NOS HISTOIRES...... EN MARGE DE L'HISTOIRE
MAMETZ , petit village au cœur de l’ARTOIS, à l’extrémité des collines du boulonnais, presque équidistant d’Arras, Lille, Calais, Boulogne...Comment écrire l’histoire d’un village sans Histoire, comment essayer de faire de lui autre chose qu’un point sur la carte ou un nom sur un annuaire ?...C’est pourtant ce que je vais entreprendre en y mettant tout l’amour que je porte à ce coin de terre et tout ce qu’il a été possible de glaner au long d’une existence passée à son service et à celui de ses habitants. La toponymie, c’est-à-dire l’étude des noms de lieux, est une science qui se doit d’être aussi exacte que possible. Pourtant il est de ces noms qu’il suffit de prononcer pour faire naître une image et l’historique ne fait pas toujours bon ménage avec la linguistique. Si l’évocation d’un village ou d’un lieu-dit rappelle souvent une particularité géographique ou le processus de formation de l’agglomération, ailleurs, le mot claque comme un étendard sur un champ de bataille, il dessine le profil d’un monument ou d’un personnage, il évoque une famille qui lui doit, ou à qui il doit, son appellation, mais bien souvent, cela ne pose qu’un énorme point d’interrogation. Notre Village de MAMETZ, avec ses deux satellites que sont MARTHES et CRECQUES, ne peut, à première vue, s’enorgueillir d’aucune particularité de cette sorte. Aussi, essayer de dresser l’origine des noms et l’historique de notre coin de terre n’est pas une mince affaire car, si les sources dont nous disposons font la part belle à nos deux prestigieuses voisines que sont AIRE et THEROUANNE, nous sommes, quant à nous, les oubliés de l’Histoire. Aussi, notre position en <
Aucun écrit et aucune tradition orale ne permettent d’accréditer cette thèse qui s’avère purement imaginaire...Ah !...si cela était prouvé !...voilà qui donnerait libre cours à bien des suppositions et permettrait à nos imaginations de s’élancer au galop à la suite de quelque légende exploitable et valorisante(quoique...à la rigueur...ce pourrait être un filon pour un romancier en mal de copie...) Mais, soyons sérieux, la réalité, telle que la conçoivent les historiens est plus terre-à- terre : Selon ces doctes personnes, les formes médiévales du mot MAMETZ sont Maumès ou Maumèz, c’est-à-dire : mal mès, mauvais mèz (mès ou mèz : maison avec ses dépendances) et ne peuvent remonter qu’au XIème siècle au plus tôt, au temps des grands défrichements qui virent se créer notre paysage rural. La source la plus sûre attribue la fondation du village à un certain JEAN DE MAMEZ (qui n’a rien à voir avec un autre Sire du même nom qui fonda notre homonyme picard). Il est curieux de constater qu’on trouve aussi à Mametz, dès le XIIème siècle, un Seigneur de MAUBUS (c’est-à-dire mauvais bois) devenu aujourd’hui MONBUS.
LES PREMIERS PAS
Nos villages sont nés et les voilà dûment baptisés. Essayons maintenant de les situer géographiquement, aussi précisément que possible. Une question préalable : A quelle peuplade appartenons-nous, à l’origine, sur ces terres aux limites incertaines ?...Pouvons-nous nous réclamer des ces Morins qui étaient pour Virgile <
APRES L’EPOQUE MEDIEVALE JUSQU'A LA REVOLUTION
Après une courte période de paix relative, le règne de LOUIS XIV, qui veut reconquérir les anciens fiefs, ramène une guerre destructrice(3). Le siège d’Aire, en juillet 1676, plonge la ville dans la terreur. Les dégâts sont énormes du fait de l’expérimentation par LOUVOIS, de nouveaux boulets explosifs. Faut-il situer à ce moment la destruction du Château de MAMETZ et de celui de MAUBUS, comme on pourrait penser que celui de CRECQUES n’a pas survécu à la bataille de GUINEGATTE ou au siège de THEROUANNE ?...Hélas...aucun document connu ne nous permet de l’affirmer.
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(3) Monsieur et Madame MAILLARD DELBENDE : « AIRE SUR LA LYS – nouvelles chroniques locales – Petite histoire d'Aire racontée à ses visiteurs »
Sur l’aspect de nos villages vers l’an 1600, par contre, nous pouvons être d’une précision remarquable grâce aux documents exceptionnels que sont les gravures des Albums du Duc Charles de CROY. La famille de CROY possédait, à cette époque, quasi tous les fiefs de notre région ainsi que ceux du Hainaut et du comté de Namur. Le Duc a fait exécuter des gouaches et des aquarelles extrêmement précises et détaillées de chacune de ses possessions : villes, villages, abbayes, couvents et même rivières. En sommeil pendant plusieurs siècles, ces précieux documents ont été édités récemment grâce au Conseil Régional et au Crédit Communal de Belgique, avec des commentaires du Professeur Roger BERGER (originaire d’Aire) et grâce à qui nous avons pu essayer de donner un visage d’époque aux trois fleurons de notre couronne.(4)
Si vous le voulez bien, nous allons les examiner successivement :
MAMETZ : c’est déjà à l’aide de la planche 37 du volume XXII (Comté d’Artois VI-Mametz) que j’avais essayé de vous décrire, il y a quelques années(5), l’imposant château médiéval campé sur la rive droite de la Lys, à l’emplacement de la bâtisse que nous connaissons et qui date du 19 ème siècle. Sur ce document, l’église, juchée sur une butte, est construite à sa place actuelle. Elle a déjà un clocher-porche et son beau chœur du XVIème ; (nous savons que, depuis, la nef a été détruite à deux reprises par des incendies, la dernière réfection est tout juste centenaire). L’habitat, qui semble assez dense, est fortement groupé, depuis les murailles du Château jusqu’à l’église et se prolonge vers le Moulin, sur la Lys. Les hauteurs sont abondamment boisées et forment un véritable écrin de verdure à notre village. ______
(4) Monsieur le Professeur Roger BERGER : « LES ALBUMS DE CHARLES DE CROY » Conseil Régional du Nord-pas-de-Calais et Crédit Communal de Belgique – Bruxelles)
(5) Par l'auteur de ces lignes :(AH! Mon beau Château).
MARTHES : (planche 38). Le village a été dessiné à partir du chemin qui vient de Blessy. L’habitat est plus cossu, plus dispersé aussi, ce qui correspond à la variété des terrains exposés : labours, prairies et bouquets d’arbustes. L’église se situe à l’extrémité droite. Elle possède déjà une tour coiffée d’ardoises, une nef avec trois fenêtres en briques, couverte de tuiles. Le chevet est plat, percé d’une fenêtre et le chœur est très petit et très bas. Une maison plus importante que les autres est mise en relief entre l’église et l’actuel Rietz. Egalement couverte en tuiles, elle est entourée de ses dépendances. C’est la maison du Bailli du Seigneur de Mametz, comme cela est inscrit à la base du dessin : <
CRECQUES : (planche 40). En cartouche : <
TABLEAU MONTRANT LA PROGRESSION DE POPULATION Epoque Mametz Crecques Marthes TOTAL
Entre1296 29 feux 25 feux 33 feux 88 feux et 1302 (incomplet)
1469 42 26 34 102
257 698 163 109 529 habitants
1790 416 282 220 918
1820 569 384 291 1244
Avant 1822, nos trois villages sont bien distincts. Sur le plan religieux, Mametz est Paroisse, Marthes est succursale de Blessy et Crecques succursale de Bomy. Au civil, chaque village est une commune indépendante et le Dictionnaire Historique du Pas-de-Calais nous livre quelques caractéristiques pour chacune d’elles : MAMETZ : Comme Blessy, Mametz est renommé pour la culture du tabac. Au 18ème siècle, la récolte de cette plante était déjà assez importante pour donner lieu à des difficultés entre les Abbayes de Saint-Bertin (Saint Omer), de Saint- Jean-au-Mont (Thérouanne) et les habitants de Mametz. C’est Abbayes demandaient à exercer le droit de dîme sur le tabac, ce que contestaient les mametziens. Par arrêt du Conseil d’Artois en date du 18 août 1773, les habitants ème furent condamnés à payer la 15 botte aux décimateurs. Il existait, de temps immémorial, dans l’église, une Confrérie placée sous le patronage de Notre-Dame de BRUCHINE et dont le but était d’être préservé de la peste et d’autres maladies contagieuses très communes dans le pays. Cette Confrérie devint, au 17ème siècle assez nombreuse pour attirer l’attention bienveillante de Rome et, par une Bulle du 20 septembre 1702, le Pape CLEMENT VIII lui accorda des indulgences. A l’époque de la Terreur, la statue vénérée à Mametz offusqua les gouvernants de l’époque qui envoyèrent des soldats avec l’ordre de l’arracher de l’autel de l’apporter à Aire. Mais, selon la tradition orale, le fardeau se fit de plus en plus lourd pour les soldats qui, harassés de fatigue, jetèrent leur précieux fardeau dans un fossé après l’avoir mutilée. Des habitants du village l’ayant récupérée la cachèrent jusqu’à ce que les églises fussent rendues au culte. Une question se pose : quelle est l’origine de ce mot : BRUCHINE ? Nous n’avons aucune certitude à ce sujet. Les historiens sont portés à croire que ce mot est tiré de l’état marécageux et inculte, couvert de buissons (en patois local : bruchons), dans lequel se trouvait anciennement le pays où la Vierge était honorée. L’auteur de ces lignes a recueilli une autre version de la bouche d’un <
REVOLUTION...EMPIRE...RESTAURATION...RE-EMPIRE
La révolution de 1789 ne semble guère avoir perturbé nos communes rurales. Les prêtres qui n’ont pas prêté serment sont devenus réfractaires et exercent leur ministère << sous le manteau >>, couverts par une population qui leur est attaché et que les soubresauts politiques n’émeuvent que fort peu. La tradition nous apprend que la cave de la ferme BAURAIN (Vanbremeersh actuellement) abritait le prêtre qui venait y conférer baptêmes et autres sacrements). Depuis longtemps, il n’y a plus, ici, de Seigneurs, et la Famille de MERODE, dernière propriétaire des fiefs, réside en Flandre et a émigré en Autriche dès les premiers troubles. Elle récupérera ses biens à la Restauration, mais la Noblesse ne laissera de traces que sur les matrices cadastrales, jusqu’à la dispersion complète des propriétés qui seront vendues peu à peu. (Il est assez amusant de suivre les mutations au cadastre : les Notaires semblent avoir été bénéficiaires de ces ventes, en leur nom propre ou par personne interposée). Une grosse polémique dont les échos sont parvenus jusqu’à nous, s’élève à propos de la nationalisation de l’église de CRECQUES qui, à la fin de la tourmente révolutionnaire sera vendue à un certain François Joseph CARLIER qui la revendra à Guillaume SALVA, marchand de tabacs le 23 brumaire de l’an VIII. Ce dernier y entrepose sa marchandise au grand dam des habitants du village qui n’entendent pas laisser ainsi profaner << leur >> église. Aussi, le 12 prairial de l’an VIII, le citoyen François Joseph BOURDREL verse au citoyen SALVA la somme de CENT FRANCS, reçue des habitants de la commune pour << reste et parfait paiement >> du prix de vente qui leur a été fait pour la dite église qu’il est, dès lors possible de remettre en état et de rendre au culte. Le Premier Empire ne nous a laissé aucun document dans les archives communales, sauf un plan cadastral de 1811, dit << Plan Napoléon >> que la Mairie de Mametz conserve religieusement malgré son état de vétusté. Mais nos villages ont dû, comme leurs voisins, (je me réfère ici au registre de délibérations du Conseil Municipal de REBECQUES qui, à l’époque, est une véritable litanie de protestations et de doléances à l’égard des pouvoirs publics), payer largement leur écot en argent, en chevaux, en fourrages et en hommes pour soutenir les guerres napoléoniennes. Une Chapelle de Marthes (la Chapelle Lemaître) a d’ailleurs été érigée vers 1815 en action de grâces pour <
1822..NAISSANCE DE LA COMMUNE DE MAMETZ
Et nous voici, sous la Restauration, devenus sujets de LOUIS XVIII. A cette époque s’inscrit une page déterminante de notre histoire locale. En effet, par Ordonnance Royale du 20 mars 1822, voilà nos trois communes réunis, à leur demande, en une Commune unique qui prend le nom de COMMUNE DE MAMETZ (avec trois sections qui restent, Mametz, Marthes et Crecques). Quelles sont les raisons qui ont poussé à la création de cette Communauté de Communes près de deux cents ans avant que cela ne devienne à la mode ?...On ne le sait pas avec certitude. Les problèmes financiers semblent exclus puisque chaque village apporte en dot des biens communaux non négligeables (encore que Crecques prétendait et prétend encore à certains jours, être le meilleur parti...). Il s’agit peut-être du manque d’enthousiasme de quelques-uns à vouloir endosser les charges communales qui, à l’époque, engendrent plus de tracas que d’avantages. On peut penser aussi que les édiles qui appartiennent, à l’évidence, à quelques famille prépondérantes, sont liés par le sang ou par les mariages dans les trois communes et que tout les moyens sont bons pour rapprocher les affinités et aussi les héritages...Quoi qu’il en soit, voilà nos communes mariées, pour le meilleur et pour le pire...Mariage d’amour ou mariage de raison, ce sera, de toute façon, un mariage à trois, ce qui veut dire qu’il faudra composer avec les sensibilités bien spécifiques des uns et des autres et essayer de tirer le meilleur parti d’une situation qui se révélera bien vite plutôt inconfortable et semée d’embûches. Mais, et il faut le dire bien haut, c’est tout à l’honneur de nos ancêtres d’avoir réussi à faire de ce mariage hors normes, une union solide et durable qui, malgré quelques tentatives de divorce de la part de Crecques et la persistance d’un esprit de clocher chez certains (qui, Dieu merci, va s’amenuisant) a résisté, a su se consolider et faire, aujourd’hui, notre fierté à tous. La tâche n’était pas facile car les textes de l’Ordonnance, toute Royale qu’elle fût, étaient remarquables d’imprécision, à part sur l’avantage accordé à chaque section, de conserver l’usage de ses biens propres. Eh bien, tout cela n’a pas si mal marché. Tacitement, la population, jusqu’à ces dernières années, a respecté une coutume qui voulait que le Conseil Municipal soit composé de membres régulièrement répartis entre les trois sections et, s’il était généralement admis que le Maire fut un habitant de Mametz, il y eut quelques entorses qui ne déclenchèrent pas de révolution. Les avoirs de la communauté ont été gérés et défendus avec impartialité par les représentants respectifs. Et tous les élus ont, pendant près de cent ans, fait bloc derrière les conseillers de Crecques pendant l’interminable conflit qui a opposé Crecques à Rebecques pour la possession de biens indivis aux Etiais. Conflit qui s’est terminé par un jugement à la Salomon, qui n’a semble-t-il pas suscité l’enthousiasme, mais qui a mis fin au début de ce siècle, aux querelles inter- villages qui ne rendaient service à personne. Du 19ème siècle, on peut retenir qu’il a vu grandir et prospérer notre Commune. L’habitat s’est étendu progressivement en remontant la vallée sur la rive droite de la Lys pour se grouper le long du chemin de grande communication (devenu le CD. 157) qui reliait désormais Aire à Thérouanne, évitant le détour par Glomenghem. Les routes, les ponts se sont créés ou aménagés, (notamment le pont de Crecques et celui de Mametz, sur la Lys, celui-ci ayant fait l’objet d’une longue polémique entre les propriétaires du château, celui du moulin et les gens de Mametz qui menaient leurs bêtes à l’abreuvoir...). Un peu plus tard, le Chemin de Fer d’Intérêt Local d’Aire à Berck a permis au << tortillard >> qui traversait la plaine, soufflant et crachotant, de déposer les voyageurs intrépides à la Gare de Mametz ou à la Halte de Crecques. Ainsi, le village a pris, peu à peu, le visage que nous lui connaissons, mais il faudra attendre encore de longues années pour que les constructions commencent à remplir l’espace vide entre les trois agglomérations. Si Marthes a gardé, même encore aujourd’hui, un caractère nettement agricole, si Crecques a été longtemps le siège de grosses fermes, la situation de Mametz était différente, en raison probablement de sa superficie moins riche en espaces cultivables (les terres des cultivateurs mametziens se trouvaient en majeur partie sur Aire, entre la limite des deux Communes, (les chemins du Bosquet et de la Fosse), et le haut du << Gris-Mont >>, là ou la voie ferrée traversait la départementale. Les possibilités de travail salarié offertes par les Mines, l’Usine d’Isbergues, la Céramique d’Aire etc...Attirèrent bien vite la main d’œuvre masculine en améliorant le niveau de vie. Les filles, elles, partirent << servir >>en maison bourgeoise, souvent dans l’agglomération lilloise où la << noblesse du fil à coudre >> offrait de nombreux débouchés. Et pourquoi ne pas rappeler qu’une jeune fille de MAMETZ était, en 1848, au service de Monseigneur AFFRE , l’Archevêque de Paris qui fut tué sur les barricades...Elle s’appelait Alexandrine GOZET...Que, plus récemment, un autre enfant de la Commune, un créquois, Pierre GOZET, fut lui aussi, pendant de longues années au service du Cardinal FELTIN, Archevêque de Paris, après avoir été le valet de chambre de Monseigneur DUTOIT , Evêque d’Arras... Mais revenons à notre village où la vie continue... La << petite culture >>, peu viable, survécut jusqu’ après la dernière guerre, l’épouse ayant la charge du bétail, de quelques travaux dans les champs, voire de la conduite du cheval. On peut d’ailleurs noter au passage le rôle joué dans cet état de choses par la betterave sucrière dite << betterave riche >> dont la culture, principalement entre les deux guerres, fut une source de revenus appréciables, même si les façons culturales de l’époque obligeaient toute la main d’œuvre familiale à participer aux travaux des champs. Une autre culture, bien spécifique à MAMETZ, celle du tabac s’est maintenue jusqu’aux années 50, perpétuant la tradition médiévale et occupant les gens << à domicile >> pendant que d’autres, chez eux également, fabriquaient des brosses pour les marchands du chef-lieu. Donc, depuis 1822, la Mairie se trouve à MAMETZ. Le secrétariat de la mairie est assuré, par l’instituteur (jusqu’en 1954). Dans un petit local qui jouxte l’école des garçons, construite vers 1875, en effet, une école s’est rapidement ouverte à Mametz et à Crecques, dans des locaux de fortune puisque le 1er Mai 1841 le Conseil Municipal nomme M.PHILLIPE, instituteur en remplacement de M.DELVART, révoqué de ses fonctions par le Comité Supérieur de l’Instruction de Saint Omer. M.PHILLIPE est élève de l’Ecole Normale de Douai et porteur d’un Brevet Supérieur. Il y a 30 élèves à Mametz, 23 à Marthes et 25 à Crecques et les filles sont soigneusement séparées des garçons...Les parents paient une rétribution mensuelle de 5 centimes pour l’enfant qui apprend ses lettres, 75 centimes pour ceux qui commencent à lire et 1 franc pour les élèves plus avancés. Tout ceci amènera la construction de deux écoles à Mametz (une de garçons et une de filles) et d’une école à Crecques. Par contre, les enfants de Marthes parcourront matin, midi et soir, le sentier << derrière Marthes >> pour venir à l’école et au catéchisme à Mametz. Ceci leur faisait une longue journée émaillée, en hiver de quelques glissades sur la << grioloire >> d’une pâture gelée, de quelques niches au passage et surtout d’une bonne humeur générale.
Sur le plan religieux, depuis la Révolution, le Curé de Mametz est aussi chargé de la paroisse de Marthes (sauf une exception de courte durée). Crecques, parfois confié à Mametz se voit enfin doté d’un Curé (qui, plus tard administrera aussi Rebecques). La vie religieuse semble être un peu fertile en grands événements, pourtant elle est au centre de la vie festive qui s’articule autour des fêtes carillonnées. A Mametz, la Neuvaine en l’honneur de Notre-Dame de BRUCHINE débute le jour de la Ducasse qui coïncide avec la Fête de la Nativité de la Vierge, une Vierge que l’on invoque tout particulièrement pour les femmes en couches et les jeunes enfants. Une grande reproduction d’une Vierge de Murillo accrochée dans la tribune de l’église de Mametz porte l’inscription << offert par l’Empereur >>. Pouvons-nous y voir une allusion à la visite que fit Napoléon III vers 1853 à la ville d’Aire ? Et, en ce cas, pourquoi ce tableau n’aurait-il pas brulé lors de l’incendie de la nef dans la seconde moitié du siècle ?... On ne sait pas... Mais nos villages, notre village vit... de nombreux commerces (que de cabaretiers...que de cordonniers...)(7) fleurissent le long des rues et les fêtes locales << tournent >> avec régularité, multipliant par trois les ducasses, raccrocs, geais, et par deux les communions solennelles.
(7)Par l'auteur de ces lignes, voir « MAMETZ AU TEMPS DE GRAND'PAPA »
LES FETES
MAMETZ MARTHES CRECQUES LE GEAI 3ème dimanche après Ascension Pentecôte Pâques LA DUCASSE 2ème dimanche de 1er dimanche de 3ème dimanche de septembre septembre septembre LE RACCROC 3ème dimanche après 4ème dimanche après 1er dimanche après la ducasse la ducasse la ducasse LES COMMUNIONS Dimanche de la Comme Mametz Pentecôte Trinité
LA NEUVAINE à Débute le jour de la N.D de BRUCHINE ducasse Les BALS Dimanche du geai – Jeudi du Geai – Dimanche du Geai dimanche, lundi de dimanche et lundi – Dimanche et lundi ducasse (midi et soir) de ducasse de ducasse mardi de ducasse (bal masqué) – mi-carême jour du Nouvel An
Nous sommes riches également d’un nombre impressionnant d’artisans, en particulier de maçons, de couvreurs, de menuisiers qui portent loin la réputation de Mametz. Les premières sociétés locales (Pompiers, Tir, Chasse..) voient le jour. Pendant tout le 19ème siècle, et le début du 20ème, la Commune a beaucoup construit : outre les écoles et leurs logements, on a aménagé un local pour un bureau de poste, on a clôturé les trois cimetières, on a élevé un clocher sur l’église de Marthes, on a construit un presbytère à Crecques et on a réédifié la nef de l’église de Mametz, bref, on n’a pas lésiné sur la dépense alors que le Loi de Séparation de l’Eglise et de l’Etat n’est pas encore votée.
ET CE FUT LA GUERRE DE 1914 La guerre de 1914 devait, comme partout ailleurs, mettre un frein au développement. Mametz allait payer un lourd tribut en sacrifiant nombre de ses enfants dans la fleur de l’âge. Les trois Monuments aux Morts érigés à la fin du conflit portent leurs noms gravés dans la pierre et nous rappellent que peu de familles furent épargnées. Le village lui-même ne connut des combats que le stationnement des troupes anglaises et portugaises. Ouverture pour beaucoup sur un autre aspect du monde, la rigidité anglo-saxonne, l’exotisme des hindous (partie de la Couronne britannique) stationnés à Monbus, le caractère chaleureux des portugais (dont un bon nombre fit souche dans tout le Nord de la France), ce fut un tournant pour notre Commune qui, la paix enfin revenue, se mit en devoir de panser ses plaies et de reprendre sa marche vers le progrès. Vers 1923, un pas décisif est fait grâce à la desserte en électricité alors que la Poste s’implantait solidement et se structurait. Le téléphone, l’automobile, les journaux, puis la T.S.F et le cinéma muet d’abord, puis parlant, vont provoquer une évolution rapide de notre monde rural. Pourtant, le travail des champs draine encore une bonne partie de la population. Le cheval tire vaillamment le matériel agricole et le début de journée s’illustre d’une cascade de bruits familiers : il y a le tombereau, la herse, le semoir et surtout le gros rouleau de fer qui brinquebale et tressaute sur chaque aspérité du chemin et qu’on entend venir de très loin. Les betteraves plantées font route et voici tout un peuple qui prend le champ d’assaut pour sarcler, démarier (on dit : déduire), espacer et re-sarcler... (On dit : arbraquer...)...ah ! vivement que viennent les monogermes... Et quand le soleil estival a mûri la moisson, la Vierge du 15 août ayant, selon l’année maintenu ou remis le temps, le champ de blé voit arriver son moissonneur muni de sa faux et de son << hoquet >> mais seulement pour ouvrir un chemin à la moissonneuse qui coupe et qui lie avec la << fichelle à moissonneuse >>. Ce qui n’empêche pas les enfants en vacances d’aller glaner de quoi nourrir la basse-cour familiale. Et les plus grands de relever les gerbes pour en faire les fameuses << cônes >> qui permettaient au grain de sécher avant que les charrettes ne les recueillent pour les mettre en meules en attendant le passage de la batteuse. Ce passage de la batteuse était une grande journée dans la vie d’une ferme, petite ou grande. Un personnel attitré suivait l’instrument qui faisait son tour, quelquefois de façon pas très catholique. Le battage ne prenait pas toujours toute une journée et il fallait nourrir la quinzaine d’hommes, matin, midi, quatre heures et soir, sans compter le désaltérage obligatoire. Alors, je me souviens du débrouillardise de quelques-uns, avec la complicité du maître de la batteuse, pour échapper à l’une ou l’autre des charges... D’où querelles et arrangements... Et il y avait aussi le soin du bétail : les vaches à conduire au marais ou au pâturage privé. Bien content quand le beau temps permettait enfin de les laisser passer la nuit. Mais, en ce cas, il fallait aller << moudre à pâture >> et obtenir du ruminant qu’il accepte de rester tranquille malgré l’agacement des insectes. Et les lapins réclamaient les plus beaux pissenlits des talus que ne polluaient pas encore les rares automobiles...Et les poules faisaient leurs poussins sur le nid qu’elles s’étaient fabriqué et rempli, à moins qu’elles n’aient << couvé perdu >> et ramené leur petite famille avec la fierté du travail bien fait... Tant de souvenirs nous viennent à l’esprit de cette époque où les agitations du monde parvenaient encore jusqu’à nous avec, il faut l’avouer, une résonance bien atténuée.
ET LA GUERRE DE 1939-1945
C’est dans cette période de calme relatif, de mutations progressives et d’évolution maîtrisée que survint la seconde guerre mondiale qui fut pour nous, gens de Mametz, une épreuve bien différente de celle de 14-18. Ce fut un temps de longue attente, ponctué par le martèlement des bottes des troupes d’occupations dont la présence fut quasi constante dans le village, par l’angoisse des moments d’alerte sous le vrombissement des avions à la recherche des rampes de lancement des V1 de Blanc-Pignon et autres. Ceci nous valut, le 19 mars 1944, la chute d’un chapelet de bombes sur << Les Ruelles >> dont l’explosion allait coûter la vie à deux habitants du quartier, qui laissaient quatre orphelins. D’autres de nos concitoyens allient trouver la mort au travail ou sur les routes, dans des bombardements meurtriers qui ponctuèrent ces années d’incertitude. Le conflit terminé, les prisonniers de guerre, patiemment attendus, regagnèrent leurs foyers et Mametz entreprit de panser ses plaies, heureusement bénignes. Ce dernier demi-siècle a donné à notre village le visage que nous lui connaissons aujourd’hui et qui doit lui permettre d’aborder l’an 2000 avec un optimisme raisonnable. Le boom de la construction a fait fleurir de nombreuses habitations, de bon goût pour la majorité d’entre elles, comme il a permis la rénovation des immeubles anciens. Ce fait positif a particulièrement contribué à souder les trois villages qui, à part quelques centaines de mètres entre Marthes et Crecques sont maintenant réunis. Grâce à l’achat judicieux d’une parcelle importante de terrains destinés à constituer une réserve foncière au centre de l’agglomération, le quartier baptisé << de Bruchine >> a amené le contingent de population nécessaire à la survie du village et à son expansion raisonnable. Dans les années qui viennent, on trouvera probablement dans ce secteur un espace en forme de << place publique >> à l’écart de la circulation intensive de la route départementale. Tout ceci a obligé les pouvoirs publics à aller résolument de l’avant dans l’aménagement de la voirie, la desserte en eau potable et surtout, dans la récupération et l’assainissement des eaux usées. MAMETZ a en effet, été avec REBECQUES et BLESSY qui forment le Syndicat d’Eau et d’Assainissement, l’une des premières communes du département à se doter d’un réseau d’assainissement qui lui permet de faire face, sereinement, aux contraintes d’une époque qui se veut de plus en plus écologique. Si beaucoup d’exploitations agricoles ont disparu, comme partout ailleurs, celles qui se sont maintenues se sont modernisées et structurées. Les productions, le matériel, les façons culturales, la vie même de la ferme et de ses habitants a considérablement évolué. Le passage de l’Autoroute A26, au sud-ouest du territoire a provoqué un Remembrement qui, avec le Plan d’Occupation des Sols, devrait préserver le caractère rural du village ainsi que la qualité de ses paysages. Les artisans et commerçants sont encore nombreux et variés et sont en mesure de répondre à quasi tout les besoins du village. MAMETZ, pays de terre, de vent et d’eau entend tirer parti pour le bien de tous, de ce qui était autrefois considéré comme une calamité. Les terres inondables, anciens prés flottants, se transforment peu à peu en étangs pour le plaisir des pêcheurs et des amateurs de sports nautique. Des structures d’accueil se mettent en place, des terrains de camping de bonne tenue, des gîtes et des chambres d’hôtes, des commerçants dynamiques et accueillants donnent vie et il faut se réjouir de voir qu’on a le souci de préserver l’écrin de verdure qui forme un cadre exceptionnel à toute cette partie de la Vallée de La Lys. En 1952, MARTHES s’est, à son tour, doté de son école et en 1989, MAMETZ a vu s’agrandir le groupe scolaire, preuve, s’il en est besoin, que la démographie sans être galopante, est normale et que le village veut vivre et même prospérer. Notre plus grande richesse réside d’ailleurs dans toute cette population enfantine qui remplit les classes bien vivantes et agréables, sans compter tout les jeunes qui s’essaiment vers Thérouanne, Aire, Saint-Omer, Arras ou Lille afin de préparer un avenir qui, nous le souhaitons de tout cœur, sera à la mesure de leurs espérances. UNE CONCLUSION MAIS PAS UNE FIN
Et nous voici, en cette année 1998, arrivés au terme de notre pèlerinage dans le temps. Peut-être a-t’il paru un peu long aux yeux de certains. Il a fallu pourtant élaguer bien des détails pour ne conserver que l’essentiel tout en donnant vie à ce passé qui nous a conduits jusqu’à aujourd’hui. Me permettez-vous de dire que je souhaitais que ce récit vous intéresse, comme une histoire qu’on raconte et dans laquelle on voit s’agiter des personnages familiers. Il n’était pas de ma compétence d’écrire un manuel scolaire et, de plus, nous n’en avions pas les éléments. Mais si vous avez lu jusqu’à la dernière ligne sans ennui et que, ceci fait, vous connaissez mieux ce village qui est peut être celui de vos ancêtres mais qui est peut-être aussi celui où vous avez choisi de vivre, le contrat est rempli, surtout si le connaissant mieux, vous sentez grandir votre attachement à notre petit coin de terre artésienne. Que soit l’avenir qui s’ouvre devant nous, jeunes et moins jeunes ?...personne ne peut apporter de réponse à cette question et les sujets d’inquiétude ne manquent pas. Mais nous savons avec certitude que cet avenir demande notre participation active à tous. Comme notre présent est l’aboutissement des efforts de tous ceux qui nous ont précédés sur le sol mametzien. Et si, dans le passé nous avons pu constater que c’est l’union de toutes les bonnes volontés qui a fait avancer l’ouvrage, il semble que la leçon soit toujours d’actualité. Le bien commun n’est pas l’affaire de quelques-uns : il demande la participation active et le bon vouloir de tous ceux qui reconnaissent l’action positive de leurs prédécesseurs et qui souhaitent marcher sur leurs traces. C’est à tous ceux qui ont travaillé, au cours des siècles, sur notre sol mametzien, que je voudrais, en terminant, rendre hommage : les connus, dont on égrène encore parfois les noms, mais surtout l’immense foule des anonymes. D’une façon ou d’une autre, ils ont tous laissé des traces de leur passage et il est juste de saluer leur travail opiniâtre, leur savoir-faire et leur dévouement. Et, s’il est normal et nécessaire de regarder vers l’avenir avec courage et confiance, il est également indispensable de ne pas laisser tomber dans l’oubli ou en désuétude, l’héritage du passé. Ne rougissons pas des coutumes, des noms, des dévotions qui émaillent ces pages. Le devoir de mémoire s’impose à tous...Est-il vraiment besoin de la rappeler ?...
Marie-Thérèse Delmaire1998 (reproduction soumise à l'approbation de l'auteur)