Le Procès De Louis Xvi Du Même Auteur
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LE PROCÈS DE LOUIS XVI DU MÊME AUTEUR LIBRAIRIE ACADÉMIQUE PERRIN Le Duc d'Enghien (1954), ouvrage couronné par l'Acadé- mie des Sciences morales et politiques Napoléon et le pape (1958), grand prix Gobert de l'Académie française Un policier dans l'ombre de Napoléon, Savary, duc de Rovigo (1962) Les Girondins (1969), prix du Nouveau Cercle Réédition Librairie Tallandier (1989) Charlotte Corday (1972) Réédition Librairie Tallandier (1989) Jérôme Bonaparte ou l'Envers de l'épopée (1978), prix d'Histoire de l'Académie française La Grande Mademoiselle (1985) LIBRAIRIE LAROUSSE Dictionnaire de la Révolution et de l'Empire (1965) Dans l'Histoire de la France illustrée : deux mille ans d'images ( 1984-1987) : Les Guerres de Religion Vers la monarchie absolue La Révolution Napoléon consul et empereur Restauration et révolutions ÉDITIONS DEL DUCA La Conspiration du général Malet (1963) © Librairie Académique Perrin, 1992. ISBN 2.262.00856-6 Le grand vent des réformes avait soufflé en tourbillon sur le royaume. L'Ancien Régime s'effondrait, tout un monde basculait En quelques mois, l'abolition des privilèges, la Déclaration des droits de l'homme, la Constitution nouvelle avaient mis à terre le vieil édifice que les Capétiens avaient construit pierre par pierre Le dogme de l'absolutisme royal, condamné par les Lumières, était à jamais rejeté. Plein de vertus privées et de bons sentiments, le prince qui avait régné pendant quinze ans sur vingt-quatre millions de sujets se montrait incapable de résister aux forces nouvelles comme de s'adapter à la situation. Des imprudences, des erreurs, des fautes pouvaient être reprochées au roi Mais du côté révolutionnaire, la violence était toujours prête à se déclencher: les meneurs n'allaient pas se contenter de lui enlever son sceptre et sa couronne Ils voulaient faire table rase du passé, effacer pour toujours le souvenir de la vieille monarchie héréditaire. Au milieu du bouleversement politi- que et social, il fallait d'ailleurs trouver un bouc émissaire soi- disant responsable des difficultés qui assaillaient les Français. Pris dans un cyclone, dépassé par les événements, Louis XVI allait être happé par le destin. Son exécution devait constituer l'acte fondateur de l'ère républicaine 1 LA COMMUNE DICTE SA LOI Aux environs de 8 heures du matin, ce vendredi 10 août 1792, Louis XVI cédant malgré les objections de Marie- Antoinette à la pression du procureur-syndic Roederer, décida de fuir devant l'émeute et d'aller se réfugier avec sa famille au sein de l'Assemblée nationale. A part le petit dauphin, âgé de sept ans, et sa sœur aînée, personne n'avait dormi cette nuit-là aux Tuileries. A minuit, on avait entendu sonner le tocsin, tintement lugubre réper- cuté de clocher en clocher à travers Paris et qui donnait le signal de l'insurrection. Les tambours battaient déjà dans les faubourgs: sans-culottes et fédérés s'apprêtaient à marcher contre le château. Jamais manifestation populaire n'avait été plus ouverte- ment préparée. De jour en jour, la Cour attendait l 'événe- ment. Le roi aurait peut-être pu résister aux assauts, ayant des forces supérieures en nombre. Mais à côté d 'un millier de Suisses arrivés de leurs casernes de Rueil ou de Courbevoie, et de quelque deux ou trois cents gentilshommes dévoués à sa cause, il ne pouvait compter sur la fidélité des gendarmes et des gardes nationaux de service aux Tuileries. De nom- breux bataillons étaient en effet acquis aux idées nouvelles. Le commandant en chef Mandat de Grancey, loyal partisan de la monarchie constitutionnelle, aurait sans doute pu rallier les hésitants, mais il avait été convoqué dans la nuit à l' Hôtel de Ville, d'où la municipalité en place venait d être chassée par une Commune insurrectionnelle : destitué, fait prisonnier il sera massacré place de Grève. La défense du château était ainsi désorganisée. Le roi, qui s'était assoupi quelques instants sur un canapé, était descendu vers 6 heures sur la demande de la reine pour haranguer ses troupes. Mais, inquiet, mal réveillé, il n'avait pas su trouver les mots susceptibles de galvaniser les cœurs. Quelques postes l'avaient d'ailleurs accueilli par des huées, et même des injures. Ce descendant d'Henri IV ignorait le prestige du panache blanc. Il n'avait d'ailleurs jamais songé à brandir l 'épée pour entraîner ses partisans : courageux pour lui-même, il craignait pour sa famille et surtout il n'admettait pas la légitimité de la violence pour rétablir l'ordre. Depuis bien des mois, Louis XVI voyait grandir les périls sans réussir à les conjurer. Au début de la Révolution, il avait semblé accepter les réformes. En fait, après quelques tenta- tives de réaction, il avait dû assister, impuissant, aux progrès de la démocratie. Ses hésitations, sa faiblesse de caractère avaient desservi sa cause. Mais, après huit siècles de monar- chie, il ne se sentait pas en droit de rompre avec la tradition. Il était profondément pieux et l'adoption de la Constitution civile du clergé, à laquelle il avait dû donner sa sanction, pesait lourdement sur sa conscience. Il souffrait en outre de se sentir aux Tuileries prisonnier du peuple parisien. La malheureuse fuite à Varennes marqua la grande rup- ture entre le roi et la nation. Il comptait, dira-t-il, gagner Montmédy, mais ses adversaires prétendirent qu'il avait voulu rejoindre, à la frontière, les émigrés vantards et belliqueux, haïs des patriotes, et les armées étrangères. Les partisans de la république virent leur nombre grossir, mais la manifestation du Champ-de-Mars n'aboutit qu'à une fusil- lade meurtrière. Louis XVI avait eu la maladresse de laisser aux Tuileries, avant sa fuite, un document dans lequel il contestait l'autorité de l'Assemblée. Par bonheur pour la Couronne, les législa- teurs craignaient les excès des républicains. La Constitution qu'ils préparaient depuis de longs mois supposait l'existence d'un roi, malgré les vœux des exaltés qui réclamaient la déchéance et même la mise en accusation de Louis. En septembre 1791, le nouveau «roi des Français» (il n'était plus question du «roi de France») se rendit à l'Assemblée pour prêter serment à une Constitution légèrement remaniée. Serment prononcé du bout des lèvres. En fait, Louis XVI souhaitait surtout reconquérir son pouvoir d'antan. La décla- ration de guerre à l'Autriche, voulue à la fois par l'aile gauche de la nouvelle Assemblée et par la Cour (mais pour des motifs diamétralement opposés), puis les premières reculades aux frontières exacerbèrent les passions. La duplicité des souve- rains parut certaine. Les «patriotes» croyaient de bonne foi à l'existence d'un «comité autrichien » siégeant aux Tuileries. Le renvoi des «ministres girondins » fut très mal accueilli. Le roi, ayant usé de son droit de veto pour refuser certains décrets de l'Assemblée, ne réussit qu'à accroître les colères. L'arrivée à Paris des fédérés marseillais et brestois, et surtout la publication de l'insolent manifeste de Brunswick — trop mollement désavoué par Louis XVI — précipitèrent les événements. Les sections de Paris réclamèrent à grands cris la déchéance du roi félon, mais l'Assemblée hésitait toujours. Entre-temps, le 20 juin 1792, des bandes de manifestants surexcités avaient envahi les Tuileries, exigeant la levée du veto et le rappel des ministres révoqués. Pour une fois, malgré les menaces et les avanies, Louis XVI avait tenu bon. Ce jour- là, on ne déplora aucune victime, mais cette journée était apparue comme une répétition générale, avant l' assaut final. Le roi s'apprête maintenant à quitter les Tuileries. Il imagine que son départ apaisera les passions. Des messagers envoyés à la salle du Manège, où siège l 'Assemblée, pour savoir si les représentants du peuple accepteraient d'accueil- lir la famille royale, ont reçu une réponse affirmative. L'héritier des Bourbons jette un dernier coup d'œil sur les appartements où il vient de passer tant d 'heures difficiles, il traverse le grand vestibule entre deux rangs de Suisses, arrive au petit perron donnant sur le jardin des Tuileries et franchit la grille. Sa famille le suit, avec quelques fidèles. Marie- Antoinette refoule ses larmes. Elle veut poutant se persuader qu'elle reviendra, une fois la tourmente passée. Le roi le croit aussi, ou feint de le croire. Les assistants sont loin de partager cet optimisme. Un des officiers suisses, le major de Bachmann, se penche vers un de ses compatriotes et chuchote: type="BWD" roi s'en va à l'Assemblée, il est per du. type="BWD" type="BWD" type="BWD" type="BWD" type="BWD" type="BWD" ce temps, du côté du jardin des Tuileries, le petit cortège suit les allées. Roederer ouvre la marche. Derrière lui, le roi avance en compagnie de Bigot de Sainte-Croix, le ministre des Affaires étrangères. Il a enlevé son chapeau, l'a remplacé par celui d'un des soldats. La reine le suit, au bras du ministre de la Marine du Bouchage. Elle a pris par la main le dauphin, dont l'autre main est tenue par sa gouvernante, Mme de Tourzel. La jeune Madame Royale (elle n'a que treize ans) et sa tante Madame Elisabeth viennent ensuite avec la princesse de Lamballe. Celle-ci murmure: — Nous ne retournerons jamais au château. Le cortège est encadré — et protégé — par des gardes nationaux choisis parmi les plus sûrs (ceux de la section des Filles-de-Saint-Thomas) et par des Suisses commandés par le colonel de Maillardoz et le major de Bachmann. Au total, environ cinq cents hommes. Le dauphin, enchanté de cette promenade dont il ne comprend évidemment pas la cause, gambade dans les feuilles mortes mises en tas par un jardinier et les fait voler sous ses pieds.