o Année 2000. – N 24 [2] A.N. (C.R.) ISSN 0242-6765 − CPPAP 0503 B 05115 Mercredi 22 mars 2000 ASSEMBLÉE

NATIONALEDÉBATS PARLEMENTAIRES JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

11e Législature

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

159e séance

COMPTE RENDU INTÉGRAL

2e séance du mardi 21 mars 2000

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SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS PRÉSIDENCE DE M. PHILIPPE HOUILLON M. le président. 2. Solidarité et renouvellement urbains. − Explications de 1. Questions au Gouvernement (p. 2345). vote et vote sur l’ensemble d’un projet de loi (p. 2356).

INDEMNISATION DU CHÔMAGE (p. 2345) M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l’équipement, des transports et du logement. M. Jean-Claude Sandrier, Mme Martine Aubry, ministre de l’emploi et de la solidarité. EXPLICATIONS DE VOTE RÔLE DU PARLEMENT (p. 2346) MM. Jean Proriol, MM. Philippe Douste-Blazy, , Premier Daniel Marcovitch, ministre. Serge Poignant, Michel Vaxès, LUTTE CONTRE LE RACISME (p. 2347) Germain Gengenwin, Jean-Michel Marchand. M. Georges Frêche, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. VOTE SUR L’ENSEMBLE (p. 2362) SECTES (p. 2348) Adoption, par scrutin, de l’ensemble du projet de loi. Mmes Martine David, Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Suspension et reprise de la séance (p. 2362)

OTAGE FRANÇAIS EN TCHÉTCHÉNIE (p. 2349) 3. Saisine pour avis d’une commission (p. 2362). Mme Martine Lignières-Cassou, M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. 4. Liberté de communication. − Discussion, en deuxième lecture, d’un projet de loi (p. 2363). ACCÈS AUX SERVICES PUBLICS DE LA POSTE ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS (p. 2349) Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la MM. François Brottes, Christian Pierret, secrétaire d’Etat à communication. l’industrie. Rappel au règlement (p. 2368) OMC (p. 2350) MM. Laurent Dominati, le président. MM. Yves Cochet, François Huwart, secrétaire d’Etat au commerce extérieur. Suspension et reprise de la séance (p. 2368)

FUSION DES COMMUNES DE LILLE ET DE LOMME (p. 2351) M. Didier Mathus, rapporteur de la commission des affaires culturelles. MM. Franck Dhersin, Lionel Jospin, Premier ministre. EXCEPTION D’IRRECEVABILITÉ (p. 2371) COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE (p. 2352) M. Jean-Marie Geveaux, Mme Martine Aubry, ministre de Exception d’irrecevabilité de M. José Rossi : MM. Laurent l’emploi et de la solidarité. Dominati, Patrick Bloche, Olivier de Chazeaux, Christian Kert, Mme la ministre. − Rejet. ÉDUCATION NATIONALE (p. 2353) QUESTION PRÉALABLE (p. 2376) M. Bruno Bourg-Broc, Mme Ségolène Royal, ministre délé- guée chargée de l’enseignement scolaire. Question préalable de M. Jean-Louis Debré : MM. Olivier de Chazeaux, Michel Françaix, Laurent Dominati, Patrice SYNCHROTRON DE TROISIÈME GÉNÉRATION (p. 2354) Martin-Lalande, Christian Kert. − Rejet. MM. Pierre Lasbordes, Claude Allègre, ministre de l’éduca- tion nationale, de la recherche et de la technologie. DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 2381) M. Roger-Gérard Schwartzenberg. DROIT DE VOTE DES ÉTRANGERS AUX ÉLECTIONS MUNICIPALES (p. 2355) Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance. MM. Bernard Birsinger, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’intérieur. 5. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 2383).

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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS M. Charles Cova. Oh ! Le vilain ! M. Jean-Claude Sandrier. En fait, il veut avoir les M. le président. La séance est ouverte. mains libres pour rendre les salariés taillables et corvéables (La séance est ouverte à quinze heures.) à merci. M. le président. Mes chers collègues, j’ai le plaisir de L’intérêt général commande d’exiger que le MEDEF souhaiter la bienvenue à nos trois nouveaux collègues assume ses responsabilités en matière de création M. Jean-Claude Leroy, M. Pierre Menjucq et M. Jean- d’emplois stables et correctement rémunérés. La crois- Marie Geveaux. (Applaudissements.) sance et le passage aux trente-cinq heures notamment en A ce moment, M. Jean-Marie Geveaux et M. Pierre ouvrent la possibilité. Menjucq entrent dans l’hémicycle. − Mmes et MM. les Aujourd’hui, les entreprises doivent être rendues collec- députés des groupes du Rassemblement pour la République, tivement responsables de la capacité des salariés à être du groupe de l’Union pour la démocratie française-Alliance embauchés, comme aussi des revenus des salariés qu’elles et du groupe Démocratie libérale et Indépendants se lèvent et mobilisent et qu’elles démobilisent. applaudissent.) Parce qu’il s’agit d’un problème d’emploi, parce qu’il Je vous indique dès à présent que la séance ne sera pas s’agit d’une implication des dépenses de l’Etat pour les suspendue à la fin des questions au Gouvernement. chômeurs peu ou pas indemnisés, parce que les pro- blèmes du chômage et de l’emploi ne concernent pas uni- Nous passerons directement aux explications de vote et quement les partenaires sociaux, ne pensez-vous pas, au vote, par scrutin public, sur l’ensemble du projet de madame la ministre, que le Gouvernement devrait faire loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains. entendre l’expression de l’intérêt général face à l’attitude rétrograde du MEDEF ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socia- 1 liste.) M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’emploi et de la solidarité. QUESTIONS AU GOUVERNEMENT Mme Martine Aubry, ministre de l’emploi et de la soli- darité. Monsieur le député, le MEDEF, ainsi que les M. le président. L’ordre du jour appelle les questions autres organisations patronales, ont décidé d’engager des au Gouvernement. négociations interprofessionnelles avec les organisations Nous commençons par les questions du groupe syndicales. communiste. Après le Premier ministre, au comité du dialogue social, je ne peux que me réjouir qu’enfin la négociation INDEMNISATION DU CHÔMAGE s’ouvre en au niveau interprofessionnel, après cinq années où il ne s’est quasiment rien passé. Mais, pour M. le président. La parole est à M. Jean-Claude San- nous comme pour vous, la négociation doit aboutir à des drier. accords qui constituent, pour les salariés, autant de pro- grès sociaux et d’éléments de protection et, pour les M. Jean-Claude Sandrier. Monsieur le président, ma entreprises, de meilleurs moyens de fonctionner. question s’adresse à Mme la ministre de l’emploi et de la solidarité. Le problème de l’indemnisation du chômage est très important. Il n’a pas été réexaminé depuis des années Les négociations entre les partenaires sociaux se sont alors même que le marché du travail a beaucoup évolué. engagées sur l’avenir de l’UNEDIC. Les intentions du Par exemple, le nombre de licenciements qui ont donné MEDEF sont claires : il s’agit d’utiliser le système d’in- lieu à une inscription à l’ANPE a diminué de quelque demnisation du chômage comme outil de flexibilité, de dix points − il est passé de 39 % à 28 % −, mais les baisse du coût du travail et de précarité. contrats à durée déterminé et les missions d’intérim Le MEDEF n’a avancé aucune proposition concernant marquent quant à eux une progression de près de 12 %. une revalorisation des indemnités ou un élargissement du Il convient que les partenaires prennent en compte cette nombre des bénéficiaires, alors que l’UNEDIC serait nouvelle réalité pour éviter que ne se poursuive ce mou- excédentaire de six milliards de francs et que quatre chô- vement tout à fait néfaste, qui fait qu’aujourd’hui 42 % meurs sur dix seulement sont indemnisés. seulement de chômeurs sont indemnisés contre 52 % il y Le MEDEF déciderait des conditions de retour à a dix ans. l’emploi des chômeurs et, par là même, d’une baisse des L’UNEDIC, organisme paritaire, doit comprendre que, indemnisations, transférant un peu plus encore le coût lorsqu’on est en excédent, on ne doit pas toujours se social du chômage vers la collectivité nationale et donc retourner vers l’Etat pour demander à la solidarité natio- sur l’Etat. nale d’intervenir, comme en 1992 alors que l’indemnisa- Dans tous les domaines, le MEDEF veut remettre en tion du chômage était en déficit. cause l’ensemble des avancées sociales dans notre pays. Il Il n’y a eu pour l’instant que des déclarations et une s’en prend au SMIC, à la sécurité sociale, aux retraites, première réunion. Mais croyez bien que le Gouvernement aux contrats de travail. sera extrêmement attentif aux discussions, notamment

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quant à deux points essentiels : la prise en compte de la D’une part, pouvez-vous exposer ici à la représentation précarité pour l’ouverture à indemnisation et l’indemnisa- nationale, en primeur − nous ne demandons pas l’exclusi- tion du chômage des jeunes, dont le nombre a diminué vité −, vos propositions concernant l’avenir des retraites ? de dix points par rapport au nombre de chômeurs cou- D’autre part et plus largement, quel est, d’après vous, verts par une indemnisation ces dix dernières années. le rôle que doit jouer un parlement dans une démocratie La négociation ne fait que commencer. Les rapports comme la nôtre ? Est-ce celui d’une simple chambre entre l’UNEDIC et l’Etat font partie du jeu. Nous les d’enregistrement, ... utiliserons pour faire en sorte que les problèmes des chô- Plusieurs députés du groupe de l’Union pour la démo- meurs français soient bien pris en compte. Je fais, pour cratie française-Alliance. Eh oui ! l’instant, confiance aux négociateurs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, M. Philippe Douste-Blazy. ... comme ce fut le cas en Citoyen et Vert.) d’autres temps ? M. le président. Nous reviendrons plus tard au groupe M. Jean-Pierre Michel. Avec le général de Gaulle, par communiste. exemple ! Nous en venons à une question du groupe de l’Union M. Philippe Douste-Blazy. S’il en est ainsi, monsieur le pour la démocratie française-Alliance. Premier ministre, nous aimerions vous rappeler, puisque, dans cet hémicycle, vous invoquez en toute occasion l’his- toire, que, depuis les débuts de la République, c’est le ROˆ LE DU PARLEMENT Parlement, notamment l’Assemblée nationale qui consent l’impôt et qui contrôle les dépenses de l’Etat. M. le président. La parole est à M. Philippe Douste- Ou bien alors pensez-vous, comme nous tous ici − je Blazy. dis bien : tous −, que le Parlement est un lieu ou après M. Philippe Douste-Blazy. Monsieur le président, je débat, et uniquement après débat, ce sont les députés, et vais poser ma question au nom du groupe UDF, mais uniquement les députés, qui donnent aux choix du Gou- également au nom des présidents des groupes RPR et vernement force de loi ? (Applaudissements sur les bancs du Démocratie libérale, M. Debré et M. Rossi. (Applaudisse- groupe de l’Union pour la démocratie française-Alliance, du ments sur les bancs du groupe de l’Union pour la démocratie groupe du Rassemblement pour la République et du groupe française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la Démocratie libérale et Indépendants.) République et du groupe Démocratie libérale et Indépen- M. le président. La parole est à M. le Premier dants. − Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et ministre. du groupe Radical, Citoyen et Vert.) M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le M. Albert Facon. Au nom de Tiberi ! député, depuis juin 1997 et ma déclaration de politique générale, sur toutes les grandes questions et dès qu’il avait Plusieurs députés du groupe socialiste. A la grotte, à voter des textes, le Parlement, et particulièrement cette Douste ! assemblée, a été parfaitement respecté par ce gouverne- M. Philippe Douste-Blazy. Notre question s’adresse à ment. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemble- M. le Premier ministre et concerne le bon fonctionne- ment pour la République, du groupe de l’Union pour la ment de nos institutions. démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libé- Monsieur le Premier ministre, jeudi dernier, vous avez rale et Indépendants.) choisi le journal télévisé de vingt heures pour annoncer le Il n’y a eu aucune grande question qui n’ait été débat- détail de vos mesures fiscales. tue ici quand vous l’avez souhaité. Je pense aux nom- Quarante-huit heures auparavant, ni votre ministre de breux débats que nous avons eus à l’occasion du conflit l’économie, des finances et de l’industrie ni son secrétaire du Kosovo, je pense au débat que nous avons eu sur d’Etat au budget n’avaient daigné en informer la commis- l’euro et l’engagement européen,... sion des finances. (« Hou ! hou ! » sur les bancs du groupe M. Rudy Salles. Zéro ! de l’Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe M. le Premier ministre. ... je pense aussi aux dis- du Rassemblement pour la République et du groupe Démo- cussions que nous avons eues sur les conséquences des cratie libérale et Indépendants.) tempêtes et de la marée noire. (Exclamations sur les bancs M. Jean-Claude Lenoir. C’est scandaleux ! du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l’Union pour la démocratie française-Alliance et du M. Philippe Douste-Blazy. Tout à l’heure, immédiate- groupe Démocratie libérale et Indépendants.) ment après les questions au Gouvernement, vous annon- cerez le détail de vos mesures concernant les retraites à A l’occasion de ces débats, nous avons indiqué ce que l’occasion d’une conférence de presse. nous faisions. (Exclamations sur les mêmes bancs.) Demain, nous discuterons des articles du projet de loi M. le président. Je vous en prie, chers collègues ! Un sur la liberté de communication, dans lequel sont mises peu de silence ! en place les chaînes thématiques numériques hertziennes M. le Premier ministre. Le Gouvernement et ses terrestres. Or votre ministre de la culture et de la ministres sont totalement disponibles pour l’Assemblée communication n’est même pas venue s’exprimer sur ce nationale,... point devant la commission des affaires culturelles, fami- liales et sociales, la semaine dernière. (Huées sur les bancs M. Rudy Salles. Ce n’est pas vrai ! du groupe de l’Union pour la Démocratie française-Alliance, M. le Premier ministre. ... que ce soit dans vos du groupe des Rassemblement pour la République et du commissions ou dans l’hémicycle. groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il vous est même arrivé, mesdames, messieurs les dépu- Notre question, monsieur le Premier ministre, est tés, de nous reprocher de trop légiférer. (Rires et exclama- double. tions sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la

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République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- çaise-Alliance, et du groupe Démocratie libérale et Indépen- çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- dants.) Mais il est vrai que nous avions une politique de dants. − Claquements de pupitres.) réformes, et que nous allons continuer de réformer. Quand il s’agit de l’impôt, quand il s’agit des dépenses, (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du quand il s’agit des retraites, ce sont les Français, dans leur groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. − ensemble, qui sont concernés, et ils méritent, eux aussi, Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement d’être informés en direct, du moment que vos préroga- pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- tives sont respectées. (Applaudissements sur les bancs du tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et groupe socialiste. − Huées sur les bancs du groupe du Ras- Indépendants.) semblement pour la République, du groupe de l’Union pour M. Philippe Briand. Parlez-nous de la réforme de la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie Christian Sautter ? libérale et Indépendants. − Claquements de pupitres.) Voilà, mesdames et messieurs les députés, ce que je M. le Premier ministre. Respecter le Parlement, ce voulais dire. n’est pas simplement respecter scrupuleusement les droits de l’opposition comme nous le faisons ; c’est aussi respec- Je me souviens d’un plan de sécurité sociale qui a été ter sa propre majorité. En trente-trois mois, ce gouverne- présenté devant l’Assemblée. Personne n’en a gardé un ment n’a jamais recouru une seule fois à l’article 49-3, très bon souvenir. (Applaudissements sur les bancs du contrairement aux gouvernements soutenus par l’actuelle groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radi- opposition. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe cal, Citoyen et Vert. − Huées sur les bancs du groupe du socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Rassemblement pour la République, du groupe de l’Union Citoyen et Vert. − Protestations sur les bancs du groupe du pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocra- Rassemblement pour la République, du groupe de l’Union tie libérale et Indépendants.) pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocra- M. Patrick Devedjian. La démocratie populaire ! tie libérale et Indépendants.) M. le président. Calmez-vous, je vous en prie ! Vous avez souhaité que le débat sur la « cagnotte » ait Nous en venons aux questions du groupe socialiste. lieu ouvertement. C’est pour cela, et aussi en raison des demandes qui sont venues de notre majorité, que nous avons décidé, ce qui est assez exceptionnel, d’ouvrir un LUTTE CONTRE LE RACISME collectif de printemps. Ainsi, la question des dépenses et M. le président. du surplus de recettes, fiscales et non fiscales, pourra être La parole est à M. Georges Frêche. traitée ouvertement. (Exclamations sur les bancs du groupe M. Georges Frêche. Monsieur le président, permettez- du Rassemblement pour la République, du groupe de moi tout d’abord, après vous, de saluer nos nouveaux col- l’Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe lègues, et particulièrement notre ami Jean-Claude Leroy, Démocratie libérale et Indépendants.) nouveau député du Pas-de-Calais. (M. Jean-Claude Leroy Il va de soi qu’en ce qui concerne le collectif bud- se lève. − Mmes et MM. les députés du groupe socialiste se gétaire les décisions seront prises par l’Assemblée car c’est lèvent à leur tour et applaudissent. − Plusieurs députés du à elle qu’il revient de voter l’impôt et d’autoriser les groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert dépenses. (Applaudissements sur les bancs du groupe socia- applaudissent également.) liste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et M. Philippe Briand. Deux à un ! (Exclamations sur plu- Vert. − Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemble- sieurs bancs du groupe socialiste.) ment pour la République, du groupe de l’Union pour la M. le président. Un peu de silence, s’il vous plaît ! Je démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libé- voudrais qu’on en revienne à la tradition de notre assem- rale et Indépendants.) blée ! Il en ira de même en ce qui concerne la question des Monsieur Frêche, vous avez seul la parole. retraites si des dispositions législatives doivent être arrê- tées. M. Georges Frêche. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la justice, garde des sceaux. M. Jean-Michel Ferrand. Démagogie ! La commission consultative des droits de l’homme a M. le Premier ministre. Mais, mesdames, messieurs les commandé, à l’occasion de la présentation du rapport députés, il ne faut pas, malgré les responsabilités qui sont annuel sur la lutte contre le racisme remis à M. le Pre- les nôtres, nous abstraire de la démocratie telle qu’elle mier ministre le 15 mars, un sondage auprès de la popu- fonctionne aujourd’hui. lation française. Les résultats en sont partiellement M. Jean-Michel Ferrand. Démagogie ! consternants. En effet, il apparaît notamment que 69 % des Français se déclarent plutôt racistes, un peu racistes M. le Premier ministre. C’est une démocratie de masse. ou un tout petit peu racistes, que 63 % jugent qu’il y a (Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la trop d’Arabes en France, que 21 % estiment qu’il y a République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- trop de Juifs, pendant que 31 % pensent que ces derniers çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- ont trop de pouvoirs. dants.) Ce sondage permet de mettre en évidence une ten- C’est une démocratie dans laquelle chacun de nos dance au durcissement de la société française à l’égard des concitoyens et concitoyennes exige d’être informé à questions liées à l’immigration. chaque moment des décisions que nous prenons. (Mêmes Personne aujourd’hui ne peut nier qu’il existe des atti- mouvements.) tudes et des actes toujours plus nombreux de discrimina- Nous veillons à informer largement les Français. tion raciale et d’antisémitisme dans notre vie quoti- (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du dienne : accès à l’emploi, accès au logement, accès aux groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. − loisirs, contrôles sélectifs dans nombre d’établissements de Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la loisirs, en particulier dans les discothèques.

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Tout le monde dans cette assemblée s’accordera à dire M. le Premier ministre a, en outre, présenté un plan que la France se doit de faire respecter les droits des de lutte contre les discriminations dans tous les étrangers en situation régulière dans notre pays, a fortiori domaines : l’accès au logement, le droit au travail, l’accès ceux des Français issus de l’immigration. Il y va de la aux loisirs et à la culture. Plus généralement, il a appelé à dignité de la France, depuis toujours terre d’asile et pays la mobilisation contre toutes les formes de discrimina- des droits de l’homme. tions ou de comportements racistes et xénophobes. La C’est dans cet esprit que le Gouvernement a mis en mise en œuvre d’un « numéro vert » permettra de venir place au niveau préfectoral des commissions départe- en aide à toute victime. mentales d’accès à la citoyenneté, les CODAC. Hélas ! Quant à l’action de la justice, sur laquelle porte plus beaucoup reste encore à faire. Ainsi, de nombreuses asso- précisément votre question, je voudrais rappeler que j’ai ciations se sont fait l’écho du manque de sanctions adressé, le 16 juillet 1998, une circulaire aux magistrats devant être appliquées aux auteurs de ces actes condam- du parquet les invitant à intensifier leur action dans le nables par la loi. En effet, le parquet hésite fréquemment domaine de la lutte antiraciste et à coopérer plus étroite- à engager des poursuites... ment avec tous les acteurs de la société. M. Francis Delattre. La question ! A l’heure actuelle, il est difficile, c’est vrai, d’apporter la preuve de ces discriminations devant la justice, et c’est M. Georges Frêche. ... du fait que la preuve est là tout le problème. Nos lois sont bonnes, mais leur souvent difficile à apporter dans ce type d’affaire, contri- application n’est pas satisfaisante compte tenu de la diffi- buant par là même à la banalisation du phénomène. culté d’apporter cette preuve. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement Que faire ? pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Le Gouvernement a pris des décisions que le Premier Indépendants.) ministre a annoncées samedi dernier. D’abord, il faut que les associations se mobilisent − Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour elles le font déjà − pour organiser ce que l’on appelle des la République. La question ! opérations de testing, c’est-à-dire des opérations où les M. Bernard Accoyer. Assez ! Posez votre question ! témoins puissent apporter la preuve d’une discrimination devant un tribunal. M. Georges Frêche. Messieurs, vous n’êtes pas obligés de vous faire les porte-parole de M. Le Pen ! (Protestations Ensuite, s’agissant des discriminations à l’embauche et sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la sur le lieu de travail, il convient d’aménager la charge de République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- la preuve pour permettre aux victimes d’obtenir plus faci- çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- lement réparation devant les juridictions civiles. D’ail- dants.) leurs, les directives européennes nous y invitent. Autre mesure essentielle : la question de la charge de la Au mois de juin prochain, le projet de loi de moderni- preuve a fait l’objet d’une réforme structurelle importante sation sociale, présenté par Mme Martine Aubry, contien- proposée samedi par M. le Premier ministre aux assises dra les dispositions dont je viens de parler : aménagement de la citoyenneté. Il appartiendra désormais au juge d’ap- de la charge de la preuve, possibilité pour les organisa- précier la discrimination au vu du dossier, et non plus à tions syndicales d’ester en justice, en lieu et place de leurs la victime d’en apporter la preuve. adhérents, et possibilité donnée aux inspecteurs du travail de dresser des procès-verbaux d’infractions. Madame la ministre, vous sachant attachée à la lutte contre le racisme, la xénophobie, l’antisémitisme comme Tout le monde est interpellé par le constat de la contre toutes les discriminations sociales ou sexistes, je Commission consultative des droits de l’homme, la jus- me permets de vous demander si toutes ces mesures tice, bien sûr, mais aussi toute la société. Les jeunes, les seront rapidement mises en place sur le plan juridique et moins jeunes aussi, qui sont victimes de discriminations si les instructions visant à traiter avec fermeté et intransi- − et qui, bien souvent sont Français − ne demandent pas geance ces actes délictueux pourront être données au par- l’intégration mais simplement l’égalité. Nous la leur quet ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe devons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste socialiste.) et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la SECTES justice. Monsieur le député, vous venez de rappeler l’ana- lyse de la commission consultative des droits de l’homme M. le président. La parole est à Mme Martine David. sur le racisme. Mme Martine David. Ma question s’adresse également Il est vrai que le constat est inquiétant. En effet, à Mme la garde des sceaux. Le procès de responsables de chaque acte discriminatoire est un déni de droit, une l’église de scientologie à Marseille en septembre dernier insulte au principe d’égalité qui fonde toute justice et avait été marqué par la destruction d’une quantité impor- aussi une violence qui mine le contrat social. tante de scellés judiciaires. Ces incidents fâcheux inter- Le Gouvernement est bien décidé à prendre à bras-le- venant un an après la disparition au palais de justice de corps ce difficile problème. C’est la raison pour laquelle Paris d’une partie d’un autre dossier lié à cette même le Premier ministre a organisé samedi dernier les assises organisation, il y avait tout lieu de diligenter une de la citoyenneté et qu’il a annoncé, à cette occasion, que enquête, ce qu’a évidemment fait la Chancellerie. Dès les commissions départementales d’accès à la citoyenneté lors, madame la ministre, pourriez-vous informer l’Assem- deviendront interministérielles afin que tous les services blée nationale de l’état d’avancement de cette enquête et, de l’Etat, dans chaque département, soient mobilisés sur le cas échéant, lui donner quelques indications sur les la question. premières conclusions qui en résultent ?

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Plus généralement, quelles dispositions avez-vous d’ores OTAGE FRANÇAIS EN TCHE´TCHE´NIE et déjà mises en œuvre pour garantir la confidentialité et l’impartialité indispensables à la bonne marche de la jus- M. le président. La parole est à Mme Martine tice française et prévenir le risque d’une instruction sec- Lignières-Cassou. taire dans le domaine particulièrement sensible qui Mme Martine Lignières-Cassou. Monsieur le ministre touche à la protection des citoyens ? (Applaudissements sur des affaires étrangères, le 1er octobre dernier, un jeune les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du reporter photographe, Brice Fleutiaux, a été enlevé en groupe Radical, Citoyen et Vert.) Tchétchénie, lors d’un reportage dans le Caucase qui M. le président. La parole est à Mme la garde des devait être de courte durée. Depuis cette date, il est sceaux. détenu dans des conditions difficiles, pour ne pas dire inhumaines, quelque part en Tchétchénie. Sa famille, ses Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la proches, le comité de soutien ne veulent pas perdre espoir justice. Madame la députée, vous avez rappelé l’incident et attendent une libération imminente. grave qui s’est produit au tribunal de grande instance de Je vous demande donc, monsieur le ministre, quelles Marseille. L’inspection des greffes s’est rendue immédiate- démarches sont entreprises par le Gouvernement afin ment à ma demande à Marseille et a confirmé l’origine d’obtenir sans délai la libération de ce ressortissant fran- accidentelle de la destruction des scellés dans son rapport. çais ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et Il s’agissait d’une erreur du greffe concernant l’interpréta- du groupe Radical, Citoyen et Vert.) tion d’une décision rendue par le tribunal de grande ins- tance de Marseille. M. le président. La parole est à M. le ministre des Nous avons pris des mesures pour éviter que de telles affaires étrangères. erreurs se reproduisent. Les affaires méritant une atten- M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. tion particulière sont désormais signalées par le parquet Madame la députée, j’ai eu, hélas ! plusieurs fois l’occa- par un moyen technique, l’apposition d’une pastille sur le sion dans le passé d’avoir à suivre des affaires d’otages, et dossier. Les connexions informatiques existant entre les je sais le calvaire que cela représente pour la famille, pour services des scellés et le service des archives pénales ont les proches, pour les amis. Je peux vous dire que dans été renforcées. Enfin, en cas de destruction de scellés, il a cette affaire, depuis la date de l’enlèvement, c’est-à-dire le été demandé que les fonctionnaires procèdent à des vérifi- 1er octobre, comme vous le rappeliez, les autorités fran- cations systématiques. çaises n’ont jamais cessé de s’en occuper un seul jour. Le Cette destruction accidentelle n’a heureusement pas président de la République, le Premier ministre et moi- empêché le tribunal de Marseille de rendre un jugement même avons saisi toute occasion de faire savoir aux auto- sur les affaires qui lui étaient soumises. Le tribunal a ainsi rités russes, en tout cas à toutes les autorités russes retenu la responsabilité pénale de cinq des sept personnes capables ou susceptibles d’avoir une influence utile sur sa prévenues. Elles ont été condamnées en novembre 1999 à libération, le prix que nous attachons à ce qu’il soit libéré des peines d’emprisonnement pour escroquerie et tenta- sain et sauf, et le plus tôt possible. Nous avons tous reçu tives d’escroquerie. sa famille. Je souhaite rappeler qu’il existe au sein du ministère de Je vous dirai simplement aujourd’hui, comme je le la justice une cellule spécialisée sur ces questions. Par ail- redis, à travers vous, à sa mère, à son père, à sa femme, à leurs, nous examinons en ce moment même avec la plus ses amis photographes, qui se sont mobilisés pour lui, grande attention les recommandations du rapport de la que nous ferons tout ce qui dépend de nous pour qu’il mission interministérielle de lutte contre les sectes qui a soit libéré le plus vite possible. (Applaudissements sur les été remis dernièrement par M. Alain Vivien au Premier bancs du groupe socialiste.) ministre. Nous avons pris une première mesure dans le projet de loi relatif à la présomption d’innocence pour ACCÈS AUX SERVICES PUBLICS favoriser l’action en justice des associations de lutte DE LA POSTE ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS contre le phénomène sectaire. Nous examinons également la question de la dissolution judiciaire des personnes M. le président. La parole est à M. François Brottes. morales exerçant des activités sectaires. Ces questions feront l’objet d’une discussion devant votre assemblée à M. François Brottes. Ma question s’adresse à M. le l’occasion de l’examen prochain d’une proposition de loi. secrétaire d’Etat à l’industrie. Enfin, j’ai adressé en décembre 1998 une circulaire aux A l’heure de l’effervescence autour d’Internet, l’escalade parquets pour mettre en place, dans chaque cour d’appel, − parfois virtuelle, reconnaissons-le − du monde des nou- un magistrat chargé de coordonner l’action de lutte velles techniques de communication doit nous rendre contre les phénomènes sectaires. D’ores et déjà, plusieurs encore plus vigilants pour garantir l’accès de tous, surtout groupes de travail fonctionnent en collaboration avec les des plus défavorisés, à l’utilisation sans discrimination des associations de lutte contre les sectes. Nous avons dressé moyens plus classiques de communication, comme le un premier bilan en septembre 1999 et je crois pouvoir téléphone fixe ou le courrier. dire que les parquets sont maintenant bien mobilisés. Sur cette question centrale de l’accès au service public Bien entendu, cet ensemble de mesures ne dispense pas des échanges et des communications, monsieur le secré- d’une vigilance accrue contre les menaces qui pourraient taire d’Etat, je veux vous interroger sur deux points, aux- être portées contre nos concitoyens. Madame la députée, quels, je le sais, vous accordez une grande importance. je vous remercie de m’avoir permis de faire le point Vous venez de confirmer le dispositif d’accès aux tarifs (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement sociaux pour le téléphone fixe. Pouvez-vous nous préciser pour la République) sur les mesures que nous avions prises les modalités et les échéances de sa mise en œuvre ? et que nous allons prendre dans les prochains jours. Par ailleurs, dans quelques semaines, vous allez évoquer (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du avec vos collègues européens la fièvre de libéralisation qui groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) s’empare encore une fois des commissaires européens à

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propos du secteur réservé à La Poste en matière de cour- Rassemblement pour la République, du groupe de l’Union rier. Quelle sera la position de la France ? (Applaudisse- pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocra- ments sur les bancs du groupe socialiste, du groupe commu- tie libérale et Indépendants)... niste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) M. Pierre Lellouche. Plusieurs pays européens ont pri- M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’Etat vatisé ! à l’industrie. M. le secrétaire d’Etat à l’industrie. L’Union postale M. Christian Pierret, secrétaire d’Etat à l’industrie. Mon- universelle a en effet confirmé, dès l’année dernière, que sieur le député, un des axes forts de la politique du Gou- c’était son orientation à la quasi-unanimité. Les syndicats vernement est en effet le renforcement du service public, européens membres de l’Internationale des communica- notamment dans le domaine des communications et des tions abondent unanimement dans ce sens. En outre, télécommunications. nous avons reçu l’accord de dix postes européennes très Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour récemment. Enfin, une résolution du Parlement européen la République et du groupe Démocratie libérale et Indé- a confirmé ces orientations en faveur du service public. pendants. Et celui des finances ! Je suis très heureux de pouvoir l’annoncer à l’Assem- A la première partie de votre question, je réponds de blée nationale : nous serons très fermes sur le maintien et manière très précise. Il s’agit, pour les plus démunis, de le développement du service public des télécommunica- favoriser un accès au service téléphonique à un coût abor- tions et de La Poste. (Applaudissements sur les bancs du dable. Pour cela, les titulaires du RMI, de l’ASS, de groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. − l’allocation adulte handicapé et les invalides de guerre, Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement sans qu’ils aient à faire de démarches, recevront un for- pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- mulaire,... (Exclamations sur plusieurs bancs du Rassemble- tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et ment pour la République.) Indépendants.) M. Pierre Lellouche. Bravo ! Un formulaire ! M. le président. Nous en venons à une question du M. le secrétaire d’Etat à l’industrie. ... qui, une fois groupe Radical, Citoyen et Vert. rempli, leur permettra de bénéficier automatiquement d’une réduction du prix de l’abonnement de 78 francs − abonnement normal − à 45 francs par mois. C’est donc OMC une procédure simple et immédiate. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) M. le président. La parole est à M. Yves Cochet. Quant à La Poste, la Commission européenne semble M. Yves Cochet. Monsieur le secrétaire d’Etat au vouloir faire évoluer la directive actuelle, qui est commerce extérieur, ma question a trait à l’OMC. conforme aux orientations défendues par la France, dans Il y a quelques semaines s’est tenue à Bangkok une un sens ultralibéral, comme l’avez dit. (Exclamations sur réunion de la Conférence des Nations unies sur le les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) commerce et le développement − la CNUCED − au M. Philippe Briand. Pas de gros mots ! cours de laquelle les déclarations d’intention furent d’au- M. le secrétaire d’Etat à l’industrie. Je tiens, et je tant plus généreuses qu’elles étaient moins contraignantes continuerai à tenir le langage de la fermeté vis-à-vis de la pour le commerce international. Par ailleurs, il y a quel- Commission,... ques mois, à Montréal, a été adopté un protocole sur la biosécurité, protocole assez intéressant mais dont on peut M. Pierre Lellouche. Avec un formulaire ? se demander de quelle manière il sera pris en compte par M. le secrétaire d’Etat à l’industrie. ... comme je l’ai l’OMC. exprimé au commissaire Bolkestein, dès le mois de La légitimité est du côté de l’ONU, mais la puissance novembre 1999. est du côté de l’OMC. Autrement dit, il y a une sorte Nous ne voulons pas de libéralisation programmée, d’étanchéité entre le droit international et le commerce même partielle, de la directive actuellement en vigueur mondial. Alors que les négociations sur les services puis dont l’application convient aux différents gouvernements sur l’agriculture vont reprendre, je vous poserai trois européens. questions, monsieur le secrétaire d’Etat. Nous voulons le maintien du monopole dans la durée D’abord, la France et l’Europe vont-elles tenter d’ex- et nous ne voulons pas de possibilité de contournement. clure les services publics du champ d’application de M. Pierre Lellouche. Voyez France Télécom, monsieur l’OMC ? Pierret ! Ensuite, vont-elles défendre le principe de multi- M. le secrétaire d’Etat à l’industrie. Pourquoi ? Tout fonctionnalité de l’agriculture, en cohérence avec le pro- simplement pour financer le service public et garantir la tocole de Montréal ? péréquation des tarifs. Enfin, comme le commissaire Lamy semble assez pressé Mais nous voulons aussi imprimer une vision dyna- de recommencer le cycle des négociations, savez-vous où, mique à ce service universel dont il faut enrichir le quand et sur quel ordre du jour il s’ouvrira ? (Applaudisse- contenu, en termes d’accessibilité pour tous, notamment ments sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur pour les plus défavorisés, et en termes de qualité de ser- quelques bancs et du groupe socialiste.) vice, en réduisant les délais de transfert du courrier d’un M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’Etat pays à un autre ou d’une agglomération à une autre. au commerce extérieur. M. Pierre Lellouche. Soyez donc sérieux ! M. François Huwart, secrétaire d’Etat au commerce exté- M. le secrétaire d’Etat à l’industrie. La France, à cet rieur. Monsieur le député, je reviens précisément d’un égard, mesdames et messieurs les députés, n’est pas du conseil informel des ministres du commerce extérieur à tout isolée. (Vives exclamations sur les bancs du groupe du Porto, où nous avons évalué la situation après Seattle et

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défini la stratégie que l’Union devait tenir dans les mois à groupe socialiste.) Vous nous confirmez que vous préférez venir. A cette occasion, j’ai réaffirmé la position de la les débats avec la presse plutôt qu’avec les députés, ce qui France qui est en faveur d’un cycle large équilibrant libé- est consternant de la part d’un premier ministre. (Applau- ralisation et régulation. dissements sur quelques bancs du groupe Démocratie libérale Dans cette perspective, il nous paraît difficile que le et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la cycle puisse repartir cette année, et cela pour plusieurs République et du groupe de l’Union pour la démocratie raisons. D’abord, les élections américaines pèsent, aujour- française-Alliance.) d’hui comme hier, sur les circonstances. Ensuite, nous Dimanche dernier, malgré l’annonce, dans la semaine, avons un vrai travail à faire en direction des pays en voie du saupoudrage de la cagnotte en mesures électoralistes et de développement, auxquels nous devons envoyer des clientélistes, la gauche a été battue dans deux circonscrip- signes clairs et proposer des mesures concrètes − je me tions qui lui semblaient pourtant acquises. (Applaudisse- félicite de ce point de vue que la CNUCED ait permis ments sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indé- d’améliorer les choses. Il y a aussi un travail de légitimité, pendants, du groupe du Rassemblement pour la République à faire pour l’OMC − vous en parliez. Enfin, il nous faut et du groupe de l’Union pour la démocratie française- expliquer nos positions sur les questions de l’environne- Alliance. − « Et Vasseur ? » sur plusieurs bancs du groupe ment et des normes sociales, qui sont parfois incomprises. socialiste.) Au total, le sommet de Porto aura confirmé nos posi- tions. Il faut s’en réjouir. M. le président. Un peu de calme. Acheminez-vous vers votre conclusion, monsieur le député. Je me félicite comme vous, monsieur le député, de ce que l’accord de Montréal ait reconnu le principe de pré- M. Franck Dhersin. Le groupe Démocratie libérale se caution en le plaçant sur le même plan que les règles de félicite de ces résultats. Ils prouvent que les Français, qui l’OMC. Mais l’étanchéité entre le droit international et ont dû subir plus de 420 milliards de francs de prélève- les règles de l’OMC que vous craignez ne me paraît pas ments supplémentaires en deux ans et demi, n’ont pas été du tout inéluctable. dupes du plan du Premier ministre qui ne porte que sur S’agissant des négociations qui reprennent à Genève, je 40 milliards de francs. (Applaudissements sur les bancs du vous confirme que le gouvernement français n’entend en groupe Démocratie libérale et Indépendants.) aucune façon négocier sur les services publics. (Applau- Les effets d’annonce sur lesquels vous surfez depuis dissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.) 1997 ne trompent plus personne. Votre méthode prend M. Pierre Lellouche. On l’a vu à Bercy ! de plus en plus l’allure d’une spirale de l’échec : échec électoral ; échec à Bercy avec le retrait peu glorieux de la M. le secrétaire d’Etat au commerce extérieur. Le sys- réforme de la direction des impôts ; échec à l’éducation tème fonctionne par ordre positif ; il n’est pas question nationale avec 200 000 manifestants dans les rues il y a de le remettre en cause. quelques jours. Sur l’agriculture, les négociations reprendront à leur L’ampleur de cet échec est telle qu’elle a incité Pierre rythme. Comme elles seront conduites sur la base de Mauroy, ancien premier ministre, à effectuer à la va-vite l’article 20, nous aurons la possibilité de débattre de la la fusion de sa commune, Lille, avec la commune de multifonctionnalité et de la spécificité de l’agriculture. Lomme, réputée traditionnellement à gauche. (Protesta- Enfin, s’agissant de l’information du Parlement, vous le tions sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la savez, plusieurs réunions ont eu lieu. J’ai réuni, le 2 mars, République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- à Bercy,... çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- dants, protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Où ça ? (Sourires.) Face à la montée du mécontentement et pour accroître les chances de succès de Martine Aubry, le Gouverne- M. le secrétaire d’Etat au commerce extérieur. ... ment a oublié son prétendu sens de la morale (Exclama- l’ensemble des représentants du Parlement et de la société tions sur les bancs du groupe socialiste) en acceptant, à civile concernés. J’ai l’intention de poursuivre ce dialogue moins d’un an des élections municipales, une fusion de dans les mois à venir autour de tables rondes spécifiques. communes qui pèsera sans aucun doute sur les résultats (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour la démo- de mars 2001. (Exclamations sur les mêmes bancs.) cratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Cette année, les Lillois ont eu Lomme, ils auront la Indépendants.) femme l’année prochaine. (Vives exclamations sur les bancs Le dialogue a eu lieu avant et pendant Seattle ; il aura du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe lieu après Seattle, ainsi que l’a souhaité le Premier Radical, Citoyen et Vert.) Telle est certainement votre ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socia- conception de la parité ! liste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Cette fusion aux objectifs purement électoraux pose M. le président. Nous passons au groupe Démocratie une série de questions. (Mêmes mouvements.) libérale et Indépendants. M. le président. Mes chers collègues, un peu de silence. M. Dhersin va pouvoir achever rapidement de FUSION DES COMMUNES poser ses diverses questions. DE LILLE ET DE LOMME M. Franck Dhersin. Premièrement, ne conviendrait-il pas, dans un souci du respect du vote des électeurs, d’in- M. le président. La parole est à M. Franck Dhersin. terdire toute fusion dans l’année qui précède des élections M. Franck Dhersin. Monsieur le Premier ministre, nous municipales ? ne pouvons qu’être désolés par la réponse que vous avez Deuxièmement, ne devrait-on pas prévoir qu’une faite à M. Douste-Blazy au sujet de votre conférence de fusion qui a d’importantes conséquences tant électorales presse sur les retraites. (Protestations sur les bancs du qu’économiques et sociales donne lieu à un référendum ?

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Les habitants de Lomme voulaient ce référendum. Mais Quant aux conflits, l’un est circonstanciel. Il est dû à ils n’ont été entendus ni par Pierre Mauroy ni par votre une réforme souhaitable... ministre candidate, Mme Aubry ! M. Jean-Michel Ferrand. Alors, faites-la ! Une nouvelle fois, vos amis et vous-même avez imposé la méthode au détriment de la concertation. (Protestations M. le Premier ministre. ... qui a fait pour l’instant sur les bancs du groupe socialiste.) l’objet d’un retrait, afin de rouvrir autrement la dis- Plusieurs députés du groupe socialiste. La question ! cussion. (Rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- M. Franck Dhersin. Les citoyens n’ont pu s’exprimer tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et face à cette nouvelle manipulation. Décidément, le Gou- Indépendants.) Et je me réjouis à cet égard que les respon- vernement « vire à l’aigre ». (Exclamations sur les bancs du sables syndicaux continuent de dire qu’il est effectivement groupe socialiste.) En tout cas, cela ne saurait tarder. souhaitable de réformer pour mieux servir les contri- (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libé- buables et les Français. (Huées sur les bancs du groupe du rale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la Rassemblement pour la République, du groupe de l’Union République et du groupe de l’Union pour la démocratie pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocra- française-Alliance.) tie libérale et Indépendants.) M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. M. le président. S’il vous plaît ! M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le M. le Premier ministre. L’autre conflit, tout aussi député, j’ai pensé tout d’abord que vous m’interpelliez ponctuel, concerne l’enseignement. Mais, monsieur le sur des questions concernant l’ensemble du pays. Puis, député, même avec les 200 000 manifestants auxquels j’ai constaté que votre angle de vision s’était progressive- vous avez fait allusion, nous sommes loin du million que ment rétracté jusqu’à évoquer les problèmes d’une fusion M. Bayrou, alors ministre de l’éducation, avait rassemblé entre Lille et Lomme ! (Rires sur les bancs du groupe socia- contre lui dans les rues ! (Applaudissements sur les bancs du liste.) groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) S’agissant du collectif budgétaire, qui constitue pour le D’une manière générale, nous constatons que le nombre Parlement l’occasion de débattre de la cagnotte et des des conflits sociaux est en recul dans notre pays aujour- choix budgétaires, il n’y a, contrairement à ce que vous d’hui. indiquez, aucun saupoudrage. Enfin, s’agissant de la fusion entre Lomme et Lille, M. Maurice Leroy. C’est de l’arrosage ! cette décision a été prise, à ma connaissance, conformé- ment à la loi. Elle n’appelle donc pas d’observation parti- M. le Premier ministre. Les allégements d’impôt, que culière. Puisque M. Douste-Blazy m’interrogeait tout à vous appeliez de nos vœux, sont massifs. Vous reprochiez l’heure, je note qu’il y a aussi ceux qui font fusionner au Gouvernement de ne pas trancher. Eh bien, nous Lourdes et Toulouse. Je ne sais s’ils en avaient informé avons décidé de réduire la taxe d’habitation et les les parlementaires mais, en tout cas, ils n’en avaient rien tranches inférieures de l’impôt, disposition dont profite- dit aux Lourdais. (Applaudissements sur les bancs du groupe ront aussi, par report, les tranches supérieures, et de socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. − Protesta- diminuer d’un point la TVA. Cette dernière mesure tions et huées sur les bancs du groupe du Rassemblement bénéficiera tant aux couches populaires qu’aux classes pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- moyennes qui économisent et qui pourront acheter, par tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et exemple, une automobile puisque les constructeurs ont Indépendants.) annoncé qu’ils appliquaient d’ores et déjà cette baisse. Il n’y a donc pas eu saupoudrage, mais au contraire concen- M. Yves Fromion. Et la fusion Blois-Paris ? tation d’un effet d’allégement d’impôt, socialement juste M. le président. Nous en venons aux questions de et économiquement bon. (Applaudissements sur les bancs groupe du Rassemblement pour la République. du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. − Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) M. le président. La parole est à Jean-Marie Geveaux. De même, nos priorités concernant les dépenses (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement induites par les tempêtes qui ont frappé la France, les pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- problèmes de l’hôpital public et la question de l’éduca- tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et tion étaient fort bien adaptées. Indépendants.) M. Philippe Briand. Les profs sont dans la rue ! M. Jean-Marie Geveaux. Madame la ministre de Un député du groupe de l’Union pour la démocratie l’emploi et de la solidarité, l’application de la CMU pose Français-Alliance. Et Bercy ? de graves problèmes, ce qui ne nous étonne pas. En effet, M. le Premier ministre. La situation économique dans mes collègues de l’opposition vous avaient mis en garde, notre pays est caractérisée par une croissance forte, un tout au long de la la discussion de cette loi. Aujourd’hui, investissement actif, une consommation soutenue, une les faits leur donnent raison. Les caisses d’assurance mala- baisse du chômage, une maîtrise des prix et un excédent die sont submergées. Le personnel n’est pas préparé, et ce commercial. Voilà des éléments dont les Français peuvent sont tous les assurés qui en subissent les conséquences. se réjouir et dont vous devez vous réjouir avec nous. Quant aux professionnels de santé, ils sont inquiets et (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du démobilisés, n’arrivant pas à se faire rembourser. groupe Radical, Citoyen et Vert. − Protestations sur les Madame la ministre, que répondez-vous aux infir- bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du mières et aux généralistes installés dans des secteurs où groupe de l’Union pour la démocratie française-Alliance et vivent de nombreux bénéficiaires de la CMU alors que du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) leur tiers-payant ne fonctionne pas ? Qu’allez-vous dire

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aux personnes exclues en raison des effets de seuil ? maladie universelle, ou des accords, tels ceux que nous Qu’allez-vous faire de tous ceux qui bénéficiaient d’une venons de signer avec l’hôpital et qui lui permettront de aide médicale gratuite aussi avantageuse que la CMU et mieux remplir sa mission de service public. Si l’on entend dont les ressources sont supérieures au plafond ? D’ici au bien les critiques de l’opposition, on attend toujours ses mois de juillet, ils seront exclus du dispositif. Quant aux propositions, et les Français avec nous ! (Exclamations sur mutuelles, elles sont mises hors jeu du seul fait que les les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, caisses primaires d’assurance maladie conservent 80 % de du groupe de l’Union pour la démocratie française-Alliance la couverture complémentaire. Elles participent pourtant et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. − au financement de la CMU. Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du Alors, madame la ministre, que comptez-vous faire groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du pour remédier à ces dysfonctionnements ? (Applaudisse- groupe communiste.) ments sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- ÉDUCATION NATIONALE çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- dants.) M. le président. La parole est à M. Bruno Bourg-Broc. M. Bruno Bourg-Broc. Ma question s’adresse à M. le M. Yves Fromion. Rien ! Premier ministre. M. le président. La parole est à Mme la ministre de Je commencerai par une citation : « La seule politique l’emploi et de la solidarité. valable pour ce Gouvernement, c’est le dialogue. Et le Mme Martine Aubry, ministre de l’emploi et de la soli- dialogue suppose la compréhension. » Ainsi s’exprimait, darité. Monsieur le député, les trois millions de personnes jeudi soir dernier, le professeur Jospin, réprimandant son bénéficiant dès à présent de la couverture maladie univer- mauvais élève Allègre. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe selle et les trois autres millions qui en profiteront dans les du Rassemblement pour la République, du groupe de mois à venir, dès qu’ils auront décidé de s’inscrire, appré- l’Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe cieront comme il se doit les propos de l’opposition selon Démocratie libérale et Indépendants.) Vendredi, ce fut au lesquels soigner gratuitement six millions de personnes tour du premier secrétaire du parti socialiste, François dans notre pays constitue une erreur magistrale. (Applau- Hollande, de tancer vertement le ministre de l’éducation dissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radi- nationale. Enfin, hier, le secrétaire national du parti cal, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe commu- socialiste en charge de l’éducation sonnait l’hallali en niste.) réclamant à mots couverts sa tête. Certes, vous n’étiez pas là au moment du vote de cette M. Didier Boulaud. Et Tiberi ? Que dit-il ? loi, mais vous êtes solidaire de vos amis qui, eux, ont Mme Odette Grzegrzulka. Et Françoise de Panafieu, voté contre. que dit-elle sur Tiberi ? La Caisse nationale d’assurance maladie qui, comme M. Bruno Bourg-Broc. Mais toutes vos admonestations vous le rappelez souvent, est gérée par le patronat et les publiques n’y changeront rien. En effet, la situation est syndicats, nous avait demandé 1 400 emplois supplé- complètement bloquée par votre méthode et votre poli- mentaires pour traiter les problèmes de la couverture tique. Monsieur le Premier ministre, l’immobilisme élec- maladie universelle. Elle a eu satisfaction. Mais comme toraliste n’est pas vertu. Les élèves, les professeurs, les les caisses sont aujourd’hui confrontées à un surcroît d’or- parents d’élèves demandent un projet éducatif répondant donnances à cause de l’épidémie de grippe (Exclamations aux véritables enjeux du XXIe siècle. Ce n’est pas une et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la simple question d’argent. Votre milliard ne résoudra pas République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- les problèmes posés. Alors, monsieur le Premier ministre, çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- quelles réponses allez-vous apporter aux professeurs et aux dants)... parents d’élèves en colère ? M. Bernard Accoyer. Ce n’est pas vrai ! M. le président. La parole est à Mme la ministre délé- guée chargée de l’enseignement scolaire. (Vives protesta- Mme la ministre de l’emploi et de la solidarité. Je ne tions sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la fais que rapporter les propos du président, qui est parfois République, du groupe de l’Union pour la démocratie libé- votre référence, messieurs ! rale et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) ... Comme leur nouveau système informatique leur Du calme ! Seule Mme Royal a la parole ! cause des difficultés, j’ai décidé de leur allouer 600 contrats à durée indéterminée complémentaires et Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de 500 contrats à durée déterminée. Tout comme vous, je l’enseignement scolaire. Merci, monsieur le président. regrette que la caisse nationale, qui emploie aujourd’hui (« Allègre ! Allègre ! » sur les bancs du groupe du Rassemble- 90 000 salariés, ne soit pas à même de répartir ses res- ment pour la République, du groupe de l’Union pour la sources de façon à éviter les retards accumulés qui démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libé- existent aujourd’hui en Ile-de-France. rale et Indépendants.) Cela étant, monsieur le député, j’appelle l’opposition à M. le président. Cette attitude n’est pas admissible un peu plus de cohérence. Elle ne peut pas être contre la dans l’hémicycle ! Une question a été posée, la réponse loi de financement de la sécurité sociale, au prétexte que doit être maintenant écoutée dans le silence. (« Allègre ! nous donnerions trop d’argent à l’hôpital, puis nous Allègre ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la montrer du doigt trois semaines plus tard parce qu’un République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- conflit se développait à l’hôpital. (Applaudissements sur les çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et dants.) Vert.) Oui, le Gouvernement avance, et vous ne pouvez Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement pas lui reprocher à la fois son immobilisme et son action. scolaire. Monsieur le député (Mêmes mouvements sur les Il propose des lois de progrès social, telle la couverture mêmes bancs)...

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M. le président. Messieurs, je veux que la démonstra- giques et scientifiques présenté le 15 mars dernier, et qui tion soit faite de vos méthodes. (Huées sur les bancs du avait été commandé par notre assemblée à la suite de la groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de décision de votre gouvernement, le 2 août dernier, l’Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe d’abandonner la construction en France d’un synchrotron Démocratie libérale et Indépendants.) de troisième génération. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe M. Jacques Blanc. Allons, monsieur le président ! de l’Union pour la démocratie française-Alliance et du M. le président. Je n’ai certainement pas de leçon à groupe Démocratie libérale et Indépendants.) recevoir de vous, monsieur Blanc ! (Applaudissements sur Ce rapport adopté à l’unanimité des membres de les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du l’Office, donc de vos amis, est un désaveu grave pour groupe Radical, Citoyen et Vert. − Exclamations et claque- votre ministre de l’éducation et votre Gouvernement. ments de pupitres sur les bancs du groupe du Rassemblement (Huées sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- la République, du groupe de l’Union pour la démocratie tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indé- Indépendants.) pendants.) En effet, s’il confirme bien qu’une collabora- Je demande à tous, sur tous les bancs, de se taire, y tion franco-britannique est une voie qu’il convient d’ex- compris à vous, monsieur Kucheida ! plorer, il conclut toutefois à la nécessité de construire dans les plus brefs délais une source de synchrotron en Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement France dans une région bien desservie et à vocation scien- scolaire. Dites quelque-chose, madame Alliot-Marie ! tifique affirmée pour couvrir la totalité des besoins. Ces Bravo pour le respect dû aux femmes ! C’est vraiment propos confirment ce que disent l’opposition et la lamentable ! communauté scientifique depuis plusieurs mois. M. le président. Reprenez, madame la ministre. Monsieur le Premier ministre, allez-vous suivre les Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement recommandations de ce rapport ? Allez-vous prendre la scolaire. Monsieur le député, d’abord je suis heureuse décision de construire dans les plus brefs délais un syn- que vous ayez retenu les excellentes leçons du Premier chrotron de troisième génération en France ? Cela per- ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassem- mettrait de remotiver la communauté scientifique qui en blement pour la République, du groupe de l’Union pour la a bien besoin et de conserver à notre pays l’avance qu’il démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libé- avait en ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du rale et Indépendants.) Il a, en effet, répondu aux attentes groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de en acceptant une discussion sur l’augmentation des l’Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe emplois et des moyens budgétaires consacrés à l’éducation Démocratie libérale et Indépendants.) sur plusieurs années. M. le président. La parole est à M. le ministre de En conséquence, une vraie négociation s’engagera dans l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie. les semaines à venir, dans le cadre d’une sérénité retro- M. Claude Allègre, ministre de l’éducation nationale, de uvée dans les établissements scolaires afin de définir un la recherche et de la technologie. Monsieur le député, j’ai plan pluriannuel d’amélioration de l’éducation nationale bien reçu le rapport parlementaire sur le synchrotron. qui s’appliquera dès la rentrée scolaire prochaine. Ce plan Par-delà les remarques de forme, pourquoi n’a-t-on pas sera défini à partir de l’analyse des besoins et des amélio- entendu le ministre avant de le rédiger ? Pourquoi avoir rations qualitatives tant au niveau national qu’au niveau fait croire qu’on avait consulté l’Allemagne, la Suède et la de chaque académie, c’est-à-dire au plus près du terrain. Grande-Bretagne alors qu’on n’a interrogé que les direc- M. Philippe Briand et M. Renaud Muselier. Madame la teurs de synchrotrons de ces pays ? ministre, c’est M. Bourg-Broc qui vous a posé la ques- M. Jean-Antoine Leonetti. Ce n’est pas la question ! tion. Pourquoi regardez-vous M. Allègre en répondant ? M. le ministre de l’éducation nationale, de la Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement recherche et de la technologie. Pourquoi prétendre qu’il scolaire. Sur la base de cet engagement, fondé sur la a été adopté à l’unanimité alors que Georges Charpak, confiance de la parole donnée, enseignants, parents, Guy Ourisson et Jean-Pierre Changeux ne sont pas élèves, responsables académiques à tous les niveaux, sans d’accord. oublier les collectivités locales pour la qualité des locaux Cela dit, ce rapport est intéressant. J’ai noté qu’il scolaires, se mobiliseront tous ensemble pour que les approuvait le projet franco-britannique prévu à Oxford, réformes et la transformation de l’éducation continuent mais qu’il demandait aussi plus de rayonnement synchro- au service de la réussite des élèves. (Applaudissements sur tron. (« Eh oui ! » sur divers bancs du groupe du Rassemble- les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen ment pour la République, du groupe de l’Union pour la et Vert et sur divers bancs du groupe communiste. − Excla- démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libé- mations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la rale et Indépendants.) Pour l’heure, nous l’étudions. Nous République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- le transmettrons ensuite au groupe européen des grands çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- équipements. dants.) J’ai noté également avec plaisir que vous souhaitiez que les grands équipements soient installés en France, et j’en SYNCHROTRON DE TROISIÈME GÉNÉRATION suis d’accord. Mais faut-il un nouvel équipement en Ile- de-France ? Ou un synchrotron associant la France, la M. le président. La parole est à M. Pierre Lasbordes. Grande-Bretagne, la Belgique et la Hollande pour la bio- logie dans le Nord ? Ou bien un centre européen de laser M. Pierre Lasbordes. Monsieur le Premier ministre, je de puissance en Aquitaine et dans les Landes ? Ou encore souhaite vous interpeller sur les conclusions du rapport de un centre de neutrons rapides pour étudier les déchets l’Office parlementaire d’évaluation des choix technolo- nucléaires en PACA ? A moins qu’il ne faille renouveler

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la flotte océanographique française et donner du même Mme Frédérique Bredin. Très bien ! coup des moyens à la construction navale ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la M. le président. La parole est à M. le ministre de l’in- République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- térieur. çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- dants.) Faut-il aider l’Est ou la Bretagne ? M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’intérieur. Mesdames, messieurs, le Gouvernement se soucie de Monsieur le député, en interrogeant le Gouvernement sur l’aménagement du territoire. Il étudiera ces problèmes le droit de vote des étrangers aux élections municipales, dans un cadre général et associera bien entendu le Parle- vous posez la question très vaste des liens entre citoyen- ment à cette réflexion. (Applaudissements sur plusieurs neté et nationalité. Si les citoyens français ont la respon- bancs du groupe socialiste. − Huées sur les bancs du groupe sabilité de l’avenir de la France, de son influence, de son du Rassemblement pour la République, du groupe de rayonnement, de sa cohésion, on ne peut demander la l’Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe même chose à des étrangers qui ont préféré conserver la Démocratie libérale et Indépendants.) nationalité de leur pays d’origine, ce qui est d’ailleurs leur M. le président. Nous en revenons à une question du droit. Pour autant, en vertu du traité de Maastricht, les groupe communiste. étrangers ressortissants de l’Union européenne peuvent voter aux élections municipales. DROIT DE VOTE DES ÉTRANGERS La question que vous posez, monsieur le député, a déjà AUX ÉLECTIONS MUNICIPALES été évoquée au sein de la majorité plurielle. Votre groupe a déposé une proposition de loi. Quant au groupe socia- M. le président. La parole est à M. Bernard Birsinger. liste, il a également déposé une proposition de loi consti- M. Bernard Birsinger. Monsieur le président, chers col- tutionnelle visant à accorder le droit de vote et l’éligibilité lègues, ma question s’adresse à M. le Premier ministre. aux élections municipales aux étrangers non ressortissants Le 21 mars est la journée internationale de lutte contre de l’Union européenne résidant en France. Le Mouve- le racisme. De très nombreuses initiatives se tiennent ment des citoyens a adopté une attitude d’ouverture pour dans le pays pour faire reculer ce fléau. Et nous nous féli- que le droit de vote puisse être accordé au moment du citons que le Gouvernement ait annoncé samedi des renouvellement de la carte de dix ans, mais seulement mesures visant à lutter contre les actes racistes dans le tra- pour les élections locales et, à ma connaissance, les Verts vail et le logement. ont réagi de la même façon. S’agissant des groupes de Mais peut-être pourriez-vous, monsieur le Premier l’opposition, j’ai cru entendre M. Barre dire quelque ministre, aller plus loin en ce jour symbolique et en finir chose d’analogue. avec une discrimination majeure qui frappe les étrangers Sur un tel sujet, il faut éviter de lancer un brûlot qui non communautaires. Je parle bien évidemment du droit aurait pour seul effet de ressusciter des passions malsaines. de vote et d’éligibilité pour les élections municipales. Nous devons faire un effort de conviction, de rassemble- L’apport de ces hommes et de ces femmes à la société ment pour que de telles dispositions, concernant les élec- française est en effet considérable. Ce progrès démocra- tions locales seulement, n’interviennent que dans le cadre tique vers l’égalité des droits permettra aux habitants de d’un large consensus. nos villes de mieux vivre ensemble. J’irai même plus loin : pour promouvoir une nouvelle démocratie, une Cela dit, monsieur le député, il faut garder le sens du citoyenneté qui associe chacune et chacun aux grands relief et se rappeler que les quelque 2 millions de jeunes choix collectifs, nous avons besoin d’eux. C’était d’ailleurs nés des dernières vagues de l’immigration et possédant la un des grands engagements de 1981 et cela reste aussi un nationalité française connaissent un taux de chômage des grands rendez-vous manqué de cette période. double, voire triple, de celui des autre jeunes. Le Gouver- Aujourd’hui, cette exigence est majoritaire dans notre nement a donc organisé les Assises de la citoyenneté et le peuple. De nombreuses associations ont pris une part Premier ministre a annoncé toute une série de mesures, décisive dans cette évolution. Je pense particulièrement à notamment l’octroi de 5 000 bourses de service public, celles qui se sont regroupées au sein du collectif « Même de 10 000 bourses au mérite pour favoriser l’accès à la sol, mêmes droits, même vote ». En octobre dernier, le fonction publique, ainsi que des dispositions facilitant la groupe communiste a déposé une proposition de loi qui a naturalisation pour des jeunes arrivés avant l’âge de six relancé le débat. ans sur le territoire national, institutionnalisant et don- nant un nouvel élan aux commissions d’accès à la Tous les groupes de la majorité plurielle souhaitent citoyenneté. Cette politique concerne près de 2 millions une telle réforme à laquelle certains maires de grandes de jeunes et je voudrais que vous ayez cela à l’esprit villes de l’opposition sont favorables. Des millions de lorsque vous évoquez la question du droit de vote des citoyens, notamment les étrangers qui vivent ici depuis de étrangers non communautaires. Pour ma part, je pense nombreuses années et dont les enfants sont, pour la plu- que les Algériens, les Marocains, les Tunisiens, les Séné- part, français, attendent de votre part une détermination galais ou les étrangers appartenant à l’ancienne Commu- comparable à celle qui fut la nôtre pour le PACS ou pour nauté pourraient accéder au droit de vote aux élections les 35 heures. locales dans les mêmes conditions que les étrangers Une telle mesure ferait honneur à la gauche, à notre communautaires. Mais c’est là un débat que nous devons pays et serait un signal fort lancé à l’Europe, particulière- avoir en toute sérénité. (Applaudissements sur les bancs du ment aux démocrates autrichiens. Une volonté politique groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.) claire permettrait d’accorder le droit de vote aux étrangers dès les municipales de 2001. Le temps est compté, mais M. le président. Nous en avons terminé avec les ques- c’est encore possible. Monsieur le Premier ministre, êtes- tions au Gouvernement. vous prêt à tout mettre en œuvre pour que ce droit soit effectif dès les élections municipales de 2001 ? (Applau- (M. Philippe Houillon remplace M. Laurent Fabius au dissements sur les bancs du groupe communiste.) fauteuil de la présidence.)

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PRÉSIDENCE DE M. PHILIPPE HOUILLON, Ensuite, parce que la vie elle-même nous conduit − et vice-président nous en avons la volonté − à intégrer la dimension de l’urbain, du développement durable, de l’environnement et du droit à l’esthétique, à la beauté. Je veux saluer ici les hommes et les femmes de gauche, 2 de progrès, les humanistes − il s’en trouve d’ailleurs sur tous les bancs − qui font de la lutte contre les injustices, les inégalités et le mépris une dimension essentielle de leur engagement. C’est à ce prix que nous donnerons sens SOLIDARITÉ ET RENOUVELLEMENT URBAINS aux valeurs de la République. L’Etat doit être garant de cette dimension, sinon que vaudrait notre engagement fondateur pour la liberté, l’égalité et la fraternité ? Explications de vote Les dispositions du présent projet en faveur de la et vote sur l’ensemble d’un projet de loi mixité sociale sont raisonnables puisqu’il s’agit de per- mettre aux communes qui comportent actuellement M. le président. L’ordre du jour appelle les explications moins de 20 % de logements sociaux de rattraper pro- de vote et le vote, par scrutin public, sur l’ensemble du gressivement leur retard, en vingt ans. Je répète que c’est projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement réaliste et qu’il n’en coûtera rien à celles qui s’inscriront urbains (nos 2131, 2229). dans ce processus. La parole est à M. le ministre de l’équipement, des Comme vous le savez, nous avons accepté au cours des transports et du logement. débats l’élargissement de la définition des logements M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l’équipement, des sociaux pour tenir compte de la réalité des situations de transports et du logement. Monsieur le président, mes- chacune des agglomérations concernées et des efforts dames, messieurs les députés, permettez-moi de dire en qu’elles ont produits durant les décennies passées. quelques mots, au nom de Louis Besson et de Claude Ce texte a permis d’engager le débat sur les questions Bartolone, combien nous avons apprécié le travail réalisé récurrentes des logements insalubres et des copropriétés par votre commission de la production et des échanges et dégradées. Il a aussi permis de dégager des solutions en par son rapporteur, Patrick Rimbert. La qualité de ce tra- faveur de celles et ceux qui vivent dans ce type d’habitat, vail − je ne parle pas de la quantité −, la clarté du rap- dans des conditions indignes de notre époque. port comme le contenu des interventions témoignent de J’ajoute que ce projet de loi ne procède pas d’un mou- l’intérêt porté par l’Assemblée nationale à ce texte traitant vement de recentralisation mettant en cause le principe d’un enjeu majeur de société. constitutionnel de libre administration des collectivités La concertation, établie à la fois par la commission et territoriales. Les pouvoirs des préfets ne seront en réalité par le Gouvernement en amont, tout comme l’apport des guère différents de ce qu’ils sont actuellement vis-à-vis députés pour que le texte tire le meilleur parti des expé- des documents d’urbanisme. Tout le sens de notre riences concrètes vécues sur le terrain ont contribué à réforme du code de l’urbanisme vise à simplifier celui-ci enrichir le débat. Bien sûr, il y a toujours des excès dans et à introduire plus de concertation et de démocratie dans les propos de certains, mais je me félicite qu’aucun ici l’élaboration et la mise en cohérence des projets urbains. n’ait soutenu l’idée exprimée publiquement par un ancien Mesdames, messieurs les députés, aucun d’entre nous ministre, disant qu’il n’appliquerait pas la loi. Outre la ne peut être insensible aux problèmes de société auxquels gravité du propos à l’encontre du pacte républicain, je nous sommes confrontés. Cette société de la civilisation voudrais souligner que le pire, en ce domaine, est le urbaine, nous ne devons pas en avoir peur. Nous refusons conservatisme et l’immobilisme. d’assimiler la reconstruction de la ville sur la ville à la En fait, tout le monde reconnaît publiquement le reproduction des pratiques abandonnées de construction besoin de solidarité, de cohérence, de modernisation et de des barres et des tours, insupportables aujourd’hui. C’est simplification de la politique urbaine sans l’opposer au même exactement tout le contraire. C’est pourquoi d’ail- monde rural. C’est le sens du projet de loi que nous leurs, comme vous l’avez décidé, il s’agit non seulement avons présenté. C’est le sens de l’appel à l’enrichissement de demander aux villes qui n’ont pas assez de logements que nous avons souhaité et que j’ai exprimé dès le début sociaux d’en faire plus, mais d’aider les villes qui en ont de notre discussion. beaucoup à améliorer la situation. Durant nos débats, qui ont duré près de cinquante M. Daniel Marcovitch. Très bien ! heures sur cinq jours, 1 560 amendements ont été exami- nés et 426 ont été adoptés après avoir fait, pour la plu- M. le ministre de l’équipement, des transports et du part, l’objet d’avis favorable du Gouvernement et, dans logement. Mais nous refusons également d’assimiler le quelques cas, d’un appel à la sagesse de l’Assemblée. En logement social au ghetto, à la précarité et, au-delà, à fait, chacun sait bien qu’en termes d’aménagement, l’insécurité, ce qui est injuste. Reprenant une formule d’urbanisme, d’habitat, de déplacements on ne peut lais- heureuse de M. Léonce Deprez, je préfère parler de poli- ser les choses continuer en l’état. Faire évoluer la ville tique sociale du logement plutôt que de politique du vers plus de mixité sociale et fonctionnelle, voilà une logement social. démarche rompant avec la facilité du laisser-faire qui, à En rompant avec le cloisonnement fonctionnel de nos terme plus ou moins rapproché, ne pourrait conduire villes par une approche transversale des problèmes liant qu’à une déchirure encore aggravée du lien social. aménagement, urbanisme et déplacements ; D’abord, parce que nous sommes tous confrontés aux En substituant aux procédures rigides, peu adaptables mêmes questionnements générés par l’addition des effets et souvent inefficaces, une démarche de projet plus démo- conjugués du chômage massif depuis des décennies, des cratique, plus cohérente, plus lisible ; ségrégations sociales et spatiales, de l’empilement des tex- En permettant l’adaptation continue des espaces amé- tes et des procédures. nagés préservant les espaces agricoles et naturels ;

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En assumant la mixité aux différentes échelles de la M. Jean Proriol. La pénalisation financière approuvée cité, en confortant la politique de la ville et en ne laissant par les uns, critiquée par les autres, doit être aussi appré- pas imposer une logique marchande exclusive et domina- ciée au regard de la surcharge foncière supportée par les trice ; communes. Surtout, vous vous arrogez le privilège de la En garantissant à tous des conditions de logement bonne action ou de la bonne conscience. Nous réfutons décentes tout en rejetant l’exploitation insupportable de les diptyques dans lesquels vous tentez de nous enfer- la misère ; mer : « gauche égale générosité », « droite égale égoïsme »... (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et Ce projet, désormais enrichi par vos travaux, soumis du groupe communiste.) aujourd’hui à votre décision, veut répondre à la fois à des préoccupations de court terme de nombre de nos conci- M. André Lajoinie, président de la commission. C’est toyens et à une demande de sens pour l’évolution de nos vrai ! On ne vous le fait pas dire ! cités urbaines vers plus de justice, plus de respect, plus M. Daniel Marcovitch. Enfin un peu de lucidité ! d’égalité, bref plus d’urbanité. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du M. Jean Proriol. ... ou bien encore : « ghettos de riches groupe Radical, Citoyen et Vert.) contre ghettos de pauvres ». Chacun ici adhère au prin- cipe de la mixité sociale, mais vous prenez le risque d’une densification, voire d’une redensification urbaine, ni sou- Explications de vote haitable, ni attendue de nos compatriotes. C’est l’acces- sion à la propriété qui introduira effectivement et dura- M. le président. Dans les explications de vote, la parole blement la mixité sociale. Que dit l’Union des HLM dans est à M. Jean Proriol, pour le groupe Démocratie libérale son dernier numéro daté du 30 janvier 2000 ? « La mixité et Indépendants. sociale nécessite aussi une accession à la propriété, à desti- nation des classes moyennes et modestes. » M. Jean Proriol. Quelle épreuve que la solidarité et le M. le ministre de l’équipement, des transports et du renouvellement urbains ! Entre le maquis des sigles − logement. Nous sommes d’accord ! SCT, PLH, PDU, PLU, CC, SDC, DTA et PC... M. Jean Proriol. Les élus de l’agglomération parisienne, M. Guy-Michel Chauveau. Ils existaient déjà avant ! Ce notamment mes collègues Pierre Cardo et Francis n’est pas nouveau ! Delattre, mais aussi bien d’autres, déplorent que la mixité M. Jean Proriol. ... et celui des périmètres sous-jacents, sociale ne soit envisagée que sous l’angle d’une offre plus entre la densité des articles et leur complexité, entre la importante des logements sociaux, et d’eux seuls, dans les procédure d’urgence et 1 500 amendements de tous communes qui n’en ont pas, ou pas assez. Il n’est en effet bords, entre les heures de discussions, de préférence entre rien proposé pour favoriser l’implantation, dans les quar- deux heures et quatre heures du matin, moment choisi tiers actuels d’habitat social, d’autres types de logements ! pour les débats gauche-gauche et même socialo-socialistes Ce texte pérennise la ghettoïsation des quartiers à forte faits de surenchères et difficilement arbitrés par M. le concentration de logements de familles nombreuses. ministre de l’équipement, des transports et du logement (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libé- ou par M. le rapporteur, ce fut un parcours à marche for- rale et Indépendants.) cée, un laborieux travail de commission. Il est vrai que M. Michel Pajon. Quel culot ! celle-ci avait bâclé son ouvrage ! M. André Lajoinie, président de la commission. Vous M. André Lajoinie, président de la commission de la pro- êtes pour la natalité, monsieur Proriol ! duction et des échanges. Oh ! M. Jean Proriol. Monsieur Lajoinie, vous ne vous êtes M. Jean Proriol. Il fallait que le Gouvernement tienne pas souvent exprimé dans le débat. N’allez pas commen- à l’adoption rapide du projet et veuille l’inscrire parmi les cer maintenant ! (Rires et applaudissements sur les bancs du lois de gauche de son mandat, afin de masquer son échec groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du et l’effondrement du logement social. Vous l’avez rappelé, Rassemblement pour la République et du groupe de l’Union monsieur le secrétaire d’Etat au logement : 44 300 mises pour la démocratie française-Alliance.) en chantier sont intervenues en 1998, à peu près autant Avec d’autres sur nos bancs, et pour avoir présidé un en 1999, contre 70 000 qui étaient effectivement prévues. OPAC pendant vingt ans, je peux sans prétention assurer Ce projet de loi a deux défauts majeurs : ... n’avoir ni complexes ni sentiment de culpabilité. M. François Goulard. Au moins ! M. Félix Leyzour. C’est un peu opaque ! (Sourires.) M. Jean Proriol. ... il procède d’une vision collectiviste M. Jean Proriol. Nous avons fait construire des loge- et rétrograde de l’habitat et c’est une occasion perdue ments sociaux en fonction des besoins et des moyens, y pour le volet transports. compris en centre-ville, et non en fonction de la couleur politique des communes. Tout d’abord, il correspond à une vision collectiviste de l’habitat. Vous faites pratiquement l’impasse sur la Vous prétendez combattre le logement insalubre ; propriété privée dans le logement collectif ou dans les parallèlement, dans le budget 2000, en contradiction pavillons. Vous décrétez la mixité sociale et édictez des totale avec ces nobles objectifs, vous réduisez de 23 % les mesures coercitives à l’encontre des communes, au mépris dotations prévues à cet effet ! des réalités locales. Enfin, votre texte entretient un climat d’insécurité juri- dique et créera des nids de contentieux longs et coûteux, M. le ministre de l’équipement, des transports et du aussi bien pour les communes que dans les relations loca- logement. Mais non ! taires et propriétaires. Avocats et juges auront du pain sur M. André Lajoinie, président de la commission de la pro- la planche ! duction et des échanges. Il ne croit pas lui-même à ce qu’il Ce projet est enfin une occasion perdue pour le volet dit ! transport.

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En matière de déplacement urbain, pourquoi vouloir réjouis, l’article L. 111-3 du code rural relatif à la réci- imposer toujours et partout la même organisation, avec procité, imprudemment voté dans la loi d’orientation les mêmes carcans ? Les autorités organisatrices de trans- agricole... port en commun vont se retrouver sans réel pouvoir d’ac- M. Patrick Rimbert, rapporteur. Voté à l’unanimité, tion. rappelons-le ! M. le ministre de l’équipement, des transports et du M. Jean Proriol. Je termine, monsieur le président... logement. Enfin, monsieur Proriol ! Tout le monde était d’accord ! M. le président. Il faudrait maintenant vraiment termi- ner, monsieur Proriol, et tout de suite ! M. Jean Proriol. Vous n’avez pas répondu, monsieur le ministre, aux deux questions fondamentales que pose le M. Jean Proriol. Le grand architecte Le Corbusier, transfert des lignes ferroviaires régionales aux conseils dans Le Monde urbain, nous donnait ce conseil : « Les régionaux :... matériaux de l’urbanisme sont le soleil, les arbres, le ciel, l’acier, le ciment,... M. François Goulard. C’est le transfert des déficits qu’ils organisent ! M. François Goulard. Et le marteau et la faucille ! M. Jean Proriol. ... celle du financement et celle de la M. Jean Proriol. ... dans cet ordre hiérarchique et responsabilité. indissolublement ». M. Dominique Bussereau. Heureusement, le Sénat va M. Jean-Paul Bret. Citation détournée ! corriger ! M. Jean Proriol. Je n’ai rien trouvé d’approchant dans M. Bernard Outin. La responsabilité, c’est bien le pro- votre texte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe blème, monsieur Propriol ! Démocratie libérale et Indépendants et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du M. Jean Proriol. Vous avez lâché sur des points de groupe de l’Union pour la démocratie française-Alliance.) détail, mais pas sur l’essentiel. M. le président. Pour le groupe socialiste, la parole est M. Jacques Blanc. Eh oui ! à M. Daniel Marcovitch. M. Jean Proriol. L’association des régions de France M. Daniel Marcovitch. Monsieur le président, madame, craint, à juste titre, un transfert et même un délestage des messieurs les ministres, mes chers collègues, beaucoup de charges des transports des TER sur le budget des régions. choses ont été dites et écrites sur cette loi de solidarité et de renouvellement urbains. Les caricatures les plus M. François Goulard. C’est limpide ! outrancières − M. Proriol vient encore d’en donner un M. Jean Proriol. La président de la SNCF n’a-t-il pas exemple − ont décrit l’avenir de nos villes sous la forme reconnu en commission des finances le 1er mars dernier : de tours et de barres criminogènes, zones de non-droit où « L’activité des TGV est tout à fait rentable et l’on peut seul le béton est roi. dire qu’elle finance le reste de l’activité SNCF » ? Jamais M. François Goulard. Cela existe ! les conseils régionaux n’accepteront un transfert de déficit non gagé. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démo- M. Daniel Marcovitch. Mes chers collègues, il s’agit là cratie libérale et Indépendants.) de la description des villes des décennies 60 et 70, époque où la droite au pouvoir préservait ses îlots de M. Jacques Blanc. Bravo ! tranquillité en concentrant des ghettos de misère dans M. le président. Monsieur Proriol, il faudrait conclure ! certaines banlieues et à la périphérie de l’est parisien. J’ai déjà été très tolérant ! (Approbations sur les bancs du groupe socialiste.) M. Jacques Blanc. Il dit de bonnes choses ! Mme Christine Boutin. Caricature ! M. Jean Proriol. Par ailleurs, les régions ne savent tou- M. Daniel Marcovitch. C’est ce modèle de développe- jours pas dans quelle mesure ce transfert est susceptible ment urbain que nous refusons aujourd’hui. d’engager la responsabilité pénale des présidents de La France des droits de l’homme ne peut plus accepter conseils généraux. que des millions de nos concitoyens soient relégués dans J’arrive à ma conclusion, monsieur le président. Votre un habitat de seconde zone. La lutte contre la fracture politique ... sociale passe aussi par l’effort de tous et par une véritable solidarité entre les Français. M. le ministre de l’équipement, des transports et du Mme Christine Boutin. Nous sommes tous d’accord ! logement. La politique du président ? M. Daniel Marcovitch. Mes chers collègues, nous vou- M. Jean Proriol. ... est incontestablement plurielle : à lons, c’est vrai, que les grandes agglomérations soient les l’heure où M. Mauroy est chargé d’une mission nu la lieux de la mixité sociale, condition indispensable à l’in- décentralisation, vous nous soumettez un projet de loi sertion de tous ceux qui sont en voie d’exclusion. dans lequel les préfets disposent de pouvoirs accrus dans l’élaboration des documents d’urbanisme, tandis que Certains élus de droite, nous le savons, s’opposent à la l’Etat s’implique de plus en plus dans le contenu des mixité. A Paris, l’union sacrée se refait lorsque M. Tiberi schémas. cosigne un amendement avec Mme de Panafieu et M. Bal- ladur pour éviter de construire des logements sociaux. M. Jacques Blanc. Eh oui ! M. le ministre de l’équipement, des transports et du M. François Goulard. Ce sont des centralisateurs ! logement. Ils n’ont pas entendu ! M. Jean Proriol. Vous ne vous êtes pas montré très M. Daniel Marcovitch. Et pourtant, à côté de ces ouvert aux amendements de l’opposition, sinon pour faire égoïsmes non dénués d’arrière-pensées électorales, 78 % annuler, en reprenant notre proposition, ce dont je me de nos concitoyens approuvent les mesures proposées par

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le Gouvernement de Lionel Jospin. Le Président de la M. Serge Poignant. Ce projet de loi n’a pas fait l’objet République n’en faisait-il pas de même lorsqu’il expli- du débat sérieux qu’il nécessitait ni de la concertation quait à Xavier Emmanuelli, en début d’année, que, s’il ne que l’association des maires pouvait légitimement fallait pas légiférer dans tous les domaines de la vie de attendre. nos concitoyens, il en allait différemment dans le Sur le fond, la discussion a été vive. Bien que quel- domaine du logement social ? ques-uns de nos amendements aient été acceptés, nous La loi de solidarité et de renouvellement urbains ne se avons maintenu notre opposition, affirmant et réaffirmant limite cependant pas à son article 25. A côté de la que nous étions pour la mixité sociale, mais avec une réforme du code de l’urbanisme, qui vise à rendre celui-ci approche bien différente de la vôtre et beaucoup moins plus cohérent, il y a tous ces articles qui vont permettre, limitative. Les amendements que vous avez dû accepter pour les uns, de venir en aide aux plus démunis victimes ne sont finalement que des amendements de bon sens des marchands de sommeil. Cette forme moderne de venus corriger un texte excessivement technocratique. l’esclavagisme pourra être enfin combattue par la défini- M. Patrick Rimbert, rapporteur. Mais non ! tion du logement décent. Pour d’autres, il s’agit de préve- nir efficacement la dégradation des copropriétés en diffi- M. Serge Poignant. Vous avez par exemple, dans la culté en créant le carnet de santé des immeubles, mais partie urbanisme, accepté de rétablir les déclarations de aussi de protéger les accédants à la copropriété en précé- travaux, de redonner aux PLU une partie normative dant les divisions d’immeubles d’un état des lieux qui essentielle contenue dans les POS, prenant conscience du leur sera remis. danger potentiel de multiplication des contentieux. Pour Pour en revenir à la mixité sociale, le parcours résiden- autant, vous n’avez accepté qu’un élargissement très tiel de nos concitoyens les amène souvent à paser du limité dans la définition du logement, en ne rajoutant au locatif à l’accession à la propriété. Vous le notiez tout à texte de base que les logements réhabilités ANAH avec l’heure et nous en sommes d’accord. A côté des mesures conventionnement HLM ou encore les logements qui pérennisent le parc locatif, les bailleurs sociaux se d’immigrés ; vous avez catégoriquement refusé de prendre voient autorisés à construire des logements afin de les en considération l’accession sociale à la propriété, comme mettre en vente à un prix permettant aux classes si les familles modestes n’avaient pas le droit de devenir moyennes un accès plus aisé à la propriété, mais qui un jour propriétaires ! donne également aux organismes HLM un véritable sta- M. le ministre de l’équipement, des transports et du tut d’aménageur urbain. logement. Au contraire ! Il serait trop long d’énumérer les progrès contenus M. Serge Poignant. Vous ignorez encore le parc locatif dans cette loi. Un mot cependant pour rappeler les nou- privé. La bonne démarche pour favoriser la mixité sociale veaux droits des locataires, la réforme tant attendue de eût été de prendre en compte le quotidien, les réalités l’ANAH ; et je ne saurai conclure mon intervention sans locales, les caractéristiques foncières, techniques ou envi- rappeler, dans le domaine du transport, la régionalisation ronnementales de chaque commune. Jamais, depuis la loi du transport ferroviaire ou encore l’entrée de la région de décentralisation − là encore, je ne puis qu’approuver Ile-de-France au syndicat des transports parisiens. les propos de mon collègue Proriol − un texte n’aura été Monsieur le président, messieurs les ministres, madame aussi centralisateur et planifiateur, à commencer par vos la secrétaire d’Etat, mes chers collègues, après des dizaines schémas de cohérence territoriale, qui devront intégrer les d’heures de travail en commission ou en séance, l’étude plans de déplacement urbain, les programmes locaux de de plus de 1 500 amendements et l’adoption d’un grand l’habitat, les projets d’intérêt général, les schémas natio- nombre d’entre eux parmi lesquels beaucoup, je le rap- naux de services collectifs, les servitudes d’utilité publique pelle, venaient de l’opposition, c’est une loi capitale pour et j’en passe. Quant aux plans locaux d’urbanisme, pré- la solidarité que nous allons voter. Et je veux m’adresser tendûment simplifiés par rapport aux POS, ils devront aux députés de l’opposition pour leur dire avec force eux aussi être en cohérence avec ces schémas. Vous sup- qu’ils ne peuvent être absents d’une réalisation qui primez les plans d’aménagement de zone dans les ZAC. dessine aujourd’hui la vie future de nos concitoyens. Vous n’avez cesse de parler de plan et de planification, de (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du répéter le même leitmotiv : « densification », encore et groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) toujours « densification » ! Certains de vos collègues de la majorité plurielle l’ont semble-t-il compris et perçu le Mme Christine Boutin. Nous sommes déjà présents ! danger que cela représentait pour l’environnement.

M. le président. La parole est à M. Serge Poignant, Votre texte tente tout simplement de dissimuler pour le groupe du Rassemblement pour la République. l’échec du Gouvernement dans le domaine de la politique de la ville en présentant des mesures punitives excessives M. Serge Poignant. Monsieur le président, messieurs aux communes, sans consultation, bien évidemment, sans les ministres, madame la secrétaire d’Etat, mes chers col- proposer un profond renouvellement urbain qui prenne lègues, nous voilà arrivés au terme d’un long débat qui en compte l’exigence de démolition-reconstruction des s’est souvent déroulé − je confirme les propos de mon grands ensembles les plus dégradés et qui s’appuie sur un collègue Proriol − en séance de nuit, faute de temps. aménagement équilibré du territoire. M. le ministre de l’équipement, des transports et du Vous privilégiez d’autorité la gestion économe de logement. l’espace, avant la gestion équilibrée de l’espace. Pourquoi On n’a pas fait les 35 heures ! (Sourires.) vouloir concentrer davantage encore dans les villes alors M. Serge Poignant. Eh non, monsieur le ministre ! que les Français aspirent au calme et à l’environnement de qualité ? Sur la forme, vous le savez, nous regrettons vivement la procédure d’urgence à laquelle vous avez décidé de recou- S’agissant des déplacements urbains, permettez-moi de rir pour examiner ce texte. regretter le manque d’ambition de votre texte en matière de renforcement des autorités régionales dans l’organisa- M. François Rochebloine. C’est une habitude ! tion des transports à l’intérieur des périmètres de leurs

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compétences, comme en matière de financements, qui ne reprendre que quelques-uns, le relèvement du plafond des sont pas à la hauteur des objectifs annoncés. La régionali- ressources, l’augmentation du seuil du surloyer, la défini- sation des transports engagée par la loi Pons aurait dû tion plus précise des normes minimales d’habitat décent, atteindre une nouvelle étape, que nous ne retrouvons pas la possibilité de mettre en place des commissions d’attri- dans votre texte. bution et de créer ou de redynamiser, là où elles existent, Madame, messieurs les ministres, pour toutes ces rai- les conférences communales du logement, la progressivité sons et surtout, vous l’avez compris, à cause de votre des pénalités en fonction de la richesse fiscale des dogmatisme en matière d’urbanisme et d’habitat − il suf- communes, le renforcement des sanctions visant les mar- fit d’écouter notre collègue Marcovitch pour en être chands de sommeil, l’amélioration des dispositions rela- convaincu −, de votre conception restrictive et orientée de tives à l’importance et à la qualité du traitement des la mixité sociale, de la méthode enfin que vous avez choi- espaces publics. sie pour y parvenir, le groupe du Rassemblement pour la Avant de conclure, permettez-moi d’évoquer le cœur République votera contre ce projet de loi. (Applaudisse- de la problématique qui traverse ce projet de loi : je veux ments sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la parler de la possibilité pour toutes les familles qui vivent République, du groupe de l’Union pour la démocratie fran- sur notre sol d’accéder à un logement de qualité en tout çaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépen- lieu de notre territoire. dants.) Ce n’est pas le cas aujourd’hui, nous le savons bien. Il M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès, pour est en effet intolérable que beaucoup trop de nos conci- le groupe communiste. toyens soient encore aujourd’hui interdits de séjour dans M. Michel Vaxès. Monsieur le président, monsieur le de trop nombreux quartiers, villes et villages de France. ministre, mes chers collègues, cette loi était attendue par Les valeurs de notre République : liberté, égalité, frater- toutes celles et ceux qui vivent douloureusement une ville nité, doivent s’imposer partout et particulièrement dans éclatée, ségrégative, blessée par les conséquences de l’urba- l’accès au logement dans la ville et le quartier de son nisation des années 60-70, une ville et des territoires qui choix. donnent à voir les injustices, les inégalités de la société tout entière. Satisfaire cette exigence suppose d’avancer simultané- ment dans deux directions. Reconstruire une ville solidaire, renouveler l’urbanisme, aménager durablement le territoire et mettre à son service Premièrement, offrir en tout lieu toute la diversité de une politique de déplacement cohérente et efficace, tels l’habitat afin de combattre partout la sélection par sont les objectifs d’une ambition que le groupe commu- l’argent. Nous savons que c’est bien là votre volonté, niste partage pleinement. monsieur le ministre. Mais la droite parlementaire s’en Nous nous sommes donc inscrits dans le débat avec la accommode mal, sous les prétextes les plus divers. Certes, volonté de mieux traduire dans la loi les motivations sur tous les bancs de notre assemblée, nous avons généreuses qui la sous-tendaient. entendu affirmer cette volonté, au moins dans les mots. Monsieur le ministre, vous avez rappelé que ce texte Encore faut-il qu’elle le soit dans les faits, afin que nulle reposait sur trois principes, trois valeurs : la solidarité et part on en vienne à considérer avoir satisfait aux exi- le partage ; le développement durable et la qualité de vie ; gences de mixité au motif qu’on l’aurait permis aux seuls la démocratie enfin. échelons les plus élevés de la hiérarchie sociale. Pour être satisfaite, la mixité exige que personne ne soit mis au C’est bien en nous référant à ces trois principes que, ban, assigné à résidence, du fait de sa condition ou de sa avec mes amis du groupe communiste nous avons pro- naissance. De ce point de vue, l’objectif de 20 % de loge- posé de réduire partout où il nous paraissait exister l’écart ments sociaux dans toutes les communes apparaît tout à entre des intentions partagées et leur traduction concrète la fois réaliste et indispensable. dans le texte de ce projet de loi. Nous avons le sentiment que notre commission, puis notre assemblée auront Deuxième condition, tout aussi indispensable : consen- contribué à cette amélioration. tir simultanément un effort financier conséquent, allant Un certain nombre de nos amendements, qui visaient bien au-delà de la dotation de solidarité urbaine et des à renforcer la dimension démocratique et les pratiques crédits spécifiques de la politique de la ville, afin de réha- partenariales dans l’élaboration des documents d’urba- biliter, requalifier, démolir, reconstruire, rendre à la vie nisme, ont été retenus. un parc de logements, des quartiers, des villes entières Vous-même, monsieur le ministre, avez convenu qu’a- qui, pour avoir fait l’effort d’accueillir ceux que d’autres méliorer la cité sans y impliquer les habitants ne pourrait ont rejetés, se voient aujourd’hui confrontées aux effets conduire qu’à une impasse et qu’il était important cumulés de trente années de crise économique et sociale. « d’acquérir le sens du diagnostic partagé ». Cet effort de reconquête, de requalification urbaine, d’entretien du patrimoine existant, de service de proxi- Nous en étions tellement convaincus que nous avons mité exige des moyens importants. Si l’on ne les mobilise proposé de rendre obligatoire ce diagnostic, démocra- pas, c’est l’économie générale de la loi qui pourrait être tiquement élaboré et préalable à l’élaboration des schémas remise en cause. Vous en avez convenu, monsieur le de cohérence territoriale et des plans locaux d’urbanisme. ministre, et notre assemblée, en adoptant un amendement Notre assemblée en a accepté la possibilité, sans pour de notre groupe à ce sujet, a même tenu à souligner l’im- autant en décider l’obligation. portance qu’elle portait à cette question. Dans le même esprit, nous avons apprécié que soit retenue la proposition de mise en place des comités de Vous avez annoncé votre intention de prendre en ligne permettant aux usagers, aux représentants des sala- compte cette préoccupation majeure ; nous attendons vos riés, aux élus d’être associés à la réflexion et aux proposi- réponses. tions visant à améliorer l’offre de transport. Soyez en tout cas convaincu que notre vigilance à ce Plusieurs de nos amendements visant à la réalisation de sujet ne faiblira pas jusqu’au terme de l’examen de cette la mixité sociale et à l’amélioration de la politique sociale loi, ni à l’occasion des dispositions que la loi de finances du logement ont été satisfaits. Citons, pour n’en 2001 doit envisager à cet égard.

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Parce qu’il porte la volonté de nourrir le projet global préfet en cas de carence de la commune, disposition par- et cohérent de développement des bassins de vie, parce ticulièrement contestable et dangereuse en ce qu’elle met qu’il s’inscrit dans la perspective de réduction des inégali- en cause la libre administration des collectivités locales, tés sociales et spatiales, parce qu’il vise un aménagement disposition inacceptable pour des élus attachés à la décen- durable de la cité et de l’agglomération, parce qu’il est tralisation. marqué des valeurs de solidarité et de partage, les députés Caricaturant nos arguments, vous avez cristallisé le communistes voteront ce texte. (Applaudissements sur les débat autour d’un affrontement idéologique, d’une oppo- bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.) sition sans nuances entre « communes riches » et M. le président. La parole est à M. Gengenwin, pour « communes pauvres », alors que vous savez pertinem- le groupe UDF. ment que la réalité est infiniment plus complexe. Mais bien d’autres mesures de ce projet de loi ne M. Germain Gengenwin. Monsieur le président, mes- laissent pas de nous inquiéter. sieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi dont nous venons d’achever la première lecture repose sur La réforme de l’urbanisme, telle que vous l’envisagez, des principes consensuels et les objectifs qu’il s’assigne ne est porteuse d’incohérences qui ne manqueront pas de sont pas, sur le fond, contestables. Mais notre mission est susciter de multiples contentieux, comme n’ont d’ailleurs de faire la loi et non pas de nous prononcer sur des prin- pas hésité à vous le laisser entendre certains députés de cipes. votre majorité. L’avenir des villes et des banlieues est l’un des pro- La disparition du POS au profit du PLU, outre qu’elle blèmes de société les plus graves auxquels nous sommes supprime, tant pour les citoyens que pour les élus, un confrontés. Nous en faisons tous quotidiennement le repère fondamental en matière d’aménagement urbain, constat. comporte bien des risques, à commencer par le caractère moins normatif de ce nouveau document d’urbanisme. Le groupe UDF partage donc avec vous, messieurs les ministres, cette volonté de refonder des règles d’urba- La création d’un schéma de cohérence territoriale ne nisme parfois dépassées, d’améliorer la qualité de la vie en fait qu’aggraver l’actuel chevauchement de périmètres non ville et de contribuer à l’objectif de mixité sociale par la identiques et introduit de la complexité là où il faudrait réalisation de logements sociaux harmonieusement inté- de la clarté. grés dans l’espace urbain. Concernant enfin la régionalisation des transports fer- roviaires, nous avons bien noté que vous reconnaissez le Comme l’annonçait notre collègue, Marc-Philippe succès de l’expérimentation engagée par Mme Anne-Marie Daubresse, il y a deux semaines, lors de la discussion Idrac, en 1997, puisque vous proposez d’étendre ce trans- générale, nous étions prêts à faire avec vous, je cite fert de compétence en matière ferroviaire à l’ensemble des M. Bartolone, « le pari de l’intelligence pour la mixité régions françaises, et nous nous en félicitons. Nous crai- sociale ». Nous étions prêts à faire ce pari à la condition, gnons cependant, qu’il ne s’agisse que d’un faux-semblant toutefois, que quelques-unes de nos propositions sur quel- car vous ne donnez pas aux régions les moyens néces- ques points majeurs soient retenues et acceptées par cette saires, notamment financiers, d’assumer cette nouvelle assemblée. charge. Bien au contraire, par l’indexation que vous rete- Il ne s’agissait pas de revenir sur les principes, et vous nez, vous programmez à terme la réduction des moyens nous donnerez acte, que bien des élus de notre groupe affectés au transport ferroviaire dans nos régions. Com- ont déjà fait des efforts considérables dans les communes ment croire alors à vos discours sur le développement qu’ils ont la charge de gérer. Il s’agissait pour nous de durable ? revoir la méthode, de privilégier la simplification sur la En fait de renouvellement urbain, nous regrettons, complexification, la responsabilité sur la contrainte, l’ini- messieurs les ministres, de devoir faire le constat d’une tiative de terrain sur la recentralisation insidieuse. « occasion manquée » pour la ville, d’un ensemble de Alors que vous mettez en place un dispositif contrai- mesures dont nous craignons qu’elles n’aboutissent à gnant qui soumet les communes à des pénalités finan- reproduire les erreurs du passé. Alors que nous espérions cières, nous vous avons proposé un système plus incitatif une ouverture de votre part, nous nous sommes heurtés et pas seulement pour les communautés d’agglomérations au rejet de nos principales propositions. Désormais, nous à partir de 50 000 habitants, mais aussi pour les commu- disposons d’un texte qui ne correspond pas aux attentes nautés de communes de moindre importance ; mais vous de nos concitoyens. l’avez refusé. Plusieurs députés socialistes. C’est trop long ! Alors que vous faites reposer l’ensemble de votre dispo- sitif sur les communes, nous vous avons proposé une M. le président. Monsieur Gengenwin a la parole. Je approche intercommunale, au niveau des agglomérations, lui demande d’ailleurs de conclure. en totale cohérence d’ailleurs avec la loi Chevènement ; M. Germain Gengenwin. En conséquence, le groupe mais vous l’avez également refusée. UDF, même s’il souscrit aux objectifs de mixité sociale et Alors que vous imposez aux communes de réaliser 20 % urbaine, votera contre le projet de loi tout en accordant de logements locatifs sociaux et que vous restreignez la la liberté de vote à chacun de ses membres et en souhai- liste des logements retenus pour l’application de la loi, tant qu’une nouvelle lecture s’engage vraiment dans un nous vous avons proposé de l’étendre au parc privé et de esprit de conciliation. (Applaudissements sur les bancs du l’ouvrir aux logements en accession à la propriété, afin groupe de l’Union pour la démocratie française-Alliance et que nos concitoyens puissent bénéficier d’une vraie possi- sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la bilité de choix entre le locatif social et la propriété, mais République et du groupe Démocratie libérale et Indépen- vous ne nous avez pas suivis non plus sur ce point. dants.) Enfin, au lieu de faire confiance aux élus locaux, en M. le président. Avant de donner la parole au dernier particulier aux maires qui, tous les jours, sur le terrain, se orateur inscrit pour les explications de vote, je vais, d’ores battent pour améliorer les conditions de vie de leur admi- et déjà, faire annoncer le scrutin, de manière à permettre nistrés, vous avez maintenu le droit de substitution du à nos collègues de regagner l’hémicycle.

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Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée Le Gouvernement a donc choisi la simplification mais nationale. n’a pas voulu, pour équilibrer le texte, donner de moyens la parole est à M. Jean-Michel Marchand, pour le à ces contre-pouvoirs que sont les associations pour groupe Radical, Citoyen et Vert. contester les décisions prises. Pire, le changement de dénomination des POS en PLU risque d’entraîner la dis- M. Jean-Michel Marchand. Il ne nous est pas possible parition des acquis jurisprudentiels obtenus contentieux d’avoir sur ce projet une analyse globale. Force est donc après contentieux. d’en examiner chacun de ses grands volets. Dernier point, la modification de la loi montagne. Une La volonté de certains aura été et sera, sans doute série d’amendements portant sur les dispositions d’urba- encore, de focaliser le débat et l’expression publique sur le nisme de cette loi a été adoptée, contre l’avis du Gouver- volet social. C’est là un mauvais procès. Promouvoir la nement pour la plupart. C’est inacceptable car on ne peut mixité sociale et prévoir 20 % de logements sociaux, à admettre que soit remise en cause l’économie générale terme, dans les communes où il n’y en a pas, ou pas d’un texte sans en faire un examen global. C’est inaccep- assez, voilà un bon objectif, que nous soutenons. Et se table aussi car on ne peut admettre que des atteintes donner les moyens de réussir, voire en contraignant est graves soient portées à l’équilibre d’un dispositif justifié une bonne chose. par la fragilité du milieu montagnard, dans le seul but de Mais la mixité sociale, c’est aussi une meilleure réparti- régler des situations particulières ou des difficultés locali- tion du logement social pour réduire les concentrations sées d’application. constatées dans certaines communes, certains quartiers, En conclusion, le groupe RCV, dans sa pluralité, émet- certains immeubles. La mixité sociale, si elle passe par tra les votes suivants : les radicaux de gauche et le Mou- l’accès d’un plus grand nombre aux logements sociaux, ne vement des citoyens voteront pour, les Verts s’abstien- doit pas en exclure les plus démunis, en les cantonnant dront. (Exclamations sur les bancs du groupe du soit dans le logement privé dégradé, soit dans le logement Rassemblement pour la République, du groupe de l’Union public concentré, parfois en ghettos. pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocra- Les organismes sociaux, pour réussir la mixité sociale, tie libérale et Indépendants.) doivent pouvoir acquérir des logements sur l’ensemble des tissus urbains et les mettre en location sociale. Ce doit Vote sur l’ensemble être là le rôle spécifique des organismes HLM. Dans le volet habitat, nous notons des mesures intéres- M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet santes. Certaines concernent plus particulièrement les de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains. logements insalubres ou déclarés en péril. L’instauration Je vous prie de bien vouloir regagner vos places. d’un carnet d’entretien aura pour conséquence de clarifier Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne les relations entre copropriétaires et syndic. Et même si doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas nous ne sommes pas allés jusqu’au permis de louer, est échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés enfin inscrite dans la loi la notion de « logement décent ». à cet effet. Nous avons donné des droits aux occupants des loge- ments foyers, et les premiers bénéficiaires en seront les Le scrutin est ouvert. travailleurs migrants. Mais nous n’avons pas modifié le ...... texte concernant le droit au relogement pour ceux qui M. le président. Le scrutin est clos. tombent sous le coup d’un arrêté d’expulsion et qui, de fait, pourront être condamnés parce qu’ils n’auront pas Voici le résultat du scrutin : d’autre choix que de rester dans leur logement, même Nombre de votants ...... 546 insalubre, faute qu’on leur en propose un autre. C’est Nombre de suffrages exprimés ...... 521 grave, au moment où les mesures d’expulsion vont être à Majorité absolue ...... 261 nouveau effectives. Pour l’adoption ...... 303 Les dispositions relatives aux transports urbains tra- Contre ...... 218 duisent une volonté politique affirmée, celle de réduire la L’Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur place de la voiture et de prendre en compte les différents les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste et sur modes de transport alternatif. Le texte prévoit la coordi- quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.) nation des politiques de déplacements urbains avec les documents d’urbanisme et recherche une meilleure ges- Suspension et reprise de la séance tion des flux de marchandises au sein des zones urbaines. Mais une telle politique demande des moyens importants. M. le président. La séance est suspendue. Le milliard annoncé est une bonne chose, mais il faut (La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est aussi les outils financiers nécessaires sur la durée. reprise à dix-sept heures.) Enfin, la rénovation des politiques urbaines, même si M. le président. La séance est reprise. elle permet de donner de la cohérence aux différents schémas d’urbanisme et leur octroie un caractère opéra- tionnel, pose plus d’un problème. 3 Les POS sont abandonnés au profit des PLU. Nous référant à un rapport du Conseil d’Etat de 1992 L’Urba- nisme, pour un droit plus efficace, nous attendions un SAISINE POUR AVIS D’UNE COMMISSION document plus normatif car c’est toujours l’environne- ment qui sert de variable d’ajustement et qu’on oublie de M. le président. J’informe l’Assemblée que la commis- prendre en compte. Or c’est un document plus souple, sion de la production et des échanges a décidé de se saisir plus simple à élaborer que vous avez choisi avec, en pour avis des titres Ier et II de la deuxième partie arrière-pensée, la volonté de supprimer nombre de possi- (articles 27 à 47) du projet de loi relatif aux nouvelles bilités de recours pour les citoyens et les associations. régulations économiques (no 2250).

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4 moyens nécessaires à l’exercice des missions du GEIE- Arte », mais aussi de les « concevoir ». La loi conforte donc ce pôle d’excellence dans sa vocation européenne et LIBERTÉ DE COMMUNICATION culturelle. La composition du capital du pôle français d’Arte, aujourd’hui partagé entre l’Etat et les sociétés audiovisuelles publiques, est inchangée. Il appartiendra à Arte d’ouvrir une nouvelle phase de son développement, Discussion, en deuxième lecture, d’un projet de loi visant à élargir son audience, surtout en Allemagne, et son champ de coopération internationale à de nouveaux M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, partenaires. en deuxième lecture, du projet de loi modifiant la loi Je souhaite maintenant vous présenter plus en détail le no 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de dispositif relatif au numérique hertzien terrestre retenu communication (nos 2119, 2238). par le Gouvernement, avant d’évoquer à nouveau un axe La parole est à Mme la ministre de la culture et de la central de la réforme engagée, le renforcement de l’indus- communication. trie des programmes, qui sera conforté par l’avènement Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de d’une « nouvelle télévision ». la communication. Monsieur le président, mesdames, mes- Le déploiement du numérique hertzien terrestre repré- sieurs les députés, j’ai plaisir à vous présenter les évolu- sente en effet une nouvelle frontière pour la télévision. tions du projet de loi sur la liberté de communication Compte tenu de l’importance et de la technicité du présenté par le Gouvernement. Nous avions eu un débat sujet, j’ai souhaité mener une large concertation auprès de riche en première lecture, et je pense que cette seconde l’ensemble des acteurs concernés afin de définir le meil- lecture devrait nous donner l’occasion d’avoir de nou- leur cadre juridique, économique et technique de cette veaux échanges fructueux. Je ne reviendrai pas sur les nouvelle modalité de diffusion. Eclairé par cette consulta- grands axes de la réforme, pour me concentrer sur le dis- tion et par le rapport de synthèse de M. Raphaël Hadas- positif, très attendu, je crois, proposé par le Gouverne- Lebel, le Gouvernement est en mesure de présenter cette ment sur le numérique hertzien terrestre. Ce volet donne réforme à votre assemblée en second lecture, conformé- toute sa portée aux objectifs de fond de cette réforme, et ment à l’engagement que j’avais pris devant vous. notamment à deux priorités sur lesquelles je souhaite M. Marcel Rogemont. Exactement ! insister : la refondation du service public et la dynamisa- Mme la ministre de la culture et de la communication. tion de l’industrie des programmes. Le dispositif proposé diffère de celui adopté en première Le projet de loi avait fait l’objet d’un examen attentif lecture par le Sénat, dont le travail très complet doit être par le Sénat. A l’occasion de cette seconde lecture, je salué, la Haute assemblée n’ayant disposé du rapport tiens à remercier le rapporteur, M. Didier Mathus, la Hadas-Lebel que la veille du débat. commission et son président, M. Jean Le Garrec, pour le La réforme s’inscrit résolument dans le choix du Gou- travail accompli, qui nous permet, je crois, d’aborder ce vernement de s’engager fortement en faveur d’une large débat dans les meilleures conditions. diffusion des nouvelles technologies. Complémentaire au Je souhaite mentionner une évolution importante du développement d’Internet, la « nouvelle télévision » per- texte par rapport au projet qui vous a été soumis initiale- mettra à un public beaucoup plus large que celui des ment, concernant la situation de la Cinquième et de internautes et des abonnés à la télévision payante de se Arte. Le Gouvernement, sur ma proposition, a finalement familiariser avec de nouveaux moyens de communication. préféré prévoir une organisation distincte pour ces deux M. Rudy Salles. chaînes, en choisissant de maintenir le pôle français Vous n’avez que trois ans de retard ! d’Arte hors du futur groupe France Télévision. Le Sénat Mme la ministre de la culture et de la communication. a voté cette disposition à l’unanimité. Au-delà de puissantes nécessités d’ordre technique, au- S’agissant de la Sept-Arte, comme vous le savez, notre delà de l’avis de la plupart des experts présentant le partenaire allemand s’était inquiété du fait que son inté- déploiement du numérique hetzien comme inéluctable, le gration dans le groupe puisse remettre en cause directe- Gouvernement a choisi de s’engager dans cette voie, par ment l’indépendance d’Arte, garantie par le traité franco- une véritable loi de liberté de la communication,... allemand. Si nous ne partagions pas ces inquiétudes, il est M. Rudy Salles. Par amendements ! toutefois rapidement devenu manifeste que les conditions Mme la ministre de la culture et de la communication. sollicitées pour l’intégration de la Sept-Arte dans le ... qui permettra de développer et de diversifier l’offre groupe risquaient d’en compromettre le bon fonctionne- télévisuelle pour le plus grand nombre, tout en refondant ment. le service public et en dynamisant l’industrie des pro- Il m’a semblé dans ces conditions préférable de cher- grammes. cher à conforter séparément les deux chaînes dans leur Développer et diversifier l’offre télévisuelle pour tous mission et leur vocation. les Français est, en effet, un objectif fort et premier pour La Cinquième, garantie dans le respect de la spécificité le Gouvernement. de ses missions par la loi, est érigée au rang de société Le déploiement du numérique hertzien terrestre devrait nationale de programme, au même titre que France 2 et permettre de donner satisfaction aux nombreux télé- France 3. Chaîne de la connaissance, de la formation et spectateurs désireux de se voir offrir des programmes de l’emploi, elle contribuera, à l’égal des deux autres enrichis et en plus grand nombre. Il permettra notam- chaînes, à conforter le groupe France Télévision dans sa ment le développement des télévisions locales, en parti- vocation à satisfaire les plus larges publics par des pro- culier associatives, répondant à la forte attente de pro- grammes de qualité. grammes de proximité de nos concitoyens. Pour ce qui concerne la Sept-Arte, dont les missions En permettant aux télévisions associatives d’accéder aux sont définies de manière distincte par la loi, elle n’est fréquences numériques, mais aussi analogiques, pour plus seulement chargée de « fournir les programmes et les celles qui souhaiteraient se préparer dans les meilleures

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conditions à la transition, le projet offre un socle au Le régime retenu pour TDF, sur la proposition de développement du « tiers secteur » cher à certains d’entre Christian Pierret, favorisera le développement de cet opé- vous. Pour ma part, je retiendrai volontiers l’idée d’une rateur, tout en ouvrant à la concurrence la diffusion en « télévision citoyenne », venant compléter la télévision de numérique, dont le coût sera beaucoup plus faible qu’en service public et la télévision commerciale. C’est bien là analogique. le signe qu’une nouvelle frontière est tracée pour la télé- L’autorité de régulation sera amenée à jouer un rôle vision. éminent, légitime, car l’attribution prédéterminée de la M. Rudy Salles. Il faut beaucoup d’imagination ! ressource serait très rigide. Pour autant, les interventions du CSA sont très encadrées par la loi, qui prévoit notam- Mme la ministre de la culture et de la communication. ment des régimes prioritaires d’affectation et des critères Les conditions techniques et financières garantissant le précis pour l’allocation de la ressource. développement de la « télévision citoyenne » seront préci- sément évaluées dans les prochains mois. Le CSA devra en premier lieu veiller, afin d’optimiser la gestion de la ressource, à favoriser les regroupements Le développement des nouvelles télévisions est rendu techniques et commerciaux, et à rechercher la plus grande possible par les perspectives d’évolution du marché publi- cohérence dans les regroupements, en se fondant sur les citaire, au-delà même des modifications éventuelles de la propositions des candidats. Il est par ailleurs tenu de réglementation, notamment concernant les secteurs exclus regrouper les chaînes publiques numériques. de publicité ou le recours à la syndication. Il faudra y réfléchir en étroite concertation avec l’ensemble des Sans l’implication forte et immédiate des chaînes acteurs concernés. publiques et des opérateurs privés existants, le déploie- Pour le téléspectateur, la « nouvelle télévision » est une ment rapide du numérique hertzien terrestre serait révolution. N’oublions pas que 80 % des foyers ne sont compromis. C’est pourquoi la loi prévoit tout d’abord pas raccordés au câble ou ne sont pas équipés pour rece- une attribution prioritaire de la ressource au service voir les programmes du satellite. Pour eux, l’introduction public, qui bénéficie d’un traitement particulier. de la nouvelle télévision permettra de recevoir plus de Tout en faisant place à de nouveaux opérateurs, trente chaînes, pour l’essentiel en clair, gratuites et visant notamment locaux, il est indispensable que les chaînes un large public. C’est le choix du Gouvernement. publiques constituent un élément moteur de l’offre pro- posée au public, afin de garantir le pluralisme et la diver- M. Rudy Salles. Vous avez trois ans de retard ! sité des programmes offerts par la nouvelle télévision. Mme la ministre de la culture et de la communication. Il vous est proposé à cette fin d’étendre aux fréquences Le dispositif qui vous est proposé cherche donc à conci- numériques le mécanisme d’attribution prioritaire des fré- lier deux impératifs : d’une part, permettre l’arrivée de quences prévu au bénéfice des chaînes de service public nouveaux acteurs dans la télévision hertzienne et contri- par la loi de 1986. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel buer, au-delà d’une plus grande variété de programmes, à affectera par conséquent en priorité la ressource numé- diversifier le paysage audiovisuel ; d’autre part, inciter les rique nécessaire à la diffusion des chaînes numériques de opérateurs existants, dont l’implication sera essentielle service public, chaque fois que le Gouvernement en aura pour un déploiement rapide du numérique de terre, à fait le choix. migrer rapidement vers ce nouveau mode de diffusion. En second lieu, le CSA devra attribuer deux canaux L’attribution des ressources numériques multiplexe par aux opérateurs privés existants. multiplexe, c’est-à-dire par bloc de canaux, n’a pas été retenue. Cette formule aurait été pénalisante pour les Les opérateurs privés existants doivent, au moins dans nouveaux entrants qui ne seraient pas en mesure de pos- un premier temps, diffuser leurs chaînes analogiques en tuler pour un multiplexe entier. Elle n’aurait pas été la numérique. A défaut, l’offre numérique sera peu attrac- plus satisfaisante au regard de l’objectif de préservation tive pour le public. Il est donc apparu opportun d’affecter du pluralisme des courants d’expression. Attribuer la res- une part de la ressource à ces opérateurs, en contrepartie source par multiplexe conduirait en effet à donner un des charges de diffusion simultanée de leurs programmes blanc-seing à un opérateur pour constituer son offre, pri- analogiques, dites de simulcast, qui pèsent sur eux. vant l’autorité de régulation, le CSA, d’une prérogative Ces opérateurs disposent par conséquent d’un droit à importante. l’attribution automatique d’un canal pour diffuser en L’attribution canal par canal présenterait des inconvé- simulcast leur chaîne analogique. nients inverses si elle n’était pas assortie de mesures favo- En outre, le CSA leur attribuera un canal supplé- risant le regroupement des chaînes et la gestion cohérente mentaire, à condition bien sûr que le service proposé soit des multiplexes. Elle favoriserait certes le pluralisme, mais conforme aux critères posés par la loi. Pour le reste, et au prix d’un éclatement de l’offre audiovisuelle, qui ris- dans la limite du dispositif anti-concentration, qui permet querait d’être préjudiciable à un déploiement rapide du l’attribution de six canaux au plus à un opérateur, les dif- numérique hertzien. fuseurs existants postuleront lors des appels à candidature Le projet préparé par le Gouvernement vise à concilier en concurrence avec de nouveaux opérateurs. Une part l’objectif démocratique de pluralisme et celui d’efficacité, importante de la ressource numérique reste donc dispo- en prévoyant que l’attribution de la ressource relève du nible pour ces derniers. CSA dans le cadre de critères précis fixés par la loi, qui Le dispositif offre des garanties importantes à ces nou- prévoit par ailleurs des mécanismes d’attribution priori- veaux entrants, et devrait favoriser un développement taires. rapide du numérique hertzien. Dans un contexte de croissance retrouvée, qu’il per- L’attribution multiplexe par multiplexe, pénalisante mettra d’amplifier, notamment par son impact sur les pour les nouveaux entrants, a été, je le rappelle, écartée. industries de contenu et de matériels électroniques, ce Le CSA devra favoriser le pluralisme dans l’attribution de projet offre des perspectives à de nombreux opérateurs, la ressource hertzienne, dans le cadre de critères législatifs nouveaux diffuseurs, mais aussi opérateurs de télédiffu- qui donnent toute leur chance aux nouveaux entrants, sion. notamment : l’intérêt du projet pour le public, critère

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essentiel pour favoriser le développement des télévisions gration de RFO dans le groupe France Télévision. J’ai locales ; les engagements du candidat en matière de cou- préféré proposer la solution alternative d’une convention verture du territoire et de contribution à la production entre les deux structures, solution retenue par le Sénat. Je audiovisuelle et cinématographique nationale ; la contri- m’engage à ce que cette coopération étroite conforte RFO bution à un développement rapide du numérique. et prenne en compte dans ses modalités les spécificités de Le CSA veillera aussi à prévenir l’éventuel gel des auto- chacun des DOM ou des TOM, ce qui serait peut-être risations par l’usage des prérogatives dont il est doté par plus difficile dans le cadre d’une intégration dans le futur la loi, qui vaudront aussi pour le numérique hertzien. groupe public. Le distributeur de service, que l’on appelle aussi opéra- L’ensemble des chaînes publiques profiteront du teur de multiplexe, joue un rôle très important. Personne déploiement du numérique. Arte bénéficiera notamment morale indépendante des éditeurs regroupés sur chaque d’une opportunité pour conforter sa vocation de chaîne multiplexe, il est désigné d’un commun accord par les culturelle et européenne et pour accentuer son rayonne- chaînes regroupées sur ce multiplexe. Le CSA est chargé ment international. de veiller à ce que les relations entre chaînes et opérateur Le succès de la réforme du service public audiovisuel de multiplexe soient équitables et non discriminatoires. Il dépend naturellement aussi de la mise à disposition de est doté, à cette fin, de pouvoirs d’arbitrage. Ce dispositif moyens financiers adaptés dans leur montant et leurs offre donc des garanties importantes aux nouveaux diffu- modalités d’affectation. seurs. M. Pierre-Christophe Baguet. Ah ! Quand même ! Un opérateur de télévision peut être à la fois action- naire du distributeur de service et des chaînes regroupées Mme la ministre de la culture et de la communication. sur le multiplexe géré par cet opérateur, afin de ne pas D’une part, France Télévision pourra affecter une part pénaliser ceux qui souhaitent pouvoir s’investir à la fois des recettes de la redevance à l’édition de nouveaux pro- dans l’édition de chaînes et la gestion de multiplexes. grammes de service public gratuits en numérique, en par- ticulier d’information, culturels, éducatifs, de proximité, Le régime d’autorisation est incitatif. Il est prévu une et à la diffusion d’œuvres cinématographiques et audiovi- durée de dix ans qui permet aux opérateurs d’amortir suelles nationales et européennes. Cette option garantit à leurs investissements. En cas de simulcast, la durée de la fois la présence du service public en numérique et l’autorisation délivrée pour la diffusion analogique est l’affectation des ressources publiques à des programmes. portée jusqu’au terme de celle délivrée pour le simulcast, afin d’en harmoniser la date de reconduction par le CSA. L’augmentation de la part des financements publics, au détriment des financements publicitaires, validée par le Deuxième priorité, la refondation du service public de Sénat, garantira un financement pérenne libérant les l’audiovisuel. chaînes publiques d’une dépendance excessive à l’égard Au-delà des préoccupations tenant au pluralisme de des ressources publicitaires. l’offre, il importe de souligner l’impact décisif du passage au numérique pour la réforme du groupe France Télé- M. Laurent Dominati. Mais pas à l’égard du Gouverne- vision autour d’un projet fédérateur qui représente une ment ! véritable chance pour lui. Mme la ministre de la culture et de la communication. La loi traduit sur le plan de l’organisation du groupe Le principe du remboursement intégral, par le budget de France Télévision le choix de l’ambition. France Télé- l’Etat, des exonérations de redevance conduira, je le rap- vision pourra créer des filiales... pelle, à apporter 1,6 milliard de crédits budgétaires sup- M. Olivier de Chazeaux. plémentaires au financement de l’audiovisuel public, ce Avec quel argent ? qui portera le montant total de la compensation à Mme la ministre de la culture et de la communication. 2,5 milliards par an à compter de 2001. ... dédiées à l’édition de programmes en numérique de M. Olivier de Chazeaux. service public, dont les missions seront précisées par un Vous nous l’avez déjà dit ! cahier des charges, et qui pourront recevoir à ce titre une Mme la ministre de la culture et de la communication. part de la redevance. Cette possibilité permettra à la hol- Une fois déduites les sommes correspondant au manque à ding de conduire le développement du groupe dans les gagner en ressources publicitaires, évaluées à ce jour à meilleures conditions. 1,2 milliard de francs, il restera 1 milliard de ressources financières supplémentaires aux chaînes publiques pour M. Rudy Salles. C’est une usine à gaz ! financer l’amélioration de leurs programmes et les pre- Mme la ministre de la culture et de la communication. miers investissements liés au passage au numérique ter- Les missions de la holding sont renforcées pour lui per- restre. mettre de conduire le développement du groupe, animé par une véritable stratégie industrielle, et non seulement M. Olivier de Chazeaux et M. Laurent Dominati. Non ! de le coordonner. Mme la ministre de la culture et de la communication. Cette capacité d’impulsion, conjuguée à la possibilité En invitant les chaînes publiques à jouer un rôle impor- de créer une ou plusieurs filiales, permettra une conduite tant dans la nouvelle télévision, le Gouvernement optimale des projets de développement des trois sociétés n’ignore donc pas les conséquences financières de son nationales de programmes que sont France 2, France 3 et choix. La Cinquième. Placée au même rang que France 2 et M. Olivier de Chazeaux. C’est Harpagon ! France 3, La Cinquième trouvera donc à travers son inté- gration au groupe France Télévision les conditions d’un Mme la ministre de la culture et de la communication. développement ambitieux en numérique. Il lui appartiendra de se prononcer, après un examen attentif, sur les propositions des diffuseurs publics, en M. Rudy Salles. C’est du baratin ! cours d’élaboration. Mme la ministre de la culture et de la communication. Il apparaît d’ores et déjà clairement qu’une montée en Le groupe aura par ailleurs vocation à développer ses liens charge des besoins liés au numérique est prévisible pour avec RFO. La question s’est posée d’une éventuelle inté- l’année 2002. Ils devront néanmoins être pris en compte

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dès la loi de finances pour 2001, le calendrier prévision- tieuse, mettant notamment en valeur le patrimoine et nel permettant d’envisager un lancement du numérique l’actualité culturelle, sous toutes ses formes, qu’il s’agisse au cours du deuxième semestre 2001. du livre, du théâtre, du cinéma, de la musique ou Pour l’heure, ces besoins s’inscivent dans le contexte d’autres formes d’expression. favorable de la mise en œuvre de l’engagement gouverne- Cette exigence constitue la juste contrepartie des efforts mental du remboursement intégral par le budget de l’Etat accomplis pour que cette loi, et l’effort financier qui des exonérations de redevance. l’accompagne, permettent la refondation du service Le maintien de la redevance offre en outre des garan- public. Le succès de la réforme dépend aussi en grande ties essentielles. Ressource indépendante du budget de partie de la mobilisation des équipes de la télévision l’Etat et dont la progression spontanée est régulière − de publique, qui m’apparaissent très motivées par les pers- l’ordre de 400 millions de francs par an −, la redevance pectives qu’offre la nouvelle télévision. garantit dans la durée l’autonomie de fonctionnement de Le deuxième grand objectif du projet de loi est de l’audiovisuel public. dynamiser l’industrie des programmes. Le renforcement M. Laurent Dominati. Et l’autonomie par rapport au de notre industrie des programmes est en effet une néces- Gouvernement ? sité. Sous-financée, elle est en situation précaire au regard Mme la ministre de la culture et de la communication. de celle de nos partenaires allemands, britanniques et Nous attendons de la mise en place du groupe la réalisa- espagnols. La situation de l’industrie cinématographique tion de gains de productivité, et donc des économies. est certes meilleure chez nous, si l’on observe l’évolution Cependant, le fruit des synergies résultant de la nouvelle de la part de marché du film français en salle − 30 % en stratégie, même s’il n’est pas négligeable, ne permettra 1999 −, mais elle doit être améliorée. Cette situation sans doute pas de couvrir l’ensemble des besoins de paradoxale, au moment où de nouvelles opportunités, financement de France Télévision. notamment d’exportation, sont offertes par l’émergence Je crois par conséquent, comme le rapporteur et d’une nouvelle économie, doit être corrigée. comme beaucoup d’entre vous, que des ressources finan- La préservation et le développement d’une grande cières complémentaires devront être recherchées. diversité dans la production d’œuvres audiovisuelles et M. Olivier de Chazeaux. Ah ! cinématographiques constituent un impératif, si nous voulons résister à une américanisation totale et permettre Mme la ministre de la culture et de la communication. à nos industries de contenu de profiter d’une croissance Le moment venu, une dotation spécifique significative, retrouvée. dont le montant dépendra des projets finalement retenus, sera attribuée.... Une étape importante vient d’être franchie dans les relations entre cinéma et chaînes payantes par un accord M. Michel Françaix. Et voilà ! négocié entre un grand opérateur et l’ensemble des orga- M. Laurent Dominati. La DSS ? nisations professionnelles du cinéma, que j’ai pu réunir autour d’une même table la semaine dernière. Négocié Mme la ministre de la culture et de la communication. pour cinq ans, cet accord garantit un engagement à haut ... pour permettre le démarrage du groupe dans les meil- niveau en faveur de l’industrie cinématographique, tout leures conditions, son développement en numérique et un en offrant de sérieuses garanties de fluidité du marché. investissement complémentaire dans les programmes,... Les principes sur lesquels il repose me semblent devoir M. Michel Françaix. Très bien ! inspirer durablement les relations entre producteurs et chaînes payantes qui ont le privilège de diffuser des films Mme la ministre de la culture et de la communication. en première exclusivité. ... rendu nécessaire par l’élargissement de l’offre de service public et le renforcement de ses missions. M. Jean Le Garrec, président de la commission des En contrepartie des moyens juridiques et financiers mis affaires culturelles, familiales et sociales. Très bien ! en place dans le cadre de la réforme, il est important que Mme la ministre de la culture et de la communication. soit amplifié à l’avenir l’effort accompli par la télévision Si nous pouvons prévenir, par ces principes, tout risque publique en faveur de la création, de l’innovation et de la de dérégulation du secteur du cinéma, qui serait fatal à la diversité. création, je souhaite vous faire part de ma préoccupation En tant qu’actionnaire et responsable de la tutelle de face à la dégradation de la situation de la création audio- France Télévision, le Gouvernement s’attachera à ce que visuelle. soit assurée la satisfaction de l’ensemble des publics par Des Etats généraux de la création audiovisuelle se sont des programmes variés, notamment lors de l’élaboration tenus hier. Une émotion qui ne peut nous laisser insen- des cahiers des charges et des contrats d’objectifs et de sibles s’y est fortement exprimée. moyens, en accordant une large place aux œuvres origi- nales, dans l’ensemble des genres, de la fiction au docu- M. Pierre-Christophe Baguet. La cagnotte, la cagnotte ! mentaire. Mme la ministre de la culture et de la communication. Cette réforme offrira au service public une formidable Quelques chiffres cités me confortent dans ma détermina- opportunité pour prendre des risques, tant dans les pro- tion à remédier à une situation préoccupante : 600 heures grammes proposés que dans le choix des horaires, des for- de fictions sont produites chaque année en France, contre mats et des thèmes traités. Le public et les créateurs sou- 1 300 en Grande-Bretagne et 2 000 en Allemagne ; les haitent voir des œuvres françaises audacieuses, ou des fictions nationales représentent 47 % des fictions diffu- émissions novatrices, présentées à des horaires variés en sées en première partie de soirée, contre 70 % en Alle- journée comme en soirée. Ces attentes sont légitimes. Je magne et 90 % en Grande-Bretagne, alors que nos fic- serai, pour ma part, très attentive à ce que le relâchement tions nationales réalisent d’excellentes audiences. Nos de la contrainte d’audience lié à la réduction de la durée entreprises sont trop peu présentes sur les marchés étran- de la publicité se traduise par une programmation ambi- gers, dégagent des marges bénéficiaires insuffisantes, sans

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commune mesure avec celles des diffuseurs privés, floris- engagée avec tous les acteurs concernés : elle prendra en santes, et dont la capitalisation boursière connaît une compte l’ensemble des instruments disponibles pour sti- croissance sans précédent. muler la création. Si nous ne pouvons que saluer cette bonne santé des La dynamisation de l’industrie des programmes a natu- diffuseurs, qui doit leur permettre de se développer au rellement constitué aussi un axe prioritaire du dispositif plan international et de mener une nécessaire diversifica- relatif à la télévision numérique hertzienne, dont les effets tion, je crois aussi indispensable d’infléchir une tendance à moyen terme sont, je crois, très stimulants pour la créa- qui conduirait à priver les créateurs de contenu, première tion audiovisuelle et cinématographique. Il nous faut en richesse de la nouvelle économie, des fruits de sa crois- effet apporter des réponses à la mesure de l’enjeu : assurer sance. la diversité, la qualité et le volume de notre création Sans même prendre en compte les effets du passage au audiovisuelle nationale, à l’heure de la mondialisation qui numérique hertzien terrestre, la loi permettra une forte nous menace d’uniformisation, et de la nouvelle écono- relance de la production audiovisuelle. mie dont l’industrie des contenus constitue la principale richesse. M. Laurent Dominati. Comment ? Le déploiement du numérique hertzien constituera une opportunité nouvelle pour l’industrie des programmes. Mme la ministre de la culture et de la communication. La réforme du financement du service public aura un fort M. Olivier de Chazeaux. Ce n’est pas dans le texte ! impact sur l’industrie des programmes : par l’apport de M. Rudy Salles. On brode ! ressources publiques, d’une part, l’évolution des ressources publiques excédant la baisse des recettes provenant de la Mme la ministre de la culture et de la communication. publicité, comme je viens de l’indiquer ; par les transferts Le numérique hertzien terrestre ne devra pas conduire à d’une partie de ces recettes vers les autres diffuseurs, la seule diffusion des chaînes existantes, même améliorée d’autre part. par l’offre d’horaires décalés ou de services associés. Il est de ce fait apparu primordial de prendre en compte la En 2001, ce double effet permettra un financement contribution à la production nationale et européenne complémentaire de l’ordre de 500 millions de francs au dans les critères d’attribution de la ressource hertzienne. bénéfice de la production cinématographique et audiovi- De même, il est prévu, comme pour la diffusion analo- suelle, par le jeu des obligations de production et de la gique, un régime complet d’obligation pour les diffu- taxe alimentant le compte de soutien, à laquelle toutes les seurs : quotas de diffusion, contribution à la production, ressources publiques et privées, et toutes les chaînes, sont notamment indépendante. assujetties. L’offre de nouvelles chaînes, accompagnée d’une limi- Plusieurs mesures nouvelles favoriseront le développe- tation de la durée de détention des droits de diffusion, ment de la création : la soumission de l’ensemble des dif- permettra le développement d’un nouveau marché favori- fuseurs − hertziens, par câble et par satellite − à des obli- sant l’amortissement des catalogues d’œuvres existantes, et gations de contribution à la production ; la mise en place donc l’amélioration de la situation financière des produc- de dispositions favorisant la fluidité des droits et le ren- teurs. En outre, une audience élargie et la création de forcement de la production indépendante, que le texte nouvelles chaînes conduiront à une augmentation globale qui vous est proposé dote d’un statut législatif. des recettes publicitaires des diffuseurs, et donc des inves- La profession audiovisuelle réunie hier à l’occasion des tissements dans la production de nouvelles œuvres. Etats généraux a insisté sur la nécessité absolue d’amélio- Au-delà de la relance de la production rendue possible rer les conditions de financement du service public. A ce par le jeu combiné de l’ensemble de ces dispositions, des titre, j’ai annoncé des mesures importantes : crédits bud- aspects plus qualitatifs doivent être soulignés. Par la flexi- gétaires de 2,5 milliards de francs en faveur de l’audiovi- bilité de diffusion offerte, dans les horaires notamment, suel public, en sus du produit de la redevance, sur- par le développement de nouvelles chaînes et l’arrivée de compensant la baisse des recettes de publicité ; nouveaux diffuseurs, le passage au numérique permettra financement complémentaire sous forme d’une dotation une plus grande diversité dans la programmation. spécifique substantielle pour conforter France Télévision. Mesdames et messieurs les députés, mon intervention Ces Etats généraux ont également exprimé une attente pour cette deuxième lecture se devait d’être un peu forte pour que soient prises des mesures permettant longue. d’améliorer la situation de la production indépendante. Je M. Rudy Salles. Par rapport à ce qu’elle a été en vous propose par conséquent d’adopter, par la voie légis- commission, oui ! lative, une mesure dont la portée me semble cruciale pour tous les producteurs, qui, je pense, y verront plus Mme la ministre de la culture et de la communication. qu’un signe : la suppression de la prise en compte des En conclusion d’un propos qui se voulait aussi explicite parts de coproduction dans le décompte des obligations et pédagogique que possible, je puis affirmer que le projet des diffuseurs en faveur de la production indépendante. que je vous propose, ainsi amendé par le Gouverne- ment,... M. Laurent Dominati. Ce n’est pas nous qui avions M. Rudy Salles. Très amendé ! proposé cela ? Mme la ministre de la culture et de la communication. Mme la ministre de la culture et de la communication. ... répond à une première ambition, celle d’un véritable Ainsi, les producteurs indépendants disposeront des droits progrès démocratique avec la nouvelle télévision. correspondants qu’ils pourront valoriser au mieux. Ils retrouveront ainsi la jouissance d’une part importante de M. Michel Françaix. Mais bien sûr ! leur patrimoine. M. Marcel Rogemont. Excellent ! Une seconde étape commencera dès l’issue de notre Mme la ministre de la culture et de la communication. débat, notamment en prévision de l’élaboration des La diversité des chaînes s’accompagnera de la diversité du décrets d’application de la loi. Une large concertation sera choix pour tous les Français.

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M. Rudy Salles. Avec trois ans de retard ! M. Marcel Rogemont. Vous l’apprendrez par la presse ! Mme . C’est pour bien faire ! Mme Nicole Feidt. Il ne faut pas exagérer, tout de même ! Mme la ministre de la culture et de la communication. En même temps, cette loi assure l’équilibre entre le sec- M. Laurent Dominati. Aussi, monsieur le président, je teur privé et le secteur public... laisse le choix au Gouvernement : soit nous suspendons la séance, soit il nous expose, ici-même − et cela prendra le M. Pierre-Christophe Baguet. Il y en a pour tout le temps qu’il faudra − la réforme annoncée aux Français. monde ! M. le président. Monsieur Dominati, souhaitez-vous Mme la ministre de la culture et de la communication. réunir votre groupe ? ... est favorable à l’expression citoyenne par l’ouverture M. Laurent Dominati. Oui, monsieur le président. des fréquences analogiques et du numérique hertzien de terre aux chaînes locales, aux chaînes associatives. M. Rudy Salles. Nous souhaitons réunir notre groupe devant la télévision ! (Sourires.) M. Michel Françaix. Très bien ! Mme Catherine Tasca. C’est dérisoire ! Mme la ministre de la culture et de la communication. M. Marcel Rogemont. Enfin, l’industrie des programmes est renforcée, car c’est Et scandaleux ! cela, le nerf de la guerre. Avec cette loi, nous devons non M. le président. La suspension est de droit, M. Domi- seulement redonner espoir à l’ensemble des produc- nati ayant délégation de son groupe. teurs, ... Suspension et reprise de la séance M. Rudy Salles. Que ne l’avez-vous fait il y a un an, madame ? M. le président. La séance est suspendue. Mme la ministre de la culture et de la communication. (La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est ... mais permettre à tous les Français de bénéficier de la reprise à dix-sept heures cinquante.) capacité créatrice de ceux qui alimentent la filière de M. le président. La séance est reprise. l’audiovisuel et du cinéma français. La parole est à M. le rapporteur de la commission des M. Rudy Salles. Que ne l’avez-vous fait en première affaires culturelles, familiales et sociales. lecture ? M. Didier Mathus, rapporteur de la commission des Mme la ministre de la culture et de la communication. affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le pré- J’ai donc confiance dans l’examen attentif que votre sident, madame la ministre, mes chers collègues, avant assemblée fera de ces dispositions, et je me réjouis que, d’évoquer les évolutions que comporte le texte qui nous grâce au Gouvernement, soucieux de répondre à l’attente est soumis en deuxième lecture, je voudrais rappeler les des Français par la refondation du service public, une éléments essentiels du projet tel que nous l’avions amendé télévision vraiment évolutive et proche des citoyens soit et adopté en première lecture, il y a près d’un an. possible. Je vous propose de saisir cette occasion. (Applau- Le texte était composé de trois volets essentiels : dissements sur les bancs du groupe socialiste.) Le premier portait sur la refondation de la télévision M. Rudy Salles. Les Français attendent la holding. publique avec la création d’une holding, la baisse du recours à la publicité et l’attribution de moyens supplé- M. Olivier de Chazeaux. Allez, on zappe ! mentaires par le remboursement intégral des exonérations de redevance ; Rappel au règlement Le deuxième volet concernait sur la transcription de deux directives européennes dans notre droit ; M. Laurent Dominati. Je demande la parole pour un Le troisième volet, enfin, établissait un dispositif pour rappel au règlement. favoriser et organiser la concurrence et le pluralisme dans de meilleures conditions de transparence. M. le président. La parole est à M. Laurent Dominati, pour un rappel au règlement. Notre assemblée avait amendé ce texte sur des points importants pour en renforcer l’efficacité et avait, en parti- M. Laurent Dominati. Mon rappel au règlement se culier, établi le principe du développement de la télé- fonde sur l’article 58 du règlement, monsieur le pré- vision numérique dans son article 29 bis, par un amende- sident. ment que je vous avais proposé. En ce moment même, le Premier ministre expose un Aujourd’hui, le Gouvernement, au travers des amende- important plan sur les retraites. Cela intéresse notamment ments qu’il nous propose, répond donc à l’attente de la représentation nationale. Comme tout citoyen, je sou- notre assemblée sur ce sujet et en particulier à l’impa- haiterais être informé de ses déclarations. C’est pourquoi tience que l’opposition avait alors manifestée aux cris de : je demande soit une suspension de séance pour que nous « Le numérique ! Le numérique ! Le numérique ! » Eh puissions étudier les propositions du Premier ministre, bien, le numérique, le voilà ! soit un exposé de Mme la ministre, membre du Gouver- M. Olivier de Chazeaux. Grâce à nous ! nement, sur ces propositions. M. Laurent Dominati. Heureusement que nous sommes M. Rudy Salles. C’est intéressant ! là ! Que feriez-vous sans nous ! M. Marcel Rogemont. La retraite, c’est le Sénat ! M. le président. Laissez parler le rapporteur ! M. Laurent Dominati. Certes, le projet de loi dont M. Didier Mathus, rapporteur. Dans l’intervalle, le bud- nous discutons nous intéresse. Mais il me semblerait get de 2000 a déjà permis au Gouvernement de tenir la anormal que les journalistes et les citoyens soient tenus première partie de ses engagements financiers en appor- informés de la conférence de presse du Premier ministre, tant un financement supplémentaire de 900 millions de et que les députés ne le soient pas. francs à la télévision publique.

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Par ailleurs, les négociations avec nos partenaires alle- une grande diversité de services, comme l’accès à Internet mands au sein d’Arte ont conduit le Gouvernement à et le téléphone ; le satellite offre une richesse de pro- modifier, lors de la lecture au Sénat, le dispositif de la grammes qui restera vraisemblablement inégalée et qui holding en défusionnant Arte et La Cinquième pour répond à une logique thématique de ciblage de maintenir Arte en dehors de la holding. On peut s’éton- l’audience ; quant au numérique hertzien, il devrait béné- ner de la vigueur de l’argumentation allemande, .. ficier de sa simplicité de réception, des perspectives de M. Laurent Dominati. Oui ! portabilité et de son prix. M. Didier Mathus. ... de cet attachement soudain à une Ces modes de diffusion seront également complémen- cause prétendument menacée, alors que Arte est confinée taires sur le plan géographique, les zones d’ombre de la en Allemagne à une distribution marginale sans que les diffusion hertzienne pouvant aisément être couvertes par mêmes ne s’en émeuvent. le satellite, par exemple. M. Laurent Dominati. L’apparition du numérique hertzien peut être une C’est exact ! révolution pour la télévision. C’est, d’une certaine façon, M. Didier Mathus, rapporteur. Mais prenons-en acte et la fin de la télévision telle qu’elle a été fondée dans les faisons en sorte que les coopérations entre la future hol- années 50 et 60 qui s’amorce. Mais c’est aussi la rupture ding et Arte soient les plus fructueuses possible et que, avec la tendance qui avait vu, ces dernières années, une par ailleurs, La Cinquième trouve toute sa place dans le montée en puissance des télévisions payantes apparem- holding et puisse y conforter ses missions spécifiques et ment inéluctable. Le numérique, d’une certaine façon, son identité. peut être la revanche de la télévision gratuite. La nouveauté importante de cette deuxième lecture réside donc dans le dispositif que vous venez de nous M. Jean Le Garrec, président de la commission. Très exposer, madame la ministre, pour développer dans notre bien ! pays la télévision numérique terrestre. M. Didier Mathus, rapporteur. Multiplicité des chaînes, Rappelons succinctement de quoi il s’agit : la diffusion multiplicité des opérateurs, horaires décalés, interactivité : numérique permet d’améliorer considérablement la qua- la façon de regarder la télévision ne sera plus jamais la lité de l’image et du son transmis. Mais c’est surtout la même, et son rôle dans la société s’en trouvera profondé- multiplication des capacités de diffusion qui fait le grand ment modifié. intérêt du numérique. La compression des six fréquences Cela met, bien sûr, en cause des enjeux importants. aujourd’hui disponibles en analogique permettra, selon l’Agence nationale des fréquences, de disposer d’au moins Enjeu citoyen : le morcellement de l’audience va accen- trente-six canaux répartis en six multiplexes de chacun six tuer l’affaiblissement du rôle fédérateur des grandes canaux dont quatre couvriront 80 % du territoire natio- chaînes hertziennes, ce qui doit être un sujet de préoc- nale et deux, 60 %. cupation. Leur fonction éminente dans la construction de l’imaginaire social et des représentations collectives s’ame- La diffusion numérique débute, selon des modalités nuisera peu à peu au profit de modes de consommation variables, dans la plupart des pays développés. A l’excep- télévisuelle plus segmentés et plus communautarisés. Il est tion des Etats-Unis, où le basculement total de l’analo- donc légitime que la collectivité veille à donner au service gique sur le numérique est prévu en 2006, compte tenu public un rôle central dans la télévision numérique pour du dispositif très contraignant et d’ailleurs fort peu libéral garantir un certain nombre de valeurs. Je salue le choix mis en place par la FCC, la plupart des pays envisagent qui a été fait par le Gouvernement de donner à la télé- ce basculement à l’horizon 2010. vision publique une place prépondérante, prioritaire et Depuis notre première lecture, le Gouvernement a pro- centrale dans le futur dispositif. cédé à de nombreuses consultations. Plusieurs rapports sont venus nourrir la réflexion collective en particulier le De la même façon, le progrès technologique et la rapport Cottet-Eymery et le rapport Hadas-Lebel. baisse des coûts introduits par le numérique devraient faciliter l’éclosion de télévisions locales. Il y a indis- Le lancement d’une large consultation, en juin 1999, cutablement un besoin très fort de télévision de proximité sur la base d’un Livre blanc, a permis au ministère de la dans notre pays et le numérique doit être l’occasion d’y culture et de la communication de solliciter l’avis de répondre. 300 membres et représentants du secteur audiovisuel, de la presse écrite, des télécommunications, des collectivités Enjeu du pluralisme : le numérique est une chance locales et du monde associatif sur le passage au numé- pour le pluralisme. Plus de chaînes, c’est plus de conte- rique de terre. Les particuliers ont également pu inter- nus, plus de capacités d’enrichissement, plus d’opérateurs venir via Internet. pour plus de démocratie. Il y a donc nécessité de faciliter Un large accord sur la nécessité de la numérisation de l’émergence de nouveaux opérateurs nationaux et locaux. la diffusion hertzienne terrestre s’est dégagé de cette La télévision française, on le sait, est dans une situation consultation. Certes, les opérateurs du câble et du satellite unique pour un pays démocratique. La faiblesse de la ont fait montre d’une certaine réserve, craignant très cer- concurrence, la situation ultra dominante d’un seul et tainement que cette nouvelle offre vienne concurrencer la même opérateur qui capte à lui seul 55 % du marché leur, mais, globalement, la numérisation de la diffusion publicitaire,... hertzienne est apparue comme inéluctable et génératrice de nombreux progrès, comme la diversification de l’offre M. Michel Françaix. Eh oui ! de programmes, l’ouverture vers la portabilité des récep- M. Didier Mathus, rapporteur. ... l’absence de préoc- teurs, le développement des programmes locaux, une cupation internationales pour la plupart des opérateurs, à meilleure qualité de l’image et du son, un enrichissement l’exception de Canal Plus mais sur le créneau spécifique global de l’offre télévisuelle. de la TV payante, tout cela nous mène à une sorte d’as- En fait, le câble, le satellite et le hertzien terrestre ne phyxie dont les Etats généraux des producteurs, qui se sont pas contradictoires et ne doivent pas être en compé- sont tenus hier, ont été un témoignage tout à fait éclai- tition. Je crois que chacun a ses atouts : le câble permet rant.

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L’avènement du numérique est une occasion unique Les discussions précédant l’examen de ce texte nous d’ouvrir les fenêtres, d’apporter de l’oxygène à la création auront montré que la cohabitation est une période qui se télévisuelle et d’établir enfin un véritable pluralisme des prête mal à une réforme du CSA. Cela reste à mon sens opérateurs dans ce pays. Il n’est pas si fréquent d’être face une question non résolue, qu’il faudra bien un jour à une telle opportunité de création brute de richesses. remettre sur le métier. Pour que ce basculement bénéfique sur le numérique M. Laurent Dominati. Eh bien ! Osez ! se produise, il faut, bien sûr, « donner envie » aux consommateurs en leur assurant au minimum une trans- M. Didier Mathus, rapporteur. Le dispositif proposé par cription de la télévision analogique par simulcast, mais, le Gouvernement ne prétend donc pas tout régler par la au-delà, leur proposer une offre considérablement accrue. loi. Il fait le pari d’un CSA intelligent et audacieux, et d’entreprises ambitieuses et innovantes. Dans un domaine où la technologie progresse à très grande vitesse, nul ne peut avoir de certitudes sur les évo- M. Olivier de Chazeaux et M. Laurent Dominati. C’est lutions à venir. Mais personne ne peut mettre en doute la méchant ! nécessité de convertir la distribution de télévision au M. Patrice Martin-Lalande. Ce n’est même pas une numérique. Cela reste en effet aujourd’hui le dernier insinuation ! maillon de la chaîne de la production d’images à fonc- tionner en analogique. Sa mutation est irréversible. M. Jean-Michel Marchand. De temps en temps, il faut Certains mettent en doute l’intérêt de cette « migra- bien revenir en arrière ! (Sourires.) tion » de l’analogique au numérique au motif que les pro- M. Didier Mathus. Plusieurs opérateurs français ont grès fulgurants des hauts débits sur Internet condamne- commencé de réfléchir aux contenus de ces futurs canaux raient à terme la télévision. Certes, on voit se dessiner numériques. France Télévision, en particulier, a travaillé une zone de superposition entre l’interactivité de l’Inter- avec beaucoup de dynamisme sur différentes hypothèses. net et celle de la télévision numérique. Mais je crois que J’ai le conviction que nous avons trop raisonné, au début la prégnance des usages ne disparaîtra pas rapidement. de la réflexion sur le numérique hertzien, en imaginant La consommation d’Internet ne revêt pas les mêmes une simple déclinaison du numérique satellitaire... formes et n’obéit pas aux mêmes motivations que celle de M. Michel Françaix. Très juste ! la télévision. Il y aura sûrement conflit d’usage entre une télévision interactive de plus en plus portable, de plus en M. Didier Mathus, rapporteur. ... et selon une logique plus mobile, et un Internet de plus en plus rapide, mais il de niches thématiques. Je crois qu’il en sera dans l’avenir serait irresponsable de geler aujourd’hui une mutation autrement : le numérique hertzien, ce sera d’abord de la aussi essentielle en s’appuyant sur les incertitudes natu- télévision gratuite concernant la quasi-totalité de la popu- relles de l’avenir. lation avec des réseaux couvrant 80 %... Le dispositif que nous propose le Gouvernement par M. Marcel Rogemont. Très bien ! une série d’amendements répond à une logique et à la nécessité d’« ouvrir les fenêtres ». Mme Catherine Tasca. C’est important ! Une place centrale est réservée au service public avec M. Didier Mathus, rapporteur. On se trouvera dans une une transcription pour le numérique du dispositif priori- tout autre logique que celle des chaînes thématiques avec taire dont bénéficie déjà le service public dans l’analo- des satellites payants. gique. M. Marcel Rogemont. Il ne faut pas qu’il n’y ait que Le service public aura les fréquences dont il a besoin. Il de la télévision payante ! La télévision doit être pour tout jouira de la souplesse de fonctionnement qui lui permet- le monde, même pour ceux qui n’ont pas d’argent ! tra de créer des filiales et d’assumer son développement numérique. M. Didier Mathus, rapporteur. Bien sûr, de nombreuses questions se posent sur le financement, élevé, du bas- Pour ce qui concerne les services privés, le simulcast culement sur le système numérique. s’accompagnera d’un plafond d’un certain nombre de canaux. J’ai noté avec beaucoup de satisfaction, madame la ministre, votre annonce d’une dotation spécifique en Ainsi que nous le verrons à la faveur de notre dis- faveur de France Télévision... cussion, il est essentiel de vérifier que l’équilibre entre ser- vice public, d’un côté, et opérateurs existants et nouveaux M. Jean Le Garrec, président de la commission, et entrants de l’autre, permette une véritable fluidité du sys- M. Michel Françaix. Très bien ! tème. Le CSA doit être capable de répondre aux attentes M. Didier Mathus, rapporteur. ... lui permettant d’assu- qui sont les nôtres afin que le numérique constitue un rer ses missions de service public dans le développement vrai progrès pour la télévision dans notre pays. Le dispo- numérique. sitif qui nous est proposé par les amendements du Gou- vernement doit permettre de répondre à ce besoin. M. Marcel Rogemont. C’est essentiel ! Le dispositif donne un rôle majeur au CSA dans la M. Didier Mathus, rapporteur. J’étais convaincu que le mise en place du numérique. Beaucoup d’observateurs se choix et les arbitrages du Gouvernement qui donnent une sont interrogés et s’interrogent encore, au vu des états de place centrale au service public étaient raisonnés. Le Gou- service du CSA, sur sa capacité à être un véritable orga- vernement en a bien mesuré les implications, ce qui veut nisme de régulation. Ses récents atermoiements sur la dire qu’il faut assurer un financement public. Nous question de la publicité Internet nourrissent cette inter- devons alors poser de nouveau la question d’une nouvelle rogation. Il est pour le moins surprenant que, parfois, le ressource pour l’audiovisuel public,... CSA s’arroge des attributions réglementaires qu’il n’a pas, M. Laurent Dominati. Créez une taxe ! alors qu’il a usé avec tant de timidité de ses pouvoirs réels à l’égard des opérateurs. (Exclamations sur les bancs du M. Patrice Martin-Lalande. Oui, une taxe sur les télé- groupe Démocratie libérale et Indépendants.) communications !

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M. Didier Mathus, rapporteur. ... sachant où nous en M. Marcel Rogemont. Excellent ! sommes avec la redevance, comme tous les pays euro- péens. Exception d’irrecevabilité M. Laurent Dominati. Allez ! Instituez-nous donc une petite taxe ! M. le président. J’ai reçu de M. José Rossi et des M. Didier Mathus, rapporteur. Il faut donc que l’Etat membres du groupe Démocratie libérale et Indépendants assume pleinement ses responsabilités et qu’il donne des une exception d’irrecevabilité déposée en application de missions importantes à la télévision publique. l’article 91, alinéa 4, du règlement. Je suis intimement convaincu que la nation a le devoir La parole est à M. Laurent Dominati, pour une durée d’imposer pour le service public une place prioritaire, qui ne peut excéder trente minutes. centrale, sur le numérique hertzien. (M. Jean Le Garrec, M. Laurent Dominati. Monsieur le président, j’avais président de la commission, et M. Marcel Rogemont applau- demandé tout à l’heure une suspension de séance pour dissent.) l’informer des propos du Premier ministre. Cela va me Réfléchissons aux conséquences qu’auront dans la permettre d’informer l’Assemblée en donnant lecture de société ces nouvelles formes de télévision, ces nouvelles deux dépêches de l’AFP. façons de regarder la télévision, et considérons l’affai- La première précise que « M. Lionel Jospin indique blissement quasi inéluctable du rôle fédérateur des qu’il n’est pas nécessaire d’allonger la durée de cotisations grandes chaînes hertziennes que nous avons connues du régime général » et la seconde que « M. Jospin plaide depuis quarante ans ! pour l’allongement de la durée de cotisations ». Il y aura donc un changement profond. Le service On appréciera la clarté des propos du Premier public doit être au premier rang de cette mutation car il ministre. J’y vois, madame la ministre, une sorte de y va des valeurs collectives qu’incarne l’idée de la nation. méthode de gouvernement, celle des effets d’annonce et Je pourrais également parler de ce qu’avait fait le CSA d’une certaine confusion. concernant les nouvelles possibilités de financement par la En ce qui concerne la télévision, le rapporteur a exposé publicité. Mais il me semble qu’il faut faire le contraire vos choix et votre projet de loi, ainsi que vous l’aviez fait de ce qu’a fait le CSA : plutôt que de décréter, il faut dis- vous-même. cuter ! Compte tenu d’une longue habitude d’intervention du Mme Catherine Tasca. Très bien ! législateur et du Gouvernement dans le secteur de M. Didier Mathus, rapporteur. Il convient surtout de l’audiovisuel, il peut sembler étonnant qu’un parle- réfléchir à une chose essentielle : si l’on doit mobiliser de mentaire vienne défendre une exception d’irrecevabilité, nouvelles sources de financement, y compris en dérégu- c’est-à-dire d’expliquer que le texte est inconstitutionnel. lant en partie les interdits concernant certains aspects de Avec près de sept cents textes réglementaires, on est habi- la publicité, ce doit être en produisant des richesses, et tué à ce que l’Etat intervienne dans ce secteur. donc au profit soit d’opérateurs nouveaux, soit de nou- Mais pour assurer qu’un projet de loi soit constitution- velles formes d’expression, soit de la création. nel ou inconstitutionnel, il faut savoir exactement de quel Il est impératif que l’on n’« égalise » pas cette ressource projet de loi il s’agit. J’en viens donc à votre texte. éventuelle en la distribuant inconsidérément : on doit M. Patrice Martin-Lalande. Lequel ? veiller à ce qu’elle serve à la création de richesses supplé- mentaires. M. Laurent Dominati. Oui, lequel ? Et cette question nous renvoie à la méthode Jospin. La télévision numérique est sans doute un formidable progrès démocratique. C’est plus de contenu et plus Vous êtes arrivée au Gouvernement après une cam- d’opérateurs, c’est-à-dire plus de démocratie. C’est encore pagne électorale où vous avez annoncé un projet de loi forcément plus de moyens d’expression, et donc plus de qui aurait pour but de moraliser, en quelque sorte, la moyens tout court pour la création audiovisuelle dans ce télévision en général, privée en particulier, notamment en pays. Il s’agit donc, au-delà du vocabulaire technique qui ce qui concerne les grands groupes de communication peut paraître un peu hermétique à nos concitoyens, d’un qui possédaient des chaînes privées et qui étaient en rela- formidable enjeu. tion avec l’Etat par le biais des marchés publics. C’était au mois de juin 1997. Je suis très heureux que le Gouvernement ait pu hono- rer, dans un délai difficile à tenir, ... Au mois de janvier 1998, déjà avec un peu de retard sur votre calendrier initial, vous annonciez, d’une part, M. Marcel Rogemont. Exact ! que la télévision publique serait coiffée par une holding, Plusieurs députés du groupe Démocratie libérale et France Télévision, et, d’autre part, qu’il y aurait un sys- Indépendants. C’est de l’humour ? tème de comité interne de surveillance ou de conseils de directoire pour les télévisions privées, un système d’auto- M. Didier Mathus, rapporteur. ... l’engagement, formulé il y a moins d’un an, d’une grande consultation sur le contrôle, si je me souviens bien. Mais vous avez aban- numérique hertzien. donné tout cela et vous avez bien fait. Finalement, les groupes privés ont fait valoir une certaine réalité de la Je salue la ténacité de Mme la ministre pour avoir télévision. conduit cette consultation et fait éditer les rapports. Ainsi, nous disposons, pour cette deuxième lecture, de En juin 1998, le groupe socialiste venait à votre tous les éléments nous permettant de mettre en œuvre secours − était-ce vraiment à votre secours ? − et indiquait une véritable révolution de la télévision. qu’il allait commettre un dispositif de loi anti-concentra- tion pour contrer la pression que les chaînes exerçaient M. Laurent Dominati. Non ! Nous ne disposons pas de sur le Gouvernement. « tous » les éléments ! En septembre 1998, il y eut un premier texte sur la M. Didier Mathus, rapporteur. C’est extrêmement posi- télévision publique et vous annonciez qu’un autre texte tif. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) sur la télévision privée viendrait plus tard. Le premier

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texte prévoyait la réduction de la publicité − on y est Vous avouez vous-même que vous ne savez pas quel encore −, la holding − on y est encore un peu. Mal- sera l’effet du texte pour les chaînes publiques, ne heureusement, le Conseil d’Etat a qualifié ce texte d’at- serait-ce qu’en matière financière. tentatoire aux libertés publiques. On pourrait dire que l’intérêt du texte est reconnu Au mois de décembre, sous la pression du groupe puisque celui-ci prévoit une réduction de la publicité, socialiste qui voyait dans votre première proposition un laquelle est déjà en œuvre, ainsi que la fameuse obligation cadeau monumental fait aux chaînes privées, contraire- pour l’Etat de rembourser les exonérations de redevance. ment aux intentions affichées lors de votre campagne Mais je vous ferai observer que la première de ces deux électorale, vous avez dû retirer ce texte. mesures est de nature réglementaire et que l’on n’a donc La nouvelle mouture que vous avez proposée à pas besoin d’un texte de loi pour réduire la publicité sur l’Assemblée nationale en mai 1999 n’a pas été, quant à les chaînes publiques. Quant à la seconde, le rembourse- elle, soumise au Conseil d’Etat. Dans ce texte, vous avez ment des exonérations de redevance par l’Etat, c’est la loi prévu un certain nombre de modifications, notamment le de finances qui est concernée. fameux amendement « redevance », qui assurait le rem- M. Michel Françaix. Pendant vingt ans, on n’a rien eu ! boursement des exonérations de redevance aux chaînes M. Laurent Dominati. D’ailleurs, la dernière loi de publiques mais qui, en réalité, n’était que virtuel, seule la finances n’a pas acté le remboursement intégral des exo- loi de finances pouvant décider du montant de la rede- nérations de la redevance au secteur public. vance et de son affectation. Vous avez de plus intégré la directive européenne. M. Michel Françaix. On n’a rien eu pendant vingt ans Enfin, vous confirmiez à l’Assemblée nationale que ce et, en plus, il mégote ! premier texte − le projet de loi dont nous débattons en M. Laurent Dominati. On a là la preuve que c’est la loi deuxième lecture − ne concernait que le secteur public et de finances et elle seule qui décide du caractère principal qu’un autre texte concernant le secteur privé verrait le de votre réforme et de votre texte. jour. Bien évidemment, le caractère incohérent, en réalité L’Assemblée a adopté plusieurs amendements, notam- fort archaïque et même un peu hypocrite de votre texte, ment à l’initiative de députés et de la majorité et de l’op- ne justifie pas à lui seul son caractère inconstitutionnel. position, sur Internet. En effet, vous prétendez renforcer la télévision publique, Lors de la première lecture au Sénat, vous confirmiez à mais les décisions que vous êtes en train de prendre, qui la fois l’abandon de la holding Arte et l’extension de cette renforcent en fait un petit peu le secteur privé − c’est le législation au domaine de l’Internet. Le Sénat vous pro- fameux cadeau que dénonçait le groupe socialiste il y a à posait quant à lui des amendements sur la télévision peu près un an de cela, mais il l’a oublié ! − ne renforce- numérique. ront pas le secteur public : elles l’affaibliront. Il suffit, pour s’en convaincre, d’examiner les budgets A l’Assemblée, la veille de la réunion de la commis- de TF 1 et de France 2, à peu près équivalents au sion, vous déposiez cinquante-trois amendements nou- moment de la privatisation. Actuellement, celui de TF 1 veaux concernant la télévision numérique et Internet. représente presque le double de celui de France 2, et le Cela signifie, madame la ministre, que le Conseil d’Etat pourcentage de l’augmentation du chiffre d’affaires de n’a pas vu la moitié du texte ! TF 1 est d’une année sur l’autre, de deux chiffres alors Tout cela signifie pour moi que vous n’avez pas res- que l’augmentation du budget de France 2 se réduit géné- pecté les procédures qui sont les garanties, dans toute ralement à 3 % ou 4 % par an au maximum, et encore république qui est une démocratie, d’une véritable démo- faut-il que l’Etat lui consente des cadeaux. cratie, d’une véritable discussion. Mes chers collègues, dans ce bras-de-fer, le secteur Vous pourriez m’objecter qu’après tout le Gouverne- public sera incapable de faire face à la concurrence. Vous ment est contumier du fait puisqu’il a l’habitude de ne prévoyez rien de sérieux pour pallier ce caractère iné- changer ainsi les textes de loi. Je vous ferai cependant luctable de la faiblesse du secteur public,... remarquer que ce sont beaucoup plus les parlementaires M. Marcel Rogemont. Parce que le secteur public n’est que le Gouvernement qui doivent changer les textes de pas dans le secteur concurrentiel, voilà tout ! loi. M. Laurent Dominati. ... car vous n’osez pas remettre Mme la ministre de la culture et de la communication. en cause le périmètre de ce secteur, et notamment pas la C’est ce qu’ont fait les sénateurs ! définition de ses missions. M. Laurent Dominati. Vous auriez dû élaborer votre Vous voyez, madame la ministre, que j’essaie de parler texte de loi d’une façon globale et le présenter avec un de votre texte, ou plutôt des différentes annonces succes- exposé des motifs et une étude d’impact. Or cette étude sives aboutissant à un texte de loi qui sera évidemment est forcément absente puisque votre texte en est arrivé à une fois de plus amendé et qui risque encore d’être modi- une telle incohérence que vous n’êtes plus capable de dire fié à la suite des annonces que vous venez de faire. Je quels seraient ses effets financiers sur les chaînes reconnais cependant que j’en approuve une, celle qui publiques, sur les chaînes privées ou sur le secteur de la concerne les producteurs. Il était temps de la mettre à communication générale. l’ordre du jour. Je vous rappelle que je vous l’avais pro- posée, il y a près d’un an. M. Olivier de Chazeaux. Très bonne remarque ! Le caractère incohérent, archaïque que je dénonce n’est M. Laurent Dominati. Vous ne savez pas quel pourra toutefois pas à lui seul inconstitutionnel. On verra cepen- être, madame la ministre, l’effet de votre texte. Ne venez- dant ce que dira le Conseil constitutionnel sur le fait que vous pas d’annoncer une DSS, une dotation spécifique le Conseil d’Etat n’ait pas été une nouvelle fois consulté. spéciale, une dotation spécifique pour le secteur public ? Ce qui me paraît le plus important, c’est de nous Bref, il s’agit d’un cadeau puisé dans la cagnotte du Gou- demander s’il y a bel et bien une révolution numérique, vernement ! comme l’a dit le rapporteur, si nous en avons bel et bien

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fini avec la télévision des années 50 et 60 et si l’interven- Ce qu’un gouvernement devrait faire aujourd’hui, ce tion de l’Etat et du législateur, telle que vous la concevez, n’est pas ce rafistolage auquel vous vous êtes livrés. Il fau- est encore légitime. drait une vraie loi sur la communication, une grande loi Mes chers collègues, qu’est-ce qui fonde l’intervention à l’image de la loi sur la presse de 1881, garantissant la du législateur dans le domaine de la communication ? liberté d’expression et éliminant les contraintes régle- Aux termes de l’article XI de la Déclaration des droits de mentaires qui aboutissent en réalité à l’uniformisation des l’homme et du citoyen, « la libre communication des programmes, à l’affaiblissement de la culture française pensées et des opinions est un des droits les plus précieux dans le monde... de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, impri- M. Michel Françaix. Et le marché ? mer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. » M. Laurent Dominati. ... et à un mode de concentra- La liberté de la presse et celle de la communication tion qui, il est vrai, enrichit un certain nombre d’opéra- sont fondées sur cet article, ainsi que l’a reconnu le teurs, mais sur un marché appauvri. J’ai envie de dire Conseil constitutionnel dans ses décisions du 27 juillet « Au royaume des aveugles les borgnes sont rois » ! 1982 et des 10 et 11 octobre 1984. Mme la ministre de la culture et de la communication. Le Conseil constitutionnel ajoute que le principe ainsi Belle expression pour la télévision ! proclamé − celui de la liberté d’expression − ne s’oppose M. Laurent Dominati. Une loi qui favorise la création point à ce que le législateur, compétent aux termes de française et un maximum de diversité dans l’audiovisuel. l’article 34 de la Constitution pour fixer les règles concer- nant les droits civiques et les garanties fondamentales Voilà pourquoi, madame la ministre, cette loi n’est pas accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés légitime du point de vue constitutionnel car le Conseil publiques, édicte des règles concernant l’exercice du droit constitutionnel indique bel et bien que le législateur ne de la libre communication et de la liberté de parler, doit intervenir que vers le plus et non vers le moins ou le d’écrire et d’imprimer. Vous pourriez donc me rétorquer statu quo. que le Gouvernement est fondé à intervenir en ce qui Or qu’avez-vous fait concernant la télévision numé- concerne le secteur de la communication sans porter rique hertzienne sinon simplement transposer les disposi- atteinte à l’article XI de la Déclaration des droits de tions législatives relatives à l’analogique. Vous n’avez pas l’homme. Certes, mais pas n’importe comment car le fait œuvre d’imagination. Vous vous êtes contentée de Conseil constitutionnel a prévu que le Gouvernement ne faire du « copier-coller » ! Ce n’est pas un progrès. pouvait intervenir que pour rendre l’exercice de cette Vous n’avez pas renoncé à un seul de vos pouvoirs liberté d’expression plus effectif. alors que pour passer à une ère d’abondance et de liberté Mme la ministre de la culture et de la communication. d’expression, il s’agit de sortir d’une relation de pouvoir C’est ce que nous faisons ! avec les télévisions. Vous y êtes aujourd’hui, nous y serons peut-être demain. M. Laurent Dominati. Vous n’avez donc le droit d’in- tervenir, madame la ministre, que si vous renforcez la M. Jean Vila. Ça m’étonnerait ! liberté d’expression... M. Laurent Dominati. Cela vient plus vite que vous le Mme la ministre de la culture et de la communication. pensez, croyez-en mon expérience ! Nous le faisons ! M. Christian Cuvilliez. Nous ne sommes pas pressés ! M. Didier Mathus, rapporteur. C’est le cas ! M. Jean Vila. Vous êtes mal partis ! M. Laurent Dominati. ... et que si, en ce qui concerne l’autorisation préalable de diffusion, par exemple − ce M. Laurent Dominati. Les dernières élections partielles point me semble très important compte tenu de la révo- ne semblent pas l’indiquer. lution numérique que vous avez succinctement décrite − Je le répète, ce que devrait faire un gouvernement, c’est les contraintes techniques imposent un régime d’autorisa- une véritable loi de liberté d’expression pour la communi- tion préalable. cation audiovisuelle au XXIe siècle en essayant de sortir Mais il faut vérifier, mes chers collègues, que ces d’une relation de pouvoir. Et vous ne le faites pas. contraintes existeront encore dans les années à venir. Le rapporteur indique que la télévision sort des années Est-il exact que nous allons rester dans un système de cinquante et soixante mais votre première mesure est de pénurie de fréquences ? reconstituer une holding d’Etat. Drôle de holding d’ail- M. Didier Mathus, rapporteur. Non ! leurs, car tout l’Etat ne s’y retrouve pas, avec un pré- M. Laurent Dominati. Telle est la question essentielle sident commun à deux chaînes et demie seulement que nous devons nous poser. − France 2, France 3 et La Cinquième qui n’a qu’un demi canal. Vous avez été obligée de laisser Arte de côté Si un Gouvernement intervient aujourd’hui en matière car, en réalité, vous n’avez pas su discuter avec nos parte- audiovisuelle, il doit s’interroger sur ce que sera la naires allemands. Et ce n’est pas une histoire de traité, les communication audiovisuelle demain. Il doit se demander Allemands ont simplement été vexés. si nous n’avons pas changé d’ère − d’après le rapporteur, nous en avons changé. Il doit aussi se demander si nous D’un côté, vous n’arrivez pas à constituer de véritable serons toujours dans un système de pénurie de fréquences holding, de l’autre, vous ne confiez pas au CSA de véri- ou si nous connaîtrons un système d’abondance de fré- table pouvoir conventionnel. Si vous avez entendu les quences ! producteurs et les réalisateurs réunis hier aux assises de Chaillot, vous savez qu’ils ont demandé le passage d’une M. Michel Françaix. Il a compris ! Bravo ! ère réglementaire, c’est-à-dire l’ère ministérielle − la vôtre, M. Laurent Dominati. Si tel est le cas, la loi telle que madame la ministre −, à une ère conventionnelle où l’on nous l’avons écrite et modifiée, à plusieurs mains, au confierait des pouvoirs de convention et de contrat au cours de nombreuses années, devrait prendre un tour CSA. Or M. le rapporteur met directement en cause le complètement différent. CSA : encore une pression exercée sur cette institution !

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Etes-vous vraiment capables de sortir d’une relation de − c’est inéluctable −, lui confier l’essentiel des pouvoirs, pouvoir ? On se le demande quand votre astuce du rem- notamment la capacité de contracter des contrats avec les boursement des exonérations de redevance conduit tout différents opérateurs publics et privés, enfin marquer les simplement à rendre la télévision publique beaucoup plus limites et les missions du service public de l’audiovisuel, dépendante du gouvernement du moment et notamment comme le demande la Commission européenne. de Bercy. Tant que l’on ne définira pas les missions du secteur M. Patrice Martin-Lalande. C’est vrai ! public, celui-ci ne trouvera pas sa légitimité et personne ne voit aujourd’hui à l’antenne la différence entre TF 1 et M. Laurent Dominati. Vous dites assurer l’indépen- France 2. Tant que vous ne justifierez pas la redevance dance de la télévision d’Etat, mais chaque mois, le pré- par des missions spécifiques au secteur public, c’est-à-dire sident de France Télévision se demandera si le ministre des programmes différents du secteur privé, vous vous du budget est content de lui, s’il obtiendra le rembourse- heurterez à de perpétuelles mises en cause de la télévision ment d’exonération de redevance ou s’il aura le petit publique. cadeau que vous avez annoncé. Ouvrez-vous une ère nouvelle de liberté de communi- Vous savez très bien que, dans une telle confusion, cation et d’expression pour d’autres opérateurs ? Non. l’Etat ne sera plus à même d’assurer le financement de Vous maintenez la totalité du pouvoir réglementaire entre toutes ces chaînes sans qu’il y mette de l’ordre. C’est la vos mains : les opérateurs privés sont suspendus à raison pour laquelle il faut bien évidemment, comme je l’humeur du ministre et du gouvernement. l’ai fait, se poser la question de l’étendue et du périmètre du secteur public. Ils se demandent combien de canaux numériques hert- ziens le Gouvernement va leur octroyer car ils sont tou- Tant que vous ne direz pas si on doit garder France 2 jours sous votre dépendance. Votre projet de loi dit d’ail- − et dans ce cas, cette chaîne devra être d’une nature leurs en quelque sorte : si vous vous comportez bien, complètement différente de ce qu’elle est aujourd’hui −, nous vous attribuerons des canaux supplémentaires, vous resterez dans la confusion. Vous ferez la part belle sinon, nous gardons la priorité, notamment pour le ser- non seulement au secteur privé français − encore qu’il vice public. soit extrêmement menacé par les grands groupes inter- nationaux −, mais surtout à ces Américains que vous En somme, qu’il s’agisse de télévision publique ou de dénoncez tant. Car, madame la ministre, il faut quand télévision privée, vous maintenez une relation de pouvoir. même se demander pourquoi il y a si peu de fictions Or, on n’entre pas dans une ère de liberté de communi- françaises, comme vous l’avez dit dans votre propos limi- cation en maintenant la télévision sous tutelle, même de naire − moins, proportionnellement, que de fictions alle- façon indirecte. mandes en Allemagne, britanniques en Grande-Bretagne Voilà pourquoi cette loi est inconstitutionnelle : elle ne ou espagnoles en Espagne −, et ce malgré les quotas de va pas dans le sens d’un renforcement des libertés. Vous diffusion, et alors que nous avons un dispositif de protec- êtes incapable de passer d’un régime réglementaire à un tion de la création française. Pourquoi France 2, tous les régime conventionnel qui ferait véritablement confiance dimanches soirs, diffuse-t-elle un film américain ? La télé- au CSA et d’imaginer une véritable liberté des ondes vision publique est-elle là pour acheter des films améri- pour l’avenir. cains ? Certainement pas. Ce n’est pas votre intention, ce Je sais bien que nous ne sommes pas encore dans une n’est pas l’intention du contribuable, ce n’est pas l’inten- ère d’abondance de fréquences, mais nous y arrivons tion des parlementaires ici présents, qui répètent sans grâce à Internet et au numérique. Et sans doute fau- cesse qu’il faut défendre la création. Alors pourquoi ? drait-il déjà imaginer − je vais plus loin que l’actualité − Parce que la logique dans laquelle vous êtes enfermée, un régime de déclaration préalable pour le plus grand sans définir réellement la mission du service public, nombre de domaines possibles. On pourrait concevoir un conduit à cette espèce de chaîne bâtarde, qui se sent mal régime de concession comme c’est le cas dans d’autres dans sa peau, qui se sent également mal défendue. pays et pour Canal Plus qui avait certes un statut déroga- Madame la ministre, vous ne faites pas progresser le toire. Ce sont des questions à se poser mais auxquelles je service public faute de définir ses missions et de lui don- ne prétends pas apporter de réponse car elles sont ner une véritable légitimité par rapport au secteur privé. complexes et délicates... Vous ne garantissez pas plus qu’auparavant la liberté d’ex- M. Michel Françaix. Ah, quand même un peu d’hon- pression et vous ne sortez d’une logique de tutelle, ni vis- nêteté intellectuelle ! à-vis des chaînes publiques ni vis-à-vis des chaînes pri- vées. Aussi ce texte n’est-il pas conforme aux intentions M. Laurent Dominati. En réalité, aucun de nous ne sait du Conseil constitutionnel. Dans le domaine de la ce que va devenir la télévision qu’elle soit publique ou communication, le législateur ne peut légitimement inter- privée... venir que s’il le fait pour accroître les libertés, et non pas M. Michel Françaix. Pas de certitudes ! pour maintenir les auditeurs, les téléspectateurs et les opé- M. Laurent Dominati. Loin d’avoir des certitudes, je rateurs sous tutelle. fais confiance à la vie et à la liberté, alors que vous en Voilà pourquoi, mes chers collègues, j’ai défendu restez à un cadre classique. devant vous cette exception d’irrecevabilité. (Applaudisse- Quelle loi nous faut-il pour la liberté de communica- ments sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indé- tion du XXIe siècle ? La logique de régulation devrait pendants et du groupe du Rassemblement pour la l’emporter sur une logique de réglementation. Si nous République.) étions dans une république majeure, sérieuse et respon- M. le président. Dans les explications de vote sur l’ex- sable, le Gouvernement aurait eu le temps, depuis deux ception d’irrecevabilité, la parole est à M. Patrick Bloche, ans et demi, de réunir parlementaires, professionnels de pour le groupe socialiste. l’audiovisuel et juristes pour établir un cadre législatif qui fixerait les grands principes de la liberté de communica- M. Patrick Bloche. M. Laurent Dominati a tenté de tion : instituer une grande autorité de communication démontrer que ce texte serait contraire à la Constitution.

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Je me suis donc efforcé d’entrer dans sa logique. Il a domaine concerné. En tant que législateurs, avec la légiti- commencé par un rappel historique, en nous disant, ce mité que nous donne le suffrage universel, il est de notre que nous savions déjà, que ce texte avait évolué. Mais devoir, sinon de notre fonction, d’organiser la liberté. heureusement qu’il a évolué Dieu sait si on nous Nous devons d’autant plus l’organiser que la télévision reproche souvent de légiférer à retardement et, face au numérique offre des champs d’expression et de déve- développement des technologies nouvelles, de voter la loi loppement du pluralisme et de la démocratie. en décalage par rapport à ce que les techniques imposent Nous ne sommes pas encore, comme vous le disiez, à comme possibilités nouvelles, tout particulièrement dans une ère d’abondance de fréquences puisque la télévision le domaine de la communication. Ce reproche nous est numérique dans le contexte technique qui est le nôtre, ce adressé pour l’audiovisuel, mais aussi, habituellement, n’est encore que trente-six canaux et six multiplex. Nous pour l’Internet. Et en première lecture, nous avons suffi- n’en sommes donc pas encore à un système de déclara- samment entendu de critiques selon lesquelles cette loi tions préalables, nous sommes encore dans un système justement n’aurait visé qu’à solder les problèmes liés à d’autorisations. l’analogique, sans s’inscrire dans l’avenir, c’est-à-dire le Nous sommes là pour fixer des règles qu’une autorité développement de ce que Mme la ministre a appelé avec de régulation, qui s’appelle le CSA, sera amenée, à appli- juste raison la nouvelle télévision. quer pour attribuer des canaux de diffusion. Nous faisons M. Dominati trouve embêtant que le texte ait évolué un choix politique que la majorité, ici dans cet hémicyle, parce que le Conseil d’Etat en est resté à une version portera. Il s’agit de la priorité donnée aux services assez ancienne et n’a pas pu suivre ses évolutions. Sans publics, priorité qui nous paraît tout à fait indispensable revenir à un débat que nous avons eu dans cet hémicycle pour structurer ce secteur nouveau de l’expression audio- à l’occasion d’une proposition de loi − vous savez que les visuelle. propositions de loi ne sont pas soumises à l’avis du J’ai été très sensible aux propos de notre rapporteur. Il Conseil d’Etat − je trouve étonnant que les législateurs y a, comme toujours, des risques liés aux nouvelles tech- que nous sommes, avec la légitimité que nous donne le nologies, ici une plus grande segmentation fait craindre suffrage universel, se réfèrent aux compétences du Conseil une « communautarisation » du paysage audiovisuel là où d’Etat, que je me remets évidemment pas en cause. hier la télévision analogique jouait un rôle beaucoup plus Certes, c’est parce que « ça arrange » certains mais fina- fondateur de notre identité nationale. lement, cela revient à invoquer le gouvernement des J’en termine, car je crains d’arriver au bout de mes experts comme en d’autres domaines est invoqué le gou- cinq minutes. vernement des juges. M. le président. M. Laurent Dominati. Alors, supprimez le Conseil En fait, vous avez déjà dépassé votre d’Etat ! temps de parole, monsieur Bloche, je vous rassure. M. Patrick Bloche. Nous sommes responsables, en tant M. Patrick Bloche. Merci, monsieur le président, de que législateurs, nous votons la loi et nous avons la légiti- votre tolérance. mité pour cela. Je comprends la logique libérale, voire libérale libertaire dans laquelle s’inscrit M. Dominati... M. Olivier de Chazeaux. C’est incroyable comme vous vous moquez des procédures ! M. Olivier de Chazeaux. Quelle expression ! M. Patrick Bloche. Vous avez fait ensuite référence, M. Patrick Bloche. ... mais s’il juge que la dérégulation monsieur Dominati, à l’article XI de la déclaration des et l’autorégulation sont seules constitutionnelles, je lui droits de l’homme que nous connaissons tous par cœur. conseille d’abord de changer la Constitution. (Applau- Vous avez rappelé que le projet de loi vise à renforcer ce dissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe principe qui nous est cher : la communication est libre. A communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) partir de là, j’ai eu quelques difficultés à vous suivre sur M. le président. La parole est à M. Olivier de Chazeaux le fait qu’organiser la liberté pouvait être anticonstitution- pour le groupe du Rassemblement pour la République. nel. En fait, sous prétexte d’anticonstitutionnalité, vous M. Olivier de Chazeaux. Il est toujours agréable dans posez un vrai débat politique − et cela ne m’étonne pas cette enceinte, lorsque l’on évoque les questions relatives que ce soit vous qui le posiez : dans un domaine comme à l’audiovisuel, d’écouter notre collègue Dominati. l’audiovisuel, mais aussi les nouvelles technologies ou M. Michel Françaix. N’exagérons rien ! Internet, quelle est la part de la régulation publique et de M. Marcel Rogemont. Pas pour tout le monde ! la régulation par le marché ? J’ai cru comprendre que vous souhaitiez laisser sinon la M. Olivier de Chazeaux. Lorsqu’il est question de totalité du moins la plus grande partie de la régulation réforme de l’audiovisuel, il y a toujours de la passion aux lois du marché... dans nos débats, et M. Dominati fait partie de ces rares parlementaires qui ont le talent de faire passer leur pas- M. Laurent Dominati. Non, j’ai parlé d’une autorité sion pour l’audiovisuel. indépendante, le CSA. M. Marcel Rogemont. Ce n’est pas la nôtre ! M. Patrick Bloche. ... et ouvrir la possibilité pour les opérateurs de s’autoréguler, pour reprendre un terme qui M. Olivier de Chazeaux. J’ai bien compris, à travers les est maintenant dans le langage courant, en toute liberté. propos de M. Bloche, que ce n’était pas la vôtre ! C’est un clivage politique fort, tout à fait légitime dans Au-delà de cette passion qu’il faut saluer, M. Dominati cet hémicycle, que vous avez voulu mettre en exergue. En m’a particulièrement convaincu dans ses arguments, effet, vous avez une vision de la régulation différente de notamment à propos de la nouvelle régulation qui devait la nôtre. poindre avec la réforme de l’audiovisuel. Pour notre part, nous estimons qu’en matière audiovi- Madame la ministre, vous avez parlé de nouvelles fron- suelle, il est nécessaire de maintenir une régulation tières, de nouvelle ère audiovisuelle. A cela, il convient publique dans le cadre de lois ou de règlements suivant le d’apporter de nouvelles règles de liberté de communica-

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tion. C’est bien ce que nous a parfaitement démontré Laurent Dominati a dénoncé également le rapport que aujourd’hui notre collègue Dominati, plus particulière- vous établissez dans chacun de vos projets entre le pou- ment en faisant référence à la holding d’Etat que vous voir et la télévision, et votre conception de l’audiovisuel voulez vous approprier et essayer de nous imposer à tra- qui se caractérise par une absence de liberté. Nous parta- vers cette réforme de l’audiovisuel, holding d’Etat qui ne geons totalement ce sentiment. Comme lui, nous consi- permettra justement pas à cette nouvelle liberté de dérons qu’il faut passer d’une ère réglementaire à une ère communication de s’exprimer. conventionnelle. J’en viens aux dispositions nouvelles sur le numérique Enfin, nous le rejoignons aussi lorsqu’il dit que, ce terrestre que vous nous présentez aujourd’hui. Comme l’a texte, qui ne va pas dans le sens d’un accroissement des très bien rappelé Laurent Dominati, elles n’ont pas fait libertés, n’est pas constitutionnel. Si ce projet porte la l’objet de débats au sein du Conseil d’Etat, dont l’inter- belle ambition de favoriser la liberté et la communication, vention − dois-je le rappeler à M. Bloche − fait partie des rien dans le corps du texte ne permet de la retrouver. Il règles procédurales que nous devons appliquer dans le va en fait continuer à faire peser sur l’audiovisuel public cadre de la présentation d’un projet de loi. un pouvoir étatique contre lequel nous nous insurgeons. M. Patrice Martin-Lalande. C’est la République ! Pour toutes ces raisons, le groupe UDF votera avec conviction l’exception d’irrecevabilité présentée par M. Olivier de Chazeaux. En fait, monsieur Bloche, Laurent Dominati. (Applaudissements sur les bancs du c’est vous qui souhaitez changer les règles de la Constitu- groupe de l’Union pour la démocratie française-Alliance, du tion. Comme l’a suggéré tout à l’heure M. Dominati, groupe du Rassemblement pour la République et du groupe supprimez le Conseil d’Etat si celui-ci ne vous agrée pas ! Démocratie libérale et Indépendants.) Mais ce qui me choque plus particulièrement, madame M. le président. La parole est à Mme la ministre. la ministre, et Laurent Dominati l’a souligné, c’est que les opérateurs vont se retrouver dans une situation d’inéga- Mme la ministre de la culture et de la communication. lité. Vous allez, en effet, faire la part belle aux opérateurs Je précise à M. Dominati que le Conseil d’Etat a été saisi publics concernant le développement du numérique ter- sur l’intégralité du texte présenté en première lecture et restre, puisque France Television va se retrouver titulaire consulté par lettre modificative sur les mesures concer- de neuf canaux alors que les opérateurs privés n’en auront nant la régulation. Je lui rappelle aussi que le Gouverne- que deux, dont l’un dans le cadre du simulcast. ment, qui respecte entièrement le travail parlementaire, a amendé des dispositions votées par le Sénat. Mme la ministre de la culture et de la communication. Non ! M. Laurent Dominati. Comment pouvez-vous dire cela ? M. Olivier de Chazeaux. A cet égard, il faudra que vous nous expliquiez pourquoi vous avez parlé « d’opéra- Mme la ministre de la culture et de la communication. teurs existants » et non pas « d’opérateurs historiques », Enfin, je répondrai à M. de Chazeaux que si nous avons comme cela avait été décidé en commission. Chaque opé- remplacé « opérateurs historiques » par « opérateurs exis- rateur existant pourra donc prétendre à six services sup- tants » c’est tout simplement parce que le terme « histo- plémentaires. Certes, vous vous êtes empressée de préciser riques » est beaucoup plus ambigu. Les opérateurs exis- que vous souhaitiez de nouveaux entrants. Mais pour- tants sont les chaînes qui disposent d’une autorisation quoi ? On en revient là à la régulation du marché évo- d’émettre en analogique. quée par M. Bloche et à laquelle il est finalement opposé. M. Didier Mathus, rapporteur. En effet ! En fait, madame la ministre, vous nous proposez de favoriser le développement du secteur concurrentiel, mais M. le président. Personne ne demande plus la sans donner les mêmes moyens à tous. Ainsi, France parole ?... Télévision, qui doit entrer dans le secteur concurrentiel, Je mets aux voix l’exception d’irrecevabilité. aura des moyens largement supérieurs à ceux qui sont (L’exception d’irrecevabilité n’est pas adoptée.) accordés aux opérateurs privés. Voilà qui pose aussi un problème de constitutionnalité. Il doit y avoir liberté de communication, mais il doit y avoir également égalité de Question préalable traitement entre les opérateurs publics et privés, ce qui ne sera pas le cas avec votre projet de loi. M. le président. J’ai reçu de M. Jean-Louis Debré et M. Gérard Terrier. Quel libéralisme ! des membres du groupe du Rassemblement pour la République une question préalable, déposée en applica- M. le président. La parole est à M. Christian Kert, tion de l’article 91, alinéa 4, du règlement. pour le groupe UDF. La parole est à M. Olivier de Chazeaux, pour une M. Christian Kert. Trois arguments de Laurent Domi- durée qui ne peut excéder trente minutes. nati ont retenu plus particulièrement l’attention du groupe UDF. M. Olivier de Chazeaux. Madame la ministre, presque un an après la première lecture de cette prétendue Le premier me paraît avoir été mal compris par notre réforme de l’audiovisuel, nous nous retrouvons donc pour collègue Bloche. Laurent Dominati, en effet, a dit qu’il évoquer enfin les vrais enjeux de l’audiovisuel français du fallait aller vers plus de régulation au lieu de s’orienter e XXI siècle. vers davantage de réglementation. Il a appelé de ses vœux une grande autorité de régulation conférant l’essentiel des M. Marcel Rogemont. Merci de le relever ! pouvoirs et qui marquerait bien la grande différence que M. Olivier de Chazeaux. Le Sénat, dont on a encore nous voulons instituer entre le secteur public et le secteur peu parlé,... privé de l’audiovisuel. Je m’étonne donc que notre Patrick Bloche n’adhère pas à ce qui me semble consti- Mme la ministre de la culture et de la communication. tuer une évidence. Pourquoi M. Dominati l’a-t-il passé sous silence ?

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M. Olivier de Chazeaux. ... a sévèrement critiqué, après En fait, le Premier ministre est bien le maître d’ou- quelques-uns d’entre nous, votre projet et l’a amendé vrage et le maître d’œuvre de cette réforme de l’audiovi- pour tenter de lui conférer l’aspect d’une vraie réforme de suel qui se caractérise aujourd’hui davantage par « son l’audiovisuel. A cet égard, je voudrais, en votre nom à cyber-immobilisme ». tous, saluer la qualité du travail accompli par nos col- M. Laurent Dominati. Comme pour la réforme des lègues sénateurs. Ils ont ainsi démontré, non pas leur finances ! archaïsme, mais leur modernité, et surtout leur souci d’être particulièrement au fait de l’actualité audiovisuelle. M. Olivier de Chazeaux. Mais il ne perçoit pas l’enjeu majeur que représente pour notre pays l’entrée de la M. Michel Françaix. Allez donc au Sénat ! France dans la société de l’information. Tout cela a fina- M. Olivier de Chazeaux. Pourtant − et cela se perçoit lement conduit et conduit encore aux péripéties parti- déjà −, ce travail ne sera pas reconnu dans cette enceinte culièrement navrantes de la préparation de ce débat parle- ni par la majorité ni par le Gouvernement. mentaire. Effectivement, madame la ministre, votre tâche n’est Mme la ministre de la culture et de la communication. pas aisée. Surtout lorsque le Premier ministre, par ses Mais si ! propres agissements, vient contredire votre position. Alors M. Olivier de Chazeaux. Du reste, le nombre des que vous vous arc-boutez pour défendre le service public amendements qui nous sont proposés en témoigne. Mais de l’audiovisuel, dont vous ne cessez de vanter les ce n’est pas une surprise. Vous l’aviez déjà laissé entendre, mérites, M. Jospin, Premier ministre de notre pays, choi- en première lecture, madame la ministre. Aux termes de sit, quant à lui, TF 1 pour venir répondre aux inquié- ce que nous avons appelé la jurisprudence seconde tudes des Français sur la fameuse « cagnotte fiscale » ou lecture, toutes nos propositions visant à améliorer votre sur la question de l’enseignement. Quel aveu symbolique ! texte avaient été repoussées. Ainsi, lorsque nous avons Quelle peu de reconnaissance de la part du Gouverne- évoqué la question du numérique hertzien, vous nous ment pour le service public de l’audiovisuel ! aviez répondu que vous n’étiez pas prête mais que ce M. Christian Cuvilliez. Ce n’est pas un argument ! point serait examiné en seconde lecture. C’est dire le peu M. Olivier de Chazeaux. Aujourd’hui, la particularité d’intérêt que vous marquiez déjà pour le travail à venir du projet de loi que vous nous présentez porte sur le du Sénat ! numérique hertzien. Le nouveau numérique hertzien est Ce peu d’intérêt pour le travail parlementaire est parti- arrivé ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) culièrement manifesté par votre absence en commission. M. Michel Françaix. Vous voyez bien qu’il se passe des Vous nous avez cruellement manqué. choses ! Mme la ministre de la culture et de la communication. M. Olivier de Chazeaux. La belle affaire ! Certes, cela Je n’ai pas été invitée par la commission ! montre que nous avons été entendus. Mais, madame la M. Olivier de Chazeaux. En effet, le texte que nous ministre, compte tenu du nombre de rapports rédigés sur allons examiner n’a plus rien à voir avec celui de la pre- cette question, bien avant 1997 d’ailleurs, vous auriez pu mière lecture. nous faire des propositions en la matière dès la première lecture. M. Laurent Dominati. Très juste ! Alors, ce nouveau numérique hertzien peut-il laisser M. Michel Françaix. Cela montre que nous ne sommes supposer une modernité de votre texte ? La réponse est pas immobiles ! négative, du fait d’un manque d’audace et d’une carence importante sur la convergence des médias. Non, vous M. Olivier de Chazeaux. Vous l’avez vous-même n’allez pas assez loin − M. le rapporteur l’a d’ailleurs sou- reconnu de cette tribune, madame la ministre, en évo- ligné. Et ce n’est certainement pas l’amendement Bloche quant très longuement les dispositions concernant le qui vous dédouanera. Il est, en effet, particulièrement numérique hertzien. A tout le moins, vous auriez pu insuffisant. C’est l’arbre qui cache la forêt. venir présenter ces réformes importantes devant notre Reprenons quelques points de ce projet de loi. S’agis- commission. La tâche du rapporteur en aurait été facili- sant du secteur public de l’audiovisuel, votre définition tée. des missions de service public me fait dire une nouvelle M. Michel Françaix. Le rapporteur est remarquable ! fois que vous avez le service public honteux. Au lieu de défendre le service public, vous faites plutôt de l’esthé- M. Olivier de Chazeaux. En effet. Nous avons d’ail- tisme. Finalement, ce texte sera pour vous l’occasion de leurs salué en commission la qualité de son travail, alors mettre un terme à toute hypocrisie gouvernementale en la qu’il n’a disposé que de vingt-quatre heures pour analyser matière. A travers ce catalogue que vous nous présentez les amendements du Gouvernement et présenter un bon concernant ce que vous appelez les missions de service rapport. Les quelques lacunes qui ont été relevées sont public, on note surtout que vous ébauchez une notion de non pas de son fait, mais du vôtre, madame le ministre. service du public que tout opérateur privé ou public peut M. Patrice Martin-Lalande. Oui ! accomplir. Pour nous, le service public de l’audiovisuel doit avant M. Olivier de Chazeaux. Tout cela confirme en quel- tout être citoyen. Il doit permettre la réalisation de ce que sorte les critiques que l’on peut entendre ici ou là à lien social tellement indispensable à l’harmonie parfaite votre encontre, madame la ministre. On ne peut ouvrir entre les générations au sein de notre société mais aussi un quotidien ou un magazine sans y trouver une pique de nos familles. La télévision publique a un rôle culturel concernant votre réforme de l’audiovisuel. A en entendre et éducatif fondamental à jouer dans l’avenir. certains, vous seriez même responsable de tous les maux de l’audiovisuel et, en tout cas, de la lenteur de cette M. Marcel Rogemont. On est d’accord ! réforme voulue par M. Lionel Jospin, dès 1997. Il l’a M. Olivier de Chazeaux. Il doit être le lieu privilégié annoncée dans cette enceinte dans sa déclaration de poli- de la transmission du savoir et de la connaissance pour tique générale, puis dans son discours d’Hourtin. toute une génération qui peut avoir le sentiment d’avoir

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perdu tout repère familial et qui cherche sa place dans M. Olivier de Chazeaux. Nous ne discutons pas du ser- notre société toujours plus dure et toujours plus mou- vice public, madame Bredin. Ainsi que je viens de le vante. montrer, la volonté du Gouvernement est de travailler sur une notion de secteur public de l’audiovisuel, donc en M. Marcel Rogemont. On est d’accord ! qualité d’actionnaire d’une entreprise publique. Or, que M. Olivier de Chazeaux. Cela n’apparaît pas dans vos je sache, aucune autre entreprise publique, détenue majo- votes, malheureusement ! ritairement, voire totalement, par l’Etat, ne bénéficie d’une quelconque redevance. Il faut donc revoir les M. Marcel Rogemont. Nous n’avons pas encore voté ! modes de financement et les moyens que l’actionnaire M. Olivier de Chazeaux. Nous verrons bien si vous entend donner à la société dont il détient le capital. adoptez nos amendements ! A partir de là, il est temps de rediscuter de la mesure Telle serait la vraie mission du service public que que vous nous avez proposée en première lecture et que chaque citoyen est en droit d’attendre. Or ce n’est pas la je ne comprends pas très bien. Vous souhaitez, madame voie que vous avez choisie. J’en veux pour preuve la déci- la ministre, que France Télévision soit dotée de tous les sion prise par le Premier ministre, le 18 janvier dernier, moyens permettant d’affronter la concurrence. Or celle-ci de retirer Arte de la holding que vous aviez si patiem- est aujourd’hui essentiellement le fait d’un important ment construite. Le cas d’Arte est révélateur du peu de opérateur généraliste, à savoir TF 1, qui bénéficie d’une rigueur du Gouvernement dans la préparation de ce texte. ressource financière importante avec la publicité. Com- Pourtant, nous avions dès la première lecture stigmatisé ment peut-on imaginer que France Télévision serait cette difficulté. Nous avions précisé que l’introduction capable de faire face à la concurrence de TF 1, puisqu’elle d’Arte dans cette holding n’était pas possible compte tenu n’est pas dotée des mêmes moyens, n’ayant pas les mêmes notamment des termes du protocole franco-allemand ressources publicitaires ? Si vous voulez vraiment avoir concernant Arte. une entreprise publique forte dans ce secteur audiovisuel, il faut revenir sur la réduction du temps de publicité que Une fois de plus, les faits nous donnent raison. Vous vous avez proposée en première lecture. Je sais bien que avez donc, sous la contrainte − et non pas librement −, vous étiez alors motivée par l’idée d’affirmer l’identité du renoncé à inclure Arte dans cette holding. Cet exemple service public de l’audiovisuel, mais force est de constater devrait vous inciter à nous écouter davantage, madame la aujourd’hui que tel n’a pas été le cas. ministre. Vous feriez peut-être moins d’erreurs. Par ailleurs, puisqu’il s’agit d’entreprises publiques, il Or, avec le retrait d’Arte, vous vous retrouvez privés de faut procéder à une remise en cause du système la seule chaîne qui pouvait crédibiliser les missions de ser- comptable. J’ai bien lu le texte. France Télévision sera vice public de type culturel. C’est pourquoi il faut se soumise au droit des sociétés anonymes régies par la loi rendre à l’évidence : il s’agit non plus de service public de de 1966. Il s’agit donc bien de la loi de sociétés de droit l’audiovisuel, mais de secteur public. Plus exactement, privé dont l’Etat est un actionnaire. D’autres entreprises vous êtes en train de définir et de mettre en place des fonctionnent de la même manière, mais France 2 et entreprises publiques de l’audiovisuel, ce qui n’a pas du France 3 présentent une particularité étonnante. En effet, tout le même sens. Certes, celles-ci ne sont pas condam- elles reçoivent une dotation au titre de la redevance, mais nables en soi. On pourrait tout à fait accepter l’idée que si leur gestion est bonne et qu’elles dégagent des béné- l’Etat souhaite détenir le capital d’entreprises engagées fices, ceux-ci sont reversés à Bercy, ce qui va à l’encontre dans un secteur économique nouveau. D’ailleurs, l’exposé du bon fonctionnement d’une entreprise publique, des motifs de votre projet de loi montre bien votre madame la ministre. C’est pénalisant. Il conviendrait volonté de doter France Télévision de moyens impor- donc à mon sens de revoir ce système comptable et de tants, afin de lui permettre de faire face à la concurrence permettre à France 2 et France 3 de conserver leurs béné- importante des opérateurs privés. Dans ces conditions, il fices pour pouvoir les réinvestir ou se constituer des est important que l’Etat puisse agir en qualité d’action- réserves comptables intéressantes. Ce serait une démarche naire de cette entreprise publique. Mais si aujourd’hui, positive de nature à motiver les dirigeants de cette hol- vous nous confirmez clairement le souhait du Gouverne- ding que vous nous proposez. ment de défendre un secteur public de l’audiovisuel et d’encourager les participations de l’Etat dans les sociétés J’aborderai maintenant la question du numérique de de programmes, alors il me paraît important de redéfinir terre. les modes de financement et de se poser un certain M. Marcel Rogemont. C’est la deuxième partie ! nombre de questions. La première porte sur la redevance. Si vous faites le M. Olivier de Chazeaux. Il est évident que c’est une choix que je viens d’exposer − et les dispositions portant mutation technologique importante et qu’il faut organiser sur le numérique de terre ou la possibilité, pour France le passage de la diffusion analogique vers le numérique Télévision, de créer un certain nombre de filiales le hertzien. confirment −, il est temps de remettre en cause ce pré- M. Michel Françaix. lèvement fiscal devenu désuet à l’heure de la société de Très bien ! l’information. La redevance n’est plus adaptée. Nombre M. Olivier de Chazeaux. C’est en tout cas ce qui de nos concitoyens sont d’ailleurs exemptés de son paie- résulte des rapports Lévrier, du rapport Cottet-Eymery et ment. Grâce à la fameuse cagnotte fiscale, le Gouverne- de celui de M. Hadas Lebel. Mais dans quelles conditions ment peut aujourd’hui prendre la courageuse décision de ce passage doit-il se réaliser ? Il importe, madame la supprimer la redevance, qui n’est plus adaptée à l’ère ministre, que vous nous apportiez des réponses significa- audiovisuelle du XXIe siècle. tives sur le développement du numérique hertzien, d’au- M. Laurent Dominati. Très bien ! tant qu’un rapport du Commissariat général du plan de février 2000 contredit les trois précédents. Notre inter- Mme Frédérique Bredin. Cela signifie à terme la pau- rogation est légitime, car c’est une décision importante périsation du service public ! que nous allons être amenés à prendre.

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L’expérience du passé doit malheureusement nous inci- plus lié uniquement à l’ordinateur, il est caractérisé par sa ter à plus de mesure en matière audiovisuelle. N’oublions mobilité, par l’image. C’est l’un des facteurs importants pas le plan câble, les normes TDF 1 et TDF 2 ! Etes- du développement de cette interactivité si nécessaire dans vous certaine, madame la ministre, que la décision que le cadre du développement de cette nouvelle ère indus- vous allez nous demander de prendre est la bonne au trielle de l’audiovisuel français. Pour ma part, je regrette regard d’une évolution technologique si fulgurante ? Il y a que, dans ce projet de loi, vous ne soyez pas allée plus un an à peine dans cette enceinte, alors que nous parlions loin concernant la convergence des médias et que vous d’une tentative de rapprochement de Rupert Murdoch et vous soyez contentée de l’amendement Bloche. Je le de Canal Plus vous avez manifesté votre inquiétude. Mais regrette d’autant plus que le Gouvernement nous fait cette situation est déjà totalement dépassée ! miroiter une loi sur la société de l’information sans nous Lorsque je vois qu’AOL, société à peine constituée, donner de date. qualifiée de start-up, a pu acquérir Time Warner, que Mme la ministre de la culture et de la communication. Yahoo !, également nouvelle société qui ne passe pas pour Elle arrive ! être un opérateur important dans le monde de l’audiovi- suel, a fait l’acquisition des droits de retransmission de la M. Olivier de Chazeaux. Certes, elle arrivera, comme la prochaine Coupe du monde, ou encore que Microsoft a réforme de l’audiovisuel, ... trois ans après ! (Exclamations fait l’acquisition de Web TV, je ne peux m’empêcher sur les bancs du groupe socialiste.) C’est Le Désert des Tar- d’être inquiet quant à l’évolution de l’ère audiovisuelle et tares ! Attention, ça va arriver, et quand ça arrive, il est de relever une carence importante de votre projet de loi trop tard ! Mais vous viendrez nous parler de la conver- s’agissant de la convergence des médias. Une telle disposi- gence des médias, je n’en doute pas, lors la deuxième tion va malheureusement nous manquer cruellement. lecture du projet de loi sur la société de l’information ! Pour en revenir au numérique hertzien, combien cela Encore une fois, vous avez raté le coche, madame la va-t-il coûter ? J’ai lu attentivement les déclarations du ministre. C’est dommage ! A l’occasion de cette deuxième président de France Télévision qui a évalué à 1,5 milliard lecture, vous auriez pu coupler la réforme de l’audiovisuel de francs l’introduction de France Télévision sur le avec la loi sur la société de l’information. Cela aurait per- numérique hertzien. Comment allez-vous financer cet mis à notre pays et à tous ceux qui travaillent autour de cette nouvelle économie de tirer pleinement profit d’une investissement ? Le Gouvernement a-t-il réalisé une étude e d’impact économique qui puisse nous guider dans notre meilleure croissance de l’audiovisuel du XXI siècle. réflexion ? Non ! Nous n’avons aucun élément écono- Nous allons débattre d’un texte déjà dépassé, qui ne mique et financier de nature à nous permettre d’apprécier répond pas aux attentes des nombreux Français impliqués correctement la décision que vous allez nous demander de dans le développement de l’audiovisuel et de cette société prendre. En fait, on voit bien que ce que vous souhaitez de l’information. C’est la raison pour laquelle je vous avec l’introduction du numérique de terre, c’est faciliter invite, mes chers collègues, à voter cette question préa- le développement de France Télévision. lable. M. Michel Françaix. Il y a plus honteux ! M. Laurent Dominati et M. Christian Kert. Très bien ! M. Olivier de Chazeaux. Il est d’ailleurs normal qu’un M. le président. Dans les explications de vote sur la actionnaire souhaite favoriser le développement de la question préalable, la parole est à M. Michel Françaix, société qu’il contrôle. En l’espèce, il s’agit de privilégier pour le groupe socialiste. France Télévision, notamment en facilitant l’attribution de services à cette société... M. Michel Françaix. Je suis surpris par l’attitude de l’opposition que je trouve ambiguë et paradoxale. Il y a M. Marcel Rogemont. Qui assure un service public ! un an, elle voulait le numérique hertzien, tout de suite, M. Olivier de Chazeaux. ... au détriment des opéra- prétextant que cela ne pouvait attendre et aujourd’hui teurs privés. M. de Chazeaux nous dit qu’il n’y a pas lieu à débattre, qu’il vaudrait mieux attendre encore un an, que ce dos- Vous avez dit tout à l’heure, madame la ministre, sier n’est plus important parce que d’autres vont arriver ! qu’avec le numérique de terre vous espériez l’arrivée de Bien sûr, le monde bouge. Mais en ce qui vous concerne, nouveaux entrants sur le numérique hertzien. messieurs de l’opposition, je dirais plutôt : l’immobilisme Mais on peut s’interroger sur leur identité. S’agira-t-il est en marche et rien ne l’arrêtera ! (Sourires.) d’opérateurs français déjà connus écartés des précédentes attributions, ou plutôt des entrants américains, allemands M. Laurent Dominati. C’est Jospin, ça ! ou paneuropéens ? Et l’on voit bien aujourd’hui que le M. Patrice Martin-Lalande. Quel aveu ! secteur privé est peu enthousiaste face aux mesures que vous avez proposées. M. Michel Françaix. Méfiez-vous car la pensée finit par En conclusion, je reviendrai sur la convergence des tuer l’action ! Et je crains que nous ne soyons dans ce cas médias pour montrer à quel point il est plus raisonnable de figure. de débattre aujourd’hui de ce projet de loi. La conver- M. Olivier de Chazeaux. C’est ce que nous ne cessons gence des médias, je l’ai dit tout à l’heure, c’est finale- de vous dire ! ment l’interconnexion entre le monde de la télévision et celui de l’Internet. Lorsque j’ai évoqué cette question en M. Michel Françaix. Il est difficile de se substituer aux commission, M. Françaix a insisté sur le fait que le futurs industriels, aux prochains responsables d’antennes numérique de terre allait permettre à un nombre plus et de programmes, aux auteurs ou réalisateurs à venir, aux important de Français de bénéficier d’une abondance de millions de consommateurs potentiels pour tenter de dire fréquences. Je partage son point de vue. Mais le rôle du ce que doit être, ou ce que sera exactement le programme législateur consiste aussi à anticiper les évolutions tech- numérique proposé sur le réseau hertzien numérique ter- nologiques. Vous avez indiqué, madame le ministre, restre dans les années à venir. qu’Internet n’était pas connecté avec le monde de la télé- Cependant, les programmes interactifs installés sur le vision. C’est entièrement faux ! Aujourd’hui Internet n’est câble, les stratégies de multidiffusion de Canal Plus,

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l’accès à Internet à haut débit, les premières grilles de Vous parlez avec beaucoup de lyrisme du monde futur, programmes et les premiers services proposés sur le réseau mais ce projet de loi ne prévoit rien pour le développe- terrestre numérique par nos partenaires européens, ou ment des nouvelles technologies ! Et si l’intervention de encore les grilles de programmes des télévisions de proxi- mon collègue Olivier de Chazeaux vous a tant gênés, c’est mité sont autant d’indications de directions vers lesquelles qu’il a mis le doigt là où cela fait mal. Il a justement les programmes hertziens numérisés français doivent pointé toutes les carences du texte ! On part avec un pro- s’orienter. S’il est difficile d’appréhender ce futur proche, jet sur la télévision publique et on arrive à Internet, cela n’insultons pas l’avenir et ne restons pas immobiles ! Au- dans la confusion la plus totale. Une chatte n’y retrou- delà des nécessités d’ordre technique qui la rendent iné- verait pas ses petits ! (Exclamations sur les bancs du groupe luctable, cette réforme est-elle souhaitable ? socialiste.) Olivier de Chazeaux a d’ailleurs posé les vraies Oui, parce que le texte de loi s’inscrit résolument dans questions. Qu’est-ce que le service public ? le choix d’un engagement volontariste en faveur d’une M. Marcel Rogemont. Bonne question ! large diffusion des nouvelles technologies auxquelles vous tenez tellement ! M. Michel Françaix. Ça, vous ne le savez pas, c’est sûr ! Oui, parce que l’introduction de la nouvelle télévision M. Laurent Dominati. Vous n’y répondez jamais ! A permettra aux 80 % de foyers non raccordés au câble ou quoi sert la redevance ? Y a-t-il une différence entre les non équipés pour recevoir des programmes du satellite de programmes de France 2 et ceux de TF 1 ? Non, il n’y recevoir plus de trente chaînes, et cela pour la plupart en a pas ! A ce moment-là, que fait-on ? Quel est l’ave- gratuitement ! Vous ne pouvez y être opposés. nir ? Quelles sont les missions du service public ? Vous ne M. Marcel Rogemont. Très bien ! répondez pas à ces questions parce que vous n’osez pas M. Michel Françaix. évoquer certains tabous qui procèdent d’une vision dépas- Oui, parce que complémentaire au sée de la télévision, la vôtre, une vision gouvernementale développement d’Internet, comme vous le dites si bien, la de la télévision publique où vous avez vos amis et vos « nouvelle télévision » permettra à un public beaucoup réseaux. plus large que celui des internautes et des abonnés à la télévision payante de se familiariser avec de nouveaux Enfin, Olivier de Chazeaux a posé la question de l’ave- moyens de communication ! Et là aussi, vous êtes obligés nir, celle du numérique hertzien. Et là vous avez le culot de me suivre ! de nous dire qu’heureusement vous êtes là pour parler de l’avenir. Mais si nous n’avions pas fait pression, notam- M. Marcel Rogemont. Excellent ! ment Olivier de Chazeaux, en première lecture, si le M. Michel Françaix. Oui, parce que cette réforme per- Sénat n’avait pas parlé de télévision numérique hert- mettra d’affirmer le rôle moteur de la télévision du ser- zienne, vous n’en parleriez pas non plus ! Et savez-vous vice public, en particulier sur la fiction, l’information, les pourquoi, mes chers collègues ? Parce que cela vous programmes jeunesse et le régional ! Cela contribuera au dérange ! D’ailleurs que propose le Gouvernement ? Qua- développement de l’industrie des programmes et permet- siment rien ! tra une meilleure circulation des œuvres. Cela facilitera l’arrivée de nouveaux entrants pour casser le modèle télé- M. Michel Françaix. Ne jouez pas au méchant ! visuel dominant. Et je ne vois pas comment vous pouvez M. Laurent Dominati. On se contente de dire que la demander que l’on ne garde que TF 1, que l’on ne bouge télévision publique aura une priorité. En sous-main, on plus, sous prétexte que l’on ne sait pas qui va entrer ! informe le président de cette télévision qu’il aura neuf (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement canaux alors qu’il en demande douze, mais que s’il est pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- gentil, il en aura plus. On dit aux télévisions privées tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et qu’elles auront deux canaux, mais que si elles sont gen- Indépendants.) tilles, elles en auront plus. Voilà comment cela se passe ! Cette réforme favorisera l’émergence d’un secteur de Voilà pourquoi ce texte n’est pas sain dans la vision de télévision locale et de proximité. Et j’espère que vous l’avenir qu’il porte. Il est même néfaste, parce qu’il aura pouvez nous suivre sur ce terrain. pour effet de maintenir les différents opérateurs, publics Bien loin de votre « ébriété » technologique de la pre- et privés, dans une situation de dépendance. mière lecture, lorsque vous vouliez à tout prix le numé- Vous ne souhaitez pas définir les missions de service rique hertzien sans savoir ce qu’il y avait derrière, vous public, parce que vous voulez que France 2 puisse demandez aujourd’hui à faire du surplace ! Je crois quant concurrencer TF 1 et jouer ainsi sur les rivalités ! Vous ne à moi qu’il faut légiférer pour casser le modèle télévisuel faites confiance ni au CSA, ni aux acteurs. En effet, si dominant qui conduit à la prédominance du marché sur vous faisiez confiance aux acteurs de la télévision, vous la culture, de la technique sur le contenu et du commerce feriez une loi de développement, d’internationalisation, sur la pensée. Voilà pourquoi nous refuserons de voter la une loi d’audace pour la télévision française, que ce soit question préalable. (Applaudissements sur les bancs du celle du service public ou celle du service privé. Vous groupe socialiste.) feriez également une loi d’avant-garde sur Internet M. Christian Cuvilliez. Très bien ! concernant les nouvelles technologies. Mais tout cela, vous ne le faites pas et Olivier de Chazeaux a parfaite- M. le président. Pour le groupe Démocratie libérale et ment eu raison d’élargir le débat. Il vous a rappelé que le Indépendants, la parole est à M. Laurent Dominati. premier opérateur de télévision, la société la plus impor- M. Laurent Dominati. Je retiendrai surtout de l’inter- tante était une société Internet, AOL, avec 1 700 milliards vention de mon collègue du groupe socialiste qu’il a par- − rendez-vous compte, mes chers collègues ! − alors que faitement résumé le projet du Gouvernement, et même TF 1, la première télévision française, ne représente que au-delà, sa politique, par cette phrase : « L’immobilisme 10 milliards ! Voilà l’ordre de grandeur. Voilà la menace est en marche et rien ne l’arrêtera ! » C’est tout à fait qui pèse sur les sociétés privées ! C’est une menace étran- exact. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) C’est gère ! Et c’est également la menace qui pèse sur le secteur actuellement la devise du Gouvernement et cela résume public, car, loin de le renforcer, en réalité, vous le main- bien le projet de loi. tenez sous tutelle !

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Voilà pourquoi ce projet de loi n’est pas bon. Il est M. Michel Françaix. C’était il y a un an ! hypocrite, archaïque et confus. Olivier de Chazeaux a M. Christian Kert. C’est nous qui le souhaitions alors donc eu parfaitement raison de déposer cette question que vous n’y étiez pas prêts. préalable, que nous voterons. M. Marcel Rogemont. Maintenant, nous sommes M. le président. Pour le groupe du Rassemblement pour la République, la parole est à M. Patrice Martin- prêts ! Lalande. M. Michel Françaix. Alors débattons ! M. Patrice Martin-Lalande. Monsieur le président, M. Christian Kert. Voilà ce qu’a voulu dire Olivier madame la ministre, mes chers collègues, Olivier de Cha- de Chazeaux et il faut lui en rendre hommage. De la zeaux a rappelé, à juste titre, que le texte que nous exa- même façon, madame la ministre, lorsque notre collègue minons ce soir n’a plus grand chose à voir avec le texte dit que nous ne sommes plus dans le même texte, avouez initial. Et comme chacun d’entre nous, j’en suis que c’est tout de même vrai ! Nous avons passé une pre- convaincu, sur quelque banc que nous siégions, il a mière lecture à parler de la holding − dont on ne sait plus regretté que Mme la ministre ne soit pas venue nous pré- bien à quoi elle va servir − et de la publicité. Rappelons senter le nouveau texte en commission. Sur le plan tech- que c’est vous qui avez introduit, fort timidement, le nique, il nous a manqué les motivations du Gouverne- débat sur le numérique hertzien en déposant hâtive- ment ; les amendements ne suffisent pas à donner un ment,... sens aux dispositions que vous nous proposez. M. Pierre-Christophe Baguet. Nuitamment ! Olivier de Chazeaux a également rappelé l’insuffisance des perspectives proposées en matière de convergence des M. Christian Kert. ... nuitamment d’ailleurs, un amen- médias. Vous semblez animés d’une volonté de choisir dement qui enfin évoquait ce problème majeur. Tout une option technologique, le numérique terrestre, quitte à cela, monsieur Françaix, il fallait le rappeler. faire l’impasse sur les autres possibilités offertes par le Sur le service public enfin, j’ai trouvé heureuse la for- numérique ; j’y reviendrai tout à l’heure dans mon inter- mule d’Olivier de Chazeaux : « Halte à l’hypocrisie gou- vention. vernementale ». En effet, dans un débat sur l’audiovisuel Olivier de Chazeaux a aussi montré combien les mis- moderne, il faudra bien dire un jour ce que nous atten- sions de service public de l’audiovisuel restaient encore à dons du service public. De ce point de vue, Olivier définir ; votre texte les caractérise assez peu et s’en tient à de Chazeaux a eu raison. des définitions trop générales. Notre collègue a regretté la M. Michel Françaix. Attendez la discussion du texte au disparition d’Arte de la holding, en soulignant combien lieu de le refuser ! elle diminuait la crédibilité, en termes d’identité, du ser- vice public, et déploré que le Gouvernement n’aille pas M. Christian Kert. Enfin, Michel Françaix accuse l’op- jusqu’à supprimer la redevance afin de redonner à position de rester immobile. De grâce, cher collègue, France 2 des moyens financiers comparables à ceux que faites-vous cette critique, mais surtout pas à nous ! TF 1 dégage en recettes publicitaires. Oui, Olivier de Chazeaux a eu raison de défendre cette Enfin, Olivier de Chazeaux a montré tous les risques question préalable et nous la soutenons. (Applaudissements que pouvait comporter un engagement en faveur du ter- sur les bancs groupe de l’Union pour la démocratie française- restre numérique sans vision d’ensemble sur la conver- Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et gence des médias et ni aucune étude d’impact écono- du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) mique et financière qui devrait normalement s’imposer M. le président. Personne ne demande plus la pour tout projet de loi. Car ce volet du terrestre numé- parole ?... rique constitue véritablement un projet de loi à lui seul. Je mets aux voix la question préalable. Pour toutes ces raisons, le groupe RPR votera cette (La question préalable n’est pas adoptée.) question préalable, à nos yeux pleinement justifiée. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement M. Laurent Dominati. Ils sont sectaires ! pour la République, du groupe de l’Union pour la démocra- M. Bernard Outin. Nous ne sommes pas sectaires, nous tie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et sommes majoritaires ! Indépendants.) M. Olivier de Chazeaux. Belle formule ! M. le président. Pour le groupe UDF, la parole est à M. Christian Kert. M. Patrice Martin-Lalande. Qui nous en rappelle une autre ! M. Christian Kert. M. Françaix m’a paru plongé dans le doute et je souhaite l’éclairer. Il s’est efforcé, avec un art consommé, je le reconnais, de rejeter sur l’opposition Discussion générale le fait que le débat sur le numérique hertzien n’était pas au niveau où l’on aurait pu le souhaiter. Or, ce débat, M. le président. Dans la discussion générale, la parole c’est tout de même nous qui l’avons réclamé. Vous sem- est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg. blez nous le reprocher,... c’est assez extraordinaire ! M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Monsieur le pré- M. Michel Françaix. Mais vous le refusez ! sident, madame la ministre, mes chers collègues, comme M. Christian Kert. Maintenant que le débat arrive je l’avais déjà fait en novembre dernier, je voudrais profi- enfin, vous nous accusez de vouloir le freiner ! ter de ce débat pour poser de nouveau le problème de la redevance audiovisuelle. M. Michel Françaix. C’est tout de même vous qui déposez une motion de renvoi ! M. Laurent Dominati. Ah ! M. Christian Kert. Il n’est pas du tout dans nos inten- M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Le 18 novembre tions de freiner le débat sur le numérique hertzien. C’est 1999, au cours de l’examen du budget de la communica- vous qui n’étiez pas prêts à l’engager ! tion, l’Assemblée nationale avait adopté un amendement

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que j’avais déposé et qui était ainsi rédigé : « Le Gouver- due concurrence par le budget général de l’Etat, pour ne nement déposera sur le bureau des assemblées avant le pas pénaliser les radios et télévisions publiques, financées 30 juin 2000 un rapport sur la redevance des appareils avant tout par la redevance. récepteurs de télévision, actuellement réglementée par le La règle doit être, bien évidemment, le remboursement décret no 92-304 du 30 mars 1992, notamment dans ses intégral par l’Etat des exonérations de redevance. C’est ce aspects relatifs à l’assiette, au recouvrement, au contrôle qui est expressément prévu à l’article 7, paragraphe IV, de et aux exonérations. » votre projet de loi : « Les exonérations de redevance déci- Vous connaissez l’objectif qui l’a inspiré : étendre les dées pour motifs sociaux donnent lieu à remboursement exonérations de redevance audiovisuelle décidées pour intégral du budget général de l’Etat au compte d’emploi motifs sociaux. de la redevance audiovisuelle. » En 1999, 3 475 000 personnes ont été exonérées du Pour 2000, le montant des droits non émis en raison paiement de la redevance pour des raisons d’ordre social. du régime des exonérations est évalué à environ 2,5 mil- En 2000, elles devraient être environ 3 370 000, ce qui liards de francs. C’est ce montant que l’Etat doit en prin- est peu par rapport au grand nombre des redevables. cipe rembourser aux chaînes. Actuellement, mis à part les invalides ou les mutilés, S’il paraissait nécessaire, vu son coût, d’avancer pro- seules sont exonérées les personnes âgées d’au moins gressivement, par étapes, dans cette extension des exoné- soixante-cinq ans percevant l’allocation supplémentaire du rations, la priorité serait sans doute d’exonérer dès fonds de solidarité vieillesse. l’année 2000 les bénéficiaires de l’allocation d’insertion, Il est certes très légitime d’exonérer de la redevance les qui étaient 17 500 en 1997, et les chômeurs en fin de personnes démunies âgées de soixante-cinq ans et plus : droits qui reçoivent l’ASS, au nombre de 475 000 cette notre société a un devoir de solidarité envers ses anciens, même année. d’autant plus que pour eux la télévision est souvent la Pour ces 492 500 personnes, le coût de cette exonéra- seule fenêtre ouverte sur le monde extérieur. Mais, dans tion serait d’environ 370 millions de francs, ce qui, le même souci de justice sociale, il convient d’étendre certes, n’est pas négligeable ; mais ce serait sans doute cette exonération à d’autres personnes en difficulté même supportable, compte tenu des surplus de recettes fiscales si elles sont âgées de moins de soixante-cinq ans, bref, à dont Bercy dispose actuellement. d’autres bénéficiaires des minima sociaux. Il convient, par ailleurs, de moderniser et simplifier le C’est le cas des chômeurs en fin de droits, qui per- mode de perception de la redevance. çoivent l’allocation de solidarité spécifique, ou des per- Actuellement, tout détenteur d’un appareil récepteur sonnes en attente de réinsertion qui reçoivent l’allocation de télévision doit en faire la déclaration dans le délai de d’insertion. C’est aussi le cas des allocataires du RMI, des trente jours à compter de l’entrée en possession. Il serait personnes qui perçoivent l’allocation pour adulte handi- très souhaitable d’en finir avec cette obligation déclarative capé, des conjoints survivants bénéficiaires de l’allocation spécifique en l’insérant désormais dans le formulaire de d’assurance veuvage et, enfin, des personnes isolées assu- déclaration des revenus. Celui-ci ne comporterait qu’une mant seules la charge d’enfants et percevant l’allocation case à cocher où l’on déclarerait si l’on possède ou non de parent isolé. un récepteur de télévision. Fin 1997, on comptait en France métropolitaine De la même façon, le contrôle de cette obligation 3 034 000 personnes bénéficiaires de ces minima sociaux. reviendrait aux agents chargés de contrôler l’impôt sur le La loi d’orientation relative à la lutte contre les exclu- revenu et non plus aux agents du service de la redevance. sions du 29 juillet 1998 veille à préserver l’accès des per- Ce service spécifique employait 1 470 agents en 1998 et sonnes en difficulté à la fourniture d’électricité, de gaz, son coût de gestion s’élevait déjà à environ 420 millions d’eau et de téléphone. Or, pour beaucoup de ces per- de francs en 1992, ce qui représente un coût élevé pour sonnes en difficulté, qui se retrouvent isolées de par leur une efficacité réduite. La réforme proposée permettrait situation et coupées de la vie sociale, la télévision reste d’intégrer désormais les agents du service de la redevance l’un des rares moyens de conserver un lien avec l’envi- aux services fiscaux généraux, où ils renforceraient utile- ronnement extérieur, un contact avec la société. ment la lutte contre la vraie fraude fiscale. Il serait donc très légitime de ne pas limiter l’exonéra- Dans un second temps, il faudra aller au-delà et sup- tion de la redevance aux seuls titulaires de l’allocation primer la redevance. Pour beaucoup de nos concitoyens supplémentaire vieillesse et de faire bénéficier aussi les aux revenus modestes, son montant est difficile à acquit- autres allocataires de minima sociaux d’une exonération ter et représente une charge financière élevée. C’est d’ail- partielle ou totale de cette redevance. leurs pourquoi la commission des affaires culturelles a En effet, comment une personne en difficulté qui vit adopté un amendement de son président, M. Le Garrec, seulement avec l’allocation d’insertion − 59 francs par permettant de mensualiser la redevance à la demande des jour − ou un chômeur en fin de droits qui vit exclusive- assujettis. ment avec l’ASS − 2 522 francs par mois − ou encore un En réalité, cette taxe parafiscale d’un montant uni- RMIste − 2 552 francs par mois − auraient-ils les moyens forme constitue évidemment une charge beaucoup plus d’acquitter effectivement une redevance annuelle fixée à lourde pour les titulaires de faibles revenus que pour les 751 francs pour un récepteur couleur pour l’année 2000 ? personnes plus aisées. Cette charge uniforme qui frappe Et en quoi leurs maigres ressources sont-elles essentielle- tout un chacun sans aucune prise en considération de ses ment différentes de celles d’une personne de soixante- revenus, est-elle conforme à la justice fiscale et sociale que cinq ans percevant l’allocation supplémentaire vieillesse, le Gouvernement cherche à renforcer ? Je ne le crois pas. soit 2 106 francs par mois ? La suppression de cette redevance, socialement injuste Le rapport qui devra être déposé par le Gouvernement dans ses modalités, serait donc une manière équitable avant le 30 juin 2000 devra porter en particulier sur l’ex- d’aider surtout les personnes les moins favorisées. Cette tension des exonérations de redevance décidées pour mesure compléterait très utilement les réformes fiscales motifs sociaux et sur le chiffrage de ce coût, étant annoncées par le Premier ministre, qui visent à alléger la entendu que le manque à gagner devrait être compensé à charge fiscale de nos concitoyens aux revenus modestes.

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Certes, la redevance rapporte plusieurs milliards de 5 francs et représente 66 % des ressources de l’audiovisuel public. Après déduction des frais de fonctionnement du service de la redevance et de la TVA, le montant hors taxe prévu pour 2000 s’élève à 12,85 milliards de francs. La suppression de la redevance représenterait donc un ORDRE DU JOUR coût élevé pour l’Etat, qui devrait compenser intégrale- DE LA PROCHAINE SÉANCE ment ce manque à gagner au profit des radios et télé- visions publiques ; mais les surplus de recettes fiscales dont dispose actuellement l’Etat ainsi que le plan de baisse des impôts et des charges d’au moins 120 milliards M. le président. Ce soir, à vingt et une heures, troi- de francs sur trois ans... sième séance publique : Suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet M. Jean Le Garrec, président de la commission. Oh, de loi, no 2119, modifiant la loi no 86-1067 du 30 sep- monsieur Schwartzenberg ! tembre 1986 relative à la liberté de communication : M. Roger-Gérard Schwartzenberg. ... annoncé par le M. Didier Mathus, rapporteur au nom de la commis- Premier ministre devraient permettre de faire face à cette sion des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport mesure, dont on peut penser qu’elle a été envisagée. no 2238). Je demande donc que cette mesure soit chiffrée et pré- La séance est levée. vue dans le rapport sur la redevance que le Gouverne- ment nous remettra, je l’en remercie à l’avance, d’ici à (La séance est levée à dix-neuf heures trente.) trois mois, avant le 30 juin 2000. Le Directeur du service du compte rendu intégral M. le président. La suite de la discussion est renvoyée de l’Assemblée nationale, à la prochaine séance. JEAN PINCHOT

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ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 2e séance du mardi 21 mars 2000

SCRUTIN (no 227) Gouriou, Gérard Gouzes, Bernard Grasset, Mmes Odette Grzegrzulka, Paulette Guinchard-Kuns- sur l’ensemble du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvel- tler, MM. Jacques Guyard, Francis Hammel, lement urbains. Mme Cécile Helle, MM. Edmond Hervé, Jacques Heu- clin, François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Fran- Nombre de votants ...... 546 çoise Imbert, MM. Claude Jacquot, Serge Janquin, Nombre de suffrages exprimés ...... 521 Jacky Jaulneau, Armand Jung, Jean-Noël Kerdraon, Majorité absolue ...... 261 Bertrand Kern, Jean-Pierre Kucheida, André Labarrère, Pour l’adoption ...... 303 Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Contre ...... 218 Lamy, Pierre-Claude Lanfranca, Jack Lang, Jean Launay, Mmes Jacqueline Lazard, Christine Lazerges, L’Assemblée nationale a adopté. MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Mme Clau- dine Ledoux, MM. Jean-Yves Le Drian, Michel Lefait, ANALYSE DU SCRUTIN Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Patrick Lemasle, Georges Lemoine, Bruno Le Roux, René Leroux, Groupe socialiste (251) : Mme Raymonde Le Texier, MM. Alain Le Vern, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, Pour : 241. − MM. Yvon Abiven, Maurice Adevah-Poeuf, MM. Gérard Lindeperg, François Loncle, Bernard Stéphane Alaize, Damien Alary, Mme Sylvie Andrieux- Madrelle, René Mangin, Jean-Pierre Marché, Daniel Bacquet, MM. Léo Andy, Jean-Marie Aubron, Jean- Marcovitch, Jean-Paul Mariot, Mme Béatrice Marre, Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Dominique Baert, MM. Daniel Marsin, Marius Masse, Didier Mathus, Jean-Pierre Baeumler, Jean-Pierre Balduyck, Jean-Pierre Gilbert Maurer, Guy Menut, Louis Mermaz, Roland Balligand, Gérard Bapt, Alain Barrau, Jacques Bascou, Metzinger, Louis Mexandeau, Jean Michel, Didier Christian Bataille, Jean-Claude Beauchaud, Mme Yvette Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Gilbert Mitter- Benayoun-Nakache, MM. Henri Bertholet, Eric Bes- rand, Yvon Montané, Gabriel Montcharmont, Arnaud son, Jean-Louis Bianco, André Billardon, Jean-Pierre Montebourg, Philippe Nauche, Bernard Nayral, Henri Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Marie Bockel, Nayrou, Mme Véronique Neiertz, MM. Alain Néri, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Michel Pajon, Joseph Parrenin, François Patriat, Augustin Bonrepaux, André Borel, Jean-Michel Bou- Vincent Peillon, Germinal Peiro, Jean-Claude Perez, cheron, Jean-Claude Boulard, Didier Boulaud, Pierre Jean-Pierre Pernot, Mmes Marie-Françoise Pérol- Bourguignon, Christian Bourquin, Mme Danielle Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, Annette Peulvast- Bousquet, MM. Jean-Pierre Braine, Pierre Brana, Bergeal, Catherine Picard, MM. Paul Quilès, Alfred Mme Frédérique Bredin, M. Jean-Paul Bret, Mme Nicole Recours, Gérard Revol, Mme Marie-Line Reynaud, Bricq, MM. François Brottes, Vincent Burroni, Alain M. Patrick Rimbert, Mme Michèle Rivasi, MM. Alain Cacheux, Alain Calmat, Jean-Christophe Cambadelis, Rodet, Marcel Rogemont, Bernard Roman, Yves Rome, André Capet, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, MM. Jean Rouger, Mme Odette Casanova, MM. Laurent Cathala, Jean- René Rouquet, Michel Sainte-Marie, Mme Odile Yves Caullet, Bernard Cazeneuve, Jean-Paul Chante- Saugues, MM. Bernard Seux, Patrick Sève, Henri Sicre, guet, Guy-Michel Chauveau, Jean-Claude Chazal, Michel Tamaya, Mmes Catherine Tasca, Christiane Daniel Chevallier, Didier Chouat, Alain Claeys, Taubira-Delannon, MM. Yves Tavernier, Pascal Ter- Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Jean Codognès, rasse, Gérard Terrier, Mmes Marisol Touraine, Odette Pierre Cohen, François Colcombet, Mme Monique Col- Trupin, MM. Joseph Tyrode, Daniel Vachez, André lange, MM. François Cuillandre, Jean-Claude Daniel, Vallini, André Vauchez, Michel Vauzelle, Michel Ver- Jacky Darne, Camille Darsières, Michel Dasseux, Yves gnier, Alain Veyret, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet, Dauge, Mme Martine David, MM. Bernard Davoine, Philippe Vuilque et Kofi Yamgnane. Philippe Decaudin, Marcel Dehoux, Jean Delobel, François Deluga, Jean-Jacques Denis, Mme Monique Non-votant : M. Laurent Fabius (président de l’Assemblée Denise, MM. Bernard Derosier, Claude Desbons, nationale). Michel Destot, Paul Dhaille, Marc Dolez, François Groupe R.P.R. (136) : Dosé, René Dosière, Mme Brigitte Douay, MM. Julien Dray, Tony Dreyfus, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, Contre : 123. − MM. Jean-Claude Abrioux, Bernard Mme Laurence Dumont, MM. Dominique Dupilet, Accoyer, Mme Michèle Alliot-Marie, MM. André Yves Durand, Jean-Paul Durieux, Philippe Duron, Angot, Philippe Auberger, Pierre Aubry, Jean Auclair, Henri Emmanuelli, Jean Espilondo, Michel Etiévant, Gautier Audinot, Mme Martine Aurillac, MM. Edouard Claude Evin, Alain Fabre-Pujol, Albert Facon, Balladur, Jean Bardet, François Baroin, Jacques Bau- Mme Nicole Feidt, MM. Jean-Jacques Filleul, Jacques mel, Christian Bergelin, André Berthol, Léon Bertrand, Fleury, Jacques Floch, Raymond Forni, Jean-Louis Jean-Yves Besselat, Jean Besson, Franck Borotra, Bruno Fousseret, Michel Françaix, Christian Franqueville, Bourg-Broc, Victor Brial, Philippe Briand, Michel Gérard Fuchs, Robert Gaïa, Yann Galut, Roland Gar- Buillard, Christian Cabal, Gilles Carrez, Mme Nicole rigues, Jean-Yves Gateaud, Jean Gaubert, Mme Cathe- Catala, MM. Jean-Charles Cavaillé, Richard Cazenave, rine Génisson, MM. André Godin, Gaëtan Gorce, Alain Henry Chabert, Jean-Paul Charié, Jean Charroppin,

. . ASSEMBLÉE NATIONALE – 2e SÉANCE DU 21 MARS 2000 2385

Philippe Chaulet, Jean-Marc Chavanne, Alain Cousin, Abstentions : 9. − MM. Raymond Barre, Jean-Louis Ber- Charles Cova, Henri Cuq, Jean-Louis Debré, Arthur nard, Léonce Deprez, Jean-Jacques Jégou, Maurice Dehaine, Jean-Pierre Delalande, Patrick Delnatte, Jean- Leroy, Maurice Ligot, Gilles de Robien, François Marie Demange, Xavier Deniau, Yves Deniaud, Patrick Rochebloine et André Santini. Devedjian, Eric Doligé, Guy Drut, Jean-Michel Duber- nard, Jean-Pierre Dupont, Nicolas Dupont-Aignan, Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Christian Estrosi, Jean-Claude Etienne, Jean Falala, Contre : 39. − Mme Nicole Ameline, M. François d’ Jean-Michel Ferrand, Roland Francisci, Pierre Frogier, Aubert, Mme Sylvia Bassot, MM. Jacques Blanc, Yves Fromion, Robert Galley, René Galy-Dejean, Henri Roland Blum, Dominique Bussereau, Antoine Carré, de Gastines, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jean- Pascal Clément, Georges Colombier, Francis Delattre, Pierre Giran, Michel Giraud, Jacques Godfrain, Louis Franck Dhersin, Laurent Dominati, Dominique Dord, Guédon, Jean-Claude Guibal, Lucien Guichon, François Charles Ehrmann, Nicolas Forissier, Gilbert Gantier, Guillaume, Gérard Hamel, Michel Hunault, Christian Claude Gatignol, Claude Goasguen, François Goulard, Jacob, Didier Julia, Alain Juppé, Jacques Kossowski, Pierre Hellier, Michel Herbillon, Philippe Houillon, Jacques Lafleur, Robert Lamy, Pierre Lasbordes, Denis Jacquat, Aimé Kerguéris, Marc Laffineur, Jean- Thierry Lazaro, Pierre Lellouche, Jean-Claude Lemoine, Claude Lenoir, Pierre Lequiller, Alain Madelin, Alain Arnaud Lepercq, Jacques Limouzy, Thierry Mariani, Moyne-Bressand, Yves Nicolin, Paul Patriarche, Ber- Alain Marleix, Jean Marsaudon, Philippe Martin, nard Perrut, Jean Proriol, Jean Rigaud, Jean Roatta, Patrice Martin-Lalande, Jacques Masdeu-Arus, Mme Jac- José Rossi, Joël Sarlot, Guy Teissier et Gérard Voisin. queline Mathieu-Obadia, MM. Gilbert Meyer, Jean- Claude Mignon, Charles Miossec, Pierre Morange, Abstentions : 3. − MM. Pierre Cardo, Michel Meylan et Renaud Muselier, Jacques Myard, Jean-Marc Nudant, Jean-Pierre Soisson. Patrick Ollier, Mme Françoise de Panafieu, MM. Robert Groupe communiste (35) : Pandraud, Jacques Pélissard, Dominique Perben, Pierre Petit, Serge Poignant, Bernard Pons, Robert Poujade, Pour : 35. − MM. François Asensi, Gilbert Biessy, Claude Didier Quentin, Jean-Bernard Raimond, Jean-Luc Reit- Billard, Bernard Birsinger, Alain Bocquet, Patrick zer, , André Schneider, Bernard Schrei- Braouezec, Jean-Pierre Brard, Jacques Brunhes, Patrice ner, Frantz Taittinger, Michel Terrot, Jean-Claude Tho- Carvalho, Alain Clary, Christian Cuvilliez, René Dutin, mas, Jean Tiberi, Georges Tron, Anicet Turinay, Jean Daniel Feurtet, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Ueberschlag, Léon Vachet, Jean Valleix, Roland Vuil- Gerin, Pierre Goldberg, Maxime Gremetz, Georges laume, Jean-Luc Warsmann et Mme Marie-Jo Zimmer- Hage, Guy Hermier, Robert Hue, Mmes Muguette Jac- mann. quaint, Janine Jambu, MM. André Lajoinie, Jean- Claude Lefort, Patrick Leroy, Félix Leyzour, François Abstentions : 6. − Mme -Narquin, Liberti, Patrick Malavieille, Roger Meï, Ernest Mou- MM. Michel Bouvard, François Cornut-Gentille, toussamy, Bernard Outin, Daniel Paul, Jean-Claude Michel Inchauspé, Franck Marlin et Etienne Pinte. Sandrier, Michel Vaxès et Jean Vila. Groupe Radical, Citoyen et Vert (32) : Groupe U.D.F. (69) : Pour : 25. − Mme Huguette Bello, MM. Pierre Carassus, Contre : 51. − MM. Jean-Pierre Abelin, Pierre Albertini, Gérard Charasse, Bernard Charles, Jean-Pierre Defon- Pierre-Christophe Baguet, Claude Birraux, Mme Marie- taine, Jacques Desallangre, Roger Franzoni, Claude Thérèse Boisseau, M. Bernard Bosson, Mme Christine Hoarau, Elie Hoarau, Robert Honde, Guy Lengagne, Boutin, MM. Loïc Bouvard, Jean Briane, Yves Bur, Mme Gilberte Marin-Moskovitz, MM. Jean-Pierre Dominique Caillaud, Hervé de Charette, Jean-François Michel, Jean-Paul Nunzi, Jean Pontier, Jacques Rebil- Chossy, René Couanau, Charles de Courson, Yves lard, Jean Rigal, Mme Chantal Robin-Rodrigo, Coussain, Marc-Philippe Daubresse, Renaud Donne- MM. Georges Sarre, Gérard Saumade, Roger-Gérard dieu de Vabres, Philippe Douste-Blazy, Alain Ferry, Schwartzenberg, Michel Suchod, Alain Tourret, Emile Jean-Pierre Foucher, Claude Gaillard, Germain Gengen- Vernaudon et Aloyse Warhouver. win, Valéry Giscard d’Estaing, Gérard Grignon, Hubert Abstentions : 7. − M. André Aschieri, Mme Marie-Hélène Grimault, Pierre Hériaud, Patrick Herr, Mmes Anne- Aubert, MM. Yves Cochet, Guy Hascoët, Noël Marie Idrac, Bernadette Isaac-Sibille, MM. Henry Jean- Mamère, Jean-Michel Marchand et Alfred Marie- Baptiste, Edouard Landrain, Jacques Le Nay, Jean- Jeanne. Antoine Leonetti, François Léotard, Roger Lestas, Fran- çois Loos, Christian Martin, Pierre Méhaignerie, Pierre Non inscrits (10). Micaux, Mme Louise Moreau, MM. Jean-Marie Moris- set, Arthur Paecht, Henri Plagnol, Jean-Luc Préel, Marc Pour : 2. − MM. Marcel Cabiddu et Jean-Claude Leroy. Reymann, Rudy Salles, François Sauvadet, Michel Voi- Contre : 5. − MM. Marc Dumoulin, Jean-Jacques Guillet, sin, Jean-Jacques Weber et Pierre-André Wiltzer. Lionnel Luca, Charles Millon et Philippe de Villiers.

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