans, à déclarer tout de go à son père : « Je vous informe qu’à partir d’aujourd’hui, j’ai décidé de ne plus être une fille, mais de devenir un garçon. » Et le père, ravi (ils ne sont pas légions à manger de ce pain-là !) d’obtempérer et d’habiller sa fille en mousquetaire. L’habit ne faisant pas le moine, il se met en devoir d’initier son jeune garçon à l’équitation et à l’escrime. Plus tard, fidèle à sa première vocation, Ninon écrivant à Boisrobert, l’un de ses nombreux amants, confirme : « Les hommes jouissent de mille libertés que les femmes ne goûtent pas. Je me fais donc homme. » Eli Flory, qui n’a pas peur des mots, se garde, quant à elle, d’un langage prude. Un langage derrière lequel se lit pourtant la tendresse. Même lorsqu’il s’agit d’évoquer la Grande Catherine, impératrice de toutes les Russies. Il y a bien assez de mauvaises langues qui ne se privent pas de dénoncer les mœurs volages et l’insatiabilité sexuelle de la souveraine. Et qui vont même jusqu’à dire que la « tsarine libérale et libérée n’aurait pas résisté à l’assaut de l’un de ses chevaux d’écurie. » Petite mort qui aurait entraîné « la grande, la vraie, celle d’où l’on ne revient pas… »

La bouche rouge-baiser est-elle l’une de celles par qui le scandale arrive ? Ou de celles qui dénoncent le scandale dont elles ont été l’objet, mises au ban de la société ? Souvent pour bien peu de choses. À moins que cette bouche ne figure la bouche lippue de l’actrice hollywoodienne Mae West, « bouche rouge sang » chère à Salvador Dali et immortalisée par l’artiste dans un « canapé botoxé à la mousse de polyuréthane et recouvert de lycra rouge vif… ». Elle est peut-être tout simplement la bouche d’Eli Flory l’insoumise, qui prête sa parole et sa plume à toutes celles qui, depuis la lointaine Antiquité jusqu’à notre bel aujourd’hui, ont fait couler la bile sur leur passage et fait se dresser bûchers et échafauds. Il fallait l’humour d’une femme, sa tendresse, sa finesse, son intuition, son savoir, pour rétablir ces dames dans le droit fil de la vie qu’elles désiraient conduire, dynamitant au cours des époques et de l’Histoire « la cage que les préjugés attachés à leur sexe ou à leur état » avaient maintenu « cadenassée. »

Scandale ? Dérivé du grec, le terme est employé à l’origine dans la langue ecclésiastique pour désigner la « pierre d’achoppement », l’obstacle qui fait tomber dans le mal. Le Grand Larousse de la Langue Française précise que la théologie distingue « scandale actif et scandale passif ». Le premier désignant « l’acte lui-même » et le second, « le péché occasionné ». Étrange définition, dont la clarté n’est pas la caractéristique première. Pour Pierre Larousse, cependant, cette définition relève de l’évidence même. Elle prend tout son sens lorsqu’il écrit, à propos de Catherine de Russie : « Le grand scandale de son règne […], ce sont ses galanteries plus qu’orientales, cette suite prodigieuse, cette kyrielle d’amants qui se succèdent à l’infini, sans interruption ni cesse et jusqu’au dernier jour. Sous ce rapport, elle a dépassé Louis XV ; scandale bien plus grave encore chez une femme ; là est véritablement la tache indélébile que les panégyristes les plus enthousiastes ne pourront effacer. »

Au cours du temps, se dégageant de la gangue théologique, le terme de « scandale » tend à voir son sens s’affaiblir. Quoi qu’il en soit, Eli Flory a raison de signaler la plasticité de cette notion (néanmoins connotée dans sa coloration moralisante), mais aussi son côté stimulant et tant soit peu « aguicheur ». Et l’auteure d’ajouter, toujours dans le préambule, que ces femmes n’ont en réalité eu d’autre préoccupation que l’activisme (« scandale actif » ?) qui les a poussées à se battre pour se forger leur propre vie. Raison suffisante pour qu’une femme, écrivain de surcroît, s’intéresse à elles, se penche un peu plus avant sur leur histoire, leur rende une part de leur vrai visage. Et leur restitue, à bon droit, la première place qu’elles ont souvent occupée. Est-ce aussi là que le bât blesse ?

Christine de Suède, « première femme à être sacrée en 1 650 roi des Suédois, des Goths et des Vandales. »/ Madame de Pompadour, née Poisson : « première femme du peuple à se hisser si haut. » / Marie Sklodowska — devenue Marie Curie —, « première femme à diriger un laboratoire, première à utiliser le terme de ‘radioactif’ première à obtenir le prix Nobel, première scientifique à l’obtenir deux fois. »

Et qu’en est-il de Joanna Hiffernan ? La belle Irlandaise, amante du peintre Whistler, n’est-elle pas le modèle qui a inspiré à Courbet sa Vénus de Milo ? Seule de sa catégorie à exhiber, sans retenue aucune, sa nature acéphale. Et ce, à la barbe du Second Empire scandalisé qui blêmit d’effroi « dans le tête-à-tête avec un sexe qui le dévisage, renvoyant le voyeur là d’où il vient : à l’obscène de sa conception. » Il y a fort à parier que, si le duc de la Rochefoucauld s’avisait de revenir parmi les vivants, il s’exclamerait à nouveau, face au « Paysage anthropomorphe » de L’Origine du monde : « Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement ». Angèle Paoli

http://terresdefemmes.blogs.com/mon_weblog/2014/01/eli-flory-la-barbe-dolympes-de- gouges-par-ang%C3%A8le-paoli.html

Radio

Europe 1, « Social club » Frédéric Taddéi, 28 février 2014 http://www.europe1.fr/MediaCenter/Emissions/Europe-1-social-club-Frederic- Taddei/Sons/Europe-1-Social-Club-Eli-Flory-1900549/

Lyon Première, 10 février 2014 http://www.lyonpremiere.com/Esprit-es-tu-la-ou-l-histoire-du-surnaturel_a4315.html

(À partir de 05 : 00)