Benedetto Ferrari (ca. 1603-1681) Musiche Varie a voce sola

1- Amanti, io vi sò dire (Ciaconna) 4’27 2- Occhi miei che vedeste 4’28 3- M’amò tanto costei 2’16 4- Chi non sà come amor 8’56 5- Avverti ò cor 2’09 , 6- Queste pungenti spine (Cantata Spirituale) 11’14 contre-ténor 7- Lingua di donna 2’16 8- Udite, Amanti 6’14 9- Io dissi al cor 3’31 Ensemble Artaserse 10- Non fia più ver 3’46 Christine Plubeau, viole de gambe 11- Cielo sia con tua pace 4’54 (copie de Joachim Tielcke, 12- Degg’io amarvi 3’00 François Bodart – Belgique, 1995) 13- Quando prendon riposo 4’49 14- O monumenti 2’07 Claire Antonini, théorbe (Charles Besnainou à Paris, 1986) Durée totale : 64’13 Nanja Breedijk, harpe Livre I (1633) : (Simon Capp, Rose Green – Angleterre, 1996) Chi non sà come amor. Io dissi al cor. Non fia più ver. Occhi miei che vedeste Yoko Nakamura, clavecin & orgue Livre II (1637) : (clavecin italien, école Grimaldi ‘Marc Ducornet Quando prendon riposo. et Emmanuel Danset’ à Paris, 1998 Queste pungenti spine. & orgue de continuo Gerrit Klop, Lingua di donna. Cielo sia con tua pace Garderen – Pays-Bas) Livre III (1641) : Amanti, io vi sò dire. Udite, Amanti. Avverti ò cor. Degg’io amarvi. M’amò tanto costei. O monumenti créant une harmonie changeante, avec un large usage (canzonette). Par rapport au premier volume (Non fia de la dissonance. L’expression te’n fuggisti al volo évoque più ver), apparaît ainsi une plus grande caractérisation ainsi, avec éclat, l’idée de la légèreté grâce à la succes- rythmique grâce à l’usage du mètre ternaire (Lingua di Benedetto Ferrari sion rapide de valeurs brèves qui, outre leur caractère donna, M’amò tanto costei, Degg’io amarvi) ou à l’alter- descriptif, constituent un exemple d’écriture virtuose nance de séquences aux mètres variés (O monumenti) Benedetto Ferrari naquit à vers l’an est cependant pas parvenue. dans laquelle l’interprète pouvait faire montre de ses ou, enfin, de phrases mélodiques concises qui reflètent 1603. Poète, compositeur et virtuose du théorbe, il qualités vocales. l’adoption de vers plus brefs, comme le quinario (un vers mena une carrière riche de continuels déplacements et Parallèlement à la production des opéras se déroule de cinq syllabes) dans les textes poétiques (Avverti o cor). voyages, qui le virent se rendre aussi bien dans les prin- la publication des trois livres des Musiche a voce sola Ferrari resta fidèle au fil des années au genre de l’arioso, cipales villes d’Italie septentrionale (Modène, Venise, (Venise, 1633, 1637, 1641) : bien que très peu éloignés cultivant ce dernier dans chacun de ses trois volumes, Quant au contenu des textes, parallèlement d’ailleurs Bologne, Reggio Emilia, Gênes, Milan) qu’à l’étranger, chronologiquement les uns des autres, ces recueils l’illustrant en outre selon diverses formules : essentiel, aux thématiques plus diffuses, comme les thématiques notamment à la cour de Vienne où il offrit ses services illustrent parfaitement l’évolution stylistique de la mo- afin de mieux respecter la prosodie du texte(Chi non amoureuses, l’usage consistant à mettre en musique à l’empereur Ferdinand III de 1651 à 1653. Même si nodie accompagnée, de l’aube du recitar cantando à la sa), intercalé entre des séquences dans le style de l’air des poèmes à caractère moralisateur ou religieux allait les années 1623-1637 constituent encore la période la vocalité, plus spécifiquement mélodique et rythmique- qui présentent une basse au rythme régulier (Io dissi al en s’affirmant. Le genre dit « spirituel » fut ainsi cultivé moins connue de sa vie, il semble néanmoins certain ment mieux définie, dominant le mélodrame du milieu cor, Cielo sia con tua pace) ou enfin avec une structure de par des compositeurs comme Giacomo Carissimi, Do- que Ferrari aurait noué des contacts avec la cour de du siècle. répétition strophique (Quando prendon riposo). menico Mazzochi ou encore Luigi Rossi, tous contem- Modène, comme l’indique la dédicace au duc Fran- porains de Ferrari. Dans le second livre figure une com- çois Ier d’Este ouvrant le premier volume des Musiche Dans le premier livre, l’influence du style déclamé, Nous constatons dans deux recueils successifs une position qui relève de la « Cantata spirituale » (cantate varie (1633). De 1637 à 1641, Ferrari travailla surtout héritage du modèle élaboré par Caccini dans ses Nuove proximité avec le monde du théâtre d’opéra, également spirituelle), Queste pungenti spine, sur des vers du poète à Venise, où il écrivit le livret de l’Andromeda, premier musiche (1602), détermine une écriture musicale qui fait eu égard aux choix poétiques : alors que le premier lucquois Ottavio Orsucci. Le texte est construit comme mélodrame représenté dans un théâtre public en 1637, un large usage de l’arioso. La déclamation du premier volume favorise des textes de Marino et Guarini, le une exhortation à contempler la souffrance du Christ événement qui marqua, en outre, le début d’une acti- récitatif florentin était souvent accompagnée de- pas second, publié en 1637, propose des poèmes du libret- afin d’élever la conduite morale de l’âme grâce à la re- vité théâtrale appelée à devenir en peu de temps un sages plus lyriques, avec des mélodies à la ligne mieux tiste Gian Francesco Busenello. Il faut en outre souli- pentance et la prière. Le choix de la forme musicale re- véritable phénomène commercial dans la ville italienne. définie, une basse plus dynamique et un sens plus aigu gner, car il s’agit d’un élément que l’on ne rencontre vêt alors un relief tout particulier puisqu’il s’agit d’une Durant les années suivantes, Ferrari composa, toujours de l’harmonie, passages qui, néanmoins, n’étaient pas guère dans les œuvres des autres musiciens, que la structure strophique fondée sur une basse consistant pour les théâtres vénitiens, des mélodrames sur ses à proprement parler des airs au plein sens technique plupart des textes furent écrits par le compositeur lui- en une répétition continue d’un tétracorde descen- propres textes : La maga fulminata (1638) et Il pastor regio et stylistique du terme. À l’inverse des airs, l’arioso ne même et que le troisième livre présente exclusivement dant. Les diverses strophes s’intercalent alors entre des (1640), texte qui offre un intérêt particulier, car, dans dépend pas du mètre poétique mais d’une exigence des « musiche e poesie varie a voce sola del signor Benedetto séquences en style récitatif qui interrompent le rythme la version bolonaise de l’œuvre représentée l’année sui- d’emphase émotionnelle et rhétorique. Ce style se fond Ferrari » (« des musiques et poésies diverses pour voix fluide del’ostinato , créant en outre une variation dans le vante, le livret s’achève sur le duo Pur ti miro, pur ti godo. avec des éléments dérivant de la tradition madriga- seule de monsieur Benedetto Ferrari »). dessin harmonique. Ce texte apparaît d’ailleurs, peut-être avec la musique lesque, comme l’usage de la pittura sonora qui consiste du même Ferrari, dans le duo qui clôt les manuscrits à souligner le sens d’une parole ou d’un segment du Dans ce contexte, la forme de l’air strophique appa- Ferrari fit encore usage de la basse obstinée dans le re- contenant L’incoronazione di Poppea de Monteverdi, éga- texte poétique au moyen d’une mélodie pour en expri- raît déjà fermement établie, à savoir la répétition d’une cueil de 1641, cette fois sous la forme d’une chaconne, lement dans le finale du Trionfo della fatica de Filiberto mer le caractère. Un exemple clair de pittura sonora est même mélodie avec plus ou moins de variations, sur dans l’air Amanti io vi so dire. La basse présente une forte Laurenzi, divertissement musical représenté à ainsi visible dans Occhi miei che vedeste dans lequel l’au- diverses strophes du texte qui présentent toutes le connotation rythmique, avec syncope et anticipation, durant le Carnaval de 1647, dont la musique ne nous teur souligne la signification des mots duolo et morire, même nombre de vers et le même schéma de rimes la voix se déployant librement avec de longues phrases et des mélodies ornées qui parfois s’étendent sur toute Philippe Jaroussky, contre-ténor La même année, il chante le rôle de la Gloria dans la durée d’un segment de la basse continue, parfois l’oratorio de Bassani, La Morta Delusa (enregistrement même sur le double de cette durée. Un autre élément Né en 1978, Philippe Jaroussky débute ses études paru chez Opus 111-Naïve) avec La Fenice et Jean récurrent dans la composition sur un ostinato consista musicales par le violon (premier prix du cnr de Tubéry, avec qui il chante aussi les Vêpres de Pierre à explorer les possibilités harmoniques ultérieures, en- Versailles), puis le piano, ainsi que l’analyse et l’écriture Menault (enregistrement k617). traînant l’enchaînement prévisible des accords. musicale. Depuis 1996, il étudie le chant auprès de En 2002, il participe à la tournée de l’arcal, avec Nicole Fallien. En 1997, il entre au département de l’ensemble Matheus et Jean-Christophe Spinosi, dans Les trois livres des Musiche varie a voce sola, par leur choix musique ancienne du Conservatoire national de région l’opéra de Vivaldi La Verità in Cimento – qui lui apporte les de textes poétiques comme par la variété des solutions de Paris, où il obtient en 2001 son diplôme avec les éloges de la presse (cette production a fait l’objet d’un musicales qu’ils proposent, constituent une contribu- félicitations du jury. Parallèlement, enregistrement chez Opus 111-Naïve). tion non seulement à l’évolution des genres nouveaux il commence en 1999 sa carrière de Il prend également part aux Vêpres de la de musique vocale au seicento, mais aussi et par voie soliste aux festivals de Royaumont et Vierge de Monteverdi avec Jean Tubéry de fait à une cristallisation des modèles qui trouvera d’Ambronay dans l’Oratorio inédit et La Fenice (Festivals de Namur et son expression la plus aboutie dans les vingt dernières d’Alessandro Scarlatti Sedecia, Rè di de Pontoise, Sinfonia en Périgord). Il années du siècle. Gerusalemme, avec Gérard Lesne et interprète enfin leNisi Dominus de Vivaldi son ensemble Il Seminario Musicale avec l’ensemble Matheus, remportant Barbara Nestola © cmbv-cnrs (enregistrement emi Virgin). un vif succès lors des Folles Journées de Adaptation française : Yutha Tep Au cours de l’année 2000, lors d’une Nantes 2003, puis ce même programme tournée en France, il est remarqué par avec la Grande Écurie et la Chambre du la critique musicale dans la Trilogie Roy dirigé par Jean Claude Malgoire au de Monteverdi, en particulier dans Théâtre du Châtelet. Il Ritorno d’Ulisse in Patria (l’Umana Ses prochains concerts comprennent fragilità, Eumete), et L’Incoronazione outre le Nisi Dominus de Vivaldi, Agrippina di Poppea (Nerone et Valletto), et se (rôle de Néron) de Haendel. Avec produit dans l’opéra Celos, a un del aire l’ensemble Matheus, il chante des airs matan de Juan Hidalgo au Teatro Réal de Vivaldi en compagnie de Veronica de Madrid ; ces productions sont toutes Cangemi. dirigées par Jean-Claude Malgoire, avec qui il chante la Messe en si mineur et La Passion selon saint Matthieu de Bach. Il travaille également avec Gabriel Garrido pour l’enregistrement de L’Incoronazione di Poppea dans le rôle de Mercure. En 2001, après la reprise de la Trilogie de Monteverdi au Théâtre des Champs-Élysées, il interprète Arbace dans l’opéra Catone In Utica de Vivaldi à l’Opéra-Comique, de nouveau sous la direction de Jean-Claude Malgoire (enregistrement live Dynamic). Nanja Breedijk Claire Antonini Joyé. Elle étudie au sein du département de musique ancienne au Conservatoire national de région de Paris, Nanja Breedijk vient à Paris en 1995, après ses études Après des études supérieures de guitare, Claire Antonini en clavecin, avec Noëlle Spieth et en basse continue au Conservatoire royal de la Haye, pour étudier la étudie le luth et la musique ancienne auprès d’Antoine avec Hélène Dufour et Stefano Intrieri ; en outre, elle musique contemporaine, sans abandonner la harpe Geoffroy Dechaume. Puis au sein du Conservatoire assiste aux cours de chant de Michel Laplénie. En 2001, baroque, à laquelle elle s’est initiée à La Haye. Séduite national supérieur de musique de Lyon, elle se forme elle obtient le diplôme de clavecin à l’unanimité avec par cet instrument et ses possibilités inattendues, auprès d’Eugène Ferré, Gérard Geay, Robert Crawford les félicitations du jury, et prend également des cours elle se spécialise dans l’arpa doppia, Young (diplôme en 1992). Depuis 1976, elle étudie la avec Kenneth Weiss, Yvon Repérant et Mirella Giardelli. très présente dans les répertoires musique traditionnelle persane auprès de Dariush e Depuis 1999, Yoko Nakamura participe à la session italien et allemand du xvii siècle. Talaï (diplôme d’État de professeur de musique de chant baroque dirigée par Gérard Lesne, Blandine En tant que soliste elle a joué le traditionnelle en 1989). Elle se produit régulièrement Rannou et Bruno Cocset à l’abbaye de Royaumont. Concerto pour harpe de Haendel en récital en France et à l’étranger : Cité de la Musique, Elle se produit en tant que continuiste dans nombre avec Concerto Köln et en tant que Centre des Musiques arabes et de festivals européens, mais aussi en tant que chef de continuiste elle travaille avec des méditerranéennes de Tunisie, chant et accompagnatrice (Il Ritorno d’Ulisse in Patria formations telles que La Fenice et Festival d’Île-de-France, contribuant à Mons, Belgique ; Académie de Musique ancienne à Akadêmia en France, Ex Tempore largement à la diffusion de la Saint-Armand-de-Coly, Périgord Noir). en Belgique, tout en enregistrant trois disques (Belli, musique pour luth, mais réservant Moulinié et Il Fasolo) avec Le Poème Harmonique et une part importante de son activité Vincent Dumestre. à la musique contemporaine (œuvres de Claire Renard, Christian Boissel, Ensemble Artaserse Claudio Ambrosini). Elle est aussi Au fil des rencontres et des concerts communs au sein Christine Plubeau l’invitée d’ensembles tels que xviii-21 Musiques des des plus prestigieux ensembles de musique ancienne, Lumières, La Grande Écurie et la Chambre du Roy, la Nanja Breedijk (harpe baroque), Christine Plubeau Après des études de violoncelle, Maîtrise de Versailles… (viole de gambe), Claire Antonini (théorbe), Yoko Christine Plubeau se spécialise Nakamura (clavecin et orgue) et enfin Philippe en musique baroque, auprès de Jaroussky (contre-ténor) tissent peu à peu des liens de Wicland Kuijken, au Conservatoire Yoko Nakamura complicité autour de conceptions musicales royal de La Haye et obtient le communes, particulièrement pour la musique italienne diplôme de soliste en 1988. Elle Yoko Nakamura fait ses études du début du xviie siècle. Ainsi naît l’ensemble Artaserse. poursuit une carrière de soliste et au lycée des Beaux-Arts puis à Son premier concert au Théâtre du Palais-Royal en de continuiste au sein de plusieurs ensembles tels La l’université nationale des Beaux- octobre 2002 – autour de l’œuvre de Benedetto Ferrari Grande Écurie et la Chambre du Roy (sous la direction Arts de Tokyo (clavecin avec – obtient immédiatement un très vif succès qui annonce de Jean-Claude Malgoire), Variation, Concerto di notamment Masaaki Suzuki, basse un avenir prometteur pour cette nouvelle formation. bassi... Elle a participé à de nombreux festivals en continue, orgue et pianoforte). France et à l’étranger. Elle a enregistré pour les labels Depuis 1994, elle se perfectionne Harmonia Mundi, Auvidis et k617. Christine Plubeau en France auprès de Christophe est lauréate de la Fondation Yehudi Menuhin. Rousset, Pierre Hantaï ou Elisabeth mid-seventeenth century opera, with a more distinctive Francesco Busenello. Furthermore, it is important to Ferrari also makes use of a basso ostinato in the third Benedetto Ferrari melody and a clearer rhythm. note, for the case is quite unique, that Ferrari himself book of 1641, this time in the form of a chaconne in wrote most of his texts, and indeed all the pieces in the the aria Amanti io vi so dire. The bass presents a strong The poet, composer and virtuoso theorbo player The first book of Musiche varie is influenced by the third book of 1641, which bears the mention ‘musiche rhythm, with syncopation and anticipation, and Benedetto Ferrari was born at Reggio Emilia around declamatory style elaborated by Caccini in Le nuove e poesie varie a voce sola del signor Benedetto Ferrari’. the voice moves freely, with long phrases and ornate 1603. He worked in many of the major cities of musiche (1602), hence Ferrari’s extensive use of arioso. melodies that sometimes extend over the whole northern Italy (Reggio, , , , Declamation in the early stile recitativo developed in In the third book the form of the aria strofica already duration of the segment of the bass, or even over two Genoa, Milan) but also at the Viennese court, where he Florence was often counterbalanced by more lyrical appears to be well established, i.e. the same melody, segments. Furthermore, compositions based on an served the Emperor Ferdinand III from 1651 to 1653. passages, with a clearer melodic line, a more dynamic more or less varied, is used for each of the strophes, ostinato gave musicians the opportunity of exploring The course of his career between 1623 and 1637 is bass and a stronger sense of harmony; technically and which all have the same number of lines and the same new harmonic possibilities, predictably involving the uncertain, though he appears to have been in contact stylistically, these passages were not true arias, however. rhyme pattern (canzonetta). Compared to the first linking of chords. with the Modenese court, for in 1633 he dedicated his Unlike the aria, the arioso was not dependent on the volume (Non fia più ver) the rhythm is more marked. first book of Musiche varie to Duke Franceso I d’Este. poetic metre, but on the requirements of emotional Ferrari uses triple metre in Lingua di donna, M’amò tanto In the choice of poetic texts, as in the variety of musical Fom 1637 to 1641 Ferrari was active as a librettist and or rhetorical emphasis. This style was blended with coste and Degg’io amarvi, an alternation of contrasting solutions proposed, the three books of Musiche varie a composer, mainly in Venice. His Andromeda, set to music elements derived from the madrigal tradition: word metres in O monumenti, and concise melodic phrases, voce sola contributed to the development of new types by Manelli and staged in 1637, was the earliest Venetian painting, for example, i.e. the musical depiction of the reflecting the adoption of shorter metres, such as the of vocal music in the Seicento, and consequently to opera given before a paying public (performances meaning or idea associated with a word (or words). five-syllable line, in the poetic texts Avverti( o cor). the crystallisation of models that were to attain their had previously been reserved for an aristocratic elite). In Occhi miei che vedesti, for example, Ferrari makes full expressive potential in the last twenty years of Ferrari then provided both the text and the music for appropriate use of dissonance on the words ‘duolo e As for the content of the texts, we find poems on the century. two operas, both presented in Venice: La maga fulminata morire’ and the rapid succession of short notes on ‘te’n common themes, such as love, but also pieces with (1638) and Il pastor regio (1640). The latter was revived fuggisti al volo’ effectively evokes the idea of lightness a more moralising or religious tone. The setting of Barbara Nestola © cmbv-cnrs in Bologna in 1641. The Bolognese version included as (as well as bringing out the singer’s virtuoso qualities). ‘spiritual’ pieces was becoming increasingly popular Translation: Mary Pardoe its final duet, the text ‘Pur ti miro, pur ti godo’, which with composers at that time, and Giacomo Carissimi, was later reused (possibly with Ferrari’s music) for the Ferrari remained faithful to the arioso style over the Domenico Mazzochi and Luigi Rossi left some fine final duet in the surviving manuscripts of Monteverdi’s years, cultivating it in each of the three volumes of examples. The second book contains a composition L’Incoronazione di Poppea. The same text also appears as Musiche varie and occasionally trying out new solutions. described as a ‘cantata spirituale’, Queste pungenti the finale of Filiberto Laurenzi’s Trionfo della fatica, a It is essential in Chi non sa, where it follows the prosody spine, to a text by Ottavio Orsucci (a poet from Lucca). musical divertimento that was performed at the Roman of the text. In Io dissi al cor and Cielo sia con sua pace it The text exhorts human beings to look upon Christ’s Carnival of 1647 (music lost). alternates with sequences in aria style with a regular sufferings in order to be capable of love. The choice of rhythm in the bass. And in Quando prendon riposo Ferrari musical form is of particular importance in this piece: Ferrari also published three books of Musiche varie a uses a strophic repetition structure. a strophic structure over a bass constantly repeating voce sola (Venice, 1633, 1637 and 1641). Though they a descending tetrachord. The various strophes come were composed within a relatively short time span, they The following two books move closer to the world of between sequences in stile recitativo, which interrupt reflect the changing style of accompanied monody, opera. The first book of 1633 contains pieces by the the rhythmic flow of the ostinato, while also creating a from the emergence of recitar cantando (midway between poets Marino and Guarini, while in the second book of variation in the harmonic pattern. song and speech) to the vocal style that is typical of 1637 the composer turns to texts by the librettist Gian Philippe Jaroussky, countertenor 111-Naïve) at Vézelay (Rencontres Musicales) and at Nanja Breedijk Ferré, Gérard Geay and Robert Crawford Young, the Utrecht Festival, with La Fenice and Jean Tubéry. and obtained her diploma in 1992. From 1976 she After studies at the Royal Conservatory in The Born in 1978, Philippe Jaroussky took up the violin And he sang Pierre Menault’s Vêpres (recorded by k617), studied traditional Persian music with Dariush Talai, (premier prix, Conservatoire National de Région, also with La Fenice and Jean Tubéry. Hague, Nanja Breedijk came to Paris in 1995 to qualifying in 1989 as a teacher of traditional music. Versailles) before studying piano, musical analysis and In 2002 he took part in Vivaldi’s opera La Verità study contemporary music. But she did not give up She appears regularly in recital - Cité de la Musique, composition. In 1996 he began to take singing lessons in Cimento with the Matheus Ensemble and Jean- the Baroque harp, which she had learned to play in Paris; Festival d’Île-de-France; Centre des Musiques with Nicole Fallien. The following year he entered the Christophe Spinosi (arcal tour); his performance was Holland. Charmed by this instrument and its amazing Arabes et Méditerranéennes, Tunis; etc. - and plays possibilities, she specialised in the arpa doppia, which Department of Early Music at the Paris Conservatoire hailed by the press (production recorded by Opus with ensembles such as xviii-21 Musiques des Lumières, National de Région, where he obtained his diploma 111-Naïve, with Sara Mingardo, Nathalie Stutzmann, is commonly used in seventeenth-century Italian and La Grande Écurie et la Chambre du Roy, and the summa cum laude in 2001. Simultaneously, he embarked Anthony Rolfe-Johnson and Guillemette Laurens). He German music. As a soloist, she has played Handel’s Maîtrise de Versailles. But she also devotes much time on a career as a soloist in 1999 at the Royaumont also took part in Monteverdi’s Vespro della Beata Vergine Harp Concerto with Concerto Köln, and she plays to the performance of modern works (Claire Renard, and Ambronay festivals, where he appeared in the with Jean Tubéry and La Fenice (Namur and Pontoise continuo with ensembles such as La Fenice and Christian Boissel, Claudio Ambrosini). revival of Alessandro Scarlatti’s oratorio Sedecia, Rè Festivals, Sinfonia in Périgord). Akadêmia in France, and Ex Tempore in Belgium. With Le Poème Harmonique and Vincent Dumestre she has di Gerusalemme with Gérard Lesne and Il Seminario In 2003 Philippe Jaroussky sang Vivaldi’s Nisi Dominus Yoko Nakamura Musicale. The same oratorio was later presented at the to great acclaim with the Matheus Ensemble at Les made three recordings (Belli, Moulinié and Il Fasolo) National Theatre in Le Mans and at the Opera House in Folles Journées de Nantes, and went on give the same for Alpha. Yoko Nakamura studied at the School of Fine Arts, Montpellier; it was recorded by emi Virgin. programme with Jean Claude Malgoire and La Grande then at the National University of Fine Arts in Tokyo In 2000 he came to the notice of the music critics for Écurie et la Chambre du Roy at the Châtelet Theatre Christine Plubeau (harpsichord with Masaaki Suzuki, continuo, organ and pianoforte). In 1994 she came to France to work his performances in France of the Monteverdi Trilogy, in Paris. After learning to play the cello, Christine Plubeau particularly Il Ritorno d’Ulisse in Patria (L’Umana fragilità, His forthcoming engagements include further with Christophe Rousset, Pierre Hantaï and Elisabeth specialised in Baroque music with Wieland Kuijken at Joyé. She studied in the Department of Early Music at Eumete) and L’Incoronazione di Poppea (Nerone and performances of Vivaldi’s Nisi Dominus, Handel’s the Royal Conservatory in The Hague, and obtained Valletto). The same year, he appeared in Hidalgo’s Agrippina (Nerone) and Pergolesi’s Stabat Mater, and the Paris Conservatoire-CNR (harpsichord with Noëlle her soloist’s diploma in 1988. She went on to appear as Spieth, continuo with Hélène Dufour and Stefano opera Celos, a un del aire matan at the Teatro Réal in arias by Vivaldi with Veronica Cangemi and the a soloist and continuo player with various ensembles, Madrid. Jean-Claude Malgoire – with whom he also Matheus Ensemble. Intrieri, and singing with Michel Laplénie). In 2001 she including La Grande Écurie et La Chambre du Roy was unanimously awarded her diploma (harpsichord) sang Bach’s Mass in B minor and St Matthew Passion (Jean-Claude Malgoire), Variation, and Concerto di – directed all these productions. Philippe Jaroussky summa cum laude and took classes with Kenneth Weiss, Bassi. She has taken part in many festivals in France Yvon Repérant and Mirella Giardelli. Since 1999 Yoko also worked with Gabriel Garrido for the recording and other countries, and has made recordings for of L’Incoronazione di Poppea (Mercurio) and for Cavalli’s Nakamura has taken part in the courses in Baroque Harmonia Mundi, Auvidis and k617. Christine Plubeau music directed by Gérard Lesne, Blandine Rannou and opera I Strali d’Amore at the Beaune Festival. is a winner of the Yehudi Menuhin Foundation Award. In 2001, after the reprise of the Monteverdi Trilogy Bruno Cocset at Royaumont Abbey. She appears as a at the Théâtre des Champs-Élysées, he took the part continuo player at many European festivals, and also of Arbace in Vivaldi’s opera Catone in Utica at the Claire Antonini as a choir director and accompanist (Monteverdi’s Il Opéra Comique in Paris, again under the direction of After learning to play the guitar, Claire Antonini turned Ritorno d’Ulisse in Patria at Mons, Belgium; Academy of Jean-Claude Malgoire (performance recorded live by to the lute and early music, which she studied with Early Music, Saint-Armand-de-Coly, Périgord Noir). Dynamic). The same year, he took the role of La Gloria Antoine Geoffroy Dechaume. She went on to the Lyons in Bassani’s oratorio La Morta Delusa (recorded by Opus Conservatoire (CNSM), where she worked with Eugène Ensemble Artaserse Nanja Breedijk (Baroque harp), Christine Plubeau (viola da gamba), Claire Antonini (theorbo), Yoko Nakamura (harpsichord, organ) and Philippe Jaroussky (countertenor) have all appeared in concert with the foremost early music ensembles. That was how they met and, on getting to know one another, realised their common interest in early seventeenth-century Italian music. The result was Artaserse. Their first concert at the Théâtre du Palais-Royal in Paris in October 2002 – a concert devoted mainly to works by Benedetto Ferrari – was a triumph, announcing a promising future for this new ensemble.

Translation: Mary Pardoe Amanti, io vi sò dire Amants, je vais vous dire Lovers, I will tell you 1 Poesia di Benedetto Ferrari Poésie de Benedetto Ferrari Poem by Benedetto Ferrari

Amanti, io vi sò dire Amants, je vais vous dire : Lovers, I will tell you Ch’è meglio assai fuggire Il vaut beaucoup mieux fuir That it is much better to flee Bella donna vezzosa Une très jolie femme, A fair and charming woman, O sia cruda o pietosa; Qu’elle soit cruelle ou adorable ; Whether she is cruel or merciful; Ad ogni modo e via De toute façon, et quoi qu’il en soit, After all, whatever happens, Il morir per amor è una pazzia. Mourir par amour, c’est une folie. To die for love is madness.

Non accade pensare Qu’on n’aille pas s’imaginer Do not go imagining Di gioir in amare: Que l’amour apporte le plaisir : That love brings pleasure: Amoroso contento Le contentement amoureux Amorous contentment Dedicato è al momento, N’a lieu qu’à un moment donné, Lasts but a moment, E bella donna, al fine, Et une belle femme, pour finir, And a fair lady, after all, Rosa non dona mai senza le spine. N’accorde jamais de roses sans épines. Never gives roses without thorns.

La speme del gioire L’espoir du plaisir The hope of pleasure Fondata è su ‘l martire; Repose sur le martyre ; Is based on suffering; Bellezza e cortesia La beauté et la courtoisie Beauty and kindness Non stann’in compagnia; Ne font pas bon ménage ensemble ; Are ill assorted; So ben dir con mio danno Je puis le dire, à mon grand préjudice : But I can say, to my detriment, Che la morte ed amor insieme vanno. La mort et l’amour se tiennent par la main. That death and love go together.

Vi vuol pianti a diluvi Il faut des fleuves de larmes It takes floods of tears Per spegner i vesuvi Pour éteindre les cratères To extinguish the volcanoes D’un cor innamorato, D’un cœur amoureux, Of an amorous heart, D’un spirito infiammato; D’un esprit enflammé ; Of a soul that has been set on fire; Pria che si giunga in porto Avant d’arriver à bon port, Before reaching safety, Quante volte si dice: Ohimè son morto. Que de fois n’a-t-on pas dit : « Hélas, je suis mort ». How many times has one said: ‘Alas, I am dead!’

Credetel a costui Croyez celui qui peut dire, Believe him who can say, Che per prova può dir: Io vidi, io fui; Par son expérience : « Je l’ai vu, j’y étais » ; From experience: I saw it, I was there. Se creder nol volete, Si vous ne voulez pas le croire, If you will not believe him, Lasciate star che poco importa a me: Laissez tomber, cela m’est bien égal : Forget it, for what do I care! Seguitate ad amar; ad ogni modo, Continuez à aimer ; de toute façon, Go on loving; for he who must Chi de’ rompersi il collo non accade Celui qui doit se rompre le cou Break his neck has never been able Che schivi od erta o fondo, N’a jamais pu éviter ni le sommet ni le sol, To avoid the steep climb or the fall, che per proverbio io sentii sempre dire; Car j’ai toujours entendu dire, par le proverbe, For I have always heard say, by the proverb, dal destinato non si può fuggire. Que « nul ne peut échapper à son destin ». That no one can escape his destiny.

Donna, so chi tu sei; Femme, je te connais bien ; Woman, I know who you are; Amor, so i fatti miei. Amour, je sais à quoi m’en tenir. Love, I know what to expect. Io non tresco più con voi; Je ne veux plus avoir affaire à vous ; I will have no more to do with you; Alla larga ambidoi Tenez-vous loin de moi, l’une et l’autre : Keep away from me, both of you! S’ogn’un fosse com’io Si tous étaient comme moi, If everyone was like me, Saria un balordo Amor e non un dio. L’Amour serait un sot, et non un dieu ! Love would be a fool and not a god!

2 Occhi miei che vedeste Vous, mes yeux, qui voyez My eyes, you that see Poesia d’Incerto Poésie anonyme Anonymous text

Occhi miei che vedeste Vous, mes yeux, qui voyez My eyes, you that see Il bell’idolo vostro in preda altrui Votre bien-aimée être la proie d’un autre Your love a prey to another, Perchè non vi chiudeste? Que ne vous fermez-vous ? Why do you not close? E tu anima mia Et toi, mon âme, And you, my soul, Perch’al gran duolo Que d’un si grand chagrin Why do you not flee far Non te’n fuggisti à volo? Ne t’envoles-tu loin ? From such great sorrow? Ahi che posso dire Hélas ! que puis-je dire ? Alas, what can I say? Ch’il soverchio dolor non fà morire. Que l’excès de douleur ne nous fait point mourir. That excessive pain does not kill?

3 M’amò tanto costei Elle m’aima si fort She loved me so much Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari

M’amò tanto costei, Elle m’aima si fort She loved me so much. Che tanto i sommi dei Que les dieux de l’Olympe The greatest gods on high Non amano lassù. N’aiment pas tant, là-haut. Love not as much. Ora non m’ama più. Elle ne m’aime plus : But now she loves me no more. Meraviglia non è, Ce n’est guère étonnant It is no surprise Se varia umor e fé, Que son humeur varie, et aussi sa constance. If dispositions change and loyalties: Al mondo per natura La Nature veut qu’en ce bas monde By nature, in this world Tutto passa e non dura. Tout passe et ne dure pas. Everything passes, nothing lasts. Forse che m’ingannò Peut-être je m’égare Perhaps I am mistaken Perch’in me non trovò Car je ne trouve en moi For I find not in myself Tanto merto, e bontà Point tant de mérite ni de bonté As much merit and goodness Quant’in le è beltà Qu’il n’est en elle de beauté. As she has beauty. Ma nel regno d’amor Mais au royaume d’Amour But in Love’s realm Del pari va ogni cor Tous les cœurs sont égaux. All hearts are equal. Ah, non puo donna amante Ah ! une femme amoureuse Ah, a woman in love Esser bella, e costante Ne peut être belle et constante. Cannot be beautiful and constant.

Non mi vuo’ disperar Je ne veux point désespérer I will not despair. Se non mi vuol amar, Si elle ne veut m’aimer : If she will not love me, Ben tempo anco verrà, Le temps bientôt verra The time will come Che nessun l’amerà; Que nul ne l’aimera. When no one will love her. Vostr’instabil desir Votre instable désir, O women, I will be like you O donne vuo’ seguir Femmes, je veux l’imiter : In your fickleness: Vuo’ amar con mente scaltra Je veux aimer, rusé, Using my wiles, I will love Hoggi una, diman l’altra. Aujourd’hui l’une, l’autre demain. One today, another tomorrow.

4 Chi non sà come amor Qui ne sait comment amour He who knows not how Love Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari

Chi non sà come amor come Fortuna Qui ne sait comment amour, comment fortune He who knows not how Love, how Fortune Strazi un cor che più di lor si fida Déchirent un cœur d’autant plus qu’il ne se fie à eux, Break a heart the more it trusts them, Come questa saetti e quello ancida Comment celle-ci lance des flèches et celui-là tue How the one fires arrows and the other kills Né l’un né l’altro abbian fermezza alcuna Et que ni l’un ni l’autre n’ont aucune constance, And neither have any constancy, Giri a me gli occhi in cu di mal s’aduna Qu’il tourne vers moi ses yeux qui abritent tout le mal Let him turn to me his eyes, wherein gather all the ills Quando Pandora accoglie e Stige annida Que Pandore recueille et le Styx renferme Received by Pandora and nurtured by the Styx. Anzi pur cede Averno alle mie strida Et pourtant l’Averne cède à mes cris And yet hell gives way to my cries Come a vermiglio Sol pallida Luna Comme la pâle Lune cède au Soleil vermeil As the pale Moon gives way to the crimson Sun. A questo rischio va chi s’innamora Celui qui tombe amoureux encourt ce risque He takes this risk who falls in love; Cosi va chi per Donna incenerisce Ainsi va qui pour une Dame se consume Thus it is for him who pines for a Lady, Chi per colpa d’un ciglio il cor distrugge Qui pour ces beaux yeux son cœur détruit Who for a glance from her ravages his heart, Chi nell’oro d’un crin impoverisce Qui pour l’or d’une chevelure s’appauvrit Who for her golden locks wastes away. Ahi che tal’or ben spesso più veloce Ah, car bien souvent plus véloce Alas, too often, the poor lover Che rapida saetta Qu’une rapide flèche court un misérable amant Moves faster than a speeding arrow Corre miser’ amante Depuis le ciel d’un beau visage jusqu’au cruel Enfer. From the heaven of a lovely face Dal cielo d’un bel volto al crudo inferno Et des seins intacts To the cruelty of hell; E dalle mamme intatte D’un océan de lait And from the untainted bosom, D’un ocean di latte Auquel ces trésors servent de rives From an ocean of plenty A cui l’alme fan sponde Il glisse vers des abîmes profonds With bounty as its shores, Sdrucciola alle voragini profonde Moi par expérience je le sais He slips into the deep abyss. Io per prova il so Je l’ai appris I know this from experience, Lo appresi Io l’intesi Je l’ai compris I have understood, I have learned it Nella scola del pianto À l’école des larmes At the school of tears, where Love, Quando mi lesse amor Lorsqu’amour me l’enseigna That hard and pitiless teacher, Ahi dura sorte Ah sort cruel Instructed me; Sulla rigida catedra di morte Depuis sa chaire d’une impitoyable rigueur O cruel destiny! Io far fede non posso a chi m’ascolta Je ne puis donner foi à qui m’écoute I cannot cheer my listener, Che d’amor speculante Car en spéculant sur l’amour For when I consider love Trovo ancor duo soli Je ne trouve que deux seuls objets singuliers I find in our time but two E singulari oggetti Dignes de notre époque Unique objects Al secol nostro D’une éternelle renommée et d’un éternel honneur : Worthy of eternal fame Degni d’eterna fame La beauté de mon soleil et ma douleur And everlasting honour: E d’un eterno honore Entourée d’ardents et de fervents soupirs The beauty of my Sun La beltà del mio sole e ‘l mio dolore Et revêtue d’un froid glacial And my sorrow, Cinto d’ardenti e fervidi sospiri Délivré de sa cruelle jalousie Girded with ardent, fervent sighs E del gelo freddissimo vestito Par ses chaînes bien-aimées And clad in coldest ice. Non è sol duce degli amanti amore Amour n’est pas le seul guide des amants, Love is not the lover’s only guide; Or si che posso dire Ah oui je peux dire Ah, yes, I can say, Oimé ch’il crudo stampa Hélas, que le cruel marque Alas, that Love with his sweet brand Con dolce ferro amara piaga D’un doux fer une blessure amère Leaves a cruel mark, a grievous wound E dà le chiavi del riso in mano al pianto Et remet les clés du rire aux mains des larmes And hands to sorrow the key of laughter, Unisce al ciel delle dolcezze intanto Entre-temps il relie au ciel des douceurs Bringing heaven’s delights Dell’averno le porte Les portes de l’Averne Close to the gates of hell. E chi serve ad amor Et qui est esclave de l’amour Thus he who is a slave to love Serve alla morte. Est esclave de la mort. Is a slave to death.

5 Avverti ò cor Prends garde à toi, mon cœur O my heart, take care Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari

Avverti ò cor se del tuo ardor Prends garde à toi, mon cœur si de ton ardeur O my heart, take care, lilla non hà qualche pietà Lilla n’a pas quelque pitié ; If Lilla shows no compassion for your flame; che ti consumi più non vuò, nò, nò. Je ne veux pas que tu te consumes, non, non. I do not want you to burn away, no, no. ma s‚à tua fè darà mercè, Que si à ta foi elle fait grâce But if she is moved by your fidelity, vuò che tu arda notte e di, si, si. Je veux que tu brûles nuit et jour, oui, oui. I want you to burn night and day, yes, yes.

Non sospirar non lagrimar Cesse de soupirer, cesse de pleurer Sigh not, weep not, Se à pietà muor chi tarde ogn‚hor Si à la pitié meurt celle qui toujours te fait attendre ; If she dies, who never shows compassion; Pianger i morti non fà prò, nò, nò. Pleurer les morts n’apporte rien, non, non. Mourning the dead does no good, no, no. se à carità ella vivrà, Que si à la charité elle s’éveille But if she becomes kind, vuò che tu pianga notte e di, si, si. Je veux que tu pleures nuit et jour, oui, oui. I want you to weep night and day, yes, yes.

Se havrà‚l cor fier, statti à veder Si son cœur est fier reste à regarder If her heart is proud, stay and watch Altri languir e incenerir Les autres languir et se consumer ; Others yearn and burn; Mal per tè mai Œammonirò, nò, nò. Je ne te souhaite aucun mal, non, non. I wish you no harm, no, no. ma se nel sen t‚accoglie appien, Que si en son sein elle te fait place But if she makes room for you in her heart, vuò che t u mora notte e di, si, si. Je veux que tu meures nuit et jour, oui, oui. I want you to die night and day, yes, yes..

6 Queste pungenti spine Ces épines acérées Those sharp thorns Ottavio Orsucci Ottavio Orsucci Ottavio Orsucci

Prima parte Première partie Part one

Queste pungenti spine Ces épines acérées Those sharp thorns, che ne boschi d’abisso Nées et grandies Which sprang up and grew nodrite ed allevate Aux bois infernaux In infernal woods, affliggono, traffiggono Affligent, transpercent Afflict, wound o crudeltade, Ô barbarie ! (O barbarity!) il mio Signor e Dio Mon Seigneur et mon Dieu. My Lord and my God.

Son saette divine Ce sont flèches divines They are divine arrows, che col foco del cielo Qui par le feu céleste Which by heavenly fire addolcite e temprate Adoucies, tempérées, Subdued, tempered, allettano, dilettano, Charment, caressent Charm, caress o gran pietade Ô grande pitié ! (O great mercy!) il cor divino e pio. Ce cœur pieux et divin. That divine and pious heart.

E tu anima mia Et toi, ô mon âme, And you, my soul, Non sai che sia dolore; Tu ne sais ce qu’est la douleur ; You know not what suffering is; Ancor non senti amore? Ne sens-tu point encore d’amour ? Do you not yet feel love?

Seconda parte Deuxième partie Part two

Ahi, miserella, ascolta Hélas, malheureuse ! écoute : Alas, poor soul, listen: I tuoi vani diletti Tes vaines jouissances, Your vain delights, I piaceri, i contenti Plaisirs, contentements, Pleasures, satisfactions, Inducon, conducono Te mènent, te conduisent Lead you, guide you O pene, o stenti, Ô souffrance, ô peines ! (O pains! O suffering!) Te stessa al cieco inferno. Tout droit à l’aveugle enfer. Straight to the darkness of hell!

Deh, si, deh mira una volta Ah, oui ! ah, regarde une seule fois Ah, yes, ah, look but once upon Del tuo celeste amante De ton céleste amant The wounds, the torments Le ferite e i tormenti Les blessures, les tourments, Of your heavenly lover, Che chiamano, richiamano Qui t’appellent, te réclament, Which call you, summon you O, dolci accenti, Ô doux accents ! (O sweet accents!) Te stessa al cielo eterno. Tout droit au ciel éternel. To eternal heaven.

E pure, anima mia Et pourtant, ô mon âme, And yet, my soul, Non sai che sia dolore, Tu ne sais ce qu’est la douleur ; You know not what suffering is; Ancor non senti amore? Ne sens-tu point encore d’amour ? Do you not yet feel love?

Terza parte Troisième partie Part three

Stolta che fai? che pensi? Sotte, que fais-tu ? À quoi penses-tu ? Fool, what are you doing and thinking? Il tuo Giesu tradito Ton Jésus trahi, Your Jesus betrayed, Il tuo Giesu piagato Ton Jésus blessé, Your Jesus wounded, Si lacera, si macera, Se lacère, se mortifie, Is lacerated, mortified Ohimè che stato, Hélas, en quel état se met-il ! (Alas, what a state!) Solo per darti vita, Pour te donner la vie. Merely that you may live.

E tu ingrata Et toi, ingrate And you, ungrateful one, I sensi ogn’hor Tes sens toujours Constantly harsher, Più cruda induri Plus s’endurcissent, Harden your feelings; Sei di cor si spietato Ton cœur est si impitoyable Your heart is so merciless, Si rigido, si frigido Si raide, si froid, So stiff and cold, O stelle, o fato, Ô cieux, ô destin ! (O heavens, O destiny!) Che non procuri aita? Que tu ne peux l’aider ? That you cannot help it?

Ben veggio, anima mia Je le vois bien, ô mon âme, Well I see, O my soul, Non sai che sia dolore, Tu ne sais ce qu’est la douleur ; That you know not what suffering is; Ancor non senti amore. Ne sens-tu point encore d’amour. You do not yet feel love.

Ultima parte Dernière partie Final part

Così dunque vivrai Tu vivras donc ainsi, So thus will you live, Senz’amor, senza duolo? Sans amour, sans souffrance ? Without love, without pain? No, rivolgi il core Non ! tourne ton cœur No, turn your heart Pieghevole, piacevole Plein de pitié et de douceur, Full of mercy and kindness O, buon fervore, Ô belle ferveur ! (O, commendable fervour!) A si gravi martiri, Vers un si grand martyre, Towards such great agony,

E riverente omai Et respectueuse désormais, And henceforth respectful, Pentita e lagrimosa Repentie et en pleurs, Repentant and in tears, Manda dal petto fuore Laisse sortir de ton sein, Emit from your breast, Caldissimi, dolcissimi Brûlants de tendresse, The most fervent, most tender D’amor seni e sospiri. Les soupirs de l’amour. Sighs of love.

Così, anima mia Ainsi, ô mon âme, Thus, O my soul, Saprai che sia dolore Tu sauras ce qu’est la douleur ; You will know not what suffering is; Intenderai amore. Tu comprendras l’amour. You will understand love.

7 Lingua di donna Langue de femme Woman’s tongue Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari

Lingua di donna mentitrice amata Langue de femme, menteuse bien-aimée Woman’s tongue, beloved liar, Allor più fere e punge D’autant plus féroce et méchante All the fiercer and sharper Quando più dolce ti lusinga e t’unge. Qu’elle flatte et caresse plus doucement. When more sweetly it flatters and caresses. Cosi cantando ahi dura sorte avviene Ainsi, par leur chant (hélas, sort cruel !), parfois, Thus, by their song (ah, harsh fate!) Ch’ingannino i nocchier l’empie Sirene. Les sirènes impies trompent les matelots. The cruel Sirens sometimes deceive sailors.

De vaghi fiori d’un leggiadro viso Des fleurs éphémères d’un visage gracieux He who admires the ephemeral blooms Gioisce chi gli mira, S’enchante qui les admire Of a graceful countenance rejoices, Ma poi sovente ancor piange, e sospira; Mais plus souvent encore, il pleure et il soupire. But more often still he weeps and sighs; Cosi la rosa porporina, e vaga Ainsi, frêle et pourprée, la rose Thus, the rose, crimson and frail Coll’odor giova, e colle spine impiaga. Au parfum enchanteur a de dures épines. And enchantingly perfumed, has sharp thorns.

Sia bello un viso, non sarò si stolto, Qu’un visage soit beau, je ne serai si sot If a countenance is fair, I shall not be so foolish Ch’io mi rivolga al lume, Qu’il m’attire à sa lumière As to be attracted to its light E all’arbitrio mio arda le piume; Et qu’il darde ses flèches contre ma liberté ; And burn the wings of my free will; Io sò ch’il ciel, che tanto ne diletta Car je sais que le ciel souvent délicieux For I know that the sky, often delightful, Implacabil ancor tuona, e saetta. Tonne et foudroie aussi. Can thunder and flash with lightning too.

8 Udite amanti Écoutez, amants Listen, lovers Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari

Udite amanti, la mia bella Donna Écoutez, amants, ma belle Dame Listen, lovers: my fair Lady Tutta veste di bruno, acciò’l mio core, Est toute vêtue de noire, si bien que mon cœur, Is clothed all in black, so that my heart, Che qual vago augellin le vola intorno, Qui, tel un oiseau errant, vole autour d’elle, Which like a longing bird flies round her, Non trovi ove posar (ahi, dura sorte), Ne sait où se poser (ah, destin cruel), Finds nowhere to alight (ah, cruel fate!) Fuor ch’in sterpi di duol, bronchi di morte. Sinon sur des buissons épineux ou des branches mortes. But on painful brambles or deadly thorns. Non ha dorato il crine, Elle n’a plus sa chevelure d’or, Gone is the gold of her locks, Ma più ch’inchiostro nero, Elle est plus noire que l’encre Blacker now than the ink Con cui d’un amatore Avec lequel Amour signe With which Cupid signs Scrivendo va l’aspre sentenze Amore. La condamnation fatale d’un amoureux. The lover’s harsh sentence. Vela il candido sen ombrosa spoglia Un ombreux vêtement voile son sein candide : Dark apparel conceals her white breast: ond’un che’l mira fisso Qui le regarde en face Sad and confounded, he who gazes finds trova attonito e mesto Contemple, triste et stupéfait, That the paths which once led to heaven fatti i varchi del ciel strade d’abisso. Les chemins du ciel devenus routes de l’abîme. Are now roads to hell. O mie bell’ombre, e quando mai pietose Ô mes belles ombres, quand donc, miséricordieuses, O fairest shades, when will you take pity, mi condurrete a quella membre, ond’io, Me conduirez-vous en ces lieux And conduct me to those regions, where I, felice peregrin, possa ridire, Où je pourrai dire, heureux pèlerin, Happy pilgrim, still prisoner of my mortal frame, non sciolto ancor del mio caduco velo, Non encore défait de mon éphémère enveloppe, May say that I travelled che per strade d’orror io vidi il sole Que par les routes de l’horreur, j’ai revu le soleil, Along horrid paths and saw the Sun e ch’io godei in fra le tombe il cielo? Et qu’au sein des tombeaux, j’ai pu jouir du Ciel ? And amidst the graves rejoiced in Heaven? Così vezzosa voi sete, anima mia, Vous avez tant de charme, mon âme, In this terrible blackness, In quell’orrido nero Dans cette affreuse noirceur, This funereal gloom, in quel funesto bruno, Dans cette funeste obscurité, You are so charming, O my dear love, che fra larve sì belle Que parmi des ombres si belles That with your permission, O gods, e sì vaghe fantasme Et des fantômes si gracieux I would gladly abide io di bon cor con vostra pace, o Dei, Je voudrais de bon cœur, avec votre pardon, ô dieux, Amidst such fair shades, ispiritar vorrei. Respirer. Such delightful spirits. O piacesse ad amore, Ah s’il eût plu à l’amour Ah, if only Love and the Stars o volesser le stelle, Si les astres eussent voulu Had seen fit, O my idol, che, in sì bel inferno, idolo mio, Que d’un si bel enfer, ô mon idole, To make me the Demon il demone fuss’io. J’eusse été le démon ! Of this alluring hell: O mio bel sole oscuro, Ô mon beau soleil obscur O my fair but unshining Sun, io mi son un’ che tra quell’ombre vostre Je suis tel qu’au sein de vos ombres Willingly, amidst your shades, volontier mi farei ladro amoroso, Je me ferais volontiers amoureux voleur Would I be a loving thief, per rubbare e carpire, Pour dérober et soutirer Taking and stealing quant’è di mio desire. Selon mon désir. According to my desire. Ma mi sgomenterebbe il vostro viso, Mais votre visage m’effraierait But your face would daunt me, ché non si può rubbar in Paradiso. Qui ne se peut dérober au paradis. For one does not steal in Paradise.

9 Io dissi al cor J’ai dit à mon cœur I said to my heart Cav. Marino Cav. Marino Cav. Marino

Io dissi al cor perchè’l tuo chiuso affetto J’ai dit à mon cœur : pourquoi (lâche !) n’oses-tu I said to my heart: why (oh, coward!) dare you not Non osi (ahi vile) alla tua Donna aprire Dévoiler à ta Dame l’amour que tu lui caches ? Reveal to your Lady the love you conceal from her? Ei si dispose all’opra e prese ardire Il s’est disposé à agir, il s’est pris de hardiesse It made ready to act, it grew bold, Apprestando le note al gran concetto A préparé ses notes pour cette grande idée Practising its notes for that great purpose.

Ma sbigottito dal crudelle Mais effrayé par la cruelle But dismayed by the cruel woman, Aspetto qual guerrier cui la spada Je ressemble à ce guerrier dont l’épée I am like the warrior whose sword In sù’l ferir caggia di man S’il veut frapper lui tombe des mains Falls from his hands when he wishes to strike; Ristette à mezzo il dire Mes paroles sont restées en chemin My words came to naught, E la voce torno dal labro al petto Ma voix est revenue de mes lèvres à mon cœur. And my voice returned from my lips to my heart.

Quindi avvien avvien ch’ardo e soffro e tremo e taccio Alors voici, voici, que je brûle et je souffre And so I burn and suffer and tremble and keep silent; Ne modo trovo onde’l mio incendio estingua et je tremble et me tais I find no way to extinguish my flames; Tutto dentro di foco e fuor di ghiaccio Nulle part je ne trouve à éteindre ce feu Within all is fire, without all is ice. Au-dedans tout est feu, au-dehors tout est glace Lasso, e perch’io non narri Alas, and since I cannot tell E non distingua le pene à colei J’abandonne, et pour que je ne puisse dire Nor show my suffering to the woman Per cui mi sfaccio amor che lega il cor Ni faire voir ma douleur à celle Who humiliates me, Love who binds my heart Lega la lingua. Pour qui je perds la face, l’amour qui me lie le cœur Also binds my tongue. Me lie aussi la langue.

10 Non fia più ver Que plus jamais Nevermore Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari

Non fia più ver ch’à prezzo di quell’oro Que plus jamais au prix de cette crinière d’or Nevermore may I sell my heart Falsissimo del crin il cor io venda De bien mauvais aloi je ne vende mon cœur For the delusive gold of such fair locks, O di quegli occhi al foco rio m’accenda Ou n’aille me brûler au feu néfaste de ces yeux ; Nor burn myself at the wicked fire of those eyes, Se ben son tanto gelido che moro Je suis transi à en mourir. Be I frozen to death.

Non fia più ver che per vile tesoro Que plus jamais pour ce trésor grossier Nevermore may I cross the sea of love Il mar d’amor à valicar io prenda Je n’aille franchir la mer d’Amour, For so base a treasure O d’un sen disleal la rupe ascenda Ou gravir le roc d’un cœur déloyal Nor climb the rock of a disloyal heart Per traboccar nel centro del martoro Pour ne gagner que le martyre. To gain such misery.

Non fia più ver che quegli empi splendori Que plus jamais, Clitia, je n’admire Nevermore may I look upon the cruel splendours Clitia miri del volto Aquila affronti Les cruelles splendeurs de ton visage affrontant Of Clitia’s face, [for of] the Eagle[’s] aggressions Son per nottole e gufi ombre ed’orrori. l’obscurité Other birds live in fear and dread. Les chauve-souris et les hiboux s’accommodent aux E s’è mai l’empio sen che formonti ombres et aux ténèbres. And if ever that ignoble heart overcomes Lo sdegno mio sue figure e rigori My disdain, I shall go to the mounts of Scythia, N’andro di Scithia ad’abbracciar sù i monti. Et si jamais le cœur cruel vainc There to embrace its rigours and its icy blasts. Mon dédain, je m’en irai sur les monts de Scythie Étreindre ses fantômes et ses rigueurs.

11 Cielo, sia con tua pace Ô Ciel, accorde ton pardon Heaven, grant your forgiveness Gian Francesco Busenello Gian Francesco Busenello Gian Francesco Busenello

Cielo, sia con tua pace Ô Ciel, accorde ton pardon Heaven, grant your forgiveness Al soave peccato Au doux péché For the sweet sin D’idolatrar colei che m’ha piagato, D’idolâtrer celle qui m’a blessé ; Of idolising she who has hurt me; Torna piu che mai saldo e pertinace, En ce péché, je suis plus que jamais endurci. In this sin, I am inveterate. Minacciami pur stenti e morte e fossa, Pourtant peines et trépas, et tombeau me menacent : Yet hardship, death and the grave threaten me: Io son di carne ed ossa. Mais je suis fait de chair et d’os. But I am of flesh and blood. Non è stimato errore On n’estime pas assez l’erreur One thinks nothing of the error D’anima a te ribelle D’une âme rebelle Of a rebellious soul Mirar il sol e vagheggiar le stelle. À admirer ton soleil, soupirer après tes étoiles. In admiring the sun, longing for the stars; Perché dunque farà peccato amore Pourquoi donc l’amour serait-il un péché Then why should it be a sin for love Che mirando due stelle in un bel viso, Lorsqu’à voir deux étoiles dans un beau visage To see two stars in a far countenance Lo crede un Paradiso? On croit voir le Paradis ? And believe it is Paradise? Lilla, che farò mai? Lilla, que ferai-je donc ? Lilla, oh, what shall I do? Odiarti? Ohimé non sia Te haïr ? Hélas, que mon âme Hate you? Oh, may my soul, Sì ingrata contro te l’anima mia, Ne soit pas si ingrate envers toi, Made finer by your sun’s rays, Che si fa bella del tuo sol a’ rai. Elle qui s’embellit aux rayons de ton soleil. Not show you such ingratitude! Faccian gli uffici lor gli orrendi abissi, Que les affreux abîmes fassent leur office : May the dreadful abysses do their work: Quello ch’io scrissi, io scrissi. Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit. What I have written is written. Ma, s’io ben penso (o cruda), Mais, si je comprends bien (ô cruelle), But if I understand aright (oh, cruel one), Per te che m’avveleni, Pour toi qui m’empoisonnes, You who are poisoning me make me Sprezzo del ciel i fulmini e i baleni, Je méprise du ciel la foudre et les éclairs, Think nothing of heaven’s thunder and lightning E consento ch’Averno in se mi chiuda. Et je consens qu’Averne prisonnier me retienne. And allow Hades to keep me captive. Son fastidito homai d’insidie e d’arti: À présent je suis las des ruses et artifices. Now I am weary of snares and wiles. No, ch’io non voglio amarti. Non, vraiment je ne veux plus t’aimer, No, indeed, I will love you no more. Da la mia mente cada Sors de mon esprit, Begone from my mind, L’idolo tuo che diede Toi, mon idole, qui restas You, my idol, who never Sempr’al mio lagrimar scarsa mercede; Toujours sans merci à mes larmes. Showed mercy for my tears! Non voglio contr’il ciel brandir la spada, Je ne veux contre le ciel brandir mon épée, I will not brandish the sword against heaven, Caduco alfin è ’l tuo corporeo velo, Le voile de ton corps est éphémère, enfin, But in the end your physical guise is transient Fratel del sempre è’l cielo. Et le ciel m’est pour toujours fraternel. And heaven has always been my companion. Rompo catene e nodi, Je romps les chaînes et les nœuds I break the chains and the knots Delle fiamme malnate De ces flammes mauvaises, Of this base passion, Spargo al vento le ceneri gelate, Je disperse au vent ces cendres glacées I cast to the wind these frozen ashes, Né vuo’ che tua beltà mai più m’annodi. Et ne veux plus jamais que tes charmes m’enchaînent. And never may your beauty ensnare me again! Restati, resta pur, infido sesso, Reste là, reste là, sexe infidèle, Stay, but stay, treacherous sex, Io son re di me stesso. Je suis le Seigneur de moi-même. I am my own master. Oimè, Giove? Oimè, Lilla? Hélas, ô dieux ? hélas, Lilla ? Alas, O Jove, alas, O Lilla, Mancar l’alma io mi sento. Je sens que le cœur me manque, I feel my courage failing me! Ahi, quanto è stolto il braveggiar al vento, Ah qu’il est sot de braver le vent Ah, what folly to brave the wind! Al martellar il cor sembra una squilla, On dirait qu’une cloche me martèle le cœur My heart seems to be resounding like a bell, Disperati e confusi sensi miei: Tous mes sens sont confus et sans espoir : All my senses are in despair and confusion: Vorrei e non vorrei. Je voudrais, et ne voudrais pas. I will, yet I will not! 12 Degg’io amarvi Dois-je vous aimer Must I love you Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari

Degg’io amarvi occhi belli, no o sì? Dois-je vous aimer, ô beaux yeux, oui ou non ? Must I love you, lovely eyes, yes or no? No, ch’al lume farfalla incenerì. Non, car le papillon a été brûlé par la lumière. No, because the moth has been burnt at the flame. Sarei folle a bramarvi, o luci belle, Je serais fou, si je vous désirais, ô beaux yeux, I would be foolish to desire you, oh lovely eyes, Ché non lice a un mortal goder le stelle. Car il n’est pas donné à un mortel de jouir des étoiles. For it is not given to a mortal to enjoy the stars.

Degg’io amarvi occhi cari, sì o no? Dois-je vous aimer, aimables yeux, non ou oui ? Must I love you, dear eyes, yes or no? Sì, se dolce pallore in voi vedrò; Oui, si je vois en vous une douce pâleur ; Yes, if I see in you a sweet paleness: Abbagliar, e avvampar assai men suole Le soleil éblouit et réchauffe beaucoup moins The sun dazzles and burns much less Quando si mostra palidetto il sole. Lorsque son visage apparaît voilé. When it appears a little pale.

13 Quando prendon riposo Lorsque se reposent When wretched mortals Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari

Quando prendon riposo Lorsque se reposent When poor mortals i miseri mortali Les malheureux mortels, Take their rest, Allhor mesto e doglioso Alors triste et souffrant Then sad and distressed vo piangendo i miei mali Je vais pleurant mes malheurs. I lament my misfortunes. Quand’altri si tranquilla Lorsque d’autres sommeillent While others slumber frà le morbide piume Dans les douces plumes In soft feather beds, Vo cercando Lilla Je vais cherchant Lilla I go and seek Lilla e de begli occhi il lume. Et l’éclat de ses beaux yeux And the brightness of her lovely eyes. Ahi che bramo o desio se non si suole Ah ! que pourrais-je demander Ah, what can I long for or desire Fra le tenebre mai veder il sole. ou désirer si l’on ne peut plus If I may nevermore see the Sun in the darkness? Parmi les ténèbres jamais voir le soleil ? Lasso; che far degg’io? Alas, what should I do? Più tosto che partire, J’abandonne ; que devrais-je faire ? If I cannot see my love, S’io non veggo il ben mio, Plutôt que de partir, I will die right here Vuò qui proprio morire; Si je ne vois mon trésor, Rather than go away; Ma la cruda per questo Je veux mourir ici même ; But, for all that, the cruel one Non si muove, ò risente, Mais pour autant la cruelle Stirs not, feels nothing, Ed’io qui’ntanto resto Ne bouge pas, ne ressent rien, And meanwhile here I remain, Solitario, e dolente; Et moi je reste ici, Alone and mournful; Ahi che giunto nel cielo i Dei sospiro, Solitaire et dolent ; Ah, when in heaven I long for the gods, E ne i regni del Sol il Sol non miro. Ah ! parvenu au ciel je soupire après les dieux And in the Sun’s kingdom I see no Sun! Et au royaume du soleil je ne vois point le soleil. Partite ombre rubelle, Begone, ruddy shadows! Notte per me non fai; Éloignez-vous, ombres rougeâtres, Night, you are nothing to me, Non curo le tue stelle, Nuit tu n’es rien pour moi, I care not for your stars, Vuò del mio Sole i rai; Peu m’importent tes étoiles, I want the radiance of my Sun! Ma sorda, quanto nera Je veux les rayons de mon soleil ; But you are as deaf as you are dark, Viè più d’ombre t’ammanti, Mais sourde autant que noire, There is more shadow here than there are lovers, E vai schernendo altera Il y a ici plus d’ombre que d’amants And haughtily you scoff I miei dogliosi pianti; Et tu vas bafouant, altière, At my sorrowful tears; Ahi notte avversa alle dolcezze mie, Mes larmes douloureuses ; Alas, night unfavourable to my joys, Chieggo de’ torti tuoi giustitia al die. Hélas, nuit peu propice à ma tendresse, I ask the day to bring justice for your wrongs! Je demande au jour justice de tes torts !

14 O monumenti Ouvrez-vous, ô tombeaux ! Open, O tombs! Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari Benedetto Ferrari

O monumenti, apritevi Ouvrez-vous, ô tombeaux ! Open, O tombs! non vedete ch’io moro, Ne voyez-vous pas que je meurs, See you not that, in lasciando colei En quittant celle In leaving the lady che tanto adoro? Que j’adore tant ? I love so, I am dying? O monumenti, apritevi. Ouvrez-vous, ô tombeaux ! Open, O tombs! Non fia chi mi consoli Rien ne saurait me consoler Nothing can console me A lasciar si bel viso De quitter si beau visage ; For leaving so fair a face; Ardirei di dolermi Je me consumerais de plaintes I would be consumed with grief In Paradiso. Au Paradis même. In Paradise itself.

Traduction : Anne-Béatrice Muller Translation: Mary Pardoe

La Musica sas Philippe Maillard 21, rue Bergère 75009 Paris www.lamusica.fr

Remerciements à Rita de Letteris, Nicole Fallien, Barbara Nestola & Marc Ducornet, pour leur aide et leur soutien.

Traduction anglaise Mary Pardoe

Iconographie Joueur de Luth, Jacopo Confortini Lille, musée des Beaux-Arts ©Photo rmn, Q. d’Henripret

Amour volant portant une flûte de Pan, copie d’après la Loggia de Psyché, Raffaello Louvre, d.a.g. ©Photo rmn, M. Bellot

Fac-Simile de l’Edition originale imprimée de Bartholomeo Magni à Venise (Studio per Edizioni Scelte (s.p.e.s.), Florence, d.r.)

Photos Philippe Matsas

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