Talkin’ That Talk’

Jean-Paul Levet

Talkin’ That Talk Le langage du et du jazz

HATIER

Ouvrage publié avec le concours du Centre national des lettres A

A & R MAN (Artist and Repertory Man) Directeur artistique : « Lloyd Glenn, je dois vous dire, était un remarquable pianiste — quelqu’un d’extrêmement créatif. Il était ce que l’on appelle un “A & R mari pour Swing Time. C’était lui qui avait en charge tout ce qui concernait l’aspect proprement musical de l’entreprise. C’était donc lui qui me trouvait les chansons qu’il me proposait d’enregistrer. Il commençait par me les jouer au piano, ensuite il supervisait les répétitions et les séances d’enregistrement. » Interview de Rav Charles par Joël Dufour, Soul Bag n°117 (1989). '

A & V (Alabama & Vicksburg Railroad) Ligne de chemin de fer du reliant Meridian à Vicksburg, via Jackson : « Now when you want to go, want to ride easy Now baby, catch the A & V, Now when you want to ride easy Why not catch the A & V? That’s where you pay for your riding And, hard, get you free » A & V Railroad Blues, Little Brother Montgomery (1936).

A TRAIN Ligne de métro de New York desservant Harlem : « You must take the A train To go to Sugar Hill way up to Harlem » Take The A Train, Duke Ellington (1941).

ABE Diminutif d’Abraham Lincoln, le président qui proclama l’abolition de l’esclavage, à compter du 1er janvier 1863 : « If my captain* ask for me Tell him Abe Lincoln set us free Ain’t no hammer on this road Gonna kill poor me » Section Hand Blues, Sippie Wallace (1925). ► BEFORE ABE. Avant l’abolition de l’esclavage. ® ABBEY. Vient probablement de Abe ; surnom de la chanteuse Anna Marie Woodbridge alias Abbey Lincoln (1930).

ACE As (carte à jouer). 1. Dollar. 2. Ami, pote ; principal, premier, meilleur (années 40-50) ; d’où « The Aces», trio composé des deux frères Myers et du batteur Fred Below. 3. V. Damer le pion. ► ACE IN THE HOLE. Litt. : l’as dans le trou. (D Dans l’argot du jeu, carte cachée dans la manche. @ Par analogie, économies, bas de laine : Ace in The Hole, Bunk Johnson (1944). • BLACK ACE. Litt. : as de pique, surnom du bluesman Babe Kyro Lemon Turner (1905-1975) : « I’m the Black Ace I’m the boss card in your hand And I’ll play it for you mama If you please let me be your man » Black Ace, Black Ace (1937). • Pseudonyme du chanteur John Marshall Alexander alias Johnny Ace (1929-1954) : Johnny Ace Medley, Johnny Copeland (az 1965).

ACTION Selon le contexte, jeu, musique, excitation ou rapport sexuel : « Hard* luck, hard luck All the live-long day 1 can’t get no action Out of this old mojo* » New Mojo Blues, Barbecue Bob (1930). AD LIB Pour ad libitum, quelquefois déformé en lib lab. Improviser (années 20-35). Terme aujourd’hui obsolète remplacé par blow* : Ad Lib Blues, Sidney Bechet (1946).

AFTER HOURS Litt. : après les heures (de travail). Dans le jargon du jazz, moment où, après un engagement rémunéré, les musiciens jouent en toute liberté : «After hours, I’d go to the Uptown House to jam*. There was as much creativity going on at Monroe’s Uptown House as they had at Minton's*. That’s where we all used to go after hours, until daylight, to play. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

AGATE (To shoot the) Marcher de façon sophistiquée, rouler le but, de façon à en mettre plein la vue (voir walk that walk) : «You should have seen one of those sports* move down the street, his shirt busted open so that you could discern his red* flannel undershirt, walking along with a very mosey walk they had adopted from the river, called “shooting the agate”. When you shoot the agate, your hands is at your sides with your fingers stuck out and you kind of stmts* with it. That was considered a big thing with some of the illiterate women — if you could shoot a good agate and had a nice highclass red undershirt with the collar turned up, I’m telling you were liable to get next to that broad. She liked that very much. » Jelly Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

ALABAMA Au XIXe siècle, terme générique pour désigner le Sud des Etats-Unis; aujourd’hui obsolète, il a pu être encore utilisé en ce sens par certains bluesmen : « I’m Alabama bound If the train don’t stop And turn around I’m Alabama bound » Alabama Bound, Leadbelly (1935).

e ALABAMA BOUND. Danse par couple (comme le Bunny Hug) du début du XX siècle : « Come babe, Look into my eyes And roll them round an’ round I’m feelin’ oh so funny* Won’t you hug me honey* To dat* Alabama Bound » Walk. Right in, Cannon's Jug Stampers, vcl by Gus Cannon (1929).

ALBERT Héros malheureux de la ballade « Frankie and Albert » (devenue ultérieurement « Frankie and Johnny ») : « Frankie* shot ol’ Albert She shot him three or four times Says “Blow back down the smoke From my gun, let me see i’ Albert dyin’ He’s my man and he done me wrong” » Frankie, Mississippi John Hurt (1928). ALGIERS Faubourg de La Nouvelle-Orléans situé sur la rive opposée du Mississippi : « I ’s born in Louisiana I raised in Algiers And everywhere I seen The people all say : Ain’t nothing in ramblin’* Either running* around Well I believe I ’ll marry Ooh ooh Lord, and settle down » Nothing in Rambling, Memphis Minnie (1940). ALKY Alcool frelaté : Straight Alky Blues, Leroy Carr (1929). ALL-IN Chorus final interprété à l’unisson (années 1915-1940). ALLEY Rue, ruelle, généralement mal famée « I got to move in the alley I ain’t allowed in the street » Rising River Blues, George Carter (1929). ► BACK ALLEY. Ruelle entre deux rangées de cours (backyards), sur le principe des corons. Back Alley Rub, Jimmy O’ Bryant (1925). ► ALLEY MUSIC. Musique ancrée dans la tradition noire, musique particulièrement lowdown* ; ainsi Buddy Guy, enregistré en public en 1979, introduit-il son morceau I’ve Got a Right to Love My Woman, par cette phrase : « This is what you call alley music. » ► ALLEY RAT. Voleur :

Alley Rat, Jimmy Blythe (1928). ► ALLEY WOMAN. Prostituée, fille : Alley Woman Blues, Blind John Davis (1938). ► PUT (SOMEONE) IN THE ALLEY. Jouer quelque chose d’authentique, de réellement « doum home » : « All right, baby, we wanna give you a lil’ blues and put you down in the alley, send you back in South Carolina, North Carolina, Georgia, Alabama, Mississippi, Arkansas, Louisiana... Everybody from down in the alley, say “Yeah”... » Junior Parker, avec Jimmy McGriff, introduction parlée à Don’t Throw Your Love on Me so Strong (ca 1971/72). ► TIN PAN ALLEY. Voir ce terme. ALLIGATOR 4. Mec bien sapé, crâneur, qui « roule les mécaniques ». 5. Terme utilisé par les jazzmen noirs dans les années 30, spécialement à La Nouvelle-Orléans, pour désigner les musiciens blancs : « We’d call them alligator... because they were the guys* came to swallow everything we had to learn. » Interview de Louis Armstrong, cité par Nat Shapiro et Nat Ilentoff dans Hear Me Talkin’ to Ya. à. Passionné de jazz. ► ALLIGATOR CRAWL. Voir crawl. AMBITIOUS Fâché, excédé ; fier : « I started to kill my woman ’til she laid down cross the bed And she looked so ambitious ’til I took back everything I said » M & O Blues, Willie Brown (1930). AMEN CORNER Dans les églises baptistes, l’endroit qui se trouve à droite de la chaire où se tiennent les pratiquants fervents qui scandent le sermon de leurs « amen » (voir get religion) : « There’s a preacher* in the pulpit Bible in his hand And the sisters* was back in the amen corner Hollering : “That’s my man” » I’m Alabama Bound, Papa Charlie Jackson (1925). ANGOLA Petit village du comté de West Feliciana Parish, site du Louisiana State Penal Farm. Angola est peut-être la plus célèbre et la plus grande des fermes-pénitenciers (voir county farm).

C’est une ancienne plantation située en Louisiane, à environ 80 kilomètres au sud de Natchez, sur un domaine de plusieurs milliers d’hectares. Leadbelly, Robert Pete Williams, Guitar Welch, Otis Webster et Hogman Maxey, entre autres, y furent détenus : « They told me I had to go down to Angola An’ cultivate some land I stood before the judge he cried out : “Now, I’m gonna give you some time*, man” » Woman Done Me in, Otis Webster (1960). ANTS IN (one’s) PANTS Litt. : avoir des fourmis dans le pantalon. Ne plus tenir en place quelle qu’en soit la raison (peur, anxiété, faim ou... désir) : « Every time I meet you on the street A funny* feeling from my head to my feet I got ants in my pants Baby, for you » Ants in My Bants, Bo Carter (1931). ANXIOUS Excellent, bon, super : Hot and Anxious, Fletcher Henderson (1931).

APE Faire l’imbécile, le con : « You Saturday night women You love to ape and clown* » Stop Breakin’ Down Blues, Robert Johnson (1937). APOLLO Music-hall fameux dans la 52e rue de Harlem : Apollo Jump, Lucky Millinder (1941). Créé dans les années 1880, l’Apollo fut l’un des hauts lieux de la culture négro-améri- caine dès les années 20, alors que Harlem devenait un quartier exclusivement noir. Il atteignit son apogée lors de la décennie suivante sous la houlette de son propriétaire jusqu’en 1961, Frank Schiffman. Il fut le point de passage obligé des plus grands artistes de la communauté noire, Bessie Smith, Ida Cox, Cab Calloway, Duke Ellington, Chick Webb, Bill « Bojangles » Robinson, puis, plus tard, . APPLE (Big Apple) Surnom de la ville de New York et, par extension, de n’importe quelle grande cité du Nord : The Apple Jump, Count Basie (1939). Big Apple Blues, Robert McCoy (1938). ► BIG APPLE. Danse en vogue pendant la période swing (années 1935-1940).

ARMSTRONG De Louis Armstrong. Note suraiguë obtenue d’un instrument à vent et plus particulièrement d’une trompette.

AROUND THE BEND Litt. : dans le virage. Euphémisme pour : en taule, en cabane, au trou. « Boys, I know I like Mister Clark Yes he really is my friend He says if I just stay out of my grave He’ll see that I won’t go ’round the bend [to the pen* ?] » Lawyer Clark Blues, Sleepy John Estes (1941).

ASH Cendre : « I’ve got plenty money Don’t have many friends I just keep on riding* until that highway* ends Well, when I die Just keep one thing in mind Well, spread all my ashes all on highway 59* » Highway 59, Roy Hawkins (1952). 6. L’un des ingrédients utilisés dans les pratiques magiques : « I put ashes in my sweet papa’s bed So that he can’t slip out Hoodoo* in his bread Goopber dust* all about I’ll fix* him » Sundown Blues, W.C. Handy (1926) 7. Semence, sperme. ► ASH HAULER. L’amant (celui qui « ramone ») : Looking for My Ash Hauler, Washboard Sam (1937). ► HAUL ASHES. Litt. : tirer les cendres. ® Partir, se barrer : « If you catch my jumper Hang it upside your wall Now you know by that, babe 1 need my ashes hauled » The Girl I Love, She Got Long Curly Hair, Sleepvjohn Estes (1929). ® Faire mal, battre, frapper quelqu’un. @ Expression populaire pour faire l’amour; s’emploie indifféremment pour les deux sexes (pour les Blancs, ashes est associé au sperme et haul (one's) ashes réservé au mâle) : « Saw a big black pider* Creepin’ up my bedroom wall Found he was only going To get his ashes hauled » Black SpiderBlues, Sylvester Weaver (1927).

ASS Ane. • Variante populaire A arse, cul : « I had a girl I had her in the grass I had that bitch* 1 had her in the grass One day she got scared And a snake* run up her big ass » Winin’ Boy, Jelly Roll Morton (1938). • Individu, personne : voir T.O.B.A. (pour Tough On Black Asses). • Ass ou assed, suffixe, renforce le sens du mot : « He [Earl Hooker] was that type of guy* that I would be hard for you to get mad with him anyway, because he always was just full of smiles all the time. But he sure was a jive-ass cat*, man. He was one of the most undependable people I ever seen. » Interview d’Eddie Boyd par Sebastian Danchin, in Earl Hooker, vie et mort d’un héros du ghetto. ► BLOW (ONE’S) ASS OFF. Jouer à la perfection (laisser les auditeurs sur leur cul) : « But he [Dizzy Gillespie] was blowing*. He was blowing his ass off. That’s the first time we saw Josephine Baker. He were playing at The Moulin Rouge. » Interview de Dickie Wells, in To Be or Not To Bop, de Dizzy Gillespie et Al Fraser. ► D.B.A. Pour Dirty Black Ass, sale cul noir : « I don’t want no woman To sit around on her D.BA She got to bring me some kind of job If it’s workin’ on the W.P.A. * » Lazy Woman’s Blues, Little Bill Gaither (1939). ► K.M.A. Pour Aïss My Ass : KM. A. Blues, Roosevelt Sykes (1941). « They say, “I love Bessie Smith”. And don’t even understand that Bessie Smith is saying, “Kiss my ass, kiss my black unruly ass”. Before love, suffering, desire, anything you can explain, she’s saying, and very plainly, “Kiss my black ass”. And if you don’t know that, it’s you that’s doing the kissing. » Dutchman, Leroi Jones (1964). AUNT Tante. 1. Durant la période esclavagiste, terme par lequel un Blanc s’adressait à une Noire d’un certain âge (jeune, elle était appelée girl) : Aunt Caroline Dyer, Memphis Jug Band (1930). 2. Homosexuel âgé. ► 'AUNT HAGAR’S CHILDREN. Les enfants de tante Hagar, la servante égyptienne de Sarah et Abraham dans la Bible. Sarah, stérile, se résigne à mettre sa servante dans le lit d’Abraham ; un fils, Ismaël, naît de cette union. Mais Dieu se manifeste, bénit Sarah, qui bientôt donne un second fils, Isaac, à Abraham. C’est lui, le cadet, que Dieu a choisi ; Sarah force Abraham à chasser Hagar et Ismaël... D’où le fait que le peuple noir, lui-même exclu et exilé, ait pu s’identifier à Ismaël et se proclamer « enfant de tante Hagar » : Aunt Hagar’s Blues, King Oliver (1928). 8. OLD AUNTIE. Vieille tantine, personnage classique du folklore noir. AUTOMOBILE Métaphore fréquemment utilisée pour désigner la femme ; et la conduire {drive) renvoie à l’acte sexuel : « Got a driver* in the daytime A driver at night Oh, baby, momma let me ride* in your automobile You got a good little car You know too many mens under your steering wheel » Cité par William Ferris dans Racial Repertoires Among Blues Performers.

AX (Axe) Hache. • Pénis: « I’ve an old five pound ax And I’ll cut* two different ways And I cut* my little woman Both night and day » Jersey Bull Blues, Charlie Patton (1934). • Instrument de musique (peut-être du fait de l’assonance avec sax, saxophone) : « I just want to play my... I just want to play my axe » Just Playin' My Axe, Buddy Guy (1968). B

B ► Pour baby*. Façon d’interpeller ses interlocuteurs propre à Charlie Parker : « Il appelait tout le monde B, sûrement une abréviation de baby. Il lui arrivait d’appeler quelqu’un Jim*, ça signifiait qu’il n’aimait pas le type en question. Jim, à mon avis, c’était pour Jim* Crow... » Interview de Ted Joans par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker. ► Benzédrine. • Surnom du chanteur et chef d’orchestre William Clarence « Billy » Eckstine (1914) : Mr. B’s Blues, Billy Eckstine (1948). B & 0 ( & Ohio Railroad) Ligne de chemin de fer reliant Baltimore, Maryland, à Saint Louis, Missouri, via Cincinnati : « I’m going to act like a rambler* And I can’t stay home no more Because the gai* I love She rode that B & O » B & O nu2, Blind Willie McTell (1933). B.B. Surnom du bluesman Riley Ben King, alias B.B. King (1925) ; il remonte à l’époque où il fut engagé comme animateur de radio par WDIA* à Memphis (Tennessee), première radio entièrement noire. Après le succès de sa première émission, soutenue financièrement par Pepticon*, une deuxième lui fut confiée, «Sepia* Swing Club » ; un surnom facile à retenir lui devenait nécessaire: d’abord Beale* Street Blues Boy, puis Blues* Boy, finalement abrégé en B.B. Surnom également du bluesman Gary « B.B. » Coleman. B.C. 9. Marque d’une poudre contre le mal de tête bien connue dans tout le Sud : « I’m achin’ all over I believe I got the pneumonia this time I believe I better take a B.C. To take care of poor me » Lightnin’ Hopkins, cité par Samuel B. Charters dans The Country Blues. 10. Pilule anticonceptionnelle.

B.D. Voir bulldyke(r).

B.H. Pour Before Horse (voir horse).

B.O. Pour body odour, odeur corporelle : « Her feet look like swings way out on a limb That’s why her mother put her off on him Because she’s ugly She’s got B.O. all the time And she thinks soap and water is a doggone* crime » Jasper's Gal, Memphis Slim (1940).

B.V.D. (Badrington Vest and Drawers) Marque de sous-vêtements très populaire dans les années 20 : « I’m goin’ up North Where they say money grows on trees I don’t give a doggone* If my black soul* leaves I’m goin’ where I don’t need no B.V.D.’s » Jim Crow Blues, Cow Cow Davenport (1927).

BABOON Babouin. Le Blanc : «Monkey* and the baboon Playing seven-up* Monkey win the money Scared to pick it up » Mother Fuyer, Dirty Red (1947). Ce sens est attesté par une autre version, décryptée, du même thème, enregistrée par James Son Thomas et citée par l’eth- nomusicologue William Ferris dans Blues from The Delta : « The nigger and the white man Playing seven-up The nigger win the money Scared to pick it up » BABY (Babe) Bébé. ► Baby ou baby doll, poupée, jolie môme : « So long, baby, so long Why did you tell all the people That I done you wrong? Don’t tell nobody, dear That I was so good to you * So Long, Lightnin’ Hopkins (1948/49 ?). « He can be ugly, he can be black So long as he can eagle* rock and ball* the jack I want to be somebody’s baby doll So I can get my loving all the time » Baby Doll, Bessie Smith (1926). ► Inversement, mec, homme : « My baby came to me With the tears rolling down his face Babe, I’m sorry for you But some other woman has taken your place » My Man Blues, Alice Moore (1929). ► Façon de s’interpeller entre hommes : « Il [Charlie Parker] appelait tout le monde Baby. Un jour c’est devenu B tout court. Il me disait : “Ne bouge pas, B”, et je restais là à attendre, même si cela durait trois heures. » Interview de Ralph Douglas par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker. ® Surnom des bluesmen Jewell « Babe » Stovall (1907-1974), Charles Henry « Baby » Tate (1916-1972), « Baby Face » Leroy Foster (ca 1919-1959), Robert « Baby Boy » Warren (1919-1977), Smokey « Babe » alias Robert Brown (1927-1975), du batteur Warren « Baby » Dodds (1898- 1959) et du saxophoniste Gene « Baby Bear » Cedric (1907-1963). BACK O’TOWN Quartier populaire de La Nouvelle- Orléans, au nord de Rampait Street, où, selon les termes de Louis Armstrong (Ma Nouvelle-Orléans), « grouillaient des gens d’église, des joueurs, des flambeurs, des souteneurs au petit pied, des voleurs, des prostituées, des nuées d’enfants, où il y avait des saloons, des honky-tonks*, où des tas de femmes, aussi, faisaient le trottoir » : « Canal* Street of diamonds St Charles Street’s made of gold But when you go Back O’Town bound To see nothing but old creoles* » Old New Orleans Blues, Willie Jackson (1926).

BACKBITER Faux-jeton, faux-cul : « My mother told me When I was twelve years old : “Man, you’re nothing but a backbiter May God bless your soul*" » Back Gnawing Blues, Ramblin’ Thomas (1928).

BACKDOOR 11. La porte de derrière : « Give me one key, mama To your backdoor You’ll never be bothered, babe With me on the front no more » All Night Long, Skip James (ca 1964). ► BACKDOOR MAN. Homme qui emprunte la porte de derrière, amant : « I’m a backdoor man Well, the men don’t know But the little girls Understand. When everybody’s tryin’ to sleep I’m somewhere makin’ my midnight creep* Every morning the rooster crow Something tells me I got to go » Backdoor Man, Howling Wolf (1950). 12. Le cul, l’anus, dans l’expression a shot in the backdoor. Voir shot. BACKLASH Vent et pluie succédant à une tornade. On désigne ainsi, après des manifestations noires, la réaction des Blancs (choc en retour) ou inversement : « When I try to find a job to earn a little cash All you got to offer is your mean old white backlash But the world is big big and bright and round An’ some other folks like me were black, yellow, Beige and brown, Mister Backlash I’m gonna leave you with the blues* » Backlash Blues, Nina Simone (ca 1967-68). BACKWATER Litt. : eau arrêtée par un bief, eau croupie, stagnante. Crues, inondations : « Backwater is risin’ Corne in my windows and doors I leave with a prayer in my heart Backwater don’t rise no more. Children standing screamin’ : Mama we ain’t got no home Papa says to the children Backwater left us all alone » Risin’ High Water Blues, Blind Lemon Jefferson (1927). BAD Mauvais. ► Terme qui signifie exactement le contraire de son sens littéral : « “This cat* is crazy* !” signifie tout le contraire : ce type est éloquent, solide, bip*, dans le coup, très productif... Si vous voulez dire à votre ami que son amie est très belle, vous lui dites : “Man, that’s a bad chick* you got, baby.” » Interview de Clark Terry par Gerard Rouy, in/aær Magazine n° 264, 1986. « He [Earl Hooker] been playin’ the guitar ever since he been around ten years old, he’s been playin’ good guitar. He just picked up, he’s gifted, he was the baddest guitar player around . » Interview de Pinetop Perkins par Sebastian Danchin (1984) in Earl Hooker, vie et mort d’un héros du ghetto. ► Arrogant, présomptueux. 13. BAD BLOOD. Voir blood. 14. BAD BOY. Mauvais Noir (vu par les Blancs), Noir menant une action positive pour sa communauté (vu par les siens). 15. BAD LUCK. ® Guigne, poisse : « Got me accused of murder I never harmed a man Got me accused of forgery I can’t even write my name Bad luck, bad luck is killin’ me I just can’t stand no more of that third degree* » Third Degree, Eddie Boyd (1950). ® Euphémisme pour discrimination raciale : « Em scared to stay here Scared to leave this ole bad luck town But when I get back early mornin’ My head goes round and round » Bad Luck Blues, Kokomo Arnold (1938). 16. BAD MAN. Avec une connotation positive : homme fort, mec bien sapé, baratineur, homme à femmes... 17. Too BAD. Dommage! Par inversion de sens, merveilleux, très bien : Too Bad, King Oliver (1926). 18.Too BLACK BAD. Voir black. BAG Sac. • Putain, morue, poufiasse. • Style de vie, manière d’être; point de vue : « I mean, he could play a little bit of jazz. But I mean, blues was the bag in those days, and Earl [Hooker] was a champ... » Correspondance enregistrée, adressée à Sebastian Danchin par Eddie Boyd (1983), in Earl Hooker, vie et mort d’un héros du ghetto. 19.IT’S MY BAG. Ça me botte, c’est super : « But I don’t want to get in it You know, because it’s not my bag » Blues for Major Daley', Junior Wells (1970). 20.TRICK BAG. Voir trick. 21. BAGS Surnom du vibraphoniste Milt Jackson (1923): « It was a southern tour, and Ray Brown was in the band*, and Bags was in the band. It was a real great tour, and we bad a ball*. » Interview d’Ella Fitzgerald, in To Be or Not To Bop de Dizzy Gillespie et Al Fraser.

BAILEY Bill Célèbre professeur de musique et tapdancer, originaire de Jackson, Michigan : « Why don’t you come home She moaned and she groaned the whole night through Bill, it’s a shame but I know that I’m to blame Bill Bailey, won’t you please come home » Bill Bailey, (1956).

BAIT Amorce, appât. Belle fille, jolie môme : « Said the chicken when she ate the worm It makes me wiggle when you start to squirm ’cause it feels so good Oh, it feels so good I like good bait Because it feels so good » It Feels so Good, Lonnie Johnson (1929). 22.DREAM BAIT. Type super, remarquable. 23.JAIL BAIT, SAN QUENTIN BAIT. Jolie môme mineure, dont la fréquentation intime peut conduire en taule (San Quentin étant la prison de San Francisco, Californie). Jail Bait, Roosevelt Sykes (I960). San Quentin Bait, Charlie Davis (CÆ 1947-48).

BAKE Faire cuire au four. Faire l’amour (depuis le xvne) : « When your man comes home evil* Tells you, you are getting old That’s true sign he’s got someone else Bakin’ his jelly* roll » Fogy ism, Ida Cox (1927). BAKER L’image fort courante des gateaux roulés (jelly roll) pour désigner les organes sexuels, se prête à de nombreuses extensions (voir biscuit* roller, kitchen* man...) dont celle du boulanger (baker) qui renvoie à l’amant : « Jelly* roll, jelly roll, Ain’t so hard to find There’s a baker shop in town Bakes* it brown like mine » New Jelly Roll Blues, Peg Leg Howell (1927). BALD HEAD L’un des surnoms du pianiste et chanteur Roy Byrd alias Professor Longhair (1918- 1980): Bald Head, Professor Longhair (1949). BALL ► Bal: « That was on a Saturday night, the rehearsal, and on the Saturday night following they had an engagement to play a ball (at that time the dances were called balls). » Interview d’Alphonse Picou, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► V. Baiser, forniquer. 24. BALLS. Couilles. Blue balls fait allusion à syphilis, vérole ou orchite : « Now your mammy got the blue balls Your sister got the pox Grandma got a dirty rag Tied right roun’ her cock* » Dirty Dozens, Speckled Red (1956). « C’est à cause d’un enregistrement radio une nuit à Little Rock que le morceau a reçu son nom [One O’clock Jump]. On l’avait inscrit au programme, mais le nom que nous avions ne pouvait pas être exprimé à l’antenne, Blue Balls. L’émission terminait à 1 heure, l’animateur a suggéré qu’on l’appelle One O’clock Jump. » Interview de Buster Smith par Jack McDaniels dans Down Beat, 11 juillet 1956, citée par Luc Delannoy dans Lester Young. Profession Président. - 25. BALL (TO HAVE A). S’en payer une tranche, prendre du bon temps, particulièrement au plan sexuel : « We had a ball on the floor, On the kitchen On the second On the third On the fourth On the fifth When it got too tight* We started cuttiri* it down Had to fall down to the ground » Old Man Tom, Bukka White (1968). e 26.BALL AND CHAIN. ® Boulet et chaîne d’un forçat (fin xvm ) : « Poor people are like prisoners But they just ain’t got on a ball and chain But the way they are faring I do swear it’s all the same » Howling Wind Blues, Walter Davis (1931). ® Femme (épouse ou régulière). 27.BALLIN’ THE JACK. L’origine de l’expression est probablement à rechercher dans le langage des cheminots: jack dans le langage noir signifie locomotive et balling the jack renvoie à un train (filant à grande vitesse, il est dit high balling). ® Danse apparentée au shimmy*, ponctuée de claquements de mains et de chants, très en vogue au début du siècle : « First you put your knee close up tight Then you sway them to the left Then you sway them to the right Step around the floor kind of nice and light Then you twist around Twist around with all you might Stretch your lovin’ arms straight out in space Then you do the eagle* rock with style and grace Swing your foot way round Then bring it back Now that’s what I call ballin’ the jack » Ballin' The Jack, Chris Smith (1913). ® Pour le « peuple du blues », ballin’ the jack évoque, comme le shimmy, un comportement, un style de vie, libre et décontracté : « Got a little fair broivnie* Keep ballin’ the jack Her screamin’ and fightin’ll Let me snatchin’ it back » You Can’t Keep No Brown, Bo’ Weavil Jackson (1926). ® Dans le jargon du jeu, miser le tout sur une carte. 28.CHERRY BALL. Voir cherry. e EIGHT BALL. Noir (la 8 boule du billard américain est noire), et tout spécialement de couleur foncée : Eight Ball Blues, Roosevelt Sykes (1940). ► EIGHT BALL (TO BE BEHIND THE). Etre en mauvaise posture : Em Behind The Eight Ball, Little Bill Gaither (1941). ► KOTCII BALLS. Jeu de cartes populaire parmi les Noirs du Sud. ► RAZOR BALL. Nom donné dans certaines contrées à des soirées qui pouvaient facilement dégénérer en bagarres : « Down at the razor ball Given at the Razor Hall Sloofoot Mose and old Cross-eyed Joe Didn’t go in at all, They hung around outside, This is what they spied : what was it? Big crap* game, in the hall, started in to fight, Joe got drunk, mad with ’em all Mike took Charlie, Charlie shot his automatic » Razor Ball, Blind Willie McTell (1930). ► SKIN BALL. Voir skin. ► SNOW BALL. Boule de neige, terme péjoratif pour Noir. ► THREE BALLS. Enseigne de l’équivalent du mont-de-piété, du « clou » : « I asked that pawnshop man What them three balls doing hangin’ on that wall He said it’s two to one, buddy* You don’t get your things out of here at all » Three Balls Blues, Blind Boy Fuller (1940).

BALLYHOO Publicité tapageuse ; sorte de parade musicale, aux fins promotionnelles, devant un club : « Plus tard dans l’après-midi, quelques- uns de ces musiciens sont venus devant le Dreamland Theatre et m’ont entendu jouer sur le trottoir, où je battais l’estrade pour le spectacle de Gonzelle White. Il y avait un batteur et un trompettiste, et je jouais sur un piano droit qu’on allait chercher quelque part dans le foyer et qu’on tirait au dehors. Nous jouions deux ou trois morceaux, et un aboyeur faisait la postiche pour inviter le public à entrer. Nous appelions ça jouer le ballyhoo. On faisait ça avant le spectacle, mais, parfois, on re-roulait le piano dehors pour refaire le ballyhoo entre deux spectacles. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. BAMA Surnom du trompettiste Carl « Barna » Warwick (1917) : « Ce fut une rude soirée. Lucky* [Millin- der] avait beaucoup de musiciens de tout premier plan dans son orchestre. 11 y avait Billy Kyle au piano, Tab Smith à l’alto et Don* Byas au ténor. Dans la section de trompettes, il y avait entre autres Carl Barna Warwick et Harry Edison, et je crois que le batteur était alors Walter Johnson. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. BANANA 29.Métaphore pour pénis : Banana in Your Fruit Basket, Bo Carter (1931). 30.Négro-Américain au teint clair : Banana Man Blues (I Don't Want That Thing), Memphis Minnie (1934). BAND • Petite formation orchestrale • « This is a brand new tune The band don’t know it You don’t know it And I don’t know what it is » Introduction parlée à Just a Little Love, B.B. King (1969). • Femme. ► BAND MAN. Musicien d’orchestre, meilleur dans les arrangements et les parties collectives que dans les soli. ► BIG BAND. Orchestre d’une quinzaine de musiciens ou plus comportant généralement, autour d’une section rythmique (piano, basse, batterie et quelquefois guitare), trois sections instrumentales (anches, trompettes et trombones). Mais plus que le nombre de musiciens, c’est la nature même de la musique jouée, avec arrangements, qui caractérise le big band. Les big bands connurent leur âge d’or durant la période swing, avant de disparaître peu à peu, essentiellement pour des raisons économiques. « Our first venture together was a flop. It was when Fats* [Waller] tried fronting* a big band on a southern tour. » W.T. Ed Kirkebv in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► BRASS BAND. Orphéon, clique d’une dizaine de musiciens, comportant essentiellement des cuivres (brass), mais aussi des tambours et autres instruments de fortune (washboard, boîtes en fer- blanc...). Apparus à La Nouvelle-Orléans vers 1865, ils accompagnaient presque toutes les manifestations telles que funérailles, fish fry, réunions maçonniques, fêtes diverses... Buddy Bolden et Bunk Johnson en furent les premières vedettes : « In those days I had a brass band I used for funerals, parades and picnics. Benny, the drummer* of my brass band, had taken Louis [Armstrong] under his wings. » Interview de Kid Ory, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. La tradition des brass bands néo-orléanais, après une longue éclipse, a retrouvé sa vitalité avec le succès rencontré dans les années 80 par le Dirty Dozen Brass Band créé en 1978 par le trompettiste Gregory Davis. ► HOUSE BAND. Orchestre « maison », jouant de façon presque permanente dans un même lieu (bar, boîte, théâtre...) «The Savoy* Sultans were the house band at the Savoy and anybody who’d come in there had to play against them [...] and the dancers were always with them, up and down, up and down with the lindy* bopping. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► JAZZ BAND. 1922. Orchestre de jazz : « When the jazz band struck up You’d be surprised Everybody in the ball* Was goo-goo* eyed » At The New Jump Steady Ball, Ethel Waters (1922). ► JUG BAND. Orchestre utilisant souvent des instruments de fortune — dont le jug d’où son nom — le kazoo ou le wasb- board, mais aussi guitare, mandoline et harmonica : « It makes no difference where you were born The jug band has got your water* on While they’re playing That Fourth street mess* around » Fourth Street Mess Around, Memphis Jug Band, vcl par Charlie Nickerson (1930). Les premiers jug bands se produisirent dans les environs de Louisville, Kentucky dès 1915; populaires à Cincinnati, Ohio, au début des années 20, ils furent introduits à Memphis, Tennessee par Will Shade aux alentours de 1925 où ils connurent le succès tout au long des années 30 ; s’y produisaient alors le Memphis Jug Band de Will Shade, le South Memphis Jug Band de Jack Kelly et Will Bates, les Cannon’s Jug Stompers réunis autour de Gus Cannon et Noah Lewis, le Picaninny Jug Band avec Charlie Burse et le Beale Street Jug Band auquel collabora Dewey Corley. ► MARCHING BAND. Clique, fanfare (voir plus haut brass band*) : « That fella* that was teaching me had a marching band. [...] It was a lodge band, a march band. [...] My basic knowledge was playing marches and the like. » Interview d’Orville « Piggy’ * Minor, cité par Nathan W. Pearson dans Goin ' to Kansas City. ► ONE-MAN-BAND. Artiste, tels Doctor Ross (1925) ou Elmon Mickle (1919-1977) jouant simultanément de plusieurs instruments. ► PICK-UP BAND. Par opposition à un orchestre régulier, et à l’occasion d’un événement particulier (séance d’enregistrement, émission de radio...), réunion de musiciens sans lendemain. ► SCAB BAND. De scab, briseur de grève ; orchestre contrevenant aux règles syndicales : « He [Clark Monroe] didn’t pay you any money, but you could eat and he had a band there, a non-union band, a “scab” band, they called it. Charlie Parker played in that band after he came to New York. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► SPASM BAND. Dans le langage de La Nouvelle-Orléans, petit orchestre à cordes et instruments de fortune (jug, kazoo...), clique : « Il y avait aussi une floppée de mauvais orchestres que nous surnommions des spasm bands-, ils jouaient partout où l’on voulait d’eux, dans les rues. Ils accommodaient à leur manière le style ragtime*, alignant les solos contre toute règle. » Jelly Roll Morton, cité par Alan Lomax, dans Mister Jelly Roll. Le mot spasm (accès de toux, spasme) est quelquefois donné comme l’une des étymologies possibles de jazz. ► TERRITORY BAND. Orchestre de réputation régionale : «Je ne sais pas si, à l’époque, j’avais entendu parler de ce qu’on appelait alors les territory bands, les orchestres de réputation régionale, mais on avait l’impression que les Blue Devils jouissaient déjà d’une solide réputation dans cette région, et que Tulsa faisait partie de leur stomping ground, de leur terrain de chasse — et stomp* est le mot juste, car je devais découvrir plus tard que ce terme était alors très répandu dans cette partie du pays. Beaucoup de morceaux s’appelaient des stomps et pas mal d’orchestres s’appelaient des stomping bands. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues.

BANG 1. Drogue, injection ou « sniff » selon les cas. ► Par extension, excitation de n’importe quelle sorte, mais sexuelle particulièrement. ► Baiser : « Baby, let me bang your box* Work* with me, Annie Let’s get it while the getting is good » Work with Me Annie, Hank Ballard (1954).

BANJO Afr. du kimbandu mbanza. Instrument originaire de l’Afrique de l’Ouest ; le banjo ne comportait que quatre cordes jusqu’au début du xixe où une cinquième corde, la chanterelle, lui fut ajoutée. L’un des meilleurs joueurs de banjo du peuple du blues reste probablement Gus Cannon qui dirigea les Jug Stompers. Populaire à la fin du xixe et au début du XXe {minstrels, puis New Orleans et jug bands), le banjo connut une éclipse avant de revenir à l’honneur avec la mode du dixieland. Banjo Papa (Stop Pickin’ on Me), Lizzie Miles (1928). ® Surnom des bluesmen Gus Cannon, alias Banjo Joe (1883-1979) et Lemon Nash, alias Banjo Boy (1898- 1969). ► PUTTING IN THE BANJO. Ancienne coutume des côtes géorgiennes consistant à tourner en ridicule les membres dévoyés de la communauté dans des chants accompagnés au banjo.

BARBECUE (Bar-B-Q) 31. Métaphore désignant les organes sexuels féminins : « Some people wants it, some people don’t, If you buy my barbecue they just won’t don’t, don’t, don’t, Talkin’ ’bout my barbecue, only thing I sell And if you want my meat, You gotta come to my house at twelve » Barbecue Bess, Lucille Bogan alias Bessie Jackson (1935). 32.Par extension, femme attirante : Struttin’ with Some Barbecue, Louis Armstrong (1927). • BARBECUE BOB. Pseudonyme du bluesman Robert Hicks (1902-1931). BARNEY Surnom du clarinettiste Leon Albany « Barney » Bigard (1906-1980). BARRED Barré, empêché. Sous ¡’influence d’un mauvais sort, ensorcelé : « I wrote you a letter, mama Put it in your front yard I would love to come to see me But your good man got me barred » Writin’ Paper Blues, Blind Willie McTell (1927).

BARREL (In the) Sans le sou, fauché, raide, dans la dèche : Yes, Pm in The Barrel, Louis Armstrong (1925).

BARRELHOUSE • Bouge, taverne : « I'm gonna built me a little barrelhouse flat* Way out on Dago Hill Where I can get my beer and whiskey When it’s fresh from the hill [parlé] Police sergeant, just wont let me be He tried to find my whiskey everywhere 1 hide it» Barrelhouse Flat Blues, Mary Williams (1929). « I was playing in bonkytonks*, barrelhouses; barrelhouses and honkytonks the same thing. That’s where people gamble, shoot dice, back there. » Interview de Little Brother Montgomery par la B.B.C. (Chicago, 1976) citée par Giles Oakley dans The Devil’s Music. • Style de piano joué dans ce type d’établissement. • Faire la fête, la java : « If your man gets personal Once you’ve bad some fun* Just come back to Friar’s Point Mama and barrelhouse all night long » Traveling Riverside Blues, Robert Johnson (1937).

BASE L’un des surnoms du pianiste et chef d’orchestre William Count Basie (1904- 1984): « D’autres m’appelaient Base, et c’est d’ailleurs ainsi que nombre de mes amis les plus vieux et les plus intimes m’appellent encore. Je ne me rappelle pas qui a commencé, mais ce surnom est resté depuis longtemps. Il n’y avait pas alors de Count* Basie. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues.

BASIN STREET Célèbre artère de La Nouvelle-Orléans dans le quartier de Storyville, où se tenaient les plus fameux bordels, ceux de ou de Josie Arlington. Basin Street Blues, Louis Armstrong (1928).

BASKET Corbeille, panier. Métaphore pour organes sexuels féminins : « Get your bucket and your basket Let’s go to the wood Don’t find no berries, mama Lord, got to make lovin’ good If it’s all night long Mama, if it’s all night long » All Night Long, Skip Janies (1965).

BATHTUB GIN Alcool de fabrication artisanale : «At the Capitol Palace there were no restrictions on the hours we might play. The patrons had to purchase a bottle of sparkling water at about a dollar a bottle plus a bucket of ice. Everyone carried their own liquor in a hip flask for these were the days of prohibition and bathtub gin. » Interview de Cecil Scott, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Ilentoff.

BATTLE Syn. de cuttin’ contest: Battle of The Blues, Joe Turner and Wynonie Harris (1947). ► BATTLE-AXE. Voir axe. BAYOU Du choctaw bayuk. Bras mort d’un cours d’eau : « Si vous n’êtes jamais allés, avec un guide sûr, dans ces bayous, vous aurez bien du mal à en imaginer l’étrangeté et les mystères. Parfois il y règne un calme et un silence impressionnants, il y a de grands arbres noirs dont les branches retombent dans l’eau, des fleurs bizarres, toute une pourriture qui stagne, de curieux oiseaux qui volent de-ci de-là et qui soudain plongent dans l’eau, des chauves-souris, des serpents, beaucoup de serpents. Dans les bayous, la nuit tombe brusquement, comme si un voleur était venu dérober le peu de lumière qui y demeurait encore un moment avant. » Sidney Bechet, La musique, c’est ma vie.

BE-BOP Depuis 1944/45. Lester’s Be Bop Boogie, Lester Young (1946). Voir bop.

BEALE STREET Rue chaude de Memphis, Tennessee : « You could used to walk down the street in days of 1900 and like that and you could find a man with throat cut from ear to ear [...] Sometimes you find them throwed out of the windows and so forth, here on Beale Street. Sportin'* class o’ women running up and down the street all night long... Get knocked in the head with bricks and hatchets and hammers. Get cut with pocket knives and razor and so forth. Run off to the foot of Beale, and some of them run into the river and drown... » Interview de Will Shade, cité par Eric Sackheim dans The Blues Line. La réputation de Beale Street remonte aux années 1880 lorsqu’un immigré italien y ouvrit un tripot dans lequel, pour attirer le chaland, jouait constamment un orchestre; Beale Street devint bientôt le point de passage obligé de tous les musiciens ambulants. Le programme électoral d’E.H. Crump* prévoyait un certain nombre de mesures pour assainir la ville et plus particulièrement le quartier de Beale Street; toutes les tentatives se soldèrent par des échecs et ce n’est qu’avec la fermeture des maisons de passe en 1940 que la rue perdit son rôle attractif au profit de West Memphis, sur l’autre rive du Mississippi. La rue a donné son nom à plusieurs petits ensembles dont les Beale Street Sheiks et les Beale Streeters.

BEAN Radin. L’un des surnoms, avec Hawk, du saxophoniste Coleman Hawkins (1901-1969) : Bean Stalking, Coleman Hawkins (1945).

BEAR Ours. Noir. • BABY BEAR OU HONEYBEAR. Surnom du saxophoniste Gene Sedric (1907-1963) : « He [Fats Waller] would chuckle and grin, raise his eyebrows in glee and when Gene Sedric would come up for a solo. Fat’s booming voice would urge him to greater effort with “Get on your feet, Baby Bear, and earn your salary”. » Interview de W.T. Ed Kirkebv, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Ilentoff. ► BEAR CAT. Jeune beauté : Bearcat Blues, Jimmy Blythe (1927). ► BEAR CAT CRAWL. Courte figure de basses au piano : Bear Cat Crawl, Meade Lux Lewis (1938). ► BEAR MASII. Whisky artisanal particulièrement alcoolisé : Bear Mash Blues, Erskine Hawkins (1942). ► BEAR TRAP. S’habiller « dernier cri » et aller draguer : Bear Trap Blues, Jimmy Yancey (1940). ► GRIZZLY BEAR. Grizzly (ours). Danse en vogue durant la Première Guerre mondiale : « My first job was at a juke* in Holton, Louisiana [...] On Saturday, we used to start at nine o’clock and play all night long. They’d dance the Eagle* Rock and the Grizzly Bear. » Interview de Little Brother Montgomery’ cité par Karl Gert Zur Heide dans Deep South Piano. ► JACK THE BEAR. Selon Louis Armstrong, surnom d’une femme de petite vertu à La Nouvelle-Orléans. ► TEDDY BEAR. Sous-vêtement féminin d’une seule pièce porté dans les années 20 : « Oh I like my baby But don’t like her teddy bear I’m gonna buy her a box* back Maybe it’ll work » Shake Shake Mama, Mance Lipscomb (I960). BEAT Fouetter. Surpasser, battre : « That’s a new game That’s can be beat You move everything ’cept your feet Called “whip it to a jelly”, Stir it in a bowl* You just whip it to a jelly If you like good jelly roll » Whip It to a Jelly, Clara Smith (1926). e ► BEAT (TIIE). Surnom de la 125 rue à New York : The Beat (The Drag), Cozy Cole (1944). ► BACK BEAT. Accentuation des temps de la mesure dits faibles dans la tradition occidentale de la musique (soit les 2e et 4e temps dans une mesure à quatre temps) : «Just let me hear some of that rock* and roll music Any old way you choose it It’s got a back beat you can’t lose it Any old time you use it » Rock and Roll Music, (1957). ► BEAT IT OUT. Exhortation lancée à un soliste pour l’encourager à se surpasser (1940-45) : Beat It Out, Fats Waller (1937). ► BEAT THE RAP. Voir rap. ► BEAT TO THE SOCKS. ® Exténué, fatigué, « mort » ou fauché, raide : « Baby I’m beat to my socks Do you dig* just what I mean? » The Jive Blues, Memphis Slim (1940). ® En musique, improvisation swinguante : Beat to The Socks, Eddie Condon (1938). ► RIDE BEAT. Pour un batteur, tempo de base. er e ► TWO-BEAT. Rythme à quatre temps avec accentuation des temps forts (1 et 3 ) par la contrebasse ou le tuba ; on tient généralement le two-beat pour caractéristique du jazz New Orleans, alors que nombre de bassistes de ce style, comme Pops Foster, marquaient déjà les quatre temps (four- beat) : « L’orchestre de Benny Moten jouait un rythme two-beat en ne marquant que le premier et le troisième temps, l’orchestre de Walter Page, le deuxième ou le quatrième. Quand ces deux rythmes se sont réunis dans l’orchestre de Count Basie, ça a donné un flux égal : 1, 2, 3, 4, comme une balle qui rebondit. » Interview de Joe Jones, cité par André Francis dans Jazz. BEBOP Voir bop. « So Diz [Gillespie] was my first musical director, and some of the earlier things that later he became very famous with were written in my band, Bebop, Groovin' High, things like that. » Interview de Billy Eckstine in To Be or Not To Bop, de Dizzy Gillespie et Al Fraser.

BEBOPPER Musicien adepte du be-bop (plus couramment bopper) : « Now off the bandstand I can see Righteous* beboppers filled with glee. McGhee and Parker on a Dizzy* kick* Left me cold, I’m such a hick! » This Joint's too Hip for Me, Betty Hall Jones (1949). BEE Abeille. Métaphore courante, sous ses différentes formes (bumble bee, honey bee, king bee...), pour désigner le ou la partenaire dans les jeux amoureux : « They cryin’ : ‘‘Come here, bumble bee, you know your stuff* And your stinger*, old bumble bee Your stinger just long enough” » I’m an Old Bumble Bee, Bo Carter (1930). « 1 hear a lot of buzzin’ Sounds like my lil’ honey bee She been all around the world makin’ honey* But now she’s cornin’ back to me » Honey Bee, Muddy Waters (1951). « Well, I’m a king bee I can buzz* all night long Well, I can buzz better, honey When your good man is gone » I’m a King Bee, Slim Harpo (1957). • Surnom des bluesmen Edward « Bee » Houston (1938-1991) et Amos Easton alias Bumble Bee Slim (1905- 1968) : « Bumble Bee Slim has told you About the death of his closest friend But I’m going to tell you From the beginning to the end * The Death of Leroy Carr (Dedicated to the Memory of Leroy Carr), Bumble Bee Slim (1935).

BEEDLE-UM-BUM Onomatopée faisant référence à la sexualité ou aux organes sexuels : « Oh, my beedle-um-bum Come and see if you ain’t none It ain’t small and it ain’t made wide It’s just made up in a medium size My beedle-um-bum It’s the best beedle-um-bum that’s made in Tennessee » Beedle-Um-Bum, The Hokum Boys (1928). Se trouve sous différentes variantes : Boodle-Dee-Bum-Bum (Blind Ben Covington, 1928), Deedle Dum (Walter Hawkins, 1929), Boodle-Bum-Bum (Memphis Jug Band, 1934)... Voir bum et doodle.

BEFORE DAY CREEP Euphémisme désignant l’escapade nocturne du backdoor man, de l’amant : « Someone knocked at my door Last night when I was sleepin' I thought it was that sweet man o’mine Makin’ his ’fore day creep It was nothing but my landlord A great big chump » I’m Down in The Dump, Bessie Smith (1933).

BENDING NOTES Litt. : notes forcées ; notes naturellement absentes de l’harmonica diatonique que le joueur arrive à produire grâce à des techniques dépendant de la position des lèvres, de la langue et de l’inclinaison de l’instrument selon son axe longitudinal.

BENNY Manteau, pardessus. ® Surnom du saxophoniste Benjamin « Benny » Waters (1902), du tromboniste Henry Sterling « Benny » Morton (1907- 1985), du trompettiste Benjamin «Little Benny» Harris (1919-1975) et du saxophoniste Bennett Lester Carter (1907) : « Apparently I made a deep impression on Benny Carter. Benny Carter didn’t play in our style, but he played. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

BETTY Personnage féminin de la ballade Betty and Dupree ; elle pousse son amant au vol et au crime pour satisfaire ses goûts de luxe : « Betty told Dupree* I want a diamond ring Now listen mama Your daddy bring you mostly anything He had to kill a policeman And he wound a detective too See here mama What he caused me to do ’rested poor Dupree Placed him in the jail He had the mean old jail Went to refuse to sign him any bail » Dupree Blues, Willie Walker et Sam Brooks (1930).

BIDDLE STREET Rue du quartier chaud de Saint Louis, Missouri : « Biddle Street, Biddle Street now Is only twenty blocks long And the women on Biddle Street Just won’t leave me alone » Biddle Street Blues, Henry Spaulding (1929).

BIG Surnom de très nombreux jazzmen et bluesmen : ► BIG BILL. Surnom du bluesman William Conley Broonzy (1893-1958) : « And it’s some people said These Big Bill blues ain’t bad Lord, it must not have been Them Big Bill blues I had » Big Bill Blues, Big Bill Broonzy (1932). ► BIG BOY. Surnom des bluesmen Arthur « Big Boy » Crudup (1905-1974), Arthur « Big Boy » Spires (1912) et du saxophoniste Frank «Big Boy* Goodie (1899- 1964): Big Boy Blues, Bill Coleman (1937). ► BIG BROWN. Surnom du guitariste et chanteur de blues Andrew Brown (1937) : « Big Brown ticklin’ it tonight! » Interview d’Otis Webster, cité par Dick Shurman sur la pochette du disque Black Magic 9001. ► BIG CHIEF. Surnom du tromboniste Russell Moore (1912-1983). ► BIG EYES. Surnom du clarinettiste Louis Delisle Nelson (1885-1949). ► BIG GREEN. Surnom du tromboniste Charlie Green (1900 ?-1936) : « They would have some real battles*. Cutting contest* you know. I would set off in a dark corner and watch while Charlie Green (we called him Big Green) would be playing something wonderful and then Jimmy Harrison would say “Huh, you think you done something”, and then he’d try to cut* him. It was that way with the whole band*... » Interview de Leora Henderson, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► BIG JAY. Surnom du saxophoniste Cecil James McNeely : Jay Walk, Big Jay McNeely (1951). ► BIG JOE. Surnom du bluesman Joe Lee « Big Joe » Williams (1903-1982) et des blues sbouters Joseph « Big Joe » Turner (1911-1985) et Joseph « Big Joe » Williams (1918). ► BIG MACEO. Surnom du pianiste Major Merriweather (1905-1952). ► BIG MAMA. Surnom de la chanteuse de blues Willie Mae Thornton (1926-1984) : They Call Me Big Mama, Big Mama Thornton (ca I960). ► BIG MAYBELLE. Pseudonyme de la chanteuse Mabel Louise Smith (1926-1972) : « I said : “You can run the country I’m gonna run the Senate I’m gonna make few changes, Put some soul* brothers in it Ray Charles and Ligbtnin’* Hopkins, A guy like Jimmy Reed, Bo* Diddley And Big Maybelle, all I need.” » Red's Dream, Louisiana Red (1962). ► BIG MOOSE. Surnom du pianiste de blues Johnny « Big Moose » Walker (1929). ► BIG NICK. Surnom du saxophoniste George Walker « Big Nick » Nicholas (1922): Big Nick, John Coltrane (ca 1962). ► BIG ONE. Le Meilleur, surnom du contrebassiste et chef d’orchestre Walter Page (1900-1957) : « Le chef était le type costaud au visage avenant qui jouait du tuba et doublait au baryton. Il s’appelait Walter Page, et l’orchestre était alors connu sous le nom de Walter Page and his Blue Devils. Mais on entendait aussi les musiciens l’appeler par son surnom, Big One. On voyait aussi du premier coup qu’ils ne le respectaient pas seulement parce qu’il était le patron... » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. ► BIG SID. Surnom du batteur Sidney Catlett (1910-1951). « At The Onyx* all the drummers* wanted to sit in* and I wouldn’t let them. All the big guys — Big Sid Catlett — I wouldn’t let nobody sit in. They could play but Max [Roach] knew all our arrangements. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► BIG T (OU MISTER T). Surnom du tromboniste chef d’orchestre Weldon Leo Jack Teagarden (1905-1964) : « Jive* with Jordan is jake* with me, Blues with Basie and Big T. Might be corny* like a moon-in-june rhyme But I love a good melody some of the time » This Joint's Too Hip for Me, Betty Hall Jones (1949). ► BIG VOICE. Surnom du chanteur de blues Andrew « Big Voice » Odom (1936- 1991).

BIG D Surnom de la ville de Dallas, Texas : Big D Blues, Hot Lips Page (1944).

BIG DOG (gun, noise, potato, shot wheel...) Grosse légume, gros bonnet, caïd : « Let me be your little dog Until your big hound come I can do more howlin’ Your big dog ever done » Unnamed Title, Barbecue Bob (1929). «And when I got to be about 16 years old [...] my father put me in a bale of cotton and carried me to the train and gave me 40 dollars in my pocket. I was a big shot sure when I had 40 dollars. Sent me to go to the fair five times and he said : “Son, don’t go down on Fannin* Street.” And I told him : “Nossir, papa.” And that’s just where I was going. » Interview de Leadbelly, cité par Alan Lomax et Moses Ash dans The Leadbelly Songbook. « Let me be your lil’ wheel, baby ’til your big wheel comes Well I do more rollin'* Your big wheel ever done » Little Wheel, John Lee Hooker (1957).

BIG EIGHTY Nom d’un train desservant Savannah, Géorgie, et la côte Est. « Big Eighty left Savannah Lord and it did not stop You oughta saw that colored fireman* When he got them boiler hot » Statesboro Blues, Blind Willie McTell (1928).

BIG FAT MAMA Dans les couches populaires noires, les canons de la beauté ont toujours privilégié les femmes plantureuses : « Oh, big fat marna With the meat shakin’ on her bones Everytime she shimmies* A skinny woman leaves her home » Blind Man Blues, Sara Martin (1923). «... Puis je lui ai expliqué que je ne voulais pas non plus parce que Playboy ne mettait jamais de filles noires, basanées ou asiatiques. Tout ce qu’ils ont, je lui ai dit, c’est des blondes aux gros nichons et au cul plat, quand elles en ont un. Qui peut bien avoir envie de regarder ça tout le temps? Les Noirs aiment les gros culs. Nous aimons embrasser sur la bouche, et les Blanches n’ont pas de bouche à embrasser. » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l'autobiographie.

BIG FOUR Surnom de la Cleveland, Cincinnati, Chicago & Saint Louis Railroad : « And that Big Four, the Big Four It’s a mean old train to ride* She took my baby away And left me dissatisfied » Big Four Blues, Charley Jordan (1930).

BIG HOUSE A l’origine, le terme désignait la maison du planteur, du maître blanc. Taule, trou, cabane : « I’m going to the Big House And 1 don’t even care* — Don’t you hear me talkin’ to ya Scoldn’t my death — I’m going in the morning And I don’t even care I might get four or five years Lord, and I might get the chair* » Lonesome Day Blues, Jesse James (1936).

BIG LEG (Legged) Longue jambe. En parlant d’une femme, bien roulée, bien balancée : « If you get a big leg woman Now in this old town These steel-mill men Now will run* her down » Big Leg Woman, Johnnie Temple (1938). BIG ROCK Prison du comté de Fulton à Atlanta (Géorgie), en service jusqu’en 1961 : « They took her on down To that Big Rock jail And her crime was so evil Nobody will go her bail » Big Rock Jail, Barefoot Bill (1929).

BIG SIX Aux dés, 6 (six) : Big Six, Bumble Bee Slim (1936).

BIG-TIME Important : « Saw a big-time rounder* Mangin’* around my high brown’s* bed If I shoot that rounder Honey, it will be too bad » It's Just Too Bad, Barbecue Bob (1929).

BIMBO Vient probablement de l’italien bambino. Femme, petite amie (1920). Putain (1930) : Bimbo, Clarence Williams (1928).

BIRD Surnom du saxophoniste Charlie Parker (1920-1955) : « The nickname “Bird” comes from yardbird*. He did a short stint in the army, and yardbird is what they call a recruit. » Interview de Carmen McRae, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. Bird Calls, Charlie Mingus (1959). ► BIRD BRAIN. De peu d’intelligence : Bird Brain Baby, Mercy Dee Walton (1950). ► BIRDIE. Note ornementale. e ► BIRDLAND. ® Club new-yorkais à , près de la 53 rue, ouvert en décembre 1949 ; son nom est un hommage à Bird, alias Charlie Parker : Lullaby of Birdland, Art Blakey & Clifford Brown (1954). ® Syn. Rafter hours. • LITTLE BIRD. Surnom du saxophoniste Jimmy Heath (1926) : « That was the bad* band with Trane* and Little Bird and John Lewis. That was a terrific* band. But it disbanded within four or five months or something, maybe less. » Interview de Melba Liston, in To Be or Not To Bop de Dizzy Gillespie et Al Fraser. SNOWBIRD. ® Adepte de la neige, cocaï- nomane. @ Chemineau, travailleur saisonnier gagnant le Sud durant la mauvaise saison pour échapper aux rigueurs de l'hiver. BISCUIT Biscuit. ► Femme jeune et belle. ► Plaisir sexuel raffiné, ce qui s’oppose alors à cornbread : 33. They cook combread* for their husband And biscuit for their man » Combread Blues, Texas Alexander (1927). • BISCUIT BROWN. ® Noir. ® Partenaire sexuel, amant : 34. Don’t your kitchen feel lonesome When your biscuit brown is not around It makes you feel leavin’ Leavin’ this town » Please Give Me Black and Brown, Lemon Nash (1959). • BISCUIT ROLLER. Celui, celle qui « roule les biscuits », l’amant(e) : « Man, don’t your house feel lonesome AXlien your biscuit roller gone » Rolling Stone, Robert Wilkins (1928). • CRAKLING BISCUIT. Voir soul* food. BITCH Chienne, femelle. 1 Femme (péjoratif), pute : « But when I got to New York I heard some comments about, “Why the hell* did he [Dizzy Gillespie] send all the way to California for a bitch trombone player?” They didn’t know me at all, but as Dizzy instructed, 1 arranged some things and brought them with me, Stella by Starlight and Anita’s Dance. [... ] When we got into the initial rehearsals, and they started playing my arrangements, well, that erased all the little bullshit, you see. They say, “Mama’s all right”. Then I was Mama, I wasn’t bitch no more. » Interview de Melba Liston in To Be or Not To Bop, de Dizzy Gillespie et Al Fraser. 2. Femme (légitime), petite amie (sans nuance péjorative); quelqu’un d’excèp- tionnel, de formidable : - Everybody was in the group, and about two weeks later, Dizzy* [Gillespie] picked up another guy* who said “He was a bitch, and when he got there, he was. That was Milt Jackson”. » Interview de Ray Brown, in To Be or Not To Bop, de Dizzy Gillespie et Al Fraser. 3- Homme qui affiche son homosexualité. • SON OF A BITCII. Fils de pute, bâtard : « Fucked* your mammy Fucked your sister too Would’ve fucked your daddy But the son-of-a-bitch flew » The Dirty Dozens, Speckled Red (version inédite, 1956). « I’ve known guys* that wanted to cuss out the boss* and was afraid to go up to his face, and I’ve heard them sing those things [...] He really be talkin’ to his boss : “You sonofabitch you, you got no business.” » Blues in The Mississippi Night, Sonny Boy' Williamson, Memphis Slim, Big Bill Broonzy (ca 1951). Peut aussi s’employer, comme , dans un contexte amical. • S.O.B. Pour son of a bitch, fils de pute. Nom du groupe de blues de Chicago, le S.O.B. Band, formé par des fils de bluesmen célèbres (d’où officiellement « Sons Of the Blues »).

BLACK Noir : « Said I’m on my way back to that lonesome hill On my way back to that lonesome hill ’cause that’s where I can look down Where this black man used to live » Mississippi Moan, Isaiah Nettles (1935). Dans les couches populaires noires s’est instaurée, sous l’effet de l’idéologie des Blancs, toute une hiérarchie fondée sur les couleurs de peau, depuis le blue gummed nigger* ou le monkey (les Noirs les plus foncés, au type africain) qui sont les plus mal considérés, jusqu’au yaller (le Noir café au lait) situé lui, tout en haut de cette échelle de couleurs : « Brownskin women are evil Black women are evil too I’m gonna get myself a yeller* gal See what she will do » Evil Woman Blues, Texas Alexander (1927). « Peu de temps après que mon père se fut remarié, maman fit la connaissance de Phil Gough, un débardeur à Baltimore, mais de très basse famille. Ses sœurs travaillaient toutes dans des bureaux et d’autre part, elles avaient la peau très claire. Elles pensaient qu’il était terrible que leur père s’engage dans la vie avec maman et moi parce que nous avions la peau deux ou trois tons plus foncée. » Billie Holiday et William Dufty, Lady Sings The Blues. Les exceptions à cette dévalorisation du Noir sont rares jusque dans les années 60, mais on peut cependant noter ce couplet tiré du Good Woman Blues de Leroy Carr (1934): « Blacker the berry Sweeter the juice I’ve got a good black woman And I ain’t gonna turn her loose » Avec les grands mouvements pour l’égalité des droits civiques dans les années 60, s’affirma une nouvelle fierté noire : c’est le Black Is Beautiful lancé par Stokley Carmichael, le Back to Black enregistré par Nina Simone ou le Say It Loud, Pm Black and Pm Proud gravé par James Brown (1968): « Black tighs Black tighs digging nails into me Making love out of my taut strong black muscles Making me forget all about white tighs White love Love me black tighs » Black Tighs, The Last Poets (1970). ► BLACK ACE. Voir ace. ► BLACK AND TAN. ® Mélange de bière brune et de bière blonde ; par analogie, se dit d’un lieu « mixte », fréquenté à la fois par des Blancs et des Noirs : « All the places then were black-and-tan, unless you went on The Loop. But, in terms of race, everything on the South* Side was all right. » Interview de Buster Bailey, in Hear Me Talkin ’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. (2) Mulâtre. ® Perversion sexuelle : Black and Tan, Blind Boy Fuller (1936). ► BLACK BELT. « Ceinture noire », les Etats du Sud à forte proportion de Noirs : « I know I ain’t gonna sleep well tonight, boy C’mon, go home, you’re left out the big crap* game. Boy, you know where I’m from? I’m from the black belt. If you be all right We might carry you back there soon » Baking Powder Blues, Lucille Bogan (1933). • BLACK BOY SHINE. Pseudonyme du bluesman Harold Holiday (?-ca 1948). Noter le pléonasme, black boy et shine ayant le même sens, Noir. ► BLACK BUTT (BUFF). Technique pianis- tique du début du siècle originaire de La Nouvelle-Orléans et se caractérisant par un jeu puissant et agressif. Cette technique est à l’origine du boogie-woogie. ► BLACK BUTTERFLY. Papillon noir, jeune Noire très belle : Black Butterfly, Cootie Williams (1939). ► BLACK CAT BONE. Voir black* cat. ► BLACK CODES. Codes noirs définissant les punitions que les propriétaires pouvaient infliger à leurs esclaves. Les premiers codes furent institués en Louisiane par les Français en 1724; assouplis par les Espagnols (1763- 1800), les codes furent durcis lorsque la Louisiane, en 1803, devint américaine. Ils furent officiellement abolis à la fin de la guerre de Sécession (les 13e, 14e et 15e amendements interdisent l’esclavage et assurent les droits civiques des gens de couleur), mais ils furent progressivement réintroduits (voir Jim* Crow Laws) dans l’ensemble des Etats du Sud, d’abord dans le Mississippi (1868) puis dans le Tennessee (1869), la Virginie et la Caroline du Nord (1870), la Géorgie (1871), l’Arkansas, l’Alabama et le Texas (1874), la Louisiane, la Floride et la Caroline du Sud (1877). ► BLACK NAME. Voir name. ► BLACKOUT. Noir à la peau très foncée : Blackout, Erskine Hawkins (1941). ► BLACK RASPBERRY. Sorte de framboise de couleur très foncée. Par analogie, Noir : Black Raspberry Jam, Fats Waller (1936). Duke Ellington et son orchestre ont, un temps, usé du pseudonyme Mills Ten Blackraspberries. ► BLACK SNAKE. Voir snake. ► EARLY BLACK. A la nuit tombante. ► GREAT BLACK MUSIC. Terme dû à l’Art Ensemble of Chicago et, pour des raisons idéologiques, préféré à jazz- , désigne l’ensemble des productions musicales spécifiquement noires : Great Black Music, Message to Our Folk, Art Ensemble of Chicago (1970). ► JET BLACK. Noir de jais : « An’ a brownskin woman Like somethin’ fit to eat But a jet black woman Don’t put your hands on me » Stoney Pony Blues, Charlie Patton (1929). ► Too BLACK BAD. Cette expression est une sorte de superlatif de bad : vraiment mauvais. « You know, he’s a travelin’ horse An’ he’s too black bad You know he got a gait, now No shetlan’ ain’t never had » Shetland Pony Blues, Son House (1941).

BLACK BETTY Dans l’argot des prisons du Sud, fouet de cuir utilisé par les matons : Black Betty, James « Iron Head » Baker (enregistré au pénitencier de Sugar land en 1933).

BLACK BOTTOM Surnom du quartier noir de Nashville, Tennessee; par extension, célèbre danse des années 20 : *La fameuse danse du black bottom venait aussi de Nashville. George White, qui l’introduisit à Broadway, dans Scandales, avait pris le black bottom sur le vif, si je puis dire, dans le quartier le plus dangereux de la ville. Jusqu’au nom qui était celui d’un quartier : le Black Bottom. Les nègres qui y vivaient étaient de tels truands, si agressifs et bagarreurs, que la police blanche n’osait pas y mettre les pieds. » Erhel Waters et Charles Samuel, La Vie en blues. Par extension, quartier noir d’une ville ( années 20-30) : « You go down Black Bottom, Put your money in your shoes Because the Black Bottom women Gal, ain’t going to do nothing but take it away from you » Down in Black Bottom, Joe Evans (1931). BLACK CAT 1 Chat noir (signe de poisse, de guigne) : « When we came to the edge of town, a black cat started across the street and one negro* said : “Look that damn’ black cat, don’t let him cross us, it’s bad* luck." » Big Bill Broonzy, Big Bill Blues. Sa queue, suspendue au-dessus d’une porte, permet d’éloigner le mauvais esprit et de conjurer le mauvais sort. 2. Noir(e). ► BLACK CAT BONE. OS de chat noir, fétiche d'origine vaudou, censé faire naître I amour ou ramener le partenaire infidèle: - Alight get a black cat bone Going to bring my baby back home Lord, and if that don’t do it Might be one more rounder* gone » One More Time, Barefoot Bill (1930).

BLACK MARIA Fourgon de police, panier à salade : «J’aperçus un flic blanc pointant un revolver sur nous à travers la fenêtre. Il entra dans la pièce, suivi par d’autres et ils nous conduisirent au panier à salade posté non loin de la maison, une black maria comme on les appelait, et en route pour la prison... » Bill Coleman, Trumpet Story.

BLACK SNAKE Couleuvre de grande taille, commune en Amérique du Nord. Métaphore pour amant(e) : « Some black snake Been suckin’ my rider* You can tell by that I ain’t gonna him no more » Black Snake Blues, Martha Copeland (1926).

BLACKJACK Matraque. Jeu de cartes dont la finalité est de réaliser un total de 21 points (d’où son autre nom de twenty oné) ou de s’en approcher le plus possible sans cependant le dépasser : « Now let me tell you, people About this blackjack game It cause me so much trouble I have myself to blame » Blackjack, Albert Collins (1985).

BLACKSTICK Clarinette : Blackstick, Sidney Bechet (1947). Souvent abrégé en stick.

BUST Jouer puissamment, en particulier dans le cas des cuivres. Fumer de la marijuana.

BLIND Pour blind baggage car, wagon de marchandises : « Papa fix the blinds So the bums* can’t ride If ride they must Let them ride* the rods » Kassie Jones, Furry’ Lewis (1928). Blind ou blinder, œil, paupière ou rideaux : « Say I walked around to my window And I peeped right through my blinds I seen another darky* Trying to change my woman’s mind » Walking Blues, Chasey Collins (1935). • Surnom très fréquent dans le monde du blues depuis Blind Blake alias Arthur Phelps (1880-1935), « Blind » Gary Davis (1896-1972), « Blind Lemon » Jefferson (ca 1897-1930), «Blind» Willie McTell (1901-1959), Theodore « Blind Blues » Darby (1906), « Blind Boy » Fuller alias Fulton Allen (ca 1908-1941), « Blind » John Davis (1913-1985), « Blind » Willie Johnson (1923-1949), ou « Blind » Willie Reynolds... « Blind Boy had a million friends North, east, south and west Yes, you know it’s hard to tell Which place he was loved the best » The Death of Blind Boy Fuller, Brownie McGhee (1941). Le nombre de bluesmen aveugles — relativement important — est signe à la fois du mauvais état sanitaire des populations rurales — et particulièrement des Noirs — et du rôle joué par la musique dans une société sans protection sociale où elle a constitué souvent pour les aveugles l’un des seuls moyens de survie. Les croyances populaires accordent à l’aveugle un statut à part en lui reconnaissant des dons particuliers : la parole, le verbe, l’art du récit. ► BLIND (TO RIDE THE). Dans le langage des chemineaux, voyager clandestinement dans un wagon de marchandises, « brûler le dur » : « I’m leaving here tonight If I have to ride the blinds Take a freight train special Tell the engineer* “Lose no time” » Salt Lake City Blues, Papa Charlie Jackson (1924). ► BLIND PIG. Bouge, bar clandestin : « Blind pig, blind pig Sure glad you can’t see If you could It would be too tight* for me I’m slippin’ slippin’ slippin’ Tryin’ a dodge law I’m loaded* down with bootleg* Like to make them hear me fall » Blind Pig Blues, Barbecue Bob (1928).

BLIP 35. Excellent. Etrange, bizarre, hermétique, étonnant : Savoy Blip, Jacquet (1946). 36. Pièce de cinq cents. 37. BLOCK AND TACKLE • Chef, quelqu’un qui affirme son pouvoir, y compris en usant de la force physique. Femme qui porte la culotte. • Whisky « maison » particulièrement fort : Block and Tackle, Peetie Wheatstraw (1936).

BLOCK-CHORD Litt. : blocs d’accords. Technique pianistique, caractéristique de Milt Buckner, où les deux mains jouent ensemble en accords, donnant par là l’impression d’être liées (on parle aussi de locked-hands style).

BLOCKBUSTER Quelque chose de super : Brownie McGhee and His Jook Block Busters. Par analogie, barbituriques.

BLOOD Sang. « Sneaky Pete* Helps you blow* your top Sneaky Pete is a jive* that hits the spot After one drink your blood runs hot » Sneaky’ Pete, Bull Mœse Jackson (1947). ► Frère (de race) : « I got two dope* frien’ brothers An’ I can’t tell them apart Early rider*, early rider* Well now, one is my brother An’ the other is my blood Early rider*, early rider* » I'm Gonna Build Me a Castle, Moses Jones (1961), cité par Harrv Oster dans Living Country Blues. ► Vin (années 1945-1960). 38. BAD BLOOD. ® Bouton : « You got a bad blood, mama You got bumps all in your face Well, I say one shot* from this needle*, mama And I’m sure, I’m sure, gonna clear your face » Bad Blood, Champion Jack Dupree (1958). ® Syphilis, vérole : « A l’hôpital, on faisait à tout le monde des piqûres de Salvarsan contre la syphilis. Seulement, à l’époque, ça s’appelait bad blood. On ne me fit pas de piqûres, c’est moi qui en faisais aux autres. » Billie Holiday et William , Lady Sings The Blues. 39. BUCKET OF BLOOD. Voir bucket. 40. COLD-BLOODED. Franc, entier, vrai; expansif : Cold-Blooded Woman, Memphis Slim (1961). 41. YOUNG BLOOD. Adolescent : Young Blood, The Coasters (1957).

BLOW • Jouer d’un instrument à vent, puis, par extension, de n’importe quel instrument : « We used to go around to all the clubs and jam* [...] There were so many places where a guy could blow. » Interview de Carl « Barna » Warwick, in To Be or Not To Bop de Dizzy Gillespie et Al Fraser. • Décamper, filer, se barrer : « Tell me tell me Please has anybody seen my brown* She used to love me ’til old fatmouth* blew in town » Fat Mouth Blues, Papa Charlie Jackson (1927). 3. Fumer (de la marijuana). ► BLOW A FUSE. (D- Perdre son sang-froid, se mettre en rogne, piquer sa crise : « You know my temperature’s rising The juke*-box is blowing a fuse My heart’s beating rhythm And my soul keep singing the blues. Roll over Beethoven, Tell Tchaikovsky the news » Roll Over Beethoven, Chuck Berry (1956). ® S’éclater: « Now that be-bop* is okay Well but I’ve got to have some blues Yes, those gone* crazy sounds are crazy Why but I’ve got to have some blues ’cause it starts you to jumping* And makes me wanna blow a fuse » Broadway's on Fire, Broadway Bill Cook (1950). ► BLOW (ONE’S) ASS OFF. Jouer à la perfection (laisser les auditeurs « sur le cul ») : « But he [Dizzy Gillespie] was blowing. He was blowing his ass off. That’s the first time we saw Josephine Baker. He were playing at The Moulin Rouge. » Interview de Dickie Wells, in To Be or Not To Bop de Dizzy Gillespie et Al Fraser. ► BLOW (ONE’S) HORN. ® Jouer d’un instrument à vent : « With a Lut and a Her, a Thomas Meet me, I’m Luther Thomas I’m a saxophone player, the best I’ve been blowing my horn Since the day I was born I was born with a reed* in my mouth » Rapp Time, Luther Thomas (1981). Z Prendre un solo. ® Dire ce que l’on a sur le cœur : « An’ it’s getting late in the evening Chip, I feel like Like blowin’ my horn » Country Blues, Muddy Waters (1941). 31 Chanter ses propres louanges, se faire mousser (horn blower : vantard, fanfaron). ► BLOW (ONE’S) MIND. Perdre son sang- froid, perdre la boule ou planer, quelle qu’en soit la cause (drogue, passion...) : « In my heart you’re the precious stone I treat you like a rich man treat his gold You don’t know how you blow my mind How you turn my ( ?) upside down » Precious Stone, J.B. Hutto (1972). Blow (ONE’S) TOP (COOL, HAT, WIG). Litt. : se Élire sauter le couvercle. S’éclater. Blowtop Blues, Charlie Parker (1947). Adam Blew His Hat, Lionel Hampton (1946). ► BLOW THE GIG. Voir gig. ► BLOW UP A BREEZE (A STORM). Jouer de façon inspirée, avec un swing intense, casser la baraque (années 1935-1945) : « Basie drew Jimmy [Rushing] and several other of Moten’s man into his outfit and built the band* that blew up a storm at Kaycee’s* Reno Club. » Interview de Mary Lou Williams, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. Blowing up a Breeze, Chu Berry (1941).

BLOWER Souffleur. Musicien jouant d’un instrument à anche ; soliste : « These boys don’t have fun nowadays. Talking ’bout wild* and wooly! There were two thousand registered girls and must have been ten thousand unregistered. And all crazy about clarinet-blowers ! » Alphonse Picou, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

BLUE 1. Depuis le xvie, triste, cafardeux : « Trouble in mind I’m blue But I won’t be blue always ’cause the sun gonna shine In my backdoor* some day » Trouble in Mind, Richard M. Jones (1936). Sentiment associé au désespoir, à la frustration, et tout spécialement lorsque l’individu n’est pas maître de la situation ; c’est pourquoi le peuple du blues distingue blue de sad : « The sad feeling is if something did actually happen. Like if you know when you left this morning your woman was... sick or something... Now you’ll feel sad knowing that she feels bad. And what will make you feel blue is if you know there’s nothing hurting her organically but there’s something on her mind, you understand? And she won’t tell you what it is but you can tell the difference from her reactions. Well then, that’ll make you blue thinking, knowing, that you know that she has something on her mind that’s worrying her. That makes you feel blue that she won’t tell you what it is and you’ll be busting your brains out trying to figure out what it is. » Interview de Cousin Joe par Harriet J. Ottenheimer (1966), in Catharsis, Communication and Evocation : Alternative Views of The Sociopsychological Functions of Blues Singing.

2. Cochon, salace : Blue Bessie, The Bluest Gal in Tennessee, Bessie Smith (1924). • Surnom du trompettiste Richard Allen « Blue » Mitchell (1930-1979), du chanteur Bobby « Blue » Bland (1930) et du guitariste chanteur de blues Joseph Vallery Jr. alias Little Joe Blue (1934-1990) : Little Joe Blue, Little Joe Blue (1972). ► BLUE BALLS. Voir ball. e ► BLUE DEVILS. Litt. : diables bleus. ® Delirium tremens, éléphants roses. ® Expression remontant au xvi siècle et signifiant mélancolie, déprime; elle est peut-être à l’origine du mot blues : Blue Devils Blues, Blue Devils (oz 1928). ► BLUE FUNK. Noir funk. ► BLUE GUMMED NIGGER. Voir nigger. ► EARLY BLUE. A la nuit tombante. ► LITTLE BOY BLUE. Flic. ► OUT OF THE BLUE. Inattendu, surprenant, imprévu : « Before then, I’d never really seriously considered becoming a professional musician, but an opportunity for me to learn something and support myself by playing music fell down like a blessing out of the blue. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

BLUE MONDAY 42. Le « lundi bleu », jour de reprise du travail, jour de cafard : « Blue monday, How I hate blue monday Got to work like a slave all day Here com’ tuesday I’m so tired, got no time to play » Blue Monday, Fats Domino (1955). 43. Syn. de rent party : « They call them house parties and they call them blue monday parties... » Interview de Little Brother Montgomery (1976) cité par Giles Oakley dans The Devil's Music. A Chicago, la tradition veut que, dans les bars et les clubs, la soirée du lundi permette aux amateurs de se produire en public accompagnés de la rythmique « maison » : ce sont les blue monday jam sessions : Blue Monday at Kansas City Red’s, Carey Bell (1969).

BLUE NOTE Litt. : note bleue. Les notes bleues constituent l’une des caractéristiques fondamentales de la musique négro-américaine ; elles correspondent à une altération des 3e et 7e degrés de la gamme telle que définie par la tradition occidentale. Cette altération, souvent déterminée dans une approche ethnocentrique, comme une « bémolisation », est en réalité plus proche de ce que Gilbert Chase (in Musique de l’Amérique) appelle « une oscillation entre la note naturelle et la note bémolisée », opinion partagée par Abbe Niles (in Treasury of The Blues). En introduisant une ambiguïté modale, les blue notes donnent au blues son climat expressif caractéristique. Avec le be-bop apparut l’équivalent d’une troisième blue note, par inflexion du 5e degré de la gamme. En ce qui concerne leur origine, l’hypothèse qui était la plus fréquemment admise était celle d’Ernest Borneman (in A Critic Look at Jazz, 1946) : bien qu’il existe des gammes diatoniques en Afrique de l’Ouest, les gammes pentatoniques prédominent cependant et les premiers Africains déportés, habitués à ces dernières, eurent des difficultés à s’adapter à la gamme occidentale et eurent tendance à en infléchir les degrés qui leur étaient inconnus, soit les 3e et 7e. Mais cette hypothèse se révèle peu satisfaisante depuis que les ethnomusicologues ont démontré que les gammes pentatoniques n’étaient ni uniques, ni même dominantes, en Afrique de l’Ouest. C’est pourquoi Jacques B. Hess, s’appuyant sur les travaux du musicologue ghanéen J.H. Kwabena Nketia (in Tbe Music of ¿frica, 1974), préfère en voir l’origine dans les échelles africaines à degrés non équidistants qui « incorporent des demi- tons, des tons entiers et des intervalles qui sont légèrement inférieurs à un ton entier et légèrement supérieurs à un demi-ton, particulièrement entre les 3e et 4e degrés et entre les 7e et 8e degrés ».

BLUES Mot d’origine incertaine remontant au xvie ou xvue siècle. Le terme est toujours utilisé au pluriel (alors qu’en français, on le fait précéder de l’article au singulier). Il possède quatre acceptions principales, fort différentes et pourtant étroitement imbriquées : 1. Pour le Noir, le monde du blues, c’est le monde du racisme, le monde des conditions qui lui ont été — et qui lui sont encore — faites dans l’Amérique blanche. Ces conditions, depuis le xvne siècle, s’inscrivent dans les cadres successifs de la déportation et de l’esclavage, puis de la ségrégation et du racisme. De ce passé commun va « naître », d’ethnies africaines diverses, une communauté — les Négro- Américains — à la culture homogène. Le blues est le lieu où vont se célébrer cette origine et ce passé communs : le blues joue, de fait, le rôle de mythe créateur; et «jouer le blues», ce n’est rien moins que « créer l’ambiance qui permettra [à l’auditoire] de revivre en commun ce qu’est le blues, c’est-à-dire à la fois ses origines et sa condition de toujours » (Robert Springer). De même que la parole africaine, le Nommo, ne traduit pas l’état d’esprit et les sentiments, mais les génère, il instaure le climat affectif : « It’s a contagious thing... If I do it [play the blues], and I do it right, you got it. It’s like a disease, it’s catchin’, it’s a contagious thing... » Interview citée par Harriet Ottenheimer. Le blues n’est donc pas cette litanie fataliste, ce chant d’acceptation, de résignation généralement décrit ; ce n’est pas non plus ce processus de catharsis individuelle ou collective que décrivent généralement les hommes du blues eux-mêmes : « It’s a lot of times, we can get very worried and dissatisfied, and we can get to singing the blues, and if we can play music, and play the blues, we may play the blues for a while until we get kind of pacified. That cuts off a lot of worry. » Interview de J.D. Short par Sam Charters (1962), in The Legacy of The Blues. Cest un rite mettant en scène un passé tragique, douloureux, qui doit rester vivace dans l’esprit de tous les membres de la communauté, et qu’il s’agit, au présent et inlassablement, de faire partager. Ce que note aussi Alain Gerber (in Le Cas Coltrane) : la fonction principale des i?lues « est d’accentuer le particularisme du groupe au sein d’un monde qui n’est pas le sien en éclairant toujours, avec violence, la conscience qu’il a de lui- même et en retenant avec passion la mémoire de la terre ancestrale. Ils tendent un piège vain, mais beau, au temps perdu ».

2. Cest pourquoi le blues est un lieu résistant à l’idéologie des Blancs. Il met en échec le mythe des Etats- Unis comme creuset dans lequel sont censées se fondre les vagues successives d’immigrants. 3. Le blues est ensuite un sentiment (feeling) ■ c’est le cafard, la déprime associés à un sentiment de totale impuissance (voir blue). Cette acception est sans conteste la plus ancienne (xvie ou xvne siècle) ; c’est celle qu’attestent tous les bluesmen interrogés sur le sens du mot : « In blues it’s what you call a felt-inward feeling — of your own-self. It’s not a spiritual feeling that you have ; it’s some kind of sorrowful feeling that you have of your own-self. It’s something that happened to you and cause you to become sorry or something, maybe grievous about it. Then you would compose the song to that feeling that you have. And then you would sing it and after you begin to sing it, then you become accustomed to it through psychology that ’most anybody could have that same feeling as you did. It’s universal, but it don’t bring joy in the spirit. » Interview de Robert Wilkins, cité par Eric Sackheim dans 77JC Blues Line. Pour autant, ces éléments ne doivent pas nous amener à déduire que le blues, au sens 3, est forcément triste et de tempo lent. Ce sont là des interprétations ethnocentriques, qui associent le mode mineur à la tristesse (voir blue* note) et la tristesse à un rythme lent (le terme jump-up — qui évoque l’idée de saut et de rapidité — était d’ailleurs utilisé pour désigner la musique qui allait devenir le blues). 4. Terme générique recouvrant tout un courant de la musique négro-américaine né probablement dans le Delta vers la fin du XIXe siècle. Le mot lui-même n’a été employé en ce sens que depuis le début du XXe siècle. Auparavant, les termes reel, jump-up, over-and-over ou dittie ont pu l'être. Le blues possède un certain nombre de caractéristiques (usage de stéréotypes, redondances, inscription mnésique dans le corps et la pulsion rythmique, absence d’acte de composition identifié comme tel...) permettant de le rattacher aux traditions dites « orales ». « Blues for them [pour les Noirs] is something like a book. They want to hear stories out of their own expe- riences, and that’s the kind we tell. » Interview d’Otis Spann, cité par Pete Welding, pochette du disque Polydor 545.030. Affirmant la prééminence de la parole sur la musique, il s’oppose aux formes musi cales qui s’en sont inspirées (rock’n’roll, pop music, rock...) où le primat s’est inversé. Processus de composition : Comme dans tous les arts de tradition orale, est à l’œuvre dans le blues un processus continu de composition/recompo- sition plutôt qu’un acte individuel d’écriture, identitifé et daté comme tel; le bluesman, à chaque profération, re-crée, personnalise, s’approprie des « textes » issus de la mémoire collective : « I made up a lot of the songs I sing. It’s like you hear a record or something or other. Well, you pick up some words out of that record that you like. You sing that and add something else onto it. It’s just like if you’re going to pray, and mean it, things will be on your mind [...] As fast as you get one word out, something else will come in there. » Interview de Fred Me Dowell par Pete Welding in Blues Unlimited24 (1965). Le blues s’accommode mal de la notion d’auteur-compositeur et le bluesman confond volontiers acte de profération et acte de composition, revendiquant dans la plupart des cas la paternité de ce qu’il profère : « So I made a song. Well, I didn’t make it, somebody else made it and I liked it, so I wrote it. I’ll play it my way. » Introduction parlée à Baby Won't You Please Come Home, Speckled Red (I960). Le bluesman et son auditoire : Le blues ne prend son sens que dans la « performance » (« l’action complexe par laquelle un message poétique est simultanément transmis et perçu, ici et maintenant », selon les termes de Paul Zumthor) et donc dans l’interaction constante entre le bluesman et son auditoire. Le « texte » de blues est truffé de commentaires, interpellations {Can you hear me? Do you feel the blues? Listen, are you ready? Everything’s all right?...). Ces signes langagiers, avec leurs prolongements gestuels (qui les renforcent, les suppléent, les relayent), ont pour fonction de maintenir le contact avec ¡’auditoire, de créer/entretenir la connivence et de stimuler les interactions. A l’inverse, l’auditoire intervient, accompagnant le texte de ses remarques et commentaires : « Des cris de plaisir fusent lorsque le public identifie son destin à celui du chanteur : B.B* [King] réitère sa plainte sous une forme légèrement différente, aboutissant à la déchirante confession de son tourment. Les femmes crient : “Non, non, arrête B.B. !” Les hommes semblent s’identifier au destin du chanteur, et l’encouragent à poursuivre : “Vas-y vieux, c’est ça B.B.” Sur ce, B.B. laisse la parole à Lucille, sa guitare, la faisant parler d’une voix presque humaine... » Phyl Garland, Les Dieux du soûl. Ces manifestations, que la tradition occidentale considère comme des intrusions, sont, dans les traditions noires, des inclusions, c’est-à-dire des parties constitutives du « texte » lui-même. L’appropriation de la mémoire collective : Le processus continu de composition/ recomposition est un processus d’appropriation de matériaux issus du fonds culturel commun ; cette appropriation est marquée, revendiquée même, par l’emploi presque exclusif de la première personne du singulier (voir /). « Quand je chante le blues [...] ce n’est pas que j’aie vécu les épreuves qu’un grand nombre de personnes ont vécues dans tout le Sud et dans d’autres villes à travers le pays, mais je sais ce qu’elles ont enduré. [...] Ce n’est pas seulement ce qui vous arrive à vous, c’est ce qui est arrivé à vos ancêtres et à d’autres. Et c’est ce qui fait le blues. » John Lee Ifooker, cité par Tony Russell in Blacks, Whites and Blues. Les moyens de mémorisation : On peut identifier dans le blues les procédés classiques de mémorisation relevés dans les cultures de tradition orale : ► enchaînement de phrases stéréotypées, de formules toutes faites, connues par la majorité des locuteurs et « à tout instant disponibles pour tout poète instruit de son art » (Paul Zumthor). Le cas fréquent où le bluesman laisse sa guitare — et/ou son auditoire — terminer les phrases qu’il n’a fait qu’esquisser en est l’un des signes; leur existence souligne paradoxalement le fait que le blues n’est pas un « art » de pure répétition. ► redondance (reprise des deux premiers vers du tercet de blues, reprise de tercets entiers dans le même chant ou dans des chants différents). ► utilisation de l’allitération. ► l’inscription mnésique est soutenue, confortée par l’utilisation que fait le bluesman de son corps, par la gestuelle et la pulsion rythmique. La transmission : Tous les bluesmen, ou presque, ont fait leur apprentissage auprès d’un ou plusieurs de leurs pairs, ont baigné dans un entourage pour lequel le blues avait tous les accents de la familiarité; les biographies des gens du blues sont à cet égard significatives. Mais plus fondamentalement encore, c’est par le bouche à oreille à l’intérieur de la communauté que se propagent histoires, ragots, croyances, nouvelles et, bien sûr, chansons, tous ces éléments que le bluesman va rendre siens. D'autres vecteurs ont assuré — et/ou assurent encore — la transmission du patrimoine : les spectacles itinérants ( minstrel*, medicine* et tent* shows), puis, plus récemment, radio (voir King* Biscuit, WDIA*) et disque (voir victrola*, jukebox). transmission et transformation : Le processus de transmission, comme celui de mémorisation, est un processus de transformation/sélection ; ne sont retenus et transmis que les événements saillants, pertinents, eu égard aux valeurs et aux attentes de la communauté à un moment donné; l’authenticité du message est dans sa résonance affective, dans son adéquation aux problèmes que se pose la communauté, beaucoup plus que dans son exactitude, dans sa fidélité à l’histoire et à la chronologie. A cet égard le message délivré par le blues est à traiter avec beaucoup de précautions; les données orales sont le résultat d’un traitement social avant d’être des traces du passé. Le blues est interaction avant d’être « texte » ; il est en cela inséparable de son « contexte ». Texte et contexte : Le blues procède par allusion; il ne contient pas toutes les informations nécessaires à sa compréhension en dehors des conditions dans lesquelles il a été proféré. Cest autant le contexte (situation, rapports entre les interlocuteurs, ton, mimiques...) que le texte, qui est porteur du sens. Et c’est la connivence entre les membres du groupe, leurs références culturelles communes, qui leur permettent de se comprendre à demi-mot. A ce propos, on peut avancer l’hypothèse selon laquelle l’incohérence des paroles, fréquemment relevée par certains auteurs, relève pour partie d’une vision purement ethnocentrique. Brouillage, camouflage du message et manipulation : En tant que moyen d’expression d’une minorité exploitée, le blues est porteur d’un non-dit satirique, ou critique. Comme l’écrit Robert Merle dans sa préface du livre de Ralph Ellison Homme invisible, pour qui chantes-tu?, le blues «porte, à qui sait entendre le langage inaudible au-delà des mots entendus, l’annonce symbolique et secrète de la libération ». Il est aussi porteur d’un non- dit manipulateur : « The black man just couldn’t express what he want to say; in order to give his master some assurance, he mixed what he had to say: the words served the purpose of keeping the whites happy, they were for the whites’ benefit very often. » Interview de Nat D. Williams par Robert Springer, in Historique et Fonctions sociales du blues de 1920 à nos jours. Blues et affaiblissement des caractères de l’oralité : l’influence de la culture dominante : Les musiques négro-américaines constituent un continuum au sein duquel cohabitent et s’interpénétrent des styles musicaux variés. 11 n’y a de frontières entre les différents courants que celles imposées par le langage. Ce qui est vrai pour l’ensemble des musiques négro-américaines l’est également pour leur élément central, le blues, qui englobe dans son champ les formes les plus proches des traditions orales aussi bien que celles largement influencées par les courants esthétiques dominants et qui témoignent d’un affaiblissement de cette tradition. Ceci se vérifie synchroniquement — les formes les plus « primitives » ayant toujours cohabité avec des formes beaucoup plus sophistiquées, depuis le blues dit « classique » (dans lequel la plupart des chansons sont écrites par des paroliers) jusqu’au rock and roll en passant par le style hokum — aussi bien que diachro- niquement. L’affaiblissement de la tradition orale, sous la pression des contraintes commerciales, se caractérise, entre autres, par la diminution du nombre de thèmes abordés dans un même chant, la fixation de certains textes, la diminution des interventions « hors-texte » et des surnoms (voirname), le développement thématique, le renforcement de la notion d’auteur-compositeur ou l’importance accrue donnée à la fonction distractive et au spectacle. Elle se marque également par la disparition du primat de la parole au profit de celui de la musique (développement des soli, multiplication des morceaux instrumentaux), aspect incontestablement le plus facilement assimilable. L’affaiblissement de son aspect rituel est également net ; le changement d’audience survenu avec les années 60 le rendait inéluctable, comme la montée des nouveaux concepts tournant autour de la fierté d’être noir qui ont été relayés par de nouveaux courants musicaux, tels que la soûl music. A cet égard, la question n’est plus tant de s’interroger sur la disparition du blues en tant qu’art traditionnel que de se demander pourquoi, dans un environnement survalorisant l’écriture, il a pu conserver si longtemps, et conserve encore, les caractères de l’oralité. Qu’est-ce qui fait que le blues est le noyau vécu comme le plus spécifiquement noir et auprès duquel tous les autres courants du jazz viennent périodiquement se revivifier et réaffirmer leur spécificité (soûl, funky,free jazz)? C’est d’abord probablement le fait qu’avant d’être art, le blues est commémoration d’un mythe, celui d’une origine commune dans laquelle se mêlent Afrique idéalisée et déportation. Par ailleurs et comme le remarquent Philippe Caries et Jean-Louis Comolli, il y a en lui « une irréductabilité, quelque chose de non assimilable : le corps, le sexe qui, à travers lui, parlent et fondent ce que le Blanc appelle son “obscénité” » : « La transgression majeure dont est coupable le blues se joue au regard des normes culturelles occidentales de la vocalité, parce que la parole noire dit ce que la parole blanche a étouffé et qu’elle ne veut plus entendre: qu’elle a un corps, qu’elle est corps. » Philippe Caries et Jean-Louis Comoli, « Le blues du peuple», in Jazz Magazine n°200. Structure du blues : La structure typique est de forme AAB où la première phrase (A) est répétée, quelquefois avec une légère variation, le couplet se terminant par une phrase différente (B) qui généralement rime avec les deux premières : « (A) I got ramblin’, I got ramblin’ on my mind ► I got ramblin’, I got ramblin’ all on my mind ► Hate to leave my baby, but she treats me so unkind » Rambling on My Mind, Robert Johnson (1936). La phrase B apporte soit un développement, une justification ou une conclusion de l’affirmation A, soit exprime son antithèse. Les autres structures courantes, telles que décrites par Stéphane Colas, sont de forme AAA (autre couplet de Rambling on My Mind, Robert Johnson, 1936), AAAB (Last Fair Deal Gone Down, Robert Johnson, 1936), AB avec (Candy Man Blues, Mississippi John Hurt, 1928) ou sans refrain (Big Fat Mama Blues, Tommy Johnson, 1928) ou ABAB {My Black Mama, Son House, 1930). Musicalement, le blues se distingue par : 44. le dialogue voix-instrument (antienne), où les phrases chantées (généralement de 2 mesures) sont suivies de commentaires instrumentaux (d’une durée égale) selon le procédé des call and response l’instrument prolonge la voix humaine, lui répond, l’imite, plus qu’il ne l’accompagne : 45. l’emploi particulièrement fréquent de blue* notes, source d’une ambiguïté modale. ® des structures non seulement multiformes (nombre variable de mesures et d’accords), mais aussi quelquefois fluctuantes au sein d’un même morceau. 4. Le blues en tant que structure musicale, la blues form : « I’ve got the twelve bar blues I’ve been to ten or twelve bars tonight I guess I’ve lost count But I know I’m mighty* tight* » The Twelve Bar Blues, Jimmy Johnson {ca 1979). La forme blues est une structure musicale de douze mesures s’organisant autour de trois accords (tonique, dominante, sous- dominante). Tradition africaine des appels et réponses, work songs, ballade traditionnelle, mais également nécessité de la répétition pour la mémorisation, tels sont quelques-uns des facteurs qui ont contribué à donner au blues sa forme : « C’est le cri, autant que les chants africains en interpellations et réponses, qui a dicté au blues la forme qu’il allait prendre, il en dérive directement — et bien entendu aussi du spiritual — et en a pris la structure en trois phrases, les deux premières étant, semble-t-il, répétées pendant que le chanteur attendait de trouver la troisième. » Leroi Jones, Le Peuple du blues. Minstrels et medicine shows, chanteurs itinérants, exode rural, puis disque et radio sont quelques-uns des vecteurs qui ont contribué à la fixation et à la diffusion de la forme blues. Et « aujourd’hui, elle est si rigoureuse que toute non-conformité est ressentie comme faute ou erreur » (Joachim Berendt). Cette acception, en même temps que la plus récente (la forme blues s’est peu à peu fixée dans les premières décennies du XXe siècle) est aussi la plus restrictive, sinon même la plus réductrice ; en effet la majorité des interprétations se rattachant à la tradition du blues ne respectent que d’assez loin, voire pas du tout, h forme que la tradition occidentale voudrait lui assigner : « See, my blues is not so easy to play as some people think they are. Cause here, this is it, I may have thirteen beats in some song, and the average man, he not used to that kind of thing. He got to follow me, not himself, because I make the blues different. Do that change thing when I change, just the way I feel, that’s the way it went. I mean, you take that song, Just to Be with You. Now that’s a good blues tune, and I made it just the way 1 felt, sometimes 1 play thirteen, sometimes I play fourteen beats. » Interview de Muddy Waters, cité par Peter Guralnick dans Feel Like Going Home. La forme blues a pourtant pris une importance considérable dans la musique négro-américaine : plus de la moitié du répertoire de jazz repose sur cette grille harmonique de douze mesures, du West End Blues de Louis Armstrong aux productions les plus récentes, en passant par Ko Ko de Duke Ellington et Parker’s Mood de Charlie Parker. 5. Mais blues n’est aussi quelquefois qu'un élément de titre {Memphis Blues, Milk Cow Blues...) qui ne laisse aucunement présager de la « forme » du morceau considéré qui n’est pas obligatoirement du type blues form. En tant qu'élément de titre, blues désigne généralement des morceaux en tempo lent et s opose alors à des termes comme shuffle et stomp. ► BLUESY. Dans l’esprit du blues. DEEP BLUES. Blues d’une grande intensité émotionnelle, « qui prend aux tripes » : Top Deep Blues, Muddy Waters (1953). ► FRENCH BLUES. Voir zydeco. ► PLAY THE BLUES. (D Jouer, improviser sur la structure harmonique du blues (voir acc. 4). ® Jouer avec le feeling et dans le cadre de la tradition du blues (voir acc. 3) : « She got a jook joint aroun’ the corner All night long they play the blues Say, we used to have a lot o’ fun Ridin’ home on the ole granpa’ mule » Lorraine Blues, Andy Mosely (1959), recueilli par Harry Oster et cité dans Living Country Blues. ® Mais plus fondamentalement, c’est mettre en scène {play) la condition du Noir en Amérique blanche (voir acc. 1) : « L’homme qui va chanter le blues fait le silence en soi ; il accueille la parole de tous ; il va se laisser modeler par elle de l’intérieur, jusqu’à la sentir vivante dans sa chair. A la fin, il aura vécu, en la racontant, l’expérience collective des hommes de sa race. Et sa race, qui l’entend, aura refermé sur son témoignage le cercle de la commune douleur et du silence fraternel. Ce sont là les linéaments d’un ésotérisme chargé d’accusation : une société secrète fermente dans une haine et une nostalgie artistement entretenues. L’individu est rappelé constamment aux devoirs de la lucidité. Le blues est une sorte de parapet qui le protège contre la pire des aliénations, celle qui fait oublier qu’on est aliéné. » Alain Gerber, Le Cas Coltrane. ► . Voir rhythm. ► ROLLING BLUES. Thème pianistique de douze mesures, rapide, avec des roulements de basses de six ou huit temps par mesure (au lieu de quatre dans le stride). Cette technique est caractéristique du boogie-woogie. • Surnom des bluesmen Theodore « Blind Blues » Darby (1906), Riley Ben « Blues Boy » King (1925), et des blues* sbouters alias « Boss of the Blues» (1911-1985) et Wynonie Harris (1915-1969) : Rock, Mr Blues, Wynonie Harris (1950).

BLUES SHOUTER Crieur de blues; cette traduction de l’anglais shout évacue cependant la notion de transe incluse dans le terme wolof « saut » (voir shout). C’est principalement à Kansas City, vers la fin des années 30, que se développe ce style vocal puissant — pour couvrir l’orchestre — et agressif, favorisant l’exaltation rythmique; il survivra jusqu’au début des années 50, et disparaîtra avec les grands orchestres avec lesquels il était né ; il influence grandement les vocalistes de rock* and roll et les honkers*. « I remember the lovable Jimmy Rushing, Mr Five by Five*, from when he was singing with Bennie Moten and later with Basie. Unlike the run of blues shou- ters, Jimmy could read music, and he could be heard ten blocks away without a microphone... » Interview de Mary Lou Williams, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. Les principaux blues shouters sont Big Joe Turner (1911-1985), Wynonie Harris (1915-1969), Sonny Parker (1925-1957), Jimmy Witherspoon (1923), Eddie «Cleanhead» Vinson (1917-1988) et Jimmy Rushing (1902- 1972).

BLUES SINGER (Bluesman) Conteur musicien s’exprimant dans l’idiome du blues (voir blues, acc. 3). Participant de la tradition orale négro- améri- caine, il « anime un rituel qui met en scène les mythes de son peuple » (Robert Springer). « 1 go to work in the fields When I was just thirteen Didn’t get a chance to know what education means I’m a bluesman Man, that made me a bluesman I want the world to know What it takes to make a real bluesman. [•••] Lay down at night You don’t know where you’re goin’ to sleep Where on earth your next meal to eat That make you a bluesman, uumh, bluesman, I want the world to know how come I’m a bluesman » I'm a Bluesman, Juke Boy Bonner (ca 1970). Le mot bluesman est d’usage relativement récent et peu employé par les hommes du blues eux-mêmes qui lui préfèrent le terme de blues singer. « I have never depended on the life of the blues singer as for support. I have always felt that I should do something else... I drove a taxi for about twelve years... » Interview de Henry Townsend, cité par Eric Sack- heim dans The Blues Line. Le terme ne renvoie pas à ceux pour qui le blues est un choix délibéré, esthétique ou commercial, mais à ceux pour qui cet idiome s’impose culturellement : « The blues? Man, I didn’t start playing the blues ever. That was in me before I was born and I’ve been playing and living the blues ever since. That’s the way you gotta play them. You got to live the lolues, and with us that’s natural. It’s born in us to live the blues. » Interview de T. Bone Walker, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Ilentoff. Le bluesman entretient avec le blues une relation complexe, quasi mystique, proche de celle qu’entretient un prêcheur avec ses ouailles : « Il y a quelque chose entre le blues et le bluesman que tu ne peux pas saisir.... C’est comme une religion pour nous, la nécessité de continuer à chanter et à dire le blues malgré le peu d’argent qu’on en tire. » Interview de Joe Willie Wilkins par Jim O’Neal, in Living Blues n°91, cité par Gérard Herzhaft dans John Lee Hooker. Comme l’écrit Mack McCormick à propos de Lightnin’ Hopkins, dans l’échelle de valeur de celui-ci, « la renommée internationale ne tient que peu de place. Ce qui est vital, essentiel pour lui, ce sont les égards et l’adulation de ceux qui, déambulant dans Downing Street [Houston, Texas], se pressent autour de lui et lui donnent quelques pièces en échange de ses chansons. [...] Il tire sa satisfaction dans la vision des mimiques d’entendement qui parcourent la face d’un ami tandis que son chant évoque une aventure intime commune ». Aujourd’hui, comme le note Robert Springer, le bluesman est « de moins en moins griot et de plus en plus homme de spectacle », conséquence de l’affaiblissement de la tradition orale et de la prégnance croissante des règles du show business. Sociologiquement, le bluesman est issu des couches les plus défavorisées, métayers (sharecroppers), salariés agricoles ou ouvriers non qualifiés. Il s’exprime, au moins jusqu’à la fin des années 50, essentiellement — mais pas uniquement — pour ses pairs. Depuis, l’audience du blues s’est internationalisée en même temps qu’elle s’est déplacée du prolétariat noir vers les couches blanches aisées. Quant à la majorité des bluesmen, ils sont restés ce qu’ils etaient, amateurs ou semi- professionnels, même si quelques-uns ont pu, avec les armées 60, accéder au statut de vedettes internationales.

10 CARTER ?§eudonvme du bluesman Bo Chatmon (1898-1965): * Bo Carter is a man Broadcasts all over this land And he takes women from their men Lord, just any old place he lands » A » Carter Special, Bo Carter (1934).

K DIDDLEY >umom du guitariste et chanteur Ellas McDaniel (1928) : «Je ne sais pas pourquoi on m’avait surnommé quand j’étais jeune. Je ne sais pas ce que cela veut dire .] Je chantais déjà Bo Diddley alors que je n'avais que quinze ans. La musique et les paroles me sont venues comme cela spontanément. Au départ les textes étaient un peu durs, aussi, lorsque j’ai enregistré cette chanson, ai-je été obligé de la censurer un peu. » interview de Bo Diddley, cité par Jacques Barsamian a François Jouffa dans L'Age d'or du rock’n’roll. ’ I said : “You can run the country Tm gonna run the Senate I'm gonna make few changes, Put some soul* brothers in it Ray Charles and Lightnin*' Hopkins, A guy* like Jimmy Reed*, Bo Diddley, And Big* May belle, all I need” » Usd's Dream, Louisiana Red (1962). Le terme évoque la sexualité et plus préci- -ément le mâle et sa virilité (voir diddle). Bc Diddley (1955), Diddley Daddy (1955), -<.■ Bo Diddley (1957), Story of Bo Did- dey (1959), Bo Diddley is Loose (1961) smt quelques- uns des titres gravés par Ellas McDaniel.

BOB LEE 1 Appellation d’un train : « Well the Bob Lee Junior passed me With the baby all on the inside And the conductor said “I'm sorry buddy*, but your baby she got to ride” » Could Holler, Johnnie Temple (1939). 2. L’un des bateaux, comme le Kate -dams, de la Lee* Line of Memphis. « I went way up Red* River Crawlin’ on the... I went up Red River Crawlin’ on a log I think I heard die Bob Lee boat When she moaned » Hammer Blues, Charlie Patton (1929).

BOBBY SOX(ER) Personne se comportant comme un adolescent : Bobby Sox Blues, T. Bone Walker (1946). « I want all the teenagers and bobby soxers To get around this juke-box* » Strollin’, Champion Jack Dupree (1958).

BOBO Nom d’une tribu d'Afrique centrale. ► Danse: « Your face is all hid And your back’s all bare If you ain’t doin’ the bobo What’s your head doin’ down there? » The Dirt)' Dozen n° 2, Speckled Red (1930). ► Marijuana, kif : Georgia Bobo, Louis Armstrong (1926).

Surnom du bluesman John Pickens « Bobo » Jenkins (1916-1984).

BOGUE (Bogus) Afr. du hausa boko. Frauduleux, maquillé, truqué. Surnom du bluesman « Bogus Ben » Covington (ca 1900-1935), parce qu’il prétendait être aveugle.

BOJANGLES Surnom du danseur à claquettes Bill Robinson (1878-1949) : Bojangles, Duke Ellington (1940). « On raconte que Robinson fut surnommé Bojangles du nom d’un personnage mythique du Sud des Etats-Unis, à l’issue d’une partie de poker qui avait duré toute une nuit à Harlem. Robinson, qui avait gagné beaucoup d’argent, se serait levé et se serait lancé dans une joyeuse danse de victoire. L’un des perdants, Des Williams, se serait alors exclamé: “Bojangles, c’est tout à fait Bojangles.” Depuis cette fameuse nuit, on ne l’appelle plus autrement. » Jim Hawkins, Cotton Club.

BOLITO (Bolita) De l’espagnol bolita, petite balle. Nom sous lequel le jeu des numbers* est également connu à New York ; le terme témoigne de l’origine cubaine du jeu : « Lost my money playin’ bolita I went home Robbed my gas meter I just have numbers on the brain » Numbers on The Brain. Elvira Johnson (1926).

BOLL WEAVIL (Boll weevil, bo weavil)

Anthonome (charançon du coton) qui envahit dès la fin du XIXe siècle le Texas puis l’ensemble des zones de production cotonnière : Mississippi Bo Weavil Blues, Charlie Patton (1929). « Boll Weevil, boll weevil Cut down all my cotton and corn Well I’m gonna change my mind Headin’ right on down the road along » Boll Weevil Blues, Guitar Welch (I960). Il fut la cause, avec une série de très mauvaises récoltes et la recrudescence des lynchages, d’une accélération dans les années 10 du processus de migration des populations noires des campagnes vers les grandes villes du Sud (La Nouvelle- Orléans, Memphis, Atlanta) puis du Nord. Insecte très prolifique et résistant, le boll weavil est, pour le peuple du blues, le symbole de la pugnacité, de la résistance à l’oppression et à la ségrégation. Allusion au sexe et à la sexualité : « Hey bo weevil’, ouais. Parce que le bo weevil, il bouffait tout là-bas dans le Sud. Cette vermine vous prenait toute la nourriture et tout. Et elle, Ma Rainey, qui criait à tue-tête : “Hey bo weevil, ça faisait un bout de temps que je ne t’avais plus vu.” En fait, il y avait deux significations aux paroles; et moi qui étais une poulette à la page, je savais parfaitement de quel bo weevil il était question. Oh, j’étais pas si bête! » Interview de Victoria Spivey, citée par Giles Oakley dans Une histoire du blues. ► Non syndiqué, « jaune » : « I remember it [a date on Labor Day] because the longshoremen had two parades, one for the unions men and one for the boll-weavils, the scabs. » Interview de Bunk Johnson cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. • Surnom du bluesman Sam Butler alias « Bo Weavil » Jackson : « Bo Weavil got a letter Bo mailed it in the air Maybe my blues ’ll blow news everywhere » Poor Boy Blues, Bo Weavil Jackson (1926).

BOMB Bombe. Accentuation à la grosse caisse introduite par Kenny Clarke (en jargon musical français : « pain ») : « L’apport de Monk au nouveau style be-bop était essentiellement harmonique et créateur dans l’esprit, mais le contenu rythmique a été introduit par Kenny Clarke, qui, le premier, marqua des ponctuations à la grosse caisse. Il battait tous les temps avec légèreté, mais on entendait très bien les accentuations à la pédale. On les avait baptisées “les bombes”. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

BOMBASHAY Danse du XIXe siècle : « Now first thing honey is the Bombashay Oh turn right round, go the other way. Do the Wordly Fair, the Turkey Trot, Oh don’t that girl think she’s very hot? » Bye, Bye, Policeman, Jim Jackson (1928).

BONE Os. ► Abréviation de trombone -. « Après cette déclaration, la femme était complètement effondrée. Elle lui répondit [à Charlie Parker] : “D’accord, venez demain à la même heure, et si Bone est à la maison, il vous attendra.” Le môme était surnommé Bone parce qu’il jouait du trombone. » Interview de Walter Bishop Jr par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker. ► Pénis. ► Dollar. 46. BLACK CAT BONE. Voir black* cat. 47. BONE ORCHARD (YARD). Litt. : verger à ossements. Cimetière : « Now if you got a beer drinkin’ woman Buddy*, you better let her go ’cause if she don’t send you to prison She’ll send you to the bone yard, don’t you know » Beer Drinkiri Woman, Black Ace (ca I960). 48. BONES. (D Instrument rythmique : « Les bones étaient à l’origine les côtes d’un mouton ou de quelque autre animal comestible; on polissait la surface de ces os et, les tenant entre les doigts, on les agitait pour produire des sonorités rythmées qui incitaient à la danse. » Langston Hughes, Une introduction au jazz. « Let’s go, bones, Whip it bones, Do it a long time Jus’ like getting money from home, That’s the way I like it Play them bones boy, that way it’s hot*. Play them boy, get’n good to me Let’s have a bit of Charleston in it » Dry' Bone Shuffle, Blind Blake (1927). ® Musicien (joueur de bones) dans les minstrels. ® Dés : Roll Dem Bones, Big Bill Broonzy (1945). ► MISTER BONES. Surnom donné au tromboniste Henry Sterling Bennie Morton (1907-1985) par Lester Young : 49. Les principaux solos sur Express sont dus à Tate, Sweets* et Mr. Bones, qui entretemps avait réintégré l’orchestre, et ça déménageait d’un bout à l’autre. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues.

BONUS Les anciens combattants de la Première Guerre mondiale ne reçurent aucune aide financière lors de leur démobilisation. En 1924, leur lobby poussa le Congrès à leur roter une indemnisation sous forme de bons payables en... 1945! Après diverses manifestations, ceux-ci furent finalement honorés en 1936, date plusieurs fois célébrée par le peuple du blues : Im Gonna Have My Fun When I Get My Bonus, Carl Martin ; When The Soldiers Get Their Bonus Even Id It Don’t Last Long, Red Nelson; What a Time Em Hariri off The Soldier’s Bonus, Red Nelson ; When I Get My Bonus, Peetie Wheatstraw ; Bonus Man Blues, Black Ace.

BOODLE L Terme faisant référence aux organes -exuels et à la sexualité (voir doodle) : «Tell me baby Where did you get your sugar* from I haven’t had no boodle-bum Since you’ve been gone »

Boodle Bum Bum, Charlie Burse (1934). Embrasser, peloter; baiser (1940): Bjodlin’, Jimmy Yancey (1943). ?. Terme d’exhortation à un musicien : ► Came all the way from Paris, France Come into Atlanta to get a chance To do that rag, that Georgia Rag. “Boodle it a little bit further” That Georgia Rag » ^orgia Rag, Blind Willie McTell (1931). ► ODLE DE BUM BUM. Onomatopée, sciante de Beedle Um Bum*. ► ?ODLE IT. Surnom du bluesman James Tebins (enregistrements dans la période 19284930).

BOOGALOO 1 Danse: « I feel so good Let me go, baby Let me do the boogaloo I feel so good » I Feel so Good, John Lee Hooker (1969). ► Sentiment de l’appartenance au peuple noir. 50. Surnom du guitariste de jazz «Boogaloo » Joe Jones.

BOOGER ROOGER Bar clandestin : « Now listen to me, My feets never failed on me but once. That was last Saturday night Down at that booger rooger on (Fifty Fourth ?) That law come in. I was, I was very choked. He broke up that party. Everybody got away but me. My old feets failed on me then » Hot Dogs, Blind Lemon Jefferson (1927). Origine possible de boogie-woogie.

BOOGIE (Bogie, bogey) • Soirée dansante. • Femme éthiopienne (voir Ethiopian), Noire. • Dans certaines contrées du Sud, vérole : Boogie Disease, Dr Ross (1954). ► BOOGIE GIRL. Prostituée. BOOGIE HOUSE bordel. • Mauvais, diabolique. ► BOOGIE MAN. Equivalent américain du « père Fouettard ». • Abréviation de boogie-ivoogie* : « I want you to pull up on your blouse Let down on your skirt Get down so low you think you’re in the dirt Now when I say “Boogie” I want you to boogie When I say “Stop” I want you to stop right still » Slow Boogie, Champion Jack Dupree (1943). • Elément du titre de morceaux rapides mais pas nécessairement de facture « boogie-woogie » : Blue ’N’ Boogie, Dizzy Gillespie (1945). • Prendre du bon temps, faire la bringue. • Danser le boogie-woogie : « My baby like to boogie My baby like to rock* and roll She’s a real cool swinger* ’cause she’s got so much soul* » Two Times Nine, Eddie Clearwater tea 1980). Surnom du bluesman « Boogie » Bill Webb (1924-1990). ► PITCH A BOOGIE. ® Faire du tapage, du grabuge. ® Organiser une rent party ou faire la nouba : « We’re going to pitch a boogie woogie Going to have a ball* tonight And we ain’t going to fuss And we ain’t going to fight » We Gonna Pitch a Boogie Woogie, Harlem Hamfats, vcl par Joe McCoy (1936).

BOOGIE WOOGIE Afr. En krio de Sierra Leone, on trouve bogi-bogi, danser, et en diola du Sénégal, boogie rebo, danse mais aussi arbre creux, tambour. A rapprocher également du nom du roi africain mythique Dooji, célèbre pour ses prouesses sexuelles : Old King Dooji, Duke Ellington (1938). Dooji Wooji, Johnny Hodges (1939). Le sens du mot a été probablement renforcé par le français « bouger » et sa proximité avec le mot « bogies » (d’une locomotive). ► Style musical, essentiellement pianis- tique, ainsi nommé depuis le Pinetop’s Boogie-Woogie de Clarence « Pinetop » Smith (1928). Le style lui-même remonte probablement au début du siècle (connu alors sous des noms divers, Fast Western, Galverston, Fast Texas entre autres) ; des pianistes tels que George Thomas alias Clay Custer (The Rocks, 1922), Jimmy Blythe (Chicago Stomp, 1924), Hersal Thomas (Suitcase Blues, 1925), Meade Lux Lewis (Honky Tonk Train Blues, 1927), Charles Avery ou Wesley Wallace ont, avant Smith, gravé des pièces de facture semblable : « Boogie-woogie? I heard Blind Lemon* Jefferson use the term Booger Rooger* and play in that rhythm, oh I guess in 1917-18, in Waco, Texas. The piano wasn’t really the most popular instrument in those days because there weren’t that many pianos, but Blind* Lemon Jefferson used to do things on guitar. » Interview de Sammy Price, cité par Robert Palmer (disque Savoy 2240). Techniquement, le boogie-woogie se caractérise par un motif inlassablement répété à la main gauche, qui fait se succéder croches pointées et double croches (il est quelquefois appelé eight to the bar, 8 par mesure), tandis que la main droite brode des variations sur le blues. Le boogie-woogie connaîtra un regain de popularité durant la vogue du siving* (1935-40), puis du rock* and roll à partir de 1950-55. « Well did you ever hear the boogie-woogie The day it should be played Well this boy will make you woogie* The rest of your days » Wynonie's Boogie, Wynonie Harris (1947). ► Danse qui lui est associée : «Le boogie-woogie était un chant qui exprimait les tracas de la ville [...] Ma famille se rendait compte que c’était une musique qui était mauvaise par opposition à la musique traditionnelle et c’est la raison pour laquelle ma grand-mère qualifiait mes interprétations de boogie*. Le second mot qualifiait une danse de ma sœur que les Noirs d’Aniston appelaient woogie. Assez naturellement ma sœur dansait sur la musique que je composais au piano et c’est ainsi que les deux mots furent accouplés pour signifier une “mauvaise danse”. » Interview de Cow Cow Davenport, cité par Robert Goffin dans Une histoire du jazz. 5. Terme évoquant les rapports sexuels • « You been sleepin’ out of me all night Doin’ a loivdown* boogie woogie Oh, baby, you got some lowdown dirty* way » Goodtime Lonesome Blues, Robert Pete Williams (1961). • Surnom du pianiste Vernon Harrison alias « Boogie Woogie » Red (1925).

BOOK Répertoire d’un orchestre. « The head* arrangements go right into the band’s book, and if nobody bothers to write them down, they always turn out to be the boss* numbers*. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

BOOKER Mot d’origine geechee*. Terme péjoratif pour Blanc, en particulier lorsqu’il s’agit du patron : Old John Booker, Gus Cannon (1956). Voir aussi buckra.

BOOSTER Filou, escroc; voleur à l’étalage: Booster Blues, Blind Lemon Jefferson (1926).

BOOT Botte. 51. Noir. 52. Jouer de la bonne musique : ► Nobody knows how sad and blue I am — Ah, boot it, Mr. Blake*, boot it — I sav nobody knows how sad and blue I am “•ben I come in my frontdoor* I can hear my backdoor* slam » E^ickdoor Slam Blues, Blind Blake (1928). 3- Comprendre, piger, entraver : ► First couple doin’ the African Crawl* Next couple doin’ the St Louis Nightmare Here’s a hustler* now with the State Street Stomp* And this little hustler and her man’s gonna boot that thing » Hokum Stomp, Jane Lucas (1930). 53. BOOTED ON. Dans le coup, au parfum.

BOOT HILL Jtt : colline aux bottes. Cimetière (à l’origine, celui de Dodge City ù les hommes étaient enterrés avec leurs bottes) : Boot Hill, Sly Williams {ca 1963-64). BOOTIE (Booty) Butin. • Corps féminin, cul : « Yo’ momma’s titties* hang to the floor She got a booty like a double door » Yo' Momma, Luther Thomas (1981). • Abréviation de bootlegger. 54. SHOE BOOTY. Fille particulièrement moche, boudin : Chabootie, Gene Ammons (1948).

BOOTLEG Alcool fabriqué clandestinement : « I'm slippin’, slippin’, slippin’ Tryin-a Dodge United States law I’m loaded* down with bootleg Like to make them hear me fall » Blind Pig Blues, Barbecue Bob (1928).

BOOTLEGGER Vient probablement de l’habitude qu’avaient les trafiquants de transporter une flasque de whisky dans les tiges de leurs bottes {boots), le long de leurs jambes {legs). A l’époque de la prohibition, fabricant ou revendeur clandestin d’alcool : « So please take my advice And don’t be no hooch* headed man Ah because they’re bootleggers over here Oh well, well, that poison every man they can » Old Good Whiskey’ Blues, Peetie Wheatstraw (1936). Kokomo Arnold (1901-1969) et Leroy Carr (1905-1935) furent, un temps, bootleggers.

BOOZE XIVe siècle. Boisson alcoolisée : «We used to hang out at this place, drinking up his booze. We called it “a ninety-nine per cent”, one more degree either way would bust your top, we said. » Interview de Duke Ellington in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

BOOZOO Surnom de l’accordéoniste cajun Wilson « Boozoo » Chavis (1930) : Boozoo Stomp, Boozoo Chavis (1954).

BOP (Bebop, rebop) Depuis 1944/45. 1. Style de jazz élaboré au début des années 40 par un groupe de jeunes musiciens (Charlie Christian, Thelonious Monk, Charlie Parker, Kenny Clarke...) qui se réunissaient after* hours au Minton’s de Harlem. L’apparition du bop fit l’effet d’une bombe dans la mesure où cette nouvelle école, comme le note Jacques B. Hess, put « mûrir à l’abri de toute exposition médiatique » à cause de deux événements fortuits, la grève décrétée par l’ASCAP (société des compositeurs, auteurs et éditeurs) dès 1941, puis celle du syndicat des musiciens d’août 1942 à novembre 1944 (sur ce point, voir Petrillo). En réaction contre le style swing* dominant et son aspect commercial, ils se mirent à produire une musique caractérisée par l’abandon de la continuité rythmique (au profit d’accentuations irrégulières, d’accords entre les temps, le bassiste conservant seul son rôle rythmique traditionnel) et un élargissement harmonique (accords de passage, nouveaux accords dont celui de quinte dimi- nuée jusqu’alors jugé dissonant). Suscitant l’hostilité d’une partie des amateurs et des critiques les plus conservateurs, le bop va provoquer une véritable guerre et être à l’origine d’un mouvement de retour aux sources {New Orleans Revival), qui, en fait, ne touchera que des musiciens blancs et quelques pionniers (Sidney Bechet, Bunk Johnson, Kid Ory) qui trouvèrent là une occasion d’enregistrer à nouveau. Ce style trouve son prolongement dans la décennie suivante dans le hard* bop, mais influence aussi, au moins au plan harmonique, le courant cool*. Bop City, Kai Winding (1949). 2. Danse des années 40 : « We jumped and hoped And stamped around the floor We hucklebucked* until my back is sore But, honey, won’t you waltz with me once more » After Hours Waltz, Julia Lee (1949). ► DITTY BOP (DITTY BOPPER). Adolescent (spécialement s’il roule les mécaniques). ► HARD BOP. Voir ce terme.

BOPPER Musicien de be-bop* : « Le bopper s’habillait comme un agent de change britannique. Il s’efforçait de parler comme un professeur d’université, quand il n’utilisait pas son jargon un peu ésotérique, son argot très particulier, le jive* ou le bip* talk, et il s’abstenait soigneusement de tout ce qui aurait pu, chez lui, trahir une émotion quelconque [...] En premier lieu, il s’agissait d’éviter à tout prix l’attitude traditionnellement outrancière de l’amuseur de couleur telle que le public blanc l’entendait [...] En second lieu, le comportement cool* manifestait une moquerie, une charge, une parodie du monde gourmé, guindé, étriqué, un peu balourd des Blancs, tel qu’aimaient se les représenter les artistes de couleur. » James Lincoln Collier, L'Aventure du jazz. Par extension, personne adoptant les attitudes d’un musicien de be-bop.

BOSS Patron, contremaître : « Little bee sucks the blossom The great bee makes the honey I do all the hard work And my boss is takin’ all the money » Cotton Picking Blues, Son Seals (ca 1973). 55. De premier choix, de première bourre : « I’m the Black Ace* I’m the boss card in your hand And Ell play it for you, mama If you please let me be your man » Black Ace, Black Ace (1937). • Boss OF THE BLUES. Surnom du blues* sbouter Joseph « Big Joe » Turner (1911- 1985). STRAW BOSS. Dans une plantation, ou sur un chantier, contremaître noir dont la fonction était de commander et de rythmer le chant des travailleurs. Syn. : caller ou leader. «When I first joined the band*, he [Dizzy Gillespie] was the musical director, he wasn’t the straw boss, he was the boss. » Interview d’Art Blakey, cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop.

BOSTON Selon Eubie Blake, l’expression viendrait de l’habitude des jazzmen de parler des basses comme venant de « là- bas dans le Nord » (way up North}. ► Style de piano avec une forte accentuation des figures de basse. ► Les figures de basse elles-mêmes.

BOTTLE UP AND GO Foutre le camp, se barrer (années 40) : « Now look here, woman Where you stay last night? None of your business, you ain’t doin’ me right Baby, what you got to do? Gotta bottle up and go Now them high-powered woman sho’ Gotta bottle up and go » Otis Webster (I960), chant recueilli par Harry Oster et cité dans Living Country Blues.

BOTTLENECK Goulot de bouteille. Cylindre de verre ou de métal (dans ce cas on parle plus volontiers de slide*} qui, enfilé à l’annulaire ou à l’auriculaire de la main gauche, permet, par glissement sur les cordes de la guitare, d’obtenir des effets, des glissandos particulièrement expressifs : « I got that bottleneck style from my uncle. He was an old man, the first person I ever saw play with that. He didn’t play with a bottleneck, though; you know this big bone you get out of a steak? Well, he had done let it dry and smoothed it off and it sounded just like that bottleneck. That’s the first somebody I saw play like that [...] I was a little bitty boy when I heard him do that. » Interview de Fred McDowell par Pete Welding, in Blues Unlimited n°24 (1965). Aujourd’hui, les adeptes du style jouent généralement avec un tube de métal ou slide. Est-ce à Hawaï, à la fin du siècle dernier, que cette technique est née (un certain Joseph Kekuku utilisait en guise de slide un peigne, un couteau ou une simple barre de métal)? Ou bien dérive-t-elle, comme Jeff Todd Titon en émet l’hypothèse, de la technique du diddley" bow ? La question reste posée. Toujours est-il que eue technique est signalée par W.G Handy dès le début du siècle à Tut- wiler, Mississippi, en plein Delta : « En jouant, il appuyait un couteau contre les cordes, à la manière des guitaristes hawaïens qui se servaient d’une tige d’acier. L’effet fut inoubliable. Sa chanson me saisit tout de suite : Goin’ to ubere the Southern* cross the Dog*. Trois fois de suite, le chanteur répéta ce vers, s’accompagnant à la guitare, jouant la musique la plus étrange que j’aie jamais entendue. » W.C. Handy, Father of The Blues. Deux grandes techniques sont couramment utilisées, la guitare étant généralement accordée en open-tuning" : a • usage d’un canif ou d’une barrette de métal, la guitare étant posée à plat sur un support (L.C. Robinson) ou sur les genoux du guitariste (Black Ace, Bukka White, Jim Jackson, Peg Leg Howell, Casey Bill Weldon, Kokomo Arnold). b) utilisation d’un slide passé à l’auriculaire (Homesick James, J.B. Hutto, Muddy Waters ou, à nouveau, Bukka White) ou plus rarement à l’annulaire comme Son House, la guitare étant tenue de façon classique.

BOTTOM ► Postérieur, cul. Take Your Black Bottom Outside, Sara Martin (1927). ► Bidonville, quartier mal famé : « Take me out of this bottom Before the high water rise You know I ain’t no Christian And I don’t want to be baptized » Justice Blues, Texas Alexander (1934). ► MY BOTTOM DOLLAR. Mon dernier sou : « Took me a long time To find out my mistake But I’ll betcha my bottom dollar I'm though fattening frogs for snakes" » Fattening Frogs for Snakes, Sonny Bov Williamson n°2 (ca 1955/58).

BOUNCE 56. Tempo alerte et bondissant particulièrement favorable à la danse. 57. Elément du titre de certains morceaux présentant cette caractéristique : Bouncin' on a V-Disc, Fats Waller (1943).

BOUNCER Videur : «Just before 1 left Old Slippers, the bouncer at the honky-tonk" where 1 played, came up to me and said, “Always keep a white man behind you that’ll put his hand on you and say, ‘That’s my nigger"'Years later I told that to Joe Glaser, my ofay" manager, and he said, “You’re nuts". » Interview de Louis Armstrong par Richard Meryman, in Louis Armstrong, a Self-Portrait.

BOWL Bol. Organes sexuels féminins : Need a Little Sugar in My Bowl, Bessie Smith (1931).

BOX ► A l’origine, piano; puis, par extension, tout instrument à cordes : « Old Barber Moore on the box Only barber I know where he can shave you And give you music while he’s doin’ it » Barbershop Rag, William Moore (1928). ► Vagin, chatte : « Baby, let me bang" your box Work" with Me Annie Let’s get it while the getting is good » Work with Me Annie, Hank Ballard (1954). ► Pièce, appartement. 58. Box BACK. Veston aux épaules carrées. « Oh 1 like my baby But don’t like her teddy bear" I’m gonna buy her a box-back Maybe it’ll work » Shake Shake Mama, Mance Lipscomb (1960). 59. Box BACK BOY. Proxénète, maquereau : « Other nights, he [Joe Smith] could be found down on the levee" at the Silver Moon Sallon, at Deadman’s Corner, where a man was killed at least once a week, and where the box back boy used knife blades to keep their whining guitars talking all night long. » Interview de Parker Berry7, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 60. Box CAR. ® Wagon plat. ® Aux dés : 12. Box Car Blues, Maggie Jones (1924). 61. JUKE-BOX. Voir ce terme. 62. GITBOX. Voir gitfiddle.

BOY Garçon. 1. Terme utilisé, depuis la période esclavagiste, par les Blancs pour s’adresser à un Noir; ce qui, en réaction, suscitera entre Noirs, l’utilisation de man", symbole d’une relation adulte, d’égal à égal. 2 . Façon amicale de s’interpeller entre Noirs ; apostrophe courante ponctuant les textes de blues : « That’s why I got to leave this country, boy Lord, and go to (?) town You know I got to leave this country, boy Lord knows I’ve got to put* it doivn » Cotton Picking Blues, Son Seals (ca 1973). ► Héroïne, du fait des sensations sexuelles qu’elle procure (1920-40) : Joy Boy, Roosevelt Sykes (1936). • Surnom de nombreux bluesmen dont Harold Holiday alias « Black Boy Shine » {?-ca 1948), Walter « Buddy Boy » Hawkins {ca 1887-?), « Sonny Boy » Williamson n°2 (1897-1965), Arthur «Big Boy» Crudup (1905- 1974), «Blind Boy» Fuller {ca 1908-1941), Floyd «Dipper Boy» Council (1911-1976), Arthur «Big Boy» Spires (1912), Sonny Boy Williamson n° 1 (1914-1948), David «Honeyboy» Edwards (1915), Robert Henry « Baby Boy » Warren (1919-1977), Riley « Blues Boy» King (1925), «Juke Boy» Bonner (1932-1978), « Georgia Boy » Luther Johnson (1934-1976), et William « Billy Boy » Arnold (1886-1954), du pianiste chanteur James « Sugar Boy » Crawford (1934) et du saxophoniste Frank « Big Boy » Goodie (1899-1964) : Call Me Juke Boy, Juke Boy Bonner {ca 1960). Billy Boy’s Blues, Billy Boy Arnold (1964). Big Boy Blues, Bill Coleman (1937). 63. BAD BOY. Voir bad. 64. Box BACK BOY. Voir box. 65. BOY IN THE BOAT. Litt. : le mec dans le bateau. Métaphore pour clitoris : Boy in The Boat, Charlie Johnson (1928). 66. MANNISH BOY. Voir man. 67. WINDING BOY. Voir wind. 68. WININ’ BOY. Voir ce terme.

BRADY Shérif, héros malheureux de la ballade Duncan and Brady : « Duncan* was tending the bar In walked Brady with a shining star And Brady said : Duncan* you’re under arrest And Duncan shot a hole in Brady’s breast » Duncan and Brady, Leadbelly, cité par Alan Inmax et Moses Asch dans The Leadbelly Songbook.

BRAZOS (Big Brazos) Du nom du fleuve qui coupe le Texas en deux du nord-ouest au sud-est. Ferme-pénitencier de Brazoria à Clemens où Texas Alexander semble avoir passé une partie de sa vie : « You ought come on this Brazos Well well well Nineteen and four You could find a dead man On every turn row » Go Down Old Hannah, Ernest Williams (1933).

BREAD Du yiddish broyt, argent. ► L’argent, la galette, les moyens de subsistance : « A pretty little woman Was chasin’ me around She took me to a pad* [•••] She took my clothes She took my bread Took my Cadillac keys... » You Can't Make Love Alone, Eddie Vinson (1971). ► Bedaine, estomac, brioche. ► Rapports sexuels, organes sexuels (voir cornbread). She’s Your Cook but She Bums My Bread Sometimes, Bo Carter (1930). 69. BREAD PAN. Sexe féminin : Bread Pan (Just My Size), Roosevelt Sykes (1937). 70. CRACKLING BREAD. Voir soul* food. 71. LONG BREAD (LONG GREEN). Beaucoup de fric, un joli paquet d’oseille (ant. : small bread) : Long Bread, Donald Byrd (1955). 72. SHORTENING BREAD. Métaphore pour organes sexuels : Shortenin’ Bread, Sonny Terry (1952).

BREAK Rupture, cassure. • Courte interruption de la phrase musicale avec arrêt de l’ensemble des instruments. • Courte phrase mélodique jouée par un soliste (ou dans le cas d’un break orchestral, par plusieurs instruments) pendant cette interruption. Désigne aussi bien la rupture de l’accompagnement elle-même que l’intervention de l’instrument soliste ainsi mise en valeur : « Now the riff* is what we call a foundation, like something that you walk on. It’s standard. But without breaks and without clean breaks and without beautiful ideas in breaks, you don’t even need to think about doing anything else, you haven’t got a jazz band and you can’t play jazz. » Jelly Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. L’enchaînement de plusieurs breaks constitue un stop chorus*.

BREAKDOWN ► Danse très populaire parmi les Noirs du Sud. Adaptation très libre des quadrilles et cotillons que dansaient les maîtres blancs, le breakdown semble être apparu, comme le sukey-jump, dès la fin du XIXe siècle : « People comes from miles around Get on Wabash* breakdown Doin’ that rag* That Wabash rag » Wabash Rag, Blind Blake (1927). ► Syn. de rent* party. 5. Elément du titre de morceaux généralement rapides : Central Avenue Breakdown, Lionel Hampton (1940). 73. Expliquer. 74. S’éclater, s’exciter spécialement à l’écoute de la musique : « I find six or seven women And a whole lot of fun Then we go out and break them down Honey ’til early mornin’ » Saturday Night Spender Blues, Blind Lemon Jefferson (1929).

BREAKFAST DANCE Dans un club, set* se prolongeant jusqu’au petit matin : « The vogue before the war was to have a breakfast dance on one day of the week. Every club in Chicago, at some time or an other, would have a breakfast dance, with the show going on at six thirty7 in the morning. » Interview de Billy Eckstine, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Ilentoff.

BRIDEWELL Prison de Chicago où le clarinettiste Mezz Mezzrow fut incarcéré six mois en 1919 pour port d’arme : « Now I got to leave Bridewell Fell down on my knee Crying kill me jailer Jailer please kill me » The Bridewell Blues, Nolan Welsh (1926).

BRIDGE Pont. Partie centrale d’un thème dans une chanson de 32 mesures (voire 16 ou 64), de structure AABA (syn. : channel). BRING IT DOWN S’éclater. Revenir aux sources (get down to the nitty gritty), jouer lowdown*, faire un tabac : « It makes me crazy When you blow* it up high And when you bring it down And swing it side to side. Because when you start to jazz* I get a feeling from the start » Oh Joe, Play That Trombone, Ethel Waters (1922). ► BRING SOMEONE DOWN. Flanquer le bourdon.

BROAD 75. Femme, et plus particulièrement jeune femme (sans connotation péjorative) : « I’ve got all the men cryin’ I’m a broad that never feels blue* I hear everybody sing that I’m tight* in everything I do All I want is a good man, to make him happy too » Mighty Woman Blues, Sippie Wallace (1925). 76. Putain : « Now if you want good lovin’ And want it cheap Just drop around about the middle of the week When the broad is broke* and can’t pay rent Get good lovin’, boys, for fifteen cents You can’t get it every night On Pennsylvania* Avenue » Down on Pennsylvania Avenue, Bertha Idaho (1929).

BROKE Dans la dèche, fauché : « Yes I make big money up North But the high cost of living keeps me broke Yes I’m going back to South Carolina To get me a little shack* in the country Surrounded by pines and oaks » No More Hard Times, Alec Seward & Louis Haves (ca 1950).

BROTHER • Frère de race (terme à connotations positives) : « You might risk me, brother But I will never risk you If you allow me a chance I’ll gnaw your backbone half in two » Back Gnawing Blues, Ramblin’ Thomas (1928). • Frère (dans la foi). ► BRE’R (BROTHER) RABBIT. Voir rabbit. ► BRUZ. De brother-, déformation introduite par Lester Young vers la fin des années 30 : Bmz, Kenny Clarke (1949). ► LITTLE BROTHER. Surnom du pianiste et chanteur de blues Eurreal Wilford « Little Brother » Montgomery (1906-1985) : « Me and Robert Dehlco was playing at the Royal Garden. Sometimes he’d be on the violin with me at the piano. They called him Big Brother and me Little Brother. » Interview de Little Brother Montgomery, cité "par Karl Gert Zur Heide dans Deep South Piano. 77. SOUL BROTHER. Voir ce terme.

BROWN Alius Shérif du comté de Jefferson, célèbre pour son cheval blanc qui, selon la légende, rattrapait les nègres fugitifs (voir Underground* Railroad) et les ramenait à leur maître : « Here comes Alius Brown, baby Ridin’ after me Here comes Alius Brown Ridin’ after me I’m goin’ back to Birmingham » Cité par W.C. Handy dans Father of The Blues.

BROWN (Brownie) • Pour brownskin man!woman : homme/femme de couleur café au lait : « Did you ever dream lucky Wake up cold in hand* That’s a mighty* true sign Your brown got some other man » Barbecue Blues, Barbecue Bob (1927). « It takes a lovin’ fair brownie To satisfy my soul » Rock and Gravel Blues, Peg Leg Howell (1928). • Brownie : pièce d’un cent. ► Surnom du bluesman Walter « Brownie » McGhee (1915) ; Brownie Blues, Brownie McGhee (1946). Et du trompettiste Clifford Brown (1930- 1956): Brownie Speaks, Lou Donaldson, (1953). 78. HIGH BROWN. Négro-Américain au teint brun clair : « Woke up this mornin’, sav about four High brown knockin’ on my backdoor* She was cryin' “Try me one more time” She said “Take me back, try’ me one more time” » Me One More Time, Marshall Owens (1932). 79. SEALSKIN BROWN, (D « Peau de phoque » brune. L’une des nombreuses nuances de carnation distinguées par les Négro-Américains : « It seems to me As if Tm all broke* down Since I lost all my change I lost my sealskin brown » The Clearing House Blues, Clara Smith (1924). ® Homosexuel : « Went gay* cutting With another sealskin brown Rambled* ’til the butcher cut him down » Undertaker's Blues, Maggie Jones (1925).

BROWN Piney Propriétaire noir du Sunset* Club, dans la 12e rue à Kansas City, Missouri, où débuta Big Joe Turner comme barman et chanteur; Piney Brown est décédé en 1940 : « Yes I dreamed last night I was standin’ on the corner of 12tb* Street and Vine* I shook hands with Piney Brown And I could hardly keep from crying » Piney Brown Blues, Big Joe Turner (1940).

BROWN SUGAR Sucre brun. ► Jeune beauté, jolie poupée : Soul Sister, Brown Sugar, Sam & Dave (1968). ► Drogue. ►

BRUSHES Balais utilisés par les batteurs, en général dans les morceaux lents, pour obtenir une sonorité douce et moelleuse. BRUTE (The) Surnom du pianiste James P. Johnson (1894-1955) : « Jimmie James P. Johnson gave me the title “The Lion*" because of my spunk and enterprise. “The Lion” named him “The Brute”. Later we gave Fats Waller the name “Filthy*". » Interview de Willie « The Lion » Smith, in Hear Me Talkin' to Ya de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

BRUZ Voir brother.

BUBBER Surnom du trompettiste James « Bubber » Miley (1903-1932). « The Western style was more open... open horns* and running chords and running changes*. With Ellington, it was the new men like myself and Johnny Hodges, and Bigard against guys like Bubber Miley and Tricky* Sam Nanton. They were playing ivah-wab* music with plungers and things. » 80. interview de Louis Metcalf, in Hear Me Talkin ’ to Ya, □e Vu Shapiro et Nat Hentoff.

BUCK 1. Dollar: • The guy* wanted us to chop cotton, ■©cause he was just playin’ Friday, Satur- day and Sunday, somehow we were mikin' about 4 or 5 bucks a night, you know. » ïaervjew de Big Moose Walker par Sebastian Dan- ( 1978), in Earl Hooker, vie et mort d'un héros A ghetto 2 Jeune Noir : u Long Buck, Skip James (1964). • Surnom du trompettiste Wilbur ■ 3uck » Clayton (1911) : « Herschel Evans amena avec lui Buck □ayton. Ils étaient revenus de Los Angeles à peu près au même moment. Et jjand Herschel a su que nous avions ~voin d’un autre trompettiste parce que Zjçts* Page nous avait quittés pour Joe SÙser, il nous a dit qu’il en connaissait □n qui jouait comme un fou, et il nous a amené Buck Clayton. » IMurray et Count Basie, Good Morning Blues. ► ; BUCKS. Un gros paquet, une grosse anne d’argent. e ► > CK AND WING. Danse du XIX siècle, p calarisée par les minstrel shows-, sa finie lascive est connue sous le nom de . têV roll : 81. Sow it ain’t no charleston*, Ain't no buck and wing All you got to do ... E> to shake* that thing » ■iafee That Thing, Papa Charlie Jackson (1925).

BUCKET Seau. Métaphore pour organes sexuels fémi- 82. Don’t slip* me in the dozen cause I can’t stand it 1rs my cup 1rs my bucket k s my little red wagon* » Aarrt Slip Me in The Dozen, Chris Smith (1924). ► > CKET OF BLOOD. Litt. : seau de sang. B 'trot, club mal famé : « Pickett faisait de la musique de bas- mngue, ce que certains appellent des bonky-tonks*. Vous savez ces conneries qu’on jouait dans les clubs noirs qu’on surnommait bucket of blood. Bucket of '~lood [...] faisait référence aux bagarres qui avaient toute chance d’éclater dans ces lieux. » vîtes Davis et Quincy’ Troupe, Miles, ► KICK THE BUCKET. Voir kick.

BUCKING CONTEST De buck, désarçonner. Terme néo-orléa- nais pour cutting contest* : « Parfois nous assistions à ce qu’on appelait, à cette époque, des bucking contests. Cela se passait bien avant que l’on parlât de cutting contests. Les premiers étaient vraiment des “batailles de fanfares”. » Sidney Bechet, La musique, c'est ma vie.

BUCKRA Afr. Du efik mbakara, homme blanc (1736). Mot renforcé par le geecbee* boo- ker. Surnom péjoratif donné autrefois à l’homme blanc, et particulièrement s'il était le maître ou le patron : « As far as our héritage goes, a few words creeped in like “buckra”. I used to hear my mother say, “That oie poor buckra” — buckra meant white. » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop.

BUCKTOWN Petit bourg sur le lac Pontchartrain aujourd’hui englobé dans La Nouvelle- Orléans : Bucktown Blues, Jelly Roll Morton (1924).

BUD Surnom du saxophoniste Lawrence « Bud » Freeman (1906) et du pianiste Earl « Bud » Powell (1924-1966) : «J’avais toujours été intrigué par son surnom Bud en raison des différentes versions qu’on donnait de son origine. [...] Lorsqu’ils étaient enfants, Bud et Rit- chie, son cadet de 8 ans, jouaient dans les rues de leur quartier, autour de l’avenue Saint-Nicholas et de la 149e rue de Harlem*. Ils croisaient souvent un mendiant, toujours le même qui, à chaque fois, les sollicitait. Un jour qu’ils faisaient les courses pour le repas, le mendiant se fit plus pressant. Ils s’arrêtèrent alors pour évaluer la monnaie qui leur restait et tandis que Bud hésitait, Ritchie plaida en faveur du clochard, en balbutiant tant bien que mal. Il avait perdu quelques dents de lait sur le devant et son élocution était devenue laborieuse. Il appelait son frère bros, ce qui, dans sa bouche, donnait quelque chose comme buth et le mendiant comprit Bud. S’il te plaît, Bud, donne-moi quelque chose, s’il te plaît... La scène se reproduisit tous les jours et chaque fois, le clochard l’appela Bud. Ritchie adopta ce surnom, bientôt suivi par tout son entourage. » Francis Paudras, Zz/ Danse des infidèles.

BUDD Surnom du saxophoniste Albert « Budd » Johnson (1910-1984) : Budd’s Idea, International Jazz Group (1956).

BUDDY (Buddie) Copain, pote : « Some got six months Some got one solid* year indeedy But me and my buddy Both got lifetime here » Bad Luck's My Buddy, Noah Lewis (1930). « Be glad When my buddy’s dead and gone Lord, my buddy got something Now, Lord, I like to own » You Scolded Me and Drove Me From Your Door, Mississippi Bracey (1930). • Surnom des cornettistes Charles Joseph «Buddy» Bolden (ca 1870-1931) et Joseph Crawford «Buddy» Petit (1897- 1931): « I thought 1 heard Buddy Bolden says Dirty*, nasty* stinky butt*, take it away And let Mister Bolden play » Cité par Alan Lomax in Mister Jelly Roll. Et des saxophonistes George Holmes « Buddy » Tate (1913) et William Marcell «Buddy» Colette (1921), du pianiste et chef d’orchestre Woodrow Wilson « Buddy » Johnson (1915-1977) et des guitaristes de blues Walter « Buddy Boy » Hawkins (ca 1887-?), Eugene « Buddy » Moss (1906-1984) et George «Buddy» Guy (1936) : Buddy's Blues, Buddy Guy (1980). « When your black woman says “Bring it home, partner, railroad is all you know” When a woman says “Bring it home, Buddy Boy, railroad is all you know” Just get out on the (hard track?) And work your hand to the core » Work-in' on The Railroad, Buddv Boy Hawkins (1927). • LEROY’S BUDDY. Pseudonyme du chanteur et guitariste Bill Gaither (1905) en mémoire du pianiste et chanteur Leroy Carr : Leroy Carr's Blues (Dedicated to the Memory of Leroy Carr), Bill Gaither (1935). BUFFALO NICKEL Pièce de cinq cents (appelée ainsi à cause du bison qui y figura jusqu’en 1938) : The Buffalo Nickel, Erskine Hawkins (1949).

BUGS Surnom du trompettiste John « Bugs » Hamilton (1911-1947) : «And as the pace became more torrid and the joint* really began to rock*, Fats* [Waller] would scream to Bugs Hamilton, “Ah, send* me, send me... send me... Yeah!” » Interview de W.T. Ed Kirkebv in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

BUILT UP FROM THE GROUND Se dit d’une femme bien roulée, avec de belles jambes : « She’s long and tall She’s built up from the ground » Miss Lillie Brown, Lowell Fulson (1950).

BUKKA Surnom du bluesman Booker Washington « Bukka » White (1909-1977) : Bukka's Jitterbug Swing, Bukka White (1940).

BULL CITY Bull City est le surnom donné à la ville de Durham (Caroline du Nord) à cause de l’emblème (un taureau : bull) d’une de ses plus fameuses manufactures de tabac. • BULL CITY RED. Pseudonyme du joueur de washboard George Washington.

BULL FIDDLE ► Sorte de contrebasse fabriquée avec un baquet et un manche à balai que le joueur incline plus ou moins de façon à modifier la tension de la corde. Syn. : garbage can, steamline ou ivasbtub bass. ► Contrebasse : Bull Fiddle Blues, Johnny Dodds (1928).

BULL HEADED Bouché, con ou têtu, tête de lard : Bull Headed Woman Blues, Kokomo Arnold (1936).

BULL MOOSE Surnom du chanteur Benjamin Clarence « Bull Moose » Jackson (1919-1989) : « My name is Bull Moose Jackson And I really got the blues I ain’t got no money And I ain’t no gal* to lose » Bull Moose Jackson Blues, Bull Moose Jackson (1945).

BULLDOG Bouledogue. Pistolet, revolver ou première édition d’un journal : • i m gonna buy me a bulldog Watch my old* lady whilst I sleep 'cause women these days is so doggone* crooked 'til they might make a ’fore day creep* » Outside Woman Blues, Blind Joe Reynolds (1930).

BULLDYKE(R) (Bulldagger) Lesbienne, gouine, spécialement si elle a Je rôle dominant : < And there’s two things in Harlem I don’t understand It is a bulldykin’ woman And a faggotty* man » Home to Harlem, Claude McKay Harper (1928). ► B.D. WOMAN. Abréviation de Bull Dyker woman : « Cornin’ a time, B.D. women They ain’t gonna do me no good The way they treat us Is a low-down* and dirty too » BD Woman’s Blues, Bessie Jackson (Lucille Bogan, 1935). ► DIKE OU DYKE OU, phonétiquement, DIGAH. Syn. de bulldyke : Digab’s Stomp, Fats Waller (19??). ► O.D.B. Pour Old Bull Dyker, vieille gouine : O.D.B. Blues, Walter Roland (1935).

BULLSHIT 83. Déconner: «As Dizzy instructed, 1 arranged some things and brought them with me, Stella by Starlight and Anita’s Dance. [... ] When we got into the initial rehearsals, and they started playing my arrangements, well, that erased all the little bullshit, you see. They say, “Mama’s all right”. Then I was “Mama”, I wasn’t bitch* no more. » Interview de Melba Liston, in To Be or Not To Bop, de Dizzy Gillespie et Al Fraser. 2 Raconter des craques, mener en bateau.

BUM • Depuis le xvme siècle : cul, derrière (voir aussi beedle-um-bum). • Depuis les années 20 : femme facile, prostituée. • Mendiant, clodo (ca 1880) : « When my mother died My dad give po’ me away Lord, I’m just a bum That’s why I got no place to stay » I'm Just a Bum, Big Bill Broonzy (1935). ► ON THE BUM. Etat de celui qui a tout perdu (argent, femme...), fauché, raide, sans un radis ; sur la route, en cavale : « I’m on the bum Can’t get back home Can’t sleep for dreamin' Fm all alone » My Big Moments, Bumble Bee Slim (1936).

BUMBLE BEE Bourdon. Au sens figuré, le ou la partenaire de jeux amoureux : « Hey, I’m an old bumble bee A stinger* just long as my arm I sting the good lookin’ women Everywhere 1 goes along They cryin’ : “Come here, bumble bee, you know your stuff* And your stinger, old bumble bee Your stinger just long enough” » I’m an Old Bumble Bee, Bo Carter (1930). • BUMBLE BEE SLIM. Pseudonyme du bluesman Amos Easton (1905-1968) : « Bumble Bee Slim has told you About the death of his closest friend But Fm going to tell you From the beginning to the end » The Death of Leroy ’ Carr (Dedicated to the Memory » of Leroy Carr), Bumble Bee Slim (1935).

BUMP Choc, heurt. Danse au cours de laquelle les danseurs se donnent des coups de hanches ou de postérieur : « — That’s what you’s talkin’ about? ► Let’s get up and bump here, ain’t it (super)? ► You know what I like to see you do? ► What’s that Minnie? ► That old Snake Hip, look like your bones breakin’ in two. » New Orleans Stop Time, Bumble Bee Slim et Memphis Minnie (1936).

BUN Petit pain au lait. Métaphore pour organes sexuels féminins : « Come on baby Let’s have some fun* Just put your hot* dog in my bun And I’ll have that thing* That ting-a-ling* Just press my button* Give my bell a ring » ,/zzs7 Press My Button, Lil Johnson (1936).

BUNK Surnom du trompettiste William Geary « Bunk » Johnson (1879-1949) : « Now Bunk [Johnson], he’s another man they ought to talk about. What a man! Just to hear him talk sends* me. » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin ’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

BUNNY HUG Litt. : étreinte du lapin. Danse en vogue dans les années 20 et plus connue sous le nom de fox* trot : « Usually, they’d dance the Bunny Hug to a slow blues like London Blues or some other time in a like slow blues tempo, and how the dancers would grind* away. » Interview de George Wetting, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff

BURN Brûler. ► Par analogie avec cook -, être survolté, jouer avec intensité. ► Voler, piquer. ► Bum somebody : filer la chtouille à quelqu’un. ► BURNT-CORK. Surnom donné aux chanteurs (blancs ou... noirs) des minstrel shows qui se noircissaient le visage avec du bouchon brûlé : « Le docteur Stockey, de Clarksdale, Mississippi, c’est avec lui que j’ai tourné pour la première fois. Le show était bon [...] Et tout ce bouchon noirci sur notre visage... ça nous rendait encore plus noirs... merde... avec nos bouches peintes en blanc... pour les faire paraître plus grosses encore... moi, fallait que j’ m’enfile une bonne dose de gnôle avant le spectacle; sans cela je serais jamais parvenu à faire le bouffon devant tous ces gens... » Interview de Gus Cannon, cité par Bengt Oison dans Memphis Blues.

BURNER Flambeur ou crack, un as dans sa spécialité : The Mighty Burner, Charles Earland (ca 1969).

BUSINESS (Take care of) Se produire en public avec professionnalisme, connaître son boulot, son affaire; souvent abrégé en T.C.B. (1950- 70) : « When it’s time to T.C.B. Niggers are somewhere fucking Try and be nice to them They /zzcZ?* over you Niggers don’t realize while they’re doing all this fucking They’re getting fucked around » Niggers Are Scared of Revolution, The Last Poets (1970).

BUSTED ► Fauché, raide : « Had a girl one time, wouldn’t work or steal Broad* came right out’a Mississippi cotton field She wouldn’t steal, on the verge of a doubt But she get you busted, wouldn’t get you out » Jailhouse Blues, Sonny Terry (1959). ► Arrêté, incarcéré : « I was with her [Billie Holiday] until the time she got busted and sent away to Lexington, and man, I’ll always remember the concert at Carnegie when she got out. It was one of the greatest thrills of my life. » Interview de Bobby Tucker, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff ► Blessé ou tué, descendu. BUSTER Surnom du clarinettiste William « Buster » Bailey (1902-1967) et du guitariste de blues « Buster » Benton (1932).

BUTCH Surnom du violoniste et guitariste James « Butch » Cage (1894-1974).

BUTT Barique; cible. Cul (depuis le xvne siècle) : « In 25’s, they had a ham hanging from the chandelier about six feet up. Any woman could kick that ham, she could take it home. I’ve seen many a one crack their butts trying, but they didn’t mind and we sure didn’t mind seeing their legs. Very often they got the ham, because they used to have a high-kicking bunch around this old town. » Interview de Louis de Lisle Nelson, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

BUTTERBEANS « Haricot blanc », surnom de Joe Edwards (1896-1963) qui enregistra en duo avec sa femme Susie dans les années 20 sous le nom de « Butterbeans and Susie ».

BUTTON Bouton. Clitoris : «Just press my button Give my bell a ring » Just Press My Button, Lil Johnson (1936).

BUZZ I Téléphoner, donner un coup de fil : < Buzz me, buzz me, buzz me baby I be waiting for your call » Buzz Me, Louis Jordan (1945). 2. Embrasser, titiller, avoir du plaisir, faire . amour (dans le cadre des métaphores w. king bee ou bumble bee) : «■ Vieil I’m a king bee I can buzz all night long Well I can buzz better, baby When your man is gone » Ai a King Bee, Slim Harpo (1957). 5. Roulement de batterie.

BUZZARD LOPE • Course du vautour », danse du début du sdde.* « Went downtown* and bought me a rope Whupped my baby ’til she buzzard lope Sugar babe It’s all over now » Sugar Babe It's All Over Now, Mance Lipscomb (1968). Cette danse fut observée par Lydia Parrish (in Slave Songs of The Georgia Sea Islands) dans les îles au large de la Géorgie; le danseur, au centre d’un cercle formé par le groupe qui l’accompagne en frappant des pieds et des mains, imite le vautour mis en présence d’une charogne.

BUZZY (Buzzed) Hébété, sonné. Par extension, ivre : Buzzy, Charlie Parker (1947). C

C&A (Chicago & Alton Railroad) Compagnie qui faisait la liaison entre Kan- ns Gty, Saint Louis et Chicago; elle fut ~ - rbée par la Gulf, Mobile and Ohio I SLM & O.) vers la fin des années 40 : j -Well well, let me tell you people What the C and A will do for you Well now, it’ll take your little woman I» r. well, well, and blow back smoke at you » Train Blues, Peetie Wheatstraw (1934).

C&0 (Chesapeake & Ohio) ligne de chemin de fer reliant Cincinnati à Richmond (Virginie) et sur ÜG .elle périt John Henry, lors d’un ébou- cment dans le Big Bend Tunnel : • Fourteen long years ► & O. run by my door . fair broivn* told me this morning She didn’t want me no more » C S O. Blues, Blind Joe Amos (1927).

C&P (Central Pacific Railroad) L une des deux compagnies (avec l’Union fecâc) qui effectuèrent la première liai- «3' a-, ec la côte ouest en reliant Chicago à SIT Francisco dès 1869 ; FF Railroad Blues, Charley Taylor I (1931).

CC Nom d un médicament : « But Mister Gasman, This cold wind surely will give me i chill u better go to the doctor I jet you a C.C. pill » daw Blues, Mae Glover (1929).

C.C& 0. (Carolina, Clinchfield & Ohio lailroad) Sa ligne principale court d’Elkhorn City I e-nzuckv) à Spartambourg (Caroline du sud ) :C.C. & O. Blues, Pink Anderson et Sim- mie Dooley (1923).

C.C. RIDER Voir rider.

C.C.C ► Pour Civilian Conservation Corps. Créée lors du New Deal le 31 mars 1933, l’agence avait pour finalité de fournir du travail d’intérêt général (dans les parcs nationaux, les forêts...) aux jeunes célibataires entre 17 et 28 ans ; ils étaient vêtus d’uniformes militaires et vivaient dans des camps de toile. En 1935, la C.C.C. occupait 500 000 jeunes, répartis en 2 600 camps. Elle fut dissoute en 1943 : « Me and Big Bill* [Broonzy] needed some whiskey money and that man give me $700 — ooh, I never seen that kind of money — he give me $700 when I finished playing. Man, I was happy as a sister in a C.C.C. camp. » Interview de Sunnyland Slim, cité par Sam Charters dans The Legacy of The Blues. ► Pour Cleveland, Cincinnati, Chicago & Saint Louis Railroad, autrement connue sous le nom de Big Four : C.C. & Saint Louis Blues, Jimmie Gordon (1937). C.O.D. (Collect On Delivery) Envoi contre remboursement : « Those little things you prayed for, Whatever they may be I’d have enough to pay for them all C.O.D. » If I Had a Million Dollars, Speckled Red (1960).

C.V. Pour Champagne Velvet : C.V. Wine Blues, Howlin’ Wolf (1951-52).

C.W.A. (Civil Works Administration) Agence créée lors du New Deal : « I hollered “Hey woman Lawd, God, is you goin’ my way?” “cause I got a job Workin’ for the C.W.A.” » C.W.A Blues, Walter Roland (1934).

CABBAGE Chou. ► Fric, oseille : Cabbage Green, Champion Jack Dupree (1962). ► Tête, cigare, boule. ► Plaisirs de l’amour charnel; parties sexuelles : « Anybody here want to try my cabbage Just step this way Anybody here like to buy good cabbage Just holler “Hey” » Anybody Here Want to Try My Cabbage, Maggie Jones (1924).

CABOOSE 84. Pour calaboose, prison: Kansas City Caboose, Sonny Greer (1944). 85. Wagon de service.

CADILLAC SLIM Surnom du saxophoniste Ben Webster (1909-1973) lorsqu’il jouait dans les orchestres de Duke Ellington et de Benny Carter.

CAIN (Raise) Voir raise Cain.

CAJUN Déformation d’« acadien » ou « cadien », qui, américanisé et transcrit phonétiquement, a donné cajun (milieu du XIXe siècle). Le terme Acadie ou Arcadie désignait à l’origine la région de la baie de Chesapeake ainsi baptisée par l’explorateur Ver- razano. En 1603, Champlain, confondant celle-ci avec la péninsule de Nouvelle- Ecosse, rebaptisait cette dernière. Descendants de Français immigrés au xvne siècle en Nouvelle-Ecosse (ou Acadie), les Acadiens furent mis en demeure de prêter serment au roi d’Angleterre lors de la cession de la province par la France (traité d’Utrecht, 1713) ; expulsés en 1755 (« Grand Dérangement »), certains d’entre eux s’installèrent en Louisiane où leurs descendants ont conservé leur folklore et leur langue, soit un français du xvne siècle, mâtiné d’américanismes : « Quand moi je suis après danser J’ai juste envie de faire l’amour [faire la cour] » Les Blues De Cajun, Dewey Balfa (1969). L’Acadiana est aujourd’hui un triangle délimité à l’ouest par le Texas, au nord par la paroisse des Avoyelles et à l’est par le delta du Mississippi, et peuplé par 1,5 million d’habitants dont plus du tiers parlent français. Le premier Noir à enregistrer dans le style cajun fut l’accordéoniste Amadie Ardouin ; il peut être considéré, de par les influences bluesy qu’il introduisit, comme le précurseur de la musique zydeco.

CAKE Gâteau. ► Cake, pound cake, sponge cake, femme séduisante : Sponge Cake and Spinach, Barney Bigard (1937). Cake, Flip Phillips & Howard McGhee (1949). ► Les charmes d’une femme : « Girl in the bakershop She hollered “Papa don’t look so sad Come and try some of my cake And you won’t feel so bad” » Bakersbop Blues, Blind Lemon Jefferson (1929). ► Argent, oseille. ► CUT THE CAKE. Dépuceler, déflorer.

CAKE WALK (chalk-line walk) Danse en vogue dans la dernière décade du XIXe siècle mais dont l’origine remonte probablement avant la guerre de Sécession : « A l’origine, il s’agissait d’un concours de danse, dans une plantation, où les couples d’esclaves se disputaient un prix, généralement un gâteau (cake), offert à celui qui lèverait le plus haut la jambe. » Eileen Southern, Histoire de la musique noire américaine. Les Noirs s’y amusaient à singer les Blancs avec force courbettes, grands coups de chapeau, déploiement de parures, pas emphatiques... « Du point de vue de la plupart des Blancs, la pratique du cake walk consistait en une tentative de la part des Noirs, frustes et ignorants, d’émulation par rapport à leurs supérieurs. Mais il est hors de doute que l’homme de couleur considérait le cake walk comme une parodie subtile des attitudes des Blancs de la haute société qui veulent se donner des airs. » James Lincoln Collier, L'Aventure du jazz. « Let me see you do the rag-time* dance Turn left and do the cake walk prance Turn the other way, and do the slow-drag* » The Rag-Time Dance, Scott Joplin (1903).

CALABOOSE De Calaboso, prison de La Nouvelle- Orléans construite par les Espagnols à la fin du xvne siècle. Prison, taule : « Oh Mister Johnson* Turn me loose Don’t take me to the calaboose Oh Mister Johnson I’ll be good » Chanson traditionnelle en vogue au début du siècle. Par extension, panier à salade : « We all felt funny when we saw Buddy* Bolden riding the calaboose, because he was our favorite in the garden district. » Jelly Roll Morton cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

CALINDA Danse importée de Saint-Domingue à La Nouvelle-Orléans; elle était dansée, avec la counjaille, par les esclaves, tous les dimanches sur la place Congo*.

CALL (somebody) OCT OF HIS NAME Voir name.

CALLER Ouvrier payé pour mener le chant de ses compagnons pendant les travaux des champs. Syn. : straw boss*, leader.

CAMP MEETING Service religieux ininterrompu pouvant regrouper plusieurs centaines ou milliers de fidèles, durant plusieurs jours dans des camps de toile installés généralement dans des bois; ils furent très nombreux entre 1800 et 1830, durant le mouvement dit Second Awakening : Camp Meeting Blues, King Oliver (1923). Shake Your Can, Johnny Dodds ( 1938). ► COON CAN. Voir coon. ► GARBAGE CAN. Voir garbage. ► SOUTHERN CAN. Hanches : « You might read from Revelation Back to Geneses You get crooked Your southern can belong to me [.••] Soon* as I get out Kiss the ground Your southern can Worth two dollars half a pound » Southern Can Is Mine, Blind Willie McTell (1931).

CANAAN Nom biblique de la terre promise aux Hébreux par Dieu. Par analogie, les Etats du Nord, anti-escla- vagistes, ou le Canada, objectif de nombreux esclaves fugitifs après 1850 : « We’ll land on Canaan’s shore We’ll rest forever more » Spiritual cité par Sim Copans in Chansons de revendication.

CANAL STREET L’une des plus célèbres rues de La Nouvelle-Orléans ; au début du siècle, elle marquait la limite entre les quartiers habités par les Créoles et ceux habités par les couches populaires noires : « They tell me Canal Street, Canal Street Is the longest street down in New Orleans » Canal Street Blues, John Lee Hooker (I960).

CANARY Chanteuse dans un orchestre de jazz.

CANDY Bonbon, sucrerie. Plaisir sexuel (syn. : sugar) : « My mama told me Papa told me too “Some day, son Candy’s going to be the death of you” Now it’s chocolate candy Til my dying day The same old candy Is going to carry me away » Candy Blues, Lem Johnson (1942). ► CANDY MAN. ® Amoureux, amant, petit ami : « Candy man, salty* dog Candy man, fattin’ hog Candy man, If you can’t be my candy man

CAN Boîte en fer. ► Prison, violon : « I’d rather be sloppy* drunk Sitting in the can Than to be out in the street Runnin’ from the man* » Sloppy Drunk Blues, Leroy Carr (1930). ► Fesses, cul : You can’t be my man at all » Candy Man, Rev Gary Davis (1969). ® Revendeur de drogue.

► CANDY STICK. AU sens figuré, verge, biroute (emploi peu fréquent) : « All heard what sister* Johnson said She always takes a candy stick to bed It's the candy man Don’t stand close to the candy* man He’ll leave a big candy stick in your hand It’s the candy man » Candy Man Blues, Mississippi John Hurt (1928).

CANNED HEAT Litt. : chaleur en boîte. Combustible utilisé dans les réchauds de cuisine et qui, sommairement distillé, servit de boisson de substitution pendant la prohibition (voir dry) : «We drink everythin’, anti-freeze, you know, gas, shoe polish, canned heat, we drink it all. And I never lost appetite, see... » Interview de Big Mcx)se Walker par Sebastian Dan- chin (1978), in Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto. Par extension, bibine, tord-boyaux, particulièrement dangereux (voir jake-legg). « Canned heat is just like morphine It crawls all through your bones And if you keep on using canned heat, mama You soon get to the place you just can’t leave alone » Better Leave That Stuff Alone, Will Shade (1928).

CANNONBALL Célèbre express de l’lllinois Central (voir /.C): «Woke up this morning Found something wrong My baby had caught that train and gone Now won’t you strach my jumper Iron my overalls I’m going to ride that train They call the Cannonball » That Lonesome Train Took My Bab)’ Away, Charlie McCoy (1930). • Surnom du saxophoniste Julian « Cannonball » Adderley (1928-1975) : « Son surnom venait, raconta-t-on, d’un concours “à qui mangerait le plus”, entre lui et un autre musicien. Cannonball gagna sans difficulté. Un batteur qui assistait à la confrontation s’empressa de l’appeler “cannibale”; le malheureux étant affligé d’un défaut de prononciation, tout le monde entendit "cannonball" et le surnom resta. » François et Yves Billard, Histoires du saxophone.

CAP ON Affirmer sa supériorité, gagner une joute orale (voir dirty dozens). ► CAPPING. ® Conduite verbale manipulatrice consistant à se « foutre de la gueule » de quelqu’un sans que celui-ci s’en aperçoive (voir dirty dozens) ; une backcap est une répartie cinglante laissant l’adversaire sans voix. ® Syn. de dirty dozens utilisé sur la côte ouest. ► RED CAP. Voir red.

CAPTAIN Capitaine. 86. Contremaître, chef d'équipe : « You know I told the captain That my mother was dead Oh, I told the bossman early this morning, Lord, That my poor mother was dead, He said "Negro*, if you don’t go to work You soon will be dead too” » Couldn't Find a Mule, Sunnyland Slim (1973). Ou gardien de prison, maton : « Down South, when you do anything wrong They’ll sure put you down on the county* farm Put you under a man called captain Jack He’ll sure write his name Up and down your back » County Farm Blues, Son House (1942). 87. Depuis la période esclavagiste, l’un des termes qui étaient exigés des Noirs lorsqu’ils s’adressaient à un Blanc : « Take this hammer An’ carr’ it to the captain Tell him I’m gone » Spike Driver Blues, Mississippi John Hurt (1928). 88. Par extension, terme péjoratif pour Blanc.

CARELESS LOVE Peut-être de Kelly's Love (les deux expressions sonnant de façon semblable dans le parler noir). Kelly's Love, chant cité par Odum & Johnson in The Negro and His Songs, 1906. Rapports sexuels ou maladie vénérienne, chtouille : « You worried my mother until she died You caused my father to lose his mind Now damn you, I’m going to shoot you And shoot you four or five times And stand over you until you finish dying » Careless Love, Lonnie Johnson (1928).

CARVE Sculpter, tailler. Tailler en pièces un concurrent lors d’une joute musicale : Carvin' The Bird, Charlie Parker (1947). ► CARVING CONTEST. Joute musicale, entre orchestres rivaux à La Nouvelle-Orléans voir cutting contest*). ►

GAT Chat, renforcé par l’afr. (wolof) hipicat, personne instruite. 1 Musicien / ami de musicien : All The Cats Join' In, Roy Eldridge (1946). 89. Type, mec : « Eddie [Lang] was a fine man. He never argued. [...] Then if everything was okay, we'd sit down and get to jiving*. I’ve never seen a cat like him since. He would play guitar better than anyone I know. » Interview de Lonnie Johnson, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Ilentoff. 90. Nana. 91. Etre à la recherche d’une femme, draguer: Cattin' at Keynote, Coleman Hawkins ( 1944). • Surnom du trompettiste William « Cat » Anderson (1916-1981). ► BLACK CAT BONE. Voir black cat. • CAT EYE. Surnom donné au trompettiste Buck Clayton (1911) par Lester Young. ► CAT MAN. Homme à la recherche d’une aventure : « Cat man Stay away from my house at night Prowling* around my backdoor* when I’m gone You know that ain’t right » Cat Man Blues, Blind Lemon Jefferson (1929). ► CAT WITH SHARP CLAWS. Litt. : matou aux griffes acérées. Un sérieux client, une pointure», un concurrent .qui fait le poids (musicalement parlant), dans l’argot du Kansas City des années 30. ► CAT’S TAIL. Nom d’une danse en vogue au début du siècle. ► CATTING WALK. Voir walk that walk. ► CAT-WHISKEY. Tord-boyaux: * And drinking what they call “cat-whis key” you know, some call it “corn”, but it’s cat-whiskey. » Interview de Big Joe Williams (1976) cité par Giles Oakley dans The Devil's Music. • LONE CAT. Surnom du bluesman Jesse Fuller (1896-1976). ► SPADE CAT. Litt : mec de pique ; Noir (dans la bouche d’un autre Noir). ► TOM CAT. Tom le Chat : « What makes the men go crazy When a woman dress so tight Must be the same ol’ thing That makes a Tom Cat fight all night » Same Thing, Muddy Waters (1964). ® Quelqu’un : « Now funniest thing I ever seen Tom Cat jumpin’ on a sewing machine Sewin’ machine run so fast Took 99 stitches in his yas yas yas* » /Vezc Dirty Dozen, Memphis Minnie (1930). ® Dragueur, homme à la recherche d’une femme : « It was late last night I tried so hard to sleep When a mean old tom cat Started his midnight creep* » Tom Cat Blues, Freddie Spruell (1928).

CATFISH 92. Poisson chat; frit, il constitue l'un des plats appréciés de la cuisine noire (voir soul* food) : « I walk through the city, people On my bare feet I had a fill of catfish and cbittlins* up and down Beale* street I’m singin’ the blues Mmm, yes have to sing the blues » Why I Sing The Blues, B.B. King (1972). 93. Souvent employé comme symbole sexuel : « Well I wish I was a catfish Swimmin’ in the deep blue sea I would have all you good lookin’ women Fishin’, fishin’ after me » Rollin' Stone, Muddy Waters (1950).

CENTRAL • Pour Illinois Central (voir I.C.) : « Well she shake it like the Central She wobbles like the L & N* Well she’s a hot-shot* mama And I’m scared to tell her where I been » Scare}’ Day Blues, Blind Willie McTell (1931). • Central téléphonique ou opératrice : Give Me Central 209, Lightnin’ Hopkins {ca 1950).

CHAIN GANG Voir gang.

CHAINEY (Chaney) Voir Starin’* Chain : « Lord People said to Kassie “You’re runnin’ over time”, You’ll have another loser with the 1.0.9. Mr Kassie* said, “Ain’t in mind If I run any closer, I’ll make my time” Said “All the passengers better keep themselves hid I’m nat’al [natural*] gon’ shake it like Chainey did Like Chainey did I’m nat’al gon’ shake it like Chainey did”. » Kassie Jones, Furry Lewis (1928).

CHAIR Chaise; pour electric chair, chaise électrique : « I’m going to the Big House* And 1 don’t even care — Don’t you hear me talkin’ to ya Scoldn’t my death — I’m going in the morning And I don’t even care* I might get four or five years Lord, and I might get the chair » Lonesome Day Blues, Jesse James (1936).

CHAMPION Surnom du pianiste et chanteur Jack Dupree (1910-1992) en raison de ses débuts comme boxeur : Champion Jack Guitar Blues, Champion Jack Dupree (1961).

CHANGE Suite d’accords introduisant un changement de tonalité. ► RUN THE CHANGES. Enchaîner les changements d’accords, jouer sans invention, mécaniquement : «The Western style was more open... open horns* and running chords and running changes. With Ellington, it was the new men like myself and Johnny Hodges, and Bigard against guys like Bubber* Miley and Tricky Sam* Nanton. They were playing wab-ivah* music with plungers and things. » Interview de Louis Metcalf in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

CHANNEL Syn. de bridge*. « Everybody was playing Body and Soul, and they’d go into the channel and go right back into the melody; and Diz [Dizzy Gillespie] would go into the channel and he’d run crazy. So you had to say, damn, what’s with this a#*, man ? » Interview de Fats Palmer in To Be or Not To Bop, de Dizzy Gillespie et Al Fraser.

CHARLESTON ► Danse des années 20 (du nom d’un morceau de James P. Johnson de 1923), qui acquit une popularité mondiale. Selon Melville J. Herskovits (in The Myth of The Negro Past*, 1941) le charleston aurait son origine chez les Ashantis d’Afrique de l’Ouest : Just Wait ’til You See My Baby Do The Charleston, Clarence Williams (1925). « The Sunset* had charleston contests* on friday night, and you couldn’t get in the place unless you got there early [...] The charleston was popular at that time [1926] until Percy Venable, the producer of the show, staged a finale with four of us band boys closing the show doing the charleston. That was really something*. » Interview de Louis Armstrong in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► Cymbale double, actionnée par une pédale. Au ras du sol à l’origine, elle devint high hat, quand, vers 1926, les batteurs Vie Berton et Kaiser Marshall la posèrent sur un trépied.

CHARLIE (Mister Charlie) Terme péjoratif pour désigner un Blanc, un supérieur hiérarchique, social : « Well Mister Charlie You had better watch your men They are going through the bushes And they are going in » Red Ripe Tomatoes, Jack Kelly (1933). Au féminin : Charlene.

CHART Arrangement écrit.

CHASE Chasse, poursuite. Affrontement de deux improvisateurs. Les chases furent particulièrement populaires dans les années 40 et 50 : The Chase, Dexter Gordon & Wardell Gray (1947). • Surnom du pianiste Sir Charles Thompson (1918): Chasin’ with Chase, Lionel Hampton (1941).

CHASER Verre d’eau pris après un verre d’alcool : Straight No Chaser, Thelonious Monk (1951).

CHAUFFEUR Chauffeur de maître. Métaphore courante pour amant : « Won’t you be my chauffeur I want someone to drive* me downtown* Baby drive so easy* I can’t turn him down » Me and My Chauffeur Blues, Memphis Minnie (1941). CHEAP (To play someone) Se foutre de la gueule de quelqu’un : « Hey you, tell everybody Mister Jordan’s in town I got a dollar and a quarter And I’m just rar in’ to clown* But don’t let nobody Play me cheap I got fifty cents* more than I’m gonna keep So let the good times roll » Let The Good Times Roll, Louis Jordan (1946).

CHECKERBOARD Echiquier. Tout endroit accueillant une clientèle mixte, Noirs et Blancs mêlés. Nom du club ouvert par le guitariste Buddy Guy à Chicago.

CHERRY ► Hymen. ► Par extension, vierge, pucelle. 94. CHERRY BALL. ® L’une des nombreuses expressions renvoyant aux organes sexuels : • I ain’t gonna give you None o’ my cherry ball » Cherry Ball Blues, Memphis Minie (1930). 1 Amant(e) : « I love my cherry ball Better than I love myself She get so she don’t love me She won’t love nobody else » Cberry Ball Blues, Skip James (1965). 95. CHERRY PICKER. Coureur, dragueur, amateur de pucelles : Cherry Picker, Josh White (1935).

CHIB Couteau à lame particulièrement longue et tranchante, surin : • When I get drunk I’m evil I don’t know what to do Guess I’ll get my good chib And get something good for you » Good Chib Blues, Edith Johnson (1929).

CHICAGO FLYER Train reliant Chicago à la côte ouest via Kansas City: Chicago Flyer, Meade Lux Lewis (1944).

CHICK Poulet. Depuis le xvuie siècle, jeune femme : « Long and tall, fine, she’s brown Tall and stately, boy I love the whole crown She’s a hip* little kiddie* She’s the squarest* chick in town » Blowing to California, Wynonie Harris (1947). ® Surnom du bluesman Robert L. « Chick » Willis (1934) et du batteur et chef d’orchestre William « Chick » Webb (1909-1939) : « Some of all the great horn* blowers* worked for Chick Webb some time or other, but Chick was always dogged by bad* luck and never managed to work steady for long. » Interview de Duke Ellington cité in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

CHICKASAW Du nom d’une tribu indienne. ► Train local de la région de Memphis, Tennessee : « I might tell everybody What that Chickasaw Special done done for me She done stole my man away And blowed back dark smoke on me » Chickasaw Train Blues, Memphis Minnie (1934). ► Surnom d’un quartier de Memphis.

CHICKEN Poulet. Femme, « poulette » (jeune et bien foutue dans l’argot blanc, elle peut être vieille et moche dans l’argot noir) : « Say, my daddy was a preacher* And my brother done the same ol’ thing Say if you don’t believe I like chicken Baby, ooh well, let me catch your wing » Pullet and Hen Blues, Bob White (1940). 96. CHICKEN DINNER. « Poulette » bien foutue. 97. CHICKEN HEARTED. Poule mouillée, lâche. 98. CHICKEN SCRATCH. Danse populaire du début du siècle remise au goût du jour par Rufus Thomas (Chicken Scratch, 1965) : « Look how it’s done, now baby Look little girl, I’ll show you how to scratch Now you’re doin’ the Chicken Scratch Baby scratch my back » Baby Scratch My Back, Slim Harpo (1966). FRIZZLY CHICKEN. « Poulet frit », l’un des plus sûrs moyens de se protéger des sorts et des maléfices. ► FUNKY CHICKEN. Danse popularisée par Rufus Thomas : Do The Funky Chicken, Rufus Thomas (1969).

CHILD Enfant. Mot couramment employé pour s’adresser familièrement, amicalement, à quelqu’un : « Every morning when I get up, now Lord I see your smilin’ face You know it makes me feel so good, child That I know I can make my lay » Your Love Is Like a Cancer, Son Seals (ca 1973). ► CIIILLEN ou ciiiLLUN. Children (enfants) dans le parler noir du Sud : « Fella*, down in country It almost make you cry My God chillun Women and children Flaggin’ freight trains for ride » 34 Blues, Charley Patton (1934). • WILD CHILD. Voir wild.

CHIMES Carillons. Nom d’une technique pianistique utilisée au début du siècle ; ou d’instrument de percussion : Chimes Blues, King Oliver (1923).

CHIMNEY Cheminée. Euphémisme pour organes sexuels féminins, spécialement si le mot est associé à l’image du père Noël : « Now I’m gonna use your Santa* Claus Several different ways I’m gonna use your Santa Claus Both night and day Baby please, let your Santa Claus Come down your chimney to me tonight Because I believe what Santa Claus Gonna bring me will just suit my appetite » Santa Claus, Bo Chatman (1938),

CHINCH Cafard, punaise : Chinch Bug Blues, Blind Lemon Jefferson (1927).

CHIPPIE 99. Prostituée : Chasin ’ Chippies, Cootie Williams (1938).

► Robe courte : « I liked the freedom of standing at a saloon bar, passing along the streets crowed with men of all nationalities and descriptions. There were women standing in their cribs* with their chippies on — a crib is a room about seven feet wide and a chippie is a dress that women wore, knee length and very easy to disrobe. » Jellv Roll Morton, cité par Alan Lomax in Mister Jelly Roil. • Surnom de la chanteuse Bertha « Chippie » Hill (1905-1950).

CHITTLINGS Pour chitterlings. Plat traditionnel de la soul food fait avec des tripes de pore : « I don’t want no hogheads Don’t eat no chittlin’s Don’t want no spareribs Don’t eat no backbone Mama got a hambone* I wonder can I get it boiled ’cause these Chicago women Are ’bout to let my hambone spoil » Ham Hound Crave, Rube Lacy (1928). 100. CIIITTERLING DANCE (STRUT). Syn. de rent* party : Chitterling Strut, Lemuel Fowler (1925). 101. CIIITTLING CIRCUIT. Pour le bluesman, tournée dans les clubs noirs : « C’était dur dans ces endroits-là, dans tous ces petits bars où tous ces orchestres jouaient pour une centaine de dollars. C’était ça le chittlin’ circuit. A chaque fois, ils gagnaient 100, 125 dollars par soir et certains soirs, ils travaillaient “pour la porte” [voir play* for the door]. » Interview de Herb Turner par Sebastian Danchin (1984) in Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto.

CHOCK Alcool de mauvaise qualité : « Il m’emmena donc dans une ruelle où se trouvait une petite boîte, et c’est là qu’il m’initia à ce breuvage de l’Okla- homa appelé Chock qui était un diminutif de Chocktaw Beer. Il y avait là un vieux pianiste du nom de Goodman. Le piano était bon. J’ai commencé à jouer, à boire du Chock et à m’amuser et, au bout de quelques soirs, j’étais devenu le roi de la maison. Pour quelque temps... » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. 102. CHOCK HOUSE. Bistrot, bouge: Chock House Blues, Blind Lemon Jefferson (1926).

CHOCOLATE • CHOCOLATE BROWN. Surnom de la chanteuse Irene Scruggs (1901-1983), à cause de la couleur foncée de sa peau. ► CHOCOLATE CITY. Surnom de Washington D.C., capitale fédérale, mais aussi plus grande ville noire des Etats-Unis (70 % de la population). ► CHOCOLATE TO THE BONE. Litt. : chocolat jusqu’aux os; parmi les nombreuses nuances de carnation que distinguent les Négro-Américains, celle-ci qualifie un Noir particulièrement foncé : « So glad I’m a brownskin Chocolate to the bone An’ I got what it takes* To make a monkey* man leave his home » Chocolate to The Bone, Barbecue Bob (1928).

CHOKE 103. Technique de guitare consistant à « travailler » une note en poussant (ou en tirant) la corde jouée vers le bord du manche. 104. A l’harmonica, technique utilisée par les harmonicistes de blues (voir tongue* blocking).

CHOLLY • Surnom d’une ligne de chemin de fer. • Billet d’un dollar (1940) : Cbolly Blues, Brownie McGhee (1959). • Vagabond. Syn. : bobo. • Diminutif de Charlie, comme dans le Trombone Cbolly de Bessie Smith (1927) dans lequel se met en valeur le tromboniste Charlie Green (ca 1900-1936). ► To BE ON THE ciiOLLY. Vagabonder, rouler sa bosse en train : « On a Sunday mornin’ it began to rain 'round the bend speed a passenger train On the pilot lay po’ Jimmie Jones He’s a good ol’ porter But he’s dead and gone ’cause he’s been on the cholly so long » Chant cité par Alan Lomax dans Folk Songs of North America.

CHOO CHOO Train à vapeur : « I’ve got the choo choo blues Had ’em all night and day 'cause the Panama* Limited Carried my man away » Panama Limited, Georgia White (1940).

CHOP (someone’s) WOOD (kindlings) Litt. : couper le bois (le petit bois) à quelqu’un. Métaphore pour « faire l’amour » : « When I had you, pretty baby You know I was tryin’ to do the best I could Now your little daddy* is gone Now who you gonna get to chop your wood? » Awful Fix Blues, Buddy Boy Hawkins (1927). « I ain’t no woodchopper* I ain’t no woodchopper’s son But baby I can chop your kindlings Until the woodchopper come » I Ain't No Iceman, Cow Cow Davenport (1938).

CHOPPING Syn. de dirty* dozens.

CHOPS Côtelettes. Dans l’argot des musiciens, les lèvres ou l’embouchure d’un instrument à vent : Mo Cbops, Cecil Payne (1949). ► LICKING THE CHOPS. Echauffement du musicien, mise en condition avant un concert. ►

CHORUS Chœur, refrain. Segment mélodique de même longueur que le thème et qui constitue l’unité de longueur d’une improvisation. Par extension, l’improvisation elle-même. « Hot* Lips Page was the life of many of Kaycee* jam* session. After a soloist had bloivn* nine or ten choruses, Lips would start a riff* in the background which the other boms* picked up. Not many arrangers could improve on Lips when it came to backing up a soloist. » Interview de Jo Jones, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► STOP CHORUS. Suite de plusieurs breaks*.

CHU De cbew, mâcher. Surnom du saxophoniste Leon « Chu » Berry (1910-1941) du fait de sa tendance marquée à la boulimie : «Je n’oublierai jamais le soir où Lester [Young] a lancé un défi à Chu Berry qui était considéré alors comme le plus grand [...] Lester était là avec son vieux saxophone tout rafistolé avec du sparadrap et des élastiques ; Chu était là aussi, et tout le monde essayait de provoquer un duel entre Lester et Chu en se demandant qui allait dégommer l’autre [...] Lester a pris au moins quinze chorus*, tous différents et plus splendides les uns que les autres. A la fin du quinzième, c’est Chu qui était anéanti... » Billie Holiday et William Dufty, Lady Sings The Blues.

CHUCK Terme péjoratif employé par les Noirs pour « Blanc ». • Surnom du bassiste Charles « Chuck » Rainey et du guitariste et chanteur Charles Edward « Chuck » Berry (1926) : « Mon frère Henry, avec qui je recommençais à travailler sur les chantiers de papa, s’appelait désormais Hank, surnom qu’il avait ramené de l’armée et, du coup, il me surnomma Chuck. C’est comme ça que la famille et les gens du quartier nous appelèrent désormais : Hank et Chuck. » Chuck Berry, Mon Autobiographie.

CHURCHY ► Qui évoque l’atmosphère de l’église (principalement celle de l’église baptiste ou de la Sanctified Church} : «Les églises protestantes noires sont, aux Etats-Unis, les seuls et les véritables conservatoires qui assument la pérennité de la musique négro-américaine dans ses différentes manifestations. C’est pour cette raison qu’une grande partie de la musique de jazz moderne la plus authentique (celle notamment de Horace Silver, Art Blakey, Donald Byrd, Jimmy Smith...) est qualifiée de churchy (venant de l’église)... » Maurice Cullaz, Guide des disques de jazz. ► Bigot, bigote.

CLEAN Propre. 105. Fauché, raide (depuis 1925). 106. « Propre », qui ne fait pas usage de drogue; désintoxiqué (pour un ex-dro- gué): « Si Bird* [Charlie Parker] ne voulait pas de Bud* [Powell] dans le groupe, ce n’était pas parce qu’il n’aimait pas sa façon de jouer, il nous avait dit, à Max [Roach] et à moi, que c’était parce qu’il se “défonçait trop”. Non mais, vous imaginez Bird disant que quelqu’un se défonçait “trop”? Autant que lui? [...] On est retourné dans le club, on a fini le set*, puis on a dit à Bird : “Bud est dehors, et il est clean.” » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l’autobiographie. 107. Bien sapé, tiré à quatre épingles, habillé dernier cri : « Right away I bought me a thru train ticket Ridin’ across Mississippi clean And I was on that Midnight* Flyer Out of Birmingham, smokin’ into New Orleans » Promised Land, Chuck Berry (1964). ► Précis, épuré (en parlant du jeu d’un musicien), au point techniquement. ► Innocent (années 1950-60). 108. CLEAN (OUT). « Lessiver », dévaliser : « I had cleaned him playing pool and he had the knife right on me. » Jelly Roll Morton cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. • CLEANHEAD. Chauve. Surnom du saxophoniste et chanteur Eddie « Cleanhead » Vinson (1917-1988) : « Folks call me Mister Cleanhead Just because my head is bald But with the stuff* then I use I don’t need no head at all » Cleanhead Blues, Eddie Vinson (1971). 109. TAKE SOMEONE TO THE CLEANERS. Dévaliser, dépouiller quelqu’un : Fil Take You to The Cleaners, Lil Johnson (1936).

CLEARWATER Eau claire. Pseudonyme du bluesman Edward Harrington alias Eddie Clearwater (1935).

CLINKER Scories (depuis 1930). • Canard, fausse note, «couac»; remplacé depuis par goof*. • La chaîne reliant les pieds des détenus (voir chain gang*}. 5. Babiole, bricole de peu de valeur.

CLIP JOINT Voir joint. 110. CLIPPED. Volé, trompé, escroqué : Woke up Clipped, Ben Webster (1943).

CLOUD (To be on cloud) Jouir, être en extase, dans les nuages : Cloud Nine, Sly and The Familv Stone (1968).

CLOWN 1. Rustaud : « I started running* around and gambling And acting like a clown My heart was loaded with trouble And it took my reputation down » The Condition I’m in, Roy Hawkins (1952).

► Quelqu’un d’authentique, de vrai : « There ain’t but three men Who can make a clown out of me That’s my husband and my sweetheart And my old-time used-to-be* » Three Men, Alice Mœre (1936). ► Faire le con, l’imbééile, s’en payer une tranche : « You know there’s a-place You can put your money down Take your girl Go upstairs and clown » Highway Blues, Lightnin’ Hopkins (1953).

COAL Charbon. 111. Le vocabulaire du chauffage, comme celui de la cuisine (voir cook), a un double sens pour le peuple du blues : couper le bois de quelqu’un {chop someone’s wood*), tirer les cendres {haul ashes), le charbon {coal) et le petit bois kindling) évoquent l’acte sexuel : « Now tell me what’s the matter with your basement I don’t believe you use Sonny* Boy’s coal no more Well I always been nice to you I would bring it in to your backdoor* » Coal and Iceman Blues, Sonny Boy Williamson (1941). 112. Référence aux Noirs : Load of Coal, Jelly Roll Morton (1930). Et à Cozy Cole, le batteur que l’on entend sur ce titre.

COALFIELD N m d’une policy* wheel de Chicago dans ie courant des années 20 : - Now while you playin’ policy* Play 5-9 and 59 But be careful, buddy* 'cause you might lose your mind. Cryin’ ooh, Look what the Coalfield have done to me It done took all my money And still it won’t let me be » jûçv Wheel Blues, Kokomo Arnold (1935).

COCK Coq; tuyau. Mot tabou ; du fait de l’assonance, le mot cook* sert souvent de masque à cock. L Sexualité ou organes sexuels : « You know your sister had the blueballs* And your papa had the pox And your mama had the shingles All around her bloody cock » The Dirty Dozens, Lightnin’ Hopkins (ca 1960). Notons que si dans la bouche d’un Blanc, cock renvoie aux organes sexuels masculins, dans la bouche d’un Noir, le terme fait plutôt référence aux organes féminins. 2. Baiser, forniquer : « Well I’m goin’ to Memphis Drop by Satchitaw Gonna tell you women How to cock it on the wall » On The Wall, Louise Johnson (1930). ► COCKSUCKER. Qui pratique la fellation. Lèche-cul, fayot : « Now you’s a jumpin’ motherfucker* Cheap cocksucker Goin’ out in the alley* doin’ this That an’ the other Just keep on goin’, Shave* your black ¿/xs* dry » Dirty Dozens, Speckled Red (1956).

COFFEE Afr. De l’akan kofi, nom d’un mâle né un vendredi. Convergence avec coffee, café : 113. Noir à la peau foncée: « I love my coffee Crazy ’bout my China tea But a sugar* daddy Is sweet enough for me » Jacksonville Blues, Nellie Florence (1928). 114. Au sens figuré, plaisir charnel : «You know I like my coffee sweet in the morning You know I’m crazy about my tea at night Don’t get my coffee three times a day Great God, you know I don’t feel right » Sugar Mama, Hammie Nixon (1972). ► COFFEE GRINDER. Litt. : celui qui moud le café ; l’amant(e) : « Bought me a coffee grinder Got the best one I could find So he could grind* my coffee ’cause he has a brand new grind » Empty Bed Blues, Bessie Smith (1928).

COKE Cocaïne : « Saying coke’s for horses Not women or men The doctors say it’ll kill you But they didn’t say when » Cocaine Blues, Luke Jordan (1927).

COLD IN HAND Voir hand.

COLD TURKEY Litt. : dinde froide. 1. Etre en manque (pour un drogué) : « Il était alors devenu difficile de trouver de l’héroïne à Los Angeles? Ça ne me tracassait pas, puisque je n’en prenais pas, mais Bird, oui. C’était un vrai junkie^, Il a commencé à être gravement en manque. Puis il a disparu. Personne ne savait qu’il habitait chez Howard [McGhee], et Howard n’avait pas dit qu’il était cold turkey. Mais quand Bird arrêtait l’héroïne, il se rabattait sur la boisson. Une fois, il m’avait dit qu’il essayait de se sevrer, qu’il n’avait pas pris d’héroïne depuis une semaine : il avait huit litres de vin sur la table, des bouteilles de whisky dans la poubelle, des cachets de Benzédrine éparpillés devant lui, et un cendrier qui débordait de mégots. » Miles Davis et Quincy’ Troupe, Miles, l'autobiographie. Désintoxication.

COLD-BLOODED Franc, entier, authentique ou expansif : Cold-Blooded Woman, Memphis Slim (1961).

COMBO De combination. 115. Orchestre de taille moyenne (six à huit musiciens généralement) pratiquant une musique qui ne fait pas appel à un arrangeur. 116. Martingale.

COME Sperme. Ejaculer, jouir, atteindre l’orgasme. COME DOWN. 1. Dessoûler, « redescendre », revenir à l’état normal après un « voyage ». 2. Satisfaire, rassasier (sexuellement parlant) : « Please let me squeeze your lemons* While I’m in your lonesome town Now let me squeeze your lemons, baby Until my love comes down » Let Me Squeeze Your Lemons, Charlie Pickett (1937). COME FREAK. Noir freak. COME ON. Jouer, entamer un chorus.

CONDUCTOR Guide qui, au temps de {'Underground* Railroad*, acheminait les esclaves en fuite vers le Nord. Contrôleur, chef de train : « This train is known as the Black Diamond Express to Hell. Sin is the engineer*, pleasure is the headlight and the Devil is the conductor. I see the Black Diamond as she starts off for Hell. » The Black Diamond Express for Hell, Rev. Nix (1927).

CONGO Au xvine siècle, terrains vagues au nord- ouest de La Nouvelle-Orléans {Congo Plains) qui accueillaient cirques, spectacles de foire et jeux sportifs; le dimanche, l’endroit était entièrement réservé aux Noirs qui s’assemblaient en foule pour battre les tambours et danser la calinda* ou la counjaille*. Cette tradition dominicale remonte, semble-t-il, à 1803, date de l’acquisition de la Louisiane par les Américains qui, craignant les réactions d’une population noire influencée par la Révolution française et les pratiques vaudou, préférèrent lui laisser cet exutoire. Le lieu fut rebaptisé Congo Square au XIXe siècle (puis ultérieurement Beaure- gard Square) : « Tous les dimanches, les esclaves se réunissaient — c’était leur seul jour de congé — mon grand-père faisait retentir les tambours, il battait le rythme sur les tambours du square, les Blancs l’appelaient Congo Square et, sur cette vaste aire, les esclaves se pressaient en foule autour de mon grand-père et de ses tambours [...] Et c’était tous les gens qui venaient, même les Blancs, même les maîtres! [...] Parfois, il était le lieu de vente aux enchères ! Vous avez compris : c’était à Congo Square que les propriétaires de plantations, les maîtres venaient vendre ou acheter leurs esclaves! » Sidnev Bechet, La musique, c'est ma vie. A La Nouvelle-Orléans, Noir de pur sang africain (xvnie-xixe s.). Danse du XIXe s.

CONJURE LADY (Conjure man) 1. Dans le vaudou, personne douée de pouvoirs occultes (voyance, capacités d’envoûtement ou de guérison...), initiée aux rites vaudou : « I’ve got to see the conjure man soon Because these gin-bouse* blues is campin’ ’round my door I want him to drive ’em off Sô they won’t corne back no more » The Ginhouse Blues, Bessie Smith (1926). Parmi les plus célèbres, Sanité Dédé (fin du xvme s.), Marie Laveau (1794-?), la plus célèbre des figures du vaudou, qui la supplanta vers 1820 et disait tenir ses pouvoirs du serpent (d’où son surnom de ^nake Marie), sa fille « Tite Marie », Laveau, toutes trois de La Nouvelle- Orléans, Ida Carter (voir seven*) et, plus près de nous, Aunt Caroline Dyer (décédée en 1944): « Well I’m going to Newport To see Aunt Caroline Dyer* She’s a fortune-teller Oh Lord, she sure don’t tell no lie* » Hoodoo Woman, Johnnie Temple (1937). 2. Plus rarement, conjurer : « The devil am a Nar and conjurer too My Lord, brether — en, ah my Lord If you don’t look out he’ll conjure* you My Lord, brether — en, ah my Lord » You Must Be Pure and Holy, cité par Allen, Ware and Garrison dans Slave Songs of The United States.

CONQUEROO Voir John The Conqueroo.

CONTEST Joute musicale : « — Say, listen here Too Tight* They tell me you all gonna have a Charleston contest Out your way tonight — Yeah, boy, I heard ’em talkin’ about it » Charleston Contest, Too Tight Henry (1928). Syn. : bucking, carving et cutting contest.

COOCHIE-COO De coocb, terme de music-hall désignant une danse lascive : « Lord how I can feel misery Lord and feel like you I have a woman, in Brownsville And (she doin’ the coochie-coo?) » Broken-Hearted, Ragged and Dirty’ Too, Sleepv John Estes (1929).

COOK Cuisiner : « I’d rather be a scullion Cookin’ in some white folks yard I could eat a-plenty Wouldn’t have to work so hard » Washwoman’s Blues, Bessie Smith (1928). ► Au sens figuré : faire l’amour (en ce sens, cook est un masque du mot tabou cock*) ; ce fait n’est certainement pas sans liens avec la sexualisation des termes de cuisine) : « Keep your backdoor* locked Baby, keeps your windows pinned If your husband should knock Tell him you’re cooking and he can’t come in » Keep Your Windows Pinned, Clifford Gibson (1929). ► En jazz, jouer avec beaucoup d’inspiration, casser la baraque : Cookin' at The Continental, Horace Silver (1959). 117. COOKER. Musicien excitant, brillant, chauffant son auditoire ; ou morceau superbe. 118. COOKIE. CD Jeunot, jeunette ou petite amie : Blues for My Cookie, Lightnin’ Hopkins (1954). (2) Organes sexuels féminins (alors que dans l’argot blanc, le terme ne renvoie qu’à une jolie môme) : Papa Wants a Cookie, L. C. (1930). 119. COOK UP. Dissoudre l’héroïne dans l’eau avant une injection. 120. COOK WITH GAS. ® Etre au parfum, branché, dans le coup (1940). ® Faire quelque chose à la perfection : « Shake that thing, baby One time for your daddy I love it You’re cookin’, with gas » Shake It Baby’, John Lee Hooker (1962).

COOL • Détendu, calme ou au poil, super (1948): « We couldn’t come in when we were supposed to and make him [Earl Hines] play another chorus. He’d be sweating, man, and he’s so cool. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. • Abréviation de cool jazz* : Birth of The Cool, Miles Davis (1948). e 121. COOL OFF OU COOL DOWN. Assouvir le désir sexuel (depuis le xvn s.) : « I’m a high speed daddy If you can’t ride* my train Mama, just step right off So red* hot mama, if you fool with me Papa gonna cool you off I mean your papa gonna cool you off» Red Hot Mama, Papa’s Going to Cool You off, Barbecue Bob (1929). « She’s my red* hot mama But she sure can cool me down And when she starts to lovin’ My love come* tumblin’ down. » Fine Little Mama, Elmore James (1961). 122. COOL CAT. Mec à la page : « You told me you’re high class But 1 can’t see through that And daddy I know You ain’t no real cool cat » You Ain't Nothing but a Hound Dog, Big Mama Thornton (1965). ► COOL GREEN. Marijuana. ► COOLIN’ BOARD. A la morgue, planche sur laquelle sont exposés les corps : « You know I got my suitcase And I took on down the road But when I got there She was layin’ on the coolin’ board » My Black Woman, Son House (1930). ► COOL JAZZ. Voir jazz. • COOL PAPA. Surnom du guitariste chanteur Robert « Cool Papa » Sadler (1935). ► COOL WALK. Voir walk that walk.

COOL JAZZ Depuis 1948. Par opposition à hot, désigne un style de jazz frais, détendu, avec recherche de sonorités, propres, douces. Si Lester Young fut l’initiateur de ce style, et Miles Davis le plus connu de ses représentants, le style cool fut surtout l’apanage de musiciens blancs tels Stan Getz, Zoot Sims, Lee Konitz, Paul Desmond, Chet Baker... « Miles [Davis] ushered in an innovation that the press immediately smeared with the term “cool” jazz. It happened as a result of a record date that Miles played with Gerry Mulligan and Johnny Carisi who had written some things for Miles. The record was called Birtb of The Cool because the guys in California sort’ve played not hot*, but “coolish”. They expressed less fire than we did, played less notes, less quickly, and used more open space, and they emphasized tonal quality. » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop. COON Terme péjoratif pour Noir (argot du Sud) : « The burly coon, you know He packed his clothes to go Well, he come back las’ night His wife said : “Honey, I’m tired o’ coon I goin’ to pass for white” » Let Me Bring My Clothes Back Home, Irving Jones (ca 1899). ► COON CAN (COON KING). De l’espagnol conquián (jeu de cartes) ou con quien (avec qui), voire du grec koumkan (jeu de cartes similaire au rummy). Jeu de cartes apparenté au gin-rummy, populaire parmi les Noirs du Sud : « Now my baby doing something That I never could stand I believe she’s running With a coon can game » I Ain't Gonna Be Worried No More, Sleepy John Estes (1935). Se trouve parfois sous les noms de coon king et de double rum. ► COON. V. Gagner au coon can. ► ZIP COON. ® Personnage des minstrels. « Les deux caricatures d’esclaves les plus fréquentes étaient l’esclave des plantations avec ses vêtements en loques et son patois épais, et l’esclave de la ville, le dandy vêtu à la dernière mode, se vantant de ses conquêtes féminines. Le premier s’appelait Jim Crow* et le second Zip Coon. » Eileen Southern, Histoire de la musique noire américaine. ® Danse du XIXe siècle.

COONJAI (Counjaille, counjine, kunjine) Sorte de menuet que l’on put observer sur Congo* Square à La Nouvelle-Orléans, jusqu’à la fin du XIXe : « Coonjine, baby, coonjine on the sly, mama don’t ’low me to counjine, daddy don’t ’low me to try. » Interview d’lshman Bracey, cité par David Evans dans Tommy Johnson. Kunjine Baby, Tampa Red et Frankie Jaxon (1929).

COOP (Fly the coop) Voir fly* the coop.

COOT Surnom de la chanteuse Leola B. Wilson, de son surnom d'enfance, « Cutie » (1893-?) : Come on, Coot, and Do That Thing, Coot Grant et « Kid » Wesley Wilson (1925).

COOTIE Surnom du trompettiste Charles Melvin « Cootie » Williams (1910-1985) : Concerto for Cootie, Duke Ellington (1940).

COP 123. Agent de police, flic, cogne: « You know the cop took her in She didn’t need no bail She shooks it for the judge And he put the cop in jail » You Got to Love Her with a Feeling, Tampa Red (1960). 124. Abrév. de copulation ; (1950) v. : baiser, faire l’amour.

2. 3. A partir de 1955, prendre, se procurer quelque chose d’illégal ou d’interdit; recevoir, se payer, s’offrir ou prendre part. ► COP A NOD. Dormir. ► COP A PLEA. « S’écraser » dans un affrontement verbal (voir dirty* dozens). ► COP AND BLOW. Expression toute faite exprimant les vicissitudes de la vie : « Ça va, ça vient. » Dans le langage des maquereaux, gagner ou perdre une fille (voir blow). ► COP OUT. Aller dormir; se soumettre, s’écraser (syn. : cop a plea) ou se prostituer.

COREY Déformation de Cora Ann en Corinne puis en Corey. Reine indienne tuée lors d’un affrontement entre deux tribus à la fin des années 20. Héros noir du temps de l’esclavage : « Corey was a brother* Who was aware of his inner man And at the direction of the cosmic He lived to reach the Promised* Land Corey died on the battlefield In search of his destiny » Corey Died on The Battlefield, The Wild Magnolias {ca 1970).

CORJUN Accordéon : « Well, 1 stood there and listen at Payton on that corjun. He says, “Come in, son*”, but I was afraid and I told him, “I ain’t cornin’ in, but I can play the corjun you got”. He says, “Come in and try her”. That way he entice me in. I couldn’t make it on that corjun the first time, but I kept cornin’ back til I got so I could fool with it. » Interview de Louis De Lisle Nelson, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

CORK (Work under) Litt. : travailler « sous le bouchon ». Allusion aux minstrels blancs qui se noircissaient la figure avec du bouchon brûlé. Work under cork, c’est, pour l’artiste noir, se «prostituer», rechercher le succès commercial au prix de la trahison de son héritage culturel.

CORNBREAD 125. Pain de maïs, de tradition dans la cuisine noire (voir soul). 126. Les rapports sexuels dans ce qu’ils ont de rude, de grossier, au contraire de biscuit ou de jelly roll : « Some of these women I just can’t understand All you women 1 just can’t understand They cook cornbread for their husbands And biscuit* for their men » Combread Blues, Texas Alexander (1927). • Surnom du saxophoniste Hal Singer (1919): Combread, Hal Singer (1948). ► CORN (CORNFED). Ringard, démodé : « They could read, but had no ideas. Occasionally I condescended to play with these cornfed musicians. » Jelly Roll Morton cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

CORNY 127. Se dit de quelqu’un qui n’est pas dans le coup, qui est « vieux jeu », « à côté de la plaque », ou d’une musique commerciale, sans âme : « Jive* with Jordan is jake* with me, Blues with Basie and Big* T. Might be corny like a moon-in-june rhyme But I love a good melody some of the time » This Joint's too Hip for Me, Betty Hall Jones (1949). 128. Usé, éculé.

COTCH Sorte de poker à trois cartes : « That was the place where all the big- time* pimps* and bustlers* would congregate and play cotch (that was a game they played with three cards shuffled and dealt from the bottom of the deck). [...] And you could win or lose a whole gang* of money... » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin ’ to Ya de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

COTTON ► COTTON BELT. Surnom de la Saint Louis South Western Railroad qui dessert Saint Louis, Tewarkana et Dallas : « Cotton Belt is a slow train Also that I and C. N. If I leave Texas anymore Going to leave on that L & N » Sunshine Special, Blind Lemon Jefferson (1927). ► COTTON ON. Comprendre, piger : « My brownie* cottoned me My brown cottoned me this mornin’ soon My brownie* cottoned me this mornin’ soon Got to go far to get my lovin’ done » West Virginia Blues, Edward Thompson (1929). ► Low COTTON. De la difficulté à cueillir le coton qui est placé assez bas sur le plant de coton. Pour les habitants du Sud, déveine, guigne, poisse : Low Cotton, Rex Stewart (1939).

COTTON CLUB Célébrissime club de Harlem, au coin de la 142e et de Lenox Avenue. Inauguré à l’automne 1923, il succédait au Douglas et au club Deluxe. Il déménagea en 1936 pour s’installer à Broadway avant de fermer ses portes en juin 1940. Le Cotton Club reste particulièrement lié aux carrières de Duke Ellington (qui y resta de 1927 à 1932), de Cab Calloway, d’Ethel Waters et de Lena Horne. Le Cotton Club appliquait une politique stricte de ségrégation; comme le note Jim Hawkins : « On ne sait pas exactement d’où l’on tira ce nom de Cotton Club, mais il est vraisemblable que le fait d’avoir voulu une politique d’admission qui en réservait l’entrée à la seule clientèle blanche y ait été pour quelque chose. » Cotton Club Stomp, Duke Ellington (1929).

COUNT Surnom du pianiste et chef d’orchestre William Basie (1904-1984) : The Count, Bennie Moten (1930). «J’ai utilisé le nom de Count dès l’instant où j’ai pensé que cela pouvait me servir. De toute manière, tout le monde m’appelait ainsi. Mais le premier à l’avoir fait, ce fut un animateur de la station de radio W.H.B. Qu’on ne me demande pas pourquoi, je n’en sais rien. » Interview de Count Basie par Gretchen Weaver, Band Leaders and Record Review, citée par Luc Delannoy in Lester Young : Profession Président. « Dans ces premiers temps, je découvrais ces boîtes un peu à l’aveuglette, mais c’est pendant cette période [1927-29] que je décidai de m’appeler le Count. Je connaissais l’existence de King* Oliver et je savais aussi que Paul Whiteman était surnommé le King of Jazz. Duke* Ellington commençait à être un des plus grands noms de Harlem, mais aussi du disque et de la radio, Earl Hines et Baron Lee étaient aussi des noms importants. Je décidai donc que je serais moi-même un des plus grands parmi les nouveaux noms, et j’allai même jusqu’à me faire faire des petites cartes de visite fantaisie pour l’annoncer. On y lisait : “COUNT BASIE. Beware, the Count is here." » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. « Mon vieux copain Eddie Durham a aussi fourni à mon coauteur quelques mesures à propos de mon nom de “Count”. Quand Bennie cherchait Basie et qu’il ne le trouvait pas, il disait : “Aw, that guy ain't no 'count." » [Ellipse de no account, sans intérêt]. Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues.

COUNTY FARM Ferme-pénitencier : « Down South, when you do anything wrong They' 11 sure put you down on the county farm Put you under a man called captain Jack He’ll sure write his name up and down your back » County Farm Blues, Son House (1942). Ces établissements dépendent soit de l’administration locale {county farm) soit de celle de l’Etat {state farm) et sont gérés comme des entreprises, les bénéfices revenant à l’administration de tutelle, la main-d’œuvre étant fournie par les détenus : « I worked hard on the county farm Tried to forget my man And some day he’s going to be sorry7 He treated me this a-way » Prison Blues, Alice Mœre (1929). Les conditions de détention y furent particulièrement dures : les chain gangs* y survécurent jusqu’au début des années 40 et les mutilations volontaires — pour échapper au travail forcé — n’étaient pas rares : en 1951, à Angola, quarante détenus se tranchent les talons d’Achille et en 1957, à Kilby, une douzaine de condamnés s’écrasent les jambes à coups de marteau... « La vie dans ces county farms texanes était incroyablement dure et brutale. Les prisonniers, détenus souvent pour des infractions mineures ou simplement pour vagabondage [à ce sujet, voir Joe Turner] subissaient les coups répétés des fouets et avaient à travailler, littéralement, jusqu’à l’épuisement, jusqu’à y laisser la vie. Entravés à plusieurs dans ces chain gangs*, dans certains cas jusqu’à 300 à la file, ces hommes et parfois ces femmes étaient au travail seize heures par jour, six ou sept jours par semaine, à drainer les marais, casser les pierres dans les carrières, construire des routes. Des gardes à cheval les conduisaient et les surveillaient, armés de fusils et de fouets. La nuit on les enfermait dans des baraquements humides et délabrés, parfois enchaînés à leur couchette. » Giles Oakley, Une histoire du blues. Du fait de leur isolement culturel, des traditions musicales ailleurs disparues (celle des work* songs par exemple) ont pu y subsister, ce qui explique l’intérêt tout particulier que leur ont porté les musicologues et les nombreux enregistrements qui, depuis les premiers de John Lomax pour la bibliothèque du Congrès dans les années 30, y ont été réalisés. Parmi les fermes les plus célèbres, on peut citer Kilby et Atmore pour l’Alabama, Cummins, Gould et Marked Tree pour l’Arkansas, Reid (Caroline du Sud), Angola (Louisiane), Lambert et Parchman (Mississippi), Ellis, Darrington, Clemens, Retrieve, Shaw et Sugarland (Texas).

COUSIN JOE Surnom du pianiste chanteur Pleasant Joseph (1907-1989).

COVER Couverture. Titre à succès que les compagnies de disques font enregistrer à l’un de leurs poulains dans le but de concurrencer la version originale. Les covers subissent souvent la censure par remodelage de paroles jugées trop dérangeantes ou obscènes; c’est le cas, entre autres, du Shake Rattle and Roll de Big Joe Turner qui sera un succès national dans la cover aseptisée qu’en donnera Bill Haley quelques mois plus tard (1954).

COW cow Surnom du pianiste de boogie-woogie Charles « Cow Cow » Davenport (1894- 1955).

COWEIN Dans l’argot de La Nouvelle-Orléans^ nouba, bringue : « Those were happy days, man, happy days. Buy a keg of beer for one dollar and a bag full of food for another and have a cowein. » Interview d’Alphonse Picou, cité par Alan Lomax dans Hear Me Talkin' to Ya de Nat Shapiro et Nat Iientoff.

CRACK A JACK (Crackerjack) Fameux, réputé : « I think 1’11 stroll* on down to New Orleans now ‘Smash down in that crack a jack grocery Get myself some of that goofy* dust » Strollin', Champion Jack Dupree (1958).

CRACKER Terme de mépris, utilisé par les Noirs du Sud, pour désigner les « petits Blancs », les Blancs pauvres et racistes : « Oscar [Pettiford], naturally, was jw/- ced*, and three cracker sailors walked up. One said : “What you niggers* doin’ with this white woman ?” Oscar hit at him and fell. » Dizzy Gillespie et Al Fraser in To Be or Not to Bop.

CRAPS ► Jeu qui se joue avec deux dés et où le joueur doit totaliser 7 ou 11 pour gagner; 129. 3 et 12 (voir dirty* dozens') sont en revanche des scores perdants : « Sur notre chemin de retour de West Virginia à New York, je ne pouvais plus me faire à l’idée de rentrer à la maison sans un sou. J’avais 4 dollars quand le jeu de craps commença sur le plancher du car... » Billie Holiday & William Dufty, Lady Sings The Blues. 2. Aux dés, un 3 : « I’m looking for a seven* I throwed out a three That’s the kinda crap That made a chump outa me » It Just Won't Quit, Barbecue Bob (1930). • CRAPSIIOOTER. Joueur de dés : « My baby’s a crapshooter And she shoots ’em like a man And ever since she’s being shootin’ craps* Oooh well, well, she’s been going from hand to hand » Crapshooter Blues, Peetie Wheatstraw (1937).

CRAWL Ramper. • AFRICAN CRAWL. Danse : « First couple doin’ the African Crawl Next couple doin’ the St Louis Nightmare Here’s a hustler* now with the State* Street stomp* And this little bustler* and her man’s gonna boot that thing » Hokum Stomp, Jane Lucas (1930). • ALLIGATOR CRAWL. Danse des années 20 : Alligator Crawl, Louis Armstrong (1927). • BEAR CAT CRAWL. Courte figure de basses au piano : Bear Cat Crawl, Meade Lux Lewis (1938). ► COOTIE CRAWL. Nom d’une danse des années 10. ► GEORGIA CRAWL. Nom d’une danse populaire parmi les Noirs du Sud : « Feel like a broke down engine Ain’t got no drivers* at all What makes me love my woman She can really do the Georgia Crawl » Broke Down Engine Blues, Blind Willie McTell (1931).

CREAM Crème. 130. Ejaculer, jouir, atteindre l’orgasme. 131. Jouer, en général du saxophone, de manière doucereuse; «faire de la soupe » : Creamin’, Julian Dash (1950). ► CREAM PUFF. Homosexuel ou personne maigre, haridelle : « I’m a hard working man Have been for many years I know And some cream puffs using my money Well well, baby, but that’ll never be no more » I’m a Steady Rollin’ Man, Robert Johnson (1937).

CREEP • Creep ou before day creep, escapade nocturne de l’amant rejoignant sa maîtresse : « You oughta buy you a bulldog To watch us whilst we sleep So he can see your husband If he makes a ’fore day creep » Keep Your Windows Pinned, Clifford Gibson (1929). « Gonna buy me a bulldog Watch you whilst I sleep Just to keep these men From makin’ this early mornin’ creep » Weepin’ Willow, Blind Boy Fuller (1937). • Saligaud, répugnant. ► CREEPER OU CREEPING MAN. L’amant, celui qui se glisse par une porte dérobée (voir backdoor) : He’s a Creepin’ Man, Washboard Sam (1941). The Creeper, Freddy Robinson (1966). ► MIDNIGHT CREEP. Escapade nocturne du backdoor* man : « I’ve got to buy me bulldog* He’ll watch me while I sleep Because I’m so black* and evil* That I might make a midnight creep » Black and Evil Blues, Alice Moore (1929).

CREOLE De l’espagnol criollo : Terme désignant les enfants de parents blancs nés aux Caraïbes. En français, le terme a le même sens qu’en espagnol, alors que pour les Américains, il s’applique aux mulâtres issus plus spécialement de parents d’origine latine. En 1894, les Créoles se virent légalement assimilés aux Noirs, perdant ainsi un statut quelque peu privilégié. « She said his mother was creole And an Indian was her dad I know she give me a feeling Something that I’ve never had » 'You Changed, Big Bill Broonzy (1951). ► Langue dérivée du français parlée en. Louisiane et dans les Antilles.

CRESCENT CITY Surnom de La Nouvelle-Orléans; la ville s’étend en effet en forme de croissant sur les bords du lac Pontchartrain : Crescent City Blues, Little Brother Montgomery (1936).

CRIB Lit d’enfant, crèche. 132. Vers 1940, chambre, crèche, piaule (utilisation rare depuis l’apparition de pad) ; bordel : « I’m telling you this tenderloin* district was like something that nobody has ever seen before or since. The doors were taken off the saloons there from one year to the next. Hundreds of men were passing through the streets day and night. The chippies* in their little-girl dresses were standing in the crib doors singing the blues. » Jelly Roll Morton cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. 133. Tripot, boîte. 134. Tricher. ► CRIB DEATH. Maladie très grave touchant les enfants (et tout particulièrement les Noirs) durant leur sommeil.

CRIPPLE Estropié, boiteux. Surnom du pianiste « Cripple » Clarence Lofton (1887-1957) qui a été atteint de poliomyélite dans sa jeunesse.

CROSS Jouer d’un harmonica diatonique dans une tonalité qui n’est pas la sienne propre : playing crossed D on a G harp « I blow* harmonica, but I don’t try to blow like nobody but myself, you know. I mean, a lot of guys* cross it. You can play it straight; you can cross it three times; you can cross it four times. [...] You cross it with your mouth, with your tongue. I can’t show you how to cross it 'cause I got it in my mouth. Nobody can teach you how to blow — you just have to pick up on it... » Interview de Shakey Jake, cité par Eric Sackheim dans The Blues Line. L'immense majorité des harmonicistes de blues joue crossed, en général cinq demi- tons en dessous de la tonalité normale de l’instrument. Ainsi, si le guitariste joue en mi. l’harmoniciste jouera sur un harmonica en la (soit la sous-dominante de l’accord de mi). ► CROSSED E. Nom de l’une des manières d'accorder une guitare, comme Spanish ou sebastopol. ► CROSS-EYED STEP. Danse de la période swing*. ► CROSS NATURAL. Syn. de vasterpool (voir open* tuning) : 135. You git mostly all the songs you play in the same key. You can play some in Spanish*. I play in three tunes Spanish, natural*, and cross natural. In cross natural you drop your bass, and you drop your E string. » Interview de James Son Thomas par William Ferris, in Racial Repertoires Among Blues Performers. ► CROSS-OVER. Pas de danse : 136. Quand je suis arrivée au Pod’s and Jerry’s [...], je suis entrée et j’ai demandé le patron [...]. Je lui ai dit que j’étais danseuse et que je voulais faire un essai. Je connaissais en tout deux pas : le timestep* et le cross-over [...]. Jerry m’a désigné le pianiste et m’a dit de danser. J’ai commencé : une catastrophe... » Billie Holiday et William Dufty, Lady Sings The Blues. ► DOUBLE-CROSS. Voir ce terme. ►

CROSSCUT SAW Scie à taille croisée (utilisée par les bûcherons). Métaphore évoquant les mouvements rythmés et réguliers du coït : « Now I’m a crosscut saw Drive me cross your log Baby I cut your wood* so easy You can’t help but say hot dog* I got a double bladed ax And it sure cuts good But try7 my crosscut saw It's evil to the wood » Chass Cut Saw Blues, Tommy McClennan (1941).

CROSSROAD Carrefour. _aeu où se signe un pacte avec le diable dans la tradition négro-américaine ; le dieu des carrefours est Legba, l’un des plus puissants du panthéon du Vaudou : « He [Robert Johnson] said the reason he knowed so much, said he sold hisself to the devil. I asked him how. He said, “If you want to learn how to play anything you want to play and learn how to make songs yourself, you take your guitar and you go to where the road crosses that way, where a crossroad is. Get there, be sure to get there just a little ’fore 12 :00 that night so you know you’ll be here. You have your guitar and be playing a piece there by yourself... A big black man will walk up there and take your guitar, and he’ll tune it. And then he’ll play a piece and hand it back to you. That’s the way I learned to play anything I want.” » Interview de Ledell Johnson pour Living Blues, cité par Julio Finn dans The Bluesman. ► DIRTY WORK AT THE CROSSROADS. Sale tour, crasse : Dirty Work at The Crossroads, Clarence Gatemouth Brown (1953).

CROW JANE Femme de couleur très foncée, par extension, femme peu attirante : «And I laid in prison My face turned to the wall Says, a no-good crow jane woman Was the cause of it all » Sing Song Blues, Bob Coleman (1929).

CROW Jim Racisme anti-blanc (ne pas confondre avec Jim* Crow).

CRUMP Edward Hall Maire de Memphis, Tennessee, élu pour la première fois en 1909; il contrôla la ville (et le Tennessee tout entier) durant une quarantaine d’années. Il est resté célèbre pour avoir voulu, au début de son premier mandat, assainir Beale Street', il prit en particulier un arrêté interdisant aux Noirs de circuler dans la rue après minuit : « ’fore Mr Crump got here Things went very well Now that’s he’s in town It’s like a burning hell » Mr Crump, Frank Stokes, cité par Bengt Olson dans Memphis Blues. Notons que Mr Crump de W.C. Handy, autrement connu sous le nom de Memphis Blues, fut composé à l’occasion des élections municipales de 1909.

CUMMINS Ferme-pénitencier située à Gould, à 25 miles de Pine Bluff, Arkansas : « I’m talkin’ about Cummins I’m talkin’ about Cummins prison farm Now you heard part of my story I’m not the only one » Cummins Prison, Calvin Leary (1969).

CUSTARD PIE Chausson fourré. Métaphore évoquant les organes sexuels féminins : « Says, I’m not jokin’ Ain’t gonna tell you no lie* I want a piece of your custard pie You got to gimme some of it ’fore you give it all away » / Want Some of Your Pie, Blind Boy Fuller (1939). CUT Couper. ► Ecraser un rival lors d’une joute musicale (voir cutting* contest) ; tend à être supplanté par carve* : «Près* [Lester Young] and Herschel Evans were forever thinking up ways of cuttin’ the other one. You’d find them in the band room hacking away at reeds*, trying out all kind of new tones, anything to get ahead the other one. » Interview de Billie Holiday, in Hear Me Talkin' To Ya de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► Baiser, forniquer : « Now I ain’t no butcher No butcher’s son I can do your cuttin’ ’til the butcherman comes » All Around Man, Bo Carter (1936). ► Enregistrer un disque. 137. CUT LOOSE. Laisser tomber, cesser ses relations avec quelqu’un : « You know I talk to you baby You don’t seems understand [...] I should pack my bag to leave you I cut you a loose Lord, don’t let me cut you loose » Cut You a Loose, Luther Allison (ca 1972). 138. CUT OUT. ® Partir, se barrer, se casser, foutre le camp : « Yes a man ain’t nothing but a stupid fool To think he got a woman all by himself Well I say, soon as his back is turned You know she’s cuttin’ out with somebody else » Crazy Man Blues, Sonny Terry (ca 1952). ® Laisser tomber : « I’m going to cut out playing policy* ’cause my numbers just won’t fall Somebody done put jinx* on me Ooh well and I can’t have no luck at all Cut out Blues, Peetie Wheatstraw (1936). ► CUT (CHOP) SOMEONE’S WOOD. Litt. : couper le bois de quelqu’un; faire l’amour, baiser : « They call me Wood-cutting Sam Call me Wood-cutting Bill But the woman I did the wood-cutting for She wants me back again » Cross Cut Sam Blues, Tommy McClennan (1941). ► CUT SOME RUG. Danser. Voir rug cutter. ► CUT THE CAKE. Dépuceler. ► MACON CUTOUT. Nom d’une danse : « Now take it easy* mama And be a good scout If you want to do this dance Macon cutout » Macon Georgia Cutout, Bobby Leecan (1927).

CUTTING L’une des dénominations des douzaines (voir dirty* dozens) en usage sur la côte ouest. Orales ou musicales, les joutes ont une finalité identique, réduire l’autre au silence, aveu de défaite : Pli Start Cutting on You, Big Bill Broonzy (1938). ► CUTTING CONTEST. Joute musicale opposant des orchestres (ou des solistes) entre eux : « Les gars de couleur montrent leur talent dans ces joutes musicales qu’on appelle des cutting contests', dans ces matches, pas de tricherie, car l’auditoire noir ne s’en laisse pas conter, quand il s’agit de musique, et n’accepte que le premier choix. Ces concours ne sont que la version musicale des joutes verbales. Il s’agit de voir lequel des exécutants mettra tous les autres dans sa poche musicalement [...] Acelui qui était considéré comme le meilleur spécialiste de tel ou tel instrument, on disait : “Hé vieux, y’a Untel qu’est en ville et qui te cherchait ce matin.” Tous les prétendants au titre étaient ainsi asticotés, échauffés, chacun étant prévenu que les autres le cherchaient pour le tomber. » Mezz Mezzrow et Bernard Wolfe, La Rage de vivre. D

D. B. ► Pour Duesenberg, fabriquant d’automobiles de luxe vers la fin des années 20 : « Who is that coming Hey, with a motor so strong That’s Lemon* in his D. B. People think he’s got his girl on out » D. B. Blues, Blind Lemon Jefferson (1928). ► Initiales de Detention Barrack, prison militaire : D. B. Blues, Lester Young (1945).

D. B. A. Pour dirty black ass, sale cul noir. Voir ass.

D. J. Pour disc jockey : « I’m gonna write little letter Gonna mail it to my local D. J. Yes it’s a jumpin’* little record I want my jockey to play » Roll over Beethoven, Chuck Berry (1956).

DADDY Papa. Homme, amant : « The girl I love is built for speed She got everything that a daddy need You’d better take* it easy, take it easy, baby You’d better take it easy, mama ’cause I can’t stand the way you do » Take It Easy, Pinetop Perkins (ca 1978). 139. DADDY-O. Terme de connivence et de respect entre Noirs : Daddy-O, Louis Jordan & Martha Davis (1947). • DADDY STOVEPIPE. Pseudonyme du chanteur, guitariste et harmoniciste Johnny Watson (1870-1963). 140. SUGAR DADDY. Voir sugar.

DAISY CHAIN • Nom d’un bordel de Harlem en vogue dans les années 20 et 30 : Swinging at The Daisy Chain, Count Basie (1937). ► Partouze.

DAMN (Not to give a) S’en foutre, s’en balancer : « Vietnam Vietnam Everybody cryin’ about Vietnam Blow*, as long as they* killin’ me down in Mississippi Nobody seem to give a damn » Vietnam Blues, J.-B. Lenoir (1965).

DAMPING Technique de guitare consistant à étouffer avec la paume de la main les cordes basses; le résultat obtenu est un thud.

DAP Abréviation de dapper, pimpant (1950). 141. Homme à la mise soignée, dandy. 142. Informé, en éveil : « You can’t even hang with me Until you dress and get more dapp And you can’t compare yourself with me Until you develop a little more rapp* » Rapp Time, Luther Thomas (1981).

DARKIE (Darky) Depuis 1775, Noir (vu par un Blanc); également utilisé de façon satirique par les Noirs eux-mêmes : « O massa take tha bran’ new coat And hang it on the wall That darky take the same ole coat And wear it to the ball* » Away Down in Sunbury', chant cité par Allen, Pickard & Garrison in Slave Songs of The United States.

DARKTOWN Quartier noir : « I went down to Darktown With some good luck in my mind Now I’m sad and lonely I’ve got to do the chain gang* grind* » Darktown Gamblin, The Skin Game, Robert & Charlie Hicks (1930).

DAT 77M, dans la transcription phonétique du parler noir : Pallin' Dat Cat, Teddy Bunn (1930).

DATE ► Rendez-vous, rencard : Our Monday Date, Louis Armstrong (1939). ► Dans le langage des musiciens (années 20), somme reçue pour un enregistrement, puis, par extension, la session d’enregistrement elle-même ou un engagement dans un club. ► Bringue, nouba (années 50). 143. DOUBLE-DATE. Rendez-vous à quatre, partie carrée. 144. PICK-UP DATE. Tournée d’un musicien solitaire qui, à chaque engagement, se fait accompagner par des musiciens locaux : « Pendant que nous étions ensemble, elle m’a tiré de sacrés pétrins. Si j’étais sur la route pour des pick-up dates et me retrouvais coincé quelque part, j’appelais Nancy et elle disait : “Fous le camp de là-bas! De combien t’as besoin?” Et quelle que soit la somme, elle l’envoyait tout de suite. » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l'autobiographie. 145. SET A DATE. Filer un rencard : Set a Date, Homesick James (1965).

DAWG Pour dog : Aw, You Dawg, Cab Calloway (1932).

DAY 146. DAY CLEAN. L’aube. 147. DAY GIG. Voir gig. 148. DAY TIME PASSING. Pour un Noir à peau claire, « passer la ligne » (se faire passer pour Blanc) le jour pour aller au travail, mais rejoindre sa communauté une fois celui-ci terminé. 149. DECORATION DAY. Fête nationale américaine commémorant les soldats morts au champ d’honneur (30 mai) : « Lord, I had a woman She was nice and loving Kind to me in every way But she dies and left me So I have the blues On every Decoration Day » Decoration Day Blues, Sonny Boy Williamson (1940). ► LET’S CALL IT A DAY. Restons-en là, n’en parlons plus : Let's Call It a Day, Sonny Thompson (cd 1950).

DE KALB Petite ville à l’extrême nord-est du Texas ; Leadbelly fut incarcéré dans la prison locale : « De Kalb blues, Lord Make me feel so bad Just to think about de time* I once have had » De Kalb Woman, Leadbelly (1935).

DEALER ► Celui qui donne les cartes ou joueur professionnel. ► Revendeur de drogue : « The dealer ask me “Peetie, how you come so rough?” Well now, I ain’t bad* Ooh well, well, but just been drinking that stuff* » Drinking Man Blues, Peetie Wheatstraw (1936).

DEARBORN STREET Rue de Chicago, Illinois : Dearborn Street Breakdown, Charles Avery (1929).

DECATUR Rue « chaude » d’Atlanta, Géorgie : « Rue Decatur, en plein centre bruyant et gueulard du quartier nègre d’Atlanta, deux music-halls se tassaient côte à côte. L’un était au 81 de la rue : celui où l’on nous engagea, Joe Hill et moi [Ethel Waters]. [...] Et le juif qui dirigeait la salle, au 91, juste à côté, devait cultiver les têtes d’affiche pour se défendre. C’est ainsi que, pendant que nous passions au 81, le 91 fit appel à Harrycovers, l’un des acteurs noirs les mieux payés de l’époque. » Ethel Waters et Charles Samuel, La Vie en blues.

DEEDLE Voir diddle, doddle, beedle um bum. « Skin on her head Just as tight as a drum A little song Called Deedle Dee Dum » Stop That Thing, Sleepy John Estes (1935).

DEEP SIX « Enterrement » en pleine mer, par immersion : Deep Six Blues, Louis Russell (1946).

DEEP SOUTH Le «Sud profond», qui, historiquement, est constitué des onze Etats confédérés qui firent sécession en 1861 (Alabama, Arkansas, Caroline du Nord, Caroline du Sud, Floride, Géorgie, Louisiane, Mississippi, Tennessee, Texas et Virginie) : Deep South Suite, Duke Ellington (1946).

DEGREE (First ou Third Degree) ► First Degree (murder in the), crime avec préméditation : « I was sentenced for murder in the first degree Judge’s wife call up and said : “Let that man go free He’s a jelly* roll baker* He got the best jelly roll in town Only man can bake jelly roll with his damper down » Jelly Roll Baker, Lonnie Johnson (1947). ► Third degree, le « troisième degré », passage à tabac : « I got T B.’*s, I got the L. T.’*s I got third degree and polk disease My health is gone now Left me with the sickness blues » Fool’s Blues, Funny Paper Smith (1931). DELTA La région connue sous ce nom n’a rien à voir, comme on pourrait le penser de prime abord, avec le delta du Mississippi : cette zone de production cotonnière se situe 2 ou 300 km plus au Nord, entre le Mississippi à l’Ouest, la Yazoo River à l’Est, Vicksburg au Sud et Clarksdale au Nord. Sam Charters limite le Delta à une zone bordée par les rivières Yazoo, Sunflower et Tallahatchie : « Some people in the Delta Wondering what to do They don’t built some levees* I don’t know what become of you » Tallahatchie River Blues, Mattie Delaney (1930). Selon Manfred Miller, l’importance du Delta dans la naissance et le développement du blues serait due à l’attraction qu’ont exercée, au début du siècle, les plantations de Will Dockery et Jim Yeager dans les environs de Drew; ces deux planteurs avaient abandonné le share-cropping (aboutissant par un cycle d’endettement croissant du métayer à une nouvelle forme de servitude) et payaient des salaires décents dont l’attrait ne fit que renforcer un courant migratoire déjà important qui, dès avant 1900, drainait vers cette région fertile, une partie du prolétariat rural, et en particulier noir, du Sud : « Oh way down in the Delta That’s where I ’long to be There’s a Delta bottom* woman Who is sure going crazy over me » Low Down Mississippi Bottom Man, Freddie Spruell (1928). Mais à partir des années 20, comme le note Robert Springer, « le Delta fut probablement l’une des zones les plus dures et les plus violentes en matière de ségrégation raciale, [...] avec l’arrivée d’une population de petits Blancs des collines de l’Est de l’Etat qui apportèrent à la structure sociale de type paternaliste une atmosphère de violence à peine contenue, un besoin brûlant d’acquérir argent et pouvoir, et un racisme affiché qui correspondait parfaitement à leurs desseins ». Ces conditions particulièrement rudes firent que l’exode vers les grandes métropoles du Nord y fut encore plus massif que dans d’autres régions au point que, entre 1940 et 1950, le Mississippi perdit presque la moitié de sa population masculine entre 15 et 34 ans.

DEM Prononciation spécifiquement noire de them, revendiquée, entre autres, par les bluesmen suivants : Lionel Hampton (Ring Dem Bells, 1938). Big Bill Broonzy (Roll Dem Bones, 1945). Don Wilkerson (Dem Tambourines, 1962). Big John Patton (Dem , 1963). Roland Kirk (Dem Red Beans and Rice, ca 1972).

DEMOCRAT Démocrate. Le vote noir est traditionnellement démocrate depuis 1932 et l’élection de Franklin Roosevelt : « I ain’t goin’ down to the welfare* store It won’t be long to the democrat to be back again. I know the girls won’t make the same mistake again. The men voted ’em in The women voted ’em out I ain’t got no shoes on my feet But I ain’t goin’ down To the welfare store. It won’t be long to the election time Democrat will be in » Democrat Man, John Lee Hooker(1952). « Well we finally won the Big Race While the elephant [symbole du parti républicain] For 8 years has been taking the pace. You know, up stepped a donkey [symbole du parti démocrate] Whom I’ve always betted on To take over the victory And bring everything back home » The Big Race, Memphis Slim (I960).

DERE Equivaut à there (là), dans la transcription phonétique du parler noir : Dat Dere, Bobby Timmons (I960).

DEUCE Aux dés : 2 (deux). Dans l’argot des joueurs, un billet de deux dollars : Two Deuces, Louis Armstrong (1928).

DEVIL Diable. Aux dés, un mauvais jet (2, 3 ou 12) : Up Jumped The Devil, Roy Brown (1954). ► DEVIL’S MUSIC. Litt. : musique du diable. Le blues : « Une musique épouvantablement immorale, jouée par des fainéants sans foi ni loi, et qui exprimaient toute leur vulgarité d’esprit dans une musique parfaitement vulgaire. » Interview de Dempsy Hardin, mère de Lil Hardin, citée par James Lincoln Collier in Louis Armstrong. Le blues fut désigné ainsi aussi bien par les Blancs que par les Noirs, mais plus particulièrement par les églises noires : « Henry : The Devil’s music — don’t think the Devil care for the truth, do you?... So, the truth is, I guess I stick to my blues as the blues, and I’m not afraid to play them because I’m gonna go to the burning place whatever it is. I’m not afraid of that! Vernell : I’ve heard old people say, down through the years, “Oh, that’s the Devil’s music” and then they give you a Bible quote, you know. They’ll say, “Because the Bible said ‘Make a joyful noise unto the Lord !’ you know” ? They give you this reason. It does say that, but it doesn’t say what kind of joyful noise to make to the Lord ! The blues can be just as joyful as a spiritual*. » Interview de Henry et Vernell Townsend, cité par Giles Oakley dans The Devil's Music. • DEVIL’S SON-IN-LAW. Litt. : beau-fils du diable. L’un des surnoms que s’est attribué le bluesman William Bunch alias Peetie Wheatstraw (1905-1941) : « Everybody hollering There come that Peetie Wheatstraw Now he’s better known By the Devil’s son-in-law » Peetie Wheatstraw Stomp n° 2, Peetie Wheatstraw (1937).

DICK ► Flic, cogne : « The dicks told Q&ey* You must leave town I believe to my soul I’m Alabama* bound » Casey’ Jones, Furry Lewis (1959). ► Façon de s’interpeller entre hoppers* 5. Verge, bite : « Now your nuts* hang down Like a damn bell-clapper And your dick stand up like a steeple Your godamn arse hole Stand open like a church door And the crabs walks in like people » Shave ’em Dry, Lucile Bogan (1935). ► BIG DICK. La combinaison 15-60-75 au jeu des numbers*', aux dés, 10.

DICKIE Surnom du tromboniste William « Dickie » Wells (1907-1985).

DICTY (Dickty, dictee) Se dit d’une personne hautaine : Dicty Blues, Coleman Hawkins (1923).

DIDDLE (Daddle, deedle) 150. Tripoter nerveusement un objet. 151. Masturber. Plus généralement, toute action en rapport avec la sexualité : « I went out an’ looked around Me and my gal* was layin’ down Doin’ the diddle-da-diddle Oh, diddle-da-diddle Wont somebody tell me What diddle-da-diddle mean » Diddle-da-diddle, Georgia Cotton Pickers (1930).

DIDDLEY (Diddly) BOW Instrument d’origine africaine que David Evans, sur la pochette du disque de Jessie Mae Hemphill She-Wolf, décrit ainsi : « [II] consiste en un fil de fer, de ceux qui retiennent les pailles d’un balai, accroché à un mur et pincé de la main droite tandis que de la main gauche le joueur fait glisser une bouteille le long de cette ficelle. » Une autre variante a été décrite à Robert Springer par Lonnie Pitchford : « Il s’agit de réussir à tendre un fil de fer entre deux clous plantés dans un mur. On joue de cet instrument en faisant passer le goulot d’une bouteille sur la corde tout en la frappant à l’aide d’une petite pierre tenue dans l’autre main. » Il n’est pas interdit de voir dans ces instruments primitifs plutôt que dans l’influence hawaïenne, l’origine de la technique du bottleneck*.

DIDDY-WAH-DIDDY (Diddie-Wa-Diddie) ► L’équivalent du pays de Cocagne dans le folklore noir. L’un des informateurs de Zora Neale Hurston en parle ainsi : « Il est desservi par une route qui tourne tant, qu’une mule tirant une charrette de fourrage peut l’atteindre à l’arrière tandis qu’elle avance... » ► La signification de l’expression s’enrichira rapidement de connotations sexuelles : « Went to church, put my hat on the seat Lady sat on the seat, Said “Daddy you sure is sweet” Mister Diddie Wa Diddie... I said “Sister I’ll soon be gone Just give me that thing you sittin’ on” My Diddie Wa Diddie A little girl about four feet four Said : “Come on daddy Give me some of your diddie-wah-diddie Diddie-wah-diddie” I sure do wonder what diddie-wah-diddie means » Diddie-Wah-Diddie, Blind Blake (1929).

DIG Afr. Du wolof dig : comprendre. Convergence avec l’anglais dig : creuser, fouiller. 152. Comprendre, piger : « Stop the things you’re doing Dig up, I ain’t jivin'* I can’t stand this foolin'* around I can’t stand no puttin'* me down I put a spell on you, because you’re mine » I Put a Spell on You, Screamin’Jay Hawkins (1956). 153. Aimer, emballer : « This joint's* too hip* for me Yes 1 have to let it be I can’t dig what they putting down Yes I’m just a square* around. Well the band's* too hip for me They don’t play no melody I can’t dig what they blowing* out Yes I’m just a square about » This Joint Is Too Hip for Me, Betty Hall Jones (1949). ► Jouer de la musique avec swing : Digging for Dex, Count Basie (1946). 154. DIG POTATOES. Voir potato.

DIKE (Dyke) Voir bulldyke.

DIME • Pièce de dix cents; par extension, fric en général : « Somebody loan me a dime I want to call my ol' time used-to-be* My woman been gone so long And I begin to worry me » Somebody Loan Me a Dime, Fenton Robinson (1974). • Dix dollars (quelquefois, big dime par opposition à change dime, petite monnaie). • Condamnation à dix ans de prison. 155. DIME-A-DANCE. Salle de danse. Date de l’époque où chaque danse avec une entraîneuse (taxi-girl) coûtait dix cents.

DING DONG ► Excellent, super: Ding-Dong Blues, Bennie Moten (1927). ► Apre, farouche, furieux (à propos d’un affrontement) : « I’ve been there but one day And I learnt a ding dong play* Prisoner for ever Tomorrow gonna be a long hot day » Bom in Missouri, Magic Slim (1976). ► Pénis, d’où ding dong daddy, amant, bon baiseur : I'm a Ding Dong Daddy, Louis Armstrong (1930). ► Abruti, dingue. ► Amusement, réjouissance (syn. bells, cloches).

DING-A-LING (Ting-a-Ling) Sonnerie du téléphone. 1. Cinglé, maboul. 2. Amoureux. 3. Pénis ou vulve (de ding, cogner, rosser et, par extension, baiser, depuis le XVIIIe s.) : « I remember the girl next door We used to playhouse* on the kitchen floor She’d been the queen I’d been the king And I let her play with my ding-a-ling » Ding-A-Ling, Chuck Berry (ca 1971/2).

DINNER Repas. Jolie môme : Fine Dinner, Coleman Hawkins (1939). ► CHICKEN DINNER. « Poulette » bien balancée.

DIP Plonger. 156. Danse des années 10. 157. Pickpocket. 158. Abréviation de dipso, ivrogne, boit- sans-soif : « I took her to the opera I look at baby’s lip By the way that it was drippin’ I know the baby had a dip Snuff* dippin’ mama, What makes your lip hang so low You’ve got to stop that dippin’ Or daddy don’t love you no more » Snuff Dipping Mama, Charles Brown (1947). 159. Drogué, camé. • DIPPER BOY. Surnom du guitariste et chanteur Floyd « Dipper Boy » Council (1911-1976). • DIPPERMOUTH. « Grande gueule », surnom de Louis Armstrong (1898-1971) : « I’ll never forget the day he [Louis Armstrong] came into town (about 1920 or 1921). He wore a brown box- back* coat, straw hat and tan shoes. We called him Dippermouth. Satcbmo* was unheard of then... » Interview de Preston Jackson, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

DIRT Terre, crasse : « Can’t go down this dirt road by myself My God who you gonna carry, Gonna carry me someone else » Down Tbe Dirt Road Blues, Charlie Patton (1929). ► DIRT MUSIC. (1910-1935) Musique bot, terre à terre (voir down-to-eartb), authentique : « Bolden was still a great man for the blues [... ] He was a great man for what we call dirt music. » Interview de Bud Scott, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

DIRTY 4. Mal, mauvais, affreux : « He’s a dirty mother for you He don’t mean no good He got drunk this morning Tore* up the neighbourhood » Dirty Mother for You, Memphis Minnie (1935). Par inversion de sens : super, terrible, fantastique. Appliqué à la matière sonore, dirty caractérise le traitement non académique que lui font subir le blues et le jazz : sonorités impures, ponctuées de bruits parasites, notes qui dérapent et s’infléchissent. Didier Levallet et Denis- Constant Martin, dans L’Amérique de Mingus, caractérisent ainsi ce traitement du son : « Les origines essentiellement vocales de la musique noire américaine (work songs, spirituals et blues) ont entraîné une utili- sation du son instrumental comme prolongement, voire imitation de la voix. Les musiques populaires se soucient peu d’académisme, chaque chanteur — puis chaque musicien — raconte sa propre histoire, colorée par son timbre vocal, puis instrumental, renforçant ainsi la personnalisation d’un discours énoncé à la première personne [sur ce point, voir /]. [...] Considérant son instrument comme le prolongement naturel de sa propre voix (fut-elle intérieure), le musicien de jazz n’a de cesse que de cultiver sa différence et de se rendre immédiatement identi- fiable à la seule audition d’une sonorité n’appartenant qu’à lui. Tous les grands solistes de jazz — même les plus copiés — ont ainsi su établir leur propre sonorité, que l’initié reconnaît d’emblée. On pourra même dire de certains qu’ils existent d’abord (et parfois, peut-être seulement) par leur son. » 160. DIRTY DEAL. Mauvais tour, crasse, sale coup : « I’m tryin’ to tell you people Tell you just how I feel I feel so bad, yes I do My baby gave me a dirty deal » Feel so Bad, Utile Milton (1966). 161. DIRTY DOG. Voir dog. 162. DIRTY MOTHER FOR YOU. Voir motberfuc- ker. 163. DIRTY WORK AT THE CROSSROADS. Voir cross- road.

DIRTY DOZENS Litt. : douzaines dégueulasses. Du verbe to dozen : étonner, dans l’anglais du xvnie siècle (hypothèse avancée par William Griffin) ; et/ou du nombre douze : des chants de douze couplets étaient utilisés au xixe siècle pour l’apprentissage de la Bible; par ailleurs douze est le plus mauvais résultat dans certains jeux de dés (hypothèse de Paul Oliver et Mack McCormick). Définition. Jeu rituel, très pratiqué par les adolescents noirs des classes populaires, dans lequel les protagonistes insultent la famille de l’autre (en cas d’insultes visant directement l’interlocuteur, on parle plus volontiers de signifying), en présence de leurs pairs qui les excitent et apprécient les « coups » portés : « I hate to talk about your mother She’s got a good old soul She’s got a ten ton pussy* And a rubber ass* hole She got hair on her pussy that sweep the floor, She got knobs on her titties* that open the door » Douzaine recueillie par Roger Abrahams et citée dans Deep Down in The Jungle. Selon William Labov (Le Parler ordinaire), quatre propriétés fondamentales permettent d’opposer les vannes rituelles aux autres types d’insultes : « 1 — Une vanne ouvre un terrain sur lequel l’échange est censé se tenir. Elle s’accompagne de l’attente d’une autre vanne [...]. Le joueur qui émet la première vanne offre ainsi aux autres l’occasion de briller à ses dépens. ► — La présence d’une tierce partie est nécessaire à côté des deux joueurs initiaux. ► — Tout membre de la tierce partie peut entrer dans le jeu à tout moment et en particulier lorsque l’un des deux joueurs engagés se montre déficient. ► — Il se maintient tout au long du jeu une distance symbolique considérable qui sert à isoler l’événement des autres types d’interaction verbale. » Dans les douzaines, chacun cherche à sonder (voir sounding) l’autre, à le pousser à bout, à voir ce qu’il a dans le ventre. Il s’agit de lui « clouer le bec » sans perdre son sang-froid et sans en venir aux mains, signe d’impuissance. « Le but véritable des douzaines, c’était de rendre un gars fou au point qu’il se mette à pleurer et que la fureur l’amène à se battre. [...] Que diable, c’est en jouant aux douzaines que nous nous formions l’esprit. » Rap Brown, Crève, sale nègre, crève. Fonctions. Les douzaines remplissent une quadruple fonction, cathartique, initiatique, de renforcement de la cohésion du groupe et ludique. Elles constituent un exutoire pour l’agressivité de l’adolescent; elles lui permettent non seulement de se défouler contre son « adversaire » mais aussi contre ses proches, avec lesquels, par personne interposée, il peut régler ses comptes; John Dollar voit même dans les douzaines « une soupape de sécurité contre l’oppression raciale ». Dans l’affrontement, l’adolescent affirme sa virilité, se libère de l’emprise parentale (et tout particulièrement de celle de la mère, omniprésente dans les couches populaires noires). Cette sorte de rituel où expression et transgression des tabous (inceste, infidélité, homosexualité, zoophilie...) sont permises, permet l’intégration par les protagonistes des normes et valeurs de la communauté; dans la joute se marquent tout à la fois émancipation et appartenance au groupe. Elles sont un signe de solidarité et de connivence entre les «joueurs». Insultes et obscénités sont échangées dans un cadre implicitement admis par tous ; elles ne sauraient être en aucun cas tolérées d’un étranger (de tout inconnu et a fortiori d’un Blanc). Enfin, les douzaines, comme les autres pratiques verbales, ont une fonction ludique : plaisir de la joute, de la création verbale, et surtout plaisir de voir l’autre entrer dans le jeu et manifester ainsi sa complicité. Douzaines et autres types de parole. Dozens et sounding constituent le degré ultime des conduites verbales d’affrontements ; d’autres, moins violentes mais plus insidieuses et manipulatrices, font partie des armes du type « à la coule » : ► Rapping-. parler, tchatcher, essayer d’amener l’autre où on veut l’amener; le rapp est un discours charmeur et insidieusement persuasif. ► Scbucking et jiving traduisent une plus grande volonté de manipulation; ces conduites sont en général adoptées en présence d’un supérieur, lorsqu’on est sur la défensive, pour éviter un châtiment, une amende, ou une réprimande; on dit quelquefois aussi toming (d’« oncle Tom »). C’est feindre la soumission, la déférence, simuler l’innocence, la niaiserie ou la débilité pour mieux gruger son interlocuteur (voir Brotber Rabbit*). ► Running it down : dénigrer, déblatérer. ► Capping, putting down, mounting, marcbing, cbarging : se foutre de la gueule de quelqu’un sans qu’il s’en aperçoive. ► Signifying désigne un comportement explicitement manipulateur et provocateur qui vise directement l’interlocuteur. ► La défaite (être réduit au silence) amène également à des conduites ritualisées {copping a plea, gripping) qui marquent de façon symbolique l’allégeance au vainqueur tout en permettant au perdant de sauver la face. Douzaines enregistrées sur disque. Les enregistrements rendent assez peu compte de leur caractère véritablement obscène : « I like your mama I like your sister too I did like your daddy But your daddy would’nt do I met your daddy on the corner the other day You know about that he was funny that way » The Dirty Dozen, Speckled Red (1929). « How’s your mammy today? How’s your daddy today? Don’t play* the dozens I don’t know the rules of the game Oh, the way she talk about me Sure is a doggone* shame » In The Dozens, Chicago Carl Davis (1949). Plusieurs explications peuvent être avancées, censure et autocensure très probablement, mais aussi peut-être et surtout, non adéquation du genre (en tant que duel, elles s’accommodent mal du soliloque du bluesman). Quelques exceptions cependant au milieu des différentes versions plus ou moins édulcorées, l’enregistrement resté inédit du pianiste Speckled Red (1956): « Fucked* your mammy, Fucked your sister too Would’nt fuck your daddy But the son-ofa-bitch* flew Your pa wants a wash Your mother turn tricks* Your sister love to fuck And your brother sucks dick*. He’s a fuckin’ motherfucker*, cocksucker* Goin’ out in the alley* doin’ this That an’ the other Just keep on goin’ Sbave* your black ass* dry » ou celui du Texan Lightnin’ Hopkins réalisé par Mack McCormick {ca 1961): « You got a crooked ass-hole, nigger* An’ you can’t shit straight [parlé] You black fucker, you Is that clear, You old black southern bitch* You was born with a rag in your arse And you never did see it until it done past You know your sister had the blueballs* And your papa had the pox And your mama had the shingles All around her bloody cock* [parlé] You big black bastard, you » Autres formes de joutes. La tradition des douzaines se retrouve jusque dans les églises comme le remarque Guy- Claude Balmir {Du chant au poème) : « Des joutes verbales sont parfois organisées où deux ou trois pasteurs sont invités à impo- viser, en concurrence, à partir d’un même texte biblique » ; et, d’une certaine façon, son prolongement instrumental dans les bucking*, carving* ou cutting contests*. Origine. L’origine des douzaines est à rechercher en Afrique (on cite des joutes analogues chez les Yoruba, les Efik...) dans les jeux de récrimination et/ou dans les pratiques liées à certaines formes de parenté (dites « à plaisanterie ») où s’expriment de façon ambivalente la violence (échange d’insultes et d’obscénités) et la solidarité entre clans (échange de cadeaux et de services, interdiction de se nuire...). « Ces conduites linguistiques qui visaient d’abord les Blancs sont devenues pratique courante entre Noirs. Les relations à l’intérieur du groupe sont en effet marquées par leur rapport historique au Blanc et la crainte de trouver en autrui un maître. » Geneviève Fabre, Le Théâtre noir aux Etats-Unis. Elles tirent de ce passé leurs caractéristiques, ruse et manipulation, qui relèvent d’une stratégie d’inversion des rapports de force (voir Brother Rabbit*, Signifying* Monkey, Spider). Il n’est donc pas surprenant que ces conduites soient particulièrement valorisées dans les couches populaires noires; elles confèrent d’ailleurs plus sûrement prestige et respect au sein du ghetto que l’étalage de la force physique : « You can’t even hang with me Until you dress and get more dapp* And you can’t compare yourself with me Until you develop a little more rapp* » Rapp Time, Luther Thomas (1981). Syn. : sounding (spécialement à New York et Philadelphie), woofing ou wolfing (Philadelphie), joning (Washington D.C.), signifying ou sigging (Chicago), screaming (Harrisburg), cutting, capping ou chopping (côte ouest), playing, twelves ( The Twelves, Kokomo Arnold 1935)... ► DOUBLE DOZENS. Syn. de dirty* dozens : Double Dozens, Sweet Pease Spivey (1936). ► DOZEN. Douzaine : « I hate to talk about your mama this way The dozens is a game I don’t usually play » Teenage Love, Oscar Brown Jr (1970). ► PLAY THE DOZENS. Jouer aux douzaines, s'affronter lors d’une joute orale : « ’cause I’m leaving San Anton’ and I declare, ain’t coming here no more Well I don’t play the dozens and neither the ten 'cause you keep on talking till you make me mad Gonna tell you ’bout the mothers That your father had 'cause I don’t play the dozens I declare, man, and neither the ten » Kentucky Blues, Little Hat Jones (1930). «Joe King* Oliver was an important figure at that time. He was an eating guy* for sure. He was also a good guy, sort of sensitive in a way. He liked to joke a lot; he liked to play' the dozens. » Interview de Buster bailey, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► PUT/SLIP (SOMEONE) IN THE DOZENS. Litt. : foutre quelqu’un dans les douzaines. Mettre en boîte, charrier : «Jones slipped Brownie in the dozen last night And Brownie didn’t think that was exactly right Because slippin’ in the dozens Means to talk about your family folks And talkin’ about one’s family isn’t jokes » Don't Slip Me in The Dozen, Chris Smith (1924).

DIRTY SHAME Honteux, dégueulasse : « Wake up every morning Low* down and dirty shame Got your mess*, baby Peckin’ on my window pane That’s why I’m gonna move To the outskirts of town » Outskirts of Town, Big Bill Broonzy (1942).

DIS This dans la transcription phonétique du parler noir : Dis there, Bobby Timmons (I960).

DISTRICT (The) Autre nom de Storyville, le quartier réservé de La Nouvelle-Orléans : « But the people I knew called all that was in Storyville* “The District”. I never heard called Storyville. It got called that when somebody up here in the north read about it. It was never Storyville fo’ me. It was always “The District”, the Red Light* District. » Interview de Danny Barker, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

DITTY Chanson : Ditty a La Dizzy, Mercer Ellington (1956). L'un des termes sous lequel fut connu le blues : « They was slow tunes, unhappy. They was what they call blues now, only they called them ditties in them days. » Interview de Harrison Barnes, cité par Samuel B. Charters in The Country Blues.

DIVE Bouge, gargote, cabaret : « I’m a man from the gutter* Women, in your dive at night I’m evil*, mean* and funny* So don’t come back with that line of jive* » Gutter Man Blues, George Hannah (1929).

DIXIE (Dixieland) Les Etats du Sud, les anciens Etats confédérés (voir Deep South) ; vient de l’indication « DIX » portée à l’intention de la population francophone sur les billets de dix dollars émis en Louisiane avant la guerre de Sécession : « I met this gal* way down in Dixieland She might’ve got a lesson from a sewing machine, man ’cause she moves it just right Everybody crazy ’cause she moves it just right » She Moves It Just Right, Barbecue Bob (1929). ► DIXIE FLYER. Nom d’un train : « Dixie Flyer come on And let your drivers roll Wouldn’t stay up North To please nobody’s doggone* soul » Dixie Flyer Blues, Bessie Smith (1925). DIXIELAND. Style musical, encore appelé « New Orleans » ; le terme fait généralement référence à la musique produite par des musiciens blancs (en raison du premier enregistrement de jazz effectué par l’Original Dixieland Jazz Band, en 1917) : « Dixieland was jumping The jazz chased it away I’m not sure of modern music But the blues is here to stay » Broadway’s on Fire, Broadway Bill Cook (1950). Peut aussi désigner le style « New Orleans », tel qu’il a été plagié par des musiciens blancs au moment du « New Orleans revival » au cours des années 40 : « The squabble between the hoppers* and the moldy* figs who played or listened exclusively to Dixieland jazz, arose because the older musicians insisted on attacking our music and putting* it down. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► DIXIE LINE. Voir Mason-Dixon* Line.

DIZZIE Pris de vertige, extravagant, dingo : « I’ve been drunk so long Dizzy all the time Then I found out Whiskey ain’t no friend to me » Fightin’ The Jug, Blind Blake (1929). ► Surnom du trompettiste John Birks « Dizzy » (ou « Diz ») Gillespie (1917) célèbre pour ses extravagances et sa fantaisie : « Parlons un peu de son sens de l’humour. Gigantesque ! Je ne sais d’où lui vient ce surnom, mais il a été bien choisi. “Tout fou”, un peu dingue, c’est lui, avec son énorme amour de la vie, son goût pour les facéties, son besoin de rire de tout et de rien, autant de traits de caractère que son jeu reflétait. J’avais remarqué aussi dès le début que lorsqu’il essayait de réaliser une de ses idées, ou qu’il prenait des risques — dans l’aigu par exemple — et qu’il ratait son coup, il en riait sans être abattu... » Interview de Bill Dillard, in To Be or Not To Bop de Dizzy Gillespie et Al Fraser. DO Faire. Dans le vocabulaire des prisonniers, effectuer, tirer sa peine, faire son temps : « Uumh, big Brazos*, here I come It’ hard doing time for another man When there ain’t a thing Poor Lightnin’* done » Ain’t no More Cane on This Brazos, Lightnin’ Hopkins, cité par Samuel B. Charters in The Country Blues. ► Do BOY. Surnom du bluesman du Delta, William « Do Boy » Diamond. ► Do IT. Expression d'encouragement à un musicien. ► Do THE DO. Baiser : Do The Do, Howlin’ Wolf (1962).

DOBRO Du nom de ses créateurs d’origine tchèque, les DOpera BROthers; le terme slave dohro signifie bon, excellent. Guitare de grande taille, au dos bombé, munie au centre de la table d’harmonie d’un résonateur métallique. Sa sonorité évoque celle de la guitare hawaïenne. Produit par la National Guitare Co à partir de 1929, le dobro reste l’une des plus spectaculaires tentatives pour accroître le volume sonore de la guitare avant l’amplification électrique. Particulièrement populaire chez les bluesmen, son utilisation la plus célèbre dans le cadre du jazz reste le solo fameux d’Eddie Durham au sein de l’orchestre de Jimmy Lunceford dans Hillin’ The Bottle (1935).

DOCKERY Du nom de son propriétaire Will Dockery (1865-1936), célèbre plantation du Delta, de quelque 100 km2, entre Cleveland et Ruleville, à huit miles au sud-ouest de Drew dans le comté de Sunflower, Mississippi. Charlie Patton y travailla jusqu’en 1929: « They run me from Will Dockery’s Willie Brown I want your job — Buddy*, what’s the matter? I went out an’ told Papa Charley “I don’t want you bangin'* round on my job no more” » 34 Blues, Charlie Patton (1934).

DOCTOR Terme d’affection pour s’adresser à un ami. 164. Surnom du chanteur Peter Joe « Doctor » Clayton (1907-1947) et du polyinstru- mentiste Isaiah « Doctor » Ross (1925) en raison de son goût immodéré pour les livres de médecine : Dr Ross Boogie, Dr Ross (1951). 165. Pseudonyme du pianiste et chanteur Sunnyland Slim (1907) alias « Doctor Clayton’s Buddy » lors de ses premiers enregistrements en 1947. 166. Doc. Pour doctor, surnom du trompettiste Adolphus Anthony « Doc » Cheatham (1905). ► DOCTOR SHOW. Syn. de medicine show. DOCTOR THOMAS. Syn. d’« oncle Tom ». en particulier s’il s’agit d’un intellectuel. ► ROOT DOCTOR, GOOFER DOCTOR, TWO HEADED (FACED) DOCTOR. Sorcier, guérisseur, jeteur de sorts (voir root). ► SNAKE DOCTOR. (D Libellule (réputée pour guérir des morsures de serpent) : « I’m a snake doctor, Everybody’s tryin’ to find out my name And when I fly by easy mama I’m gonna fly in long, long distance land » Snake Doctor Blues, Javdee Short (1932). (D Par extension, sorcier, guérisseur : « I know many of you men are wondering What the snake doctor man got in his hand* He’s got roots and herbs, Steals a woman, man, everywhere he land » Snake Doctor Blues, Jaydee Short (1932).

DOE Biche, lapine. Surnom du blues shouter Jimmy Rushing ( 1903-1972) : « J’étais là, un matin, en train de bavarder avec Crip quand il me dit : “Doe et ces vieux Blue Devils reviennent ce matin. Tu veux les attendre? — Et comment! dis-je. Je veux aller à la breakfast* dancer » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. Et du chanteur Ernest Kador alias Ernie K. Doe (1936).

DOG Chien. 167. Celui qui est traité comme un chien, maltraité, trompé : « I ain’t gonna be your lowdown* dog no more If you don’t want me, baby Why don’t you tell me so Ooh, ooh, ooh, ooh, wee It’s a lowdown shame The way you’re treatin’ poo’ me » / Ain't Gonna Be Your Lowdown Dog No More, Piano Red (1974). 168. Terme de mépris pour femme; pute, catin : * He [Jelly Roll Morton] was well, he was what you call pimping* at the time, -had that diamond in his tooth and a couple of dogs along. » Interview de James P. Johnson, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. 3- Danse : The Dog, Rufus Thomas (1962). • Salopard, saligaud. ► Apocope de yellow dog*. 169. BIG DOG (GUN, NOISE, POTATO...). Grosse • légume, gros bonnet, caïd : « Let me be your little dog Until your big hound come I can do more howlin’ Your big dog ever done » Unnamed Title, Barbecue Bob (1929). 170. DIRTY DOG. Sale type, dragueur, mari infidèle : « My baby used to go for salt [To a friend of mine who lives next door] But I find her He was givin’ her sugar* I’m trustin’ with my baby The dirty dog took her » Can't Trust Your Neighbour, Freddy King (1972). 171. DOG AROUND. Maltraiter (spécialement dans les relations hommes/femmes) : « How many more years I got to let you dog me around Ld as soon I’d rather be dead Sleepin’ six feet in the ground » How Many More Years, Howlin’ Wolf (1951). 172. DOGHOUSE. Niche; contrebasse (années 1940): « Pensez donc ! Dans cet orchestre, il y avait des musiciens aussi fameux que Baby Dodds (batterie), George Foster à la niche (c’est ainsi qu’on appelait la contrebasse), Joe Howard (premier cornet) et un musicien excellent doué d’une très belle sonorité... » Louis Armstrong, Ma Nouvelle-Orléans. 173. DOGHOUSE (TO BE IN A). Etre en disgrâce : Afternoon in a Doghouse, Eddie « Lockjaw » Davis (1946). 174. DOG LATIN. Syn. de pig latin*. 175. DOGS. Pieds: « Feet’s all right, listen now for ’em dancin’. Give me my box* and let me try ’em again. Told you my feets gonna dance. These are the “Hot Dogs”. I mean red hot. [••J These are not my weary dogs These are the hottest kind of dogs 1 mean they’re steamin’ puppies. Now on my feet’s the Gypsy Hound*. You oughta see me do the Black Bottom* now » Hot Dogs, Blind Lemon Jefferson (1927). 176. DOGTROT. Maison de plain-pied où les pièces sont disposées de part et d’autre d’un couloir central. (Syn. : shotgun house.) ► DOG TUNE. Air de jazz de mauvaise qualité, soupe. ► HOT DOG. Voir hot. • HOUND DOG. Chien de meute. Surnom du bluesman Theodore « Hound Dog » Taylor (1916-1975) : Hound Dog, Hound Dog Taylor (1967). ► SALTY DOG. Voir salty. ► SHORT DOG. Train local, tortillard.

DOGGONE 177. Fichu, foutu, sacré, vachement, sacrement : « Got a pocketful of pencils Can’t even write a doggone line Got a mouthful of gold And I’m on the street Beggin’ for a lousy dime » Plastic Man, Big Joe Turner {ca I960). 178. V. : équivalent populaire de damn, jurer, maudire.

DOLL Voir baby doll.

DON Surnom du saxophoniste Carlos Wesley « Don » Byas (1912-1972) : « And Bird* [Charlie Parker] came in one night and sat in with Don Byas. He blew* Cherokee and everybody just flipped*. That was probably about his first time on the Street*. » Interview de Tony Scott, in Hear Me Talkin' to Ya.

DONEY De l’espagnol dona, demoiselle. Femme de mauvaise réputation : « I don’t want no woman Want every downtown* man she meet She’s a no good doney They shouldn’t allow her on the street » 1 Believe I'll Dust My Broom, Robert Johnson (1936).

DOODLE Griffonner. • Depuis le xvme, organes sexuels masculins : « You ought steal my peaches* Slip in my doodla at night You wanta steal my peaches Tip in my bed late at night » Peach Tree Blues, Gulfport « Peach Tree » Pavne (1923). Ou féminins : « Do the doodle doodle do Oh doing the doodle doodle do I like to take my straw*

Go play in that doodle hole » Doodle Hole Blues, Charley Lincoln (1930). ► Baiser: « I knowed a little girl Who was very very nice She got to doodle once And she want it twice » Doodle Hole Blues, Charley Lincoln (1930). ► En jazz, jouer décontracté, sans manières : « Bix [Beiderbecke] looked away and then I heard his voice. “Don’t worry, boy. You’re... Ah, hell*... — Get your bom*. Let’s doodle a little.” » Interview de Hoagy Carmichael, in Hear Me Talkin' to Ya de Nat Shapiro et Nat Hentoff. Doodlin', Horace Silver (1954). DOOLEYVILLE 179. Quartier sud de Jackson, Mississippi : « I don’t want no woman I swear I will speak to woman live on Meal When I get ready for meet some lover I’m going down in Dooleyville » Dooleyville Blues, B(X)gie Bill Webb (1966). 180. Arnaque.

DOPE Drogue : « Well, I went to the doctor See could he cure this habit* from me He looked at me and shook his head And said that dope is killing me » Can't Kick This Habit, Champion Jack Dupree (1958). ► DOPE HEAD. Drogué : Dope Head Blues, Victoria Spivey (1927).

DOT Terme utilisé dans le Sud pour désigner les Noirs : « Le shérif du Kentucky était au moins honnête. Un vrai raciste bon teint proclame : “Je n’aime pas vivre à une époque où les nègres font la loi”, les dots, comme ils les appellent dans le Sud. » Billie Iloliday et William Dufty, Lady Sings The Blues We Dots, Art Blakey (1954). • Dots , les notes. Par extension, toute musique écrite. • Pseudonyme du bluesman « Polka Dot Slim » alias Monroe Vincent (1919-1982).

DOUBLE-EYED (Headed, sighted) Qui a des dons de double vue, devin : Double-Eyed Whammy, Freddy King (1966). Voir root* doctor.

DOUBLE-TALK Double langage. Discours en apparence sensé, mais au fond incohérent : Double Talk, Fats Navarro (1948).

DOUBLE-TROUBLE Litt. : doubles ennuis. Ennuis, emmerde- ments : « I lay awake at night Can’t sleep, just so troubled It’s hard to keep a job Laid off, having double trouble » Double Trouble, Otis Rush (1958).

DOUBLE-CROSS Tromper : « It says : she’ll two-time* you Like she double-crossed me » A Married Man’s a Fool, Butterbeans (1924).

DOUGH Pâte. Fric, galette : « There ain’t but three men Who can really spend my dough There’s the rent man, the grocery man And the man that owns the clothing store » Three Men, Alice Moore (1936). ► DOUGH ROLLER. Celui (celle) qui amène le fric au foyer (l’un des sens de roll est travailler) ; le (la) partenaire : « Did you ever wake up And find your dough roller gone And you wring your hands And you cry the whole day long » Roll and Tumble Blues, Hambone Willie Newbern (1929).

DOUGHNUTS Organes sexuels : « His jelly* roll sure is nice and hot Never fails to touch the spot I can’t do without my kitchen man* LJ When I eat his doughnuts tall I leave him just the hole Anytime he wants them He certainly can use my sugar* pole » Kitchen Man, Bessie Smith (1929).

DOWN En bas, à terre. ► Abattu, déprimé : « Feel like a broke down engine Mama ain’t got no driviri wheel* If you been down and lonesome You know just how Willie McTell feels » Broke Down Engine, Blind Willie McTell (1933). ► Sans inspiration, mauvais. ► Par inversion de sens : au courant, dans le coup; ou franc, authentique. 181. DOWN AND OUT. Fauché, raide, dans la dèche : « Honey, ay ay I’m all out and down Honey ay ay I’m broke*, babe, an I ain’t got a dime Every good man gets in hard* luck sometimes Don’t they, baby? » I’m All Out and Down, Leadbelly (1935). 182. DOWNHOME. Franc, sincère, authentique, qui évoque l’atmosphère du Sud (années 50): « The word downhome, it mean back to the root, which mean where it all start at, this music, the blues and the church music... » Interview de Jo Jo Williams, cité par Jeff Todd Titton dans Early Downhome Blues. 183. DOWN ON (ONE’S) LUCK. Avoir la poisse, la guigne : « Most of the P.I’s* were gamblers and pianists. The reason so many of them were pianists was because whenever they were down on their luck, they would always get a job and be close to their girls — play while the girls worked. Some of the P. I’s would wear diamonds the size of dimes*. » Interview de Clarence Williams, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Ilentoff. 184. DOWN THE LINE. AU sud de la Mason*- Dixon line. « Leaving Goin’ back down the line You ain’t treat me right, baby Goin’ to Tennessee Tennessee here I come Tennessee, yes, my home » Leaving, John Lee Hooker (1963). 185. DOWN TO EARTH. Terre à terre, les pieds sur terre, réaliste; par extension, vrai, authentique. 186. DOWN WITH SOMETHING. Comprendre, piger, entraver. 187. DOWN YONDER. Le Sud, les Etats du Sud : Way Down Yonder in New Orleans, Kansas City Six (1938). 188. GET DOWN. Voir ce terme.

DOWNTOWN 1. Le centre-ville ou le centre des affaires : « Honey, that day that you go downtown I had a feelin’ you were putting* me doivn » There’ll Be a Day, Jimmy Reed (1963). ► Le quartier catholique, latin de la bourgeoisie créole de La Nouvelle-Orléans, à l’est de Canal Street, par opposition à Uptown, le quartier américain, protestant, des prolétaires noirs. (Voir aussi Story- ville.)

DOZENS Voir dirty* dozens. DRAG Traîner. 189. Danse ou dancing (années 20-30): Vine Street Drag, Carl Martin (ca 1930). 190. Raseur, casse-pieds ; ou cancre : « Chuck* Berry would have been bigger if he’d had a regular band*. See, he’d have the house band* backing him. They’d be good musicians, studio musicians, but they’d actually be downing the guy they were playing for. They say, “Chuck Berry7? It’s a drag. Just play anything”. » Interview de Chuck Connor, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard. 191. Travesti (syn. : drag queen). 192. Surnom de la 125e rue à New York : The Beat (The Drag), Cozy Cole (1944). 193. Humilier, déranger ; bouleverser, troubler. ► SLOW DRAG. Danse (ca 1900) dans laquelle les danseurs frottaient les pieds (shuffle) sur le sol : Give Me That Old Slow Drag, Trixie Smith (1922). • Surnom du contrebassiste Alcide « Slow Drag » Pavageau (1888-1969).

DREAM BOOK Litt. : livre des rêves. Opuscule publié par les organisateurs des loteries clandestines (voir numbers), destiné à guider les parieurs dans leurs choix en leur fournissant des listes de nombres qui sont supposés entretenir d’étroites relations avec leur expérience, leur histoire et leurs rêves : « I’m gonna buy me a dream book See what my dreamin’ means I dreamed I was mixin’ sweet milk With my baby’s cream » Dream Book Blues, Tommy Griffin (1936). Parmi les plus populaires, Aunt Della’s Dream Book, Aunt Sally’s Policy Players Dream Book, The Gypsy Witch Book et The Three Witches Dream Book. Voir numbers : number’s book, 4-11-44 et 3-6-9 (combinaisons les plus populaires). ► DREAM BAIT. Type super.

DRIFTER Mendiant, clodo, chemineau, vagabond : « Weel I’m just a drifter I’ve been driftin’ both night and day Since you put* me out I don’t have no place to stay » L’ve Got to Go, L.C. Robinson (1971). 194. Surnom du bluesman Lowell Fulson (1921). 195. DRIFTIN’ SLIM. Pseudonyme du chanteur guitariste harmoniciste Elmon Mickel (1919-1977).

DRINKING GOURD Calebasse, gourde. La Grande Ourse qui, comme dans le spiritual Follow The Drinkin’ Gourd, servait de point de repère aux esclaves fuyards en route vers le Nord (voir Underground* Railroad) : « When the sun comes back And the first quail calls Follow the drinkin’ gourd For the old man is waitin’ for To carry you to freedom If you follow the drinkin’ gourd »

DRIVE Conduire. • Faire l’amour : « Baby drives so easy I can’t turn him down » Me and My Chauffeur Blues, Memphis Minnie (1941). • Faculté de certains musiciens a pousser l’orchestre : «What made Louis [Armstrong] upset Chicago so? His execution for one thing, and his ideas, his drive. Well, they didn't call it drive, they call it “attack” at that time. Yes, that’s what it was, man. They got crazy for his feeling. » Interview de Buster Bailey, in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. • Elément du titre de certains morceaux rapides. ► DRIVER. Conducteur. Métaphore fréquemment utilisée pour amant : « Baby you got too many drivers Oh Lord, when you ain’t got but just one wheel Yes you know, things looks mighty* funny when two mens Oh Lord, are drivin’* your little automobile* » Too Many Drivers, Lightnin’ Hopkins (1964). k DRIVING WHEEL. Volant. Celui qui.« conduit » le ménage, qui fournit les moyens de subsistance à sa famille : « I give her everything she need I’m her drivin’ wheel » Driviri Wheel, Junior Parker (1961).

DRUMMER Batteur : « By far, the most important thing that happened to me musically during this period (1938-39) was my friendship and association with the great drummer Kenny Clarke, who, as you can see, was hardly considered great by certain people in those days. Kenny was modifying the concept of rhythm in jazz, making it more fluid thing, and changing the entire role of the drummer, from just a man who kept time for dancers to a true accompanist who provided accents for soloists and constant inspiration to the jazz band as a whole. » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop.

DRUMMOND Norn d’un train : « Easy mama Don’t fade away I’m going where the Drummond Cross the Yellow* Dog » Yellow Dog Blues, Sam Collins (1927).

DRUMS Batterie : Drum Stomp, Lionel Hampton (1937/ 38). Le seul instrument créé par les musiciens de jazz. Telle que nous la connaissons aujourd’hui, la batterie résulte de la réunion de plusieurs instruments de percussion, grosse caisse et caisse claire principalement; si l’on en croit les souvenirs du batteur Freddie Kohlman, c’est Louis Cottrell (ca 1875-1927) qui aurait été à l’origine de cette révolution : «Des gars m’ont raconté que, jusque dans les années 20, certains orchestres avaient deux batteurs — un qui jouait de la caisse claire et l’autre de la grosse caisse. Chris Kelly, un trompettiste formidable, avait toujours deux batteurs... » Interview de Freddie Kohlman par Valérie Wilmer, in Jazz Magazine n° 229, janvier 1975. Durant la période esclavagiste, et à l’exception notable de la Louisiane, les instruments de percussion furent interdits à cause des possibilités de communication qu’ils offraient : «Les planteurs puritains ne reconnaissaient à leurs esclaves aucune dignité humaine, ils tenaient pour condamnable tout ce qui leur rappelait leur passé africain et considéraient comme leur premier devoir de les améliorer. [...] Faisant montre en cela d’un remarquable flair, ils comprirent d’instinct qu’en proscrivant l’usage des tambours on frappait au cœur la religion africaine. Sans tambours, il devenait impossible d’appeler les Orichas; une fois les ancêtres réduits au silence, le champ devenait libre pour le travail des catéchistes. » Janheinz Jahn, Muntu, l'homme africain et la culture néo-africaine. Si le jazz a très tôt reconnu la batterie comme instrument soliste, le blues ne l’a jamais considéré comme tel, et le seul — ou l’un des très rares — solo de batterie relevé sur un disque de blues est celui de Fred Below dans Off The Wall gravé par en 1953.

DRY Sec. On désigne ainsi les Etats dans lesquels la vente et la consommation d’alcool étaient interdites durant la prohibition : « Ever since that state went dry The bootleggers* have to stand trial They gonna keep out the way of the sheriff If they can » Bootlegger's Blues, Mississippi Sheiks, vcl par Walter Vincson (1930). La prohibition prit effet, conformément aux dispositions du XVIIIe amendement, le 1er janvier 1920. Mais avant cette date, quatre Américains sur cinq vivaient déjà dans des Etats « secs » ; le Maine avait été le premier dès 1846, suivi par le Kansas et le Dakota du Nord en 1903. Elle fut supprimée par le XXIe amendement en 1933; elle subsista jusqu’en 1966 dans l’Okla- homa et le Mississippi, les deux derniers dry states. ► DRY GOODS. Les habits, les sapes : When The Wind Makes Connexion with Your Dry Goods, Martha Copeland (1927). ► DRY LONG SO. ® Sans cause, sans raison. ® Destin (années 40) ; adj : inévitable. « Let me tell you people Just before I go These hard times Will kill you juste dry long so » Hardtime Killing Floor Blues, Skip James (1931). « Winter time coming It’s going to be so You can’t make the winter, babe Just dry long so You better come on in my kitchen ’cause it’s going to be raining outdoors » Come on in My Kitchen, Robert Johnson (1936). ► SHAVE’EM DRY. Voir ce terme.

DRY BONES VALLEY (ou Sermon) Vallée des Larmes. Métaphore d’origine biblique désignant la communauté noire, avec ses divisions, ses luttes intestines et ses tiraillements (par opposition au Paradis et à ses jardins) : Dry Bones in The Valley, Joe McCoy (1935). « Looord gonna open your graves some of these days And we is gonna walk out of our graves Just like Ezekiel did with the dry bones in the valley one day Amen » The Hand of The Lord Was Upon Me (and I Went out in The Spirit), Rev. Jim Beal (1929). Un dry bones sermon est un sermon où le preacher* appelle ses ouailles à la solidarité, à l’unification. L’utilisation du terme est le signe qu’il va aborder un thème vital pour la communauté.

DUDE Mec à la redresse, qui, selon les termes de Geneviève Fabre, « s’oriente vers un double objet : la quête des moyens matériels indispensables à l’existence, la quête du plaisir » : « I had a friend named Campbell He used to steal and gamble He made his living cheating all the while ; He played a game they call euchre*, Pinochle and poker, He thought he was the smartest dude in town » He's in The Jailhouse Now, Jim Jackson (1928).

DUDLOW De la ville de D’Lo, Mississippi. Dudlow ou Dudlow Joe : terme désignant la musique de boogie-woogie avant qu’elle ne s’impose sous ce nom à partir de 1928 avec le succès du Pinetop’sBoogie Woogie de Clarence « Pinetop » Smith : « I was playing what you call boogie* woogie ever since I was twelve or fourteen years old but then we called it Dudlow Joe. » Interview de Little Brother Montgomery cité par Paul Oliver dans Conversation with The Blues. ► Surnom du pianiste Robert « Dudlow » Taylor, l’un des piliers du King* Biscuit Show.

DUES (Pay dues) 196. Payer son dû, son écot. 197. Souffrir, encaisser : « Well I’ve been around a long time I really have paid my dues When I first got the blues They* brought me over on a ship Men were standing over me And a lot more with this whip And everybody wanna know Why I sing the blues » Why I Sing The Blues, B.B. King (1969).

DUKE Due. ► Surnom du pianiste Irving Sidney « Duke » Jordan (1922) et du pianiste et chef d’orchestre Edward Kennedy « Duke » Ellington (1899-1974) : « To the jazz of old Duke and old Calloway We can love, kiss and dance ’til the break of day I don’t care* if it’s sleeting, raining or snowing We’ll be ready when that Harlem* fun begins » When I Take My Vacation in Harlem, Tampa Red (1935). Dukes : les poings, d’où to duke : jouer les durs, se battre.

DULCEOLA Sorte de dulcimer inventé par le chanteur de gospel blues Washington Philips et sonnant comme une cithare.

DUNCAN Truand, héros de la ballade Duncan and Brady dans laquelle il tue le shérif Brady : « Duncan was tending the bar In walked Brady* with a shining star And Brady said : “Duncan you’re under arrest” And Duncan shot a hole in Brady’s breast » Duncan and Brady, Leadbellv (chant cité par Alan Lomax et Moses Asch dans The Leadbelly Song Book).

DUPREE Personnage masculin de la ballade Betty and Dupree. Dupree, poussé au vol par Betty, se retrouve en prison et il est abandonné par Betty : E

EAGLE Aigle (symbole des Etats-Unis). Ancienne pièce d’or de dix dollars ainsi nommée à cause de l’aigle figurant sur l’une de ses faces : « I know this eagle’s on a dollar Other side “In God we trust” Well a woman loves a man But I know this dollar’s first » Hurry Blues, Little Hat Jones (1929). ► BALD EAGLE. Aigle chauve. ® Surnom du train reliant, si l’on en croit Bukka White, Kansas City à Los Angeles : Bald Eagle Blues, Willie G.I. Blackwell (1941). ® Nom d’un bateau à roues du Mississippi : « Those calliope concerts from the riverboats J.S. and Bald Eagle started in the first couple years after the boats started using music around 1916 and 1917; I'd say. » Interview de Danny Barker, in Hear Me Talkin ’ to Ya de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► EAGLE ROCK. ® Nom d’une danse du début du siècle : « My first job at a juke* in Holton, Louisiana [...] On Saturdays we used to start at nine o’clock and play all night long. They’d dance the eagle rock and the Grizzly Bear. » Interview de Little Brother Montgomery, cité par Karl Gert Zur Heide dans Deep South Piano. ® Souvent utilisé, avec des connotations sexuelles, dans le sens de rock : « I’m gonna tell you woman Just how to keep your man at home You got to eagle rock him Whilst he’s saddlin'* on » Got a Girl in Ferriday, One in Greenwood Town, Cat Iron (1958). ► WHEN THE EAGLE FLIES. Le jour de paye : « The eagle flies on friday* And Saturday I go out to play Sunday I go to church Then I kneel down and pray » Call It Stormy Monday, T. Bone Walker (1947).

EAR Oreille. ► EAR MAN. Musicien qui ne lit pas la musique. ► EAR MUSIC. Musique improvisée.

EASE (someone) IN 198. Dans l’argot des prisons, mettre à l’ombre, au frais : « Don’t ease, don’t you ease Ah, don’t you ease me in It’s all night long Cunningham, don’t ease me in » Don't Ease Me in, Henry Ragtime Thomas (1928). 199. Entrer ; et, au sens figuré, entrer dans le jeu, s’y mettre : « Oh I’m talkin’ ’bout you Les’ you keep on But I don’t play tbe dozens* Don’t ease me in You ’se a dirty motherfucker* [...] You dirty motherfucker You gonna see it again You gonna do like Don’t you ease me in 1 don’t play the dozens Don’t you ease me in You ’se a dirty motherfucker You gonna see it again 77>e Dirty Dozens, Lightnin’ Hopkins ica I960).

EASTMAN Vient probablement à'easy man (voir easy), déformé en easeman, eastman. Terme aujourd’hui vieilli et désignant, dans les communautés rurales, un homme vivant aux crochets d’une femme ou de diverses combines {bustier) : « I left Memphis to spread the news Memphis women don’t wear no shoes Had it written on the back of my shirt “Nach’ al* [natural] bom eastman don’t have to work Don’t have to work Nach’ al born eastman don’t have to work” » Kassie Jones, Furry Lewis (1928).

EASY A l’aise, en douceur. Terme à forte connotation sexuelle, faisant référence au rythme du coït. That Free and Easy Papa O’Mine, Sara Martin (1923). ► EASY RIDER. ® Dans la bouche d’un bluesman, au début du siècle guitare (facile à transporter). (§) Cheval (facile à monter) : « What is an easy rider? It’d be a boss* or anything... » Interview de Willie B. Thomas, cité par Harry Oster in Living Country' Blues. ® Femme (ou homme) avec qui il est agréable de faire l’amour : «Will you tell me Where my easy rider gone ’cause that train Carry my baby so far from home » Easy' Rider, Willie B. Thomas (1961). ► EASY STREET (LIVE, BE ON). Se la couler douce, avoir la belle vie : « When 1 had her She lived on easy street Now she’s begging Every man she meets » You Got to Move, Joe McCoy (1934). ► SLOW AND EASY. Expression évoquant le rythme « lent et aisé » du coït : « Don’t care* where he is Don’t care what he does All my love is his He’s my only one All, my slow and easy man » Slow and Easy' Man, Bessie Smith (1928).

EBONY Ebène. Noir. Revue écrite et jouée pour des Noirs par des Noirs : Ebony Rhapsody, Duke Ellington (1934). ► EBONY RECORDS. Voir race* records. ► EGG HEAD Crâne d’œuf, terme sarcastique pour « intellectuel » : Egg Head, Cecil Payne (1949).

EIGHT ► EIGHTS. « Huit huit » : pour des solistes, improviser à tour de rôle sur des séquences de huit mesures : « Let’s play some I wanna hear. You [Benny Carter] play, man. And then we played fours* and eights. That one night we had a ball* there, boy. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► EIGHTY EIGHT (88). Piano (à cause des 88 touches de l’instrument) : « T Bone Walker, my eighty eight man » John Lee Hooker, présentant son pianiste T Bone Walker, Let’s Make It Baby' (1962). • Surnom du pianiste Lawrence Keyes : «J’ai toujours été surnommé “88”. Je n’ai jamais beaucoup aimé ce surnom, mais on me connaît dans le métier sous ce nom; j’accepte donc que les affiches annoncent 88 Keyes. Bird*, avec son sens inné de la propriété, m’a toujours appelé Lawrence au lieu de 88 ou de Keyes. » Interview de Lawrence Keyes par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker. ► EIGHT BALL. Noir (la huitième boule de billard américain est noire), et tout spécialement si de carnation foncée : Eight Bail Blues, Roosevelt Sykes (1940). ► EIGHT BALL (TO BE BEHIND THE). Etre en mauvaise posture : Em Behind The Eight Ball, Little Bill Gaither (1941). ► EIGHT TO THE BAR. La musique de boogie- woogie (années 30 et 40): Beat Me Daddy, Eight to The Bar, Big Joe Duskin (1977).

EIGHTEENTH STREET 18e rue. Rue du quartier chaud de Kansas City, Missouri : 18th Street Strut, Bennie Moten (1925). « Nous avons continué dans la direction opposée au centre jusqu’à l’intersection de la 18erue, et là, le choc! Tout dans cette rue était éclairé comme avec des projecteurs. C’était un des spectacles les plus fantastiques que j’eusse jamais vus de ma vie. [...] Des deux côtés de la rue, il y avait, sur la longueur de plusieurs blocs, des établissements illuminés et en pleine activité. Un des premiers, je me souviens, était le Yellow Front Saloon, et un autre s’appelait le Sawdust Trail. Et partout où on allait, il y avait au moins un pianiste, quand ce n’était pas un petit orchestre ou, peut-être, une jam-session* en cours. [...] Il nous fallut d’ailleurs un peu de temps pour découvrir ces boîtes, parce que c’était la prohibition, et il y avait partout des speakeasies*. des boîtes clandestines et des clubs privés, appelés aussi des clubs à clé, et on ne pouvait pas entrer dans ces établissements si Ton ne connaissait pas quelqu’un. Et justement, ce que nous avons trouvé fantastique à Kansas City, c’est que toutes les boîtes de cette rue étaient grandes ouvertes, avec, devant les portes, des ambulances et des voitures de police à sirène prêtes à démarrer. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. ELEVEN Un des tirages gagnants, avec le 7, aux craps* (jeux de dés) : Seven Eleven (Dice Please Won't Fail Me), Big Bill Broonzy (1939). ► ELEVEN LIGHT CITY. Litt. : ville aux onze réverbères. (D Selon Little Brother Montgomery, surnom de la ville de Kokomo, Indiana : « Said I told you, mama, When you first fell across my bed You been drinkin’ your bad whiskey And talkin’ all out your head Cryin’ ohhhhh, baby, don’t you want to go Back to that eleven light city To sweet old Kokomo* » Original Old Kokomo Blues, Kokomo Arnold (1934). ® Par dérision, n’importe quelle petite ville possédant moins de onze réverbères, trou paumé : « You can talk about South Park Lenox avenue and Vine* But that eleven light city Is the town of mine » Rampart and Gravier Blues, Harlem Hamfats (1937). ► ELEVEN TWENTY NINE (11-29). Condamnation à onze mois et vingt-neuf jours, soit un an moins un jour : « Then I heard the jailer say : “Hello prisoners all fail in line I'm also talkin’ about that long-chain* woman That got eleven twenty nine” » Eleven Twenty Nine, Leroy Carr (1934). En prononçant une sentence tout juste inférieure à un an de prison, la justice permettait à l’administration pénitentiaire de faire l’économie du costume, du billet de train et des quelques dollars auxquels le détenu libéré aurait eu droit pour une condamnation à un an ou plus.

ELGIN Célèbre marque de montres dont les usines sont à Chicago : * Got Elgin movement, automatic works Gonna get some oil to take my neck ’cause she moves it just right Ah make you feel crazy ’cause she moves it just right » She Moves It Just Right, Barbecue Bob (1929).

ELM STREET Rue chaude de Dallas, Texas : « Ah Billiken, these Ellum street woman Don't mean you no good When your back is turned They’re with every man in the neighbourhood » Elm Street Blues, Texas Bill Day (1929). ELMORE JAMES Pseudonyme du guitariste chanteur Elmore Brooks (1918-1963) : Elmore's Contribution to Jazz, Elmore James (1953). ENDMAN Voir minstrel*.

ENGINEER Ingénieur, mécanicien. Selon Robert Springer, le mécanicien et le conducteur {fireman), toujours présentés comme cruels, sont des symboles de la société blanche répressive; en effet, seuls les Blancs avaient accès aux métiers nobles du chemin de fer (le personnel roulant) : « Lord, this mean ole engineer Cruel as he could be Took my man away And throwed the smoke back at me » Weepiri Woman Blues, Ma Rainey (1927). ETHIOPIAN Ethiopien. Noir (terme courant au début du siècle, aujourd’hui obsolète) : « Say God made us ail He made some at night That’s why he didn’t take time To make us all white I’m bound to change my name* I have to paint my face So won’t be kin TQ that Ethiopian race » I Have to Paint My Face, Sam Chatmon (1960). ► ETHIOPIAN OPERA. Sketch présenté dans les minstrel* shows.

EUCHRE Du verbe to euchre : duper, arnaquer, entuber. Nom d’un jeu : « I had a friend named Campbell He used to steal and gamble He made his living cheating all the while ; He played a game they call euchre, Pinochle* and poker, He thought he was the smartest dude* in town » He’s in The Jailhouse Now, Jim Jackson (1928).

EVERY TUB De l’expression « every tub on its own black bottom », chacun pour soi. En jazz, improvisation sans le support d’arrangements : Every Tub, Count Basie (1938).

EVIL ► Mauvais, mal : « When your man comes home evil Tell you are getting old That’s a sure sign he’s got someone else Baking* his jelly* roll » Fogyism, Ida Cox (1928). ► Par inversion de sens, chouette, terrible. ► Celui qui fait le mal, l’amant (vu du côté du mari trompé) : « Yes, if you make it to your house Knock on the front* door Run around to the back You’ll catch him just before he go That’s evil, evil is going on » Evil Is Going on, Howlin’ Wolf (1954).

EYE Œil. ► EYES (TO GOT EYES). En pincer pour (1940 et après) : « She might give your rent free You know she’s got eyes » Chicago House Rent Party, Memphis Slim & Willie Dixon (1959). ► BIG EYES. Expression marquant le désir extrême. Ant. : no eyes, expression marquant l’aversion ou le désaccord : No Eyes Blues, Lester Young (1947). 200. Surnom du clarinettiste Louis Delisle Nelson (1885-1949) : « Ce qu’il [George Baquet] jouait, ce n'était pas réellement de la musique de jazz... Il s’en tenait surtout à la ligne mélodique [...] Il était beaucoup plus classique que “Big Eye” Louis Nelson. Quand Baquet jouait, il n’y avait pas ces sons grincés ou ce large vibrato qui font partie de la musique de ragtime*. » Sidney Bechet, La musique, c’est ma vie. 201. CAT EYE. Surnom donné au trompettiste Wilbur Dorsey «Buck» Clayton (1911) par Lester Young. ► DOUBLE-EYED. Qui a des dons de double vue, devin : Double-Eyed Whammy, Freddy King (1966). ► EVIL EYE. Le mauvais œil. ► SNAKE EYES. AUX dés, double un : « Man, that ain’t no lie* The last thing I remember The house man yelled “Snake eyes” Give me one more drink » Just One More Drink, Amos Milburn (1951).

F

F Voir Four F (4 F). 4 F Blues, Rubberlegs Williams (1945).

F.D.R. (Franklin Delano Roosevelt) Président des Etats-Unis de 1933 à 1945 : « I sure feel bad With tears runnin’ down my face I lost a good friend Was a credit to our race » F.D.R. Blues, Champion Jack Dupree (ca 1945). Initiateur du New Deal, il fut, et il est longtemps resté, particulièrement populaire parmi la population noire comme en témoignent President Roosevelt Blues du Memphis Jug Band (1933), President Roosevelt is Everybody’s Friend du Reverend Gates (1934), Wby I Like Roosevelt des Soul Stirrers (1945) ou les multiples versions de Tell Me Wby You Like Roosevelt (Evangelist Singers, 1945; Reliable Jubilee Singers, 1946; Otis Jackson, 1946): « In the year of 1932, it was hard for me It was tough for you. In the year of 1933, That when God sent a man to settle and freed. Never forget that glorious days When he organized the P.W.A* Some of the officials did reject But Roosevelt had head on his neck Quick to think and on the alert For all the poor people back to work He took poor people out of misery Like God done Jesus on Calvary » Famine in The Land, Otis Jackson (1946). C’est en référence à Roosevelt que Billie Holiday donna son surnom à Lester Young, Prez (president).

FACE 1. Quelqu’un d’inconnu, en particulier s’il est blanc : Facin’ Tbe Face, Ike Quebec (1944). 2. Façon d’interpeller quelqu’un, introduite par le batteur Zutty Singleton qui faisait généralement précéder le terme d’un qualificatif en rapport avec la personnalité de son interlocuteur. • Surnom du bluesman « Baby Face » Leroy Foster (ca 1919-1959) à cause de son visage juvénile, et du batteur Arthur James « Zutty » Singleton (1898-1975) : Drum Face, Zutty Singleton (1951).

FAG (Faggart/faggot/faggoty man) Homosexuel (ca 1930). « And there two things in Harlem* I don’t understand It’s a bulldyking* woman And a faggoty man » Home to Harlem, Claude McKay Harper (1928).

FAIRASEE Peut-être une déformation de fair to see : agréable à regarder. Terme dont on ne trouve la trace que dans le Fairasee Woman de Peetie Wheatstraw (1936); pour les bluesmen interviewés par Paul Garon (in Tbe Devil’s Son-in- Law), le terme est inconnu : « My baby swears She don’t love nobody but me So I’m gonna take her Ooh well, and make her my fairasee [•••] When you go to Memphis You should stop by (church’s?) hall And watch the fairasee women Ooh well, well, cock* it on the wall Now my woman is from Memphis And she sure is good to me So I’m gonna keep her Ooh well, and make my fairasee »

FAIRO Voir faro.

FAIRY Homosexuel efféminé : Fairy Blues, Peg Leg Howell (1928).

FAKE Improviser un accompagnement : « When I became the age of fifteen years old, I was good to go and I really have been going ever since. Now, for faking and playing by head*, I was hard to beat. Any band* I played with, it was all right with me by music or head. » Interview de Drink Johnson in Hear Me Talkin'to Ya de Nat Shapiro et Nat Hentoff. D’où faker -, musicien qui ne sait pas déchiffrer et qui joue d’oreille. Syn. : earman.

FALL OFF THE LOG Danse pratiquée dans les bouges (barrelhouses) : « Takes a long-tailed monkey Short-tailed dog Do that dance they called “Failin’ off a log” Don’t you think I know? » Mama, Don't You Think. I Know, Papa Charlie Jack- son (1925).

FANFOOT Femme de mauvaise vie : « Now that type of barrelhouse* or nogood woman is called a sandfoot* or fanfoot. That’s the type of woman that don’t have no special man and don’t care whether she see him again since she can get what she got. » Interview de Skip James cité par Stephan Grossman, in Delta Blues Guitar. Fan Foot Woman, Blind Blake (1929).

FANGS Talent d’un musicien, ses doigts, ses lèvres.

FANNIN STREET Rue chaude de Shreveport, Louisiane : « My mama told me My sister too “Women on Fannin Street, son Thery gonna be the death of you” Ooh ooh ooh, I didn’t care* » Fannin Street, Leadbellv (1939).

FANNY ► Fesses, cul ou chatte. ► Dans le Mississippi, petite amie : Fat Fanny Stomp, Jim Clarke (1930).

FARISH STREET Rue « chaude » de Jackson, Mississippi : Farish Street Jive, Little Brother Montgomery (I960).

FARO (Faror, Fairo) Afr. Du Kanuri fero, fille; peut-être renforcé par l’écossais fere (camarade, compagne, conjoint) et par fair brown (beau brun, belle brune). Petite amie : « Who that yonder Cornin’ up the road Cryin’ it look like my faro But she walk too slow » Dark Road Blues, Willie Lofton (1935). « I went to the depot Looked up on the board I looked all over “How long has this east-bound train been gone?” It done taken your fairo, Blowed its smoke on you, Lord, Lordy Lord » Cool Drink, of Water Blues, Tommy Johnson (1928).

FAST FINGERS Surnom du guitariste et chanteur James Dawkins (1936).

FAST LIFE Vie rapide. Vie « de barreau de chaise *, vie trépidante : « Mmnim fast life is killing me Seems as though fast life won’t let me be Seems like fast life has followed me all my days Seems like fast life is goin’ to follow me to my grave I would rather drink muddy water Sleep right in a hollow log » I'd Rather Drink Muddy Water, Eddie Miller (1936). ► FAST LIFE MAN (OU WOMAN). Quelqu’un qui brûle la vie par les deux bouts : « You may see a fast life woman sittin’ ’round She be sittin’ round on a whisky Yes you know she’ll be sittin’ smilin' ’cause she knows Some man gonna buy her half a pack Take* it easy, fast life woman ’cause you ain’t goin’ live always Easy with your future With your, fast life way of goin’ Whisky’ may carry you to your grave » Fast Life Woman, Lightnin’ Hopkins (ca 1948).

FAST WESTERN Boogie-woogie : « Les vieux chanteurs de blues l'appelaient [le boogie-woogie] le piano “western" parce qu’on l’avait joué d’abord dans les camps de mineurs et de forestiers de l’Ouest et du Middle West. » Leroi Jones, Le Peuple du blues. Syn. : Fast Texas.

FAT GIRL Fille grosse. ► Surnom du trompettiste Theodore « Fats » Navarro (1923-1950) : « I met Fat Girl when he was with Billy Eckstine. He was a fat, lovable character, playing the most beautiful bom*. [...] They called him Fat Girl because he was sort of a cherub, big fat jaws and a big stomach, and he was so young in his early twenties. » Interview de Carmen McRae, in Hear Me Talkin' to Ya de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

FAT HEAD Stupide, couillon (généralement avec une connotation affectueuse). ► Surnom du saxophoniste David Newman (1933). ►

FAT MOUTH Voir mouth.

FATHA Déformation de father : père. Surnom du pianiste et chef d’orchestre Earl Kenneth Hines (1903-1983) : Life with Fatha, Earl Hines (1944).

FATHER OF THE WATERS «Père des eaux», le Mississippi (métaphore d’origine indienne) : « Want to go where the Father of the Waters And all of his daughters Like the human stream flow leisurely ’long » Way Down South Where The Blues Began, W.C. Handy (1932). Notons par ailleurs que « Mississippi » vient du chippewa Mee-Zee-See-Bee ; Chateaubriand appelait d’ailleurs les Indiens de ses rives les Meschacebéens.

FATS 202. Jazzman. 203. Gros, obèse (dans l’argot des homosexuels). • Surnom des pianistes Walter « Fats » Pichon (ca 1905-1967), Thomas « Fats » Waller (1904-1943), Antoine « Fats » Domino (1928) et du trompettiste Theodore « Fats » Navarro (1923-1950) : Blues for Fats, James P. Johnson (1943) (en l’honneur de Fats Waller).

FATTENING FROGS FOR SNAKES Voir snake.

FAUBUS Orval Gouverneur de l’Arkansas, qui, le 24 septembre 1957, dépêcha la Garde Nationale à la Central High School de Little Rock pour empêcher l’intégration de neuf enfants noirs escortés par les troupes fédérales envoyées par le président Eisenhower. Cet épisode, significatif des résistances au processus de déségrégation enclenché par la suppression de la doctrine « séparés mais égaux» le 17mai 1954 (voir Jzm* Crow Laws), inspira à Charlie Mingus ses célèbres Fables of Faubus (1959) : « — Name me someone ridiculous — Governor Faubus — Why is sick and ridiculous — He won’t permit integrated schools — Then he is a fool. Boo! Nazi fascist supremists. Boo ! Ku* Klux Klan — Name me a handful that’s ridiculous — Faubus, Rockfeller, Eisenhower — Why they* are so sick and ridiculous — Two four six eight. They brainwash and teach you hate » — FEED Nourrir. Dans le jargon musical, fournir un accompagnement à un soliste : Feediri The Bean, Count Basie (1941).

FELLOW (Fella) Compagnon, ami, pote : « Sometimes I wonder Why don’t you write to me? If I been a bad fellow I didn’t intend to be » Prisoner Bound, Frank Busby (1937).

FESS L’un des surnoms de Roy Byrd alias « Professor Longhair » : « Now Huey Smith heard Fess and he liked what he heard and tried to copy him but he couldn’t because it was so unorthodox so he came up with another kind of thing. » Interview d’Alvin Red Tyler, cité par John Broven in Walking to New Orleans.

FIFTY SECOND STREET (52th Street) Haut lieu du jazz dans les années 30 à New York ; elle était alors connue sous les noms de The Street* ou de Swing* Street : « Well go tell all the people Yes, you’d better spread the news around Well fifty second street is hotter* And Broadway is burning down » Broadway's on Fire, Broadway Bill Cook (1950).

FILTHY Crasseux, dégoûtant, obscène, pourri. • Surnom donné au pianiste Fats Waller (1904-1943) par James P. Johnson et Willie Smith The Lion : « Jimmie [James P. Johnson] gave me the title [« The Lion »] because of my spunk and enterprise. “The Lion” named him “The Brute”. Later we gave Fats Waller the name “Filthy”. » Interview de Willie * The Lion * Smith, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

FINE AND MELLOW Voir mellow.

FINGER POPPING ► Claquement de doigts pour marquer la mesure ; terme plus utilisé par les Blancs que par les Noirs bien que Hank Ballard ait fait un tube avec Finger Popping Time en 1952 : « Hey now It’s finger pop, poppin’ time I feel so good And that’s a real good sign » ► Auditeur particulièrement passionné.

FINGERPICKING Technique de guitare avec accompagnement de basses jouées avec le pouce, tandis que l’index et le majeur brodent une ligne mélodique. Elle s’oppose en cela au flat* picking (ou jeu note à note). Des bluesmen comme Blind Blake, Blind Gary Davis, Skip James ou Lightnin’ Hopkins en sont d’excellents praticiens : Pickin' The String, Jesse Fuller (1964).

FIRE Renvoyer quelqu’un, le foutre à la porte : « Les [Hite] fired the whole band*, and then hired back the men he wanted. Bandleaders used to do it like that, and it’s a good idea. You say, “I’m breaking up my band, everybody’s fired”, and then say, “I want you, you and you in my new band”. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

FIREMAN Dans le langage des cheminots, chauffeur d’une locomotive à vapeur (voir aussi engineer et Casey Jones*). Symbole, selon Robert Springer, de l’oppression du peuple noir par la société blanche : « Mean ole fireman Cruel ole engineer* You took my man away And left his mama standin’ here » Chicago Bound Blues, Bessie Smith (1923).

FISH Poisson. ► Femme : Fish Bait, Warren Lucky (1955). ► L’odeur du poisson est fréquemment utilisée pour évoquer les odeurs sexuelles : What That's Smell Like Fish, Blind Bov Fuller (1938). 204. FISH IN (ONE’S) POND. Litt. : pêcher dans la mare de quelqu’un. Faire l’amour : « Louise I believe Somebody, baby, is fishing in my pond They catching all the perches Grinding* up the bones » Louise Louise Blues, Johnnie Temple (1936). 205. FISH MARKET. Litt. : marché aux poissons. Maison close, bordel : Fish Market, Roy Eldridge (1944). 206. FISH TAIL. Queue de poisson. Danse : « Baby you strawin’ yo’ mess* now I thought you tol’ me You didn’t know how to do that fishtail You doin’ that Head* Rag Hop now » Head Rag Hop, Romeo Nelson, vcl par Tampa Red & Frankie Jaxon (1929). 207. FISH WALK. Danse populaire du début du siècle.

FISH FRY Fish fry ou Saturday night fish fry : pique- nique où l’on faisait frire du poisson après une partie de pêche ; puis, par extension, le terme devient synonyme de party, réunion amicale : «We had plenty of fish fries, Saturday night fish fries, and I made plenty then. I did pretty* good. See, at that time you could get fish for a nickel ; get a nickel’s worth of fish you get a garbage can full. Two pieces of combread* and all that fish [...] In them days, you could get anything you want for a nickel* [...] So that’s why they had plenty of picnics and plenty of fish fries and we’d go to play for 'em. » Interview de Will Shade cité par Eric Sackheim dans The Blues Line. « Somebody gave a supper and he’d hang a red light outside, so people would know that’s where the supper is at. They used to call it fish fries. When you go there, they got a piano, you go in and you play. You got this moonshine* whiskey and homebrew... » Interview de Walter Davis cité par Karl Gert Zur Heide dans Deep South Piano. « You don’t have to pay the usual admission If you’re a cook or a waiter or a good musician So if you happen to be just passin’ by Stop at the Saturday night fish fry It was rocking* You never seen such scufflin'* and shufflin’* ’til the break of dawn » Saturday Night Fish Fry, Louis Jordan (1949).

FIVE (5) Quintet. Noms des orchestres de Clarence Williams (Blue Five, 1925), Louis Armstrong (Hot Five, 1925), Big Bill Broonzy (Chicago Five, 1942)... ► FIVE CARD STUD. Variante du poker très en vogue parmi les Noirs. • FIVE BY FIVE. Surnom du chanteur James Andrew Rushing (1903-1972) : « I remember the lovable Jimmy Rushing, Mr Five by Five, from when he was singing with Bennie Moten and later with Basie. Unlike the run of blues* sbou- ters, Jimmy could read music, and he could be heard ten blocks away without a microphone... » Interview de Mary Lou Williams, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► FIVES. Nom d’une technique pianistique à l’origine du boogie-woogie (années 30). Memphis Fives, Lee Green (1930).

FIX 208. Embarras, mouise : « Lord, Lord, See what a fix she left me in I ain’t got no home And ain’t got no friends » I'm Throwin' up My Hands, Rev. Gary Davis (1935). ► Mauvais sort. V. : jeter un sort, envoûter : « I’m going in Louisiana I’m gonna get me a mojo* hand I wanna fix my woman So she can have no other man » Mojo Hand, Lightnin’ Hopkins (1962). D’où fixer : sorcier, personne douée de pouvoirs surnaturels. « Oh, baby I’m the fixer I am the fixer I’m the fixer pretty baby I got everything that you need » I’m The Fixer, Willie Mabon (1963). ► Injection d’héroïne. V. : se shooter. ► Pot de vin. V. : soudoyer, corrompre, graisser la patte. ► V. : tuer, flinguer, régler son compte à quelqu’un.

FLAG A RIDE Voir ride.

FLAPPER Femme libérée, sans aucun préjugé (années 20): « I ain’t no Happer Just a darn good gal* Don’t want no sheik Just a real good pal* » Can't Be Bothered with No Sheik, Rosa Henderson (1931).

FLAT Appartement, plat (sans épaisseur). 209. Adj. sans le sou, raide, fauché. 210. Flat ou buffet flat : bar clandestin installé dans un appartement. « There’s a lady in our neighbourhood Who runs a buffet flat And when she gives a party She know’s just where she’s at She give a dance last Friday night That was to last til one But when the time was almost up The fun had just begun » Soft Pedal Blues, Bessie Smith (1925). • FLAT FOOT. Litt. : pied plat. Policier, cogne : Flat Foot Floogie, Slim Gaillard & Slam Stewart (1938). FLAT PICKING. Technique de guitare probablement lancée par Lonnie Johnson, consistant à jouer une ligne mélodique note après note. Cette technique nécessitant un soutien orchestral (contrairement au fingerpicking) est à l’origine de toute l’évolution moderne de la guitare, de Charlie Christian à Jimi Hendrix en passant par T Bone Walker, Clarence « Gatemouth » Brown ou Matt « Guitar » Mur- phy. ► FLAT TALK. Compromis entre les langues africaines et européennes parlé par les esclaves, « petit nègre ». e ► FLATTED FIFTH. Quinte diminuée, l’équivalent de la 3 blue* note introduite par les boppers : « Il [Rudy Powell] avait écrit un arrangement sur une ballade, dans lequel il y avait un accord de si bémol très insolite, car il l’avait construit avec un la à la base, c’est-à-dire une quinte diminuée. Quand j’ai entendu ça pour la première fois, ça a fait tilt tout de suite. Je l’ai joué, rejoué, totalement fasciné, et après je l’utilisais dans mes solos partout où je pouvais. » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop. ► GIN FLAT. Bar clandestin installé en appartement. ► GOOD TIME FLAT. Tout à la fois bar, tripot, dancing, voire bordel, les good time flats installés en appartement perpétuent de façon quasiment institutionnalisée, la tradition des house rent parties : « I went to a good-time flat Last Saturday night The cops* knocked on the door Everybody made their flight » It’s Heated, Frankie « Half Pint » Jaxon (1929).

FLIP Perdre la tête, planer, rester baba : « 1 just began listening seven or eight years ago. First I heard Stravinsky’s Firebird Suite. In the vernacular of the street, I flipped. » Interview de Charlie Parker, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. • Surnom du saxophoniste Joseph Edward « Flip » Phillips (1915). ► FLIP (ONE’S) WIG. Litt. : envoyer en Pair sa perruque ; prendre son pied, s’éclater : Flippin’ The Wig, Bill Harris (1946). ► FLORIDA FLIP. Variante du poker, en vogue parmi les Noirs.

FLIP FLOP Culbute. Changement de direction ou d’attitude : She Sboulda Flip Flop, Cootie Williams (1945). ► FLIP FLOP AND FLY. Faire l’amour en position « tête-bêche », « 69 » ; « Now flip, flop and fly Don’t care* if I die Don’t ever leave me Don’t ever say goodbye » Flip, Flop and Fly, Big Joe Turner (1955).

FLOOZIE (Floogie/floosie/flozy/flugie/ faloosie) Brave fille, irresponsable, ou femme entretenue : Floogie Boo, Cootie Williams (1945).

FLY Voler. ► L’une des danses «solitaires et asexuées » selon les termes de Henry Miller, apparues dans les années 60 à la suite du succès phénoménal du twist. ► Se dit de quelqu’un d’averti, que l’on ne peut facilement rouler : Ain’t No Flies on Me, Hot Lips Page (1950). ► Fougueux, violent, en transe. ► Etre sous l’influence d’une drogue, planer. 211. FLYER. Apparaît souvent dans les surnoms des trains : Dixie Flyer, Midnight Flyer, Flying Croiv, Chicago Flyer... Le terme suggère l’idée de vitesse. 212. FLY THE COOP. Partir sans régler la note, « à la cloche de bois », filer à l’anglaise : Flying The Coop, Chubby Jackson (1950).

FLYING CROW Surnom d’une ligne de chemin de fer du Texas reliant Port Arthur, sur le golfe du Mexique, à Texarkana, à la frontière de l’Arkansas, via Shreveport : « Flying Crow leaving Port Arthur Likely come to Shreveport to change a crew They’ll take water in Texarkana And for Ashdown they’ll keep on through » Flying Crow, Black Ivory King (1937).

FOO Marijuana : Dr Foo, Slam Stewart (1946).

FOOL Fou. • Gogo, cocu, crétin : «After all is said and done You won’t be satisfied with anyone So after you get rid of me, baby Tell me, who will the next fool be » Who Will The Next Fool Be? Bobby Bland (1961). • Duper, berner, tromper : « When you loose your money Great God, don’t loose your mind And when you loose your woman Please, don’t fool with mine » Outside Woman Blues, Blind Joe Reynolds (1930). ► FOOL AROUND. Trainer, glander, sortir avec: « I doctor on women I don’t fool around with men All right, take it easy now mama While I stick my needle* in » / Think You Need a Shot, Walter Davis (1936).

FOREST CITY JOE De la ville de Forest City, Caroline du Nord. Surnom du bluesman Joe B. Pugh (1926- 1960).

FORTY (40) Magnifique, superbe (généralement á propos d’une femme): Forty and Tight, Beale Street Washboard Band (1929).

FORTY FIVE (45) ► Revolver, calibre (surtout utilisé dans les années 20): « Billy Lyons* shot six bits Stackerlee* bet he pass Stackerlee out with his forty five Said “You done shot your last When you loose your money Learn to loose” » Billy Lyons and Stack ’O'Lee, Furry Lewis (1928). ► Pianiste: « That ole stockyard fire Left people in misery It’s got ’em settin’ wonderin’ Lord, what’ll the end be. [Au pianiste:] Play it, forty five, play it for me!» Stockyard Fire, Tampa Red (1934). Cette acception a une origine indétermi- née; renvoie-t-elle á 44 touches par main (le piano a 88 touches, voir eighty eight) plus un pianiste? Ou bien l’expression forty four (44) désigne-t-elle des dons particuliers pour la pratique du piano, ce qui faisait dire á Big Bill Broonzy cité par Paul Oliver dans Screening The Blues, « could I go one better than forty four »?

FORTY FOUR (44) 213. Pour « calibre 44 » (surtout utilisé dans les années 20): «I walked all night long With my forty four in my hand Looking for my woman Looking for her other man » Forty Four Blues, James * Boodle It » Wiggins (1929). ► Train n°44 qui parcourait la ligne de l’Illinois Central (voir I.C.) : « Ah I heard my baby cryin’ And I heard the 44 whistle when she blow And I feel mistreated And your sweet mama* is bound to go » Number 44 Blues, Roosevelt Sykes (1929). ► Thème pianistique célèbre : « It’s a blues, it’s a barrelhouse*, honky- tonk blues, people danced by that, did the shimmy* by that. » Interview de Little Brother Montgomery cité par Paul Oliver dans Screening The Blues. Instrumental à l’origine, le thème s’enrichit de paroles dans les versions qu’en donnèrent Roosevelt Sykes (44 Blues, 1929) et Little Brother Montgomery (Vicksburg Blues, 1930). ► Prostituée. ► Voir forty five (acc. 2).

FORTY FOUR FORTY (44-40) Revolver de calibre 44 (le deuxième nombre fait référence au pourcentage de cordite dans la charge explosive) : « You talk about your 44-40 That it do very well But my 22-20*, Lord Is a burnin’ hell » 22-20 Blues, Skip James (1931).

FORTY ONE (41) Revolver de calibre 41 : « He touch Stack* [O’ Lee] on the shoulder Say “Stack why don’t your run?” I don’t run, white folks When I got my 41 » Stagolee, version recueillie par Alan Lomax et citée dans Folk Songs of North America.

FORTY TWENTY (40-20) Dans le langage des jazzmen, jouer en club un set de quarante minutes suivi d’un entracte de vingt minutes, et ainsi de suite : « Miles [Davis] was the first one to refuse to play “forty-twenty”. In the old days, you would come into a club and you would play from twenty minuts after the hour to the end of the hour, and then you would come on twenty minuts later and so on. Miles broke that up. He came to Philadelphia once and told the owner he was going to play three shows. The owner didn’t want to go for it, and Miles told him, “Well, then you ain’t got no deal*”. Now, musicians play only two shows a night in some places. Miles did a lot for musicians. » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop.

FOTDELLA Sorte de contrebasse à six cordes actionnées par six pédales, inventée par le multi- instrumentiste géorgien Jesse Fuller.

FOUR (4) Pour quartet. Norn de Porchestre de Hociel Thomas et Louis Armstrong : Big Four (1925). ► FOUR BEAT. Voir beat. ► FOUR F. Pour «Find them, fool them, fuck them and forget them » (Cours-leur après, mène-les en bateau, baise-les et oublie-les) : 4 F Blues, Clyde Hart (1945). Maxime exploitée — mais de façon quelque peu expurgée — par Larry Davis dans un titre plus récent {Find’ em, Fool’ em and Forget" em, 1981) : « He told me : “Son, Oh, let me give you some advice You always remember this for the rest of your life : Find1 em, Fool’ em and Forget ’em That’s the thing to do Find ’em, Fool’ em and Forget’ em Before they hurt you” Oh, yeah, he told me : “Son, oh Son I wouldn’t tell you no lie*” » ► FOURS. « Quatre quatre » : pour des solistes, jouer alternativement des soli de quatre mesures : «Let’s play some I wanna hear. You [Benny Carter] play, man. And then we played fours and eights*. That one night we had a ball* there, boy. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

FOUR ELEVEN FORTY FOUR (4-11-44) 1. Combinaison particulièrement célèbre dans le jeu des numbers : « I’m tellin’ you policy* irriter You better walk slow I’m gettin’ tired of you knockin’ my backdoor* If I don’t catch I ain’t gonna play no more ’cause I’m getting tired of playin’ 4-11-44 » 3-6-9 Blues, Louisiana Johnny (1935). Autrement connue à La Nouvelle-Orléans sous le nom de washwoman’s gig : « Four eleven and forty7 four Let me hit that gig* I’m needin’ my man so bad » Lottery Song About The Washwoman's Gig, Sara Lawson, citée par Paul Oliver dans Screening The Blues. La combinaison renvoie selon les équivalences établies dans les number’s* books à « phallus ».

FOURFLUSHER De l’argot du poker, bluffeur (qui prétend posséder une quinte flush). Arnaqueur, aigrefin, malhonnête, fourbe « My mother came from a line of respectable Creole* house-servants and cigarmakers. My father was a fourflusher, who left me with nothing... » Jelly Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

FOX Jolie fille, qui a du chien (années 40-60) : Looking for a Fox, The Fieldstones (1981). ► Fox TROT. Danse en vogue au début du siècle, et autrement appelée Bunny Hug* «You know the horse that I’m riding He can foxtrot, he can lope and pace » The Pony Blues, Son House (1942). ► FOXY. Belle, superbe, bandante (en parlant d’une Noire) : Good Lookin’ and Foxy, Roy Brown (1959).

FRAME Châssis ; subit le même détournement de sens qu’en français en renvoyant aux attributs sexuels d’une femme : Fine Brown Frame, Budd Johnson (1944). ► FRAMED. En taule, incarcéré : Framed, The Coasters (1954).

FRANKIE Frankie Baker, héroïne de la ballade Frankie and Albert dans laquelle elle tue son amant infidèle, Albert Britton : « When Albert* saw Frankie mean it He started off as fast as he could By she squeezed that 41* four times And he dropped like a stick of wood He was her man but he done her wrong » Frankie, Palmer Jones (chant recueilli par Alan Lomax et cité dans Folk Songs of North America i Cette ballade, probablement fondée sur un ou plusieurs faits divers, remonte à la 2e moitié du XIXe. Dans les versions plus récentes, Frankie and Albert est devenue Frankie and Johnny : « Frankie and Albert, the same thing as Frankie and Johnnie. » Introduction parlée de Frankie, Mississippi John Hurt (1964).

FRANTIC Excitant, superbe : « Little girl, I had suffer’ Each day since you been gone, 1 need you Person to person Bring your, big, fine, foxy*, frantic, freakish*, Fuck* 1 mean, Feelin’ self on home » Person to Person, Eddie Cleanhead Vinson (1974).

FREAK ► HomQsexuel : « You Know how 1 got gay*? My mama wasn’t paying attention at the time. You know if she had said homosexual when 1 was a little boy, I wouldn’t even know what she was talking about. I didn’t even know what it was. They called you sissy* back then. Or freak. Or faggot*. That’s the common name for it. All those other names are beautiful names that the old Devil done fixed up... » Interview de Little Richard, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard. ► Adj. Dans le vocabulaire des musiciens, techniquement inhabituel, peu orthodoxe : «Joe Oliver was very strong; he was the greatest freak trumpet player 1 ever knew. He did most of his playing with cups, glasses, buckets and mutes*. He was the best gutbucket* man I ever heard. I called him freak because the sounds he made were not made by the valves but through these artificial devices. » Interview de Mutt Carey, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► FREAKISH. ® Etrange, bizarre.

FREELANCE Se dit d’un musicien indépendant jouant au gré des contrats, en concert, en tournée ou lors de séances d’enregistrement.

FRENCH HARP Harmonica : « Parfois nous avions la chance énorme d’avoir un french* harp sur lequel nous imitions le renard et les chiens, ou les express lancés sur leurs rails : les classiques de l’harmonica. » W.C. Handy, Father of The Blues.

FRETLESS S’emploie pour qualifier le jeu sur une guitare dont le manche est dépourvu de frettes, comme celui d’une contrebasse ou d’un violon.

FRIDAY Vendredi, jour traditionnel de paye et de bringue : « The eagle flies* on friday Everybody call it pay day » When The Eagle Flies, Muddy Waters (1967).

FRISKING THE WIKERS Se gratouiller les moustaches. Lechauffement des musiciens avant un concert.

FRISCO ► Pour San Francisco, Californie : « Oh how she loved to dance That old Grizzly Bear I guess she’s gone to Frisco To dance it there » This Morning She Was Gone, Jim Jackson (1928). ► Nom d’un train : « Lord I hate to hear that Frisco whistle blow Well I saw the Frisco When she left the yard When that train pull out, baby It nearly broke my heart » Frisco Whistle Blues, Ed Bell (1927). FROG Grenouille. 216. Danse des années 20 remise au goût du jour dans les années 60 : Doin' The Frog, Duke Ellington (1927). Do The Frog, Bo Diddley (I960). 217. Fréquemment utilisé dans les préparations magiques; la grenouille peut d’ailleurs symboliser le diable comme dans le Bullfrog Blues de William Harris (1928) : « Have you ever woke up, with them bullfrog on your mind? » • L’un des surnoms du saxophoniste Ben Webster (1909-1973) : « Avec Eddie Barefield comme premier alto, nous avions un homme qui pouvait lancer des riffs* dans la section de saxes tout comme le faisait la section de trompettes, et qui était aussi un sacré soliste, comme Ben Webster. The Frog, comme nous l’appelions, était sans aucun doute un des meilleurs saxophonistes ténors que j’aie jamais entendus. Tout le monde dans la région savait de quoi il était capable. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. ► FATTENING FROGS FOR SNAKES. Voir snake.

FRONT 218. Costume. 219. Diriger un orchestre : « Our first venture together was a flop. It was when Fats* [Waller] tried fronting a big band* on a southern tour. » W.T. Ed Kirkebv, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► FRONT DOOR. ® La porte « de devant ». « Yes if you make it to your house Knock on the frontdoor Run around to the back You’ll catch him just before he go That’s evil*, evil is goin’ on » Evil Is Goin' on, Howlin’ Wolf (1954). Symbole de respectabilité (« la façade »), par opposition à backdoor : « I’m a frontdoor woman With a backdoor* man ». ?, Lilian Glinn (1929). ® Le con, la chatte, dans l’expression « a shot in the frontdoor » (voir shot). ► FRONT MAN. Chef d’orchestre, leader. ► FRONT OF TOWN. Quartier de La Nouvelle-Orléans entre le Mississippi au sud et Rampart Street au nord : s’oppose à Back O’ Town qui est le quartier populaire au nord de cette même rue.

FRUIT Fruit. • Homosexuel. • Au sens figuré, les organes sexuels : « Peach* orchard mama You swore nobody’d pick your fruit but me I found three kid* men Shakiri* down your peaches tree » Peach Orchard Blues, Blind Lemon Jefferson (1929).

FRY ALICE Rivale de Frankie dans la ballade Frankie and Albert : « Frankie* went to the corner saloon Didn’t go to be gone long She peeps through the window Do seen Albert* in Alice’s arms He’s my man and he done me wrong [...] I ain’t gonna tell no stories I ain’t gonna tell no lies* I was pass ’bout an hour from ago Girl they call Alice Fry He was my man, and he done me wrong » Frankie, Mississippi John Hurt (1928). Le personnage apparaît aussi dans la version de Kassie Jones enregistrée par Furry Lewis en 1928 : « There was a woman named miss Alice Fry Said “I’m gonna ride* with mister Kassie* or die” I ain’t good lookin’ but I take my time A ramblin* woman with a ramblin’ mind »

FUCK ► Faire l’amour, baiser : « Now fuckin’ one thing That’ll make me to Heaven I’ll be fuckin’ in the studio ’til the clock strikes eleven Oooh daddy, shave* 'em dry I would fuck you, baby Honey, I would make you cry » Shave ’em Dry, Lucille Bogan (ca 1935). Mot tabou, au moins dans les enregistrements jusque dans les années 60 (le Shave 'em Dry cité ci-dessus est resté inédit), fuck se trouve sous les formes masquées fuyer, for you (voir motherfucker) ou If You See Kay (transcription phonétique lorsqu’on épelle F.U.C.K.) : T/' You See Kay, Memphis Slim (I960). Ce n’est qu’avec les grands mouvements de contestation, que le mot est devenu d’usage relativement courant : « Niggers* fuck Niggers fuck, fuck, fuck Niggers love the word fuck They think they’re so fucking cute They fuck you around The first thing they say when you’re mad — fuck it You play a little too much with them They say fuck you When it’s time to TCB* Niggers are somewhere fucking Try and be nice to them They fuck over you » Niggers Are Scared of Revolution, The Last Poets (1970). 220. FIND THEM, FOOL THEM, FUCK THEM AND FORGET THEM. NOA four. 221. FUCK FREAK. Prostituée. FUCK UP. Avoir des emmerdements, des problèmes. « Niggers don’t realize while they’re doing all this fucking They’re getting fucked around And when they do realize It’s too late So niggers just get fucked up » Niggers Are Scared of Revolution, The Last Poets (1970). ► MOTHERFUCKER. Voir ce terme.

FUN Plaisir, amusement : « I was in a place one night They* was all havin’ fun They was all buyin’ beer and wine But they wouldn’t sell me none » Black Brown and White, Big Bill Broonzy (1951).

FUNK 222. Odeurs corporelles: « Yo’ momma got funk That smells like death She’s even got the funkiest armpits and breath Yo’ momma takes foot from garbage cans She don’t look like she ever washed her face and hands » Yo’ Momma, Luther Thomas (1981). 223. Sperme. 224. Ordures, immondices. 225. Style musical apparu à la fin des années 60, «appropriation par les Noirs américains des rythmes africains en même temps qu’une mise au goût du jour par l’adoption des sons électriques du rock » (D. Rousseau et J. Reese in Jazz Hot n° 396). Sly And The Family Stone, Funkadelic, puis Parliament et Defunkt sont quelques- uns des groupes qui, à des degrés divers, ont représenté cette tendance. ► BLUE FUNK. Dépression nerveuse : Blue Funk, Ray Charles & Milt Jackson (1957). FUNKY 1. Puant (en parlant des odeurs corporelles) : « Funky, qui, jusque-là, pour la plupart des Noirs, voulait dire simplement puant (et s’employait d’habitude dans un contexte sexuel), sert à désigner une musique expressive, ce qui implique que même la vieille idée préconçue de l’Amérique blanche, selon laquelle le Noir a une odeur particulière, réelle ou non, devient l’un des traits de la “négri-tude”. Et dans les années 50, la négritude était devenue pour beaucoup de Noirs (et de Blancs) la seule force que gardait la culture américaine. » Leroi Jones, Le Peuple du blues. ► Authentique, sûr, terrible : The Funky Way to Treat Somebody, David Newman (ca 1969). « Le mot funky m’embarrasse toujours parce qu’on l’a utilisé à tort et à travers. Pour moi, c’est une des formes de la sincérité. Le terme funky est extrêmement difficile à définir [...] Moi, je préfère dire soulful. » Interview de Quincy Jones, in Jazz Magazine, février 1958. ► Dans les années 50, style musical sensuel, expressif, mêlant intimement le blues et la musique d’église, porteur du désir d’affirmer et de valoriser la culture noire, popularisé entre autres par Art Blakey et Horace Silver; il est apparu en même temps que la montée du mouvement pour les droits civiques. « In contrast to the cool* school, another movement arose that was tagged "hard bop*” because it reasserted the primacy of rhythm and the blues in our music and made you get funky with sweat to play it. [...] Hard bop with its more earthy, churchy* sound drew a lot of new black fans to our music... » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop. 226. Syn. : soul ou churchy. > FUNKY CHICKEN. Danse popularisée par Rufus Thomas : Do The Funky Chicken, Rufus Thomas (1969).

FUNNY Etrange, bizarre : « It may look funny Funny as can be We got eight children Don’t none of ’em look like me » I’m Gonna Move to The Outskirts of Town, Big Bill Broonzy (1942). • FUNNY PAPA (FUNNY PAPER). Surnom du chanteur de blues J.T. « Funny Paper » Smith {ca 1885-1940) alias « The Howling Wolf », qui enregistra entre 1930 et 1935.

FURRY Surnom du bluesman Walter « Furry » Lewis (1893-1981) : « Good mornin’, judge, what mav be mv fine? Good mornin’, judge, what may be my fine? “Fifty dollars, Furry, and eleven twenty- nine*” » Judge Harsh Blues, Furry Lewis (1928).

FUSE (Blow a) Voir blow.

FUYER Voir motherfuyer. G

G.M. & 0. (Gulf Mobile and Ohio Railroad) Ligne reliant Chicago, Illinois, à Mobile sur le golfe du Mexique, via Saint Louis, Missouri, et Jackson, Mississippi : * Now I left Chicago I left on that G. & M. Then if I reach my home I’ll change all on that L & N* » Hobo Jungle Blues, Sleepy John Estes (1935).

GAB Bagout, baratin : « Men sure’s deceitful They gettin’ worse everyday Actin’ like a bunch of women They just gabbin’, gabbin’, gabbin’ away » Foolish Man Blues, Bessie Smith (1927).

GABRIEL Trompettiste.

GAGE Marijuana : My Gage Is Goiri up, Memphis Minnie (1941). « De nos jours, les jeunes musiciens de jazz pensent qu’ils doivent se comporter d’une façon dingue s’ils veulent jouer du jazz. Ils fument des joints, ils boivent du gin, ont des pépées et parlent leur jargon : ils parlent de gage, de tea* et de vraiment être cool*. Cinq heures de conversation et une seule minute de musique. Voilà à quoi cela se monte. » Sidney Bechet, La musique, c’est ma vie.

GAL Déformation phonétique de girl*.

GALLION Région, zone, quartier, sous la coupe de Jim* Crow, où les préjugés raciaux sont forts : ► Don’t have to work there Like in Arkansas Went I cross the Mason-Dixon* Line Good bye old gallion Mama’s going a-flying » North Bound Blues, Maggie Jones (1925).

GALLIS Déformation de gallows, potence, gibet : ► Father did you bring me silver Father did you bring me gold What did you bring me dear father Keep me from the gallis pole Yes, what did you? What did you bring me Keep me from the gallis pole » The Gallis Pole, Leadbelly (1939).

GALVESTON Voir Fast Western. GAME 227. Activité illicite, escroquerie, manigance. 228. Habileté mise à exercer cette même activité. • LONG-SHOE GAME. L'activité du souteneur, du proxénète (du fait des chaussures voyantes portées par les maquereaux). • RUN (WHUP) A GAME ON SOMEBODY. Monter une arnaque pour extorquer quelque chose à quelqu’un. Run est plutôt utilisé à Los Angeles et New York, wbup à Chicago. • SKIN GAME. Voir skin. • THE GAME. La vie, celle des hommes du milieu, des hors-la-loi, la « belle vie ». Voir master pimp*.

GANG 1. Grande quantité, tripotée, floppée (années 30-50) : « Got a gang of brownskin sweet women Got a gang of high yellows too I got so many womens I don’t know what to do » Gang of Brown Skin Women, « Papa » Harvey Hull et Long « Cleeve » Reed (1927). ► Equipe, clique : « When he walks in to see his old gang With whom he used to drink Well, then if he ask them for a little taste Oh well, well, they say “Oh that’s just what you think” » When a Man Gets Down, Peetie Wheatstraw (1936). Par extension, groupe (de musiciens), combo : Peg Leg Howell and His Gang (enregistrements de 1927). e 229. CHAIN GANG. Am. Litt. : groupe enchaîné. Au cours du xix siècle, avec la surpopulation des prisons et le besoin de main- d’œuvre, se répandit la pratique des chain gangs ou chaînes de forçats. Ces équipes, surveillées par des gardes en armes, étaient employées sur les grands chantiers de l’Etat, construction de routes ou de voies ferrées, assèchement de marais, exploitation de carrières ou de mines. Ce système fut aboli dans certains Etats dès le début du xxe, mais survécut ailleurs jusqu’au début des années 40 : « Says, I got chains ’round my body Chains all around my shoes Now that’s the reason, capt’n* Hear me singing, Laivd* These chain gang blues » Chain Gang Blues, Kokomo Arnold (1935). 230. GANG BANG. Actes sexuels en chaîne : Gang Bang, Oscar Brown (1972).

GAPPINGS Salaire d’un musicien, cachet, cacheton (années 10-25) : « In those days, a band* who played for those places [dans les riches bordels de La Nouvelle-Orléans] didn’t need to worry about salaries... Their tips were so great until they did not even have to touch their nightly gappings... Most of the places paid off the musicians every night after the job* was over instead of the weekly deal... » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

GARBAGE CAN Poubelle : « Well you better save a dollar And try to make other plans ’cause you gonna whine ’round the Welfare* Eating out them garbage cans » No More Hard Times, Alec Seward et Louis Haves (ca 1950). ► Les ordures (garbage ou trash), comme les cendres (ashes), évoquent souvent la sexualité : « I need this good lookin’ woman So she can empty my can [...] I need you to come back, honey Because my garbage can is overflowin’ » Garbage Man, Muddy Waters ( 1972). ► Contrebasse rudimentaire faite à partir d’une bassine et d’un manche à balai : « Some people call it a garbage can, but I call it steamline* bass. » Interview de Will Shade cité par Paul Oliver dans Conversation with The Blues.

GASOLINE Essence. Gasoline ou gas : alcool dénaturé, frelaté, tord-boyaux : « I asked for water And she gave me gasoline Lord, Lordy Lord » Cool Drink of Water Blues, Tommy Johnson (1928 . ► GAS. ® Quelque chose de surprenant super, excitant (années 40-50). «Just can’t wait for that swimmin’ date* To see your new bathing suite It must be a gas ’cause the one you had last Gee ! Was it cute » Vacation Time, Chuck Berry (1958). ® V. Exciter, plaire, botter.

GATE Porte. 231. Dans l’argot des jazzmen, très bon engagement. 232. Musicien. « Earl Hines was the pianist in his banc [...] We used to make him player longer solos. We’d say, “Play another one. Gates”. And he’d go again. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Be; 233. Copain, pote. • GATEMOUTH. Grande gueule, bavard. Surnom du blues* shouter Arnold Dwigh: « Gatemouth » Moore (1913) et du bluey- man Clarence « Gatemouth » Brows (1924): Gatemouth Boogie, Clarence Gatemour. Brown (1947).

GATOR (Gator Tail) D'alligator*. Surnom du saxophoniste Willis Jackson (1932-1987) après le succès de son Gator Tail enregistré en 1949 en compagnie de Cootie Williams : Gator's Groove, Willis Jackson (1952).

GAY Homosexuel : «Yes I loved him But he trifled with my heart Had to shoot him Because he was too smart Went gay cutting < - With another sealskin broivn* Rambled* ’til the butcher cut him down » Undertaker's Blues, Maggie Jones (1925).

GEE ► Cri du charretier pour faire tourner son attelage à droite (à gauche, haw) : « Hey now, get away Red Get over here, Red Gee, gee, haw*, yeah, back » Mule Blues, Robert Pete Williams, recueilli et cité par Harry Oster in Living Country Blues. ► (Ou gee whiz). Exclamation de surprise, bon sang ! Eh ben ! : « Gee, look at that old fat gal* She really shakes a mean* hip — She shakes too of ’em » Hip Shakiri Strut, Hokum Boys, vcl par Georgia Tom et Jane Lucas (1930). ► De la première lettre degwy, type, mec, pote (années 30-45). GEECHEE (Geshie, geechie) D’ Ogeechee, région incluant la Géorgie, la partie sud de la Caroline du Sud et les îles côtières. 234. « Simplification morphologique et syntaxique de l’anglais avec une forte proportion de termes africains », selon les termes de Guy-Jean Forgue : « Charleston, South Carolina, baby Is where I was born, Now if you get there baby Them geechies put* your water on » Charleston Blues, Bertha Chippie Hill (1946). Buckra (booker), juke (jook), jake sont quelques-uns des mots de l’argot noir américain d’origine geechie. 235. Par extension, incompréhensible, abscons. • Surnom du bluesman Johnnie Temple (1906-1968).

GEET Vient probablement de l’allemand geld, argent. Argent, House : Get That Geet, Johnny Hodges (1950).

GELATINE Gélatine. Au sens figuré, plaisir sexuel, caresses : « Have you met miss Mabel Green Who makes all kind of gelatine ’cause she sells it very high To get any better you need to try I’ve known her for a great long time All kind of jelly* is in her line If it look like jelly Shake it like jelly It must be gelatine » If It Looks Like Jelly, Shakes Like Jelly, It Must Be Gel-A-Tine, Charlie Lincoln (1928).

GENTLE GIANT Surnom du saxophoniste William Evans alias Yussef Lateef (1921) depuis sa conversion à l’islam vers 1958.

GEORGIA ► GEORGIA BOY. Surnom du bluesman Luther Johnson (1934-1976). 236. GEORGIA CRAWL. Nom d’une danse populaire parmi les Noirs du Sud : « Run here papa, look at sis Out in the barnyard jus’ shakin’ like this Doin’ the Georgia Crawl, ooh Georgia Crawl We don’t need nobody tryin’ to do that Georgia Crawl » Georgia Crawl, Henry Williams et Eddie Anthonv (1928). 237. GEORGIA PEACH. Jeune femme belle, jeune beauté. 238. GEORGIA SHAVE (GIVE SOMEONE A). Trancher la gorge, couper le cou. 239. GEORGIA SKIN. Voir skin. ► GEORGIA TOM. Surnom du bluesman et chanteur de gospel Thomas Andrew Dorsey (1899-1956).

GET 240. GET DOWN. Vient probablement de get down to the bottom (of things), aller au fond des choses, être parfaitement au courant de. 1. Exhortation à prendre un solo (« Vas-y, chauffe ») : « [Parlant à sa guitare :] Get down! What? What you say? » Way Down South, Matt « Guitar » Murphy (ca 1990). ► Dans le vocabulaire des prostituées, se mettre au boulot (get down time : le soir). ► Miser, parier gros : « Says, now look here, son You better not be late That gig* won’t come out in the Interstate* So you better get down and get down right That gig gonna fall out tonight » Policy Blues, Cripple Clarence Lofton (1943). 241. GET AROUND ON (ONE’S) HORN. Voir bom. 242. GET (ONE’S) GOAT. Embêter quelqu’un, emmerder : « Woke up this morning When chickens was crowin’ for day Felt on the right side of my pillow My man had gone away. By his pillow he left a note Readin’ “sorry Jane You got my goat No time to marry No time to settle down” » Young Woman Blues, Bessie Smith (1926). 243. GET HOT. Jouer avec exubérance ; avoir du pot au jeu. 244. GET IT. Comprendre, piger ; exhortation à prendre un solo. Par extension, satisfaire (musicalement parlant) : « [Parlé] Ah gitfiddle*, pick it now, Boot* it now Lord I believe to my soul Kokomo*'s done broke a yo yo string When 1 tell you to get it now, mama, you get it » Paddlin’ Madeline Blues, Kokomo Arnold (1930). 245. GET OFF. Etre emballé, excité, « planer » (drogue, orgasme); improviser. 246. GET RELIGION. Voir religion.

GETAWAY (To make a) S’évader, se barrer, foutre le camp : « Feelin’ tomorrow like I feel today I’ll pack my trunk Make my getaway » St Louis Blues, W.C. Handy (1914).

GHOST NOTE Litt. : note fantôme. Notes, de « l’invention » de Charlie Parker et Dizzy Gillespie, qui « en tempo rapide, ne sont pas jouées, alors qu’on croit réellement les entendre [...] tant la continuité de la pensée musicale improvisée est présente sous le découpage abrupt des éléments de phrase » (Jacques B. Hess, in Bebop).

GIG Vient probablement du français « gigue ». Engagement temporaire (à l’origine d’un musicien, puis, par extension, pour n’importe quel travail, spécialement s’il est plaisant) : « Man I had a right to be scared when I played my first gig in Chicago and believe me, I was. Those were the days of tough competition in solid* cats like Roy Palmer and Kid* Ory on trombone and Joe Oliver, Tig Chambers and Sugar Johnny on trumpet, competition that would scare the good notes out of anybody, and I was no exception. » Interview de Preston Jackson, in Hear Me Talkin ' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► Soirée,/«/« session. ► Noce, bringue, nouba, orgie. ► Anus, derrière. ► Gig (ou jig) : au jeu des numéros (voir numbers), combinaison de trois numéros gagnants rapportant cent fois la mise. « Well I dreamed last night My gig out Woke up this morning My flat* fell out » Policy Blues, Yodelling Kid Brown (1928). La combinaison 4-11-44 (voir four eleven forty four) se trouve à La Nouvelle- Orléans sous le nom de washwoman’sgig. ► V. Faire la bombe, la nouba. 247. ANGEL GIG. La combinaison : 14-65-19- 248. BLOW THE GIG. Ne pouvoir honorer un engagement (années 50). 249. DAY GIG. Job non musical permettant à un musicien d’assurer l’alimentaire (années 40).

GIMMIES (Got gimmies on) Avoir ses nerfs : « I believe I’ll pack my suitcase Leave my home Yeah, ’cause every time I see my lil’ woman She’s got her gimmies on » Trembling Bed Springs, Rich Trice (1927).

GIN TUB Alcool artisanal, clandestin : «Je bus une gorgée et faillis vomir. C’était l’alcool le plus dégueulasse que j’aie jamais goûté. Il y avait des whiskies de contrebande qu’on appelait gin tub ou éclair blanc [white lightnin’], mais ce truc-là me semblait être plutôt du fluide d’embaumeur. Je passai la bouteille à Ted qui pouvait avaler n’importe quoi. Il but une gorgée et quand il put reprendre son souffle, il prononça un “Nom de Dieu” si retentissant que les danseurs nous dévisagèrent curieusement... » Bill Coleman, Trumpet Story.

GIN-MILL (Gin flat) Bar, bouge : « Yes, I run* around for months and months From gin-mill to gin-mill to honkey-tonk* » Dirty T.B. Blues, Victoria Spivey (1929).

GIRL Fillette. ► Terme par lequel un Blanc s’adressait à une Noire ; l’âge venu, elle devenait aunt (tante). ► Cocaïne. 250. FAT GIRL. Surnom du trompettiste Theodore « Fats » Navarro (1923-1950). • GAL. Déformation phonétique de girl. Môme, nana, petite amie : « You think she’s crazy about* you And the gal be leavin’ you all the time [...] My gal had a man upstairs And one downstairs And one cross the street » Crowing Rooster, Memphis Slim (1959). • GAL BOY. Dans l’argot des prisonniers, celui qui, lors de rapports sexuels, a un comportement passif. Ant. : wolf. • GOLDEN GIRL. Blanche.

GITFIDDLE (Git, gitbox, gitter, gitterbox) Guitare : « [Parlé] Ah gitfiddle, pick it now, Boot* it now Lord I believe to my soul Kokomo*’s done broke a pour string When I tell you to get it now, mama, you get it » Paddlin' Madeline Blues, Kokomo Arnold (1930). 251. Gitfiddle Jim, pseudonyme du bluesman James « Kokomo » Arnold (1901- 1969) dans ses enregistrements de 1930.

GITS Déformation de guts, boyaux, tripes (années 30-50). Courage : All My Gits Are Gone, Jay McShann (1946).

GLORY Gloire. Terme employé par les esclaves pour désigner un train de marchandises voyageant à vide : It’s Glory’, Duke Ellington (1931). GO Go ou go to town : swinguer, improviser, chauffer (provient sans doute de l’excitation de ruraux se rendant à la ville). « You have to play real hard* when you play for Negroes. You got to go some to play for Negroes. » Interview de Leonard Bechet cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. Goin’ to Town, Duke Ellington (1928). ► Go AHEAD. Injonction couramment utilisée pour encourager un soliste : «Aw, aw, aw, that’s all right, That’s good, Yeaaaah, Go ’head, Jerry, Let me hear a little bit of that (?) » B.B. King à son bassiste Jerry Gemmott dans You’re Mean (1969). ► Go FOR. Aimer : «The people that’s really across the tracks*, they still go for ’em [the blues] big- » Interview de Rufus Perryman par Robert Springer, in Historique et Fonctions sociales du blues de 1929 à nos jours. ► Go HOME, GO OUT. Dans le jazz traditionnel, entamer le dernier chorus : « Musically, he [Dizzy Gillespie] knows what he is doing backwards and forwards. So what he hears — that you think maybe is going through — goes in and stays. Later, hell go home and figure it all out just what it is. » Interview de Billy Eckstine, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► Go MAN GO. Exclamation d'encouragement lancée à un musicien; l’expression était à l’origine utilisée par les boppers dans les années 40.

GOAT (Get one’s goat) Voir get.

GOATEE Bouc. Touffe pileuse sur la lèvre inférieure dont la mode chez les boppers a été lancée par Dizzy Gillespie : « Now a trademark, that tuft of hair cushions my mouthpiece and is quite useful to me as a player; at least I’ve always thought it allowed me to play more effectively. Girls like my goatee too. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

GOGO Style musical né à Chocolate City (Washington D.C.) au début des années 80, privilégiant les basses lourdes, les percussions, la polyrythmie et les distorsions électroniques. Trouble Funk, Chuck Brown and The Soul Searchers et E.U. sont les noms les plus représentatifs de ce style.

GOGO GIRL Vient probablement du français « à gogo ». Danseuses « dévêtues » de fanfreluches qui agrémentent les shows musicaux dans les boîtes : « He [Earl Hooker] had male and female singers, and dancers, girls and boys. He had a whole show. Gogo girls, he called ’em. They would strip. Not all of the clothes down, though... » Interview de Bertha Nickerson/Chism par Sebastian Danchin (1984) in Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto. Gogo Girl, Freddy Robinson (1966).

GOLD DIGGER Chercheur d’or. Femme intéressée, dont l'intérêt pour un homme se limite à l’épaisseur de son porte-monnaie : « My baby must be a gold digger She got all my pockets clean Now since you know I’m down* and out, darlin' You begin to scream » Gold Digger, Janies Banister (ca 1954).

GOLDEN BULLET Litt. : balle en or. Sperme : The Golden Bullet, Count Basie (1950). GOLDEN GATE LIMITED Train de la Southern Pacific Line reliant Houston (Texas) à San Francisco (Californie) via San Antonio et El Paso; quittant quotidiennement Houston à minuit, il passe le long de la ferme-pénitencier de Sugarland et serait à l’origine de la légende du Midnight* Special.

GOLDEN LEAF Marijuana de toute première qualité (années 20-45) : Golden Leaf Strut, New Orleans Rhythm Kings (1925).

GOLLY ► Déformation de girl : « I start drinkin’ and gamblin’ Runnin’* round both night and day I had a good golly But I didn’t treat her right » When My hirst Wife Left Me, John hee Ifooker (1961). ► GOOD GOLLY. Exclamation : Ciel ! Pour sûr! « — Hmm, you sure is lucky all night — Hah, eleven* — Good golly! Wait, hold them Let me shoot 'em some » Darktown Gamhlin, The Crap Game, Robert & Charlie Hicks (1930). '

COMBO Voir gumbo.

GONE ► (Années 40-50.) Complètement parti (musique, drogue...) : « She makes me feel so good all night long Reelin’ and a-rickin’ ’til I’m almost gone » I Get a Thrill, Wvnonie Harris (1954). ► Excitant, beau, terrible : « She’s too shirt, she’s too tall She’s in the groove* And right on the ball* She’s reet*, petite and gone » Reel, Petite and Gone, Louis Jordan (1947). Dans ce sens, a succédé à ow/ of the world* (extraordinaire) dans le langage des hoppers. • LONG GONE. Surnom du chanteur loui- sianais Luke « Long Gone » Miles (1925) : Long Gone, Luke « Long Gone » Miles (1961).

GOO-GOO EYES (Make) Faire les yeux doux : « When the jazz* band struck up You’d be surprised Everybody in the hall* Was goo-goo eyed » At The New Jump Steady Ball, Ethel Waters (19221

GOOD BOOK La Bible : « And the old people told me, baby But I never did know The Good Book declare You got to reap just what you sow » Cypress Grove Blues, Skip James (1931).

GOOD LOOKING OUT Expression de remerciement: Good Lookin’ Out, Stanley Turrentine (ca 1965). GOOD THING 252. Certitude, information sérieuse, sûre. 253. Chance, bonne fortune. - Ooh baby You done lost your good thing now The way I used to love you baby Baby, that’s the way I hate you now » You Done Lost Your Good Thing Now, B,B. King (1964).

GOODS Voir dry goods.

GOOF . Imbécile, connard, balourd. Z Fausse note, couac. ; V. goof off : faire une faute, se conduire de façon irresponsable, stupide ; paresser, glander, se les rouler : Goofin' Off Illinois Jacquet (1947).

GOOFER (Gopher, goopher, goofy) DUST Afr. Du congolais nguba, ayant donné eoober, arachide (1888). Toofer est un terme générique (comme coodooing, handicapping ou tricking) désignant les pratiques magiques; il ren- ■ Die aussi à déveine, guigne ou poisse : Goophy Dust, Bennie Moten (1924). Voir dust.

GOOSE Oie. Surnom du saxophoniste Johnnv Griffin I1928): « A dude [...] with a neck like a goose, but a beautiful cat [...] My man*... » Interview de Willis Jackson, cité sur la pochette du LP Muse 5162 Bar Wars. The Goose Is Loose, Willis Jackson (1977).

GOREE Ferme-pénitencier de Sugarland, Texas : Goree Blues, Almora (1934).

GOSPEL De God, Dieu al spell, incantation, charme. Evangile. 254. Pour les Noirs du temps de Tesclavage, vérité : « So be true, be true, don’t lose your lyin’ 'cause all I want is gospel all the time So be true, be true, don’t lose your lyin’ Be True Be True Blues, Henry Sims (1929). 255. Depuis les années 30, forme du spiritual* ; il s’en distingue par le fait qu’il est le plus souvent composé (et non plus tiré de cantiques, le plus souvent anonymes) et par sa forme plus rythmée où transparaît . influence du jazz et du rhythm* and blues : « I swear to God I’ve got to preach these gospel blues Great God amighty Oh I’m gonna preach* these blues And choose my seat and set down » Preachin' The Blues, Son House (1930).

GOUGE ► Filou, escroc. ► Syn. : rent* party : The Gouge of Armour Avenue, Fletcher Henderson (1924).

GRAB Plaire, aimer, botter : « You can snatch* it, you can grab it, You can break it, you can twist it, In a way that a fellow* can get it, I ain’t had my right mind, Since I have blowed* into this town My jelly*, my roll*, Sweet mama, don’t want you to let it fall » Shake It and Break. It, Charlie Patton (1929).

GRAND Un millier de dollars : Twenty Grand Blues, Lizzie Miles (1939).

GRAND PRIZE Grand Prize Beer Company, marque de bière vantée par Clarence « Gatemouth » Brown dans Pale Dry Boogie de 1952 : « You may be wonderin', what’s the reason why Everybody’s now drinkin' the beer that’s pale and dry I’ll give you a tip, a hint to the pleasure wise Grand Prize is a beer that’s always satisfies »

GRAND TRUNK Ligne de chemin de fer reliant Chicago, Illinois, à l’Ontario (Canada) : Grand Trunk Blues, Red Nelson (1935).

GRANNING Voir louding.

GRASS Herbe, marijuana : The Grass Is Getting Greener* Everyday, Cecil Gant (ca 1944-46).

GRAVY Jus de viande. 1. Comme de nombreux termes de cuisine, gravy évoque la sexualité : « Say the way she fries my steak People I’m satisfied And the way she serves her gravy Man, you’d be surprised Say, she serves me in the morning She serves me late at night Said, and everything she serves me She serves it to me right » Gravy Serves, Buddy Moss (1935). ► Argent, fric; le pouvoir qu’il procure (années 40). All for Grits and Gravy, Fess Williams (1930). 256. GRAVY SERMON. Voir preaching. 257. GRAVY TRAIN. Ceux qui poursuivent un joueur chanceux pour profiter de ses largesses; bon boulot procurant aisance et considération : « Georgia Brown, Sioux City Sue One two (?) Caldonia too They be there, jumpin’* like men Oh mister Blues, ain’t you glad? You gonna ride, ride on gravy train All aboard, get on gravy train » Gravy Train, Tiny Bradshaw (1949). 258. GRAVY TRAIN PREACHER. Voir preaching.

GREASE • Manger, bouffer. • Jouer de façon inspirée, authentique : The Grease Patrol, Plas Johnson (ca 1982). • GREASY SPOON Cuillère grasse. Restaurant noir, servant de la soul* food : Find Me at The Greasy Spoon (If You Miss Me Here), Coot Grant & Kid Wesley Wilson (1925).

GREAT BUCK MIJSIC Voir black. GREAT NORTHERN La Great Northern Railroad reliait La Nouvelle-Orléans à Jackson, Mississippi ; elle est aujourd’hui intégrée à la Gulf, Mobile and Ohio Railroad (voir GM. & O) : Great Northern Blues, Richard Brown (1927).

GREEN Vert. Billet de banque (à cause de la couleur verte des dollars) : « Eagle* flies on silver Eagle flies on green » UTierc The Eagle Flies, Muddy Waters (1967). • BIG GREEN. Surnom du tromboniste Charlie Green (ca 1900-1936). 259. GREENBACK. Billet de banque qui, par analogie, devient aussi leaf (feuille) ou, en liasse, cabbage (chou) : « I can look and see the green grass Growin’ up on the hill But I haven’t seen the green back of a dollar bill For so long, so long, baby, so long » How Long How Long Blues, Leroy Carr (1928). ► GREEN DIAMOND. Nom d’un train de l’llli- nois Central Railroad (voir Z.C.). « Green Diamond blowin’ her whistle Train's cornin’ round the rail I can’t ride Pullman Guess I’ll have to ride* the rail » Lake front Blues, Little Brother Montgomery (1935). ► GREENS. Verdure, partie verte des légumes que les maîtres abandonnaient à leurs esclaves : Fat Meat and Greens, Jelly Roll Morton (1926). ► LONG GREEN. Beaucoup de fric, une jolie galette : Long Green Stuff, Howlin’ Wolf (1962). ► TURN MONEY GREEN. Litt. : changer la (petite) monnaie en vert (en dollars), enrichir, faire fructifier : « If you’ll be my woman I will turn your money green Show you more money, baby Than Rockfeller ever seen » I Will Turn Your Money Green, Furry Lewis (1928).

GREYHOUND Lévrier. 260. Célèbre compagnie d’autobus desservant toute l’Amérique du Nord : « You can bury my body Down by the highway side Lord my old devil spirit Can catch a Greyhound bus and ride » Me and The Devil, Robert Johnson (1927). 261. Surnom d’une policy* wheel de Chicago dans le milieu des années 30 : « When you playin’ policy* Play 4-18 and 56 You can pile up your black money ’cause you sure gonna get it fixed* Cryin’, oh look what the Greyhound has done to me It done took all my money And still it won’t let me be » Policy Wheel Blues, Kokomo Arnold (1935). 262. V. Filer à toute vitesse.

GREYSTONE Le quartier de sécurité de la prison de Pleasanton, Californie : Greystone Blues, Big Joe Williams (I960).

GRIND Moudre : « Now I grind my coffee* For two and three dollars a pound And it ain’t no more cheap Like mine in town It’s so doggone* good Until it make you bite your tongue And I’m a coffee grindin’ mama Won’t you let me grind you some? » Coffee Grindin’ Blues, Lucille Bogan (1929). Rouler, jouer des hanches (music-hall); d’où faire l’amour, baiser (voir exemple précédent) : « Ain’t but one thing That make me sore When you grind me one time And just won’t do it no more » Steady Grinding, Dorothea Trowbridge and Stump Johnson (1933). ► GRINDER ou COFFEE GRINDER. Celui qui « moud » avec art, amant(e) : « Bought me a coffee grinder Got the best one I could find So he could grind* my coffee* ’cause he has a brand new grind » Empty Bed Blues, Bessie Smith (1928). « I got so many customers I don’t have no time at all I work seven days a week in my mill That’s why they call me the grinder man Oh the little girls They bring their shops to my mill I don’t fool* ’round with men I only grind for the girls I’m a grinder man I stays open both night and day They call me the grinder man Stays open both night and day » Grinder Man, John Lee Hooker (ca 1953-55). ► JOE THE GRINDER. «Joe le baiseur», excellent amant : Joe The Grinder, Irvin Lowry (1939). Le terme jody en est, selon certaines sources, la contraction. ► ORGAN GRINDER. Joueur d’orgue (de Barbarie). « Organ grinder, organ grinder Organ grinder play that melody Take your organ And grind some more for me » Organ Grinder Blues, Victoria Spivey (1928). : Mais aussi « titilleur d’organes », amant expert, comme l’atteste ce même Organ Grinder Blues : « Grind* it north Grind it north and grind it east and west When you grind it the best Organ grinder, organ grinder Organ grinder don’t you tell me you’re through If you are tired Let mama grind awhile for you » ► PORK GRINDER. ® Organes génitaux : « I wake up this morning With my pork grinder in my hand If you send me no woman Please send me a s/ssy* man » Sissy Man Blues, Kokomo Arnold (1935). ® Homme, amant.

GRIPPING En saisissant. Conduite de soumission adoptée par le vaincu d’une joute orale (voir dirty* dozens).

GRIT 263. Farine de maïs (voir nitty-gritty) : « If I don’t love you Grit ain’t grocery Eggs ain’t poultry And Mona Lisa was a man » Grits Ain’t Grocery, (1968). 264. Energie, courage (années 40). 7>jiwg to Get My Grits, Buster Brown (1964).

GROAN Syn. de moan* : « Put your arms ’round my back Baby squeeze me tight Girl you know what I like Make me moan and groan Make me feel so good » Breakfast in Bed, Lonnie Brooks lea 1979). « When you feel like groaning It ain’t nothing but love, children, That must be the Holy Ghost Cornin’ down from above » When You Feel Like Moaning, cité par Harold Cour- lander dans Negro Folk Music.

GROOVE Plaisir : Buddy’s Groove, Buddy Guy (1967). V. Avoir du plaisir, jouir : Groovin’ High, Dizzy Gillespie (1945). • Surnom de l’organiste Richard « Groove » Holmes (1931) : Groove’s Bag, Richard Groove Holmes (1962). ► GROOVY. AU poil, super : That’s The Groovy Thing, Earl Bostic (1945). ► IN THE GROOVE. Litt. : dans la rainure. ® Dans les années 30, l’expression devint populaire et faisait référence aux délices promises à l'homme rejoignant une femme : Rock Me in The Groove, Sweet Georgia Brown (1941). ® Ce sens fut rapidement occulté en étant adopté par les Blancs; passé d’une communauté à l’autre à travers l’un des rares lieux d’échange, la musique, le terme prit son sens musical actuel (pour le Webster, c’est « play swing music in exalted mood ») et désigne une interprétation particulièrement swinguante. Ain’t That a Groove, James Brown (1966). ® Par extension, au poil, dans le coup, super : « Don’t care if you’re young or old Get in the groove Let the good times roll » Let The Good Times Roll, Koko Taylor (1978).

GROSSBECK Pour Groesbeck. Village de l’est du Texas, près de Waco, siège de la prison du comté de Limestone, construite en 1923 : « Take Fort Worth for your dressing And Dallas all for your sal So you want to go to the state penitentiary Go to Grossbeck for your trial I hung around* Grossbeck I work in hard showers of rain I never felt the least bit uneasy 'til 1 caught that penitentiary bound train » Blind Lemon's Penitentiary Blues, Blind Lemon Jefferson (1928).

GROUNDHOG Marmotte d’Amérique. L’homme en quête d’une aventure : « There’s a groundhog rootin* Rootin’ in the next door yard Ain’t nothin’ can stop him Unless the ground gets real hard » Ground Hog Blues, Little Son Jackson ( 1948). GROWL Grognement. Sorte de grognement rauque, imitant la voix humaine, que le musicien produit avec un instrument à vent (voir dirty) : « Bechet est le premier que j’aie entendu faire le growl. Le growl n’est pas un truquage. C’était la manière dont il souhaitait jouer. Bechet appelait ça \egoola. C’était le nom de son chien, qu’il emmenait avec lui et qui se trouvait toujours dans les parages. » Interview de Johnny Hodges, cité par Stanley Dance dans Duke Ellington. Pratiquement abandonné dans le style bop, absolument prescrit dans le cool, le procédé réapparaît avec le retour de ¡’expressionnisme dans le hard bop ou le free jazz.

GUITAR Surnom des bluesmen Robert « Guitar » Welch (1896), Guitar Nubbitt alias Alvin Hankerson (1923), Arthur « Guitar» Kelley (1924), « Guitar Slim » alias Eddie Jones (1926-1959), « Guitar Shorty » alias John Henry Fortescue (1932-1976), du guitariste chanteur Johnny « Guitar » Watson (1935) et du guitariste Matthew « Guitar » Murphy (1929) : Matt’s Guitar Boogie, Matt « Guitar » Murphy (1963). • GUITAR JUNIOR. Pseudonyme des bluesmen Luther Johnson Jr. alias Lee Baker Jr. ou Lonnie Brooks ( 1933) et Luther Johnson aussi connu sous les sobriquets de Snake et de Georgia Boy (1934-1976) : Call Me Guitar Junior, Luther Johnson (cw 1990). ► LAP STEEL GUITAR. Guitare métallique que le joueur (Sonny Rhodes, par exemple) utilise posée à plat sur ses genoux.

GULFPORT ISLAND Gulf & Ship Island Road, ligne de chemin de fer du sud du Mississippi construite entre 1887 et 1902 : « It’s the last fair deal gone down On that Gulfport Island Road » Last Fair Deal Gone Down, Robert Johnson (1936).

GULLY LOW Pour low as a gully, aussi bas que le caniveau. ► Déprimé, triste. ► Qualifie une musique râpeuse, terre à terre : Gully Low Blues, Louis Armstrong (1927).

GUMBO (Gombo) Désigne à l’origine une sorte de légume appelé aussi okra (1805). 1. Plat typique de la cuisine créole, aux variantes innombrables : gombo filé (à la feuille de sassafras en poudre), gombo févis (sorte de légume fibreux), gombo z’herbes (à l’okra), gombo z’huitres, shrimp gombo... ; « Nobody could top him [Manuel Perez] in the street* parades because he could hit those high notes. He always had a stomach full of food, while most of them fellows* who played the street parades were full of whiskey. About two hours later, they pooped out, but Manuel Perez didn’t, he had eaten two pots of gumbo before he left. » Interview de Danny Barker in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 2. Langue des Noirs francophones de Louisiane : « C’est la transformation par un esclave africain ignorant de la langue française en une langue concise et simple, mais en même temps douce et musicale. La tendance est d’abréger le plus possible les phrases, et dans la forme et dans la construction. Tout ce qui n’est pas absolument nécessaire à la compréhension de la phrase est supprimé. Le genre n’existe pour ainsi dire pas et le verbe est simplifié à l’extrême. » Alcier Fortier, Louisiana Folktales in French Dialect. (1895).

GUTBUCKET De guts, boyaux, tripes. Au sens figuré, sincère; fondamental, «venant des tripes » (1900-1950). ► Contrebasse rudimentaire faite d’un baquet et d’un manche à balai ( voir washtub bass'). ► Qualifie une musique low-down, à ras de terre, une musique de barrelhouse : « In this era, Louis Armstrong played in the ensemble and [King] Oliver took the majority of the solos. He had a real “gutbucket” tone and really moved*. » Interview de Tommy Brookins, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. GUTTER Caniveau. ► Courage. ► Comme gut bucket ou nitty-gritty, gutter marque l’origine et l’ancrage social de la musique et atteste de son authenticité : « I met a girl from the Delta* Grabbed her and I held her Squalled like a panther Still that didn’t help her She was in the clutches of a drunkard A man from the gutter » Gutter Man Blues, George Hannah (1929). 265. GUTTER MUSIC. Musique authentiquement noire, dénuée de tout artifice (obsolète). 266. GUTTY. Authentique, vrai (1930-1940).

GYPSY Tzigane, bohémienne ; elle joue un grand rôle (divinatoire et/ou maléfique) dans de nombreux blues : « The gypsy woman told my mother Before I was born “You got a boy child cornin’ Goin’ to be the son-of-a-gun* He gonna make pretty women Jump* and shout*..." » Hootchie Cootchie Man, Muddy Waters (ca 1952). 267. GYPSY HOUND. Nom d’un pas de danse : « These are not my weary dogs* These are the hottest kind of dogs I mean they 're steamin’ puppies. Now on my feet's the gypsy hound. You oughta see me do the black* bottom now » Hot Dogs, Blind Lemon Jefferson (1927). H

H Pour horse, cheval. Héroïne (ou quelquefois haschisch) : « The habit* is a false crutch. Don’t get on the H. [...] Look at me, now. I had a eighteen-thousand-dollar home, and it’s gone. I spent four to five hundred dollars a week for the stuff*. » Interview de Mary Ann McCall, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

► B. H. (BEFORE HORSE). Avant d’être « accro » : « Fats* [Navarro] was a real sweet guy* B.H. — before horse*, is what I mean. He was jovial and always laughing; he was really big before he get on the stuff*. » Interview de Carmen McRae, in Hear Me Talkin ’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

H.N.I.C. Pour Head Nigger In Charge. Contremaître noir dans une plantation (syn. : straw boss) ou responsable noir : « That lighter had an inscription on the side : “To Dizzy* Gillespie with kindest affection. From Moody and Margenia.” On the other side the inscription read, “The HNIC”. So when I lit the cigar, Adam [Powell] laughed, man! [...] I said : “Well Adam, I’ll tell you what, you can get one, but you can’t have those same letters because I’m the HNIC ! You can be NNIC.” So I bought him one and had it inscribed : “To the NNIC which means the Next Nigger In Charge.” » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop.

HABIT Accoutumance aux drogues dures (années 30-60). « Cocaine habit is mighty* bad It’s the worst old habit That I ever had Hey hey, honey, take a whiff on me » Cocaine Habit Blues, The Memphis Jug Band, vcl par Hattie Hart (1930).

HADACOL Marque d’un élixir vendu dans les Etats du Sud après la Seconde Guerre mondiale. La marque du sénateur Dudley Leblanc fut l’une des premières, après l’Interstate Grocer Company qui produisait la farine « King Biscuit » (voir King* Biscuit), à financer des émissions de blues à la radio (KWEM à West Memphis, Arkansas) destinées aux populations noires : Hadacol Bounce, Professor Longhair (1949).

HAGAR Voir aunt.

HAIR (Let one’s hair down) Prendre du bon temps, s’envoyer en l’air : « Let your hair down baby Let’s have a natural* ball* 'cause when you're not happy It ain’t no fun at all » T. Bone Shuffle, T. Bone Walker (1947).

HALF PINT Demi-portion. Surnom du chanteur Frankie « Half Pint » Jaxon (1895-?) qui enregistra entre 1927 et 1940.

HALL •N’importe quel endroit (dancing, club, salle de concert...) où se produisent des musiciens de jazz : Mahogany Hall Stomp, Louis Armstrong (1929). HAM Jambon. Métaphore pour coït : « Never miss the sunshine ’til the rain begin to fall You never’ll miss your ham ’til another mule’s* in your stall » Don't Fish in My Sea, Ma Rainey (1926).

HAMAZOO Variante du Kazoo*.

HAMBONE Métaphore, appartenant à la tradition culinaire (voir kitchen* man), désignant les organes sexuels masculins : « I’m going to Tishamingo To have my hambone boiled These Atlanta women Done let my hambone spoil » Tishamingo Blues, Peg Leg Howell (1926). • Surnom du pianiste « Hambone » Willie Newbern (?-1940? ; enregistrements en 1929).

HAMFAT Dans l’argot blanc, mauvais, médiocre; dans l’acception noire, bon temps. Les Harlem Hamfats enregistrèrent entre 1936 et 1939.

HAMMER Marteau. ► Femme noire. ► Quelquefois employé, dans une métaphore particulièrement agressive, pour désigner le pénis : « I got a ten-pound hammer The women love to hear it sound They says : “Come on, Moses Go and drive it down” » 7ez? Pound Hammer, Moses Andrews (1937). On peut en voir l’origine dans la ballade de John Henry qui reste l’un des plus puissants symboles de la force physique, et sexuelle : « John Henry* had a little girl Her name was Polly Ann John was on his bed so low [She] drove with his hammer like a man »

HAMMERING-ON Technique guitaristique (liaison frappée) qui consiste, après avoir fait sonner une note, à la prolonger en posant un doigt de la main gauche à une ou plusieurs cases de là, de façon à obtenir une nouvelle note plus aiguë, ceci sans nouvelle intervention de la main droite. La technique inverse, ou pulling off (liaison tirée), consiste à relâcher une corde après sa mise en vibration de façon à ce qu’elle sonne à vide. Ces techniques caractérisent le jeu de Leadbelly ou de John Lee Hooker.

HAND Main. ► Hand (Hoodoo hand, mojo hand). talisman. Souvent décrit comme un petit sac de flanelle rouge (voir red* flannel) contenant des ingrédients variables (brins d’herbes séchés, racines de mandragore...) : « Lord, 1 know many of you mens, Wondering what the snake doctor* got in his hand* He’s got roots and herbs Steals a woman, man, everywhere he land » Snake Doctor Blues, J.D. Short (1932). On parle de talkin ’ hand lorsque le talisman est supposé trembler pour répondre aux questions posées. ► Aux cartes, la main : You're My Best Poker Hand, T. Bone Walker (ca 1947-50). 268. BIG HAND. Applaudissements nourris : « Thank you very much, ladies and gentlemen, have a big hand for my band: they workin’ hard*. » B.B. King, commentaire entre deux morceaux lors de l’enregistrement public « At The Regal » (1964). 269. COLD IN HAND. Fauché, sur la paille : « You left me baby Because I'm cold in hand You taken my money And spent it on your other man » Ice and Snow Blues, Peetie Whearstraw (1931). 270. HAND JIVE. Technique utilisant le corps comme instrument de percussion; l’un des seuls adeptes de cette technique qui aient été enregistrés semble être le chanteur et harmoniciste J.C. Burris (1928): « That’s the sound of the hand jive Dot that jive* for a long long while That’s the jive that you got to know This jive git from coast to coast Call it the Handjive Do that crazy handjive » Hand Jive, J.C. Burris (1975). 271. HAND ME DOWN. Objet usagé, d’occasion : « Aw, sometimes 1 think I got the sweetest girl in town She’s tailor made And she ain’t no hand me down » Married Woman Blues, Joe Callicot (1968). 272. HAND RAP (SLAP). Salut non verbal par lequel deux personnes se frappent les mains. HANDY MAN. Homme à tout faire, adroit de ses mains et, par extension, amant expert : « He threads my needle, gleans my wheat Heats my heater, chops* my meat My man is such a handy man Sometimes he’s up before dawn Busy ivorking* on my front lawn* My man is such a handy man » Handy Man, Victoria Spivey (1928). • LEFT HAND. Gaucher (syn. : lefty). Douteux, maladroit. Surnom du bluesman Frank Craig alias « Left Hand » Frank (1935-1992). ► LOCKED-I IANDS STYLE. Litt. : style « mains liées ». Technique pianistique, caractéristique de Milt Buckner, où les deux mains jouent en accords, donnant par là l’impression d’être liées (syn. : blockchord*). ► OVERHAND. Technique pianistique du début du siècle.

HANG AROUND (somebody) Traîner, tourner autour (de quelqu’un) : « Woman, I don’t want a soul* Hangin' around my house when I'm not in home I don’t want you to open the door for nobody Baby, when you’re all alone » Don’t Ansiver The Door. B.B. King (1966).

HANGOVER Gueule de bois : « Lord, 1 wonder what could have happened Ain’t nobody here but me All these empty’ bottles on the table here I know 1 didn't drink all by myself I must have a blues hangover » Blues Hangover. Slim Harpo (1960).

HANKY De hanky panky, supercherie. Fourbe, trompeur : £WZ ¿mrZ Hanky, Mercy Dee Walton (1949).

HANNAH Voir Old Hannah. HANNAH MAY Pseudonyme de la chanteuse Jane Lucas et des sœurs Addie « Sweet Peas » Spivey (1910-1943), Elton « Za Zu Girl » et Victoria Spivey (1906-1976).

HARD Par inversion de sens, super, fantastique, au poil : « You have to play real hard when you play for Negroes. You got to go* some to play for Negroes. » Interview de Leonard Bechet cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll

HARD BOP Depuis 1955 environ. Courant musical reprenant à son compte une partie des apports du bop, en s’en démarquant par des rythmes moins complexes et par un retour aux sources du blues et du gospel (il est également appelé jazz funky, soul ou churchy) : « In contrast to the cool* school, another movement arose that was tagged “hard bop" because it reasserted the primacy of rhythm and the blues in our music and made you get funky* with sweat to play it. [...] Hard bop with its more earthy, churchy* sound drew a lot of new black fans to our music... » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop. Principaux représentants du style : Art Blakey and The Jazz Messengers, Horace Silver, Cannonball Adderley, John Coltrane, Sonny Rollins...

HARD LUCK Guigne, poisse (syn. : bad* luck). « Hard luck is at your front* door Blues are in your room Callin' at your backdoor* What is gonn’ become of you » Bird Nest Bound, Charlie Patton (1930).

HARD-HEADED Têtu, obstiné, « tête de pioche » : « When a dumb man tries to gamble He expect to lose When you got a hard-headed woman, An’ you’re bound to have a blues » Hard-Headed Blues. Clifford Gibson (1929).

HARDY John Condamné à mort pour meurtre à la suite d’une rixe lors d’une partie de dés, John Hardy fut exécuté par pendaison en 1894 : «John Hardy lost that fifty cents It was all he had in the game He drew the forty’* four that he carried by his side Blowed out that poor negro’s* brain, Lord, Lord » John Hardy, cité par Alan Lomax dans Folk Songs of North America.

HARLEM Quartier de New York, au nord de la presqu’île de Manhattan. A la fin du XIXe siècle, la population noire de la ville était disséminée, avec cependant deux zones de plus forte concentration, au sud de Manhattan et autour de l’actuelle Pennsylvania Station. Harlem, depuis les années 1880 et la prolongation du métro aérien jusqu’à la 129e rue (voir A* Train), était un quartier résidentiel. Avec l’effondrement du marché foncier en 1904/1905, la population de couleur commença à s’y installer (le nombre de Noirs à New York avait triplé entre 1880 et 1910) de façon concentrique à partir de l’angle de la 7e avenue et de la 135e rue. Au début des années 20, l’ensemble du quartier était noir. Les institutions et les églises noires s’y étaient installées, ainsi qu’une bonne partie de l’élite intellectuelle (Langston Hughes, James Weldon Johnson, Marcus Garvey...); Harlem était alors une zone d’intense création littéraire, théâtrale et musicale, qui devint l’endroit à la mode pour les couches blanches aisées. « When I take my vacation in Harlem What a hell* of a time it will be With the rhythm of that Harlem hi-de-hi And the girls that I know care for me » When I Take ,Wv Vacation in Harlem, Tampa Red (1935). Cette période, appelée « Renaissance de Harlem », n’a pas survécu à la grande crise économique et à la paupérisation progressive du quartier. « Entre cette date [1924] et 1930, et avec une rapidité stupéfiante, Harlem était passé du statut d’élégante capitale du monde noir, à celui de quartier sordide et dangereux [...] Les causes de cette dégradation étaient nombreuses : multiplication des bas salaires, des loyers élevés, obligeant les familles à prendre des pensionnaires; affluence de campagnards illettrés et ignorant les modes de vie urbains ; et, comme à Chicago, la loi de la pègre. Avec la Prohibition, celle-ci avait pris le contrôle des cabarets, développé le marché illicite de l’alcool, le colportage de la drogue, le racket [...] La déscolarisation des enfants, la délinquance juvénile avaient pris des proportions considérables... » (James Lincoln Collier, in L’Aventure du jazz). Après 1945, le ghetto déborda au nord dans le Bronx, alors qu’un autre pôle se formait à Brooklyn, autour de Bedford- Stuyvesant. Jungle Night in Harlem, Duke Ellington (1930).

HARP (Mouth harp) Harmonica : « I was cuttin’ hair, and pickin’ cotton, and playin’ the piano and I went into town and there was a harp player and a real black fellow sleepin’ on the crab table, Little* Walter and Black Honey. Walter was sleepin’ with his head on the rack and Black Honey was on his guitar and the boss had to get him a pillow. I said to them : “I’m gonna buy some groceries, and that goddam rang a bell for Little Walter when I said I’d buy some groceries...” » Interview de Sunnyland Slim, cité par Sam Charters dans The Legacy of The Blues. Les bluesmen utilisent généralement un harmonica diatonique; d’où le recours à des techniques particulières (voir bendings notes, cross) pour produire les demi-tons.

HARPO SLIM Pseudonyme du bluesman James Moore (1924-1970): « My husband used to be as skinny as a rail, so when he got his first record in 1957, we called him “Slim”. The “Harpo” is for ’’mouth harp*”, you know, with an O on the end. » Interview de la femme de Slim Harpo, citée par Sam Charters (LP Sonet 769).

HART Marque de pain : Hart’s Bread Boogie, Billy Red Love (ca 1954).

HASTINGS STREET Principale artère du quartier noir de Detroit, Michigan : « Hastings Street, relativement étroite, s’allonge sur des kilomètres, bordée de maisons basses en briques ou en bois dont bon nombre dans un état de délabrement avancé. Nous notons de nombreuses et rudimentaires boutiques (coiffeurs, épiceries, poissonneries...) fréquentées par une clientèle dont l’état de pauvreté est frappant. Entre certaines maisons, de misérables alleys* perpendiculaires à la rue et encombrées de poubelles s’enfoncent vers des baraques ou des terrains vagues... » Jacques Demêtre et Marcel Chauvard, * Voyage au pays du blues », in Jazz Hot, nos 149 à 154 (déc. 1959 à mai 1960). « If anybody just happen to ask you Where the weddin’ gonna be Tell ’em right down there On Hastings Street » Can’t You Read, Big Maceo Merriweather (1941). La rue, riche en bars et en animation nocturne dans les années 20 et 30, vit souvent des gens comme Cow Cow Davenport, Speckled Red ou Will Ezell s’y produire. Elle fut en partie détruite en 1961 lors du percement d’une voie rapide.

HAUL ASHES Litt. : tirer les cendres. ► Partir, se barrer : « If you catch my jumper Hang it upside your wall Now you know by that, babe I need my ashes hauled » The Girl I Love, She Got Long Curly Hair, Sleepy John Estes (1929). ► Faire mal, battre, frapper quelqu’un. ► Expression populaire pour faire l’amour, ramoner; s’emploie indifféremment pour les deux sexes (pour les Blancs, ashes est associé au sperme et tawZ (one’s) ashes réservé au mâle) : « Saw a big black spider* Creepin’ up my bedroom wall Found he was only going To get his ashes hauled » Black. Spider Blues, Sylvester Weaver (1927). HAWK Aigle. Vent glacial. Surnom du saxophoniste Coleman Randolph Hawkins (1901-1969) : « Scotty knew that music backwards. He used to sound like Hawk too. » Interview de Budd Johnson cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop.

HAY 273. Menue monnaie (essentiellement dans l’expression that ain’t hay) : « I’m dressed up tight* Goin’ a-workin down the ZZne* Me and my gal gonna shake* that thing We just don’t know, honey, that just ain’t hay Oh listen, when I tell you Honey, that just won’t hay » It Just Won't Hay, Barbecue Bob (1929). 274. Marijuana.

HEAD Tête. • Noir. • Gland du pénis; fellation. D’où bead chick, femme pratiquant la fellation. Abréviation de head arrangement, arrangement « de tête » élaboré et mémorisé par les musiciens en cours de répétition; s’oppose à l'arrangement écrit, dû généralement à un arrangeur : «When we first started out, we didn’t have good arrangers writing just for the band*. We used heads we have made up on the job* for the first four years or so, and then we began to get arrangements, too. » Interview de Buck Clayton, in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► Etat d’âme; disposition d’esprit. ► Un nom d’alcool suivi de head signifie soûl, bourré : gin head, hooch head, pake head, jig head, juice head, jug head, lush head, whisky head, wine head : Gin Head Woman, Tampa Red (1943). Jake Head Boogie, Lightnin’ Hopkins (ca ‘1951). De même pour les noms de drogue : dope head, hop head, reefer head, weed head : Dope Head Blues, Victoria Spivey ( 1927). Reefer Head Women, Jazz Gillum (1938). 275. DOUBLE HEADED (SIGHTED) DOCTOR. Voir root doctor*. 276. EGG HEAD. Crâne d’œuf, intello : Ægg Head, Cecil Payne (1949). • FAT HEAD. Stupide, couillon. Surnom du saxophoniste David Newman (1933). 277. HEAD KNOCK. Selon Mezz Mezzrow, Dieu. 278. HEAD RAG HOP. Danse: « Say you lil’ girl With the black dress on Come over here, stand by me Let me show you how to do the head rag hop » Head Rag Hop, Romeo Nelson, vcl par Tampa Red et Frankie Jaxon (1929). 279. OUT OF (SOMEONE’S) HEAD. Cinglé, maboul, à côté de ses pompes : « She’s got me crazy, out of my head With my baby, mean in bed She keeps me mumbling and fumbling “Don’t stop now” Gotta have loving, ooh, wow » I Get a Thrill, Wynonie Harris (1954).

HEAL Guérir, cicatriser : « One night I was lavin’ down I feel so bad, so low, so low Blues came along Heal me heal me » The Healer, John Lee Htxiker (1989). 280. HEALER. Guérisseur, guérisseuse : « Blues is the healer All over the world He heal me He can heal you » Tlx Healer, John Lee Hooker (1989).

HEAT Chaleur. ► La pression policière (du point de vue des gens sur lesquels elle s’exerce). V. subir cette pression : « I went to a good-time flat* Last Saturday night The cops* knocked on the door Everybody made their flight » It’s Heated, Frankie « Half Pint » Jaxon (1929). ► Les lieux où elle s'exerce. 281. CANNED HEAT. Voir ce terme.

HEAVY UPSTAIRS On qualifie ainsi un beau parleur, un bon « rapper », maniant toutes les subtilités du langage des rues et possédant un sens acéré de la repartie. (Heavy signifie important, fondamental.)

HEEBIE JEEBIES Tremblote, bougeotte, danse de Saint- Guy. Danse : « So come on down Do that dance they call the heebie jeebies dance Sweet mama Papa's go to do the heebie jeebies dance » Heebie Jeebies, Louis Armstrong (1926).

HEIFER Femme, fille, nana jeune et belle : « Then I walked away And I hung my head and cried Says, I feel so lonesome I ain’t got my heifer by my side » Milk Cow Blues tt° 4, Kokomo Arnold ( 1935).

HEIL Enfer. Bon, super, excellent ; terme intensifiant le sens du mot suivant : « Why they don’t leave Vietnam Leave those poor people alone They got a hell of a problem Just like I have at home » Vietnam Blues, Juke Boy Bonner (1972). 282. A HELL OF (TO BE). Etre un crack, un as : « Zue Robertson was a hell of a trombone player, but he wasn’t a leader. » 283. Interview de Danny Barker, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. e 284. HELL’S KITCHEN. Litt. : la cuisine de l’enfer. Nom d’un quartier de New York aux alentours de la 6 avenue, à hauteur de la 40erue; ce quartier abritait une importante communauté noire au début du siècle, avant que Harlem* ne draine l’essentiel des Noirs de l’agglomération. 285. HELLUVA. Pour a hell of : « He’s a great artist and knows how to get around those things, so I have to give him credit for it because he’s a helluva musician. » Interview d'Earl Hines cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop. • HIGH SHERIFF FROM HELL. Litt. : grand chef issu de l’enfer. Surnom que s’est attribué le bluesman Peetie Wheatstraw (1905- 1941). « I’m Peetie* Wheatstraw The High Sheriff from Hell The way I strut* my stuff Ooh well, well, now, you never can tell » Peetie Wheatstraw Stomp, Peetie Wheatstraw (193- 286. RAISE HELL. Voir raise* helllcainlsand.

HEN Poule. Femme, par opposition à jeune fille (1920- 1940): « Says I knocked on my front* door, mama My good gal* wouldn't seem to let me in Says, it must be another rounder* Laying up with my old black hen » Front Door Blues, Kokomo Arnold (1935).

HENRY John La légende, popularisée par la célèbre ballade, veut que John Henry — poseur de voies ferrées de son état — soit mort de fatigue à l'issue d’une compétition qui l’opposait à une machine : « This old hammer, wham Killed John Henry, wham Can’t kill me, wham Can’t kill me, wham » Chant de travail, recueilli en 1928 par Metfessel, cité par Paul Oliver dans The Story of The Blues. Selon certaines sources, l’origine de la légende pourrait se trouver dans un accident mortel qui, en 1870, endeuilla la construction du Big Bend Tunnel sur la C & O* Railroad : «John Henry was a new born, baby Sittin’ down on his mama's knee Said that Big Bend tunnel On the C and O* Railroad It’s gonna be the death of me, Lord Lord » John Henry, Leadbellv (1933). Rapidement John Henry devint un héros à la force prodigieuse, un symbole de courage et de virilité : « Well they taken John Henry to the White House And they buried him in the sand All the women from the east All the women from the west Come to see their steel drivin’ man » John Henry, Memphis Slim (1959). « La ballade dénonce les aberrations d’une mécanisation inhumaine et donne en exemple la virilité du héros, sa force prodigieuse, son invincibilité et son humanité. Aux yeux des Noirs, John Henry est un héros non seulement à cause de ses prouesses mais parce qu'il fut toujours conscient de la singularité de son destin et de la mort qui l’attendait. Différent en cela du trickster, il préfère affronter l’adversaire de front et refuse de mourir autrement que le marteau à la main. » (Geneviève Fabre, in Le Théâtre noir aux Etats-Unis). • Surnom du bluesman William George Tucker alias John Henry Barbee (1905- 1964).

HENRY’S SWING CLUB Club situé Hastings Street à Detroit : Henry’s Swing Club, John Lee Hooker (1948).

HEP Voir hip.

HESITATION Danse en vogue durant la Première Guerre mondiale : Hesitation Blues, Jim Jackson (1930).

HEX Sortilège, mauvais sort : « Won’t you tell me baby Who can your good man be I woke up this morning baby With a hex all over me » 1 Couldn't Stay Here, Charly Jordan (1936).

HI Surnom du bluesman Henry Brown.

HI TIDE Pour high tide, marée haute. Surnom du bluesman Willie Gitry alias « Hi Tide Harris » (1946-ca 1990). HI WANNA De Hawaïan, Hawaïen. Technique d’accord de guitare.

HI-DE-HO MAN Surnom du chanteur et chef d'orchestre Cab Calloway (1907) : « Quelque temps plus tard, un soir où je ne prenais pas garde à ce que je faisais, en plein milieu de Minnie, j’eus un trou de mémoire et ne pus me souvenir des paroles. A leur place, je plaçais un “Hi- de-ho” que l’orchestre reprit en chœur, suivi par les clients. Sous cette nouvelle forme, cette chanson devint un véritable tube qui fit vendre une incroyable quantité de disques, ce qui me permit d’améliorer ma carrière et me donna même une marque commerciale, “Hi-de-ho”. » Interview de Cab Calloway, cité par Jim Hawkins in Cotton Club.

HIDES Les peaux d’un tambour et, par extension, la batterie elle-même. 287. HIDE-BEATER. Batteur.

HIGH Parti, ivre, soûl : « It’s Saturday night And I’m higher than a Georgia pine One more drink of corn And I’ll leave my Georgia mind » When a Gator Holler, hoik Say It’s a Sign of Rain, Margaret Johnson (1926). Ou défoncé : « Say goodbye, goodbye to whiskey And so long to gin I just, want my reefers* I just want to feel high again » Junker’s Blues, Champion Jack Dupree (1958). 288. HIGH BALL. Se dit d'un train filant à grande vitesse : « We were a forlorn bunch of bays as we stood beside the tracks that night and watched the brakemen raise his lantern and give the engineer* the “high ball”. » W.C. Handy, Father of The Blues. Frisco Hi-Ball Blues, Little Brother Montgomery (1931). 289. HIGH BROWN. Voir brown. 290. HIGH JACK. Voir hijack. 291. HIGH MAN. Syn. de root* doctor. 292. HIGH RISE. Bâtiment à plusieurs étages : High Rise (Closed Doors), Freddy King (1962). 293. HIGH ROLLER. Dépensier, qui jette l’argent par les fenêtres (voir roll). 294. HIGH SHERIFF FROM HEU.. Voir hell. 295. HIGH-YELLER ou HIGH-YALLER. Voir yeller.

HIGH HAT Chapeau haut de forme. Cymbale double, actionnée par une pédale et dite « charleston » ; inventée vers 1926 par Vie Berton et Kaiser Marshall, elle fiat surtout popularisée par Jo Jones alors membre du big band de Count Basie.

HIGHWAY Route à numéro impair qui sillonne les Etats-Unis dans le sens nord-sud. En ce qui concerne les axes est-ouest à numéros pairs, voir route. Les highways ont vu déferler plusieurs générations d’immigrants en route vers les grandes métropoles industrielles du Nord; le peuple du blues chante particulièrement celles qui, depuis le golfe du Mexique, traversent le Delta*. 296. HIGHWAY 13. Chantée par Walter Davis (1938), Bigjoe Williams (1961), Homesick James Çca 1973), elle longe la côte est, de la Caroline du Nord au New Jersey. 297. HIGHWAY 27. Remonte de Gainesville, Floride, jusque dans le Michigan via la Géorgie, le Tennessee et le Kentucky : « Oh I’m going to leave Mississippi now, babe Before it be too late It may be like 27 highway Swear it just won’t wait » Love My Stuff, Charlie Patton (1934). 298. HIGHWAY 41. Relie Miami, Floride, à Chicago, Illinois, via Nashville, Tennessee : Highway 41, Muddy Waters (1972). 299. HIGHWAY 45- Relie Mobile, sur le golfe du Mexique, à Chicago, Illinois, en passant par Tupelo et Jackson, Mississippi : « Goin’ back to Mobile Ain’t gonna leave my home no more Highway 45 Run right back my baby’s door » Highway 45, Big Joe Williams (1962). 300. HIGHWAY 49. Relie Gulfport, Mississippi, à l’ouest de La Nouvelle-Orléans, à Chicago, Illinois, via Jackson, Mississippi et Memphis, Tennessee ; elle se scinde en deux dans la traversée du Delta*, une branche est, via Greenwood, et une branche ouest via Belzoni et Indianola; elle a été chantée par Freddie Spruell (1935) et Big Joe Williams (1935 puis 1958): « Well I’ll get up in the morning Catch the highway 49 Well, well I’m going to book for little Malvina Ooo, man, don’t say she can’t be found » 49 Highway Blues, Big Joe Williams (1935). HIGHWAY 51. Relie La Nouvelle-Orléans à l’Illinois et au Wisconsin, via Jackson, Mississippi, où elle croise la 49; elle a été chantée par Curtis Jones (1938), Jazz Gillum (1938), Smoky Hogg Ica 1950), Stickhorse Hammond (1950), John Lee Hooker (1950), Memphis Slim (1961) et Tommy McClennan : « Now my baby had won five dollars And now, now she spend it (on a VS* Ford) So’s I could meet that Greyhound* bus On that highway 51 road » .Vezz' Highway 51, Tommy McClennan (1940). ► HIGHWAY 59- Traverse de part en part le Texas de Laredo au sud-ouest à Texarkana au nord-est: « I’ve got plenty money Don’t have many friends I just keep on riding until that highway ends Well, when I die Just keep one thing in mind Well, spread all my ashes all on highway 59 » Highway 59, Roy Hawkins (1952). ► HIGHWAY 61. Remonte la vallée du Mississippi de La Nouvelle-Orléans jusqu’à Duluth sur le lac Supérieur, via Baton Rouge, Natchez, Vicksburg, Greenville, Clarksdale, Memphis et Saint Louis : « I’m goin’ to leave here walking I’m goin’ down number 61 And if I find my baby You know we going to have some fun* » Highway 61 Blues, Jack Kelly (1933). Elle a été célébrée également par Roosevelt Sykes (1932), Will Batts (1933), Joe McCoy (1935), Speckled Red (1956) et Memphis Willie Borum (1961). ► HIGHWAY 75. Depuis Houston, Texas, elle remonte vers le nord en direction de Dallas, Texas, Tulsa, Oklahoma, Topeka, Kansas, avant de rejoindre Winnipeg au Canada : « You know I was standin’ on 75 highway Po’ Lightnin’* tryin’ to flag a ride* You know, I walked 75 highway ’till I wore the bottom out under my shoes » 301. 75 Highway, Lightnin’ Hopkins (1959). ► HIGHWAY 99. Court en bordure de la côte ouest de Los Angeles, Californie, à la frontière canadienne, via Sacramento et Seattle : Highway 99, Lowell Fulson (ca 1947).

HIJACK Contraction de high jack. : haut les mains. Voler, faire un hold-up : « I got a mind to ramble* I got a mind to rob and steal I got a mind to hijack, people You don’t know how 1 feel » Hi Jack Blues, Walter Davis (1931).

HILL BILLY ► Montagnard du plateau de Cumberland dans le sud des Appalaches, à cheval entre le Kentucky et le Tennessee. Péquenaud, rustaud : Hillbilly Willie’s Blues, Blind Willie McTell '( 1935). ► La musique issue de cette région : « En 1925, un string band enregistra à New York pour Okeh et, lorsque Ralf Peer leur demanda leur nom, le leader lui répondit : “Appelez l’orchestre du nom que vous voulez. Nous sommes un groupe de bill billies originaires de Caroline du Nord et de Virginie.” Le groupe devint connu sous le nom des Hill Billies, et cette appellation s’appliqua à la musique qu’ils jouaient, malgré les réticences de beaucoup de musiciens qui la jugeaient peu gratifiante. » Torn et M.A. Evans dans Le Grand Litre de la guitare. Ce style musical influença notablement le jeu des bluesmen de la côte est (Blind Blake, Blind Willie McTell, Peg Leg Howell, Blind Boy Fuller...) puis, dans les années 50, le rock'n’roll* (ou rockabilly).

HIP Afr. Du wolof hipi, ouvrir les yeux. Dans le coup, à la coule, au parfum : « With the beat the beat and body heat Get up and jump right outta your seat Just stay on your feet and don’t you trip I’m gonna make you groove* I’m gonna make you hip » Rapp Time, Luther Thomas (1981). 302. HEP. Distorsion blanche de hip : Hep Cat’s Ball, Louis Armstrong (1938). 303. HIPSTER. Mec branché, au parfum (années 1950). « Le hipster [...] savait manœuvrer les leviers et comment on pourrait s’y prendre [...] Il ne manifestait aucune émotion, il restait cool et gardait son sang-froid, n’exprimait son mépris que par un haussement d’épaules presque imperceptible ou, si cela lui paraissait nécessaire, en utilisant son elliptique langage composé d’un vocabulaire fluide et évanescent, dans lequel les mots et les phrases n’avaient pas une signification spécifique mais exprimaient simplement une attitude, souvent ironique et méprisante envers le sujet. » James Lincoln Collier, L’Aventure du jazz. ► HIP TO THE JIVE. Dans le coup : « I’ve got to sell from this bin Everbody’s getting hip to the jive » The Jive Blues, Memphis Slim (1940). ► Ant. de hip : out of it, en dehors du coup, « cave ». ► RIVER HIP. Souple, agile : « She’s a river hip mama And they all wanna be baptized » River Hip Mama, Washboard Sam (1942).

HIT THE NUMBERS Voir numbers.

HIT THE ROAD Prendre la route, déguerpir, foutre le camp : « You told me to hit the road And I did just that Now you find out that you need me But, ooh, I ain’t cornin’ back » The Thrill Is Gone, B.B. King (ca 1969).

HOBO Contraction de hoe-boy, terme désignant les sudistes démobilisés qui, au lendemain de la guerre de Sécession, ne trouvant que ruines et désolation, étaient obligés de se louer à la journée dans les plantations. 304. Chemineau, travailleur itinérant : « I ain’t nothing but a hobo .. Want something to help me to carry my load I have traveled the road so long Ooh well, well, until it have made my shoulder sore » Jungle Man Blues, Peetie Wheatstraw (1936). 305. V. Vagabonder, faire la route : « When I first start to hoboin’ I took a freight train to be my friend You know I hobo, then hobo Long way from home » Hobo Blues, John Lee Hooker (ca 1948-50). ► HOBO JUNGLE OU IIOBOVILLE. Bidonville, campement où se regroupaient les hoboes pour se protéger des descentes de la police ferroviaire (railroad bull) : « Now when I came in on that Mae West I put* it down all at Chicago Heights Now you know, the hobo jungle And that’s where I stayed all night » Hobo Jungle Blues, Sleepy John Estes (1935). HOCKY Mensonge, salades: « ’cause I’m the greatest Deacon, The best you’ve ever seen You all hate old Deacon Jones, ’cause all my chicks* are in the lean I’m the greatest jockey*, And I love to ride* the best I don’t want no hocky Now, how about that mess*. Fare thee well, all you sinners, fare thee well » Fare Thee Well, Deacon Jones, Bull Moose Jackson (1947).

HOCUS POCUS Tromperie, supercherie; sorcellerie, magie noire : Hocus Pocus, Buddy Lucas (1962).

HOG MAW Vessie de porc au vinaigre, plat traditionnel de la cuisine noire : Hog Mate Stomp, Fats Waller (1927).

HOKUM Absurdités, foutaises, blabla sentimental, balivernes. Style de chansons comiques, parodiques et paillardes, très en faveur vers la fin des années 20. Parmi les illustrateurs de ce style, on peut retenir Tampa Red’s Hokum Jug Band avec Tampa Red et Thomas Dorsey, The Famous Hokum Boys, avec Georgia Tom et Big Bill Broonzy et The Hokum Boys, groupe qui vit passer en ses rangs entre 1929 et 1937 Georgia Tom, Tampa Red, Blind Blake, Big Bill Broonzy et Casey Bill Weldon. « I don't know what the word hokum means myself right now [...] but it was a good word to carry, for nobody know that it meant and they say: “Hokum, Hokum Boys, we going to see something.” » Interview de Thomas Dorsey alias Georgia Tom, citée par Giles Oakley dans The Devil'

HOLE Trou paumé; taule, trou, bouge : « I’m deep down in a hole Somebody else has dug Gettin’ sick and tried Of fightin' that jug* » Fightin' The Jug, Blind Blake (1929). ► HOLE (TO BE IN). Avoir des ennuis : « If you don’t believe I love you Look what a fool* I’ve been If you don't believe I'm sinkin’ Look what a hole I'm in » Stealin', Stealin', Memphis Jug Band (1928). ► HOLE-IN-THE-WALL. Bouge, bistrot, ayant une toute petite façade sur la rue : Hole in The Wall, Memphis Minnie (1934).

HOLINESS CHURCH Holiness Temple Baptist Church, église respectant scrupuleusement les rites de l'Eglise Baptiste : « We used to go to the Holiness Church where they had the holy water for the washing of feet in the water. I and we’d get up with everybody doing the Holy* Dance and do it along with them. And when everybody was “talking in tongues”, we used to imitate them talking in tongues, though we didn’t know what we were saying. » Little Richard, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard.

HOLLER (Hoolie, arhoolie) Cri, braillement. 306. Appel modulé, entre le cri et le chant, lancé par un travailleur agricole (on dit aussi field holler) à l’intention de ses congénères dispersés alentour, ou par un vendeur ambulant (street holler) : Holler Stomp, Pete Johnson (1939). Le holler et les chants de travail (work songs) sont quelques-uns des déterminants de la structure du blues : « Worksong* et field holler, dont la fonction ne se définissait que par rapport au travail et à la vie collective, furent transformés en blues sous la pression des nouvelles conditions de travail du sharecropper* isolé : une forme d’expression individuelle qui réunit en une seule ligne vocale généralement associative les structures contradictoires du worksong et du holler. » Manfred Miller, Une histoire du jazz. Les boilers étaient connus dans tout le Sud sous des noms divers tels que loudmou- thing ou whooping. 307. V. Crier, brailler : « Every man would be hollering, but you don’t pay that no mud. Yeah, ’course, I’d holler too. You might call them blues, but they was just made up things. Like a fella* be working near you and you want to say something to ’em. So you holler it. Sing it. Or maybe to your mule or something or it’s getting late and you wanna go home. I can’t remember much of what I was singing now, ’cepting I do remember I was always singing “I can’t be satisfied”. » Interview de Muddy Waters cité par Paul Oliver dans Conversation with The Blues. ► SMOKY HOLLER. Voir ce terme.

HOLLYWOOD Nom d’un quartier de Memphis, Tennessee, d’où les Hollywood All Stars tirent leur nom.

HOLMES Delia Héroïne de la ballade du même nom réputée pour avoir été assassinée dans une maison de jeux en Géorgie au début du siècle : Delia, Blind Willie McTell (1940).

HOLY ROLL (Holy dance) Danse, transe participant de l’extase religieuse : « I went to church To do the holy roll Grabbed me a sister To convert her soul » We Gin Done Done It, Leola B. Wilson (1929).

HOME Maison. Pour le peuple noir, home renvoie à ce qui est spécifiquement, authentiquement noir comme dans : ► BACK HOME. L’Afrique. ► COME HOME. Revenir à la négritude. ► DOWN HOME. Sans manières, sincère, authentique, qui évoque l’atmosphère du Sud : « The word downhome, it mean back to the root, which mean where it all start at, this music, the blues and the church music... » Interview de Jo Jo Williams, cité par Jeff Todd Titton dans Early Downhome Blues. ► GOING HOME. S’en retourner dans le ghetto. ► HOME BOY. Quelqu’un de la communauté, du ghetto. 308. Dans les années 60, home, « marquant l'existence d’un lien indissoluble avec la communauté » (Geneviève Fabre), servit, comme Black Power, de cri de ralliement. ► HOME COOKING. Se dit de quelque chose de vrai, d’authentique (années 1940) : Home Cookin’, Eddie Condon (1933), Horace Silver (1957). ► BACK HOME (TO GET). Revenir au thème après l’improvisation. ► Go HOME. Commencer le dernier chorus d’un morceau. Voir go.

HOMESICK JAMES Pseudonyme du guitariste et chanteur Johnny William Henderson (1910) : Wbr&mg with Homesick, Homesick James (1964).

HONEY Miel. 309. Noir(e) de teinte claire. 310. Les délices (charnelles) qu’il (elle) dispense : « I’m going to build me a bungalow Just for me and my bumble bee* Then I don’t worry I will have all the honey I need » Bumble Bee, Memphis Minnie (1930). • HONEY BEAR. Surnom du saxophoniste Gene Sedric (1907-1963). Voir Baby Bear*. • HONEYBOY. Surnom du bluesman David «Honeyboy» Edwards (1915). ► HONEYDRIPPER. Litt. : celui qui fait s’égoutter le miel. Métaphore pour « amant », remontant, semble-t- il, au Honeydripper Blues d’Edith Johnson, (1929) : «Just because I’m brown* He wants to drive me away ’cause he knows he’s a good honeydripper And i need him every day » • Surnom du pianiste et chanteur Roosevelt Sykes (1906-1983) ; The Honeydripper, Roosevelt Sykes (1945). ► HONEYSIPPER. Litt. : qui sirote du miel. Variante de honeydripper : « When you kiss your baby like the hep cats* do You’re just a bold honeysipper doing nothing new Honeysipper, ain’t no friend of mine Honeysipper, stealing all the time Honeysipper, stole my gal* away [...] Honeysipper, just like the cats all say Sipping my baby’s life away » Honeysipper, Charles Brown (1954).

HONK ► Depuis 1930, jouer d’un instrument à anche avec une sonorité « sale », râpeuse (voir dirty), dans le registre grave : « I might drive right up to your front door Honk my hom* like a did before » MrBlues Is Coming to Town, Wynonie Harris (1950). ► Style des saxophonistes hurleurs : « Un style se développa [...] c’était le honk. Une figure rythmique répétée, hurlée, obstinément poussée au-delà de la musique. La haine, la privation, le secret et le désespoir. Cela jaillissait d’une culture à diphtongues et venait renforcer le culte noir des émotions. Pas de compromis, pas de raffinements ennuyeux, seulement l’élégance d’une chose trop laide pour être décrite et qu’on ne dilue qu’à ses risques et périls. » Leroi Jones, « Les enragés », in ta Mort d'Horatio Alger. ► HONKER. Musicien qui conduit « progressivement le public vers l’extase en produisant des sons aigus, des bruits de klaxon et des grognements, et en se contorsionnant sur scène » (Dan Morgenstern parlant d'Illinois Jacquet). En français, on parle de saxophonistes « hurleurs ». Parmi les premiers représentants du style, Illinois Jacquet et Arnett Cobb, puis Big Jay McNeely, Red Prysock, Joe Houston, Jimmy Wright, Sam Taylor, Chuck Higgins... « Tous les saxophonistes de ce monde étaient des honkers. Illinois*, Gator*, Big* Jay, Jug*, les grands joueurs de l’époque. [...] Le style se répandit comme la poudre dans les cabarets et les boîtes des villes noires [...] Jay fut le premier à trouver le chemin, à ouvrir la voie à un acte complètement nihiliste. McNelly, le premier nègre dada du siècle, sautait, tapait du pied, bramait [...] D’abord, il tomba sur les genoux sans lâcher son saxo et traversa ainsi la scène. On était tous penchés pour avaler le moindre son, le visage torturé de Jay montrait à l’évidence que la musique continuait, mais nous n’en avions même plus besoin. Ensuite il tomba sur le dos, à plat, les deux jambes en l’air tout droit, et il donna des coups de pieds dans le vide avec des contorsions pendant que le saxo crachait une sociologie enragée... » Leroi Jones, « Les enragés », in La Mort d'Horatio Alger.

HONKY-TONK De honky (honkey, honkie). Afr. : du wolof hong, rouge, avec probable convergence avec hunkie, terme utilisé par les Américains blancs pour désigner les immigrants hongrois (puis plus largement d’Europe centrale). D'où : Blanc, les Blancs. Il s’agit là d’un terme à connotations négatives, popularisé vers la fin des années 60 par les Black Muslims et le Black Power. ► Depuis 1900, bistrot, dancing et tripot, beuglant de la plus basse catégorie : « Chaque coin de mon quartier avait un honky-tonk. Il y avait “Chez Spano”, “Chez Kid Brown”, “Chez Matranga” et “Chez Henry Ponce”. La première salle du honky-tonk était le saloon et, dans le fond, il y avait deux autres pièces. L’une d’elles était une salle de jeux, l’autre une salle de bal. » Interview de Louis Armstrong par Richard Meryman. Life, 1966, in Jazz Magazine n°180, 1970. « They work all the week, Saturday night they take a bath and they go to the juke*. call it the juke, the honky- tonk, barrelhouse*, then they go down there and gamble until Sunday morning. Well anyway they had somebody playing in the front, somebody be playing the piano, me or somebody else... » Interview de Little Brother Montgomery, cité par Giles Oakley dans The Devil's Music. ► Style de musique jouée dans les bordels des grandes villes du Sud. 311. HONKY-TONK TRAIN. Train comportant un wagon spécial, équipé d’un piano, où l’on pouvait danser et où de nombreux pianistes de boogie-woogie (Albert Ammons par exemple) ont eu l’occasion de se produire; de tels trains circulaient en particulier sur la ligne de l’Illinois Central (/.G*): Honky Tonk Train Blues, Meade Lux Lewis (1927). HOOCH (Hootch) • Terme datant de l'époque de la prohibition et désignant un alcool distillé clandestinement; par extension, n’importe quelle sorte d’alcool : « I’m so glad, good whiskey Has come back in time Because, now, I drink so much hooch Ooh well, well, I’m ’bout to lose my mind » More Good Whiskey Blues, Peetie Wheatstraw <1935). • Danse du ventre lascive (voir hootchie* cootchie). HOOCH HEAD. Bourré, soûl, beurré : « So please take my advice And don’t be no hooch headed man Ah because they’re bootleggers* over here Oh well, well, that poison every man they can » Old Good Whiskey Blues, Peetie Wheatstraw (1936). ► HOOCH HOUSE. Bar, bistrot: Superstition Blues (Hooch House Blues), Lucille Bogan (1933). ► HOOCHY COOCHY. Voir hootchie-cootchie.

HOODLUM Gangster, assassin : « Now at this time, which was still prohibition, Kansas City was under Pendergast’s* control. Most of the night spots* were run by politicians and hoodlums, and the town was wide open for drinking, gambling, and pretty much every form of vice. Naturally, work was plentiful for musicians, though some of the employers were tough people. » Interview de Mary Lou Williams, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

HOODOO Déformation de voodoo (1875). 312. Vaudou, pratiques de magie noire : « I call it black magic Some call it plain hoodoo » Black Magic Blues, Curtis Jones ( 1962). 313. Sorcier: « I’m going to the hoodoo I’m gonna put you under my feet I’m gonna have you, baby Do anything in the world I want you to do » The Midnight Rambler, Robert Pete Williams (1961). 314. Préparation magique, philtre : « I put ashes in my sweet papa’s bed So that he can’t slip out Hoodoo in his bread Goopher dust* all about I'll fix* him Conjuration in his socks and shoes » Sundown Blues, W.C. Handy (1926). 315. Déveine, guigne, poisse. 316. V. Ensorceler, envoûter: « Now miss hoodoo lady Please give me a hoodoo hand I want to hoodoo this woman of mine I believe she’s got another man » Hoodoo Lady Blues, Big Boy Crudup (1948). ► HOODOO HAND. Philtre, talisman (syn. : mojo hand') : « Going to Louisiana To get me a hoodoo hand To try to stop the women From taking my man » Louisiana Hoo Doo Blues, Ma Rainey (1925). ► HOODOO MAN (LADY). Sorcier, sorcière : « Now look here, woman I want you to tell you the truth Darlin’, tell me where you been You been outside in the alley* Down in that hoodoo man’s house » Hoodoo Blues, Robert Pete Williams (1961).

HOOFER Danseur de claquettes. HOOK 317. Narcotique et, plus spécialement, héroïne. 318. Escroc, voleur. 319. Prostituée. 320. V. Faire le trottoir, draguer : « Mama I’m gone With a hom* long as your right arm And when I get to hookin’ I’ll have me a brand new happy home » Loving Heifer, Black Ace (1937). ► HOOKED. ® Marié : « Well I’m gonna sing this a verse And I ain’t gonna sing it no more Well I heard my good girl call me You know I’m hooked and I’m ’bout to go » Sweet Woman Blues, Sonny Terry (ca 1962). ® Depuis 1935, drogué, acero : « Man, but gettin’ her to work was another thing. Lady* [Billie Holiday] was in terrible shape then. When a person’s hooked, nothin’ in the world is more important than dope*. The worst part of it is what she’s one of the nicest people I ever met, and, most important, she really fought that stuff*. » Interview de Bobby Tucker, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► OFF THE HOOK. Désintoxiqué, « propre » : Off The Hook, Earl Hooker (1968). ► ON THE HOOK. ® Dans l’embarras, dans la merde. ®. Sous l’influence d’une drogue, «acero ». ► OUT OF THE HOOK. Sorti des emmerdes, tiré d’embarras : « I mean, he’d put you in a trick* bag in a minute to get hisself out of the hook. » Interview de Ricky Allen par Sebastian Danchin (1984), in Earl Hooker, vie et mort d’un héros du ghetto.

HOOKER • Prostituée. • Revendeur de drogue; joueur professionnel, flambeur : « I was getting into drugs by this time, smoking marijuana and using a little cocaine. Whenever 1 was in ¿.A*, we’d book a suite at the Carolina Pines Hotel, on La Brea and Sunset. We just let it hang out. All the hookers, hustlers* and dealers* hung around there. » Little Richard cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard. 6. Verre d’alcool.

HOOTCHIE-COOTCHIE ► Féticheur, personne douée de pouvoirs magiques : « 1 got a black* cat bone I got a mojo* too I got John* The Conqueroo I’m gonna mess* with you I’m gonna make you girls lead me by my hand Then the world 'll know I’m a hootchie cootchie man » I’m Your Hootchie Cootchie Man, Muddv Waters (1953). ► Terme de music-hall désignant une sorte de danse du ventre lascive, autrement appelée cooch ou booch : « Have you ever went fishin’ on a bright summer’s day Standin’ on the bank, see the little fish play Hands in your pockets, and your pockets in your pants See the little bittie fishes do the hootchy-kootchy dance » Turkey Buzzard Blues, Peg Leg Howell et Eddie Anthony (1928).

HOOTIE De hootch/hooch, alcool fabriqué clandestinement. Surnom du pianiste et chef d’orchestre James Colombus «Jay » McShann (1909), suite à quelques cuites restées mémorables : « Les copains avaient l’habitude de me charrier à cause de la bouteille et m’appelaient Hootie. J’étais drôlement porté sur la bouteille. Tout ce qu’on buvait était alors de l’alcool trafiqué et chaque fois que nous voyions quelqu'un qui avait l’air un peu parti, on s’exclamait : “Regardez ! Il est trafiqué !” » Interview de Jay McShann par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker.

HOOVERVILLE (Hoover valley) Du nom de Herbert Clark Hoover, président des Etats-Unis de 1929 à 1933. Nom donné par dérision aux bidonvilles qui se développèrent durant la Dépression (années 1930): « And we have a little city That they call down in Hooverville Times has got so hard They ain’t got no place to live » It's Hard Time, Joe Stone (1933).

HOP ► Réunion amicale : Wednesday Night Hop, Dick Wilson (1937). ► Opium : « These guys were all big gamblers, and had all the best women and a lot of them smoked hop or used coke*. In fact those days you could buy all the dope* you wanted in the drugstore. Just ask for it and you got it. » Jellv Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. • Surnom du bluesman Harding « Hop » Wilson (1927-1975) ; il s'agit d’une déformation de son surnom antérieur « Harp ». 321. BULLFROG HOP. Danse en vogue dans les années 20 : Bullfrog Hop, Perry Bradford (1909). 322. CALICO HOP. Syn. de rent* party. 323. HEAD RAG HOP. Danse: « Say you lil’ girl With the black dress on Come over here, stand by me Let me show you how to do the head rag hop » Head Rag Hop, Romeo Nelson, vcl par Tampa Red et Frankie Jaxon (1929). 324. HOP HEAD. Drogué: Hop Head, Duke Ellington (1927). 325. HOP SCOP. Danse : New Orleans Hop Scop Blues, Sara Martin (1923). 326. LINDY HOP. Voir ce terme. 327. TEXAS HOP. Danse. «Well the chicks* around L.A.* They do the Texas hop But when you hit Chicago They all do the lolly pop » Let’s Dance, Floyd Dixon (1949).

HORN Cor, trompette, saxophone et, plus généralement, n’importe quel instrument à vent : « He had his way of talkin’ It was the language of his horn » Good Bye Pork Pie Hat, Roland Kirk (ca 1974-75). • Erection : « Mama, I’m gone With a horn long as your right arm, And when I get to hookin’ I'll have me a brand new happy home » Loving Heifer, Black Ace (1937). ► BLOW (ONE’S) HORN. Voir blow. ► GET AROUND ON (ONE’S) HORN. Jouer en maîtrisant parfaitement son instrument quelles que soient les difficultés techniques ou le tempo. ► OPEN HORN. Sans sourdine wah-wah : « The Western style was more open... open horns and running chords and ranwng changes*. With Ellington, it was the new men like myself and Johnny Hodges, and Bigard against guys like Bubber* Miley and Tricky* Sam Nanton. They were playing wah-wab* music with plungers and things. » Interview de Louis Metcalf, in Hear Me Talkin 'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

HORSE Cheval. 328. Héroïne; voir aussi H*. « The habit* is a false crutch. Don’t get on the H. [...] Look at me, now. I had a eighteen-thousand-dollar home, and it’s gone. I spent four to five hundred dollars a week for the stuff*. » Interview de Mary Ann McCall, in Hear Me Talkin ’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. « One time on 52nd* Street a guy gave me something I took for coke* and it turned out to be horse. I shorted it and puked up in the street. If I had found him, he would have suffered bodily harm, but I never saw him again. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. 329. Au jeu des numbers, combinaison de quatre nombres. ► HORSE TROT. Danse en vogue au début du siècle.

HOSS Pour horse, cheval. « What is an easy* rider? It’d be a hoss or anything. » Interview de Willie B. Thomas, cité par Harry Oster dans Living Country' Blues.

HOT Chaud, épicé. • Qualifie une musique interprétée avec fougue, une musique particulièrement expressive, laissant une large part à l'improvisation. S’oppose alors à straight qui s’applique à une interprétation fidèle à la partition : «With repeal of Prohibition, folks no longer had to come to speakeasies* to buy liquor sold by racketeers. Harlem’s hot music suddently cooled off because the patrons could buy a bottle and drink at home for cheaper. » Interview de Cecil Scott, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► Par extension, style de jazz populaire autour de 1930. 330. HOT DOG. Métaphore pour pénis : « Mama, I got a hot dog and it ain’t cold It’s just right for to fit your roll* It’s a fittin' mother fuyer don’t you know I’m a hungry mother fuyer don’t you know I’m a dirty mother fuyer And I don’t tell you no lie* » Dirty Mother for You, Rcxisevelt Sykes (1936). • HOT LIPS. Litt. : lèvres chaudes. Surnom du trompettiste Oran Thaddeus « Hot Lips » Page (1908-1954) : Blues with Lips, Hot Lips Page (1938). 331. HOT MAMA (HOT NUMBER). Femme passionnée, volcanique : I’m The Last of The Red Hot Mama, Catherine (1929). 332. HOT NUTS. Voir nuts. 333. HOT PANTS. Litt. : pantalons chauds. Chaud lapin : Hot Pants, James Brown (ca 1970). 334. HOT SHOT. ® As, crack; arrogant, prétentieux : Mr. Hot Shot, Lonnie Brooks (ca 1983). « Come on around my house, mama Ain’t nobody there but me Call me a hot-shot liar and a cheater Because I’m from Tennessee » Come on Around My House, Mama, Blind Willie McTell (1929). ® Dynamique, expéditif; chaud(e) lapin(e) : « Well she shakes it like the Central* She wobbles like the L. & N.* Well she’s a hot-shot mama And I’m scared to tell her where I been » Scarey Day Blues, Blind Willie McTell (1931). ® Injection mortelle d’héroïne. • Surnom des bluesmen Coy « Hot Shot » Love (1914-1980) et Blind Willie McTell alias Hot Shot Willie (1901-c«1970). 335. HOT STUFF. Pulsions sexuelles : Hot Stuff, Oliver Cobb (1929). 336. HOT TAMALE. DU nom d’un plat mexicain à base de bœuf et de maïs très épicé. ® Mexicaine. ® Fille sexy, bandante : « Hot tamales and they’re red* bot Yes she’s got ’em for sale She got two for a nickel*, got four for a dime* I would sell you more but they ain’t mine » Ttey’re Red Hot, Robert Johnson (1936).

HOUND Placé après un nom de drogue, signifie drogué : « I work hard from monday Until late Saturday night And you’s a dirty mistreater* You ain’t treat me right And I’m through cookin’ your stew and beans And you’s a dirty pot-hound Dirtier than any man I’ve seen » Pot Hound Blues, Lucille Bogan (1929). • HOUND DOG. Voir dog.

HOUSE OF JOY Bordel : House of Joy, Cootie Williams (1945).

HOMIN' WOLF Pseudonyme des chanteurs de blues J.T. « Funny Paper » Smith (ca 1885-1940) : « I’m the wolf that everybody been trying to find out Where in the world I prowl Nobody ever gets a chance to see me But they all hear me when I moan » Howlin’ Wolf Blues, J.T. « Funnv Paper» Smith (1930). Et de Chester Burnett (1910-1976) : « They call me the Howlin’ Wolf, mama And you find me howlin’ at your door You know I love you darling Don’t drive the wolf from your door » Howlin’ for My Baby, Howlin’ Wolf (1951).

HUCKLEBUCK Danse des années 40. The Hucklebuck, Paul Williams (1948). Remise au goût du jour dans les années 60 : 77ie Hucklebuck, Chubby Checker (ca 1961).

HUDDY Déformation de howdy, salut : « In the morning when I rise Tell my Jesus huddy, oh I wash my hands in the morning glory Tell my Jesus huddy, oh » Tell My Jesus Morning, cité par Allen, Ware et Garrison dans Slave Songs of The United States.

HILLY-GULLY Danse solitaire lancée à la suite du phénoménal succès du twist* : « Well I can’t hully-gully I can’t do a shimmy* But when it comes to lovin’ I’m a lovin’ little fool » Want Ad, John Lee Hooker (1961).

HUNG (Hung up) Déboussolé, paumé, complexé, gêné (1940-1970) : « On the subway I dug the man digging on me But the dude* was hung up In a mass of confusion » On The Subway, The Last Poets (1970). Depuis les années 50, hung tend à supplanter hung up.

HUNKIE TUNKIE Pour honky-tonk* : « Well, they say everybody’s talkin’ About your hunkie tunkie blues Well, they say everybody’s talkin’ ’bout your modern hunkie tunkie blues » Hunkie Tunkie Blues, Charley Jordan (1930).

HUNTSVILLE Pénitencier de l’Etat du Texas : « I went down to Huntsville I did not go to stay Just got there in good old time To wear them ball* and chain » Run Mollie Run, Henry « Ragtime » Thomas (1927).

HUSTLE ► Moyens de se procurer de l’argent en dehors des règles couramment admises par la société, escroquerie, vol, jeu, drogue, ... : «Yes time is hard, baby And hustling is really on Prices are high, darling And all the good jobs are done » The Hustle Is On, T-Bone Walker (1950). « Yes he ¡Jelly Roll Morton] was a very good pool player. Played for real money. He was in the class with Pensacola Kid, couldn’t beat him but he could give him a hell* of a game... Jelly* Roll was on the hustling side. He’d gamble, play pool, play piano. » Interview de Johnny St. Cyr cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. ► V. Se débrouilller; se prostituer, racoler : « I was just a youngster who loved that bom* oîKing* Oliver [...] I would delight delivering an order of stone coal to the prostitute who used to hustle in her crib* right next to Pete Lala’s Cabaret [...] Just so’s I could hear King Oliver play... » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkirt ' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

HUSTLER Quelqu’un qui sait « se débrouiller » dans la vie en dehors des règles habituelles de la société : « Si nous devons jamais comprendre la culture urbaine des Noirs américains, il nous faut considérer les bustiers et les artistes professionnels (entertainers') comme des héros culturels [...] et non comme des déviants ou des personnages accessoires. » Charles Keil, Urban Blues. « I know how you Hungry hustlers feel Your women don’t know how to rob They’re too doggone* scared to steal » Robbing and Stealing Blues, Gene Campbell (1930).

HYPE Apocope de hypodermic, hypodermique. ► Dans le vocabulaire des drogués, seringue hypodermique; injection (syn. shoot). ► Pour les boppers, quelque chose de factice, d’illusoire (fin années 50). ► Idée excitante, grand projet: Mad Hype, Howard McGhee (ca 1945/ 46). ► Discours convaincant. ► V. Tromper, escroquer, tricher. Peloter, baiser. I

I Je. Le blues se parle, à de très rares exceptions près, à la première personne du singulier; dans le corpus analysé par Michael Taft, I apparaît avec une occurrence de 5,7 %, ce qui en fait le mot le plus usité dans le blues (le second,you, ne représente que 3,61 %). Plus généralement, les mots marquant la première personne du singulier — I, my, me, mine — totalisent même 10,27 %. / signe l’appropriation de la mémoire collective qu’opère le bluesman et favorise l’identification de l’auditoire : « Quoi qu’il dise, l’exécutant, fût-il l'auteur du texte, ne parle pas de lui- même. L’emploi du je importe peu : la fonction spectaculaire de la performance « ambiguïse » assez ce pronom pour que se dilue, dans la conscience de l'auditeur, sa valeur référentielle. Par là même, pour celui qui parle ou chante, se dénoue une solitude, et une communication s’instaure. Pour l’auditeur, la voix de ce personnage qui s’adresse à lui n’appartient pas tout à fait à la bouche dont elle émane : elle provient, pour une part, d’en deçà. » Paul Zumthor, Introduction à la poésie orale. Pour plus de détails, voir blues, acc. 3 (l'appropriation de la mémoire collective).

I.C. Pour Illinois Central, célèbre ligne de chemin de fer reliant Chicago, Illinois, à La Nouvelle-Orléans via Memphis, Clarksdale, Greenville et Vicksburg : * That I.C. special Is the only train I choose That’s the train I ride When I get these I.C. blues » I.C. Moan, Tampa Red (1930). Cette ligne, parcourue par des trains célèbres tels que le Cannonball* ou le Number 44* (qui, suppose-t-on, a donné son nom au thème des forty four), fut également le théâtre de la mort de Casey Jones*.

I.C.N. Nom d’un train : « The L and N* is a fast train Also that I and C.N. If I ever leave Chicago Going to ride that Sunshine* Special again » L and N Blues, Walter Davis (1933).

I.G.N. International Great Northern, compagnie de chemin de fer texane : « Cotton* Belt is a slow train Also that I and G.N. (I and C.N?) If I leave Texas anymore Going to leave on that L and N* » Sunshine Special, Blind Lemon Jefferson (1927).

ICE ► Cocaïne: Ice Freezes Red, Fats Navaro (1947). ► Bijoux. ► Adj. Bien, super. ► V. tuer, liquider. ► ICED. Emprisonné, au secret.

IF YOU SEE KAY Transcription phonétique lorsqu’on épelle F.U.C.K. (voir fuck) : You See Kay, Memphis Slim (I960).

IGNORANT OIL Dans l’argot de Kansas City, alcool : Hootie’s Ignorant Oil, Jay McShann, vcl par Walter Brown (1941).

ILLINOIS Surnom du saxophoniste Jean-Baptiste « Illinois » Jacquet (1922) : Illinois Blows The Blues, Illinois Jacquet (1947).

IN Dans le coup, branché, à la page : The In Crowd, Ramsey Lewis (1965). ► IN THERE. Pour In the groove. Excellent, super (années 1935-1945) : « Chicago was really jumping* around that time [1923] [••■] The Lincoln Gardens of course was still in there. The Plantation was another hot spot* at that time... » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. « Most of the pimps* were good gamblers also... And Henry Zeno was in there with them [...] He even had several prostitutes on his staff working for him [...] By that he would handle more cash than the average musician [...] And he was little short dark sharp* cat* and knew all the answers. » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

INTERSTATE Surnom d’une célèbre loterie clandestine (voir policy* wheel) : « Says, now look here, son You better not be late That gig* won’t come out in the Interstate So you better get* down and get down right That gig gonna fall out tonight » Policy Blues, Cripple Clarence Lofton (1943).

INDIE Pour INDependant record companlE. A partir de 1941, les restrictions de matières premières dues à la guerre contraignirent les grandes compagnies à cesser la publication des race series; par ailleurs, les syndicats de musiciens avaient interdit à leurs membres d’enregistrer à cause de leur inquiétude face au succès grandissant du juke-box (sur ce point, voir Petrillo). Cela favorisa la création de nouveaux labels; certains, tels Atlantic, Chess ou Specialty, conquirent d’appréciables parts de marché.

IRONING BOARD Table à repasser. Instrument « bricolé » par Samuel Moore (1939), alias « Ironing Board Sam » à partir d’un clavier d’orgue et d’une planche à repasser.

ISOM (Isam, Hisam) Patronyme équivalant sensiblement chez les Noirs au « John Doe » des Blancs et au Français « Monsieur X » ; le chanteur californien Ray Agee a enregistré en 1957 sous le nom d’Isom Ray.

IVORIES ► Dents. ► Touches d’un piano. • Surnom du pianiste et chanteur « Ivory » Joe Hunter (1914-1974) et des bluesmen Dave Alexander (1938) alias « Black Ivory King » et Lee Semien alias King Ivory Lee (1931). ► TICKLE THE IVORIES. Litt. : taquiner l’ivoire. Jouer du piano : « Piano thumpers tickled the ivories in the saloons to attract customers, furnishing a theme for the prayers at Beale* Street Baptist Church and Avery Chapel. » W.C. Handy, Father of The Blues. J

J.A.T.P. Pour Jazz At The Philharmonie. Du nom du Philharmonie Auditorium de Los Angeles, Californie. Concerts censés retrouver l’esprit des jam* sessions, présentés par le producteur Norman Granz à partir de 1944 : J.AT.P Blues, Irving Ashby (1946).

JABBO Surnom du trompettiste Cladys «Jabbo » Smith (1908).

JACK ► Am. Aux cartes, le valet: « Well Jack o’ diamonds Told that ole queen of spades* If you come, darling And be on your wicked ways Cryin’, you know You allowed me to, oh Lay out all night long » Drop Down Mama, Honeyboy Edwards (1953). ► Mule, mulet : « If I could holler* like a mountain jack I’d go up on the mountain Bring my ’tuni* back I’m wild* about my ’tuni » Sweet Petunia, Curley Weaver (1928). ► Locomotive. ► «Jack» ou «Jackson», façon d’interpeller, d’apostropher quelqu’un dans les milieux du jazz : « Blow, blow, Jack », Lonnie Johnson au saxophoniste Hal Singer dans Big Leg Woman (1960). Hit The Road jack, Ray Charles (1961). ► Combinaison de cinq nombres dans le jeu des numbers : « It takes five numbers To make a jack And you must be born lucky To get your money back » Policy Blues, Yodelling Kid Brown (1928). ► Argent, pognon : Beau Koo Jack, Louis Armstrong (1928). ► Clochard, zigoto. 337. BALUN’ THE JACK. Voir ball. 338. JACK OF ALL TRADES. Touche-à-tout, homme à tout faire : « I’m a real jack of all trades I can be your sweet woman Also be your slave » Mighty Tight Woman, Sippie Wallace (1925). Big Joe Turner fut au début des années 30 jack of all trades au Sunset Club de Kansas City : barman, meneur de jeu, videur, chanteur. 339. JACK OFF. Se masturber, se branler : «Well she was doing that to me and Buddy took out his thing*. He was ready, so she opened up her legs and he put it in her. He was having sex with Angel, I was jacking off, and Angel was sucking me when they introduced my name on stage... » Interview de Little Richard, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard. 340. JACK RABBIT. Sorte de lapin géant, emblème du Texas. « Yellow woman Make a preacher* lay his Bible down Jet black* woman Make a jack-rabbit hug a house » I'm All out and down, Leadbelly (1935). 341. JACKS. Charme, gris-gris. 342. JACK THE BEAR. Selon Louis Armstrong, surnom d’une femme de petite vertu à La Nouvelle-Orléans. 343. LIKE JACK THE BEAR (JUST AIN’T NOWHERE). Fauché, sans valeur, insignifiant; souvent abrégé en nowhere. ► MOUNTAIN JACK. Puma, cougar des Montagnes Rocheuses : « If I could holler Like that mountain jack I’d go up on the mountains Call my baby back » Honey Dripping Papa, Kid Prince Moore (1936).

JACKASS ► Baudet : « Bedbug big as a jackass He will bite you and stand and grin Think you pull the bedbug apart Come back and bite you again » Mean Old Bedbug Blues, Furry Lewis (1927). ► Crétin. ► Cul. derrière (vient d'arse), mais aussi vagin, chatte : Jackass Blues, King Oliver, vcl par Georgia Taylor (1926).

JACKSTROPPER Tricheur : « Some jackstropper Some jackstropper have stole my girl Yes you know, you can tell by that Oh you know, I don't feel so well » Jackstropper Blues, Lightnin’ Hopkins (ca 1948/49).

JAG Piqûre (drogue), shoot; mauvais alcool : « He used to go off on drinking jags, denatured alcohol, canned* heat, corn, anything. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

JAIL BAIT Voir bait.

JAKE Vient probablement de juke. Alcool frelaté, quelquefois additionné de gingembre : « Now if you got a jake drinkin’ woman Buddy*, she don’t mean you no good » Beer Drinkin’ Women, Black Ace (1970). Cette mixture particulièrement dangereuse fit des ravages lors de la prohibition, rendant aveugle, ou entraînant des paralysies (jake-leg). Voir aussi Mickey* Finn, Pete*) : « Took one drink last night And it made me go stone* blind Thought I’d run away But I had to take my time » Bug Juice Blues, Kid Prince Moore (1936). « Eh now, I'm so glad I don’t have to drink no more moonshine* Well, now I can drink my good whiskey Ooh well, well, and I ain’t afraid of dying » Good Whiskey Blues, Peetie Wheatstraw (1935). Le pianiste et chanteur Leroy Carr (1905- 1935) serait d’ailleurs mort des suites de l’absorption d'un tel breuvage. ► JAKE HEAD. Soûl, bourré au jake : Jake Head Boogie, Lightnin’ Hopkins (ca ‘1948/50). ► JAKE-LEG. Paralysie des jambes due à l’absorption de jake: « I say jake-leg, jake-leg, jake-leg Tell me what in the world you going to do I say you done me drunk so much jake, oh Lord 'til it done give him the lemon leg » Jake Leg Blues, Willie Lofton (1934).

JAM Afr. Du wolof jaam : esclave ; ou du mandingue jamo : foule, rassemblement. 344. L'un des mots auquel l’argot noir donne une forte connotation érotique. 345. Pour jam session : Jam on a Monday Morning, Buddy Guv '(ca 1960). 346. V. Improviser, jouer de la bonne musique; faire une jam session, faire le bœuf, jouer pour le plaisir : « I opened the window on Ben Webster. He was saving, “Get up, pussycat, we’re jammin’ and all the pianists are tired out now. [Coleman] Hawkins has got his shirt off and is still bloiving*. You got to come down.’’ » Interview de Mary Lou Williams, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 347. Danser. 348. Cocaine. ► JAM SESSION. Réunion de musiciens jouant sans programme précis, hors engagement, pour leur seul plaisir : « Il y avait, entre autres, un saloon où les musiciens de couleur se réunissaient après le boulot. Il comportait une arrière-salle avec un piano où se déroulaient des jam sessions extraordinaires entre deux heures du matin et midi. J’étais remonté à bloc. Je me tins près du bar, buvant et bavardant. Lorsque la jam devenait très hot, je n’y tenais plus et sortais mon instrument, prenant mon tour sur la scène. Chacun payait sa tournée et ne prêtait aucune attention à ce qu’il déboursait, spécialement moi. Ces jam sessions m’apprirent pas mal de choses, car nous étions trois ou quatre trompettistes sans même un pianiste. On recherchait la difficulté et on essayait des trucs inédits ou que le copain ne pouvait faire. » Bill Coleman, Trumpet Story. ► JAM-UP. De première (qualité) : « It’s a hot* dog, baby, no, it’s never cold It’s just right for to fit your roll* Tight mother* fuyer don’t you know Fit mother fuyer don’t you know Jam-up mother fuyer I ain’t gonna tell you no lie* » Mother Fuyer, Dirty Red (1947). ► MAMMY JAMMER. Variante de motherfucker*. ► WIND JAMMER. Petit accordéon acadien.

JAMBALAYA Qumbalaya) Plat réputé de la cuisine louisianaise : « Le jumbalaya, c’était un amalgame compact de saucisson de Bologne coupé en dés, de crevettes, d’huîtres, de crabes fendus en deux auxquels on ajoutait une pincée de poudre brune appelée feelay (on en met aussi dans le gumbo* créole). Mayann mélangeait tout ça, ajoutait de la sauce tomate et servait avec un riz bien détaché. » Louis Armstrong, Ma Nouvelle-Orléans.

JAMES ALLEY James (en réalité Jane) Alley est une ruelle de La Nouvelle-Orléans, entre les rues Perdido et Gravier, juste derrière la prison, dans le quartier autrefois appelé The Battleground : James Alley Blues, Richard « Rabbit » Brown (1927). La légende, démentie par les travaux de James Lincoln Collier, veut que James Alley soit le lieu de naissance de Louis Armstrong.

JAMES Jesse Jesse Woodson James (1847-1882), bandit célèbre originaire du Missouri. La légende, dans les campagnes, veut qu’il ait été un brigand au grand cœur, car il ne s’attaquait qu’aux banques et aux chemins de fer : « Now woman you must want me To be like Jesse James I got to kill some man And rob some passenger train » Jesse James Blues, Washboard Sam (1935).

JANE Femme, nana : « Later on, some of them made arrange ments to have some kind of electric-light bulbs in the toes of their shoes with a battery in their pockets, so when they could get around some jane that was kind of simple and thought they could make her, as they call making um, why they’d press a button in their pocket and light up the little- bitty bulb in the toe of their shoes and that jane was claimed. It’s really the fact. » Jellv Roll Morton, cité par Alan Lomax in Mister Jelly Roll.

JASPER Lesbienne : « He called Peter Blue And Jasper too Oh, what that cat* That cat can do » Peter Blue and Jasper Too, Paul Gayten (1947).

JASS Voir jazz. «Jass, quel horrible mot. [...] Ce mot pouvait signifier n’importe quel truc : s’amuser comme des fous, faire la bombe, faire l’amour, s’encanailler... Ce mot s’écrivait jass, ce qui signifiait faire l'amour, baiser. » Sidney Bechet, La musique, c'est ma vie.

JAWS Pour « Lockjaw », surnom du saxophoniste Eddie Davis (1922-1986) : «Je me rappelle très bien qu’à chaque fois que je levais les yeux, Jaws était là, assis derrière moi, sur les marches près du piano. Je ne sais plus si Candy Johnson avait déjà demandé son congé ou non, mais en tout cas Jaws ne cessait de me répéter : “Tu as besoin de moi dans cet orchestre.” Et moi je lui répondais : “Non je n’ai besoin de personne.” Mais il revenait à la charge : “Il faut que tu me prennes dans cet orchestre.” Et je lui répondais toujours : "Man, j’ai pas besoin de toi ; pas question que tu restes avec nous.” Mais j’ai fini par le prendre quelque temps après et il nous a aussitôt apporté dans son jeu de ténor le même contraste avec Paul Quinichette que Herschel [Evans] et Buddy [Tate] avec Lester. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues.

JAYBIRD Surnom de l’harmoniciste et chanteur de blues Burl C. «Jaybird » Coleman (1896- 1952).

JAZZ (Jass, jasz, jaz) L’étymologie du terme donne lieu à de multiples hypothèses dont : ► Afr. Du mandingo jasi et du wolof/ees, anormal, excessif, exagéré; du terme temne être débordant de vie. D’où peut-être jasm (1860), vitalité, énergie, que l’on retrouve sous les formes jass, jassmo dans la rubrique sportive d’un journal de San Francisco au tournant du siècle, pour signifier la grande forme, la « pêche ». ► du français « jaser » ; cette théorie acceptée par le Merriam Webster semble cependant faire fi d’une loi de la phonétique : si le créole dit volontiers « iase », jamais, semble-t-il, il ne prononce « djase ». ► du français «chasse», «chassé», termes de danse désignant un pas glissé d’où, en créole, « chasse-beau » (lutte pacifique de danseurs de cake walk) et jazzbo (1909) : Jazzbo Bail, Mamie Smith (1921). ► de l’anglais jass (1517) que l’Oxford English Dictionary rapproche de chass ou chase (chasser, pourchasser et, par glissement de sens, combattre). La première apparition discographique du terme remonte à 1917, date du premier enregistrement de jazz par l’Original Dixieland Jazz Band. 349. Acte sexuel; organes sexuels: « Winding Boy* is a bit on the vulgar side. Let’s see. How could I put it... Means a fellow* that makes good jazz with the women. » Interview de Johnny St Cyr, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. « I like the motion that my daddy has For everyone likes the real good jazz » The World’s Jazz Crazy and So I Am, Trixie Smith (1925). Femme considérée comme un objet sexuel : « I dont want no jazz baby They ain’t even on my mind I know I would’nt get a chance with her Ooh well, because some other man would have her all the time » 1 Don’t Want No Pretty Faced Woman, Peetie Wheatstraw' (1936). V. Baiser, faire l’amour : I Wanna Jazz Some More, Helen Gross (1924). Par extension, exciter, donner du plaisir : « Another thing, I was the first to use the word “jazz” on a song. On both Brown Skin, Who You For? and Mama’s Baby Boy, I used the words “jazz songs” on the sheet music. I don’t exactly remember where the words came from, but I remember I heard a woman say it to me when we were playin’ some music. “Oh, jazz me, baby”, she said. » Interview de Clarence Williams, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. V. Jouer de la musique excitante : « It makes me crazy When you blow it up high And when you bring it down And swing* it side to side Because when you start to jazz I get a feeling from the start That gives me such a [kickin’ and twickin’?] Around my heart » Oh Joe, Play That Trombone, Ethel Waters (1922). ► Terme générique sous lequel sont englobées l’ensemble des productions musicales se rattachant à la tradition négro-américaine, à l’exception des périodes 1935-1945 (où le terme dominant est stwng*) et 1945- 1950 (où le terme hop* prédomine). Au-delà des subdivisions généralement opérées (voir be-bop, cooljazz, dixieland, free jazz, funky, jazz rock, New Orleans), le jazz est un continuum que les auteurs s’accordent généralement à caractériser par trois traits fondamentaux : 350. un traitement spécifique du temps musical (voir swing) ; 351. un traitement spécifique de la matière sonore (voir dirty) ; 352. la primauté de l’improvisation ou, plus généralement, de l’expression individuelle et collective, sur la composition. Cette utilisation du mot jazz pour rendre compte de l’ensemble de la musique négro-américaine est, pour des raisons idéologiques, remise en question par de nombreux musiciens comme Archie Shepp, Max Roach ou les membres de l’Art Ensemble of Chicago (qui pour leur part parlent de Great Black* Music) : « A La Nouvelle-Orléans, to jazz your lady, cela veut dire b... votre petite amie. Je ne veux pas que les critiques appliquent ce mot à ma musique... Ma musique est une œuvre de beauté qui n’a rien à voir avec ça... » Charles Mingus, cité par Jean-Louis Comolli in * Jazz, érotisme et jazz encore », ¿es Cahiers du jazz n° 10. Paris 1964. Ce que résume Lucien Maison (in Histoire de la musique afro-américaine) : « Ainsi sous une triple pression : celle des marchands (toujours prêts à faire circuler le jazz en truquant ses papiers d’identité dans l’espoir de gonfler le profit), celle des amateurs sclérosés 1 toujours enclins à répudier les formes surgies après qu’ils ont nourri leur passion pour d’autres formes), celle des musiciens enfin (accablés par les coups que leur ont porté le racisme, le phari- saïsme bourgeois et l’ethnocentrisme culturel), oui, sous cette triple pression, le mot jazz a été contesté dans sa prétention à signifier certaines réalités musicales contemporaines, voire toutes les réalités musicales afro-américaines du passé. » 22. et tradition orale. Si le blues est sans conteste à rattacher à la tradition orale noire — qui se manifeste aussi bien dans ► art des preachers que dans les ¿Zzríy dozens, les lies ou autres toasts, et se perpétue dans le rap —, quel est le rapport du jazz à l’oralité? Le jazz est essentiellement un art instrumental; et lorsqu’il est vocal, il sollicite beaucoup plus les compositeurs de Tin* .-an Alley que la tradition orale noire. ► convient donc de chercher ailleurs le rapport du jazz à la tradition orale négro- américaine. Et d’abord, bien sûr, dans le traitement particulier de la matière sonore, la recherche de l’expressivité et de la voix dans l’instrument : « Avec lui [Charlie Parker], tout le monde était heureux sur scène parce qu’il était un sorcier qui nous communiquait des messages musicaux qui nous faisaient tordre de rire. Tous les musiciens connaissent certaines phrases musicales, qu’ils traduisent par “Salut, ma belle” ou, quand une jeune femme se dirige d’un pas tranquille vers les toilettes, “Je sais où tu vas.” Bird avait un répertoire de ce genre en perpétuelle expansion. A une époque où les gars partaient à l’armée, il saluait un membre de l’orchestre qui venait d’être appelé par une phrase qu’on pourrait traduire ainsi : “Emporte de quoi te changer pour trois jours.” Tout avait un sens musical pour lui. S’il entendait un chien aboyer, il disait que le chien parlait. S’il était en train de souffler dans son saxo, il trouvait quelque chose à exprimer et voulait que vous deviniez ses pensées. [...] Il avait des notes pour exprimer tous les phénomènes de la nature. Parfois, sur la piste de danse, des danseuses évoluaient devant lui. Leurs attitudes, leurs gestes, leurs visages provoquaient en lui un choc émotionnel qu’il exprimait dans ses solos. Dès qu’il commençait à jouer davantage dans l’aigu, nous étions tellement habitués à ses réactions que nous comprenions tout de suite ce qu’il exprimait. » Interview de Gene Ramey par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker. Mais la tradition orale affleure constamment dans les interpellations, exhortations, exclamations et grognements dont les musiciens ponctuent leur jeu. Ces épiphénomènes marquent la présence de l’individu, de son corps et de sa jouissance, derrière le musicien. Enfin, elle se manifeste également dans le processus de transmission des savoirs entre musiciens qui ne fait que rarement appel à des apprentissages didactiques (encore que les jeunes musiciens contemporains complètent souvent leur formation dans des écoles de musique) : « Nous n'étions pas jaloux d'un musicien plus fort que nous. Nous cherchions à comprendre ce qu’il faisait, et nous y parvenions. Aujourd’hui, si quelqu’un joue bien, les mecs disent : “Pour qui se prend-il?” Quelle erreur! Moi, par exemple, dès qu’Erroll Garner joue quelque chose qui me plaît, je lui dis : “Erroll, un de ces jours, passe chez moi, il y a deux ou trois petits trucs que tu fais, je ne sais pas comment, et qui me plaisent bien.” De la même façon, je vais jusqu’au Blackhawk et je demande à Oscar [Pettiford] : “Oscar, qu’est-ce que tu ferais, là, avec la main gauche?” Ils sont sidérés de m’entendre demander ça, comme autrefois. C’était la règle pour tous. Nous transmettions notre savoir. » Interview d'Earl Hines par Robert Reisner, inB/ntf, la légende de Charlie Parker. « A Kansas City règne une merveilleuse tradition selon laquelle un musicien plus expérimenté essaie d’aider un nouveau. Un saxophoniste alto, Prof* Smith, aidait Bird* à se perfectionner au saxo. Efferge Ware, un guitariste, entraînait une véritable équipe de jeunes dans mon genre, nous enseignant les cycles, les accords et les progressions. Nous nous asseyions dans le parc et étudions toute la nuit. » Interview de Gene Ramey par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker. 3. Baratin, bagout : « People tell me Life is what you make it But the whole thing Seems jazz to me » Hard Way to Go, Bill Gaither (1939). • Surnom de i'harmoniciste Wil- liam«Jazz» Gillum (1904-1966) et du trompettiste Roy Eldridge (1911) alias Little Jazz (Little Jazz Boogie, 1945). ► JAZZ AT THE PHILHARMONIC. Voir J.A.T.P. ► JAZZ-BACK. Voir monkey-back. ► JAZZ BAND. 1917, date du premier enregistrement de l’original Dixieland Jazz Band. Orchestre de jazz (vieilli) : « When the jazz band struck up You’d be surprised Everybody in the hall Was goo-goo* eyed » Al The New Jump Steady Ball, Ethel Waters (1922). ► JAZZBELLE. Référence biblique Jezabel fit accuser à tort un paysan de vol ; pour cela, elle fut tuée et son corps livré aux chiens. Dans l’argot des cajuns, prostituée : « The wife sleepin’ in one room and the husband in the other. Your children don’t understand that. God doesn’t understand that. If you don’t give your man what he wants, there is always a Jezebel around the corner who will. He ’ll go around the corner and get himself a Jezebel. » Interview de Little Richard cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard. ► JAZZBO. DU créole « chasse-beau », lutte pacifique de danseurs de cake walk. Dans les années 1910- 1925, vieux terme de l’argot noir pour désigner un mec dégourdi, sapé à la dernière mode : « Don’t start no crowing Lay* your money down I’ve got mine on Jazzbo That Memphis clarinet clown He can moan* and he can groan* I ain’t fooling you There ain’t nothing on that horn* That old Jazz can’t do » Jazzho Brown from Memphis Town, Bessie Smith (1926). ► JAZZ COMPOSER’S GUILD. Association créée en 1965 par Bill Dixon pour défendre les intérêts des musiciens face aux directeurs de cabarets, de maisons de disques et aux impresarios. ► JAZZER. Popotin, cul : « Says, ole miss Jones laid down in the grass Ever see a woman work her jazzer so fast? ’cause it feels good, yes, it feels so good Talkin’ about my gal* Because it feels so good » Feels so Good, Kokomo Arnold (1935). ► JAZZHORN. Kazoo* agrémenté d’un pavillon de trombone de la création de Brownie McGhee. ► JAZZ IT UP. A l’origine, jouer du jazz : « After that trip, I came home and started jazzing it up in Memphis. One of the jobs* our hand* had, for example, was to accompany the draftees to the station in 1917 and 1918. We \Azyed Draftin' Blues. Preparedness Blues, and I jazzed them up. » Interview de Buster Bailey, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. Depuis 1940, jouer un jazz artificiel, plein de clichés. ► JAZZMAN. Musicien de jazz : « Nous sommes réduits à jouer dans des porcheries. Tout cela parce qu’on nous désigne sous le vocable de musiciens de jazz. Quand vous me classez dans la catégorie jazzmen, vous limitez automatiquement mes possibilités de travail. » Interview de Charles Mingus, recueillie par Jean Clouzet et Guy Kopelowicz, in Jazz Magazine n" 107 (1964). ' ► JAZZY. ® Au début du siècle, jouer jazzy, jouer du ragtime. @ Salace, cochon : «/ Want a Jazzy Kiss, Mamie Smith (1921). ® Qui évoque l’atmosphère, le feeling du jazz.

JAZZ ROCK Courant musical représenté dès 1968 par des orchestres blancs tels que « Blood Sweat and Tears » ou « Chicago » qui tentaient une synthèse du rock et du jazz : rythmique rock avec arrangements pour instruments à vent jazzy*. Mais c’est surtout avec In a Silent Way (1969) puis Bitches Brew (1970) de Miles Davis qu’une page de l’histoire du jazz est tournée; après Bitches Brew fleurirent de nombreux groupes de jazz rock souvent créés par des musiciens ou anciens musiciens de Miles Davis : Tony Williams et son « Lifetime », Herbie Hancock, Wayner Shorter et Joe Zawinul (« Wheather Report »), Chick Corea, Larry Coryell, John McLaughlin...

JEFFING De Jefferson Davis, président de la Confédération depuis la Sécession (4 février 1861) jusqu’à la fin de la guerre; symbole de l'esclavage pour la population de couleur. D’où jeff -. Blanc. Jeffing est un synonyme de toming*.

JELLY Afr. Du mandingue jeli, chanteur, ménestrel; renforcé par l'anglais jelly, gelée. ► Relations, plaisirs sexuels: « Reason why grandpa like grandma so Same sweet jelly she had a hundred years ago » Jelly Roll, Butch Cage (1960). ► Peut aussi prendre des sens plus précis : foutre, sperme (1719). « I done more for you Than your daddy ever done I give you my jelly He ain’t give you none » Motherless Child Blues, Barbecue Bob (1927). Ou con, chatte : « Mabel's cookin* is a treat Her jelly* roll cannot be beat* She always keep them fresh and clean Clean her jelly down in between » If It Looks Like Jelly, Shakes Like Jelly, It Must Be Gel-a-Tine, Charlie Lincoln (1928). 353. JELLY BEAN. ® Personne habillée « dernier cri » et de façon voyante : « She's long an’ she tall Sweet mama jelly bean She knows just how To get me out of New Orleans » Waycross Georgia Blues, Barbecue Bob (1928). ® Maquereau, souteneur : « Down on Franklin Avenue, Jelly beans struttin’* to and from Well you hear one jelly bean ask the other one “Which a-way did my good girl go?” Nut Factory’ Blues, Hi Henry Brown (1932). ® Façon de s’adresser à quelqu'un (années 1930-1950). • JELLY JAW. Surnom du bluesman Jaydee (J.D.) Short (1902-1962), du fait du vibrato particulier qu'il produisait avec sa mâchoire (jaw) et sa bouche. 354. JELLY ROLL. Gâteau roulé à la confiture. ® Amoureux, époux (ca 1890-1900). ® Version lascive du buck and wing en vogue durant la Première Guerre mondiale ; « Well I ain’t been to Heaven But I’ve been told St Peter learnt the angels How to do the Jelly Roll » Hesitation Blues, Rev. Gary Davis (1969). ® Les parties sexuelles masculines (ou féminines), coït : « I wanna know what make grandpa, hey Love your grandma so? She got the same jelly roll She had forty years ago » Hambone, Blues, Ed Bell (1927). ® Plus généralement, jelly roll, comme biscuit, fait référence à l'amour physique dans ce qu’il a de plus doux, de plus caressant, et s’oppose en cela souvent à combread*, l’amour fait à la va-vite : « I’d rather have your jelly roll Than my home cooked bread I love your jelly roll I love your good jelly roll » He's a Jelly Roll Baker, Lonnie Johnson (1942). • Surnom du pianiste et compositeur Ferdinand Joseph La Menthe alias Jelly Roll Morton (1885 ou 1890-1941). ► JELLY ROLLER. Amant : «Just as sure As you hear me sing this song You sure won’t miss your jelly ’til your jelly roller's gone » You'll Never Miss Your Jelly, Til Your Jelly Roller's Gone, Lil Johnson (1929).

JERK Danse « solitaire et asexuée » (selon Henry Miller) apparue dans les années 60 à la suite du succès du twist : Come on and Do The Jerk, Smokey Robinson (1964). ► SOUL JERKER. Voir soul.

Jl.WTOWS Quartier au cœur du West Side de Chicago connu pour le marché aux puces de Maxwell Street : « He’d get a knife and fork and beat the bars out of the chairs around the house so I told my wife I see he’s gonna be a drummer* so I gets on my car and go to Jewtown in Chicago and I buy a $35 parade snare drum for him. » Interview de Big Daddy Kinsey par Jacques bacava (1987) in Le Récit de vie des bluesmen.

JIG Vient probablement de « gigue ». 355. Soirée dansante. 356. Alcool. 357. Apocope de jighawk / jigaboo / jigger- boo (le suffixe « boo » vient probablement de boot, noir); Noir à la peau très foncée : « You just gotta respect men like Jelly [Roll Morton], King* Oliver, Henderson and those other pioneers. They were proving something and had a rough* time. Jazz was known then as “Jig” music, and those men had to fight all that way. » Interview de Louis Metcalf in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 4. Jig (ou gig) : au jeu des numbers*, combinaison de trois numéros gagnants rapportant cent fois la mise. ► JIGGER MAN. Guetteur dans l’argot du milieu. ► JIG HEAD. Soûl, bourré : « Now the Chicago whiskey Does them getaway* Now this Chicago whiskey Does something to their minds Women get jig-headed Oooh well, well, they never drink moonshine* » Southern Girl Blues, Peetie Wheatstraw (1941).

JIM Façon de s’interpeller entre hommes, comme «Jack » ou « Jelly Bean » : «Dexter [Gordon], lui, trouvait que je n’étais pas si bip* que ça. Il me disait toujours : “Jim [...], tu peux pas sortir avec nous avec cette allure, en t’habillant comme ça. Pourquoi tu passes pas autre chose, Jim? Faut te trouver des fringues. Faut que t’ailles chez F & M”, qui était un magasin de vêtements sur Broadway. » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l’autobiographie. ► JIM CANAAN. Déformation de Jim Kinnane, personnage qui avait la haute main sur nombre de bars et d’activités illicites dans le Memphis du début du siècle : Old Jim Canaan, Robert Wilkins (1935). ► JIM LEE. Bateau à aubes de la Lee Line of Memphis : The Race of The Jim Lee and The Katy Adams, Jazz Gillum (1961). ► JIM TOWN. Ville ou quartier noirs : /Zm Town Blues, Fletcher Henderson (1936).

JIM CROW 1829. Le terme vient d’une chanson de plantation du XIXe siècle, Jump Jim Crow, reprise par le chanteur de minstrel Thomas Rice (1808-1860). Jim le Corbeau, symbole du préjugé racial; désigne aussi bien l’oppresseur que l’opprimé : « I’m tired of this Jim Crow Gonna leave this Jim Crow town Doggone* my black soul I’m sweet Chicago bound Yes I’m leavin’ here From this ol’ Jim Crow town » Jim Crow Blues, Cow Cow Davenport (1927). ► CROW-JIM. Racisme anti-Blanc : « I remember a statement a critic wrote in the paper. He said, “I was over in Europe, and over there it’s 'crow-jim Not ‘Jim-Crow’ it’s ‘crow-jim’. In other words the people don’t like nothing but black music over there’’. » Interview de Budd Johnson, cité dans To Be or Not To Bop, de Dizzy Gillespie et Al Fraser. ► JIM CROW LAWS. Lois «Jim Crow», lois officialisant la ségrégation raciale. Promulguées à partir de 1880 dans les ex-Etats confédérés, elles n’avaient fait alors qu’officialiser un état de fait : métiers réservés aux Noirs, séparation dans les transports et les lieux publics... Les espoirs nés de l’émancipation (1863), de la promulgation du 13e amendement interdisant l’esclavage (1865) et du Reconstruction Act organisant la réintégration des Etats sécessionnistes dans l’Union (1867) étaient ainsi rapidement balayés. « Goin North, chile, Where I can be free Where there’s no hardship Like in Tennessee Goin’ where they* don’t have Jim Crow laws Don’t have to work there Like in Arkansas » North Bound Blues, Maggie Jones (1925). Cette situation se trouvait même officialisée au plan fédéral en 1896 lorsque fut rendu le célèbre arrêt « Plessy contre Fer- gusson » : Noirs et Blancs deviennent sur l’ensemble du territoire « égaux mais séparés ». Les ségrégationnistes se réclameront de cet arrêt jusqu’en 1954, date à laquelle la Cour Suprême le déclare inconstitutionnel. Cette décision historique marque tout à la fois la fin de la ségrégation institutionnalisée et le début de la lutte pour les droits civiques qui dominera la décennie suivante. Cette période verra, spécialement dans le «Deep South», les résistances s’exacerber, comme à Little Rock. Arkansas, où le gouverneur Faubus* va tristement s’illustrer.

JIMMIES Nervosité extrême, delirium tremens : The Jimmies, Jimmie Lunceford (1946).

JINX Personne ou objet portant malheur; sort mauvais sort : « I’m gon' cut* out playing policy* Because my numbers just won’t fall Somebody’s put jinx on me Oh well, well, and I can’t have no luck at all » Cut out Blues, Peetie Wheatstraw (1936). jms Pour meningitis, méningite : Memphis Minnie Jitis Blues, Memphis Minnie (1930).

JITTERBUG Afr. De jitter, nervosité, agitation, lui- même du mandingue jito, effrayé. ► Danse (autre nom du lindy hop) : « Well now, my baby have changed her way of dancing Oh, she don’t two-step no more Oh she do that new dance you call jitterbug Oh, man, she jump clear the floor » My Baby Made a Change, Sonny Boy Williamson (1941). ► Personne souffrant de delirium tremens, maboule : Jitter Bug, Cab Calloway (1934). ► Amateur de musique, spécialement de musique swing.

JIVE Afr. Du wolof jet1, dénigrer; renforcé par l’anglais jibe, se moquer, se foutre de. 358. Argot noir : H# That Jive, Jack, Slim Gaillard (1946). 359. Baratin visant à duper, à arnaquer l’autre (voir dirty* dozens) : « Here you come around with that same old jive Tellin' me to play 25-50-75 » Three Six Nine Blues, Louisiana Johnny (1935). 360. Défonce, bon temps : « I’m gonna dig* me some jive And try to knock* myself out » 77%* Jtie Blues, Memphis Slim (1940). 361. Danse. 362. Bagarre. 363. Marijuana: Here Comes The Man with The Jive, Stuff Smith (1936). 364. Rapport sexuel. 365. Musique rvthmée et rapide, swing ica 1935-1945). 366. V. Rire de, se moquer de (ca 1920-30) : « Well I’m a country* man Never go to town The women in Chicago Trvin’ to jive me ’round » Stamp Blues, Tony Hollins (1941). Don’t Jive Me, Louis Armstrong (1928). V. Tromper, duper, mener en bateau particulièrement dans le cas d’un subordonné pris en défaut par son supérieur (voir dirty* dozens) : « I was a pretty* good mixer ’cause I came from the South and I knowed how to say, "yes* sir" and “no sir’’ and get next to my superior which is the white people you know — I just went along with my jive. I knowed how jive them* and they* let me get away with a whole lot of stuff* that I wouldn’t ’ve if I’d been a little hostile with them. » Interview d’Arvella Gray, citée par Paul Oliver dans Conversation with The Blues. ► COLLAR THE JIVE. Comprendre, piger, saisir, être au parfum. ► HIP TO THE JIVE. Voir hip. ► JIVE MAN. Arnaqueur, escroc : Jive Man Blues, Frankie « Half Pint » Jaxon (1929). ► HAND JIVE. Voir hand. ► LINE OF JIVE. Boniment, sac d’em- brouilles, salades : « I’m a man from the gutter* Women, in your dive* at night I’m evil, mean and funny* So don’t come back with that line of jive » Gutter Man Blues, George Hannah (1929).

JOB Boulot; pour un musicien, engagement: « But, man, those guys* could really play. [...] But those guys couldn’t get used to all that money. They used to bring their food on the job, just like they was used to doing in the lowdown* bonkey-tonks* along Perdido* Street. Here, they’d come every night to this Wayside Park with a bucket of red* beans and rice and cook it on the job. (Man, I wish I had some of that stuff* right now. The best food in the world ! j » Jelly Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. ► SENDER JOB. Voir send.

JOCKEY 367. Celui qui « monte » ou qui « conduit » (voir ride), d’où au sens figuré, partenaire sexuel : « My gal*'s a jockey She’s teachin’ me how to ride* » Jockey Rider Blues, Big Joe Williams (1961). 368. Pour dise jockey', animateur de radio : « There’s a jumping* little record I want my jockey to play Roll over Beethoven I got to hear it again today » Roll over Beethoven, Chuck Berry (1956).

JODY (Jodie) Amant, bon baiseur : The Jody Grind, Horace Silver (1966).

JOE MOORE Dans le milieu des joueurs et des flambeurs, variante de jomo, forme inversée de mojo : La phrase «I got Joe Moore in my hand », citée par Zora N. Hurston in Mules and Men, doit ainsi s’interpréter comme « I got a mojo hand ».

JOGO Noir : « The one who introduced me to Handy was a guitarist named Guy Williams. Guy had a little blues of his own he was always playing, named Jogo Blues. This man later joined Handy’s band* in 1911 and in 1913 Pace and Handy published the Jogo Blues under the same tittle and then mater changed it somewhat to make the St. Louis Blues. » Jelly Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

JOHN Afr. Du mandingue Jon, esclave; convergence avec le prénom John. ► Homme; amant : My John Blues, Clara Smith (1925). ► Homme qu’on peut facilement rouler, gogo (spécialement en parlant d’un Blanc) : « One john in the city One lives up on the hill But the man I’m lovin’ Lives down in Jacksonville » Jacksonville Blues, Nellie Florence (1928). ► Dans les milieux de la prostitution, client, micheton : « Now after Storyville* shut down, the girls couldn’t just call out the door for beer. But the wrinkless was they could catch a “john” (a sucker*) and call down to whatever saloon they like to trade with and say these words “Oh bell boy, oh bell boy” and when the bell boy from that particuliar saloon answers, this chick* will say to him “Bring me half a can.” » Interview de Louis Armstrong in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

JOHN THE CONQLEROO De Conqueror root, racine du conquérant : My John The Conquer Root, Muddy Waters (1964). Le talisman le plus puissant, le plus célèbre dans le folklore négro-améri- cain; il est censé ramener l’amant(e) infidèle, fortifier son amour ou forcer la chance dans les jeux de hasard : « I got a black* cat bone I got a mojo* too I got John The Conqueroo I’m gonner mess with you I'm gonner make you girls Lead me by my hand Then the all world’ 11 know I’m the hootchie* cootchie* man » Hootchie Cootchie Man, Muddy Waters (1953).

JOHNNY Héros de la ballade Frankie and Johnny (voir Frankie).

JOHNSON ► La loi, l’autorité (syn. : the man) : « Oh, Mister Johnson tom* me loose Got no money, but a good excuse Oh Mister Johnson, I’ll be good Oh, Mister Johnson turn me loose Don’t take me to the calaboose* Oh Mister Johnson, I’ll be good » Mister Johnson, chant traditionnel. ► Chose; pénis.

JOINT 369. Dans les années 1930-1940, habitation et, plus généralement, n’importe quel endroit, prison, bar, bouge (voir juke* joint)... « Hey mister landlord Lock up the door When the police comes around Tell him “the joint is closed" » Let The Good Times Roll, Louis Jordan (1946). 370. Pénis (années 1930-1940). 371. Cigarette de marijuana, joint (années 1940-1970) : « They asked me about drugs. Every now and then, I’d smoke a joint or something like that. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. • CLIP JOINT. Coupe-gorge, un endroit où « while one jives you, another creeps or crawls in and rifles your pockets ». (Danny Barker in Hear Me Talkin’ to Ya). • DAME JOINT. Maison close, bordel. • JUICE JOINT. Bistrot : Juice Joint, Cripple Clarence Lofton (1939). • JUKE JOINT. Voir juke. • THAT’S THE JOINT. C’est fantastique. • JOKER Farceur. L’amant vu par celui qui est trompé : « You used to be my sugar* But you ain’t sweet no mamlish* more You got another joker Hangin’* round your door » Tooten out Blues, Slue Foot Joe (1929).

JOMO Forme inversée de mojo*.

JONAH Surnom du trompettiste Robert Elliot «Jonah » Jones (1908).

JONES Casey Le mot casey provient de la déformation de Cayce, Kentucky, ou de la contraction de Kansas City (Æ.C, Kassie, Kaycee) comme dans le cas du guitariste William « Casey Bill » Weldon ( 1909-?). John Luther Jones est un conducteur de train (engineer) blanc, mort lors d’une collision sur la ligne Illinois Central le 20 avril 1900 et qui devint le héros de ballades très populaires sous le nom de Casey Jones ou Kassie Jones : « Early one morning came a shower of rain ’round the curve I seen a passenger train In the cabin was Casey Jones He’s an old engineer* But he’s dead and gone » Casey Jones, Mississippi John Hurt (1963). La collision se produisit entre Memphis (Tennessee) et Canton (Mississippi) alors qu’il tentait de rattraper son retard sur l’horaire : « Lord, some people said Mister Kassie couldn’t run Let me tell what Mr Kassie done He-Teft Memphis, ’t was quarter to nine Got to Newport News it was dinner time I-.] Lord, People said at Kassie You’re runnin’ over time You'll have a collision with the 109’ Kassie said : “’Ain’t in mind I’ll run into glory ’less I make my time” » Kassie Jones, Furry- Lewis (1928). La ballade veut qu'on l’ait trouvé une main sur la commande du sifflet et l’autre sur celle du frein; il avait ordonné à son collègue de sauter mais était resté lui- même aux commandes... Si Casey Jones incarne dans l’inconscient collectif la puissance, l’invulnérabilité et la liberté que l’on associe volontiers aux conducteurs de locomotive, certaines versions notent son aspect « ouvrier modèle », veillant plus aux intérêts de la compagnie qu'à la vie de ses passagers et chassant les vagabonds en leur interdisant l’accès aux wagons : « Casey said before he died, “Fix the blinds* so the bums* can’t ride If they ride, let them ride* the rods Trust their lives in the hands of God” » Gæey Jones, Mississippi John Hurt (1963).

JONING Afr. Pb. du mandingue jon, esclave. L’un des noms des douzaines (voir dirty* dozens), utilisé plus particulièrement à Washington D.C.

JOOGIE Voir boogie. Joogie Blues, Edna Winston (1927).

JOOK Voir juke.

JOYS Terme autrefois utilisé, comme stomp, dans le titre de certaines compositions. Aujourd’hui obsolète. Afew Orléans Joys, Jelly Roll Morton (1923).

Jl'BILEE Afr. De juba (1834), nom d’une femme née un lundi. ► Danse pratiquée dans les plantations au temps de l’esclavage. ► Technique utilisant le corps comme caisse de résonance et les mains comme instruments de percussion. ► Chant d’allégresse ; « On chantait des jubilees, en alternant les passages comme on fait aujourd’hui. On les récitait d’abord, puis on reprenait en chantant, et de nouveau on récitait, puis on chantait ; et après, on se mettait à taper dans les mains pour le jubilee. Parfois il y avait des frangines qui commençaient à “sauter". Ça se passait après le sermon. Elles sautaient en l’air, ça n’était pas de la danse, mais c’en était très proche. » Interview de Harrison Bornes par Allen et Russell (1959), citée par Donald M. Marquis dans Btiddy Bolclen, le premier musicien de Jazz.

JUG 1. Bouteille de whisky : « [Parlé] Pass the jug After a while, drink to the blues » Hokum Stomp, Jane Lucas et Georgia Tom Dorsey (1930). ► Cruche ou bouteille à moitié remplies d’eau dans lesquelles on chante ou souffle de façon à produire des sons imitant un tuba ou une contrebasse (voir jug band*). ► Depuis 1815, prison, taule. • Surnom du saxophoniste Eugene « Gene » Ammons (1925-1974) : Brother Jug’s Sermon, Gene Ammons (1948). 372. FIGHT THE JUG. Câliner la bouteille, biberonner : « I’m deep down in a hole* Somebody else has dug Gettin’ sick and tried Of fightnin’ that jug » Fightin’ The Jug, Blind Blake (1929). 373. JUG BAND. Voir band. Jug Band Blues, Sara Martin (1924).

JUICE • Boisson alcoolique : « Some people like to laugh Some like to cry But there’s three things that satisfy Number one is my money to have my spread Number two is my woman close to me Number three is my juice Which I’m gonna drink » One, Two, Three, Everybody, Amos Milburn (1954). • Drogue: Joy Juice, Dinah Washington (1946). 3- Sperme, si le mot est associé à la métaphore du lemon, citron/pénis : « Now you can squeeze my lemon* ’till the juice run down my leg You can squeeze my lemon ’till the juice run down my bed But I’m going back to Friar’s Point If I be rocking to my head » Traveling Riverside Blues, Robert Johnson (1937). 374. BUG-JUICE. Depuis 1875, mauvais whisky : « Love my bug-juice Just as crazy about it as I can be (My late bug-juice vane?) Lord, I’m afraid he’s going to pour it on me Took one drink last night And it made me go stone* blind Thought I’d run away But I had to take my time » Bug Juice Blues, Kid Prince Moore (1936). 375. JUICED. Soûl, bourré (années 30) : « The doc took me off of scotch, bourbon and beer Good good whiskey, if I wanna stay here, I can’t get juiced, I can’t have no fun*, Gonna buy me a little bottle and drink up some more » Milk and Water, Amos Milburn (1954). ► JUICE HEAD. Alcoolique, soulard (années 30) : « I got a juice head baby She’s drunk all the time » Juice Head Baby, Eddie Vinson (1945). ► JUICE JOINT. Bar, bouge (voir joint).

JUJU 376. Terme d’origine africaine, aujourd’hui peu usité : fétiche, talisman, gris-gris : The Magic of Juju, Archie Shepp (1967). 377. Celui qui pratique la magie, doué de pouvoirs surnaturels.

JUKE Jook) Peut-être du bambara dzugu, mauvais, méchant, et du gullah joog, en désordre. Juke (juke joint, juke bouse, jook) : taverne en bordure de route ou à proximité d’une gare, guinguette, bordel (années 1900-1930) : « Un juke joint est un endroit où les gens peuvent jouer aux cartes, aux dés, boire et tout le reste [...] Pour boire votre whisky, pas de verre, il fallait boire à la bouteille ou bien se servir du gobelet qui servait pour la bière, et qui était généralement en fer-blanc. En fait, c’était pas possible d'utiliser des chopes là- dedans parce que sinon les gens se seraient ouvert le crâne avec. C’étaient des endroits plutôt durs. Quand on jouait dans un endroit comme ça, il fallait s’asseoir sur une chaise cannée, sur la piste de danse et y aller. Il n’y avait ni micro, ni sono, ni rien, il fallait chanter aussi fort que possible. Pour trouver un boulot dans un endroit comme ça, si le propriétaire avait entendu parler de vous quelque part, il venait vous trouver, il vous disait combien il payait, et c’était à prendre ou à laisser. Dans certains endroits, on était payé un dollar et demi par soirée, mais on se faisait des pourboires en plus en jouant les chansons que les gens vous demandaient. » Interview de Johnny Shines par Pete Welding, in Living Blues, n° 22, 1977. « On jouait à Chambers, dans le Mississippi, on jouait à Cleveland, on jouait à Leland, on jouait à Brooksville. On jouait dans des juke houses, n’importe où, dans des granges, dans des bâtiments coupés en deux, n’importe où. On pouvait se faire tuer pour 10 cents, vous savez, pour 10 cents. » Interview de Johnny * Big Moose» Walker (1978) par Sebastian Danchin in Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto. Les juke-joints fournirent du travail à de nombreux bluesmen jusque dans les années 50 ; à ce moment-là, un juke-box prit bien souvent leur place... ► JOOK. V. ® Prendre du bon temps, s’en payer une tranche. ® Jook it. Jouer du piano (surtout dans le contexte d’un cabaret borgne ou d’un bouge) : Jookit Jookit, Walter Roland (1933). ► JUKE-BOX. Juke-box : « You know my temperature’s rising The juke box is blowing* a fuse My heart’s beating rhythm And my soul keep singing the blues. Roll over Beethoven, Tell Tchaikovsky the news » Roll over Beethoven, Chuck Berry (1956). En 1940, ce sont quelque 350 000 appareils qui étaient installés dans presque tous les bars et restaurants ; ils absorbaient 44 % de la production de disques. « JUKE BOY. Surnom du bluesman Weldon «Juke Boy» Bonner (1932-1978): Call Me Juke Boy, Juke Boy Bonner (ca 1960).

JUMP 378. Morceau sur tempo rapide, favorable à la danse. « When I was getting out of the cab and paying the driver, 1 could hear the King’s* Joe Oliver’s band playing some kind of a real jump number*. Believe me, they were really jumpin’ in fine fashion. I said to myself, “My Gawd*”, I wonder if I’m good enough to play in that band. I hesitate about going inside right away, but finally I did. » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 379. Danse de la période swing. 3- Se dit d’un lieu animé, vivant. • V. Sauter, et, par le même détournement de sens qu’en français, baiser : « Mama, I feel like jumpin’ Through the keyhole in your door I can jump so easy Your man will never know » Falling Down Blues, Furry Lewis (1927). • V. Vibrer (d’excitation, de contentement), jouer de la musique swinguante : Jumpin’ at The Woodside, Count Basie (1938). ► JUMPER. Souteneur; amant (dans la bouche du mari trompé) : Mean Jumper, Blind Lemon Jefferson (1928). ► JUMP SALTY. Se fâcher, se foutre en rogne : « Now two old womens Are running hand in hand One found out The other one had a man Then that woman jumped salty Lord, because it was against her rule » Afy Feet Jumped Salty, Washboard Sam (1941). ► JUMP-UP. Ce terme désigna au début du siècle la musique qui allait devenir le blues : « They had these little old jump-up songs. I don’t reckon they was even worth getting a record on if they’d had that up then... The little old blues they had to my idea wasn’t worth fifteen cents. » Interview du Rev. Le Dell Johnson, cité par David Evans dans Tommy Johnson. e ► SUKEY (SOOKIE) JUMP. Danse dérivée des quadrilles et cotillons, dansée dans la deuxième moitié du xix : « Poor Howard was a poor boy, he went all around the plantation playing for the sukey-jumps. He was the first man who started sukey-jumps playing in the whole world. » Leadbelly, cité par Alan Lomax et Moses Asch dans The Leadbelly Songbook. JUNGLE 380. Bidonville : « Well now I been in the jungle Three long nights and days But I can’t find no one Oh well, well, now, to help me on my way » Jungle Man Blues, Peetie Wheatstraw (1936). 381. Style ellingtonien (1925-1939), évoquant plus la jungle de Harlem que la forêt vierge et où abondent les effets de growl, et de cuivres bouchés (voir growl, wah- wab) : Jungle Jamboree (1929). Jungle Blues (1930). Echoes of The Jungle (1931), Duke Ellington. e e k THE JUNGLES. ® A New York, quartier noir entre les 60 et 63 rues : « Another interesting place in 1920 was Small’s Sugar Cane Club, a cellar located on the southwest corner on 135th street and Fifth Avenue [...] Charlie [Small] came from South Carolina and most of his help were from that state too. Many of them came from the Jungles, where I first played at Alien’s and George Lee’s, since that neighbourhood was full of South Carolinians. » Interview de James P. Johnson par Tom Davin, « Conversations with Jantes P.Johnson », Jazz Review 3(13), 1960. ® La pègre, le milieu.

JUNIOR Mot placé devant le nom de quelqu’un ayant le même prénom que son père. Surnom du pianiste de jazz Julian Clifford «Junior» Mance (1928), du saxophoniste Herman «Junior» Cook (1934), des har- monicistes de blues Herman «Junior » Parker (1932-1971), Amos «Junior » Wells (1932), du pianiste originaire deDetroit, Emery H.Williams Jr. alias «Detroit Junior» (1931), du guitariste Robert «Junior» Lockwood (1915), et des trois différents « Guitar Junior », Luther Johnson (1934-1976), aussi connu sous les sobriquets de « Snake » et de « Georgia Boy », Luther Johnson «Junior » (1939) et Lee Baker «Junior» (1933), alias également « Lonnie Brooks ».

JUNK ► Ordure, camelote. ► Truc, bidule : « Then 1 told old Krutchev Sittin’ there lookin’ bad “Get that junk outa Cuba Before you make me mad Take off them missiles bases Take them planes and all Or 1’11 grab me a bat Use your head for the ball” » Red's Dream, Louisiana Red (1962). ► Baratin, embrouille : « I’ve got to go outside Shut your mouth, boy Poor boy can’t talk at once And I done told you two or three times I don’t want no junk » Sweet Petunia, Jesse James (1936). ► Héroïne, stupéfiants : « Well I can’t kick this habit* And this junk is killing me Every since 1 started this habit Everything been down* on me » Can't Kick This Habit, Champion Jack Dupree (1958). 382. JUNKER (JUNKIE OU JUNKY). ® De peu de valeur, médiocre « As for the record sessions, it seems like they would always give him [Fats Waller] a whole lot of junkie tunes to play because it seemed as if only he could get something out of them. » Interview de Gene Cedric, in Hear Me Talk-in'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. @ Drogué: « They call me, they call me a junker ’cause I’m loaded* all the time I don’t need no reefers* I’d be knocked* out with that angel wine » Junker Blues, Champion Jack Dupree (1941). 383. ON THE JUNK. Drogué, shooté (syn. : on the stuff). K

K.C. ► Abréviation de Kansas City, Missouri : Destination KC, Lester Young (1944). ► La Kansas City Southern Railroad qui relie Houston, Texas, à Kansas City, Missouri, via Shreveport : « 1 thought I heard that K.C. When she blowed She blowed like My woman was on board » K.C. Moan, Memphis Jug Band (1929). 384. Surnom du bluesman K.C. Douglas (1913-1975): K.C. Blues, K.C. Douglas (1961).

K.M.A. Pour Kiss My Ass* : K.M.A. Blues, Roosevelt Sykes (1941).

KAISER Surnom du batteur Joseph « Kaiser » Marshall (1899-1948) : Kaiser’s Last Break, Sidney Bechet et Mezz Mezzrow (1947).

KANSAS Surnom du bluesman Wilbur «Joe» McCoy alias Kansas Joe (cz? 1903-czz 1949), du batteur de Kansas City Carl Donnell « Kansas » Fields (1915) : « One spot* there [in Chicago], the 65 Club, had a breakfast* dance one morning, and they had a little combo* with King Kolax on trumpet; a kid named Goon Gardner, who could swing* like mad, on alto; John Simmons on bass; and Kansas Fields, drums*. » Interview de Billy Eckstine, in Haar Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 385. Pseudonyme de la chanteuse Thelma Holmes, alias « Kansas City Kitty » pour ses enregistrements de 1930/34.

KATE (Katy) • Kate Adams, célèbre bateau à aubes de la Lee Line of Memphis qui, au tournant du siècle, naviguait sur le Mississippi : « Katy Adams got ways Just like a man Because she steals a woman Sweet loving babe Everywhere she lands » Don't You Leave Me Here, Papa Harvey Hull (1927). Il était réputé pour être un véritable bordel flottant : « La Katy Adams, on appelait ça le bateau de ces dames; pensez, un bateau de femmes sur l’eau. Toutes les femmes s'attachaient à ce bateau... Il suffisait de payer cinquante cents pour une cabine et on pouvait rester à bord de Memphis jusqu’à Rosedale, et c’est comme ça qu’elles se faisaient leur argent... Elles gardaient leur fric entre les jambes, dans un sac accroché à la ceinture... et elles en avaient tellement, de l’argent, en revenant vers Memphis, qu’élles en étaient bossues, pouvaient plus se redresser. » Interview de Will Shade cité par Paul Oliver dans Conversation with The Bittes. ► La Missouri, Kansas and Texas Railroad Line, qui dessert Kansas City, Missouri, Fort Worth, Dallas, San Antonio et Houston, Texas : «And I hate to hear Hear the little Katy when she blow Puts me on a wander Mama, makes me wanna go? » No Special Rider Blues, Little Brother Montgomerv (1930).

KAYCEE Phonétiquement, K.C., Kansas City, Missouri : • « In those years around 1930, Kaycee was reaWyjumping* so many great bands having sprung up there or moved in from over the river. I should explain that Kansas City, Missouri, wasn’t too prejudiced for a Midwesternern town. » Interview de Mary’ U)u Williams, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

KAZOO Instrument tenant de l’ocarina et du peigne vocal ; d’usage courant dans lesjz/g bands*, il est pratiquement abandonné depuis la Deuxième Guerre mondiale : « The piano was the only musical instrument used in the Tramp Band. The ¿/rammer* was a washboard* and the horns* were kazoos. You know, you blow, it sounds like blowing a paper through a comb. » Interview de Budd Johnson cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop.

KENNEDY John Fitzgerald Président des Etats-Unis élu en 1961 ; il fut assassiné à Dallas, Texas, le 22 novembre 1963. Kennedy était et reste un homme très populaire dans la communauté noire (il fut élu contre le républicain Richard Nixon avec 70 % des votes des électeurs noirs) : « Well when President Kennedy got elected The news went all around the world He’s the youngest man To try to satisfy the world » President Kennedy Blues, Champion Jack Dupree (196?).

KICK V. Donner des coups de pied : « It’s all about a man Who always kicks and dog* me ’round And when I try to kill him That’s when my love come* down » Please Help Me Get Him off My Mind, Bessie Smith (1928). ► Poche. ► Plaisir, jouissance (années 40) : « Well I looked at my watch It was ten twenty six But I’m keep-on-dancin’ 'til I got my kicks We were reelin’, reelin’ and ■¿.-rockin’* » Reelin’ and Rockin’, Chuck Berry (1958). ► V. Abandonner, cesser de : « When my man start kickin’ I let him find another home I get full of good liquor And walk the street all night Go home and put my man out If he don’t treat me right Wild* women don’t worry Wild women don’t have the blues » Wild Women Don’t Have The Blues, Ida Cox (1924). D’où kick the habit, se désintoxiquer, laisser tomber la drogue : Can’t Kick This Habit, Champion Jack Dupree (1958). ► GET A KICK OUT OF. S’éclater, éprouver du plaisir : « Next to a grand organ there’s nothing finer than a magnificied symphony orchestra. I get my kicks out of that kind of music as well as spontaneous jazz*. Both kinds for different moods are solid* senders, and each type has its place in this everyday world of ours. » Interview de Fats Waller, in Hear Me Talkin’ to Ya. de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► KICK MUD. Litt. : piétiner dans la boue. Faire le trottoir. Mud Kickin’ Woman, Sunnyland Slim (1949). ► KICKS. ® Plaisir. ® Chaussures, pompes. ® Pas de danse : « Non content d’être un sacré trompettiste, Harry Smith faisait aussi un numéro de danse. Il savait danser à claquettes et en soft-shoe*, il connaissait le buck* and wing, les kicks, les splits* et quantité d’autres pas. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. ► KICK THE BUCKET. Litt. : donner un coup de pied dans le seau. Décéder, passer l’arme à gauche : Blues Kicked The Bucket, Rex Stewart (1946). KID Gamin. Surnom du tromboniste et chef d’orchestre Edward « Kid » Ory (1886- 1973), du trompettiste Herb « Kid » Morand (ca 1905-1952), du pianiste chanteur « Kid » Wesley Wilson (1893-1958) et du bluesman Billy the « Kid » Emerson (1929). ► KIDDIE (KIDDEO, KIDDO). Diminutif de kid. Adolescente, jeunette, fille inexpérimentée : « She’s a Zrçt>* little kiddie She’s the squarest* chick in town » Blowing to California, Wynonie Harris (1947). Kiddo, Wardell Gray (1950). Kiddeo, John Littlejohn (1968). ► KID MAN. Jeune amoureux, inexpérimenté, puceau : « Now it ain’t none of my business Babe but you know I know it ain’t right Hit your kid man all day long And play sick on your husband at night » Deep Blue Sea Blues, Tommy McClennan (1941).

KILL Tuer. Epater, époustoufler, tuer (au sens figuré) : « I got a fine little girl And she me to a T* Havin’ a real (grown ?) lovin’ You know it’s killing me » Fine Little Girl, Lafayette Leake (1978). ► KILLER, KILLER DILLER. Crack, as (années 30-40) : « [S’adressant au guitariste Scrapper Blackwell :] Knock* it on out*, boy I know what you’re talkin* about Lord, it’s a killer » Hustler’s Blues, Leroy Carr (1934). Quelqu’un de fascinant, qui retient l’attention, qui pique la curiosité : « Well he walked into the hotel Everybody left He looked in the glass And he smiled at himself Saying “I’m an ugly little figure on a scout I’m a terrible* little something Hush your mouth I’m a awful little creature I’m a killer diller from the South” » Killer Diller, Memphis Minnie (1946). Par extension, morceau particulièrement difficile à jouer. ► KILLING FLOOR. ® Dans un abattoir, endroit où sont dépecées les bêtes : « I work at the stockyard On the killing floor Making twenty five dollars And bringing you twenty four » Plenty Trouble on Your Hand, Jimmie Gordon (1937). ® Par analogie, dans un pénitencier, l’étage des condamnés à mort. ® Déprime, descente au « troisième dessous » : « If I never get off this killing floor I’ll never get down* this low no more If you say you had money You better be sure ’cause these hard times Will drive you from door to door » Hardtime Killing Floor Blues, Skip James (1931). ► MAN KILLER. Voir man.

KILROY Kilroy was here, graffiti fréquemment trouvé dans les toilettes publiques durant la Deuxième Guerre mondiale indiquant que l’armée américaine était là; terme utilisé depuis pour désigner quelqu’un d’insignifiant : Kilroy Boogie, Albert Ammons (1946).

KING Roi. Surnom du trompettiste Joe « King » Oliver (1885-1938), du pianiste Nat « King » Cole (1917-1965), du chanteur Clarence Beeks alias « King Pleasure » (1922-1981), des guitaristes et chanteurs Albert Nelson alias « Albert King » (1924) et Silas Johnson alias « Earl King » (1934), du saxophoniste « King » Curtis Ousley (1935- 1971), du chanteur et batteur « King » Ivory Lee Semien (1931) et du bluesman Dave Alexander alias « Black Ivory King ». ► KING-A-LING. Voir ding-a-ling. King-a-Ling, Freddy King (1963)- ► KING BEE. Voir bee. ► KING KONG. Whisky ou vin de la pire qualité ; King Kong, Clyde Hart ica 1944/45). ► KING OF SWING. Voir swing. ► KING SOLOMON. Roi Salomon. Racine à laquelle le vaudou attribue des pouvoirs surnaturels. • KING SOLOMON HILL. Pseudonyme du bluesman Big Joe Williams (1903-1982) dans certains de ses enregistrements des années 20. ► KINGSNAKE. Voir snake.

KING BISCUIT « Well evenin’ everybody People tell me how do you do? We’re the King Biscuit Boys We came out to welcome you » Emission de radio patronnée par la firme « Interstate Grocer » qui commercialise la farine « King Biscuit », et immensément populaire parmi les populations noires du Delta. Emise depuis Helena, Arkansas, par la station KFFA, cette émission quotidienne, diffusant en direct du blues, fournit du travail à de nombreux musiciens dont Willie Love, Joe Willie Wilkins, Robert Lockwood, James Peck* Curtis, Houston Stackhouse, Pinetop* Perkins, Robert Dudlow* Taylor, Robert Nighthawk, Earl Hooker et surtout Sonny* Boy Williamson qui, plus ou moins régulièrement selon les époques, y apparut entre 1938/40 et 1965, date de sa mort : « They* saw an opportunity to capitalize on his name, and they put his picture on the Sonny Boy Meal, and that’s what sold Sonny Boy Meal. Sonny Boy [Williamson] supposedly was to get a percentage of all the meal that was sold. He had some sharp* people take advantage of him and all Sonny Boy cared about was the almighty dollar, which I don’t blame him but he didn’t make anything, they cheated him. Instead of gettin’ royalties, they give him a flat piece of change and that was it. » Interview de Sonny Payne par Sebastian Danchin, in Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto. Le « King Biscuit » show eut un tel succès au début des années 40 qu'il suscita de nombreuses imitations (« Mother’s Best Flour », « Star Bright Flour »...) et permit la percée d’émissions destinées aux auditeurs noirs sur des radios « blanches » ; l’exemple le plus frappant à cet égard est certainement celui de « WDIA » à Memphis, Tennessee, qui, devant le succès rencontré, se tourna même exclusivement vers ce nouveau public.

KING Martin Luther Leader noir né en 1929; adepte de la non-violence, de la résistance passive et du boycottage, partisan de l’intégration, prix Nobel de la paix 1964, il fut assassiné à Memphis, Tennessee, le 4 avril 1968, quelque 3 ans après un autre leader noir, Malcolm X : « Well the world lost a good man When he lost doctor Martin Luther King A man who tried to do everything He tried to keep the world in peace And now the poor man is gone to rest But, go on Martin Luther King Take your rest There’ll always be another Martin Luther King » Death of Luther King, Champion Jack Dupree (1968).

KINGPIN Cheville ouvrière. Gros bonnet, grosse légume, caïd : King Curtis and The Kingpins.

KITCHEN MAN Litt. : homme de cuisine. Homme d'intérieur apprécié pour bien d’autres choses que pour ses talents culinaires (voir cook): « His jelly* roll sure is nice and hot Never fails to touch the spot I can’t do without mv kitchen man When I eat his doughnuts* tall I leave him just the hole Anytime he wants them He certainly can use my sugar* pole » Kitchen Man, Bessie Smith (1929).

KITTY (Kitten) ► Pot, cagnotte: «Just coming up from down South, I didn’t drink at all, but they had a kitty on the piano for the musicians to chip in and buy beer. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► Jeune fille désirable et naïve : Kitty on Toast, Horace Henderson (1940). Leave Mv Kitten Alone, Little Willie John (1959).' • Pseudonyme de Thelma Holmes, alias « Kansas City Kitty » pour ses enregistrements (1930/34).

KLOOK Surnom du batteur Kenneth Spearman « Kenny» Clarke (1914-1985): « Kenny got called Klook. It really should sound like Klook, because of something he used to do on drums*, sort of a riff*, he played that sounded like klook-a- mop. » Interview de Carmen McRae, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

KNIFE Couteau. Utilisé en guise de bottleneck*. « When 1 first started, I tried it [jouer du slide*} with a pocket knife but I couldn’t make much out of it. So my uncle, who was a guitar player, he took a little bone out of a steak and he taken his knife and trimmed it, smoothed it off and played with it on his little finger. And I thought that was the prettiest tune I ever heard in my life. » Interview de Fred McDowell, cité par Pete Welding (pochette du disque Arhoolie 1027).

KNOCK L’un des verbes clés du jive-, selon le Dan Burley’s Original Handbook of Harlem Jive, knock est un synonyme de put down, speak, walk, loan, borrow, give, ask, exhibit. Prêter, donner: Knock Me a Kiss, Louis Jordan (1941). 386. KNOCK IT OUT. Baiser. 387. KNOCK (SOMEONE’S) OFF HIS FEET. Renverser, époustoufler, « tuer » : « Now one upon a time, down on 45th street I meet a fine chick* and tried to knock her off her feet Now at that time I thought she was plain And didn’t know that I was the real candy* man » 1 Was Fooled, Billy Boy Arnold (1955). 388. KNOCK (SOMEONE) OUT. Epater, transporter, emballer : « When you talk to me like that You knock me out Right off of my feet » Hoorn Boom, John Lee Hœker (ca 1966). ► KNOCK YOURSELF otrr. Exhortation lancée à un soliste : « Vas-y », « défonce-toi ».

KOKO Surnom de la chanteuse de blues Cora Taylor née Walton (1935).

KOKOMO De Ma-ko-ko-mo, nom d’un chef indien. ► Ville de l’Indiana située entre Chicago et Indianapolis : « Now I tell you all about that city I declare it ain’t a great large town But everywhere you go in Kokomo baby You find the women there breaking* them down » Mr. Freddie's Kokomo Blues, Freddie Spruell (1935). ► Selon les informations données par James « Kokomo » Arnold à Jacques Demêtre, Kokomo serait un néologisme créé sur « Koko », une marque de café, d’où sweet kokomo : Kokola Blues, Madlyn Davis (1927). ► Adepte de la cocaïne. ► Jeunot, qui manque d’expérience. ► On le trouve aussi utilisé comme verbe, pour «baiser», dans Kokomo Me Baby enregistré par Danny Boy en 1961 : « Well don’t you kokomo me baby Kokomo me right Kokomo me marna ’til the broad daylight » • Surnom du bluesman James « Kokomo » Arnold (1901-1969) : « Well, I went to my captain* And I asked him for a peck of meal He said : “Leave here, Kokomo You got boll weevils in yo' field” » Bo Weavil Blues, Kokomo Arnold (1935).

KU-KLUX-KLAN Du grec kyklos, cercle. Société secrète fondée en 1865 à Pulaski, Tennessee, pour rétablir la suprématie blanche dans les Etats du Sud (à la fin de la guerre de Sécession, en 1868, les Noirs obtiennent la citoyenneté, puis le droit de vote deux ans plus tard). L’organisation, officiellement dissoute en 1869, continua ses activités jusqu’à une enquête du Congrès en 1871. Reconstitué en 1915, le Ku-Klux-Klan fut particulièrement actif dans les années 20 (plus de cinq millions de membres, particulièrement dans le Sud et le Middlewest, vers 1925), puis, plus faiblement, au milieu des années 50 : « Oh Lord, don’t let them shoot us Oh Lord, don’t let them stab us Oh Lord, don’t let them tar and feather us Oh Lord, no more svastikas Oh Lord, no more Ku-Klux-Klan » Fables of Faiibus, Charles Mingus (1959). Le Ku-Klux-Klan lutte principalement contre les Noirs, mais également contre les juifs, les intellectuels, les catholiques opposés à la discrimination, et, avant son abolition, contre les adversaires de la prohibition.

KUNJ1NE Voir coonjai. Kunjine Baby, Tampa Red et Frankie Jaxon (1929)" L

L.A. Los Angeles, Californie : « Yes, every- wink don’t mean I'm sleep And every- good-bye don’t mean I’m gone I’m gonna settle down on the West side And make L.A. my home » L.A Blues, Charles Waterford (ca 1945/46).

L.N. (Louisville and Nashville Line) Ligne de chemin de fer desservant Memphis et Nashville, Tennessee, Louisville, Kentucky et Atlanta, Géorgie : « I’ve seen the Central* And I’ve seen that L & N But have you boys seen How these women hug on them railroad men » Troubles Just Begun, Larry Johnson (1966).

L.T. L.T. ou L.T.R., pour Living Together Relationship, euphémisme pour « à la colle » : « I got T.B.’s*, I got the L.T.’s ► got third degree* and polk disease My health is gone now Left me with the sickness blues » Fool’s Blues, Funny Paper Smith (1931).

LA LA MUSIC Syn. de zydeco*. La La Blues, Nathan Abshire (1960-1961).

LADY Façon d’interpeller ses interlocuteurs que Lester Young utilisait très souvent : « “Dis-moi, Lady B [Count Basie], tu te sens bien? — Très bien. Tout va très bien. Je viens de décrocher un contrat avec Decca.” [Lester Young] est resté là à réfléchir en hochant la tête, et puis il a murmuré quelque chose comme s’il se parlait à lui-même : “Parfait. Maintenant, on va bien voir ce qui va se passer.” Il a fini son verre, m’a regardé en émettant des sons inarticulés, et il a recommencé son baratin : “Ecoute, Lady B, écoute bien. On va rentrer, se taper un autre petit verre, et puis tu vas me raconter tout ça de nouveau.” » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. • LADY DAY. Surnom de la chanteuse Billie Holiday (1915-1959) ; « Du temps du “Log Cabin”, les autres filles essayaient de se moquer de moi en m’appelant “Lady” parce qu’elles se figuraient que j’étais trop fière pour aller ramasser le foutu pèze sur les tables. Mais ce nom de “Lady” me resta longtemps, même quand tout le monde avait oublié d'où il venait. Lester Young le reprit et lui adjoignit “Day”, provenant de “Holiday”. Cela donna donc “Lady Day”. » Billie Holiday et William Dufty, Lady Sings The Blues. ► LADY OF THE SPIDERS. Syn. de conjure* lady. ► LADY VIOLET. Surnom donné par Lester Young à son saxophone. ► MAIN LADY. Autrement appelée Bottom Woman* (whore, bitch) ou encore Mother*, c’est la plus ancienne prostituée au service d’un maquereau, et cela lui vaut une autorité certaine sur ses consœurs. LAME 389. Paumé, « cave » (ant. : bip) : « A square* and a lame were synonymous and they accepted the complete life-style including the music dictated by the establishment. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. 390. Qualifie quelque chose d’inintéressant, de lourdingue, de merdique : « I don’t want no lame excuses ’bout my lovin’ bein so good That you couldn’t wait no longer Now I hope I’m understood » One Hour Mama, Ida Cox (1939). ► LAME DUCK. Danse du début du siècle.

LAST MILE Le dernier mile. Le dernier trajet du condamné à mort, de sa cellule au lieu de l’exécution : Last Mile Blues, Ida Cox (1940).

LATER Pour see you later, au revoir, à bientôt : Later, Ella Fitzgerald (1953).

LAW (The) La loi. Les représentants de la loi, les flics : « Sometimes the law would come, and all of them was in there in the gambling room, they had to pay a fine. You'd spy more pistols laying on the floor when the law come in. You could just look anywhere and find a pistol or a big, long knife laying down on the floor, some of them stuck up under the heaters. You seen the houseman tell the law to come by to keep him from having a lot of trouble. Guys* what got pistols on ’em, if the law come and take their pistols, they wouldn’t have nothing to act with. » Interview de Sam Chatmon, cité par McKee & Chisenhall dans Beale, Black and Blue.

LAWD Phonétiquement Lord, le Seigneur, Dieu : The Good Lawd’s Children, Peetie Wheatstraw (1941).

LAWN Gazon. Métaphore (rare) renvoyant à la toison du sexe féminin : « Sometimes he’s up before dawn Busy tvorking* on my front lawn My man is such a handy* man » Handy Man, Victoria Spivey (1928).

LAY Coucher. ► Femme, nana, en tant qu’objet sexuel. ► V. Baiser, niquer. ► V. Dire, exposer : « B.D. * women They done laid their claim They can lay their jive* Just like a nach’l [natural*] man » B.D. Woman's Blues, Bessie Jackson (1935). ► LAID OUT. Bien sapé, fringué, tiré à quatre épingles. ► LAY BACK. ® Jouer ou chanter en arrière de la mesure (années 30) : « You know, with most singers you have to guide ’em and carry ’em along — they’re either layin’ back or else runnin’ away from you. But not Billie Holiday. Man, it was a thrill to play for her. » Interview de Bobby Tucker, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ® Dans la vie quotidienne, se tenir peinard. ► LAY DOWN : ® Donner, présenter : « Don’t start no crowing Lay your money down I’ve got mine on jazzbo* That Memphis clarinet clown » Jazzbo Brown from Memphis Town, Bessie Smith (1926). ® Arrêter temporairement de jouer lors de l’exécution d'un morceau : « The order, “Don’t take down’’, was a signal to everyone in the band to play all the time — no laying down the horn* for a minute. » Interview de Jack Weber, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► LAY DOWN THE LINE. Voir line. ► LAY FOR. Attendre quelqu’un au tournant, ► LAY (SOME) IRON. Faire des claquettes (années 1900). ► LAY (PUT) IT ON THE LINE. Voir line. ► LAY OUT. Eviter. En jazz, arrêter temporairement de jouer. « We used to make him [Earl Hines] play longer solos. We’d say, “Lay out, lay out, lay out...”, and we wouldn’t come in. Earl had to play again... » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

LAZARUS Voir Poor Lazarus.

LAZY Paresseux. Décontracté, relax : Lazy Blues, Erskine Hawkins (1947). • Surnom du chanteur, pianiste et guitariste William « Lazy Bill » Lucas (1918) et du bluesman louisianais Leslie Johnson (1933) alias Lazy Lester.

LEADBELLY Litt. : ventre de plomb. Surnom du bluesman Huddie William Ledbetter (1889-1949) ; « Oh must have been a bedbug Because a chinch couldn’t bite me that hard

Asked my sugar* for fifty cents Said Leadbelly ain’t a child in the yard » New Black Snake Moan, Leadbelly (1935).

IEADER Chef de file. ► Personne chargée de mener le chant des ouvriers agricoles ; syn. : straw boss ou caller. ► Chef d’un orchestre : « Winding* Boy, there’s a parade coming up in such and such a club. Do you want the job*? It means five dollars for the leader and two-and-a-half a piece for the man. So I would elect myself leader and go around and get me a band. » Jellv Roll Morton, cité par Alan Lomax in Mister Jelly Roll.

LEAVE TOWN Quitter la ville. Euphémisme pour mourir, décéder : Lester Left Town, Wayne Shorter (1960).

LEAVENWORTH Petite ville de l’est du Kansas où a été construit en 1895 le premier pénitencier fédéral (Fort Leavenworth) : « The little boy’s hollering People did you read the news Says I done killed my rider* And I got them Leavenworth blues » Leavenworth Prison Blues, Bo Jones (1929).

LEE Du nom du général confédéré Robert E. Lee. N'om d’une célèbre compagnie de bateaux à aubes : Waitin’for The Robert E. Lee, Louis Jordan (1940). La course victorieuse que le Robert Lee livra au Natchez en juin 1870 entre La Nouvelle-Orléans, Louisiane, et Saint Louis, Missouri, est entrée dans la légende.

LEFTY Surnom des bluesmen Walter Williams, alias Lefty Dizz / Diaz (1935) et du guitariste Lefty Bates (1920-1991).

LEGIT Musicien de jazz se contentant de respecter la partition : « There was another difference between the “high-class” musician and the dance musician. The latter was proud of his status and didn’t want to sound like an opera-house tooter, so he tried to get as honky-tonk* a tone as possible to avoid a “legit” tone. » Interview de Jack Weber, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

LEMON ► Négro-Américain au teint clair. ► Métaphore courante pour désigner les organes sexuels : « Well I’ll tell you, woman How to keep your man at home Lord, you can squeeze his lemon, woman And roll* him all night long » Little Leg Woman, Big Joe Williams (1935). • Surnom des bluesmen Blind Lemon Jefferson (1897P-1930) et Lemoine «Lemon» Nash (1898-1969).

LET THE GOOD TIMES ROLL Voir roll.

LET YOUR HAIR DOWN Voir hair.

LETS CALL IT A DAY Voir day.

LEVEE Du français « levée ». Remblai de terre contenant les eaux d’un cours d’eau. Le Mississippi est ainsi canalisé par plus de 1600 kilomètres de digues, du Missouri au golfe du Mexique ; « Oh crying won’t help you Praying won’t do no good When the levees breaks mama You got to move » When The Levee Breaks, Kansas Joe et Memphis Minnie (1929). A Chicago à la fin du XIXe, le «Levee District », entre State Street et Chicago River, était le quartier de la prostitution. ► LEVEE CAMP. Camp volant de consolidation des digues : « I worked in a levee camp Just about a month ago Well I wind so many wagons It made my po’ hands so’ » Levee Camp, Washboard Sam (1941).

LEVEL (On the) En toute bonne foi, régulier, honnête : « Play it mister You see I’m on the level » Policy Dream Blues, Bumble Bee Slim (1935).

LIMBO Danse des années 60 : Doin' The Limbo, James Brown (1962).

LIBERIA Pays d’Afrique de l’Ouest fondé sur le modèle américain en 1847 par d’anciens esclaves : Liberian Suite, Duke Ellington (1947). LIBRARY OF CONGRESS Bibliothèque du Congrès à Washington. Equivalent à la fois de la Bibliothèque et de la Phonothèque Nationales, du musée de l’Homme et de celui des Arts et Traditions populaires, c’est aussi un centre de dépôt légal pour tout ce qui s’imprime et s’enregistre aux Etats-Unis et un centre de documentation. C’est essentiellement pendant la grande crise, dans le cadre du WPA* que se développa le département du folklore qui nous intéresse particulièrement ici ; le gouvernement finança l’un des plus vastes programmes de collecte de matériaux traditionnels jamais entrepris (témoignages et chants, mais aussi dessins, photos, instru- ments de musique, outils...). La section de la musique noire est particulièrement redevable à John A. Lomax et à son fils Alan; entre 1933 et 1942, ils effectuèrent sur le terrain de très nombreux enregistrements (dont certains dans des fermes-prisons ou des pénitenciers) au Texas, en Louisiane, dans le Mississippi, le Tennessee, le Kentucky et, plus tard, en Floride, Alabama, Géorgie, Caroline et Virginie. Parmi les bluesmen ou jazzmen enregistrés, on peut noter, au milieu de douzaines d’autres peu ou pas connus, Muddy Waters, Leadbelly, Bukka White, Blind Willie McTell, James P. Johnson ou Ivory Joe Hunter...

LICK ► Break ou courte phrase improvisée. ► Phrase musicale caractéristique d’un artiste, « plan » : « Like another Ooh-Bop-Sh’Bam. That’s a drum* thing. And Salt Peanuts was another. It was a drum lick, that’s the reason Kenny Clarkes’ name is on it. » Interview de Billy Eckstine in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 391. LICKING THE CHOPS. Mise en condition du musicien avant un concert.

LICORICE STICK Clarinette (années 30-40).

LIE Histoire à dormir debout, sornettes, 392. TELL LIES. Raconter des bobards, mener en bateau : « A married woman ’ll swear She loves you all of her life And meet her other man around the corner And tell you that same lie twice » WTten You Fall for Somebody That’s Not Your Own, Lonnie Johnson (1928).

LIGHTNING Surnom des bluesmen Otis Hicks, alias Lightnin’ Slim (1913-1974), et Sam Lightnin’ Hopkins (1912-1982) : « I was born march the 15th, man The year was 19 and 12 Yes yes you know, ever since that day Poor Lightnin’ ain’t been doin’ so well » Going Back and Talk to Mama, Lightnin' Hopkins (ca 1947).

LIL’ SON Surnom du bluesman Melvin « Lil' Son » Jackson (1916-1976).

LINDA LU Danse populaire vers la fin des années 50 : Linda Lu, Left Hand Franck (ca 1977).

LINDY HOP Danse apparue en 1927 après la première traversée de l’Atlantique par Lindberg : « Elle adorait danser avec le jeune Mel Thormé qui gagnait tous les concours de lindy organisés chez Billy. Peut- être n’aurait-il pas pu battre les gars du Savoy* à Harlem, mais il dansait rudement bien. » Billie Holiday et William V>ufty,Lady Sings The Blues. LINE Ligne. 1. La « ligne », originellement la ligne Mason-Dixon*-, elle séparait les Etats confédérés des autres Etats de l’Union; aujourd’hui symbole de la ligne de démarcation raciale : « The area of the city where we lived was all black people, but a couple of streets over it was white. We lived near the borderline. Daddy made a play yard for us with swings and slides and boards and everything and the white kids used to come over and play with us, cos we’d be having a lot of fun [...] But you couldn’t go over there. That’s where the line was. You couldn’t go over that side and play with them... » Interview de Little Richard, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard Passer la ligne, c’est se faire passer pour Blanc : « Enfin je ne mis pas longtemps à découvrir que j’avais deux belles-mères; la seconde était une Blanche. Elle s’amena près du cercueil de papa avec deux gosses, mon demi-frère et ma demi- sœur, Blancs eux aussi [...] Nous avons parlé toutes deux, ma seconde belle- mère et moi, de papa et des gosses. Elle me dit qu’elle les faisait passer pour Blancs. Je lui répondis qu’elle pouvait bien fichtrement faire comme elle l’entendait et s’ils pouvaient “passer”, qu’ils le fassent. Mais selon mon idée, elle avait tort de ne pas leur dire la vérité. » Billie Holiday et William Dufty, Lady Sings The Blues. 2. Discours mielleux, enjôleur, généralement d’un homme à une femme (voir line of jive*). ► Mélodie, harmonie. 393. Ligne de chemin de fer : « When a man is out workin’ Workin’ hard on the line Some lowdown* rascal Always tryin’ to steal his wife » Doin' The Best I Can, Peetie Wheatstraw (1934). 394. Métier, occupation de quelqu’un. 395. Prix d’un objet (années 40). • DOWN THE UNE. Au sud de la « Mason- Dixon Line », dans le Sud : « Leaving Goin’ back down the line You ain’t treat me right, baby Goin’ to Tennessee Tennessee here I come Tennesse, yes, my home » Leaving, John Lee Hooker (1963). • LAY DOWN THE LINE. Faire sa loi, commander. • LAY (PUT) IT ON THE UNE. ® Mettre la fraîche sur la table, montrer l’oseille : « Everyday when you look out And see that policy* writer cornin’ to your house Look here, son, lay your gigs on the line Catch that 4-18 and 59’ If I don’t catch policy Kill every writer I see I’m getting tired of you, Policy writers 3-6-9 in’* for me » Policy Blues (3-6-9 Blues). Louisiana Johnny (1935). ® Parler franchement; aller au fond des choses. • LINED. Marié (archaïsme). LINING OUT. Façon de chanter un cantique dans laquelle le preacher lance un vers, aussitôt repris par l’assemblée tout entière ; procédé déjà utilisé au temps de l’esclavage et auquel les spirituals* doivent beaucoup. ► LINE OF JIVE. Voir jive. ► MASON-DIXON LINE. Voir ce terme. ► ON THE LINE. En ligne, au téléphone. 396. Au boulot, sur la brèche: « This is Peetie* Wheatstraw I’m always on the line Save up your nickels* and dimes* You can come up to see me sometime » Peetie Wheatstraw Stomp n° 2, Peetie Wheatstraw (1937). 397. Syn. de lined, marié (archaïsme) : « Well you can't tell woman’s on the line Lord you can’t never tell When a woman’s on the line Well I don’t go crazy Sure gonna lose my mind » Dough Roller Blues, Joe Callicot (1968). ► SECOND LINE. Voir ce terme. ► UP AND DOWN THE LINE. Litt. : au-dessus et en dessous de la ligne. De partout : « I take a long look Right smack down in your mind And I don’t see but one woman Rambling* up and down the line » Mind Reader Blues, Bertha Lee (1934).

LION (The) • Surnom du pianiste Willie Smith « The Lion» (1897-1973): Plusieurs explications peuvent être avancées quant à l’origine de ce surnom; l’une fait référence au comportement héroïque de Willie Smith durant la Première Guerre mondiale sur le front français, une autre au Lion de Judas (il parlait hébreu et aurait, un temps, songé à devenir rabbin) ; une dernière fait allusion aux grognements qu’il poussait en jouant : « During the first war, I was one of the few volunteer to go to the front and fire on french Seventy Five and of those who did few returned. I stayed at the front for fifty one days without relief. I was known from that time on as sergeant William H. Smith “The Lion” » « I wanted to be a rabbi. I got as far as becoming a cantor. Because of my devotion to judaism, I was called “The Lion of Juda”, later abreviated to “The Lion”. » Interviews de Willie Smith, in Hear Me Talkin ' to \ d, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. • Surnom du saxophoniste baryton Leo Parker (1925-1962) : Chase TV’ Lion, Leo Parker (1947).

LIPS Lèvres. Pour « Hot Lips », surnom du trompettiste Oran Page (1908-1954): «J’ignore qui au juste il [l’imprésarioJoe Glaser] est venu écouter, nous ou Lips Page, mais je sais au moins ceci : il voulait un groupe dirigé par Lips Page. Le soir où il est venu, Lips a été absolument sensationnel. C’est donc à lui qu’il a parlé, et c’est lui qu’il a engagé. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Bittes.

LITTLE Petit. ► LITTLE BENNY. Surnom du trompettiste Benjamin Harris (1919-1975) : Little Benny, Clyde Hart avec Benny Harris (1945).’ ► LITTLE BIRD. Surnom du saxophoniste Jimmy Heath (1926): « That was the bad* band with Trane* and Little Bird and John Lewis. That was a terrific* band. But it disbanded within four or five months or something, maybe less. » Interview de Melba Liston, in To Be or Not To Bop de Dizzy Gillespie et Al Fraser. ► LITTLE BROTHER. Voir brother. ► LITTLE ESTHER. Surnom de la chanteuse Esther Phillips ( 1935-1984) à ses débuts; il vient d’un de ses premiers engagements, avec Johnny Otis, où elle partagea l’affiche avec « Big Mama » Thornton. ► LITTLE GIANT. Surnom du batteur Chick Webb (1909-1939) : « Ils étaient vraiment chez eux au Savoy*. On les avait donc installés sur le podium principal tandis que nous occupions le petit. Et le Little Giant, de sa place, dirigeait tout son monde d’une façon éblouissante. C’était extraordinaire et, quand je n’étais pas en train de jouer, j’allais me poster quelque part pour les écouter. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. Et du saxophoniste John Arnold «Johnny» Griffin (1928): Little Giant, Johnny Griffin (1959). ► LITTLE HAT. Surnom du bluesman « Little Hat » Jones : « Well my woman poked her head out the window of the bed Said “Please don’t let ’em kill Mister Little Hat dead” I said “No use to worryin’ sweet mama, 1 ain’t gonna be here long” » Kentucky Blues, Little Hat Jones (1930). LITTLE JAZZ. Voir jazz. ► LITTLE JOE BLUE. Voir blue. ► LITTLE MACK. Surnom de l’harmoniciste de blues Little Mack Simmons (1934). ► LITTLE MILTON. Pseudonyme du guitariste chanteur James Campbell (1934). ► LITTLE RICHARD. Surnom du chanteur et pianiste de rock’n’roll et de gospel Richard Penniman (1935): Little Richard’s Boogie, Little Richard (1953). ► LITTLE SONNY. Pseudonyme de l’harmo- niciste et chanteur Aaron Willis (1932) : Sonny’s Bag, Little Sonny (1967). ► LITTLE T. BONE. Surnom du guitariste R.S. Rankin (1933). ► LITTLE WALTER. Surnom du chanteur et harmoniciste de blues Marion Walter Jacobs (1930-1968) : « I was cuttin’ hair, and pickin’ coton, and playin’ the piano and I went into town and there was a harp* player and a real black fellow sleepin’ on the crab table, Little Walter and Black Honey. Walter was sleepin’ with his head on the rack and Black Honey was on his guitar and the boss had to get him a pillow. I said to them I’m gonna buy some groceries, and that goddamn rang a bell for Little Walter when I said I’d buy some groceries... » Interview de Sunnvland Slim, cité par Sam Charters dans The Legacy’ of The Blues. ► LITTLE WILLIE. Surnom du pianiste et chanteur Willie Littlefield (1931).

LOADED 398. Bourré, fin soûl, beurré : « I’m slippin', slippin', slippin' Tryin’ a dodge United States law I’m loaded down with bootleg* Like to make them hear me fell » Blind Pig Blues, Barbecue Bob (1928). 399. « Chargé », drogué : « They call me, they call me a junker* ’cause I’m loaded all the time I don’t need no reefers* I’d be knocked* out with that angel wine » Junker Blues, Champion Jack Dupree (1941). 400. Riche, plein aux as. ► LOADS OF. Une grande quantité, une tripotée : « She’s got big, blue eyes, white bottom feet She’s ’way over-sized, but I’m just crazy about her meat She looks like a bear, got hair everywhere Her name is Trudie, and she's got loads of bootie* That's why I’ve got to go back to Cleveland, Ohio » Cleveland Ohio Blues, Bull Moose Jackson (1945).

LOBO En argot blanc, gangster, bandit; en argot noir, laideron, boudin : Loopin’ Lobo, Rex Stewart (1946).

LOCKED HANDS Litt. : mains liées. Voir band.

LOCKJAW Egalement «Jaws », surnom du saxophoniste Eddie Davis (1922-1986): « C’est là [au Minton*] que j’étais tombé à nouveau sur Fats* Navarro et qu’on avait pris l’habitude de jammer. Il y avait Milt Jackson, Eddie « Lockjaw » Davis, qui dirigeait l'orchestre maison. Quelle pointure, lui aussi! Car, voyez-vous, les grands musiciens comme Lockjaw, Bird*, Dizzy* ou Monk, les rois du Minton’s, ne donnaient jamais dans le lieu commun. » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l'autobiographie.

LOFT Friche industrielle, entrepôt, servant d'appartement, de lieu de répétition ou de concert. Cette pratique est apparue à New York dans la deuxième moitié des années 70 ; l’un des premiers lofts est celui de la famille Rivers, Sam, le saxophoniste, et sa femme Bea, le « Rivbea » : « Un après-midi, alors que Wolpe se trouvait dans mon loft, [Charlie] Parker m’a fait une de ses visites imprévues; je les ai présentés l’un à l’autre. » Interview de Tony Scott par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker.

LOG (Walk someone’s log) Voir walk (someone’s) log.

LOLLIPOP ► Sucette: « Like a lollipop with sugar tip Wild* about my papa’s lips » It's Sweet Like So, Teddy Bunn (1930). Lollypop Mama, Roy Brown (1947). ► Danse: «Well the chicks* around L.A.* They do the Texas Hop* But when you hit Chicago They all do the lolly pop » Let's Dance, Floyd Dixon (1949). ► Fric, oseille. ► LONG BREAD Beaucoup de fric, joli paquet d’oseille : Long Bread, Donald Byrd (1955). Syn. : long green.

LONG CHAIN MAN Celui qui convoyait les détenus lors de leur mise à disposition d’entrepreneurs publics ou privés (de long chain, la chaîne utilisée pour entraver les forçats; voir chain gang*) : « I looked out of the window Saw the long chain man Oh, he’s coming to call us Boys, name by name He’s gonna take me from here To Nashville Tennessee He’s gonna take me right back, boys Where I used to be » Nashville Stonewall Blues, Robert Wilkins (1930). A la fin de la guerre de Sécession, la surpopulation des prisons amena les autorités à mettre les détenus à la disposition d’entrepreneurs privés ou publics (à ce sujet, voir Joe Turner*) ou à les transférer dans de grandes plantations transformées en fermes-pénitenciers. Ce système de location de détenus (ou Convict Lease System), qui ne faisait que perpétuer l’ancienne pratique de location d'esclaves, fut aboli par le Congrès en 1887 ; mais la loi demeura ignorée dans le Sud jusqu’en 1928 avec le départ des derniers prisonniers de la mine de charbon de Flat, Alabama.

LONG GONE Surnom du chanteur louisianais Luke « Long Gone » Miles (1925) : Long Gone, Luke « Long Gone » Miles (1961).

LONG GREEN Beaucoup de fric, jolie galette : Long Green Stuff, Howlin’ Wolf (1962).

LONGHAIR Musicien jouant de la musique écrite, de la musique commerciale; le type de musique qu’il joue; intellectuel (an- nées 30-40). • PROFESSOR LONGHAIR. Voir Professor.

LONG-TIME MAN Condamné à une lourde peine de prison : « Alberta, She won’t write to me She won’t write me no letter She won’t send me no word It makes a long-time man Oh Lawd*, feel bad » It Makes a Long-Time Man Feel Bad, recueilli par John A. Lomax, cité par Langston Hughes et Arna Bontemps dans The Book of Negro Folklore.

LONNIE BROOKS Pseudonyme du guitariste chanteur Lee Baker Jr (1933).

LOOK OLT Exhortation lancée à un musicien prenant un solo, ou que le bluesman se lance à lui-même : « Look out there, Gonna play some music now, Look out! » Dough Roller Blues, Joe Callicot (1968). LOOSE Desserré, mou. Relaxé, détendu : The Goose Is Loose, Willis Jackson (1977). ► LOOSE LIKE (AS) A GOOSE. Dans le jargon des musiciens, évoque le jeu relâché, détendu, d’un musicien jouant sous l’influence d’une drogue : Loose Like a Goose, Bennie Moten (1929).

LOST JOHN Ballade classique contant l’évasion d’un prisonnier surnommé « Lost John » ; il fut impossible de le retrouver parce qu’il avait brouillé les pistes en plaçant un talon à l’avant de ses chaussures : « Got a heel in front Got a heel behind Well you can’t hardly tell Whichaway I’m goin’ » Lost John, cité par Harold Courlander dans Negro Folk Music.

LOUD Taquiner, faire marcher. ► LOADING. Le degré zéro des jeux d’insulte (voir dirty* dozens) : Loud Speakin’ Papa, Fletcher Henderson (1925). ► LOUDMOUTH. ® Fort en gueule; qui ne sait pas tenir sa langue : Loudmouth Lucy, Chuck Willis (1952). ® Loud mouthing : syn. de holler. • Surnom du bluesman Calvin « Loudmouth » Johnson.

LOUIS Joe Champion du monde de boxe qui a incarné la réussite noire et inspiré d’innombrables blues depuis Joe Louis 1 The Man de Joe Pullum (1935) jusqu’à/« Louis and John Henry de Sonny Boy Williamson (1939) en passant par Champ Je-. Louis, King of The Gloves de Bill Gaither alias Leroys’ Buddy (1938) : « I came all the way from Chicago To see Joe Louis and Max Schmeling fight Schmeling went down like the Titanic When Joe gave him just one hard right [■■•] It was only two minutes and four seconds Poor Schmeling was down on his knees He looked like he was praying to the Good Lord To have “mercy on me please” »

LOUISIANA RED Surnom du bluesman Iverson Minter (1936): « Well down in Mississippi Down in the Delta home Well that’s where Louisiana Red was born Well I have been had a hard all my day » I’m Louisiana Red, Louisiana Red (1971).

LOW COTTON Litt. : coton bas. Evoque la difficulté à cueillir le coton qu pousse assez bas sur le cotonnier. Pour les habitants du Sud, déveine guigne, poisse : Low Cotton, Rex Stewart (1939).

LOW-DOWN Vil, bas, ignoble : « Rolled* from town to town Holding hopeful rights Some lowdown rascal Took the president’s life » President Kennedy, Sleepy John Estes (1972). ► Vrai, authentique; exprime, comme gutbucket ou nitty-gritty, l’ancrage dam b réalité quotidienne du Noir pauvre : « I’m lookin’ for a lowdown woman Who’s lookin’ for a lowdown man Ain’t nobody in town Got as lowdown as 1 can » Low Down Mississippi Bottom Man, Freddie Sprue! (1929). ► En parlant de musique, vraie, auther- tique, bluesy : « I like lowdown music I like to barrelhouse* and get drunk too I’m just a lowdown man Always feelin’ lowdown and blue » Low Down Mississippi Bottom Man, Freddie Spruell (1929).

LONE CAT Surnom du bluesman Jesse Fuller (1896- 1976).

LONESOME SUNDOWN Pseudonyme du guitariste chanteur Cornelius Green (1928).

LUCILLE Surnom de la guitare de B.B. King : « The song that you’re listening to Is from my guitar that’s named Lucille I’m going crazy about Lucille Lucille took me from the plantation Oh, you might say, brought me fame » Lucille, B.B. King (1967).

LUCKY Veinard. Surnom du saxophoniste Eli « Lucky » Thompson (1924) et du chef d’orchestre Lucius « Lucky » Millinder (1900-1966) : « Nous sommes passés en premier et nous avons dû jouer quinze à vingt minutes avant que Lucky s’amène avec son orchestre. Je pensais que nous jouions très bien, et nous avons donc continué. La série terminée, je suis parti dans un coin de la salle bavarder avec quelqu’un pendant que l’autre orchestre se mettait en place. Soudain Lucky est arrivé et a sauté sur la petite caisse sur laquelle il aimait se jucher et, quand l’orchestre a démarré, tout le monde a fait silence, et toute l’assistance s’est mise à danser en cherchant à s’approcher le plus près possible du podium ! Lucky et ses gars avaient mis le feu aux poudres, et de quelle façon! Whew! » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. ► DOWN ON (ONE’S) LUCK. Voir down. ► BAD LUCK. Voir bad.

LUCY Surnom de la guitare (une Flying V) d’Albert King : « I want all you soul* brothers and soul* sisters To get around. I wanna tell you ’bout my Lucy. You see, I’ve been in love The first time I saw her. [...] ’cause I love her I love Lucy, yes I do And if you put your hands on my Lucy Ain’t no tellin’ what I might do fo' you » / Love Lucy, Albert King (1968). ► SWEET LUCY. Nom d’un vin : « Il [Charlie Parker] était allé dans les montagnes et à son retour, seulement deux ou trois mois plus tard, la dif- férence était incroyable. Il avait perdu sa sonorité Sweet Lucy, comme quelqu’un qui parlerait tout en buvant du vin. Son style était complètement changé. Il est devenu le chouchou de Kansas City. » Interview de Gene Ramey par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker.

LUSH 1848. Personne qui picole beaucoup, poivrot (années 30-40) : « So we went to a house on Rampart* Street We knocked on the door and it opened with ease And a lush little girl said "Come in please” And before we could even bat an eye We were right back in the middle of a big /¿sû fry* » Saturday Night Fish Fry, Louis Jordan (1949). ► LUSH HEAD (LUSH HOUND). Poivrot, alcoolo : « She’ll drink up all your whiskey Drink up all your wine When she gets drunk She’ll drives you out your mind I got a lush-head woman And she really likes to drink When she gets full of whiskey She don’t take time to think » Wine Drinkin' Woman, Roy Hawkins (1950).

LUX Contraction de « Duke of Luxemburg », surnom du pianiste de boogie-woogie Anderson Meade « Lux » Lewis (1905- 1964).

LYON (LYONS) Billy de Personnage qui, si l’on en croit la ballade, aurait été victime de Stagger Lee : « Mister Lyons told Stack’* O' Lee “Please don’t take my life I got two little babes And a darlin’ lovin’ wife’ What I care ’bout two little babes Darlin’ lovin’ wife You done stole my stetson I’m bound to take your life” » Stack' O' Lee, Mississippi John Hurt (1928). M

M.K.T. (Missouri, Kansas and Texas Railroad) Ligne de chemin de fer généralement appelée Katy*, K.T.*.

M.O. Abréviation de Gulf, Mobile and Ohio, ligne de chemin de fer : « I leave here I’m gonna catch that M & O I'm goin' way down south Where I ain’t never been before » .1/ & O Blues, Willie Brown (1930).

MA Voir mama.

.MAD Fou, excité. Fâché, irrité, en rogne : « I'm a mean tight* mama I got to sleep and wake up mad But the man who knows his business Will find out I'm not so bad » Mean Tight Mama, Sara Martin (1928). Dans le jargon des musiciens, talentueux, doué (années 40-50) : .Mad Lad, Sir Charles Thompson (1947).

MADISON Danse des années 60 sans contact entre les danseurs, rendue célèbre par l'enregistrement du pianiste Ray Bryant : The Madison Time, Ray Bryant (1960).

MAE (May) Syllabe que l’usage, dans les Etats du Sud, accole souvent à un prénom féminin : Willie Mae Willow Foot, Hot Lips Page (1945). « For favoured feminine acquaintances Duke* Ellington lapses into the old southern custom of adding May to everything, Daisy May, Evie May, Willie May,no matter if the resemblance to your own give name is very slight. » Interview de Louis Metcalf in Hear Me Talkin ’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. La chanteuse Jane Lucas (1906-1976) a par ailleurs enregistré avec Georgia Tom sous le pseudonyme de Hannah May.

MAGIC Surnom des bluesmen Samuel Maghett alias « Magic Sam » (1937-1969) et Morris Holt alias « Magic Slim » (1937).

MAHOGANY Acajou. ► L’une des nombreuses nuances dans les couleurs de peau distinguées par les Négro-Américains ; intermédiaire entre banana ou lemon et chocolate* to the bone. ► L’une des plus fameuses maisons de passe de La Nouvelle-Orléans au début du siècle : « Lulu White was a famous woman of the sporting* world in Storyville*... She had a big house on Basin* Street called Mahogany Hall... The song was written after her house had gotten so famous... Rich men came there from all pans of the world to dig* those beautiful Creole* prostitutes... And pay big money... » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

MAKE IT 1. Faire l’amour, s’envoyer en l’air: « Let’s make it pretty’ baby Let’s make it right now Not tomorrow night I mean right now » Let's Make It, John Lee Hooker (1961). «Je le [Bud Powell] surpris un soir tenant celle [la main] de la femme d’un industriel de province venu s’encanailler dans un club de jazz parisien. Il lui demande soudain, d’une voix calme, mais convaincante : — Give me some pussy* \ Les innocentes ne comprenaient pas toujours l’anglais et réclamaient une traduction à leurs époux! Bud me raconta plus tard qu’il avait sollicité Ella Fitzgerald de la même façon. D’un ton autoritaire qui n’admet- tait pas la discussion, il lui avait ordonné : — Ella, come on, let’s make it! Et, dans un rire mêlé de larmes, il mima la brève réponse d’Ella : — Whbaattt?... Cette boutade avait déclenché un fou rire interminable et communicatif, que la seule évocation de la tête d'Ella relançait sans cesse jusqu’aux crampes d’estomac. » Francis Paudras, La Danse des infidèles. 2. Réussir dans la vie; se produire (sur scène). 3. MALCOLM X Malcolm Little (ou Malcom X*) est le successeur d’Elijah Muhammad, leader des Black Muslims (musulmans noirs) adeptes de la violence pour faire appliquer les droits civiques et défendre les revendications; il est assassiné le 21 février 1965 : « Niggers* loved to hear Malcolm [X*] rap* But they don’t love Malcolm Niggers loves everything but themselves » Niggers Are Scared of Revolution, The Last Poets (1970).

MAMA Non pas maman, mais jolie fille, jolie femme : « Talkin’ about shave* ’em Mama’s gonna shave ’em dry And if you don’t know Mama’s gonna learn you how » Shave 'em Dry, Lucille Bogan (1935). ► Surnom des chanteuses Willie Mae « Big Mama » Thornton (1926-1984) et Estella « Mama » Yancey (1896) : Mama’s Blues, Estella Mama Yancey (1952). ► BIG FAT MAMA. Voir ce terme. ► BIG MAMA. Voir big. ► MA. De Mama, surnom de la chanteuse de blues Gertrude «Ma» Rainey (1886- 1939): « If anybody ask you Who wrote this lonesome song Tell ’em you don’t know the writer But Ma Rainey put it on » ¿¿¿s? Minute Blues, Ma Rainey (1923). * MAMIE. Surnom de la chanteuse « Mamie » Smith (1883-1946) qui enregistra en 1920 le célébrissime Crazy Blues, tenu pour le premier enregistrement dû à un artiste noir (en réalité il s’agit du deuxième enregistrement de Mamie Smith) et qui se vendit à 75 000 exemplaires en un mois. Ce succès totalement inattendu révéla l’existence d’un nouveau marché, celui de la population de couleur (sur ce point, voir race* records') : Mamie’s Blues, Mamie Smith (1922). ► MAMMY JAMMER, MAMMYSUCKER. Variantes de motherfucker. ► SUGAR MAMA. Voir sugar. ► SWEET MAMA. Terme tendre pour amante : « Some folks built like this, built like that Don’t you howlin’ me Don’t you call me fat You know I’m built for comfort I ain’t built for speed Oh you know Sweet papa got everything sweet mama need » Built for Comfort, Taj Mahal (1978).

MAMLISH Mot renforçant le sens du mot suivant : « You used to be my sugar* But you ain’t sweet no mamlish more You got another joker* Hangin’* ’round your door » Tooten out Blues, Slue Foot Joe (1929).

MAN Homme. 401. Terme d’interpellation entre hommes; selon Clarence Major, il faut voir là une réaction au boy méprisant couramment utilisé par certains Blancs à l’adresse des Noirs ; « I was born march the 15th, man The year was 19 and 12 Yes, you know, ever since that day Poor Ligbtnin' ain’t been doin’ so well » Going Back and Talk to Mama, Lightnin’ Hopkins (ca 1947/49). 402. L’homme, l’amant, par opposition au mari : « Put your man in your bed And put your husband down on the floor » We Gonna Move (to The Outskirts of Town), Casev Bill Weldon (1936). 3. Abréviation de sweet man, eastman, skirtman, mac, souteneur : « Stood on the corner with her feet all soaking wet Beggin’ each and every man that she met If you can’t give a dollar, give me a lousy dime* I want to feed that hungry man of mine » Mamie's Blues, Jelly Roll Morton (1938). ► BAND MAN. Voir band. ► Go MAN GO. Voir go. ► GUITAR MAN. Guitariste (l’expression est préférée aux termes de guitarist ou guitar player) : « Hey guitar man, Play a HT blues for me » Patcha. Patcha, Big Joe Turner et Jimmy Witherspoon (1985). On trouve de la même façon piano man, eighty eight man... ► MAIN MAN. ® Petit ami, amant attitré. ® Entre hommes, meilleur ami. ► MAN KILLER. Boisson alcoolique. ► MANNISH BOY. Pléonasme, dû semble-t-il à Muddy Waters, désignant l’homme viril, le mâle : « When I make love to a woman She can’t resist [...] I can make love to you women In five minutes time Ain’t that a man? [■••] That mean mannish boy I’m a man I’m a full grown man » Mannish Boy, Muddy Waters (ca 1977). ► MAN O’ WAR. Amant, bon baiseur : « When he advances can’t keep him back So systematic is his attack All my resistance is bound to crack For my man o’ war He never misses when he brings up his big artillery Bullets like kisses and hit the mark with such rapidity » My Man OWar, Lizzie Miles (1930). ► OLD MAN (LADY). ® Homme (femme) d’âge mur qui entretient une maîtresse (un amant) : « Send me a Lulu, a voodoo*, any old man I’m no particuliar, boys I’ll take what I can I’ve been worried, oh, most these days Oli Lawdy, send me a man Lordy, send me a man » Lawd, Send Me a Man, Ma Rainey (1924). @ Souteneur, mac. ► OLD MAN. Surnom du batteur Louis Cot- trel (ca 1875-1927). ► OLD MAN ODEN. L’un des surnoms du vocaliste de blues James Burke Oden alias St Louis Jimmy (1903-1977). 403. OLD MAN RIVER. Le fleuve Mississippi (appelé aussi Father* of The Waters) ; Old Man River, Ray Charles (1963). 404. PAPER MAN. Voir paper. 405. PIE BACK MAN. Voir pie. 406. ROOT MAN. Voir root. 407. SWEET BACK MAN. ® Gigolo : « Ces musiciens ne sortaient guère pendant le jour. Leur femme leur apportait à manger au lit et on ne les voyait que la nuit. Ces types-là, nous les appelions des sweet back papas. Ces hommes ignoraient tout de la culture du coton, du riz, de la canne à sucre et ça ne les intéressait pas le moins du monde. Chaque nuit, ils sortaient tirés à quatre épingles, et certains d’entre eux avaient trois ou quatre femmes. L’une le nourrissait, l’autre lui achetait ses vêtements et ses souliers. C’était le genre de types qui portaient des chapeaux Stetson à dix dollars, ils avaient des pièces en or de vingt dollars à leur montre, des diamants aux doigts et même incrustés dans les dents. » Big Bill Broonzy et Yannick Bruynoghe, Big Bill Blues. ® Souteneur: « You’ll never have nothin’ Long as you live in Sugarland* Because you workin' for a woman And a sweet back man » Sugarland Blues, Black Boy Shine (1936). 408. SWEF.T MAN. Celui qui se la coule douce; entretenu par une femme, gigolo : « Girls I wanna tell you about those sweet men The mens gon’ around here tryin’ to play cute I’m hard on you, boys, I hear me tell I feel in love with a sweet man once He said he loved me too He said if I’d run away with him What nice things he would do » Pinchbacks, Take ’em Away, Bessie Smith (1924). 409. THE MAN. ® L’homme blanc : « Tell you married men How to keep young wives at home Just do a job* and roll* for The Man And try to carry your labor home » Outside Woman Blues, Blind Joe Reynolds (1930). On trouve aussi pour désigner la société blanche dominante dans le langage militant des années 60, whips (fouets), abréviation de WHIte Power Structure. ® Par extension, la police : « You can cry cry cry Yes baby, you can well beat your head On the pavement ’til the men come And throw you in jail » Don’t Let The Sun Catch You Crying, Louis Jordan (1946). Plus généralement, tout représentant d’un quelconque pouvoir (la loi, le patron, le leader d’un orchestre...). @ Maître (à penser), source d’inspiration : « I saw Rex Stewart and Louis Armstrong, but Roy [Eldridge] was my man. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. • Surnom du saxophoniste Samuel « The Man » Taylor (1916).

MANNY (Mammy) De « Manischewitz Wine », vin doux cas- her populaire parmi les Noirs : «Well she still drinkin’ manny An' she wants more Reach for the knob Miss the whole drun door » She Drunk, Otis Webster (cité par Harry Oster dans Living Country Blues).

MANZELLO Sorte de saxophone alto sonnant sensiblement comme un soprano, fabriqué dans les années 20, et dont le seul utilisateur notable fut Roland Kirk : «Je me suis vu jouant de deux instruments en même temps. Le son qui sortait de ceux-ci était étrange. Je n’avais jamais entendu auparavant quelque chose de comparable. Cette sonorité ne m’a plus quitté par la suite [... ] Je me suis mis alors à fouiller les brocanteurs. [...] Enfin, un jour, j’ai découvert dans une arrière- boutique les instruments de mon rêve, ce manzello et ce stritch qui, ajoutés au ténor, sont parvenus progressivement à reproduire la sonorité que j’avais entendue une nuit. » Interview de Roland Kirk par Jean Clouzet et Jean- Claude Zylberstein, citée dans ]azz Magazine n" 101, décembre 1963-

MARCHING Voir putting* down (acc. 2) et dirty* dozens.

MARDI GRAS Mardi Gras est certainement la fête célébrée avec le plus de faste à La Nouvelle- Orléans; elle fut d’abord organisée par des associations blanches, puis par des noires (la première fut celle des Zulus* Mardi Gras in New Orleans, Professor Longhair (1950).

MARE Jument. Métaphore courante pour maîtresse, amante : «Just like a rattlesnake* I sting, mama, Lordie, every mare in this world I say, just like a rattlesnake, baby I sting every mare in this world I ain’t gonna have no job*, mama Rollin’* through this world» Rattlesnake Blues, Charlie Patton (1929).

MARIMBA Afr. De madimba. ► Instrument originaire d'Afrique centrale (balafon) constitué de lames de bc ss parallèles disposées au- dessus de rés - nateurs (autrefois des calebasses, aujourd’hui des tubes métalliques). Le vibraphone, à lames d'aluminium, en ex l’extension moderne. ► Marijuana de Colombie. ► MARION Nom d’un train : « Think I heard The Marion whistle blow And it blew Just like my baby gettin’ on board » Green River Blues, Charlie Patton (1929).

MARKET STREET Rue de San Francisco, Californie : Market Street Blues, Lowell Fulson (ca 1946/50).

MASHED POTATOES L’une des danses « solitaires et asexuées ■ selon les termes de Henry Miller, lancée pij James Brown à la suite du succès phénoménal du twist: Mashed Potatoes U.S.A., James Brown (1962).

MASON-DIXON LINE Du nom de Charles Mason et Jeremiak Dixon, arpenteurs qui, au xvme, tracèrent la frontière entre la Pennsylvanie et le Maryland.

A l’origine, ligne frontière entre Etats abolitionnistes et Etats esclavagistes; symbole de la démarcation raciale : « Way down below the Mason-Dixon line That’s where I'm going Just to ease my mind Want to see my folks I miss them so I bought my ticket And I'm bound to go » Mason Dixon Blues, Mattie Hite (1923). ► MASON LINE. Rue marquant la frontière entre communautés noire et blanche (années 40). ► MASTER Maître. Nom donné au Blanc dans la période esclavagiste; on peut remarquer que le terme apparaît dans une interview pourtant récente (août 1975) de Nat D. Williams par Robert Springer : « The black man just couldn’t express what he wanted to say ; in order to give his master some assurance, he mixed what he had to say : the words served the purpose of keeping the whites happy, they were for the whites' benefit very often. » ► MASTER PIMP. Voir pimp.

MAXWELL STREET Rue de Chicago, au cœur du West Side, célèbre pour son marché aux puces. De nombreux bluesmen dont Floyd Jones, Smockey Smothers, John Brim, Earl Hooker ou Hound Dog Taylor y ont fait la manche : « Il suffisait d’aller à Maxwell Street le dimanche matin et de se trouver un bon coin. Bon Dieu, on gagnait plus de fric que j’en aie jamais vu. Quelquefois 100 dollars ou 120. On prend une bassine et on met un carton dedans ou un morceau de journal. Quand les gens jettent des pièces, personne ne les entend tomber. Sinon quelqu’un pourrait venir et se barrer avec la bassine. Vous pouvez me croire, ça chauffait dur à Jewtoum* le dimanche matin. » Interview de Hound Dog Taylor par Ira Berkov, Maxwell Street : « Survival in a Bazaar (1977) », citée par Sebastian Danchin dans Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto. • Surnom du bluesman Charles Thomas alias « Maxwell Street Jimmy Davis » (1925).

MAY Voir Mae.

MCCOY (A real McCoy) Le fin du fin, le nec plus ultra : « Pretty baby, this is the real McCoy But this only girl That made many men jump for joy Watch Yourself, Buddy Guy (1961).

MEAL TICKET WOMAN Prostituée (au sens économique du terme), gagneuse, celle qui nourrit son homme : « I been walking all day And all night too ’cause my meal ticket woman have quit* me And 1 can’t find no work to do No Job Blues, Ramblin' Thomas (1928).

MEAN ► Mesquin, minable, méprisable: « Alabama, Alabama Why you want to be so mean? You got my people behind a barbed wire fence Now you tryin’ to take my freedom away from me » Alabama Blues, J. B. Lenoir (1966). ► Qui a les pieds sur terre, probe, honnête, sincère (années 20-40) : « I love my baby She’s so mean to me » T. Bone Blues, T. Bone Walker (1940). ► Le meilleur (années 30) : « The Rendez-Vous had a band with some real mean cats*. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

MEDICINE SHOW Spectacle destiné à attirer la clientèle vers un camelot vendeur de remèdes miracles ou vers un arracheur de dents : « Me and Jim Jackson played on the shows together, all down the Mississippi and through Arkansas, Alabama, all over. We were with the Red Rose Minstrels* it was called, but it was a medicine show. It was just a show where the man sold all kinds of medicine and soap and stuff*. One medicine good for a thousand things — and wasn’t good for nothing... » Interview de Speckled Red, cité par Eric Sackheim dans The Blues Line. Big Joe Williams, Sonny Terry, Gus Cannon, Will Shade, Furry’ Lewis, Jim Jackson, Frank Stokes, Tommy Johnson, Papa Charlie Jackson, Speckled Red et bien d’autres, à un moment de leur vie, ont participé à des spectacles de ce genre. Les medicine shows ont été un puissant facteur d’homogénéisation et de popularisation du blues. MELLOW 1. Fondant, moelleux, « le terme le plus souvent utilisé lorsqu’une station de radio demanda à ses auditeurs d’un ghetto de Chicago [des auditeurs noirs] de décrire la musique noire » (Joachim E. Berendt) : « I’m going to the roadhouse* Way out on the edge of town Where the music is soft and mellow And the people really break* ’em down » Reckless Life Blues, Merline Johnson (1939). ► Homosexuel. ► FINE AND MELLOW. Super, plaisant (avec des connotations érotiques) dans les années 30-50 : « He wears high draped pants Stripes are really yellow But when he starts to love me He’s so fine and mellow » F/we and Mellow, Billie Holiday (1939).

MEMBER 410. A l’origine, membre d’une communauté religieuse : « My daddy’s people were members of Foundation Templar AME Church, a methodist church on Madison street, and my mother’s father was with the Holiness* Temple Baptist Church, downtown* in Macon. » Interview de Little Richard, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard. 411. Par extension, avec la montée des mouvements pour les droits civiques, membre de la communauté noire, Noir. « After that incident, I talked to Charlie Barnet and made him Joe Guy a. job*. I told him I was lonesome and really I figured with at least one more member in the band, security guards and people like that might get used to seeing “members” around. Joe Guy and I went on tour together with Charlie Barnet and with two “members” in the band*, I had a good time. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. 3- Interpellation entre Noirs.

MEMPHIS La plus grande ville du Tennessee. • Surnom du bluesman « Memphis » Willie Borum (1911-ca I960) et du pianiste John Williams alias « Memphis Piano Red » (1905-1982). • MEMPHIS MINNIE. Pseudonyme de la guitariste et chanteuse de blues Minnie Douglas (1896-1973) : Minnie Minnie Bumble Bee, Memphis Minnie et Joe McCoy (1932). • MEMPHIS SLIM. Surnom du pianiste Peter Chatman (1915-1988) : « My name is Memphis Slim They call me the grinder* man If you be my customer I’ll let you have it on a easy* plan » Grinder Man Blues, Memphis Slim (1940).

MEREDITH James James Meredith fut le premier Noir à avoir tenté, en janvier 1961, de s’inscrire à « Ole Miss », l’université du Mississippi implantée à Oxford. La Cour Suprême donna tort au Conseil d’administration de l’université qui refusait son inscription en 1962; le 13 septembre, jour de la rentrée, le gouverneur Barnett — rejoignant en cela Fau- bus* — fît déployer la police autour du campus pour bloquer l’entrée à l’étudiant noir. Ce n’est que devant l’envoi de troupes fédérales et la menace de sanctions pénales, qu’il finira par céder. Des émeutes s’ensuivirent qui firent plusieurs morts en deux jours. Shot on James Meredith, J.B. Lenoir (1962).

MERRY-GO-ROLND Manège. ► Vie trépidante : « I’ve got to come off of merry-go-round I’ve got to stop running downtown* » Deathwish, Luther Thomas (1981). ► Jeu de roulette. 3- Escroc.

MESS Fouillis, saleté. 412. En argot blanc, débile, con ; dans l’argot noir, crack, « pointure » : « Oh Lord, don’t say anything about Ma* [Rainey]. [...] Ma was a mess. Ain’t nobody in the world ever been able to holler “Hey Boll Weavil*” like her. Not like Ma. Nobody. I’ve heard them try to, but they can’t do it. » Interview de Victoria Spivey (1976), citée par Giles Oakley dans The Devil’s Music. 413. V. Tourner autour, draguer : « See that preacher* walking down the street He’s fixing* to mess with every sister* he meet » Preacher Blues, Hi Henry Brown (1932). 414. Se mêler de (ce qui ne vous regarde pas): « I got my problems I don’t want you to mess* with me » I Had a Dream Last Night, Buddy Guy (ca 1968 . ► How ABOUT THAT MESS. N’est-ce pas magnifique? « ’cause I’m the greatest Deacon, The best you’ve ever seen You all hate old Deacon Jones, ’cause all my chicks* are in the lean I’m the greatest jockey*, Now, how about that mess. Fare thee well, all you sinners, fare thee well » Fare Thee Well, Deacon Jones, Bull Moose Jackson (1947). ► MESS AROUND. ® V. Traîner, glander, perdre son temps. ® Draguer, tourner autour, prendre du bon temps : You’re Always Messin’ Around My Woman, Lizzie Miles (1923). ® Nom d’une danse dans laquelle les hanches décrivent un mouvement circulaire : 77J«/ Dance Called « Messin’ Around », Sara Martin (1926).

MEZZ ► Joint de marijuana, de bonne qualité : « Dreamed about a reefer* five feet long Mighty* mezz, but not too strong You’ll be high*, but not for long If you’re a viper* » If You’re a Viper, Rosetta Howard (1937). ► Par extension, le meilleur, le gratin. • Surnom du clarinettiste et chef d’orchestre, Milton « Mezz » Mezzrow (1899-1972).

MICKEY Surnom du guitariste McHouston «Mickey » Baker (1925).

MICKEY FINN Boisson droguée à l’insu du consommateur (voir Pete) : Mickey Finn, Don Redman (1929).

MIDDLE Bl'STER Charrue, d’un modèle très difficile à manier selon Big Bill Broonzy : « I want two mules to walk Where I tell ’em move on down the field 1 want a brand new middle buster too I want a yellow jacket turnin’ low » The Ole Mule Breakin' Blues, Roosevelt Charles, recueilli par Harry Oster (1960) et cité dans Living Country Blues. MIDNIGHT FLYER Ligne de chemin de fer joignant Birmingham, Alabama, à La Nouvelle-Orléans, Louisiane : « Right away I bought me a thru train ticket Ridin’ across Mississippi clean* And I was on that Midnight Flyer Out of Birmingham, smokin’ into New Orleans » Promised Land, Chuck Berry (1964).

MIDNIGHT SPECIAL Spécial Minuit, surnom d’un train célèbre dans toutes les fermes-pénitenciers du Sud et plus particulièrement du Texas. La légende veut que si les feux du Midnight Special éclairent la fenêtre de la geôle d’un détenu, il sera libéré au petit matin : « Well I heard her tell the captain Turn* a-loose my man. Let the Midnight Special Shine her light on me Oh, let the Midnight Special Shine her ever lovin’ light on me » The Midnight Special, Leadbelly (1935). Elle est peut-être originaire de Sugarland, le pénitencier situé le long de la Southern Pacifie Railroad, où, chaque jour après minuit, passe le Golden Gate Limited-, selon Sandburg (cité par Paul Oliver in Songsters and Saints) le Midnight Special est resté célèbre du fait qu’un train de prostituées partait le samedi à minuit de Memphis à destination d’un pénitencier du Sud pour rendre visite aux détenus méritants; la version enregistrée par Sam Collins en 1927 et faisant référence à une certaine Miss Norah accrédite cette explication : « Yonder comes Miss Norah “How do you know?” “I know her by her apron And the dress she wear’ Umbrella on her shoulder Piece of paper in her hand Gonna ask some sergeant To release her man” »

MIGHTY Extrêmement, rudement, vachement (placé devant un adjectif): « I have Uneeda biscuit here And a half a pint of gin The gin is mighty fine But them biscuits are a little too thin » Rabbit Foot Bines, Blind Lemon Jefferson (1926). ► Surnom du bluesman Joseph « Mighty’ » Joe Young (1927). ► MIGHTY ILEA. Surnom du tromboniste Gene « Mighty Flea » Connors (1930).

MILK Lait. Métaphore courante pour évoquer le plaisir sexuel : « But the cow* that’s black and ugly Has often got the sweetest milk » Mean Tight Mama, Sara Martin (1928). ► MILK AND HONEY. Le Paradis. ► MILK COW. Métaphore courante pour femme, maîtresse : « Well you know my milk cow Tell her to hurry home I ain’t had no milk Since that cow* been gone » My Black Mama, Son House (1930).

MINSTREL Ménestrel. Forme de spectacle apparue vers 1840 où les acteurs blancs s’efforcent d’imiter les représentations données par les esclaves pour leurs maîtres : « Deux musiciens appelés endmen parce qu’ils se plaçaient aux extrémités d’un demi-cercle, et nommés Tambo et Bones, à cause de leurs instruments (un tambourin et des castagnettes d’os), dialoguaient avec un interlocuteur placé au centre. Ce premier mouvement, fait de danse et de musique, se terminait par une marche en cercle et servait d’introduction à un olio, pot pourri de scénarios et de farces. Les mélodies étaient très sentimentales et les danses reprenaient les pas que les Noirs avaient rendus populaires à l’époque : soft shoe, breakdown*, stick dancing, cakewalk*. Les sketches présentaient quelques gags émaillés de plaisanteries grossières. Les tirades (stump speeches) passaient pour imiter les sermons noirs. » Geneviève Fabre, Le Théâtre noir aux Etats-Unis. Ces imitations grossières ont contribué à véhiculer les stéréotypes communs (« les darkies sont instables, irresponsables, voleurs, sans souci », comme le note Eileen Southern) et ont gommé tout ce qu’il pouvait y avoir de revendicatif dans les pièces noires originelles. Apparus au moment où la société américaine était violemment ébranlée par le débat sur l’esclavage, les ménestrels apparaissent aujourd’hui comme un vecteur de diffusion idéologique au service du clan proesclavagiste : « Non contents de s’approprier une forme artistique, les Blancs la détournaient de ses fins de façon concertée et délibérée. Interceptant l’expression culturelle noire, les ménestrels ont ainsi obscurci la visée véritable du spectacle noir originel et n’en ont retenu ni la portée satirique ni le caractère subversif. [...] 11 s’agissait de diffuser une certaine image du Noir qui rassurait le Blanc dans l'opinion de sa propre supériorité et qui. envahissant la scène, allait marquer la psyché collective [...] Le ménestrel fait un peu figure de forteresse idéologique s’efforçant de résister aux assauts d’idées subversives et d’évènements menaçants. » Geneviève Fabre, Le Théâtre noir aux Etats-Unis. Le genre connut une grande vogue au XIXe siècle et s’institutionnalisa avec l’apparition de troupes professionnelles dont certaines survécurent jusque dans les années 20 où elles fournirent du travail aux premiers musiciens de jazz et de blues (voir aussi medicine* show, tent* show).

MINTON Pour « Minton’s Playhouse », club de la 118e rue ouest, au sud de Harlem; ouvert en 1938 par Henry Minton. Il est connu pour avoir abrité les expérimentations des pionniers du be-bop : Monday at Minton’s, Chu Berry (1941).

MISS ANN Terme méprisant pour désigner une Blanche ayant une attitude hautaine, dédaigneuse envers les Noirs : Miss Ann, Little Richard (1956).

MISSISSIPPI Surnom des bluesmen « Mississippi » John Hurt (1892-1966), Fred McDowell (1904-1972) et de la chanteuse Matilda Witherspoon alias « Mississippi Matilda » (1914). Nom du groupe des « Mississippi Sheiks » constitué autour de Lonnie Chatmon (ca 1892-ca 1943 ; enregistrements au début des années 30). ► MISSISSIPPI MARBLES. Jeu de dés qui fut très populaire parmi les Noirs du Sud; les dés eux-mêmes.

MISTER SO & SO ► Monsieur Machin, monsieur Truc- muche : « And there ain’t but one thing That make Mister Johnson* drink I swear by how you treat me, baby, I’m begin’ to think Oh babe, my life don’t feel the same You breaks my heart When you calls Mister So and So’s name » Kind-Hearted Woman Blues, Robert Johnson (1936). ► Salaud, salopard. ► MISTREAT Am. Maltraiter. Tromper : « Now you’re a mean* mistreater And you mistreat me all the time I tried to love you, baby 1 swear, but you won’t pay that no mind » Mean Mistreater Mama, Leroy Carr (1934).

MOANING Gémissement, plainte. V. Gémir : «When you hear me moanin’ and groanin’*, baby You know it hurt me deep down inside Yes, when you hear me holler*, baby, Aw, you know, you’re my desire » / Can't Quit You Bab)', Otis Rush (1956). Psalmodie, interprétation d’un chant caractérisée par une libre exploitation de la variation mélodique (généralement sur la gamme pentatonique), quelquefois à lèvres fermées (humming). Le moaning n’est pas une plainte et ne renvoie pas au chagrin ou à la douleur, mais à la transe et à l’extase : « Quand tout marche bien, quand je tiens mes auditeurs dans le creux de ma main, je pars dans ces moanings qui me remuent et qui remuent vraiment les gens. » Interview de Bessie Griffin par Maurice Cullaz, Jazz Hot 373 (mai 1980). Le prédicateur l’utilise quand l’émotion de ses ouailles arrive à son comble. Syn. : groaning, mourning, tuning, whooping ou zooning.

MODEL T. Ford Modèle T, la première voiture construite par Henry Ford dès 1908; modèle simple (elle n’avait que deux vitesses), robuste et bon marché, son succès alla grandissant jusqu’à ce que sa production soit arrêtée en 1927 : ♦ Well well the T. Model Ford I say is the poor man’s friend Well well it will get you there Hey when your money is spend » Poor Man’s Prient1, Sleepy John Estes (1935). Comme c’est fréquemment le cas (voir Dynaflow, Terraplane), l’automobile est couramment sexualisée par les Noirs : « These here women what called theirselves a Cadillac Ought to be a T. Model Ford You know they got the shape all right But they can’t carry no heavy load » T. Model Blues, Walter Roland (1933).

MOE Personnage de Noir dans les blagues et les farces : Five Guys Named Moe, Louis Jordan (1942).

MOGEN DAVID (Morgan David) Vin doux casher : Morgan David Wine, Bukka White (1963). MOJO ► Stup, drogue, came. ► Pour mojo hand : « I got a black* cat bone I got a mojo too I got John* The Conqueroo I'm gonna mess* with you » I’m Your Hootchie Cootchie Man, Muddy Waters (1954). ► Le terme n’est pas exempt de connotations sexuelles, évoquant les organes génitaux : « My rider*'s got a mojo And she won’t let me see Everytime I start to lovin’ She ease* that thing* on me » Low Down Mojo Blues, Blind Lemon Jefferson (1928). Dans ce sens, Got My Mojo Workin de Muddy Waters (1960) n’est pas sans ambiguïté, ambiguïté que renforcent work et son double sens : « Got my mojo workiri* But it just don’t work on you 1 wanna love you so bad Tell, I don’t know what to do » • Surnom de l’harmoniciste George « Mojo » Buford (1929). 415. JOMO. Forme masquée de mojo. « It must be a black* cat bone Jomo can’t work* that hard • Woman what did you spell me for anyhow, tell me, It must be a black cat bone Jomo can’t work that hard • What kind of thing are you accusin’ me off? Everytime I wake up, Jim Tampa’s in my yard » Jim Tampa Blues, Lucille Bogan (1927). 416. Mojo HAND. Charme confectionné à partir d’ingrédients divers — goopher dust*, poudre de serpent ou de crapaud, racines (John* The 'Conqueroo, King* Solomon), os de chat noir (black cat* bone)... « I'm goin’ down in New Orleans Get me a mojo hand I wan’ show all you good-lookin’ women Just how to treat your man » Louisiana Blues, Muddy Waters (1950). Ce philtre d'amour est censé raviver les sentiments amoureux, provoquer le désir, empêcher l’adultère, « Lord I’m goin’ to Louisiana I’ll get me a mojo hand I say I’m going to Louisiana I’ll get me a boodoo* band I’m gonna stop my woman An fix* her so she can’t have another man » Two Strings Blues, Little Hat Jones (1929). sous peine de défécation ou de menstruation pour la femme, ou d’impuissance pour l’homme, pendant le coït, « Well, I’d like to love you baby But your good man got me barred* » Talking to Myself, Blind Willie McTell (1930). voire de mort : « Well I love you mister Charlie* Honey, God knows 1 do But the day you try to quit me Brother, that’s the day you die » Staggering Blues, Rosie Mae Moore (1928).

MOLASSES SUPPER Fellation, pipe : Molasses Supper Blues, George Hannah (1930).

MOLDY FIG Litt. : figue moisie. Terme péjoratif pour désigner les amateurs d’un style musical vieillot et tout particulièrement de New Orleans* : «The squabble between the hoppers* and the moldy figs who played or listened exclusively to dixieland* jazz, arose because the older musicians insisted on attacking our music and putting* it down. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

MONEYMAKER (Money cumulator) Le cul, et plus généralement les attributs sexuels d’une femme : Shake Your Moneymaker, Elmore James (1961).

MONKEY ► Noir de couleur foncée, de type africain : « You make take my brown* You sure can’t keep her long I got a new way of lovin’ Monkey mens can’t catch on » Goin’ up The Country, Barbecue Bob (1928). ► Mais le monkey, c’est avant tout celui qui est malin comme un singe, habile à manipuler plus fort que lui, comme dans ce couplet du Mother Buyer de Dirty Red (1947): « The monkey stumbled The baboon* fell Monkey grabbed the money An’ he run like hell* » Le singe, auquel les Blancs assimilent Noir, devient, par inversion des valet un héros qui oppose sa ruse et son c cours à la force brute et dominatrice Blanc (sur ce point, voir signifying* me key). 3- Petite formation de jazz; d d’orchestre. 4. V. Monkey ou monkey around : train baguenauder, glander : « Now two and two is four, Four and two is six You gonna keep on monkeyin' ’rounc with your friends, boy You gonna get your business right in a fix (thrown out on the street ?) But I’m cryin’, baby, don’t you want to go Back to the land of California To my sweet home Chicago » Sweet Home Chicago, Robert Johnson (1936). ► MAKE A MONKEY OUT OF SOMEONE. Se foul de la gueule de quelqu’un, se payer tronche. ► MONKEY BUSINESS. Entourloupe, fumis rie, arnaque, coup fourré : Too Much Monkey Business, Chu Berry (1956). ► MONKEY-BACK. Costume avec un vesaK court à pinces : « Sur le chemin menant à un des club- où j’allais occasionnellement travaille^ j’avais vu dans la vitrine d’un fripier ua petit costume monkey-back. Après av : ar vérifié l’état de mes finances, je me suis aperçu que je pouvais me l’offrir. Je cr< K que je l'ai payé quatre dollars. Il am quelques reprises et des pièces cachées mais, enfin, je possédais un costume monkey-back (qu’on appelait aussi un pincb-back et un jazz-back), et je me trouvais très élégant. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues ► SIGNIFYING MONKEY. Voir signify.

MONON Ligne de chemin de fer qui croise la L & N à Louisville et à Cincinnati : « I’m goin’ where the Monon Crosses the L & N* And catch me a freight train And go back home again » Down South Blues, Scrapper Blackwell (19311

MONTANA Surnom du pianiste Arthur « Montana ■ Taylor (1903-1954) : Montana Five, Montana Taylor (1946).

MOOCH ► Danse lente semblable au drag (années 20-30) : ► Vol, larcin : The Mooch, Duke Ellington (1928). ► V. Mendier ; voler : « You started in moochin’ But your moochin’ is in vain Be careful with yourself You'll get a ball* and chain » Wfe Sure Got Hard Times, Barbecue Bob (1930). ► MOOCHER. Mendiant ou voleur : Minnie The Moocher, Cab Calloway (1931).

MOONSHINE 1892. Désignait alors les boissons alcooliques importées en contrebande de France et déchargées au clair de lune (moonlight). Alcool de contrebande : « Now you didn't want me When you lay down across my bed Drinkin’ your moonshine whiskey And talkin’ all out of your head* » Pistol Snapper Blues, Blind Boy Fuller (1938).

MOORE GIRL Appellation populaire de la Moore Central Railroad, petite compagnie de chemin de fer du comté de Moore en Caroline du Nord : ne Moore Girl, Andrew et Jim Baxter (1927).

MOORE Tom Nom du propriétaire d’une plantation près de Navasota, Texas, connue pour ses conditions de travail particulièrement rudes : « Now mister Tom Moore’ a man He don’t never stand and grin He just say, keep out of the graveyard I’ll save you from the pen* » Tom Moore's Farm, Lightnin’ Hopkins (1959).

MORGAN STREET Rue du quartier chaud de Saint Louis, Missouri : « Jelly* roll in Deep Morgan Just about Sixteenth Street Well there’s certainly a lot of business Where these women do meet » Nut Factory Blues, Hi Henry Brown (1932).

MOSE Moïse. Vieux Noir (le terme est souvent utilisé de façon générique) : OT Mose, Robert McCoy (1938). MOTHERFUCKER (Mother fuyer, mother for you) Litt. : niqueur/ baiseur de ta mère. L'un des mots les plus ambigus du parler négro-américain, qui, selon le ton et le contexte, peut être la pire des insultes ou un terme de respect et d’affection. ► Homme (sans connotation négative). ► Connard, enculé : « Now what do you think about your father Your dirty black motherfucker? Oh I’m talkin’ about you ’les you keep on, but I don’t play the dozens* Don’t ease* me in, you’se a dirty motherfucker You goin’ to see it again » The Dirty Dozens, Lightnin’ Hopkins (1961?). Formes composées les plus fréquentes : bad, dirty, fine, hungry, jam-up, jive, rough, stinking, tight motherfucker... Variantes : mother eater, motherfouler, mothergrabber, motherhugger, motberji- ver, motherjoker, motherlover-, mammyjammer, mammysuker, mammyfucker, mammybugger... Formes masquées : mother for you, mother fuyer : « He’s a dirty mother for you He don’t mean no good He got drunk this morning Tore* up the neighbourhood » Dirty Mother for You, Memphis Minnie (1935). « It’s a hot* dog, baby, no it’s never cold It’s just right for to fit your roll* Tight* mother fuyer, don’t you know Fit mother fuyer don’t you know Jam-up* mother fuyer, I ain’t gonna tell you no lie* » Mother Fuyer, Dirty Red (1947). 2. Par inversion de sens, terme de respect, d’amitié : « There was nothing left to do but Be where Monk was and find him That crazy Motherfucker » Extrait d’un poème d’Amiri Baraka (Leroi Jones), dédié à Thelonious Monk.

MOTOR CITY Surnom de la ville de Detroit, Michigan : 7Zie Motor City Is Burning, John Lee Hooker (ca 1966).

MOTOWN Contraction de Motor Town, surnom de Detroit, Michigan; d’où le nom de l’une des premières entreprises de disques spécifiquement noires, Tamia Motown.

MOUNTAIN JACK Puma, cougar des montagnes Rocheuses : « If I could holler* Like that mountain jack I'd go up on the mountains Call my baby back » Honey Dripping Papa, Kid Prince Moore (1936).

MOUNTING Voir dirty* dozens (acc. 5).

MOURNER Parent ou ami d’un défunt. Les pêcheurs désireux de faire acte de repentir : Moan, You Mourners, Bessie Smith (1930). Dans les églises baptistes, ils sont regroupés sur les mourner’s* benches, les trois premiers rangs à partir de la chaire : « Sisters and brothers, I have been born again I went up to the mourners’ bench about five years » Experience Meeting, Deacon ton Davis (1927).

MOURNING Voir moaning.

MOUTH ► FAT MOUTH. ® Crétin, stupide : « I was raised in Texas Schooled in Tennessee High-stepper You can’t make no fatmouth out of me » Long Lonesome Blues, Blind Lemon Jefferson (1926). ® Homme qui dépense sans compter pour une femme : « Tell me tell me Please has anybody seen my brown* She used to love me ’til old fatmouth blew* in town She used to be mine But the fatmouth has got her now That’s a dirty mistreater* Didn’t mean me no good » Fat Mouth Blues, Papa Charlie Jackson (1927). @ V. Ne pas savoir tenir sa langue, parler à tort et à travers, être une grande gueule. ► LOUDMOUTH. Voir loud. MOUTH BOW. Litt. : arc en bouche. Instrument rudimentaire en forme d’arc; le joueur fait vibrer la corde passée entre ses lèvres d’une main, tandis que de l'autre il modifie longueur vibrante et hauteur z. son. ► MOUTH HARP. Voir harp. ► MOUTH ORGAN. Harmonica : « Yeah, the first blues I ever heard was t guy coming uptown* on Saturday u— the guitar and the mouth organ, the tic of a coca-cola bottle... » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bo: ► RUN (ONE’S) MOUTH. Trop parler, jaca- ser; se plaindre, se lamenter: You Run Your Mouth and I’ll Run M Business, Louis Jordan (1940).

MOVE Etre dynamique, avoir du punch, spécialement en matière de musique : « In this era, Louis Armstrong played z the ensemble and [King] Oliver took the majority of the solos. He had a real gutbucket’* tone and really moved. » Interview de Tommy Brookins, in Hear Me Talks', to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

MUCH Beaucoup. L’un des termes quantitatifs utilisés dar.? l’argot du jazz pour exprimer une idée qualitative : bon, bien. « [Thelonious] Monk, too, was a grea creator with his songs and tunes. I knew Monk when he played ten times as much as he does now. I think he has got a little weird in his music today. But I tell you. Monk could play. » Interview de Billy Eckstine, in Hear Me Talkin’to de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

MUD KICKIN’ WOMAN Voir kick.

MUDDY WATERS Litt. : eaux boueuses. Surnom du bluesman McKinley Morganfield (1915-1983); c’est sa grand-mère qui le surnomma ainsi car, enfant, il jouaii dans la boue le long des berges du Mississippi : « They call me Muddy Waters The bluest* man in Chicago town » They Call Me Muddy Waters, Muddy Waters (1952

MUGGLES Cigarette de marijuana, joint : Muggles, Louis Armstrong (1928).

MULE Mulet. 1. Terme souvent utilisé pour désigner le patron blanc, boss, maître. 2. Homme qui cocufie : « High yeller*, she'll kick you That ain’t all When you step out at night ’nother mule in your stall » Brownskin Woman, Barbecue Bob (1927). ► MULE (WHITE MULE). Boisson alcoolisée, piquette : « An’ if we can’t get decent whisky We will take a drink of mule » Alley Bound Blues, Curtis Jones (1938). « Listen brothers My subject is that white mule of sin » Rev. George Jones and His Congregation (1923). • Surnom du pianiste chef d’orchestre John Henry « Perry » Bradford (1894- 1970) et du bassiste Major Quincy Holley (1924). ► HOLDING THE MULE. Nom d’une danse.

MUMBLES Surnom de l’harmoniciste Walter « Sha- key» Horton (1918-1981). MUSICIANER L’un des termes relevés par Howard Odum dans ses recueils de folklore noir (1911); il est utilisé par les musiciens noirs pour se désigner eux-mêmes en particulier quand ils sont spécialistes du banjo ou du violon; dans le cas d’un chanteur et « compositeur », c’est le terme de songster qui est utilisé. Quant à music physicianer, c’est une expression des medicine* shows, aujourd'hui tombée en désuétude, et qui désignait le musicien chanteur itinérant.

MUTE Sourdine utilisée pour modifier la sonorité des cuivres (syn. : wah-wah) : «Joe Oliver was very strong; he was the greatest freak* trumpet player I ever knew. He did most of his playing with cups, glasses, buckets and mutes. He was the best gutbucket* man I ever heard. I called him freak because the sounds he made were not made by the valves but through these artificial devices. » Interview de Mutt Carey, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

MUTHA (Muthafucka) Mother, motherfucker* dans la transcription du parler noir : « Bama* [Carl “Barna” Warwick] would see me talking to somebody and say; “Man, what you’re talking with that greasy muthafucka for?” — Well, I thought he was all right. — Man, that muthafucka hate niggers*. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. N

N.R.A. P tur National Recovery Administration (16 juin 1933), programme qui définissait la politique industrielle du New Deal. Selon Franklin Roosevelt, il ambitionnait d'assurer « un profit raisonnable à l’industrie et des salaires convenables aux ouvriers par l’élimination des pratiques scandaleuses qui avaient non seulement accablé l’entrepreneur honnête, mais aussi accru la misère de l’ouvrier ». De nombreux codes relatifs à la durée du travail, au salaire minimum, à l’action syndicale... furent promulgués et leur applica- ùon confiée à la N.R.A. qui lança de vastes campagnes pour les faire accepter. Elle eut sur les couches défavorisées des effets particulièrement néfastes, par conjonction d'une augmentation des prix avec une raréfaction des emplois ; d’où la traduction de son sigle en Negroes Ruined Again. Elle fut déclarée inconstitutionnelle en 1935.

NAME ► BLACK NAME. « Now I hear my black name ringin’ All up and down the line* Now I don’t believe you love me, mama I believe I’m just throwin’ away my time » Mv Black Name Blues, Sonny Boy Williamson (1941). Le « nom noir », par opposition au patronyme issu du système esclavagiste dans lequel le Noir, dépossédé de son nom africain : ♦ I don’t know my real name I don’t know when I was born » I’ve Been Treated Wrong, Washboard Sam (1941). fut contraint d’adopter celui de son maître. Le black name — « surnom » dans la terminologie occidentale — est signifiant, contrairement au nom patronymique : « My father’s father used to tell me a lot about that. That’s why this Boyd, that’s just an identification for me like my social-security card number. I don’t respect that as nothing. ’Cause I’m no Boyd, man. » Interview d'Eddie Boyd, cité par Julio Finn dans The Bluesman. Il marque une volonté de recouvrer une identité; il symbolise la re-naissance du Noir et exorcise un passé douloureux ; il est re-création, et, comme le note Paul Garon (in The Devil’s Son-in-Law'), il est un moyen d'échapper à une condition misérable, de s’affranchir et d’accéder à un autre statut; qu’on songe ici, par exemple à des surnoms tels que «The Black Ace », « The Boss Card in Your Hand », « The Devil’s Son-in-Law », « The High Sheriff from Hell », « The Honey- Dripper », « The Howling Wolf », « Light- nin’ » Hopkins... Mais il est également signe de connivence, de reconnaissance, au sein d’un groupe de pairs et participe à ce titre au renforcement de la cohésion sociale. Ainsi la pratique des Black Muslims depuis les années 20 de ne garder que leur prénom suivi de X et de se séparer de leur « nom d’esclave », s’inscrit-elle dans une tradition vivace, tout comme l’adoption de patronymes musulmans par nombre de musiciens (Sahib Sihab, Yusef Lateef, Saluda Hakim alias Charlie Parker) : « La police nous a piqués à l’aéroport. Ils nous avaient suivis depuis chez le dealer*. [...] Ils nous ont demandé nos noms. J’ai donné le mien, Bird* le sien, Dexter Gordon aussi, mais quand est venu le tour de Blakey, il leur a dit s’appeler Abdullah Ibn Buhaina, son nom musul-man. Le policier qui notait tout lui a fait : “Arrête tes conneries et donne-moi ton putain de nom américain, ton vrai nom!” [...] On s’est retrouvés en taule. » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l’autobiogra- phie. Dans certains cas, le surnom participe également d'une stratégie de contournement lorsque le barde négro- américain, lié par contrat à une firme de disques, réapparaît sous une nouvelle identité pour les besoins d'un enregistrement avec une nouvelle firme ; songeons entre autres à John Lee Hooker (re-naissant au gré des circonstances Texas Slim, Birmingham Sam, John Lee Cooker ou Booker, Delta John, The Boogie Man, Johnny Williams ou Little Pork Chops) ou à Big Bill Broonzy (alias Big Bill Johnson, Sammy Sampson, Big Bill Broomsley ou Slim Hunter)... La pratique des (sur)noms, très fréquente dans la culture négro-américaine (dans le Blues Wbo's Who de Sheldon Harris, 62 % des bluesmen noirs répertoriés portent un surnom), est originaire d’Afrique où leur fonction n’est pas tant de dénommer que de marquer, de caractériser une personnalité et d’influencer une destinée. Ce qui, comme le démontre Julio Finn, reste valable pour le monde du blues. C’est dans cette perspective que doit s’interpréter l’appropriation par un bluesman du nom d’un de ses pairs défunts, l’exemple le plus célèbre en la matière restant celui de Rice Miller re-naissant « Sonny Boy » Williamson à la mort de John Lee « Sonny Boy » Williamson. Mais on peut citer aussi Bill Gaither alias « Leroy’s Buddy » (en référence à Leroy Carr), Brownie McGhee alias « Blind Boy Fuller n° 2 » ou Chester Burnett alias Howlin’ Wolf reprenant le titre fétiche de J.T. « Funnv Paper » Smith, Howlin’ Wolf Blues (1930). Le (sur)nom est par ailleurs l’un des signes incontestables de la survivance de l’oralité dans la culture populaire négro- américaine. Mais il peut être dans le même temps l’un des signes du recul de cette même tradition lorsqu’il devient accroche publicitaire : Louis Armstrong était « Pops » pour ses pairs mais « Satchnto » ou « Satchelmouth », pour les besoins du show-business... ► CALL SOMEBODY OIT or ms NAME. Insulter, mettre dans les « douzaines » (voir dirty* dozens) : « Woman talk about me They lies* on me Call me out of my name 'cause their men come to see me Just the same » Kitchen Mechanic Blues, Clara Smith (1925). ► EMANON. NO name à l’envers : Emanon, Dizzy Gillespie (1946).

NAPPY Bouclé, crépu : « Now my hair is nappy And I don’t wear no clothes of silk But the cow* that’s black and ugly Has often got the sweetest milk* » Mean Tight Mania, Sara Martin (1928). Terme péjoratif pour désigner un Noir et par renversement de sens, terme d’affection et de connivence entre Noirs. • Surnom du blues* shouter Napoleor. Brown Goodson Culp alias « Napp>. Brown » (1929).

NAPTOWN Surnom de la ville d’Indianapolis, Indiana : « Nobody knows old Naptown Baby, like I do If you will stop and listen I will tell you a tiling or two » Naptown Blues, Lerov Carr (1929).

NASTY Méchant. Dégoûtant, obscène, ordurier: « Thought I heard Buddy* Bolden say You’re nasty, you’re dirty* Take it away You’re terrible, you’re awful Take it away » Buddy Bolden’s Blues, Jelly Roll Morton (1939). Sexy, bandant; terrible, super (années 1900-1940) : « I’ve got a razor That’s got a nasty blade » Don't Mess with Me, Sister Harris (1923). ► SACK NASTY. Voir sack. ► NATION Vient probablement A'lndian Nation. nation indienne. Terme assez vague qui, au XIXe, désignait un territoire devenu partie intégrante de l’Oklahoma. Pour le peuple du blues, le terme peut évoquer la liberté : « I’m leavin’ this place And I’m going west I’m going to the Nation Where there is a shanty* for me » Shanty Blues, Henry «Ragtime» Thomas (1927).

NATIONAL De National Music Company, marque d’instruments de musique; elle acheta la licence Dobro* en 1932. Guitare métallique, utilisée par des bluesmen tels que Bukka White, Son House ou Blind Boy Fuller.

NATURAL ► Renforce, comme mamlish, le sens du terme qu’il précède : « Let your hair* down Let’s have a natural ball* ’cause when you’re not happy It ain’t no fun at all » T Bone Shuffle, T Bone Walker (1947). ► Aux dés : 7 ou 11. ► NATURAL BORN (MAN). Quelqu’un d’exceptionnel : « I left Memphis to spread the news Memphis women don’t wear no shoes Had it written on the back of my shirt “Nach’al [natural] born eastman* don't have to work” Don’t have to work Nach’al born eastman don’t have to work » Kassie Jones, Furry' Lewis (1928).

NEEDLE Aiguille. 417. Métaphore couramment employée pour « pénis » depuis I Think You Need a Shot de Walter Davis en 1936 : « Well I operate on the women I don’t fool* around with men Why in the world can’t you take your time Let my old needle in Got my needle in you, baby And you seem to feel allright Well, when I turn this medicine loose Darling, I want you to hold me tight » Bad Blood, Brownie McGhee (1952). 418. Métonymie pour drogue (s’ingérant par injection) : « Since cocaine went out of style You can catch them shooting* needles All the while it takes a little coke* To give me ease Strut* your stuff long as you please » Cocaine Habit Blues, Memphisjug Band, vcl par Ben Ramey (1930).

NEGRO Noir : « You know I told the captain* That my mother was dead Oh, I told the bossman early this morning, Lord, That my poor mother was dead, He said “Negro, if you don’t go to work You soon will be dead too” » Couldn't Find a Mule, Sunnyland Slim (1973). Si le terme n’est pas péjoratif — Marcus Garvey, l’un des grands leaders noirs du début du siècle, publia d’ailleurs un journal du nom de The Negro World — , depuis les années 60 et la fierté noire, negro tend à se voir substituer le terme nigger, considéré avec une connotation plus positive. ► NEGRO SPIRITUAL. Voir spiritual.

NEHI Marque d’une boisson gazeuse : Iced Nehi, Otis Spann Ica 1964). Le terme est sexuellement connoté (nehi mama, femme pétillante). « So they can eagle* rock me They can talk me about things that I used to do I got the Nehi blues mama Don’t know what in the world to do » AfeW Mama Blues, Frank Stokes (1928). Peut-être du fait de l’assonance avec knee high (allusion à la mode des années 20 où les femmes portaient la robe au-dessus du genou): « Let me tell you boys What these knee-high dresses will do Got you broke*, naked and hungry Boys, and then come down on you » Nehi Blues, Blind Joe Reynolds (1930).

NEIB Apocope de neighbour, voisin : My Next Door Neib, Champion Jack Dupree (1968).

NEW ORLEANS ► Style musical qui se forma au début du siècle à La Nouvelle-Orléans, et trouva son plein épanouissement au début des années 20 à Chicago (King Oliver, Louis Armstrong). Le style New Orleans se caractérise par l'improvisation collective (peu de soli), le trio « cornet-clarinette- trombone » et un rythme two beat* (on dit quelquefois jazz two beat). Il a connu un certain regain de faveur vers la fin des années 30 (Louis Armstrong, Sidney Bechet). ► On oppose quelquefois New Orleans à dixieland*, ce dernier renvoyant alors au style New Orleans tel que joué par des Blancs. ► NEW THING Litt. : nouvelle chose. Syn. de free jazz : « Il s’est passé beaucoup de choses en 1960, et notamment l’arrivée à New York d’un nouveau saxophoniste alto, Omette Coleman, qui a bouleversé complètement le monde du jazz. Il est arrivé et a foutu tout le monde en l’air. Très vite, on n’a pas pu trouver de place au Five Spot, où il passait tous les soirs avec Don Cherry — qui jouait d’une trompette de poche en plastique (je crois qu’Ornette avait aussi un alto comme ça) —, Charlie Haden à la basse et Billy Higgins à la batterie. Ils jouaient d’une façon que tout le monde appelait “free jazz”, “avant- garde”, “new thing” ou va savoir. » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l’autobiographie.

NEWK Surnom du saxophoniste Théodore Walter « Sonny » Rollins (1930) : Newkleus, Sonny Roilins (1975).

NICKEL Pièce de cinq cents : « White folks in Washington They know how throw a colored man A nickel to see him bow » Bourgeois Blues, Leadbelly (1938). ► BUFFALO NICKEL. Pièce de cinq cents (à cause du bison qui y figura jusqu’en 1938): The Buffalo Nickel, Erskine Hawkins (1949). ► NICKEL AND A NAIL. Litt. : cinq cents et un clou : « Cela veut dire qu’un jeune homme adore entendre sonner son argent dans sa poche. Mais il ne possède en réalité que quelques pièces auxquelles il ajoutera quelques clous pour être plus sûr de son effet. » Big Bill Broonzy et Yannick Bruynoghe, Big Bill Blues.

NIGGER Noir, nègre. Dans la bouche d’un blanc, le terme est méprisant : « Au lieu de me dire ce qu’elle voulait que je fasse, elle s’excitait parce que son mari devait attendre, commençait à crier après moi et on me traitait de nigger. Je n’avais jamais entendu ce mot auparavant. Je ne savais pas ce qu’il signifiait. Mais je pouvais le deviner d’après le son de sa voix. » Billie Holiday et William Dufty, Lady Sings The Blues. Entre Noirs, selon le contexte et l’intonation, nigger est soit ironique, soit amical et signe de connivence, d’admiration c« d’approbation, surtout depuis le» années 60 et les grands mouvements pales droits civiques. Dans son autobiographie, Big Bill Broonn raconte que, malgré ses conseils, Torn— McClennan s’obstinait à chanter son Bcrit up and Go sans en gommer le mot ger: « The nigger and the white man playing seven-up* The nigger beat the white man And was scared to pick it up He had to bottle* up and go » Et son obstination se solda par sa défenestration, sa guitare autour du cou... ► FIELD NIGGER. Durant la période esdan- giste, Noir travaillant dans les champs, par opposition au house nigger, travaillant dans la maison du maître (voir big* house et ayant de ce fait une vie moins rude « I'd rather be a scullion Cookin' in some white folks yard I could eat a-plenty Wouldn't have to work so hard » Wash Woman’s Blues, Bessie Smith (1928). Dans la rhétorique des militants noirs, le field nigger est un Noir actif, potentiellement révolutionnaire, au contraire d» house nigger (syn. : oncle Torn). ► BLUE GUMMED NIGGER. ® Noir aux lèvres violacées, noirâtres, Noir au type neoe- ment africain (syn. : monkey). ® Noir rancunier, récalcitrant, méchant. Notons ici ta pression idéologique voulant que plus ur Noir est de couleur foncée, plus il es mauvais, bestial. Une croyance vivace parmi les Noirs ruraux du Sud veut d'ailleurs que la morsure d’un tel Noir so® empoisonnée. ► RED NIGGER. « A mi-chemin entre l’Ame- rique nègre claire et l’Amérique nègr? noire (sur le plan de la couleur) se trouve une catégorie spéciale de Noirs auxquels on donne le nom de red niggers. Ce son: ceux qui sont assez clairs pour apparten_- à l’Amérique nègre claire, mais n’ont piles caractéristiques aryennes. Ils n’ont pes les cheveux plats ou les traits des Blancs. • (Rap Brow, Crète, sale nègre, crève) : Red Nigger, Cleo Page (ca 1965).

NIGHTHAWK Engoulevent ; noctambule. Surnom adopté par Robert Lee McCollum alias Robert McCoy (1909-1967) après le succès de son Prowling Nighthawk ea 1937.

NINA Aux dés : 9 (neuf). • Nina Simone : surnom de la chanteuse et pianiste Eunice Kathleen Waymon « Nina » Simone (1933) : « Le seul ennui, c’était que maman apprenne que j’allais jouer du piano dans un bar [...] S’il y avait un panneau sur le trottoir annonçant : “Au programme ce soir : Eunice Waymon”, ça augmenterait les risques; alors j’ai décidé d’utiliser un nom de scène. J’avais un petit ami hispano, Chico, qui m’avait baptisée Niña, c’est-à-dire fillette en espagnol. [...] J’aimais beaucoup la sonorité de ce mot J’aimais bien aussi le prénom Simone, depuis que j’avais vu Simone Signoret dans des films français. Et voilà : Nina Simone. » Nina Simone et Stephen Cleary, Ne me quittez pas. Mémoires.

NITE Night (nuit) dans la transcription phonétique du parler noir : Friday Nite, Cannonball Adderley ica 1958).

NITTY-GRITTY De nit, lente, et de grit, gruau de maïs. Ce qui a trait à la réalité quotidienne; ce qui est fondamental et constitue les bases de la vie : Let’s Go to The Nitty-Gritty, Horace Silver (1963).

NIX Refuser, repousser une offre ; Nix It, Nix It, Johnny Hodges (1950). NOODLE Nouille. Jouer une musique pleine d’invention : Noodlin’, Willie The Lion Smith (1940).

NO SIR Voir yes* sir : « An’ let these white folks alone. Honor the white folks, honor’ em, yassuh [yes* sir] an' nossuh [no sir]. You have to do that. [...] You sho’ had to be obedient.to white people. That’s taught from the fire hearth trainin’ up. You see, when a white man walk up, you surely had to get plumb out the way. » Interview de Willie B. Thomas, cité par Harry- Oster dans Living Country Blues.

NORTHERN Nom d’une ligne de chemin de fer : « I’m going Where the Northern crosses the L & N* And catch me a freight train To go back home again » I’m Going back to Tennessee ( ?), Leroy Carr ( 1929).

NUBBIT Nabot, surnom d’Alvin Hankerson alias « Guitar Nubbit » (1923).

NUMBER ► Personne, individu; d’où number one, soi-même ou petit(e) ami(e). ► Chanson, morceau : «After we recorded the number, the studio man came around with the list to write down the usual information composer, name of the tune and so on. He asked Louis [Armstrong] what the tune was called and Louis said “1 don’t know”. Then he looked around and saw the empty jzçg* sitting in the middle of the floor and said : “Man, we sure knocked that jug — you can call it Knockin’ a Jug.” And that’s the name that went on the record. » Interview- de Kaiser Marshall, in Hear Me Talkin ' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► NUMBER 29. Train parcourant la ligne de l’Illinois entre Cairo et East St Louis : N. 29, Wesley Wallace (1930).

NUMBERS «Jeu des nombres», loterie clandestine, probablement importée de Cuba (voir bolito), qui fit fureur à Harlem avant de se répandre dans la communauté noire pendant la grande crise : « Mais le prochain truc que George invente, c’est d’instaurer dans la boîte le racket des nombres, c’est un genre de loterie plus ou moins truquée. Et l’un des pires bandits à New York gagne le gros lot. Il s’appelait Bob Ewley. Il gagne effectivement le gros lot et George n’arrive pas à trouver l’argent pour le payer, cela se montait à huit ou neuf mille dollars, ce qui à l’époque était une somme fabuleuse... » Sidney Bechet, La musique, c’est ma vie. Le jeu, autrement appelé policy, consiste à miser, par l’intermédiaire des numbers runners qui collectent les paris dans les rues, sur des combinaisons de nombres. Une combinaison de deux nombres s’appelle saddle, de trois, gig et de cinq jack. Les principales portent des noms tels qy'angel gig (14-54-19) ou big dick (15-60- 75). Les plus connues restent cependant 3-6-9* et 4-11-44* (ou washwoman’s gig). ► HIT THE NUMBERS. Gagner à la loterie : « I dream I hit the numbers Win on the horses too I dream I had so much money I didn’t know what to do But it was a dream » Just a Dream, Jimmy Witherspoon (1969). ► NUMBERS BANKER. Collecteur des paris recueillis par les numbers runners. ► NUMBERS BOOK (ou DREAM BOOK). Livre puisant largement dans les croyances populaires et censé guider les parieurs dans leurs choix en établissant des relations entre nombres et événements de la vie quotidienne ou rêves (fèces : 3-6-9, mort : 7-6-9, rêver d’un serpent : 16-32-64, phallus: 4-11-44, veuve sans enfant: 3-1-6...) : « I dreamed last night The woman I love was dead If I had played the dead row I would come out ahead I act like a fool And played 3-6-9* Lost my money And that gal* of mine » Playing Policy Blues, Blind Blake (1930). Parmi les nombreux numbers books : Policy Pete, Lucky Day Workout, The HP. Dream Book, The Rajah ou encore King Solomon’s Wheel of Life and Death Dream's Book. ► NUMBERS RUNNER (WRITER). Intermédiaire, coursier, chargé de recueillir les mises et de distribuer les gains aux parieurs : « Got the number runner’s blues And everytime I see a policeman I almost jump out of my shoes » Number Runner's Blues, Jimmie Gordon (1938). Number Writer, Dan Pickett (1948).

NUTS Noix. 419. Dingue, maboul, cinglé : «Just before 1 left Old Slippers, the bouncer* at the honky-tonk* where Iplayed, came up to me and said,.. “Always keep a white man behind you that ’ll put his hand on you” and say. “That’s my nigger*’’. Years later I told that to Joe Glaser, my ofay manager, and he said, ‘You’re nuts” ». Interview de Louis Armstrong par Richard Meryman. in Louis Armstrong : a Self-Portrait. ► Testicules, « noix », roustons dans l’argot blanc courant : « Now your nuts hang down Like a damn bell-clapper And your dick* stands up like a steeple Your goddam arse-hole Stands open like a church door And the crabs walks in like people » Shave 'em Dry, Lucille Bogan (1935). ► Selon les cas, orgasme, organes sexuels féminins, clitoris, dans les acceptions plus spécifiquement noires. 420. HOT NUTS. Mâle excité, en rut : Hot Nuts Swing, Stella Johnson (1936) 421. NUT FACTORY. Dans l’argot blanc, asile d’aliénés. Maison de passe, bordel dans l'argot noir : « Jelly* roll keeps working* Just about Sixteenth Street Well, they got a nut factory Where the women do meet Got a nut factory Where they work so hard Well, it’s all over the country Husbands ain’t got no job » Nut Factory Blues, Hi Henry Brown (1932). 422. NUT HOUSE. ® Roustons : « I got a job in the freight house Tryin’ to learn how to truck A box fell on me this morning Like to bust one of my Nut house for crazy folks » Sweet Patuni, Jesse James (1936). ® Bordel, claque, clandé. O

O.D.B. (Old Bull Dyke) Voir bulldyke.

O.P.A. « Office of Price Administration », Fun des organismes mis en place lors du New Deal ; il était chargé d’assurer le contrôle des prix et de rationner certains biens i viande, conserves, chaussures, essence...) durant la Deuxième Guerre mondiale : «When I had no money during depression My icebox was filled with meat Well, now that I’ve plenty money Can’t buy nothing to eat I said “Oh mister groceryman Please don’t treat poor me this way” He have me a sad story Saying “Tell it to the O.P.A.” » Tell It to The O.P.A., Ann Sortier McCoy (ca 1945/46).

OFAY Afr. Du gola fua, du ndob fowe, blanc ; renforcé par la convergence avec foe, ennemi, en pig* latin, latin de cuisine. Dans la bouche d’un Noir, Blanc : « They had a place on State* Street called the Fiume where they had a small ofay band, right in the heart of the South* Side. They were really fine. » Interview de Inuis Armstrong, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

OFF THE WALL Am. Bizarre, dingue, à côté de la plaque, à la masse ; « Cut* out that off the wall jive* ► Idées ou valeurs blanches. 3- D’où baratin stupide, inepte. Arnaque et, par extension, sale type, drogue de mauvaise qualité. 4. Durant la Prohibition, fausse monnaie.

OLD HANNAH Afr. Du hause raonaa, soleil. Dans l'argot des prisons, le soleil : « Go down, Old Hannah Well well well Doncha rise no more If you rise in the morning Bring Judgment Day [...] Well I looked at Old Hannah Well well well She was turnin’ red And I looked to my partner He was almost dead » Go Down Old Hannah, Ernest Williams enregistré au pénitencier de Sugarland (1933).

OLD LADY 423. Maîtresse, «bonne femme», petite amie (années 1900) : « Now Earl [Hooker] was spendin’ the early part of the evenin’ on that door with his old lady or somethin’ until things had settled out. » Interview de Son Seals par Sebastian Danchin (1983), in Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto. 424. Epouse (années 20-50). 425. Dans la bouche d’un mac, l’une de ses femmes (wive) : « I got my money from an old lady She says “Son give it to the poor” She says “Don’t shoot dice an’ play coon* can And don’t give my money away” » Gambling Man, Red Nelson (1935). If you can’t treat me no better It’s got to be your funeral and my trial » Your Funeral and My Trail, Sonnv Bov Williamson (1958).

OKIE-DOKIE (Okey-dokey) ► Pour O.K., tout va bien, au poil : Okie Dokie Stomp, Clarence Gatemouth Brown (ca 1955). ► OLD MAN Voir man.

OLD RILEY Ballade autrement connue sous les noms de Here Rattler Here, Red Saunders, Old Whitney ou Old Coffee, contant l’évasion d’un esclave nommé Riley : « The overseers in them times had a negro named Riley. And Old Riley was one of the best there was and Old Riley was tryin’ to make his way to freedom. And while Riley was goin’, they couldn’t catch up with him, got the blood hounds put on his tracks and they commenced talkin’ about it. » Interview de Leadbelly cité par Alan Lomax et Moses Asch in The Leadbelly Songbook. '

OLIO Pot pourri de sketchs dans les minstrel* Shows : « Notre numéro, qui était le seul de la revue à être exécuté par des artistes sepia, était une attraction spéciale qu’on appelait alors l’o/z'o. Il n’avait pas de lien avec les autres parties du spectacle ni avec les numéros comiques. Nous arrivions en scène, faisions notre truc, et c’était terminé... » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues.

ON Fantastique, super ; raffiné ; au courant, au jus (années 40-50) : ► GET (BE) ON (SOMETHING). Etre alcoolique ou drogué : « For an example of a guy who got on, there was Stan Getz. » Interview de Don Lamond, in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

ON THE BRUN (Have something) Avoir quelque chose en tête, ne penser qu a ça, être obsédé par : « I put my money on 1-22 Now what in the world am I going to do? I just have numbers* on the brain » Numbers on The Brain, Elvira Johnson (1926).

ON THE LEVEL En toute honnêteté, en toute sincérité, en toute bonne foi : « Play it mister You see I’m on the level » Policy Dream Blues, Bumble Bee Slim (1935).

ON THE OTHER SIDE OF THE TRACKS (ou across the tracks) Litt. : de l’autre côté des voies ferrées, « la masse des invisibles oubliés dans le ghetto » selon les termes de Geneviève Fabre : « Can you hear me talkin’ baby? I’m your Saturday night boogie woogie man I’m going downtown* ’cross the tracks » Saturday Night Boogie Woogie Man, Jimmv Liggr.- (ca 1950).

ON THE Q.T. Pour On the quiet, sans tambour ni trompette, en catimini : Tippin’ on The Q.T., Count Basie (1945

ON THE SUNNY SIDE OF THE STREET Du côté ensoleillé de la rue. La belle vie celle des nantis : On The Sunny Side of The Street, Loui- Armstrong (1934). Ant. : On the other side of the tracks.

ONE-MAN-BAND Polyinstrumentiste, artiste jouant simultanément de plusieurs instruments comme Doctor Ross ou Elmon Mickle.

ONE NIGHT STAND (One-nighter) ► Dans le jargon des jazzmen, engagement pour un seul passage sur scène: au pluriel, tournée changeant de ville à chaque représentation : « Ring* Oliver received an offer to go on the road and make some one-nightstands at real good money. Ump ! [...] The tour was great, we had lots of fun ana made lots of money. » Louis Armstrong, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Na Shapiro et Nat Hentoff. «We were doin’ one-nighters and we were doin’ one every night! We were working seven nights a week, two ant sometimes three shows at night. The schedule was indescribable. You would get there and not even have time to unpack your bags. » Interview de Little Richard, cité par Charles Wte- dans The Life and Times of Little Richard. ► Par extension, aventure sans lendemain.

ONE STRAND (One-strand-on-the-wall) Syn. de diddley* bow : « We’d nail a strand of wire on the waL the other end on the floor and with a bottle and a brick — to change the length of wire — really played up some music. » Interview d’Albert King par Mel Tapley, cité par Robert Palmer, pochette du disque Tomato 2696361

ONYX’* Célèbre club de New York situé dans la 52e rue (Swing Street) entre la 5e et la 6e avenue : « Cette même année, Dizzy* Gillespie et moi avions arpenté la 5e rue pour dénicher un contrat. Nous avions refusé une offre de 75 dollars par semaine et par personne au Kelly’s Stable. J’avais travaillé auparavant à l’Onyx Club et j’étais ami avec le propriétaire, Mike Westerman. Je lui ai donc demandé s’il pouvait me réengager. Il a été heureux d’accepter. J’ai annoncé : “Ce sera le groupe de Diz”, et Diz a objecté : “Ce sera le tien, parce que c’est toi qui as le contrat.” C’est donc devenu le groupe Gillespie- Pettiford. » Interview d’Oscar Pettiford par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker.

OO-BOI'-SHE-BAM (Oo-pa-pa-da et autres variantes) Onomatopée illustrant le goût des boppers à pervertir le langage : Oo-Bop-She-Bam, Dizzy Gillespie (1946). « She told him we couldn’t speak the language, she could, and “oo-pa-pa-da”, we needed some to help us. » Billie Holiday et William Dufty, Lady Sings The Blues.

OPEN TUNING Façon d’accorder une guitare permettant d’obtenir un accord parfait en jouant les cordes « à vide ». Cette technique est utilisée tout particulièrement par les musiciens utilisant un bottleneck. L’open E est quelquefois appelé Sebastopol* et l’open A, Spanish*. Toutefois ces appellations peuvent varier selon les régions ou les interprètes.

ORGAN ► ORGAN GRINDER. Voir grinder. ► MOUTH ORGAN. Voir mouth.

OUT OF (someone’s) HEAD Cinglé, maboul, à côté de ses pompes : « She’s got me crazy, out of my head With my baby, mean in bed . She keeps me mumbling and fumbling “Don’t stop now” Gotta have loving, ooh, wow » / Get a Thrill, Wynonie Harris (1954).

OUT OF (someone’s) NAME (Call somebody) Voir call somebody out of bis name*.

OUT TO LUNCH Litt. : parti déjeuner. A côté de la plaque, cinglé, dans les vapes : Out to Lunch, Eric Dolphy lea 1960).

OUT-OF-SIGHT Litt. : hors de vue. Formidable, extraordinaire, excitant (années 50) ; « He [Corey*] often drew crowds By his out-of-sight rap* Seemed everyone can dig* what he say But by some trick* of fate A dude* who knew only hate Slipped by, and tooks Corey’s life » Corey Died on The Battlefield, The Wild Magnolias (1970).

OUT-OF-THIS-WORLD Litt. : hors de ce monde. Fantastique, formidable, exceptionnel : « I got my eyes* on a little girl An’ she’s really out-of-this-world » Almost Grown, Chuck Berry (1959)

OVER THE TOP Position peu orthodoxe des mains du guitariste qui passe la gauche par-dessus le manche; quelquefois utilisée par Furry Lewis.

OVER-.AND-OVER « Certains field hollers* s’apparentent aux chants à commentaire social; sans structure précise, ils pouvaient se présenter sous la forme d’une ou de plusieurs phrases répétées à l’infini. C’est pourquoi ils étaient connus sous le nom â'over-and- over. » Robert Springer, ¿e Blues authentique.

OVERHAND Nom d’une technique pianistique du début du siècle. P

Fs AND Q’s Affaires, oignons de quelqu'un; champ d’intérêt : « Sometimes I would give the solos to one of the other trumpets or the trombones. But be sure you’re on your P’s and Q’s when you get your solo. » Interview d’Edgar Haves, in To Be or Not To Bop, de Dizzy Gillespie et Al Fraser.

P.I. Pour pimp*.

P.W.A. Public Works Administration. Dans le cadre de sa politique du New Deal '■ 'uvelle Donne), lancée après la grande aise de 1929, Franklin Roosevelt fit financer un vaste programme de constructions, barrages, routes, ponts, digues, assèchement de marais... qui allait fournir des emplois à des centaines de milliers de chômeurs : « Lord Mister President Listen to what I’m going to say You can take all the alphabet But please leave the P.W.A. Now you're in Mister President And 1 hope you’re here to stay But whatever change you make Please keep the P.W.A. » Don’t Take away My P.W.A, Jimmy Gordon (1936). plus touchés par la crise, les Noirs ■_rent les premiers bénéficiaires de cette création d'emplois comme de l’assurance cb ’ mage instituée par le « Social Security Act» du 14août 1935. Les résultats dans le domaine agricole ■jrent moins probants ; en particulier dans te cadre de 1’A.AA (Agricultural Adjustment Agency). L'objectif prioritaire de ce programme était de soutenir les prix; il es*, de fait, un résultat catastrophique pour de nombreux Noirs, métayers ou ouvriers agricoles, dans la mesure où les propriétaires eurent tendance à réduire production et surfaces mises en exploitation.

PACHUCO Mexicain : Pachuco Hop, Chuck Higgins (1952). Syn. : chicano.

PAD Piaule. « Now late up in the night Make me up a pallet* on yo’ floor Late up in the night Make me a pad down in yo’ floor Well I don’t fell like walkin’ by myself » Lonesome Blues, Robert Pete Williams, recueilli par Harry Oster et cité dans Living Country Blues.

PADDLE Pagaie, roue à aube, nageoire. ► Supplice infligé aux esclaves et consistant à les frapper avec une planche cloutée. ► Paddles : les mains (années 30-40). ► V. Loger, crécher, pieuter : « Paddlin’ Madeline home Paddlin’ Madeline home First we drift for miles And then we begin to go ashore ’cause I mean it’s paddlin’ Madeline That sweet, sweet Madeline Paddlin’ Madeline home » Paddlin' Madeline Home, Kokomo Arnold (1930).

PAL 1. Copain, pote : « Gonna tell you boys Just because you my pals It’s a mighty* bad sign To advertise your gal » You’ve Got Something There, Blind Boy Fuller (1939). ► Petit ami : « My man ain’t actin’ right He stays out late at night And when I find that gal That tired to steal my pal I’ll get her told Just you wait and see » Any Woman’s Blues, Bessie Smith (1923). ► V. Fricoter avec quelqu’un : « I love you, hey But you won’t behave You going to keep on a .pallin’ Going to wake up in your grave » Penitentiary (?), Bessie Tucker (1928).

PALLET Dans les Etats du Sud, paillasse, grabat : « Don’t you never drive a stranger from your door Never drive a stranger from your door If he come to your home, got no place to go Make him down a pallet on your floor » Never Drive a Stranger from Your Door, Willie Harris (1930).

PANAMA Surnom du batteur David Albert « Panama » Francis (1918).

PANAMA LIMITED Surnom d’un train : « Thirty freight biowin’* But she gonna catch that fast Panama Limited You know, it kind of blow A little different, you know » tow/ Limited, Bukka White (1930).

PANATELIA Marijuana de la meilleure qualité (années 30): « Nous traversions la 7e avenue quand un type que je connaissais me cria : “Dis donc, poupée, viens voir. Chez Jimmy, il y a la meilleure panatella que tu aies jamais fumée.” » Billie Holiday et William Dufty, Sings The Blues.

PAPA 426. Comme Daddy, Papa ne désigne pas le père mais l’homme, le mari, l’amant : « Woman in the bakery’ shop shouted “Papa don’t look so sad Come and try7 some of my cake* And you won’t feel so bad” » Bakershop Blues, Blind Lemon Jefferson (1929). ► Autre nom sous lequel sont dési les féticheurs (voir root* doctor). • Surnom des trompettistes O « Papa » Celestin (1884-1954) et Mutt mas « Papa » Carey (1891-1948) et bluesmen J.T. « Funny Papa/Paper » S (oa 1885-1940), « Papa » Charlie Jad (c

PARCHMAN Célèbre ferme-prison d’Etat, dans le lage de Parchman, comté de Sunil« Mississippi : «Judge give me life this morning Down on Parchman Farm I wouldn’t hate it so bad But I left my wife and home » A Parchman Farm Blues, Bukka White (19*0 Elle fut longtemps considérée comme prison modèle, drainant spécialistes ricains et européens. Les femmes y éi admises et des baraquements spé servaient aux rapports sexuels. Les t men Bukka White et Roosevelt Ht furent tous deux incarcérés.

PARTY Quelqu’un : « Hear my phone ringin’ Sounds like a long distance call When I pick up the receiver The party said : "Another mule* is kickin’* in your stall” » Long Distance Call, Muddy Waters (19511

PAS-A-MA-LA (Pasmala, pasamala) 1895 (La Pas Ma La). Du français • mêlé ». Danse en vogue à la fin du XIXe et au d du XXe siècle : « She put her hand on her head And let’s her mind rove on Stands way back, lookin’ to stop Oh! She dance so nicely and politely She do the Pas-A-Ma-La » Bye, Bye, Policeman, Jim Jackson (1928).

PAT .Am. Marquer le temps en frappant des mains et en tapant des pieds : « I just think that swing* is a matter of some good things put together. That you can really pat your foot by. » Interview de Count Basie, cité par Stanley Dance dans 77’e World of Swing. ► PATTING JUBA. Afr. De juba (1834), nom d’une femme née un lundi. 2 Danse pratiquée dans les plantations au temps de l’esclavage. ® Technique utilisant le corps comme caisse de résonance et les mains comme instruments de percussion (voir aussi hand* jive).

PATCH(A) Raccommoder, ravauder, boucher un trou et. par extension, baiser, faire l’amour : « I got a girl in ( ?) Big and fat The way she patch is tight* like that Patcha, patcha, patcha, patcha, Patcha, patcha, patcha all day long » Battle of The Blues, Joe Tuner et Wynonie Harris (1947).

PATROL Patrouille. Mercenaires chargés par les propriétaires de surveiller les esclaves et de ramener les fugitifs. Ces patrouilles virent le jour après la révolte sanglante de Nat Turner en Virginie (1831) : « O some men tell me That a nigger* won’t steal But I’ve seen a nigger in my cornfield O run, nigger, ’for the patrol will catch you O run, nigger, ’fore this is almost day » Chant recueilli par Allen, Pickard et McKim Garrison, in Slave Songs of The United States.

PATENT (Patootie) Voir sweet* patootie.

PAY DUES Payer sa cotisation (pour être membre d’une organisation). Avoir de la malchance; souffrir (spécialement des préjugés raciaux) : « Well T ve been around a long time I really have paid my dues When I first got the blues They brought me over on a ship Men where standing over me And a lot more with this whip And everybody wanna know Why I sing the blues. When I laid in the ghetto flats cold and numb » Why I Sing The Blues, B.B. King (1969). Surmonter une mauvaise passe.

PEA VINE Pois grimpants. Nom d’un fameux tortillard du Delta, reliant à l'origine la plantation de Dockery à la ville de Bayle. La ligne fut intégrée par la suite à la Yazoo and Mississippi Valley Railroad (ou Yellow* Dog), et prolongée jusqu'à Rosedale : « I think that I heard The Pea Vine whistle when she blowed Blowed just like My rider’s* gettin’ on board. » Pea Vine Blues, Charley Patton (1929).

PEACH Pêche. 431. Jolie fille. 432. Appâts, organes sexuels : « Well now you say the peaches you love Don’t grow on no tree I believe now you say Peaches grow just above the knee » Tennessee Peaches Blues, Peetie Wheatstraw (1930). • GEORGIA PEACH. Métaphoriquement, jeune beauté. • PEACH TREE. Hermaphrodite : « My home ain’t here It’s down in peach-tree land Everyone at home calls me Brownskin peach-tree man » Peachtree Man Blues, Guilford « Peachtree » Payne (1923).

PECK Surnom du batteur de blues James « Peck » Curtis (1912-1970).

PECKERWOOD Forme inversée de woodpecker, pivert. Blanc. « This cracker* swung out at me, and I ducked the punch and popped him in the eye [...] “I wish I had some brass knuckles so I would kill you, niggah [nigger*].” ‘You ain’t got none now, peckerwood.” » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

PEE WEE Minuscule. Surnom des guitaristes Connie Curtis « Pee Wee » Crayton (1914-1985 ) et James « Pee Wee » Madison.

PEETIE WHEATSTRAW Pseudonyme du bluesman William Bunch (1902-1941), alias « The High Sheriff from Hell » ou « The Devil’s Son-in-Law » : « I’m Peetie Wheatstraw The "High Sheriff from Hell” The way I strut* my stuff Ooh well, well, now, you never can tell » Peetie Wheatstraw Stomp, Peetie Wheatstraw (1937) Et du chanteur Harmon Ray (1914) qui enregistra avec Joe McCoy en 1942.

PEG LEG Jambe de bois. • Surnom des bluesmen Arthur Jackson alias « Peg Leg Sam » (1911-1977), amputé de la jambe droite à la suite d’un accident de chemin de fer en 1930, et Joshua Barnes « Peg Leg » Howell (1888-ca 1967) amputé, lui, après avoir reçu, lors d’une rixe avec son demi-frère, une balle dans la jambe : Peg Leg Stomp, Peg Leg Howell (1927).

PEN Apocope de penitentiary, pénitencier : « Been down on Angola* Oh, God, I’ve been down in a pen I done killed my little old woman Gotta serve that time* again » How Long Blues, Leon Strickland (1959).

PENDERGAST Thomas J. Maire démocrate de Kansas City, Missouri, de 1911 à 1938, date à laquelle il fut interpellé pour fraude fiscale. Lié à la pègre locale, il fit de Kansas City une ville ouverte où, par exemple, pas une seule condamnation pour violation des lois sur la prohibition n’a été prononcée durant toute leur période d’application, soit du 16 janvier 1920 au 5 décembre 1933! « Now at this time, which was still prohibition, Kansas City was under Pendergast’s control. Most of the night spots* were run by politicians and hoodlums*, and the town was wide open for drinking, gambling, and pretty much every form of vice. Naturally, work was plentiful for musicians, though some of the employers were tough people. » Interview de Man,’ Lou Williams, in Hear Me TaJsi to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. Avec plus de 300 bars programmant rep.- lièrement de la musique vivante, la viüe draina d’innombrables musiciens de tas le Sud et du centre des Etats-Unis et JO noms de Count* Basie, Benny Moten, WL- ter Page, Lester Young, Eddie Durhan. « Hot* Lips » Page, Mary Lou William^ Jimmy Rushing, Joe Turner, Jay McShane ou Charlie Parker, comme ceux de 2 12e rue et de Vine Street, restent indissociablement liés à l’histoire du jazz à Kansa City.

PENNSYLVANIA AVENUE L'une des principales artères du quart» chaud de Baltimore, Maryland : « I want to tell you about a street I know In the city of Baltimore And every night about half pat eigh: I The broads* that strollin’* just won : 1 wait You ’ll find ’em every night on Pennsylvania Avenue » Down on Pennsylvania Avenue, Bertha i_ni (1929).

PEOPLE ► Frère (de race) : « Let’s go down in this alley* Ooh well well, let’s go down in this alley Peetie* Wheatstraw, good people Gonna put you all in the alley* » Throw Me in The Alley, Peetie Wheatstraw 1: A partir des années 60, Noir assumais ■ négritude. ► Interpellation : « I wonder if somebody, people Been stirrin’ somethin’ up in my st^»i Oh, I'm been gettin’ awful sick lard baby 1 just can’t get along with you » Spider in My Stew, Buster Benton (ca 198C PEPTICON Marque de remontant. Son fabricant ha parmi les premiers (avec Hadaco.' - l’lnterstate Grocer Company) à finar .e- une émission de blues sur la statior. de Memphis WDIA-, ces dix minutes jc_- lières furent animées un temps rar B.B. King : « Pepticon, Pepticon sure is good You can get it anywhere in your neighbourhood »

PERDIDO Célèbre rue de La Nouvelle-Orléans peálele à Canal Street : « Buddy [Bolden] played at most of the rough* places like the Masonic Hall* on Perdido and Rampart*, at the Globe Hall in the downtown* section on St Peter and St Claude, and occasionally in Jack- son Hall, a much nicer place on the corner of Jackson and Franklin. » Jelly Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

PETE Diminutif de Peter. Peut-être du nom d’un certain Pete Sawyer qui, le premier, aurait employé la cocaïne, l’opium, puis le chloral, comme additifs à la boisson de certains clients afin de les dévaliser, les compromettre ou les prostituer; le procédé fut employé dès la fin du siècle dernier : « When the bootlegger* goes to his still Gets ready to make his stuff* He’s got his concentrated lye Cocaine and his snuff » Bootlegging Blues, Jim Jackson (1928). Par extension, alcool dénaturé, trafiqué. ► SNEAKY PETE. Vin de qualité inférieure, bibine : « Now the woman I love is really all right She drinks sneaky pete both night and day All day long and all night too When she gets drunk She says what she want to » Sneaky Pete, Champion Jack Dupree (1971).

PETER Pénis. Rapports sexuels : Street Peter, Jelly Roll Morton (1929).

PETRILLO James Caesar Président de 1'American Federation of Musicians (Syndicat des musiciens), célèbre pour avoir imposé un arrêt total des enregistrements d'août 1942 à novembre 1944 afin de protester contre l’invasion du juke-box et la prolifération du disque sur les ondes des chaînes de radio en remplacement des orchestres. Cette grève, venant après celle de l’ASCAP (voir bop), eut pour effets secondaires de favoriser la réédition d’enregistrements et la création de petites compagnies indépendantes (voir indie'). Elle marqua la fin d’une époque dans l’enregistrement, les principales firmes, Bluebird, Decca et Vocalion, ayant de plus en plus de mal à maintenir leur suprématie.

PHARAOH Pharaon. Les esclavagistes, les Blancs : « As he stirred up in Egypt in Moses’ time Talking with Moses, out of the burning bush “Ooooh Moses, ooooh Moses I want you to go down in Egypt’s land Tell Pharaoh”, I said “Let my people go...” » Tlx Eagle Stirs Her Nest, Rev, J.M. Gates (1928). « Descends Moïse, jusqu'au fond de l’Egypte; va dire au vieux pharaon de libérer mon peuple... Cela il l’avait chanté pendant des années. Puis tout à coup [avec l’Emancipation] ce même spiritual revêtait sa vraie signification. On pouvait enfin percevoir un véritable espoir et un immense bonheur dans ces strophes... » Sidney Bechet, La musique, c'est ma vie. Au sujet des codes véhiculés par les spirituals, voir spiritual, Underground* Railroad*. Petite amie (déformation probable de faro*).

PHAROAH Surnom du saxophoniste Farrell « Pha- roah » Sanders (1940). PHILLY Appellation populaire de Philadelphie, Pennsylvanie : « After leaving Lucky* Millinder, I tried to answer that question by going out as a single attraction when i accepted the engagement at the Downbeat in Philly, a little stint which commercially and per- sonnally was quite rewarding to me. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. • Surnom du batteur Joseph Rudolph « Philly Joe » Jones (1923-1985) : Philly Twist, Kenny Dorham (ca 1961).

PIANO Surnom des pianistes et chanteurs Huey « Piano » Smith (1924) et Willie Lee Perryman alias « Piano Red » (1913). ► PIANO MAN. Pianiste. Terme généralement préféré à pianist.

PICKING Voir fingerpicking, flat* picking.

PIE Pâté. Au sens figuré, les appâts, le « châssis », et plus précisément les organes sexuels : « I want to wait ’round here, baby Until your fried pies get done Because I think I’ve got a nickel* Lord, I want to buy me some » Scarey Day Blues, Blind Willie McTell (1931). Pie est beaucoup moins courant dans ce sens que d’autres termes culinaires tels jelly* roll ou biscuit. PIE BACK MAN. Gigolo.

PIECE Pour un musicien, son instrument.

PIG BUND PIG. Voir blind. PIG AND WHISTLE. De pig, cochon, goinfre, et whistle, gosier, gorge. Bouge : « I met him [Blind Willie McTell] back — like ’29 or ’30. We had some drive-in places... We called them pig and whitles... They call him to the car and let him play... » Interview de William Lee « Piano Red » Perryman par Karl Gert zur Heide (1977), citée par Bruce Bastin dans A Blues Tradition in The Southeastern United States. PIG LATIN. Latin de cuisine. Sorte de sabir utilisé dans le Sud (dans le Nord, on parle plus volontiers de dog latin) : « Lester [Young] portait un chapeau et parlait argot. D’accord, mais tous les musiciens parlaient argot à cette époque. Je pense que l’un des plus grands utilisateurs d’argot était Ben Webster. Pour autant que je m’en sou- vienne, les gens du show-business ont toujours parlé argot. Quand j’étais enfant, les gens avaient pris l’habitude de parler un argot qu’on appelait pig latin, que Lester a utilisé du reste. On prend un mot comme you par exemple. On enlève le « y », on le met à la fin puis on ajoute « ay ». You devient « ouyay ». Par exemple, « You go to the store » devient « ouyay ogay otay hetay toresay. » En parlant argot, on évite de se faire comprendre de tout le monde. » Interview d’Eddie Barefield, cité par Luc Delannoy dans Lester Young • Profession President. « Oomanway, oomanway, oomanway [woman, woman, woman] Ouway urshay eesay oodgay ooshay eemay [You sure is good to me] Eemay oingay ooshay akeshay ooway ackay [I’m going to take you back] Ooshay ennessee esstay [Right back in Tennessee] » Shepard Blues (Pig Latin Blues), Ollie Shepard (1939) transcription : Paul Oliver. PIG MEAT. Viande de porc, viande impure selon les préceptes bibliques, mais appréciée des Négro-Américains. Le terme déborde le terrain culinaire pour devenir pour les Noirs l’une des façons de se désigner : « Look here, papa You don’t treat pigmeat the way you should If you don’t believe that it’s pigmeat Ask in the neighbourhood » Pigmeat Blues, Ardella Bragg (1926).

PIGEON WING Danse du début du siècle : « When them chillun* sick in bed Heard that talk about short’niri bread* Popped* up well and dance and sing Skippin’ roun’, cut the pigeon wing » Shortenin' Bread, chant de plantation recueilli par Alan Lomax, in Folk Songs of North America.

PIMP Mac, souteneur, proxénète : «What makes the rooster Crow every morning before day To let the pimps know That the workingman is on his way » Crowin’ Rooster Blues, Lonnie Johnson (1941). Pour les masses populaires du ghetto, le pimp représente souvent l’archétype du mâle et, comme le remarque Pop Foster, « all the musicians back in New Orleans wanted to be pimps ». C'est le mec affranchi, tiré à quatre épingles, des diamants aux doigts ou enchâssés dans les dents, dont la principale occupation est de se faire voir (pimp strut), de déambuler (voir walk* that walk ou shoot* the agate) et de baratiner (voir talk that talk) : « Most of the pimps were good gamblers also... And Henry Zeno was in* there with them [...] He even had several prostitutes on his staff working for him [...] By that he would handle more cash than the average musician [...] And he was little short dark sharp* cat* and knew all the answers. » Interview de Louis Armstrong in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► MASTER PIMP. Caïd : « Seigneur de la jungle des villes, qui emprunte ses caractéristiques à la fois au milieu dont il est issu et à la société dominante dont il parodie les valeurs sans les rejeter vraiment. Ce redoutable homme d’affaires dispense des plaisirs en échange de sommes importantes. La profession qu’il exerce s’appelle Le (Grand) Jeu [The Game] ou La (Belle) Vie [The Life], A la tête d’une organisation qui rassemble prostituées, clients, entremetteurs, hôteliers, policiers et trafiquants [...] L’orgueil qu’il tire de son succès contribue à accroître sa fierté raciale. Il acquiert ainsi le rayonnement qui distingue le master pimp du petit maquereau et l’érige au. rang de chef dans le contexte du ghetto. » Geneviève Fabre, Le Théâtre noir aux Etats-Unis. ► P.I. Pour pimp, maquereau, mac : « Most of the P.I’s were gamblers and pianists. The reason so many of them were pianists was because whenever they were down* on their luck, they would always get a job and be close to their girls — play while the girls worked. Some of the P.I’s would wear diamonds the size of dimes*. » Interview de Clarence Williams, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

PINCHBACK De pinch-back coat, veston resserré à la taille, en vogue dans le milieu des années 20 (sur ce point, voir monkey- back). Mac, gangster, syn. de hustler* : Pinchhacks, Take ’em Away, Bessie Smith (1924).

PINETOP Surnom des pianistes Joe « Pinetop » Perkins (1913) et Clarence « Pinetop » Smith (1904-1929), auteur du célébrissime Pine Top’s Boogie Woogie. « Now I cook her breakfast Even carry it to her bed Now she take one bite Threw the teacup at po’ Pine Top’s head » Pine Top Blues, Pine Top Smith (1928).

PINOCHLE Jeu de cartes : « I had a friend named Campbell He used to steal and gamble He made his living cheating all the while ; He played a game they call euchre*, Pinochle and poker, He thought he was the smartest dude* in town » He’s in Tlx Jailhouse Now, Jim Jackson (1928).

PIZEN Déformation de poison, poison. ► Alcool. ► V. Se bourrer la gueule, se soûler; empoisonner : « Gettin szok* and tired o’ the way you do Kind mama, gonna pizen you Sprinkle goopher dust* ’round your bed Wake up in the morning, Find your own self dead » Strut That Thing, Cripple Clarence Lofton (1935).

PLAY Jeu. N’importe quelle action mais plus particulièrement bagarre, dispute, joute verbale (voir dirty* dozens'). Intrigue, ruse, complot (années 30-40) : « I’ve been there but one day And I learnt a ding* dong play Prisoner for ever Tomorrow gonna be a long hot day » Bom in Missouri, Magic Slim (1976). 433. PLAY (ONE’S) ASS OFF. Voir ass. 434. PLAYBOY. Viveur, noceur ; maquereau : « I used to be a playboy I played out both night and day But since I met miss (Lamar?) She have made me change my ways » Caught The Old Coon at Last, Memphis Slim (1941). * Surnom du guitariste de blues Edward « Eddie » Taylor (1923) : Big Town Playboy, Eddie Taylor ( 1955). 435. PLAY (SOMEONE) CHEAP. Voir cheap. 436. PLAYER. Homme à femmes; mac. S’est substitué aux termes anciens en usage dans les campagnes sweetman, skirtman ou eastman. 437. PLAY FOR THE DOOR. Pour un musicien jouant en club, jouer à la recette : « Quand on dit “jouer pour la porte”, cela veut dire que vous récoltez les droits d'entrée. Je me rappelle une his- toire que [Earl] Hooker m’avait racontée [...] L’arrangement avec le patron du club, c’était vingt dollars en fixe plus la “porte”. [...] Le patron vient voir Hooker à la fin du spectacle et lui dit : “J’ai pas grand’ chose pour vous.” Hooker lui dit : “Hé, mec, j’ai vu des gens debout ce soir, vous avez récolté plus que ça à la porte, vous me devez plus que ça”, et le patron du club lui dit : “Vous étiez d’accord pour jouer pour la porte, et voilà tout ce qu’on a récolté.” Hooker s’est dit qu’il fallait qu’il fasse quelque chose et il dit au type, il lui dit : “M-m-mec, tu l’as dit, je jouais pour la porte.” Hooker m’a raconté qu’il était allé avec plusieurs des gars de l’orchestre, et ils ont démonté la porte. » Interview de Herb Turner par Sebastian Danchin (1984), citée in Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto. ► PLAYHOUSE. ® Maison de jeu : « I can’t keep open, I’m gonna close the flat* I can’t keep open, I’m gonna close the shack* The chief of police tore my playhouse down No use in grievin’ I’m gonna leave this town » Good Time Flat Blues, Maggie Jones (1924). @ V. Faire la java, la bringue : « Listen to me baby what I’m talkin' about Come on back to me little girl So we can play some house Now baby, come, baby come Come back, baby come Come back baby I wanna playhouse with you » Baby Let's Play House, Arthur Gunter (1955). ► PLAY PARTY. « Lorsqu’il s’agissait de marquer la rentrée des récoltes, l’achèvement d’une maison, un mariage, bref n’importe quel évènement qui méritait d’être célébré, on organisait des play parties, fêtes échevelées qui se terminaient seulement lorsque les danseurs s’effondraient, vaincus par l’épuisement et l’alcool. L’orchestre, composé généralement d’un banjo, d’un violon, d’une guitare et d’un vieux piano, jouait inlassablement des ragtimes*... » Paul Oliver, Le Monde du blues. ► PLAY THE BLUES. Voir blues. ► PLAY THE DOZENS. Voir dirty* dozens. ► PLAY THE RACES. Voir races.

PLENTY 438. Syn. de very, très : « When I was down in Georgia I was doin’ mighty* well Since I’ve been here in Chicago I’ve been catchin’ a plenty hell* » Red Beans and Rice, Kokomo Arnold (1937). 439. Bon, terrible, excellent (années 1900- 1940): That’s a Plenty, Sammy Price (1956).

PLUCKING Pour un contrebassiste, jouer en faisant vibrer les cordes, sans les faire claquer contre le manche (ant. : slapping).

PLUNGER Ventouse. Sourdine de caoutchouc utilisée tout particulièrement par les trompettistes pour modifier la sonorité de leur Voir wah ivah.

POCKET KNIFE Couteau de poche, utilisé en guise i bottleneck* : « I used to play with a pocket knife. ox.B noticed sometime the pocket knife - x between my fingers, and 1 just thoux r the bottleneck* myself, you see that car r slip off, can’t go no further up or dowH either, just there. » Interview de Furry Lewis cité par Eric Sackhâm Tlx Blues Line.

POLICY Loterie clandestine également appe.ee numbers* : « I dreamed I played policy And played the horses too I dreamed I win so much money I didn’t know what to do But it was a dream Just a dream I had on my mind And when I woke up, baby Not a penny could I find » Just a Dream, Big Bill Broonzy (1939). ► POLICY RACKETEER. Celui qui tire déficelles et empoche les bénéfices ; le pianiste et chanteur Henry Brown (1906- 1981) fut un temps l’un de ces caïds. ► POLICY WHEEL. Roue servant au tirrx- dans le jeu des nombres : « Cryin’ oh Lord Look what that policy wheel have done to me It done took all my money And still it won’t let me be » Policy) Wheel Blues, Kokomo Arnold (1935). dont le peuple du blues garde la même xe (Red Devil, Fast Mail, Interstate...) : « He said, “Play it mister You see, I’m on* the level That gig* jumped right out in the Red Devil I played it that evenin’ in the Fast Mail Woke up the next morning in the county jail » Policy Dream Blues, Bumble Bee Slim (1935). ! « That gig won’t come out In the Interstate » Policy Blues, Cripple Clarence Lofton (1943). ► POLICY WRITER. Collecteur, celui qui note (writer) les paris dans le policy game er distribue les éventuels gains : « Now look here policy writer I play both night and day You gets my money and then you walk away And if I don't catch policy* I'm gonna lay you low ’cause I'm getting sick* and tired Of you takin’ my dough* » Policy lilnes (You Can't 3-6-9 Me), Albert Clemens (1935).

POLY ANN L'une des petites amies prêtées à John Henry* : «John Henry* had another little woman Her name was Polly Ann John Henry taken sick And he had to go to bed » John Henry, traditionnel.

POND Voir fish in (one’s) pond.

PONY Poney. Dans le cadre de la métaphore ride (chevaucher, baiser), partenaire sexuel ou organes sexuels : « She don't need no saddle* Don’t use no guiding line She’s a rough riding* mama And she treats my pony fine » Hard Riding Mama, Wvnonie Harris (1947). L’une des nombreuses danses sans contact physique entre les danseurs, lancée à la suite du succès du twist : Pony Time, Chubby Checker (1961).

POODLE Caniche. Par analogie, pubis et, par extension, organes sexuels : Let Me Play with Your Poodle, Lightnin' Hopkins (1947).

POONTANG Afr. Du limba puntung, vagin; convergence avec le français « putain ». Sexe féminin. Relations sexuelles d’un Blanc avec une Noire : Poontang, T. Bone Walker ( 1968).

POOPED Vanné, crevé, « H.S » : Too Pooped to Pop, Chuck Berry (1959).

POOR LAZARUS « Pauvre Lazare », voleur, héros de la ballade du même nom, populaire parmi les chanteurs de minstrels et les condamnés dans les pénitenciers du Sud : « High sheriff, he toi’ the deputy, he says “Go out and bring me Lazarus Bring him dead or alive Wo, Lawdy*, bring him dead or alive” » Po’ Lazarus, recueilli par John et Alan Lomax et cité dans Folk Sungs of North America.

POP Jouir, planer : Too Pooped to Pop, Chuck Berry (1959). Surnom du guitariste et chanteur de gospel et de soul music Roebuck « Pop » Staples (1915).

POPS Terme familier, affectueux, à l’adresse d’un ancien (dans les années 30 et 40, poppa stoppa). Surnom du contrebassiste George Murphy Foster (1892-1969) et l’un de ceux de Louis Armstrong (1898-1971) : « Louis Armstrong came to that concert and stopped to visit me backstage. He said : “You’re cutting* the fool up there, boy. Showing your «ss*.” 1 said : “Aww, no, Pops.” » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

PORK CHOP Côtelette de pore. Façon de s’interpeller entre Noirs. Désignait à l’origine un Noir aux attitudes serviles, un « oncle Torn ». Pork Chop music : au début du siècle, style de jazz barrelhouse au rythme lent. LITTLE PORK CHOPS. L’un des nombreux pseudonymes utilisés par John Lee Hooker pour ses enregistrements.

PORK GRINDER Voir grinder.

PORK PIE HAT Chapeau rond et aplati. Autre surnom, avec « Prez », du saxophoniste Lester Willis Young (1909-1959) : Good Bye Pork Pie Hat, Charles Mingus (1959).'

PORO Société secrète de l’Afrique de l’Ouest. Marque de cosmétiques populaires dans les années 20 : Sweet Smellin’ Mama (Poro Blues), Lizzie Miles (1923).

POT 1. De pod (cosse, gousse), marijuana : « When I came to New York, in 1937, I didn’t drink nor smoke marijuana. “You gonna be a square*, muthafucka’*.” Charlie Shavers said and turned me on smoking pot. » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop. 2. Vagin. Femme. ► POT-HOUND. Drogué : « I work hard from monday Until late Saturday night And you’s a dirty mistreater* You ain’t treat me right And I’m through cookin’ your stew and beans And you’s a dirty pot-hound Dirtier than any man I’ve seen » Pot Hound Blues, Lucille Bogan (1929).

POTATO Pomme de terre. 440. Mec, type; petite amie, jeune fille. 441. (Ou sweet potato). Au sens figuré, organes génitaux : « If you don’t like my sweet potato What made you dig so deep Dig my potato field Three or four times a week » You’ll Never Miss You Jelly ’till Your Jelly Roller Gone, Lil Johnson (1929). ► POTATOES. Fric, pognon, oseille. ► BIG POTATO. Voir big* dog. ► DIG POTATOES. Litt. : arracher des patates. Faire l’amour, baiser : Diggin’ My Potatoes, Washboard Sam (1939). ► MASHED POTATOES. Voir mashed.

PREACH Prêcher : « Hallelujah Joe ain’t preachin’ no more Everybody thought he was true When he preach that song about what you gonna do Hallelujah Joe ain’t preachin’ no mo’ He’s swingin’* now so he ain’t gonna preach no mo’ » Hallelujah Joe Ain’t Preachin' No More, Harlem Hamfats, vcl par Joe McCoy (1937). ► PREACHER. Prédicateur: « Le preacher tonitrue dans une ascension rythmée et swinguante, modulant dans une psalmodie incantatoire, exhortant les fidèles, mettant certains d’entre eux en transe [voir get religion*], provoquant les témoignages et les confessions publiques [voir testify] et enchaînant brusquement avec les spirituals ou les gospel* songs. » James Lincoln Collier, L'Aventure du jazz. La tradition laïque du blues assirae volontiers le preacher à un voleur « Now some folks say A preacher won’t steal I caught two in my watermelon fie : They was eating them watermelons I Throwing away the rinds » Come Along Little Children, Poor Jab (19321 1 Ou à un coureur : « See that preacher walking down the street He’s fixing* to mess* with every he meet » Preacher Blues, Hi Henry Brown (1932). Bluesman et preacher participent i mêmes fonctions sociales : « The bluesman is like a preacher. H delivering a message. » Joe Hughes cité par Alan Govenar dans Meezrrr Blues. Comme le note Charles Keil, ils ont ] but « d’accroître le sentiment de sc rité, de remonter le moral et de renfc le consensus au sein du groupe ». ► PREACHING. « Terme impossible à traduire, sui pas par sermon ou prédication : le / ching est une scansion incantatoire, mée, swinguée, théâtrale, musicale laquelle \epreacher fait revivre, devt congrégation qui participe pleinen un épisode de la Bible, des Evangiles bien un évènement politique ou lie l’actualité. » Maurice Cullaz, in Jazz Hot n° 373- Un prêche atteignant une grande inten-tt est un graty sermon, et un preacher entca- nant une telle adhésion un graty trax preacher ou un soul* jerker : « Le sermon rythmé arrache les as- approbatifs d’une foule qui piétine sur place [voir shuffle], se balance, frarçe dans ses mains le contretemps, tar _» que naît progressivement de l’assistacct un chant de masse spontané, élétr e» taire, où s’entrechoquent sacs et restas jusqu’à un ultime orage. » Lucien Maison, Histoire du jazz et de la nusizut afro-américaine. Dans le cas contraire, lorsque le preacœ veut dire les choses tout en finesse, z n. des fioritures, be styles out. L’art du preaching a influencé conskfe- rablement les grands solistes de jazz.

PRES (Prez) Surnom du saxophoniste Lester W._. Young (1909-1959) : « Dans notre pays, les titres de rois, æ comtes ou de ducs [Voir King, Cotati Duke] ne veulent pas dire grand- chose Le grand homme du moment, c’était Franklin D. Roosevelt et il était le Président. Je commençai donc à appeler Lester “Le Président”. Ce nom abrégé donna “Près” mais il signifie toujours ce que je voulais qu’il signifie, le plus grand bonhomme du pays. » Billie Holiday et William Dufty, Lady Sings The Blues.

PRETTY Joli. Devant un adjectif, équivalent de very : vachement, rudement, sacrément : « We had quite a few harmonica players back then that were pretty damn good... they had more weight, more tone. » Interview de Big Leon Brooks, cité sur le disque Living Chicago Blues, volume 5- ► Surnom du batteur Bernard « Pretty » Purdie (1939).

PRINCE AI,BERT Surnom du saxophoniste Albert Omega «Al» Sears (1910-1990): «J’avais entendu Helen [Humes] pour la première fois lors d’un de nos galas à Cincinnati. Elle travaillait alors au Cotton Club local du Ferguson Hotel avec une petite formation placée sous la direction d’Al Sears, un saxophoniste connu aussi sous le sobriquet de Prince Albert qui devait quelques années plus tard prendre chez Duke* la place de Ben Webster. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues.

PRISON FARM Voir county* farm.

PROFESSOR Professeur. 442. Personne cultivée. 443. Pianiste, spécialement s’il a étudié la musique (s’oppose alors au pianiste autodidacte jouant dans les barrelhouses) : « All the highest class landladies had me for “professor”, if they could get me — Willie Piazza, Josie Arlington, Lula White, Antonio Gonzales, , and Gypsy Schaeffer, the biggest-spending landlady. » Jelly Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. ► PROF. Surnom de l’altiste Henry Buster Smith (1904-1991) : • Herschel [Evans] et Buck* [Clayton] nous ont aussi trouvé un nouvel alto quand Buster Smith a décidé de nous quitter. J’ai l'impression que Prof ne pensait pas que nous arriverions à nous imposer au plus haut niveau. Quoi qu’il en soit, quand Claude Hopkins, qui passait par Kansas City, lui a proposé un poste dans son orchestre, il a accepté. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. • PROFESSOR LONGHAIR. Pseudonyme du pianiste et chanteur louisianais Henry Roeland Byrd (1918-1980) : « We were playing at the Caldonia Inn. We had Big Slick on drums*, Apeman Black on sax, and Walter Nelson on guitar. We had long hair in those days and it was almost against the law. By teachin’ these fellows, Mike [Tessitore, propriétaire du club] says, “I’m going to keep this band, we’ll call you Professor Longhair and the Four Hairs Combo*”... » Interview de Professor Longhair cité par John Broven dans Walking to New Orleans.

PROJECT Projet d’intérêt public mené dans le cadre du New Deal : « Well I’ve got to get some money I want to buy me a V-8* Ford Well well 1 want to ride this new highway That the project just completed in a week ago » Project Highway, Sonny Boy Williamson (1937).

PROMISED LAND La Terre promise. Le concept peut faire référence soit au Paradis, soit aux Etats du Nord : « Lord don’t you know, 1 have no friend like you If Heaven is not my home. Oh Lord what shall I do Some have forsaken me, Heaven when I die I’m on my way, back to the Promised Land » Lord Don’t You Know I Have No Friend Like You, Stovepipe N.I (1924).

PROWL Etre en quête d’une proie. Verbe qui, associé en général à ground hog, s’applique à l’homme en quête d’une aventure amoureuse : « I’m a prowlin’ ground hog And I prowl the whole night long I’m gonna keep on rootin’*, baby Until the day 1 die » I’m a Prowlin' Ground Hog, Roosevelt Charles cité par Harry Oster in Living Country Blues.

PRUNETANG Goût de pruneau. Probable masque de poontang* : « She says “Taste this brand new drink You'll like it” Ooh wee, I love that stuff* That drive me insane [Refrain] I love that stuff Give me some prunetang If you want get along with me » Prunetang, Chuck Higgins (ca 1973/74).

PUNK ► Moche, mal fichu. ► Terme injurieux, tête de lard, tocard, tordu. ► Voyou. ► Homosexuel : « They called me sissy*, punk, freak* and faggot*. If I ever went out to friends’ house. On my own, the guys* would try' to catch me, about eight or twenty of them together. They would run me. » Interview de Little Richard cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard.

PUSHING OFF Voir bammering-on.

PUSSY Pussy, qui littéralement signifie « minet », « chaton », par le même détournement que subit en français le mot « chatte », renvoie lui aussi au sexe féminin (forme masquée : poly-nussy) : « You can play with my pussy But please don’t dog* it around If you goin’ to mistreat* it No pussy will be found » Pussy Cat Blues, Jane Lucas (1930). Femme, en tant qu’objet sexuel. Lâche, poltron, dégonflé.

PUT (someone) IN THE ALLEY Voir alley.

PUT (someone) IN THE DOZENS Voir dirty* dozens.

PUT DOWN Laisser tomber, abandonner : « I do all the hard work An’ my boss takin’ all the money That’s why I got to leave this country, boy Lord, and got to (?) town You know, I got to leave this countr- -• ■ Lord knows that I’ve got to put it do»7 - Cotton Picking Blues, Son Seals (1973)- Mais plus généralement en parlant c- relations avec autrui : « Tell me tell me baby What is this hear About you putting me down For someone new » I Would Hate to See You Go, John Brim (195c 9 ► Mépriser, se foutre de la gueule ■ quelqu’un, le charrier (voir dir—*i dozens) : « Stop the things you’re doing Dig up, 1 ain’t jivin'* I can’t stand this foolin'* around I can’t stand no puttin’ me down I put a spell on you, because you ’re 1 mine » I Put a Spell on You, Screamin’ Jay Hawkins (lSi=H Put down est devenu put on dans ■ bouche des hoppers.

PIT OUT Mettre à la porte, foutre dehors : « Yes if you’ve ever been mistreated' You know just what I’m talkin’ abcxx j I worked five long years for one woman She had the nerve to put me out » Five Long Years, Eddie Boyd (1952).

PUT WATERS ON 444. Chialer: « Did you ever go home An’ miss your good gal* gone See the letter on your table An’ got your waters on, Lord You don’t know, sure don’t know my mind When you see me laughing I’m laughing just to keep from cryin’» Honey>, You Don't Know My Mind, Barbecue 5 - (1927). 445. Pisser, « lâcher les vannes » (de trouile ou d’émotion) : « I'm gonna tell you all women And to please understand Don’t start no 3-6-9* with my man 'cause if you do it ’ll surely go wroqg I got a 44* that ’ll put your waters CE Now, must I holler No, I ’ll shave* ’em dry » Neu Shave 'em Dry, Lil Johnson (1936). Q

Q.T. (On the) Voir on the Q.T.

QUACK Coin-coin. ► Couac produit par un instrument à vent; le procédé fut très utilisé par les saxophonistes hurleurs (voir honker). ► Charlatan : « I’m a snake doctor* man Got my medicine, I say, in my bag I mean to be real doctor man And you know I don’t mean to be no quack » Snake Doctor Blues, J.D. Short (1932). ► Homosexuel.

QUART Quart, « pot » (de vin ou d’un autre alcool) : « 1 met a girl last night We went out for a good time, We went to a club at Eighteenth* and Vzwe* She drank five quarters of beer And I shook my head She ordered five more quarts » She belt so Good, Jimmy McCracklin (1953).

QUARTET Petite formation de quatre musiciens (le terme le plus fréquent restant cependant four) : Golden Gate Quartet. Dans certains cas, le terme peut désigner un ensemble de plus de quatre voca- listes dans la mesure où seules des harmonies à quatre voix sont chantées.

QUEEN Jeune beauté (années 30-40). (Ou drag queen.) Homosexuel (années 50). • Surnom de la chanteuse de blues « Queen » Sylvia Embry (1941-1992).

QUESTIONNAIRE (Questionna^) Papiers de mobilisation dans l’armée : « Uncle* Sam will send you your questionnaire What in the world are you gonna do? Well, you know you got to go No need of feelin' blue* » Million Lonesome Women, Brownie McGhee (1941).

QUILLS ► Dans l’argot noir, sorte de flûte de pan (adepte : Henry « Ragtime » Thomas, ca 1874-1930). ► Sifflet d'une locomotive à vapeur.

QUIT Rompre, quitter, se séparer de : << You never tell What’s on a country man’s mind He 'll be huggin' and kissin’ you But quittin’ you all the time » Mama's Got The Blues, Sara Martin (1922). ► QUIT THE SCENE. Litt. : quitter la scène. Partir, se casser, mettre les bouts ; décéder. R

R and B (R n’ B) Voir rhythm* and blues.

RABBIT Lapin. L’un des animaux les plus importants du folklore négro-américain : rusé, voire tricheur, il sait toujours se sortir à son avantage de tous ses démêlés avec des animaux beaucoup plus forts. D’où symbole du Noir : « The black man in America knows he’s just like the rabbit. He’s the victim for every damn thing that comes along. The fox is looking for him; the wolf is looking for him ; the man is looking for him. Everybody keeps him on the run to survive. » Interview de Willie Dixon par Robert Neff et Antony Connor in Blues. • Surnom du bluesman Richard « Rabbit » Brown (ca 1880-1937) et du saxophoniste John Cornelius «Johnny » Hodges i 1906-1970) à cause de son amour immodéré des sandwichs à la laitue : «Duke* [Ellington] had a penchant for pinning nicknames on those most closely associated with him, usually nicknames that stick. Thus, Freddy Jenkins, the little trumpet player who held the uninhibited spot in the band later graced by Ray Nance, became Posey. Johnny Hodges, also star now out on his own, still is called Rabbit by those closest to him. » Interview de Louis Metcalf, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► DON’T PAY SOMEONE NO RABBIT FOOT. Litt. : ne pas payer des pieds de lapin à quelqu'un. Ignorer, dédaigner quelqu’un. BRE’R RABBIT. Pour Brother Rabbit, frère Lapin. Personnage important de la tradition orale négro-américaine depuis la période esclavagiste. C’est l’archétype du « mauvais nègre », filou, celui qui préfère embobiner ses interlocuteurs, employer la ruse et la manipulation plutôt que de les affronter de face (sur ce point, voir dirty* dozens'). Il trouve son prolongement moderne dans le personnage du «signifying monkey » (singe vanneur). ► JACK-RABBIT. Sorte de lapin géant, emblème du Texas ; « Yellow* woman Make a preacher* lay his Bible down Jet black* woman Make a jack-rabbit hug a hound » I’m All Out and Down, Leadbelly (1935).

RACE RECORDS Séries de disques spécialement destinés à la clientèle noire (années 1922-1940). Le terme apparaît pour la première fois en janvier 1922 avec la marque Okeh; le terme est alors très en vogue parmi les militants et la presse noirs. C’est le succès du Crazy Blues enregistré par Mamie Smith en 1920 qui révéla aux compagnies de disques le formidable marché représenté par la clientèle noire. Vers la fin des années 10, en effet, les ventes de disques ne cessaient de baisser à cause de la concurrence de la radio alors en pleine expansion (entre 1921 et 1925, le marché annuel du disque passe de 51 à 20 millions de dollars); ce nouveau marché constituait donc une opportunité inespérée que saisirent toutes les compagnies : Columbia d’abord dès 1921 (série 16 000), Black Swan et Paramount l’année suivante, puis en 1923 Victor avec sa célèbre série Bluebird. Elles recrutèrent des agents (voir talent* scouts') chargés de découvrir de nouveaux chanteurs et dès le milieu des années 20, cinq à six millions de disques sont vendus annuellement à la clientèle noire. Ils étaient mis en vente non seulement dans les magasins spécialisés mais aussi dans les saloons, les drugstores ou les salons de coiffure... Après la Deuxième Guerre mondiale, lorsqu’il leur apparut que le terme de race music, maintenant à connotation raciste, pouvait constituer un frein commercial, les compagnies lui cherchèrent des substitutifs, et les dénominations ebony (MGM), sepia (Decca, Capitol) firent leur apparition, avant que le terme de rhythm* and blues, d’abord adopté par RCA Victor, ne s’impose à la fin des années 40 (juin 1949 en ce qui concerne le Bilboard). RACES Courses hippiques. L’expression play the races signifie souvent dans le parler noir le fait de jouer aux « nombres » (voir numbers') : « I go on, Go on plaving the races all the time Dreamed a number all the last night Yes yes, and my baby did the same My baby got up this morning And she played it just the same My baby takes all my money Put it all on 5-6-2 » Playing The Races, John Lee Hooker (1946).

RAG Chiffon. A l’origine, syn. de danse: « Negroes call their clog dancing “ragging” and the dance a “rag”, a dance largely "shuffling*". The dance is a sort of frenzy with frequent yelps of delight from the dancer and spectators and accompagnied by the latter with hand clapping and stomping* of feet. » Chaff, Ethiopian Glee Book (1849), cité par Rudi Blesh et Harriet Janis dans All Played Ragtime. Morceau se rattachant à la tradition du ragtime* : « Grab your gal*, fall in line While I play this rag of mine » Too Tight Blues, Peg Leg Howell (1927).

RAGTIME Style musical, essentiellement pianis- tique, probablement apparu dans la région de Saint Louis vers la fin de la guerre de Sécession ; il domina largement la musique populaire américaine entre 1880 et 1915- Comme le note Reimer Von Essen (in Une histoire du jazz) il s’agit là certainement de « la forme la plus européenne de la musique afro-américaine issue d'une application des techmcJ musicales noires aux formes popularSeJ de la musique de salon européenne a cette époque, marches, polonaises, p ‘ J» quadrilles ». Les principaux représenta» de ce style, Scott Joplin (Maple Leaf r J 1899), Tom Turpin, Louis Chauvin, E_’® Blake et Scott Hayden, sont issus dt a bourgeoisie noire cultivée. « Ragtime is a certain type of syncopao» and only certains tunes can be playec ir this idea. But jazz* is a style that car tt applied to any type of tunes. I stars» using the word in 1902 to show peccel the difference between jazz and t» time. » Jellv Roll Morton, cité par Alan Lomax dans MBBl Jelly Roll. 2. Transposé à la guitare, le style abandonna la stricte structure musicale tju caractérisait le ragtime « classique • e devint caractéristique des bluesmen de k côte est, Blind Blake ou Blind Wiüt McTell en particulier : jeu syncopé, a tempo rapide, sollicitant souvent la pn- gression d'accords do-la-ré-sol-do, avec une ligne de basses en contrepoint d’une ligne mélodique jouée sur les corde» aiguës. • Surnom du songster* Henry « Ragtime » Thomas (ca 1874-1930).

RAILROAD BILL Surnom d’un certain Morris Slater, Nor de l’Alabama, qui, après avoir abattu ua ’ shérif en 1893, vécut en hors- la-loi, dévalisant les trains de marchandises pour redi- tribuer le produit de ses vols aux pauvres Blancs et Noirs confondus. Il fut abattu fe 7 mars 1897 à Atmore, Alabama. Sa popularité fut très grande dans les Etats du Suc et la ballade qui lui est consacrée comporte plusieurs dizaines de couplets « Railroad Bill ought to be killed Never worked and he never will Railroad Bill done took my wife Threatened to kill me That he would take my life » Railroad Bill, Will Bennett (1930).

RAISE HELL (Cain/Sand) ► Faire du tapage ou de l’esclandre, foutre (volontairement) le bordel. ► Se chamailler, faire une scène, chercher des crosses : « Now my woman she got ways Just like a wild cat in the woods Sure we’ve raised a hell And disturbance right here in my neighbourhood » ¿to/ Luck Blues, Kokomo Arnold (1938) « Said a woman act funny* Quit* you for another man She ain’t gon’ look at you straight But she’s always raisin sand » Got The Blues, Blind Lemon Jefferson (1926). « You're always squawking 'bout some lovin' Raisin' Cain ’bout turtle dovin' Come on now, so there’ll be no shovin’ Come and get it » Come and Get It, Fats Waller (1941).

RAM Défoncer avec un bélier. Baiser (depuis le xvme) : « I'm a ramrodding daddy* 1 stays up on Main Street I keep my gun loaded For every good-lookin’ woman I meet » Ram Rod Daddy, Bo Carter (1931).

RAMBLE ► Vagabonder, faire la route : « I have been prowlin’* and ramblin' Ever since I was twelve years old And I wouldn’t stop ramblin’ For all my weight in gold » Prowling Nighthawk, Robert Nighthawk (1937). ► Elément du titre de morceaux généralement rapides : Muskat Ramble, Louis Armstrong (1926). • Surnom du bluesman Willard « Ram- blin » Thomas (ca 1902-ca 1940). ► RAMBLER. Vagabond : « I’m known as the rambler I’m known in every man's town » Rambler's Blues, Lonnie Johnson (1942).

RAMPART STREET Rue de Storyrille*, célèbre quartier de La Nouvelle-Orléans, Louisiane : « Going down to New Orleans Gonna go down on Rampart Street Until I find my baby I’m gonna ask every soul* I meet » New Orleans Blues, Charles Brown (1946).

RAMSEY «Ramsey State Convict Farm», ferme- pénitencier située à Otey, Texas : « I’m going to tell you ’bout my hammer Well, ’bout a-killing me, hammer I says the captain* is gone to Houston He’s coming back by Ramsey » Chant cité par Harold Courlander dans Negro Folk Music.

RANK Ruiné, fauché : lust a Rank Stud, Sweet Pease Spivey '(1936).

RAP ► Discours charmeur, enjôleur d’un homme à une femme, bagout, baratin, tchatche. On parle de silent rap (ou shody- doo) lorsque le dragueur n’exprime son désir que par des gestes et des mimiques. Par extension, long monologue, discours : « Even then brothers would sneak to their tents To hear Corey* get* on down He often drew crowds by his out-of-sight* rap Seemed everyone can dig* what he say » Corey' Died on The Battlefield, The Wild Magnolias (1970). ► Baratin visant à mener son interlocuteur en bateau (voir dirty’* dozens). ► Condamnation à une peine de prison. ► V. Baratiner: « Now don’t you hear me, mama Howling at your door But if you give me what I want Mama, you won't hear me rap no more » Howlin' Tom Cat Blues, Mississippi Sheiks, vcl par Bo Carter (1934). ► Style musical des années 80, issu du rhythm* and blues, et, pour son style verbal, aussi bien de Tart du preaching que de celui, profane, des dirty* dozens. Les associations poésie-jazz opérées par « The Last Poets » dans les années soixante en constituent une sorte de préfiguration. Le rap est la version américaine du dub jamaïcain. 446. TAKE TUE RAIL Payer les pots cassés : Gonna Take My Rap, Jazz Gillum (1947). Ant. : beat the rap, s’en tirer. « He was a big man and a real bully [...] killed is brother-in-law, and then, beat the rap. » Interview de Johnny Saint-Cyr, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

RUSHAN Surnom du saxophoniste Roland Kirk (1936/1977) adopté après qu’il en a eu la révélation dans un rêve.

RAT 447. SMELL A RAT. Flairer quelque chose, se douter de : « I think I smell a rat in my house Baby, I believe you got just too late, Aw, I smell a rat, I smell a rat in my house, Honey, I think you walkin’ ’round too late You know I need a rat in my house like this now Just like I need a hole in my head » 1 Smell a Rat, Buddy Guy (1979).

RATTLE Cliqueter. Dans le prolongement de la métaphore de rattlesnake, (crotale; amant), baiser. ' « I can rattle to the left, rattle to the right My woman says “I believe my rattlesnakin’ daddy* can rattle all night’” ’cause I’m a rattlesnakin’ daddy I’m a rattlesnakin’ daddy Wants to rattle all the time » I'm a Rattlesnakin’ Daddy, Blind Boy Fuller (1935). ► RATTLESNAKE. Serpent à sonnettes, symbole phallique : «Just like a rattlesnake I sting*, mama Lordie, every mare* in this world I ain’t gonna have no job*, mama Rollin’* through this world » Rattlesnake Blues, Charlie Patton (1929).

RAZOR BALL (Drill) Voir ball.

READY Prêt. Dans le coup, au parfum, affranchi : « I’m drinkin’ TNT* I’m smokin’ dynamite I hope some screwball* start a fight 'cause I'm ready Ready as anybody can be I’m ready for you I hope you're ready for me » I’m Ready, Muddy Waters (1954). REAL Vrai, authentique, sincère (années 40-60) : Are You Real? Art Blakey et The Jazz Messengers (1958). ► REAL MCCOY. Celui qui a de la classe; le fin du fin, quelque chose de véridique, d’authentique : « When Uncle* Sam called me I knowed I’d be called the real McCoy When I got in the army They just call me soldier boy » / Wonder When I'll Get to Be Called a Man, Big Bill Broonzy (1956).

RED Rouquin, surnom traditionnel des Noirs albinos. Surnom du trompettiste Henry « Red » Allen (1908-1967), du bassiste George « Red » Callender (1918), du saxophoniste Wilbert « Red » Prysock (1926), des pianistes William « Red » Garland (1923- 1984), Rufus (1892-1973) et Willie (1913) Perryman alias respectivement « Speckled Red » et « Piano Red », Vernon Harrison alias « Boogie Woogie Red » (1925) ou des guitaristes Iverson Minter (1936) alias « Louisiana Red » et Hudson Woodbridge alias « Tampa Red » (1903-1981) : Rockin’ with Red, Piano Red (1950). Jump Red Jump, Red Prysock (1954). Speckled Red Blues, Speckled Red (1956). Premier surnom du saxophoniste Lester Young (1909-1959) en raison des plats néo-orléanais à base de piment qu’il affectionnait tout particulièrement : « Finalement Fletcher [Henderson] est sorti — il y avait des tas de gars dehors — et il a répété sa question : “Vous n’avez donc pas de ténor à Kaycee*? Y’a aucun de vos enfoirés qui soit capable de jouer?” Il a pas arrêté de balancer ce genre de vannes. Il y avait bien Herschel Evans, il était avec moi, mais lui, il ne pouvait pas lire une partoche. Alors tous ces enfoirés autour n’ont pas trouvé mieux que de crier “Red”, on m’appelait comme ça, “Red, allez Red, vas-y et empoigne ce foutu saxophone...” » Interview de Lester Young par François Postif, in Jazz Hot n° 363. ► RED BEANS AND RICE. Haricots rouges et riz, plat typique de la cuisine noire : Dem Red Beans and Rice, Roland Kirk (ca 1972). ► RED CAP. Casquette rouge. Porteur (dans une gare) : « Say, mister red cap porter, help me with my load Red cap porter, help me with my load ’fore your steamboat captain let me get on board » Florida Bound, Edward Thompson (1929). ► RED FLANNEL. Flanelle rouge, tissu préféré des hoodoo* men pour la préparation des mojo* hands : « Il [Buddy Bolden] buvait tout le whisky qu’il pouvait trouver, ne portait jamais ni col ni cravate, laissait voir sa chemise grande ouverte pour permettre aux femmes de voir sa flanelle rouge, et s’en payait toujours une tranche.» Jellv Roll Morton cité par Man Lomax dans Mister Jelly Roll. « She had red flannel rags Talked about hoodoom’* poor me » Chant de Whistling Alex Moore cité par Paul Oliver, dans Conversation with The Blues. ► RED HOT. Bandante, volcanique : « Men they call me oven They say I’m red hot. They say I got something The other gals* ain’t got » Jacksonville Blues, Nellie Florence (1928). ► RED LIGHT. La lanterne rouge, enseigne des bordels : « En fait, cette histoire de lanterne rouge, ça remonte à Kansas City, à l’époque où les trains de marchandises se formaient à longueur de nuit. Les serre-freins, qui trimbalaient leur lanterne de fonction, l’accrochaient devant les bordels voisins qu’ils honoraient de leur clientèle, et les contrôleurs du trafic savaient ainsi où il fallait frapper pour prévenir les gars qu'il y avait un convoi en partance. C’est de là qu’est venue la lanterne rouge comme enseigne des bordels. » Nell Kimball, Les Mémoires de Nell Kimball. Selon d’autres sources, l’origine de cette expression serait liée à l’histoire de Story- ville où les tenancières payaient d’importants pots-de-vin pour obtenir la protection des autorités; le lundi soir, une lanterne rouge était accrochée à la porte pour signifier que le bribe money (pot-de- vin) était prêt... D’où red light district, quartier réservé, et red light house, claque, clandé. ► RED NIGGER. Voir nigger. ► RED RIVER. Rivière qui marque la frontière entre l’actuel Oklahoma et le Texas, et de façon symbolique, entre la liberté et l’oppression (le Texas était esclavagiste) : « I was way up Red River Crawlin’ on a log I think I heard the Bob Lee* boat When she moaned » Hammer Blues. Charlie Patton (1929). ► RED TOP. Le capuchon rouge qui orne le goulot des meilleures bouteilles de champagne : Red Top, Gene Ammons (1947). ► RED WAGON. Voir wagon. ► REDNECK. Litt. : cou rouge. Blanc (à l’origine, petit Blanc du Sud) : « Elvis Presley was due to be coming into that town a couple of weeks later, and the police told [Little] Richard, “If you see that guy Elvis Presley, tell him we’re gonna lock him up too, cos’ he has long hairs’.” Real rednecks. » Chuck Connor, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard.

REED Instrument à anche : Rockin’ The Reeds, Big Jay McNeely (1983). • Surnom du chanteur de blues et saxophoniste Aaron Corthen alias AC. Reed (1926) depuis ses débuts dans l’orchestre du guitariste Earl Hooker qui utilisa la ressemblance existant entre le style vocal de son chanteur et celui de l’une des vedettes du blues de l’époque, Jimmy Reed : «J’ai simplement repris le “Reed” quand j’ai commencé vraiment à jouer de la musique, et j’ai commencé à m’en servir. C’était Hooker qui m’avait dit de le faire, c’est lui qui me l’a fait faire. Ça devait être au début des années 50, il m’appelait Little Jimmy Reed, c’était avant que je fasse des disques. » Interview d’AC. Reed par Sebastian Danchin (1983), in Earl Hooker, vie et mort d’un héros du ghetto.

REEFER Joint : « All you do is drink moonshine* I believe you smoke reefers too You don’t care* what you do » Low Down Woman. Washboard Sam (1937). ► REEFERHEAD. Adepte, fumeur de marijuana.

REEL Danse en tempo rapide, d’origine irlandaise. Pour les Noirs après l’émancipation, toute musique au rythme marqué : « Bien sûr, nous jouions beaucoup de ce qu’on appelle le blues maintenant, sauf que quand nous le jouions, on n’appelait pas ça le blues, on appelait ça le reel. » Interview de Fred McDowell, cité par Bruce Cook dans Listen to The Blues.

REET (Reat, root) Corruption de right, bon, excellent, au poil, ou d’all right, oui (années 30-40) : « She’s too shin, she’s too tall She's in the groove* And right on the ball* She’s reet, petite and gone* » Reel, Petite and Gone, Louis Jordan (1947).

REGULAR Comme en français, la «régulière», l’épouse ou la maîtresse attitrée : « It seems cloudy, brown* I believe it’s going to rain Going back to my regular ’cause she got everything » Cloudy Sky Blues, Barbecue Bob (1927).

RELIGION (Get) Lors d’un office religieux, danser, crier, entrer en transe pour proclamer son repentir : « Well I’m gonna get religion And learn how to pray I need help so bad Lord, and Lord is the other way » Hard Luck Blues, Little Milton (1966). RENT ► Loyer, terme : « Did you ever dream lucky Wake up cold in hand* And didn't have a dollar To pay your house rent, man » Haven't a Dollar to Pay Your House Rent, Genevieve Davis (1927). ► Mais rent, signifiant aussi accroc, déchirure, fente, peut donner lieu à des jeux de mots bien dans la tradition du blues : « Like the landlady Asked you about the back rent [loyer en retard ou... raie des fesses] You told her “No I ain’t no front rent” » [loyer d’avance ou...] Chicago House Rent Part)’, Memphis Slim et Willie Dixon (1959). ► RENT PARTY. Soirée donnée par quelqu’un afin de recueillir l’argent nécessaire au paiement de son loyer ; les invités payaient pour la nourriture et la boisson, quelquefois pour l’entrée : « A Harlem comme dans tous les ghettos des villes du Nord, le seul moyen pour bien des Noirs de pouvoir payer les loyers excessifs de leurs appartements consistait à organiser des soirées où les invités apportaient leur quote- part. Le pianiste était chargé d’attirer les gens dans un bar, un café ou l’appartement lui-même, grâce au dynamisme de son jeu et les meilleurs pianistes se faisaient entendre de très loin. Il était donc important que le piano ait une sonorité “de bastringue” et il était même parfois traité avec des journaux que l’on plaçait derrière les marteaux ou de l’étain dont on recouvrait les feutres pour obtenir l’effet désiré. » Eileen Southern, Histoire de la musique noire américaine. « Back in those old house rent party days We didn’t make no money But we had a lot of fun » Chicago Rent Part)’, Memphis Slim (I960). Cette pratique devint, sous différentes dénominations — blue monday party’, breakdown, callico hop, chitterling rags, gouge, house hop, house shout,juggle and struggle, kado, parlor social, percolator, shout, skiffle, skittle, stomp, struggle, too terrible party’, too tight party — une véritable institution dans tous les centres urbains du Nord et du Sud. Montana Taylor, Romeo Briggs, Romeo Nelson, Charles Avery, Dan Burley, Clarence « Pinetop » Smith animèrent de nombreuses rent parties et Estelle « Mama » Yancey, femme de Jimmy Yancey, y fit même la majeure partie de sa carrière : « J’avais un circuit, un endroit où jouer chaque soir. Remarquez, si on se faisait 50 ou 35 cents sur la soirée, pour pianoter pendant trois ou quatre heures, on n'avait pas à se plaindre. Les gens avaient besoin d’argent pour leur loyer et c’est pour ça qu’ils organisaient ces fêtes. » Interview de Georgia Tom (1976), citée par Giles Oakley dans The Devil's Music.

RHYTHM AND BLUES Terme générique ayant à la fin des années 40 (25 juin 1949 en ce qui concerne le Billboard) remplacé race* music pour désigner l’ensemble de la musique enregistrée par des Noirs pour des Noirs : « En fait cela n’expliquait pas grand- chose quant à la nature de la musique. Elle n’était pas particulièrement rythmique et n’était presque jamais du vrai blues comme celui que l’on avait abandonné dans les Etats du Sud. Bien sûr, rhythm and blues était un euphémisme qui voulait dire musique des Noirs. » Interview de Jerry Wexler cité par Tony Palmer dans All You Need Is Love. « I got the rockin’ pneumonia I need a shot* of rhythm and blues I caught the rollin' arthritis Sittin’ down at a rhythm review » Roll Over Beethoven, Chuck Berry (1956).

RIDE 1. Monter à cheval et, par extension, voyager: « Mister conductor man I wanna talk with you I wanna ride your train From here to Boogalou’ I’m leavin’ this morning I haven’t got my fare I wan’ see if I can find my good girl here » Evil Woman Blues, James Wiggins (1928). ► Par le même détournement de sens qu’en français, « monter », baiser : « Me and my gai* We was side by side She said : “Daddy I would like to ride” I said : “Freeze to me, mama” » Freeze to Me, Barbecue Bob (1929). Dans cette perspective, les partenaires amoureux deviennent rider, mule, mare ou pony. Notons que ride, comme rock et roll, est un de ces mots qui font allusion aussi bien au bruit cadencé du train sur les rails qu’aux mouvements du coït. Cette association train-coït, très fréquente, se retrouve également dans le jeu des nombres {numbers) où la combinaison 4-11-44 renvoie aussi bien à « locomotive » qu’à « organes sexuels masculins » (sur ce point, voir four-eleven-forty four* et boogie woogie). ► Prendre un solo, dans le jargon des musiciens de jazz, improviser pour un preacher : « Church’s bells are ringin’, the preacher’s preachin’*, Deacon Taylor’s Tidin’, the members* shoutin', The dirty deacon has taken my gal and gone And all the little children Are probably tryin’ to sing my song » Ham Hound Crave, Reubin Lacy- (1928). 448. FLAG / THUMB A RIDE. Faire du stop : « I’m standin’ here on the highway I’m tryin’ to thumb me a ride Seem like to me, darlin’ Everybody tryin’ to pass me by » Highway Blues, Robert Pete Williams (1960), chant recueilli par Harry Oster et cité dans Living Country Blues. « Standing at the crossroads* 1 tried to flag a ride Ain’t nobody seem to know me Everybody pass me by » Crossroad Blues, Robert Johnson (1936). 449. JOY RIDE. Défonce d’un drogué occasionnel : Joy Ride, Al King (1956). 450. RIDE BEAT. Voir beat. 451. RIDE IN TUE MOONLIGHT. Litt. : chevaucher au clair de lune. Baiser, faire l’amour : Riding in The Moonlight, Howlin’ Wolf (1952). RIDE THE BLIND. Dans le langage des hoboes, voyager clandestinement dans un wagon de marchandises {blind), « brûler le dur » : « I’m leaving here tonight If 1 have to ride the blinds* Take a freight train special Tell the engineer* : “lose no time” » Salt Lake City Blues, Papa Charlie Jackson (1924). ► RIDE THE RAIL Voyager sous les wagons : « Green* Diamond blowin’ her whistle Train’s coming round the rail I can’t ride Pullman Guess I ’ll have to ride the rail » Lake Front Blues, Little Brother Montgomery- (1935). ► RIDE THE RODS. « Chevaucher les barres (de frein) », voyager sur les tiges de freins ou les tampons des wagons : « Papa fix the blinds* So the bums* can’t ride* If ride they must Let them ride the rods » Kassie Jones, Furry Lewis (1928). « Ou encore, il s’installera sur les tiges de freins qui courent sous les wagons. Une place périlleuse mais qui offre le double avantage de le dissimuler complètement et de le mettre hors d’atteinte : aucun employé ne s’y aventu- rera. Si notre candidat à l’évasion est particulièrement adroit, il placera une petite planche en travers des deux tiges de freins afin de se loger dans l’étroit espace compris entre ces tiges et le plancher du wagon. S’accrochant continuellement aux essieux, aux tiges, aux barres d’accouplement, toute la journée, toute la nuit, dans le vent glacial ou dans la fumée suffocante des tunnels, l’homme risque l’engourdissement par le froid ou tout simplement la perte de connaissance par épuisement. Dans les deux cas, le résultat sera identique, la chute et ¡’écrasement par les roues des wagons suivants... » Paul Oliver, Le Monde du blues. ► RIDE (PULL ou RUN) THE TRAIN. Faire l'amour avec plusieurs hommes à la suite (« à la queue leu leu ») : « I’m a high speed daddy If you can’t ride my train Mama, just step right off So red-hot* mama, if you fool* with me Papa gonna cool* you off I mean your papa gonna cool you off » Red Hot Mama, Papa’s Coing to Cool You off, Barbecue Bob (1929). RIDER Le partenaire (en amour) : « I’m going in third alley And bring my rider home All these women in Third Alley Won't let my rider alone » Third Alley Blues, Ivy Smith (1927). ► C.C. RIDER. ® A l'origine, nom d’un train : « C.C. Rider, that come out when the ole log-trains was invented way back in the teens. They made a song out of that [...] C.C. Rider, that was the name of the train and say “Here come ole C.C. Rider and they commence puttin’ words in it and matchin’ it up and made a song out of' it...” » Interview de Mance Lipscomb par Robert Springer (1973), citée dans sa thèse, Historique et Fonctions sociales du blues. ® Déformation A'easy* rider, amant(e). ► E.Z. RIDER. Phonétiquement easy* rider : New E.Z. Rider Blues, Taj Mahal (1970?) ► SEE SEE RIDER. Pour easy* rider : See See Rider, Ma Rainey (1924). ► SPECIAL RIDER. Petite amie, maîtresse, nénette : « Lord I ain’t got No special rider here I might leave ’cause I don’t feel welcome here » Mean Old Frisco Blues, Arthur Big Bov Crudup (1942).

RIFF Courte phrase de 2 à 4 mesures, plus rythmique que mélodique, de caractère répétitif, et destinée à pousser les solistes : « Mais avec [Count] Basie, nous avions quelque chose que l’arrangement le plus cher n’aurait pu remplacer. Les gars s’amenaient, quelqu’un se mettait à fredonner un air. Un autre le jouait une ou deux fois au piano. Un troisième indiquait un a-ha-dipe, a-ha-dope. Le papa Basie s’amusait alors à la jouer un peu sur le piano avec deux doigts. Et c’est ainsi que ça commençait à prendre forme. » Billie Holiday et William Duftv, Z/wT Sings The Blues. Warming up a Riff, Charlie Parker (1945).

RIGHTEOUS Bon, au poil : « I got a yaller* girl And a brown* named Lillian But the best I’ve ever had Was my old Crow* Jane She’s righteous, I mean She’s righteous, Lord » Righteous Blues, Blind Blake (1930). ► RIGHTEOUS BUSH. Marijuana, herbe.

RING AND SHUFFLE SHOUT (Ring shout) Voir shout.

RIP UP S’envoyer en l’air : Rip up The Joint, Sidney Bechet (1941). Particulièrement en matière sexuelle : « Well it’s Saturday night And I just got paid Fool about my money Don’t try to save My heart says go go Have a time 'cause it's Saturday night and 1 feel fine I'm gonna rip it up I’m gonna rock it up I’m gonna it up I’m gonna ball it up I’m gonna rip it up And ball tonight » Rip It up, Little Richard (1956). Svn. : tear it up, whoop it up. RISING SUN Nom d’une célèbre maison close de La Nouvelle-Orléans : « There is a house in New Orleans They call the Risin’ Sun It’s been the ruin of many poor girls And me, oh Lord, for one » The Rising Sun Blues, Georgia Turner, chant recueilli par .Alan Lomax et cité dans Folk Songs of North America. The Rising Sun Blues, Peetie Wheatstraw (1935).

RIVER ► RIVER HIP. Voir hip. ► UP THE RIVER. Voir ce terme.

ROACH Cafard. Mégot d’une cigarette de marijuana, d’un joint (années 30-60) : « 1 used to light up with the other cats*, and to me you’d have a better session with gage*, as we called it, than getting full of whisky. But the judge started throwing all them years at us for just a roach. So well, I didn’t see nothing funny in that. Truth is, it’s all in your mind and you play better without anything... » Interview de Louis Armstrong par Richard Meryman, citée dans Louis Armstrong. a Self-Portrait.

ROAD HOUSE Bar, tripot, situé sur une route à proximité d’une bourgade : « Lee Rainey vint un jour à la maison et me demanda si je voulais travailler dans un road bouse avec lui. Il s’agissait d’une auberge sur la route, comme il en existe de très nombreuses aux Etats-Unis. On pouvait y manger, boire, écouter de la musique et danser. Comme c’était encore la prohibition, on n’y servait pas d’alcool, mais les clients pouvaient en apporter et on leur servait de la glace, de l’eau, du ginger ale ou de la bière de contrebande. » Bill Coleman, Trumpet Story. « Now I’m gon’ to the roadhouse Way out on the edge of town Where music get so soft and mellow* And the people can break* ’em down » Can’t Trust Myself, Jazz Gillum (1946).

ROAD RUNNER Oiseau très commun dans les Etats du Sud-Ouest et le Texas; on l’appelle ainsi parce qu’il court au lieu de voler : I’m a Roadrunner, Junior Walker (ca 1966).

ROBINSON Jackie Le premier Noir à avoir joué au plus haut niveau au baseball en 1947 : Did You See Jackie Robinson Hit The Ball, Count Basie (1949). Par extension, premier Noir à pénétrer dans une profession.

ROCK Afr. Du bidyogo rak, danser. Bercer, balancer : « I got a jazz* playin’ piano And a great rockin’ chair You can rock in rhythm By the music that you hear » Feather Bed Blues, Bumble Bee Slim (1935). ► Danser. ► Swinguer, chauffer, exhortation lancée à l’intention d’un soliste : « Rock it, rock it, rock it » Lonnie Johnson au saxophoniste Hal Singer prenant un chorus dans Don’t Ever Love (I960). ► Baiser. Comme l’a écrit Boris Vian, « l’assonance de bercer avec un autre mot français assez précis lui aussi fournit l’équivalence très exacte du sens réel ». « I’ve rocked Lolly Pop Mama, Sally Brown Rocked all the finest girls in every town » Rock Mister Blues, Wvnonie Harris (1950). • Surnom des bluesmen L.C. « Good Rockin » Robinson (1915-1976), « Good Rockin » Charles Edwards (1933- 1984) et « Rockin’ Sidney » alias Sidney Semien (1938). ► EAGLE ROCK. Voir eagle. ► ROCKER. Terme assez peu usité pour « amant » : « Let me be your rocker now Until your straight chair come And I rock you easier* Your straight chair ever done » Ham Hound Crave, Rube Lacy (1928). ► ROCKS (THE). Terme sous lequel les pianistes des années 20 désignaient leurs techniques de basses : The Rocks, George Thomas alias Clay Custer (1922). Le morceau de George Thomas semble être le premier morceau enregistré utilisant une ligne de basses de boogie-woogie; ce dernier terme n’aura pourtant cours qu’à partir de 1929, date à laquelle Pinetop Smith enregistre son Pinetop’s Boogie Boogie.

ROCK ISLAND LINE Ligne de chemin de fer reliant Fort Worth, Texas, à Kansas City, Missouri : « I’ve got the Rock Island blues Waiting for the Rock Island train I took the Rpck Island train And take a Rock Island ride* somewhere » Old Rock Island Blues, Lonnie Coleman (1929).

ROCK ’N’ ROLL Si rock et roll sont des termes d’utilisation ancienne, faisant, sans ambiguïté, référence aux mouvements du coït (comme le notait Boris Vian, « pour traduire exactement rock and roll, il faudrait dire quelque chose comme “braise et brande” si ça avait un sens »), ce n’est qu’en 1936 qu’ils se trouvent pour la première fois réunis dans Rock and Roll enregistré par Benny Goodman et les Boswell Sisters. 1. Style musical dont les principales phases de développement peuvent schématiquement se résumer ainsi : — vers la fin des années 40, un style en tempo rapide, chanté par des blues shou- ters (Louis Jordan, Joe Turner, Roy Brown, Wynonie Harris...) auxquels répondait souvent un saxophoniste « hurleur » (voir honker), devint extrêmement populaire auprès du public noir; les paroles faisaient abondamment appel aux mots rock et roll et entretenaient une ambiguïté voulue entre les deux sens de rock and roll, nom d’une danse et coït : We’re Gonna Rock, We’re Gonna Roll, Wild Bill Moore (1947). «Just get paid off on a Saturday Just about twelve o’clock From then on All the joint* begin to rock and roll » WfesV Helena Blues, Rcoosevelt Sykes (1949). ► Dans la deuxième moitié des années 50, ce même style, quelque peu « blanchi » et mâtiné de country and western et de hillbilly, accédait à la popularité mondiale sous le nom de « rock and roll ». Dans cette acception, le terme est, semble- t-il, dû au disc-jockey Alan Freed qui l’titi- lisa dès 1952 (Moondogs Rock and Roll Party) : « People think that rock and roll started in 1956 with people like Elvis Presley and Alan Freed, but they are wrong. In the late 40’s and early 50’s, when you had cats* like Wynonie Harris and Roy Brown, every other word was rock*, like I’m Gonna Rock This Joint Tonight. I used to live a block away from the Howard Theatre in Washington and let me tell you, when guys like Wynonie and Roy came to town there was an electricity- in the air that you don’t even get at a Teddy Pendergass concert today. When Wynonie came into a place, he used to shout the house down. » Interview de Don Covay, cité sur la pochette du disque Sbouters, Roots of Rock’N'Roll, vol9, Savoy 2244. ► Le style perdant en popularité au cours des années 60 se verra commercialement diffusé sous des formes affadies qui ont pour noms twist, madison, locomotion, hully* gully, watusiferk ou autre mashed* potatoes. On distingue parfois « rock and roll » de « rock’n’roll », le premier se rapportant alors au « rock’n’roll » tel qu’il commence à s’essouffler aux alentours de 1958. 2. Danse associée à cette forme musicale et directement inspirée du « lindy hop » : « You make me dizzy miss Lizzy The way you rock ’n’ roll You make me dizzy miss Lizzy When we do the stroll* » Dizzy Miss Lizzy, Larry Williams (1958).

ROCKET 88 Nom d’une automobile fabriquée par Oldsmobile : Rocket 88, James Cotton (1965).

ROD Baguette. 452. Pénis, verge : « I’m a ram* rodding daddy Lord my rod is long and slim And every time I rod a gun for a woman You know, it’s too tight*, Jim* » Ram Rod Daddy, Bo Carter (1931). ► Pistolet, « feu ». ► RIDE THE RODS. Voir ride.

ROLL Rouler. 453. Liasse de billets : « I don’t care* Streets they is covered with snow 1 got to work at the warehouse And bring my baby the roll » Warehouse Blues, Frank Tannehill (1937). 454. Petit pain, de ceux dont on se sert pour les hot-dogs; par analogie, organes sexuels féminins : « Marna, I got a hot-dog and it ain't cold It’s just right for fit your roll » Dirt)) Mother for You, Roosevelt Sykes (1936). 3- V. Voyager, rouler sa bosse : « I been driftin’* and rollin' along the road Lookin’ for my room and board » Rolling Log Blues, Lottie Beaman (1929). • V. Travailler, bosser : « I’m a hard workin’ man Have been for many years I’m the man that roll When icicles hanging on the tree And you hear me hollerin’ Baby, down on my bended knee » I'm a Steady Rollin’ Man, Robert Johnson (1937). • V. Balancer, en parlant de musique. Roll ’em .- jouer avec une grande intensité, avec swing. Roll ’em, Bags, Kenny Clarke ( 1949). • S’écouler (en parlant du temps) comme dans Let The Good Times Roll (Louis Jordan, 1946), dans Preachin ’ Blues de Son House gravé en 1930 : « I’m gonna do like a prisonner I’m gonna roll my time* on out » ou dans Hard Heated Woman de Hogman Maxey enregistré au pénitencier d’Angola en 1959 : « Oh I know my baby's sure Gonna jump and shout When she got that letter That I’ve rolled my long time out » • V. Roll, évoquant le roulis, le balancement, se prête à de nombreux doubles sens ; faire l’amour : « Let me tell you men, How to keep your gal* at home Just put her in bed 455. Oh well, well, and roll her all night long » Froggie Blues, Peetie Wheatstraw (1936). ► HOLY ROLL. Voir holy. ► LET THE GOOD TIMES ROLL. Litt. : laisse le bon temps rouler. Prends la vie du bon côté, prends ton pied : « Don’t sit there mumblin’ and talkin’ trash* If you wanna have a ball* You got to go out and spend some cash Let the good times roll Don’t care if you’re young or old Get together*, let the good times roll » Let The Good Times Roll, Louis Jordan (1946). ► ROLLING BLUES. Voir blues. ► ROLL THE BELLY. Nom d’une danse de barrelhouse. ► ROLL THE BONES. Jouer aux dés : Roll Dem Bones, Big Bill Broonzy (1945). ► STEADY ROLL. Evoque un rythme de coït puissant et régulier : Steady Roll, Jelly Roll Morton (1924).

ROLLER Rouleau. 456. (1862.) Abréviation de pateroller, policier, cogne : « Blind man on the corner Beggin’ for a dime* The roller come and caught him And threw him in jail for a crime » Why I Sing The Blues, B.B. King (1969). 457. Voiture de police, panier à salade : « I was standin' on the corner 13 an’ Government street I had my flask, I had my flask in my hand Said a roller roll up, he said “Jump in, Bud Be a long time ’fore you get another drink again’’ » The Government Street Blues, Roosevelt Charles (1960). 458. Gardien de prison, maton. 459. Pour biscuit/jelly roller, amant : « I ain't no gambler And 1 don’t play no pool I’m a ramblin’* roller Jelly* baking*, jelly baking fool » No No Blues, Willie Baker (1929). ► BISCUIT ROLLER. Litt. : le rouleur de biscuit; l’homme, l’amant. Voir biscuit. ► DOUGH ROUER. Celui qui échange son labeur contre rétribution, le travailleur. Voir dougb.

ROLLING MILL • Laminoir: « The rolling mill was broke down They ain’t shippin’ no iron to town » Rolling Mill Blues, Peg Leg Howell (1929). ► Scierie : « But they called it a rolling mill at the time, because they'd roll the logs down the hill, put ’em on the trolley, and roll ’em on down » Mister Charlie. Your Rolling Mill Is Burning Down, Lightnin’ Hopkins (ca 1959/60).

ROLLING STONE Quelqu'un qui roule sa bosse, chemineau, routard : « She’s a rollin' stone She roll* back home someday » Rolling Stone, Robert Wilkins (1928).

ROOSTER Coq. L'homme; par glissement de sens, l’amant : « Says, I love my pullet ’cause that meat *s so tender and sweet Says, I’m a rooster, baby Ooh well, I can’t stand rooster meat » Pullet and Hen Blues, Bob White (1940).

ROOT Racine. 460. Charme, maléfice, sort, gris-gris: « Mama here come your root man Open the door and let him in It’s just about time You using some of your good roots again There is one thing baby You want the root all by yourself But you know I’m a doctor* mama I don’t give it somebody else » Root Man Blues, Walter Davis (1935). 461. V. Fouiller avec le groin; forniquer, baiser : « I'm a rootin’ groundhog*, babe And I root everywhere I go [parlé] Lay it on me, boy, it’s bad* I’m tryin’ to keep my woman from takin’ my lovin’ She ended up givin’ it to So-and-So » Rootin’ Ground Hog Blues, Big Joe Williams (1937). • Surnom donné par Ben Webster au trompettiste Willis Raymond « Ray » Nance (1913-1976). ► ROOT DOCTOR (MAN). Magicien, sorcier qui prédit l'avenir, porte chance ou lance des sorts, fabrique des amulettes et des talismans : « I’m a first class root doctor And I don’t bar no other doctor in this land My remedy is guaranteed to cure you Pills and pains ain’t my plan » Root Doctor Blues, Doctor Clayton (ca 1942), Syn. : wood doctor, papa, two-facer, two- headed man, hootchie-cootcbie man,fetisher, vodun, obi, goof er doctor, snake doctor ou wangator. ► RUB (ONE’S) ROOT. Se branler; faire appel au pouvoir d’un gris-gris.

ROOTY-TOOT Afr. Du wolof ruti tuti, roulement de tambour. Musique passée de mode : « She shot him in the shoulder He fell down on the floor Rooty-toot-toot and rooty-toot-toot She shot that man some more He was her man He didn’t treat her right » Frankie Baker, Palmer Jones (1924), transcription par Langston Hughes, citée par Langston Hughes et Arna Bontemps dans The Book of Negro Folklore.

ROSELAND BALLROOM Salle de danse (pour Blancs) à New York; installée sur Broadway, elle fut ouverte de 1919 à 1956. Elle employait généralement des orchestres commerciaux avec quelques notables exceptions comme Count Basie ou Fletcher Henderson. C’était une dime-a-dance, une salle où chaque danse avec une « taxi-girl » coûtait dix cents : « The band*, the spectators and the dancers, would be making the Roseland feel like a big rocking* ship [...] man, wail” people would be shouting at the band. » Malcolm X, L'Autobiographie. Roseland Shuffle, Count Basie (1937).

ROUGH Grossier, rugueux. Par inversion de sens, super, fantastique : « Diz [Gillespie] the Wiz, a real horn* tooter. And then he’d played about sixteen bars and blast* out. Yeah, yeah, he was a rough man then, real rough. » Interview de Cab Calloway, cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans 7o Be or Not To Bop.

ROUNDER ► Fêtard, joyeux drille ; débauché, viveur : « I’m the good time rounder I run a good time flat* Sometimes for two or three weeks My mama don’t know where I ’m at » Good Time Rounder, Barbecue Bob (1929). ► Souteneur, maquereau : « But people didn’t like the title [Jacksonville Rounder's Dance, 1907]because rounder meant pimp, so I wrote some new lyrics in 1919 and renamed it The Original Black Bottom Dance. » Interview de Perry Bradford, cité par Paul Oliver dans Songsters and Saints.

ROUTE Le terme est généralement utilisé pour les grands axes routiers est-ouest, à numéros pairs, par opposition à highway, qui désigne les axes nord-sud à numéros impairs; cette distinction n’est que partiellement retenue par la langue noire qui parle souvent de highway dans les deux cas (80 Highway Blues, Son Bonds, 1941). Dans la mesure où les grandes migrations ont toujours vu les Noirs ruraux du Sud gagner les cités industrielles du Nord, il n’est pas étonnant de constater que les routes ont été beaucoup moins célébrées par le peuple du blues. ► ROUTE 66. Relie Chicago, Illinois, à Los Angeles, Californie via Saint Louis, Springfield, Tulsa, Oklahoma City, Amarillo, Albuquerque et Flagstaff : cette route mythique cristallise les valeurs blanches de conquête de l'Ouest, de recul de la « frontière » et de la liaison coast to coast-, elle n’est qu’exceptionnellement chantée par les Noirs : Route 66, Chuck Berry7 (1961). Les notables exceptions à l’omniprésence des axes sud-nord dans le folklore noir coïncident avec les routes empruntées par les vagues d’immigrants texans en route vers l’Eldorado californien : ► ROUTE 80. Relie Montgomery, Alabama, à San Diego, Californie, via Shreveport, Dallas et Fort Worth, Texas : « Eighty Highway left Savannah, Lord And did not stop You ought to saw that colored fireman* When he got that boiler hot » Statesboro Blues, Blind Willie McTell (1928). ► ROUTE 90. Relie La Nouvelle-Orléans, Louisiane, à El Paso, Texas via Houston et San Antonio : Route 90, Clarence Garlow (1954).

ROYAL PALM Nom d’un train express circulant entre Chicago, Illinois, et Miami, Floride : Royal Palm Special Blues, Sloppy Henry (1928).

RUB Frotter. 1. Danse lente dans laquelle les couples peuvent « frotter » « Il y avait des réunions de ce genre tous les samedis soir et j’intitulai un de mes so\os Saturday Night Rub [1930]. Se frotter, c’était tout ce qu’ils faisaient pendant que je jouais. Un homme et une femme se levaient, se frottaient le ventre l’un contre l’autre, frappaient le sol et me criaient : “Ah oui, joue comme ça, Bill, vas-y” » Big Bill Broonzv, Big Bill Blues. ► Par extension, laparty où l’on danse le rub : « [Parlé] Hello Bill 462. Hello 463. Goin' to the rub tonight? 464. I think so 465. Aw, do it now 466. Do that Saturday Night Rub » Saturday Night Rub, The Hokum Bovs, vcl par Big Bill Broonzy (1930). ► Danser : Rub a Little Boogie, Champion Jack Dupree (1953). • RUB (ONE’S) ROOT. Voir root.

RUBBERLEGS Surnom du chanteur et danseur Henry « Rubberlegs » Williams (1907-1962).

RUBBING BOARD (Rubboard) « Frottoir » métallique, dont on joue en général avec des dés à coudre, des clés ou des décapsuleurs; quelquefois contracté en rubboard : «J’ai commencé tout jeune sur un tout petit rubboard, avec deux clés. A l'époque, la musique n’était pas trop électrifiée et ça allait très bien. Lorsque les instruments électriques sont arrivés, mon son était étouffé et j’ai ajouté une clé. Ça a encore été pendant un moment et puis ça a augmenté : chaque fois qu’ils ajoutaient un instrument, j’ajoutais une clé pour rester au niveau. J'en suis maintenant à douze. » Interview de Cleveland Chenier par Guy Schou- kroun, in Soûl Bag n” 77. RUG CUTTER Litt. : déchireur de carpette. Danseur infatigable, qui danse de façon débridée : Rug Cutter Swing, Henry Allen (1934).

RUMBLE Bataille de rues entre bandes d’adolescents : Jamaïca Rumble, Harry Carney (1946).

RUN Courir. RUN AROUND. Tourner autour, draguer : « I’m talkin’ to you baby I’m tired of you actin’ like chicks* on TV I know you been runnin’ around with your other man You ’re tryin’ to make a fool* out of old me » Can't You Hear Me Talking to You, B.B. King (ca 1972). ► RUN DOWN. Expliquer, donner un conseil ou un tuyau, mettre au parfum : « If you get a big* leg woman Now in this old town These steel mill men Now will run her down • Big Leg Woman. Johnnie Temple (1938). ► RUNNER. ® Revendeur de drogue. ® Coursier au jeu des numbers (voir numbers* runner). ► RUN THE CHANGES. Voir change. ► RUN (ONE’S) MOUTH. Trop parler, jacasser, pérorer; se plaindre, se lamenter: You Run Your Mouth and I ’ll Run My Business, Louis Jordan (1940). ► RUN THE TRAIN. Faire l’amour avec plusieurs partenaires à la suite (syn. : pull ou ride the train) : « There was a lady we used to have sex with called R.M.S. She used to be there in the school grounds at night and the guys* would run train on her six, seven, ten boys in a row. » Interview de Little Richard, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard. ► RUN (WHUP) A GAME ON SOMEBODY. Voir game.

RUSHING Tom Shérif adjoint du comté de Bolivar dans le Delta* de 1928 à 1932; Charlie Patton le mentionne dans Tom Rushen Blues (1929).

RUSTABOUT Docker spécialisé dans le déchargement des balles de coton : « This is how the riverboats got music on them. Those boats had rustabouts on them and half of those rustabouts played guitar, and nearly all sang. » Interview de Danny Barker in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

RUSTY DUSTY Fesses, derrière, cul : « Now get up woman Get up your big fat rusty dusty Get up mama Get up before it gets too rusty » Rusty Dusty Blues, Louis Jordan (1941). S

S Dans la communauté noire américaine, le nom propre peut se rencontrer quelquefois au pluriel, Sam Cooke devenant ainsi Cookes et Horace Silver, Silvers. (A propos des noms, voir name.)

S.O.B. Voir bitch.

S.O.L Pour « Short of Luck » ou « Shit out of Luck », pas de bol, manque de pot : S.O.L. Blues, Louis Armstrong (1927).

S.P. Pour « Southern Pacific », compagnie de chemin de fer desservant La Nouvelle- Orléans, Louisiane et la Californie via Houston et San Antonio, Texas : S.P Blues, Albert Ammons (1947).

SACK Sac; lit, pieu : « Going to tell you one thing Ps a natural* fact Want you to come on home And drop that sack » Drop That Sack, Papa Charlie Jackson (1925). ► SACK NASTY. Femme bandante, attirante : Sack Nasty, Rex Stewart (1948).

SADDLE Selle. ► Dans le jeu des numbers, combinaison de deux nombres. ► V. Se mettre en selle, monter (au sens où monte l'étalon), baiser : « I’m gonna tell you woman How just to keep your man at home You got to eagle* rock him Whilst he’s saddlin’ on » Got a Girl in Ferriday, One in Greenwood Town, Cat Iron (1958).

SAINT JAMES INFIRMARY Hôpital St James. Hôpital londonien ayant fait l’objet d'une ballade éponyme importée aux Etats-Unis par les Anglais : Gambler’s Blues (St fames Infirmary Blues), Hokum Boys, vcl par Bob Robinson (1929).

SAINT LOUIS JIMMY Pseudonyme du chanteur de blues James Oden (1903-1978).

SAINT LOUIS SUN Nom de la ligne de chemin de fer Sunshine Special : « St Louis Sun’s come and gone Lord, the eastbound Sun’s come and gone Yeah, the eastbound Sun's come and gone She’s gone to come no more » Lovin' Babe, Henry- Thomas (1929)- SALT Saler. Tromper, duper, berner : « I’m frigeratin’ papa from way up North I’ve had your kind before You can salt some people But you can’t salt me 1 don’t taste salty no more » tied Hot Mama. Papa's Going to Cool You off, Barbecue Bob (1929). ► JUMP SALTY. Voir jump. ► SALT AND PEPPER. Qualité inférieure de marijuana. ► SALTWATER. Danse populaire lea 1938- 1945). SALTY. ® Agacé, fâché, de mauvais poil (voir jump* salty). ® Elégant, de bon goût, dans le coup. ® Alerte, vif. ® Lascif, obscène, cochon (voir salty* dog}. ® Poudre d’héroïne. ► SALTY DOG. ® Femme excitante, émous- tillante. ® Vieux cochon, gros dégueulasse, vicieux : « Said, the scaredest I ever seen in my life Uncle Bud like to caught me kissin’ his wife Hey, hey, you salty dog » Salty Dog, Mississippi John Hun (1963).

SAN HO ZAY Pour San Jose, Californie : San Ho Zay, Freddie King (1961).

SAN QUENTIN BAIT Voir bait.

SAND Sable. Courage, cran. Danse des années 40 : « Le premier instrumental, It’s Sand, Man, était une contribution d’Ed Lewis, arrangée par Buck* [Clayton]. On y entend Don Byas au ténor et Mr. Dicky [Wells] au trombone. [...] Le titre venait d’une danse à la mode à ce moment-là qui s’appelait sanding ou doing the sand, un truc genre shuffle* qui avait probablement été lancé par un numéro de scène. On faisait un pas de côté, puis de l’autre, en traînant les pieds comme si on voulait étaler du sable sur la piste. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. • V. Lécher les bottes, fayoter : « Dans le parler jive* de l’époque [les années 40], si vous accusiez quelqu’un de vous “sabler”, ça voulait dire qu’il vous faisait des courbettes et des ronds de jambe comme un larbin qui ferait de la lèche à son patron. Si on traitait quelqu’un de sandman*, ça voulait dire oncle Torn. Mais on pouvait aussi “sabler” un peu pour s’approcher d’une nana, surtout si on essayait de se remettre avec elle après avoir fait une connerie. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. ► RAISE SAND. Syn. de raise* hell. ► SANDFOOT. Femme de mauvaise vie, de mœurs dissolues : « You drink your whiskey Run around Get out in the street And act like a sandfoot clown* » Your Time to Worry, Blind Willie McTell (1935). ► SANDMAN. Lèche-cul, fayot.

SANTA CLAUS (Santy Claus) Père Noël. ► Organes sexuels : « I know all about your pappy and your mammy Your big fat sister and your little brother Sammy Your auntie and your uncle and yo’ ma’ and pa’ They all got drunk and showed their Santy Claus » New Dirty Dozens, Memphis Minnie (1930). ► Amant (celui qui peut aller et venir dans la cheminée — voir chimney* — et apporte du plaisir) : « Let’s make Christmas merry Baby, let me be your Santa Claus I wanna slide down your chimney* ’til your stockings full of toys » Let’s Make Christmas Merry Baby, Amos Milburn (1949).

SANTA FE Pour Atchison, Topeka and Santa Fe Railroad, compagnie de chemin de fer dont les lignes relient Chicago, Illinois, à Los Angeles, Californie, via Kansas City, Missouri, Wichita, Kansas, Houston et Fort Worth, Texas, et Oklahoma City, Oklahoma : « Now Mister Casey* said just before he died There one more road he would like to ride Fireman* asked Casey : “What road is it?” "That's the Southern* Pacific, boy and the Santa Fe The Santa Fe, boy, the Southern Pacific and the Santa Fe” » Casey' Jones, Furry Lewis (1968). La ligne fut ouverte entre le port cotonnier de Galveston et la ville de Richmond, Texas, le 10 octobre 1878. Elle rejoignit ensuite Fort Worth, évitant Dallas, bourgade trop petite à l’époque, avant d’être prolongée vers Amarillo et Albuquerque, Nouveau-Mexique, Santa Fe (aujourd’hui non desservie par le rail) et la Californie, atteinte en 1887.

SAPSUCKER De sap, individu bête, nigaud, connard, ballot. Couillon, idiot : « A sad sapsucker am I Yes I’m a sad sad sad sapsucker And 1 like that jive* Yeah man But I can’t can’t have no woman messin’* ’round my hive » ► A Sad Sapsucker Am 1. Fats Waller (19??).

SASHAY N’importe quelle danse sur un rythme hispano-américain (rumba, tango...): « The night 1 saw little Mickey Mouse Sashaying all around the house » Panin' Dat Cat, Teddy Bunn (1930).

SASSY De saucy, effronté. Effronté, impertinent. • Surnom de la chanteuse Sarah Vaughan (1924): « Sassy, comme nous l’appelions, et moi étions devenus de très bons copains à cette époque. Elle raffolait de l’orchestre et elle venait tout le temps nous voir, peut-être bien tous les jours, et traîner dans les coulisses avec les musiciens ou dans ma loge. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues

SATCHMO De satchel mouth, gueule en cartable, d’où «grande gueule». Surnom commercial du trompettiste Louis Armstrong (1898- 1971). Selon James Lincoln Collier, Armstrong aurait gagné ce surnom lors de sa première tournée en Angleterre en 1932; en jouant, il s’exhortait lui-même avec de grands : « Satchel mouth » ; un des journalistes du Melody Maker, peu accoutumé à l’accent sudiste, interpréta Satchmo : Satchel Mouth Swing, Louis Armstrong (1938).

SAIT RDAY NIGHT FISH FRY Fête, réjouissance populaire dans les petites villes du Sud; cette tradition s’est rapidement perdue dans le contexte des grandes métropoles (années 30-40) : « Muddy* Waters, he was cornin’ out the rural communities, playing Saturday night fish fry and what not... » Interview de Big Daddy Kinsey par Jacques Lacava (1987), in Le Récit de vie des bluesmen.

SAVOY Le plus célèbre et le plus grand (il occupait tout l’espace entre les 140e et 141e rues sur Lenox Avenue à Harlem) des dancings; ouvert le 12mars 1926, il fut démoli en 1958. Il était connu sous le nom « The Home of Happy Feet » ou « The Track ». « The Savoy was a place of tremendous enthusiasm, a home of fantastic dancing. And Webb was acknowledged King of the Savoy. And visiting band* would depend on catching hell* from, little

Chick, for he was a crazy drummer* and shrewd to boot*. » Interview de Mary Lou Williams, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

SCAG Héroïne : Scag, Archie Shepp (1965).

SCAT ► Dans le vocabulaire du jazz, chant en onomatopées; si l'utilisation de syllabes sans signification est d’usage courant dans toutes les musiques populaires, la légende veut que le style ait été créé par Louis Armstrong en 1926 lors de l’enregistrement de Heebie*Jeebies dans lequel, ayant oublié les paroles, il leur aurait substitué des onomatopées : « The records were very successful, and Heebie* Jeebies was what today could be called a hit record. That was the record where Louis forgot the lyrics and started scattin’. We had all we could do to keep from laughing. Of course, Louis said he forgot the words, but I don’t know if he intented it the way or not. » Interview de Kid Ory, in Hear Me Talkin' to Ya de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► V. Chanter « en scat » : Scattin’ The Blues, The Spirits of Rhythm, vcl par Leo Watson (1943).

SCRAPPER Surnom du guitariste de blues Francis « Scrapper » Blackwell (1906-1962) : « [Parlé] Say, Mister Scrapper, that’s too tight* Why, you oughta have played it » Trouble Blues, part 2, Scrapper Blackwell (1928).

SCRALNCH (Scronch, scrontch, scrouch, scrounch) Danse : Saturday Night Scroutch, Tampa Red (1929). ' « Down in Dixie* There’s a dance a-new Ain’t much to it and it’s easy to do Called that Scraunch Ah. doin' that Scraunch Just wiggle and wobble it Honey, when you do the Scrauch » Doin' The Scraunch, Barbecue Bob (1930). Organes sexuels (voir skrontch). 5. V. Baiser, forniquer : Scrouchiri, Kansas City Kitty (1931).

SCREWBALL Cinglé, dingue, excentrique : « I’m drinkin’ TNT* I 'm smokin’ dynamite I hope some screwball start a fight ’cause I’m ready* Ready as anybody can be I’m ready for you I hope you ’re ready for me » /'m Ready, Muddy Waters (1954).

SCUFFLE Bosser, gagner sa croûte grâce à un travail régulier mais emmerdant : Hard Scuffin’ Blues, Little Buddy Doyle (1939).

SCREAMING L'un des noms des douzaines dans là région de Harrisburg, Pennsylvanie (voir dirty* dozens'). • Surnom du pianiste chanteur « Screaming Jay » Jalacy Hawkins (1929). SEABOARD Pour Seaboard Air Line Railroad, compagnie de chemin de fer desservant la côte est de Miami, Floride, à Petersburg, Virginie, avec une extension jusqu’à Atlanta, Géorgie : « Did you ever take a trip On the Seaboard line Because if you ride that train It ’ll satisfy your mind » Railroad Blues, Trixie Smith (1925). Seaboard and Southern, Brownie McGhee (1947).

SEBASTOPOL (Sevastopol, vastapol, vasterpol, vestapol) Du nom d’un morceau de musique de la fin du XIXe appelé Le Siège de Sébastopol (la ville fut assiégée par les troupes franco- anglo-turquo-piémontaises en 1855). Technique d’accordage de guitare permettant d’obtenir à vide un ré (ou un mi) majeur (voir open* tuning) : Talking in Sebastopol, Gabriel Brown (1935). autrement appelée cross natural : « So I was just determined to play it so finally I met one blind feller* who said, “Well maybe this idea will do”. So he tuned up in Sevastapool, what he call cross-C* or something, I don’t know anything about it. » Interview d’Arvella Gray, citée par Paul Oliver dans Conversation with The Blues.

SECOND FIDDLE Litt. : deuxième violon. Sous-fifre, comparse, second couteau : « I ain’t going to play no second fiddle I'm used to playing lead You must think that I 'm blind You been cheating me all the time » I Ain’t Going to Play No Second Piddle, Bessie Smith (1925).

SECOND LINE Litt. : seconde ligne. ► Ceux qui, à La Nouvelle-Orléans, suivent les parades, les funérailles, les cortèges, les fanfares : « Dans aucune autre ville des Etats-Unis, il n’ y a ces second Unes, ces enterrements en jazz... Même sans enterrement, pour rien, juste pour le plaisir, les second Unes s’organisent spontanément dès qu’il est question de parade — tout le monde se prépare, sort son parapluie et ça démarre. C’est quelque chose qui fait partie de notre vie [...] Tout le monde a envie de faire partie des second Unes. Je ne connais personne à La Nouvelle- Orléans qui n’aime pas ça. Quel que soit le genre de musique qu’ils jouent eux- mêmes, tous suivent les parades. » Interview de James Black par Valérie Wilmer, in Jazz Magazine n°299, janvier 1975. « I was just like the rest of the kids — wanted to know all about that new music called “jazz”. I was just a “second-line” kid. That meant I’d follow the big bands* down the streets and, man, what a thrill when [Lorezo] Tio or George Baquet would let me carry their cases while they played! Id walk alongside them feeling just as important as could be. » Interview d'Albert Nicholas, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► Pour Jelly Roll Morton (in Mister Jelly Roll), la « deuxième ligne » était constituée de supporters musclés qui suivaient (ou précédaient) la fanfare : « Devant tout le monde marchait la “seconde ligne”, armée de bâtons, de bouteilles, de battes de baseball et de toutes sortes de munitions, prête à combattre l’ennemi quand on atteindrait la ligne de démarcation... » ► Danse en vogue à La Nouvelle-Orléans dans les années 50/60.

SEE SEE RIDER Pour as'r rider (voir rider) : See See Rider, Ma Rainey (1924).

SEND Exciter, plaire, « botter » (années 30-40) : « Run here pretty baby Set down on your daddy’s knee I want to tell everybody How you ’re been sending me » Cherry Red, Big Joe Turner (1939). ► SENDER. ® Quelque chose, quelqu’un d’émouvant : « You don’t wear no lipstick and powder, baby But you set my soul on fire You ’re the Natural* bom solid sender, baby » Solid Sender, John Lee Hooker (1960). ® En jazz, musicien de talent qui sait « pousser » les danseurs. ► SENDER JOB. Maîtresse, concubine. ► SOLID SENDER. ® Type à la page, mec à la coule : « Right now, every time someone mentions Fats* Waller’s name, why you can see the grins on all the faces, as if to say : “Yea, yea, yea, Fats is a solid sender, ain’t he?” » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ® Adj. Au poil, chouette : « The Lord made the world And everything that was in it The way my baby loves me Is so solid sender She can go to heal* the sick And she can go to raise the dead » Your Funeral and My Trial, Sonny Boy Williamson (1958).

SEPIA L’une des nombreuses nuances dans les couleurs de peau distinguées par les Négro-Américains : Sepian Bounce, Jay McShann (1942). ► SEPIA RECORDS. Voir race* records.

SET 467. Pour un musicien, passage sur scène (généralement d'une trentaine de minutes). 468. La rue et, plus généralement, les endroits où « ça se passe », où friment, se mettent en scène m’as-tu-vu, arnaqueurs et marlous. 469. Le groupe de ceux par qui « ça se passe ».

SEVASTOPOL (Sevastopool) Voir Sebastopol.

SEVEN Sept. • Nombre premier auquel de nombreuses traditions accordent des propriétés particulières, généralement bénéfiques : « Seven was the seven come down from Heav’n » The Holy Baby, spiritual recueilli par Alan Lomax (1942). Notable exception, celle des « sept ans de malheur » : « Some will break a mirror And cry bad* luck for seven years And if a black* cat crosses them They ’ll break right down in tears » Fogyism, Ida Cox (1927). Le chiffre est lié à de nombreuses pratiques magiques et superstitions : « On the seventh hour On the seventh day On the seventh month The seventh doctor say : “He was born for good luck" And that you see I got seven hundred dollars And don’t you mess* with me » I'm Your Hootchie Cootchie Man, Muddv Waters (1960). mais aussi au bleu et au blues : « Le blues est associé à la couleur bleue parce que le bleu est théologiquement en relation avec le chiffre sept, et ce chiffre, dans les accords du blues, détermine la couleur sonore. » Interview de Marion Brown, in Jazz Magazine n° 200. ► Nombre gagnant (avec le 11) aux craps* : « When a player rolls the two dice, the total he gets becomes his « point », if it is not 7 or 11 *, which wins at once, or 2,3, 12 [en ce qui concerne 12, voir dirty* dozens] which lose. To win he must roll that total again before rolling a 7, which loses. If he succeeds, it is called a “pass" and he retains the dice. » Harry Oster, Living Country Flues. Ou au seven-up*. 5. Pour septet : Kansas City Seven, septet composé de Buck Clayton, Dickie Wells, Lester Young, Count Basie, Freddie Green, Walter Page et Jo Jones (1939). ► SEVEN SISTERS. Voyant, personne douée de pouvoirs surnaturels : « They tell me seven sisters in New Orleans They can really fix* a man up* tight And I’m headed for New Orleans Louisiana I’m traveling both night and day When I leave the seven sisters I’m piling stones all around And go to my baby and tell her There’s another seven sisters man in town » Seven Sisters Blues, J.T. Funny Paper Smith (1931). • Surnom d’Ida Carter, l’une des plus célèbres conjure* ladies. ► SEVENTH SON. Le septième fils, celui auquel la tradition attribue des pouvoirs particuliers (prédiction de l’avenir entre autres) : « Well I can tell your future Before it comes the past And I can do things fo’ you That make the heart feel glad I can look at the skies and predict the rain I can tell when a woman’s got another man I’m the one, yes, I’m the one The one they call the seventh son » Seventh Son, Willie Dixon (1970). ► SEVEN-UP. Jeu de cartes très en vogue parmi les Noirs et dont le but est de réunir une combinaison de sept points : « Little girl is sayin’ to her mother and father to tell the Santa Claus to bring me a lil’ ol’ deck of cards, so I can play seven-up in the park, but while that lil’ girl plays, death may be her Santa Claus. » Death May Be Your Santa Claus, Rev J.M. Gates (1926).

SHACK Taudis, bidonville : « I gave you a brand new Ford You said : “I want a Cadillac” I bold you a ten dollars dinner You said “Thanks for the snack” I let you livin’ in my penthouse You said : “It’s just a shack” » How Blue Can You Get, B.B. King (1964). ► SHOTGUN SHACK. Cabane aux pièces disposées de chaque côté d’un couloir central. Cette disposition particulière permettait, dit-on, aux chasseurs de prime de tirer (shoot) facilement sur d’éventuels fugitifs.

SHADOW Surnom du batteur Rossiere « Shadow » Wilson (1919-1959) : « Shadow and Billy [Eckstine] were tight buddies* and both were friends of mine. I ’d known Shadow from Frankie Fairfax’s Band. Shadow was the drummer* in the band* that mutinied on Frankie when everyone quit just before I joined. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

SHAG 470. Danse du début du siècle revenue à la mode pendant la période swing. 471. Terre à terre (syn. : downhome) : Shaggy Dad, Lightnin’ Hopkins (1965). 3- Acte sexuel.

SHAKE ► Danse des années 20 remise au goût du jour dans les années 60 par Otis Redding : Do That Shake Dance, Washboard Sam (1942). ► V. Secouer, branler. 472. SHAKE BABY. Pantalon particulièrement moulant. 473. SHAKE DANCER. Syn. de gogo* girl : Shake Dancer, Little Walter (1957). 474. SHAKEDOWN. ® Pot-de-vin. ® Passage à tabac, cuisinage, chantage. @ Fouille. ® Danse. 475. SHAKER. Contremaître, patron. k SHAKIN’ IT UP. Voir walk that walk. SHAKE THAT THING (SHAKE IT). Remuer son popotin, se bouger le cul. ® Baiser : « I’ve got nice clean linen And easy* ridiri* springs But it don’t mean nothin’ If you can’t shake that thing » Feather Bed Blues, Bumble Bee Slim (1935). ® Danser avec beaucoup de feeling, d’inspiration (années 1900-1950) : « Now all the people Ask me why I’m alone A sissy* shook that thing And took my man from home » SZssy Blues, Ma Rainey (1926).

SHAKEY Surnom des chanteurs et harmonicistes James D. Harris (1921-1990) alias « Shakey Jake » qui vécut professionnellement des jeux de cartes et de dés (d’où «Shake them, Jake », bientôt contracté en « Shakey Jake »), et Walter Horton (1918-1981) : Shakey Boogie, Walter Horton (1964).

SHANTY Bidonville (années 30) : A Shanty in Old Shanty Town, Coleman Hawkins (1944).

SHARE-CROPPING 1867. Système de métayage issu du Delta*, appliqué dans le Sud. Le propriétaire fournissait la terre, la maison et l’équipement minimum; en contrepartie le métayer (share-cropper), outre le travail qu’il fournissait, était redevable d’un loyer et d’une partie de la récolte : « Dans à peu près tout le Sud rural, les fermiers noirs, mais aussi blancs, sont des péons, liés par la loi et la coutume à un esclavage économique d’où la seule évasion est la mort ou le pénitencier. » W.E.B. Du Bois, The Souls of Black Folk (1903).

« My sister and my brother-in-law Come a mighty* long way From share-cropping in 1947, boy Every year they got to find a new place to stay Now they got their own place and land For their cattle to graze » /'m in The Big City, Juke Boy. Bonner (1968). Le share-cropping a été progressivement remplacé par le salariat dans les années 50, avec la généralisation des machines à cueillir le coton.

SHARK Requin. ► Escroc, requin. ► Champion, as : « “Hell*, don’t be messing* with this guy*. This guy is a shark!”. I told them, “Boys, I been kidding you all along. I knew all these tunes anyhow. Just listen.” » Alan Lomax & Jelly Roll Morton, Mister Jelly Roll. SHARP Aigu, tranchant. 476. Elégant, bien sapé (années 20-40) : « The hip* cats ’round the corner They don’t look sharp no more » Skidrow Blues, Jimmy Witherspoon (1947). « He was sharp! His suits he wore was two-tone. He had a brown suite, it would be dark brown on this side this way, this leg would be dark brown, this arm and his chest ’d be dark brown, and this other side’d be beige brown like that, that’s the kinda suits he wore. » Interview de Lee Shot Williams par Sebastian Dan- chin (1984), in Earl Hooker, vie et mort d’un héros du ghetto. 477. Joueur expérimenté, arnaqueur. 478. Intelligent, rusé : « Most of the pimps* were good gamblers also... And Henry’ Zeno was in there with them [...] He even had several prostitutes on his staff working for him [...] By that he would handle more cash than the average musician [...] And he was little short dark sharp cat* and knew all the answers. » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► CAT WITH SHARP CLAWS. Voir cat.

SHAVE ’EM DRY Litt. : les raser à sec. • Baiser sans préliminaires. « Shave ’em dry is what you call makiri* it with a woman ; you ain’t doin’ nothin’, just makin’ it. » Interview de Big Bill Broonzy, cité par Paul Oliver dans Screening The Blues. « I got nipples on my titties Big as the end of my thumb I got something ’tween my legs ’ll make a dead man come Ooh daddy, baby won’t you shave ’em dry Won’t you grind* me baby Grind me ’til I cry' » Shave 'etn Dry, Lucille Bogan (1935?). ► Se conduire mal.

SHIMMY Du français « chemise ». 479. Danse populaire noire lancée en 1918 par la chanteuse Gilda Gray : « Now one old sister By the name of sister Green Jumps up and done the shimmy You ain’t never seen » Preachin' The Blues, Bessie Smith (1927). 480. Symbole d’un style de vie libre, le shimmy rejoint en cela par Te«gZe* rock ou le ballin ’* the jack, évoque, sans ambiguïté, le plaisir sexuel : «You even told me Right in my face That you had another woman To shimmy in my place » Ha-Ha Blues, Rosie Mae Moore (1928). 481. Le jeu de chemin de fer. e • SWAMP SHIMMY. De Swamp, quartier le plus mal famé de La Nouvelle-Orléans du début du xix siècle.

SHINE Cirage. ► Noir, vu par un Blanc (années 1900- 1930): « Good morning, captain* Good morning, shine Do you need another muleskinner On your new road line?” Muleskinner Blues, Eli Owens (1970). ► Personnage de la tradition orale négro- américaine et spécialement des toasts* : Hey Shine, Snatch and The Poontangs (1968). • BLACK BOY SHINE. Pseudonyme du bluesman Harold Holiday (?-cz? 1948). Noter le pléonasme, black boy et shine ayant le même sens, Noir. • SHINEY TOWN. Quartier noir : Sbiney Town Blues, Frank Stokes ( 1929).

SHINGLE (Shingle-bob) Coupe de cheveux « à la garçonne », à la mode dans les années 20 : « Gimme red lipstick and a bright purple rouge A shingle-bob haircut and a shot* of good booz’* Hurry down, sweet daddy, come biowin’* your hom If you come to late, sweet mama will be gone » Richlands Women Blues, Mississippi John Hurt (1963). SHIT Merde. ► Interjection: merde! « But every now and then, George [Wallington] would miss a chord, and Oscar [Pettiford] would jump all over him, “white muthafucka*, can’t play. Shit!” » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► Grabuge, merde : « The Street* was the jumping off point for all the crackers* from down South going overseas to different places. They’d come down to Fifty*-Second Street to start some shit. And they used to get it too because everybody down there was ready at that time. I was standing there with my hom* but I used to carry a carpet knife, one that cut carpet with, with the crook in it. Ifesszr*, I was ready* for Fifty-Second Street. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► Haschisch : « When we had that first big band*, I got tied up into shit, I mean heavily. Well, Dizzy* [Gillespie] took me off the streets then. » Interview de Max Roach cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop. ► Truc, bidule : « I said, “Man, it’s new shit. What the fuck* are you talking about, man, come on.” He’d say, “Man, well he does all them old klook-mops ’n shit. So that’s how he [Kenny Clarke] got his name, Klook-mop, because Teddy Hill said he was playing all them klook-mop beats.” » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. 482. SUIT OUT OF LUCK. Variante argotique de short of luck : pas de pot! (voir S.O.L.).

SHOE Chaussure. Dans le langage des hoppers, personne élégante. 483. SHOE BOOTY. Fille particulièrement moche, boudin : Chabootie, Gene Ammons (1948). e 484. SOFT-SHOE. Danse du XIX que l’on pouvait voir présentée dans les spectacles de minstrels : « Non content d’être un sacré trompettiste, Harry7 Smith faisait aussi un numéro de danse. Il savait danser à claquettes et en soft-shoe, il connaissait le buck* and wing, les kicks*, les splits* et quantité d’autres pas. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues.

SHOOK-UP Désaxé, déséquilibré, déboussolé : « They’re drinkin’ homebrew from a water cup The folks dancin’ got all shook-up And started playin’ that rock* and roll music » Rock and Roll Music, Chuck Berry (1957).

SHOOT 1. Dans le vocabulaire des drogués, se faire une injection : « Diz* [Gillespie] went to the bathroom and peeped over into the stall where you sit down, and Bird* [Charlie Parker] was obviously in there shooting some shit*. Diz came out the door talking to us but really drugged about it. “Do you know what that muthafucka* [...] is doing?” he said. “He’s in there shooting shit.” I hit the microphones and it went through the whole house to the speakers, and Bird heard it in the bathroom. Man, you heard spoons dropping and needles, and Bird comes rushing out the bathroom. » Interview de Max Roach, cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop. ► SHOOTING THE AGATE. Voir agate. ► SHOOT CRAPS. Jouer aux dés : « I been shootin’ craps and gamblin’ Good gal*, and I done got broke* I done pawned my 32* special*, Lord And my clothes in soak » Broke Down Engine, Blind Willie McTell (1933).

SHORSTUFF Surnom du guitariste et chanteur de blues John Wesley « Shortstuff » Macon (1923- 1973).

SHORTENING BREAD Voir bread. SHORTY Surnom du trompettiste de l’orchestre de Count Basie Harold « Shorty » Baker (1913-1966) et du bluesman John Henry Fortescue alias « Guitar Shorty » (1932- 1976).

SHORTY GEORGE 1. Surnom d’un train qui, une fois par mois, amenait femmes et petites amies aux prisonniers de Sugarland*, Texas, avant de les ramener à Houston : « Well the Shorty George Ain’t no friend of mine He keeps a-takin’ all the women Keep all the men behind » Short)' George, Leadbelly (1940). ► D’où la deuxième acception du terme, amant : Shorty’ George, Count Basie (1938).

SHOT Un verre, un canon. Injection (drogue), d’où bot shot, injection mortelle, overdose. Plaisir sexuel, éjaculation : « You got bad blood* baby And I think you need a shot Lord my needle’s* in you baby And you seems to feel all right And when your medicine comes down I want you to hug me tight » I Think You Need a Shot, Walter Davis (1936). D’où shot in the front door, coït, shot in the backdoor, sodomie, et shot upstairs, fellation. • Surnom du bluesman Lee « Shot » Williams (1938): « My people used to call me “Shot", but now it’s like “you’re a big shot*", you know, they say “You're a shot”, you know. Whatever, you know. » Interview de Lee « Shot » Williams, cité par Sebastian Danchin dans Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto. ► BIG SHOT. Gros bonnet, grosse légume (syn. : big dog) : « Well, I ain’t got no more to say And I ain’t going to chase you around Some day I’ll be running With the biggest shots in town » Green County Gal, Bumble Bee Slim (1936).

SHOUT Afr. Du wolof saut, marcher, courir, renforcé par l'anglais sbout, crier. Cri : « Sorte de signature musicale, de fiche d’identité qu'un esclave (plus tard un ouvrier agricole, un paysan de couleur) chantait à tue-tête, criait, lorsqu’il voulait annoncer sa venue ou sa présence, par une modulation particulière et bien reconnaissable de sa voix. Ces sbouts se sont perpétués jusqu’à nos jours, mais sous la forme de courtes phrases chantées, psalmodiées par les marchands ambulants dans le Sud des Etats-Unis. » Maurice Cullaz. Certains de ces shouts sont utilisés par George Gershwin dans Porgy and Bess. ► Syn. de rent* party : Jamaica Shout, Coleman Hawkins (1933). ► Danse. « I’m gonna do the shout Got a letter this morning Got a letter from my baby She was on her way, on her way home » Doin' The Shota. John Lee Hooker (1970). En règle générale, elle n’est qu’un prélude à l’acte sexuel (John Lee Hooker le suggère un peu plus loin) : « Said, me and my baby We gonna do the shout Gonna lock up the door And ease down the window If anybody call, said, we’re not in home If the telephone ring, we’re not in home We're doin' the shout Just me and my baby » 485. RING AND SHUFFLE SHOUT (RING SHOUT). Ronde religieuse, reprenant des figures africaines, se déroulant après l’office dans les églises noires jusqu’à la guerre de Sécession : «Après l’office régulier, on pousse les bancs contre le mur. Jeunes et vieux, femmes et enfants... se tiennent tous debout au centre de la salle, et lorsqu’on entonne le spiritual, ils commencent à marcher, puis, petit à petit, à faire des shuffles, l’un après l'autre, en formant un cercle. Le pied ne quitte pratiquement pas le sol et la progression est surtout due à des secousses, des tressautements qui agitent le sbouter tout entier et le font bientôt transpirer à grosses gouttes. » Cité par Eileen Southern in Histoire de la musique noire américaine. Le pas de base, ou shuffle*, est un pas traîné, sans croisement des pieds ; ne pouvant donc être assimilé à un pas de danse, il permettait de détourner l’interdiction de danser prononcée par l’église protestante. 486. Si JOUTER. Voir blues* sbouter.

SHRIMP Crevette. Métaphore peu courante pour excitation ou plaisir sexuel : « I woke up this mornin’ And all my shrimps was dead and gone I was thinkin’ about you, baby Why you hear weep and moan » Dead Shrimps Blues, Robert Johnson (1937). On peut en déduire que dead shrimps renvoie à l’absence de désir sexuel ou à l’impuissance : « I got dead shrimps And someone is fishin’* in my pond I’ve served my best bait*, baby And I can’t do that no harm [-.] Now you taken my shrimps, baby You know you turned me down I couldn’t do nothin’ until I got myself unwound »

SHUCKING Conduite verbale défensive adoptée en présence d’un supérieur pour éviter réprimande ou châtiment (voir dirty* dozens) : « I wanna tell you all married man You better leave these married women alone You gonna knock on her door early one morning And her husband ain’t gonna be gone You can start shucking and jiving* Say, “this is the wrong number I knock on Well I’m sorry mister I thought this was my uncle Joe” » High Rise, Chisco Chism (1979).

SHUCKS ► Feuilles externes de la canne à sucre : Dropping Shucks, Louis Armstrong (1926). ► Blabla, fadaises, balivernes : « Aw shucks, hush your mouth Baby, you knockin’* me out You my kind of woman You know what is all about » Au' Shucks, Hush Your Mouth, Jimmy Reed (1964). ► SHUCKING SUGAR. Enlever les feuilles externes (shucks) de la canne à sucre : Shucking Sugar Blues, Blind Lemon Jefferson (1926).

SHUFFLE Mouvement traînant des pieds qui ne perdent pas le contact avec le sol ; utilisé à l’origine pour détourner l’interdiction de danser faite aux esclaves ; pas de base dans les shouts*. Nom d’une danse (ca 1900) : « We knocked on the door and it opened with ease And a lush* little girl said, “come in please” And before we could even bat an eye We were right in the middle of a big fish* fry. It was rockin’ You never seen such scuffling* and shufflin’ ’til the break of dawn » Saturday Night Fish Fry, Louis Jordan (1949). 3- Rythme de batterie : « Dizzy* [Gillespie] was the master of all the music. I came in the band*, and I was doing some funny stuff* on the drums*, trying to play shuffle rhythms, I thought. And he stopped me right in the middle of it. The band was still playing and people were still on the floor dancing. — Blakey, what are you doing? he said. — I don’t know, I said. — Then why do you do it? If we had wanted a shuffle here, we’d hire Cozy Cole. We want you to play your drums, the way you play them. » Interview d'Art Blakey, cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop. 4. Elément de titres de morceaux généralement rapides : . Roseland Shuffle, Count Basie (1937). ► RING AND SHUFFLE SHOUT. Voir shout.

SICK AND TIRED Litt. : malade et fatigué. Dégoûté : « I believe I believe I’ll make a change Well I’m so sick and tired Sleepin’ out in the cold ice and rain » 1 Believe I’ll Make a Change, Johnny Shines (1972).

SIDEMAN Accompagnateur, membre d’un orchestre sous l’autorité du leader : «Jazz musicians were paid some pitifully low wages at that time, as sidemen, and since I had no group of my own established, people considered me a sideman. That status, and the little money that went along with it, 1 refused to accept. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

SIDEWINDER Coup de poing, tarte; cogneur, dur à cuire ; garde du corps : Sidewinder, Lee Morgan (1963).

SIGGING Autre nom des douzaines (voir dirty* dozens) à Chicago.

SIGNIFY 1. Conduite verbale manipulatrice par laquelle quelqu’un « signifie » sa domination sur l’autre, non seulement en imposant sa loi dans l’échange, mais aussi en choisissant le moment où celui-ci doit cesser (avoir le dernier mot) ; cela va de la simple mise en boîte où l’on fait marcher l’autre : « He [mon père] used to signify a lot between Philip and I. He'd go up to Philip and say : “Well, it don’t look like you gonna play anything tonight. I guess i'll have to call Buddy.” And he’d do the same damn* thing to me. » Interview de Buddy Guy, cité par Robert Neff et Antony Connor dans Blues, à l'échange d’insultes et d’obscénités caractéristiques des douzaines (pour plus de détails, voir duly* dozens) : « I love mine just like you love yours And it ain’t none of my business What (you?) wanna do behind closed door ► ain’t gonna mess* with your woman And look brother*, don’t mess with mine All that signifyin’ and jokin' Can get you put right on the firing line » Firing Line, Albert King (ca 1975). 2. Dans le parler des ruraux noirs de Floride, frimer, poser, se pavaner : Signifying, Woman, Jazz Gillum (1947). SIGNIFYING. Syn. de dirty* dozens. • Surnom de la chanteuse Mary Johnson jca 1900). SIGNIFYING MONKEY. Litt. : le singe vanneur, l’un des personnages importants de la tradition orale noire ; sa force tient à la ruse et à l’utilisation du discours : il embobine, manipule pour arriver à ses fins. Voir aussi toast.

SING SING Nom original du bourg du comté de Wet- chester, New York, siège de la prison d’Etat : Sing Sing Prison Blues, Bessie Smith (1924). Après la construction de la prison, le village fut rebaptisé Ossining en 1901.

SIR Surnom du pianiste « Sir » Charles Philipp Thompson (1918): « Lester [Young] m’a baptisé Sir Charles. y avait trois Charles qui travaillaient au Cafe Society où nous jouions. [...] Quand il y avait un coup de fil pour Charles, c’était la panique. [...] Puis un jour Lester a dit : “Ecoutez, il faut trouver une solution pour cette histoire. Toi, y a mon pote qui dit que tu as quelque chose de royal, tu devrais donc avoir un nom pour te différencier. Alors on va t’appeler sir Charles.” C’est comme ça que j'ai eu mon surnom... » Interview de Sir Charles Thompson par Helen Dance, Jazz Oral History Project, Rutgers Institute of Jazz Studies, citée par Luc Delannoy dans Lester Young Profession President.

SISSY Poule mouillée, femmelette; homosexuel efféminé : « Some are young, some are old Mv man says "sissy got good jelly* roll" My man got a sissy, his name is Miss Kate He shook* that thing like jelly on a plate » Sissy Blues, Ma Rainey (1926).

SISTER Sœur. Sœur (de race), terme à connotations très positives : « Sweet Lorraine, Sioux City Sue Sweet Georgia Brown, Caldonia too They’ll be there, jumpin’* like men Hey sisters, ain’t you glad? We got a news There’s good rockin’* tonight » Good Rockin’ Tonight, Wynonie Harris (1947). Dans les années 60, le terme est généralement renforcé par soul*. Membre d’un mouvement religieux, sœur (en religion) : « Preacher* come to your house You ask him to rest his hat Next thing he want to know “Sister, where’s your husband at?” » Preacher Blues, Hi Henry Brown (1932). • Surnom de la chanteuse et guitariste de gospel «Sister» Rosetta Tharpe (1921- 1973). 487. SEVEN SISTERS. Voir seven. 488. SOUL SISTER. Voir soul.

SIT IN Pour un musicien, jouer en invité, avec un groupe constitué : Sittin' In, Chu Berry (1938).

SIX Pour « sextet » : Kansas City Six, sextet composé de Buck Clayton, Lester Young, Charlie Christian, Freddie Green, Walter Page et Jo Jones (1939).

SIX-SHOOTER Pistolet « six coups » : « Now the blues don’t mean nothing When you got your six-shooter on your side If your woman mistreats* you Shoot her and grab a train and ride » Six Shooter Blues, Georgia Tom (1930).

SIXTEEN Terme archaïque pour boogie-woogie : «Je me souviens — j’avais treize ans, c’était en 1896 — comment Turk jouait une note de la main droite pendant qu'il en jouait quatre de la gauche. On appelait ça sixteen, ce qui s’appelle boogie- woogie* aujourd'hui. » Interview d’Eubie Blake, cité par R. Blesh et H. Janis dans They All Played Ragtime.

SIZE Taille. Au sens figuré, organes génitaux masculins : « I dreamed I saw my mama Tell me good-bye Then around the backdoor* I saw her try another man’s size » Backdoor Blues, Emery Glen (1927).

SKEEDLE LOO DOO (Skoodeldum doo, skoodle um skoo). Danse du début du siècle : Skeedle Loo Doo Blues, Blind Blake (1926). « Say pal*, do you know anything about that new dance They call Skoodle um skoo ► No I don’t ► It’s a dance they call Skoodle um skoo, let’s go [...] You got to Skoodle um skoo, oh baby got to Skoodle um skoo Come on mama, got to Skoodle um skoo, Skoodle um, Skoodle um skoo » Skoodle Um Skoo, Papa Charlie Jackson (1927). Skoodeldum Doo, Seth Richard (1928).

SKID ROW De skid, prendre la mauvaise pente. Quartier mal famé, délabré : « Me and Joe Lutcher got a team together called the Little Richard Evangelistic Team. We started traveling across the country, and we helped many people through the ministry [...] We were able to help a lot of people on the skid row, we fed them and gave them a place to sleep. » Interview de Little Richard cité par Charles White dans 71be Life and Times of Little Richard.

SKIFFLE (Skittle) Syn. de rent party’ : « All right now baby Shake* that thing Now look-a-here, ol’ gal* The hometown skiffle » Hometown Skiffle, Roosevelt Holts (1965).

SKIN Peau. ► Batterie, drums (années 20-30). ► Main. 489. GIVE SOME SKIN. Salut rituel par lequel les deux interlocuteurs se frappent les mains selon différentes techniques. C’est un geste d’approbation ou de compliment : « [Fats Waller s’adressant à Slick Jones :] “Gimme some skin, man, gimme some skin!" And as the pace became more torrid and the joint* really began to rock*, Fats* would scream to Bugs* Hamilton, “Ah, send* me, send me... Send me... Yeah!” » Interview de W. T. Ed Kirkebv in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 490. GEORGIA SKIN, SKIN BALL OU SKIN GAME. L’un des jeux de cartes les plus prisés des Noirs : « Grand, efflanqué, le teint clair, il passait pour le meilleur joueur de Georgia skin de la région. Il lessivait tous les résiniers qui venaient en ville toucher leur paye et dont le Georgia skin était le jeu préféré. De tous les jeux auxquels j’ai vu jouer, aucun ne permet des tricheries aussi effrontées. » Jellv Roll Morton, cité par Alan Lomax, dans Mister Jelly Roll. « Went out to the skin game last night Thought I’d have some fun Lost all the money that I had, baby Had to pawn my special gun Says, you better let the deal go down Skin game’s cornin' to a close And you better let the deal go down » Skin Game Blues, Peg Leg Howell (1927). 491. SKIN GAME. Affaire véreuse.

SKIP Surnom du bluesman du Mississippi Nehemiah « Skip » James (1902-1969) : « I’d skip around at the parties people used to have in their houses, so they give me the name of Skippy. » Interview de Skip James cité par Eric Sackheim dans The Blues Line.

SKRONTCH 1. Organes sexuels : « I’ve often wondered since about the condition of the wigs of the busy radio censors, if they ever learned the truth about the significance of such recorded titles as The Skrontch, T.T. on Toast, Warm Valley, and others. » Interview de Louis Metcalf, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 2. Danse créée au Cotton Club en 1938 : Tlx Skrontch, Duke Ellington (1938).

SKUNK Traître, indie, mouchard : The Skunk, Fats Navarro (1948).

SLAPPING ► Technique de contrebasse consistant à faire claquer les cordes contre le manche (par opposition au plucking où le contrebassiste fait simplement vibrer les cordes). ► Se dit également d'un saxophoniste faisant claquer l’anche de l’instrument avec sa langue : « [Barney] Bigard [...] le saxophoniste de La Nouvelle-Orléans qui savait le mieux “slapper” de l'anche. » Stanley Dance, Duke Ellington.

SLAVE Esclave. Boulot, travail (par opposition à hustle et aux multiples façons de se procurer de l’argent). V. Trimer, suer sang et eau, bosser comme un nègre : « I work so hard from dusk to dusk Can’t find a woman that I can trust ’cause I’m poor coal loader, way down in the mine Slavin’ for you woman, I almost done gone blind » Poor Coal Passer, Springback James (1936).

SLEEPY Endormi. Surnom du bluesman « Sleepy » John Estes (1904-1977) : «A une certaine distance de nous se trouvait un homme blanc qui indiquait à John Estes ce qu'il fallait que nous fassions [sur un chantier de pose de voies ferrées] pour qu’il puisse à son tour nous le chanter. Un jour, ce Blanc continuait de nous faire des signes, mais nous demeurions là sans bouger. Il se fâcha et s’approcha de nous. — Qu’est-ce que vous foutez là, sacrés Nègres? Nous ne pouvions lui répondre. Il se tourna vers John Estes : — Qu’est-ce qui ne va pas? John Estes ne répondit pas. Le Blanc le frappa. John se réveilla, se mit aussitôt à chanter et le travail reprit. C'est de là que provient ce nom, qui lui est resté, “Sleepy” John Estes. » Big Bill Broonzy et Yannick Bruynoghe, Big Bill Blues.

SLICK Habileté. ► Noir aux manières de Blanc. A l’origine, Noir ayant fait décrêper ses cheveux pour se rapprocher des canons blancs de la beauté. ► (Ou slickster.) Amaqueur, filouteur: You Turn Slick on .Me, Howlin’ Wolf (ca 1973). 492. Surnom du batteur et chef d'orchestre Wilmore « Slick » Jones (1907-1969) : « Fat’s [Waller] booming voice would urge him to greater effort with “Get on your feet, Baby Bear*, and earn your salary.” Or to Slick Jones who would be frantically chewing a wad of gum, "Gimme some skin*, man, gimme some skin !” » Interview de W. T. Ed Kirkeby, in Hear Me Talkin to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

SLIDE Glisser, coulisser. Tube métallique, glissé à l’annulaire ou à l’auriculaire de la main gauche (pour un droitier), que le guitariste fait glisser sur les cordes (voir bottleneck) : « That ’s All Right. 1 heard him [Earl Hooke'r] play it in Cairo, Illinois, in 1950. It was a little club called Red's Club. I heard him play that tune with a slide... and that’s when I knew it wasn’t nobody in the world could play a slide like that. Because he could actually make a guitar talk. I believe he influenced me more than anybody, because the things he would do with a guitar was awful strange, and as a kid I wanted to get the sound that he got. » Interview d'Andrew Brown, cité par Dick Shurman, pcx'hette du disque Black Magic 9001. Surnom du tromboniste Locksley Wellington « Slide » Hampton (1932).

SLIDING DELTA Nom d’un train de la Yazoo Delta Railroad (voir Yellow* Dog) parcourant le Delta* entre Greenville et Greenwood, Mississippi : « When you hear the Delta, baby It’s don’t you want to ride*? Baby, Sliding Delta Don’t you want to ride? If 1 don’t get to ride it Baby, gonna sure, Lord, lose my mind » Slidiri Delta, Tommy Johnson (1930).

SLIM Surnom des bluesmen James Moore alias « Slim Harpo » (1924-1970), Otis Hicks alias « Lightnin’ Slim » (1913-1974), Peter Chatman alias « Memphis Slim » (1915- 1988), Eddie Jones alias « Guitar Slim » (1926- 1959), Albert Luandrew alias « Sun- nyland Slim » (1907), Allen Bunn alias « Tarheel Slim » (1924-1977), Morris Holt alias « Magic Slim » (1937), Amos Easton alias « Bumble Bee Slim » (1905-1968), Oscar Willis alias « T. V. Slim » (1916- 1969), et du jazzman Bulee « Slim » Gaillard (1916-1991) : Slim’s Jam, Slim Gaillard (1945).

SLIP (someone) IN THE DOZENS Voir dirty’* dozens.

SLIPHORN Trombone : Sliphorn Outing, Benny Morton (1944).

SLOP L’une des danses « solitaires et asexuées » (selon Henry Miller) lancées dans les années 60 à la suite du phénoménal succès du twist : The Slop, Jasper Love (1960).

SLOPPY Ivre, imbibé de mauvais bourbon : « I’d rather be sloppy drunk Better than anything I know And another half a pint, Mama will see me go » Sloppy Drunk Blues, Leroy Carr (1930). ► SLOPPY JOE. Restaurant de bas étage, gar- gotte : Sloppy Joe, Duke Ellington (1929).

SLOW AND EASY Expression évoquant le rythme d’un coït « lent et aisé » : « Don’t care where he is Don’t care what he does All my love is his He’s my only one Ah, my slow and easy man » Slow and Easy Man, Bessie Smith (1928).

SLOW-DRAG Voir drag.

SLUE FOOT Pour slew foot, pied tordu, pied-bot ; Maladroit, balourd; moche. ► SLUE FOOT JOE. Pseudonyme utilisé dans certains enregistrements par le bluesman Ed Bell (ca 1905- 1960). ► SLUM GULLION Ragoût de bœuf et de pommes de terre : Slum Gullion Stomp, Cow Cow Davenport (1929).

SMACK Bise. 493. Gifle. 494. Marijuana. ► Surnom du pianiste et arrangeur James Fletcher Henderson (1898-1952): « Along about the latter part of 1923, I received a telegram to go to New York to join the great Fletcher Henderson’s orchestra. That’s how I felt about “Smack” Henderson, years before I had seen him in person, from recordings he made for years by himself with Ethel Waters and Revela Hughes. » Interview de Louis Armstrong, 'm Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

SMELL A RAT Voir rat.

SMOKE Fumée. Noir; alcool trafiqué (.moonshine’whisky). • SMOKE TOWN. Quartier noir : Smoketown Strut, Sylvester Weaver (1924). • SMOKE HOUSE. Dans les Etats « secs » (voir dry), lieu où l’on pouvait se réunir pour fumer, jouer aux cartes et aux dominos ; bar : Smoke-House Blues, Jelly Roll Morton (1926). ► SMOKEY. Surnom des bluesmen Andrew « Smokey » Hogg (1914-1960), Abraham « Smokey » Smothers (1925), « Smokey » Babe alias Robert Brown (1925-1975) et du chanteur Smokey Robinson (1940). • SMOKY HOLLER. Surnom de la ville de Tallahassee, capitale de la Floride : « When you get down to Smoky Holler Put your money in your shoe These Smoky Holler women ’sho put a medicine on you » Tallahassee Women, Tallahassee Tight alias Louis Washington (1934).

SNAKE Serpent. 1. Riche en connotations — clandestinité, pêché, infidélité — depuis la Genèse, le serpent est l’une des métaphores les plus communes pour « amant », avec ces différentes variantes, king snake, rattlesnake... : « Mmm Wonder where is my stinging* snake gone I can’t see no peace Since my stinging snake left the home [...] Mmm Where is my stinging snake Aw, I believe to my soul That my stinging snake Trying to put* me down » Stinging Snake Blues. Memphis Minnie (1934). 2. Sorcier, envoûteur (voir doctor). à- Dans le langage des hoboes, aiguilleur (vient du « S » que portaient les revers de leur uniforme). ► BLACK SNAKE. Type de couleuvre de grande taille, commune en Amérique du Nord. Métaphore pour amant(e) : « Some black snake Been suckin’ my rider* You can tell by that I ain’t gonna (?) him no more » Black Snake Blues, Martha Copeland (1926). ► FATTENING FROGS FOR SNAKES. Litt. : engraisser des grenouilles pour les serpents. Expression campagnarde signifiant qu’une femme n’aime pas nourrir son homme pour se le voir « souffler » par une rivale : « Girls around here are just like leeches Play in your orchard and steal your peaches* I wish all these chicks* would let my man be ’cause all his love belongs to me So now, I’m tired of fattening frogs for snakes I dress him all up so he’ll look good He chew with all the chicks in my neighbourhood So now, I’m tired of fattening frogs for snakes » Fattening Frogs for Snakes, Rosetta Crawford ( 1939). ► SNAKE DOCTOR. Voir doctor. ► SNAKE EYES. Voir eye. ► SNAKE HIPS. Danse du début du siècle. • Surnom du danseur Earl Tucker qui fit les beaux jours du Cotton Club de Harlem dans les années 20. 2. SNAKE MARIE. Surnom de Marie Laveau, célèbre envoûteuse (voir conjure* lady) de La Nouvelle-Orléans (XIXe) qui avait l’habitude de danser avec un serpent.

SNATCH Empoigner, saisir. ► Sexe féminin : Snatch and The Poontang, enregistré par Johnny Otis (Kent 557). ► Voler, piquer; menacer: Snatch Wat Thing, Blind Willie McTell (1933).

SNEAK AROUND Tourner autour, rôder, draguer « I saw you wigglin’ and gigglin' I'm mad as 1 can be We’ve got seven* children and none of them looks like me That’s why I’m gonna leave you wax out on the outskirts of town ’cause I don't want nobody who's always sneakin’ around » We Gonna Move (to The Outskirts of Town), Case* Bill Weldon (1936). 495. SNEAKY PETE. Voir Pete.

SNIFF Renifler, flairer. Inhaler de la « poudre » par le nez : « Now you’re in Dallas, boy Please visit old Elm* Street You can see the snuff-sniffin’ women Like a police on his beat » Elm Street Woman Blues, Dallas Jamboree Jug Band, vcl par Carl Davis (1935).

SNITCH Voler, tricher : « I hate a-snitchin’ Worse than the good Lord hate sin If they ever get me into trouble Soon on my way to the pen* » Snitchin’ Gambler Blues, Memphis Jug Band (1928). • SNITCHER. Indic, mouchard : « Oh mah babe Way down in Polock town Where de police an’ de snitchers Dey tore my playhouse* down » Cité par Langston Hughes et Arna Bontemps in The Book of Negro Folklore.

SNOOKS Surnom du guitariste chanteur louisianais Fird (Ford) Eaglin (1936) : « So what about Ford ? “Oh well this was a record company, claimed they never heard of the name Fird, so they changed it to Ford. Imperial named me that in ’53 ” And Snooks? “Did you ever hear of the radio programme Baby Snooks ? That was a character, always in trouble. Well, that’s how I got that name. I was a bad boy, you believe that, used to swing* on the kitchen cabinet, all those things. So they called me Snooks.” » Interview de Snooks Eaglin par Sam Charters, in The Legacy of The Blues.

SNOOKIE (Snooky) Rusé, malin. Surnom de l’harmoniciste James Edward « Snooky » Pryor (1921) et du trompettiste Eugene Edwards « Snookie » Young (1919).

SNOW Neige. Cocaïne, neige : « Girls in white dresses With blue satin sashes, Snowflakes that stay On my nose and eyelashes » My Favorite Thing, Sheila Jordan (1975). ► SNOW BALL. Terme péjoratif pour Noir.

SNUFFY Poivrot, ivrogne ; « I took her to the opera I look at baby’s lip By the way that it was drippin’ I know the baby had a dip Snuff dippin*' mama, What makes your lip hang so low You’ve got to stop that dippin’ Or daddy don’t love you no more » Snuff Dipping Mama, Charles Brown (1947).

SOAP Savonner. Graisser la patte. Pot-de-vin ; argent, pèze : No Soap, Erskine Hawkins (1939).

SOCKS Chaussettes. Improvisations : Tired Socks, Johnny Hodges (1939).

SOFT-SHOE Voir shoe.

SOLID ► Plein, bon (comme dans l’expression une bonne heure, une bonne année) : « Some got six months Some got one solid year indeedy But me and my buddy Both got lifetime here » Bad Luck's My Buddy, Noah Lewis (1930). ► Fantastique, super, au poil (années 30- 60): « When I was free I thought I was smart Whole lot of women and a Cadillac car Stetson shoes, you hear me, Dunlap hats All the little girls call me solid cat* » Prisoner's Plea, Billy Boy Arnold (1957). ► En jazz, bien rythmé, « carré ». ► SOLID SENDER. Voir send.

SOLOMON Voir King Solomon.

SOMETHING (Something else) Extraordinaire, fantastique, super : « The Sunset* had charleston* contests* on friday night, and you couldn’t get in the place unless you got there early [...] The Charleston was popular at that time [1926] until Percy Venable, the producer of the show, staged a finale with four of us band boys closing the show doing the charleston. That was really something. » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. « From the first day I heard it [Dizzy Gillespie], I said to myself : “Man, this cat* is something else.” And now, today, that cat is still as great as he ever was. » Interview de Fats Palmer cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop.

SON Fils. 496. Surnom des bluesmen « Son » Bonds (1909-1947), James « Son » Thomas (1926), Frank « Son » Seals (1942), Melvin «Lil Son» Jackson (1916-1976) et Eddie James « Son » House (1902-1988) : « This is Son House and Leroy Williams gonna play you a little piece here at Lake Cormorant, Mississippi. Now, how about a disc at that song? » Introduction parlée à Delta Blues, Son House (1941). • SEVENTH SON. Voir seven. • SONNY. Fils (avec une nuance affectueuse). Surnom des pianistes Conrad Yeates alias « Sonny » Clarke (1931-1963) et Alphonso « Sonny » Thompson (1916- 1989), des saxophonistes Edward « Sonny » Stitt (1924-1982), William « Sonny » Criss (1927-1977), Theodore Walter «Sonny» Rollins (1930), des batteurs Percival «Sonny» Payne (1926- 1979), William Alexander « Sonny » Greer (1903-1982), du blues shouter « Sonny » Parker (1925-1957) et des bluesmen Clarence Smith alias « Sonny Rhodes » (1940) et Sanders Terrell alias «Sonny Terry» (1911-1985): « I call her my sugar But sugar never was so sweet Everytime I meet the little girl She knocks* old Sonny off his feet* » Sweet Woman Blues, Sonny Terry (1962). Dizzy Meets Sonny, The Modern Jazz Sextet avec Dizzy Gillespie et Sonny Stitt (1956). Like Sonny, John Coltrane (1960). ► SONNY BOY. Fiston, mec : « Oh yes I just wanted president Roosevelt Well you know, he gone he gone, sonny boy, Ooh well, but this world would never fail » President Roosevelt, Big Joe Williams (1960). • Surnom des bluesmen John Lee « Sonny Boy » Williamson (1914-1948) : « I want a machine gun And I want to be hid out in the wood I want to show old man Hitler That Sonny Boy don't mean him no good » Win The War Blues, Sonny Boy Williamson (1944). De Rice Miller, alias Sonny Boy Williamson n°2 (1901- 1965), d’un troisième Sonny Boy Williamson (qui enregistra quelques faces à la fin des années 60), d'Eugene Powell alias « Sonny Boy Nelson » (1908) et d’« Ole Sonny Boy » (peut- être l’un des pseudonymes d'Alexander «Papa» Lightfoot, 1924-1971). ► SON-OF-A-BITCH. Voir bitch. ► SON-OF-A-GLIN. ® Sorte de ragoût : « Well I’m going to the race track To see my pony run He ain’t the best in tire world But he’s a runnin’ son-of-a-gun » My Black Mama, Son House (1930). ® Syn. de son-of-a-bitch (voir bitch) : « When I think about All the bad deeds 1 have done I say to myself Ooh well, well, I’m no good ■ son-of-a-gun » Sinking Sun Blues. Peetie Wheatstraw (1939). Peut également s’employer (comme son- of-a-bitch) avec des connotations très positives : « Sidney [Bechet], he wouldn’t learn notes, but he was my best scholar. The son-of-a-gun was gifted. Man, he ran away that thing, playing from his heart... » Interview de Louis de Lisle Nelson cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

SONGSTER Collecteur diseur d’histoires et de chansons, au répertoire étendu et varié (berceuses, chants de travail, de cow- boys, blues, spirituals, morceaux issus des minstrels...). Le songster, dépositaire de la tradition orale, est généralement attaché à une communauté; il se produit aussi bien devant un public blanc que noir, lors des différents événements de la vie sociale. Henry « Ragtime » Thomas (ca 1874- 1930), Leadbelly (1885-1949), Frank Stokes (1887-1955), Jim Jackson (1894- 1937), Mississippi John Hurt (1894-1966) et Mance Lipscomb (1895-1976) sont les principaux songsters dont l’Histoire a retenu les noms. Les songsters perdirent en popularité avec l’avènement du disque. « Très souvent itinérant, le musicien, raconteur d’histoires, chanteur de chansons — songster, comme on commence à l’appeler — passe de village en village, de camp forestier en chantier, [...] distrayant ouvriers et contremaîtres, travailleurs agricoles, et forestiers, en échange du gîte, du couvert et d’une bouteille de whisky. » Gérard Herzhaft, Le Blues. Voir blues* singer, musicianer*.

SOUL Ame : « Preacher* took me off of sinnin' Because he says it’s savin’ my soul Now the government takes my woman off the welfare* roll* Boy, that’s funny Man, that makes the money get real funny Man, I ain’t jivin’, man Money got real funny, funny, funny money But I mean real funny, brothers*, real funny » Funny Money, Juke Boy Bonner (1972). ► Individu, personne : « In Derbytown there is a man A nasty little soul Everytime he see a girl He reaches for her » Derby town, Old Cell Odom et Lil « Diamonds » Hardaway (1936). ► Concept exprimant l’identité culturelle et ethnique des Négro-Américains, leur fierté et l’affirmation de leur différence : Do You Have Soul Now? King Curtis (1960). Soul Pride, James Brown (1964). Cette acception du terme trouve sa source dans le livre de W.E.B. Du Bois, The Souls of Black Folk (1903). ► Style de jazz, dit quelquefois aussi funky, churchy ou hard hop, sensuel et expressif ; il fait largement appel au blues et à la musique d’église et a été popularisé par des jazzmen tels Art Blakey et Horace Silver. ► Après la récupération de la soul music par l’industrie du disque, être soul est devenu synonyme de « dans le coup », à la mode. BODY AND SOUL. Amoureux, amant, quelqu’un du sexe opposé avec qui on se sent en accord, affectivement et sexuellement; vient probablement du célèbre thème du même nom immortalisé par Coleman Hawkins (1939). PLAY YOUR SOUL. Exhortation lancée à un soliste (par exemple Big Mama Thornton exhortant son guitariste in Little Red Rooster, 1973). SOUL BROTHER (SISTER). Noir(e) affranchi (e), sans préjugés, fier(e) de son appartenance raciale et de sa culture (années 60) : Soul Brothers, Ray Charles et Milt Jackson (1957). Serenade to a Soul Sister, Horace Siver (1968). SOUL CITY. Harlem. SOUL FOOD. « Nourriture de l’âme », cuisine noire traditionnelle telle que remise en vogue dans les années 60 (travers et tripes de porc, haricots rouges au riz et porc salé, pain de maïs...); elle utilise traditionnellement les bas morceaux, ceux que les Blancs donnaient aux esclaves : « That’s true, man, they* take a turnip, you dig*, and they cut off the best part and throw it away. But I take the greens* and I cook them up in my own apartment there. » Interview d'Eddie Boyd, cité par Sam Charters dans The Legacy of The Blues. « Mon ami Boonie me procurait toujours le meilleur barbecue de la ville : étant de Saint Louis, où c’est une spécialité, j’ai toujours été fou de bon barbecue et de tripes. J’adore la grande cuisine noire, le chou vert, l’igname confit, le pain de maïs, les blackeyed peas et le poulet frit du Sud — entier — accompagné d’une bonne sauce épicée. » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l’autobiographie. SOUL JERKER. Preacher qui transporte sa congrégation, qui l’amène à la participation physique et vocale, à l’extase. ► SOUL MUSIC. Style musical dérivé à la fois de certaines formes de jazz, du rhythm* and blues et de la musique religieuse ; la soul music se caractérise par l’abandon de la forme blues (voir blues, acc. 4) au profit de ballades à 32 mesures avec pont, ou de chants écrits sur la structure des gospel* songs (8 ou 16 mesures). Née en même temps que le free*jazz, elle est porteuse des mêmes refus et de la même volonté de retour aux sources : « But the black musician, he picks up his horn* and starts blowing* some sounds that never tought of before. He improvises, he creates, it comes from within. It’s his soul ; it’s that soul music. » Discours de Malcolm X (28 juin 1964), cité par Frank Kosky in Black Nationalism and The Revolution in Music. La. soul music a incarné la réhabilitation du peuple noir, a exprimé la fierté d’être Noir, physiquement et culturellement; elle a eu un immense impact sur la jeunesse de couleur. « La spiritualité [SOMZ] est le principe même de cette musique, à la fois stratégie et disposition d’être, démarche consciente et active qui s’efforce de transformer les anciennes contraintes en possibilités nouvelles. » Geneviève Fabre, Le Théâtre noir aux Etats-Unis. Elle a par ailleurs ravalé au second plan le blues*, tenu comme porteur des anciennes valeurs et incapable de refléter les nouvelles aspirations des classes populaires noires. Sweet Soul Music, Arthur Conley (ca 1965-1966). La soul music fut très rapidement récupérée, banalisée et standardisée, ce qui ne fut pas sans incidence sur l’évolution sémantique du mot soul (voir soul, acc. 4). ► SOUL WALK. Voir walk that walk. ► SPOKEN SOUL (SOUL TALK). L’américain tel que le prononcent les Noirs : « Spoken soul is more a sound than a language. » Claude Brown, Rappin' and Stylin' out.

SOUNDING Voir dirty* dozens.

SOUNDS Musique et, tout spécialement, la musique noire (années 40).

SOUTH SIDE Quartier noir de Chicago, Illinois, situé entre la Chicago River et le lac Michigan. C’est le plus ancien quartier à peuplement noir de la ville; apparu au début du siècle, il comptait déjà 44 000 habitants en 1910, 110 000 en 1920, 233 000 en 1930 et approchait les 350 000 en 1945 : South Side, Wardell Gray (1949). La bourgeoisie noire l’ayant progressivement investi après la Seconde Guerre mondiale, le ghetto proprement dit se déplaça vers le West* Side. Les formes de blues* qui s’y développèrent sont directement issues de celles du Delta* et l’archétype du bluesman du South Side reste Muddy Waters : « I don’t mean to say that your memory is bad In your soul you must know it ain’t right You must remember the way you begged to play in my band When we played the South Side Monday nights » I Stand Alone, Jimmy Johnson (ca 1979). SOUTHERN Southern Line, ligne de chemin de fer desservant Washington D.C. et La Nouvelle-Orléans, Louisiane, Memphis et Greenville dans le Delta, Birmingham, Alabama et Atlanta, Géorgie : « Lord sittin’ on the Southern Gonna ride all night long » Counting The Blues, Ma Rainey (1924). Pour le peuple du blues, le Southern est réputé croiser le Yellow* Dog à Moorhead dans le Delta. ► SOUTHERN CAN. Hanches. Voir can. ► SOUTHERN PACIFIC. Compagnie de chemin de fer dont les lignes relient La Nouvelle- Orléans, Louisiane, à la Californie via Houston et San Antonio, Texas : « Mister Kassïe* said before he died That one more road he wanted to ride* People tell Kassie “Which road is he?” Southern Pacific and The Santa* Fe » Kassie Jones, Furry Lewis (1928).

SPADES 497. Aux cartes, les piques (au contraire des diamonds, carreaux, les piques sont considérés comme de mauvais augure) : « I bet my money and I lost it Lord it’s gone Doggone* my bad* luck soul Mmmm I lost it, Lord it’s gone I mean I lost it, years ago I ain’t never gonna bet on that Queen of Spades no more » Bad Luck Blues, Blind Lemon Jefferson (1926). ► Noir : Trumpet in Spades, Duke Ellington (1936). 498. ACE OF SPADES. Organes sexuels féminins.

SPANISH Du nom d’un morceau appelé Spanish Fandango. Accordage de guitare en open* timing produisant à vide un sol ou la majeur; c’est le plus utilisé du Texas (Ramblin’ Thomas) à Atlanta (Blind Willie McTell, Barbecue Bob) : « Anyway he finally got me a guitar and I held that sound in my head that I heard this preacher* play back in Memphis and when I got the guitar I kept messing with the string until I got it tuned where I can held that sound and I found out later that’s the key that Elmore* James and all the gwjs* play slide* guitar. Lot of people call it “Spanish”. » Interview de Big Daddy Kinsey par Jacques Lacava (1987), in Le Récit de vie des bluesmen. • Jeu de basses utilisé dans le boogie- woogie. • SPEAKEASY Vient probablement de speak low, speak easy. Bar clandestin à l’époque de la prohibition : « Now I had a speakeasy But the police come and closed it down Now it sure is a hard thing To sell booze* around this town » Been Mistreated Blues, Georgia Tom (1930).

SPECIAL ► Revolver, « feu » : « She got a 38* special But I believe it’s most too light I got a 32-20* Got to make the caps all right » 32-20 Blues, Robert Johnson (1936). ► Train : Detroit Special, Big Bill Broonzy (1936). SPECIAL AGENT. Détective chargé de la surveillance des trains et de la poursuite des voyageurs clandestins (sur ce point, voir ride the blinds*) : « Now some special agents up the country They sure is hard on a man They will put him off when he’s hungry And don’t even let him ride* the train » Special Agent (Railroad Police Blues), Sleepv John Estes (1938). ► SPECIAL RIDER. Voir rider.

SPECKLED RED Surnom du pianiste Rufus Perrvman (1892-1973) : Speckled Red Blues, Speckled Red (1956).

SPECS Surnom du batteur Gordon « Specs » Powell (1922).

SPEED Ella Ballade populaire contant l’assassinat de la belle Ella Speed par son amant jaloux, Bill Martin : Ella Speed, Leadbelly (1934).

SPEEDBALL Injection de drogue dans la jambe : «J’étais accro à certains médicaments, comme le Percodan et le Seconal, je buvais beaucoup de Heineken et de cognac. Je sniffais surtout de la coke, mais il m’arrivait de m’injecter de la coke et de l'héroïne dans la jambe; on appelle ça une speedball, c’est ce qui a tué John Belushi. » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l'autobiographie. Speedball, Lee Morgan (1965).

SPERICHIL Archaïsme pour spiritual* : « [...] ail stand up in the middle of the floor, and when the sperichil is struck up begin first walking and by and by shuffling* around, one after the other, in a ring*. » Article paru dans The Nation (1867), cité par Julio Finn dans The Bluesman.

SPIDER Araignée. L'un des personnages des contes négro-américains : « Sachant tendre ses pièges au bon endroit, presque invisible mais toujours aux aguets, l’araignée symbolise cer- taines qualités de ceux qui, sans en avoir l’air, contrôlent bien des situations. » Geneviève Fabre, Le Théâtre noir aux Etats-Unis. « I’m a good web-builder Please let me build your web one time Because now there ain’t another spider Well, well, can build a web like mine » King Spider, Peetie Wheastraw (1935). 2. L'un des ingrédients utilisés dans les préparations magiques : « I been so unlucky, baby I found a spider in my stew Oh, a spider in my stew Oh, I didn’t know what happened, baby I got so much confidence in you » Spider in My Stew, Buster Benton (ca 1980). ► LADY OF THE SPIDERS. Syn. de conjure* lady.

SPIRITUAL S'il est communément admis que les spirituals soient des cantiques, spécialement d'origine protestante, remodelés par la tradition négro-américaine, les travaux récents des musicologues Kolinski et Viv Broughton montrent qu’ils dérivent plutôt des chants de travail, des worksongs, « sur lesquels est venue se plaquer une imagerie biblique » (Jacques B. Hess). « I've heard old people say, down through the years, “Oh, that's the Devil's* music" and then they give you a Bible quote, you know. They ’ll say, “Because the Bible said ‘Make a joyful noise unto the Lord!’ you know? They give you this reason. It does say that, but it doesn’t say what kind of joyful noise to make to the Lord ! The blues* can be just as joyful as a spiritual.” » Interview de Vernell Townsend, cité par Giles Oakley dans The Devil’s Music. Les spirituals possèdent les caractéristiques de base de la tradition musicale négro-américaine (chants en questions- réponses, rythme, syncopes, effets vocaux tels que vibrato, glissando...) Comme le blues, le spiritual est un des courants de base de la musique négro- américaine, dans lequel elle vient périodiquement se replonger; ainsi les musiques dites soul, funky ou les voca- listes de rhythm and blues et de rock and roll. A l’époque de l'Underground* Railroad, les spirituals servirent de codes entre passeurs et esclaves ; par Pharaoh*, il fallait entendre maîtres blancs, par Canaan ou Promised* Land, le Canada ou les Etats non esclavagistes...

SPLIT Pas de danse : « Non content d’être un sacré trompettiste, Harry Smith faisait aussi un numéro de danse. Il savait danser à claquettes et en soft-shoe*, il connaissait le buck* and iving, les kicks*, les splits et quantité d’autres pas. » Albert Murray et Count Basie. Good Morning Blues. ► SPLIT THE SCENE. Décéder, passer l’arme à gauche.

SPOOK Spectre, revenant. 499. Dans la bouche d'un Blanc, terme méprisant pour Noir. 500. Terme de connivence entre Noirs : « “Man, if you join the Muslim faith, you ain’t colored no more, you’ 11 be white”, they’d say. “You get a new name [voir black name*} and you don’t have to be a nigger* no more. So everybody started joining because they considered it a big advantage not to be black* during the time of segregation. I thought of joining but it occurred to me that a lot of them spooks were simply trying to be anything other than a spook at that time.” » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

SPOON Cuillère. Peloter, caresser, flirter : « When 1 see two sweethearts Spoon underneath the silvery moon It makes my love come* down I wanna be around Kiss me, honey, It makes my love come down » H Makes My Love Come Down, Bessie Smith (1929). • Surnom du blues sbouter Jimmy Witherspoon (1923) : « Now I dream I was in the White House Sittin’ in the president’s chair I dream he look around and say : “Spoon, Spoon, I’m so glad you hear” » / Had a Dream, Jimmy Witherspoon (1962). ► SPOONFUL. Métaphore exprimant de façon vague ce qui touche au sexe et à la sexualité : « Eve and Adam Was the first two people got a spoonful » 'Bout a Spoonful, Mance Lipscomb (1970). « You can bring me whiskey You can bring me tea* Nothin' satisfied me, man But my lovin’ spoonful » Coffee Blues, Mississippi John Hurt (1964).

SPORT Archaïsme. Viveur, jouisseur; maquereau : « Stagolee* went down to hell Lookin' mighty* curious The devil says : “Here’s that sport from East St Louis” » Stagolee. recueilli par Alan Lomax et cité dans Tolk Songs of North America. « When I left home and went to town I thought I was the biggest sport around » Country Fool. The Showmen (1961). ► SPORTING GIRL. Putain : « The very first place I worked was Dago Frank’s on Archer and State* street. That was a place where the sportin’ girls hung out. » Interview d'Aiberta Hunter, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► SPORTING HOUSE. Bordel, maison de plaisir : « Those places were really something* to see — those sportin' houses. They had the most beautiful parlors, with cut glass, and draperies and rugs, and expensive fourniture. They were just like millionnaire’s houses. And the girls would come down dressed in the finest of evenin’ gowns, just like they were goin’ to the opera. » Interview de Clarence Williams, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► SPORTING LIFE. La «vie», celle des hommes du milieu, des hors-la-loi : « I’m tired of runnin’* around Think I ’ll marry and settle down This ol’ night life, this ol’ sportin’ life Is killing me I’ve been a gambler and a cheater too Now it’s come my time to lose This ol’ sportin’ life is got the best hand What can I do? » Sportin' Life Blues, Brownie McGhee (1946).

SPOT Boite de nuit: « Freddie Keppard was playin’ in a spot across the street and was drawin’ all the crowds. I was sittin’ at the piano, and Joe [Oliver] came over me and commanted in a nervous housh voice: Get in B-flat... » Interview de Richard M. Jones, in Hear Me Talkin'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. Dollar. Condamnation it une peine de prison (too spots = condamnation a deux ans). Carte a jouer: «You want anything on that tenspot...? All right, king, come up there. Ten dollars more will catch the king. Okay, boys, it’s a bet. » [...] Eight more dollars on the eight spot... Let’s make it sixteen. Nobody standing here but you and 1.1 got the ace — it’s better than your eight spot, what do you say? Twenty dollars more. Okay? Bet... » Jelly Roll Morton cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

SQUARE ► Bourgeon du cotonnier (la partie qu’attaque le boll* weavif : «Bo* Weavil told the farmer “Think I treat you fair”, Lordy “Suck all the blossom And leave your hedges square” Lordy (leave you with a empty square?) » Mississippi Bo Weavil Blues, Charley Patton (1929). ► Celui qui respecte conventions et valeurs dominantes, conformiste, bourgeois ; mec hors du coup, cave : « She don’t have to be an angel But I sure don’t want a square I want a woman wise enough To wanna gets somewhere » The Hunt Is on, Percy Mayfield {ca 1951-52).

SQUATTER Chaise (années 40). V. S’asseoir: Squattiri, Eddie Davis (1950).

SQUEEZE Fausse note, couac, canard. MAIN SQUEEZE. Nana, petite amie.

STACK Bateau à aubes qui parcourait le Mississippi au début du siècle pour le compte de la Lee Line of Memphis : « The Kate’s* in the bend The Stack is turnin’ around and ’round The stem wheel knockin’, friend I’m Alabama bound » Alabama Blues, Robert Wilkins (1929). Grande quantité, beaucoup : « I’m sitting on a stack of dollars Just as high as I am tall If you be my little old baby You sure can have them all » Stack O'Dollars Blues, Charley Jordan (1930). 501. STACKED DECK. Coiffure masculine « en château de cartes » qu’adoptèrent des chanteurs comme Little Richard ou Billy Wright : Stacked Deck, Billy Wright (1950).

STAGGER LEE (Stacker Lee, Stack O'Lee, Stackolee) Personnage mythique du folklore noir; selon la ballade éponyme, Stagger Lee aurait assassiné Z?z7Zy De Lyon* qui lui avait pris son Stetson : « Gentleman of the jury What do you think of that? Stagger Lee killed Billy De Lyon About a five dollars Stetson hat That bad man, oh cruel Stagger Lee » Stagolee, Mississippi John Hurt (1964). Si Ton en croit Furry Lewis dans sa version de 1928, il s’était montré mauvais perdant au jeu : « I remember one September On one friday night Stackerlee and Billy Lyons* had a great fight Cryin’ : “When you lose your money Learn to lose” »

STALLION Pénis, biroute. Jolie môme : Stallion, Jazz Modes (1956). Freedom for The Stallion, Allen Toussaint (1976).

STATE FARM Ferme-pénitencier dépendant de l’administration centrale. Voir county* farm.

STATE STREET Rue du South Side (et du centre) de Chicago, Illinois : State Street, Lizzie Miles (1922).

STATION Relais sur la route des esclaves évadés : « Get your ticket ready Prepare to get on board For your station’ gonna be changed After a while » The Gospel Train, spiritual cité par Sim Copans dans Chansons de revendication.

STAYIN’ CHAIN Figure légendaire du folklore noir, célèbre pour ses prouesses sexuelles : « An’ I got a woman Pretty little woman She ain’t anything but a Stavin’ Chain ’fraid she’s a married woman And I’m scared to call her name » Woman Woman Blues, Ishman Bracey (1930). Notons que les versions enregistrées (Johnnie Temple, 1938 Jazz Gillum, 1938; Zu Zu Bolin, 1952), comme c’est aussi le cas pour les dirty dozens, ne donnent qu’une très faible idée de ce que pouvaient être les paroles non expurgées; seule exception, la version enregistrée par Jelly Roll Morton pour la Bibliothèque du Congrès en 1938 : « I had that bitch, had her on the stump I fucked* her 'til her pussy* stunk I'm the winin’* boy [...) Nickle's* worth of beefsteak and a dime’s* worth of lard Gonna salivate your pussy 'til my penis gets hard I’m the winin’ boy » Stavin’ Chain ne se contente pas de « tomber » les femmes, il vit de leurs charmes, comme le suggère Jelly Roll Morton dans le dernier couplet : « I want about ten bitches to myself The one I like, gonna keep her to myself I’m the winin’ boy »

STEADY ROLL Voir roll.

STEAMLINE BASS Contrebasse rudimentaire confectionnée avec une bassine et un manche à balai.

STEEL CITY Surnom de la ville de Gary, Indiana : »The town I'm singing about Is just 30 miles east of the Windy* City It produced some of the greatest persons That the world has ever known [Parlé] Michael Jackson, You be marching I’m talkin’ about the Steel City, you all» Gary, Indiana, Big Daddy Kinsey (ca 1985).

STEP CRAB STEP. Danse du début du siècle. CROSS-EYED STEP. Danse de la période swing. STEP IT UP AND GO. Foutre le camp, lever le pied, se barrer : Step It up and Go, Brownie McGhee (1940).

STEW Ragoût. «And I’m through tryin’ To make a man of you And if I can’t bring a job* Don’t you look for your daily stew » Pot Hound Blues, Lucille Bogan (1929). Lieu de débauche. Ivrogne, pochard, soulard. Métaphore pour organes sexuels féminins : « A man say I had somethin' look like new He want me to credit him for some of my stew Say, he’s goin’ up the river try to sell his sack He would pay me for my stuff* when the boat get back » Stew Meat Blues, Lucille Bogan (1935).

STEWBALL Vient probablement de skewbald, cheval blanc et roux. Nom d’une ballade consacrée à un cheval de course : « Old Stewball was a race horse But the poor horse, he was blind He ran so fast, down in Texas He left his shadow behind Behind, behind He left his shadow behind » Stewball, Willie Dixon (1959).

STICK Bâton. Cigarette de marijuana, joint. Thème à succès, « hit ». Prostituée. Apocope de blackstick, clarinette : Slapstick, Jimmy Hamilton ( 1945). V. Travailler, réussir dans son boulot : Are You Sticking? Duke Ellington (1941). • STICKHORSE. Surnom du bluesman Nathaniel « Stickhorse » Hammond (1896- 1964).

STICKS (Stix) Surnom du bluesman Granville Henely « Sticks » McGhee (1917-1961) et du batteur des Jazz Crusaders, Nesbert « Sticks » (ou «Stix») Hooper (1938).

STING Piquer. Baiser, faire l’amour (variation sur la métaphore de l’abeille, hee) : « I met my bumble bee* this morning As it flying in the door Aid the way he sting me He made me cry for more » Bumble Bee, Memphis Minnie (1930). ► STINGAREE. Vient probablement de sftn- ging bee. Les organes sexuels : « Now my woman left me something Called that old stingaree Hey mama left me something Called that stingaree* Says 1 done stung* my little woman And she can’t stay away from me » Stingy Mama, Blind Boy Fuller (1937). ► STINGER. ® Dans le langage des cheminots, serre-freins. ® Dans le prolongement de la métaphore de sting (piquer; baiser), pénis : « Hey, I’m an old bumble bee* A stinger just as long as my arm I sting the good lookin’ women Everywhere I goes along They crvin : “Come here Bumble bee, you know your stuff* And your stinger, old bumble bee Your stinger just long enough” » I'm an Old Bumble Bee, Bo Carter (1930).

STIX Voir Sticks.

STOCK Arrangement commercial : « “Man, I’ve got money to go downtown* and buy some stocks, if I wanna buy some stock arrangements”, I said. » Interview de Billy Eckstine, cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop.

STOMP ► Morceau rapide destiné à animer l’auditoire; Jelly Roll Morton se targue d’en être — comme du jazz — l’inventeur : King Porter Stomp, Jelly Roll Morton (1926). Le terme, comme joys, est aujourd'hui obsolète. «Je ne sais pas si, à l’époque, j’avais entendu parler de ce qu’on appelait alors les territory bands*, les orchestres de réputation régionale, mais on avait l’impression que les Blue Devils jouissaient déjà d’une solide réputation dans cette région, et que Tulsa faisait partie de \&yt stomping ground, de leur terrain de chasse — et stomp est le mot juste, car je devais découvrir plus tard que ce terme était alors très répandu dans cette partie du pays. Beaucoup de morceaux s’appelaient des stomps, et pas mal d’orchestres s’appelaient des stomp bands. » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. ► Syn. de rent* party. ► V. Danser, taper du pied : Stompin’ at The Savoy, Chick Webb (1934). Foot Stompin', Red Prysock (ca 1955). ► STOMP-DOWN. Prostituée, « gagneuse » : « When I was down south, baby, I was with my broad* I’m here in Atlanta treated like a dog. Now you ’se a stomp-down rider You ’se a stomp-down rider, But you ’re most too drunk for me » Stomp Down Rider, Blind Willie McTell (1931). ► STOMP OFF. Frapper du pied avant le début de l’exécution d’un morceau pour donner le rythme à l’orchestre Ica 1900). Stomp off Let’s Go, Erskine Tate (1926).

STONE Quand il précède un adjectif, signifie complètement : « Now friend, don’t never let your good girl Fix* you like this woman got me Got me stone crazy ’bout her As a doggone* fool* can be » Broutn Skin Girl, Tommy McClennan (1939). ► STONED. Soûl. Drogué, parti (années 40- 70): Stoned. Wardell Gray (1948).

STONEWALL Surnom du pénitencier fédéral de Nashville, Tennessee : Nashville Stonewall Blues, Robert Wilkins (1930).

STONY-LONESOME Nom d’une prison : « Po’ gal* wishin’ For dat* jailhouse key To open up de door And let herself go free Stony Lonesome No place for a dog Not even fitten For a razor-backed hog High Sheriff said "Gal* don’t be so blue* Cause dat jailhouse keeper Goin’ to be good to you” » Chant d'Ophelia Simpson, recueilli par John Jacob Niles, cité par Paul Oliver dans Songsters and Saints.

STOOP-DOWN Stupide, bête : « Now what did the rooster* tell the duck You ain’t so good lookin’ gal* But you sure how to strut*. Just stoop-down girl Let your daddy see You get something down there Now woman, warming hell a lot of me » Stoop Doten Girl, Sam Chatmon (1976).

STOP CHORUS Voir chorus.

STOP TIME Voir time.

STOREFRONT CLUB Club dans un magasin et donnant directement sur la rue : « Man, we played in some smokey holes, bars under the Elf station, in storefront clubs, and it was hard, so hard you was looking for the worm to pull the robin into the ground, you dig*? You ask cats* like Muddy* [Waters] and Willie Dixon and J.B. Lenoir, you ask ’em how hard it was to get five or six dollars together on a weekend. »Interview de Bo Diddley, cité par Pete Welding, pochette du disque Chess 427011. De la même façon, on parle de storefront church pour une église établie dans un magasin, un entrepôt.

STORM (Blow up a) Voir blow.

STORMY MONDAY Lundi orageux. Lendemain de fête et de libations, quand il faut payer ses excès :

« They call it stormy monday But tuesday is just as bad Wedn’sday is worst And tuesday is also sad » Stormy Monday, T Bone Walker (1947).

STORYVILLE En 1896, un conseiller municipal de La Nouvelle-Orléans, Sidney Story (d’où Storyville), fait voter un arrêté cantonnant la prostitution dans deux quartiers : « Par décision du conseil municipal de La Nouvelle-Orléans, le paragraphe 1 de l’arrêté 13302 sera modifié de la manière suivante : à dater du 1er octobre 1897, il sera réputé illégal pour toute prostituée ou femme se livrant notoirement à la débauche, de vivre, dormir ou généralement habiter dans un immeuble ou appartement ou local situé en dehors des limites ci-après définies [...] Sera désormais déclarée illégale, ¡’ouverture hors de ces limites de tout cabaret, café dansant et autres lieux proposant des exhibitions de cancan, danses obscènes et autres exhibitions de féminité à sensations hors des limites ci- après définies... » Coupure de presse, citée par Nell Kimball dans Les Mémoires de Nell Kimball. En octobre 1917, le conseil municipal vota la fermeture de Storyville sous la pression du Haut Commandement de la Marine; effective le 1er novembre 1917 à minuit, cette mesure précipita le départ des musiciens de jazz vers d’autres horizons, St Louis et New York en particulier. Il existait aussi un Storyville réservé aux prostituées noires, à quelques pâtés de maisons du premier et que les plus vieux musiciens de jazz appelaient uptown* par opposition à downtown* qui désignait le quartier français où prédominaient les Créoles.

STOVALL Nom d'une plantation du Delta* : « Well now the reason I love That ole Stovall farm so well Well well you know, we heve a plenty money And we never be raisin'* hell » Burr Clover Blues, Muddy Waters (1942).

STOVEPIPE Tuyau de poêle. Sorte de chapeau haut-de- forme. • Surnom des bluesmen Sam Jones alias « Stovepipe n° 1 » (Stovepipe Blues, 1924) et Johnny Watson alias « Daddv Stovepipe » (ca 1870-1963) : « Well, they call me Daddy Stovepipe Turn your damper down Good Lord, now when you get to Memphis Won't find me there » Stovepipe Blues, Daddy Stovepipe (1924). Stovepipe nu 1 doit son surnom au fait qu'il jouait, outre de la guitare et de l’har- monica, du « tuyau de poêle » dans lequel il soufflait pour obtenir une ligne de basse.

STRAIGHT ► En parlant d’un alcool, sec (sans addition d’eau) : « Whiskey straight Will drivé the blues away That be the case I want some for today » Got The Blues, Can't Be Satisfied, Mississippi John Hurt (1928). ► Play straight, jouer en restant fidèle au thème, sans improvisation. Par extension, jouer quelque chose de fade, de banal, de commercial. ► Sans vibrato : « Un jour, M. Buchanan arrêta l’orchestre : “Ecoute, Miles. Ce machin à la Harry James, ce vibrato, tu ne fais pas ça ici. Cesse de secouer toutes ces notes, de les faire trembloter, tu trembleras assez quand tu seras vieux. Joue straight, développe ton propre style, tu en es capable. Tu as assez de talent pour ça.” » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, ¡’autobiographie.

STRAND Voir one* strand.

STRAW Paille. Au sens figuré, pénis : « Do the doodle doodle do Oh doing the doodle doodle do I like to take my straw Go play in that doodle hole » Doodle Hole Blues, Charley Lincoln (1930). ► STRAW BOSS. Voir boss. ► STREAMLINE Aérodynamique, caréné. Streamline Train, Cripple Clarence Lofton (1939). Bien roulée, bien balancée (en parlant d’une femme) : « I got a woman Streamlined from her feet to her head If she should ever quit* me She might as well be dead » River Hip Woman, Washboard Sam (1942).

STREET Rue. Le trottoir (pour une prostituée). Variante : stroll. Le monde en dehors de la prison. ► STREET PARADE. Parade de rue, typique de La Nouvelle-Orléans, accompagnant toutes sortes de manifestations dont les enterrements : « Shake your tambourine Like they do in New Orleans A big-time* serenade We’re goin’ to the street parade And we’re gonna second* line We’re gonna have a good time » Street Parade, Earl King (ca 1972). ► SUNNY SIDE OF THE STREET. Le « côté ensoleillé de la rue », la belle vie : On The Sunny Side of The Street, Louis Armstrong (1934). Ant. : On the other side of the tracks (voir track). e SWING STREET. La 52 rue à New York. e THE STREET. La Rue, la 52 rue à New York, haut lieu du jazz à partir des années 30 (voir Fifty* Second Street) « When Bird* [Charlie Parker] and Diz* [Dizzy Gillespie] hit The Street regularly a couple of years later, everybody was astounded and nobody could get near their way of playing music. Finally, Bird and Diz made records, and then guys* could imitate it and go from there. » Interview de Tony Scott, in Hear Me Talkin ’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

STRETCH Peine de prison : « I have four-five to twenty one When I git back we gon’ have some fun Up* the river Daddy going to do a stretch » Doing a Stretch, Blind Blake (1929).

STRIDE Ecart, enjambée. Style pianistique (années 20-30) issu du ragtime* et caractérisé par un jeu de main gauche alternant accords dans le registre médium sur les temps faibles et notes graves sur les temps forts. Eubie Blake (1883-1983), James P. Johnson (1894-1955), Willie « The Lion » Smith (1897-1973), Fats Waller (1904-1943) ou Joe Turner (1907) en restent les meilleurs représentants.

STRITCH Sorte de saxophone alto dépourvu de courbure et dont le principal adepte fut Roland Kirk. George Braith l’utilise aussi dans certains enregistrements.

STROLL ► Surnom de la 7e Avenue à New York; par extension (années 30-40), rue, avenue : « I woke up this mornin’ Got on the stroll Met my baby, got her told Looky here, baby, you ’re singin’ wrong Let your papa help you to sing this song » Badly Mistreated Man, Carl Martin (1935). ► Le trottoir; la prostituée elle-même: « Last Saturday night I got married Me and my wife settle down Now me and my wife have parted Gonna take another stroll downtown* » Goodnight Irene, Paul Gavten (1950). ► V. Pour la section rythmique, jouer sans le piano : « I stood up to play at the Apollo*, and said: “Stroll!” [...] Prez [Lester Young] used to stroll a lot ; Roy Eldridge used to stroll a lot — piano out. That’s where I learned it, because Roy would say “Strol- luh !” in a minute. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► Danse lancée aux alentours de 1957 par Chuck Willis ; « I want all the teenagers and bobby* soxers To get around this jukebox* I want you to listen to me Take a little stroll with me » Strollin’, Champion Jack Dupree (1958). Le terme (comme c’est fréquemment le cas des noms de danses) est sexuellement connoté : « So we parked way out on the Cocamo The night was young and the moon was gold So we both decided to take a stroll Can you imagine the way I felt? I couldn’t unfasten her safety belt » No Particular Place to Go, Chuck Berry (1964).

STRUGGLE Lutte. Struggle ou juggle and struggle : soirée donnée par quelqu’un pour recueillir l’argent nécessaire au paiement de son loyer. Syn. rent* party. En jazz, médiocre prestation (1900- 1930). Danse populaire dans les années 20 : Monday Struggle, Albert Ammons (1939).

STRUT 502. Rouler le but, frimer: « Down on Franklin Avenue, Jelly* beans struttin’ to and fro Well you hear one jelly bean ask the other one “Which a-way did my good girl go?” » Mil Factory Blues, Hi Henry Brown (1932). 503. Pas de danse; le danseur lui-même (1900-1930) : Alabama Strut, Cow Cow Davenport (1928). • CHITTERLING STRUT. Syn. de rent* party : Chitterlin’ Strut, Lemuel Fowler (1925). • STRUT (ONE’S) STUFF (THAT THING). ® Danser : « She’s forty two in the hip Thirty one in the bust She’s got big fine legs And she knows how to strut her stuff » Little Bee, Fats Domino (ca 1949). ® Dominer son sujet, être de la partie, connaître son affaire (y compris sexuellement parlant) : « Can’t get away, ain’t no bluff She sure knows how to strut her stuff Now try her once and you will see Why she’s (in?) her company If it looks like jelly*, shake like jelly It must be gel-a-Tine » If It Looks Like Jelly, Shakes Like Jelly, It Must Be Gel-a-Tine, Charlie Lincoln (1928). « “cause you shouldn’t a, Shouldn’t do what darlin” ? I don’t know I'm tellin’ you lover How to be struttin’ that thing, night and day » Strut That Thing, Cripple Clarence Lofton (1935).

STUD Mec à la page : Younger Stud, John Lee Hooker (1971).

STUDY Dans le Sud, non pas étudier (ce qui est le sens courant), mais méditer, réfléchir : « Now I've got to studyin’ Sittin’ down studyin’ ’bout my old-time used-to-be* Lord, I’ve been studied so hard. Lord 'til these blues crept up on me • Woman Woman Blues, Ishman Bracey (193O) STUFF Matière. Répertoire musical. Grabuge: « Boy, if you don’t find her There gonna be some stuff » Woman Boogie Blues, Memphis Slim (1959). 3 Truc, bidule, chose, affaire : « They cryin’ Come here, bumble bee*, you know your stuff And your stinger*, old bumble bee Your stinger just long enough » I’m an Old Bumble Bee, Bo Carter (1930). 504. Depuis 1955, drogue (white stuff ■. morphine ou héroïne) : «Ail I was interested in was getting high*. I’d been riding all over the city of Los Angeles looking for cocaine [...] They shoulda called me little cocaine, I was sniffing* so much of the stuff! » Interview de Little Richard, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard. Vagin (ca 1930-1940). Baratin, tchatche. • Surnom du violoniste Hezekiah Gordon Leroy « Stuff » Smith (1909-1965) : « But let me tell you more about The Street*. Around 1942, Erroll Garner, Coleman Hawkins, Stuff Smith and Don* Byas among others, were on The Street. » Interview de Tony Scott, in Hear Me Talkin 'to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. • Do THAT STUFF. Cri d’encouragement à un soliste ou à des danseurs. • HOT STUFF. Voir hot. • ON THE STUFF. Soûl, bourré; drogué (années 30): « Any musicians who says he’s playing better either on tea*, the needle* or when he is juiced*, is a plain, straight liar. When I get so much drink, I can’t even finger well, let alone play decent ideas. And in the days when I was on die stuff, I may have thought I was playing better, but listening to some of the records now, I know I wasn’t. » Interview de Charlie Parker in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► STRUT (ONE'S) STUFF. Voir strut.

STUMP Moignon, chicot. Surnom du pianiste et chanteur James « Stump » Johnson (1902-1969).

SUCKER Gogo, bonne poire. « 1 left New Orleans, where there were too many sharks to go to some of these little places where I could practice on the suckers. » Jellv Roll Morton cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

SUDS Mousse (de savon). ► N’importe quelle boisson alcoolisée, mais plus particulièrement la bière. ► Fric, pèze : « Four*, '¡even and forty-four Goin’ down this mornin’ ’cause I got to go But if I hit this gig* Ain’t gonna bust these suds no more » Cité par Langston Hughes et Arna Bontemps dans The Book of Negro Folklore.

SUEY Chatte, vagin : Who ’ll Chop Your Suey When I'm Gone, Willie Jackson (1926).

SUGAR Sucre. Argent, pognon (avec une idée d’opulence comme dans sugar daddy) : I'm Gonna Salt Away Some Sugar, Fats Waller (1940). Petit(e) ami(e) : When My Sugar Walks Down The Street, Clara Smith (1925). Les plaisirs qu’il (elle) offre : « I like my coffee* in the morning, woman I’m crazy about my tea* at night If I don’t get my sugar three times a day Oh, darling, I don’t feel right » My Country Sugar Mama, Howlin’ Wolf (1964). ► Drogue, héroïne, cocaïne : Brown Sugar, Elvin Jones et Philly Joe Jones (c« 1965). 505. GIVE (SOMEONE) SOME SUGAR. Embrasser : « My baby use to go for salt But I find her, he was givin’ her sugar I’m trustin’ with my baby The dirty* dog took her » Can't Trust Your Neighbour, Freddy King (1972). 506. SUGAR BOWL. De façon métaphorique, organes sexuels féminins : « Anytime he wants to eat He can use my sugar bowl » Kitchen Man Blues, Sara Martin (1928). SUGAR BOY. Surnom du pianiste néo- orléanais James « Sugar Boy » Crawford (1923). SUGAR DADDY (PAPA OU MAMA). Homme (femme), généralement d’âge mûr, qui entretient une maîtresse (un amant) : « Sugar marna, sugar mama Your sugar ain’t sweet no more I got myself a brand new sugar mama Just to ease my worried mind » Sugar Mama, John Lee Hooker (1965). SUGAR FOOT. Se dit d’un danseur talentueux. SUGAR FOOT STOMP. Danse des années 20 : « Daddy, sweet daddy Rock* your mama like a cradle Sweet papa I must let my doggies romp Do the dance with me They call the Sugar Foot Stomp » Sugar Foot Stomp, King Oliver (1926). e SUGAR HILL. La partie la plus huppée de Harlem, entre les 140 et 145 rues; partie « chaude » d’un quartier noir : Sugar Hill Blues, Roosevelt Sykes (1936). SUGAR PIE. Surnom de la chanteuse Pey- lia Balington alias « Sugar Pie » Desanto (1935).

SUGARLAND Petite ville du Texas, à l’ouest de Houston, entre la ville et le Brazos, le long de la Southern Pacifie Railroad ; c’est le siège de la Texas State Prison : « Well I can’t do nothing Hon’ but wave my hands Got me a lifetime sentence Down on Sugarland Lordy, some has got six months Some got two and three years But it’s so many good men Got lifetime here » Shorty George, Leadbelly (1935).

SUIT TO A T Voir T.

SUKEY JUMP (Sookie Jump) Voir jump. SUN BRIMMER Ombrelle, ombre : Sun Brimmer Blues, Memphis Jug Band (1927), blues où le chanteur, Will Weldon, joue sur les motsszzw (soleil) et son (fils), « Son Brimmer » étant le surnom de Will Shade (1898-1966), le leader du groupe.

SUN RA Du nom du dieu égyptien du soleil, Râ. Pseudonyme du chef d’orchestre Herman « Sonny » Blount (ca 1914).

SUNNY Surnom du batteur James Marcellous Arthur « Sunny » Murray (1937).

SUNNY SIDE OF THE STREET Voir street.

SUNNYLAND Train joignant Saint Louis, Missouri, à San Francisco, Californie : « I believe I heard This lonesome Sunnyland blow It blow this morning Like it went coming back no more » Dust My Broom, R.L. Burnside (1983). • D’où le surnom d’Albert Luandrew, alias Sunnyland Slim (1907).

SUNSET Club de Kansas City, au coin de Woodland et de la 12e rue, dont le patron dans les années 30 et 40, Piney Brown, est resté célébré et dont l’homme à tout faire — barman, videur et crieur de blues — fut un temps Big Joe Turner : « The Sunset had charleston* contests* on friday night, and you couldn’t get in the place unless you got there early [...] The charleston was popular at that time [1926] until Percy Venable, the producer of the show, staged a finale with four of us band* boys closing the show doing the charleston. That was really something*. » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin’to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

SUNSHINE SPECIAL Train de la Missouri Pacific Railroad desservant Saint Louis, La Nouvelle-Orléans, Los Angeles, Houston et San Antonio : « Burn the railroad down So that Sunshine Special can’t run I got a gang* of women Man they ride from sun to sun » Sunshine Special, Blind Lemon Jefferson (1927).

SUPPER Souper. « .Mais la grande attraction du Rhythm Club, c’étaient les jam* sessions qui avaient lieu au minimum deux fois par semaine; on les appelait en argot des suppers. Une annonce était faite au tableau à l’avance afin que la nouvelle puisse se répandre. Il y avait des soupers de saxophones, des soupers de trompettes... » Bill Coleman, Trumpet Story.

SURF L’une des danses apparues dans les années 60 à la suite du succès du twist : Surf Monkey, Freddy King (1963).

SUSIE Q Danse créée au Cotton Club de Harlem en 1936: « Well one step, then mess* around You look up and you look down And do the Susie Q, and do the Susie Q Well, ain’t nothing to it, people just see what to do » Susie Q, Sonny Boy Williamson (1938). SWEET Doux. Jazz joué par des musiciens blancs tels Paul Whiteman ou Benny Goodman (années 20-40). ► SWEET BACK MAN (PAPA). Voir man. ► SWEET LUCY. Voir Lucy. ► SWEET MAMA. Voir mama. ► SWEET MAN (PAPA). Voir man. • SWEET PEA. Surnom du pianiste et arrangeur William «Billy» Strayhorn (1915- 1967) et de la chanteuse Addie « Sweet Peas » (ou « Pease ») Spivey. ► SWEET PATOOTIE (PATUNI). DOUX pétunia. ® Petite amie, maîtresse. @ Les plaisirs charnels qu'elle dispense, ou, par comparaison avec la fleur de pétunia, les organes sexuels féminins : « I got a gal* down by the jail Sign on the door “sweet patuni for sale” » Sweet Petunia, Curley Weaver (1928). ► SWEET POTATO. Voir potato. ► SWEET TALK. Voir talk.

SWEETS Musicien de jazz. • Surnom du trompettiste Harry Edison (1915): Blues for Pres, Sweets, Ben and All The Other Funky One, Sonny Stitt (1959).

SWING Balancer. ► Selon les termes de Dan Morgenstern, « il est difficile d’en donner une définition, même les musicologues avertis ont renoncé à une formulation claire. Car le swing est une qualité émotive, une impulsion rythmique qui se dérobe à la notation. C’est la pulsation spécifique, le battement du cœur de tout jazz mûr ». It Don't Mean a Thing If It Ain ’t Got That Swing, Duke Ellington (1932). « Le jazz a introduit l'irrationnel dans l’élaboration du discours musical : le swing pourrait être qualifié de “rythme biologique”, irruption du subjectif dans le découpage du temps, introduction de la petite parcelle de désordre vital par cette façon de jouer de l’imprécision pour mieux faire rebondir l’inexactitude. » Didier Levallet et Denis-Constant Martin, L Amérique de Mingus. « Le mot swing désigne cette coloration traditionnelle de l’énergie qui anime la musique. C’est le corps du musicien qui est mis en jeu, cette corporéité étant déterminée par une tradition particulière : le musicien est issu du blues, il est passé par le blues. » Interview de Cecil Taylor, in Jazz Magazine n° 200. ► Style musical très en vogue entre 1935 et 1945 dont les grands noms furent Lionel Hampton (1909) et Benny Goodman (1909-1986) qui, si l’on en croit les médias, en fut sacré « Roi » : « Well you ’ve heard of the King of Swing Well Joe [Louis*] is the King of Gloves Now he’s the world heavy-weight champion A man that this whole world loves » Champ Joe Louis (King of The Gloves), Bill Gaither (1938). ► Elément du titre de certains morceaux rapides : Black. Snake Swing, Victoria Spivey (1936). ► V. Danser, s’éclater : « I’m the queen of everything I’ve got to be high* before I can swing Light a tea* and let it be If you ’re a viper* » If You’re a Viper, Rosetta Howard (1937). ► V. Fourguer de la drogue. 507. SWINGER. ® Musicien au jeu swinguant (années 50). ® Viveur, jouisseur : « My baby like to boogie* My baby like to rock* and roll She’s a real cool* swinger ’cause she’s got so much soul* » Two Times Nine, Eddie Clearwater (ca 1980). 508. SWING LIKE A RUSTY GATE. Litt. : swinguer comme un fer à repasser (méprisant). e e e ► SWING STREET. La 52 rue de New York où étaient concentrés, spécialement entre les 5 et 7 avenues, de nombreux clubs de jazz dans les années 30 et 40. Rue connue aussi sous le nom de « The Street ». SY Surnom du trompettiste Melvin James « Sy » Oliver (1910-1988) : « Inky, comme Cecil Scott, paradait devant l’orchestre de façon plaisante. Il avait une manie, il adorait inventer des noms ou surnoms pour les gens et les choses. C’est lui qui dota Oliver, dont le prénom était Melvin, du surnom de “Sy”, abréviation pour “psychologie” ! Lorsque Sy entra dans l’orchestre de Zack White, Inky en faisait partie. Il me raconta que chaque fois que Sy venait avec un arrangement nouveau, il faisait ressortir le côté psychologique dans la manière où tel ou tel passage devait être joué, alors Inky commença à l’appeler “psychologie”, nom qui fut très vite abrégé en Sy. > Bill Coleman, Trumpet Story. T

T Voir Mister T.

T (Suit/Dress to a T) Aller comme un gant, botter : « I got a fine little girl And she suits me to a T Havin’ a real (grown?) lovin’ You know it’s killing* me » Fine Little Girl, Lafayette Leake (1978).

T. & T. Ligne de chemin de fer : « And I walked up on a stranger I told him I was in so much misery He said you ’ll never start to Texas You better take the T and T » West Texas Blues, Little Brother Montgomery- (1936).

T. MODEL Voir model T.

T. & N. 0. Pour Texas and New Orleans Railroad : « He’s a railroad man And he sure do love to ride If he don’t ride that T and N.O. He sure ain’t satisfied » T.N & O Blues, Lucille Bogan (1933).

T. 99 Déformation de Tee* Nah Nah, nom de la reine du Mardi Gras à La Nouvelle- Orléans. • Surnom du blues shouter Jimmy « T. 99 » Nelson (1928) : T. 99, Jimmy Nelson (1949).

T.B. Pour tuberculosis, tuberculose : « Yes he railroaded me to the sanit-orium It’s too late, too late But I have finished my run This is the way all the women are done When they got the dirty T.B. » Dirty T.B. Blues, Victoria Spivey (1929).

T BONE 1929. Steak ainsi nommé parce que la viande est coupée autour d’un os en forme de T : « Say you talkin’ bout your red ripe tomato I’m crazy ’bout my T bone steak » T Bone Steak Blues, Yank Rachel (1929). • Surnom du guitariste et chanteur Aaron Thibeaux « T Bone » Walker (1910-1975) : « If anybody should happen to ask you Who composed this song Just tell 'em Sweet papa T Bone, he been here and gone » Wichita Falls Blues, T Bone Walker (1929). En référence à T Bone Walker, le guitariste R.S. Rankin (1933) s’est vu gratifié du surnom « Little T Bone ».

T.C.B. Pour Take Care of Business. Voir business.

T.N.T. Dynamite : « I ’m drinkin’ TNT I ’m smokin’ dynamite I hope some screwball* start a fight ’cause I’m ready* Ready as anybody can be I’m ready for you I hope you’re ready for me » I’m Ready, Muddy Waters (1954).

T.O.B.A. «Theater Owner’s Booking Agency», agence de spectacles, créée en 1909 par Anselmo Barasso, et pour laquelle ont travaillé Lonnie Johnson et la majorité des chanteuses du blues dit « classique ». A cause des salaires de misère qu’elle offrait, T.O.BA devint vite dans le monde noir Tough on Black Asses (« dure pour les culs noirs »). Son rôle n’en est pas moins important dans le développement et la diffusion de la musique noire dans la mesure où elle fournit « des endroits où les Noirs de talent pouvaient s'épanouir sans contrainte, à leur propre rythme et dans leur propre voie, sans être gênés par les exigences commerciales ni influencés par les principes de l'Amérique blanche » (Eileen Southern, Histoire de la musique noire américaine). Egalement appelée Toby : Toby, Bennie Moten (1932).

T.P. (Texas and Pacific) Ligne de chemin de fer reliant Vicksburg, Mississippi, et Memphis, Tennessee, à la Californie via Dallas, Texas : « Say, the T.P. is runnin' Smoke settin’ on the ground When the train was gone Couldn’t find my easy* rider around » 7IP. Window Blues, Jack Ranger (1929).

T.T. Pour titties*, seins.

T.V. SUM Pseudonvme du bluesman Oscar Willis ( 1916-1969) : « I'm a T.V. man I goes in thousand of people’s home » Don’t Knock The Blues, TV. Slim (1968).

TAG Courte coda.

TAIL Queue, pine, dard, mais aussi chatte : Tail Dragger, Howlin’ Wolf (1963). ► TAILGATE. Hayon arrière. Let The Tailgate Down, air louisianais traditionnel. Se dit du style d’un tromboniste jouant en longs glissandos tel Kid Ory : Tailgate Ramble, Sidney Bechet (1949). Le terme trouverait son origine dans les parades de La Nouvelle- Orléans : « Pour ne pas heurter la tête des autres musiciens avec sa coulisse, le joueur de trombone était assis sur le plancher à l’arrière du chariot et ses pieds pendaient par-dessus le tailgate, l’abattant abaissé. » Langston Hughes, The First Book of Jazz. TAJ MAHAL Pseudonyme du chanteur et guitariste Henry Fredericks (1942).

TAKE ► Cachet d’un musicien (années 20-30). ► « Prise », l’une des versions d’un morceau gravées au cours d’une séance d’enregistrement; on parle ainsi d’alternate takes pour désigner les différentes prises d’un morceau autres que celle publiée originellement. TAKE CARE OF BUSINESS (T.C.B.). Voir business. e TAKE FIVE. De take a five minutes break. Non pas la 5 prise d’un morceau lors d’un enregistrement, mais la pause. Take Five, George Benson (ca 1974). TAKE SOMEONE TO TUE CLEANERS. Voir cleaners. TAKE TUE RAP. Voir rap. WHAT IT TAKES. Tout ce qu’il faut (pour satisfaire un homme) : I Got What It Takes to Bring You Back, Sara Martin (1923).

TALENT SCOUT Dénicheur de talents. Bien que la marque Okeh ait inauguré cette pratique dès 1923 en envoyant ses agents prospecter dans les campagnes et les villes du Sud, c’est Paramount qui, dans la deuxième moitié des années 20, dénicha le plus de chanteurs noirs de premier plan tels Charlie Patton, Son House, Willie Brown ou Skip James.

TALK Parler. Dans le jargon du jazz, jouer en communiquant ses sentiments, jouer en imitant la voix humaine : Heah [Hear] Me Talkin' to Ya, Louis Armstrong (1928). SOUL TALK. Voir soul (spoken soul). SWEET TALK. Flatterie, flagornerie : « Ooh Tomorrow I may be far away Don’t try to dog* me, honey Sweet talk can’t make me stay » Good Chib Blues, Edith North Johnson (1929). TALK THAT TALK. Avoir le baratin, la « tchatche » d’un mec affranchi, dans le coup : « When she walk that walk* And talk that talk And whisper in my ear And when you talk like that She knocks* me dead Right off of my feet » Boom Boom, John Lee Hooker tea 1966). Pour plus de détails sur les différentes conduites verbales propres à la communauté noire, voir dirty* dozens. ► TALK DEAD. Parler en utilisant un vocabulaire passé de mode et/ou entré dans le langage populaire blanc. ► TALK TO ME. Exhortation fréquemment lancée à un soliste (ou par un bluesman à lui-même) : « [Parlé] Talk to me, Kelton boy! Play it on down — Look* out, Little Red! » Bad Condition Blues, Jimmy McCracklin (1948). ► TALKING HAND. Voir hand. ► TALK TRASH. Raconter des salades, dire des conneries : « Don’t seat there mamlin’ And talkin’ trash If you won’t to have a ball* You got to go out And spend some cash » Let The Good Times Roll, Louis Jordan (1946).

TAMALE Voir hot* tamale.

TAMPA RED Pseudonyme du bluesman Hudson Whittaker (1903-1981): « T 11 play kingfish, babe If you act just like the minnows do I case ole Tampa Red should flutter Don’t you be ’shamed to shoo » King Fish Blues, Tampa Red (1934).

TAN L’une des nombreuses nuances de carnation distinguées par les Négro-Améri- cains : Tan Little Daddy, Sleepy John Estes (1966). ► BLACK AND TAN. Voir black.

TANGLEFOOT « Pieds emmêlés ». Whisky bon marché : Tanglefoot, Fats Waller (1929).

TAP DANCING 509. Danse à claquettes : Tap Dancing, Panama Francis ( 1975). ► Technique rudimentaire consistant à s’accompagner en tapant du pied, des capsules de bouteille ayant été fixées au préalable sous la semelle de la chaussure; Lightnin’ Hopkins ou John Lee Hooker nous en ont laissé quelques témoignages enregistrés : Tap Dance Boogie, Lightnin’ Hopkins (ca 1950-51).

TARHEEL Litt. : talon enduit de goudron. Surnom des habitants de Caroline du Nord et du bluesman Allen Bunn (1924- 1977) alias « Tarheel Slim ».

TEA Thé. 510. Marijuana, kif : « Now you lay down in my bed Between my two white sheets I can’t see and smell nothing But your doggone* tea » Pol Hound Blues, Lucille Bogan (1929). « I found out in all five bands* I’ve been the leader* of, that a tea smoker is not nosy and don’t forget his music and isn’t hard to get along with and he always wants to try to learn something new and to improve old songs. » Big Bill Broonzy et Yannick Bruynoghe, Big Bill Blues. 511. Tea prolonge souvent la métaphore du coffee, amant, en évoquant lui aussi les amours illicites : « Wild* about my coffee* But I’m crazy ’bout my China tea But this sugar* daddy Is sweet enough for me » Jacksonville Blues, Nellie Florence (1928). TEAPOT. Amateur d’herbe, de marijuana : Teapot, Jay Jay Johnson (1949)

TEAR Déchirer. TEAR. Prendre du bon temps; dans le jargon du jazz, jouer de façon particulièrement inspirée : « That how I felt about Smack* Henderson, years before I had seen him in person, from recordings he made for years by himself, with Ethel Waters and Revela Hughes. He had the first big colored band* that bit* the road and tore it up. » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin ’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. TEAR THE (PIAY) HOUSE DOWN. Litt. : démolir la maison. Recevoir des applaudissements nourris, « casser la baraque » ; ► TORE DOWN. Soûl, bourré : I’m Tore Down, Freddy King (1960).

TEDDY BEAR Voir bear.

TEE-NAH-NAH A La Nouvelle-Orléans, nom de la reine de Mardi Gras élue par les tribus « indiennes » (Noirs habillés en- Indiens selon une tradition remontant au siècle dernier) : Tee-Nah-Nah, Smiley Lewis (1950). Souvent déformé, par proximité phonologique, en T. 99 : T. 99, Jimmy Nelson (1949).

TELL Dire. Tell everybody, tell it to me, tell it like it is sont des exhortations fréquemment adressées par un bluesman à son instrument : « Well the blues is a aching old heart disease [Parlé] Do it now, you gonna do it? Tell me all about it The blues is a lowdown* aching heart disease And like consumption Killing me by degrees » Preaching Bines, Robert Johnson (1936). Au sujet des interjections, commentaires et exhortations « hors texte », voir blues. ► TELL IT LIKE IT IS. Dire la vérité, aller au fond des choses, exprimer la réalité vécue par la communauté.

TEMPLE-BLOCKS « Suites de boules creuses accordées diatoniquement, parfois chromatiquement, appelées aussi “coquilles” et “têtes de mort” » (Jacques B. Hess) : «J’avais des temple-blocks et une baguette retenue à un fil invisible accroché au plafond. Je jouais alors au Ritz de Pittsburgh, si toutefois on peut appeler ça jouer. Je faisais tourner mes baguettes entre mes doigts puis, à un certain moment je criais “bam!” et je jetais en l’air la baguette truquée. Les gens poussaient un “ah!" de surprise... » Art Blakey, lors d’une table ronde organisée par Down Beat, « La batterie d’une côte à l’autre », in ¿es Cahiers du jazz n° 10, 1964.

TENDERLOIN Filet, beau morceau de viande. ► Autre nom de Storyville* ; sans doute en raison des substantiels pots-de-vin qu’acceptaient les autorités pour fermer les yeux sur les multiples activités illicites du quartier et qui leur permettaient de s’offrir du tenderloin. ► Petit quartier noir du New York du début du siècle, situé aux environs de la 35e rue Ouest. ► Quartier réservé du Chicago des années 1900.

TENT SHOW Théâtre ambulant sous chapiteau présentant des attractions diverses (équilibristes, jongleurs, monstres, chanteurs, danseurs, musiciens). Les tent shows furent surtout florissants de la fin du XIXe au début du XXe siècle. Des musiciens hawaïens s’y produisaient; ils popularisèrent une façon spéciale de jouer de la guitare, à plat sur les genoux, avec utilisation d’un slide et d’accords ouverts (voir open* tuning). Certains voient là l’origine de l’emploi du slide ou bottleneck dans la musique américaine.

TENTH Jeu de basses utilisé dans le boogie-woogie.

TERRAPLANE Automobile fabriquée par la « Hudson Motor Car » de Detroit, Michigan, à partir de 1932, et populaire à cause de son bas prix : « When I feel so lonesome You hear me when I moan Who’s been driviri* my Terraplane for you Baby, since I’ve been gone » Terraplane Blues, Robert Johnson (1936).

TERRIBLE Terrible. Par le même détournement de sens qu’en français, sensationnel, super : « The boss heard me and said : “Get her outta here, she’s terrible !” But the piano player who was really nice (he was a terrible piano player, though) told the boss, “Aw, let her stay, she ’s only a kid.” » Interview d’Alberta Hunter, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. ► Too TERRIBLE PARTY. Syn. de rent* party.

TERRIFIC Terrifiant, épouvantable. Super, formidable, enthousiasmant : « Now I know my heroes in that band were Roy Eldridge, trumpet ; Chu* Berry, tenor saxophone; and Dicky Wells, trombone. That night they were terrific and I went home with my head so full of music that I dreamed I had sat* in with them. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

TERRITORY ► Terme vague évoquant, comme nation, l’idée de liberté : « I been to the Nation*, ’round the territory You hear me talkin’ to you You got to reap just what you sow I been all ’round the Nation and 'round the territory But I found no Heaven on earth Lord, nowhere I go » Long Lonesome Day, Jesse James (1936). ► Région constituée du Texas, de l’Arkansas, de TOklahoma et du Nouveau- Mexique. ► TERRITORY BAND. Voir band.

TERRY Quartier noir d'Augusta, Géorgie : « 1 got to Augusta in the end of 1938. The house was located in a section of the city7 called “The Terry”, short for the negro territory. » Janies Brown et Bruce Tucker, James Brotvn The Godfather of Soul.

TESTIFY Déclarer, témoigner. Témoigner de la profondeur et de l’authenticité d’une expérience, d’un sentiment. Pour un fidèle, narrer devant toute l’assemblée un épisode de sa vie durant lequel il lui semble avoir obéi à une voix : « L’église était remplie à craquer par les dames de la paroisse et les “saintes” [...] Le pasteur commençait son prêche et le poursuivait au milieu des “Amen” et des “Oui, Seigneur”. Et puis quelqu’un commençait son témoignage de foi, à grand renfort de cris et de gesticulations, parlant en langues, tandis que les éventails s’agitaient frénétiquement alentour, que des gens couraient tout le long de l’allée centrale, comme ça, spontané- ment, que d’autres criaient, louaient le Seigneur, et que le pasteur recueillait toute cette énergie spirituelle pour la renvoyer décuplée vers les fidèles. Parfois il fallait emmener des femmes à l’hôpital, victimes de leurs transports. » Nina Simone et Stephen Cleary, Ne me quittez pas, Mémoires. «Testify! Don’t be sad Tell the truth ! Don’t you add For no adder, can’t go in For my Lord is coming back again » Testify, For My Lord Is Coming Back Again, Rev. D.C. Rice (1930). Terme utilisé à l’origine à l’église, aujourd’hui d’usage courant en musique ou en littérature : « Hey, hey, the blues is allright It’s all right, all right, Both day and night Say it again Hey, hey, the blues is allright Testify Hey, hey, the blues is allright » 7Zic Blues Is All Right, Little Milton (ca 1980).

TEXAS Surnom du bluesman Alger « Texas » Alexander (ca 1895-c« 1955) : Texas Got The Blues, Texas Alexander (1934). ► TEXAS HOP. Voir hop. ► TEXAS TWIST. Voir twist.

THE MAN Voir man.

THEM 512. Voir they. 513. Devient dem dans sa prononciation spécifiquement noire revendiquée entre autres, par Lionel Hampton (Ring Dem Bells, 1938), Big Bill Broonzy (Roll Dem Bones, 1945), Don Wilkerson (Dem Tambourines, 1962), Big John Patton (Dem Dirty Blues, 1963), ou Roland Kirk (Dem Red Beans and Rice, ca 1972).

THEY (Them) Ils. Les Blancs : « I prayed my mind Your trouble gonna come some day Now run here, baby Set down on my knee I wanna tell you All about the way they treated me » If I Had Possession Over Judgement Day, Robert Johnson (1936). « All I want is my ticket Please show me my train I’m gonna ride, gonna ride ’til I can’t hear them call my name » Grievin’ Hearted Blues, Brownie McGhee (1959). « I was a pretty good mixer ’cause I came from the South and I knowed how to say, “Yes* sir" and “No*sir" and get next to my superior which is the white people you know — I just went along with my jive*. I knowed how jive them and they let me get away with a whole lot of stuff* that I wouldn’t’ve if I’d been a little hostile with them. » Interview d’Arvella Gray, citée par Paul Oliver dans Conversation with The Blues.

THING Chose. Comme en français, au sens figuré, pénis, queue ; coït : « Do it easy*, honey, don’t get rough From you papa, I can’t get enough I’m wild* about that thing Sweet joy it always bring Everybody knows it I’m wild about that thing » I'm Wild about That Thing, Bessie Smith (1929). ► Do THAT THING. Cri d’encouragement à un soliste ou un danseur. ► SHAKE THAT THING. Voir shake. • THE THING. Surnom du guitariste Lafayette Thomas (1932-1977).

THIRD DEGREE Voir degree.

THIRTY EIGHT (38) Pour « calibre 38 » : « I had a 38 special* But it’s most too light But my 22-20* Makes the caps all right » 22-20 Blues, Skip James (1931).

THIRTY TWO (32) Pour « calibre 32 » : « I been shootin’ craps* and gamblin’ Good gal*, and I done got broke* I done pawned my 32 special* Lord and my clothes in soak » Broke Down Engine, Blind Willie McTell (1933). ► THIRTY TWO TWENTY. Revolver de calibre 32 (20 fait référence au pourcentage de cordite dans la charge explosive) : « Her thirty* eight special* It do very well I got a 32-20 Now it’s a burning hell » 32-20 Blues, Robert Johnson (1936).

THREE BALLS Voir ball.

THREE HUNDRED FOUR (304) Durant la Dépression, bordereau signifiant à un travailleur la fin de son embauche sur un chantier (voir project) : « Working on the project* What a scared man, you know Because everytime, look around Ooh well well, somebody’s getting their 304 » Ateu’ Working on The Project, Peetie Wheatstraw (1937).

THREE SIX NINE (3-6-9) ► Combinaison célèbre dans le jeu des numbers* : « I acted a fool* And played all 3-6-9 Lost my money And the gal* of mine » Playing Policy Blues, Blind Blake (1930). ► Cochonneries, saloperies, crasses (car la combinaison renvoie dans les dream* books à « excréments ») : « I’m gonna tell you all women And to please understand Don’t start no 3-6-9 with my man » New Shave 'em Dry, Lil Johnson (1930). ► V. Tromper, berner, faire des crasses : « I’m getting tired Of these policy* writers 3-6-9 in’ for me » Policy Blues, Cripple Clarence Lofton (1943).

THREE-TIME LOSER Litt. : trois fois perdant. A l’origine, récidiviste retournant pour la troisième fois en taule. Récidiviste, cheval de retour : Three Time Loser, Wilson Pickett (ca 1965). On trouve aussi two-time loser.

THRU Pour through, à travers : Walkin' Thru The Park, Muddy Waters (1969).

THUD Voir damping.

THUMB A RIDE Voir ride.

THUNDER Tonnerre. Surnom du pianiste Wilson « Thunder » Smith (?-1965). C’est en référence à celui-ci que le guitariste et chanteur de blues Sam Hopkins, qui travaillait avec lui au début des années 50, tirera le sien, « Lightnin’ » (éclair, foudre). TICKLE THE IVORIES Voir ivory.

TICKLER Charmeur, chatouilleur. Surnom quelquefois donné aux pianistes de stride* du New York du début du siècle, célèbres par leurs manières affectées et leur façon de « taquiner l’ivoire » (tickle the ivories*). The Tickler, Eddie Boyd (1952).

TIGER « Dans l’argot des barrelhouses, le mot “tigre” désigne la main la plus mauvaise que l’on puisse avoir dans une partie de poker; un sept en haut, un deux plus bas, sans paire, ni quinte, ni floche. » Alan Lomax, Mister Jelly Roll.

TIGHT Serré, collant, moulant : « What makes the men go crazy When a woman dress so tight Must be the same ol’ thing That makes a Tom Cat* fight all night » Same Thing, Muddy Waters (1964). ► Radin, pingre : « He [Charlie Patton] 'd hold tight to that money. He wouldn’t even give Bertha no money much. » Interview de Son House (parlant de Charlie Patton), in Delta Blues Guitar. ► Par extension, bien habillé, chic : It’s Tight Jim, Preston Jackson (1926). ► Bandante, provocante : « ’Cause I’m a mighty* tight woman A real tight woman I’m a real jack* of all trades I can be your sweet woman Also be your slave I can cook* things* so good ’til you swear that I won’t have » Mighty Tight Woman, Sippie Wallace (1925). 514. IT’S GONNA BE TIGHT. Ça va faire mal! « Come on in now And get in this hip* shakin’ contest* Yeah, ’cause it’s gonna be tight Let’s all of us pull off our shoes And have a stinking good time » Hip Shakin ’ Strut, Hokum Boys, vcl par Jane Lucas (1930). 515. TIGHT LIKE THAT. Bien que Leadbelly ait répondu à Alan Lomax, lors d’une interview, que l’expression n’évoquait que la danse, il ne fait aucun doute qu’elle fait référence aux rapports sexuels : « I never have a single girl at a time Always have about six, seven, eight or nine Oh it’s tight like that, beedle* urn bum Hear me talkin' to you, I mean it’s tight like that » It's Tight Like That, Tampa Red et Georgia Tom (1928).

► Too TIGHT. Dans le jargon des musiciens, magnifique, super (années 20): « [Parlé], Say, Mister Scrapper*, that’s too tight Why, you oughta have played it » Trouble Blues Part 2, Scrapper Blackwell (1928). • Pseudonyme du bluesman « Too Tight» Henry Castle (ca 1899-1971): « — Say, listen here Too Tight They tell me you all gonna have a charleston* contest* Out your way tonight — Yeah, boy*, I heard ’em talkin’ about it — Well, thing I want to know is, Who is gonna play for 'em? — Well, I heard them say They wanted to get ole Henry L. Castle to play, I guess that's myself » Charleston Contest, Too Tight Henry (1928). ► Too TIGHT PARTY. Syn. de rent* party.

TIME Le temps ; euphémisme pour une condamnation à une peine de prison : « Say, captain* holler “hurry” I'm gonna take my time Say, he makin’ money And I’m trvin’ to make time Say he can lose his job But I can’t lose mine » Captain Holler Hurry, Willie Turner (1950). ► LONG TIME MAN. Condamné à une lourde peine de prison : « Alberta, She won’t write to me She won’t write me no letter She won't send me no word It makes a long-time man Oh Lawd, feel bad » It Makes a Long-Time Man Feel Bad, recueilli par John A. Lomax, cité par Langston Hughes et Arna Bontemps dans The Book of Negro Folklore. ► STOP TIME. Ponctuation régulière, tous les deux ou quatre temps, faite par la section rythmique de l'orchestre, pendant l'intervention d’un soliste : Stop Time, Horace Silver (ca 1954). ► TIME STEP. Voir cross-over.

TIN PAN ALLEY De tin pan, poêle en fer blanc. Le nom viendrait du quartier de l'industrie du spectacle, à Londres, où quand un client désirait entendre une composition, les éditeurs concurrents perturbaient l’écoute en tapant sur des casseroles... Terme péjoratif pour désigner le monde des éditeurs et compositeurs de musique et plus généralement, l’industrie du spectacle. Au début du siècle, le quartier connu sous ce nom se situait près de la 27e rue dans Manhattan. A la fin des années 30, le quartier des éditeurs s’est déplacé vers les 40e et 50e rues, près de Broadway : Tin Pan Alley, Ray Agee (1963).

TING-A-LING Voir ding-a-ling : « Mmm, if you wanna satisfy your soul Come on and rock* me with a steady roll* I’m wild* about that thing Gee, I like that ting-a-ling Kiss me like you mean it I’m wild about that thing » I’m Wild about That Thing, Bessie Smith (1929). TINY Minuscule. Surnom du vocaliste Myron « Tiny » Bradshaw (1905-1958), du pianiste Hartzell « Tiny » Parham (1900-1943) et du guitariste Lloyd « Tiny » Grimes (1916-1989) : Ttray’s Tempo, Tiny Grimes (1944).

TIPPIN’ Contraction de tiptoeing, en marchant sur la pointe des pieds : « Now I swung that 97 I went down in three rail stops I could hear the special* agent When he comes tippin’ over the top » Special Agent, Sleepy John Estes (1938).

TITTE (Titty ) De tit, mamelle. ► Au XIXe, mère ou sœur aînée : « Titty Rita die like a Lazarus die I want to die like a Lazarus die » Chant cité par Allen, Ware et Garrison in Slave Songs of The United Slates (1867). ► Seins, nichons : « I got nipples on my titties Big as the end of my thumb I got somethin’ tween my legs ’ll make a dead man comes Ooh daddy, baby, won’t you shave* ’em dry, ooh Won’t you grind* me, grind me ’til I cry » Shave ’em Dry, Lucille Bogan (ca 1935). Phonétiquement: T.T. T.T. on Toast, Duke Ellington (1938).

TOAST Prolongement, en vers rimés, des « douzaines » (voir dirty* dozens’) : « Poème narratif récité, souvent d’une manière théâtrale et qui représente la plus grande floraison de talent verbal nègre. Les toasts sont souvent longs et durent variablement de deux à dix minutes. Ils adhèrent à un modèle de structure générale mais, en aucun cas, contraignant. Cela consiste en une sorte d’introduction pittoresque ou stimulante, une action qui alterne avec du dialogue (car l’action consiste habituellement en une lutte entre deux personnages ou deux animaux (voir baboon, monkey, spider} et quelque fin à effet, soit une raillerie, un commentaire ironique, soit une vantardise. » Guy-Claude Balmir, Du chant au poème.

TOBY ► Surnom de la Theater Owner’s Booking Agency (voir T.O.B.A). ► Charme, talisman : Toby Woman Blues, Gene Campbell (1931).

TOGETHER Ensemble. Au point, fin prêt : « Let the good times roll* Don’t care if you’re young or old Get together Let the good times roll » Let The Good Times Roll, Louis Jordan (1946).

TOMING (Tomming) Comportement de soumission et de déférence propre à un « oncle Tom ». Voir aussi dirty* dozens et shucking. « I criticized Louis [Armstrong] for other things, such as his “plantation image”. We didn’t appreciate that about Louis Armstrong and if anybody asked me about a certain public image of him, handkerchief over his head, grinning in the face of white racism, I never hesitate to say I didn’t like it. I didn’t want the white man to expect me to allow the same things Louis Armstrong did. Hell*, I had my own way of tomming. Every generation of blacks* since slavery has had to develop its own way of tomming, of accomodating itself to a basically injust situation. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

TOMMIE (Tommy, Tonie) 1. Femme, petite amie : « Got two little tonies, Can’t hardly tell ’em apart One is my lover The other one’s in my heart » Two Little Tommie Blues, Papa Harvey Hull et Long « Cleeve » Reed (1927). ► Prostituée, « gagneuse » : « Hey, Jim Tampa, hey Jim Tampa, Hey, Jim Tampa, you treat your woman so mean. You treat your tommies Like a woman vou ain’t never seen. I-] My man’s got five women And he calls ’em by their natural name » Jim Tampa Blues, Lucille Bogan (1927). TONGUE BLOCKING Technique utilisée par les harmonicistes de blues qui consiste à « bloquer » avec la langue certains trous et à souffler (ou aspirer selon les cas) dans d’autres : « Eh bien, si tu écoutes son disque [celui de Little Walter] Can ’t Hold out Much Longer, tu ne peux pas obtenir cet effet de sonnette [ringing sound} qu’avec le tongue-blocking, c’est la seule manière de faire des accords sur l’harmonica. Quant à Rice Miller [Sonny Boy Williamson n° 2], il ne “bloquait” pas beaucoup, il soufflait les notes directement... avec les lèvres. » Interview de Billy Boy Arnold par lan Beecroft, in Soul Bag n° 107'

TONK 516. Tripot : « I took a Job* playin’ in a tonk for Dago Tony on Perdido* and Franklin street and Louis [Armstrong] used to slip in there and get on the music stand behind the piano. » Interview de Bunk Johnson, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 517. Jeu de cartes proche du gin-rummy : Tonk, Duke Ellington (1946). ► HONKY-TONK. Voir ce terme.

TOODLE-OO (Toodle-um) • Au revoir. • Notons l’assonance avec doodle*, d’où quelquefois, des utilisations moins innocentes du terme : « Run here, mama, just look at this She got her hand in her toodle-um Up to her wrist, she been doing something wrong She been doing something 1 can tell by the way she smell » / Can Tell by The Way You Smell, Walter Davis (1935).

TOP (Blow one’s top) Voir blow.

TOPSY TURVY Sens dessus dessous : Topsy Tuny, Cozy Cole (ca 1957).

TORE DOWN Voir tear.

TOTSY Surnom du guitariste et chanteur Larry Davis (1936).

TOUGH Dur, rude, difficile : Tough Times, John Brim (1953). Par inversion de sens, beau, bon : << There is a place in St Louis They call Cake* alley, you know It’s a very tough place Ooh well, well, where all the bums* do love to go » Ci?te Alley, Peetie Wheatstraw (1938).

TOW Remorquer, haler. Au sens figuré, évoque l’amour et les rapports sexuels : « Well, let me be your towboat And I’ll tow ’cross the pond* Well I’ll take you slow* and easy Ooh well, it really won’t take me long » Easy Towing Mama, The Yas Yas Girl (1939).

TOWN (Go to) Voir go.

TRACK Trace. ► Dancing (années 30-40). ► Morceau, plage d’un disque. ► Le lieu où « ça se passe », la rue (voir set). ► ACROSS THE TRACKS. De l’autre côté des voies ferrées : « la masse des invisibles oubliés dans le ghetto » selon les termes de Geneviève Fabre : Across The Tracks Blues, Duke Ellington (1940). Ant. : on the sunny side of the street (voir street).

TRAIN (Pull/ride/run the) Voir run* the train.

TRAMP Vagabond, chemineau, clochard : « Well I woke up this morning Put on my shoes and clothes Walked down the street Tried to straighten my hair Some woman want to know What tramp is that » Me and My Dog Blues, Brownie McGhee (1940). 518. Prostituée. ► V. Errer, « faire la route », vivre comme un clodo : « When I get off my troubles I’m gonna bring my money down And change my way of living Oh well, so I won’t have to tramp around » Road Tramp Blues, Peetie Wheatstraw (1938).

TRANE Surnom du saxophoniste John Coltrane (1926-1967); « Le paradoxe d’un perfectionniste comme Coltrane est qu’il manque souvent de confiance en lui [...] Comme pour en administrer la preuve, Coltrane intitula son album Blue Train préférant se référer au train plutôt que de prendre directement son propre surnom, Trane. Ce fut pourtant la dernière fois qu’il le fit; car le thème d’ouverture de l’album {Blue Train), avec son solo exemplaire de huit chorus à la file, eut suffisamment de succès [...] pour lui donner confiance et lui permettre d'oser dorénavant utiliser son propre nom. » J.C. Thomas, Chasin’ The Trane-John Coltrane.

TRAPS Pièges. Batterie: « Les traps, c’était l’expression consacrée à cette époque lointaine pour désigner la batterie, c’est-à-dire caisse claire et grosse caisse réunies, dont le musicien jouait assis dans les cabarets et non debout comme dans les parades. » Louis Armstrong, Ma Nouvelle-Orléans. A l’origine, le terme désignait la pédale de la grosse caisse : « En ce temps-là, certains batteurs avaient un valet qui transportait leur matériel, leur traps. Le mot traps, qui désigne l'ensemble de la batterie, vient de la pédale de grosse caisse. Dans le temps, la pédale était fixée au bord d’une caisse par une sorte de lame avec une charnière. C’est cet assemblage qu’on appelait traps. L’ensemble était fixé par deux morceaux de cuir. Pour jouer, il fallait glisser son pied dans le trap. » Interview de Freddie Kohlman par Valérie Wilmer, in Jazz Magazine n° 229, janvier 1975.

TRASH Ordure. ► EMPTY (ONE’S) TRASH. Vider les ordures. Terme quelquefois employé avec des connotations sexuelles dans le sens « se vider les burnes » (voir aussi garbage) : « I don’t need the money, honey I just need you to empty my trash » Garbage Man, Muddy Waters (1972). ► TALK TRASH. Voir talk. ► WHITE TRASH. Blanc du Sud pauvre. TREE OF HOPE « Arbre de l’espoir », planté à Harlem dans la 7e avenue à hauteur de la 131erue. Censé porter chance et réaliser les rêves de ceux qui le touchent, l’arbre fut transplanté au milieu de l’avenue grâce à l’action du tap* dancer Bill « Bojangles » Robinson : Tree of Hope, Benny Carter (1941).

TRICK Mauvais tour, crasse, entourloupe : « “Some day I’m going to make a gambler out of you”, he told me. [...] So Harry- taught me some holdout tricks, meaning that you are sure to win if you get the works in, but very dangerous if you can’t get the cards back into the deck for the next deal. He taught me day after day until one time he decided to make a payday at a railroad camp at Orange, Mississippi. What Harry meant by “making a payday” was that he was going to win all the money from the people that had worked for it. » Jelly Roll Morton cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. V. Jouer un mauvais tour, faire des crasses : « Now six and two is eight Eight and two is ten Friends, boy, she trick you one time She sure gon’ do it again » Sweet Home Chicago, Robert Johnson (1937). Client d’une prostituée : « Lawd, I went to my woman’s door Just like I been goin’ befo’ “I got my all-night trick, baby An’ you can’t git in Come back ’bout half past fou’ If I’m done, I’ll open the door Got my all-night trick, baby An’ you can’t come in” » I Couldn't Git in, chant recueilli par Odum et Johnson et cité dans The Negro and His Songs. Dans le jargon de la prostitution, passe. Selon Eubie Blake, les tricks sont des variations à la main droite d’un pianiste de ragtime ; trucs, plans : « On that evening when he was sick, [King] Oliver played as a member of the ensemble but let Louis Armstrong solo and, believe me, Louis really played, showing everyone present all he knew, all his tricks, and he received after each song tremendous acclamations. » Interview de Tommy Brookins, in Hear Me Talkin ' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 5. Charme, mauvais sort : « I got a gypsy* woman giving me advice I got a whole lot of tricks, keeping them on ice I got my mojo* workin’* But it just won’t work on you » Got My Mojo Working, Muddy Waters (1957). ► TRICK BAG. Ennuis, emmerdes, sacs d’embrouilles : « [Earl] Hooker used to put us in some tricks bags, though. See, Hooker was good, creative, and as far as hustling* gigs, he got ’em, regardless how he got ’em, see. He had me booked all down in Mississippi, and I wasn’t with him no place... » Interview de Ricky Allen par Sebastian Danchin (1984), in Earl Hooker, vie et mort d'un héros du ghetto. ► TRICK BROAD. Prostituée. ► TRICK HOUSE. Bordel, boxon. ► TRICKSTER. Escroc. ► TRICKY. Tricheur : « But women are so tricky They’ll try to tell you white is black To get a woman nowadays Is like buying a pig in a sack » Ups and Downs Blues, Roosevelt Sykes (1940). • Surnom du tromboniste Joseph Irish « Tricky Sam » Nanton (1904-1946) : «J’allais souvent dans un établissement de la 133e rue, entre la 5e et Lenox, pour écouter Tricky Sam Nanton jouer du trombone. Beaucoup de boîtes étaient alors au sous-sol, mais celle-ci donnait de plain-pied sur la rue. Tricky Sam et moi sommes devenus bons amis. Nous avons passé de bons moments ensemble à faire des jams* et nous soûler. C’était quelques années avant qu’il n’entre chez Duke*... » Albert Murray et Count Basie, Good Morning Blues. ► TURN TRICKS. Pour une prostituée, faire des passes, monter un client : «These pimps* and hustlers* et cetera would spend most of their time at Twenty-five until their girls, finish tur- ning tricks in their cribs* [...] Then they would meet them and check up on the night’s take. » Interview de Louis Armstrong, in Hear Me Talkin ’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. TRIXIE De tricky*. Surnom de la chanteuse de blues classique «Trixie» Smith (1895- 1943): Trixie's Blues, Trixie Smith (1921).

TRUCK Camion. Travailler, bosser; baiser, faire l’amour: « Now when you get one of them faulty women She don’t do the truck Get you a two-by-four* And I swear you can strut* your stuff » Broum Skin Girl, Tommy McClennan (1939). ► TRUCKING. Danse lancée au Cotton Club en 1934 (années 30) : Truckin’, Duke Ellington (1935).

TRUMMY Surnom de tromboniste James Asbome « Trummy » Young (1912-1984).

TRUTH Jazz authentique, joué avec une émotion intense (années 40).

TUB Baquet. 519. Batterie rudimentaire (années 40) : « Say mama got the washboard* Sister got the tub My brother got the whiskey And mama’s got the jug* » Going to Move to Alabama, Charlie Patton (1929). L’un des orchestres qui accompagnaient Ma Rainey lors d’enregistrements de 1928 s’appelait « Tub Jug Washboard Band ». 520. Abréviation de washtub* bass.

TUNI Pour petunia, pétunia. « I’m wild* about my ’tuni Only thing I breathe Sweet* petunia gonna carry me to my grave » Sweet Petunia, Curley Weaver (1928). Voir sweet* patootie.

TURKEY TROT Danse du XIXe siècle populaire jusque dans les années 20 : « Now first thing honey* is the Bombashay* Oh turn right round, go the other way. Do the Wordly Faire, the Turkey Trot, Oh don’t that girl think she’s very' hot* I » Bye, Bye, Policeman, Jim Jackson (1928).

TURN ► TURN LOOSE. Libérer, relâcher : « I wrote to the governor To please turn me a-loose Since I didn’t get no answer I know it ain’t no use » Prison Cell Blues, Blind Lemon Jefferson (1928). ► TURN MONEY GREEN. Voir green. ► TURN ON. ® Enflammer, hotter, plaire. @ Se droguer. ® Donner un conseil. ► TURN OUT. Initier quelqu’un, mettre au parfum. ► TURN OVER A NEW LEAF. Faire peau neuve, tourner la page, repartir à zéro : « Since nineteen and fifty two, baby •' I’m gonna turn over a brand new leaf I’m gonna leave all of my troubles, baby Gonna leave all my troubles behind » Turn over a New Leaf, John Lee Hooker (1952). ► TURN TRICKS. Voir trick.

TURNER Joe Personnage important du folklore noir dans lequel il apparaît sous deux éclairages différents : 521. Si l’on en croit W.C. Handy, Turner serait une déformation de Turney. Pete Turney fut gouverneur du Tennessee de 1892 à 1896; lui et son frère Joe auraient plusieurs fois convoyé des détenus (voir long* chain man) depuis Memphis jusqu’au pénitencier de Nashville : « They tell me that Joe Turner’s come and gone Got my man and gone He come with forty links of chain Got my man and gone » Joe Turner, cité par Langston Hughes et Arna Bon- temps dans The Book of Negro Folklore. ou vers les grandes plantations et les mines où ils constituaient une main d’œuvre bon marché : « On a monday morning I was arrested On a tuesday I was tried Judge found me guilty And I hung my head and cried Judge What’ll be my fine Says, a pick and a shovel Way down Joe Brown’s coal mine » Ninety Nine Years Blues, Julius Daniels (1927). Lorsque le nombre des détenus était insuffisant, divers moyens étaient utilisés pour pallier le manque : mandats d’arrêt en blanc, parties de dés engagées par des indicateurs, suivies par des descentes de police... Ainsi de nombreux Noirs, dont le seul crime était souvent de n’avoir ni toit ni travail, ont été incarcérés : « They picked me up And put me in the county* jail They wouldn’t even let my woman Come and go my bail » County Jail Blues, Big Maceo (1941). ► Une version radicalement différente nous est livrée par Big Bill Broonzy dans son autobiographie, Big Bill Blues- Joe Turner aurait été l'intermédiaire d'un planteur blanc qui, voulant garder sa générosité anonyme, aurait fait distribuer en cachette et par son contremaître Old Joe, des vivres aux esclaves durement éprouvés par une inondation : « And Joe Turner was known to be a man That could help them all poor people The white and the black And they would start cryin’ and singing this song They tell me Joe Turner has been here and gone Then they would come home Look in their kitchens They would find flour, meat and molasses That Joe Turner had left there for them » Blues in 1890, Big Bill Broonzy (1951).

TURPENTINE Whisky de mauvaise qualité : « Now what are you going to do When your supper get like mine Take a mouthful of sugar And drink a bottle of turpentine » / Can’t Stand It, Memphis Jug Band, vcl par Ben Ramey (1929). TURTLE TWIST Danse populaire dans le Sud durant les années 20 : Turtle Twist, Jelly Roll Morton (1929).

TUSH Noir au teint clair ; bourgeois « au bras long » : Tush, Earl Warren (1944).

TUXEDO JUNCTION A l’origine, carrefour d’Ensley Avenue et de la 20e rue à Ensley, dans la banlieue de Birmingham, Alabama. Endroit (dancing ou autre) où se retrouvent les mecs branchés : Tuxedo Junction, Erskine Hawkins (1939). TWELFTH STREET (12th street) Rue du centre de Kansas City, Missouri, réputée pour sa vie nocturne ; sa partie est était un quartier noir, avec, du début du siècle à la fin des années 20, de nombreuses maisons closes : « Said, I’ll be standing on the corner Twelfth Street and Vine* With my Kansas City baby And a bottle of sherry7 wine » Kansas City, Little Willie Littlefield (1952).

TWELVES Douzaines. Terme quelquefois employé à la place de dirty* dozens : The Twelves, Kokomo Arnold (1935).

TWENTY ONE (21) Syn. de blackjack : « I sit down with two “ten” I told I have a little fun The deal hit sixteen with the five Just enough to make twenty one Well every dollar I get You know blackjack* take it away from me » Blackjack, Albert Collins (1985).

TWENTY TWO (22) Pour « calibre 22 ». ► TWENTY TWO TWENTY. Revolver de calibre 22 (20 fait référence au pourcentage de cordite dans les munitions) : « If she gets unruly And she don’t want to I’ll take my 22-20 And cut her half in two » 22-20 Blues, Skip James (1931 )

TWIST Cordon, torsion. Danse lancée par Hank Ballard (The Twist, 1959) mais popularisée l’année suivante à travers l’interprétation (voir cover) qu’en donna Chubby Checker (The Twist, 1960; Let’s Twist Again, 1961) à une période d’essoufflement de la vogue du rock* and roll : «Johnny plays the guitar at the weekly record hops* He start twistin’, turnin’, and they wouldn’t let him stop Girls all shook* up see him shakiri* on the show Everybody starts to holler “Go, go, go”, oh baby» Let's Go Go Go, Chuck Berry (1961). La particularité du twist est d’avoir été la première danse « solitaire et asexuée » (selon Henry Miller); le twist inaugura l’intrusion massive du marketing dans la musique de danse, et une multitude de pas furent lancés sur le marché à la suite du succès phénoménal qu’il rencontra (locomotion, madison, mashed potatoes, hully-gully, jerk, slop, shake, surf, watusi, pony, ride, Bristol stomp, fly, limbo, pop eye.). • Surnom du bluesman Johnny « Twist » Williams (1906). ► TEXAS TWIST. Danse populaire dans le Sud au cours des années 20. ► TURTLE TWIST. Danse populaire dans le Sud dans les années 20 : Turtle Twist, Jelly Roll Morton (1929). ► TWISTER. ® Tornade, cyclone : « Yes I was stayin’ in my kitchen I was lookin’ away out across the bay I see that mean old twister I started in to pray » That Mean Old Twister, Lightnin’ Hopkins (1946). ® Clefs. @ Nouba, bringue. ® Descente de police, rafle.

TWO-BEAT Voir beat.

TWO-BY-FOUR Couteau à cran d’arrêt : « I been talking to you, man And I ain’t going to talk no more Well, some of these mornings I’ll cut your head with my two-by-four » Two by Four Blues, Merline Johnson (1941).

TWO-FACED MAN (woman) Variante de root* doctor : A Two Faced Man, Wee Willie Wayne (1951). « Two-Faced woman Trying to see her two days at one time Be mighty* doggone careful Of nar’ one of them days be mine » Two-Faced Woman, Curley Weaver (1935).

TWO-TIME Tromper (en amour): « She’s a two-timin’ mama Always tryin’ a two-time me The law told me I couldn’t hurt her But something red I did see » Good Time Rounder, Barbecue Bob (1929). Two-Time Man, Don Redman (1932) ► TWO-TIME LOSER. Récidiviste (syn. threetime loser). ► TWO-TIMER. Homme (femme) infidèle.

TWOS AND FEWS Dans l’argot de la prostitution, passe; l’expression provient du coût d’une passe dans les quartiers noirs avant la Deuxième Guerre mondiale (soit aux alentours de deux dollars). Twos and Fews, Meade Lux Lewis(1939). U

U Phonétiquement, You : U Need Some Loi ing Blues, Mamie Smith (1921). On peut trouver quelques exemples de cette pratique de l’écriture phonétique, inaugurée par Mamie Smith, tout au long de l’histoire de la musique noire américaine enregistrée (Black Nite, de Charles Brown, Dat There, de Bobby Timmons...). Mais c’est réellement avec Prince (dès 1981 et son album Controversy) et les productions des courants funk et rap que le procédé va se systématiser; on trouve alors, outre U pour TOM, 4 (four) pour for ou 2 (two) pour to ou too.

UNCLE Oncle. Terme équivalent à boy* dans la bouche d’un Blanc s’adressant à un Noir d’un certain âge : « There was a man that I knew, when I was ten years old, that the white people called a boy. He was about thirty then. When I went to the army and came back in 1919, well he was an old man then and the white people was calling him uncle Mackray. So he never got to be called a man. » Big Bill Broonzy et Yannick Bruynoghe, Big Bill Blues. ► UNCLE SAM. 1813. Ce surnom est celui d’un certain Samuel Wilson, d’abord fournisseur en viande de l’armée, puis inspecteur du ravitaillement, pendant la seconde guerre anglo-américaine (1812-1814). Il fit preuve d'une intégrité professionnelle sans faille qui lui valut ce surnom; et. comme ses initiales correspondaient à celles de United States, il devint le symbole des Etats-Unis. « [Parlé] Like I was saying, Uncle Sam is a bad man. He get all the young folks and everything, keep up a lot of noise and can put you in a hole* or something, every time there is a war goin’ on. [...] but 1 want to tell you what the women say about what he done to her. Uncle Sam. Uncle Sam’s Blues, here : You know Uncle Sam he think that, Yeah, that he is so doggone* cute He took my husband out of his good clothes And put him in one of his khaki suits » Uncle Sam's Blues, Speckled Red (1960). ► UNCLE TOM. D’après le roman de Harriet Beecher-Stowe, Uncle Tom’s Cabin (La Case de l’oncle Tom), 1852. ® Noir servile : « Then during wartime, we were on the train going to play a gig*, and we were riding* in the colored part of the train. This Uncle Tom porter was reporting what we were doing back to the white conductor. » Dizzy Gillespie, To Be or Not To Bop @ V. Se comporter comme un « oncle Tom » (voir aussi toming) : « In Europe they don’t want me to Uncle Tom or clown* like I have to do here. They just want you to play the blues*! They like it better if you just stand there in the same spot and play your numbers*. And the reception is so much greater in Europe ! » Interview de Muddy Waters par Mike Bloomfield, Rhythm and Blues Magazine, juillet 1964.

UNDERDOG Le perdant (d'une compétition sportive ou... sociale) : Beneath The Underdog (Moins qu’un chien), titre du récit autobiographique de Charles Mingus.

UNDERGROUND RAILROAD (Railway) Organisation clandestine qui permettait aux esclaves évadés de « passer la ligne » (voir line), de gagner le Nord anti-esclavagiste ou le Canada : Song of The Underground Railway John Coltrane (1961). « The Underground Railroad is a strange machine It carries many passengers and never has been seen Old Master goes to Baltimore and Mistress goes away And when they see their slaves again They’re all in Canaday» Chant de 1854, cité par Sim Copans dans Chansons de revendication, reflets de 1’Histoire américaine. «Je n’ai jamais approuvé la façon très publique dont certains de nos amis de l’Ouest ont mené ce qu’ils appellent le “Chemin de Fer clandestin”, mais qui, je trouve, en raison de leurs déclarations ouvertes, est devenu carrément le “Chemin de Fer public”. » Frederick Douglas, Mémoires d'un esclave américain (1845). En deçà de la « ligne », le fugitif devait échapper aux « chasseurs de têtes » (voir patrol) payés par les propriétaires : « O run, nigger, ’fore the patrol will catch you O run, nigger, ’fore this almost day » Chant recueilli par Allen, Pickard et Mckim Garrison, in Slave Songs of The United States. Au-delà de la « ligne », à moins de gagner le Canada, les fugitifs n’étaient pas encore à l’abri, puisque pour éviter toute sécession au sein de l’Union, les Etats du Nord s’étaient engagés à leur refuser asile et à les livrer à leurs « légitimes » propriétaires. Le nombre des fuyards est difficile à estimer; on le suppose entre 2 000 (Sim Copans, Chansons de revendication) et 10 000 par an (Caries et Comolli, Free Jazz Black Power) sur un nombre total d’esclaves estimé en 1860 à 3,8 millions.

UP AND DOW N THE UNE Voir line.

UP THE RIVER ► Surnom de la prison de Sing Sing qui est sur l’Hudson en amont (up) de : « You can send me up the river Or send me to that mean old jail I killed my man And I don’t need no blame » Sing Sing Prison Blues, Bessie Smith (1924). ► Métaphore pour «en taule», «en cabane » : « I have four-five to twenty one When I git back we gon’ have some fun* Up the river, daddy, Going to do a stretch* » Doing a Stretch, Blind Blake (1929).

UPTIGHT ► Dans l’argot des musiciens: archi- connu, familier. ► Dernier cri, à la mode : « I’m dressed up tight Goin’ a-workin down the line* Me and my gal* gonna shake* that thing We just don’t know, honey, that just ain’t hay* Oh listen, when I tell you Honey, that just won’t hay » It Just Won’t Hay, Barbecue Bob (1929). ► Tendu, nerveux, anxieux; syn. : hung up (années 50). ► Par inversion, décontracté, calme (années 60). Uptight (Everything’s All Right), Stevie Wonder (1965).

UPTOWN A La Nouvelle-Orléans, quartier noir à l’ouest de Canal Street (voir aussi Yiory- ville). Banlieue, quartier résidentiel (ant. downtown, quartier des affaires) : « Says, I’m going uptown Tell the chief of police My woman quit* me, I can’t see no peace She keeps me worried, I’m bothered all the time » Hunkie Tunkie Blues, Charley Jordan (1930).

USED-TO-BE Homme (mari ou concubin notoire) : « I went to the jail house Crying : “Jailer please Please mister jailer Let me see my used-to-be” » I’ve Got to Go and Leave My Daddy Behind, Sara Martin (1923). Femme (épouse ou régulière) : « Let me tell you, mama What that black dog done to me He cheated me from my regular* Now he’s after my used-to-be » Black Dog Blues, Blind Blake (1927). Souvent renforcé par old-time : « I’m praying to the Lord above For my old-time used-to-be » The Santy Claus Crave, Elzadie Robinson (1927). V

V-8 ► Automobile Ford «V-8» : « Get your red ripe tomato And your T Bone* steack And if you fix* it like I like it I will get you a new V-8 » Bread Baker, Leroy Carr (1934). ► Femme froide, hostile (années 40).

V-DISC Victory Disc. Disques souples édités pour les troupes pendant la période 1943-1945; la série rouge était destinée à l’armée de l’air, la bleue à la marine. Le répertoire était pour une bonne part de jazz et provenait soit de repiquages, soit de séances spécialement produites pour la circonstance; dans ce dernier cas, les matrices furent détruites après la guerre, les musiciens ayant participé gratuitement aux enregistrements : Bouncin’ on a V-Disc, Fats Waller (1943).

VAG Abréviation de vagrancy, vagabondage : « I pickin’ up the newspaper And I lookin’ in the ads And the policeman came along And he arrested me for vag » No Job Blues, Ramblin' Thomas (1928). Voir Joe Turner.

VALLEY Vallée. Surnom d’un quartier mal famé d’East St Louis, Illinois, détruit en 1937; Peetie Wheatstraw y habita un temps : « We used to have luck in the Valley But the girls had to move way out of town Some moved in the alley* Ooh well, well, because Third Street is going down » Third Street's Going, Down, Peetie Wheatstraw (1937). ► HOOVER VALLEY. Voir Hooverville. ► WARM VALLEY. Litt.: vallée chaude; organes sexuels féminins : Warm Valley, Duke Ellington (1940).

VASTE RPOOL Voir Sebastopol.

VICTROLA Tourne-disques : « When your pal* buy your gal* A Coca-Cola You can bet your life He’s playing her victrola » Do It Right, Kid Wesley Wilson (1929).

VINE STREET Rue célèbre de Kansas City, Missouri : « Said, 1'11 be standing on the corner Twelfth* Street and Vine With my Kansas City baby And a bottle of sherry vine » Kansas City, Little Willie Littlefield (1952). VIPER Accroché à la marijuana : « Then you’ll know your body’s sent You don’t care* if you don't pay rent The sky is high* and so am I If you’re a viper » If You're a Viper, Rosetta Howard (1937).

VONCE (Vounce) Marijuana; mégot d’un joint; quelque chose (années 40) : Swiss Vounce, Howard McGhee (1948).

VOODOO Afr. 1875. Certaines hypothèses font dériver le mot de « veau d’or » (danse de l’Afrique de l’Ouest), d'autres du vaudoun (bon génie, esprit protecteur) du Dahomey, d’autres enfin, de vo, déité inspirant la peur chez les Africains de langue ewe. Vaudou (voir hoodoo) : « He’s what that, what you call a voodoo man He studies witchcraft and other kind of stuff* He put a big black snake* in my bed He put that goopher dust* where I lay my head He put a dead rooster on my door... » Voodoo Daddy, Lonnie Brks (ca 1979). W

W & A Nom dun train : « Some say it was the Seaboard* Some the W & A Don’t care* what train it was, took my gal* away Starch my jumper, iron my over-alls, I want to get that train, they call Cannonball* » Cow Cow Blues, Speckled Red (1960).

W.D.I.A. Station de radio de Memphis, Tennessee, qui commença à programmer des émissions à destination du public noir à la fin de 1948, avec un succès tel que, dès 1949, l’ensemble des programmes lui fut destiné, ce qui en fit la première radio « noire » des USA. Parmi les animateurs de WDIA, on peut noter Rufus Thomas et B.B. King.

W.P.A. Pour Works Progress Administration. Agence gouvernementale créée en mai 1935 en plein New Deal. Dès 1936, elle fournissait du travail à plus de trois millions de personnes (le taux de chômage avoisinait les 25 % lors de l’élection de Roosevelt). Elle finança également un vaste programme artistique — dont le Federal Writer's Project qui permit la publication de textes de Richard Wright, Ralph Ellison, Arna Bontemps ou Marga- reth Walker, le recueil du folklore oral, ou des souvenirs de plus de deux mille anciens esclaves ; elle permit l’alphabétisation de plus de 400 000 Noirs avant d’être dissoute en 1943 : « WPA, PWA, CWA*, all of these was work projects* for men and women. Me and my manager both was on the WPA together. There was no recording at that time. It was easy for us to get a job* on the WPA because we had been in the army in 1918 and they call us old veterans. » Big Bill Broonzy, Big Bill Blues. WABASH Petite ville de l'lndiana. L’une des principales avenues du South Side de Chicago, Illinois : « Down South On Wabash street Everybody You chance to meet » Waftasl) Rag, Blind Blake (1927). ► WABASH OU WABASH CANNONBALL. Express de la Wabash Railroad, mis en service en 1946 entre Detroit, Michigan, et Saint Louis, Missouri : « Slidin’ thru the woodland Thru the hill and (by the shore?) Slidin’ thru the jungle, boys On the Wabash Cannonball » Wabash Cannonball, Blink Willie McTell (1956). Mais surtout train mythique des chemineaux et vagabonds (voir hobo) censé les amener magiquement là où ils désiraient se rendre : « I’m going to the Western Union Type the news all down the line* Because my man’s on the Wabash Darling, and I don’t mind dying » Rough and Tremble Blues, Ma Rainey (1925).

WAGON Chariot, wagon (découvert). ► Depuis 1890, amoureux, amant: You’ve Been a Good OP Wagon, Bessie Smith (1925). ► Panier à salade : « They had us blocked off From the front to the back And they were puttin’ em In the wagon like potato sacks » Saturday Night Fish Fry, Louis Jordan (1949). ► RED WAGON. Organes sexuels : « Don't slip* me in the dozens ’cause I can’t stand it It’s my cup It’s my bucket* It’s my little red wagon » Don't Slip Me in The Dozen, Chris Smith (1924). ► THAT’S YOUR RED WAGON. Ce sont tes affaires, tes oignons. ► WAGON WHEEL. Pièce d’un dollar en argent.

WAH-WAH 522. Sourdine utilisée notamment par certains trompettistes pour modifier le timbre de l’instrument. Cootie Williams, Bubber Miley, Cat Anderson, Ray Nance ou Miles Davis sont quelques-uns des meilleurs spécialistes de cette technique : « Nous tirions parti de bien d’autres imitations de cris d’animaux, telles que les wah-wah sur les trompettes et les trombones. Les sourdines entrèrent en scène avec King Oliver, qui fut le premier à fourrer des bouteilles dans sa trompette pour jouer plus doucement, et qui se mit ensuite à employer toutes sortes d’autres objets pour donner à son instrument des sons variés. » Jelly Roll Morton cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. 523. Style des musiciens l’utilisant

WAIL Swinguer, chauffer, déménager : « Everybody rock*, rock, rock, Everybody jump*, jump, jump, Everybody wail, wail wail, Everybody jump » Jumpin' in The Morning, Ray Charles (1952).

WALK Marche. • Technique des pianistes du début du siècle : « The walk* could be effected in many ways, the pianist rocking* from fourth finger to thumb up and down the scale in the most typical form ; through using the catch-up* of alternating walk and chord, and numerous other variants. » Paul Oliver, The Story of The Blues. D’où walking bass et walking blues. • En jazz, rythme à quatre temps (années 50). • Danse créée par Jimmy McCraklin en 1957: The Walk, Jimmy McCraklin (1957). ► CAMEL WALK. Danse en vogue après la Première Guerre mondiale : The Camel Walk, New Orléans Jazz Band (1925). ► FIG WALK. Danse de la période swing. ► FISH WALK. Danse populaire du début du siècle. ► WALKING BASS. Litt. : basses ambulantes. Technique caractéristique du boogie- woogie ; elle doit son nom à l’impression de marche en cadence qui s’en dégage : « Ça remonte à 1903,1904. Les pianistes faisaient alors courir les basses [...] Ils commençaient à les faire courir, ça sonnait bien et les filles se mettaient à sauter dans le bouge. Les types ne savaient pas ce qu’ils jouaient, et moi aussi je faisais courir les basses. J’ai appris à jouer de la guitare à côté d’un piano. C’est mon style et dans ma musique, j’ai bien fait ressortir les basses. Au piano, je m’asseyais toujours du côté des basses et c’est comme ça que je joue. Ce bon vieux James P. John [Johnson], il a fait courir les basses pendant longtemps sans savoir comment s’appelait la musique qu’il jouait. Mais les écrivains en ont parlé dans leur prose et lui ont trouvé un nom : boogie-woogie. » Introduction parlée à Cry for Me, Leadbelly (1948). Ce sont des bluesmen tels que Robert Johnson et Leadbelly qui, les premiers, ont transposé les walking bass à la guitare et, selon Gérard Herzhaft (in L’Encyclopédie du blues), « cette accentuation particulière du rythme a été à l’origine du Chicago blues ». ► WALKING THE BAR. Marcher sur le comptoir : « Au départ, ça avait lieu dans ces clubs où l’estrade pour les musiciens est située derrière le bar, ou qui ont un comptoir suffisamment large pour que les musiciens puissent marcher dessus sans risquer de mettre les pieds dans les verres ou sur les doigts des clients. Les musiciens étaient donc requis de déambuler comme ça, d’un bout à l’autre du comptoir. Et plus ça se contorsionnait, dans les gesticulations et les girations les plus dingues, plus les sons tirés des binious étaient dégueulasses et discordants —, et plus les patrons étaient contents. C’était ça, walking the bar. » J.C. Thomas, Chasiri The Trane; John Coltrane. ► WALKING THE DOG. Danse des années 20 : Walking The Dog, Eddie Lang (1929). remise au goût du jour par Rufus Thomas : Walking The Dog, Rufiis Thomas (196.3). ► WALK (SOMEONE’S) LOG. De l’argot des bûcherons où une log-walking compétition consiste à marcher d’un bout à l’autre d’un tronc d’arbre flottant. Vaincre, filer une volée à quelqu’un : I’m Gonna Walk Tour Log, Baby Doo Caston (1940). La log-rolling compétition oppose, sur le même tronc d’arbre, deux bûcherons cherchant à se faire tomber à l’eau. ► WALK TUAT WALK. Marcher de façon à se faire remarquer, frimer, rouler le but : « Mais on reconnaissait à coup sûr le Grand Maître des Cérémonies à sa façon de marcher dans les parades [voir s/reeZ* parade]. C’était un personnage qui marchait en se pavavant, d’une façon royale. C’était, parmi les membres du club, celui qui pouvait le mieux marcher et que l’on choisissait, invariablement, comme Grand Maître des Cérémonies. Oui, le Grand Maître des Cérémonies, il avait cette façon fringante de marcher et il pouvait aussi étonner [...] En effet, il marchait toujours fièrement, parfaitement en rythme, en se basant sur le tempo de la musique, mais, en même temps, il se mouvait de telle façon qu’on ne savait jamais ce qu’il allait faire [...] Et puis tous ces pas de danse qu’il improvisait, c’était vraiment quelque chose, cette suprême élégance qui était la sienne, quand il tournait brusquement sur lui- même. » Sidney Bechet, La musique, c’est ma vie. Walk That Walk, Buddy Tate (1958). Selon le contexte, on parlera de cattiri walk (attirer l’attention des femmes, susciter l’admiration), deslu foot, de soûl walk, de cool walk, de pimp walk ou de shoo- ting the agate*.

WALL (One-strand-on-the-wall) Voir one-strand.

WALLER Du nom du pianiste Fats Waller (1904- 1943). Pianiste remarquable ou musicien de talent.

WALNUT STREET Rue du centre de Saint Louis, Missouri : Stay out of Walnut Street Alley, Lonnie Johnson (1927).

WANG Pénis, queue : The Wang Wang Blues, Mamie Smith (1921). ► WANG DANG DOODLE. Onomatopée faisant référence à la fête, au plaisir et à la sexualité (voir aussi doodle et Wang} : « We gonna pitch a bail* down that Union Hall We gonna romp and stomp* ’til midnight We gonna fuss and fight til daylight We gonna pitch a Wang Dang boodle all night long » Wang Dang Doodle, Howlin' Wolf (1960).

WARM VALLEY Voir valley.

W ASH OLT Surpasser, lessiver, rétamer : « Benny* | Carter] is a magnificent trumpet player. [...] He used to blow out his trumpet players. He used to pick up his boni* and play solos and wash out the trumpet players, man. He was always the best trumpet player in his band* Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop WASHBOARD Planche à laver : « Me and my old washboard Sure do have some scares and woe In the muddy water Wringin’ out these dirty clothes » Washwoman’s Blues, Bessie Smith (1928). Instrument de percussion, constitué d’une planche à laver recouverte de tôle ondulée tenue devant la poitrine et que le joueur frotte (on dit aussi rubboard) de ses doigts munis de dés à coudre : « Il [Washboard Sam] chantait très bien, en s’accompagnant au washboard. Il se servait pour cela de sept dés à coudre au bout de sept de ses doigts. Il les frottait sur cette planche à laver, variant la sonorité et le rythme selon ses chansons. » Big Bill Broonzy et Yannick Bruynoghe, Big Bill Blues. Cet instrument de fortune connut une grande vogue dans les années 20 et jusqu’à 1935 (Washboard Serenaders, Washboard Rhythm Kings, Clarence Williams...) : « Mama don’t ’low no washboard playing here Now we don’t care* what mama don’t low We gonna play washboard anyhow Mama don’t ’low no washboard playing here » Mama Don't ’Low, Washboard Sam (1935). • WASHBOARD SAM. Pseudonyme du bluesman et joueur de washboard Robert Brown (ca 1910-1966) : « My name is Washboard Sam But many call me Loving Joe Listen to what I say If you really wants to know Now ask the ladies in your neighbourhood About my plan And they will tell you That Loving Sam is The Man* » Lover's Lane Blues, Washboard Sam (1941). • WASHBOARD WILLIE. Surnom du bluesman William Hensley (1909).

WASP 1957. Pour White Anglo-Saxon Protestant. Blanc ; « On s’est embarqués dans une grande discussion sur les Blancs, et Mingus a complètement perdu les pédales. A cette époque, il leur en voulait à mort, il ne supportait pas ce qui était blanc, en particulier les hommes. Côté sexe, il pouvait apprécier une Blanche ou une Orientale, mais ça ne changeait rien à sa haine de l’Américain blanc ou de ce qu’on appelle les WASP. » Miles Davis et Quincy Troupe, Miles, l'autobiogra- phie.

WASHTUB BASS Sorte de contrebasse rudimentaire faite avec une bassine (washtub') et un manche à balai.

WASHWOMAN'S GIG Voir gig.

WATER (Put waters on) Voir pz/i waters on.

WATERGATE Immeuble de Washington D.C., siège du quartier général du parti démocrate durant les élections présidentielles de 1972 qui opposaient le républicain Richard Nixon au démocrate George McGovern. L’immeuble est devenu célèbre en 1973, quand fut révélée l’effraction commise le 27 juin de l’année précédente dans les locaux du parti démocrate. L’affaire du Watergate entraîna la démission de Richard Nixon le 8 août 1974 et son remplacement par Gerald Ford : « Three and half more years of torture Is more than we can stand Because the Watergate affair Is flooding all over the land They* cryin’ law and order What does law and order mean? Does it mean one has to talk Or get executive clemency? » Watergate Blues, Bob Kirkpatrick (1973).

WATERMELON MAN Vendeur de pastèque. Revendeur de drogue, dealer : Watermelon Man, Herbie Hancock (1962).

WATTS Quartier noir du sud-est de Los Angeles. Résidentiel à l’origine (comme Harlem), le quartier commença à se paupériser dans les années 20 : « There was a road* house out in a little place called Watts, about nine or ten miles from Los Angeles. The colored owner, George Brown, wasn’t doing any good, so, when I offered to come out there, he immediately accepted. [...] We had invitations printed and, my opening night, all Hollywood was there. » Jellv Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

WATBSE (Watusi) Du nom d’une tribu d’Afrique orientale. Danse des années 60 apparue à la suite du succès du twist : Watusi Jump, Lou Donaldson (ca 1962).

WAY BACK Qui évoque le Sud et ses traditions : « We’re gonna take you way back I say : we’re gonna take you way back » Introduction parlée à Blues at Sunrise, Albert King (1973).

WAY OUT Extra, super, au poil; original, créatif. « I’d been playing with Fats* [Domino] for a couple of years and I’d seen some pretty’ wild suits as far as colors go, but [Little] Richard with the diamonds, the different colored stones and sequins, the capes, the blouseshirts, the way he used make up, the way he did his eyes [...] it was really very way out for the times. » Interview de H.B. Barnum, cité par Charles White dans The Life and Times of Little Richard.

WEED Mauvaise herbe. Marijuana : Weed Smoker’s Dream (Why Don’t You Do Now?), Harlem Hamfats, vcl par Joe McCoy (1936). ► WEEDHEAD. Drogué (à la marijuana) : Weed Head Woman, Champion Jack Dupree (1941).

WEEPER Drogué : Willie The Weeper, Louis Armstrong (1927).

WELFARE Programme d’assistance aux nécessiteux : « Well you better save a dollar And try to make other plans ’cause you gonna whine ’round the Welfare Eating out them garbage cans » No More Hard Times, Alec Seward et touts Haves (ca 1950).

WEST SIDE L'un des quartiers de Chicago, Illinois, qui fut progressivement investi par les couches populaires noires à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, lorsque le premier foyer d’implantation, le South Side, commença à s’embourgeoiser. Le blues qui s’y développa, joué par des musiciens tels Otis Rush, Magic Sam ou Buddy Guy, est à l’image du quartier, violent et désespéré : « Now I got a West Side baby And she live ’way ’cross town And when I’m with my pretty baby Oh, I just don’t want a soul* around » West Side Baby, Fention Robinson (1978).

WET DECK Litt : pont mouillé Se dit d’une femme qui a « le feu au cul » : Wet Deck Marna, Champion Jack Dupree (ca 1945/46). WETBACK Litt. : dos mouillé. Surnom donné aux Mexicains entrés illégalement aux Etats-Unis (un grand nombre d’entrées illégales se font à la nage, via le Rio Grande qui marque la frontière) : Wetback Hop, Chuck Higgins (1955).

WHAM BAM THANK YOU MA’AM Litt. : « Et toc, merci m’dame ». ► Phrase de remerciement d’un client après une passe. Dans les variantes Ram Bam ou Wham Bam Thank You Ma’am, on retrouve ram (défoncer avec un bélier) dont le sens argotique est « baiser » et l’onomatopée wham qui renvoie aux organes sexuels. Selon Charles Mingus, Max Roach utilisait cette expression lorsqu’il ne parvenait pas à exprimer ce qu’il ressentait : Wham Bam Thank You Ma’am, Charles Mingus (1961).

WHAMMY Malédiction, sortilège : « If I could forget about you, baby I wouldn’t be in so much misery Yes but I think I understand, baby You must have put your, put your whammy on me » She Put The Whammy on Me. Freddy King (1962)

WHEEL ► BIG WHEEL Syn. de big* dog. ► DRIVING WHEEL Voir drive. ► POLICY WI IEEL. Roue servant au tirage des chiffres gagnants dans les numbers « I went to the wheel They wouldn’t let me in I stood on the steps right out in the wind “Mister man, mister man, please open the door I want to play 4*-11-44” » 4-11-44, Papa Charlie Jackson (1926). Elles apparaissent souvent dans les paroles de blues par leurs surnoms, Big Train, Fast Mail, Green Gable, Greyhound, Interstate, Coalfield, Wisconsin, Steamliner... ► WHEELS. Bagnole, tire, chignole. ► WHEEL AND DEAL. Magouiller : Wheel and Deal, John Lee Hooker (1955). WHEELING Prison de l’ouest de la Virginie. « Got my dungeon loaded Bound to blow you down I just got back From Wheeling today » Cité par W.C. Handy dans Father of The Blues.

WHIP Fouetter : Gal You Need a Whippin’, Louis Jordan (1954). Voler, piquer, faucher, taper : « Some folks are so deceiving Take frienship as a joke They’ll whip you when you’re up And you can’t find them when you’re broke* » Mailman Blues, Tiny Mayberry’ (1938). ► WHIPS. Pour WHIte Power Structure, la société blanche dominante.

WHIRLWIND L’un des- surnoms du chanteur et pianiste louisianais Roy Byrd alias Professor Longhair ( 1918-1980).'

WHISKY HEAD (Headed) Poivrot, sac à vin (voir head) : « Now he’s a whiskey headed man And he stays drunk all the time Just as sure as he don’t stop, drinking I believe he’s gonna lose his mind » Whiskey Head Man, Tommy McClennan (1939).

WHISPERING Surnom de l’harmoniciste Moses « Whispering » Smith (1932-1984).

WHITE ► Blanc, l’homme blanc. Les rapports qu’il entretient avec le Noir apparaissent la plupart du temps masqués dans le blues ; (voir baboon, monkey, they, captain...)-, le Blanc est cependant quelquefois mis en scène « à visage découvert » : « I love my girl like a schoolboy loves his pipe Or like a Kentucky white man loves his rock and rye. I’ll love my girl ’til the day I die » St. Louis Blues, Jim Jackson (1930). ► La couleur blanche, selon l’idéologie dominante qui déprécie le Noir, est survalorisée (sur ce point, voir black où le problème des différentes nuances de couleur et de leur hiérarchie est abordé) : « I’ll certainly treat you Just like you was white If that don’t satisfy you Girl, I’ll take your life » Falling Down Blues, Robert Wilkins (1929). R.R. Macleod, dans son ouvrage Yazoo 1-20, émet l’hypothèse selon laquelle white pourrait signifier « innocent » : « Tell me brownskin mama, Wherever did you stay last night? With your hair* all down Your face ain’t never white » Snatch It Back Blues, Walter « Buddv Boy » Hawkins (1927). Il admet cependant que sa transcription du dernier vers est sujette à caution, You’re facin’ every way’ étant une autre interprétation que permet l’écoute et qui n’altère pas le sens de l’ensemble. WHITE DEATH. Mort blanche. Tuberculose. WHITE LIGHTNING. Alcool, tord-boyaux : « Goin’ down the Delta* Where I can have my fun Where I can drink my white lightnin’ and gamble I can bring my baby home » Mississippi Blues, Willie Brown (1942). ► WHITE MULE. Voir mule. ► WHITE STUFF. Voir stuff. ► WHITE TRASH. Blanc pauvre du Sud. ► WHITNEY. Blanc (terme neutre ou négatif selon le contexte) : Don’t Call Me Nigger, Whitney, Sly and The Family Stone (197?).

WHOA Dans la bouche d’un charretier, Ho! (stop) : « Men in the country Hollerin’ “Whoa, haw, gee*" Women in the city flying around Askin’ the question “Who wants me?” » Hesitation Blues, Rev. Gary’ Davis (1969).

WHOOP Cri (de joie). Cri, phrase criée durant le travail des champs (voir holler) : Whoop and Holler Stomp, Montana Taylor (1929). Psalmodie utilisée dans les sermons lorsque l’excitation gagne les fidèles (voir moaning). ► MAKE WHOOPEE. Faire la noce, la bringue : «Well that night I didn’t have but 50 cents I was in Jackson whooping with them women and men Well well and I bet my 50 cents on Joe [Louis*] Well, in no time, I won my 50 cents back again » Joe Louts and John Henry, Sonny Boy Williamson (1939). ► WHOOP IT UP. Prendre du bon temps : « I’m telling you when they started playing this little things, they would really whoop it up, everybody got hot* and threw their hats away. » Jelly Roll Morton, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll.

WHORE Prostituée, putain : « I stayed up for you all night Now baby, and I stayed up the night before Well it’s best for you to keep single Black gal*, when you walks like a whore » Black Girl Blues, Roosevelt Scott (1939). ► WHOREHOUSE. Maison de passe, bordel : « Roy Eldridge didn’t wanna go to Europe. We got Dizzy [Gillespie] and everytime we’d look, Dizzy was coming out of a whorehouse in Paris. So that’s Dizzy. » Interview de Dickie Wells, cité par Dizzy Gillespie et Al Fraser dans To Be or Not To Bop.

WICKED Mauvais, méchant, pervers. « Oh Lord have mercy on my wicked soul* Wouldn’t mistreat* you, baby For my weight in gold Oh Lord have mercy on my wicked soul » My Black Mama, Son House (1930). Par inversion de sens, terrible, sensas.

WIG Perruque, postiche : « You don’t like your daddy You got no right to carrying a stole Hand me back that wig Í bought you Mama, let your doggone* head go bald » Church Bells Blues, Luke Jordan (1927). 524. Crâne, « boule » : « I’ve often wondered since about the condition of the wigs of the busy radio censors if they ever learned the truth about the significance of such recording tittles as The Skrontch, T.T. on Toast, Warm Valley and others... » Interview de Louis Metcalf in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. 525. Les cheveux d’un(e) Noir(e), spécialement s’ils sont décrêpés et, par extension, Blanc : Natural Wig, Muddy Waters (1968). 526. Type un peu maboul, cinglé, original. « Playing with Cab [Calloway], I was always doin’ my damnest to be bip*. 1 was a wig, and i was always doing crazy things. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. 527. Mentalité, esprit, pensées : I Dig Your Wig, Buddy Guy (1964). 528. V. Dans le jargon musical, jouer une musique intellectuelle; joùer un arrangement « de tête ». ► WIGGED. Dey/tjp (one’s) wig : qui s’éclate, parti, branché.

WIGGLE Danser : «You wiggle and a-wobble it And you move it around Ball the jack* and you go to town And does that scraunch* » Doin' The Scraunch, Barbecue Bob (1930).

WILAPHANT Fille moche : Wilaphant Winnie, Benny Morton ( 1945).

WILD Sauvage, dissolu, dissipé. Par inversion de sens, super, au poil (années 40-60) : • Surnom du saxophoniste « Wild » Bill Moore (1913-1971), de l’organiste William Strethen «Wild Bill » Davis (1918) et de l’harmoniciste de blues George «Wild Child» Butler (1936). ► WILD ABOUT. Amoureux, dingue de : « Ain’t crazy ’bout my yeller* I ain’t wild about my brown* Makes no difference when the sun goes down Ee, hey, daddy, won’t you shave* ’em dry » Shave ’em dry, Ma Rainey (1924).

WILSON Bill La ballade de Bill Wilson est une variante de celle de John Henry* : « Bill Wilson had a baby boy You could hold in the palm of you’ hand Well, the last world I heard that baby cry “Gonna be your wagon* drivin’ man, Lord'’ » Bill Wilson, Memphis Jug Band (1930).

WIND ► WINDER. Tige, queue (d’une plante). Amant bien monté : Got Stem Winder, Brownie McGhee (1946). ► WINDING BOY. Tombeur, dragueur, voire gigolo : « Winding Boy is a bit on the vulgar side. Let’s see — how could I put it — means a fellow that makes good jazz* with the women. See Jelly* [Roll Morton] lived a pretty' fast* life. In fact, most of those fellows round the District* did. They were all halfway pimps* anyway... » Interview de Johnny St Cyr, cité par Alan Lomax dans Mister Jelly Roll. ► WIND JAMMER. Voir jam. ► WINDY CITY. Surnom de Chicago, Illinois, en raison des vents violents qu’elle subit : « I got a baby that’s all so pretty I find her right here in the Windy City » Diddley Daddy, Bo Diddley (1955).

MINE HEAD Alcoolique, poivrot (voir head) : « I got a wine head woman And she stay drunk all the time » Wine Head Woman, Woodrow Adams (ca 1955).

WININ’ BOY Si l’on en croit Jelly Roll Morton, winin' boy signifie à la fois « sommelier » et « tombeur » (de femmes) ; cette deuxième acception est confirmée par Johnny St Cyr (voir winding* boy) qui ajoute cependant que le winin' boy ne se contente pas de tomber les femmes, mais qu’il en vit : « I'm a winin' boy, mmmm, mmm, mmm Yes I’m a winin’ boy, don’t deny my name Pick it up and shake* it like Slavin’* Chain I’m a winin' boy, don’t deny my name » Winin’ Boy, Jelly Roll Morton (1938).

WINO Vendangeur ; poivrot, alcoolo : Be Bop Wino, Thurston Harris (ca 1954).

WISHING WELL « Le puits des vœux », élément important de l’imaginaire amoureux dans la civilisation américaine, aussi bien blanche que noire ; l’équivalent du « pont des soupirs » : Wishing Well, Bobby Bland (1959).

WOBBLE Danse apparue à la suite du twist : The Wobble, Jimmy McCracklin (1958).

WOLF Loup. Dans l'argot des pénitenciers, caïd, celui qui impose sa loi aux autres détenus : « I’ve got a liT ole cabin And on it number 44* I wake up every morning The wolves is standing in my door » 44 Blues, James « Boddie It » Wiggins (1929).

WOLFING Autre nom des douzaines (voir dirty* dozens).

WOLVERINE Petite amie (années 40) : Wolverine Blues, Louis Armstrong (1939).

WOMAN Femme; maîtresse, amante : « You can’t watch your wife And your outside women too While you’re off with your woman Your wife could be at home Beatin’ you doin’ it, buddy* What you tryin’ to do? » Outside Woman Blues, Blind Joe Reynolds (1930).

WOOD Bois. Dans le prolongement des métaphores crosscut saw (scie), axe (hache) pour désigner les organes sexuels masculins, wood devient fort logiquement le sexe féminin et chop ou cut someone’s wood, faire l’amour : ► CUT (ou CHOP) SOMEONE’S WOOD. Voir chop someone’s wood. ► WOODBLOCK. Instrument de percussion composé d’un morceau de bois dans lequel sont taillées deux larges fentes et que le batteur frappe avec des baguettes. ► WOODCHOPPER. Litt. : celui qui coupe le bois; l’homme, l’amant (voir chop* someone’s wood). ► WOOD DOCTOR. Syn. de root* doctor. ► WOODSHED. V. Travailler seul son instrument (années 30) : « It was here that the term woodshedding originaled. When one of the gang* wanted to rehearse his part, he would go off into the woods and practice until he made it. [...] Sometimes, more than half of band* would be “woodshedding”. » Interview de Cuba Austin, in Hear Me Talkin’ to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff.

WOOFING De woof, se vanter, fanfaronner, parler pour ne rien dire. L’une des dénominations des douzaines (voir dirty* dozens) ; utilisée en particulier à Philadelphie.

WOOGIE 529. Traverse de bois soutenant les rails. 530. Pénis : « But you can take me, pretty baby And jump me in your big brass bed I want you to boogie* my woogie ’til my face turn cherry red » Ctory Red, Big Joe Turner (ca 1980). 531. V. Baiser : Want to Woogie Some More, Washboard Sam (1937). ► BOOGIE WOOGIE. Voir ce terme.

WORK Travailler. 1. Baiser, forniquer (notons que le français « besogner » est aussi employé dans ce sens) : « Got a Monday, Monday girl She works it on Broad and Main Got a Tuesday woman says, “Here’s you my spendin’ change.” Got a Wednesday, Wednesday girl, She works it on Broadway Square, Got a Thursday woman Takes me each and everywhere » Gang of Brown Skin Women, Papa Harvey Hull et Long « Cleeve » Reed (1927). 2. Pour un charme, un envoûtement, agir, faire effet : « I got a gypsy* woman giving me advice I got a whole lot of tricks*, keeping them on ice 1 got my mojo* workin' But it just won’t work on you » Got My Mojo Working, Muddy Waters (1957). ► PUBLIC WORKS ADMINISTRATION. Voir P.W.A. ► WORKS PROGRESS ADMINISTRATION. Voir W.P.A. ► WORKHOUSE. Maison de redressement : « It was in New York City workhouse On a cold december day 't was in a dirty cell Where a dying pickpocket lay » Dying Pickpocket Blues, Nolan « Barrelhouse » Welsh (1929). ► WORK FOR THE DOOR. Voir play* for the door. ► WORKING BROAD. Prostituée, gagneuse. WORKOUT. Test, épreuve; dérouillée, raclée; élément de titres de morceaux rapides : Hand Jive Workout, Don Covay (1961). ► WORKSHOP. Atelier de recherche et d’expérimentation artistique ou musicale. L’un des plus célèbres workshops a été celui du contrebassiste et chef d’orchestre Charles Mingus (1922-1979). ► WORK SONG. Chant de travail, de structure simple, souvent structuré en call and response, destiné, selon les termes de Maurice Cullaz, « à rythmer l’effort ou à distraire, de sa fatigue ou de sa peine, le travailleur » : « Les chants de travail faisaient alterner l’appel du meneur avec la réponse du groupe ; même le blues prolonge en fait les premiers chants, car le chanteur solitaire s’v répond à lui-même. » Geneviève Fabre, Le Théâtre noir aux Etats-Unis. Les work songs se chantaient essentiellement lors des travaux agricoles ou sur les grands chantiers (voies ferrées, barrages, routes...) ainsi que dans les pénitenciers où ils ont survécu jusqu’à une époque récente : Work Song, Julian Cannonball Adderley (1975). ► WORK UNDER CORK. Litt. : travailleur au bouchon. Allusion aux minstrels blancs qui se noircissaient la figure avec du bouchon brûlé. Work under cork, c’est, pour l’artiste noir, se « prostituer », rechercher le succès commercial au prix de la trahison de son héritage culturel. X

X Pratique des musulmans noirs depuis les années 20 selon laquelle ils ne gardent en guise de patronyme que leur prénom, suivi de la lettre X (Malcolm*X). Il faut voir là une volonté de garder en mémoire le traumatisme lié à l’esclavage — X se lit ex (esclave) — et à la perte d'identité qui en a résulté ; c’est un choix délibéré d'anonymat, commémorant celui que les Noirs subirent quand, déportés puis esclaves, ils se virent dépossédés de leurs noms africains (voir name') : Mr. Freedom X, Miles Davis (ca 1971).

Y

Y. M. V. Yazoo and Mississippi Valley Railroad, ligne de chemin de fer du Delta reliant Greenwood et Clarksdale via Tutwiler; elle est plus connue sous le nom de Dog ou Yellow* Dog : « Now hush, be still Thought I heard somebody calling me Well I guess 1 was just mistaken It was that whistle on that Y. M. & V » Y. M.& V. Blues. Lost John Hunter (1950).

YA Pour You dans la prononciation noire : Glad ’a See Ya, Willis Jackson (1959).

YACKETY YACK Jacasser, cancaner : « Betty and Barbara and Jeannie and Jane Are yackity-yackin’ with Joan About some things that Antony Told her over the telephone » An/orcy Boy, Chuck Berry (ca 1958/59). ► YACK. Abréviation de yack, commérer, baver, tchatcher : « Yack, yack, yack Talkin’ about people you just don’t know Yack, yack, yack All tlie time Yack, yack, yack Your big mouth, all the time You talk too much, woman » Poa Talk too Much, John Lee Hooker (1970). YANK Surnom du mandoliniste James « Yank » Rachell (1908).

YARDBIRD ► Habitué des prisons, récidiviste. ► Jeunot, bizut. ► Surnom du saxophoniste Charlie Parker (1920-1955). « The nickname Bird comes from Yardbird. He did a short stint in the army, and yardbird is what they call a recruit. » Interview de Carmen McRae, in Hear Me Talkin' to Ya, de Nat Shapiro et Nat Hentoff. « Quand il avait quatorze ans, Bird fréquentait les speakeasies*. Il ne jouait pas, il écoutait simplement. En fait, il jouait avec l’orchestre mais de la manière suivante : l’orchestre était dans la salle où il ne pouvait rentrer, car il était mineur; alors il restait dehors l’oreille collée au mur, à faire ses doigtés. C'est comme ça qu’il a reçu son sobriquet : les musiciens qui le trouvaient toujours dans la cour l’ont surnommé Yardbird. » Interview de Teddy Blume par Robert Reisner, in Bird, la légende de Charlie Parker « C’est à la camaraderie en vigueur au sein du groupe [de Jay McShann] que Charlie Parker doit son surnom de Yardbird. Les explications relatives à son origine diffèrent, mais tous, à l’exception de Charlie, paraissent s’accorder sur le fait qu’il s’agissait d’une référence à un poulet destiné à alimenter la marmite. » Brian Priestley, Charlie Parker. Quelquefois aussi, Yard : « Yard était un drôle de bonhomme. Il n’a jamais fait usage de drogues devant moi. Bien sûr, il fumait des joints ou des bricoles diverses, mais il ne s’est jamais défoncé sous mes yeux. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop. ► OLD YARDBIRD. Surnom du saxophoniste Buster Smith (1904-1991).

YAS YAS Masque d’ ass, cul, derrière : « 1 got my income tax this morning Yes and it’s got to be paid Tax on my ’lectic, tax on my gas Soon be paying tax on my yas, yas, yas » Income Tax Blues, Ralph Willis (1950/51) Souvent aussi yes yes. « If you want to hear That elephant laugh Take him down to the river And wash his yes yes yes » Keep It Clean, Charlie Jordan (1930). YELLER (Yaller) Pour yellow girl ou boy, Noir(e) au teint clair : Yellow Gal, Leadbelly (1940). « I ain’t high yellow, I’m deep yellow-brown I ain’t goin’ to marry Ain’t goin’ to settle down I’m goin’ drink good moonshine* An’ run these browns* down » Young Woman Blues, Bessie Smith (1926) « Black man is evil Yaller man is so lowdown* I walk into these houses Just to see these black* men frown » Chocolate to The Bone, Barbecue Bob (1928) ► YALLER BROWN. Noir brun clair. ► YALLER DOG. Voir Yellow* Dog.

YELLOW DOG Surnom de la Yazoo and Mississippi Valley Railroad, autrement appelé « Yazoo Delta » à cause des lettres « Y.D. » qui figurent sur les machines. Il croise le Southern à Moorhead, Mississippi. d'où la phrase fameuse citée par Handy dans son autobiographie : « Where the Southern cross the Dog... » et fréquemment reprise depuis : « I was standing, lookin’ and listenin’ Watchin’ the Southern* cross the Dawg If my ¿«fry didn’t catch the Southern She must’ve caught the Yaller Dawg » Southern Blues, Big Bill Broonzy (1935).

YES SIR (No sir) « Oui, monsieur », « non, monsieur », termes de déférence — réelle ou simulée (voir dirty* dozens') — adoptés par le Noir en présence d’un Blanc : « I was a pretty good mixer ’cause I came from the South and I knowed how to say, ■‘Yes sir” and “No sir” and get next to my superior which is the white people you know — I just went along with my jive*. I knowed how jive them and they* let me get away with a whole lot of stuff* that I wouldn’t’ve if I’d been a little hostile with them*. » Interview d’Arvella Gray, citée par Paul Oliver dans Conversation with the Blues. « Oh, if you forget, [the bossman] tell you "Nigger*, what’s wrong with you?” “What you mean, boss? “I want you to get that hat off yo' head!” Yassuh an’ nosuh, All over there’s no good place; He may be young, He don’t have to be more than sixteen or seventeen years You got to honor him at the ground » an' Nossuh Blues, Robert Pete Williams (1960). les Sir, Boss, Muddy Waters (1966).

YES YES Voir yas yas.

YO-YO Le yo-yo est l’un des objets cités par le peuple du blues pour leur pouvoir suggestif : « I like to yo-yo Yes, both night and day If some folks it’s hard work But for me it’s same as plav [■•■] I got a gal* She sure is big and fat Let’s yo-yo, Bob Beause it’s tight* ’cause it’s tight like that » Yo-Yo Blues n° 2, Barbecue Bob (1930).

YUSEF LYTEEF Pseudonyme du saxophoniste William Evans (1921) depuis sa conversion à l’islam. Z

ZA ZU GIRI. Surnom de l’aînée des sœurs Spivey, Elton Spivey Harris (1900-1971).

ZIP COON Voir coon.

ZONKED Soûl, bourré; sous l’influence d’une drogue, accro : Zonked, Red Prysock (1955).

ZOOMING (Zooning) Technique vocale utilisée par un preacher* pour favoriser l’implication émotionnelle et physique de ses ouailles ; elle consiste à répéter et répéter un mot ou une courte phrase en n’introduisant que de très légères variations dans la modulation. (Voir moaning et aussi gratty* sermon.)

ZOOT SUIT Tenue vestimentaire en vogue dans les années 40, veste ample rembourrée aux épaules et large patalon allant se resserrant vers le bas : « Past 1939, we’d wear the be-bop* jackets with berets. Before Cab [Calloway], and with him, I dressed conventionally, double breasted suit and long coats coming down almost halfway to my knees ; zoot suits at that time. Long-collar shirts with an ordinary hat. » Dizzy Gillespie et Al Fraser, To Be or Not To Bop.

ZUKEY (Sukey jump) Voir zydeco. Monologue on Square Dances or Sooky Jumps, Leadbelly (1940).

ZULU Association d’entraide noire créée à La Nouvelle-Orléans au début du siècle; ce fut la première à présenter son char dans la célèbre fête du Mardi* Gras et à élire son roi et sa reine; en 1949, ce fut Louis Armstrong qui eut cet honneur : Zulu’s Ball, King Oliver (1923).

ZIHTY Surnom du batteur Arthur James « Zuttv » Singleton (1898-1975)

ZYDECO (Zarico, zodico, zologo, zordico, zukey jump) Afr. Du yula za ve, danser, renforcé par le français « les z’haricots » (le créole fait la liaison) tiré de l’expression « les haricots sont pas salés » qui fait allusion aux périodes de misère pendant lesquelles on ne pouvait pas acheter de viande salée pour accompagner les haricots... ► Style musical florissant dans le sud- ouest francophone de la Louisiane (Lake Charles, Lafayette, Opelousas, Crowley, Mamou, Basile...). Le répertoire et l’instrumentation (privilégiant l'accordéon) témoignent de l’influence cajun alors que les rythmes et les constantes références au blues rattachent la musique .zyrfeco à la tradition noire. Les principaux représentants de ce style sont tous accordéonistes, Rockin’*Dopsee, Queen* Ida, Fernest Arceneaux, Big Chenier ou Boozoo* Chavis. Le zydeco* s’est fait connaître au plan international dans les années 70, surtout grâce à Clifton Chenier, lui aussi accordéoniste. ► En créole, le terme désigne ce style de musique, mais également la danse : « Creoles go to a zarico to dance the zarico to zarico music played by zarico musicians. » Barry Jean Ancelet,« Zydeco / Zarico : Beans, Blues and Beyond », in Black Music Research Journal, vol8, n° 1.

Index Thématique

L’index thématique permet de survoler les différents champs couverts par Talkiri That Talk : termes d'argot, métaphores courantes, toponymes (surr. de lieux), anthroponymes (surnoms de personnes), les termes de jargon se rencontrant, eux, dans les rubriques liées aux pratiques magiques, à l'industrie du spectacle, aux techniques et pratiques musicales, au métier de musicien et aux conditions dans lesquelles il s’exerce. Une soixantaine de termes génériques, ou mots clefs, ont été retenus. Ils permettent d’accéder à toutes les entrées relatives à un champ sémantique ; chacun d’entre eux est illustré par un titre d’œuvre. Leur détermination a été faite empiriquement, par approximations et affinements successifs, et le résultat n’est pas exempt de toute subjectivité. Dans le cas d’une expression comportant plusieurs mots, l’astérique est placé après le mot auquel s’effectue le renvoi. Le signe ► indique un renvoi à un autre thème de l’index.

AFFIRMATION DE L’IDENTITÉ NOIRE I'm Black and I'm Proud, James Brown. Alley* (put someone in the alley), Aunt* Hagar's children, black name*, blood, blues (play the), boogaloo, bring* it down, brother* (bruz), clown, dirty* dozens, downhome, dry* bones sermon, funky, gits, grit, gutbucket, gutter, H.N.I.C., hand* rap (slap), home* (back home, come home, home boy, home cookin’, downhome, go home), I, Isom, low*-down, member, name, nitty*- gritty, people, rabbit, real, sister, soul, soul* brother (sister), spider, together, X, zulu. ► HEROS ET PERSONNAGES.

ALCOOL One Bourbon, One Scotch, One Beer, John Lee I I(x>- ker. Alki, bathtub* gin, bear* mash, black* and tan, block* and tackle, blood, blue* devils, bootleg, bootlegger, booze, buzzy, C.V., Canaan Jim*, canned* heat, cat* whiskey, chaser, chock, come* down, crib, dip, dive, dry, fifth, gasoline, gin* tub, Grand* Prize, hangover, head, high, hooch, hooker, ignorant* oil, jag, jake, jake* head, jake*-leg, jig, jug, juice, juice* head, juiced, king* kong, loaded, lush, lush* head, man* killer, manny, Mogen* David, moonshine, mule, pete, pizen, quart, red* top, shot, sloppy, smoke, Sneaky Pete*, snuffy, stew, stoned, straight, Sweet Lucy*, tanglefoot, tore* down, turpentine, whisky* head, white* lightning, white mule*, wine* head, wino, zonked.

ALCOOL (Débits de boisson) Honk)’ Tank, Bill Doggett. Barrelhouse, blind* pig, booger* roo- ger, bucket* of blood, buffet flat*, chock* house, clip* joint, flat, gin* flat, gin* house, gin* mill, good time flat*, hole* in the wall, honky* tonk, hooch* house, hunkie* tunkie, joint, juke, juke* joint, juice joint*, juke, pig* and whistle, road* house, sloppy* joe, smoke* house, speakeasy, spot, tonk, stew, stuff (on the), suds.

AMANT(E) Backdoor Man, Howlin’ Wolf. Ash* hauler, backdoor* man, baker, before* day creep, bee (bumble bee, honey bee, king bee), biscuit, biscuit* brown, biscuit* roller, black snake*, candy* man, chauffeur, cherry* ball, cherry* picker, coffee grinder, creep, creeper, dirty* dog, dough* roller, driver, easy* (E.Z.) rider, evil, grinder, groundhog, handy* man, honeydripper, honeysipper, hot* nuts (pants), jelly* bean, jelly* roller, jockey, jody, Joe the grinder*, john, joker, jumper, kid* man, kitchen* man, man, man* o’war, mannish boy*, mare, milk* cow, mule, old man*, organ grinder*, pal, papa, pony, pork grinder*, rider, rocker, rooster, Santa* Claus, see* see (C.C.) rider, sender job*, Shorty* George, snake, special rider*, sugar, sugar* daddy, sweet mama* (papa), sweet patootie* (patuni), wagon, winder, woodchopper.

AMITIÉ ► HOMME.

ARGENT Money Blues, Fletcher Henderson. Ace, ace* in the hole, barrel* (to be in the), beat* to the socks, blip, bone, bonus, buck, bread, broke, brown(ie), buck, buffalo* nickel, bum* (on the), busted, cabbage, cake, cholly, clean, cold in hand*, deuce, dime, dixie, dough, down* and out, eagle, fix, flat, geet, grand, gravy, green, greenback, hay, jack, like Jack* the bear, kitty, line* (lay it on the), loaded, lolly* pop, long bread*, long green*, nickel, nickel* and a nail, out and down*, potato, quarter, rank, roll, soap, spot, suds, sugar, tight, turn money green*, uptight, wagon* wheel, when the eagle* flies.

ARMÉE/POLICE High Sheriff Blues, Charlie Patton. Black* Maria, little boy blue*, bonus, Brady, Brown* Alius, cop, dick, flat* foot, heat, patrol, questionnaire, roller, Rushing* Tom, skunk, snitcher, special agent, twister, Uncle* Sam, wagon, yardbird.

ARMES Forty Four Blues, James « Boodle It » Wiggins. Black* betty, blackjack, bulldog, chib, fix, forty* five (45), forty* four (44), forty* four forty (44-40), forty* one (41), play, rod, six*-shooter, special, T.N.T., thirty* eight (38), thirty* two (32), thirty* two twenty (32-20), twenty* two twenty (22-20), two* by four.

ARNAQl E/VOL/CRASSES March of The Hoodlums, Eddie Lang. Alley* rat, backbiter, booster, burn, clean, cleaners* (take someone to the), clip* joint, clipped, cop, crossroads (dirty work at the), dip, dirty* deal, dooleyville, fix, fly* the coop, fourflus- her, game, game (the), gouge, hijack, hocky, hocus* pocus, hoodlum, hook, hustle, hustler, jackstropper, jigger* man, jive, jive* man, merry*- go-round, mickey* finn, monkey* business, mooch, moocher, pete, play, salt, set, shark, sharp, slick, snatch, snitch, snitcher, sporting* life, three*-six-nine (3- 6-9), trick, tricky, wheel* and deal, whip.

AUTOMOBILES ET ROUTES Key to The Highway, Jazz Gillum. D.B., Dvnaflow, Greyhound, Highway 13, 27, 41, 45, 49, 51, 59, 61, 75, 99, Model T, ride* (flag a, thumb a), Rocket 88, route 66, 80, 90, T Model, Terraplane, V8, wheels.

BATEAUX ET RIVIÈRES The Race of The Jim Lee and The Katy Adams, Jazz Gillum. Adams Katy*, Bald Eagle*, Bob* Lee, Jim* Lee, Kate (Katy), Lee, levee, Old Man* River, Red* River, Stack.

BATTERIE ET PERCUSSIONS ► INSTRUMENTS DE MUSIQUE.

BISTROTS ET BOUGES ► ALCOOL (DEBITS DE BOISSON).

BLANCS (Vus par les Noirs) / Been Workin' for Mister Charlie, Willie Stewart. Baboon, booker, buckra, captain, Charlie, chuck, cracker, golden girl*, face, fay, honkey, john, Man (the), master, Miss* Ann, Mister Charlie*, mule, ofay, peckerwood, pharaoh, redneck, them, they, wasp, whips, white, white* trash, whitney, wig.

CHEMIN DE FER Pea Vine, Charlie Patton. A & V, A Train, B & O, Bald Eagle*, Big* Eighty, Big* Four, blind, blind* (ride the), Bob* Lee, box* car, C & A, C.C.C., C.C. & O, C & O, C & P, caboose, Cannonball, Central, Chicago* Flyer, Chickasaw, cholly, choo choo, conductor, Cotton* Belt, Dixie* Flyer, Drummond, engineer, fireman, Flyer, Flying* Crow, Forty* Four (44), Frisco, G.M. & O, glory7, Golden* Gate Limited, Grand* Trunk, Great* Northern, Green* Diamond, Gulfport* Island, high* ball, honky* tonk train, I.C., I.C.N., I.G.N., Jack, Jones (Casey), K.C, Katy, L.N, line, M.K.T., M.O., Marion, Midnight* Flyer, Midnight* Special, Monon, Moore* Girl, Northern, Number 29, Panama* Limited, Pea* Vine, quills, red* cap, ride the blind* (the rail*, the rods*), rider* (C.C., easy, E.Z., see see), Rock* Island Line, Royal* Palm, S.P., Santa* Fe, Seaboard, short dog*, Shorty* George, Sliding* Delta, snake, Southern, Southern* Pacific, Special, special* agent, Saint* Louis Sun, Stagger* Lee, stinger, streamline, Sunnvland, Sunshine* Special, T & N.O, T & P, T.T., W & A, Wabash, Wabash* Cannonball, Woogie, Y & M.V, Yellow* Dog.

CHEMIN DE FER SOLTERRAIN ► ESCLAVAGE.

CHEMINEALX ET VAGABONDS Hobo Blues, John Lee H(X)ker. Blind (ride the), bum, cholly, drifter, dust (one’s) broom, flag a ride*, getaway, haul ashes, hit the road, hobo, hobo jungle (hoboville), rail (ride the), ramble, rambler, ride* the blind, ride* the rods, roll, rolling* stone, snow bird*, thumb a ride*, tramp, vag, Wabash* Cannonball.

COMMUNICATION VERBALE Hear Me Talkin' to Ya, Cannonball Adderley. B, black name*, blow* (one’s) horn, blues, blues* singer, bre’r rabbit*, buzz, call somebody out of his name*, cap* on, capping, cheap* (play someone), chopping, cop* a plea, creole, cutting, dig, dirty* dozens, dog* latin, double talk*, dozens, flat* talk, gab, geechee, gripping, groan, gullah, gumbo, heavy* upstairs, holler, jazz, jive, joning, junk, lie, line, line of jive*, loud, moaning, monkey* (make a monkey out of someone), monkey* business, motherfucker (mother for you, motherfuyer, muthafucka), mounting, okie-dokie, pig* latin, play, play the dozens*, put* in the dozens, put* down, rap, run (one’s) mouth*, sand, scat, screaming, shit, shot, shucking, signify, signifying* monkey, slip* someone in the dozens, songster, spoken soul*, talk, sounding, stuff, sweet talk*, talk* dead, talk* trash, talk* that talk, testify, toast, toming, twelves, whoop, wolfing, woofing, yackety* yack, zooming.

CONTEXTE HISTORIQUE Let's Have a New Deal, Carl Martin. Abe, black* codes, bonus, CCC, CWA, cajun, Crump, Decoration Day*, democrat, dry, F.D.R., Faubus, hobo, hoover- ville, Jim* Crow laws, Kennedy*(John Fitzgerald), Kilroy, King* (Martin Luther), Ku-Klux-Klan, Liberia, Library* of Congress, line, Malcolm X, Meredith (James), NRA, OPA, PWA, Pendergast, project, three* hundred four (304), Uncle* Sam, V. disc, WPA, Watergate. ► ESCLAVAGE.

CONTEXTE NATUREL ET RURAL Mule Blues, Rtxisevelt Charles. Backwater, bayou, boll* weavil, caller, Dockery, drinkin’ gourd, easy* rider, field nigger*, gee, H.N.I.C., hawk, hil- billy, roller, hoss, house nigger*, jack, jackass, leader, low* cotton, middle* buster, Moore* (Tom), mountain* jack, road runner, share-cropping, shucks (shucking sugar), square, Stovall, straw boss*, twister, whoa, whoop.

CONTEXTE SOCIO-ECONOMIQI E Unemployment Stomp. Big Bill Broonzy. Boll* weavil, buckra, C.C., C.C.C., C.O.D., C.W.A., captain, Dockery, dough roller*, downtown, driving wheel*, engineer, fireman, gravy* train, H.N.I.C., hand* me down, killing floor, leader, line, N.R.A., O.P.A., P.WA, project, roll, rolling* mill, rustabout, scuffle, share- scropping, slave, stick, straw boss*, three balls*, three* hundred four (304), truck, W.P.A., welfare, work. ► ARGENT ET MARQUES COMMERCIALES.

CORPS (Parties du) T.T. on Toast, Duke Ellington. Ass, B.O., backdoor, blind(er), bootie, bottom, bread, bum, butt, cabbage, can, chops, D.B.A, dogs, dukes, fanny, frame, gig, ivories, jackass, jazzer, K.M.A, moneymaker, paddles, rusty dusty, sniffer, southern can*, T.T, titties, warm* valley, yas yas (yes yes). ► ORGANES SEXUELS.

COSTUMES ET MODES ► HABILLEMENT ET MODES.

COULEURS DE PEAU Chocolate to The Bone, Barbecue Bob. Banana, bear, biscuit* brown, black, brown(ie), chocolate* to the bones, coffee, righ brown*, righ yaller*, jet black*, lemon, mahogany, red nigger, sealskin brown*, sepia, tan, yaller, yeller. ► NOIRS.

CROYANCES ET SUPERSTITIONS I’m Your Hootchie Cootchie Man, Muddy Waters. Ash, barred, black* cat, black cat bone, conjure* lady, crossroads, doctor, double*-eyed (readed, sighted), dream* book, dust* (fumble dust, goofer dust), Dyer (Caroline), fix, fixer, frizzly chicken*, frog, goofer, gypsy, hadacol, hand, haul ashes, healer, hex, high man, hoodoo, hoodoo* hand, hoodoo* man, hootchie* cootchie, jacks, jinx, Joe* Moore, John* the Conqueroo, jomo, juju, King* Solomon, Laveau* (Marie), medicine* show, mojo, mojo* hand, numbers* book, red* flannel, root, root doctor*, seven, seven* sisters, seventh* son, snake, snake doctor*, snake* Marie, spider, toby, tree* of hope, trick, two- faced* man, two-readed doctor*, woo- doo, wabash* cannonball, whammy, wood doctor*, work.

CUISINE Gimme a Pigfoot, Bessie Smith. Biscuit, bread, bread* pan, cake, candy, candy* stick, catfish, chitterlings, cornbread, crackling biscuit*, dive, gravy, greasy* spoon, greens, grit, gumbo, hog* maw, jambalaya, jelly* roll, red* beans and rice, roll, sloppy* Joe, slum* gullion, son*-of-a-gun, soul* food, stew, T* bone.

CUIVRES ET ANCHES ► INSTRUMENTS DE MUSIQUE.

DANSES ET DANSEURS Sugar Foot Stomp, Fletcher Henderson. Alabama* bound, Bailey* Bill, ball, ballin’* the jack, Big Apple*, Black* Bottom, Bobo, Bojangles, bombashay, boogaloo, boogie, boogie woogie, bop, breakdown, buck* and wing, bump, bunny hug, buzzard lope, cake* walk, calinda, cat’s tail, charleston, chicken* scratch, Congo, coochie-coo, coonjai, crawl* (african, alligator), cootie crawl*, cross*-over, cut* some rug, dime*-a- dance, dip, dog, drag, eagle* rock, fall* of the log, fig walk*, fish* tail, fly, fox* trot, frog, funky* chicken, georgia* crawl, gogo* girl, grizzly bear*, gypsy* hound, read* rag hop, heebie* jeebies, hesitation, hooch, hoofer, hootchie* coochie, hop* (bullfrog, head rag, lindy, Texas), hop* scop, horse* trot, huckle- buck, hully*-gully, jam, jelly roll, jerk, jitterbug, jive, jump, kicks, kunjine, lame* duck, lay* (some) iron, limbo, linda* lu, lindy* hop, lolly* pop, macon cutout, madison, mashed* potatoes, mess* around, mooch, pas-a-ma-la, patting* juba, pigeon* wing, pony, rag, reel, ring* and shuffle shout, rock, rock’n'roll, roll* the belly, roseland* ballroom, rub, rubberlegs, rugcutter, saltwater, sand, sashay, savoy, scraunch, second* line, shag, shake, shake* dancer, shakedown, shake* that thing, shimmy, shout, shuffle, skeeddle* loo doo, skrontch, slop, slow-drag*, snake* rips, soft*-shoe, split, step* (crab, crosseyed), stomp, stroll, struggle, strut, strut* (one's) stuff, sugar* foot, sugar* foot stomp, sukey* jump, surf, susie Q, swamp shimmy*, swing, tap* dancing, texas hop*, truckin’, turkey* trot, turtle* twist, twist, walk (fig, fish), walkin’* the dog, watuse, wiggle, wobble, zukey* jump, zydeco.

DÉSIR SEXUEL ► SEXUALITE. ► DISQUES (et compagnies de) ► SPECTACLE.

DROGUE If You 're a Viper, Rosetta I loward. B, B.H., bang, bird (snowbird), blast, blockbuster, blow, blow* (one’s) mind, bobo, boy, brown* sugar, clean, coke, cold* turkey, come* down, cook* up, cool* green, dealer, dip, dope, dopehead, fix, fly, foo, gage, get* on something, golden leaf, gone, grass, H, habit, hay, head, high, hook* (off the, on the), hooked, hooker, hop, hop* head, horse, hot shot, hound, hype, ice, jag, jam, jive, joint, joy dust*, joy ride, juice, junk, junker (junkie), kick* the habit, kokomo, loaded, loose, marimba, mezz, mojo, muggles, needle, panatella, pot, reefer, reeferhead, righteous* bush, roach, runner, salt* and pepper, scag, shit, shoot, shot, smack, sniff, snow, speedball, stick, stoned, stuff, sugar, swing, tea, teapot, turn* on, viper, vonce, watermelon* man, weed, weedhead, weeper, white stuff*, zonked.

ESCLAVAGE Slavery, Lightnin’ Hopkins. Abe, aunt, big* house, black* codes, boy, bre’r rabbit, Brown (Alius), cake walk, calinda, Canaan, captain, conductor, Congo, coonjai, Deep* South, Dixie, Dixie* Line, drinking* gourd, field nigger*, girl, glory, gospel, house nigger*, Jim* Crow laws, Liberia, line, master, minstrel, Old* Riley, patrol, Pharaoh, Promised* Land, station, Underground* Railroad. ► CONTEXTE HISTORIQUE.

FEMME Million Lonesome Women, Brownie McGhee. Aunt, automobile, baby, baby* doll, bait, ball* and chain, band, barbecue, bear* cat, big* fat mama, bimbo, biscuit, bitch, black* butterfly, block* and tackle, boogie, broad, brown* sugar, bulldyke(r), cake, cat, cherry, chick, chicken, chicken* dinner, cookie, crow jane, dike (dyke), dinner, dog, doll, doney, easy* rider, fairasee, fanfoot, fanny, faror, fish, flapper, floozie, fox, gal, Georgia* peach, gold* digger, golly, hammer, heifer, hen, hot* mama (number), hot* tamale, jail bait*, jane, jazz, kiddie, kitty, lay, lobo, Mae (May), main squeeze*, mama, old* lady, peach, pha- roah, pot, potato, pound cake*, pussy, queen, regular, sack* nasty, salty* dog, sandfoot, San Quentin bait*, shoe* booty, sponge* cake, stallion, sugar* mama, titty, tommy, two*-timer, used*- to-be, V-8, wilaphant, wolverine, woman. ► BLANCS ET AMANT(E).

FRIME Alabama Stmt, Cow Cow Davenport. Alligator, bear* trap, sand, shoot the agate*, signify, skin, strut, strut* (one’s) stuff, tickler, walk* that walk.

GHETTO ► HABITAT.

GUITARES ET INSTRUMENTS À CORDES ► INSTRUMENTS DE MUSIQUE.

HABILLEMENT/MODE The Wind Makes Connection with Your Dry Goods, Martha Copeland B.V.D, bear* trap, benny, big* fat mama, box-back, chippie, clean, dap, dry* goods, front, goatee, hot* pants, jazz*- back, kicks, laid* out, monkey*-back. nappy, pinch*-back, pork* pie hat, Poro. shake* baby, sharp, shingle, stacked* deck, teddy* bear, tight, uptight, wig. ZOOL

HABITAT Skid Row Boogie, Pete Johnson. Across the tracks*, alley, back alley"", backdoor, Black* Bottom, bottom, box. crib, darktown, dogtrot, downtown. flaL high rise, hobo* jungle, hooverville. Jim* town, joint, jungle, loft, pad. paddle, pallet, rent* party’, sack, shade, shanty, shiney* town, shotgun shack*, skid* row, smoke* town, squatter, sugar* hill, uptown.

HARMONICA ► INSTRUMENTS DE MUSIQUE DIVERS.

HÉROS ET PERSONNAGES Joe Louis and John Henry, Sonny Boy Williamson. Abe, Albert, Bailey* Bill, Betty, Brady, Bre’r Rabbit*, Brown* Alius, Brown* Piney, Canaan Jim*, Casey* Jones, Chaney, Corey, Crow* Jim, Crump, Duncan, Dupree, Dyer* Caroline, F.D.R., Faubus, Frankie, Fry* Alice, Hardy* John, Henry* John, Holmes* Delia, James* Jesse, Jim* Crow, Johnny, Johnson* (Mister), Ken- nedy* John Fitzgerald, King* Martin Luther, Lost* John, Louis* Joe, Lyons* Billy, Malcolm* X, Meredith* James, Moe, Moore* Joe, Moore* Tom, Old* Riley, Pendergast, Petrillo, Poly* Ann, Poor* Lazarus, Rabbit, Railroad* Bill, Robinson* Jackie, Rubberlegs, Rushing* Tom, Shine, Signifying* Monkey, Speed* Ella, Stagger* Lee (Stacker Lee, Stack’O’Lee), Stavin’* Chain, Tee*-Nah- Nah, Turner* Joe, Uncle* Sam, Uncle* Tom, Wilson* Bill, Zip Coon*. HOMME (Homme/mari/ami) Daddy-O, Louis Jordan & Martha Davis. Ace, baby, bad* man, bobby* soxer, boy, buck, buddy, cat, child, daddy, daddy-o, dap, dirty* dog, dog, driving* wheel, dude, eastman, egg* head, face, fatmouth*, fellow, gate, gee, groundhog, handy* man, hot nuts*, hot* pants, jazzbo, john, kid* man, killer, killer* diller, kitchen* man, mannish* boy, motherfucker, mule, pal, papa, playboy, pops, pork* grinder, pork* shop, rooster, rounder, salty* dog, son*-of-a-gun, sport, stud, sugar* daddy, swinger, tom cat*, two*-timer, used-to-be, wagon, winding* boy. ► AMANT(E). ► HOMOSEXT ALITE ► PRATIQUES SEXUEU.ES.

INSTRUMENTS DE MUSIQUE (Batterie et percussions) A Drum Is a Woman, Duke Ellington. Beat* (after beat, back beat, ride beat, two beat), bomb, bones, brushes, buzz, charleston, drummer, drums, finger* popping, hand* jive, hides, high* hat, hoofer, marimba, pat* (patting juba), rubbing* board (rubboard), shuffle, skin, tap* dancing, temple*-blocks, traps, tub, washboard, woodblock.

INSTRUMENTS DE MUSIQUE (Cuivres et anches) The Man with The Hom, Miles Davis. Armstrong, ax(e), battle-axe, birdie, blackstick, blast, blow, blow* (one’s) horn, blow* (one’s) ass off, blow* up a storm, blower, bone, chops, cream, gabriel, growl, honk, honker, horn, horn* (get around on one’s horn), Lady* Violet, licorice* stick, manzello, mute, open horn*, plunger, quack, reed, sliphorn, stick, stritch, tailgate, wah wah.

INSTRUMENTS DE MUSIQUE (Guitare et instruments à cordes) Bottleneck Blues, Sylvester Weaver. Ax(e), banjo, bottleneck, box, bull* fiddle, choke, cross* natural, damping, diddley* bow, dobro, doghouse, easy* rider, fingerpicking, flat* picking, fot- della, fretless, garbage* can, gitfiddle, guitar man*, gutbucket, hammering-on, hi* wanna, knife, lap steel guitar*, Lucille, Lucy, national, one* strand, open* tuning, over* the hop, picking, plucking, pocket* knife, pushing* off, ragtime, Sebastopol, slappin’, slide, Spanish, steamline* bass, tub, vasterpool, washtub* bass.

INSTRUMENTS DE MUSIQUE (Piano et claviers) Eighty Eight Boogie, Memphis Slim. Barrelhouse, bear cat crawl*, black* buff (butt), block*-chord, boston, box, chimes, dudlow* joe, eighty* eight (88), fives* (the), forty* five (45), ironing* board, ivory, locked hands*, organ* grinder, overhand, piano man*, professor, rocks (the), rolling* blues, stride, stroll, tenth, tickle the ivories*, tickler, tricks.

INSTRUMENTS DE MUSIQUE (Divers) Top of The Harp, Louis Meyers. Ax(e), bending* notes, blow, choke, corjun, cross, diddley* bow, dulceola, french* harp, hamazoo, harp, ironing* board, jammer (windjammer), jazzhorn, jug, kazoo, mouth* bow, mouth harp*, mouth* organ, one* strand, piece, quills, tongue* blocking, washboard, windjammer*.

INSULTES ► COMMUNICATION VERBALE.

JEU Policy Dream Blues, Bumble Bee Slim. Ace* in the hole, ball* (kotch ball, skin ball), ballin’* the jack, barrelhouse, big six, blackjack, bolito, bones, boxcars, burner, Coalfield, combo, coon* can (coon* king), cotch, craps, crapshooter, crib, dealer, deuce, devil, dick* (big), dream* book, eleven (11), euchre, Florida flip*, four* eleven forty four (4-11- 44), four* flusher, game* (skin game), Georgia skin*, get* down, get* hot, horse, gig, gravy* train, Greyhound, hand, hit the numbers*, honky* tonk, hooker, Interstate, jack, jackstropper, jig, Joe* Moore, merry-go-round, natural, nina, numbers, numbers* banker, numbers* book, numbers* runner, numbers* writer, pinochle, play the races*, playhouse, policy, policy* racketeer, policy* wheel, policy* writer, road* house, roll* the bones, runner, saddle, seven (7), seven up, sharp, shimmy, shoot* craps, skin* game, smoke* house, snake* eyes, spades, spot, three* six nine (3-6-9), tiger, tonk, twenty-one (21), washwoman’s* gig, wheel* (policy wheel). JOUTES MUSICALES ► MUSIQUE (PRATIQUES CULTURELLES) . JOUTES VERBALES ► COMMUNICATION VERBALE.

LIEUX CITES The Saint Louis Blues, Bessie Smith. Algiers, Basin* street, Beale* street, Biddle* street, Birdland, Black* Belt, Brazos, Bucktown, Canal* street, Chickasaw, Congo* square, Dearborn* street, Decatur* street, Deep* South, De* Kalb, Delta, Dockery, Dooleyville, Eighteenth* street, Elm* street, Fannin* street, Farish* street, Fifty* Second street, Harlem, Hastings* street, Hollywood, James* Alley, Kokomo, Liberia, Market* street, Mason-Dixon* line, Maxwell* street, Morgan* street, Pennsylvania* Av., Perdido, Rampart* street, Sing Sing, State* street, Stovall, Tuxedo* Junction, Twelfth* Street, Vine* street, Wabash* street, Walnut* street, Watergate, Watts. ► MUSIQUE (LIEUX DE PRODUCTION), PRISONS ET PÉN1TONCIERS, PROSTITUTION (RUES ET QUARTIERS « CHAUDS »), TOPONYMES.

MALADIE/MORT/MALCHANCE/ENNUIS Bad Luck and Trouble, Lightnin’ Hopkins. BC, bad blood*, bad* luck, ball* (to be behind the eight ball), blue balls*, blue devils, blue funk*, blues, bone* yard, boogie, boot* hill, burn (somebody), careless* love, coolin’* board, crib* (death), cripple, Decoration* Day, deep* six, double* trouble, down* on (one’s) luck, dues* (pay), fix, fuck* up, hard* luck, heebie* jeebies, hole* (to be in the), hoodoo, hook* (on the), jake*- leg, jimmies, jinx, jitis, jitterbug, kick* the bucket, killing* floor, last* mile, leave* town, low* cotton, pay* dues, quit* the scene, SOL, TB, trick* bag, white* death.

MARQUES COMMERCIALES Hadacol Bounce, Professor Longhair. B.C, C.C, C.V., D.B., dobro, Dynaflow, Elgin, Grand Prize, Greyhound, Hadacol, Hart, King* Biscuit, Motown (Tamla), National, Nehi, Pepticon, Poro, Rocket 88, T Model, Terraplane, V.8, Victrola, W.D.I.A. ► CONTEXTO SOCIO-ÉCONOMIQUE.

MUSICIENS (Surnoms) I'm The Black Ace, Black Ace. Abbey, Ace* (Black Ace*, Johnny Ace*), B (Mister B), B.B., Baby, Baby* Bear, Baby* Boy, Baby* Face, Bags, Bald* Head, Barna, Banjo* Joe, Barbecue* Bob, Barney, Base, Bean, Bee, Benny, Big* Bill, Big* Boy, Big* Brown, Big* Chief, Big* Eyes, Big* Green, Big* Jay, Big* Joe, Big* Maceo, Big* Mama, Big* Maybelle, Big* Mouse, Big* Nick, Big* One, Big* Sid, Big* T, Big* Voice, Billy* Boy, Bird, Black, Black Ace*, Black* Boy Shine, Blind, Blind* Blake, Blind* Blues, Blind* Boy, Blind* Lemon, Blue, Blues (Mister), Blues* Boy, Bobo, Bo* Carter, Bo* Diddley, Bogue, Bojangles, Bo* Weavil, Bones (Mister), Boodle* It, Boo- galoo, Boogie, Boogie* Woogie, Boozoo, Boss* of The Blues, Boy, Brownie, Brute (The), Bubber, Buck, Bud, Budd, Buddy, Buddy* Boy, Bugs, Bukka, Bull* City Red, Bull* Moose, Bumble* Bee Slim, Bunk, Buster, Butch, Butterbeans, Cadillac* Slim, Cannonball. Casey, Cat. Cat* Eye, Champion, Chase, Chew, Chick, Chippie, Chocolate* Brown, Chu, Chuck, Cleanhead. Clearwater. C :••:■!* Papa, Coot, Cootie, Combread, Count, Cousin Joe, Cow Cow, Cripple, Daddy* Stovepipe, Detroit Junior’. Deoi'<- ¿. -- in-Law, Dickie, Dipper* Boy, Dippermouth, Diz, Dizzy, Do Boy, Doc (Doctor), Doe, Don, Dot, Drifter (The), Driftin’ Slim, Dudlow, Duke, Eighty Eight Elmore* James, Face, Fast* Fingers, Fat* Girl, Fatha, Fat Head*, Fats, Fess, Filthy, Five* By Five, Flip, Ford, Forest* City Joe, Frog, Funny* Paper (Papa), Furry, Gatemouth, Gator, Geechee, Gentle* Giant, Georgia* Boy, Georgia* Tom, Git- fiddle* Jim, Goose, Groove, Guitar, Guitar* Junior, Half* Pint, Hannah* May, Harpo* Slim, Hawk, Hi, Hi-de- ho-man, High* Sheriff From Hell, Hi Tide, Homesick* James, Honey* Bear, Honeyboy, Honeydripper, Hootie, Hop, Hot* Lips, Hot* Shot, Hound* Dog, Howlin’* Wolf, Illinois, Isom, Ivory, Jabbo, Jaws, Jaybird, Jazz, Jelly* Jaw, Jelly* Roll, Jonah, Jug, Juke* Boy, Junior, K.C, Kansas, Kaiser, Kid, King, King of Swing*, King* Solomon, Kitty, Klook, Koko, Kokomo, Lady* Day, Lazy* Bill, Lazy7* Lester, Leadbelly, Left Hand*, Lefty* Dizz, Lemon* (Blind Lemon), Leroy’s Buddy*, Lightnin’, Lil’ Son, Lion (The), Lips, Little* Benny, Little Bird*, Little* Brother, Little* Esther, Little* Giant, Little* Hat, Little* Jazz, Little* Joe Blue, Little* Mack, Little* Milton, Little* Richard, Little* Sonny, Little* T Bone, Little* Walter, Little* Willie, Lockjaw, Lone Cat*, Lonesome* Sundown, Long* Gone, Longhair, Lonnie* Brooks, Loudmouth, Louisiana* Red, Lucky, Lux, Ma, Magic, Mama, Mamie, Man (The), Maxwell Street, Memphis, Memphis* Minnie, Memphis* Slim, Mezz, Mickey, Mighty, Mighty* Flea, Mississippi, Mister B, Mister*” Bones, Mojo, Montana, Muddy* Waters, Mule, Mumbles, Nappy, Newk, Nighthawk, Nina, Nubbit, Old* Man Oden, Old Yardbird*, Panama, Papa, Peck, Peetie* Wheatstraw, Pee* Wee, Peg* Leg, Pharoah, Philly, Piano, Piano Red, Pinetop, Pop, Pops, Pork* Chop (Little), Pork* Pie Hat, Pres, Prez, Pretty, Prince Albert, Prof, Professor* Longhair, Queen, Rabbit, Ramblin’, Ras- haan, Red, Reed, Rockin’ (« Good Rockin' »), Root, S, St Louis Jimmy, Sassy, Satchmo, Scrapper, Screaming, Shadow, Shakey, Shine, Shortstuff, Shorty, Shot, Sir Charles, Sister, Skip, Slam, Sleepy, Slide, Slim, Slim Harpo*, Slow Drag, Slue Foot, Smack, Smockey, Snoo- kie (y), Snooks, Son, Sonny, Sonny* Boy, Speckled* Red, Specs, Spoon, Stickhorse, Sticks, Stovepipe, Stuff, Stump, Sugar Boy, Sugar* Pie, Sunny, Sunnyland Slim, Sun* Ra, Sweet* Pea, Sweets, Sy, T Bone, T V Slim, T.99, Taj* Mahal, Tampa* Red, Tarheel* Slim, Texas, Thing (the), Thunder, Tight (Too Tight), Tiny, Totsy, Trane, Tricky* Sam, Trixie, Trummy, Washboard* Sam, Washboard* Willie, Whirlwind, Whispering, Wild, Wild* Child, Winding Boy, Yank, Yard, Yardbird, Yusef Lateef, Za Zu Zutty. ► BLACK NAME* (P. 183).

MUSIQUE (Lieux ou se produit la) Cotton Club Stomp, Duke Ellington. Apollo, barrelhouse, Birdland, breakfast* dance, bucket* of blood, contest* (bucking, carving, cutting), Checkerboard, chittlin’* circuit, Congo, Cotton* Club, doctor* show, fish* fry, hall, Henry’s* Swing Club, honky* tonk, honky* tonk train, joint, juke, Mardi* Gras, medicine* show, minstrel* show, Minton, Onyx, rent* party, Roseland* Ballroom, Savoy, spot, storefront* club, tent* show, Sunset.

MUSIQUE (Pratiques culturelies) A/Zer Hours. Erskine Hawkins. After* hours, ballyhoo, banjo* (putting in the), battle, birdland, blue* monday, breakdown, breakfast* dance, bucking* contest, carve, carving* contest, chase, chitterling* dance (rag, strut), contest, cut, cutting* contest, fish* fry, forty* twenty (40-20), gouge, head* arrangement, hop* (calico), house* hop, house* rent party, house* shout, jam* session, Mardi* Gras, play* party, razor ball*, rent* party, Saturday* night fish fry, second* line, shout, skiffle, stomp, street* parade, struggle, supper, Tee- nah-nah, too tight* party, walking* the bar, workshop, Zulu.

MUSIQUE (Termes techniques) Warming up a Riff, Charlie Parker. Ad lib, all-in, armstrong, bear* cat crawl, beat* (back, four, ride, two), bending* notes, block* chord, blue* note, blues, book, break, bridge, change, channel, chart, chorus, clinker, cross, dots, eights, every* tub, fake, faker, flatted* fifth, fours, freak (lips), go* to town, goof, growl, head* arrangement, home* (back, go), lib-lab, lick, line, lining* out, quartet, riff, scat, stock, stomp* off, stop chorus*, stop time*, stroll, stuff, swing, tag, tailgate, two beat*, walking* bass.

MUSIQUE (Styles et courants) Birth of The Cool, Miles Davis. Barrelhouse, be-bop, blues, boogie*- woogie, bop, cajun, cool jazz, devil’s* music, dirt music, ditties, dixieland, dudlow, eight* to the bar, fast* western, free* jazz, french blues*, funk, funky, gogo, gospel, great black* music, hard* bop, hillbilly, hokum, holler, honk, hot, jazz, jazz* rock, jubilee, jump-up, jungle, la* la music, new* Orleans, new* thing, over and over, r and b, r’n’b, race* music, ragtime, rap, rhythm* and blues, rock* and roll, shout, sixteen, soul (jazz), soul music, sperichil, spiritual, stride, swing, work* song, zodico (zydeco).

MUSIQUE (divers) It Don't Mean a Thing of It Ain't Got That Swing, Duke Ellington. Alley* (put someone in the), alligator, beat* it out, blow, blow* (one’s) horn, blow* (one’s) ass off, blow* (one’s) cool (hat, top, wig), blow* a fuse, blow* up a breeze (a storm), blower, blues* shou- ter, blues* singer, bluesy, boot, bopper, bounce, burn, canary, cat, chops* (licking the), churchy, come* on, cook, cooker, corny, dig, dirty, dog* tune, doodle, drive, ear, ear* man, fangs, fats, feed, finger* popping, forty*-twenty (40- 20), frisking* the whiskers, get* down, get* hot, ghost*note, go, go* gome, go* out, grease, groove* (in the), groovy, gully* low, gutbucket, gutter, gutty, hot, jam, jazz it up, jazzy, jitterbug, joys, jubilee, jump, killer*-diiler, lay* back, lay* down, lay* out, legit, lick, longhair, loose* like a goose, low*-down, mad, mellow, moldy* fig, move, musicianer, noodle, number, paper, paper* man, play (one’s) ass* off, rag, ramble, ride, rock, roll, rooty*-toot, scat, sender, sit in, socks, solid, songster, sounds, squeeze, stomp, straight, struggle, sweet, sweets, swinger, talk, tear* it up, tear* the house down, tell, too tight*, truth, wail, waller, wig, woodshed. ► SPECTACLE (INDUSTRIE DU). NÉGRITUDE ► AFFIRMATION DE L’IDENTITE NOIRE. NEW DEAL ► CONTEXTE HISTORIQUE.

NOIRS (Appellation des) Aunt Hagar's Children, W.C. Handy. Aunt, Aunt* Hagar’s children, bad* boy, ball (snowball), banana, bear, biscuit* brown, black, black* and tan, black* cat, blackout, black* raspberry, blood, blue gummed nigger*, boogie, boot, brother, brown(ie), buck, coal, coffee, Congo, coon, creole, crow* jane, darkie, dot, dry* bones valley, ebony, eight* ball, ethiopan, field nigger*, girl, Hagar, head, high brown*, isom, jig, jigaboo, jogo, member, monkey, mose, nappy, negro, nigger, pigmeat, porkchop, red nigger*, sealskin brown*, shine, slick, snow ball*, spade cat*, spades, spook, tush, uncle, yaller. ► COULEURS DE PEAU.

NOTABLES ET GROS BONNETS Mr Hot Shot, Lonnie Brtxtks. Big* dog (gun, noise, potato, shot, wheel), block* and tackle, boss, buckra, captain, Crump, H.N.I.C., hot* shot, Johnson, kingpin, Law (the), Man (the), Pendergast, shaker, straw boss*, them, they.

ORGANES SEXUELS Warm Valley, Duke Ellington. Ace of spades*, ax(e), balls, banana, barbecue, basket, bone, bowl, box, boy* in the boat, bread* pan, bucket, bun, butt, button, cabbage, candy* stick, cherry* ball, chimney, cock, cookie, custard* pie, dick, ding*-a-ling, ding* dong, doodle, doughnuts, fanny, frame, front* door, fruit, hambone,' hammer, head, hot* dog, hot* nuts, jackass, jelly, jelly* roll, johnson, joint, king*-a-ling, lawn, lemon, mojo, needle, nuts, patuni (patootie), peter, pie, pony, poodle, poontang, pot, potato, pussy, rattlesnake, red wagon*, rent, rod, roll, santa claus, scraunch, shortening bread*, size, skrontch, snatch, stallion, stew, stinga- ree, stinger, straw, stuff, suey, sugar* bowl, sweet* patootie, tail, thing, ting-a- ling, ’tuni, wang, warm* valley, woogie. ► SEXUALITE.

PIANO ► INSTRUMENTS DE MUSIQUE.

PLAISIR (Prendre du) Let The Good Times Roll, Louis Jordan. Ape, ball* (to have a), barrelhouse, blow* a fuse, blow* (one’s) top (cool, hat, mind, wig), blue* monday, boogie, breakdown, bring* it down, bull* shit, clown, cowein, date, ding* dong, fish fry, flip, flip* (one’s) wig. fun, gig, groove, hair* (let your hair down), ham- fat, hop, jam, jass, jazz, jig. jive. jook. kick, kick* (get a kick out of), let the good times roll, mess* around, pitch a boogie*, playhouse, pop, rip up, rounder, Saturday* night fish fry, street* parade, swing, tee* nah nah, twister, wang* dang doodle, whoopee, whoop* it up.

PRATIQUES SEXUELLES B.D. Woman’s Blues, Bessie Jackson. Aunt, BD, bitch, black* and tan, bulldyke (r), cocksucker, cream puff, daisy* chain, date* (double date), diddle, drag, fag* (faggart, faggot, faggoty man), fairy, flip* flop and fly, freak, freakish, fruit, gang* bang, gay, head* chick, jack* off, jane, mellow, molasses* supper, ODB, peach* tree, punk, queen, ride* (pull/ run) the train, rub (one’s) root*, sealskin brown*, shot, sissy. ► SEXUALITE.

PRÉDICATEUR ► RELIGION.

PRISONS/PÉNITENCIERS A Parchman Farm Blues, Bukka White. Angola, Big Rock, Brazos, Bridewell, Cummins, De Kalb, Goree, Greystone, Grossbeck, Huntsville, Leavenworth, Parchman, Ramsey, Sing Sing, Stonewall, Stony-Lonesome, Sugarland, Wheeling.

PRISONS/PÉNITENCIERS (Langage) Ball and Chain, Big Mania Thornton. Around* the bend, ball* and chain, big* house, black* betty, black* maria, busted, caboose, calaboose, can, captain, chain gang*, chair, clinker, county* farm, D.B., degree (first, third), dime, do. ease* (someone) in, eleven* twenty nine (11-29), framed, gallis, hole, iced, jug, killing* floor, last* mile, long* chain man, long* time man, Lost* John, Old* Hannah, pen, prison* farm, rap, roller, Shorty* George, special* agent, spot, state* farm, street, stretch, three*-time loser, time, turn* loose, up* the river, wagon, wolf, workhouse, yardbird.

PROSTITUTION (Rues et quartiers « chauds ») Storywile Blues, Bunk Johnson. Basin* Street, Beale* Street, Biddle* Street, Daisy* Chain, Decatur* Street, District* (the), Eighteenth* Street, Elm* Street, Fannin* Street, Farish* Street, Levee* District, Morgan* Street, Pennsylvania* Av., Storyville*, Sugar* Hill, Tenderloin, Twelfth* Street, Valley* (the).

PROSTITUTION (Langage) Winin’ Boy, Jelly Roll Morton. Alley* woman, bag, Bear* (Jack the), beedle*-um-bum, bimbo, bitch, boogie, boogie* girl, boogie* house, box* back boy, broad, bum, chippie, cop* and blow, cop* out. crib, dog, eastman, fish* market, forty* four (44), fuck* freak, get* down, hook, hooker, house* of joy, hustle, Jack the Bear*, jazzbelle, jelly* bean, john, jumper, kick* mud, long- shoe game*, mahogany, main lady*, man, meal* ticket woman, mud kickin’* woman, nut* factory, nut* house, old* man (lady), P.I, pie* back man, pimp, pinchback, playboy, player, red* light, Rising* Sun, rounder, shoot the agate*, sport, sporting* girl, sportin’* house, stew, stick, stomp*-down, stroll, sweet* back man, tommy, tramp, trick, trick* broad, trick* house, turn tricks*, twos* and fews, wham* bam thank you ma’am, whore, whorehouse, winding* boy, wining* boy, working* broad.

PSEUDONYMES ► MUSICIENS (SURNOMS).

RACISMS ► RELATIONS INTERRACIALES.

RADIO ► SPECTACLE (INDUSTRIE DU).

RELATIONS INTERRACIALES Black, Brourn and White, Big Bill Brcxinzy. Aunt, baboon, backlash, bad* luck, black* and tan, blues, boy, captain, Charlie, Checkerboard, Crow* Jim, day* time passing, Dixie* line, doctor* Thomas, down the line*, engineer, Faubus, fireman, gallion, girl, jeffing, Jim* Crow, jive, King* Martin Luther, Ku-Klux-Klan, line, Malcolm* X, Mason-Dixon* line, Meredith* James, monkey, nation, no* sir, okee*-doke, poontang, Promised* Land, Red River, slick, them, they, tom- ming, tracks* (across the), underdog, uncle, uncle* Tom, Underground* Railroad, work* under cork, yes* sir.

RELIGION Camp Meeting, Don Wilkerson. Amen* corner, brother, camp* meeting, Canaan, dry* bones valley, good* book, gospel, gravy* sermon, gravy* train preacher, head* knock, holiness* church, holy* dance (roll), jubilee, lawd, lining* out, member, milk* and honey, moaning, mourner, mourning, preach, preacher, preaching, Promised* Land, religion* (to get), ring and shuffle shout*, shout, sister, soul* jerker, speri- chil, spiritual, testify, whoop, zooming. ► CROYANCES ET SUPERSTITIONS.

SEXUALITÉ Shave ’em Dry, Lucille Bogan. Action, ants* in (one’s) pants, ash, bake, ball* (to have a), bang, beedle-um-bum, before* day creep, big* eyes, biscuit, boll* weavil, boodle, boogie-woogie, bread, buzz, cabbage, cake, candy, careless* love, catfish, Chaney, cherry* ball, chop* (someone’s) wood (kindlings), cloud, coal, cock, coffee, come, come* down, cook, cool, cop, cornbread, cream, creep* (midnight), crosscut* saw, cut, cut the cake*, cut (someone’s) wood, deedle, diddie, diddy*-wah- diddy, diddle, cliggin’* potatoes, ding-a- ling, do* the do, doodle, drive, eagle* rock, easy, empty' (one’s) trash*, fine* and mellow, fish, fish* in (one’s) pond, flip* flop and fly, four* f, fuck, funk, garbage* can, gelatine, golden* bullet, gravy, grind, groove, ham, haul* ashes, honey, hook, hot* shot, hot* stuff, if* you see kay, jam, jass, jazz, jazzy, jelly, jive, joint, juice, jump, knock* it out, kokomo, L.T., lay, make* it, mess, milk, nasty, patch(a), peter, poontang, potato, prowl, prunetang, puntang, ram, rattle, red* hot, ride, ride* in the moonlight, rip* up, rock, roll, root, saddle, scraunch, shag, shake, shake* that thing, shave* ’em dry7, shortening bread*, shot, shrimp, slow* and easy, spoon, spoon-fui, Stavin’* Chain, steady roll*, sting, strut* (one’s) stuff, strut* that thing, sugar, sugar* bowl, sweet* patootie, tea, tight, tight* like that, toodle-oo (um), trash, trash* (empty one’s), tight* like that, tow, truck, wang, wang dang* doodle, wet* deck, wood, woogie, work, yoyo. ► ORGANES SEXUELS.

SPECTACLE (Industrie du) Tin Pan Alley, Ray Agee. A & R man, alternate take*, big* hand, bouncer, Brown* Piney, burntcork*, chittlin’* circuit, cooch, coochie*- coo, cork* (work under), cover, D.J, date, doctor* show, dog* tune, endman, forty* five (45), forty* twenty (40- 20), freelance, gig, gogo* dancer, hootchie* cootchie, indie, J.A.T.P, job, jockey, juke* box, King* Biscuit, leader, medicine* show, minstrel, Motown, number, olio, one* night stand, one* nighter, Petrillo, pick-up* date, play (work) for the door*, plug* side, race*record, sepia* record, set, shake* dancer, sideman, sit* in, stick, T.C.B, take, take care of business*, take* five, talent* scout, tent* show, Tin* Pan Alley, T.O.B.A, Toby, track, V-disc, victrola, W.D.I.A, work* under cork.

SPONSORS ► MARQUES COMMERCIALES.

SUPERSTITIONS ► CROYANCES ET SUPERSTITIONS.

TOPONYMES The Apple Jump, Count Basie. Alabama, Apple (the), Back’O’Town, Beat (the), Big Apple*, Big D, Black* Belt. Black* Bottom, Canaan, Chickasaw, Chocolate* City, Crescent* City, Delta, District (the), Dixie, Dixieland, Downtown, Drag (the), Eleven* Light City, Father* of the Waters, Frisco, Front* of Town, Hell’s* Kitchen, Jewtown, Jungles* (the), KC, Kaycee, LA, Levee* District, Motor* City, Naptown, Nation, Old Man* River, Philly, Promised* Land, San* Ho Zay, Smoky* Holler, Soul* City, Southside, Steel* City, Storyville, Street (the), Stroll, Sugar* Hill, Swing* Street, Tenderloin, Territory, Terry', Up* the River, Uptown, Valley (the), Westside, Windy* City7. ► LIEUX CITES.

TRAIN ► CHEMIN DE FER.

TRIPOTS ► JEU.

VAGABONDS ► CHEMINEAUX ET VAGABONDS.

VAUDOU ► CROYANCES ET SUPERSTITIONS.

VIOLENCE Sidewinder, Lee Morgan. Ball (razor ball), degree* (first, third), dukes, Georgia* shave (give someone a), haul* ashes, heat, jive, mess, pitch a boogie*, razor ball*, rumble, shit, sidewinder, stuff, walk* (someone’s) log, workout.

VOL ► ARNAQUE / VOL / CRASSES.

HEAR ME TALKIN’ TO YA

D’une langue noire... à Talkin’ That Talk Le 12 juillet 1979, Charles C. Joiner rend son jugement dans le procès opposant une quinzaine d’enfants noirs de l’école primaire Martin Luther King d’Ann Arbor, Michigan, aux autorités scolaires ; se fondant sur une loi de 1974 sur l’égalité des chances à l’école, il reconnaît 1’« anglais noir » comme une langue à part entière ; elle contraint l’institution scolaire à la traiter comme telle et, en particulier, à enseigner aux enfants noirs l’anglais standard en deuxième langue. Cette décision revêt une importance capitale pour la communauté noire américaine, ainsi reconnue, légitimée dans sa spécificité langagière et culturelle. Mais elle témoigne dans le même temps de la vacuité de toute une idéologie de l’intégration, celle du melting-pot : l’anglais noir est à la fois la manifestation et la cause d’une marginalisation croissante des populations noires défavorisées. L’objet de cet ouvrage n’est pas de cerner l’ensemble des contours de ce particularisme langagier, aux plans syntaxique et phonologique ; seul le plan lexical va ici nous intéresser. La double appartenance du barde négro-américain — à la minorité noire et à un groupe social fermé et aussi particulier que celui des musiciens — marque profondément son langage. Les comportements d’isolement et d’auto-ségrégation qu’on rencontre chez ces derniers « ont pour fonction essentielle de mettre le musicien à l’abri des ingérences du public de “caves” et, par extension, de la société ordinaire. Ils ont pour première conséquence de renforcer le statut d’extériorité du musicien, par l’effet d’un cycle de déviance croissante » h Rejetés comme Noirs, en marge comme musiciens, bluesmen et jazzmen, doublement exclus, parlent leur singularité. C’est cette singularité que traque Talkin' That Talk. Son champ d’investigation est précisément délimité, qui se propose d’inventorier le vocabulaire du musicien négro-américain, tel qu’il se révèle dans des productions orales (l’argot est oral ou il n’est pas) dont la trace est conservée, chants, interviews, biographies enregistrées... Le lexique ainsi recueilli couvre près de 3 000 termes ou expressions relevant de l’argot, et du jargon spécifique aux musiciens, lié aux différentes techniques et pratiques instrumentales, aux conditions et lieux de production de la musique ; il recense aussi les métaphores les plus courantes, des surnoms, noms de lieux, faits historiques, institutions, marques commerciales, nombres et personnages — historiques ou mythiques — revêtant une signification ou une importance particulières pour le bluesman et le jazzman ou pour l’ensemble de la communauté noire. Sont exclus en revanche les termes d’un usage trop restreint, souvent issus des délires verbaux de gens comme Cab Calloway ou Slim Gaillard. Les citations ont pour fonction de témoigner que le corpus recueilli est en usage parmi les musiciens noirs américains, ce qui, cela va de soi, ne signifie nullement que cet usage leur soit exclusif.

Argot et jargon Argot et jargon ont comme point commun de n’affecter qu’un seul plan de la langue, le plan lexical ; ce trait, avec le fait qu’ils ne sont pas liés à une région particulière, permet de les distinguer des dialectes et des patois. Ils se moulent dans le cadre de la syntaxe et de la phonologie de la langue — ici, l’anglais non standard des Noirs américains — créant un ensemble de mots qui viennent se superposer au vocabulaire traditionnel. Cette nouvelle strate lexicale n’embrasse pas l’ensemble des champs sémantiques, mais affecte de façon privilégiée certains pans bien délimités — les femmes, le jeu, la délinquance, la boisson... pour ce qui est de l’argot ; le jargon, lié à un métier et à des pratiques, est constitué essentiellement de termes techniques. L’index thématique situé à la fin de cet ouvrage illustre parfaitement ces aspects. Argot et jargon supposent une connivence entre les locuteurs et participent au renforcement de la cohésion du groupe. Comme le note Mack McCormick à propos du bluesman Sam Lightnin’ Hopkins, « il tire sa satisfaction dans la vision des mimiques d’entendement qui parcourent la face d’un ami tandis que son chant évoque une aventure intime commune ». Pour le reste, argot et jargon se distinguent par bien des points et d’abord par leur rapport antagoniste au signifié : le terme argotique est, de par sa nature même, imprécis, flou et polysémique ; il joue sur l’évocation, l’analogie ou la suggestion. Des signifiés tels que « femme / femme entretenue / maîtresse / pute », ou bien « amoureux / amant » et bien d’autres sont souvent englobés dans le même signifiant et seuls, le contexte, l’intonation et le degré de connivence entre les interlocuteurs permettent de préciser la dénotation. L’argot fait également l’impasse sur les détails, la décomposition d’un signifié en différentes parties parce que, comme le remarque Claude Rudigoz, « le fantasme procède synthétiquement, par saisies globales émotives, et non analytiquement, par distinctions successives ». Le jargon vise au contraire à compenser l’imprécision, l’inadéquation, voire l’absence, du vocabulaire ordinaire pour exprimer toutes les nuances que requièrent les différentes techniques ou pratiques. Les termes de jargon se regroupent pour la plus grande part dans les rubriques de l’index thématique relatives à la musique, au show- business et aux pratiques rituelles ou magiques. Si le jargon est ancré dans la tradition d’un métier et dans le geste technique, ce qui lui confère une stabilité certaine, l’argot est volatil, fluctuant au gré des modes et des modes de vie. Il possède un fonds permanent, mais, pour le reste, subit à un rythme rapide un processus de renouvellement constant. Accéléré même dans le cas du vernaculaire noir américain où les mots transfuges — ceux qui ont « passé la ligne », qui sont passés d’un usage interne à la communauté noire au langage populaire américain — sont alors généralement abandonnés par le langage noir (les utiliser, c’est « parler mort », talk dead) ou investis de significations nouvelles. Ce processus, décrit par Claude Brown et Grâce Sims Holt, est significatif de la vitalité et de la permanence du brouillage dans la communication interraciale aux Etats-Unis. Ainsi, si la richesse de l’argot réside dans sa puissance d’évocation, et dans la prolifération de quasi-synonymes, celle du jargon réside, elle, dans sa précision accrue, une expression plus rigoureuse et spécifique. On pourra incidemment relever dans Talkiri That Talk les différents procédés de création de l’argot qui vont des déformations, systématiques (pig latin) ou accidentelles (casey, hi wanna), aux emprunts (doney,faror, juke), en passant par métonymies (eagle, eighty eigbt, soûl) et métaphores (canned beat, driviri wbeel, garbage cwzfellipses (eleven twenty-nine, forty five), antonomases troncations (ad-lib, neib, vag) ou suffixations (kiddie), euphé mismes (backdoor man, diggiri potatoes, bot dog), onomatopées (diddie, ding-a-ling), redoublements (cboo cboo) et antiphrases (bad, dirty, down, funky). On pourra également noter l’emploi, plus spécifique à l’argot noir américain, d’un langage des nombres (voir tbree-six-nmë), ou plutôt une amorce de langage des nombres, dans la mesure où les possibilités engendrées par ce procédé ne sont pas, loin s’en faut, toutes explorées.

Une fonction cryptique? Originellement, l’argot est la langue des malfaiteurs ; de cette origine il tire sa fonction première qui est cryptique : il offre le moyen de parler, en présence de tiers, en termes incompréhensibles pour le commun des mortels. Si l’on en croit Denise François-Geiger, depuis environ un siècle, la fonction principale des argots évolue du cryptique au ludique ; ce n’est que partiellement le cas de l’argot noir américain qui conserve une fonction cryptique et manipulatrice très vivace. L’accès du blues à la popularité auprès du public blanc et à une audience internationale dans les années 1960 — c’est la période dite du blues revival — apparaît comme fondé sur un véritable malentendu ; malentendu parce que n’en ont été retenus que ses aspects les plus immédiatement assimilables, musique et pulsion rythmique ; malentendu parce que sa parole, qui le fonde et lui donne sens, est restée presque totalement indéchiffrable en dehors de la communauté qui l’a engendré. Pour des problèmes de compréhension ou de traduction, mais surtout pour des raisons idéologiques, on a voulu voir dans le blues une musique de la résignation et du fatalisme. Ce malentendu fondamental est l’un des derniers avatars rencontrés par la culture noire américaine dans l’histoire de ses rapports avec la culture dominante. Les planteurs avaient coutume de demander à leurs esclaves d’organiser des spectacles incluant danses, chants, mimes et saynètes. Il est aujourd'hui acquis que ceux-ci, offrant toutes les marques extérieures du respect dû aux maîtres blancs, avaient un caractère satirique, voire subversif très affirmé. Comme l’a noté Geneviève Fabre, « ils permettaient une critique publique sans que celle-ci fût jamais directe, ni explicite. Les esclaves pouvaient ainsi exprimer leur insatisfaction ou leur mécontentement sans risquer d'être punis pour leur insolence ». Le cake walk, dans lequel les Noirs s’amusaient à singer les Blancs avec courbettes, grands coups de chapeau, déploiement de parures, « du point de vue de la plupart des Blancs [...] consistait en une tentative de la part des Noirs, frustes et ignorants, d’émulation par rapport à leurs supérieurs. Mais il est hors de doute que l’homme de couleur considérait le cake walk comme une parodie subtile des attitudes des Blancs de la haute société qui veulent “se donner des airs”1. Les chants spirituels, longtemps considérés comme l’expression même de la résignation, de la soumission, peuvent eux aussi être décryptés à deux niveaux : « Nos negro-spirituals, aujourd’hui si admirés dans le monde entier, étaient souvent des codes. Nous chantions le “Ciel” qui nous attendait et les maîtres des esclaves écoutaient en toute innocence, sans se douter que nous ne parlions pas de l’au-delà. Le mot “Ciel” désignait le Canada et le Noir chantait l’espoir qu’en s'enfuyant par le Chemin de Fer souterrain [Underground Railroad] il y parviendrait un jour2 ». Et « même aujourd'hui, un Blanc peut trouver difficile sinon impossible de déchiffrer ou interpréter le code utilisé par le preacher dans une église de campagne ou d’un ghetto »3. Le blues, lui, est généralement tenu pour l’expression même du fatalisme et de la résignation ; cette interprétation s’inscrit dans la droite ligne d'une société blanche qui a toujours tenu l'homme noir pour passif, incapable de subvenir à ses besoins et pour lequel l’état de servitude était un moindre mal. La réalité est sensiblement différente, comme en témoignent les multiples complots et révoltes — la plus célèbre restant celle de Nat Turner en 1831 — qui ont ensanglanté le Nouveau Monde depuis la période esclavagiste. Toute fonction subversive a été ainsi déniée au blues ; il est vrai qu’elle ne s'exerce que très marginalement de façon explicite ; Black Brown and White de Big Bill Broonzy ou Alabama Blues de J.-B. Lenoir restent à cet égard des exemples relativement isolés et peu significatifs : « If you’re white, you’re ail right If you’re brown, stick around But as you’re black, mmm, mmm, mmm, brother Git back, git back, git back » Black. Brown and White, Big Bill Broonzy (1951). « I never go back to Alabama That is no place for me They killed my brother and my sister And the whole world get them peoples down there free » Alabama Blues, J.-B. Lenoir (1965). En effet, beaucoup plus représentatives de la tradition sont ces pièces où la critique, la satire ne sont pas immédiatement discernables : « Monkey and the baboon playing seven-up Monkey win the money Scared to pick it up » Mother Buyer, Dirty Red (1947)’. « I'm scared to stay here Scared to leave this ole bad luck town But when I get back early mornin My head goes ’round an’ ’round » Bad Luck Blues, Kokomo Arnold (1938). « Now run here, baby, Set down on my knee I wanna tell you All about the way they treated me » If I Had Possession over Judgment Day, Robert Johnson (1936). « All I want is my ticket Please show me my train I’m gonna ride, gonna ride, ’til I can’t hear them call my name » Grievin’ Hearted Blues, Brownie McGhee (1959). Sous le couvert de la malchance (badluck), du singe (monkey) et du babouin (baboon), sous les génériques « Ils/Eux » (theyltbem), sous le masque de Jim Crow, elles traitent des rapports Noirs-Blancs et de la ségrégation raciale. Ainsi, le rejet du blues par la bourgeoisie noire n’est-il pas tant une tentative d’oubli du traumatisme lié à l’esclavage, que le refus de la subversion qui lui est inhérent. Comme le notent Philippe Caries et Jean-Louis Comolli, « ce qui ne cesse de durer, dans le blues, la peau dure du blues, c’est cela même qui ne cesse pas, dans le peuple noir, de résister aux intégrations ». Cette volonté délibérée de brouillage de la communication remonte à la tradition africaine (où la parole n’est pleinement valorisée que dans l’ambiguïté et le mystère), tradition constamment réactivée et renforcée par l’arrivée de nouveaux déportés et la nécessité de survivre dans un environnement hostile. Comme le remarque justement Robert Springer, « il faut avoir constamment à l’esprit la possibilité d’un traitement symbolique de sujets dangereux ou tabous. Il semble ainsi que les relations raciales soient souvent décrites par le truchement des tensions du couple et que, très communément, ce soit le Blanc 1. Une autre version, révélatrice, due à James « Son » Thomas, nous est livrée par l'ethnomusicologue William Ferris in Blues from The Delta : « The nigger and the white man playing seven-up The nigger win the money, scared to pick it up » que l’on vise à travers la femme » : « I use those three cliches : whisky, women and money [...] ’cause it takes me on a lead for what I’m going to say [...] These are the most important things in life [...] Everybody thinks I’m talkin’ about women but I’m not1. » Il est révélateur de noter ici les conditions dans lesquelles Brownie McGhee livre cette clef de décryptage : il la confie à un Européen, donc à quelqu’un qui, contrairement au Blanc américain, a un a priori favorable, et à une période où le blues, ayant accédé à une popularité mondiale, avait perdu nombre de ses fonctions traditionnelles.

Dissimulation, double sens et manipulation Le « peuple du Blues2 » est historiquement marqué par son rapport à « l’homme », c’est-à-dire au Blanc et/ou au maître (the Man) : « Quelqu’un m’a demandé ce que ça me faisait de faire du cinéma. J’ai répondu : “Quand on est Noir, on joue tout le temps un rôle.” Et c’est vrai. Dans ce pays, les Noirs jouent un rôle tous les jours, s’ils veulent s’en sortir. Si les Blancs savaient vraiment ce que les Noirs ont en tête, ça leur foutrait vraiment les foies. Les Noirs n’ont pas le pouvoir de dire de telles choses, alors ils mettent des masques et font un superbe travail d’acteur, juste pour passer leur putain de journée3. » Son langage, qui joue aussi bien de la dissimulation et du double sens que de la manipulation, conserve la trace de ce rapport à « l’homme ». Manipuler, c’est feindre de se mouler dans le stéréotype du nègre joyeux et bon enfant véhiculé par l’idéologie dominante : « Some people thinks I’m happy But they sho’ don’t know my mind They see smile on my face But my heart is bleeding all the time » Bleeding Heart Bines, Jimmie Gordon (1938). C’est simuler la soumission, mimer la débilité, singer l’innocence pour amener son interlocuteur au point où on veut l’amener : «Je ne t’en ai jamais parlé, mais notre vie, à nous, est une guerre, et du jour où j’ai rendu mon fusil, à la Reconstruction, je suis devenu un traître pour la vie, un espion dans le pays de l’ennemi. Tâche de vivre, dans la gueule du loup. Je veux que tu les noies sous les oui4, que tu les sapes avec tes sourires, que tu les fasses crever à force d’être d’accord avec eux, que tu les laisses te bouffer jusqu’à ce qu’ils te vomissent ou qu’ils éclatent5. » Les personnages du folklore traditionnel que sont le « singe vanneur » 1 Interview de Brownie McGhee, in Out of The Blacks into The Blues, film de Claude Fleouter et Robert Manthoulis, 1972. 1 D’après l’ouvrage de Leroi Jones, Blues People, qui désigne ainsi l'ensemble de la communauté noire américaine. 1 Miles Davis avec Quincy Troupe, Miles, l’autobiographie. 1 Voir yes sir. 5 Ralph Ellison, Homme invisible, pour qui chantes-tu ? (signifying monkey) et « frère Lapin » (Bre’r Rabbit) sont à cet égard particulièrement représentatifs ; comme est significative l’étendue des nuances du vocabulaire relatif aux pratiques manipulatoires1. Mais manipuler, c’est avant tout opérer une véritable inversion des rapports de force ; d’où la survalorisation dont bénéficie au sein des couches populaires noires le rapper, le « baratineur », celui qui possède une grande maîtrise verbale, qui est capable d’avoir le dernier mot et d’arriver à ses fins2. Un argot se nourrit de la nécessité dans laquelle se trouve un groupe de masquer ou de voiler sa pensée. Plus cette nécessité est vitale, « plus l’argot devient complexe, étendu et organisé »3. Si cette loi est fondée, alors la richesse, la créativité du vernaculaire noir américain témoignent, s’il en est besoin, de la permanence et de l’intensité de la lutte des Noirs pour leur survie culturelle, économique et politique dans le Nouveau Monde. Puisse ce glossaire contribuer à un autre déchiffrage, à une autre lecture, plurielle, de ce que dit le peuple du blues. Jean-Paul Levet