N° 394 Janvier-février-mars 2013

Vallon de POLSET (Maurienne)

Conférence du 11 avril sur les Forêts de montagne par J.-P. FEUVRIER

Photo : M. CHAMBRE 1

2

LE MOT DU PRESIDENT

« Il était une fois une société d’amis de la nature qui trimaient bénévolement depuis très longtemps, tâchant de conserver amoureusement tout ce qui dans leur belle région était témoignage de sa richesse naturelle… » Ainsi pourrait commencer dans quelques années à l’usage de nos petits enfants une comptine célébrant le souvenir de feu la Société d’Histoire Naturelle de Savoie ! Car cette année 2013 commence très mal pour nous. Au moment où j’écris ces mots, notre subvention annuelle semble hésiter entre 4 000 et 10 000 euros (au lieu des 35 000 qui seraient le minimum admissible pour ne pas mettre la clé sous la porte à la fin de l’année). Notre déménagement des archives de Bassens a pris un gros retard, et la punition ne s’est pas faite attendre : une inondation récente par les eaux usées de l’étage au-dessus a détruit irrémédiablement une partie de nos archives… Par miracle, les herbiers n’ont pas été touchés directement, mais l’humidité résultante les menace. Comme quoi lorsque nous demandons depuis des années à nos élus les moyens d’une conservation décente de tout ce patrimoine, nous ne sommes peut-être pas tout à fait irresponsables ; et à force de ne pas nous entendre, on en arrive à des catastrophes. Et tout cela malgré le succès de nos opérations 2012 et le succès de la réouverture du musée en 2013 (nombreuses classes de la ville, 500 visiteurs lors du dimanche porte-ouverte), avec le plaisir non dissimulé des visiteurs d’être fort bien accueillis par nos commentateurs bénévoles dans un musée certes à l’allure un peu vieillotte, mais qui lui donne aussi un certain charme que n’ont peut-être plus les happenings moderne-style ! J’en profite une fois de plus pour remercier nos membres qui donnent sans compter de leur temps pour que vive ce bâtiment, et je salue la mémoire de deux disparus récents, Monsieur Pierre LEVECQ, généreux donateur d’herbiers et Monsieur Gérard MOUTON, membre de diverses associations naturalistes bien connu des botanistes régionaux. Je vous invite à continuer nombreux à participer aux conférences, ateliers, expositions, rencontres, qui ne manqueront pas de se dérouler tout au long de cette année, car nous continuerons notre effort contre vents et marées. Rien ne doit venir entamer notre enthousiasme pour cette belle cause du Patrimoine naturel à laquelle nous tenons tant ! J’ajoute que nous espérons beaucoup du projet de « contrat tripartite » en cours d’étude avec nos élus (cf. réunion du 11 avril) ; cela afin de pérenniser nos moyens en réponse à ce que la SHNS, la ville de CHAMBERY, et le Conseil général de la SAVOIE, doivent conjointement à la connaissance de la nature régionale et à la conservation du patrimoine des collections du muséum.

Photo

:Gilles TRIBOULET

Michel SAVOUREY

3

PROGRAMME D’ACTIVITÉS DU 2ème TRIMESTRE 2013

CONFERENCES : (2ème jeudi du mois à 18h30)

- 11 avril : Les forêts de montagne : diversité et contraintes par Jean-Pierre FEUVRIER.

- 16 mai : Géologie, roches et reliefs des Alpes françaises du Sud, diaporama présenté par Henri WIDMER (auteur des Guides du relief : Alpes françaises du Nord ; Alpes du Sud et Provence - aux éditions GAP).

- 13 juin : « Les Chauves-souris vous sourient » par Olivier SOUSBIE. Découverte des chauves-souris chambériennes à travers un film et un diaporama

ATELIERS : (4ème jeudi du mois de 18h à 20h)

- 25 avril - 23 mai - 27 juin

Penser à apporter de quoi alimenter cet atelier (minéraux, fossiles, insectes, plantes ou des photos, livres nouveaux, etc.…).

EXPOSITION :

- Du 7 mai au 20 juin : "Bouquetin, le retour du roi"

Plus de rocher qu’animal de montagne, le Bouquetin des Alpes s’est également bien adapté aux altitudes élevées où il a trouvé son

dernier refuge. Au bord de l’extinction à la fin du XIXe siècle, ses effectifs se portent maintenant mieux. Cette exposition, riche des clichés de Michel FORIEL pris au coeur du Parc national de la Vanoise, vous fera connaître cet animal emblématique des Alpes. L’exposition présente les caractéristiques de l’espèce et sa vie au cours des saisons. Exposition aimablement prêtée par la Galerie Euréka.

SORTIE :

- Samedi 4 mai : rendez vous à 19h sur le parking du Lac Sainte-Hélène.

Nocturne aux marais de Villaroux pour inventorier les papillons de nuit avec nos spécialistes et présentation de la Rainette verte (petite grenouille) par Ludivine QUAY.

Ces marais représentent un très bel ensemble humide du Val Coisin. Ils se composent de nombreuses prairies et de boisements humides qui offrent des habitats naturels et des lieux de passage pour de nombreuses espèces.

Sortie organisée conjointement avec d’autres organismes naturalistes (CPNS, FRAPNA, GHRA). Pour toutes informations : Philippe FRANCOZ [email protected]

4

INSECTES ET PLANTES : UNE COEXISTENCE PAS SI PACIFIQUE COMPTE RENDU DE LA CONFÉRENCE DU 13 DECEMBRE 2012

Parler des Insectes et de leurs relations avec les plantes est pour moi une agréable opportunité : concilier mon grand intérêt pour les insectes et celui, non moins grand, pour les plantes. Cet exposé général et loin d’être exhaustif sur les insectes phytophages, est réalisé à partir de documents personnels, enrichis de documents tirés d’ouvrages et issus d’Internet.

Les différents régimes alimentaires des insectes :

Dans la grande saga de l’évolution de la vie, les insectes ont acquis des adaptations à des régimes alimentaires variés. On peut distinguer par exemple les zoophages se nourrissant de proies animales, les xylophages exploitant le bois vivant ou mort, les coprophages consommant les déjections animales et les phytophages se nourrissant aux dépens des végétaux. Ce sont ces derniers qui seront les héros principaux de l’exposé. Les zoophages peuvent être prédateurs redoutablement armés comme les Carabes, les Calosomes, les Cicindèles, les Coccinelles, les Mantes, les Ascalaphes, Chrysopes. Les parasitoïdes exploitent leur hôte en le maintenant en vie jusqu’au bout. Les Hyménoptères Ammophiles, Pompiles ou Braconides en offrent de bons exemples.

Les régimes phytophages sont très variés :

Les xylophages tels que les Coléoptères Scolytidés, s’attaquent aux arbres dépérissants. Leurs larves dessinent avec leurs galeries larvaires, des motifs très caractéristiques sous l’écorce. D’autres comme la superbe Rosalie alpine, le Lucane cerf-volant ou le Cérambyx de Scopoli pondent dans des bois morts en voie de décomposition dont se nourriront leurs larves. Les coprophages utilisent les déjections d’animaux végétariens. Ce sont les Bousiers tels le Scarabée sacré dont le comportement a été si bien décrit par Jean-Henri Fabre.

Les vrais phytophages s’alimentent à partir de différentes parties de végétaux et pour cela sont armés de pièces buccales spécialisées dans un type particulier de consommation.

Les brouteurs de végétaux :

Munis de pièces buccales broyeuses avec d’efficaces mandibules coupeuses et broyeuses, ils peuvent s’attaquer à n’importe quelle partie de la plante, feuilles, tiges, fleurs, graines ou fruits. Selon le spectre de leur régime alimentaire, il est possible de les répartir par catégories qui traduisent leur liaison à une ou plusieurs plantes hôtes. Les monophages s’attaquent principalement à une espèce ou plusieurs espèces très voisines. Par voie de conséquence, ce sont des espèces rares ou localisées et fragiles. Les chenilles du Nacré de la Canneberge (Boloria aquilonaris) se nourrissent exclusivement des Oxycoccos, tandis que celles du Solitaire (Colias palaeno) vivent sur les Airelles des marais et des landes. Le Cuivré de la Bistorte (Lycaena helle) est exclusif de cette plante dans les tourbières du Jura des Vosges et du massif central. Dans nos massifs alpins, le Petit Apollon (Parnassius sacerdos) (figure 1) ne se rencontre qu’au bord des torrents où vit le Saxifrage faux aïzon. Plus communs sont les Sphinx de l’Euphorbe (Hyles euphorbiae) qui vit aux dépens de

5 l’Euphorbe petit cyprès principalement, ou Cucullia verbasci sur les Molènes, Cucullia caninae sur la Scrophulaire des chiens, le Vulcain (Vanessa antiopa) et le Paon du jour (Inachis io) (figure 2) sur les orties.

Les suceurs de sève

Chez les Coléoptères beaucoup d’espèces sont liées à une plante hôte précise. Citons simplement la Chrysomèle de l’Aulne (Agelastica alni), celle de la Menthe (Chrysolina herbacea) ou le Doryphore (Leptinotarsa decemlineata), qui chez nous affectionne notre Pomme de terre. Les oligophages se nourrissent de quelques espèces dans une famille donnée. Le bien connu Aurore (Anthocaris cardamines) se délecte des Brassicacées (Arabis, Lunaria, Cardamine, Rorippa, Biscutella…). La Cucculie de la Laitue (figure 3) consomme des Lactuca, mais aussi des Prenanthes, tandis que notre Apollon (Parnassius apollo) est inféodé aux Crassulacées (Sempervivum, Sedum). Chez nos magnifiques porte-queue, la chenille du Flambé (Iphiclides podalirius), dévore quelques Rosacées arbustives ou arborescentes tels que Prunus, Amelanchier, Crataegus, Malus tandis que le Machaon (Papilio machaon) se régale des Apiacées dont Daucus, Laserpitium, Peucedanum etc.

Parmi les envahisseurs on peut évoquer le cas de ce très beau papillon originaire d’Argentine, importé avec des palmiers, le Paysandisia archon de la famille des Castnidae. Les chenilles se développent dans le bourgeon terminal, c’est-à-dire le cœur du palmier. Les dégâts constatés dans le midi de la France sont importants d’autant plus qu’il s’y rajoute maintenant les dégâts dus à un grand Charançon rouge (Rhynchophorus ferrugineus) arrivé en 2006 en France et originaire d’Asie tropicale. Les polyphages ont pour plante-hôte de nombreuses plantes de familles différentes. Cela leur permet de pulluler parfois au détriment de nos forêts. La chenille de la Pudibonde (Calliteara pudibonda) (figure 4) vit aux dépens de divers arbres : Quercus, Salix, Acer, Fagus, Corylus, Tilia, Rubus, Sorbus, Pyrus, Malus…celle du Cul brun (Euproctis chrysorrhoea), vit sur Quercus, Ulmus, Prunus, Crataegus, Rosa et sur des arbres fruitiers. Les chenilles du Bombyx disparate (Lymantria dispar) consomment surtout des Chênes mais aussi des arbres fruitiers Leurs pullulations sont spectaculaires.

Sont polyphages également les Orthoptères comme Phaneroptera falcata qui se repait de plantes Dicotylédones. D’autres sauterelles sont volontiers omnivores comme le Dectique verrucivore (Decticus verrucivorus) voire essentiellement carnivores comme la grande sauterelle verte (Tettigonia viridissima ). Les Criquets sont phytophages et certains se cantonnent aux plantes monocotylédones (Graminées et Carex).

Les mangeurs de nectar et de pollen

On rencontre souvent sur les fleurs des insectes qui s’alimentent soit de pollen soit de nectar. Ce faisant, ils peuvent transporter du pollen d’une fleur à l’autre et permettre ainsi la fécondation croisée qui parfois est la seule solution pour la survie de la plante. En effet il existe de nombreux obstacles à la fécondation directe. Les fleurs peuvent être hermaphrodites, avec étamines et pistil et la pollinisation directe est donc possible. Cependant, dans certains cas, il y a incompatibilité entre pollen et stigmate ou bien des obstacles mécaniques ou physiologiques empêchent cette rencontre. Les fleurs peuvent être unisexuées comme chez le noisetier. On parle de plantes monoïques. Chez le Lychnis ou les Saules il existe des pieds mâles et des pieds femelles (plantes dioïques). Dans tous ces cas, l’intervention d’un

6 organisme pollinisateur extérieur est indispensable. En dehors des Chauves-souris et des Colibris, ce sont surtout les insectes qui remplissent ce rôle. Coléoptères, Lépidoptères ou Diptères floricoles peuvent se comporter en pollinisateurs. Mais ce sont surtout les Hyménoptères et en particulier les Apoïdes (Abeilles et Bourdons) qui sont spécialisés en ce domaine. Les abeilles, domestiques ou solitaires, et les Bourdons sont équipés pour prélever le pollen et /ou le nectar qui serviront de nourriture aux larves. Le corps velu et les appendices modifiés permettent récolte et transport du pollen, tandis que les pièces buccales transformées en langue autorisent la succion du nectar. L’homme a détourné ce processus à son profit et bénéficie de la transformation du nectar en miel par les abeilles domestiquées depuis la préhistoire. Sans l’intervention des insectes pollinisateurs, les productions végétales et fruitières seraient considérablement moins importantes. On ne peut pas évoquer la pollinisation sans évoquer les relations étonnantes entre les insectes et les Orchidées. Chez ces plantes, le pollen est aggloméré en petites masses ou pollinies et le transport par le vent est impossible. De plus, un obstacle mécanique s’oppose au contact entre les pollinies et le stigmate. Les insectes, souvent des Hyménoptères, sont attirés par les odeurs émises par les Orchidées et tentant de s’accoupler avec les fleurs prennent en charge les pollinies et les transportent jusqu’à une autre fleur (Figure 5). Le grand Charles Darwin a décrit ces phénomènes étonnants dans un remarquable ouvrage paru en 1870. Notons aussi que la Vanille, Orchidée importée en Afrique en provenance d’Amérique du sud, doit être pollinisée manuellement faute d’avoir introduit l’insecte pollinisateur. Autopollinisation chez Ophrys apifera (d’après Darwin 1870)

Les insectes de l’ordre de Hémiptères sont munis de pièces buccales transformées en un rostre qui permet d’une part, de perforer les tissus végétaux jusqu’aux vaisseaux conducteurs de sève élaborée et d’autre part d’aspirer ce précieux liquide. Parmi ces suceurs on peut citer les Cigales, les Cicadelles, les Cochenilles, les Pucerons et de nombreuses Punaises. Certains de ces Hémiptères sont très spécialisés et ne s’attaquent qu’à une ou deux espèces particulières. Ce prélèvement peut être préjudiciable à la santé de la plante soit que celle-ci est affaiblie soit que l’insecte a introduit une bactérie ou un virus pathogène. Deux espèces envahissantes sont récemment apparues dans nos régions à l’occasion d’importation de plantes étrangères. Une très belle Punaise aux pattes postérieures dilatées se retrouve fréquemment dans nos maisons en hiver, le Leptoglossus occidentalis (figure 6) originaire des USA. Absolument inoffensives, elles puisent leur alimentation dans les tissus des graines de quelques Gymnospermes dont les Pins. Un autre Punaise remarquable par le décor délicatement nervuré de sa cuticule, est le Tigre du platane (Corythuca ciliata) arrivé des USA en Italie en 1964. Depuis il se rencontre partout en France. L’été il exploite la sève des feuilles causant un dépérissement plus ou moins prononcé de l’arbre et l’hiver il se réfugie sous les lambeaux décollés du rhytidome.

7

Des relations particulières entre plantes et insectes

Les insectes mineurs :

On désigne par mine, la galerie creusée par la larve de l’insecte mineur le plus souvent dans l’épaisseur même de la feuille du végétal hôte. La larve mineuse mange le parenchyme de la feuille, dessinant un motif caractéristique qui permet de reconnaître l’identité de l’insecte. La galerie s’élargit au fur et à mesure de la croissance de la larve. On rencontre de tels mineurs dans plusieurs familles de Microlépidoptères et de Diptères. Un des insectes mineurs le plus connu est sans doute la Teigne Minière du Marronnier (Cameraria orhridella) (figure 7). La chenille de ce minuscule papillon (3 mm) figure 8) de la famille des Gracillaridae, creuse de larges galeries dans les feuilles des marronniers (Aesculus hippocastanum). Les parties de feuilles attaquées deviennent brunes et l’arbre semble malade. 3 générations se succèdent dans les feuilles et la chrysalidation de la dernière génération a lieu dans les feuilles tombées au sol. Le papillon décrit de Macédoine seulement en 1984 est arrivé en France en 2000.

Les insectes gallicoles :

Une galle ou cécidie est une excroissance développée chez un végétal à la suite de la piqure de ponte d’un organisme cécidogène. On dénombre (Patrick Dauphin, 1993) plus de 1100 insectes capables d’induire la formation de galles. Parmi ceux-ci, 528 Diptères Cécidomyidés et 134 Hyménoptères Cynipidés. L'induction de la formation d'une galle dépend de substances apportées par le parasite dans sa salive ou au moment de la ponte. (enzymes, auxines, cytokinines, acides aminés, acides nucléiques, etc. La larve elle-même continue à agir sur les tissus végétaux de la galle. Le mécanisme n'est pas encore parfaitement élucidé. Une galle résulte de l'expression phénotypique de deux génotypes : - Celui du végétal hôte, impliqué dans la morphogénèse des organes du végétal (bourgeons, feuilles, racines, fruits, fleurs etc.) - Celui de l'organisme parasite car en effet, la forme de la galle sur un même végétal dépend du parasite. On connaît aussi des galles de forme hybride engendrées par des parasites eux- mêmes hybrides. Le mécanisme génétique est encore hypothétique, mais la cécidogénèse demeure un phénomène remarquable qui mériterait de nouvelles investigations.

(cf. photo figure 9) Galle de Mikiola fagi (Cecidomyidae)

Galle de Diplolepis rosae (Cynipidae) sur Eglantier

8

La galle offre le gite et le couvert au parasite en développant des tissus nourriciers particuliers. En plus de l’organisme cécidogène, la galle héberge des commensaux et aussi des prédateurs et parasites du gallicole. C’est un véritable petit écosystème.

Les insectes gallicoles sont des parasites de végétaux généralement sans impact grave sur l’hôte. Cependant, il faut rappeler les conséquences catastrophiques de l’invasion du Puceron Phylloxera vastatrix sur le vignoble français au 19ème siècle. Ce minuscule suceur de sève produisait des galles sur les racines et les parties aériennes des pieds de vigne entrainant un fort dépèrissement.

Les fourmis et les plantes, des relations sophistiquées :

Les exemples d’associations complexes entre plantes et fourmis sont répandus dans les régions tropicales. Nous allons en décrire quelques exemples que nous avons pu observer lors de voyages dans ces régions. Les arbres du genre Cecropia appelés vulgairement bois canon, ont un tronc creux divisé en compartiments dans lesquels sont hébergés des fourmis du genre Azteca. Outre l’offre du gite, le Cecropia produit des corps nourriciers dont les fourmis sont friandes. En retour, les fourmis assurent une certaine protection contre la plupart des ravageurs de l’arbre dont les fourmis Atta et même contre les lianes.

Parfois, les plantes développent des organes particuliers creux ou domaties, destinés à héberger des fourmis. Chez le genre Myrmecodia (Rubiacée d’Asie du sud-est), la base de la tige est renflée et creusée de cavités dans lesquelles vivent les fourmis Iridomyrmex et leur couvain. Chez les Hydophyton d’Australie on observe le même phénomène. J’ai pu observer au Nicaragua, un cas très élaboré de relation entre Acacia cornigera et des fourmis Pseudomyrmex. La plante présente des domaties en forme de cornes creuses provenant de la transformation des stipules, dans lesquelles vivent les petites fourmis rouges dont la piqure est redoutable (figure 10). L’Acacia développe des nectaires extrafloraux et des expansions des folioles (corps de Belt) dont les fourmis se repaissent. En retour, l’arbuste est protégé contre les ravageurs vertébrés ou invertébrés. Seul un oiseau, le Troglodyte à tête rousse est toléré sur l’arbre pour y nicher. Des domaties épineuses existent aussi sur des Acacia africains. Corps de Belt sur folioles

Les insectes phytophages au secours de l’homme

La lutte contre les espèces envahissantes est souvent très difficile. Dans certains cas, le recours à la lutte biologique par des ennemis naturels de la plante invasive a été envisagé et couronné de succès. Parmi les exemples les plus anciens, on peut citer le cas spectaculaire des Opuntias, cactées introduites en Australie en 1839 à des fins ornementales et devenue une véritable peste végétale. En 1926, Cactoblastis cactorum, un microlépidoptère, ravageur spécifique des raquettes des Opuntias est introduit sur le continent australien. En 1939, 90% des Opuntias ont disparu. Plus récemment, pour lutter contre la Salvinia molesta, Ptéridophyte aquatique très envahissante dans les lacs et cours d’eau tropicaux, c’est un Charançon, le

9

Cyrtobagous salviniae qui est introduit dans les zones infestées. Le résultat a été parfois très intéressant comme en Papouasie Nouvelle Guinée où des villages abandonnés à cause de la Salvinia sont maintenant réoccupés par les hommes. A la Réunion où l’on connait de nombreuses et redoutables pestes végétales, la lutte biologique se fait contre la Vigne marronne Rubus alceifolius (figure 11) extrêmement envahissante. Un ravageur spécifique, la Tenthrède Cibdela janthina (figure 12) originaire de Sumatra été introduite avec succès. Mais avant toute introduction, de longues études doivent être entreprises pour vérifier la spécificité du ravageur, son absence de concurrence avec la faune locale sauvage ou domestique. Il faut en outre convaincre la population souvent réticente. La lutte biologique semble pour le moment la seule possibilité de lutte contre une invasive notoire qui nous laisse désarmés pour le moment, la Renouée du japon (Fallopia japonica, F. sacchalinensis). Des tests sont effectués en Grande Bretagne. Espérons que les résultats seront satisfaisants et que nous pourrons importer cette technique.

Pour conclure, il resterait à évoquer les défenses des plantes contre leurs ennemis, pièges mortels des plantes carnivores, défenses mécaniques et chimiques mises en œuvre par les végétaux, mais cela nous entrainerait trop loin.

Jacques BORDON

Remarque (Michel SAVOUREY) : Jacques BORDON est un entomologiste haut-savoyard plutôt lépidoptérologiste, membre ancien et très actif de l’Association entomologique de Genève. Il a travaillé pendant des années avec Pierre REAL dans le cadre du CLERJ à la réalisation d’inventaires de la chaine du Jura (visites diurnes et piégeages nocturnes de papillons entre autres), et est fortement impliqué dans le suivi de la réserve « zone humide des marais de Lavours ». Il est un des membres fondateurs du RERA (Réseau des Entomologistes Rhône- Alpins). Il a participé activement au premier inventaire des lépidoptères rhopalocères de la région Rhône-Alpes (publié par le muséum de Grenoble en 1999), en tant que coordinateur pour la Haute-Savoie et l’Ain, ainsi qu’aux inventaires de macro-hétérocères qui ont suivi. J’ajoute qu’il est un de mes collaborateurs fidèles de la première heure pour tout ce qui concerne les inventaires de lépidoptères du département de la Savoie…

10

Fig. 1. Petit Apollon Fig. 2. Paon du Jour

Fig. 3. Cucullie de la laitue Fig. 4. La pudibonde

Fig. 5. Abeille sur Ophrys apifera Fig. 6. Leptoglossus occidentalis

11

Fig. 7. Mines sur le Marronnier Fig. 8. Chenille de la Teigne du Marronnier

Fig. 9. Galle de Mikiola fagi Fig. 10. Domaties stipulaires sur Acacia cornigera (Cecidomyidae) sur Hêtre

Fig. 11. La Vigne marronne Fig. 12. L’agent de lutte biologique Cibdela janthina

12

PAROLES DE DIAMANTS COMPTE RENDU DE LA CONFÉRENCE DU 10 JANVIER 2013

De Marc TARDY, Professeur émérite à la Faculté, Spécialiste de la tectonique Alpine

ETYMOLOGIE

Taillé, le diamant est une PIERRE PRECIEUSE. Son UNITE de POIDS est le CARAT, mot dérivé de « CAROUBIER », arbre méditerranéen dont les graines, de taille et de poids régulier ont servi de mesure dans l'Antiquité.

1 carat : masse d'une graine de caroube soit 0.20 g donc 5 carats correspond à 1 g de diamant.

Le Caroubier (Fabacées)

13

LE DIAMANT : PIERRE SACRÉE

Enluminure du Livre des propriétés des choses (1230-1240) de Barthélémy l’Anglais. Selon la légende moyenâgeuse, les pierres issues de montagnes fantastiques et emportées par les eaux, constellent la vallée. En blanc les diamants!

En Inde, source historique de la Pierre, le diamant inaltérable est assimilé à un matériau digne des DIEUX. L'univers BOUDHISTE le cantonne au domaine sacré. Il symbolise la force... le pouvoir... l'amour.

Son commerce est attesté dès le premier siècle de notre ère. Les diamants affluent en Europe. En 1802, Napoléon fait main basse sur la cassette de diamants de la COURONNE PORTUGAISE.

Conséquences : Esclavage des hommes, femmes et enfants Conflits Contrebande

Le trafic mondial a été supprimé le 30 avril 2003 par le processus de Kimberley (traité international signé par 43 pays et appuyé par la De Beers).

Le Régent (140,64 carats), considéré comme le plus beau diamant du monde. Appartient aux Diamants de la Couronne (trésor créé par François 1er en 1530). La pierre d’origine (426 carats) découverte en Inde (Golconda) en 1698 et taillée en Angleterre, a été achetée en 1717 par Philippe d’Orléans, alors régent de France. Musée du Louvre.

14

LE COUPLE PLUS CONTRASTÉ DE LA MINERALOGIE

LE DIAMANT ET LE GRAPHITE

Le CARBONE est présent sous deux formes cristallisées.

1 Le DIAMANT est la forme stable à Haute Pression et Haute Température dureté exceptionnelle mais fragilité aux chocs densité élevée facilitant le tri brûle à 500º dans l'air à 1100º il se transforme en GRAPHITE

Diamant Graphite

Chaque atome de C est relié à 4 atomes Chaque atome de C est relié à 3 atomes proches proches

2 Le GRAPHITE : « j’écris » Clivage parfait : il est commun dans les roches MÉTAMORPHIQUES de la croûte terrestre.

15

DURETE

PROPRIETES

16 TAILLE ET BRILLANCE

L(1) L L

Diamant trop plat : la Taille idéale : la lumière Diamant trop profond : la lumière ne se réfléchit pas sort par la face supérieure lumière se réfléchit et sort conférant son éclat par une face latérale maximum. (1) Lumière

Indice de réfraction élevé : origine des « FEUX » après la TAILLE.

Des défauts dans l'arrangement électronique des cristaux confèrent des couleurs variées.

Le diamant pur est INCOLORE.

D'infimes traces d'azote ou de bore donnent des couleurs jaune et bleu.

UN GISEMENT PRIMAIRE LE « PIPE » DE KIMBERLEY (Afrique du Sud)

Le plus grand trou creusé par la main de l'homme. (Ø 500 m – 700 m profondeur)

17

Cristal octaédrique (2cm) émergeant d'une Kimberlite de Sibérie.

La KIMBERLITE roche éruptive ultrabasique est la roche HÔTE du DIAMANT avec laquelle il n’a aucun lien génétique.

Coupe d’un « pipe » :

pyroclastite : débris de roches magmatiques éjectés par les volcans (cendres tufs lapillis)

diatrème : cheminée volcanique remplie de brèches volcaniques dues aux explosions.

sill : filon couche.

dyke : lame épaisse de roches magmatiques en forme de mur après érosion.

18

LES GISEMENTS

Les gisements PRIMAIRES : cheminées (ou pipes) par lesquelles sont remontées à travers la croûte continentale des roches volcaniques (1870).

Les gisements SECONDAIRES, SEDIMENTAIRES issus de l'érosion des appareils volcaniques précédents (Inde : Antiquité). Inaltérables, les diamants sont inclus dans des formations détritiques, continentales et marines de tous âges (de < 600 M. A. aux alluvions actuelles).

Phénomènes géologiques externes : - érosion (eau, vent, gel, glace…)

gisement primaire

gisement secondaire

Chercheurs de diamants dans le désert d’Afrique du Sud, sur la côte ouest, à l’embouchure du fleuve Orange.

19 LES PROVINCES DIAMANTIFERES

Zones claires : 2,5 milliards d’années Zones foncées : 1,5 milliards d’années

Les gisements de diamants se trouvent dans les cratons (noyaux des continents datés de plus de 1,5 milliards d’années).

Ils sont liés à des roches volcaniques spécifiques et rares - kimberlites - lamproïtes

LA PRODUCTION MONDIALE

En 2005, à peine 20% de la production de diamants bruts est destinée à la joaillerie (qualité gemme). 80% sont destinés aux usages industriels.

20 MÉTAMORPHISME ET CRISTALLISATION

graphite

diamant

ORIGINE REMONTÉE ET ÉJECTION DES DIAMANTS

- Avant 2,5 milliards d’années, épaississement du manteau lith.(200 km) sous les cratons et formation précoce de diamants, liée à des circulations de fluides riches en C. - Dans le manteau plus profond cristallisation de diamants, d’âges variables et à toutes les prof., à partir du C subduit. - Remontée de manteau chaud (avec diamants) par les panaches - Impact de la tête de panache chaude sur la base de la lithosphère > fusion partielle > et magma kimberlitique et volcanisme explosif < ramonage et expulsion rapide des diamants qui n’ont pas le temps de se transformer en graphite.

21

DES DIAMANTS VIEUX COMME LA TECTONIQUE DES PLAQUES

En 2011, des chercheurs ont daté 4 000 inclusions de diamants provenant de toutes les racines lithosphériques des cratons (prof. > 200 km) et remontés par le volcanisme. Les inclusions sont formées de péridotite (manteau) et d’éclogite (roche métamorphique née lors de la subduction des plaques océaniques) Constat : Au-delà de 3,2 Milliards d’années toutes les inclusions sont des péridotites. Explication simple proposée : La première subduction s’est produite il y a 3,2 milliards d’années au plus! C’est l’âge du début de la tectonique de la Terre formée il y a 4,5 milliards d’années..

Le DIAMANT, né des étoiles enregistre et restitue la nature du manteau. La dynamique du manteau le porte en surface.

22 RECONSTITUER « L’AMBIANCE » DU CENTRE DE LA TERRE

LA CELLULE À ENCLUMES DE DIAMANT

Le principe de l’appareil Le minéral à étudier est placé entre deux diamants gemmes dans un trou (environ 200 µm de diamètre) percé dans un joint métallique. Une fois l'échantillon et des éclats de rubis en place, on rempli le reste du trou avec un milieu transmetteur de pression (liquides organiques, gaz rares, solides mous) et l'on comprime l'ensemble entre les deux diamants. L’augmentation de la pression est induite par la réduction du volume du trou. Des pressions de 360 GPa (3,6 millions de fois la P atmosphérique) et des températures de 5 000 K (plus de 4 700 °C) sont atteintes.

23 LE DIAMANT INTERSTELLAIRE « Record de dureté battu ! »

La LONSDALEITE découverte dans une METEORITE (1967). Présente dans tout l'univers, elle est produite dans le coeur des étoiles massives par fusion de 3 noyaux d'Helium. Elle résiste à 58% de pression de plus que le diamant.

LONSDALEITE (dans une météorite) « Meteor crater (ARIZONA) (50 000 ans) - Plus DURE que le diamant - Structure cristallisée du carbone

AGE DES ROCHES VOLCANIQUES TRANSPORTEUSES

Les plus anciennes Kimberlites : - 1600 MA. (Afrique du Sud) - 100-120 MA Crétacé Kimberley - 1200 MA – Af. Sud, Australie, Inde (Af. Sud) - 540 MA - Cambrien - 55 MA – Eocène - 350 MA – Dévonien – Carbonifère - 15 MA – Miocène

Hadéen : de la formation de la terre (4.7 milliards d'années) au début de l’archéen (3.2 milliards d'années) où se rencontrent les premières roches sédimentaires.

24 LE DIAMANT SYNTHETIQUE

MODE DE FORMATION Première réussite en SUEDE en 1953. Aujourd'hui, sont recréées les conditions naturelles de formation (pression – température).

UTILISATION dans l'INDUSTRIE pour : - sa dureté – outils de coupe et d'usinage – trépans de pétroliers, scalpels d'ophtalmologiste - ses propriétés appropriées à l'ELECTROCHIMIE - ses propriétés OPTIQUES ET THERMIQUES adaptées à L'ELECTRONIQUE - sa FAIBLE CONDUCTIVITE ELECTRIQUE (industrie des semi-conducteurs)

PRINCIPAUX PAYS PRODUCTEURS USA, Russie, Afrique du Sud,… France (10ème mondiale).

LE DIAMANT BONHEUR DES GÉOLOGUES

Hantise des diamantaires, les « imperfections » ou « crapauds » sont des inclusions minérales emprisonnées durant la croissance du cristal et empruntées au MANTEAU TERRESTRE à plus de 150 km de profondeur (Température > 1100ºC Pression > 45000 atmosphères) Echantillons uniques de l'intérieur de la Terre.

Georges CAMBRES (A partir de documents aimablement prêtés par l’auteur)

25

COMPTE RENDU DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE DU JEUDI 14 FÉVRIER 2013

L’assemblée générale ordinaire de la SHNS s’est tenue au Muséum le 14 février à 18h30. L’ordre du jour était joint à la convocation des membres envoyé en même temps que le bulletin n°393, accompagné d’une procuration en cas d’impossibilité d’assister à la réunion.

Représentativité de l’assemblée :

Une feuille d’émargement des membres présents et représentés a été établie.

Adhérents à jour de leur cotisation 53 Adhérents non à jour 28 Sympathisants ou membres de droit 51 Adhérents présents 24 Pouvoirs 18 Total présents et représentés 42 (52% des adhérents)

RAPPORT MORAL PAR MICHEL SAVOUREY

Nous pouvons être fiers de l’année écoulée, pendant laquelle nos activités traditionnelles ont pu se dérouler normalement, comme le montre le rapport d’activités. Le remplacement de notre secrétaire Karima en congé maternité s’est passé sans encombre avec Aurélie qui a très bien assumé son rôle. Notre prestation d’exposition sur ROUSSEAU a été remarquable et remarquée, rassemblant plus de 1100 visiteurs, qui n’ont pas manqué de signaler à leur passage leur envie que le musée soit de nouveau accessible au public. Nous avons donc tenté de proposer des possibilités de visite, demandant encore un effort aux bénévoles qui animent la société. Je remercie chaleureusement tous ces passionnés qui ont donné et donnent encore de leur temps et de leur énergie pour soutenir fermement la SHNS. Le déplacement à Bassens de nos herbiers et documents est imminent, et j’ose espérer que ce ne sera pas une fois de plus une solution trop provisoire à ce problème.

26 Malgré ces efforts et les rencontres que j’ai pu faire, je crains néanmoins que nous ne soyons guère écoutés par nos prestataires de subventions, puisqu’à ce jour, nous ne pouvons présenter pour 2013 qu’un budget en déficit, ou au minimum qui verrait nos réserves réduites à néant à la fin de l’année. Je vous présente donc ce rapport avec un goût amer sur les lèvres, sinon de dégout même parfois…Et il me faut une bonne dose de courage pour ne pas vous proposer aujourd’hui ma démission.

J’en appelle à un retour à la raison de tous ceux qui ont quelque respect pour la préservation du patrimoine savoyard, et à une mobilisation de tous les membres de l’association pour aider à la survie de notre vénérable institution.

Avant de soumettre au vote ce rapport moral, nous adressons particulièrement nos remerciements :

aux membres bénévoles mesdames et messieurs Evelyne BLACTOT, Ginette et René BRIANCON-MARJOLLET, Lisette et Maurice BRUNIER, Georges CAMBRES, Marc CHAMBRE, Philippe CLARIOND, Frédéric DUMONT, Jean-Pierre FEUVRIER, Philippe FRANCOZ, Gérard GUILLEMAUD, Jean-Paul MEUNIER, Gérard MOTTET, Charles PEROLINI, Sylvie SERVE, Josette STANTON et Daniel STEPANIAN par leurs présences et leurs appuis. à Madame LACLAIS, Maire de Chambéry pour le soutien financier de nos projets. à Monsieur GAYMARD, Président du Conseil Général pour l’aide financière au fonctionnement de l’association. Le donateur Pierre LEVECQ ayant complété nos collections d’herbiers, Les conférenciers bénévoles Pierre GOTTELAND, Paul PAVLIDES, Jean-Paul MEUNIER, Raymond PICCOLI, Yves YGER, Cécile ARNAUD LORILLOU, Richard GENTIT et Jacques BORDON pour leurs exposés instructifs. à vous tous, adhérents et associations qui nous soutenez avec beaucoup de convictions.

Nous faisons le plus de communications possibles, ce qui commence à se sentir par l’assistance plus fournie de nos activités et comptons une dizaine de nouveaux adhérents.

Le rapport est adopté à l’unanimité.

RAPPORT D’ACTIVITES PAR GEORGES CAMBRES

1. Les conférences :

Elles ont rassemblé de 20 à 50 personnes. Des naturalistes, scientifiques, venus de l’extérieur ou membres adhérents de la S.H.N.S. sont venus nous présenter sept conférences très intéressantes tout au long de l’année 2012. L’auditoire nombreux s’explique par notre partenariat avec les autres associations naturalistes, une communication plus dense et des thèmes très variés.

- 12 janvier : Inventaire naturaliste pour la gestion environnementale, par Pierre GOTTELAND. - 8 mars : Les scarabées, joyaux vivants, macrophotos commentées par Paul PAVLIDES. - 12 avril : Approche de la détermination des roches, par Jean-Paul MEUNIER. - 10 mai : La foudre et le phénomène orageux par Raymond PICCOLI. - 11 octobre : Les rêveries d’un cueilleur solitaire, par Yves YGER.

27 - 8 novembre : La vie des arbres de Chambéry, par Cécile ARNAUD LORILLOU et Richard GENTIT. - 13 décembre : Les plantes et insectes, une coexistence pas très pacifique, par Jacques BORDON.

2. Les ateliers :

Ils ont rassemblé de 8 à 12 personnes pour sept séances. Les ateliers, où chacun peut amener roches, insectes ou plantes à déterminer, ont été animés principalement par monsieur Meunier, ainsi que par mesdames et messieurs Briançon- Marjollet, Brunier, Cambres, Clariond, Evin, et Stépanian. Cette activité remporte un petit succès du fait de la multiplicité des sujets abordés et au caractère concret des demandes formulées par les participants. C’est un chaleureux moment de convivialité.

3. Les sorties sur le terrain :

- Dimanche 13 mai : une journée géologique en Maurienne, organisée par Jean-Pierre FEUVRIER avec un exemple d’érosions torrentielles en moyenne Maurienne et travaux de corrections.

- Vendredis 25 mai et 15 juin : nocturne au marais de Bondeloge à Saint-Jeoire Prieuré pour un inventaire de papillons de nuit effectué par Philippe FRANCOZ et les membres de la Société d’Histoire Naturelle.

- Dimanche 10 juin : une journée botanique au lac Luitel (Uriage), organisée par Georges CAMBRES et Gérard MOUTON avec la découverte d’une tourbière en activité (cas rarissime en France) et l’herborisation dans la région de Chamrousse.

Nous en profitons pour avoir une pensée pour Gérard MOUTON. Botaniste de grande compétence, acquise par son métier de paysagiste, il avait le don de la simplicité - comme la Terre…

Photo : Maurice BRUNIER

- la sortie du jeudi 5 juillet a dû être annulée suite au mauvais temps.

4. Activités annexes :

- Du mercredi 6 au mercredi 20 juin : ACA (Association Cantonale d’Animation) à St-Jean de Maurienne exposition sur les papillons du monde et de Savoie et sortie sur le terrain samedi 9

28 juin autour à-St Julien Mont-Denis (safran, vignes, prairies et forêts protégées de Serpolière…) avec Michel SAVOUREY.

- Expositions ROUSSEAU 2012 au Muséum du 15 juin au 9 juillet et du 14 septembre au 8 octobre : à la croisée des chemins de Jean-Jacques et Cabinet de curiosités.

5. Le bulletin :

Nous avons fait paraître quatre bulletins en 2012 (n°s 390 à 393) contenant des articles variés, les comptes rendus de sorties, de conférences, de réunions de bureau et des activités dont :

En ethnobotanique, 26 plantes décrites et la suite de l’article sur l’herbier de Jean-Jacques PERRET, par Sylvie SERVE. Comptes rendus sur les conférences et les sorties de l’année. L'Azuré d'Icare, par Emilie Salamin-Amar. Le Ginkgo biloba ou l'arbre qui a vaincu le temps, d'après Pierre-François MICHEL. Quelques longicornes de Savoie par Philippe FRANCOZ. Nouvelles observations du damier rouge (Euphydryas intermedia) par Michel SAVOUREY et la suite du catalogue d’insectes de Jean-Jacques PERRET sur les arachnides, par Michel SAVOUREY et André MIQUET Plusieurs articles concernant notre exposition Rousseau 2012 au muséum, par Philippe CLARIOND et Jean-Paul MEUNIER.

6. Les réunions de bureau :

Les membres se sont retrouvés six fois : les 9 février, 15 mai, 31 juin, 9 octobre et 13 décembre.

29 7. Collections Museum :

Nous remercions Monsieur Frédéric DUMONT qui est venu plusieurs fois dans l’année pour continuer à inventorier les livres et bulletins géologiques qui se trouvent dans nos archives à Bassens.

Nous remercions également Daniel STEPANIAN qui durant l’automne, a inventorié les meubles contenant des préparations microscopiques et a rajouté des étagères dans la salle de Zoologie du 1er étage du Muséum pour abriter dans les vitrines, les peaux de loup, le renard, le blaireau, la genette et la fouine.

Don de Pierre Levecq par l’intermédiaire de son fils Jacky : 526 planches d’herbiers soit 19 boites avec les diapositives correspondantes et des catalogues de Gaston Bonnier dont des Flores de France et 2 volumes de la Flore d’Europe. 30 causeries sur les herbiers et 11 (1984 à 1987) sur les champignons. Planches de dessins originaux dont 3 planches sur le Ginkgo.

Prêt de nos deux tables et tréteaux au Club Philatélique de Savoie pour leur manifestation du 12 au 16 octobre, nous en profitons pour les remercier pour le prêt des 20 panneaux d’affichage du 2 mai au 10 octobre, qui nous ont permis de présenter l’exposition Rousseau.

Prêt d’un serpent, d’un pic vert et d’une boite contenant 10 papillons de la collection Borde à la Médiathèque Jean-Jacques Rousseau pour leur exposition « En pleine Lumière » du 25 avril au 12 septembre.

Le prêt à la Galerie Euréka d’une boîte sur l’évolution des abeilles et une autre contenant 24 hyménoptères pour leur exposition « Secrets d’abeilles » du 10 avril au 8 septembre.

Visite mutuelle des réserves avec le musée Savoisien afin de se faire des prêts d’objets.

Monsieur Arnaud CLEMENT a passé deux journées dans nos collections de paléontologie pour ses recherches de fossiles rarissimes.

8. Diverses actions :

Les membres de la LPO ont passés trois soirées au muséum dont deux pour des ateliers organisés par la section herpétologie.

Par ailleurs, nous avons scanné plusieurs anciens articles des bulletins destinés à des recherches sur les tulipes de Savoie.

Nous avons également renseigné et identifié plusieurs insectes qui envahissaient des Chambériens.

Pour finir, un professeur de l’université de Savoie nous a sollicité de nouveau pour avoir une visite du muséum avec ses étudiants en Master Professionnel. Par la suite les collections ont été ouvertes (depuis l’automne 2012) aux groupes scolaires.

30 9. Ouvrages entrés durant l’année 2012 dans la bibliothèque de prêt :

Adhésion à la Fédération Française des Sociétés de Sciences Naturelles. Noctuidae Europeae volume 13, d’Erich Bauer. A la rencontre des Orchidées sauvages de Rhone-Alpes. Les mystérieux effets de la foudre de Raymond Piccoli. Coléoptères cerambycidae de la faune Continentale et de Corse. Carte géologique de Lanslebourg.

Ces ouvrages augmentent le fonds de prêt. Ils vous attendent pour votre plaisir et pour alimenter votre connaissance scientifique.

10. L’informatisation des collections (présentée par Jean-Paul Meunier) :

Du 1er octobre 2011 au 31 janvier 2012, Natacha Nugue et Emmanuel Dubois ont inventorié informatiquement 453 boîtes de papillons soit environ 20 000 espèces sous la tutelle de messieurs Francoz et Savourey.

Nous pouvons les rajouter aux 11 610 échantillons de fossiles et minéraux inventoriés les années précédentes.

Le Muséum étant crédité de 120 000 objets (chiffre probablement approché), la partie déjà inventoriée (11 610 fiches) représente environ 9,6 % du total. Le temps nécessaire pour réaliser cette tâche a été de 4 années scolaires avec en moyenne un peu moins de 4 étudiants par an, consacrant chacun environ 30 heures par mois.

Les gratifications des stagiaires et les salaires de l’employée ont été contrôlés par l’Urssaf.

11. Ouverture Muséum :

La réouverture du muséum a commencé le 15 juin avec une inauguration de l’exposition Rousseau qui nous a permis de recevoir 1100 personnes pour les deux mois d’ouverture. Les groupes scolaires peuvent venir visiter le muséum sur rendez-vous depuis le 13 novembre, ce qui nous a permis de recevoir plus de 500 élèves en moins de 2 mois. Un courrier a été envoyé le 11 octobre aux groupes scolaires, l’inspection académique, nos tutelles et la presse pour annoncer l’ouverture, et celle au public tous les jeudis de 14h à 18h. Plusieurs personnes nous ont sollicitées pour ouvrir plus et certain ont même envoyés des courriers à Madame le Maire. Cette année nous avons participé aux journées européennes du Patrimoine de Savoie les 15 et 16 septembre, où nous avons accueilli 478 visiteurs.

Courrier au Directeur de l’Office National des forêts pour remercier Madame Carole Desplanque pour la visite de la réserve naturelle du Lac Luitel à nos membres le 9 juin.

Le club philatélique de Savoie a eu la gentillesse de déposer notre affiche pour que nous puissions être indirectement présent lors du forum des associations du 14 septembre.

Le rapport d’activité est adopté à l’unanimité.

31 RAPPORT FINANCIER, PAR JEAN-PIERRE FEUVRIER

Le document clôturant les comptes de l’année 2012 est distribué en séance. Jean-Pierre FEUVRIER commente le document ci-dessous :

SITUATION AU 31 DECEMBRE 2012

RECETTES 2012

Cotisations 2 216,00

Visites Gratuit

Subventions : Ville de Chambéry 5 000,00

Conseil Général 5 000,00

Intérêts des placements 661,68

TOTAL RECETTES 12 877,68

DEPENSES 2012

MUSEUM

Activités - déplacements - livres - abonnements 1 626,51

2 271,40 Bulletins et affranchissement Salaires - charges sociales 23 719,17

Chauffage 3 257,85

Fonctionnement (edf- eau- tel- net- etc.) 1 961,47

Assurances - Banque 1 575,40

Réparations - fournitures - entretien 174,01

Total dépenses du Muséum 34 585,81

Expositions temporaires 819,95

Gratification et frais route stagiaires 498,85

TOTAL DEPENSES 35 904,61

RESULTAT -23 026,93

Avoirs au Solde de Avoirs au BILAN 01/01/2012 l'exercice 31/12/2012 57 422,57 -23 026,93 34 395,64

Le résultat se traduit par une perte élevée de 23 026,93 € comme en 2011. La réduction drastique de notre fonds de réserve était une des conditions de nos partenaires financiers Ville

32 de Chambéry et Conseil général, au rétablissement de leurs aides, actuellement réduites à 5000 €. - Nos avoirs au 31.12.12 s'élèvent à 34 395,64 € soit une année de fonctionnement environ. - De 2011 à 2012, la répartition des recettes et dépenses a peu évolué. Notons toutefois :  un accroissement des cotisations (+600 €) lié à l'augmentation du nombre d'adhérents (de 67 à 92) en partie due à l'exposition Rousseau.  la diminution du poste salaires et charges (-5 000 €) ; la valeur élevée de 2011 étant liée à des régularisations des années antérieures. - Le poste expositions temporaires fait référence à l'exposition Rousseau. La modestie de la dépense (819,95 €) par rapport au devis initial de 6 400 € a plusieurs explications :  la peinture du local n'a pas été réalisée (-4 010 €),  le dispositif de sécurité a été pris en charge par le Conseil général (-550 €),  l'édition du guide de l'exposition été prise en charge par la Ville de Chambéry (-300 €). La présentation du budget ne fait pas ressortir la part du bénévolat dans la conception et l'animation de l'exposition ; estimé à 350 heures soit, au SMIC, une valeur de 3 200 €.

Le prévisionnel 2013 Il est présenté une nouvelle fois en déséquilibre malgré l’accroissement des aides de nos partenaires financiers à hauteur de 10 000 €, ce qui n'est pas acquis en dépit de l'effort engagé par notre association pour réduire le fonds de réserve. Ce prévisionnel ne prévoit aucune dépense en terme d'inventaire.

L’assemblée approuve le compte de résultats de l’exercice 2012 et le montant de la cotisation reste inchangé pour l’année 2014 (24 € en individuel et 25 € pour un couple).

Le rapport financier est adopté à l’unanimité.

ELECTION DU BUREAU

1) A main levée, élection des membres du conseil d’administration non titulaires d’une fonction :

Frédéric BRUNNER, Georges CAMBRES, Marc CHAMBRE, Philippe CLARIOND, Jacqueline EVIN, Jean-Pierre FEUVRIER, Philippe FRANCOZ, Jean-Paul MEUNIER, Michel SAVOUREY, Daniel STEPANIAN et Sylvie SERVE.

2) Election à main levé des membres du bureau :

Président : Michel SAVOUREY Vice-Président (entomologie) : Philippe FRANCOZ Vice-Président (géologie) : Jean-Paul MEUNIER Vice-Présidente (botanique) : Sylvie SERVE Trésorier : Jean-Pierre FEUVRIER Secrétaire : Daniel STEPANIAN Secrétaire adjoint : Georges CAMBRES

3) Reste élu au poste de vérificateur aux comptes :

Claudine ANTONIOTTI-PAGANINI.

Nous remercions tous les bénévoles qui œuvrent pour notre Société.

La réunion de l’assemblée générale s’est terminée vers 22 heures par un buffet convivial.

33

LES RAPACES NOCTURNES Ecologie, répartition et statut de conservation en Savoie COMPTE RENDU DE LA CONFÉRENCE DU 14 MARS 2013

Introduction

En dehors de quelques espèces généralement connues du grand public telles que la chouette hulotte ou la chouette effraie, les rapaces nocturnes restent un mystère pour les non ornithologues. Cela vient du fait qu’en dehors des espèces citées, vivant proches ou avec l’Homme, la plupart des espèces sont rarement observées. Vivant dans des habitats spécifiques (falaises, forêts froides, bocage…), discrets et parfois peu enclins à se manifester vocalement, l’observation des rapaces nocturnes se mérite ! Mieux les connaître, c’est augmenter les chances de les observer, mais aussi mieux les protéger…

Le département de la Savoie est pourtant riche de 8 espèces nicheuses sur les 9 présentes en France. Le département compte ainsi 3 espèces de hiboux et 5 espèces de chouettes. Bien qu’exceptionnellement présent en Savoie en migration ou en hivernage (aucune mention récente), le hibou des marais est la seule espèce à ne pas nicher en Savoie. Mais au fait… quelle est la principale différence permettant de distinguer chouettes et hiboux ? Il s’agit d’un petit détail de plumage… le hibou des marais ci-contre est un mauvais exemple mais il s’agit des aigrettes de plumes sur la tête dont les chouettes sont totalement dépourvues. Celles du hibou des marais sont très réduites… mais bel et bien présentes.

Hibou des marais (J.-C. Delattre)

Pour la suite de cet article, je me propose de passer en revue l’ensemble des espèces nicheuses de Savoie. J’évoquerai à chaque fois leurs principales caractéristiques (taille, envergure), leurs exigences écologiques (habitats privilégiés, limites altitudinale, régime alimentaire…), leur répartition et leur statut de conservation au sein du département en l’état actuel de nos connaissances. En conclusion, j’évoquerai les menaces et causes de disparition de certaines espèces mais également les moyens et actions envisageables pour aider à leur conservation.

Les espèces nicheuses de Savoie

Intéressons-nous aux hiboux du département… Au nombre de trois, le plus grand d’entre eux est le hibou grand-duc (Bubo bubo). Avec ses 50 à 70 cm de hauteur et son envergure pouvant dépasser 1,7 m, le plus grand rapace nocturne d’Europe reste difficile à observer. Il niche préférentiellement sur les parois rocheuses s’élevant au minimum à une trentaine de mètres de

34 hauteur, de la plaine jusqu’à 1700-1800 m d’altitude. Le hibou grand-duc affectionne la proximité de zones dégagées (prairies, pâtures…) car il chasse difficilement en zone boisée du fait de sa grande envergure. Il est bien présent sur les falaises de l’Avant-Pays savoyard, jusqu’à basse altitude (Voglans, Chambéry-le-Haut, Nances, Chanaz…) mais également jusqu’en Tarentaise, Maurienne et les contreforts des Bauges bien qu’il y soit plus localisé. A l’heure actuelle, la population départementale compte 32 couples connus.

Le hibou moyen duc (Asio otus) est bien plus petit que le grand-duc, atteignant à peine 40 cm pour les plus grands. Il fréquente les secteurs comportant des haies arborées, des bosquets et occupe également les boisements mixtes jusqu’à la limite de la forêt (1800 m sur les adrets de Maurienne). Il a toutefois besoin de la proximité de zones ouvertes pour la chasse. Peu exigeant, il niche dans les vieux nids de corneilles ou de corbeaux, ce qui lui permet de nicher jusqu’en ville, dans les parcs et jardins. C’est une espèce relativement commune mais qui reste discrète et peu connue. Les Bauges et l’Avant-Pays constituent les secteurs où l’espèce est la mieux connue mais de nombreuses localités restent à découvrir… La population départementale est estimée entre 250 et 500 couples. Hibou moyen duc (J.-C. Delattre)

Le hibou petit duc ou petit duc Scops (Otus scops) est le plus petit représentant des hiboux en Savoie. Ne mesurant qu’une vingtaine de centimètres, il s’agit également du seul rapace nocturne migrateur du département. Se nourrissant principalement d’insectes, il est contraint de passer l’hiver en Afrique et ne revient qu’à partir du mois d’avril en Savoie. Il recherche alors une loge ou un abri de petite dimension pour nicher. Il peut ainsi utiliser une ancienne loge de pic, un trou dans un muret de pierre sèche ou un bâtiment, un cabanon de vigne… Il recherche donc les zones ouvertes où chasser les insectes et d’assez gros arbres pour lui fournir un endroit où nicher. Espèce plutôt méridionale, il est cantonné aux secteurs les plus chauds du département et monte très peu en altitude (rarement au-dessus de 1000 m). C’est pourquoi on va principalement le trouver dans l’Avant-Pays savoyard (Saint-Jean de Chevelu, Les Marches, Saint-Baldoph…) et sur les secteurs les plus chauds de Tarentaise (Bourg Saint- Maurice) et Maurienne (Hermillon, Avrieux, Termignon…). Ce petit rapace bien sympathique est rare sur le département du fait de ses exigences écologiques (secteurs chauds, offrant des loges ou des abris, riches en insectes…) et on ne compte que 20 à 30 couples en Savoie.

C’est du côté des chouettes que le record de petitesse est détenu. La chouette chevêchette (Glaucidium passerinum) est le lutin de nos forêts froides. Du haut de ses 16 à 20 cm, elle n’est pas toujours facile à repérer mais facilite parfois la tâche de l’observateur en se perchant au sommet des épicéas ou des sapins. D’affinité boréale, elle affectionne tout particulièrement les forêts froides de conifères ou les boisements mixtes des secteurs mal exposés. Elle a par contre besoin de zones ouvertes et de clairières pour chasser. On la trouve à partir de 1000 m et jusqu’à la limite de la forêt à plus de 2000 m. Sédentaire et ne pouvant chasser les campagnols et mulots sous la neige, elle se spécialise sur les petits oiseaux (roitelets, mésanges, pinsons…) pour survivre durant la période hivernale. L’espèce niche quasiment uniquement dans des loges creusées par le pic épeiche, rarement dans des cavités naturelles.

35 La région accueille la plus grosse population française de l’espèce et la Savoie regroupe une bonne proportion de la population régionale. Les massifs des Bauges, de la Chartreuse ainsi que les massifs internes (Vanoise, Beaufortin…) regroupent l’essentiel des effectifs. Toutefois, de nombreuses localités restent à découvrir et la population savoyarde représente 75 à 150 couples.

La Savoie accueille également une proche cousine de la chevêchette, la chouette chevêche ou chevêche d’Athéna (Athene noctua). Cette dernière est légèrement plus grande (25 cm) et reste surtout cantonnée aux basses altitudes (moins de 900 m). Spécialisée sur la prédation des gros insectes, des petits mammifères (souris, campagnols…) et non migratrice, elle est confinée aux secteurs à faible enneigement et subit parfois de lourdes pertes lors des hivers rigoureux. On peut la trouver dans les secteurs de bocage, les pâtures parsemées de gros arbres ou d’arbres taillés en têtards qui lui offrent des cavités où nicher mais également les cultures tant qu’elle trouve à se loger ! Chouette chevêche (J.-C. Delattre)

Elle ne dédaigne pas les cabanons de vigne, les granges ou les trous dans les vieux bâtiments en pierres. Sensible aux hivers longs et rigoureux, liée à un paysage d’agriculture extensive, à la présence de cavités et ne pouvant se réfugier en montagne, la chouette chevêche a subit une forte régression depuis la deuxième moitié du vingtième siècle. La population savoyarde est estimée à moins de 100 couples, essentiellement cantonnés à l’Avant-Pays et à la combe de Savoie (La Chavanne, Les Marches…). Quelques couples restent encore à découvrir en Maurienne notamment mais la population a perdu plus de 50% de ses effectifs en moins de 50 ans…

La chouette de Tengmalm (Aegolius funereus) se rapproche de la chouette chevêchette par son écologie mais est environ deux fois plus grosse (un peu moins de 30 cm). Elle fréquente les boisements frais de hêtre et de conifères entre 900 et 2000 m d’altitude. Strictement forestière, elle peut occuper des massifs denses et est spécialisée dans la chasse des petits mammifères en sous-bois. Ne migrant pas mais n’étant pas assez lourde pour chasser ses proies sous la neige, elle peut souffrir d’hivers longuement enneigés. L’espèce niche dans des loges creusées par le pic noir voire dans des cavités naturelles de grands arbres (fissures donnant sur une loge, chandelle…). Chouette de Tengmalm (J. Hahn)

36 La répartition de l’espèce en Savoie se superpose assez bien à celle de la chevêchette avec une bonne occupation des massifs de la Chartreuse, des Bauges et de la Vanoise. La population est estimée entre 100 et 200 couples, dont de nombreux restent à découvrir !

La chouette effraie, ou dame blanche (Tyto alba) est une beau rapace nocturne souvent connu du grand public car vivant à proximité de l’Homme. C’est une chouette de plus de 30 cm, spécialiste de la chasse des petits mammifères en zones ouvertes qu’elle survole sans relâche ou surveille depuis un perchoir bas (poteau de pâture, poteau électrique…). Volant à basse altitude, elle est souvent victime de collisions avec des véhicules sur le réseau routier secondaire. Cette espèce ne monte pas en altitude (rarement au-dessus de 500 m, quelques cas de nidification à 900 m sont toutefois connus) et évite fortement les secteurs très boisés. En Savoie, elle est donc cantonnée à la plaine et reste très rare dans les vallées (aucune donnée récente en Tarentaise ou Maurienne).

Chouette effraie (D. Gerber)

La dame blanche niche préférentiellement dans le bâti humain (granges, clochers, combles, greniers accessibles…) et a oublié depuis bien longtemps son habitat d’origine constitué par les falaises de basse altitude. Cette adaptation lui pose aujourd’hui de gros soucis car la fermeture des clochers à cause des pigeons, l’aménagement des combles et des vieilles granges entrainent une très forte diminution des sites de nidification potentiels. Ce constat ajouté à une forte mortalité routière a entrainé ces dernières décennies une chute spectaculaire des effectifs de cette espèce. Déjà peu commune en Savoie, l’espèce est aujourd’hui au bord de l’extinction sur le département. Seules quelques observations sont connues de l’ouest du département (Tresserve, Attignat-Oncin, Chambéry, Laissaud…). Il reste sans doute moins de 20 couples sur l’ensemble du département. La cohabitation est pourtant possible !

La chouette hulotte (Strix aluco) vient terminer ce tour des rapaces nocturne de Savoie du haut de ses 40 cm. C’est la plus grande de nos chouettes et également la plus commune. Peu exigeante, elle fréquente de nombreux types de paysages allant des parcs et jardins jusqu’aux boisements d’altitude. On la trouve donc de Chambéry jusqu’à plus de 1800 m d’altitude. Sa seule exigence étant de trouver des proies (oiseaux, petits mammifères, amphibiens…) et un endroit où nicher (loge, tronc creux, vieux nid de corneille, habitation…).

Chouette hulotte ayant capturé une pie (J. Hahn)

37 Cette grande capacité d’adaptation a favorisé cette espèce qui a pu facilement s’adapter à de nombreuses conditions et milieux, même remaniés par l’Homme. Ceci explique qu’il s’agit à l’heure actuelle de l’espèce de rapace nocturne la plus commune et la plus répandue en France et en Savoie. On estime que la population départementale dépasse les 1000 couples.

Les causes de mortalité et de déclin

La principale cause de disparition des rapaces nocturnes et de nombreuses autres espèces d’oiseaux est la disparition ou la diminution de leurs habitats et des sites de nidification. La coupe des vieux arbres, le remplacement des vergers traditionnels par des arbres de basse tige n’offrant aucune cavité, l’utilisation de pesticides ou l’urbanisation galopante et les rénovations ne laissant aucune place à la faune sont d’autant de facteurs participant à la diminution des espèces sensibles que sont la chouette effraie, la chouette chevêche ou le hibou petit duc. A ces causes de mortalité indirectes, viennent s’ajouter des causes de mortalité directe comme les collisions routières, les intoxications (raticides, pesticides…), les tirs, les collisions avec des surfaces vitrées, des câbles ou des lignes électriques. Les poteaux creux sont également de véritables pièges pour les petites espèces qui sont incapables d’en ressortir (diamètre trop faible pour voler). Ce problème commence toutefois à être réglé avec le concours d’EDF après plus de dix années d’efforts.

Chouette effraie ayant percuté une ligne électrique (J. Hahn)

En cumulant l’ensemble de ces problèmes, on comprend mieux pourquoi certaines espèces sont en diminution constante depuis quelques décennies. La diminution des espaces de chasse et des sites de nidification additionnée aux risques de mortalité importants induits par les activités humaines sont les principales raison de ces déclins. Il est alors également facile de comprendre que les espèces peu exigeantes ou présentes en altitude sont moins concernées par ce déclin et ces risques.

Comment aider nos rapaces nocturnes ?

Pour essayer de conserver et protéger ces rapaces nocturnes, le moyen le plus efficace est de protéger leurs habitats. A commencer par ce qui leur permet de nicher comme les grands arbres à cavités, les vieux murets de pierre sèche offrant des trous, les vergers traditionnels dits de haute tige, des boisements âgés et diversifiés (ce qui n’exclut pas des coupes ponctuelles !), des accès aux granges, clochers, greniers ou bâtiment techniques. Le maintien de l’agriculture extensive ou le développement d’une exploitation moins intensive (rotation des cultures, adaptation au terroir, lutte raisonnée avec de produits moins toxiques…) sont également des facteurs positifs.

38 En solution de secours et plus facile à mettre en œuvre à l’échelle personnelle, on peut proposer des nichoirs aux espèces en difficulté. Il s’agit là d’une solution secondaire mais qui peut s’avérer efficace tant qu’il reste des zones de chasse à proximité. De nombreuses espèces utilisent les nichoirs qu’on leur propose : chouette effraie, chouette hulotte, chouette chevêche, hibou petit duc sont les plus fréquents. Des plans de nichoirs pour ces différentes espèces peuvent facilement être trouvés sur Internet. Certains modèles peuvent facilement être conçus, notamment à partir d’une simple caisse à vin percée d’un trou du bon diamètre pour la chouette chevêche ou le hibou petit duc…

Participez à l’amélioration des connaissances ! La LPO Savoie s’est dotée depuis 2010 d’un formidable outil de partage des connaissances naturalistes : www.faune-savoie.org. Il est possible de s’inscrire en quelques clics et de transmettre vos observations sur l’ensemble du département pour de nombreux groupes faunistiques (oiseaux, reptiles, amphibiens, mammifères, papillons de jour, libellules, grillons, criquets et sauterelles). Participer vous permet également de consulter les observations des autres inscrits et de vous tenir informé de l’évolution des connaissances et des actualités naturalistes.

N’hésitez pas à participer… Mieux connaître est également un bon moyen pour mieux protéger !

Jeune chouette hulotte (J. Hahn)

Jérémie HAHN LPO Savoie

39

LES ANIMAUX SAUVAGES EN SAVOIE ET ENVIRONS COMPTE RENDU DE L’EXPOSITION DU 4 FÉVRIER AU 30 MARS 2013

Cette exposition d’animaux sauvages montre différentes espèces que l’on peut rencontrer en montagne, plaines et lacs de Savoie et des environs. En règle générale, la prise de photos animalières demande de la patience, la connaissance du terrain et les habitudes des animaux, une approche lente et discrète. La photographie a bien évolué depuis l’utilisation des films argentiques, comme ces bouquetins pris il y a plus de dix ans. L’arrivée du numérique a bouleversé la photo. Il facilite l’amélioration de la qualité avec ses possibilités techniques et limite beaucoup moins le nombre de prises de vues. Les objectifs longue focale comme le 500 mm permettent une prise de vue plus rapprochée et évitent de trop déranger et de faire fuir des chamois, mouflons et oiseaux. L’objectif macro 100 mm a été utilisé pour prendre le papillon « gazé ». Plusieurs des photos exposées ont eu du succès dans des concours photo internationaux.

Combat de bouquetins en Maurienne Saut de cabri de bouquetin, massif des Bornes (74)

Chamois femelle et jeunes en Chartreuse Harle bièvre et colvert au lac du Bourget

Marc CHAMBRE

40

RÉSERVES NATURELLES DE LA GRANDE SASSIÈRE ET DE LA BAILLETAZ UN COUP POUR RIEN !

Raisons du choix de ce secteur

Avec l’âge, je m’aperçois qu’il me reste énormément de « coins » de Savoie que je ne connais pas. J’ai donc profité de l’année 2012 pour aller faire un tour en Vanoise. Comme tous les Parcs Nationaux, une législation relative aux espèces vivantes (animales et végétales) m’a fait prendre contact avec les responsables du PN, afin de définir ce que je pourrais faire et à quelles dates. 2 secteurs furent choisis, un côté Maurienne, sur la commune d’Aussois, le second côté Tarentaise, sur la commune de Peisey-Nancroix (articles en préparation). Mon contact me proposa également 2 secteurs hors périmètre du PN: les Réserves Naturelles de la Bailletaz et de la Grande Sassière, respectivement sur les communes de Val d’Isère et de Tignes. A ces altitudes dépassant les 2200 mètres, les prospections naturalistes de touts genres sont tributaires de la météo. 3 sorties furent donc programmées pendant les mois de juillet, août et septembre. La première et la dernière tombèrent à l’eau, sans jeu de mot, et pour la seconde, l’eau se transformant même en neige ! Pour celle du 22 août, la météo clémente permis enfin une sortie sur le terrain.

Localisation du site et déroulement de la journée

En quittant Boug St-Maurice, la D902 nous amène au Lac du Chevril, plus connu sous le nom de Lac de Tignes. Tout de suite à gauche après le tunnel du Saut, une petite route serpente en direction de notre but, c'est-à-dire le parking du Saut, qui est le bout de la route aménagée autorisée au public. Ici commence la RN et c’est avec une autorisation de circuler que nous poursuivons le chemin jusqu’à hauteur du chalet du Santel, également nommé chalet des Gardes ou de la Sassière. Découvrant le site, je n’ai pas voulu aller trop loin et pour la prospection du matin, les 3 agents de la RN et moi-même sommes restés le long du ruisseau de la Sassière, entre le chalet et les flancs des Côtes des Lanches. Comme pour la botanique, ce n’est pas la distance qui compte, mais surtout de bien regarder autour de nous. Et ce jour là, il a fallu vraiment être vigilant, car les conditions de sécheresse ne nous ont permis de voir que quelques dizaines d’espèces, et en nombre limité à chaque fois (voir tableau). L’après-midi, les prospections nous amenèrent au sud du chalet, en direction du Lac du Plan du Cheval. Même constatation que le matin, c’est çà dire très peu de « bestioles » qui volaient. Les rares données recueillies furent faites le long du ruisseau du même nom, qui sert de déversoir au lac, pour alimenté le ruisseau de la Sassière, 200 mètres en contrebat. La fin d’après-midi arriva assez vite, et rendez-vous fut pris pour la « nocturne » papillons qui devait se faire à côté du chalet. C’est par facilité que ce secteur fut choisi, l’autorisation de circuler me permettant d’amener le matériel assez encombrant au plus près. Mais malheureusement, la fin de journée se termina (encore) sous un déluge d’eau et obligea les participants à un départ rapide !

Conclusion

Le site est actuellement sous-exploité en ce qui concerne les hétérocères, et ce n’est pas la liste de cette journée qui va faire progresser nos connaissances. D’où une demande de reconduction pour les années 2013 / 2014, dans les mêmes conditions. La seule chose positive de cette journée est l’impact auprès du public qui était encore bien présent sur le secteur. C’est souvent avec étonnement et curiosité que les randonneurs vinrent nous trouver avec les mêmes questions, à savoir « Mais, qu’est-ce que vous faites », « Oh,

41 vous êtes dans une réserve, vous n’avez pas le droit », et pleins d’autres du même genre. Ce qui montre une certaine évolution du grand public dans la façon de voir la montagne par rapport à 20 ans en arrière. Il y a 20 ans, nous aurions sûrement croisé d’autres « chasseurs ».

Les espèces d’hétérocères observées le 22 août

Secteur chalet du Santel / rive gauche du ruisseau de la Sassière

Cerapteryx graminis (Linnaeus, 1758) 4811 NOCTUIDAE La Noctuelle du gramen Chersotis cuprea (Denis & Schiffermüller, 1775) 4925 NOCTUIDAE La Noctuelle cuivreuse Chersotis multangula (Hübner, [1803]) 4931 NOCTUIDAE La Chersotide de la mollugine tinctaria (Hübner, [1799]) 4036 GEOMETRIDAE L’Orangée des alpages Eana argentana (Clerck, 1759) 2004 TORTRICIDAE La Tordeuse argentée Idaea flaveolaria (Hübner, [1809]) 3609 GEOMETRIDAE L’Acidalie jaune Mesotype verberata (Scopoli, 1763) 3814 GEOMETRIDAE La Larentie rupestre Nomophila noctuella (Denis & Schiffermüller, 1775) 3172 CRAMBIDAE La Nomophile Xestia ochreago (Hübner, 1790) 4881 NOCTUIDAE La Ségétie ochracée

Secteur lac du Plan du Cheval

Chersotis cuprea (Denis & Schiffermüller, 1775) 4925 NOCTUIDAE La Noctuelle cuivreuse Crocota tinctaria (Hübner, [1799]) 4036 GEOMETRIDAE L’Orangée des alpages Mesotype verberata (Scopoli, 1763) 3814 GEOMETRIDAE La Larentie rupestre Metaxmeste phrygialis (Hübner, 1796) 3078 CRAMBIDAE L’Hercyne rupicole Nomophila noctuella (Denis & Schiffermüller, 1775) 3172 CRAMBIDAE La Nomophile Pempeliella ornatella (Denis & Schiffermüller, 1775) 2827 PYRALIDAE ? Pygmaena fusca (Thunberg, 1792) 3980 GEOMETRIDAE La Phalène mouche Xestia ochreago (Hübner, 1790) 4881 NOCTUIDAE La Ségétie ochracée Zygaena exulans (Hochenwarth, 1792) 1909 ZYGAENIDAE La Zygène des sommets

Quelques fiches d’espèces vues sur le site Les numéros correspondent aux listes Leraut et Robineau

La Noctuelle cuivreuse L 4925 - R 1497 Chersotis cuprea (D. & S., 1775) De répartition eurasiatique boréo-alpine, cette noctuelle se rencontre sur l’ensemble des massifs montagneux de l’Espagne à l’Europe centrale et nordique. S’observe facilement la journée, butinant les chardons et les centaurées, mais vole très peu. Vient également à la lumière.

Univoltine: été, et s’attarde en automne envergure : 25 mm Chenille hivernante, qui se développe sur un grand nombre de plantes basses.

42 L’Orangée des alpages L 4036 - R 0618 Crocota tinctaria (Hübner, [1799]) Cette Fidonie de la famille des géomètres est très commune en montagne au-dessus de 1200 mètres, et dépassant par endroit les 3000. Contrairement à la Noctuelle cuivreuse, cette espèce vole facilement de jour comme de nuit. Pour cette journée, c’est l’espèce la plus répandue.

Univoltine: principalement juillet envergure : 30 mm Chenille hivernante, qui a comme plantes nourricières diverses plantes basses comme les : sp, sp, sp, etc.

La Phalène mouche L 3980 - R 0568 Pygmaena fusca (Thunberg, 1792) Comme son nom l’indique, de taille très petite, cette géomètre est une boréo-alpine présente dans l’Arc alpin et en Scandinavie. Vole au ras du sol, à une altitude comprise entre 2000 et 3000 mètres, sur des secteurs exposés sud. La femelle à les ailes réduites et ne vole pas !

Univoltine: mai à août envergure : 15 mm Chenille à évolution en 2 temps. Fin août, puis après hibernation, début juillet de l’année suivante ! Plantes nourricières connues : Viola calcarata, Vaccinium uliginosum, Draba verna.

La Nomophile L 3172 Nomophila noctuella (D. & S., 1775) Espèce migratrice très commune en Savoie. Se rencontre de l’Afrique du nord au Japon.

Appartient à la famille des Crambidés, récemment séparée des Pyrales. Vient bien aux sources lumineuses.

Univoltine : début d’été jusqu’en décembre envergure : 20 mm Chenille sur un grand nombre de plantes basses comme les trèfles, les graminées, etc.

Philippe FRANCOZ

43 ETHNOBOTANIQUE

LYSIMAQUE COMMUNE – LYSIMACHIA VULGARIS L.

NOMENCLATURE Son nom latin a été attribué par Carl von Linné en 1753. Synonymie : Lysimachia capillaris Opiz, Lysimachia lutea Bubani, ... Noms vernaculaires : lysimaque commune, grande lysimaque... Étymologie : Lysimachia est le nom latin ancien attribué à ces plantes, peut-être découvertes par Lysimachos, médecin de l'Antiquité. Le qualificatif vulgaris signifie commun, répandu.

DESCRIPTION BOTANIQUE Grande plante de la famille des primulacées dont la tige dressée peut atteindre la hauteur 60 cm à 1,50 m. Les feuilles ovales sont opposées ou disposées par 3-4 en verticilles. L’inflorescence est en panicule de fleurs jaunes, glabres et à calice à lobes bordés de rouge. La floraison a lieu de juin à août. C’est une plante commune que l’on peut trouver de la plaine à l’étage montagnard. Elle aime les sols humides voire inondés. On peut la trouver en Savoie dans les magnocariçaies (marais à grands Carex), les mégaphorbiaies marécageuses en bordures de cours d'eau, fossés, ainsi que dans les aulnaies alluviales avec Lycopus europaeus, Filipendula ulmaria, Lythrum salicaria, Humulus lupulus, ou l'invasif Solidago gigantea…

“Deutschlands Flora in Abbildungen”-STURM

USAGES DIVERS Les fleurs fournissent un colorant naturel qui sert à teindre la laine en jaune ou les cheveux en blond. Les racines donnent une teinture brune.

44 MÂCHES – Valerianella carinata Loisel., Valerianella locusta (L.) Laterr.

La mâche cultivée des producteurs de primeurs est Valerianella locusta var. olitoria. Nous avons quatre valérianelles spontanées en Savoie, deux sont très rares, Valerianella dentata et Valerianella rimosa et deux autres fréquentes, Valerianella carinata et Valerianella locusta. Leur distinction se fait essentiellement sur l'aspect des fruits. Toutes les jeunes feuilles de ces espèces sont consommables.

MÂCHE CARÉNÉE - VALERIANELLA CARINATA LOISEL.

NOMENCLATURE Son nom latin a été attribué par Jean-Louis-Auguste Loiseleur-Deslongchamps, botaniste français, en 1810. Synonymie : Valerianella corymbifera Boiss., Valerianella columnae Bulbani … Nom vernaculaire : mâche carénée, doucette carénée... Étymologie : le mot Valerianella est un diminutif de Valeriana, valériane, un genre voisin qui se distingue par le fait qu'il regroupe des plantes vivaces à aigrette plumeuse à maturité. L’espèce carinata du latin carina, carène d'un bateau, évoque la forme creusée du fruit.

DESCRIPTION BOTANIQUE Herbacée annuelle de 10 à 30 cm de haut, autrefois de la famille des valérianacées et dans celle des caprifoliacées selon la classification phylogénique actuelle. La tige hexagonale, poilue sur les angles, porte des feuilles entières en rosette basale, les supérieures sont opposées, linéaires, obtuses. L’inflorescence est une cyme composée de nombreuses fleurs blanches qui apparaissent d’avril à juin. Les fruits sont des akènes allongés, prismatiques et creusés d'un profond sillon d'un côté. C’est une plante très fréquente de l’étage collinéen à montagnard, abondante dans les champs, chemins, vignes sur sols argileux calcaires. On peut la trouver dans la végétation adventice avec le cortège Allium vineale, Euphorbia helioscopa, Fumaria officinalis, Mercurialis annua, Muscari racemosum, … “Flore de la France” - COSTE

USAGE ALIMENTAIRE Alfred Chabert indique dans son ouvrage que les jeunes feuilles de mâche sont récoltées pour préparer des salades. Les rosettes des diverses valérianelles se récoltent dès le début du printemps, les feuilles très tendres, de saveur douce au léger goût de noisette, se dégustent crues.

45 MÂCHE POTAGÈRE - VALERIANELLA LOCUSTA (L.) LATERR.

NOMENCLATURE Son nom latin a été attribué par Jean-François Laterrade, botaniste français, en 1821. Synonymie : Valeriana locusta L., Valerianella olitoria (L.) Pollish... Nom vernaculaire : mâche, doucette, rampon... Étymologie : Le mot latin locusta signifie sauterelle, langouste, on peut se demander quel est le rapport avec cette plante ?

DESCRIPTION BOTANIQUE Valerianella locusta, espèce très voisine de la précédente, s'en distingue par une tige tétragone dans le bas, des feuilles supérieures lancéolées, aigües et surtout par ses fruits subsphériques et ridés en travers. Elle se rencontre aussi avec la végétation ségétale sur sols carbonatés, au bord des chemins, dans les vignes.

“Flore de la France” - COSTE

USAGE ALIMENTAIRE Identique à la mâche carénée vue précédemment.

Rappel bibliographie : CHABERT A., 1897 – Plantes médicinales & plantes comestibles de Savoie, Curandera – 152 p.

46 MAÏANTHÈME À DEUX FEUILLES – MAIANTHEMUM BIFOLIUM (L.) F. W. SCHMIDT

NOMENCLATURE D'abord classé dans le genre Convallaria par Linné, son nom latin a été attribué par Franz Wilibald Schmidt, botaniste et zoologiste tchèque, en 1794. Synonymie : Convallaria bifolia L., Convallaria quadrifida Lam., Maianthemum convallaria Weber, … Noms vernaculaires : maïanthème à deux feuilles, petit muguet... Étymologie : le genre Maianthemum vient du latin maius, mai et du grec Anthemon, fleur, en raison de l'époque de floraison de la plante. Bifolia fait allusion aux deux feuilles de la tige fleurie, (à l'état végétatif, la plante n'a qu'une feuille comme me l'a fait remarqué Arthur Lequay, excellent botaniste et fin observateur !).

DESCRIPTION BOTANIQUE Plante vivace de 8 à 20 cm de l'ancienne famille des liliacées, actuellement dans celle des asparagacées selon la classification phylogénique. Les deux feuilles entières, ovales en coeur sont alternes et pétiolées. Les petites fleurs à 4 tépales blancs, odorantes, sont disposées en grappe terminale dressée. Les fruits sont des baies rougeâtres. C’est une plante fréquente de l’étage collinéen à subalpin. Le maïanthème aime l'ombre des pessières-sapinières. On peut le trouver en Savoie en compagnie des essences forestières telles que Lamium galeobdolon, Lonicera alpigena, Phyteuma spicatum, Vaccinium myrtillus, Valeriana tripteris et diverses fougères.

“Flora von Deutschland Österreich und der Schweiz” (1885)-THOMÉ

USAGE MEDICINAL – TOXICITÉ En cas d'ingestion des baies par de jeunes enfants, risque potentiel, la symptomatologie observée sera voisine de celle engendrée par le muguet, c'est-à-dire des troubles digestifs et dans les cas les plus graves : arythmie, vertiges et spasmes musculaires.

47

MARRUBE COMMUN– MARRUBIUM VULGARE L.

Le marrube commun n'a rien de commun en Savoie ; c'est une plante rare et vulnérable du fait d'un nombre restreint de populations (Delahaye & Prunier, 2006). On évitera donc d'en récolter.

NOMENCLATURE Son nom latin a été attribué par le botaniste suédois, Carl von Linné, en 1753. Synonymie : Marrubium lanatum Benth., Marrubium album St-Lag., … Noms vernaculaires : marrube commun, marrube blanc… Étymologie : le genre Marrubium a, pour certains auteurs, une origine hébreuse dans Mar, amer et Rob, suc, pour d'autres auteurs, il provient de Marruvium, actuelle ville de San Benedetto en Italie. Vulgares signale la large répartition de la plante en Europe, Asie, Afrique et introduite en Amérique.

DESCRIPTION BOTANIQUE Plante herbacée vivace de 30 à 60 cm, listée dans la famille des lamiacées. La tige rameuse porte des feuilles tomenteuses, ridées. Les cymes multiflores sont composées de petites fleurs blanches, munies d'un calice à 10 dents crochues. La floraison a lieu de juin à septembre. C’est une plante rare de l’étage collinéen à 1500 m. D'origine méditerranéenne, le marrube apprécie les situations sèches et chaudes et les sols riches en nitrate des reposoirs à bestiaux, ou les terrains en friches. On pourra observer le marrube dans la végétation rudérale en compagnie de Carduus nutans, Cirsium eriophorum, Cynoglossum officinale, Reseda lutea, Verbascum densiflorum...

“Bilder ur Nordens Flora” – LINDMAN

USAGE MEDICINAL – TOXICITÉ Autrefois recommandée pour ses vertus stomachiques, fébrifuges et expectorantes, l'infusion des sommités fleuries du marrube était aussi appliquée en usage externe comme vulnéraire. Marrubium vulgare est sur la liste de la 10ème édition de la pharmacopée française, il y est indiqué pour traiter les affections bronchiques et toux bénignes. La monographie du marrube a été supprimée de la pharmacopée en 2005.

48 MASSETTE À LARGES FEUILLES – TYPHA LATIFOLIA L.

Les nombreux lacs et les marais de Savoie offrent des milieux de vie possibles pour les massettes. Signalons ici que la massette à feuilles étroites (Typha angustifolia) et la petite massette protégée sur tout le territoire français (Typha minima) sont rares en Savoie et qu'il faudra se contenter de les regarder sans les récolter.

NOMENCLATURE Son nom latin d’espèce a été attribué par Carl von Linné, botaniste suédois, en 1753. Synonymie : Typha pendula Fisch. ex Sond., Typha palustris Bulbani, … Noms vernaculaires : massette à larges feuilles, quenouille à larges feuilles… Étymologie : Typha était le nom générique donné à ces plantes des marais, peut être dérivé du grec ancien tiphos, marais, avec une erreur de transcription du i en y ? Latifolia est attribué en raison de la largeur de ses feuilles par rapport à d'autres espèces. Massette a été attribué en raison de l'inflorescence dense et en forme de massue.

“Flora batava” (1800) – KOPS

49 DESCRIPTION BOTANIQUE Plante vivace hélophyte (plante dont le bourgeon de survie est sous l'eau mais dont une partie des feuilles et les fleurs émergent) de la famille des typhacées dont la hauteur varie de 1 à 2,5 m. Les tiges portent des feuilles vertes, torsadées larges de 10 à 20 mm. Les épis mâles et femelles ont la même longueur (12 à 20 cm) et sont superposés et contigus. L'épi femelle, situé dessous, devient brun foncé à maturité, en juin-juillet. C’est une plante fréquente de plaine surtout, parfois de montagne, dans les marais, fossés, bords de lacs, roselières, en compagnie de Butomus umbellatus, Equisetum fluviatile, Phalaris arundinacea, Phragmites australis…

USAGE ALIMENTAIRE Les jeunes pousses de feuilles peuvent se consommer comme légumes.

USAGES DIVERS Les Typha latifolia sont plantés dans des zones de lagunages filtrants pour épurer les eaux domestiques usées. Le rôle des massettes (et des roseaux, Phragmites australis) est principalement mécanique ; les tiges et les rhizomes perforent la couche de boues superficielles, ce qui permet l’oxygénation et évite le colmatage. La masse foliaire des végétaux préserve la surface des filtres d’une éventuelle dessiccation estivale et assure de l’ombre aux bactéries, leur permettant un bon développement. En hiver, la couverture des macrophytes permet de limiter l’impact des faibles températures (gel). Le rôle des roseaux pour l’élimination directe de la pollution (carbone, azote, phosphore) est extrêmement faible. Ce sont les micro-organismes, se développant dans le support filtrant, qui assurent l’épuration biologique. Rmq : il existe une station d'épuration biologique de ce type à Curienne, à Epersy et à Ruffieux en Savoie. Les massettes sont vendues dans les jardineries comme plantes aquatiques esthétiques pour fixer les berges des bassins ; elles permettent de confectionner des bouquets secs. Autrefois, on utilisait leurs feuilles pour faire du papier.

50

MAUVE SAUVAGE – MALVA SYLVESTRIS L.

Cinq Malva sont inscrites dans l’inventaire commenté et liste rouge des plantes vasculaires de Savoie (Delahaye & Prunier, 2006), une seule est très rare, Malva alcea. Cette dernière et Malva moschata ont des fleurs isolées à l'aisselle des feuilles inférieures et médianes et ont leurs bractées supérieures en général profondément découpées. Malva sylvestris et Malva neglecta sont dans le groupe des mauves à fleurs groupées par plus de deux, et aux feuilles peu échancrées. Toutes peuvent avoir les mêmes emplois, identiques à celui de la guimauve vue précédemment. Nous ne décrirons ci-après que la plus citée pour ses propriétés, la mauve sauvage.

NOMENCLATURE Cette espèce a été décrite par Carl von Linné, botaniste suédois, en 1753. Synonymie : Malva erecta Gilib., Malva vulgaris Ten., Malva elata Salisb., …. Noms vernaculaires : mauve sauvage, mauve des bois, grande mauve… Étymologie : Malva est l'antique nom donné à diverses espèces de la famille des malvacées, il pourrait venir du grec Malakos, mou, peut être en raison de leur propriété émolliente ? Le qualificatif de sylvestris, qui vit dans les forêts, n'est pas très approprié à cette espèce qui fréquente plutôt les endroits rudéraux !

DESCRIPTION BOTANIQUE Cette malvacée vivace peut atteindre 30 à 120 cm de haut. La tige dressée porte des feuilles lobées, irrégulièrement dentées. Les fleurs sont groupées par 2 à 6 à l'aisselle des feuilles, les pétales roses, veinés de stries pourpres, sont longs de 15 à 20 mm ; elles s’épanouissent de juin à septembre. Le fruit de 8-10 mm est composé de carpelles ridés disposés en cercle. C’est une plante fréquente, que l’on trouve de la plaine jusqu’à l’étage montagnard, dans les décombres, bords de chemin. La mauve aime les sols assez secs, comme d'autres rudérales annuelles telles que Bromus sterilis, Cirsium arvense, Hordeum murinum, Lactuca seriola, Matricaria perforata…

“Köhler's Medizinal-Pflanzen” - KÖHLER (1897)

USAGE MEDICINAL – TOXICITÉ Malva sylvestris est inscrite dans la 10e édition de la pharmacopée française. Les fleurs et feuilles, riches en mucilage, sont indiquées pour les affections dermatologiques (crevasses, écorchures, gerçures et piqûres d'insectes) ainsi que pour les colites spasmodiques et les

51 irritations ou gênes oculaires (atmosphère enfumée, effort visuel, bain de mer ou de piscine). Les fleurs sont de plus préconisées pour les toux bénignes et les affections de la cavité buccale ; elles entrent dans la composition du “sirop pectoral des 7 fleurs” avec la guimauve, le tussilage, le bouillon blanc, le pied de chat, la violette et le coquelicot. La monographie de la mauve a été supprimée de la pharmacopée en 2001.

USAGES ALIMENTAIRE Les feuilles se récoltent au printemps et se consomment cuites ; on peut les ajouter à un bouillon de volaille, à un gratin d'autres plantes, les cuisiner en omelette, beignets... Les fruits cueillis en été avant maturité, appelés parfois fromageons, ont un délicieux goût de noisette fraîche. Les fleurs décorent salades et desserts.

Rappel bibliographie : AESCHIMANN D., LAUBER K., MOSER D. M., THEURILLAT J.-P., 2004 – Flora alpina, tome 2, Belin éditeur – 1188 p. CHABERT A.., 1897 – Plantes médicinales & plantes comestibles de Savoie, Editions Curendera - 152 p. FOURNIER P., 1947 – Le livre des plantes médicinales et vénéneuses de France, tome 2, Paul Lechevalier éditeur, 447 p. PAUME M.-C., 2005 – Sauvages et comestibles, Édisud - 194 p.

52 MELÈZE – LARIX DECIDUA MILL.

NOMENCLATURE Son nom latin a été attribué par Philip Miller, botaniste écossais, en 1768. Synonymie : Pinus larix L., Larix europaea DC.… Noms vernaculaires : mélèze commun, mélèze d'Europe, ... Étymologie : le genre Larix est d'origine inconnue, le mélèze n'étant pas connu des Grecs, ce mot serait issu d'un langage des montagnards alpins. Le qualificatif latin decidua signifie à feuilles caduques, une particularité de ce conifère. Mélèze a une origine tout aussi énigmatique, il est peut être dérivé du latin mel, miel, en raison de sa résine ?

DESCRIPTION BOTANIQUE Arbre de la famille des pinacées dont la hauteur varie de 30 à 35 m, parfois 50 m. Sa longévité est de 1000 ans et plus... L'écorce grise est lisse puis se crevasse. Les aiguilles, insérées en rosettes, ne dépassent pas 4 cm de long. Les châtons femelles rouge carmin à violacés se transforment en cônes ligneux de 2 à 4 cm renfermant des graines ailées. Ce conifère résiste au froid et a besoin de lumière. C’est un arbre assez commun à l'étage subalpin, où il forme souvent des peuplements clairs en compagnie de l'arole (Pinus cembra), dans les landes à éricacées avec Arctostaphylos uva-ursi, Rhododendron ferrugineum, Vaccinium myrtillus... Il est parfois en concurrence avec l'épicéa (Picea abies) ou le pin à “Köhler's Medizinal-Pflanzen” - KÖHLER crochets (Pinus uncinata).

USAGE MEDICINAL – TOXICITÉ Le mélèze doit ses propriétés médicinales à sa résine visqueuse, jaunâtre, à odeur agréable qu'on en extrait. Appelée térébenthine du mélèze ou térébenthine de Briançon ou encore térébenthine de Venise, elle est inscrite sur la liste de la pharmacopée française révisée. Elle est employée dans les cas de bronchites, cystites, mais souvent remplacée de nos jours par l'essence de térébenthine obtenue par distillation de la résine du pin maritime. L'huile essentielle de Larix decidua riche en α-pinène a des propriétés anti-infectieuses et neurotoniques, elle est indiquée pour les pneumonies et la fatigue nerveuse. D'autre part, les rameaux sécrètent, sous l'action d'une espèce d'abeille, une substance blanche dite manne de Briançon, qui devient granuleuse en séchant, au goût agréablement sucré et aux propriétés laxatives.

53 USAGES DIVERS Le bois de mélèze est formé d'un aubier jaunâtre et d'un coeur brun rouge imprégné de résine ce qui lui permet de résister aux insectes, et à l'eau en cas d'immersion. C'est un bois très dense, résistant et souple. On en faisait des tonnelets pour l'eau-de-vie, des abreuvoirs, des ponts, des pilotis... Il est utilisé aussi en charpente, menuiserie, placage et construction navale. Des chalets de villages du Queyras étaient construits en mélèze : murs, charpente, cloisons, toit, etc. C'est un bois de chauffage qui brûle assez bien mais en faisant beaucoup d'étincelles. Le mélange de térébenthine du mélèze et d'essence de lavande aspic, servait jadis aux grands peintres pour diluer leurs peintures et leur donner éclat et résistance aux corrosions. Le mélèze est parfois planté comme essence ornementale, il supporte bien la taille et peut être conduit en bonzaï. Rmq : Le bolet élégant, Suillus grevellei, comestible médiocre, se trouve exclusivement sous les mélèzes avec lesquels il vit en symbiose.

Pour en savoir plus : FRANCHOMME P., JOLLOIS R. & PENOEL D., 2006 – L’aromathérapie exactement, R. Jollois ed. – 490 p. LIEUTAGHI P., 1969 – Le livre des arbres, arbustes et arbrisseaux, Actes sud éditions – 1322 p.

54 MELILOT OFFICINAL – MELILOTUS OFFICINALIS LAM.

On peut rencontrer principalement quatre espèces du genre Melilotus en Savoie : albus, altissimus, neapolitanus et officinalis. Le mélilot de Naples (neapolitanus) est très rare, localisée et en danger d'extinction, on se gardera donc bien de la récolter. Toutes les espèces ont des propriétés semblables, on décrira ci-après celle citée le plus souvent dans la littérature pour son emploi.

NOMENCLATURE Son nom latin a été attribué par Jean-Baptiste Pierre Antoine de Monet, chevalier de Lamarck, naturaliste français, en 1779. Synonymie : Trifolium officinale Schrank, Melilotus neglectus Ten., Melilotus luteus Gueldenst., Melilotus arvensis Wallr. … Noms vernaculaires : mélilot officinal, mélilot jaune. Étymologie : le genre Melilotus est transcrit du grec Mêlilôtos qui désignait diverses plantes de la famille des légumineuses “à miel”, recherchées par les abeilles. Officinalis rappelle l'usage médicinal ancien de cette plante.

DESCRIPTION BOTANIQUE Plante herbacée annuelle ou bisannuelle de la famille des fabacées dont la hauteur varie de 30 à 100 cm. Les feuilles sont à 3 folioles dentées, la médiane étant portée par un plus long pétiolule. Les longues grappes sont composées de plus de 30 fleurs jaunes, à carène beaucoup plus courte que les ailes. Elles s’épanouissent de juin à octobre. Les fruits sont des gousses brunes, globuleuses à stries sinueuses. Le mélilot officinal pousse souvent en association avec les plantes rudérales, à l'étage collinéen ou montagnard. On l'observe sur les terrains secs à l'abandon, ballasts ferroviaires, friches, en compagnie d'autres pionnières telles que Daucus carota, Echium vulgare, Linaria vulgaris, Melilotus albus, Oenothera biennis, Pastinaca sativa....

USAGE MEDICINAL – TOXICITÉ Théophraste au IVe siècle avant J. C. connaissait déjà l'usage des mêlilôtos... Les mélilots sont riches en coumarine qui développe une odeur caractéristique de foin coupé sur les plantes séchées ; elle confère au mélilot des propriétés antispasmodiques et émollientes. Les sommités fleuries de mélilot sont listées dans la 10e édition de la pharmacopée française. Elles sont indiquées pour les cas de fragilité capillaire cutanée (ecchymoses...), de manifestations de l'insuffisance veineuse (jambes lourdes, hémorroïdes...), de troubles digestifs (lenteur à la digestion, flatulence...), de colites spasmodiques, de troubles mineurs du sommeil, d'état neurotonique des adultes et enfants, et enfin en usage externe en cas d'irritation ou gêne oculaire. La monographie du Melilotus officinalis a été supprimée de la pharmacopée en 2005, elle persiste comme souche pour médicament homéopathique. MELILOTUS est un remède homéopathique de certaines congestions, épistaxis, hémorroïdes...

USAGE DIVERS Les plants séchés des mélilots développent une odeur de coumarine comme l'aspérule odorante. On en a fait des petits sachets pour parfumer le linge des armoires et éloigner les mites.

55 Le mélilot est apprécié des abeilles, il leur fournit nectar et pollen en fin d'été.

“Deutschlands Flora in Abbildungen”-STURM

56 MÉLITTE À FEUILLES DE MÉLISSE – MELITTIS MELISSOPHYLLUM L.

NOMENCLATURE Son nom latin a été attribué par Carl von Linné en 1753. Synonymie : Melittis grandiflora Sm., Melissa sylvestris Lam., … Nom vernaculaire : mélitte à feuilles de mélisse. Étymologie : le genre Melittis a la même origine que Melissa qui désigne l'abeille en grec, sans doute en raison de la propriété mellifère de ce genre. Mellissophyllum signale la ressemblance entre les feuilles dentées des espèces de ces deux genres.

DESCRIPTION BOTANIQUE Lamiacée vivace dont la tige hérissée, varie de 20 à 50 cm. Les feuilles opposées, pétiolées, dentées sont longues de 3 à 9 cm. Les fleurs groupées par 1 à 3 à l'aisselle des feuilles, apparaissent en mai-juin. La corolle rose et blanche mesure 3-4 cm de long , le calice est à lobes obtus. La plante froissée dégage une odeur aromatique citronnée. C’est une plante, thermophile (qui aime la chaleur), commune en plaine que l’on peut trouver dans les hêtraies claires, les chênaies buissonnantes, les ourlets, plutôt sur terrains calcaires en compagnie de Carex montana, Hippocrepis emerus, Quercus petraea, Quercus pubescens, Sorbus aria…

“Deutschlands Flora in Abbildungen”-STURM

USAGE MEDICINAL – TOXICITÉ La plante entière est employée en herboristerie pour des propriétés sédatives, antiseptiques oculaires et antirhumatismales. La mélitte n'est pas listée dans la pharmacopée française.

57

MENTHES – Mentha sp.

Quatre espèces de menthes sont répertoriées en Savoie (Delahaye & Prunier, 2006), auxquelles on peut rajouter la menthe verte (Mentha spicata) subspontanée, et sans doute de nombreux hybrides. Dans le cadre de cet article, toutes ces plantes ayant les mêmes usages, nous nous limiterons donc à la description d'une espèce commune, Mentha arvensis.

MENTHE DES CHAMPS - MENTHA ARVENSIS L.

NOMENCLATURE Elle a été dénommée par Carl von Linné, en 1753. Synonymie : Mentha exigua L., Mentha diffusa Lej.,… Noms vernaculaires : menthe des champs...menstrata en patois savoyard. Étymologie : l’origine du mot Mentha reste inconnue, certains auteurs proposent une origine dans la mythologie grecque, Minthé, nymphe qui aurait été métamorphosée en cette plante aromatique. Arvensis fait allusion à l'habitat.

DESCRIPTION BOTANIQUE Plante vivace de 5 à 25 cm de hauteur, de la famille des lamiacées. La tige pubescente, ascendante ou couchée, porte des feuilles pétiolées à poils appliqués. Les inflorescences de petites fleurs rosées sont à l'aisselle des feuilles. C’est une plante assez commune de l’étage collinéen à montagnard. On peut la trouver dans les champs, chemins un peu humides où se regroupent Capsella bursa-pastoris, Chenopodium album, Galinsoga ciliata, Polygonum persicaria, Ranunculus repens…

“Illustrations of the British Flora” - FITCH

58

USAGE MEDICINAL – TOXICITÉ Les menthes étaient utilisées depuis l'Antiquité, sans doute déjà cultivées. Alfred Chabert, médecin chambérien, écrit en 1897 que les douleurs rhumatismales ou arthritiques étaient soulagées par divers traitements dont des fumigations de menthe sauvage... Diverses variétés de menthes font l’objet d’une monographie dans la 10ème édition de la pharmacopée française ; les feuilles et sommités fleuries y sont indiquées en usage externe pour traiter les affections dermatologiques (gerçures, piqûres d'insectes...), le rhume, les affections buccales et en usage interne pour leurs vertus digestives, dépuratives (pour faciliter les fonctions d’élimination rénales et digestives) et antispasmodiques en cas de colites. On extrait des huiles essentielles de diverses menthes cultivées à cet effet (Mentha arvensis, longifolia, x piperita, pulegium, spicata, suavolens...). Elles contiennent des principes actifs variés certaines étant plus riches en alcool (menthol) d'autres en cétones ou autres ce qui leur confère des propriétés différentes. L'huile essentielle de la menthe poivrée (Mentha aquatica x Mentha spicata) est un hybride très souvent utilisé en phytothérapie sauf chez les enfants de moins de 7 ans. Mentha x piperita, appliquée après un coup réduira l'inflammation, son application sur les tempes soulagera les migraines, elle traitera aussi les indigestions, mal des transports, nez bouché, douleurs dentaires...

USAGE ALIMENTAIRE Les feuilles de menthe servent à préparer des tisanes au goût agréable. Le spearmint, variété de Mentha spicata est bien connu des amateurs de chewing-gum, cette huile essentielle sert à parfumer les confiseries, bonbons, sirops, glaces... Les tablettes à mâcher goût chlorophylle sont en réalité aromatisées avec de la menthe. La menthe est bien sûr un condiment qui parfumera taboulés, salades et plats divers...

USAGES DIVERS Chabert en 1897, écrit que les ménagères savoyardes aisées et soigneuses mettent diverses plantes dont la menthe sauvage dans leur linge pour le parfumer. Plusieurs essences de menthes sont distillées, la tonalité mentholée de la menthe poivrée contribue à amener un effet de fraîcheur à certaines eaux de Cologne et eaux de toilette masculines, aux dentifrices, la menthe crépue a une odeur plus herbacée. Jadis, on jonchait le plancher de tiges feuillées de menthe pour éloigner les puces.

Rappel bibliographie : BRUNETON J., 1999 – Pharmacognosie, Phytochimie, Plantes médicinales, Editions TEC & DOC – 1120 p. CHABERT A.., 1897 – Plantes médicinales & plantes comestibles de Savoie, Editions Curendera - 152 p. FRANCHOMME P., JOLLOIS R. & PENOEL D., 2006 – L’aromathérapie exactement, R. Jollois ed. – 490 p.

59

M. rotundifolia = M. suavolens

Sylvie SERVE

60

AU SOMMAIRE DE CE NUMERO

PAGES

1. LE MOT DU PRÉSIDENT, par M. SAVOUREY 3

2. PROGRAMME D’ACTIVITÉS DU 2ème TRIMESTRE 2013 4

3. INSECTES ET PLANTES : UNE COEXISTENCE PAS SI PACIFIQUE 5 COMPTE RENDU DE LA CONFÉRENCE DU 13 DECEMBRE 2012, par J. BORBON

4. PAROLES DE DIAMANTS COMPTE RENDU DE LA CONFÉRENCE 13 DU 10 JANVIER 2013, par G. CAMBRES pour M. TARDY

5. COMPTE RENDU DE L’ASSEMBLEE GENERALE ORDINAIRE 26 DU 14 FEVRIER 2013

6. LES RAPACES NOCTURNES DE SAVOIE COMPTE RENDU DE 34 LA CONFÉRENCE DU 14 MARS 2013, par J. HAHN

7. LES ANIMAUX SAUVAGES EN SAVOIE ET ENVIRON COMPTE 40 RENDU DE L’EXPOSITION DU 4 FÉVRIER AU 30 MARS 2013, par M. CHAMBRE

8. RÉSERVES NATURELLES DE LA GRANDE SASSIÈRE ET DE 41 LA BAILLETAZ - UN COUP POUR RIEN ! par P. FRANCOZ

9. ETHNOBOTANIQUE, par S. SERVE 44

- lysimaque commune - mâches - maïanthème à deux feuilles - marrube commun - massette à larges feuilles - mauve sauvage - mélèze - mélilot officinal - mélitte à feuilles de mélisse - menthes

Les opinions émises dans le bulletin n’engagent que leurs auteurs. Nous remercions toutes les personnes ayant participé à la réalisation de ce numéro. Bulletin paraissant 4 fois par an / CPPAP 51825

S.H.N.S.  Museum - 208, avenue de Lyon61 - 73 000 CHAMBERY  04 79 62 18 68 [email protected]