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17.03 > 14.04.18 > 17.03 ZIBELINE N°116 Mensuel culturel engagé du Sud-Est marionnettes Tricastin châteauvallon à Mougins danger en Liberté DESTINATION : des villes en concurrence

3€ L 11439 - 116 - F: 3,00 - RD CONTEXTE[ S ] 13 & 14 ART / TERRITOIRE AVRIL 2018

RENCONTRES & DÉBATS menés par Anne Quentin

« Que faire quand la laïcité s’eff rite, que le racisme avance et que les problèmes sociaux s’aggravent ? Comment s’émanciper, grandir, rêver pour créer d’autres possibles ? De plus en plus de théâtres tentent de trouver de nouveaux ancrages à leur action pour que les lieux de l’art deviennent des lieux de vie, d’échange, de partage. CONTEXTE[S] réunit intellectuels, artistes, acteurs socio-culturels, enseignants et professionnels pour croiser points de vue et expériences et inventer ensemble des alternatives au prêt-à-consommer et au prêt-à-penser. Deux jours pour rebattre les cartes au Merlan qui fait le pari de son “contexte” pour irriguer son territoire et inventer d’autres voies à l’art. » Anne Quentin

VENDREDI 13 AVRIL

14H30 ART / TERRITOIRE > TABLE 1 accueil > 14h VIVRE, RENCONTRER, INVESTIR

Des habitants de et des artistes s’interrogent ensemble sur les réalités et la fonction d’un théâtre qu’ils côtoient de près ou de loin. Un temps pour faire vivre la rencontre en paroles, en récits ou témoignages autour d’un thème : le territoire peut-il réinventer l’art ?

16H30 ART / TERRITOIRE > TABLE 2 IRRIGUER, ENTREPRENDRE, AGIR

Ils sont acteurs de leur territoire. Entrepreneurs, bailleurs, enseignants, travailleurs sociaux et culturels, traversent tout autant qu’ils participent du territoire. Quelle communauté forment-ils ? Comment envisagent-ils leur rôle, comment fabriquent- ils des territoires pour l’art ?

18H00 ART / TERRITOIRE > RENCONTRE DÉCALÉE durée : ± 1h RENCONTRE DÉCALÉE avec Thierry Thieû Niang

SAMEDI 14 AVRIL

11H15 ART / TERRITOIRE > TABLE 3 accueil > 10h30 PRESCRIRE, RECONNAÎTRE, DÉBORDER

Acteurs culturels et artistes témoignent de l’identité culturelle du territoire qu’ils contribuent à forger. Ils croisent leurs points de vue pour interroger les représentations symboliques, le lien et les interrogations que soulève l’art dans son contexte. Et si l’art réinventait le territoire ?

13H00 >

© Mickaël Phelippeau ART / TERRITOIRE SPECTACLE (étape de travail) durée ± 45 min. JUSTE HEDDY de Mickaël Phellipeau

Le nouveau portrait dansé du chorégraphe avec Heddy Salem. Juste Heddy

Gratuit Infos & réservations (réservation indispensable) avenue Raimu, Marseille 14e Événement réalisé avec la complicité de Radio Grenouille 88.8 fm 04 91 11 19 20 / www.merlan.org MARS 13 & 14 AVRIL CONTEXTE[ S ] 2018 AVRIL 2018 ART / TERRITOIRE RETROUVEZ ZIBELINE SUR JOURNALZIBELINE.FR menés par Anne Quentin CULTURE ET SOCIÉTÉ RENCONTRES & DÉBATS Mensuel payant paraissant le deuxième samedi du mois Édité à 20 000 exemplaires, imprimés sur papier recyclé Point Édité par Zibeline BP 90007 13201 Marseille Cedex 1 Dépôt légal : janvier 2008 ISSN 2491-0732 « Que faire quand la laïcité s’eff rite, que le racisme avance et que les problèmes Imprimé par Riccobono sociaux s’aggravent ? Comment s’émanciper, grandir, rêver pour créer d’autres Imprim’vert - papier recyclé de bascule possibles ? De plus en plus de théâtres tentent de trouver de nouveaux ancrages Crédit couverture : © Alouette sans tête à leur action pour que les lieux de l’art deviennent des lieux de vie, d’échange, Conception maquette Tiphaine Dubois Risque d’accident nucléaire majeur. À Fukushima ou Tcher- de partage. CONTEXTE[S] réunit intellectuels, artistes, acteurs socio-culturels, nobyl ? Non, ici, à Tricastin, dans notre zone de risque, à 60 enseignants et professionnels pour croiser points de vue et expériences et Directrice de publication & rédactrice en chef km d’. Qui le dit ? Les allumés antinucléaires, les inventer ensemble des alternatives au prêt-à-consommer et au prêt-à-penser. Agnès Freschel Deux jours pour rebattre les cartes au Merlan qui fait le pari de son “contexte” [email protected] 06 09 08 30 34 militants, des ZADistes ? Non, des députés, des citoyens, pour irriguer son territoire et inventer d’autres voies à l’art. » Anne Quentin Rédactrice en chef adjointe Dominique Marçon et certains membres de l’Autorité de Sécurité Nucléaire : la [email protected] 06 23 00 65 42 vieille centrale, mise en service en 1980 pour un maximum Secrétaire de rédaction Anna Zisman de 30 ans, est notablement fissurée. Elle a rejeté des gaz VENDREDI 13 AVRIL [email protected] 06 88 46 25 01 radioactifs une semaine après sa remise en route en décembre, 14H30 ART / TERRITOIRE > TABLE 1 elle est située en zone sismique et inondable par le Rhône. accueil > 14h VIVRE, RENCONTRER, INVESTIR ARTS VISUELS Claude Lorin Comme à Fukushima. [email protected] 06 25 54 42 22 Le plus troublant est que nous continuons à vivre, à Des habitants de Marseille et des artistes s’interrogent ensemble sur les réalités et LIVRES Fred Robert la fonction d’un théâtre qu’ils côtoient de près ou de loin. Un temps pour faire vivre [email protected] 06 82 84 88 94 travailler, sans protester. La catastrophe écolo- la rencontre en paroles, en récits ou témoignages autour d’un thème : le territoire MUSIQUE ET DISQUES gique qui va, de façon certaine selon tous les peut-il réinventer l’art ? Jacques Freschel [email protected] 06 20 42 40 57 scientifiques, affecter gravement la planète, CINÉMA n’est plus évitable. Le point de bascule 16H30 ART / TERRITOIRE > TABLE 2 Annie Gava [email protected] 06 86 94 70 44 approche, et on ne sait trop quelles 116 IRRIGUER, ENTREPRENDRE, AGIR Élise Padovani [email protected] espèces survivront à l’enchaînement

WRZ-WEB RADIO ZIBELINE ÉDITO Ils sont acteurs de leur territoire. Entrepreneurs, bailleurs, enseignants, travailleurs Marc Voiry d’ouragans, de maladies causées par les sociaux et culturels, traversent tout autant qu’ils participent du territoire. Quelle [email protected] pollutions majeures, de migrations massives, communauté forment-ils ? Comment envisagent-ils leur rôle, comment fabriquent- de guerres qui s’ensuivront. Ce n’est pas un ils des territoires pour l’art ? Polyvolants Chris Bourgue scénario catastrophe, mais ce qui nous attend. [email protected] 06 03 58 65 96 18H00 ART / TERRITOIRE > RENCONTRE DÉCALÉE Gaëlle Cloarec Faut-il s’y préparer ou continuer à vivre ? Faire comme [email protected] 06 72 95 39 64 durée : ± 1h avec Thierry Thieû Niang si de rien n’était pendant 10 ans, 20 ans au mieux, et RENCONTRE DÉCALÉE Maryvonne Colombani [email protected] 06 62 10 15 75 laisser l’enfer en héritage à nos enfants ? C’est aujourd’hui Marie-Jo Dhô [email protected] qu’il faut arrêter Tricastin, la surdépendance électrique, Marie Godfrin-Guidicelli éteindre ces écrans énergivores qui nous empêchent de voir SAMEDI 14 AVRIL [email protected] 06 64 97 51 56 le réel, pour nous adapter au monde qui vient, et qui ne sera > 11H15 ART / TERRITOIRE TABLE 3 vivable qu’en changeant radicalement nos règles de vie et accueil > 10h30 PRESCRIRE, RECONNAÎTRE, DÉBORDER Maquettiste Philippe Perotti en sortant du cynisme capitaliste. En pratiquant la solidarité, [email protected] 06 19 62 03 61 la sobriété, la décroissance, l’écoute de l’autre et de la terre, Acteurs culturels et artistes témoignent de l’identité culturelle du territoire Commerciale qu’ils contribuent à forger. Ils croisent leurs points de vue pour interroger les Rachel Lebihan nous pourrons limiter la catastrophe. Une question, plus que représentations symboliques, le lien et les interrogations que soulève l’art dans [email protected] 07 67 19 15 54 La régie jamais, culturelle. On s’y met ? son contexte. Et si l’art réinventait le territoire ? Jean-Michel Florant AGNÈS FRESCHEL [email protected] 06 22 17 07 56 Collaborateurs réguliers : Régis Vlachos, Frédéric 13H00 > © Mickaël Phelippeau ART / TERRITOIRE SPECTACLE (étape de travail) Isoletta, Yves Bergé, Émilien Moreau, Christophe Floquet, durée ± 45 min. de Mickaël Phellipeau Pierre-Alain Hoyet, Aude Fanlo, Thomas Dalicante, Marion JUSTE HEDDY Cordier, Caroline Gerard, Delphine Dieu, Hervé Lucien Administration Le nouveau portrait dansé du chorégraphe avec Heddy Salem. Catherine Simon Juste Heddy [email protected] Houda Moutaouakil [email protected] 04 91 57 75 11 Chargée des abonnements Gratuit Infos & réservations Marine Jacquens [email protected] 06 46 11 35 65 e (réservation indispensable) avenue Raimu, Marseille 14 Communication Événement réalisé avec la complicité de Radio Grenouille 88.8 fm 04 91 11 19 20 / www.merlan.org Louis Giannotti [email protected] 04 91 57 75 11 Théâtre MON TRAÎTRE

Mise en scène Emmanuel Meirieu D’après Mon traître et Retour à Killybegs de Sorj Chalandon « Son traître, c’est son ami, un activiste de l’IRA qui a trahi sa cause. Lui, c’est le grand reporter Sorj Chalandon. Voici leur histoire, La Criée 17/18 adaptée avec force. » Théâtre national de Marseille Mardi 17 avril 20h30 THÉÂTRE DE L’OLIVIER ¦ Istres 04 42 56 48 48 ¦ www.scenesetcines.fr (e-billet) La Criée Licence 3-1064783 ToutCourt Étonnant festival de courts métrages ! Une centaine de films, entre animations, documentaires et DU 5 AU 14 AVRIL 2018 I 20:30 fictions fantastiques 04 91 75 64 59 www.theatre-nono.com 18 > 21 avril 35 traverse de carthage 13008 marseille Cinéma pour tous dès 3 ans ! 2,5/5 € par séance Pass illimité 10 €

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CREATION Perm - Russie sommaire

116

SOCIÉTÉ Le nucléaire en procès (P.6) politique culturelle Entretien avec Nathalie Anton, directrice de l’Arcade, projet artistique à l’Université de Toulon (P.7) Destination Provence, des villes en concurrence avec les investissements privés (P.8-10) Châteauvallon en Liberté : entretien avec Charles Berling et Pascale Boeglin-Rodier (P.12-13)

Bollène, centrale nuéclaire du Tricastin, canal de Donzère-Mondragon 2013 © cc Franck Gavard Perret événements Le Train Bleu (P.14)

Projet de réhabilitation de la Festival + de genres à Klap (P.15) prison Sainte-Anne © Fabre & Speller - Entretien avec Alexis Moati, création d’Une famille Baua Architectes Urbanistes Associés innocente à La Criée (P.16) Festival Russe au Toursky (P.17) Festival L’ImpruDanse à Draguignan, les Nouvelles Hybrides, critiques Semaine de la marionnette à Mougins (P.18-19) MP2018, spectacles, musiques (P.24-50) Marseille, Cassis, Vitrolles, Aix, Velaux, Pertuis, Istres, Miramas, Festival de Pâques à Aix, festival Présences Féminines Grans, Berre, Port-de-Bouc, , Saint-Mitre, Cavaillon, à Toulon, la ZAT à Montpellier (P.20-21) Avignon, Toulon, Ollioules, Nîmes, Montpellier, Béziers Mucem (P.22) R-V aux parcs et jardins à Vitrolles, Opera Mundi (P.23)

DU 5 AU 14 AVRIL 2018 I 20:30 AU PROGRAMME DU MOIS 04 91 75 64 59 Musiques (P.51-56) www.theatre-nono.com Spectacles (P.58-75) 35 traverse de carthage 13008 marseille

L’Amour des hommes, de Mehdi ben Attia à voir au festival Panorama des cinémas, Scènes et Ciné © 4 A 4 Productions - Cinétéléfilms - Amel Gellaty

cinéma [P.76-83] Marseille, Aix, La Ciotat, Aubagne, Vitrolles, Martigues, Port- de-Bouc, Salon-de-Provence, Istres, Miramas, Fos, Grans, Port-Saint-Louis, Gardanne, Avignon, Montpellier, Toulon, Berlin

Arts visuels [P.84-93] MP2018, Marseille, Aix, La Ciotat, Aubagne, Martigues, , Eygalières, L’Isle-sur-la-Sorgue, Toulon, Le Lavandou, Carros, Saint-Paul-de-Vence, Montpellier, Sète, Sérignan

livres [P.94-98] Deux jeunes filles, Tamarone, janvier 2017, exposition Jeunes-Génération à La Friche © Lola Reboud

CREATION Perm - Russie 6 société

Bollène, centrale nuéclaire du Tricastin, canal de Donzère-Mondragon 2013 © cc Franck Gavard Perret Danger nucléaire 18 HABITANTS DES DÉPARTEMENTS DU VAUCLUSE, DU GARD, DE LA DRÔME ET DES BOUCHES-DU-RHÔNE PORTENT PLAINTE CONTRE L’AUTORITÉ DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE POUR MISE EN DANGER DE LA VIE D’AUTRUI

isque sur le système de refroidissement des En cas de séisme, un accident de type Fukushima rejets toxiques jour et nuit ». L’une des autres réacteurs, défaillance d’éléments importants n’est pas à exclure. Selon Jean Revest, qui plaignantes, Michèle Van Mosse, évoque son Rpour la protection en cas de séisme, irré- s’exprime au nom de la Coordination anti- sentiment d’être de plus en plus menacée par le gularités dans la fabrication d’équipements... nucléaire du sud-est, « avec le mistral, en cas nucléaire, et pas seulement à cause du Tricastin : La liste des « incidents » relatifs à la centrale d’accident, en une heure Avignon serait atteint, « dans la Vallée du Rhône on est aussi concernés nucléaire du Tricastin (en zone sismique, sur Marseille en deux ». Il évoque l’objectif prin- par Cruas, Marcoule, Cadarache... nos enfants vont la commune de Saint-Paul-Trois-Châteaux, cipal de la démarche judiciaire : briser le mur avoir à gérer 48 centrales en fin de course et leurs Drôme) est longue. On la trouve sur le site du silence. « La mobilisation citoyenne pourrait déchets ». La Vauclusienne déplore le fait que de l’ASN, Autorité de Sûreté Nucléaire, qui changer les choses, car nous avons un pouvoir. Nous « tout le monde est arrosé en respirant, en mangeant « assure, au nom de l’État, la réglementation et pouvons refuser de servir de rats de laboratoire. » des légumes ou en buvant du vin produit à proximité le contrôle du nucléaire pour protéger le public, les Il est vrai que les décennies de lobbyisme intense des sites ». À l’instar des riverains de l’Étang de patients, les travailleurs et l’environnement »*. et la politique nucléariste du gouvernement Berre, qui ont diligenté eux-mêmes une étude Estimant que la centrale est l’une des plus français, qui soutient coûte que coûte EDF, CEA des pollutions industrielles dans leur secteur, vieilles et des plus délabrées du parc nucléaire et Areva, ont bien fonctionné. Le 22 février, des faute d’action des pouvoirs publics, des analyses français, le Collectif antinucléaire du Vaucluse gendarmes ont évacué les opposants au projet citoyennes pourraient être entreprises, afin avait adressé à l’ASN en novembre 2017 une d’enfouissement de déchets nucléaires sur la d’évaluer précisément l’impact sur l’environ- mise en demeure pour que ses 4 réacteurs commune de Bure (Meuse). Significativement, nement des centrales. La procédure juridique, ne redémarrent pas. N’ayant pas obtenu de malgré un appel à manifester sa solidarité devant elle, est entre les mains de l’avocat des 18 plai- réponse, en février, 18 habitants des dépar- les Préfectures, très peu de monde était présent gnants, Me Riglaire, du Barreau de Lille. Une tements du Vaucluse, du Gard, de la Drôme à Marseille. Pour Christine Dardhalon, l’une cinquantaine de plaintes du même type ont été et des Bouches-du-Rhône ont porté plainte des plaignantes domiciliée dans le Gard, « à déposées le 9 mars auprès du Procureur d’Avi- au pénal contre l’organisme, pour « mise en chaque manifestation, on se rend compte que les gens gnon, par un avocat du Vaucluse, Me Faryssy. danger de la vie d’autrui et non-interdiction de sont conscients du risque qu’ils encourent, mais ils Zibeline reviendra sur la question cruciale du fonctionnement d’une installation nucléaire en sont résignés ». Les propos répétés du président nucléaire, dans ses prochains numéros. situation d’urgence radiologique et de protection de l’ASN, Pierre-Franck Chevet, qui anticipe GAËLLE CLOAREC des personnes face à la contamination radioactive de un accident majeur sur le sol français, sans l’environnement », en saisissant les Procureurs des cependant prendre de mesures radicales, ne sont *https://www.asn.fr/L-ASN/L-ASN-en-region/ Auvergne-Rhone-Alpes/Installations-nucleaires/ Hauts-de- (siège de l’ASN) et de la Drôme. pas fait pour la rassurer : « il essaie de se couvrir ». Centrale-nucleaire-du-Tricastin/Avis-d-incidents

Risque d’accident majeur Contamination au quotidien À lire Le canal de Donzère-Mondragon longe le site Selon Jean Revest, il y a d’autant plus urgence Nucléaire : danger immédiat du Tricastin et assure le refroidissement des que, sans même la survenue d’un accident, « le Hugues Demeude, Thierry Gadault réacteurs, mais sa digue présente des faiblesses. crime est déjà à l’œuvre au quotidien, avec des Flammarion, 21€ politique culturelle 7 Diriger l’agence régionale

NATHALIE ANTON, DIRECTRICE vivant : je veux accompagner les génèrent de la ressource propre. compagnies dans leur structu- Le service formation doit être ADJOINTE DE CHÂTEAUVALLON ration, y compris avec de la mis en avant auprès des JUSQU’EN DÉCEMBRE, A PRIS LA valorisation quand cela sera professionnels, et s’adapter possible -des prêts de salles, davantage aux demandes DIRECTION DE L’ARCADE, AGENCE des aides à résidences, des du milieu. RÉGIONALE DES ARTS DU SPECTACLE aides à l’emploi culturel. À propos de recettes, Mais quelles sont exacte- quel est le budget de Zibeline : Qu’est ce qui vous a amenée à ce poste ? ment les missions actuelles l’ARCADE ?

Nathalie Anton : Ma volonté de candidater de l’ARCADE ? N Il n’a pas baissé au départ at ha li à la succession de Bernard Maarek était liée à L’ARCADE a deux pôles : e A de Bernard Maarek, ce que nt on mon expérience, et à mon envie de me retrouver le pôle ressource, qui concentre © X-D.R beaucoup redoutaient. La Région de l’autre côté. J’ai toujours placé les artistes l’information sur les lieux, les compagnies et l’État tiennent à leur agence, et la au centre de mes préoccupations, et à ce poste et les programmations, à destination des 2500 financent plutôt bien : 800 000 euros de la je pense que je pourrai inventer un meilleur professionnels qui reçoivent notre lettre heb- région, 600 000 euros de l’État. Il faut qu’à accompagnement, dans la structuration de leurs domadaire, et du public avec le site Culturo ce prix là elle soit force de proposition, qu’elle démarches, l’information, la formation, l’emploi. qui répertorie les spectacles de la région ; traduise et aide à mettre en œuvre la politique La production également ? et le pôle développement, où je veux faire publique et qu’elle développe de la compétence, Aux marges, nous pouvons accompagner la jouer tous les leviers : nous pouvons aider en au service de la vie artistique. production, même si ce n’est pas notre mis- ingénierie, en expertise extérieure, en diffusion ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL sion. En fait, je veux redéfinir les missions de même si nous ne faisons pas de production. l’ARCADE en les adaptant aux changements Vous allez continuer les actions de formation ? actuels ; d’abord en la recentrant sur le spectacle Oui, elles sont essentielles, et en plus elles arcade-paca.com

DEPUIS 2013, L’UNIVERSITÉ DE TOULON A SOUTENU QUATRE PROJETS Des étudiants co-créateurs PORTÉS PAR DES ARTISTES OU « découvre la création d’un scénario et les tournages » DES STRUCTURES DE LA RÉGION. et Théo, en D.U.T CETTE ANNÉE, APRÈS LE METAXU, métier du multimédia et de l’Internet, a conçu LES COMPAGNIES GRAND BAL, et lancé la campagne de ARTMACADAM ET RIDZ, PLACE AU crowfounding. « Grâce à eux, on fait plus » s’en- COLLECTIF MARSEILLAIS LE NOMADE thousiasment Philippe VILLAGE Domengie et Virginie Coudoulet-Girard qui L’équipe du court-métrage Les Oubliés, plateau de Telomedia, UTLN Toulon © Théo Dauphin apprécient leur détermi- a plateforme de production audiovisuelle de l’écriture du scénario à la postproduction nation, conscients néanmoins du défi queLes et numérique Telomedia au sein du cam- du pilote. « Un projet chronophage qui demande Oubliés représente : « C’est un challenge pour L pus de Toulon a tous les atouts (350 m2 beaucoup d’assiduité » reconnaît le réalisateur les artistes qui doivent impliquer des amateurs, de plateau, régie, etc.) pour faire aboutir le Philippe Domengie, heureux d’avoir fidélisé garder la même exigence de qualité, la longévité de nouveau projet du collectif Le Nomade Vil- un noyau dur d’une vingtaine d’étudiants durant la résidence ». Beaucoup de contraintes, certes, lage : la réalisation d’un court-métrage avec leur temps scolaire et en dehors. Cette réussite mais un plaisir partagé qui fait de leur aventure des étudiants de l’UTLN. Ainsi peut prendre ne doit rien au hasard car le collectif a déjà une vraie rencontre artistique, professionnelle forme Les Oubliés, suite filmique à la pièce de mené de nombreux projets pédagogiques. En et humaine. théâtre franco-portugaise This is (not) Europe revanche c’est sa « première expérience dans une MARIE GODFRIN-GUIDICELLI montée avec le Teatro O Bando à Lisbonne, université qui compte autant de filières sur les arts qui a séduit les étudiants par sa dimension numériques, l’audiovisuel ou la danse. Et puis l’outil Université de Toulon sociale et fantastique. D’octobre 2017 au 30 est neuf et les conditions hallucinantes ». Même 04 94 14 20 30 univ-tln.fr/Projets- artistiques-Appel-a-projets.html mars 2018, date de la diffusion du film durant engouement du côté des étudiants : Déborah, le Printemps de l’Université de Toulon, artistes et inscrite en D.U.T. technique de commercia- Le Nomade Village étudiants auront œuvré ensemble à chaque étape, lisation et éloignée de la pratique artistique, 06 15 55 69 70 lenomadevillage.com 8 politique culturelle Provence, destination concurrence ! ARLES CONTRE AVIGNON, AIX CONTRE MARSEILLE, L’HEURE SERAIT-ELLE À LA MISE EN CONCURRENCE CULTURELLE DES TERRITOIRES PROVENÇAUX ? PARTOUT LE PRIVÉ EST SUR LES RANGS...

ans un « Arles-Avignon, le défi culturel » paru toutes deux largement en-dessous du revenu par an, tandis que le patrimoine bâti arlésien, dans Le Monde le 16 février, Laurent Car- médian, il répertorie les manifestations culturelles antique et médiéval, en attire quelque 380 000. Dpentier présente Arles et Avignon comme contribuant à leur dynamisme. Pourtant il ne Quant aux Rencontres d’Arles et aux Suds (res- des « sœurs rivales ». Il parle de la « marque cite que les investissements privés pour l’art pectivement 100 000 et 50 000 entrées) ou même Avignon », comme s’il s’agissait d’un produit contemporain et les deux grands festivals d’été, aux Festivals d’Avignon, In et Off (respectivement et non du lieu de vie de 85 000 habitants. Et sans mentionner la principale source d’attractivité 150 000 et 700 000 entrées), ils n’existeraient pas de « Arles la branchée », qui se réjouit de voir culturelle de ces deux villes, sœurs jumelles dans ces villes sans leur exceptionnel patrimoine, des stars s’installer -Edouard Baer, Benjamin plus que rivales : leur inaliénable patrimoine. qui leur sert d’écrin. De même les musées d’art Millepied- au côté des 52 000 autochtones. Le Palais des Papes et le Pont d’Avignon contemporain : la Collection Lambert à Avignon, Constatant la pauvreté commune des deux villes, comptabilisent plus d’1 million de visiteurs et la Fondation Van Gogh à Arles connaissent

Avignon, Sainte-Anne, Lambert, le Off et les autres DANS LA CITÉ PAPALE ON A L’HABITUDE PLUS QU’AILLEURS DE PROFITER GRASSEMENT DE LA DÉPENSE CULTURELLE DES CITOYENS ET DES ARTISTES : C’EST LE SEUL ENDROIT DE OÙ LE THÉÂTRE EST UNE ACTIVITÉ RENTABLE !

e Off, magnifique preuve annuelle de Mais certains théâtres permanents ne sont pas en l’amour des français pour le théâtre, est reste : le Théâtre de l’Oulle loue ses 7 créneaux Lune source intarissable de revenus pour 18 000 euros minimum. Laurent Rochut, les commerçants, hôteliers et restaurateurs, son directeur, ouvrira un nouveau théâtre dès mais surtout pour les propriétaires de salles. 2018 (la salle Tomasi qui était mise en vente Projet de réhabilitation de la prison Sainte-Anne © Fabre & Speller - Baua Architectes Urbanistes Associés Le créneau de deux heures se loue entre 12 000 pour 270 000 euros par Grand Avignon) et un (petite) programmation à l’année, créneaux et 25 000 euros, chaque salle en enchaîne 7 ou autre en 2019 (le théâtre des Gémeaux lui aussi réservés aux compagnies régionales... 8 dans la journée, et certains « théâtres » ont intra muros). Le directeur-gestionnaire, qui plusieurs salles. Ainsi le Collège de la Salle en se félicite de ne pas demander de subventions, Le privé au service a 7, et alignait plus de 55 créneaux cet été. On n’en a effectivement pas besoin ! Pourtant, du bien public peut donc imaginer que cette « école chrétienne contrairement aux nombreux propriétaires C’est toute l’ambiguïté des relations public/ de premier plan » parvient à des recettes estivales maquignons du Off, il se fixe des missions qui privé dans la culture : certains loueurs de salle avoisinant le million d’euros... relèvent du service public : accueil de création, choisissent le plus rentable, d’autres ont un projet artistique... D’autres sont même philan- thropes, et à l’heure où la puissance publique #BalanceTonOff demande souvent aux opérateurs culturels des Les acteurs de la vie publique ne peuvent se soustraire aux questions des journalistes et cacher leurs résultats en termes de « recettes propres », la financements. Mais les loueurs de salle ne sont pas tenus aux mêmes obligations, et une véritable donation d’Yvon Lambert à l’État apparaît omerta règne... Nous ne connaissons leurs prix qu’à travers ce que les compagnies nous en disent ! comme un geste d’une incroyable générosité. Sa Aussi, puisque ni les théâtres ni AF&C ne publient ces prix de location, Zibeline vous propose de Collection, donnée en 2012 à condition qu’elle balancer les abus du off (prix du créneau et conditions d’accueil). Dans les théâtres mercenaires, reste à Avignon et que la Fondation annexe dans les théâtres permanents. Afin qu’on mesure comment l’argent des artistes et du public profite l’hôtel de Montfaucon occupé jusqu’alors par aux marchands du temple culturel. l’École d’Art, est estimée à près de 100 mil- Contactez-nous sur notre site journalzibeline.fr/contactez-nous, nous publierons en juin le résultat lions d’euros. L’État a payé le musée, la Ville le de notre enquête déménagement de l’École d’Art, et Eric Mézil, directeur de la Collection recruté par Yvon 9 Provence, destination concurrence !

des pics de fréquentation très importants et leur sécurité dispendieuse ; et l’attrait des voisines : Arles et Avignon n’ont rien à gagner durant les festivals, alors que les monuments investisseurs privés qui n’ont pas de mission à une rivalité instaurée artificiellement entre du patrimoine attirent presque toute l’année. de service public mais peuvent financer la elles. Et elles n’ont aucun lien administratif culture, en faisant fructifier un capital culturel analogue à celui qui oppose Marseille et Aix. Attractivité culturelle exceptionnel par intérêt ou philanthropie. Il s’agit aujourd’hui pour elles de mettre en œuvre Il ne s’agit donc pas, pour la puissance publique L’équilibre entre l’intérêt économique et des politiques publiques de la culture, d’analyser à Arles ou Avignon, de favoriser la branchitude culturel des citoyens est donc instable. De les pratiques culturelles des habitants, et surtout de ou de jouer la concurrence entre cités voisines. plus les maires d’Avignon (socialiste) et Arles clarifier la relation avec les investisseurs privés qui, Il s’agit, pour chacune, d’exister comme ville (communiste) ont une relation fragile avec leur par nature, ne travaillent pas pour le bien public. et de laisser place aux habitants. Pour cela les majorité d’alliance, et un lien complexe avec les AGNÈS FRESCHEL deux cités rhodaniennes doivent gérer au mieux collectivités de droite qui les régissent (Région, le lien avec leur passé de capitale antique ou Départements 13 et 84, Grand Avignon) sous la médiévale, et leur coûteux entretien ; leur présent menace permanente d’un prochain basculement métamorphosé en été par l’afflux festivalier, vers le FN, qui gouverne bien des communes Aix Marseille, 2000 ans d’inimitié acteurs culturels : elle a récupéré, au travers de Ce sont elles, les sœurs ennemies de la Destina- la société d’économie mixte Avignon Tourisme tion Provence. Leurs antagonismes ne cessent dont elle est l’actionnaire principal (15 millions de les éloigner, à l’heure où le gouvernement de CA, 200 000 de bénéfice annuel) et que Cécile demande à toutes les communes des Bouches- Helle préside, la gestion et les recettes du Palais du-Rhône, y compris Arles, de rentrer à toute et du Pont, confiée auparavant à Culturespace. force dans la métropole marseillaise, puisque Et la réhabilitation architecturale du centre le département va disparaître. Les sœurs sont ville, en particulier le projet de réhabilitation ennemies depuis longtemps, depuis César, de la prison Sainte-Anne, semble inventer un depuis que le Tribunal de Grande instance, partenariat public privé intelligent : souhaitant la faculté des lettres et arts, le Rectorat et créer un lieu mixte (culture, travail, commerce, la DRAC, bref tout ce qui fait qu’une ville habitation) la mairie a lancé un appel à projet compte de notables, sont installés dans la pour réhabiliter l’ancienne prison, remporté par sous-préfecture (140 000 hab.) plutôt que dans LC2I-Marseille, qui livrera dans quelques mois la ville centre (850 000 hab.). Un antagonisme des logements et un parking, des restaurants structurel et économique qui s’est aggravé sous et des commerces, mais aussi une crèche, un les règnes de Jean-Claude Gaudin et Maryse espace de co-working, une auberge de jeunesse Joissains, qui se font des coups en douce. Aix 2 Projet de réhabilitation de la prison Sainte-Anne © Fabre & Speller - Baua Architectes Urbanistes Associés et... une friche culturelle de 700 m , condition fait financer l’Arena par la Métropole, mais Lambert, est resté aux commandes jusqu’en indispensable pour remporter l’appel d’offre. refuse d’entrer au financement de Marseille 2018. Le musée magnifique, aux collections Provence 2018, alors même que le Pavillon uniques et aux expositions passionnantes, mais Le service public Noir, la Fondation Vasarely, le Jeu de Paume et souvent mal médiatisées, accueille moins de Reste que le meilleur acteur de l’intérêt géné- le Grand Théâtre y participent... Aix, en général, 35 000 visiteurs annuels les bonnes années. ral et du bien public, en matière culturelle, refuse de concevoir une politique culturelle Des tensions permanentes régnaient entre la appartient au champ du financement public, territoriale avec Marseille. Il faut dire que l’état municipalité et un directeur au tempérament direct ou indirect. Parce que les cahiers des des bibliothèques et musées marseillais, la d’artiste, on reprochait à la Ville d’avoir démé- charges existent et que ces acteurs culturels programmation de l’Odéon, théâtre municipal, nagé l’École d’Art en périphérie (elle n’est doivent rendre compte de leur activité, de leurs de La Buzine, inexistante, la fréquentation qu’à une centaine de mètres des remparts...). comptes, de leurs choix artistiques, de leur alarmante du musée d’histoire ou du mémorial Résultat : la nomination en février d’un nouveau relation au public. Ainsi le Festival d’Avignon, de la Marseillaise, le peu de crédit accordé à directeur : Alain Lombard, ancien administrateur le In, se réjouit de concerner les spectateurs de une vie culturelle associative bouillonnante et du musée d’Orsay qui a fait toute sa carrière la région (un tiers du public), les jeunes (20% particulière, mais aujourd’hui exsangue, le peu dans l’administration publique, parviendra-t-il de moins de 30 ans), les employés et ouvriers de considération accordé à la culture par une à mieux médiatiser ce trésor avignonnais ? (10%). Quel opérateur privé se préoccuperait municipalité essoufflée, mais autoritaire, ne de tels chiffres ? donne pas envie de faire politique commune... Récupérer les recettes A.F. C’est ainsi que Martigues la communiste et Aix culturelles LR se retrouvent à faire front commun contre Cette relation complexe entre public et privé une mégapole qui peut les affaiblir, comme un a amené la mairie avignonnaise à inventer des poids trop lourd vous entraîne dans sa chute... modes économiques qui déconcertent parfois les suite p.10 A.F. 10 politique culturelle Investissements privés Arles, une ville en mutation En Provence comme à les Fondations d’art contemporain se multiplient, appuyées sur des Fonds de dotation, organismes de mécénat destinés à réaliser une mission d’intérêt général. Ils ne peuvent recevoir de fonds publics mais les entreprises mécènes, et les particuliers, défiscalisent leurs dons à hauteur de 60 ou 66%, manière indirecte de financer l’initiative privée d’intérêt général. Le concept commence à faire son chemin en France, et les collectivités à travailler avec elles. Ainsi, jusqu’en janvier la Fondation Blachère (Apt) qui soutient depuis 15 ans l’art contemporain africain a exposé dans tous les musées municipaux de la ville ses Éclaireurs, Sculpteurs d’Afrique. Le Fonds Edis, né de la volonté de Régis Roquette en 2012, a égale- ment exposé dans les musées avignonnais, par deux fois, des œuvres numériques (et poétiques !) commandées à des artistes internationaux (à lire sur journalzibeline.fr). Le philanthrope a acquis l’ancien Grenier à Sel, renommé Ardenome, et y ouvre à partir du 31 mars sa première exposition dans les lieux. Planète laboratoire sera la première exposi- tion monographique consacrée aux artistes HeHe (Helen Evans et Heiko Hansen) qui conçoivent des univers oniriques, déstabilisants, apocalyptiques, qui questionnent notre relation à l’environnement. Musées d’artistes À Arles les fondations se multiplient : la fondation Van Gogh (art contemporain), la fondation Manuel Rivera-Ortiz (photographie documentaire), la fondation Luma de Maja Hoffmann... La der- nière en date (acquisition le 2 mars) est la Fondation Lee Ufan, appuyée sur un fonds de dotation pour l’heure mystérieux, mais l’artiste coréen vient d’acquérir les 1500 m2 de l’hôtel Vernon pour y exposer une partie de ses œuvres dont il a fait donation, et y accueillir des expositions temporaires. Le projet architectural est confié à Tadao Ando, et le lieu devrait être ouvert au public en 2020. À Aix, la belle-fille de Picasso ouvrira un nouveau musée en 2021 : elle a hérité de l’héritage de sa mère, Jacqueline Roque, dernière épouse du peintre, et possède ses dernières œuvres. La Ville vient de lui vendre l’ancien collège des Prêcheurs, soit 1500 m2 en plein centre ville, pour 11,5 millions d’euros. L’héritière ne dit pas si elle fera dation des œuvres, mais sa collection est sans nul doute une des plus importantes collections Picasso du monde et elle déclare « vouloir partager ce qu’elle a reçu »...

Investissement spéculatif Le bâtiment de Frank Gehry, Fondation Luma © Claude Lorin Mais à Marseille ou à Aix, les investissements dans les bâtiments Le bâtiment de Frank Gehry s’élève vers le ciel, scintillant, énorme, à vocation culturelles ne sont pas toujours clairs. Ainsi l’Hôtel de métamorphosant le profil de la ville antique. Surplombant, arro- Caumont, ancien Conservatoire d’Aix, est devenu un Centre d’art gant, prétentieux. La fondation Luma et Maja Hoffmann imposent exploité par Culturespace, accueillant 300 000 visiteurs par an depuis leur présence et leur argent, transformant la ville. Arles est un pays 2015... Or Culturespace vient de le revendre 25,4 millions à Groupama, paradoxal, une commune vaste incluant la Camargue, dotée d’un alors qu’elle l’avait acquis auprès de la Ville d’Aix pour 10 millions, patrimoine inestimable mais mal mis en valeur, faute de moyens. et que l’État, le Conseil Régional et la Ville d’Aix avaient financé la Ses musées, celui de l’Arles Antique et Réattu, tout comme les Ren- restauration du bâtiment, monument historique, à hauteur de 780 000 contres de la Photographie et les Suds, ou l’École supérieure de la euros. Culturespace affirme que le bâtiment conservera sa vocation Photographie, ont longtemps bénéficié de la générosité du Conseil culturelle, refusant de s’exprimer sur la plus value... Régional et Départemental, et des investissements d’État, lorsqu’ils À Marseille c’est Le Silo dont le financement n’en finit pas d’être étaient socialistes. Les changements de majorité ont dans l’ensemble obscur. Sur les murs les logos de la Ville de Marseille, propriétaire entamé ces subventions culturelles, et les investissements privés, qui du lieu, et de la Caisse d’Epargne, qui programme, mais en partie font grimper l’immobilier, mettent en difficulté une population plus seulement : la Ville se réserve des soirées, mais la banque encaisse pauvre qu’ailleurs, et jalouse de son identité provençale très locale. chaque année une compensation dont il n’est pas aisé de connaître Cette identité, tiraillée entre provençalisme de gauche et d’extrême le montant. La salle, mal conçue, souvent vide, semble une gabegie droite, entre biou et reine d’Arles, art contemporain et patrimoine financière, et Jean Claude Gaudin ne parle plus de son « Olympia sur antique, survivra-t-elle au rapprochement forcé avec la métropole, Mer » comme en 2012... l’afflux de capitaux et d’habitants « estrangié » ? A.F. A.F. e

23 FestivalMardi 20 > Vendredi russe 30 Mars

CréationL’histoire et mise en scène du par soldatRichard Martin SoiréesCinq films inédits cinéma en version originale passion sous-titrée Musique d’Igor Stravinsky Direction musicale Jean-Philippe Dambreville Avec Richard Martin & Marianne Sergent PourCabarets prolonger les soirées russes en musique

DeLes Nicolas Joueurs Gogol Par le Théâtre de la Comédie N.P. Akimov Spectacle sur-titré en français

RÉSERVATIONS 04 91 02 54 54 + D’ INFOS www.toursky.fr

MARSEILLE

CHRISTOPHE GARCIA ROMAIN BERTET ANDRÉS MARÍN FANNY SORIANO HILLEL KOGAN JORIS FRIGERIO FRANK MICHELETTI JEAN-CLAUDE GALLOTTA

FESTIVAL L’impruDanseL’impruDanse du 3 au 7 avril 2018

2ÈME ÉDITION © master1305 • THÉÂTRES EN DRACÉNIE Licences n° 11088047 et 31088046 THÉÂTRES EN DRACÉNIE Licences n° 11088047 • master1305 ©

04 94 50 59 59 www.theatresendracenie.com 12 politique culturelle Châteauvallon en Liberté

LE 23 FÉVRIER, CHARLES BERLING ET PASCALE BOEGLIN-RODIER ONT ÉTÉ NOMMÉS OFFICIELLEMENT DIRECTEURS DE CHÂTEAUVALLON. UNE DÉCISION DU CONSEIL D’ADMINISTRATION QUI CONFIRME LA VOLONTÉ DE L’ÉTAT ET DES COLLECTIVITÉS. ENTRETIEN.

Zibeline : Vous dirigez conjointement le Cette programmation restera-t-elle artistique- Théâtre Liberté de Toulon, qui jusqu’à pré- ment différente de celle du théâtre Liberté,

sent formait avec Châteauvallon une scène construite en complémentarités ? Pascale Boeglin-Rodier et Charles Berling © Vincent Berenger Nationale unique, mais à deux pôles. Cette C.B. : C’est essentiel, fondamental. Moi qui décision de vous confier également la direction connais Châteauvallon depuis que j’ai 12 ans prochaines années. La mutualisation des équipes de Châteauvallon remet-elle cette bipolarité je ne veux pas briser cette identité mais au et des lieux ne doit pas s’accompagner d’une en question ? contraire la retrouver. Ses spécificités artistiques baisse de moyens pour la création artistique et Charles Berling : Les deux institutions restent étaient moins nettes ces dernières années... on la programmation. Les tutelles se sont engagées distinctes, mais effectivement cette décision ne peut pas encore vous parler de programma- pour l’année prochaine, mais il va falloir qu’elles vient confirmer la volonté des collectivités de tion parce que l’on veut parfaire nos liens avec s’engagent au-delà. La métropole toulonnaise rapprocher les deux pôles de la scène nationale. l’équipe et décider avec elle, mais on a six mois est sous dotée par l’État et la Région, il faut Depuis la création du Théâtre Liberté on pour retrouver l’identité de Châteauvallon. rééquilibrer les choses, et si Châteauvallon nous demandait ce rapprochement entre les Retrouver l’identité ? Vous pensez qu’il l’avait et Le Liberté sont aujourd’hui correctement deux entités de l’agglomération toulonnaise... perdue ? financés, il ne faut pas que cela change sous Pascale Boeglin-Rodier : De plus l’État, dans C.B. : La programmation était devenue moins prétexte de mutualisation. un décret de mars 2017, a précisé qu’il fallait emblématique qu’à sa naissance, pluridisci- Pensez-vous pouvoir assumer la direction un seul projet artistique par label national. plinaire et assez similaire avec celle d’une de ces deux lieux très actifs sans recours à un Il s’agit d’une seule scène nationale, à deux scène nationale. Nous voulons retrouver les directeur délégué ? pôles mais unique : ce rapprochement des différences qui ont fait la saveur du lieu. P.B.-R. : On se pose la question... Mais plutôt directions était légalement nécessaire, et le P.B.-R. : Oui, la complémentarité va d’ailleurs qu’un directeur délégué à Châteauvallon nous départ inattendu de Christian Tamet a permis de soi. Au Liberté nous avons plusieurs salles souhaiterions quelqu’un de transversal : on que nous nous conformions à cette décision dont une très grande, mais nous n’avons ni cette veut s’occuper concrètement de la direction dès aujourd’hui. Quoi qu’il en soi, cela aurait histoire, ni ce site en extérieur, ni les moyens des deux lieux. été indispensable dès juin 2018. d’accueillir les compagnies en résidences de C.B. : Il faut que les deux pôles parviennent Pour les années à venir, cela va-t-il modifier création. Le site de Châteauvallon est parfait à mieux travailler ensemble, à sortir du cycle les programmations ? pour imaginer une programmation estivale, des de la concurrence pour entrer dans celui de C.B. : Pour la saison prochaine, la program- événements en extérieur, et pour accueillir la l’enrichissement mutuel. On aime les ponts ! mation est arrêtée à 70% par la direction création artistique dans des conditions idéales Entre les disciplines, les lieux, les publics, les précédente. Il s’agira pour nous de la compléter de logement et de répétition. pays... La personnalité de Christian Tamet par nos propositions, et en 2019/2020 de pro- En aurez-vous les moyens ? Cette fusion empêchait un lien véritable, et si nous faisons poser entièrement notre saison. Tout cela en des deux pôles s’opère-t-elle sans perte de appel à quelqu’un pour nous aider à program- accord, et je dirai même en co-construction, financements ? mer l’ensemble des salles, ce sera non pour avec l’équipe actuelle : nous voulons, c’est P.B.-R. : Pour l’instant l’ensemble des tutelles opposer les lieux, mais pour construire un des vraiment important pour nous, travailler avec s’est engagé sur la reconduction des moyens volets du projet artistique commun à Toulon l’équipe, nous appuyer sur leur savoir-faire et de chacun des pôles. et Châteauvallon. leur expérience. C.B. : Oui, une bataille va être nécessaire les ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL 13

duo de clowns-danseurs, quelques éléments de décor, un montage musical : trois générations d’une même famille prennent vie sur le plateau.

14 & 15 avril : Couple Gilles Gaston-Dreyfus et Anne Benoît excellent dans ce jeu de massacre amoureux où se télescopent le désir, la haine, la perte, la fuite, les sarcasmes, la déception, la rage et la tendresse, la mélancolie et la fureur ! Une déclinaison fantasque -et cruelle- de la vie à deux interprétée à l’unisson… un comble !

Théâtre Liberté - scène nationale de Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

AU PROGRAMME DU MOIS Châteauvallon 21, 23 & 25 mars : Traviata vous méritez un

Pascale Boeglin-Rodier et Charles Berling © Vincent Berenger avenir meilleur Ni fosse ni orchestre pour cette partition « désacralisée » de La Traviata, mais treize acteurs- Lire aussi, dans les numéros 114 29 & 30 mars : Nénesse chanteurs-musiciens qui réenchantent le livre et le et 115 et sur journalzibeline.fr Jean-Louis Martinelli poursuit son compagnonnage roman (extraits) agrémentés d’archives. Avec, en guise Zibeline, informée du départ conjoint de Nathalie avec l’écriture dansante et truculente d’Aziz Chouaki, d’écrin, la mise en scène au cordeau de Benjamin Anton et Christian Tamet de la direction de le « Céline algérois » comme il le nomme, avec cette Lazar, spécialiste du théâtre baroque. Châteauvallon, avait annoncé ce rapprochement farce politique, voire « anthropologique » autour de possible entre les deux pôles en janvier (Zib’114). En février, Zibeline publiait le droit de réponse la figure de Nénesse. Personnage complexe et ambigu 5 & 6 avril : Ludwig un roi sur la lune de Charles Berling et Pascale Boeglin- embringué dans une affaire de sans-papiers qui va Madeleine Louarn brode autour de Ludwig II de Rodier, précisant entre autres qu’ils n’étaient mal tourner… Bavière une « pièce-paysage » composée d’un texte pour rien dans ce départ (Zib’ 115). très dense, de moments dansés, de musique live, en 3 avril : PacifikMeltingPot totale résonance avec le romantisme allemand et le Les yeux et les oreilles ouvertes sur le monde, Régine personnage fantasque dont le règne annonça la fin Chopinot réunit sur le plateau chants, danses et d’un monde. AU PROGRAMME DU MOIS musiques venus de France, de Nouvelle-Calédonie, de Nouvelle-Zélande et du Japon. Une traversée métissée 10 & 11 avril : Letzlove Théâtre Liberté qui lui ressemble, où la présence du corps n’est pas Des échanges entre Thierry Voeltzel et Michel 22 mars : Un faux pas dans la vie d’Emma seulement réservée à la danse. Foucault étaient nés une amitié amoureuse et un Picard livre d’entretiens. Quarante après, la parole libérée Alain Fourneau adapte à la scène le troisième 6 & 7 avril : Verso Medea et libertaire du philosophe résonne au théâtre sous roman de la trilogie de Mathieu Belezi sur l’Algérie, Entre les mains de la metteure en scène Emma Dante, les feux des projecteurs braqués par le metteur en avec Micheline Welter pour porter la parole, crue et la tragédie grecque d’Euripide est transposée dans scène Pierre Maillet qui déjoue la forme classique transgressive, d’Emma Picard. Une femme qui, à la la Sicile contemporaine, accompagnée de chansons de l’interview. (voir aussi p 26). fin des années 1860, se débrouilla avec son époque, en dialecte et d’airs populaires. Apre, puissant, le sa condition, son désir et son Dieu. spectacle irradie de la présence d’Elena Borgogni, 13 & 14 avril : Orphelins et prend les couleurs d’une fête incandescente et Nouvelle venue à Châteauvallon, Chloé Dabert nous 23 mars : Unwanted primitive. fait entrer de plain-pied dans la vie des Orphelins Samedi détente avait déjà fait l’effet d’une bombe, décrite par le britannique Dennis Kelly. La comédie Unwanted aussi qui ne laisse personne indifférent ! 13 & 14 avril : Des roses et du jasmin est noire, l’écriture incisive, le jeu théâtral d’une Créée au Festival d’Avignon 2017, la pièce de Dorothée Histoire et histoires intimes se croisent dans cette précision horlogère. Munyaneza dénonce l’utilisation du corps des femmes épopée contemporaine écrite et mise en scène par dans les combats et les conflits à travers un travail Adel Hakim, interprétée par les acteurs du Théâtre Châteauvallon - scène nationale, Ollioules théâtral et chorégraphique singulier. national Palestinien. Trois tableaux introduits par un 04 94 22 02 02 chateauvallon.com 14 événements Le Train Bleu passe la quatrième

au 15 avril- verra quant à lui se succéder une adaptation de François Rabelais à La Criée (Paroles gelées, mes Jean Bellorini), une lecture de lettres d’amour à la Biblio- thèque départementale, ou encore le Coup de fougue de Generik Vapeur, un « trafic d’acteurs et d’engins » sur le débarcadère de l’Estaque. On pourra aussi découvrir deux expositions à La Friche, où l’œuvre de Carlos Kusnir côtoiera celle de 15 photographes invités à questionner « la jeunesse en France ».

Transports en commun Pour chaque parcours, le tarif de 20 à 40€ comprend les spectacles, repas, visites, tra- jets en bus (pris en charge par la Métropole Aix-Marseille Provence)... ou en bateau ! Comme chaque année, la Région Paca offre la carte Zou ! aux participants du Train Bleu, qui permet de voyager à tarif réduit pendant un an sur son réseau TER. Or le rail est éminemment politique (lire notre article Transportez-moi sur journalzibeline.fr). Le rapport Spinetta, remis D.Quixote, Andres Marin © Benjamin Mengelle récemment au gouvernement, préconise de e 4 édition pour le Train Bleu, festival itinérant porté fermer les petites lignes peu fréquentées et donc non rentables. Le Petit Train de la Côte par 13 structures culturelles de premier plan sur le Bleue, soit celui qui va de l’Estaque à Miramas territoire provençal (lire notre article sur la commémoration de son centenaire en 2015 sur journalzibeline. e six jours pour la 3e édition, le Train Siska à l’Usine, et une randonnée emmenée fr), devrait perdurer, après rénovation. Mais Bleu passe à neuf cette année, répartis par le Bureau des Guides du GR2013. Le Philippe Maurizot, représentant de la Région Dsur trois week-ends. Le directeur des dimanche, le Théâtre Nono (nouveau parte- Paca lors de la conférence de presse du Train Salins, scène nationale de Martigues, à l’origine naire du Train bleu) présentera son « urgence Bleu, n’exclut pas « qu’il soit privé l’an pro- -avec La Criée, le Sémaphore, l’Olivier et du moment » : l’Opéra Barokko, sous forme chain ». La collectivité, dont les relations avec le Théâtre de Fos- de ce projet collectif né en d’étape de travail (voir p.61). la SNCF sont particulièrement tendues, vient 2015, prévoit « une édition exceptionnelle ». Théâtre et danse seront au menu du week- de lancer un appel à manifestation d’intérêt Pour Gilles Bouckaert, le partenariat noué end suivant, du 6 au 8 avril : un Roméo & pour ouvrir ses TER à la concurrence. Pour le avec MP2018 a été décisif, permettant une Juliette « resserré autour de l’histoire d’amour », Conseiller régional, « on peut imaginer que dilatation temporelle et géographique de la mis en scène par Anthony Magnier au cela ne soit pas complètement négatif... ». Ne manifestation. Raymond Vidil, président Sémaphore ; un projet d’Alexis Moati inspiré serait-il pas pleinement convaincu ? de MP Culture*, se déclare séduit par l’idée par le film de Sidney LumetÀ bout de course à Et quid de la manifestation, dans ces d’itinérance qui a prévalu à la création du La Criée (voir p.16) ; et le maître du flamenco, conditions ? Train Bleu, et représente « tous les territoires, Andrés Marín, qui se confrontera (jusque sur GAËLLE CLOAREC toutes les disciplines ». Il est vrai que la pro- un skate-board !) à Don Quichotte aux Salins. grammation, déjà riche, s’étoffe encore. Le dimanche, direction l’Étang de Berre, avec * L’association MP Culture pilote MP2018 des étapes à l’Estaque (pour un concert de sur le territoire Aix Marseille Provence 9 parcours l’Ensemble Télémaque au Pic), à Vitrolles Le week-end du 30 mars au 1er avril commen- (une chorégraphie plongée dans des billes de cera à Martigues, puis Istres et Port-de-Bouc, polystyrène par la Cie Eponyme, au Domaine pour finir à Marseille. Il fera la part belle à de Fontblanche), à Saint-Chamas, où le des artistes locaux : Kubilai Khan Inves- circassien Mathurin Bolze évoluera dans tigations avec leur chorégraphie Black Belt le Parc de la Poudrerie, et enfin à Miramas (aux Salins), la création du metteur en scène où le Théâtre La Colonne accueillera un Le Train Bleu 30 mars au 15 avril Vincent Franchi Sémaphore , Orphelins (au ), programme musical centré sur Antonio Vivaldi Istres, Miramas, Martigues, Marseille, Port-de- qui interroge la de justice dans notre et Astor Piazzolla. Bouc, Ensuès-la-Redonne, Saint-Chamas, Vitrolles Europe en crise, un concert en accès libre de Le week-end de clôture -à Marseille, du 13 letrainbleu.net 15

walk ! Les danseurs et chorégraphes Ashley Chen et Philip Connaughton font face à l’adversité et à l’obstruction dans Whack !!, l’un et l’autre empêchés, tantôt adversaires tantôt compagnons, pour dénoncer l’absurde rivalité des adultes qui régit leurs relations. Au Pays-Bas, Arno Schuitemaker est une figure incontournable de la danse, réputé pour ses performances « hautement physiques et rigoureusement conceptuelles ». Klap Maison pour la danse permet au public marseillais de le découvrir et d’expérimenter ensemble le voyage hypnotique de While we strive. Le corps mis en jeu et ses multiples représentations sont au cœur des recherches d’Alexandra Bachzetsis et de son solo Private : wear a mask when you talk to me sur la fabrication des désirs sexuels et du genre. Autre approche du corps avec Camille Mutel qui, délais- sant les habits d’interprète, guide les artistes vers une performance rituelle où dialoguent nudités et costumes (Animaux de béance). Le performeur grec Euripides Laskaridis conjugue mythologies et actualités, tragédie et comédie, et s’affranchit totalement de la question du genre : dans Titans, l’Olympe est un monde cosmique et chaotique peuplé de personnages anthropomorphes, d’ombres et de masques… + de Genres, c’est aussi des artistes qui explorent le lien entre le père

Put your heart under your feet… and walk ! de Steven Cohen © Pierre Planchenault et son enfant, les notions d’autorité et de dépendance (Des gestes blancs de Sylvain Bouillet avec Charlie Bouillet) ; dansent Hymne à la liberté à contre sens de la bien-pensance en com- binant métaphore, référence historique, littérature médiévale pour développer une À Klap, + de Genres fait la question du genre n’est pas le domaine réflexion digressive queer Le( corps du roi réservé de la psychanalyse, de la sociologie de Matthieu Hocquemiller) ; interrogent entrer en résonance des ou de l’anthropologie : il est aussi celui des la féminité à travers la réinterprétation d’une œuvres engagées, hors artistes auxquels Klap Maison pour la danse* matière originelle (le solo Woman créé par se fait l’écho. Son temps fort + de Genres Andreas Constantinou porté, ce jour-là, normes, décalées ou « témoigne en quelques coups de poing des par Alice Tatge) ; livrent leur expérience subversives ; des œuvres introspections subtiles d’artistes et perfor- amoureuse personnelle, explorent tabous et meur-se-s qui ne craignent pas de présenter cicatrices en racontant des endroits intimes militantes et vibrantes l’humanité en écorché anatomique ». de leur corps (Embrase-moi de Kaori Ito et Questionner les frontières du genre, les Théo Touvet). Ou qui puisent à la source d’humanité. Et détisse différenciations de genre, les stéréotypes des contes et usent de subterfuges, comme l’écheveau du genre de sexe, telles sont quelques-unes des Michel Kelemenis dans La Barbe bleue, réflexions qui sous-tendent les pièces des afin de renverser les codes de la morale. artistes nationaux et internationaux invités. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI ans son étude La question du « genre » ou la Dans ses créations provocatrices et anti- * certains spectacles sont programmés avec Le défaite de l’homme hétérosexuel en Occi- conformistes, le plasticien-chorégraphe-per- Merlan scène nationale de Marseille (Ashley Chen et Ddent, le psychanalyste Jacques Arènes formeur sud-africain Steven Cohen (lire Philip Connaughton, Alexandra Bachzetsis, Camille explore la « problématique de la gender theory notre critique sur jounalzibeline.fr) interroge Mutel) et le théâtre Joliette (Michel Kelemenis). [qui] a glissé du refus du monde patriarcal au son identité de « monstre homosexuel juif et rejet du modèle hétérosexuel. La revendication blanc » dans la société postapartheid. Son d’égalité entre sexes, se déployant sur un travail est déclaré immoral dans son pays, + de genres registre classique de différenciation assez alors il se bat pour l’égalité, et célèbre son 17 mars au 19 avril claire de sexes, fait place progressivement amour disparu en produisant « un art vital », la Klap Maison pour la danse, Marseille à une logique de l’indifférenciation ». Mais danse : Put your heart under your feet… and 04 96 11 11 20 kelemenis.fr 16 événements

La Criée accueille la Cie Vol Plané et son projet Dans l’intimité d’un Une famille innocente ? héritage politique Quatre courtes pièces que nous présente Alexis Moati, metteur en scène et directeur de la Cie

Zibeline : D’où est né ce projet ? Alexis Moati : Lorsque nous étions artistes associés à Chalon-sur-Saône on m’a demandé de travailler à l’adaptation d’un film au théâtre. Il y avait ce film qui m’a beaucoup marqué,À bout de course de Sidney Lumet1, qui met en jeu la notion d’héritage, de ce qu’on fait de ce qu’on nous a transmis, thèmes qui me sont essentiels. Pour commencer le processus de création2, et pour qu’ils s’approprient le sujet, j’ai demandé aux acteurs de la compagnie de s’emparer de certains des thèmes du film, avec un cahier des charges à respecter : travailler Le projet Antigone © Vinvent Beaume à la Gare Franche ou dans le 15e arr., prendre le bonheur de se retrouver malgré la cavale. de Sophocle, dans la traduction de Florence au minimum une personne du Groupe des Pierre Laneyrie, Chloé Martinon et Arthur Dupont, de Brecht, d’Henry Bauchau, et des 153, utiliser la Sonate dite « pathétique » de Verret ont retravaillé la scène à partir d’un leurs. C’est une création collective qui interroge Beethoven, très présente dans le film, et col- texte de Nathalie Sarraute tiré de Enfance, sur aussi la loi religieuse et les lois de la Cité. laborer avec quelqu’un d’extérieur au projet. la mémoire. Presque tout le Groupe des 15 y PROPOS RECUEILLIS PAR DOMINIQUE MARÇON Ce sont ces laboratoires de recherche, devenus joue, d’autres personnes et un enfant, devenu 1 Le fils aîné d’un couple d’activiste contre la guerre des petites formes latérales autonomes, que le personnage principal, contrairement au film. du Vietnam, en fuite après avoir posé une bombe nous présentons. Un point de vue qui permet de remonter le dans une usine de napalm et tué un des gardiens, Soit quatre formes, présentées succes- temps, une fois l’enfant devenu adulte. Cette se résoudra-t-il à les quitter pour construire sa vie ? sivement dans des parcours différents. forme irriguera le spectacle final. 2 La pièce s’intitulera Happy Birthday, Sam ! et Pouvez-vous les détailler ? La 3e, Good morning, s’attache au passage du sera créée à Chalon-sur-Saône en septembre Chronologiquement nous avons commencé militantisme à la lutte armée. Dans le film la réfé- 2018 pour l’ouverture du nouveau théâtre 3 par Do it : portrait de l’auteur en basket, com- rence c’est le groupe militant révolutionnaire Projet inventé par la Cie Vol Plané pour la Gare Franche, le Groupe des 15 est constitué d’une mande à José Amerveil et moi-même. Nous Weather Underground, et le couple Bill Ayers vingtaine de jeunes, des quartiers Nord et sommes partis de deux scènes du film : celle et Bernardine Dorn partis en cavale avec leurs d’ailleurs, associés à la vie de la Cie dans un de l’anniversaire, et celle du départ du fils ; et deux enfants. Ils voulaient vraiment renverser échange permanent avec l’équipe et ses créations du livre de Virginie Linhart Le jour où mon père le gouvernement américain à la fin des années s’est tu, qui explique que les enfants de 68 60 et ont choisi la clandestinité. Et pour ouvrir sentent qu’ils ont un héritage, fondateur, mais la pièce sur cet héritage politique, Carole qu’ils ne savent pas ce qu’ils doivent accepter, Costantini et Fanny Avram ont fait appel Une famille innocente ? 7 avril Thomas Fourneau rejeter ou transmettre. Et d’une idée simple, à pour la vidéo et le son. 3 parcours : courir jusqu’à bout de course. La dizaine de Dans leur installation il y a notamment une radio Do it (13h45)/Good morning (14h30)/De(s) textes parlent de mon enfance, de mes parents, pirate, qui émet des sons de personnes ayant composition (15h15) dans le cadre du Train Bleu et de mon père plus particulièrement. À partir existé (Ulrike Meinhof, Weather Underground, Good morning (16h15)/ Do it (17h)/ de photos, de souvenirs, j’ai travaillé sur la Brigades rouges italiennes…) et leurs textes. De(s)composition (17h45) Do it (20h)/Good morning (20h45)/ mémoire. José a sonorisé le tapis de course qui Quant à la 4e forme, , c’est une surprise ! In Vivo De(s)composition (21h30) devient une machine à remonter le temps et se Dans le décor de De(s)composition, donc dans transforme au fil de la performance. Avec nous une maison, l’idée est de montrer le quotidien 13 avril il y a Warda Rammach, comédienne, et Léna d’une famille qui a un secret... 4e parcours : Chambouleyron, musicienne, qui ont créé Vous jouerez aussi Le projet Antigone De(s)composition (19h)/In Vivo (20h30) quatre morceaux de musique qui évoquent mon avec le Groupe des 15 ? adolescence, l’adolescence de mes parents, C’est encore la famille qui est au cœur du Le Projet Antigone 14 avril la jeunesse de mon grand-père et Bob Dylan. projet, mais la plus compliquée qui soit : Les La 2e forme, De(s)composition du bonheur en Atrides. On a travaillé sur Antigone l’année La Criée, Marseille famille, part de la scène d’anniversaire qui dit dernière tous ensemble, à partir de textes 04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com Le Toursky à l’heure russe

e Festival russe du Toursky fête sa 23e édition. Il conjugue toujours avec la même énergie théâtre, musique, cinéma, et ajoute Là ses qualités celle, éducative, de se lier (à nouveau) avec le 6e Festival des Centres Russes de l’enseignement extrascolaire pour enfants, organisé par l’association Perspective qui cherche à promouvoir le bilinguisme des enfants d’origine franco-russe, la culture slave et la pratique artistique. Les ateliers et animations (théâtre de marionnettes, initiation aux instruments russes tradi- tionnels, aux chants, aux danses) seront suivis d’un grand gala des centres extrascolaires russes hexagonaux et européens, au cours duquel l’on pourra applaudir performances musicales et dansées. La musique sera reine, comme tous les ans lors des cabarets russes après les spectacles, prolongation conviviale de la fête. Deux formes seront proposées, l’une sera animée par la troupe du Théâtre de la comédie N.P.Akimov, atmosphère saint-pétersbourgeoise au programme, festive et joyeuse, l’autre permettra de découvrir Héléna Maniakis qui mêle culture grecque, arménienne et amour Le projet Antigone © Vinvent Beaume de la langue russe et interprète, accompagnée de Dario Ivkovic et Branislav Zdravkovic, des chansons passant des répertoires tziganes, révolutionnaires aux textes bouleversants de Vissotski. Le pôle cinéma est toujours d’une belle et éclectique richesse, essentiellement composé cette année, à l’exception de Morozko d’Alexandre Rou (1964), de films récents ; on se laissera emporter par l’épopée d’Andreï Konchalovsky, Paradis (2016), l’émotion du Prix François Chalais, Le disciple (Kiril Serebrennikov, 2016), le

thriller, prix de l’Aigle d’Or à Moscou et grand prix du Festival russe ASPAS ASSOCIATION SOLIDARITÉ PROVENCE AMÉRIQUE DU SUD de Paris 2017, La dame de Pique de Pavel Lounguine (2016), et enfinMatilda d’Alexei Uchitel (2017). S’inscrivant dans la lignée de l’arroseur arrosé, la pièce de Nicolas Gogol, Les Joueurs, est présentée par le Théâtre de la comédie N.P.Akimov, pour la première fois au Toursky, dans la mise en scène de Tatiana Kozakova. L’intrigue, riche en rebondissements aborde le monde avec une ironie caustique et connaît une chute étonnante. Clou du festival, la création de l’Histoire du soldat de Ramuz, adapté librement par Marianne Sergent, mis en scène par Richard Martin et dirigé par Jean-Philippe Dambreville. Pourquoi dans le festival russe ? La pièce fut créée il y a cent ans (1918) par Georges Pitoëff. Un bijou musical et une histoire intemporelle à savourer ! MARYVONNE COLOMBANI 20 ans qui ont libéré des rêves et des réalités

¡ 20 años desatando Festival russe sueños y realidades ! 20 mars au 8 avril Théâtre Toursky, Marseille ES 04 91 02 54 54 toursky.fr 20 © X-D.R Les joueurs © X-D.R RENCONTRES DU CINEMA SUDAMERICAIN 23 AU 31 MARS 2018 MARSEILLE CINÉMA LE GYPTIS WWW.CINESUDASPAS.ORG FRICHE LA BELLE DE MAI GRAND PLATEAU T. 09 80 78 01 53 ET EN AVRIL DANS 15 VILLES DE PACA

A SSOCIATION S OLIDARITÉ PROVENCE A MÉRIQUE DU SUD 18 événements Danses nomades à Draguignan

our sa deuxième édition, le festival Chaillot à l’automne dernier. Avec la pièce L’impruDanse se déploie dans la cité engagée du chorégraphe israélien Hillel Pdracénoise pour cause de travaux au Kogan, We Love Arabs, interprétée avec théâtre, irriguant ainsi la danse à l’auditorium le danseur arabe Adi Boutrous, véritable du Pôle culturel Chabran, à la Chapelle de autofiction décalée au propos provocateur et l’Observance et au complexe Saint-Exupéry. drôle. Avec no.W.here de Frank Micheletti, Les arts du mouvement en mouvements, voilà vertigineux duo porté par Viktoria Anders- qui n’est pas pour déplaire ! L’ouverture le 3 son et Sara Tan aimantées par le mouvement avril se fera sous le signe du cinéma, comme et la composition sonore du chorégraphe et l’an dernier, avec la projection du film de de Jean-Loup Faurat. Avec la playlist rock Thierry Demaizière et Alban Teurlai, ultra-féminine de Jean-Claude Gallotta, My Relève, histoire d’une création, qui ausculte Ladies Rock, chorégraphiée en hommage aux le processus de création du ballet Clear, Loud, figures incandescentes passées et présentes de Bright, Fonward de Benjamin Millepied. la scène internationale, patchwork énergique Phasmes, Fanny Soriano © Tom Proneur Après cette immersion au plus près du travail et émouvant de pièces dansées et d’images créatif de l’ex-directeur du ballet de l’Opéra allégrement contées par le chorégraphe. intime et mystérieuse ; Fanny Soriano pour de Paris, place à la danse au plateau avec Le festival L’impruDanse se plaît à flouter les deux courtes pièces au langage très person- la version inédite et singulière de Don Qui- frontières entre la danse, le théâtre et les arts nel autour d’un corps-matière malléable et chotte par le chorégraphe espagnol Andrés du cirque en conviant Christophe Garcia métamorphosable (Hêtre et Phasmes). Autant Marin, profondément habité par le héros pour une partition jouée et dansée aussi vive de chemins de traverse imprudents parfaite- chevaleresque de Cervantès au point de le et colorée que l’été (Lettre pour Éléna écrit ment contrôlés par Maria Claverie-Ricard, réinventer. De le personnifier, peut-être, d’une par Érika Tremblay-Roy) ; Romain Bertet directrice de Théâtres en Dracénie, curieuse manière contemporaine, troquant cheval et plongé dans un corps à corps physique et d’une danse plurielle, ouverte aux autres arts, épée pour des rollers et des gants de boxe symbolique avec la matière, englouti par l’argile aux autres disciplines et aux autres formes. dans D. Quixote créé au Théâtre national de et la lumière dans … de là-bas, performance Et soucieuse de donner la danse en partage

Venir d’ailleurs, écrire en français haque mois, les Nouvelles Hybrides Copernic (1994-95) puis en Provence (1998), permettent de découvrir de nouveaux d’abord écrivain d’expression tchèque, elle Cauteurs aux voix singulières et pertinentes. publie son premier roman directement écrit Après la plasticienne des mots, orfèvre des en français en 2016 (Giboulées de soleil). langages, Pascale Petit (voir p.47), cette La dernière par choix, les deux autres par vivante association nous conduit à rencontrer nécessité, ces trois auteurs vivent en France Laura Alcoba, Velibor Čolič et Lenka et en ont adopté la langue pour composer Velibor Colic © C. Hélie - Gallimard Velibor Horňáková-Civade, qui ont pour point leurs œuvres. Bernard Magnier, journaliste commun d’être des auteurs en langue fran- et directeur de la collection Lettres africaines çaise, qui pour tous les trois est leur langue (Actes Sud), animera une table ronde les réu- d’adoption. Laura Alcoba, écrivain, traductrice, nissant. La question essentielle réside dans maître de conférence à l’université Paris Ouest ce choix de la langue, nouvelle pour chacun Nanterre, est d’origine Argentine, a rejoint d’entre eux : « nouvel espace de liberté », la France à l’âge de dix ans ; Velibor Čolič refondation de soi, distanciation nécessaire est journaliste, critique musical, écrivain, à l’écriture, manière d’être plus pertinent en constatant les atrocités commises dans les appréhendant le monde d’un ailleurs ? Ou « zones ethniquement purifiées », il a déserté est-ce un « exil dans l’exil » par l’abandon l’armée bosniaque, et trouvé refuge en France de la langue maternelle en même temps que (1992) ; Lenka Horňáková-Civade, peintre, celui du pays d’origine ?. Bernard Magnier écrivain, est née en République Tchèque, elle abordera, lors d’une conférence à travers les s’installe d’abord à Paris où elle complète œuvres d’écrivains nés à l’étranger et qui ses études dans le cadre du Programme ont contribué à l’enrichissement des lettres 19 Marionnettes et fières de l’être

’est une 4e édition enthousiasmante de la Un quatuor de marionnettistes, dirigé par Semaine de la marionnette qui se pro- Sylvie Osman, leur donnent vie. Cfile à Mougins ! À fils, en ombres portées, Pour les plus jeunes le programme est tout à gaines, sur baguettes… elles seront de tous aussi alléchant ! C’est dans Le ciel des ours les styles, matières et formes, témoignant de que nous convie la Cie italienne Teatro la diversité de cet art fascinant qui fait aussi Gioco Vita ; entre théâtre d’ombres et danse, montre de constructions scénographiques deux histoires se croisent : celle d’un ours épatantes. En ouverture de cette Semaine qui cherche à devenir papa, et celle d’un (qui s’étale cette année du 7 au 19 avril), deux ourson attristé par la mort de son grand-père. merveilles du genre : Stalingrad et Ramona, C’est dans le ciel que l’un et l’autre tournent spectacles du Théâtre Gabriadze, l’une leur regard et cherchent des réponses. Sur le des formations de marionnettes à fils les plus thème de la différence et de l’acceptation de réputées que l’on doit à son fondateur, le soi et des autres, deux compagnies présentent Géorgien Rezo Gabriadze. Des figurines au des spectacles sensibles et poétiques : le Phasmes, Fanny Soriano © Tom Proneur décor, du texte à la mise en scène il crée des théâtre de papier de la Cie Balsamique à l’occasion d’un workshop dirigé par Cécile univers poétiques infiniment humains, chaque Théâtre accompagne Le vilain petit canard Renard, danseuse de la compagnie de Jean- détail révélant partout le merveilleux. Dans sur un chemin semé d’embûches en quête de Claude Gallotta, et de rencontres-débats avec Stalingrad il est moins question de la bataille créatures lui ressemblant ; la Cie Marizibill, les artistes à l’issue des représentations. du même nom que de la vie d’êtres ordinaires elle, s’attache aux pas d’un drôle de petit MARIE GODFRIN-GUIDICELLI s’efforçant de vivre durant ce siège. Petite et bonhomme pas comme les autres, Anatole, grande histoires s’entremêlent dans ce conte et de son encombrante casserole qui le suit sur fond de chaos, d’amour et d’espérance. Sa partout. Les marionnettes de Francesca Festival L’impruDanse 3 au 7 avril dernière création, Ramona, est une histoire Testi, très expressives, disent avec finesse Théâtres en Dracénie, Draguignan d’amour qui a pour protagonistes deux loco- sa solitude et sa détresse, mais aussi sa force 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com motives que les aléas des aiguillages séparent de caractère et son ouverture au monde. et contrarient, mais qu’un petit cirque et sa C’est Guignol qui clôturera les réjouissances. troupe d’acrobates vont réunir... (Les deux Ou plutôt Cyrano-Guignol de Bergerac, revisité spectacles sont joués en russe et en géorgien, par Albert Chanay ! Tout y est, les envolées surtitrés en français). lyriques, la bravoure, et la tirade du nez (si ce Avec son Passager clandestin, la Cie Arketal n’est qu’il n’en n’a pas, lui, de nez)... et tout adapte le texte de Patrick Kermann, The Great est mené de main de maître par Guignol, disaster, l’histoire d’un berger italien en quête Gnafron et leurs amis, manipulés par Julie françaises (Ionesco, Beckett et tant d’autres), de travail, rêvant d’un destin américain, qui Doyelle et Alexandre Chetail. cette relation charnelle et conflictuelle avec la sera engagé clandestinement en tant que DOMINIQUE MARÇON langue adoptée. Deux rencontres complèteront plongeur sur le Titanic, et y périra. Revenu cette passionnante approche, une séance « À du fond de l’océan, il va mêler sa voix à celle avec Laura Alcoba entre lecture de ses compagnons d’exil et raconter en haute voix » Semaine de la marionnette de passages de La Danse de l’araignée par filigrane l’histoire du XXe siècle, et celle de 7 au 19 avril Pauline Huruguen, et discussion menée tous ceux qui, fuyant la guerre ou la misère Scène 55, Mougins par Christiane Dumoulin, et une Ren- mettent leur vie en péril, en meurent parfois. 04 92 92 55 67 scene55.fr contre avec Velibor Čolič animée par Bernard Ramona, Rezo Gabriadze © Christophe Raynaud De Lage - Avignon 2017 Magnier et des lectures de Jean-Marc Fort. Ironie, poésie, fantaisie, humour, tour à tour se déclinent pour livrer avec acuité récits d’enfance, de dictature, de conquête de la liberté… au cœur des pages. MARYVONNE COLOMBANI

6 & 7 avril Bibliothèque, Ansouis Médiathèque, Pertuis Médiathèque, Saint-Saturnin-les-Apt 04 90 08 05 52 lesnouvelleshybrides.com 20 événements Festival de Pâques « L’excellence pour tous, sans élitisme », tel est le principe majeur du Festival de Pâques énoncé par ses fondateurs, Dominique Bluzet et Renaud Capuçon

e festival prend son allure de croisière, Le Guay dans la Sonate pour piano n° 11 et attire pour sa 6e édition les formations en la mineur (alla Turca) et la Fantaisie en L les plus prestigieuses au monde : Lon- ré mineur de Mozart, le violon de Vadim don Symphony Orchestra, la Camerata Gluzman en formation de quintette, le Khatia Buniatishvili © Caroline Doutre de Salzburg, l’Orchestre National de piano de Yefim Bronfman, l’ensemble Les Pâques obligent, de grandes œuvres sacrées France, le Luzerner Sinfonieorchester, Surprises (Juliette Hurel à la flûte et la tiennent une place centrale : La Passion selon Insula Orchestra Accentus, la Deutsche soprano Maïlys de Villoutreys), les violons Saint-Jean de Bach sera portée par l’ensemble Kammerphilharmonie Bremen, le Quatuor de Vladimir Spivakov, Véronika Eberle... Pygmalion dirigé par son fondateur Raphaël Hagen, l’Orchestre National de Russie, Le violoncelle de Truls Mørk rejoindra le Pichon et la Grand-Messe en ut mineur de le Wiener Staatsoper, sans compter les Luzerner Sinfonieorchester sous la houlette Mozart dirigée par Laurence Equilbey. L’art solistes les plus doués de leur génération, durant de James Gaffigan, tandis que Francesco lyrique est aussi à l’honneur, que ce soit avec les deux semaines de cette manifestation Piemontesi sera aux côtés de l’Orchestre la version de concert de l’opéra mozartien, éclectique. En effet, le contenu s’attache à National de France dirigé par Emmanuel Le Nozze di Figaro, ou des airs de Ravel, s’ouvrir à la création contemporaine autant Krivine dans les Variations Symphoniques pour Fauré, Hahn, Rossini, par la mezzo-soprano qu’à l’interprétation des « classiques ». On aura piano et orchestre de César Franck. Renaud Catherine Trottmann accompagnée par ainsi la possibilité d’entendre des pianistes Capuçon quant à lui dirigera depuis son violon le piano de Karolos Zouganelis. On aura d’exception : Sir András Schiff (aussi à la virtuose la Camerata de Salzburg et jouera le privilège de pouvoir assister à une mas- direction de la Capella Barca qu’il a fondée), des œuvres de Paul Ben-Haim et de Mozart, ter-class du violoniste Gérard Poulet, de Lucas Debargue, Khatia Buniatishvili accompagné de l’alto de Gérard Caussé ; se familiariser avec le travail du compositeur accompagnée de la flûte d’Emmanuel Pahud, auparavant, lors de la soirée d’ouverture, il aura contemporain Éric Tanguy. Une page sera Sergei Bezrodny, ainsi que Claire-Marie suivi le chef François-Xavier Roth. Fêtes de laissée à la toute jeune génération, avec la

Toujours plus de femmes

our sa 8e édition, le Festival Pré- Lili Boulanger où seront jouées des sences Féminines, fidèle au pièces de la compositrice trop tôt Pcredo de sa directrice artistique disparue mais aussi de sa sœur Nadia Claire Bodin, se propose une nouvelle et de Camille Pépin, marraine de la fois d’essaimer, du 23 au 30 mars, à précédente édition. Le Théâtre Marc travers le territoire de la communauté Baron de Saint-Mandrier réunira un d’agglomération Toulon Provence duo mixte composé de Marie Van Méditerranée des concerts, ainsi Rhijn au clavecin et du danseur que des conférences, des rencontres, Pierre-François Dollé pour un des Master class et quelques levers hommage contemporain autour de rideau pour mettre à l’honneur le de Suites de danse baroques de la parcours de femmes compositrices. désormais célèbre Elisabeth Jacquet La qualité artistique de la program- de la Guerre (le 25). mation sera à la hauteur de l’enjeu Temps fort de cette programmation, et convoquera pour l’occasion des la Marraine de l’édition, Tiziana De figures emblématiques du répertoire, Tiziana de Carolis © Bruno Mazodier Carolis, sera à l’honneur du concert mais aussi de nouvelles venues, le tout servi Sirmen, Laura Aulin Valborg et Iris Szeghy à l’Espace des Arts du Pradet (le 27), ainsi que par de fidèles interprètes, habitués du festival en traversant les époques et les esthétiques lors d’une rencontre au Café culture (le 23) comme novices. (23 mars au Musée National de la Marine à et au Théâtre liberté à Toulon (le 28). L’heure Pour le concert d’ouverture, en partenariat avec Toulon). C’est le Foyer Campra de l’Opéra exquise sera donnée en création mondiale le Festival belge Europart, les 4 musiciennes de Toulon qui accueillera le lendemain une en hommage à Irène Régine Poldowski, du Quatuor Alcea interpréteront pour leur conférence et un trio d’exception composé dont on entendra également 22 mélodies première participation, et en guise d’inédit, d’Anne Le Bozec, Olivia Hugues et Marion sur les textes de Paul Verlaine et l’andante des œuvres de Maddalena Laura Lombardini Grange pour un voyage Dans les jardins de languido extrait de la Sonate pour violon et 21 ZAT is beautiful

es ZAT se suivent et ne se ressemblent pas, leurs histoires, familiales, légendaires, vraies ou c’est ce qui fait tout le piquant de ces Zones fausses, un poème… Dans le Parc à Palabres LArtistiques Temporaires, initiées par la Ville (Parc de La Rauze), 33 arbres abriteront leurs de Montpellier et Pascal Lebrun Cordier, dont récits, et Jean Guillon, conteur, animera des Pierre Sauvageot et ses Lieux Fictifs (Mar- ateliers en amont de la ZAT pour les volontaires. seille) reprennent les rênes pour la troisième fois. Trois spectacles déambulatoires, là encore, Onze lieux montpelliérains ont déjà été inves- pénétreront les lieux à travers des entrées

Khatia Buniatishvili © Caroline Doutre tis, et cette année, ce sera le quartier Près subjectives et suggestives. 1789 secondes violoniste et compositrice Alma Deutscher, d’Arènes qui accueillera cette manifestation (CIA - Cie Internationale Alligator) née en 2005, « nouveau Mozart de l’opéra », aux festive, gratuite, inventive, qui toujours draine embringuera les passants dans une Histoire côtés d’Anastasia Kobekina (violoncelle) un public curieux et complice. Pendant deux pleine de questions sur la Liberté, l’Égalité, et Jérôme Ducros (piano). Enfin, la soirée jours, on est invité à redécouvrir un espace et la Fraternité, où chacun est citoyen plus de clôture rendra hommage aux immenses montpelliérain, à l’arpenter, à le voir sous un que spectateur. Les Arts Oseurs, avec Les musiciens que sont Martha Argerich (piano), angle inattendu, à croiser ses habitants, à tondues, rappelleront que sous les pavés, Kian Soltani (violoncelle), Daniel Barenboim mélanger les histoires de vie et de scène. La il bien autre chose que la plage : un passé (piano) et Renaud Capuçon (violon). Festival ZAT propose une incursion sensible dans les enfoui, celui de ces 20 000 femmes qui entre de dimension internationale, assurément ! quartiers Celui de Près d’Arènes n’est pas 1941 et 1946 furent tondues sur les places MARYVONNE COLOMBANI inscrit dans les guides touristiques. C’est publiques, devant des habitants avides de un lieu hétéroclite, entre zone commerciale, vengeance et de spectacle… Le regard en rond point monumental et petites enclaves biais (Cie La Hurlante) plonge la rue dans pavillonnaires. Difficile à cerner. C’était le défi les failles mentales, la différence, le décalage. Festival de Pâques de Pierre Sauvageot pour cette 12e édition : L’historique Théâtre de l’Unité propose 26 mars au 8 avril GTP, Jeu de Paume, Conservatoire « attraper » cet espace, faire sens en le reliant une Nuit unique au gymnase Saint-Martin : , Aix-en-Provence aux quartiers mitoyens. couchés dans des lits, les spectateurs, entre 04 42 91 69 69 festivalpaques.com Il a ainsi demandé au metteur en scène britan- sommeil et veille, navigueront parmi théâtre nique Julian Maynard-Smith de concevoir et littérature. Tandis qu’à la piscine Suzanne l’un de ses parcours de Dominoes, une ligne de Berlioux, Ludovic Nicot dirigera un concert blocs en siporex, déposés par les habitants pen- subaquatique. Maillot de bain requis. Il y aura dant trois jours, qui parfois passe par l’intérieur aussi un match de foot à 4 équipes (Véronika des maisons, les terrasses de café, dessinant Tzekova), une fête au Parc de la Rauze (Rara un chemin sculptural, fragile et magique à Woulib avec le JAM et Figuenotes)… travers la ville. Jusqu’à sa mise en vie et mort, Près d’Arènes : the place to be. piano arrangées par David Jackson pour lorsqu’à la fin de la ZAT le premier domino ANNA ZISMAN un ensemble violon-contrebasse-piano et sera couché sur le deuxième, qui fera chuter ZAT voix de soprano. le troisième, et ainsi de suite… Frissonnement 14 & 15 avril Dans une veine plus chambriste le théâtre de ce serpent urbain et communautaire. quartier Près d’Arènes, Montpellier Marelios à La Valette accueillera le duo vio- Les habitants sont aussi invités à raconter zat.montpellier.fr loncelle-piano Marie Ythier et Jonathan Fournel dans un programme post-romantique de sonates d’Ethel Smyth et Dora Pejacevic, et plus contemporain autour de Kaija Saariaho (le 29). Pour la clôture au Théâtre Liberté, les habi- tués Anne Baquet (soprano) et Damien Nédonchelle (piano) inviterons les festivaliers à une pétillante flânerie musicale dans un pro- gramme d’œuvres exclusivement composées par une dizaine de femmes issues d’univers 1789 secondes © Jean-Alexandre Lahocsinszky différents, qu’il s’agisse de la musique savante ou de la chanson française (le 30). ÉMILIEN MOREAU

Présences Féminines 23 au 31 mars Toulon, Le Pradet, Saint-Mandrier, La Valette 06 13 06 06 82 presencesfeminines.com 22 événements Algérie et Comores au Mucem

© Pascal Grimaud Le Musée des civilisations de l’Europe et de la institutions patrimoniales s’y prennent pour conserver les habitats, ou plus précisément Méditerranée axe sa programmation de printemps la façon dont les habitants les occupent à sur la colonisation travers les âges. Le 29 mars, dans le cadre du cycle Représentations fictionnelles au regard de l’archive, on pourra assister Expositions et temps forts marseillais. Au programme, des documentaires à un atelier sur la fiction en tant qu’outil et Outre les Voyages imaginaires de Picasso radiophoniques réalisés par la journaliste Anne l’imaginaire comme domaine de recherche, et L’Amour de A à Z (lire p. 88 et 89), et en Pastor, les somptueuses photographies de avec deux artistes : Leandro Nerefuh et attendant la prochaine exposition du Mucem, Pascal Grimaud (séries Filles de Lune et Sophia Al-Maria. Le premier sera également consacrée à l’or, il est encore temps d’aller Territoires d’outre-tombe), des contes musicaux invité, les 30 et 31 mars, à revisiter les concepts voir Roman-photo, jusqu’au 23 avril (lire notre collectés par Jorus Mabiala, ou encore un de colonisation et décolonisation... voire les critique sur journalzibeline.fr). De même que concert d’Ahamada Smis (afro-soul). Mais formes de recolonisation qui apparaissent (La Connectivités, dans les espaces semi-permanents aussi des tables rondes consacrées à l’actua- découverte de l’Amazonie par les Turcs enchan- du musée (à lire aussi sur journalzibeline.fr) : une lité des Comores, territoire scandaleusement tés, en partenariat avec le Théâtre de la Cité). Nuit vernie sera consacrée à cette vision négligé par la France, qui prévoit malgré tout Par ailleurs le Mucem reconduit son partenariat « braudelienne » des cités méditerranéennes, d’ouvrir un musée de société à Mayotte. avec La Cité de la Musique, pour renouveler le 6 avril, avec comme à l’accoutumée sur ce le cycle Algérie-France, la voix des objets, dispositif une visite nocturne, et de la musique Conférences et ateliers qui mêle tables rondes et installation à partir (cette fois, un DJ set proposé par le festival Alphabetville, le laboratoire de recherche de la collection du Musée d’histoire de la arlésien Les Suds). Autour des expositions, des et d’expérimentation sur les écritures et les France et de l’Algérie, projet abandonné par la ateliers et parcours spécifiques sont prévus médias de La Friche, invite à une réflexion sur ville de Montpellier en 2014. Trois rencontres pour le jeune public : lors des dimanches la violence de notre temps, à partir des œuvres sont prévues, avec à chaque fois une première d’avril (8 et 15), les enfants à partir de 7 ans de Walter Benjamin. Le philosophe Bernard partie musicale en lien avec la thématique : pourront fabriquer leur propre roman-photo ; Stiegler ouvrira les débats au Mucem, lors de les 4 avril (émigration harkie), 9 avril (juifs les 2 et 7 avril, ceux de 3 à 6 ans partiront en la conférence d’ouverture le 22 mars, avant de d’Algérie) et 16 avril (berbères kabyles). balade avec un guide-cuisinier, pour goûter laisser la place à l’historien des idées François GAËLLE CLOAREC des « histoires à croquer » faites d’ingrédients Cusset (le 5 avril) puis au sociologue Michel issus de l’agriculture méditerranéenne. Wieviorka (le 13 avril). Le séminaire « La Les 14 et 15 avril, le Mucem vibrera au rythme geste technique » : parler objets... par des Comores, avec un temps fort consacré à les milieux tiendra sa seconde session le 22 Mucem, Marseille cet archipel dont sont originaires nombre de mars. L’occasion de découvrir comment les 04 84 35 13 13 mucem.org 23 Tous au parc La sorcière de Fontblanche ! et le robot

a ville de Vitrolles ouvre grand les portes du parc de Fontblanche pour un deuxième Rendez-vous aux parcs et jardins Ldurant lequel se succèderont, gratuitement !, cinq spectacles de danse, de théâtre, et un conte, de 14h à 18h. Avec ses petits pots et autres calebasses, Claire Pantel raconte des histoires connues ou un peu moins, transmises de bouche à oreille ; en piochant au hasard des graines de cumin, de haricot magique, de bois de lit… elle transporte son auditoire en Orient, en Afrique, en Europe. Paul Durand, lui, est un héros du quoti- dien, à qui il arrive un tas d’aventures. Après ses déboires avec une cabine téléphonique, il s’attaque à l’un des objets les plus diaboliques qui soit : la fameuse tente qui se déplie et se replie en Deux secondes… Ivan Chary, alias Petit Monsieur, est un © France Cadet clown élégant et irrésistible ! Changement d’univers avec la mise près avoir fait déborder l’auditorium de la Bibliothèque de en espace du roman de Romain Gary, La vie devant soi, par la Cie l’Alcazar en invitant le paysagiste Gilles Clément (lire p 44), Les Chiennes nationales. Les deux comédiens nous invite chez AOpera Mundi poursuit son cycle de rencontres Le vivant Madame Rosa, vieille dame juive à qui Momo, petit garçon arabe dans tous ses états. La venue de l’anthropologue Nastassja dénué de préjugé, tient compagnie. Un beau moment de fraternité Martin, prévue initialement le 14 mars au Frac Paca, est reportée et de citoyenneté auquel participe le public, installé au cœur de au 19 mai ; on était très curieux de l’entendre raconter la résistance la pièce… La Cie Antipodes propose un petit moment de grâce, subversive des chasseurs-pêcheurs du Grand Nord face aux le pas de deux d’un couple amoureux qui ne fait qu’un, dans métamorphoses de leur environnement, et aux politiques d’assimi- une chorégraphie de Lisie Philip. De portés rapides en regards lation auxquelles ils sont confrontés. Ce n’est que partie remise ! complices, Morena Di Vico et Michaël Pascault dansent, Pour patienter, on assistera avec plaisir à la conférence d’Anna virevoltent, inscrivent dans leur histoire d’amour l’espace qui Colin, commissaire d’exposition et critique indépendante, qui les entoure. Enfin, c’est dans le théâtre de Fontblanche que vous s’exprimera à la médiathèque La Passerelle (Vitrolles), le 20 mars, attendent Arnaud Saury et Mathieu Despoisse (Dad is dead, sur les sorcières d’hier et d’aujourd’hui. Une thématique dans le Mathieu Ma Fille Foundation) sur leur vélo acrobatique ! Sans vent : plusieurs lieux marseillais -L’Équitable Café, L’Asile 404, et le cesser de pédaler autour d’une piste circulaire, et tout en effectuant Vidéodrome2- viennent d’accueillir une Semaine des magies où l’on des acrobaties invraisemblables, le comédien et le circassien a beaucoup évoqué la sorcellerie, à la croisée du féminisme et de conversent, échangent sur le bien-fondé du militantisme, sur les l’écologie. Anna Colin se penchera quant à elle sur le « potentiel de mystères de l’identité sexuelle, sur les contradictions qui nous renversement du pouvoir » des sorcières, et la façon dont certaines habitent tous et les choix que l’on fait… Hilarant et pertinent ! artistes se sont emparées de leur détonante aura symbolique. DO.M. On ne boudera pas non plus Jean-Gabriel Ganascia, venu parler d’un autre sujet brûlant : les rapports entre l’intelligence artificielle Rendez-vous aux parcs et jardins et le vivant... Enseignant à l’Université Pierre et Marie Curie 14 avril (Paris), ce spécialiste en intelligence artificielle et en modélisation Parc de Fontblanche, Vitrolles cognitive démêlera le vrai du faux dans un domaine fourmillant de 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr « déclarations fracassantes ». Sans entrer dans les fantasmes tech- nologiques les plus délirants, l’existant « induit des risques effectifs contre lesquels il convient d’ores et déjà de se prémunir ». L’artiste marseillaise France Cadet, spécialisée en numérique et en robotique, interviendra à la fin de la conférence (le 14 avril, à la BMVR Alcazar). GAËLLE CLOAREC

Des sorcières d’hier et d’aujourd’hui 20 mars Médiathèque de Vitrolles , Mathieu Ma Fille Foundation © Frédéric Joyeux

L’intelligence artificielle et le vivant

Dad is dead 14 avril BMVR Alcazar, Marseille

Opera Mundi, Marseille 07 82 41 11 84 opera-mundi.org ela a commencé par un embrasement. Gigantesque, réussi, Aimer, une foule de 40 000 personnes se pressant sur le Vieux CPort pour admirer, en cette Saint-Valentin, les cœurs et les lèvres qui se dessinaient aux cieux. L’animateur qui ouvrait la soirée avec le poème Le baiser de Germain Nouveau (1885) embrasser, invitant les spectateurs à s’embrasser et à se faire photogra- phier, était peu convaincant mais la création pyrotechnique du Groupe F, leurs gerbes de feu où dominaient le violet et réfléchir l’or, leurs cascadeurs aux tenues fluorescentes suspendus au milieu du port, s’apprêtant à la conquête des airs et de la mer allumaient une ville à nouveau rassemblée, répétant l’amour d’écho en écho... L’ouverture de MP2018 a rassemblé, A midi Quel Amour ! avait été lancé avec Choux/Chantilly sur le Parvis de l’Opéra pour la Sirène de Lieux Publics, exception- ému, émerveillé mais surtout... nellement déplacée le 2e mercredi du mois. Une Saint-Valentin donné à penser ! L’amour mettrait-il orchestrée aux sons métalliques des fouets alimentaires sous la direction de Christian Bini en harmonie avec les cors de du plomb dans la tête en même l’Orchestre Philharmonique de Marseille et Vincent temps que du feu au cœur ? Robinot. Chantilly montée de main de maître par les élèves du lycée hôtelier Pastré-Grande Bastide. Tout cela sur une proposition de la cheffe des Grandes tables, Marie-Josée Oderer, jusqu’à la dégustation de petits choux qui fondent délicieusement dans la bouche !

Le Grand Baiser, Groupe F © Thierry Nava-MP2018 Etage X, court métrage de Francy Fabritz © Eike Eckold

Le Grand Baiser, Groupe F © Thierry Nava-MP2018 Après le feu d’amour c’est vers le Mucem que le public s’est déplacé : plus de 6000 d’entre eux, du moins, envahissant Muc’ aime tous les espaces !

côté de Roman-Photo et de L’Amour de A à Z (voir page 89), 13 une situation propice à de drôles de jeux. Le dernier court est un film salles laissées vides en attendant Picasso et les ballets russes d’animation en noir et blanc, clin d’œil à la bande dessinée, I Want Àétaient malicieusement investies par l’Agence de Voyages Pluto to Be A Planet Again de Vladimir Mavounia-Kouka et Marie imaginaires : une foule d’artistes déplaçait les cadres des textes Amachoukeli : dans une société à deux vitesses, faisant coexister classiques et des chansons populaires, transformant l’expo en spectacle des humains H- et H+, Marcus, un H- est amoureux depuis l’enfance vivant, et le spectateur en visiteur mobile. Une belle réussite ! d’une H+ ; il va tout tenter pour qu’elle puisse s’intéresser à lui, c’est- à-dire se « faire augmenter ». Espérons que ce court, qui répondait à Court toujours une proposition thématique « une télé-transportation vers le monde La salle de l’auditorium du MuCEM était comble elle aussi pour de 2050 », ne soit que pure fantaisie ! L’amour court(s) toujours, une série de quatre courts métrages, venus du Festival du court métrage de Clermont-Ferrand, proposés Conférences d’amour par l’Alhambra. En écho avec ces films, trois comédiens de l’Officine La semaine suivante le Mucem partait En quête d’amour avec un cycle théâtrale Barbacane, Margaux Borel, Olivier Corcolle et Niccolò de quatre conférences en partenariat avec Sciences Po Aix. Rebecca Scognamiglio, interprètent quelques variations autour de l’amour. Zlotowski, Angelin Preljocaj et Eric Reinhardt expliquaient la Les séances se succèdent, et pour pouvoir s’installer il faut attendre présence de la mort dans leurs œuvres, liées à la passion qui brûle, que des places se libèrent ! Dans The Spa de l’Australien Will Goo- ressorts dramatiques, témoins de la folie, mais aussi de la tendresse ; dfellow un vieil homme ne veut plus le spa qu’il a commandé comme Abdellah Taïa parlait d’amour et de politique, d’homosexualité, cadeau pour sa femme. Or les livreurs qui l’ont déchargé du camion de pauvreté et de relation postcoloniale, de la violence qui naît de sont pressés -un match de rugby les attend-, ils vont découvrir la la répression du désir ; Tobie Nathan, moins convaincant, liait la raison du refus et regarder le match, avec le vieil homme… dans le naissance de la passion amoureuse aux philtres intentionnels de spa. Un film drôle et émouvant, suivi deWelcome Home Allen, une celui qui veut être aimé. Et Marcela Iacoub, militante, réclamait parabole sur la guerre d’un autre Australien, Andrew Kavanagh, l’expression possible du désir féminin, non le consentement mais le puis d’Etage X, un court de Francy Fabritz, primé à Locarno, avec vouloir, pour qu’homme et femmes soient enfin égaux... deux excellentes comédiennes, Eva Medusa Gühne et Morgana AGNÈS FRESCHEL, CHRIS BOURGUE, ANNIE GAVA Muses. Deux femmes, quinquagénaires, se retrouvent coincées ensemble dans l’ascenseur d’un grand magasin. Quand l’une d’elles Voir aussi sur journalzibeline.fr le compte rendu détaillé a besoin d’uriner, l’autre lui propose… son propre sac, ce qui va créer des conférences et expositions en cours La Friche en fêtes

Du 14 au 17 février la Friche était en ébullition amoureuse, et intellectuelle ! Avec les enfants d’abord, puis pour tous les publics, plutôt avertis

Enfance et intimité Raoul Lay et une formation de chambre de Télémaque proposaient un concert littéraire Letzlove © Tristan Jeanne-Vales dans les locaux de l’IMMS, puis à L’Alcazar le lendemain. Lettres d’amour et doubles-croches, Amour militant de grilles et de toiles expose intégralement deux petites formes de 40 mn, sont des voyages Letzlove parlait aussi de désir, avec un autre les quatre musiciens et leurs instruments de dans le patrimoine musical des deux derniers voyage, dans le temps. L’histoire DU jeune métal, de plastique et d’électronique à la vue siècles. La partie consacrée aux Romantiques homme de 20 ans, Thierry Voeltzel, découvert du public pour une performance qui doit autant proposait Chopin, Schubert et Schumann avec par Michel Foucault, symbole d’une époque aux Tambours du Bronx qu’à la culture DJ des échanges épistolaires de George Sand et post 68, et d’une liberté incommensurable. Le (machines assurées par Matthieu Pernaud Chopin avec leurs amis parisiens au sujet du spectacle, réjouissant, jouissif, épatant, prenait de Temenik Electric). Si cette fois la structure séjour marseillais des deux amants, ce qui ne l’allure d’interviews conférences, récit de la est placée sur le côté (et pas au milieu du public manqua pas d’amuser le public. Les jeunes rencontre en stop, digressions sur la politique, comme ça devrait être le cas) elle garde un apprentis-comédiens de l’ERACM, Mama la drogue et le plaisir, le militantisme homo- sacré punch, tout en démystifiant l’artisanat Bouras et Basile Duchmann, dirigés par Fré- sexuel, le refus joyeux des cadres sociaux, des techno. On aime les titres les plus mélodieux déric Grosche, ont lu avec beaucoup de ferveur conventions, de la construction d’un avenir comme Push, à paraître sur un EP en prépa- la correspondance de Schumann avec Clara, tracé ou non, loin de la peur du Sida qui allait ration. Lui succédant, la « star » de la soirée l’« ardente fiancée ». La partie des Modernes surgir et tout bouleverser, et de l’avènement Corine apparaît avec son total look disco : proposait des extraits de Fauré, Debussy et Ravel, de la gauche socialiste qui allait briser d’autres nue sous son survet’ et perruque-crinière de accompagnant un texte de Proust, des morceaux possibles. Une leçon de liberté et de théâtre, lionne. Cette Farrah Fawcett mâtinée d’Olivia cocasses de la correspondance entre Debussy portée par Pierre Maillet incarnant Foucault Newton-John affiche ainsi tout le vocabulaire et Fauré, et un passage étonnant du Ravel et Maurin Olles un comédien mutin dans de la femme-objet : voix de velours et discours d’Echenoz à propos de la tournée triomphale du tous les sens du terme, séduisant, séducteur, aguicheur. Quelle quiche, quelle piche, quelle compositeur aux États-Unis. Avec Charlotte libre comme l’air. Avec la nostalgie, à la fin du pouf, cette Corine ! Mais au fil du set le malaise Campana à la flûte, Nicolas Mazmanian au spectacle, de ce sens frémissant de la vie et de s’installe : recycler les gimmicks disco-funk de piano, Yann Le Roux-Sèdes au violon et un l’engagement joyeux, de ce désir de révolution, pacotille, OK, titiller l’imaginaire sexiste, why not, nouveau venu au violoncelle, Jean-Florent qui donne par comparaison la mesure de nos mais Pourquoi, Pourquoi (le titre de son « hit ») Gabriel. Un spectacle sensible et attachant. prisons intellectuelles et sociétales. se complaire dans cette vacuité musicale et ce Skappa proposait aux adultes et aux enfants cliché permanent ? Le saxophoniste Raphaël une Maison où l’on passe, allégorie des maisons Une pouf’ et du barouf Imbert (son frère à la ville) viendra distiller en closes où l’on viendrait chercher non du sexe Temps doux pour l’ouverture, la Cartonnerie a fin de concerts ses solos sans nous apporter la mais des images et des mots. Les enfants, été joliment réaménagée pour un public assez réponse. On n’aura pas la patience que s’installe surpris, ne comprennent pas le double jeu mais clairsemé et une soirée en mode « confort ». le set éclectique du DJ Madrey : la qualité une mère maquerelle chanteuse nous invite à Instrumentarium assure le début, la clôture des basses demeure problématique dans ces choisir l’ordre de nos passages en chambre, à et la transition de ce live & DJ’s : ce dispositif grands espaces frichistes, dommage. deux... On y voit des ombres qui prennent vie, scénique a été conçu pour remuer le plein air des jeux de lumières, on y entend des histoires des grands festivals (programmé au Sziget à Les zones grises d’Agata et des poèmes, dans l’intimité retrouvée d’une Budapest l’an dernier et aux Vieilles Charrues De Quel Amour ! à Quel amour ? La Friche passe relation à l’art et au désir. cette année). La structure tubulaire tendue à l’interrogation pour nommer l’événement. Aimer pour tous

e jour de la Saint-Valentin, le Théâtre Joliette organisait avec l’association Des livres comme des idées un goûter philo Ldestiné aux enfants accompagnés de leur famille. Animée par Juliette Grégoire, éditrice jeunesse, la rencontre tournait autour des nombreuses questions que l’on peut se poser au sujet du sentiment amoureux. En se basant sur l’ouvrage Ce que je sais de l’amour, de Philippe Katerine (qui clôturera en mai prochain la prochaine édition du festival littéraire Oh les beaux jours ! au Mucem), ainsi que sur des extraits de pièces commandées spécialement à des dramaturges, par le théâtre, pour MP2018. Le dialogue, riche et souvent émouvant, s’est noué entre des participants de sexe et d’âge très différent. De la fillette encore naïve mais déjà fort capable de réflexion (« l’amour c’est dire aux gens plein de jolis mots pour qu’ils se sentent heureux dans leur année », au grand-père qui a dû assumer les reproches de ses petits-enfants après avoir refait Letzlove © Tristan Jeanne-Vales sa vie. Il arrivait que l’on se tortille sur sa chaise, ou que les rires Le sexe, la drogue et la stupéfaction devant la violence des fusent, au fil des témoignages de coups de foudre, d’espoir ou de hommes irriguent l’art photographique du Marseillais, mais blessures. Certains se sentent écrasés par le fait d’aimer, d’autres l’amour n’est présent que sous forme paradoxale. White Noise, parlent de légèreté. La conclusion générale étant que d’un tel sujet, installation-cadavre exquis réalisée à partir du film éponyme de on ne fait pas le tour en une après-midi, mais qu’il est bon, ainsi, de plus de quatre heures est projetée via dix-huit écrans suspendus se retrouver pour en parler. au plafond du Cabaret Aléatoire. Samedi dans la nuit, elle jouxte GAËLLE CLOAREC la rave party assurée par les DJ’s du collectif Métaphore. Cette étonnante proximité avec le dancefloor empli deravers ravive la part dynamique d’une œuvre excessive par ses sujets et les moyens qu’emploie l’artiste pour en capter l’essence. D’Agata y documente sa plongée dans les zones grises de la psyché Le prix de l’amour humaine. Ses relations troubles avec prostituées, dealers et toxicos nourrissent son art jusqu’au-boutiste, conçu avec force mour, gloire et beauté. Il fallait assumer un tel titre, et c’est le gros plans et ralentis, à même les plaies d’une société malade. « Je défi qu’a relevé à La Criée le 16 février Laurent de Sutter, sais que le plaisir est trop court mais je ne peux pas renoncer aux Aprésident de l’association qui porte chaque année à Marseille passions » légende-t-il un de ses montages. Cette transgression la Semaine de la Pop Philosophie. Dans un exposé prolixe, morale constitue à la fois le plus grand danger éthique de son le brillant professeur de droit s’est intéressé au prix de l’amour à travail et son plus conséquent mérite artistique. En projetant travers les âges. Depuis Platon, chez qui l’amour est « une théorie parallèlement des images d’archives de charniers et de massacres, hors-sol, dénuée de chair », au cinéma japonais, où « un amour qui l’artiste, prolongeant l’interrogation bataillienne de « l’expérience se dit est déjà de qualité moindre », en passant par la nécessité de intérieure », accroit la tension insoutenable entre jouissance et la transcendance chez Héloïse et Abélard. Une chronologie menée mort. Désespérée, sa création, d’une grande beauté plastique, tambour battant, qui a laissé bien des auditeurs un peu ébouriffés, n’avilit cependant pas ses sujets. Appuyée par des sous-titres mais pas tellement plus avancés sur la question centrale : oui, en éloquents, elle reflète, avec la lucidité qu’on connaît au Marseillais, matière amoureuse, l’addition semble proportionnelle aux enjeux, les dégâts de notre modèle économique sur les corps de nos quelle que soit l’époque. congénères, l’artiste (récemment hospitalisé à Calcutta après La seconde partie de soirée donnait la parole à Zeev Gourarier, une overdose) s’incluant physiquement dans le processus. « Il directeur scientifique et des collections du Mucem, pour donner un faut faire le sacrifice de soi » assène-il… Vertigineux, White Noise avant-goût de l’exposition Une histoire des manières d’aimer, qui révèle avec une douloureuse acuité ce que nous nous cachons s’ouvrira en septembre au Louvre-Lens, et dont il assure le com- de l’état du monde vu par ses marges. missariat. Un parcours dans l’histoire de l’art qu’il a conçu comme CHRIS BOURGUE, AGNÈS FRESCHEL ET HERVÉ LUCIEN un récit, avec un sens aigu des inégalités de genre. Plus intimidé que Laurent de Sutter, lui aussi a laissé son public sur sa faim, mais pour des raisons inverses : on aurait aimé qu’il ait plus de temps pour développer ses différents choix, guidés par sa faramineuse Voir aussi page 90 l’exposition Jeunes générations érudition. G.C. différentes textures sonores dans un jeu de paroles sont distribuées aux spectateurs, et Danse stéréophonie déconcertant : quelques pièces des danses que les interprètes déconstruisent rythmées comme une Bourrée, ou une musique dans l’enceinte d’un bal populaire, chaque matinée d’orientalisme avant de clore un époque correspondant à un style, salsa, techno, spectacle dans un Chant de l’ardent désir. samba, cumbia, rap, hip-hop, chamamé… et musique Comme à la tête d’un taraf Anne Playoust Corps et voix se mêlent, évoquent les années dirigea avec entrain cet ensemble multi-gé- terribles de la dictature, le foot, les « folles » de nérationnel et multiculturel : les musiciens du la place de Mai avec leur danse des foulards… d’amour quatuor tunisien Cadences dispensèrent les Consensuel, le tango apporte l’un des rares plaisirs de la tradition orientale croisant leurs beaux moments, avec un couple rejoint par les archets avec le superbe quatuor Béla qui ouvrit autres danseurs en une chaîne émouvante : une le spectacle avec le deuxième quatuor n°2 du femme mènera finalement la danse, réponse au GTP sublime Janácek. Métissage, amitié, partage au machisme, et lors des applaudissements sont des mots doux quand ils s’écrivent en l’une des danseuses appellera à la « révolte des e bonheur des enfants issus des conser- musique. femmes » le 8 mars. Inspiré par Le Bal d’Ettore vatoires du territoire de MP2108 se lisait Scola, le spectacle comporte quelques belles Lsur leurs visages au fur et à mesure qu’ils Essai argentin performances, mais demeure cependant bien entraient sur scène : 120 instrumentistes en Et en danse ? El Baile, composé par la cho- éloigné de sa force évocatoire de l’histoire herbe prenaient d’assaut le Grand Théâtre pour régraphe Mathilde Monnier et l’écrivain populaire. ne former plus qu’un avec les deux quatuors argentin Alan Pauls tente de représenter les CHRISTOPHE FLOQUET ET professionnels Béla et Cadences, et proposer 40 dernières années de l’histoire de l’Argentine, MARYVONNE COLOMBANI une improvisation toute en plasticité explorant à travers des chants emblématiques, dont les

Kolik © Hervé Bellamy C’est la moite

uoi de mieux pour s’offrir à l’amour que de plonger dans un bain de vapeur ? Renaître à son corps, respirer la © Lisa George, Yes we camp © Lisa George, Yes Qmoiteur ambiante... On connaît les plaisirs harassants et revigorants du hammam ou du sauna. Mais s’y livrer dehors, juste au-dessous de la fontaine du Palais Longchamp, dans un écrin choisi pour ces rituels de l’eau, à la vue des passants, au son de la musique, c’est nettement plus insolite. C’est à cette expérience inédite que le collectif Yes We Camp, assisté de Sidi&Co, a convié les volontaires, le temps d’un week-end. Bains du Sud ou bains du Nord ? Hammam ou banya ? De part et d’autre de la tente qui abrite les platines des DJ et le bar, deux drôles d’installations métalliques, à mi-chemin entre la fourgonnette et la cabane mobile. À gauche le hammam, tapis bariolés, lampes orientales et gants de gommage ; à droite la banya, tabourets de bois rustique et (fausses) peaux de bêtes. On peut choisir ; on peut aussi tester les deux. C’est gratuit. Chaque session dure trente minutes. On y entre à 5, après s’être changé dans un vestiaire rudimentaire ; on circule en maillot, on se rince à l’extérieur. Et aussi étrange que cela puisse paraître, on trouve ça très naturel. Vapeur ! Vapeur ! ou l’art de questionner en douceur la place du corps dans l’espace public et la notion d’intimité. FRED ROBERT

Vapeur vapeur a été donné le 16 février au Palais Longchamp, Marseille Reflets, fenêtres, écrans trl-X est la touche modifiante signifiant : couper. C’est bien cela que nous montre CCyril Teste et le collectif MxM dans la mise en scène du texte éponyme de Pauline Peyrade. Ida est dans son appartement, c’est la nuit, les baies vitrées projetées en fond de scène donnent sur les tours d’un quartier de Paris. Elles sont aussi les écrans Kolik © Hervé Bellamy multiples de la jeune femme : téléphone, Mac, webcam, caméra de sécurité d’entrée d’immeuble... L’univers du personnage est Logorrhée poreux : l’extérieur lui parvient sans répit et se transforme vite en sensation de harcèle- ment. La sur-connexion conduit Ida comme insatiable le spectateur à la nausée. Celle du trop plein d’injonctions, d’informations, d’images. La ubert Colas et Thierry Raynaud une multitude de verres d’eau qui semblent saturation provoque l’étouffement qui prend trimballent ce texte de Rainald Goetz l’amener vers un degré acceptable de force de une forme duelle chez Ida : la boulimie des clics Hdepuis près de 7 ans. En lecture, puis mis vie, depuis le cri de révolte jusqu’à l’acceptation qui ouvrent sur le monde et le refus d’ouvrir en scène, sur les scènes régionales, nationales, de sa condition mentale, en passant par le sa porte à un réel déréalisé devenu anxiogène internationales, francophones. La reprise vaut rangement obsessionnel des chiffres et des (sa sœur comme l’amant ne parviendront le coup, même si l’on ne comprend pas trop syllabes, des émotions et des ombres. La vidéo jamais à entrer chez elle. Seul le fantôme, la labellisation Quel amour ! pour un texte de Patrick Laffont, fantomatique, illustre en c’est significatif, d’un amour perdu pénètrera introspectif où il est très peu, voire pas, ques- arrière plan la croissance de la conscience de dans l’appartement). Car Ida est coupée : tion de l’autre, et encore moins de la relation Kolik, être assis et logorrhéique, qui fascine les des autres et d’elle-même. Les créations à lui, sinon dans le rejet. Texte solitaire, sa spectateurs sans rien raconter, sans bouger vidéos, comme autant de fenêtres digitales, dramaturgie est fondée sur la lente prise de de sa chaise, dans un voyage où les mots figurent l’enfermement, soutenu par un bel conscience d’un moi révolté, dégoûté par sans idées suffisent, par leur rythme, leurs environnement sonore continu. La mise en le monde, perdu ou trouvé dans sa propre dynamiques et les nuances que le comédien scène parvient à porter une écriture éclatée. pensée, ses obsessions mathématiques, ses leur impose, à construire un trajet vers une Tout comme le jeu des comédiens, explorant ordres et ses désordres, son inaptitude à com- certaine lumière. Fascinant, tout près de la une présence-absence nouvelle et difficile au poser avec le réel social, et son lent et violent, vacuité averbale, surverbale, mais touchant théâtre, tant les images peuplant le plateau drôle, ironique, cheminement en lui-même, miraculeusement à quelque chose du tréfonds. peuvent engloutir le corps de l’acteur, son dans les mots qui finissent par construire un AGNÈS FRESCHEL aura. C’est aussi la question que soulève la éveil philosophique à la connaissance de soi. pièce : que deviennent nos corps derrière Texte existentialiste, mais pas philosophique ces fenêtres virtuelles ? puisqu’il ne démontre pas les concepts mais DELPHINE DIEU les met en œuvre, il est porté avec un rare Kolik a été joué à Montévidéo, Marseille, génie d’acteur par un Thierry Raynaud habité, les 12 et 13 février, et au Bois de Ctrl-X a été joué au théâtre du Merlan, inspiré, souffrant, souriant, s’enfilant crescendo l’Aune, Aix, les 16 et 17 février Marseille, les 13 et 14 février Au croisement du cirque et de la danse

Grands spectacles et petites pépites étaient au rendez-vous de la 20e édition des Élancées et de l’Entre-deux-Biennales

omme toujours, et c’était encore le cas lors oui, mais excitant, et l’impact sur les enfants de cette 20e édition, se croisent compa- est immédiat. Attentifs et curieux ils suivent Cgnies régionales et internationales, avec ses déplacements -jetés, sautillements, courses des spectacles de cirque qui invitent parfois dans les rangées-, ses regards appuyés sur la danse au cœur des agrès et acrobaties, chacun, jusqu’au bureau qui deviendra bien ou l’inverse lorsque la danse approche les d’autres choses, et le tableau devenu support formes circassiennes. Dans les 6 communes de d’un dessin fait de lettres… Sans cesser de Scènes&Cinés aucun temps mort lors de ces danser, et sans un mot, Stefania Branetti 14 jours durant lesquels le taux de remplissage évolue telle une enseignante loufoque, et des salles et chapiteaux a atteint 94%, soit sensible, donnant à voir dans cette gestuelle plus de 14 000 spectateurs (du territoire Istres très rythmée les émotions d’une « vraie » Ouest Provence et des alentours, le festival maîtresse : crainte, joie, fatigue, rêve, doute, étant au cœur du « coup de projecteur » étonnement… Soulagement mêlé de joie Cirkopolis, Cirque Eloize © Patrick Lazic donné par l’Entre-deux-Biennales et dans des enfants après la représentation, cette robotisés, interchangeables, un engrenage la programmation de MP2018) au cours des « maîtresse » jouait donc « la comédie » et dont il est difficile de s’échapper. Pourtant, peu 75 représentations ! savait parler ! Créé pour être joué dans des à peu les couleurs vont faire leur apparition, salles de classes élémentaires et maternelles, la gaieté et la fantaisie s’installer. Avec le Hors des plateaux le solo clownesque Ma Maîtresse ? a été québécois Cirque Eloize le mot spectaculaire L’après-midi était frais malgré le soleil, mais présenté par le collectif Sauf le dimanche prend tout son sens. Ce que l’on voit provoque le lieu propice à l’enchantement : le Théâtre dans toutes les classes des écoles de Grans quantité d’émotions, de réactions, décuple de verdure de La Colonne, à Miramas, (enfin durant le festival. les perceptions. Inspiré du film de Fritz Lang, une programmation en ce lieu !) accueillait Cirkopolis envoûte par sa poésie, sa finesse, une petite forme atypique et remarquable, 3D. Grands spectacles l’élégance de certains tableaux (à la roue C’est un objet singulier qui trône au centre de À l’Olivier, à la Colonne et sous chapiteau, allemande notamment), par la créativité qui la petite scène recréée pour l’occasion, fait de les grands spectacles ont attiré les foules. se dégage de numéros pourtant très connus bois recourbé en demi-cercle traversé d’un Explosion de sons, d’énergie, de couleurs : les comme les massues ou le diabolo. Les douze filin métallique. Objet que Jonathan Gui- seize acrobates de la troupe Circolombia circassiens internationaux sont les brillants chard (Cie H.M.G) va lentement apprivoiser, envahissent les sens avec leur show époustou- interprètes de cette ode à la liberté. lors de glissements, contournements, poses flantUrban . Tous issus de la Circo Para Todos, Sous le chapiteau du collectif franco-belge alanguies… qui le font vibrer et résonner de école nationale de cirque de Colombie dédiée Malunés on est loin des happy end… et les sons divers. Puis, sur une partition sonore jouée à l’insertion socio-économique de jeunes en contes de fées vont être particulièrement en direct par Cyril Malivert, les acrobaties difficulté, ils mettent en scène, dansent et malmenés ! Le monde merveilleux bascule vont se faire dansantes au gré des balance- chantent leur vie quotidienne à Cali. Du barrio rapidement dans le délire, et les personnages ments et retournements ; de la légèreté de émergent les guerres de clans, les battles incontournables vivent des situations impro- ses mouvements, au cœur des prouesses, naît sensées mesurer les valeurs de tel ou tel, les bables. Car l’histoire qu’ils racontent, celle une poésie délicate, qui suspend le temps. confrontations de filles entre elles, mais aussi du Petit Chaperon Rouge, ne les passionne C’est une étrange maîtresse qui fit son appa- les rêves d’un avenir meilleur, voire fortuné… pas vraiment… autant convoquer alors plus rition dans une classe de l’école élémentaire Omniprésent, le hip hop accompagne les de personnages, les faire se rencontrer et Georges Brassens, à Grans, à la surprise géné- acrobaties très spectaculaires (au trapèze, à réinventer une histoire ! Celle de comédiens rale. Une musique se fait entendre dans le la roue Cyr, à la corde dynamique, à la bas- circassiens très joueurs (notamment avec couloir, la porte s’ouvre… qui donc est cette cule coréenne ou sur fil de fer), chanteurs, une Blanche Neige endormie transformée en personne qui frôle les murs, se cogne, repart rappeurs et danseurs se succédant au son poupée de chiffons, disloquée), qui ont bien et revient sans regarder personne ? « C’est d’un reggaeton enlevé. Energisant ! du mal à se défaire des clichés et à nouer une bizarre » laisse échapper une fillette. Bizarre Une ville-usine terne et grise, des employés relation. Une aubaine pour les « héroïnes » qui Ailleurs, aussi, la Biennale

irque encore, au Merlan, à Marseille, et à l’Espace NoVa, à Velaux. CLe cirque contemporain aime à fonder ses spectacles sur un agrès unique et original, expérimenté jusqu’au bout de ses possibilités scéniques. Juan Ignacio Tula et Stefan Kinsman s’attachent dans Santa Madera à explorer la roue Cyr, sorte de grand cerceau à taille d’homme qui leur permet, à chacun et ensemble, de sonder la circularité, le tournis, le porté mouvant, l’équilibre. Autour de ces figures ils tissent une relation, faite de rapprochements, de méfiance, de tendresse et d’étreintes, parfois. La musique accompagne ces changements de relation et l’exploit physique épate, mais la pièce tourne littéralement en rond dans son cercle de sable, épuisée au bout d’une petite heure. Vaincue par une monomanie circulaire ? Pas de femmes dans Machine de cirque, univers d’après l’apocalypse. Restent cinq hommes et une étrange machine sur plusieurs niveaux au centre de la scène ; Cirkopolis, Cirque Eloize © Patrick Lazic tubulures d’échafaudage, poulies, ficelles, trapèze, vont en profiter pour crier leur ras-le-bol de toujours devoir être des cruches bascule, roues de vélos, constituent un assemblage et prendre le pouvoir, dans les airs et sans leur étouffante et éternelle robe de hétéroclite qui autorise aux protagonistes, essais, envols, princesse ! Les sept acrobates-voltigeurs, et pour certains aussi musiciens sauts, descentes vertigineuses de mât chinois, esquisses et chanteurs, passent des trappes magiques au trapèze, des cadres aériens d’appels, rythmés avec un humour démoniaque par et coréens aux portées les plus folles, pour recréer leur propre monde, bien le multiinstrumentiste-clown Frédéric Lebrasseur. plus féérique et délirant. Et Forever, Happily… Le spectacle va crescendo, multipliant les difficultés, les défis à la pesanteur. La capacité des uns et des Dédicace dansée autres à se glisser dans n’importe quel numéro est Depuis sa création en février 1999, la transmission est dans l’ADN du Festival. époustouflante, les solos de spécialité glissent vers 20 ans de rencontres et d’échanges autour d’un même projet : « proposer à un des mouvements d’ensemble aussi étourdissants que large public un panorama de la création contemporaine des arts du geste ». potaches. Le fastueux numéro de jonglage de massues Ce panorama c’est Christine Fricker (Cie Itinerrances) qui s’en empare, en cadence, celui, poétique, de vélo, puis ébouriffant sollicitée par le Festival. La chorégraphe marseillaise ne feuillette pas seulement de monocycle, celui, virtuose, de planche coréenne les souvenirs, elle offre aux regards sa vision d’un instantané en partant de assorti de figures acrobatiques vertigineuses, temps photos de certaines pièces emblématiques. Un « après », l’« évocation » forts du parcours, laissent aux passages moins spec- d’un geste dansé ou d’un geste de cirque. Sur la scène de l’Olivier vont se taculaire tout leur sel : même partager un verre d’eau succéder, au fil des tableaux, 29 danseuses et danseurs amateurs issus de est propice à d’étonnantes variations. La mécanique la formation Coline, de l’association Pulsion, de l’option danse du lycée parfaitement huilée du spectacle s’appuie sur une Rimbaud et du Conservatoire de danse, auxquels viennent se joindre chorégraphie inventive, aux accélérations effrénées. trois danseurs de sa compagnie, Aude Cartoux, Simon Gillet et Jessy Yohann Trépanier, Raphaël Dubé, Maxime Laurin, Coste. On reconnaît, ou pense reconnaître, tel spectacle (les images ne sont Ugo Dario, apportent énergie, vivacité et humour à pas annotées), on cherche un moment… puis, très vite, la photo figée prend cette post-fin du monde, cherchant à donner un sens à vie. Pas de jeux de va-et-vient entre le fond de scène et le plateau, ce qui se une machinerie aux rouages étranges ; théâtre et cirque danse dit l’ici et le maintenant. Des variations très émouvantes alliant passé et se rejoignent ici, en une poésie touchante et cocasse. présent, parfois hésitantes souvent maîtrisées, ont aboli le temps. Le spectacle AGNÈS FRESCHEL ET MARYVONNE COLOMBANI terminé, Christine Fricker reprenait sur scène son rôle de chorégraphe pour faire danser le public. Transmission toujours, amplement partagée ! DOMINIQUE MARÇON Santa Madera a été jouée au Merlan, Marseille les 20 et 21 février ; Le Festival des arts du geste Les Elancées s’est déroulé du 12 au 25 février sur le territoire Istres Ouest Provence Machine de cirque le 16 février à l’Espace NoVa, Velaux 32 critiques spectacles Amélioration continue

rageuse, fait face à son conseiller Pôle-Emploi, légèrement compréhensif mais implacable. Mélanie, bien qu’ayant accepté de participer aux séances collectives organisées par son entreprise « tous ensemble et main dans la main avec les robots » s’est fait virer de son boulot, remplacée par ces mêmes robots. Elle va devoir se « réinventer ». Par exemple comme pleureuse lors d’enterrements de gens seuls. Car chance : il n’y a pas encore de machines qui savent pleurer ! Dans Le Monde dans un instant, laboratoire machinerie sportif musical domestique de Det Kaizen, les questions que les avancées © Simon Gosselin technologiques posent à l’homme -sur sa ls nous attendent en veste de survêt des premier tableau. présence à soi, aux autres, au monde, et aux années 80, moulinant énergiquement, pour Kasparov, champion du monde d’échec, nous machines !- sont mises en scène, en 5 tableaux Iles rallumer de temps en temps, les pédaliers raconte sa défaite devant la machine Deep branchés les uns sur les autres. La fragilité de de 5 vélos d’appartements-lampes à bras Blue en 1997, et sa conversion technophile : l’humain et la férocité des situations se muent télescopiques, bricolés maison. Des marques car si les machines sont bien les plus fortes, en vertiges augmentés, dans un mélange de au sol dessinent les zones de jeu d’un sport les humains continuent encore de jouer aux mélancolie retro-futuriste et de jubilation inconnu. Des futs étanches insubmersibles échecs ; alors pourquoi avoir peur ? Travaillons archaïquo-théâtrale. Question mélancolique sont posés à intervalles réguliers sur les plutôt avec elles pour construire un monde rétro-futuriste : c’était quand la première fois côtés. Le tout baigne dans une musique meilleur ! qu’un robot vous a donné un ordre ? synthétique, jouée en direct, surplombé par Oui mais. Deuxième tableau. Perchés sur les MARC VOIRY l’étrangeté large et haute de deux chaises chaises de juge-arbitre, avancées maintenant de juge-arbitre de tennis. Une cloche de ring sur le devant de la scène, Mélanie Fonce, Le monde dans un instant a été créé du de boxe à l’ancienne sonne à l’avant-scène : vélo-factrice au chômage, désemparée mais 7 au 10 février à La Criée, Marseille

L’artiste en utopie

orsqu’ écrit L’Âme Humaine live électro-pop nimbe sous le socialisme en 1891, il conçoit avec de poésie le regard en Lhumour et finesse une société dans laquelle creux sur notre société l’art sauve l’humanité. Les individus, enfin qui dénature un indi- libérés des contraintes avilissantes grâce à vidualisme poten- l’exploitation des machines, développent un tiellement artiste en raffinement du rapport esthétique à la vie, qui vulgaire culte de soi. les élève et provoque des élans de joie. Ce Car l’issue humaine texte hybride et décapant, relevant de l’essai, pour Wilde est le deve- du programme politique, du discours uto- nir-artiste de tous. pique ainsi que du manuel de développement Ainsi l’adresse directe personnel, est transposé avec inventivité et aux spectateurs est © Pascal Victor justesse au théâtre par Geoffroy Rondeau, un choix judicieux Séverine Astel et Gérald Kurdian. Le percutants. Dès les premiers instants nous pour illustrer une idée centrale du texte : ce plateau propose un univers évoquant à la fois assistons à une incarnation adéquate de la n’est pas à l’art de devenir populaire mais un intérieur design raffiné et un assemblage de pensée parfois paradoxale du dandy irlandais. au public de se faire artiste. C’est d’ailleurs formes rectangulaires découpant des espaces, Deux comédiens et un musicien forment un trio à une position d’artistes-citoyens que nous traçant des lignes renforcées par des couleurs soutenu par des créations vidéos étonnantes convient progressivement les comédiens, acidulées. Bientôt certains volumes s’ouvrent, et envoûtantes qui rendent compte avec joie et réalisant le rêve de l’auteur. figurant frigo, Smartphone et surfaces digi- singularité de l’individualisme socialiste cher DELPHINE DIEU tales. Comme issus d’un livre pop-up, les à Wilde. On regrettera parfois un déséquilibre personnages apparaissent, disparaissent, entre parties filmées et parties jouées. Mais L’Âme humaine sous le socialisme a été présenté délivrant en coup de point des aphorismes la dramaturgie est efficace et la musique à La Criée, à Marseille du 20 au 23 février 33

Musset au Sémaphore, Marivaux à la Répertoire Garance, Tchekhov à la Criée... Trois textes du répertoire qui mettent en et domination scène la relation maître/valet sociale

va Doumbia recréait Badine à Port-de- Bouc. Un titre qui laissait entendre une Eadaptation de la pièce de Musset, même si, finalement, il s’agissait bien de mettre en scène On ne badine pas avec l’amour dans son intégralité, en ajoutant simplement deux scènes qui du coup pimentaient judicieusement le texte : un prélude était lancé par deux acteurs dans le public, jouant les spectateurs rebelles, jeunes kaïra au verbe haut qui peu à peu se mettent à incarner les caractères comiques de la pièce, prêtre aviné et précepteur glou- ton, racailles d’une époque où la domination sociale s’affichait comme un principe. L’autre JAHM © Xavier Cantat scène ajoutée est tout aussi politique : Rosette, ajouts : ses JAHM par leur acronyme l’annoncent, et le vieux serviteur oublié mourra tout seul, fille du peuple trahie par Perdican, au lieu de et L’Île des esclaves s’invite, questionnant la nostalgique d’une féodalité qui au moins mourir en silence se révoltera, empruntant ses légitimité de la domination de classe. Ainsi Silvia maintenait debout la maison des maîtres... mots à Noun, sœur de lait non de Camille mais qui se fait passer pour sa suivante se montre par- Dans la mise en scène de Benedetti rien n’est d’Indiana : dans le roman de George Sand ticulièrement odieuse et dominatrice, résistant au déplacé, actualisé ou pimenté. Il s’agit de plonger la femme du peuple humiliée, noire qui plus sentiment amoureux qu’elle éprouve pour celui dans l’œuvre, de la jouer au plus juste, de faire est, ne reste pas silencieuse. Les plus célèbres qu’elle croit être un valet, et piétinant celui de confiance au texte dans une modernité qui passages de la pièce de Musset, largement Lisette, elle-même dédoublée par une servante doit tout à la maîtrise du jeu : lui-même est un empruntés à sa correspondance avec George muette endossant véritablement l’esclavage comédien fabuleux qui donne à Lopakhine, fils Sand, parlent aussi de ces dominations entre les domestique : la Révolution française passera de serf et commerçant qui deviendra propriétaire hommes et les femmes, entre les habitants du par là et abolira les ordres et leurs privilèges, de la Cerisaie, une épaisseur humaine inédite. château et ceux du village, les éduqués et les mais non la domination des classes populaires, De petits décalages, brefs temps d’arrêts, apar- autres, exploités, trompés, avilis. Eva Doumbia qui s’inscrit jusque dans le rapport amoureux, tés murmurés au public, scène de réception fait jouer Perdican et Rosette par deux comé- le vocabulaire, les usages, les vêtements, dont jouée dans la transparence de paravents, diens noirs, réactivant une autre domination, et la metteure en scène joue habilement. Mais là introduisent une discrète distanciation avec assoit ses comédiens à la table, s’appropriant encore la concomitance de deux discours, celui un réalisme de façade, tout comme le rythme les mots comme d’un texte lu. Les jeunes de la pièce plongé dans son temps, celui de ses adopté -tout va à toute allure- et décor sonore s’en sortent bien, mais les deux comédiens actualisations qui le complètent et le détournent, qui laisse entendre le retard du train, la fer- plus âgés ont du mal à jouer entre lecture et placent les acteurs dans un entre deux indécis meture définitive de la maison ou la mise à incarnation, jeu et ironie, présent et passé. Un qui les empêche souvent d’être convaincants. bas de la cerisaie à la tronçonneuse. Ainsi le Badine qui, au-delà de l’analyse dramaturgique spectateur peut entendre le texte pour ce qu’il qui réactive le sens politique du texte, aurait Servitude volontaire est, s’attacher à des personnages et à leurs nécessité une direction d’acteurs plus précise. La mise en scène de La Cerisaie par Christian ambiguïtés incarnées, mais aussi mesurer par Benedetti repose sur le pari inverse : il s’agit instants comment cette fin de monde résonne L’ordre et la classe de monter le texte à nu, avec de grands acteurs, aujourd’hui, dans nos maisons délitées où Chez Marivaux, avant la Révolution Fran- dans une scénographie et des costumes les plus l’argent règne en maître, et où les exploités çaise, le rapport de classe est moins sournois, insignifiants possible. La force de la pièce, écrite continuent de souffrir et mourir en silence, et la domination faisant partie de l’ordre politique avant une autre révolution, parle immédiatement souvent consentants... de la monarchie. Le Jeu de l’amour et du hasard à notre époque. Elle dit la fin d’un temps, d’un AGNÈS FRESCHEL affirme que l’on aime dans sa propre classe, mode de vie où la liberté sexuelle, la beauté et c’est-à-dire que le hasard n’existe pas dans le la nature en fleurs n’appartenaient qu’à une choix amoureux au regard de la détermination classe délicieuse et dominante qui ne voulait Badine a été joué au Sémaphore, Port-de-Bouc, sociale. Là encore, Pascale Daniel-Lacombe pas envisager sa fin, ni la dure exploitation le 9 février, #JAHM à la Garance, (Théâtre du Rivage) propose une mise en qu’elle imposait à ses serviteurs. Dans cette Cavaillon, le 8 février, La Cerisaie à La scène de l’intégralité du texte, avec quelques Cerisaie tout se rate, se brise et se dévoie, Criée, Marseille, du 8 au 10 février 34 critiques spectacles Les chinois de l’ombre

a dernière pièce de en est donnée par une mèche allumée côté Franck Dimech jardin au début du spectacle qui se consume Linterroge la situa- lentement sans jamais exploser. Pas de révolte tion des populations dans ce monde souterrain. d’origine chinoise à Le spectacle ne baigne pas pour autant Aubervilliers et Mar- dans le drame. La fantaisie est amenée par seille. Si sa préparation le personnage de l’européen bienveillant a demandé un travail et curieux, excellent Olivier Horeau qui d’investigation et semble le double naïf du metteur en scène. d’écoute, il ne s’agit Il cherche le contact à tout prix en exhibant en aucun cas de livrer la photo de sa maison familiale, engage une une œuvre documen- conversation sérieuse avec un lapin posé sur taire, mais plutôt de le clavier d’un piano, puis s’applique à manger restituer un climat et des raviolis avec des baguettes. Surréaliste ! surtout de briser les © Willy Vainqueur Sans oublier l’envahissement de la scène clichés et les représentations folkloriques Jung-Shih Chou dit un long texte à voix par une multitude de tabourets rouges ou d’une population et sa civilisation. Donc soufflée, et l’expression de son visage en dit de baguettes tombées du ciel. Le spectacle pas de dragon, ni de pieds bandés, mais une beaucoup sur la douleur qu’elle ressent. Mais s’achève sur l’évocation de Xu Lizhi, poète dénonciation du travail des immigrés exploités sa traduction aurait certainement permis une suicidé à l’âge de 24 ans, et le texte tracé sur dans des ateliers clandestins sous l’autorité meilleure compréhension et imprégnation une immense banderole, hommage à toutes de chinois nantis. Ainsi la scène dans les de la situation… les victimes de la société marchande. cuisines d’un restaurant où s’échinent les D’autres récits sont faits en français pour CHRIS BOURGUE ouvrières tandis que la patronne hurle des évoquer l’arrivée en France, la tragédie de la ordres et consulte son téléphone portable : défénestration d’une ouvrière effrayée par un pas besoin de traduction surtitrée pour com- contrôle de police dans un atelier… Franck prendre ces échanges verbaux. C’est aussi en Dimech révèle par touches l’opacité de ce Les chinois à Marseille s’est joué au Théâtre chinois, sans traduction, que la comédienne monde impénétrable et muet. L’illustration Joliette, Marseille, du 20 au 23 février Exécution d’une œuvre

ans la pièce d’Howard Barker, Tableau réussite un collectif artistique d’une vingtaine enjeux de la pièce, préférant l’abstraction en d’une exécution, le doge lance : « Je d’étudiants, dont onze comédiens. La rigueur gommant les références à l’époque et aux lieux. Dméprise les artistes autant que je vénère du travail effectué est perceptible dans la clarté Car la République vénitienne du XVIe siècle, l’art ». Ou bien est-ce le cardinal ? dont les dirigeants réclament Affirmation provenant des pou- une œuvre de célébration à la voirs, qu’ils soient politiques ou peintre Galactia, assurant leur religieux, posant clairement les hégémonie et initiant un récit relations paradoxales entre art et national fondateur, ressemble dirigeants mis en lumière dans à notre système libéral, dans la pièce. L’auteur britannique lequel tout art subversif ou contemporain, inventeur du d’avant-garde est récupéré et théâtre de la catastrophe, peint digéré. La toile scandaleuse de avec nuances les contradictions l’artiste qui montre la cruauté humaines, les cruautés comme et les horreurs de la guerre sera les intelligences. Le choix de ce comprise. Mais : « Être comprise, texte dense pour cette production c’est la mort ! » avait-elle annoncé universitaire est ambitieux et prophétiquement. Et les diverses judicieux. La richesse des thèmes Galactia, figées dans un cri rouge

abordés, l’actualité de leurs © Roxane Samperiz et silencieux clôturant la pièce, questions nourrit la création des étudiants. des propos dont l’exigence et la subtilité sont indiquent avec beauté ce moment où l’œuvre Comment créer dans un système de mécénat ? portées par des comédiens investis et précis exécutée exécute son auteur. Quelles places les femmes occupent-elles dans dans leur jeu. Les personnages prennent vie et DELPHINE DIEU l’art ? Agnès Régolo, metteuse en scène corps dans un rythme tenu et ponctué d’une chargée d’enseignement dans la formation création sonore évoquant la catastrophe en Tableau d’une exécution a été joué du 7 au 10 mars Arts du spectacle de l’AMU, emmène avec cours. La scénographie sert efficacement les à la salle de Lenche du Théâtre Joliette à Marseille 35 Epuiser les signes

’est à une chorégraphie d’enquête que lointain, montrant une nous convie Ambra Senatore dans sa mystérieuse femme Cdernière création Scena madre. Les signes épluchant des patates sont dévoilés peu à peu, par accumulations, dans sa cuisine, déplacements, variations de situations mini- fonctionne comme males. Au départ, le vide d’une scène blanche, un motif qui rythme encadrée de lourds rideaux noirs. Par solo, un récit à l’envers. puis duo, des personnages entrent, sortent. Comme une scène Cousant et décousant des gestes ébauchés. primitive. Entraperçue Abstraits. On cherche une logique, un legato furtivement. Et non entre ces reprises de micro saynètes qui une scène de crime semblent issues des souvenirs fragmentaires comme on aurait pu de rencontres ordinaires, de réminiscences initialement le croire. de films, de livres. On cherche un ordre à ces La madre qui prépare apparitions / disparitions ainsi qu’aux actions son repas (sa scène ? chorégraphiées avec minutie, alliant théâtralité, La cena di madre ?) est légèreté et facétie. Bientôt les sept interprètes Scena Madre, photo de répétition © ccn de Nantes - Bastien Capela l’action dramatique occupent chacun leur espace, délimité par qui n’en sont pas. Autant les petits papiers hors-scène qui permet l’exploration ludique des jeux de lumières. Et il semble que le lieu montrés à la dérobade, comme des pièces à des enfants-danseurs le temps que le plat où ils se trouvent détermine la danse et la conviction ou des informations essentielles, soit prêt, ou bien plutôt ses épluchures qui posture, le personnage. Puis le fil que l’on que les actions répétées, déplacées et augmen- s’accumulent comme autant de significations croyait tenir s’écroule comme ces châteaux tées, ces signes ne font pas sens. Et c’est de éparpillées. de cartes fabriqués par un des danseurs. La cela qu’il s’agit : l’épuisement du sens derrière DELPHINE DIEU grammaire des corps alterne entre virtuosité le jeu infini des fausses pistes. Il n’y a rien à et jeux d’échos, mouvements extraits de notre chercher. Il y a à Voir. Un des personnages le plat quotidien. On nous présente des signes, souligne : « Le tableau est la solution à tout. » Scena madre était présenté les 8 et 9 des indices qui s’effacent aussitôt. Ou plutôt En cela le soulèvement récurrent du rideau au février au théâtre du Merlan, Marseille Diablotin

l est irritant, ce diable. Jeune et beau gosse, compagnie Pour ainsi dire que l’on comprend l’objectif est atteint. La pièce Le chat n’a il frime en pantalons moulants, persuadé la raison de cette atmosphère déstabilisante. que faire des souris mortes pose toutefois Id’avoir raison, mais prompt à changer d’avis. Le texte de Philippe Dorin, mis en scène par un problème, car elle s’adresse aux enfants à « On apprécie d’autant plus les choses que Sylviane Fortuny, plutôt que « d’aborder le partir de 9 ans. Soit un âge où l’on n’a -à moins les autres ne peuvent pas d’être très précoce- pas encore en avoir », assène-t-il avec les clés pour comprendre les cynisme, précisant un peu plus références au roman de Mikhaïl tard « faut pas croire tout ce Boulgakov Le Maître et Mar- que je dis ». C’est vrai qu’il est guerite, ou à l’œuvre de Faust. difficile à suivre, ce personnage Et pas non plus l’expérience inspiré librement du Méphisto des incertitudes existentielles de Faust. Tout comme les communes à l’adolescence, pour autres protagonistes de la en reconnaître les allusions sur pièce. Ce n’est pas faute scène. Quant aux adultes qui les d’enthousiasme, au contraire, accompagnent, probablement les deux rôles féminins décla- trop éloignés de cette période rant avec conviction qu’elles inconfortable, ils émergent de n’ont « ni Dieu, ni maître », la représentation plus per- et se fichent de savoir qui a © Anne Sendik plexes qu’agacés, mais surtout créé le monde. Mais il faut un moment avant mythe d’un point de vue sociétal ou religieux » nostalgiques de la profondeur faustienne. d’identifier Marguerite ; le jeune premier a se focalise sur l’adolescence, ce temps de GAËLLE CLOAREC tellement peu de caractère que l’assistance transition entre l’enfance et l’âge adulte, règne est désolée pour lui, et l’ensemble manque du doute et des volte-faces. De ce point de Le chat n’a que faire des souris mortes s’est singulièrement de tenue. vue, et s’il s’agit de mettre le spectateur en joué les 8 et 9 février au Théâtre Massalia, C’est en allant chercher la note d’intention de la situation de ressentir les affres adolescentes, Marseille, et le 3 février au Théâtre de Fos 36 critiques spectacles Naïveté voyageuse

u’aurait dit Jules Verne de la douce Mrs Aouda (loin- de l’adaptation déjantée taine dans une prise vidéo), ou Qproposée par la Cie La l’attaque des Sioux, le déroulé Naïve de son Tour du monde de la pièce subit des à-coups, en 80 jours ? Sans doute, le le mécanisme d’horlogerie père de la science-fiction aurait connaît de tonitruants ratés, apprécié l’usage de machines le personnage de Passepartout futuristes, le personnage d’un refuse de narrer l’histoire sous savant illuminé, le recours à prétexte que ce n’est pas son des personnages robots, dont rôle… Hervé Pezière, Patrick l’animation semble tellement Henry et Bruno Bonomo s’en vraie que leur effondrement donnent à cœur joie dans la final constitue un élément de tonique mise en scène de Jean- surprise… L’Espace NoVa de Charles Raymond qui use Velaux accueillait la création d’une esthétique aux maints 2018 (qu’elle coproduit) de la © Ville de Velaux retournements, dans un décor troupe fantaisiste et iconoclaste dans le cadre York… Obstacles et contretemps rythment que n’aurait pas renié Méliès. Le roman devient de ses Carnets de voyage, thème de la saison. le parcours haletant. Une énorme horloge un show, abondé de chansons anglaises (sic !) Et quel carnet ! Les personnages de Jules Verne, occupe la scène, ajoutant au pari du riche des Beatles, de Queen et la musique originale revenus de leurs pérégrinations, se lancent anglais celui des comédiens qui tentent de Fredo Faranda (groupe Valmy)… Du dans un show burlesque où ils évoquent leurs d’achever la narration de ses aventures en Music-Hall ? Une belle manière d’appréhender aventures. Du cœur de Londres où Phileas une heure. De même que pour Phileas Fogg, la distanciation propre à toute fiction ! Fogg parie la moitié de sa fortune avec ses épris de précision (« l’imprévu n’existe pas » !), MARYVONNE COLOMBANI collègues du Reform Club, la course contre le et voit son trajet perturbé par l’inspecteur Fix, temps nous entraîne à Suez, Bombay, Calcutta, persuadé qu’il tient là le voleur de la Banque Le Tour du monde en 80 jours a été créé Hong Kong, Yokohama, San Francisco, New d’Angleterre, mais aussi par le sauvetage le 9 février à l’Espace NoVa, Velaux Un chien trop sage aussi bien par les gens du village que par sa propre fille et son ami l’écrivain. Percer le mystère qui a accompagné cet homme tout au long de sa vie constitue la trame du récit. Cette énigme sert à introduire un thème cher à l’auteur : le pardon. Il semble ici quelque peu plaqué, n’apportant rien à l’intrigue. Autre ingrédient indispensable au récit : la minute d’érotisme au passé simple : « Nous passâmes la nuit ensemble, coquins, respectueux, alternant la volupté et le chagrin, (…) tantôt bestiaux, tantôt raffinés, toujours complices… ». En fait, Marie-Françoise et Jean-Claude Broche, les metteurs en scène de la compagnie du Roseau n’ont pas adapté la nouvelle, celle-ci nous étant livrée in extenso. Deux acteurs : l’un, Patrice Dehent, incarne le médecin, l’autre, Laurent Feuillebois, est à la fois l’ami écrivain (le narrateur) et tous les autres personnages. Alternativement, chacun récite de longs monologues en mettant fidèlement leur voix, leur sensibilité au service de la nouvelle. Ayant pris le parti de privilégier le texte, craignant sans doute qu’une réécriture ne bouscule le classicisme rassurant et convenu de la prose d’Eric-Emmanuel Schmidt, on exclut ainsi toute forme de théâtralité. Le Chien , MFB © X-D.R Une prose empesée, récitée par les deux acteurs n’alluma pas l’étin- uand le nom d’Eric-Emmanuel Schmidt est sur une affiche, le celle susceptible d’enflammer le spectateur, de faire de cet instant théâtre est plein. Ce soir-là, le théâtre du Balcon n’a pas dérogé à un vrai moment de théâtre. Le chien était mort une deuxième fois. Qla règle. On jouait l’adaptation d’une de ses nouvelles, Le Chien, CAROLINE GERARD extraite du recueil Les deux messieurs de Bruxelles. Un médecin à la retraite se suicide cinq jours après la mort accidentelle de son chien, un beauceron nommé Argos. Ce geste est incompris par tous, Le Chien a été joué le 17 février au Théâtre du Balcon, Avignon 37 Littérature en résistance Filmer

nspiré du roman-jeunesse de Sam Mills Black-out, le spectacle Flaubert Iconcocté avec une éblouissante omment Truffaut aurait-il filmé intelligence par le Collectif Men- Madame Bovary ? Pas comme suel adopte un titre date, 2043, à CChabrol, c’est sûr, il l’aurait déca- l’instar de 1984 de George Orwell lée et rapprochée de nous... Cendre (traduction de Valérie Le Plouhinec Chassanne se met en scène, fantasmant pour l’édition française, éd. Naïve un film qu’elle écrirait pour Truffaut, livres, 2010) ; texte d’anticipation dialoguant avec Gustave aussi, adaptant plus que de science-fiction, qui nous les scènes de son roman avec les yeux de entraîne dans une dystopie qui n’est © Collectif Mensuel Berthe, la fille d’Emma et de Charles qui pas sans rappeler celle de Fahrenheit 451 de pensée critique, peu à peu sa conscience a fini orpheline et ouvrière… La lecture, Ray Bradbury. Le gouvernement britannique, se forme, par ses lectures, Sa majesté des intéressante, souligne la frustration, suite à des attentats perpétrés par des jeunes mouches, L’attrape-cœurs, Lady Chatterley, l’insatisfaction sexuelle et intellectuelle gens qui auraient lu le subversif 1984, a ins- l’écoute d’un bon vieux rock, ses discussions d’Emma, son romantisme décapité, sa tauré un système totalitaire « pour le bien avec le groupe résistant « Les Mots ». Se pose jeunesse trompée et incomprise. La de tous », et éradiqué des livres tout ce qui la question de la forme que peut prendre la modernité de cette Bovary nous frappe, pouvait induire à une subversion quelconque. révolte : violente, pacifiste ? Le choix reste la description de la condition féminine, L’adolescent Stéphan qu’interprète avec une ouvert, posé dès l’incipit de la pièce qui, en conjugale, toujours à l’œuvre aujourd’hui, belle vérité un jeune comédien, enserré dans un long retour en arrière, raconte son histoire ; dans la négation du désir féminin. Oui, une arène étroite surplombée par quatre il la referme, laissant au spectateur son libre Truffaut en aurait fait un grand film... musiciens-comédiens qui créent un décor arbitre, principe premier d’humanité. Un théâtre Mais on ne sait ce qu’incarne au juste sonore et musical. Solitude devant ses actes, d’anticipation d’une troublante actualité ! Cendre Chassanne sur le plateau : sa responsabilité, ses lectures… après avoir MARYVONNE COLOMBANI Bovary, elle-même lisant le roman, un renié son père libraire, été adopté par une autre personnage qu’elle qui raconte famille conforme, « parfaite », et consommé 2043 a été joué le 15 février au théâtre cela ? Cette indécision, dont elle pourrait les pilules « du bonheur » qui annihilent toute de Fontblanche, Vitrolles jouer en passant d’un plan à l’autre, reste informe et vague, affaiblissant la portée d’une relecture de Flaubert pourtant très pertinente. Le plaisir du Du pourquoi et de la tragédie texte persiste, mais le spectacle échoue de peu, manquant de jeu, de je et d’elle. À l’instar d’une tragédie antique, Madame Bovary, c’est qui ? le chœur (toujours une formation AGNÈS FRESCHEL locale invitée -à Vitrolles le très beau Chœur de la Maison Pour Tous) est témoin, commentateur, acteur, Bovary, les films sont plus ourle le récit, de chants qui le par- beaux que la vie a été créé au théâtre des Halles, Avignon, courent de leur innocence, de leur les 15 et 16 février confiance, jusqu’au superbe temps final, bouleversant dans sa pureté

© Serge Martinez mélodique. Entre réalité et fiction, ourquoi ? » est la question fondatrice actualité et distanciation théâtrale, la pièce © Octave Paute de la pièce de David Greig, Les sait aborder avec une sensible pertinence un «PÉvènements, traduite par Domi- acte sidérant, poser des mots sur l’indicible, nique Hollier et mise en scène avec sobriété tenter de mettre du rationnel dans ce qui et intelligence par Ramin Gray. Cruellement nous échappe. Claire (merveilleuse Romane contemporaine, elle renvoie tour à tour aux Bohringer), dans sa quête pour comprendre, problèmes des migrations et des attentats. approcher l’assassin (Antoine Reinartz qui Claire, jeune prêtre, chef d’une chorale où se endosse avec une aisance circassienne tous les retrouvent des chanteurs issus de toutes les autres personnages) va tout perdre ; chemin de parties du monde en une communauté idéale dénuement, de dépouillement, de sainteté… et réalisée, cherche à comprendre non pas ce La tragédie est là, actuelle, dans cette faille où qu’elle a vécu en survivant de peu au massacre la raison n’est plus, bouleversante d’humanité. de son ensemble par un jeune homme qui M.C. veut détruire tout ce qui est étranger mais Les événements a été donné le 20 ce qui a poussé le criminel à la barbarie. février à Vitrolles, salle Guy Obino 38 critiques spectacles

© Arnaud Bertereau que Peer est dans le même temps un héros, sur la brillante performance de Radouan Maudit soit un mortel et un mythe. Parce que l’adapta- Leflahi, d’une sincérité troublante dans tion et la mise en scène de David Bobée tous ses états. Effronté, farouche, vaurien, agissent comme un feu d’artifices avec son bagarreur, baratineur, imposteur pris au Peer Gynt tourbillon d’images, de récits, de musiques, piège de ses propres mensonges. Avec la de folies scéniques sans jamais perdre de vue frénésie de la jeunesse, il mord goulûment ourquoi Peer Gynt d’Henrik Ibsen créée l’essentiel de la trame originelle. L’affabula- dans une vie qui ne pourra jamais lui donner en 1876 n’a-t-elle pas pris une ride ? Pour- tion, la quête de soi, la lâcheté. Portée par le bonheur tant il se vautre dans la veulerie, Pquoi la quête de Peer et sa malédiction une troupe aussi éclectique que magnifique la tromperie, la violence, le déni malgré toute résonnent-elles encore aujourd’hui ? Parce dans sa présence inspirée, la pièce repose l’attention d’une mère aimante. Mais lucide :

Plaidoiries à vif !

’autobiographie de Kery James, Banlieu- sard et fier de lettres, sert de prétexte à un Lduel entre celui qui porte haut les couleurs Yannik A Vif © Nathadread A Vif du rap depuis vingt ans et le comédien Landrein. Avec la voix off de Jean-Pierre Baro, comédien et metteur en scène formé à l’ERAC, fan de la première heure de ses albums. Dans un dispositif a minima (une longue table, un écran, deux chaises et deux pupitres), deux avocats s’affrontent autour d’une question centrale : « est-ce que les Français ont les dirigeants qu’ils méritent ? ». Arguments contre démonstrations, les deux adversaires vont déployer ruses, invectives et humour cynique dans deux plaidoiries inver- sement attendues à la couleur de leur peau, balayant les préjugés d’un revers dialectique. État, République, Démocratie, Citoyenneté sont passés au crible par le « black des banlieues » et le « bourgeois blanc de Neuilly » qui rebattent les cartes à leur manière, piochant dans leurs notes, l’un citant le Petit Larousse l’autre l’écrivain argentin Julio Florencio Cortázar ! 39

« un cochon de fils comme toi ! »… Son destin est cauchemardesque et ses rêves La voix de son Maître inaboutis, car celui qui se croyait roi ou empereur terminera sa course dans une solitude effroyable. David Bobée crée un théâtre cinématographique dans lequel le spectateur plonge avec délectation durant 3h40, excepté quelques « minuscules lon- gueurs », et son immersion est totale dès le rideau levé. Dans une ambiance de fête foraine où les montagnes russes ont remplacé les montagnes norvégiennes, les scènes s’enchaînent en une succession de tableaux vivants ; c’est la place du cirque avec sa danseuse et son musicien, la place du village avec son forgeron, la cour de ferme à l’orée d’une noce, la montagne peuplée de trolls, l’antichambre d’une société du CAC 40, un © Pierre Grosbois bateau dans la mer du Nord. David Bobée et ses compagnons de théâtre chevauchent elire Madame Bovary à voix haute, quel pari Mais n’est-ce pas là, justement, l’objectif du avec fougue la monture de Peer qui court osé ! Le metteur en scène et dramaturge procès : ausculter chaque détail de la vie au devant de son destin, aveuglé par son Rportugais Tiago Rodrigues s’en empare d’Emma pour juger la parole licencieuse de individualisme triomphant. et réussit une pièce à l’extrême limpidité là l’écrivain ! MARIE GODFRIN-GUIDICELLI où l’on pouvait craindre l’inextricable car M.G-G « sa » Madame Bovary est un entrelacs de voix, de langes, d’écritures. Prenant prétexte du procès intenté contre Gustave Flaubert Peer Gynt a été joué les 8 et 9 février Bovary a été joué les 16 et 17 février à au théâtre Les Salins, en 1856 pour immoralité, Tiago Rodrigues Châteauvallon scène nationale, Ollioules scène nationale de Martigues réécrit l’histoire, mêlant les procès-verbaux et les 21 et 22 février au Théâtre d’Arles des audiences, la correspondance entre le romancier et l’amour de sa vie, Elisa Schle- singer, et quelques extraits du célèbre roman. L’artistique, le politique et le privé ne font plus qu’un. La démarche est habile, la visée est juste : interroger la porosité entre ces espaces prétendument étanches, mettre en débat l’immunité de l’art, la censure, et, Qui de Yann Jaraudière et Souleymaan Traoré selon l’expression contemporaine, « le poli- remportera le concours d’éloquence de la tiquement correct ». Comme est pertinente petite conférence ? Difficile à dire car les et joyeuse la mise en abime sur scène : sur deux tribuns prennent à partie le public, à un sol jonché de feuilles blanches éparses bon escient et au bon moment, qui réagit sans cesse foulées ou brandies (pages du au quart de tour et n’hésite pas à s’exprimer roman, actes du procès…), les comédiens à voix haute. À chaud et en direct, la partie embrassent leurs personnages à pleine de ping-pong fonctionne à merveille car bouche. Avec espièglerie, fraicheur, et une chacun tient le rythme avec une verve totale conviction. Tout se joue dans la salle piquée d’humour et de saillies, avec des du tribunal. Les amours adultères d’Emma, séquences slamées entrecoupées de pro- son alanguissement dépressif, la fidélité jections vidéo, sur le ghetto, la pauvreté, la de Charles, jusqu’à l’ennui mortel de la rue, la discrimination, les affamés du pouvoir, vie provinciale. Mais, surtout, l’expression l’éducation. Jean-Pierre Baro a donc visé d’une droiture morale bafouée aux yeux de juste, qui transforme le théâtre en et la société bourgeoise. Avocats de la défense œuvre au dialogue avec le public. et de l’accusation, Charles, Gustave, les M.G-G amants Léon et Rodolphe, Emma prennent vie - du rire aux larmes et de la valse à la transe techno - dans un espace ouvert, À vif a été joué le 13 février au Liberté scène nationale de Toulon éclaté, simplement fragmenté par quatre paravents mobiles. D’épaisses loupes filtrent 20 et 21 mars Le Merlan, Marseille la lumière, grossissent le ridicule des accu- 04 91 11 19 20 merlan.org sations, examinent les mystères du cœur… 40 critiques spectacles Scènes d’intérieur

ue se passe-t-il pendant 20 ans, 30 ans, pauvres, d’avoir voulu résister lorsqu’on est enfermé ? Tous les jours la à une société qui les aiguillait Qmême chose ? Rien à faire -rien à dire ? toujours dans le même sens, Didier Ruiz, metteur en scène d’un théâtre qui de s’être débrouillés avec les vient recueillir la parole pour la restituer telle moyens du bord, d’avoir voulu quelle sur le plateau, entre témoignage et acte s’évader, d’avoir espéré autre artistique, a rencontré pour sa dernière création chose. 35 ans d’enfermement, 9 des anciens détenus. Ils ont tous les quatre ans à l’isolement total, interdic- une longue expérience de la prison. Des flots à tion d’assister à l’enterrement déverser, des monceaux à partager. Il y a aussi d’un père, fers aux pieds et bras Annette, compagne de l’un d’eux, envers du entravés devant la tombe d’un dedans, qui raconte la détention en creux, celle fils, 27 prisons en 19 ans, auto vécue par les proches, l’amour en pointillés, arrachage de dents, grève de la quelques minutes au parloir, et tout le reste du faim. La liste est longue, les mots temps les larmes qui ne peuvent plus couler. déchirent. Les regards ne cillent Il y a peu, Joël Pommerat présentait le travail pas. Ceux-là ont résisté. Écou- accompli avec les détenus « longue peine » de tons-les pour mieux entendre la Centrale d’Arles (voir Zib’ 114). Sur scène les autres. aujourd’hui, des « anciens » : récidivistes ou ANNA ZISMAN « sorties positives ». Sur fond de grève des © Emilia Stéfani surveillants, projets de nouvelles prisons, aug- et bref), face public, les pieds écartés, le dos mentation du nombre des prisonniers (tandis droit, racontent. Et même si on s’était préparé Une longue peine a été joué au théâtre qu’ailleurs en Europe, les chiffres baissent), le à entendre du dur et du lourd, on était loin du sortieOuest, à Béziers, les 9 et 10 février. monde artistique réagit, s’engage, dénonce. compte. Très loin… Dès les premiers instants, La réalisatrice Stéphane Mercurio a suivi l’élaboration du spectacle, qu’elle restitue dans Le public suit. Découvre. on pénètre dans un monde inconcevable, Après l’ombre. Sortie en salles le 28 mars Pendant une heure et demie, les cinq « inno- où l’absurde le dispute à la violence, où les cents » (Didier Ruiz les appelle comme ça, ces lois se dissolvent dans l’arbitraire. Démesure En avant-première à Montpellier comédiens qui n’en sont pas, qui parlent brut et effroi. Ils sont tous coupables d’être nés le 23 mars (voir P 77) Cauchemar en famille

illiam T. Voll- Thierry Jolivet et sa Cie La Meute nous mann se lançait entraîne dans le tourbillon. Les 9 comédiens et Wdans le siècle les 3 musiciens du groupe lyonnais Mémorial* en publiant, chez Actes occupent un plateau survolté, où les mots Sud, l’un de ses écrits s’entrechoquent dans une orgie du verbe, les plus tonitruants. les corps se livrent et se volent, les histoires En 2000 sortaient les se croisent, les sons déchirent les dialogues. 1000 pages gargan- La scénographie marque les deux mondes, tuesques, sadiennes, le clinquant et le sombre, avec des éléments effrayantes et fasci- qui sans cesse tournent pour signifier qu’on nantes de La famille est ici ou là. Au fond, chant, guitare et batterie royale, incursion soulignent le trait. L’esthétique est réaliste, © Simon Gosselin infernale et biblique le découpage dramaturgique évoque un récit dans l’underground de San Francisco, hanté terrible et salvatrice, sans passé, pleine d’une de BD, on passe d’une case à l’autre, l’espace par les prostituées et le crack, les pédophiles, compassion christique. Dans les lofts et les s’élargit pleine page ou se multiplie dans des les indics, les mac, les clients aussi fauchés et bureaux, John Brady prophétise un avenir plus cadres simultanés. La langue sulfureuse de défoncés que les filles, les fœtus abandonnés, noir encore : la vanité de l’existence, l’avilisse- Vollmann dégouline et étourdit, masturbation doublée d’une fresque au cynisme désenchanté ment, l’obsolescence de tout et tous. Et pour lexicale. L’Ancien testament surplombe cet au pays du capitalisme, ses cocktails, ses lignes siphonner toujours plus le suc, dépenser plus, ensemble apocalyptique. L’expérience théâtrale de coke, sa loi de l’offre et de la demande, ses gagner plus, il projette d’ouvrir un bordel virtuel, n’en est pas pour autant sublimée. costumes Hugo Boss et ses sacs Prada. Deux où les naufragés des open space pourraient A.Z. gourous naviguent sur ses eaux poisseuses. assouvir leur fantasmes les plus terribles. Dans les bas-fonds, c’est Maj (pour Majesté), la Pour cela il va falloir trouver Maj et sa famille La famille royale a été joué au Théâtre « Reine des putes », qui règne sur les trottoirs, déglinguée. de Nîmes les 6 et 7 mars 41 Radio thérapie

panne. Il fait nuit, elle abandonne sa voiture, et tombe sur deux hommes qui émettent, comme autant de bouteilles à la mer, des sensations, des moments à vivre ensemble : une émission de radio. Tous les trois se livrent à des exercices d’auto suggestion pour pénétrer les intérieurs des auditeurs (« Il y a une plante à droite du canapé ? Oui ? Et à gauche, c’est la bibliothèque à CD ? Vous avez du Lou Reed ? »), qui répondent via leur ordinateur par « oui », « non », ou « heu… ». Entre transe (répéter 50 fois Brigade, pour que le mot prenne une allure poétique) et personnalisation des objets qui © Simon Gosselin peuplent les espaces domestiques (« Plante à, maintenant, il y a des gens qui écoutent fait pour qu’une interaction opère entre scène est là, qui toujours te regarde et t’entend »), On traversera le pont une fois rendus à la et ailleurs fantasmés, devant des spectateurs le spectacle approche quelque chose de Lrivière. Mathilde Maillard et Sébastien finalement laissés de côté. Le dispositif invite nos moyens détournés pour tenter de vivre Vial (co-créateurs, avec Antoine Defoort et à une communion quasi spirituelle, autour de ensemble. D’ailleurs, les buches électriques Julien Fournet), muets, au moyen de panneau (petits) événements que les trois comédiens s’allument : ce sont les auditeurs qui sont messages qu’ils font défiler façon témoignage (avec Arnaud Boulogne) partagent avec intervenus. Jouer à avoir froid. Jouer à se faire douloureux sur YouTube, nous expliquent la poignée d’auditeurs. Le public présent réchauffer par des spectateurs invisibles. On que tout est radio-diffusé via Internet, que 17 assiste à une pièce en différé. Quelque chose dirait que c’est du théâtre. auditeurs sont en ce moment même à l’écoute. se passe, qui nous renvoie à notre condition de ANNA ZISMAN Heureusement, la salle d’hTh est pleine, on spectateurs, pendant que, peut-être, émotion se sent moins seuls. Mais, étrangement, le et aventure pénètrent dans le domicile des 17 On traversera le pont une fois rendus à la rivière a été joué à hTh, Domaine de déséquilibre entre public présent et public personnes qui se sont connectées ce soir sur Grammont, Montpellier, les 8 & 9 février invisible persiste tout au long de la pièce, qui le site de la Cie L’Amicale de production. Expérience à vivre via Internet lors de chaque s’adresse à ceux qui ne sont pas là : tout est Mathilde, qui se fait appeler Brigade, tombe en représentation : s’inscrire sur ontraverseralepont.com Pièce de collection

héo Mercier, artiste plasti- de Jonathan Drillet (qui a écrit cien, élabore un travail autour les textes avec Marlène Saldana) Tde l’objet : il les assemble, égraine les formes, les styles, les bouscule les contextes, leur époques. Et subrepticement, la vie invente une (autre) histoire ; s’invite, sort littéralement du cadre. il procède à des greffes, il les Dans la description du tableau anthropomorphise. Les objets Danse sous l’empire de la peur sont ses compagnons, inspi- (Paul Klee), il est question d’un rateurs, matière à récit, il les personnage qui voudrait s’échap- emballe et les nous les rend per, qui se cogne contre le bord. intelligibles. Depuis quelques Alors la narration s’impose : le père années (magnifiqueRadio Vinci © Martin Argyroglo absent-écrasant, sa fille annihilée Park, présenté l’an dernier à hTh), il s’affranchi sa propre collection, au point d’en oublier par la matérialité des souvenirs, la folie qui rode des genres, invite son univers à s’épanouir au sa fille, d’oublier de lui envoyer les cartes parmi les fantômes. Le décor (Théo Mercier spectacle vivant. La fille du collectionneur est postales qu’il lui adressait, retrouvées dans et Arthur Hoffner) se dévoile peu à peu, un hybride entre les deux langages. Les objets son bureau. Il a depuis disparu (s’est-il sui- monumental, abri pour l’inconscient collectif. (d’art) y sont rois, les humains sont réifiés, cidé, comme ses écrits le suggèrent ? s’est-il Et François Chaignaud, véritablement sub- la vie passe des uns aux autres, le souvenir seulement échappé de l’étouffante charge juguant, ressuscite la complexité de l’absent. s’ancre au creux d’un fauteuil, dans un tiroir, paternelle ?) et sa fille ploie sous la charge Si les murs ont des oreilles, les objets recèlent les corps se rigidifient, et se révoltent pour de la collection. On assiste à un pantomime bien nos histoires les plus intimes. exister au-delà de la tyrannie de l’exposition. de vente aux enchères, où elle (excellente A.Z. De la filiation, surtout, car il s’agit bien ici Marlène Saldana) se transforme en table d’héritage, matériel et familial, celui d’un père Art nouveau, en chandelier, en divan, tandis La fille du collectionneur a été joué les 10 et 11 qui semble lui s’être totalement perdu dans que la voix, parfaite de détachement classieux, mars à hTh, domaine de Grammont, Montpellier 42 critiques spectacles C’est (pas) de la danse ! et c’est tant mieux

Deux mille dix sept © David Mambouch La quarantième édition des Hivernales fut une indéniable réussite publique et artistique, démontrant la variété esthétique de la danse d’aujourd’hui, jusqu’à ses frontières

a valeur n’attendrait pas le nombre des des figures où chaque danseur est un élément chorégraphique juste... son univers a long- années ? Visiblement l’expérience des d’un groupe en mouvement, comme dans les temps permis une respiration à la virtuosité et Lfestivals et la culture chorégraphique d’une vols d’oiseaux migratoires. à l’expressivité des autres. Mais son Littéral équipe de programmation, ça compte. Car si l’est sans doute trop, avec ses 60 balais pour toutes les propositions n’étaient pas également Souvenirs fêter son anniversaire, une musique sèche et passionnantes, chacune risquait, à son endroit, Le même principe collectif était à l’œuvre froide, cinq danseurs en rose qui reprennent et la recherche et la création. Quitte à décon- dans Record of ancient things de Petter multiplient ses mouvements sans rien exprimer certer ceux qui s’attendent à « de la danse ». Jacobsson et Thomas Caley, directeurs que leur combinaison. Essoufflé ? du Ballet de Lorraine : il s’agissait, à partir des Grands spectacles impros de la talentueuse troupe en baskets, Furieuses En ouvrant et clôturant par des spectacles de se souvenir des sauts, tours et déboulés Maguy Marin, qui appartient à la même qui rassemblent, les Hivernales ont rempli académiques, de les exécuter à toute allure, génération, tient un propos autrement radical. les grandes salles de la Fabrica et de l’Opéra répétitivement, puis enfin de s’essayer au 2017 est de notre temps. Direct, comme un Confluence : pour commencer le 2 février contact, et à l’écartèlement collectif... Mais coup de poing. Ses interprètes dansent à peine, Minuit, la danse circassienne de Yoann si les moments véritablement chorégraphiés au début, comme sur un dance floor policé, Bourgeois, désormais codirecteur du de la fin étaient fascinants, la première demie puis ils s’harnachent de sacs de shopping, Centre Chorégraphique de Grenoble, jouait heure s’étirait en longueurs sans écriture : de marques, de firmes, de fausses dents trop du pouvoir comique de la chute, et onirique pourquoi ces longs souvenirs brouillons d’un blanches, de chapeaux en formes d’églises de l’envol ; l’autre codirecteur de Grenoble, classicisme mort ? ou de chars, dollars au poing, symboles sans Rachid Ouramdane, faisait, pour clore le La « nouvelle danse », celle des années 80, ambiguïté d’une élite profitant du libéralisme festival le 3 mars, danser le Ballet de Lorraine. le serait-elle autant ? Daniel Larrieu, son sur le dos des ouvriers, des femmes, des vieux, Courir plutôt, dans un désordre feint et une rapport doux au corps, au geste naturel, des damnés de la terre. Les images sont d’une belle harmonie de rouges, pour former des son côté pop parfois, abstrait toujours, sa force à couper le souffle, le sol se peuple de lignes, des ellipses et dessiner sur le plateau fascination pour la transmission de la phrase tombes, les loups s’y faufilent, la musique 43

d’un quotidien qui ouvre la porte à l’utopie Plastoc est une vraie réussite ; Georges Appaix La première pièce jeune public créée par continue d’interroger la parole dansée, et le Christian Ubl, H & G, librement adaptée du couple diffracté en 6 danseurs, dans What do conte Hansel et Gretel des Frères Grimm est you think ; Mon corps Palimpseste d’Eric « croquignolesque » ! Doit-on vraiment pour Oberdorff joue de mystère : les danseurs parler aux enfants, se déguiser, jouer avec des évoluent autour de cocons de tissus, cherchant bouées en plastique en forme de sucettes et à faire corps ensemble. de bouteille de Coca Cola, emprunter leurs Quant à Naïf Production, en résidence expressions et exagérer leurs postures ? S’il aux Hivernales, les deux chorégraphes ont veut « mettre la junk-food au cœur de l’adapta- chacun à leur manière touché à l’essence de tion du conte », sur le plateau, c’est carrément la danse : Mathieu Desseigne en offrant indigeste. Danse gesticulée, narrateur lourde- sa chair partiellement, par bribes éclairées ment impliqué dans le jeu, mimes, grimaces, lentement, jusqu’à l’abstraction (La chair a vocalises et bruits de bouche, roulades, sauts, ses raisons), Sylvain Bouillet en dansant vraie fausse ingénuité… on s’interroge sur le avec son fils, petit garçon de 7 ans. second degré ! Seule l’arrivée des sorcières, Essence du spectacle, de la danse, dans sa à la manière d’un derviche tourneur, projette façon de n’incarner que soi, sans distance, ce les enfants au cœur du conte, apeurés mais qu’aucun adulte n’est capable de faire : rien heureux d’être invités sur scène à les réveiller n’est plus miraculeux qu’un enfant sur une pour les rendre éternellement aimables. scène. Charlie capte tous les regards : son père ne le fait pas danser, ils évoluent ensemble Reflet comme pour jouer, s’étreindre, se repousser Christophe Béranger et Jonathan Pran- aussi, s’agacer. Ils dansent vraiment, explorant las-Descours (Cie Sine qua non Art) n’hé- la relation père fils comme un nouveau pas sitent pas à s’aventurer dans des contrées de deux, à inventer, acrobatique, émouvant, méconnues. Pour Versus ils se sont associés disant la paternité qui écoute, la tendresse, au plasticien marseillais Étienne Rey qui le rêve, l’éveil et l’autorité bienveillante. Tout sculpte la lumière et l’espace avec d’immenses un monde chorégraphique à explorer ! lames de plexiglas qui diffractent les rayons Deux mille dix sept © David Mambouch colorés qu’elles reçoivent. Les deux danseurs lamine, les noms de tous nos oppresseurs Escalier y évoluent, d’abord l’un après l’autre puis milliardaires s’inscrivent dans le décor, comme Corps en état de veille secoués de brefs sou- ensemble ou plutôt côte à côte. Ils suivent un mur infranchissable où les ennemis sont bresauts, pénombre insistante, mouvements les déplacements de la structure plastique enfin désignés. Magistral, dans la forme, le à angles vifs, lente apparition des danseurs, qui partage l’espace scénique et crée des rythme, la force et la clarté du propos. boucles sonores, danse robotisée quand la anamorphoses des mouvements : les dan- Le Jaguar de Marlene Monteiro Freitas est musique techno prend son envol... la création seurs se confondent avec leur image... Les tout aussi sauvage, portant lui aussi ses coups de Liam Warren, Intersum -littéralement « je déplacements, d’une grande lenteur, étirent sur l’élite en tenue de tennis surmaquillée et suis à l’intervalle »-, est un objet plus concep- les corps qui s’enroulent ensuite au sol. La délétère. Avec Andreas Merk elle produit tuel que chorégraphique. Le chorégraphe création musicale de Damien Skoracki une performance criarde, déjantée, où les confronte ses trois interprètes à un grand oppose musique baroque et électronique et un mouvements sont toujours excessifs, nerveux, escalier mobile, tour à tour échafaudage, cage, chanteur lyrique ajoute encore à l’étrangeté du où les corps semblent des mécaniques, des tremplin, qui les conditionne et les empri- climat. Tout déstabilise le spectateur, emporté marionnettes en proie à des saccades, à sonne. Difficile d’atteindre le sommet, d’y par cette très belle proposition. une folie salvatrice qui s’acharne à détruire garder l’équilibre, de combattre le vertige, de AGNÈS FRESCHEL, MARIE GODFRIN-GUIDICELLI jusqu’aux références artistiques, Blaue Reiter, s’élancer sans file ! La danse abstraite, presque ET CHRIS BOURGUE Sacre du printemps, qui envahissent la scène désincarnée, est une valse d’hésitations que pour mieux succomber à la fureur. Long parfois, les corps, entravés dans leurs mouvements, Retrouvez les critiques de Rock’n chair d’Arthur mais comme un excès nécessaire. subissent : l’immobilisme contraint est une Perole et de Etude(s) de chute de Michaël Allibert et Jérôme Grivel sur journalzibeline.fr aliénation. On ne saura pas si Intersum met Aux marges en jeu des robots ou des humains tant sa Il y avait aussi Phasme, de Fré Werbrouck, composition est ordonnancée et structurée, où la danseuse belge coincée dans une table et son propos rationnel. Ici pas d’affect ni bouge inlassablement les bras provoquant, de palpitations, pas de chair ni de peau. Les Les 40e Hivernales se sont déroulées du 2 février malgré de belles lumières parfois, un profond corps, habillés à la manière des fleurettistes, au 3 mars à Avignon, Cavaillon, Vedène ennui : l’absence de danse ne suffit pas à sont en guerre contre le vide. Le rythme est Intersum a été créé le 8 février à Klap , Marseille faire spectacle... hypnotique, l’esthétique lunaire, mais la pièce, Maison pour la danse H & G a été donné le 20 février au Théâtre En revanche les compagnies de la région ont concise et techniquement irréprochable, met de Fos (durant Les Elancées), et du 22 brillé : Ex Nihilo, habitué à la rue, a transporté à rude épreuve la capacité de résistance du au 24 février au Massalia, Marseille sur scène son propos politique et poétique : spectateur face à la lenteur calculée du Versus a été créé le 22 février à Klap Paradise is not enough, centré sur l’évocation mouvement. Maison pour la danse, Marseille 44 critiques rencontres Accueillir les vagabondes

et la conférence abécédaire destinée D’après lui, « certains ne le savent pas, tous au jeune public, qui complétaient ne sont pas bons, mais les habitants de la ce Grand format, ont également Terre sont des jardiniers ». Un optimisme qui fait le plein. n’empêche pas la lucidité du constat ! À Dubaï, C’est dire si la parole de ce paysa- en plein désert, on cultive irrationnellement giste, théoricien du « Tiers-Paysage », toutes les fleurs du monde, on répand de la élément du « Jardin Planétaire » qui neige sur des pistes de ski artificielles. En désigne les espaces de plus en plus Californie, où il ne pleut plus sous les effets restreints où l’homme laisse l’évo- du réchauffement climatique, on peint les lution des lieux à la seule nature, sols en vert pelouse. « Savez-vous qu’il faut était attendue. À mesure que les aussi arroser les gazons en plastique, sinon © Gaëlle Cloarec interrogations liées à la destruction de ils brûlent sous le soleil ? » e 13 février, il fallait arriver tôt pour trouver l’environnement se font plus anxieuses, le désir Le paysagiste recommande, pour quitter le une place encore libre dans l’auditorium de participer à une réflexion de fond sur nos « stupidocène », de se débarrasser de l’illusion Lde la BMVR Alcazar : la venue de Gilles pratiques devient plus prononcé. À Marseille de la maîtrise ; déplorant que le culte des Clément, invité par Opera Mundi à donner se crée d’ailleurs une Cité de l’Agriculture*, machines et de la chimie soit encore ensei- une conférence dans le cadre de son cycle pour fédérer circuits courts, jardinage urbain, gné dans les lycées agricoles. Et suggère Le vivant dans tous ses états, a drainé un permaculture, agro-foresterie et mille autres « d’accueillir les vagabondes », ces plantes qui large public. À tel point qu’il a fallu prévoir propositions concrètes. poussent spontanément dans nos interstices. une projection dans le hall d’entrée de la Selon Gilles Clément, la planète entière peut GAËLLE CLOAREC bibliothèque, pour accueillir les visiteurs en être regardée comme un jardin, soit « un rêve : * cite-agri.fr surnombre. Les ateliers philo adultes et enfants, le lieu où l’on place ce que l’on veut protéger ».

Vues d’artistes

onsidérer les Calanques comme territoire de science et source d’inspiration. C’est Cl’ambition qui a prévalu lors de la mise en place d’une résidence de recherche organisée par la Fondation Camargo, le Parc National des Calanques et l’Institut Pythéas (AMU/ CNRS/IRD). Suite à une réflexion menée avec le paysagiste Gilles Clément (lire ci-dessus), un appel à projet international a été lancé, et huit artistes ont été sélectionnés : Ryo Abe, Julien Clauss, João Modé, Nicolas Floc’h, Frank Gérard, Lisa Hirmer, Katie Holten et Shanta Rao. Invités à travailler sur le rapport homme/nature, ils ont présenté le fruit de leurs réflexions lors d’une Journée portes ouvertes, le 10 février, sur le site de la Alphabet inconscient des calanques - Katie Holten © G.C Fondation Camargo à Cassis. Le travail le plus abouti s’est révélé être issus de l’usine Altéo (cf Zibeline n°93), qui Les visiteurs se sont pressés dans ces beaux celui de deux photographes, Franck Gérard continue de déverser ses toxiques dans le espaces, bâtiments et jardins dominant la et Nicolas Floch. Le premier s’est lancé dans canyon de Cassidaigne- étaient sans doute mer, chaque artiste répondant volontiers aux une documentation visuelle des « espaces une façon de représenter un monde étouffant questions. Parfois en anglais non traduit, hélas, de frottement » entre l’homme et la nature, sous la pollution. On a été moins convaincus dans le cas de l’irlandaise Katie Holten, qui a les conflits d’usage étant... d’usage sur le par la démarche de Shanta Rao : pour évoquer dessiné un intrigant « alphabet inconscient » du littoral méditerranéen. Le second, qui « espère les méduses, elle a travaillé une matière irisée paysage. La lumière somptueuse des calanques, pouvoir continuer sur tout le Parc un projet à base de peinture navale, particulièrement sur terre ou perçant sous les flots, a de quoi ins- au long cours », s’est plus particulièrement nocive. Le FRAC PACA exposera un rendu de pirer ! Mais la démarche du projet ne consistait penché sur les récifs artificiels sous-marins. Les résidence sous forme de plateau expérimental, pas à esthétiser un lieu, si magique soit-il, sans trois tableaux monochromes de Julien Clauss, jusqu’au 8 avril. en éluder les graves problèmes écologiques. réalisés avec des « boues rouges » -pigments G.C. 45 Des règles du jeu

ascale Petit, invitée en résidence à La y a du Flaubert, son Dictionnaire des idées Tour d’Aigues par l’association Nou- reçues notamment, dans ce travail qui semble Pvelles Hybrides, arpente les genres à rassembler les parts hétéroclites de tous les travers plus de vingt publications. Lors de clichés qui régissent les discours censés la rencontre organisée dans la médiathèque nous informer et pourtant nous éloignent Les Carmes (Pertuis), elle offrait une lecture du sens à force de le traquer, de chercher à d’extraits de son ouvrage poétique Le Par- tout définir à travers des « grilles de lecture » fum du jour est fraise (éditions de l’Attente, qui déforment la réalité… à quelles fins ? 2015). Sa voix précise aux inflexions sobres Légèreté et profondeur se mêlent ici en un (intonations « d’aéroport », de « coaching », portrait inquiétant du monde. Détournement ? de « performeuse ») laisse transparaître un « De toute façon pour moi, la littérature est humour décapant, subtil. La ponctuation un détournement » sourit Pascale Petit, « il y nerveuse aiguise le texte, qui parfois s’évade en a toujours une transposition de la réalité dans expressions anglaises, entre les larges nappes

Pascale Petit à la Médiathèque Les Carmes, Pertuis, février 2018 © M.C l’espace d’un livre, chaque fois le décalage de respiration et le vertige des accumulations. est différent, le propre de l’œuvre d’art est L’adresse permanente au lecteur, cet autre point d’être rendus délirants. Les logiques de décaler, de décaper, j’aime bien le terme indispensable de l’exercice littéraire, accorde poussées à l’extrême nous renvoient à une de décapage par l’écriture ». Nous aussi ! une théâtralité, une connivence, mais aussi, analyse du monde contemporain, à ses MARYVONNE COLOMBANI par l’abondance interrogative et impérative, manipulations, sa cruauté, sous couvert le met en demeure. S’exacerbent alors les de questions engageantes, de formules de angoisses générées par un univers construit « management » ou de « relaxation ». « Je ne Rencontre avec Pascale Petit le 17 février à base de tests de personnalité, amplifiés au suis pas un objet, mais un projet » (sic !)… Il à la Médiathèque Les Carmes, Pertuis 46 critiques musiques Per un barbier di qualità !

a nouvelle produc- des artistes, s’accessoirisent... c’est poétique tion du Barbier de et efficace ! On est plongé dans un monde LSéville, représentée abstrait où, in fine, règne... la MUSIQUE, et à l’Opéra de Marseille dans lequel le jeu des acteurs/chanteurs au mois de février, est de s’exprime pleinement. C’est l’incarnation de ces réussites dont on doit Figaro, puissante, impressionnante de Florian parler. De fait, elle permet Sempey qui emporte l’adhésion avec aussi, à un profane d’adhérer en contrepoint, celle de Rosine endossée par d’emblée à un spectacle, Stéphanie d’Oustrac, tout à fait crédible une œuvre, un univers en jeune pupille séquestrée qu’on rêverait qui resterait, sans ses d’enlever. Son mezzo grimpant habilement qualités singulières, plus se moule dans les exigences vocales hors- distant à sa perception norme du rôle. Philippe Talbot (Almaviva), et son plaisir. Certes, Pablo Ruiz (Bartolo), Mirco Palazzi (Basilio) la musique de Rossini © Christian Dresse 2018 Annunziata Vestri (Berta), Mikhaël Pic- est facile d’accès : sa machinerie rythmique aujourd’hui. cone (Fiorello), les messieurs du Chœur de huilée, ses airs enlevés, voire jingelisés (Fiiii... C’est en partie grâce à l’inventivité virevol- l’Opéra (préparés par Emmanuel Trenque) garooo !!)... De même, la comédie originelle tante de Laurent Pelly (et son équipe) qu’on complètent un drôle de plateau emmené avec de Beaumarchais possède des ressorts dra- doit cet attrait. Le cocon scénographique maestria par Roberto Rizzi Brignoli à la tête matiques qui ont fait leur preuve. Cependant, dans lequel il place ses interprètes est illico de l’Orchestre-maison. Un barbier au poil ! donner Il barbiere di Seviglia dans son jus accrocheur, fascinant : une déclinaison de JACQUES FRESCHEL d’il y a quelques années (scénographie, partitions, portées musicales vierges ou non, décors, costumes, mise en scène, postures servent de décors, de barreaux ou rambarde... Il Barbiere di Seviglia a été représenté à parfois poussiéreuses...) n’est plus possible Des panneaux s’ouvrent ou s’enroulent autour l’Opéra de Marseille du 6 au 15 février

Chanter le genre !

ort d’un parcours créatif clarinette et de la trompette entamé il y a plus de vingt intégrés à la scénographie Fans, enrichi de rencontres (Marie Hervé) et la mise en avec les arts de la scène, du scène (Louise Moaty et Flo- théâtre, de la danse et du cirque, rence Beillacou). On s’envole l’ensemble Télémaque pro- avec les comédien.ne.s Agnès posait en février, à l’Odéon à Audiffren et Thibaut Mullot Marseille, un nouvel opus dont il qui se disputent l’identité de a le secret. Étrange objet que cet ce.tte Baron.ne-là, homme opéra bouffe intitulé Le Baron ou/et femme, hermaphrodite, de M. ! Sa musique et son livret tantôt séduisant la maîtresse (collaboration avec Charles de l’empereur d’Autriche ou Eric Petit) ont été conçus incarnant la favorite du harem par le directeur artistique de du Pacha... Du coup, insensi- la compagnie musicale, Raoul blement, c’est la question Lay. Son propos s’inspire du © Pierre Gondard contemporaine de l’identité récit des aventures rocambolesques du Baron des décors sonores propres aux lieux tra- sexuelle que l’on aborde et que les enfants de Münchhausen imaginé par R. E. Raspe versés par les héros : la Vienne impériale, le appréhendent au delà des tabous, grâce à au XVIIIe siècle, comme pour Le Chevalier palais du Pacha d’ et son sérail, un la magie du conte. Que d’ambitions pour un déconcertant, spectacle présenté dans les champ de bataille et ses canonnades, la lune spectacle en apparence simple d’accès ! Que éditions précédentes du festival Grandes accueillante, le ventre d’une baleine en guise de matières sonores nouvelles, de questions Musiques pour Petites Oreilles. de prison... On voyage avec cette musique nécessaires s’imposant aux oreilles et à l’esprit La salle est pleine de petits et grands qui enluminée d’accordéon, de piano et percus- des petits... mais pas qu’eux ! s’immergent dans l’atmosphère fantastique sions, contemporaine sans en avoir l’air, au J.F. et délirante du conte. On joue avec les mots fil des dialogues chantés par Brigitte Peyré en vue de proposer à tous différents niveaux (soprano) et Alexandre Dubois (baryton), Le Baron de M. a été créé les 9 et 10 février de lecture ; on joue avec les notes pour créer de l’errance de la flûte, du hautbois, de la au Théâtre de l’Odéon à Marseille 47 Entre héritage et nomadisme

ans le cadre des Matins sonnants du de relais aux tempi du chef. Gmem, l’Ensemble Musicatreize et Un travail de réverbération Dles musiciens de l’Ircam, jouaient les à convolution par l’Ircam œuvres d’Alberto Posadas (Voces Nóma- (simulation numérique de das) et Michel Petrossian (Horae quidem la réverbération d’un espace cedunt). Ce dernier, sur les images du film de virtuel) donne une sensation son compatriote Artavazd Pelechian, Les de profondeur incroyable, Saisons, signe une musique puissante, très six haut-parleurs diffusant ciselée, avec 12 voix a cappella qui libèrent l’ensemble. Roland Hay- aussi des sons populaires que le compositeur rabedian, concentré, distille aurait pu sans doute exploiter davantage, même © X-D.R de ses gestes toujours sûrs si les tessitures sont très complexes, de la voix de Cicéron : Horae quidem cedunt (Certes, départs et nuances, avec rigueur et souplesse. lyrique à la voix plus poitrinée. La première les heures-saisons disparaissent). Du cycle des saisons de Petrossian aux voix partie s’appuie sur les Géorgiques de Virgile, Alberto Posadas a quant à lui composé son nomades de Posadas, des sons qui fuient, et des poèmes de Philippe Mahaud. Relais œuvre pour 12 voix et un dispositif électroa- se croisent, s’installent ailleurs pour trou- permanents des voix, cris de bergers, appels coustique, sur un de ses textes. Jeu en tuilage ver d’autres identités, se font symboles des incessants, le texte en latin semble structurer hommes/femmes, relayé par les sons électro- réfugiés d’aujourd’hui retrouvant une place, le discours, croisements, répétitions, tension niques, agitation, bruissement de la nature, sons enfin méritée, après tant d’errance pour fuir extrême. Dans une deuxième partie, sur la concrets, tout se mêle. L’informatique se fait les dissonances du monde. fuite inexorable des saisons, l’on retrouve des vocale, la voix devient synthèse, troublant. Final YVES BERGÉ articulations de la Genèse biblique ; bouches extraordinaire, voix entremêlées fortissimo. Le fermées, bourdons, phonèmes répétés, extrêmes traitement informatique se fait en temps réel graves des basses sur les aigus soutenus des grâce aux 2 ingénieurs-musiciens de l’Ircam, Les concerts ont été donnés dans le cadre des Matins soprani. Un final âpre se fait sur la phrase-titre un clavier-midi Studiologic sur scène servant Sonnants du Gmem à l’Opéra de Marseille le 4 mars

Garder la Maîtrise !

omme pour de nombreuses structures artistiques de la région, le fonctionnement Cde la Maîtrise des Bouches-du-Rhône est menacé par un désengagement financier des collectivités territoriales. C’est pourtant l’une des vitrines de l’art vocal du Dépar- tement (mais aussi de la ville de Marseille et de la Région) dont les vertus artistiques et pédagogiques sont indéniables. Dans un quartier peu « favorisé » (le 13e arrondissement à Marseille), c’est tout une jeunesse qui est formée à l’excellence, accompagnée tout au long de sa scolarité, de la Pré-maîtrise (primaire) à la Maîtrise (au collège Malraux), jusqu’au Jeune chœur (lycée et au delà). Kintertotenlieder, création 2017 du BNM avec les chanteurs et solistes de la Maîtrise des Bouches-du-Rhône © Alwin Poiana Certains talents émergent comme le jeune la justesse et l’équilibre des voix (soutenues Cantique de Jean Racine royalement donné sopraniste Théo Imart promis aujourd’hui à par instants par deux professionnels du chœur en bis. Un programme ou de jeunes solistes se un brillant avenir. On ne compte plus les - Asmara -Jean-Bernard Arbeit et Guilhem sont également illustrés : Luca Volfin, Sacha borations fructueuses que Samuel Coquard, Bernard Chalbos- et l’orgue manié par Viala, Ian Esteban Grinblat, Alia Hadjem son directeur artistique, entretient avec les Frédéric Isoletta) ont été au rendez-vous ! ou Majda Boughamni... Combien il serait Chorégies d’Orange, le Festival d’Aix, l’Opéra Des pièces sacrées de différents styles et dommageable de perdre ce pôle d’excellence de Marseille... Partout où l’on a besoin d’un époques ont brillamment résonné dans la nef : et d’intégration ! À bon entendeur... chœur d’enfants entraîné, performant et sûr, on de Purcell ou Buxtehude au temps baroque, de JACQUES FRESCHEL fait appel à la Maîtrise des Bouches-du-Rhône ! Rheinberger ou Mendelssohn parmi les roman- Fin janvier, un concert de soutien était organisé tiques ou, plus modernes, Kodaly, Poulenc Concert de soutien au profit de la Maîtrise à l’église St Vincent de Paul (Réformés) à (magnifiques et difficilesLitanies à la Vierge des Bouches-du-Rhône donné le 28 janvier Marseille. Une fois de plus, le talent, la rigueur, noire interprétées au cordeau !), Fauré et son à l’église Saint Vincent de Paul, Marseille 48 critiques musiques Voyage d’hiver

our changer sa formule, le Festival de l’imitation. Le soliste nous offrit également Musique de Toulon proposait cette l’occasion d’entendre les magnifiques et Pannée aux mélomanes une programmation rarement entendus au concert Chants du resserrée sur 8 jours avec une bonne partie Rhin de Bizet. Dans les Geistervariationen des dates en résidence à l’Opéra de Toulon. et Trois Fantasiestücke, op.111, l’interprète Après un premier concert symphonique avec ne cachait pas non plus son émotion à jouer l’Orchestre de la maison en guise d’ouverture, Schumann. La prestation fut saluée par deux la deuxième soirée invitait le fameux Qua- rappels généreux sur les compositions de tuor Pražák pour un programme mêlant Bach, pour une soirée digne d’éloges. répertoire classique et romantique. Dans la Pour son final, leFestival proposait la troi- première partie consacrée à deux quatuors sième édition de La Nuit du Piano. Investi de Schumann et Brahms, c’est l’écrin un peu par des prétendants au titre de roi ou reine vaste du lieu qui mettait en danger l’équilibre des 88 touches, l’Opéra se mua en temple tonal de l’ensemble, car l’acoustique était du clavier pour le plus grand bonheur d’un un peu mate. L’écueil était amplifié par un public comblé par le talent indiscutable des premier violon à la sonorité légèrement verte, différents interprètes : Nathalia Milstein dont le jeu était plus assuré sur une écriture livra une version de référence de la célèbre en homorythmie que dans les moments où Fantaisie en Ut majeur, op.17 de Schumann ; sa sonorité de soliste devait se détacher par Judith Jaurégui était en lévitation sur les une écriture plus horizontale. Ces œuvres très Estampes et l’Isle Joyeuse de Debussy ; romantiques dans leurs canons stylistiques Jean-Paul Gasparian s’érigeait en Dieu étaient d’autant plus difficiles à appréhender. du martellement frénétique autour du Regard Dans la deuxième partie, les membres du de l’Esprit de joie de Messiaen, et prince du groupe retrouvaient leur superbe accom- legato dans les Impromptus D.899 n° 2 et 3 pagnés du pétillant Raphaël Sévère dans Nathalia Milstein © Frederic Labrouche de Schubert. C’est à François Dumont que le Quintette pour clarinette et cordes en la ainsi son programme d’explications bienve- revenait l’honneur suprême de clôturer la majeur, K581de Mozart. Il y assumait avec nues, peu convenues et sincères mettant à nu soirée sur le Gaspard de la Nuit et La Valse de une évidente aisance son premier rôle, tandis sa personnalité artistique. Ses interprétations Ravel avec des interprétations d’anthologie. que le premier violon retrouvait une sonorité de transcriptions du « Ring » de Wagner bril- Vivement la prochaine édition. plus assurée et mieux fondue avec les autres laient d’une éloquence rare pour montrer deux ÉMILIEN MOREAU membres du quatuor. approches de la transcription diamétralement Le lieu fut réinvesti lors de la venue de Kit différentes : l’une de Liszt au service du piano, Armstrong. Non sans humour mais aussi l’autre de Busoni totalement au service de Le Festival hivernal a eu lieu du humilité, il présentait chaque pièce, éclairant l’œuvre orchestrale originale et focalisée sur 9 au 17 février à Toulon

Sirène de mars

ucie Antunes, périlleux de plus en plus impressionnants, et compositrice et restait d’autres fois comme cloué au sol par Lpercussionniste, les sons. Le oud, paradoxalement, partageait formée au conservatoire basses et frottements avec des percussions de Marseille avant d’en- qui savaient se faire mélodiques... Une his- chaîner les récompenses toire née de la musique semblait se mettre nationales, a donné un en place, entre le corps très présent de la avant-goût de son pro- percussionniste, les tourments de l’acrobate, chain spectacle Bascules les sons préparés, électriques du oud. Comme sur le parvis de l’Opéra un univers mental partagé, qui donnait envie lors des rituelles Sirènes d’en savoir plus long. En novembre, lors de mensuelles de Lieux la création du spectacle ?

publics. Accompagnée Bascules, Lucie Antunes © Grégoire Edouard AGNÈS FRESCHEL d’un oudiste (Yadh Elyes) et d’un acrobate elle semblait donner vie par ses accélérations, danseur (Félix Carrelet), encerclée par un ses crescendos et ses scansions, au corps de dispositif de gongs, des cloches et de tubes, l’acrobate, qui risquait des équilibres et sauts Bascules a été créé le 7 mars à Marseille 49 Et Venise danse! Ouverture de la 16e édition de Mars en Baroque : Saint-Mitre les Remparts accueille Un bal à Venise ean-Marc Aymes décline la soirée concitato, alternance en 3 parties : enjouée, plaintive, festive. chant-instruments, JDirigeant son Concerto Soave il domine agitation au service magistralement orgue, clavecin et Lautenwerk de la parole. Si doux (clavier au jeu luthé), pour interpréter des est le tourment de compositeurs qui ont animé les soirées dansées Monteverdi, à la ligne de la Sérénissime : les Scherzi Musicali de mélodique plaintive Claudio Monteverdi en sont la clé de voûte. d’un large ambitus, María Cristina Kiehr, soprano, fidèle depuis est orné d’arpèges toujours, nous fait apprécier sa science du luthés, transcendé par Maria Cristina Kiehr et Jean-Marc Aymes © Marie-Eve Brouet chant baroque, avec ses sons tenus et ses la chaleur de la viole, se concluant par une C’est donc avec succès que Mars en Baroque ornements. Simon Pierre et Anaëlle Blanc demi-cadence d’une étrange modernité. De a posé ses affects vénitiens hors les murs, Verdin, jeunes et brillants violonistes, se Maurizio Cazzati, la merveilleuse Passacaille de dans la belle salle de la Manare, tout près de jouent des tuilages, questions-réponses et 1660, à partir d’une basse obstinée : la danse la Venise provençale. Prémices d’un festival anacrouses. Concert où tout s’enchaîne, du à 3 temps et ses belles variations sont une exceptionnel, sous le signe de l’Amour ! presto endiablé à l’adagio planant ! Grâce aussi respiration solennelle avant le feu d’artifice YVES BERGER à Sylvie Moquet, viole de gambe, pulsation de Marco Uccellini. Car La Poule et le Coucou et legato subtil, complément indispensable donne à entendre le combat ironique mariés Un Ballo a Venezia a ouvert Mars en Baroque, du continuo. Lidia épine de mon coeur, entre les violons, leurs caquètements qui qui se poursuit jusqu’au 31 mars, le 9 mars pièce très enlevée, fuse et surprend : style rivalisent avec les grands accords du clavecin ! 04 91 90 93 75 marsenbaroque.com Provocations musicales

rôle de personnage que celui que joue découvertes. Simple ? Non bien sûr, car il Alan Sapritch dans sa drôle de One man s’agit-là de sa version de l’histoire, de ses Dconférence sur les musiques actuelles, choix, mis en avant ou quasiment passés sous T’as vu c’que t’écoutes ?! Ni conférencier, silence (le disco, la période yéyé en France...), ni prof, mais véritable fondu de musiques, avec une mauvaise fois chevillée au corps, de toutes les musiques (ou presque !), et revendiquée et hilarante ! Au-delà du pano- passeur hors pair de ses connaissances en rama musical, de l’évocation de l’évolution la matière. C’est rien moins que l’histoire de des techniques et des esthétiques, c’est de l’évolution du monde musical, du blues des changements sociétaux dont parle Sapritch, années 30 à nos jours, qu’il va raconter et et notamment de l’émergence des femmes jouer à la guitare, accompagné de Roland, dans un milieu hétéro-patriarcal, avec un son précieux batteur numérique. Comment bel appel à celles qui étaient présentes ce va-t-il s’y prendre ? Les premières phrases soir-là à se réveiller et à poursuivre la prise donnent le ton : « Comment en est-on arrivé de pouvoir… là ? Ou plutôt, qu’a-t-on fait pour mériter Alors bien sûr, comme il le dit lui-même ça ? », tandis que se déverse dans nos oreilles, « il y a autant d’avis sur la musique que de plus ou moins sensibles, le tube du moment personnes dans cette salle », et autant de Despacito... Pour le comprendre il faut repartir ressentis, de joies, de transports frissonnants des racines, des origines, de l’Histoire, et donc ou de désapprobations. Il n’en demeure pas du blues. Durant deux bonnes heures il va moins que quelques certitudes auront été ainsi remonter le temps, faire se succéder subtilement titillées, suffisamment ébranlées les styles -rhythm’n’blues, jazz, soul, funk, pour provoquer discussions et réflexions à rock, rap, punk, house, électro...- soulignant posteriori, et pour longtemps ! l’épopée d’anecdotes savantes et instructives, DOMINIQUE MARÇON et d’un zapping musical très fourni (quelques 120 extraits musicaux plus ou moins longs !) T’as vu c’que t’écoutes a été donné qui transporte le public de découvertes en le 16 février au Forum de Berre Alan Sapritch © Laurent Ferrigno 50 critiques musiques Lydia la survivante

ans le décor joyeusement déglingue de la salle alternative mar- des concerts pour se nourrir. Ici elle sirote sa bouteille de vin blanc seillaise, les valeurs sont renversées et on n’est pas choqué que mais ne perd pas sa lucidité : « this planet is a fucking madness, Dla tête d’affiche du soir débute son concert à… 23h30 ! En welcome to my world » assène-t-elle avec autorité. Weasel première partie, les Grrzzz jouent à cent à l’heure un rock Walter (à la batterie, pads et effets), vu par le passé totalement régressif mais finalement assez jouissif. avec le quatuor de free jazz cinglé Flying Lutten- À sa manière Lydia Lunch, 60 ans au comptoir, bachers, lui fournit un fond sonore rythmique est aussi régressive, en mode poésie nihiliste. qui décape les oreilles. La voix de pythie Avec Brutal Measures, Lydia Lunch fait déjantée de Lydia, rauque et cassée, tient la toujours du Lydia Lunch. Depuis le milieu distance sur 45 minutes de live. Le public des années 70, l’artiste, qui a collaboré du premier rang n’était pas né lorsqu’elle avec des ténors de la scène indépendante a commencé à performer mais paraît (Sonic Youth, Nick Cave, Einsturzende sensible à la radicalité de l’icône under- Neubauten) exhorte le public de son ground, désormais installée à Barcelone. spoken word. Elle expose dans sa poésie Il boit son commentaire social, mâtiné de offensive, qui doit autant à Kathy Acker cabaret critique, qui touche au cœur des qu’à Jim Morrison, les turpitudes humaines : désespoirs actuels : « Ils nous appellent avidité, cruauté, violence. En dentelle noire “sorcières” mais avant qu’ils n’inventent les et bottines à talons hauts, la poétesse sait dieux, nous étions simplement des femmes ». de quoi elle parle : victime d’inceste dans son Lydia le dit elle-même : « Toutes mes chansons enfance, elle fait partie de ces rares survivantes du ». Chirurgical. HL sont littéralement des autopsies © mouvement no wave new yorkais, pionnier du punk HERVÉ LUCIEN anglo-saxon. Lydia Lunch (repas) doit d’ailleurs son nom à Willy De Ville qui avait remarqué qu’elle volait la nourriture en backstage Lydia Lunch s’est produite le 22 février à L’Embobineuse, Marseille

Wynton Marsalis, le jazz à la racine

u milieu de son Big Band de 15 musiciens, classique que dans le jazz, directeur général enseigne que la complexité labyrinthique de Wynton Marsalis passerait presque et artistique du Jazz at Lincoln Center de New la partition jouée sonne à l’oreille comme les Ainaperçu. Assis au dernier des trois rangs York, récompensé en 1997 du très prestigieux pas légers d’une promenade sur un chemin sur lesquels s’étage l’ensemble orchestral, le Prix Pulitzer de la musique pour l’un de ses 70 clair. Performance exceptionnelle élevée ce trompettiste fait d’abord entendre sa voix. albums studio, il est vrai qu’à 56 ans Wynton soir-là au GTP au rang de règle, tant à l’égard Petit laïus de présentation, remerciements Marsalis n’a plus grand chose à prouver. des solos successifs de chaque instrumentiste d’usage, Marsalis, loin de l’engoncement Chacune de ses interventions solo prend les que des parties exécutées de concert avec auquel semblait devoir le consigner son allures d’une escapade, virtuose et si maîtrisée une alchimie absolue, proche de celle des veston et sa cravate bien serrée, apparaît qu’elle parait, en forme de paradoxe, libérée meilleurs quartets. Une quête primordiale de croulant de décontraction. de tout encombrement technique. Tout l’art pureté dans le style revendiquée par Marsalis Reconnu comme l’un des plus grands trom- se retrouve ainsi concentré vers la sensibi- lui-même, quitte à faire fi de l’air du temps : pettistes de son temps, aussi à l’aise dans le lité et la sincérité de l’interprétation, à telle « La popularité n’est pas ce qui importe. Ce qui compte c’est la qualité de ce que nous faisons. » Et pourtant, au terme du concert, c’est bien une salle unanimement enthousiaste qui rappelle le Big Band. Wynton Marsalis entame alors seul La Vie en Rose, en guise de dernier hommage à son public, ravi. Ce soir assurément, il est entré dans son cœur une part de bonheur, dont il connaît la cause. LOUIS GIANNOTTI

Wynton Marsalis & Jazz at Lincoln Center Orchestra s’est produit le 12 février

© Frank Stewart au Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence au programme musiques bouches-du-rhône 51

Hérodiade Marseille, mes amours

Quintette pour piano et cordes C’est dans l’écrin de La Magalone, après un lever de rideau assuré par les élèves de la Cité de la Musique, que, réunis en quintette, Alexandre Amedro, Nina Pissareva (vio- lons), Frédéric Lagarde (violoncelle), Olivier Lechardeur (piano) et Aurélie Entringer © X-D.R (alto), issus de l’Orchestre Philharmonique de Pour les amoureux de l’opérette marseillaise, Marseille, proposeront deux monuments : le les amateurs des douceurs de la vie dans Quintette pour piano et cordes en mi bémol Un petit cabanon, certes « pas plus grand majeur op.44 de Schumann et celui en sol qu’un mouchoir de poche », mais délicieu- mineur op.57 de Chostakovitch. sement festif, le spectacle concocté par le ténor Jean-Christophe Born multipliera 31 mars les bonheurs. La verve du ténor s’adjoint à La Magalone, Marseille la vivacité de la soprano Perrine Cabassud 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com et à l’accordéon de Cyrille Muller. Une Béatrice Uria-Monzon © Philippe Gromelle bouffée de fraîcheur et de gaîté. Inspiré de Hérodias, l’un des Trois Contes de Flaubert, l’opéra de Massenet sur un livret de 23 mars Paul Milliet et Henri Grémont rappelle la fin de Schumann/Marie-Josèphe Jude Théâtre Municipal de Fontblanche, Vitrolles Saint-Jean-Baptiste. Aimé de Salomé, (Inva La grande pianiste Marie-Josèphe Jude 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr Mula) fille de la cruelle Hérodiade (Béatrice apporte sa virtuosité et sa sensibilité à Uria-Monzon), Jean (Florian Laconi) sera l’interprétation de deux œuvres majeures condamné à mort par Hérode (Jean-François de Schumann, la Fantaisie op.17, voyage Lapointe), jaloux de l’amitié que lui porte le initiatique de l’amour, trouble, ascension vers War Quintets 1918 peuple, alors que lui-même en est seulement la sérénité, lumière, et le cycle de huit pièces craint. Une partition vocale virtuose sous la de la Fantasiestücke op.12. Palette aux subtiles direction de Victorien Vanoosten. couleurs que l’on retrouve dans le disque Schumann qui fête les 40 ans du label Lyrinx. 23 au 30 mars Opéra, Marseille 04 91 55 11 10 04 91 55 20 43 opera.marseille.fr

Là-haut Ils sont au Paradis, élus, heureux…non ! La seule vie agréable est parisienne ! Évariste Chanterelle (Grégory Benchenafi) retourne Eric Le Sage © Neda Navaee sur terre pour séduire de nouveau sa femme, Le subtil pianiste Éric Le Sage (né à Aix- Emma (Caroline Gea). Elle suit son époux au en-Provence) rejoint le prestigieux Quatuor Paradis, mais Saint-Pierre (Philippe Fargues), Modigliani sur un programme dédié princi- exaspéré, les chasse, et Évariste se réveille... palement à des quintettes dont l’inspiration Cette charmante opérette bouffe d’Albert fut liée à la première guerre mondiale. Le Willemetz est dirigée par Bruno Conti Quintette op.42 de Louis Vierne, dédié à son dans une mise en scène de Carole Clin. fils mort en 1918, celui de Gabriel Pierné, dédié à Fauré et composé durant ce terrible 14 & 15 avril conflit. Plus tendre, enfin, la formation des Odéon, Marseille cordes offrira le romantique Quatuor à cordes 04 96 12 52 70 odeon.marseille.fr op. 41 de Schumann. Marie-Josèphe Jude © Eric Manas 9 avril 30 mars Théâtre La Criée, Marseille Théâtre Comoedia, Aubagne 04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com 04 42 18 19 88 aubagne.fr 52 au programme musiques bouches-du-rhône alpes vaucluse

Impressions françaises

Stabat Mater Vanda Œuvre lyrique aux élans enthousiastes, le Elle ne lui laisse pas de nom, pas de souve- Stabat Mater de Rossini transporta son public nirs. L’héroïne du Testament de Vanda de lors de sa création et s’attira les foudres des Jean-Pierre Siméon se retrouve en centre partisans d’une morose gravité. Le Chœur de détention après avoir traversé toutes les Amadeus s’attache à cette pièce avec le horreurs. L’oubli est le cadeau qu’elle laisse pianiste Pierre Contat et Nicolas Dolce à sa fille avant de mourir. C’est à nous qu’elle aux percussions, sous la direction de Mireille raconte sa terrifiante histoire, bouleversante Abram Bonhomme. Les délicates envolées de dénuement, dans l’opéra de chambre de

solistes seront interprétées par Isabelle Schawandascht Geneviève Laurenceau © Yvan Lionel Ginoux, mezzo-soprano (Ambroisine Escalier (soprano), Karine Magnetto Le concert violon piano Impressions fran- Bré) accompagnée d’une viole de gambe (mezzo-soprano), Jacques Calatayud çaises réunit deux des plus brillants artistes (Marie-Suzanne de Loye), dans la subtile (baryton basse). de leur génération, la violoniste Geneviève mise en scène de Nadine Duffaut. Laurenceau et le pianiste David Bismuth, 14 avril sur un programme essentiellement composé Théâtre de Fos de sonates de musique française, Sicilienne 04 42 11 01 99 scenesetcines.fr de Fauré, Sonate n°1 et Danse macabre de Saint-Saëns, Clair de lune de Debussy et d’autres pièces tout aussi délicates et inspirées.

Quatuor Bela & Duo Sabil 14 avril Dans le cadre de la semaine du Bien Vivre L’Alpilium, Saint-Rémy-de-Provence Ensemble, organisée par la Ville d’Istres, deux 04 90 92 70 37 06 29 19 69 78 mairie-saintremydeprovence.fr formations de haute volée se rencontrent, le Quatuor Bela, aux cordes iconoclastes : Frédéric Aurier et Julien Dieudegard (violons), Julian Boutin (alto), Luc Dedreuil (violoncelle) et le Duo Sabil aux audacieuses Du chœur à l’ouvrage approches (Ahmad Al Khatib, oud), Yous- Ambroisine Bré © X-DR sef Hbeisch aux percussions). Délicatesses 6 & 7 avril La Chartreuse, Villeneuve-Lez-Avignon classiques et contemporaines uniront ces 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr musiciens hors pair sur des compositions d’Ahmad Al Khatib et de Frédéric Aurier.

Messe en Si mineur Catholique par sa forme et luthérienne dans son esprit, la Messe en si mineur BWV 232 de © Christophe Raynaud de Lage Bach est sans doute l’une des plus célèbres. Par une sombre nuit d’hiver, un navire fait Elle sera interprétée par les sopranos Olivia naufrage au large des îles anglo-normandes… Doray et Mathilde Rossignol, la mezzo-so- Une quarantaine de jeunes choristes se prano Blandine Folio-Peres, le ténor Rémy

Quatuor Béla © G.Garitan retrouvent seuls. La création de Benjamin Mathieu et la basse Geoffroy Buffière. 21 mars Dupé, sur un livret de Marie Desplechin L’Orchestre Régional et le Chœur Symphonique Théâtre de l’Olivier, Istres mêle réalisme et fantastique pour évoquer le Avignon-Provence seront sous la direction 04 42 56 48 48 scenesetcines.fr délicat passage de l’enfance à l’âge adulte. de Samuel Jean. Incontournable ! L’opéra, accompagné par le bel ensemble contemporain L’Instant donné, met en scène 30 & 31 mars les enfants de la Maîtrise des Bouches du Opéra Confluence, Avignon Rhône. Magique ! 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

30 mars Théâtre Durance, Château-Arnoux-Saint-Auban 04 92 64 27 34 theatredurance.fr au programme musiques var gard hérault alpes-maritimes bouches-du-rhône 53

L’Italienne à Alger Création mondiale

Violon solo La violoniste Viktoria Mullova, lauréate des concours Tchaïkovski et Sibelius, est l’invitée de Michael Schønwandt qui dirigera trois monuments, Till l’espiègle op.28 de Richard Strauss, le Concerto pour violon et orchestre en ré majeur op. 77 de Brahms et les Variations Enigma op. 36 d’Edward Elgar. De pures merveilles, servies par le Stradivarius (1723) de la grande artiste. Sonia Wieder Atherton © X DR. Sonia Wieder

L’Orchestre de Cannes, auquel se joint exceptionnellement la violoniste Sonia Wieder-Atherton, propose la création mondiale du Concerto pour violoncelle et orchestre du compositeur contempo- Laura Verrecchia © Carlo Terenzi Laura Verrecchia rain Olivier Penard, sous la houlette de Chassés-croisés amoureux, fuites, trompe- Samuel Jean. Répondra à cette création ries, quiproquo… L’opéra bouffe de Rossini la Symphonie n°9 en mi mineur op. 95, dite multiplie les imbroglios qui permettent Du Nouveau Monde, d’Anton Dvorak. aux chanteurs moult acrobaties verbales, en considérant l’amour cruel alors qu’ils 5 avril aspirent à l’amour d’une belle. Francesco Théâtre Croisette, Cannes Lanzillotta dirige cette œuvre aux multiples 04 92 98 62 77 orchestre-cannes.com rebondissements dans une mise en scène de Henning Brockhaus. Mullova © X DR Viktoria 29 & 30 mars Opéra Berlioz, Montpellier 13 au 17 avril 04 67 601 999 opera-orchestre-montpellier.fr Roméo et Juliette Opéra, Toulon 04 94 92 70 78 operadetoulon.fr

Piano-Voix Dessay Ils ont enregistré moult CD ensemble, se sont Folle nuit partagé les scènes les plus prestigieuses du Nîmes comme un miroir de Nantes, connaîtra monde. C’est à un concert d’exception que non une Folle Journée, mais une Folle Nuit, de nous convie le récent Théâtre Scène 55 avec 15h à 22h, à travers quatre concerts déclinés la soprano Nathalie Dessay et le pianiste sur le thème de l’exil. René Martin rassemble Philippe Cassard. Tout devient magie grâce © X DR Catherine Trottmann des œuvres musicales composées par des à leurs délicates interprétations, Schubert, Comment conter encore la sanglante rivalité artistes qui ont été poussés à fuir leur pays Mozart, Chausson, Debussy… des familles Capulet et Montaigu, et les amours pour des raisons politiques, artistiques ou tragiques de leurs enfants, Roméo et Juliette ! autres. Un voyage bouleversant. Tant d’œuvres retracent les malheurs des amants de Vérone… L’opéra de Gounod, 7 avril inspiré de la pièce de Shakespeare, sera mis Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes en scène par Irina Brook et dirigé par Alain 04 66 36 65 10 theatredenimes.com Guingal dans l’écrin de l’opéra de Nice…

21 au 27 mars Opéra de Nice

Natalie Dessay © S. Fowler-Sony Classique Natalie Dessay © S. Fowler-Sony 04 92 17 40 79 31 opera-nice.org 13 avril Scène 55, Mougins 04 92 92 55 67 scene55.fr 54 au programme musiques bouches-du-rhône var gard hérault

Suuns L’Or du Commun

General Elektriks Carry No Ghosts est le nouvel album pour le plus américain des frenchies qui rappellons-le a fait ses armes au sein des brillants groupes hip

hop de la côte ouest. Aux claviers et au chant, © maxresdefault Hervé Salters sollicite lui aussi d’excellents Les récentes, et souvent stériles, polémiques musiciens : Jessie Chaton (basses), Anto- sur le rap français (qui n’intéresse que les nionian (rythmes et programmations), Touski journaux à sensation et le microscosme de (batterie et vibraphone) et Eric Starczan Skyrock) rappellent que pas si loin d’ici, on (guitare). Belle brochette de musiciens jazz sait conjuguer rimes riches et beats souples funk pour un répertoire qui évolue vers le rock avec discrétion et créativité. Ainsi cette for- à l’image du dernier single Different Blue. mation bruxelloise, au très joli nom, renoue avec les origines d’un rap jazzy, mélodieux et conscient. Proches du petit prodige belge Roméo Elvis, Primero, Loxley et Swing pourraient profiter de la confusion pour imposer leurs lignes claires. © X DR Dans le genre art-rock, le groupe canadien 23 mars est un des plus emballants du moment, avec Victoire 2, Saint-Jean de Védas son rock tendu et ses chansons qui enserrent victoire2.com

les esprits comme des serpents. La voix de © Jeremy Toix 31 mars Ben Shemie n’y est pas pour rien : le garçon 7 avril L’Affranchi Marseille Festival de la Meuh Folle Alès chante sans desserrer les dents, figurant parmi 04 91 35 09 19 l-affranchi.com les vocalistes les plus singuliers entendus 07 85 24 35 61 meuhfolle.com ces dernières années, dans une veine psy- 11 mai chédélique qui nous ramène au Pink Floyd La Cigalière Sérignan de Syd Barrett. Vu en 2015 au This Is Not 04 67 32 63 26 lacigaliere.fr A Love Song et en 2016 au Festival Yeah à Chinese Man Record Lourmarin, le quatuor vaut le détour !

1er avril Feu ! Chatterton Espace Julien, Marseille Avec son premier album Ici Le Jour (A tout 04 91 24 34 10 espace-julien.com Enseveli) en 2014, le quintette parisien a prouvé qu’on pouvait conjuguer tremolos dans la voix, textes entêtants et esprit rock. Dans la lignée Emily Jane White d’un Dominique A mais en groupe. Avec son Dans la lignée de cette alt-folk qui va droit au nouvel opus L’Oiseleur (qui vient de paraître,

cœur et soulève notre enthousiasme (Sufjan précédé de trois titres plus solaires), la bande © X DR MC Youthstar Stevens, Alela Diane), la Californienne sait elle d’Arthur Teboul, chanteur moustachu et Le label du groupe aixois met en avant ses aussi poser un décor assez sombre derrière possédé, veut confirmer les espoirs placés en artistes : MC Youthstar, partenaire vocal du une voix on ne peut plus gracieuse. Le titre elle pour un renouveau canaille et décadent duo (accompagné de son partenaire Senbeï) de son dernier album They Moved in Shadow et de la chanson française. mais aussi Saro, beatboxer de référence mon- All Together (sorti en 2016 sur le label aquitain diale (lauréat du Grand Beatbox Battle 2017) Talitres) est inspiré d’une phrase de L’Obscu- et le duo électronique Baja Frequencia qui rité du Dehors du terrible romancier américain croise sur un canevas de beats bass music Cormac Mc Carthy, référence plutôt parlante des influences asiatiques et sud-américaines pour une œuvre où se meuvent ombres et fan- pour un global mix étourdissant. Bonus en tômes. Concert gratuit organisé par Tandem. prélude de la soirée : une projection exclusive (et gratuite) du film documentaireIndependant © Fanny Latour Lambert 31 mars 22 mars Music qui évoque la mutation de l’économie Hôtel du Département Toulon La Paloma Nîmes et de l’industrie musicale. 04 98 07 00 70 tandem83.com 04 11 94 00 10 paloma-nimes.fr 20 avril 23 mars Le Moulin Marseille Espace des libertés Aubagne 04 91 06 33 94 lemoulin.org e a Me e Maee © Charlotte Maria / ze-factory.fr © Charlotte

KALLIROI ET LE FADOREBETIKO PROJECT Jeudi 29 mars – 17h30 Conférence illustrée* Vendredi 30 mars – 20h30 Concert P.r2b © X DR. P.r2b SHONO La jeunesse Souterraine Samedi 31 mars – 20h30 Concert MUSIQUE & DANSE DE L’INDE aime Pépé Ferré Les 31 mars et 1er avril – 11 h à 17 h Stage

uel rapport entre la jeune scène française et Léo Ferré ? La Cité de la Musique de Marseille, Auditorium grandiloquence décomplexée, la capacité à mêler le trivial et 4, rue Bernard du Bois – Marseille 1er - 04 91 39 28 28 *BMVR l’Alcazar 58, cours Belsunce - Marseille 1er le grave, les images poétiques audacieuses font partie des Q www.citemusique-marseille. com arguments communs de ces générations que, pourtant, tout devrait séparer. La première est post-moderne, affranchie des codes, pas terriblement anarchiste mais on n’y fait pas dans le jeunisme et ça fait du bien. Dans le mini-drame musical d’Ocean Forever, Pauline Rambo alias P.r2b, ancienne de la Fémis et du Cours Florent, exprime sa jeunesse avec dégoût et emphase, avec des mots qu’aurait pu employer Pépé Ferré (étrangement, on pense à la prosodie des Étrangers). La chanson ouvrait la dernière anthologie de La Souterraine, précieux label français qui documente avec passion et sérieux toute la créativité de la nouvelle scène française, mêlant sans distinction chanson, pop et électro, tant ces catégories n’ont plus de sens. La version de Tu ne dis jamais rien de P.r2b ouvre aussi (bonne habitude) C’est Extra, treize reprises du grand Léo que La Souterraine a réalisé à l’initiative d’une famille Ferré qu’on sait rétive aux réappropriations trop classiques (parution le 27 avril chez Universal/La Mémoire et la Mer). Le festival Avec le Temps accueille une présentation en live et en avant-première française. Et, logiquement, P.r2b y chante quatre des chansons aux côtés du chanteur iconoclaste Guillaume Marietta (rocker pilier de l’écurie rock Born Bad Records, qui livre sa version de Thank You Satan) et les timbres plutôt classiques d’Eddy Crampes (pour qui la chanson underground n’a plus de secret) et Sarah Maison (l’interprète du fameux et étrange Western Arabisant plébiscité sur les ondes de France Inter en 2016). Reprenant les arrangements de l’album créés par les membres des groupes Aquaserge et Forever Pavot, les instrumentistes du groupe Biche officieront en backing band de ce concert dont le répertoire embrasse les styles successifs de Ferré, du réalisme au post-classicisme en passant par le psychédélisme avec Zoo. Bel et rare hommage. HERVÉ LUCIEN

C’est Extra En Live 25 mars Montévidéo, Marseille festival-avecletemps.com 56 au programme musiques bouches-du-rhône vaucluse

Riccardo Del Fra/Nik Bärtsch

FadoRebetiko Project Rassegna La chanteuse et pianiste grecque Kalliroi C’est en chantant en Arc de cercle que la Raouzeou dirige le projet musical FadoRebe- Cie Rassegna convie les plus jeunes des tiko, porté aussi par les musiciens marseillais auditeurs (à partir de 7 ans) à la découverte des Jean-Marc Gibert (bouzouki et guitare), musiques populaires méditerranéennes. Dans

Jérémie Schacre (guitare) et Nicolas Koe- Nik Bärtsch © Marton Möll cet espace intimiste, au plus près des jeunes dinger (contrebasse). Tout en continuant à Dans les années 80 Riccardo Del Fra fut oreilles, la guitare flamenca de Bruno Allary tisser des liens entre le rebetiko et le fado, le pendant près de dix ans le contrebassiste de croise le oud et le violon oriental de Fouad quartet aux multiples influences présentera sa Chet Baker. Sur l’album My Chet My Song, Didi, soutenus par les chants hispanique toute nouvelle création, Marika, hommage à la accompagné d’un quintet magnifique, il donne de Sylvie Paz et sicilien de Carine Lotta. chanteuse populaire grecque Marika Papagika sa version de l’univers musical et poétique et aux femmes du blues. Le 29 mars aura lieu du trompettiste, entremêlant à la reprise de une conférence-concert à la BMVR Alcazar. standards ses propres compositions inspirées par cette collaboration (24 mars). Changement radical de registre avec le jazz contemporain du pianiste Nik Bärtsch et de son quartet Ronin. Au confluent du jazz, du funk et de la musique minimaliste, sa musique transmet « une énergie à la fois intense et calme » (7 avril).

Théâtre de Fontblanche, Vitrolles

© Charlotte Maria. 04 42 79 63 60 charlie-jazz.com © Damien Tomasi 30 mars 14 avril Cité de la Musique, Marseille Espace Pièle, Cornillon-Confoux 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com 04 90 55 71 53 scenesetcines.fr Lisa Simone

Latcho Divano 17 Dans le cadre du festival des cultures tsiganes, Tarkos Opéra… 18 18 la Cité reçoit Norig et son No-Gypsy Orches- Après une résidence de création au Vélo tra : après de nombreuses collaborations, avec Théâtre, le collectif Inouï Productions Tony Gatlif entre autres, et deux albums, la présente un opéraMARS « de poche » qui met enAVRIL MARS AVRIL MARS AVRIL jeune chanteuse poursuit son exploration musique, et en chant, la langue du poète Chris- de la musique tsigane en y mêlant jazz, tophe Tarkos. À l’aide d’un instrumentariumTHÉÂTRE THÉÂTRE THÉÂTRE pop, classique, tango… Quatre musiciens minimaliste fait de « petits claviers, piano jouet, l’accompagnent à la guitare, l’accordéon, la bribes de percussions,LES clarinette, FILLES bidouillages AUX MAINS JAUNES LES FILLES AUX MAINS JAUNES LES FILLES AUX MAINS JAUNES Dynamo Théâtre – Michel Bellier / Joëlle Cattino Dynamo Théâtre – Michel Bellier / Joëlle Cattino Dynamo Théâtre – Michel Bellier / Joëlle Cattino contrebasse et le violon. Tchavolo Schmitt, sonores divers », Stéphane Keruel (chant et SAM 17 MARS 21:00 SAM 17 MARS 21:00 SAM 17 MARS 21:00 guitariste virtuose du jazz manouche, donnera mise en scène), Guigou Chenevier (composi- quant à lui une master class pour amateurs © Alexandre Lacombe tions musicales) et Emmanuel GilotINCLASSABLE (création INCLASSABLE INCLASSABLE confirmés ou professionnels. Elle n’est pas seulement la fille de son sonore) enchanteront la « pâte-mot » du poète. illustre mère, Nina, mais aussi et surtout une …de là-bas …de là-bas …de là-bas Cie L’œil ivre - Romain Bertet Cie L’œil ivre - Romain Bertet Cie L’œil ivre - Romain Bertet exceptionnelle chanteuse à la voix ample et Tarkos Opéra, ou À quoi bon encoreMER des 21 poètes ? MARS 21:00 MER 21 MARS 21:00 MER 21 MARS 21:00 puissante. Depuis sa rencontre avec Hervé 24 mars Samb, musicien polymorphe et fer de lance du Vélo ThéâtreMUSIQUE, Apt MUSIQUE MUSIQUE 04 90 04 85 25 velotheatre.com son africain d’aujourd’hui croisant blues, jazz, Du chœur à l’ouvrage Du chœur à l’ouvrage Du chœur à l’ouvrage pop et rythmiques ancestrales, Lisa Simone a UN OPÉRA POUR VOIX D’ENFANTS UN OPÉRA POUR VOIX D’ENFANTS UN OPÉRA POUR VOIX D’ENFANTS commis deux albums ; ses chansons, simples Comme je l’entends, les productions – Benjamin Dupé Comme je l’entends, les productions – Benjamin Dupé Comme je l’entends, les productions – Benjamin Dupé VEN 30 MARS 21:00 VEN 30 MARS 21:00 VEN 30 MARS 21:00 mais somptueuses, disent son bonheur de vivre, +++ TABLE RONDE Création artistique avec des jeunes au plateau +++ TABLE RONDE Création artistique avec des jeunes au plateau +++ TABLE RONDE Création artistique avec des jeunes au plateau sa sérénité nouvelle. En 1re partie, le Massilia MAR 27 MARS 19:00 MAR 27 MARS 19:00 MAR 27 MARS 19:00 Blues Band de Philippe Troisi et Mylène Del Biondo offre un blues électrique, fait de THÉÂTRE THÉÂTRE THÉÂTRE reprises et de compositions personnelles. LA PETITE CASSEROLE LA PETITE CASSEROLE LA PETITE CASSEROLE Norig © Olliver Robert 6 avril D’ANATOLE D’ANATOLE D’ANATOLE 6 & 7 avril Cie Marizibill – Cyrille Louge Cie Marizibill – Cyrille Louge Cie Marizibill – Cyrille Louge Forum de Berre Cité de la Musique, Marseille MER 04 AVRIL 16:00 MER 04 AVRIL 16:00 MER 04 AVRIL 16:00 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com 04 42 10 23 60 forumdeberre.com 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr 19 AU 22 AVRIL 2018

#VIVANT LE NUMÉRIQUE FESTIVAL ARTS EN ESPACE PUBLIC AU SERVICE DU VIVANT ? SAMEDI 31 MARS CUCURON CONFÉRENCE ET ATELIERS VAUGINES ÜBER BEAST MACHINE CADENET CRÉATION TRANSMÉDIA : SPECTACLE, EXPOSITION ET SITE WEB LES 30 ET 31 MARS LUBERON +12 TRANSE EXPRESS - TANDAIM ans - MICRO FOCUS - EX NIHILO - BONHEUR INTÉRIEUR BRUT - NO TUNES INTERNATIONAL - Renseignements / réservations JUHYUNG LEE - AMARE - ANTIPODE - 2L AU QUINTAL 04 95 04 95 75 – www.theatremassalia.com - AKALMIE CELSIUS FRICHE LA BELLE DE MAI + LA SOUTERRAINE - BOXSONS - COMME JOHN

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17 18 18 DES ROSES ET MARS AVRIL MARS AVRIL MARS AVRILDU JASMIN

THÉÂTRE THÉÂTRE THÉÂTRE Texte et mise en scène LES FILLES AUX MAINS JAUNES LES FILLES AUX MAINS JAUNES LES FILLES AUX MAINS JAUNES Adel Hakim Dynamo Théâtre – Michel Bellier / Joëlle Cattino Dynamo Théâtre – Michel Bellier / Joëlle Cattino Dynamo Théâtre – Michel Bellier / Joëlle Cattino SAM 17 MARS 21:00 SAM 17 MARS 21:00 SAM 17 MARS 21:00 Avec les acteurs du

INCLASSABLE INCLASSABLE INCLASSABLE Théâtre National Palestinien …de là-bas …de là-bas …de là-bas Cie L’œil ivre - Romain Bertet Cie L’œil ivre - Romain Bertet Cie L’œil ivre - Romain Bertet VEN. 13 ET SAM.14 AVRIL MER 21 MARS 21:00 MER 21 MARS 21:00 MER 21 MARS 21:00

MUSIQUE MUSIQUE MUSIQUE Du chœur à l’ouvrage Du chœur à l’ouvrage Du chœur à l’ouvrage UN OPÉRA POUR VOIX D’ENFANTS UN OPÉRA POUR VOIX D’ENFANTS UN OPÉRA POUR VOIX D’ENFANTS Comme je l’entends, les productions – Benjamin Dupé Comme je l’entends, les productions – Benjamin Dupé Comme je l’entends, les productions – Benjamin Dupé VEN 30 MARS 21:00 VEN 30 MARS 21:00 VEN 30 MARS 21:00 +++ TABLE RONDE Création artistique avec des jeunes au plateau +++ TABLE RONDE Création artistique avec des jeunes au plateau +++ TABLE RONDE Création artistique avec des jeunes au plateau MAR 27 MARS 19:00 MAR 27 MARS 19:00 MAR 27 MARS 19:00

THÉÂTRE THÉÂTRE THÉÂTRE LA PETITE CASSEROLE LA PETITE CASSEROLE LA PETITEInfos et CASSEROLEréservations www.theatre-liberte.fr D’ANATOLE D’ANATOLE 04D’ANATOLE 98 00 56 76 Cie Marizibill – Cyrille Louge Cie Marizibill – Cyrille Louge Cie Marizibill – Cyrille Louge MER 04 AVRIL 16:00 MER 04 AVRIL 16:00 Rejoignez-nousMER 04 AVRIL 16:00 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr 58 au programme spectacles bouches-du-rhône hérault vaucluse

Kindertotenlieder Adieu, Ferdinand ! Librement adapté pour chœur d’enfants, piano, Bien sûr, avec Philippe Caubère, un spec- danseurs et chants d’animaux par Franck tacle c’est deux spectacles, et deux spectacles Krawczyk, Apparition est le premier volet, c’est trois ! Trahison sexuelle et camp de créé en décembre 2017 à l’Opéra de Marseille, La Tragédie de Macbeth naturiste à Montalivet dans Clémence, du diptyque d’Emio Greco et Pieter C. sinistrose familiale, hiver et marasme belge Scholten, les directeurs du BNM Marseille, dans Le casino de Namur. Ils seront joués en inspiré des Kindertotenlieder de Mahler. Un alternance dans cet adieu-bouquet final du spectacle sensoriel, musicalement et plas- comédien au Ferdinand de son historique et tiquement fascinant, qui confronte fragilité phénoménal Roman d’un acteur. de la vie et force de l’imaginaire. © Thomas Jorion Après l’opéra, le théâtre ! Frédéric Bélier-Garcia semble décidemment fas- ciné par « la pièce maudite » de Shakespeare. Un Macbeth qu’il a décidé de concentrer autour de cinq personnages, en utilisant la traduction d’Yves Bonnefoy, et où les sor- cières, fantômes, rois, prétendants, assassins © Philispar et comploteurs sont embarqués dans une 22 au 24 mars plongée au cœur des replis les plus intimes La Criée, Marseille de l’être humain. 04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com 28 au 30 mars La Criée, Marseille 04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com © Gilles Vidal Pourquoi Monsieur Seguin Clémence et Le casino de Namur joués en alternance a-t-il emprisonné sa chèvre ? 27 mars au 7 avril Vaut-il parfois mieux être soumis à des Un fils de notre temps Le Gymnase, Marseille contraintes, et pouvoir continuer à vivre en 08 2013 2013 lestheatres.net sécurité, plutôt que vouloir être libre à tout prix, et risquer de se faire manger, comme la Blanquette de Monsieur Seguin, par le loup ? Question d’actualité, que la metteure Georges Dandin en scène Julie Villeneuve explore depuis ou Le mari confondu deux ans avec des adolescent(e)s à Marseille. Le paysan devenu riche Georges Dandin veut Qu’en est-il des bergers, des chèvres et des aussi être Georges de la Dandinière en se loups aujourd’hui ? faisant donner comme épouse par un couple

© Guillaume Chapeleau de nobles désargentés leur fille Angélique 23 & 24 mars Monologue intérieur d’un jeune paumé au chô- contre espèces sonnantes et trébuchantes. La Criée, Marseille mage au début de la seconde guerre mondiale, Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Une 04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com qui, pour survivre, deviendra soldat. Monologue comédie que Jean-Pierre Vincent a choisi de que Jean Bellorini a choisi de faire porter à traiter comme un méchant rêve, dans un décor un quatuor d’acteurs-musiciens-poètes, pour épuré mettant à nu les rapports de force. Une déployer les résonnances personnelles que le farce noire où les parvenus sont ridiculisés. propos suscite. Une épopée tragique, dernier roman écrit par Ödön von Horváth, « auteur 10 au 14 avril dégénéré », publié en 1938, alors qu’il est en Le Gymnase, Marseille exil, fuyant le régime hitlérien. 08 2013 2013 lestheatres.net

3 au 6 avril La Criée, Marseille 04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com SOUS LA PRÉSIDENCE DE LES S.A.R. LA PRINCESSE DE HANOVRE BALLETS We love arabs Assistant du célèbre cho- régraphe israélien Ohad DE Naharin, Hillel Kogan manie à forte dose l’au- todérision et l’ironie dans MONTE cette proposition où l’on assiste au processus de © Gadi Dagon création d’un spectacle chorégraphique contemporain engagé, prônant le rapprochement des peuples palestinien et israélien. CARLOJEAN-CHRISTOPHE MAILLOT Boursouflure artistique et politique de pacotille dansent ensemble, comme pourraient le faire Bouvard et Pécuchet.

20 & 21 mars Théâtre Jean Vilar, Montpellier 04 67 40 41 39 theatrejeanvilar.montpellier.fr

27 au 31 mars Les Bernardines, Marseille mp2018 08 2013 2013 lestheatres.net

4 avril La Garance, Cavaillon 04 90 78 64 64 lagarance.com

Trois sacres Sur la musique de Stra- vinsky, premiers pas de danse pour l’actrice Bérénice Béjo, qui en compagnie du choré- graphe Sylvain Groud, donne voix et corps à © Grégoire Korganow trois états pulsionnels de l’amour : l’attraction irrépressible, le côte à côte intime, et l’union fusionnelle. Avec des textes d’Anne Bert, Françoise Simpère, Christine et Olivier Walter.

10 au 14 avril Les Bernardines, Marseille 08 2013 2013 lestheatres.net

Orphelins Texte de l’auteur contemporain britannique Dennis Kelly, Orphelins est un thriller familial à huis clos. Le diner en amoureux d’Helen et Danny est perturbé par l’irruption de Liam, couvert de sang, porteur d’un récit confus. Une interrogation sur les violences qui traversent la société occi- dentale, et la façon dont chacun(e) s’y confronte, tout en y étant partie prenante. Une création théâtrale et politique de la jeune Cie Souricière.

20 au 24 mars Théâtre Joliette, Marseille 04 91 90 74 28 theatrejoliette.fr

5 & 6 avril Théâtre des Halles, Avignon 04 32 76 24 51 theatredeshalles.com

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Mélancolie(s) L’autre là, la blonde

Amor Josette Baïz aime la richesse de la diver- sité, et Amor, compilation de danse qu’elle a concocté autour du thème de l’amour, sous toutes ses formes, ne déroge pas à cet état d’esprit. Huit extraits de pièces signés par des chorégraphes prestigieux (Angelin Prel- jocaj, Joëlle Bouvier et Régis Obadia, Sharon © Simon Gosselin Fridman…) seront dansés par les interprètes © X-DR Le collectif In vitro, adepte d’un théâtre très de sa Cie Grenade, et reliés entre eux par La nouvelle création d’Ivan Romeuf, ex-di- vivant, dirigé par la metteure en scène Julie des extraits de Les déclinaisons de Navarre, recteur artistique de l’ex-Théâtre de Lenche, Deliquet, fait résonner le monde d’aujourd’hui espièglerie de Claire Laureau et Nicolas où il est question de Marylin Monroe, ou bien à travers cette adaptation de deux œuvres Chaigneau. de l’une de ses admiratrices, de solitude, majeures d’Anton Tchekhov : Ivanov et d’actrice, de folie. Et d’un espace temps dans Les trois sœurs. Une adaptation nourrie lequel on se perd, sur les traces d’une femme d’improvisations, qui désacralise le texte étrange dont on ne sait si elle s’adresse à nous, (« même si tous les mots sont de Tchekhov, ou ou si elle se parle à elle-même. Interprétée presque… ») où le cinéma fait son apparition, par Marie-Line (!) Rossetti. et qui prolonge la réflexion du collectif sur la disparition d’un monde et ses illusions. 7 avril Théâtre Toursky, Marseille 4 & 5 avril 0 820 300 033 toursky.fr Théâtre Joliette, Marseille 04 91 90 74 28 theatrejoliette.fr

ÜBM © Leonard Ballani La convivialité 10 & 11 avril Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org

Ligne (s) d’horizon Un spectacle d’images, avec le papier comme acteur central, aux frontières du théâtre, de la marionnette, de la danse, des arts plastiques,

© Véronique Vercheval © Véronique et de la vidéo. Une drôle de petite bonne Passer un moment de convivialité autour de femme, un bureau-établi qui tangue, et une l’orthographe française, il fallait y penser, et ligne d’horizon qui s’étire, prend la forme © La meta carpe il fallait l’oser ! Arnaud Hoedt et Jérôme d’un mot, d’une phrase, d’une histoire. Une Piron, anciens professeurs de français, performance magique proposé par la Cie ÜBM, pour Über Beast Machine, c’est à la fois sillonnent, sous le nom croquignolet de toulousaine Le Lutin Théâtre d’Images. un spectacle, une exposition et un site web. Cie Chantal et Bernadette, les salles de Une création transmédia donc, autour d’une spectacle en proposant, autour d’une table créature électrique et végétale qui ne peut de douze, leur approche courte (25 mn) et survivre sans soins humains, étudiée de près rafraichissante de cet outil technique déguisé par le Laboratoire Pro-Vivance, le tout imaginé en outil de prestige. par Michaël Cros et sa Cie transdisciplinaire Méta-Carpe, qui creuse les rapports entre 27 & 28 mars corps, marionnettes et outils numériques. Le Merlan, Marseille © David TRIVES À partir de 12 ans 04 91 11 19 20 merlan.org 6 avril Théâtre Toursky, Marseille 29 au 31 mars 29 au 31 mars 0 820 300 033 toursky.fr Théâtre Massalia, Marseille La Passerelle, Gap 04 95 04 95 75 theatremassalia.com 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu au programme spectacles bouches-du-rhône alpes 61

Barokko Marion Coutris et Serge Noyelle ont rassemblé une foule d’artistes européens, chanteurs, acteurs, danseurs, Marco Quesada EkivokE est à la commande musicale, on y croisera Collectif marseillais pluridisciplinaire, tourné des acteurs russes, et Alain Aubin, Noël essentiellement vers la création en espace Vergès, Magali Rubio et William Petit. public, le collectif Micro Focus a puisé dans Ensemble ils réinventent la démesure d’un la Magie Nouvelle et les Arts de la rue pour baroque archaïque et contemporain. Il sera mettre au point EkivokE, une déambulation question d’un Pape destitué, d’un Ange Noir loufoque et hallucinée, un spectacle hybride et d’un Roi déchu, du désir, de passion et de qui conjugue jeu théâtral, techniques d’illu- chaos, autour du songe éveillé d’un pontife sionnisme, street art et photographie. Pour © Julia TREGUB de carnaval, à l’heure de sa mort. Dentelles, créer un tour de magie à l’échelle d’une ville, Aboutissement d’un vaste chantier artistique visages de poudre, volupté, décadence, injonc- et faire se révéler le grand EkivokE ! débuté en 2009 en Belgique, création maison tions lyriques et joutes verbales vont s’aligner à laquelle se sont joints depuis 2016 plusieurs sur un long plateau bi-frontal... théâtres d’Europe et du monde, Barokko, grande forme de théâtre-opéra va enfin venir envahir le vaste plateau du Théâtre Nono. 5 au 14 avril Le spectacle, créé à Perm en 2017, renoue Théâtre Nono, Marseille avec horreur et bonheur avec l’esprit Nono ! 04 91 75 64 59 theatre-nono.co

Atelier À mains levées Familiers du Bois de l’Aune, les complices des compagnies tg STAN / De KOE / Maatschappij Discordia présentent le théâtre comme un art plastique, qui se modèle, se dessine, se construit, se défait, s’esquisse, se sculpte… avec quels matériaux, quels instru- ments ? Un chantier déjanté qui nous amène à déchiffrer les arcanes de la création théâtrale. © Ulysse Fiévé

30 mars Lieux publics, Marseille

04 91 03 81 28 lieuxpublics.com © Jean-Louis Fernandez

La trilogie de Nathalie Garraud et Oliv- ier Saccomano, La beauté du geste, suit le Arthur et Ibrahim parcours théâtral et politique d’une troupe Ni une ni deux ! Puisque le père d’Ibrahim veut d’acteurs. L’an dernier, nous en avions applaudi qu’il cesse de s’amuser avec Arthur, pour jouer le premier volet, L’instant décisif, où les comé- avec des gens « comme eux », Arthur va se diens (Cie du Zieu) sont aux prémices d’une transformer en Arabe pour préserver son amitié pièce, avec ses questionnements. Le deuxième avec Ibrahim ! Confrontation du monde des temps, À mains levées, les voit en quête de enfants et celui des adultes, blessures toujours représentation dans leurs démêlés avec l’ordre vives de l’histoire entre la France et l’Algérie, et les entités qui le symbolisent. (voir Zib’ 114) une comédie, et une invitation au questionne- © Jorn Heijdenrijk ment à destination des jeunes et des adultes. 20 au 22 mars 28 au 30 mars , Aix-en-Provence À partir de 10 ans. Bois de l’Aune Bois de l’Aune, Aix-en-Provence 7 au 9 avril 04 88 71 74 80 boisdelaune.fr 04 88 71 74 80 boisdelaune.fr Théâtre Massalia, Marseille 04 95 04 95 75 theatremassalia.com

3 au 5 avril La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu 62 au programme spectacles bouches-du-rhône alpes-maritimes

L’héritier de village It’s Always Here / Scarabeo, Angles and The Void / 12 Posdated Checks Mass B L’homme marche, c’est bien connu, depuis la nuit des temps, et investit dans ce mouvement irrépressible le monde… fuite, conquête, espoir de reconstruction, ailleurs… Béatrice Massin met en scène dix danseurs dans une marche intemporelle sur la Messe en si mineur de

Bach, entrecoupée d’éclats contemporains, 12 Postated checks © Gadi Dragon pour une bouleversante fresque humaine, Trois opus, trois talents de la scène israélienne © Christophe Henry baroque et réinventée. au Pavillon Noir, témoignent une fois encore À l’instar du Bourgeois Gentilhomme de de sa créativité et de son énergie. Le duo Molière qui cherchait à singer les manières très « lié » d’Adi Boutrous, qui interprète des nobles, Blaise, paysan récemment enrichi avec Avshalom Latucha It’s Always Here par un héritage, adopte les us et coutumes de précède la joyeuse dualité de celui d’Andrea ce qu’il croit être digne de son nouveau statut Costanzo Martini, Scarabeo, Angles and social… Le texte de Marivaux mis en scène The Void. Enfin, 20 jeunes danseurs du Ballet par Sandrine Anglade est savoureux, drôle, Preljocaj se livreront à la performance de 12 corrosif et nous renvoie aux fonctionnements Postdated Checks d’Ella Rothschild. du libéralisme actuel, jusqu’à la banqueroute !

© Patrick Cockpit. 7 & 8 avril 20 au 24 mars 23 & 24 mars Pavillon noir, Aix-en-Provence Théâtre du Jeu de Paume, Aix-en-Provence Pavillon noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org 08 2013 2013 lestheatres.net 04 42 93 48 14 preljocaj.org 5 avril (It’s Always Here et Scarabeo, Angles and The Void) Scène 55, Mougins 04 92 92 55 67 scene55.fr Le Corps du Ballet National Théorie des prodiges de Marseille Système Castafiore (Marcia Barcellos et Karl Biscuit) revient au Pavillon Noir, en cultivant son goût de l’étrange et du merveil- Vader leux. Avec La Théorie des Prodiges, on entre Le premier volet de la trilogie familiale selon le dans un univers baroque et fantastique à collectif Peeping Tom, Vader (père) s’appuie l’esthétique rappelant les tableaux de Bosch sur l’hyperréalisme, familier de la compagnie et de Dali, en une série de saynètes, vignettes belge. Les danseurs devenus « élastiques » d’instants qu’ourle la voix superbe d’une rendent compte du huis clos familial, jonglent chanteuse (Camille Joutard)… Un spectacle entre émotion et humour en une expression tou- © Alwin Poiana à la frontière des genres à partir de 8 ans. jours décalée et ironique d’une intense poésie. Réinvention du genre du ballet classique, avec la célébration de chaque individualité tout en gardant une superbe cohérence d’en- semble, l’œuvre d’Emio Greco et Pieter C. Scholten met en scène 23 danseurs du Ballet National de Marseille. Nous est offerte ici une célébration énergique et puissante de l’art de la danse.

14 avril © Herman Sorgeloos Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence 13 & 14 avril 08 2013 2013 lestheatres.net Pavillon noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org © Karl Biscuit

30 & 31 mars Pavillon noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org au programme spectacles bouches-du-rhône vaucluse 63

Monsieur Kaïros

Aimer aimer Yvonne, princesse Dernier volet du triptyque initié avec Sous de Bourgogne… le signe du chien, puis de Jaloux de Dieu, Avant de passer par La Criée à Marseille (fin Aimer aimer, écrit et mis en scène par Alain mai), le décapant spectacle d’Édith Amsel- Simon, suivra les mêmes et jubilatoires règles lem fait étape à Vitrolles. Elle transpose une de composition que les opus précédents, pièce de l’auteur polonais Witold Gombrowicz jonglant entre improvisations et ruptures, dans une cour de récréation. Une comédienne en un style à sauts et gambades titillant différente chaque soir interprétera l’héroïne au autant l’intelligence que les zygomatiques. physique ingrat que le beau jeune premier choi- Mots, danse, musique (répartis entre Jeanne sit -par provocation ! Façon de laisser sa part au Alcaraz, Elyssa Leydet-Brunel et Mickaël risque, ce que n’aurait pas renié le dramaturge, Zemmit), tout parle d’amour… © Christophe Leclaire adepte de « l’anarchie illimitée de la forme ». Le temps, pas le météorologique, ni celui qui À partir de 13 ans. 23 au 29 mars nous entraîne, mais celui de l’occasion, de Théâtre des Ateliers, Aix-en-Provence l’opportunité, jeune dieu de l’antiquité grecque 04 42 38 10 45 theatre-des-ateliers-aix.com qu’il fallait savoir « saisir par les cheveux », est-ce lui qui a inspiré Fabio Alessandrini pour son Monsieur Kaïros où l’on voit des personnages refuser leur identité, et la scène Tout l’univers en plus petit abolir les frontières du réel entre comique et La fantaisie foraine de Gilles Cailleau se goût du paradoxe… glisse dans un petit théâtre à l’italienne aux Spectacle des ATP AIX © Jm Coubart splendeurs déchues. La mémoire saura-t-elle Yvonne, princesse de Bourgogne repeupler ces objets de jadis de leur magie pas- 17 & 18 mars sur château-toboggan sée, rendre vie à cet ensemble rafistolé, recousu, Théâtre des Ateliers, Aix-en-Provence 10 avril 04 42 26 83 98 atp-aix.net Théâtre Fontblanche, Vitrolles rapetassé ? Souvenirs fragmentés, diffraction 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr du temps pour s’apercevoir de la permanence d’un univers ancien. C’est délicieux, avec le charme des dorures et des pourpres délavés auxquels deux personnages rendent vie… IMAGO-GO Spectacle des ATP AIX. Marta Izquierdo Muñoz interroge à travers Le tarot du grand tout cette nouvelle création les imaginaires déve- Aubagne accueille le conteur Lamine Diagne, loppés autour de la majorette. Circassiens, qui nous invite à pénétrer dans l’hôpital de comédiens, danseurs, musiciens, arpentent La Timone à Marseille. Un jeune musicien ses diverses incarnations avec pertinence et y accompagne son neveu, victime d’un humour. Ce fleuron de la culture populaire accident de voiture ; il s’aventure dans le est présenté lors d’une étape de travail dans dédale des couloirs hospitaliers pour glaner le cadre du dispositif TRIDANSE. de fantastiques histoires (le cheval du 8e étage, l’enfant-bulle, l’étage fantôme...), et ainsi sti- 24 mars muler sa guérison. Un spectacle réalisé suite 3bisf, Aix-en-Provence à une immersion dans les services de l’hôpital 04 42 16 17 75 3bisf.com pour enfants, avec l’aide à la dramaturgie de François Cervantes. À partir de 7 ans. 14 avril Vélo Théâtre, Apt 04 90 04 85 25 velotheatre.com © Sébatien Armengol © X DR 17 & 18 mars 28 mars Salle Jean Monnet, Plan de Meyreuil Le Comoedia, Aubagne 04 42 26 83 98 atp-aix.net 04 42 18 19 88 aubagne.fr 64 au programme spectacles bouches-du-rhône

Cabane Tuyauterie

Et l’acier s’envole aussi Guillaume Apollinaire avait le sang chaud et on lui doit des pages enflammées : certains de ses poèmes, ou ses correspondances avec diverses maîtresses. Pierre Béziers s’inspire ici de ses Lettres à Madeleine, une jeune © Marianne Grimont © X DR. femme rencontrée dans un train alors qu’il Céline Schnepf a choisi d’offrir un Petit partait au front en 1915. « Je pense à ton corps Mais d’où vient ce fantasme apparemment cabaret pour forêts miniatures à son très jeune exquis divinement toisonné » s’énamoure le très répandu, d’une femme au foyer irrésisti- public (à partir de 1 an : le spectacle dure une poète depuis les tranchées, tandis qu’autour blement attirée par le plombier venu faire des demi-heure). Un homme et une femme se de lui hurlent les obus de la grande boucherie. réparations chez elle ? On trouvera peut-être partagent un territoire forestier ; il dresse les réponse à cette question dans le spectacle de renards tandis qu’elle collectionne les cerfs. Philippe Blasband, avec Charlie Dupont Elle vit dans une jupe, c’est pratique, lui dans et Tania Garbarski. Le piquant de l’histoire une caisse en bois, ce qui a ses avantages étant que ces derniers, hors scène, forment aussi. Et tous deux se rencontrent à mi-chemin un « vrai » couple, prêt à titiller le voyeur qui entre la danse et le théâtre. sommeille en tout spectateur...

11 avril 6 avril Le Comoedia, Aubagne Espace NoVa, Velaux 04 42 18 19 88 aubagne.fr 04 42 87 75 00 espacenova-velaux.com © Théâtre du Maquis 23 mars Halle Léo Ferré, Gardanne 04 42 65 77 00 ville-gardanne.fr Le jeu de l’amour et du hasard Tamao

Candide l’Africain La Cie Marbayassa suit Candide de décou- verte en découverte. Il s’agit bien du conte philosophique de Voltaire, mais tel qu’il serait écrit aujourd’hui, en Afrique, fécondé de culture orale avec l’art des griots, et en musique s’il vous plaît ! L’Espace Nova dédie cette soirée

© Christophe Vootz à l’association humanitaire AMNS Les Enfants Monsieur Orgon et son meilleur ami ont de Tangaye, qui œuvre pour le développe- convenu de marier leurs enfants Silvia et ment du village de Tangaye au Burkina Faso. Dorante. Mais tous deux, voulant rencontrer © Olivier Thillou leurs promis respectifs, prennent les traits De la sortie de son œuf jusqu’à son retour, de leurs valets Lisette et Arlequin. Marivaux pour la première ponte, sur la plage de sa souligne la cruauté de l’amour, et des rapports naissance, la vie de la petite tortue de mer de classe. Car dans cette pièce adaptée par Tamao s’apparente à un parcours initiatique. Philippe Calvario avec la collaboration de Accompagnée de créatures loufoques, mi-si- Valérie Nègre, les couples réassortis vont rènes, mi-marins, elle raconte ses aventures… jusqu’au « jeu de massacre ». Leïla Mendez et Sophie Laloy plongent les tout-petits dans un univers aquatique 12 avril enchanteur où se mêlent film, théâtre, et Le Comoedia, Aubagne une musique -jouée sur scène- composée 04 42 18 19 88 aubagne.fr essentiellement autour des poèmes de voyage de Blaise Cendras. © X DR 24 mars 21 mars Espace NoVa, Velaux Les Salins, Martigues 04 42 87 75 00 espacenova-velaux.com 04 42 49 02 00 les-salins.net au programme spectacles bouches-du-rhône var 65

Mon frère ma princesse

L’abattage rituel Couak ! de Gorge Mastromas Faire écouter aux plus petits (dès 4 ans) des On peut être un type bien, et se métamorphoser œuvres issues du répertoire, peu diffusé, de en un salaud cynique dénué de scrupules. grands compositeurs de ces cinquante der- Entre la morale et le pouvoir Gorge Mastro- nières années, tel est le contenu du spectacle mas a choisi, il vendra son âme pour devenir d’Annabelle Playe, soprano et électroacous- un richissime chef d’entreprise à qui rien © Adrien Patry ticienne. Écrites pour la voix, les œuvres de ni personne ne résiste, ou presque… Après Alyan, petit garçon de cinq ans, n’en démord Luciano Berio, Georges Aperghis, John Cage, Orphelins, Chloé Dabert retrouve la langue pas : il veut être une princesse. Et une maman. Jacques Rebotier, François-Bernard Mâche acérée de l’auteur anglais Dennis Kelly, Face à la cruauté des autres enfants, et à et Cathy Berberian sont revisitées par cette poursuivant une réflexion sur la place de l’incompréhension de ses parents, Alyan drôle de cantatrice qui donne du sens aux l’individu dans nos sociétés contemporaines. s’échappe dans les contes de fées et porte sons, et en fait des images ! une robe… de princesse. Émilie Le Roux, Cie Les Veilleurs, met en scène le texte de Catherine Zambon (Ecole des Loisirs) qui met en lumière la question de l’identité sexuelle et de l’acceptation de la différence. À partir de 8 ans.

11 avril Les Salins, Martigues

© Solange Abaziou 04 42 49 02 00 les-salins.net © X DR 27 mars 28 mars Les Salins, Martigues La Colonne, Miramas 04 42 49 02 00 les-salins.net Alban Richard & Coline 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr

M comme Méliès Nanan Georges Méliès n’a certes pas inventé le Le jazz n’est pas réservé qu’aux adultes, les cinéma, mais il est bien à l’origine d’un grand oreilles des tout-petits apprécient aussi le nombre de techniques cinématographiques, genre, surtout quand ils peuvent participer. particulièrement des premiers effets spéciaux, Par le biais de la douceur et du jeu, le quintet mis en œuvre dans Le Voyage dans la lune en composé de Lydie Dupuy (paroles, musique 1902. Pour leur premier spectacle écrit pour et batterie), Rémi Ploton (arrangements et le jeune public (dès 8 ans), Elise Vigier et piano), Mélina Tobiana (chant), Vincent Marcial Di Fonzo Bo se sont inspirés de ses Perier (saxo et clarinette) et Julien Sarazin textes et d’entretiens pour montrer comment (contrebasse), invite les enfants à utiliser leurs l’art se fabrique tout en rendant hommage à mains, leurs corps et leurs voix. Un régal ! ce précurseur de génie. © M. Barret-Pigache À l’occasion de la création d’une chorégraphie commune avec les danseurs de la formation Coline, Alban Richard présente en deuxième partie de soirée Vivace, sa dernière pièce. Dans ce duo, interprété par Yannick Hugron et Anthony Barreri (ancien danseur de Coline), la danse est faite de pulsions, basées sur une rythmique, une dynamique qui évoque

l’endurance, la vitalité. © X DR 31 mars 20 mars Théâtre de Fos

© Vigier Fonzobo © Vigier La Colonne, Miramas 04 42 11 01 99 scenesetcines.fr 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr 4 avril 24 mars Les Salins, Martigues Théâtre Marelios, La Valette 04 42 49 02 00 les-salins.net 04 94 23 62 06 lavalette83.fr 66 au programme spectacles bouches-du-rhône var

Mille batailles Groenland Manhattan

Lettre pour Éléna Sur un texte d’Érika Tremblay-Roy et une chorégraphie de Christophe Garcia, la Cie La Parenthèse aborde le thème délicat du deuil. Trois jeunes filles, de retour de l’école, découvrent des lettres déposées sur le bord © Cornellier de la route pour elles. « Il y en a de tout le Du Chevalier inexistant d’Italo Calvino, monde, sauf d’Éléna », l’amie absente. Entre

la danseuse et chorégraphe canadienne danse et théâtre s’instaure alors un jeu de Canton © Tony Louise Lecavalier, icône féminine de la piste épistolaire qui les mènera vers une vérité Un explorateur américain, parti au pôle Nord en danse contemporaine, livre une version très pas toujours facile à entendre… 1897 pour y planter un drapeau vainqueur sur personnelle qui, entre solo et duo exécutés des terres de « sauvages » à coloniser, échoue avec Robert Abudo, offre une allégorie de dans sa mission. Autant revenir avec des nos combats contemporains, sur une scène qui souvenirs vivants, des esquimaux qui feront a tout d’un ring. La musique jouée en direct sa fierté ! Parmi eux un enfant, Minik, va vivre par Antoine Berthiaume accompagne et la violence de l’immigration forcée. Après Le rythme cette danse époustouflante. Tour de Valse, Tony Canton réunit à nouveau, avec pertinence, BD (roman graphique de 27 mars Chloé Cruchodet, éd. Delcourt) et musique Théâtre de l’Olivier, Istres (Stéphane Milleret et Sébastien Tron) !

04 42 56 48 48 scenesetcines.fr © JC Verchere 7 avril 29 mars 14 avril Théâtre de l’Olivier, Istres Théâtre de l’Olivier, Istres Châteauvallon - Scène nationale, Ollioules 04 42 56 48 48 scenesetcines.fr 04 94 22 02 02 chateauvallon.com 04 42 56 48 48 scenesetcines.fr

Floating flowers Au-dessus de la mêlée Inspirée d’une fête religieuse taïwanaise au Cyrano de Bergerac cours de laquelle des lanternes lumineuses lâchées sur l’eau des fleuves et rivières accompagnent l’âme d’un défunt vers un au-delà apaisé, la pièce du jeune chorégraphe Po-Cheng Tsai transforme les corps des huit danseurs –quatre femmes et quatre hommes vêtus d’un jupon blanc- en ondes paisibles, ou flots impétueux, qui répondent aux rythmes obsédants de la musique de Rockid Lee. © Rudy Sabounghi Tradition et modernité se rejoignent pour Bretteur valeureux au sein des armées du Roi célébrer la vie, éphémère et précieuse. de France, mais aussi poète éloquent, Cyrano

est un amoureux malheureux. Affublé d’un nez © Chantal Depagne Palazon disgracieux qui le rend laid, il reste invisible aux Il est à lui tout seul tout ce qui fait un match yeux de sa cousine Roxanne qui aime le beau de rugby, des joueurs au coach, sans oublier Christian… Jean Liermier met en scène le les supporteurs, parents y compris… Cédric chef-d’œuvre d’Edmond Rostand en mettant Chapuis plonge les spectateurs la tête la à nu les défauts et fragilités d’un Cyrano première dans cet esprit de corps qui va bien magistralement interprété par Gilles Privat, au-delà d’un sport adoré ! C’est une aventure plus mélancolique que fier, assaillis de doutes humaine qu’il raconte en la jouant, louant, qui le rendent infiniment humain et attachant. Chou Wen © Yi avec humour et sensibilité, des valeurs aussi 10 avril précieuses que l’endurance et l’amitié, une Théâtre de l’Olivier, Istres 3 et 4 avril fraternité révélatrice d’une belle humanité. 04 42 56 48 48 scenesetcines.fr Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 scenesetcines.fr 14 avril 23 mars Le Carré, Sainte-Maxime Espace Gérard Philippe, Port-Saint-Louis 04 94 56 77 77 carreleongaumont.com 04 42 48 52 31 scenesetcines.fr au programme spectacles bouches-du-rhône hérault 67

Les Veufs

Ma class’ hip hop Hospitalités Entre stand-up et master class, le spectacle Cet exaltant projet a été mené par le performeur de Céline Lefèvre livre une riche histoire suisse Massimo Furlan à l’invitation du musi- du hip hop, dansée, jouée, avec beaucoup cien Kristof Hiriart avec des habitants de La d’énergie et d’humour. Immergée depuis plus Bastide-Clairence, petit village du Pays Basque. de vingt ans dans l’univers de cette culture, © Collectif L’Isba La fiction imaginée pour la performance en la danseuse et chorégraphe en décortique Un homme et une femme se rencontrent dans ce lieu (faire croire à l’arrivée de migrants les codes, les styles et les courants, démons- les allées d’un cimetière ou l’un et l’autre dans le village pour y faire chuter le prix de trations à l’appui ! se rendent fréquemment pour conserver l’immobilier) a rejoint l’actualité lorsqu’une intact le souvenir qui les lie à leurs défunts famille de syrien s’y est installée… C’est cette conjoints. S’instaure alors un dialogue fait histoire que racontent neuf des villageois. de petites choses, comme un frémissement de vie. José Renault met en scène le texte de Louis Calaferte avec le Collectif L’Isba.

23 mars Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 theatre-arles.com © Pierre Nydegger La Compagnie des spectres 7 avril Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 theatre-arles.com

10 & 11 avril Théâtre La Vignette, Montpellier 04 67 14 55 98 theatrelavignette.fr © X-D.R

Espace Gérard Philippe, Port-Saint-Louis 04 42 48 52 31 scenesetcines.fr Zvizdal Après la catastrophe de Tchernobyl, en 1986, des centaines de milliers de personnes ont été déplacées et les abords de la centrale nucléaire ont été déclarés zone interdite. C’est La Maison là, dans le village de Zvizdal où ils sont nés, © Chantal Depagne Palazon Pénétrer dans une maison, en parcourir les que vivent, seuls, Pétro et Nadia, un couple pièces, s’interroger sur ses habitants, leur Dans l’appartement d’une cité de banlieue, d’octogénaires qui n’a pas voulu partir. Avec vie… Cet espace dans lequel nous convie une mère, Rose, et sa fille, Louisiane, font face la journaliste Cathy Blisson, le Collectif Inne Goris nous enveloppe de sa propre à un huissier venu procéder à un inventaire Berlin trace un portrait filmé bouleversant histoire, d’une relation mère-fille qu’elle livre avant saisie. Un état des lieux qui va réveiller de ces survivants au fil des saisons, au fil avec beaucoup de finesse et de poésie. Un chez Rose les fantômes du passé, elle dont la d’un temps qui s’étire. casque sur les oreilles, les spectateurs se vie s’est arrêtée en 1943… Drames familiaux laissent guider par les chuchotements de liés à la Deuxième Guerre mondiale, non- ces deux voix, celle de la mère parlera aux dits, souffrances, tout se dévoile dans une enfants, celle de la fillette aux adultes, sur la logorrhée sensible et désespérée. Le texte de musique et les bruitages de Wouter Snoei. Lydie Salvayre est mis en scène et adapté par Zabou Breitman, qui joue les trois rôles. 19 & 20 mars Théâtre d’Arles 24 mars 04 90 52 51 51 theatre-arles.com L’Alpilium, Saint-Rémy-de-Provence

04 90 92 70 37 mairie-saintremydeprovence.fr © Collectif Berlin

27 & 28 mars 12 & 13 avril Théâtre d’Arles Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 theatre-arles.com 04 90 52 51 51 theatre-arles.com 68 au programme spectacles vaucluse bouches-du-rhône var

While we strive Ça ira (1) Fin de Louis

Dionysos… Dionysos... Ce nom vous évoque sûrement quelque chose ! Figure majeure de la mytho- logie grecque, Dieu du vin, de la vigne et de l’ivresse, de la végétation et de la génération... Cette divinité complexe est au cœur du conte © Jochem Jurgens que propose Jeannie Lefebvre qui emporte © Elisabeth Carecchio Dans les spectacles du chorégraphe hollandais loin, très loin, son auditoire immobile ! Lais- La dernière mise en scène de Joël Pommerat Arno Schuitemaker, corps, mouvement, sez-vous guider, la rencontre est belle. est un grand spectacle. Liant l’intime et le musique et lumière fusionnent, bouleversent politique il plonge dans l’histoire de la Révo- les perceptions de l’espace pour créer de Dionysos, ou plus exactement l’étrange étranger lution Française, et s’introduit au sein de la nouvelles et fascinantes sensations. Emportés 23 mars sphère publique transformant la salle en agora, dans une danse hypnotique, à la limite de Médiathèque, Charleval là où se déroulent les réunions citoyennes, 04 42 28 56 46 charleval-en-provence.org la transe, les trois performeurs de While we les discours et les négociations. Au cœur de strive portent le rythme jusqu’à une extrême la démocratie naissante. limite physique. 23 & 24 mars 27 mars Ivo Livi ou le destin Opéra Confluence, Avignon La Garance, Cavaillon d’Yves Montand 04 90 78 64 64 lagarance.com La vie d’Yves Montand est revisitée par Ali 6 & 7 avril , Sainte-Maxime Bougheraba et Cristos Mitropoulos, dans Le Carré 04 94 56 77 77 carre-sainte-maxime.fr une mise en scène de Marc Pistolesi. Quatre comédiens et un accordéoniste remontent le L’oiseau migrateur temps pour raconter comment un fils d’immi- grés italiens va devenir un artiste majeur et un citoyen engagé dans les grands moments Loretta Strong de l’histoire du XXe siècle. De Marseille à Hollywood, de la guerre froide au commu- nisme, tout se joue, se danse et se chante, sans artifice et avec une énergie follement communicative ! © P. Bretelle et J. Jolivet © P. © Ultima Necat Ce spectacle s’inspire de l’histoire qu’a vécue Ultima necat, c’est le nom de la compagnie enfant l’auteur-illustrateur Hervé Walbecq qui porte ce spectacle : la dernière (minute) tue. avec un oiseau. Durant 8 ans le verdier en Il va bien avec l’ambiance de fin du monde de question évolua librement dans sa chambre. l’œuvre de Copi : une cosmonaute perdue dans Sur le plateau, l’homme-dessinateur est l’espace apprend que la Terre vient d’exploser, accompagnée de Marie-Aude Thiel, clown suite à une invasion d’hommes-singes. Dans et musicienne, pour faire vivre, en direct par sa navette, elle lutte contre l’invasion de rats, des dessins à la ligne claire, la suite : l’envol, qui assaillent son propre corps. Fantasme la migration. Dorian Rossel met en scène fantasque ? Une métaphore de la vie et de cette invitation au voyage, à la découverte la mort mise en scène par Gaël Leveugle. de soi et des autres. © Fabienne Rappeneau 12 avril 24 mars Auditorium Jean Moulin, Le Thor 9 au 14 avril en tournée Nomade(s) Artéphile, Avignon 04 90 33 97 32 auditoriumjeanmoulin.com La Garance, Cavaillon 04 90 03 01 90 arthephile.com 04 90 78 64 64 lagarance.com au programme spectacles vaucluse 69

Les carnets d’un acteur

Lettre à monsieur Dernier jour d’un condamné le futur Président L’ombre de la guillotine plane sur le person- Dans cette lettre écrite en 2007, entre autres nage interprété par William Mesguich, questions de politique-poil à gratter, Gérard condamné à mort. On ne connaît pas son Gelas se demandait si on pourrait déplacer le nom, ni son crime ; là n’est pas l’important Palais de l’Élysée dans la banlieue parisienne, dans ce fameux texte de Victor Hugo, mis par exemple vers ce département de la Seine- en scène par François Bourcier. Il s’agit Saint-Denis que l’on ne désigne quasiment plutôt de rappeler ce qu’implique la peine plus que par le familier « 9-3 ». Cette création de mort : les affres de l’attente, avant que 2018, mise en scène par François Brett, ne tombe le couperet de la violence légale convaincu que le texte reste pertinent après sur un individu. le résultat des élections pour interpeller le pouvoir, est conçue comme un slam : percutant, 12 & 13 avril et fougueux. Avec Franck . Le Balcon, Avignon Charles Gonzalès © Jean Didier Tiberghien 04 90 85 00 80 theatredubalcon.org La création 2018 d’Alain Timár s’inspire de Dostoïevski (Les carnets du sous-sol et Le rêve d’un homme ridicule), Shakespeare, et la Bible. Charles Gonzalès, seul en scène, … de là-bas interprète Fedor, homme à tout faire dans Le chorégraphe Romain Bertet, pour créer un théâtre, qui rêve de brûler les planches cette « pièce archéologique », a souhaité plutôt que de les balayer. Un jour, l’occasion « avant tout la création d’un lieu ». Il interroge est là, et il va se risquer sous les feux de la donc la notion d’espace au moyen d’outils rampe, avec son amour des textes, sa rage visuels et narratifs : cadre en déplacement, et ses frustrations. construction d’une histoire avec des traces, paysage changeant d’échelle, ombre du per- 22 au 25 mars sonnage qui creuse son sillon dans sa maison Théâtre des Halles, Avignon d’argile, jusqu’à s’y fondre... 04 32 76 24 51 theatredeshalles.com À partir de 12 ans.

Franck Etenna © X DR Être et ne pas être 7 & 8 avril Sept jeunes acteurs issus du Conservatoire de Chêne Noir, Avignon théâtre d’Avignon (Coline Agard, Marion 04 90 86 74 87 chenenoir.fr Bajot, Anne Sophie Derouet, Léa Guillec, Sean Lempérière, Mathie Lisi, et Sarah Rieu) confrontent leurs incertitudes existen- tielles. Au terme d’un parcours initiatique, ils L’amour dans tous ses états se révéleront « capables d’un sentiment de Sandra Valentin et Hervé Pauchon compassion et d’empathie, ce qui autorisera parcourent sur scène les étapes de la vie enfin la rencontre authentique ». Une pièce d’un couple. Cela s’est déjà vu, au théâtre ! théâtrale et chorégraphique, sur le thème de © Pascale Beroujon L’originalité de cette œuvre est d’apporter un l’identité, écrite et mise en scène par Silvia 21 mars regard très particulier sur ce processus, qui Cimino (création 2018). Théâtre Durance, Château-Arnoux/Saint-Auban peut aller de la construction au délitement : 04 92 64 27 34 theatredurance.fr celui d’une psychothérapeute. Marie-Lise 6 & 7 avril Labonté ponctue chaque moment de passion Le Balcon, Avignon montante, d’intimité ou de détresse avec son 04 90 85 00 80 theatredubalcon.org éclairage théorique.

10 avril Chêne Noir, Avignon 04 90 86 74 87 chenenoir.fr 70 au programme spectacles alpes vaucluse

La petite casserole d’Anatole Gus

Iliade Pauline Bayle adapte Homère avec le sens de l’épure, et une scénographie réduite au minimum, ce qui ne l’empêche pas de bousculer le mythe. En assouplissant les rôles genrés, par exemple. Ses acteurs et actrices se glissent tour à tour dans la peau © Benjamin Rullier de personnages masculins ou féminins, qu’ils Il a été abandonné tout petit dans une poubelle, soient humains, héroïques ou divins. La Guerre et son destin en est marqué. Le chat Gus reste

© Cyrille Louge de Troie oppose deux camps, mais surtout griffeur et hostile, alors que, recueilli, il est Décidément cette histoire d’un petit garçon deux visions du monde, qui, selon la jeune désormais entouré d’amour. Un mystère qui qui trimbale une casserole encombrante metteure en scène, ont encore des choses à intrigue Sébastien Barrier. Avec son ami et inspire les créateurs ! Publiée par Isabelle nous dire aujourd’hui. musicien Nicolas Lafourest (propriétaire du Carrier aux éditions Bilboquet, elle a été matou), il consacre ce spectacle à l’éclaircir. adaptée à plusieurs reprises au cinéma et Pour parler de perte et d’attachement, ainsi sur scène. Le Théâtre Durance accueille que « de la difficulté et du plaisir d’aimer ». à son tour cette touchante métaphore du (voir Zib’ 115) À voir en famille dès 10 ans. handicap, sous la forme d’un spectacle de marionnettes adapté aux enfants de trois ans 21 & 23 mars et plus, avec en alternance Francesca Testi La Passerelle, Gap et Anthony Diaz ou Marjorie Currentin 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu et Dominique Cattani. © Pauline Le Goff 4 avril 20 & 22 mars Théâtre Durance, Château-Arnoux/Saint-Auban La Passerelle, Gap Les malédictions 04 92 64 27 34 theatredurance.fr 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu

Quatorze Odyssée La Cie À tire-d’aile livre le second pan de son travail « homérique ». Pauline Bayle et ses comédiens choisissent cette fois un temps apaisé après la guerre, la ruse d’Ulysse plutôt que la force des guerriers. Son Odyssée n’est pas de tout repos, certes, mais chaque épreuve © Richard Volante le rapproche de lui-même, avec ses ambiva- Le Théâtre La Passerelle envoie régulièrement © Pierre Grosbois lences et ses contradictions. Comme dans des artistes en tournée dans les Hautes-Alpes, Aborder la guerre de 14-18 par l’humour, l’Iliade, cinq artistes interprètent une quinzaine avec ses « Excentrés ». C’est le cas pour cette il fallait oser ! C’est le pari de la Cie Cas- de rôles, sans sacrifier la clarté de l’histoire. œuvre de Nicolas Bonneau, qui fait appel à sandre, qui s’attaque aux racines de la la marionnette et à la magie dans un propos grande boucherie. En remontant 38 jours documentaire. Inspiré par l’ethnologue Jeanne avant son déclenchement, concentrés en deux Favret-Saada, il a enquêté sur les guérisseurs, heures de spectacle historique. Six comé- magnétiseurs et rebouteux qui exercent en diens incarnent de multiples personnalités Mayenne et Bretagne. La comédienne Hélène de l’époque, ayant participé à l’engrenage Barreau et la musicienne Fannystatic ont fatal : généraux, dignitaires, journalistes... plongé avec lui dans l’opacité de ces pratiques Dans un clin d’œil appuyé aux insuffisances encore très répandues. du « devoir de mémoire » officiel.

© Pauline Le Goff 8 avril, à Veynes 13 avril 21 & 23 mars 10 avril, à Tallard Théâtre Durance, Château-Arnoux/Saint-Auban La Passerelle, Gap 12 avril, à Chabottes 04 92 64 27 34 theatredurance.fr 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu 13 avril, à Embrun 15 avril, à Chorges 18 avril La Passerelle, Gap La Garance, Cavaillon 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu 04 90 78 64 64 au programme spectacles alpes var 71

Rue des voleurs

Balthazar, Dieu et moi Bella Balthazar se pose des questions profondes sur Bella, enfant rêveuse, regarde autant les gens la vie, la mort, la destinée. Le voyage initiatique que les nuages. Ce serait si beau de voler… d’un petit garçon et sa maman, sous la forme Et voilà qu’elle remarque que de jour en jour, d’une déambulation dans les espaces du elle est plus légère ! Elle peut alors se laisser Centre d’art contemporain de Briançon. Un tomber comme une fleur de la branche de son spectacle à voir en famille à partir de 8 ans, © Jessica Calvo arbre vigie. Jusqu’à ce qu’elle perde contact adapté et mis en scène par Viviane Escazut, Bruno Thircuir adapte le roman de Mathias avec le sol, pour de bon. Marina Montefusco professeure au Conservatoire du Briançonnais, Énard, qui voit un jeune marocain quitter propose un conte délicat pour marionnettes, d’après le texte de Claire Gatineau, son son pays au moment des printemps arabes, qui nous parle de ces moments où la vie, ancienne élève. pour rejoindre les indignés espagnols. Les l’âge, nous font passer d’un état à un autre. représentations ont lieu dans un camion- Une création de la Cie Le Clan des songes. théâtre, avec lequel La fabrique des petites utopies circule depuis des années sur les deux rives de la Méditerranée, à la rencontre d’une jeunesse bouillante, car éprouvée. À partir de 14 ans.

4 au 6 avril

© Nicolas Rubat Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu 20 mars Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

Batman contre Robespierre

Besame (mucho) Mettre les points sur le i et projeter un esprit délirant sur le reste du monde, c’est la spécialité de la Compagnie du i qui se lance dans la création d’un spectacle de clown. Séraphine, chignon tiré et talons vertigineux, aime tout © Séverine Cadillac ce qu’elle contrôle, mais bien sûr, la vie est récalcitrante à ce genre d’aspiration ! Nous 4 avril

© Laura Mac Coll Théâtre du Rocher, La Garde suivons sa découverte des imperfections 0800 083 224 polejeunepublic.fr humaines aux côtés d’un musicien muet et Les « Échappées » du Théâtre du Briançon- mystérieux, un certain Gabriel… délicieu- conduiront ce spectacle d’Alexandre sement séraphique ! Markoff en tournée dans les Hautes-Alpes. Pourquoi un tel titre ? L’histoire d’un homme banal, doté d’une famille, d’un boulot et d’un La mécanique des ombres crédit à la banque, et qui va tout perdre, sert à Les trois danseurs acrobates de la Cie Naïf évoquer l’ensemble d’un « peuple divisé, qui Production continuent leur travail de mélange ne croit plus en l’action collective, résigné, que entre danse hip hop et cirque. Après Je suis la publicité, la télévision, le cinéma ont fini fait du bruit des autres, ils poursuivent la par convaincre que seul un justicier solitaire démarche avec un spectacle qui invente un pouvait encore quelque chose pour lui ». langage gestuel plein de promesses. Avec les trois mêmes costumes (sweet et jean, 10 avril, à Villard-Saint-Pancrace et visages cachés dans la profondeur des 11 avril, à La Grave capuches), ils évoluent aussi dans le domaine 12 avril, à Guillestre 13 avril, à L’Argentière-la-Bessée du mime, déclinant les gestes du quotidien et les dérapages des accidents de la vie. Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu 20 mars © Vincent Bidault © Vincent Auditorium de la Dracénie, pôle 22 & 23 mars culturel Chabran, Draguignan Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu 72 au programme spectacles var

Le Nouveau monde Boutelis

Flaque Les trois artistes de la Cie Defracto jonglent avec les règles : oui, ils manient les balles à la perfection, mais aussi et surtout, ils déjouent les codes de la discipline. L’art de la chute est parfois plus subtil que celui de toujours tout © Claire Bossuet réussir. Et parfois aussi, on peut jongler sans Gilles Cailleau (Cie Attention fragile) objet. Ou sans les bras. Avec la transgression s’affronte au contemporain, de plein fouet : comme moteur, ils présentent un spectacle celui, dur et plein de questions, qui ouvrent sur de haute voltige, où tout est chorégraphié, des abîmes d’incompréhension et de révoltes. surtout les ratés. Il s’adresse autant aux enfants qu’à leurs parents : avec des poupées, des objets, de la magie, mis en situation devant les spectateurs, © Jacques Sampic il rejoue, en musique, en mots, les enjeux de L’univers de la Cie Lapsus regorge d’images notre XXIe siècle. Alors la poésie apparaît oniriques. Tout semble suspendu sur la scène : comme un moyen d’éclaircir et d’adoucir les corps, les objets, les histoires. Les 7 circas- le monde. siens évoluent entre voltige, monocycle, théâtre, un lit, une pluie de miroirs, des perruques, des 11 au 14 avril talons aiguilles : la vie s’invite sur le plateau, Complexe Saint-Exupéry, Draguignan © Pierre Morel et tissent des récits entre les numéros. 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com 14 & 15 avril Pôle Jeune Public, Le Revest-les-Eaux 31 mars 0800 083 224 polejeunepublic.fr La Croisée des Arts, Saint-Maximin 04 94 86 18 90 st-maximin.fr Au loin

In the middle Elles ont réussi à grimper sur les plus hautes Les Nuits barbares… marches des podiums des concours de hip hop. Parmi des concurrents presque exclusi- vement masculins, les 7 danseuses de la Cie Swaggers cassent les barrières et ouvrent le champ de la street dance aux femmes. Attention ça bouscule les genres ! Marion © Virginie Delattre © Virginie Motin ose le hip hop alternatif et détendu : C’est l’histoire d’Ulysse. Il est ici un petit un crew organique et sensuel. personnage de papier, qui navigue sur des feuilles de livres pliées en forme de bateau. Blaise Ludik a adapté ce monument de la littérature pour les tout-petits (à partir de 3 ans), en en faisant une métaphore : le voyage comme autant d’étapes de la croissance, de

l’avancement vers le moment où on devient © Guillaume Gabriel un « grand ». Et, au-delà des péripéties, il Les Barbares… Effrayants et fascinants, depuis est question aussi de bonheur et de liberté. que la société fait société, depuis les Grecs, il © Dati Photography y a « les autres », dangereux, inconnus. Hervé 30 mars 24 mars Koubi lance 16 danseurs dans l’Histoire. Pôle Jeune Public, Le Revest-les-Eaux Le Carré, Sainte-Maxime Masques, couteaux, percussions, tout envoute, 04 94 56 77 77 carre-sainte-maxime.fr 0800 083 224 polejeunepublic.fr la chorégraphie fait tournoyer les corps, les peurs et les mythes.

Les Nuits barbares ou les premiers matins du monde 7 avril La Croisée des Arts, Saint-Maximin 04 94 86 18 90 st-maximin.fr au programme spectacles alpes-maritimes bouches-du-rhône 73

Le tour de la dette en 80 minutes

Une Carmen en Turakie Tartuffe Le Turak Théâtre y va fort avec Carmen ! Tartuffe est un imposteur, Orgon se laisse Voilà qu’elle est bretonne, qu’elle vit dans un prendre à ses mensonges. Elmire, sa femme, phare, que le drame fait place à la comédie, et n’est pas dupe. La mise en scène de Jean que les personnages se dédoublent derrière de Pange (Cie Astrov) inclut le public dans des marionnettes. Quant à la musique, elle la mise à nu de Tartuffe, et le rend complice invite un clavecin, un sitar, du bouzouki… du piège monté par Elmire, qui verra enfin

(adaptation musicale Laurent Vichard) © Greg Tabibian Orgon ouvrir les yeux sur la duplicité de son L’opéra se pare des accessoires du théâtre Christophe Alévêque ne s’en laisse pas hôte. Le dispositif quadri frontal permet un d’objets, maniés par les 4 interprètes, qui, conter. Sous ses allures de bouffon décapant, jeu intime et dynamique, au service du texte défient autant les lois de l’amour que celles il s’est entouré (avec Vincent Glenn) de de maitre Molière. de la scène lyrique. Dès 8 ans. spécialistes en économie pour écrire son spectacle. Alors, oui, on rigole, et beaucoup, mais on entrevoit aussi des solutions à cette crise, qui passe par les paradis fiscaux et l’austérité bien tempérée. Tout d’un coup, les évidences installées se transforment en scandales qu’on pourrait dynamiter. Spectacle en partenariat avec le Secours Populaire.

13 avril Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 theatredegrasse.com © X DR.

27 & 28 mars Scène 55, Mougins 04 92 92 55 67 scene55.fr © Romain Etienne Ballet de Lorraine 22 & 23 mars 30 mars ECSVS, La Roquette-sur-Siagne Salle Guy Obino, Vitrolles 04 93 40 53 00 theatredegrasse.com 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

Cartes blanches Le porteur d’Histoire Käfig a fêté ses 20 ans ! La Cie de Mourad Ils sont cinq, sur un plateau nu, un tabouret Merzouki, apôtre du hip hop, fête l’événe- pour chacun, et deux portants de costumes à ment avec un spectacle qui réunit 6 danseurs Sounddance © Laurent Philippe portée de main. Le voyage peut commencer. dans un décor baroque. Les mouvements Trois spectacles, trois chorégraphes, trois pièces À travers le temps et les continents, à travers croisent l’histoire des 25 créations (depuis majeures où l’art des danseurs du Ballet de les faits historiques et les petites histoires, 1996, tournées dans plus de 700 villes et 61 Lorraine se développe dans toute sa diversité. Alexis Michalik (texte et mise en scène, deux pays…), dans une atmosphère de retrouvailles The Fugue (chorégraphie Twyla Tharp remon- Molière) nous transporte au monde du théâtre et de célébration avec un public familier de tée par Richard Colton) : 20 variations sur un et de l’imaginaire. On y croit, on en redemande. cette danse qui a largement décroché ses thème à 20 temps. Duo (William Forsythe), titres de noblesse. ou l’art de remonter le temps. Et Sounddance (Merce Cunningham), sommet de danse d’ensemble, à la fois complexe et uniforme.

22 mars Scène 55, Mougins 04 92 92 55 67 scene55.fr © Benoite Fanton © Alejandro Guerrero 5 & 6 avril 19 mars Théâtre de Grasse Théâtre Croisette, Cannes 04 93 40 53 00 theatredegrasse.com 04 92 98 62 77 palaisdesfestivals.com 74 au programme spectacles gard bouches-du-rhône hérault

Cuisine et dépendances Fantaisie littéraire

Le livre de ma mère Cela fait 30 ans que Patrick Timsit caresse le rêve d’incarner le livre d’Albert Cohen, ode magnifique à sa mère, aux « mères de tous les pays ». Bien des films et one man shows plus tard, Dominique Pitoiset le met en scène

© Pascal Victor pour cette interprétation d’un des textes les Voilà un texte contemporain qui est déjà entré plus sensibles et universels sur ce rapport dans le répertoire classique. La pièce écrite il unique entre un enfant et sa mère. y a une vingtaine d’années par Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui, succès historique, Mariette Navarro © Philippe Malone est aujourd’hui reprise avec 5 nouveaux comédiens. Petites frustrations, jalousies, 51e et 52e écrivains invités par la Maison lâchetés, amitié, regrets, c’est tout un ballet des littératures à voix hautes, Jean-Yves social qui remonte sur scène (Jaoui à la mise Lacroix (romancier, traducteur, libraire ; en scène). On rit, on grince, on s’émerveille dernier ouvrage : Pechblende, Albin Michel, de tant de justesse. 2016) et Mariette Navarro (auteure, co-di- rectrice de collection chez Cheyne éditeur, 22 & 23 mars dernier ouvrage : ZAE, Zone à étendre, éditions Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes Quartett, 2018) viendront à la rencontre des 04 66 36 65 10 theatredenimes.com nîmois pour une Fantaisie littéraire : lectures

13 avril © Gilles Vidal par les auteurs, rencontre, questions, échanges. Théâtre de la Colonne, Miramas 3 & 4 avril 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes 22 mars, Jean-Yves Lacroix 04 66 36 65 10 theatredenimes.com 5 avril, Mariette Navarro Maison des littératures à voix hautes, Nîmes 12 avril 04 66 62 06 66 triptyktheatre.fr Théâtre Toursky, Marseille Trisha Brown Dance Company 04 91 02 54 54 toursky.fr Il y a un an disparaissait l’une des figures majeures de la danse contemporaine, l’amé- ricaine Trisha Brown. Une soirée hommage La conquête de l’inutile retrace en trois pièces 10 ans de création, entre 2000 et 2009. Pureté, invention, intensité. Chotto Desh L’Amour au théâtre (sur la musique de Rameau), Le chorégraphe Akram Khan écrivait en Geometry of quiet (musique du compositeur 2011 un solo (Desh) pour raconter son désir de contemporain Salvatore Sciarrino), et Groove danse, qu’il a fallu défendre et nourrir envers et and Countermove (new jazz de Dave Douglas). contre tout, et surtout son père. Il le remonte aujourd’hui, adapté pour le jeune public (dès 7 ans). Sur des contes imaginés par Karthika

Nair et le chorégraphe, dans un mélange © X-D.R de danse traditionnelle et contemporaine, « Effort maximum, résultat minimum, ou se dessine l’itinéraire d’un garçon épris de comment faire des efforts surhumains pour liberté et de mouvement. obtenir des détails infimes. » La Cie genevoise L’Alakran, Oscar Gómez Mata en tête, cultive l’art du spectacle performance, mêlant intervention du réel et invention de l’absurde. Dans cette dernière création, les ombres de Virginia Woolf et Jorge Borges devisent avec Anatole… Acteurs et personnages échangent les rôles, fiction et réalité se brouillent. Geometry of Quiet © Service Culturel Musée Art moderne 2017 © Richard Haughton 28 & 29 mars 11 avril 27 au 29 mars Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes Domaine de Grammont, Montpellier 04 66 36 65 10 theatredenimes.com 04 66 36 65 10 theatredenimes.com 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr au programme spectacles hérault bouches-du-rhône 75

Ça occupe l’âme

Five easy pieces Mon grand-père Auteur, metteur en scène, et fondateur de Dag Jeanneret (Cie In Situ) a eu la bonne la maison de production de théâtre et de idée d’adapter le texte de Valérie Mrejen cinéma International Institute of Politi- pour la comédienne Stéphanie Marc. Les cal Murder, le Suisse Milo Rau, manie les mots claquent comme des fouets, pour raconter extrêmes : tabous, voyeurisme, violence, dans cette histoire de famille intranquille, avec un travail qui érige le théâtre comme exutoire © X-DR. grand-père volage, suicides en chaine, amour et outil de compréhension. Sa dernière pièce Deuxième spectacle de la saison pour la rentré, le tout emballé dans les années 70. va peut-être plus loin encore, en mettant Montpelliéraine Marion Pellissier, cette C’est drôle, c’est beau, et c’est vrai. Poignant. sur le plateau 7 enfants, rejouant l’histoire fois avec la Cie La Raffinerie. Un couple est du pédophile Éric Dutroux. Malaise garanti. séquestré. Ils ne savent plus pourquoi : peu Réflexion sur l’acte théâtral en prime. importe. Ce qui les occupe, c’est la volonté de ne pas perdre la mémoire, de garder vivants leurs souvenirs pour continuer à rester ce qu’ils sont. Mais les images du passé et du présent divergent de l’un à l’autre, d’un moment à l’autre. La vidéo surveillance, toujours active, entérinera le décalage. © Christian Pinaud 27 & 28 mars 20 au 22 mars Théâtre Jean Vilar, Montpellier Église Saint Félix de Bayssan, Béziers

© Phile Deprez 04 67 40 41 39 theatrejeanvilar.montpellier.fr 04 67 28 37 32 sortieouest.fr 4 au 6 avril Domaine de Grammont, Montpellier 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr Tram 83 Jusqu’ici tout va bien Une mise en scène collective par Le Grand Cerf Bleu (Laureline Le Bris-Cep, Gabriel Mockumentary… Tur, Jean-Baptiste Tur) pour présenter Très narratif, le dernier spectacle du cho- une mise en scène que chaque famille ou régraphe Wim Vandekeybus plonge presque réitère à Noël : le bonheur, l’entente, dans un univers peu abordé en danse : la la fratrie… À partir de recueils de témoignages science-fiction, doublée d’une atmosphère et de souvenirs, les comédiens rejouent ce plutôt dystopique. Sur des textes de Bart grand moment de théâtre intime, en dévoilant Meuleman et Ultima Vez, les danseurs successivement les scènes de salons, avec sont les survivants d’une catastrophe, réfu- cuisine en sourdine, et inversement. Espace giés dans un espace protégé, surplombés par © Didier Nadeau de figuration et envers du décor nous livrent des révélations messianiques, et rejouent la Tram 83 recouvre un certain nombre de sig- des secrets que nous reconnaissons tous… comédie humaine. nifications, entre la ligne nocturne de tram bruxelloise, le nom d’un bar-bordel grouillant de personnages et le titre du roman de Fiston Mwanza Mujila qu’adapte et met en scène Julie Kretzschmar. Une date, le 30 juin, inauguration du tram et indépendance du Congo (ex-Zaïre), et une écriture lucide et poé- tique pour un spectacle choral coup de poing. 21 & 22 mars Théâtre de la Vignette, Montpellier

© Danny Willems 04 67 14 55 98 theatre.univ-montp3.fr Mockumentary of a contemporary saviour 11 & 12 avril 12 & 13 avril

Domaine de Grammont, Montpellier Bois de l’Aune, Aix-en-Provence © X-DR 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr 04 88 71 74 80 boisdelaune.fr 3 & 4 avril sortieOuest, Domaine départemental de Bayssan, Béziers 04 67 28 37 32 sortieouest.fr 76 au programme cinéma bouches-du-rhône

Vidéo FID Sur le chemin de l’école

Continent Jeunesse Dans le cadre du Continent Jeunesse de la Biennale des écritures du Réel : « Des aventures artistiques à l’école », projection de 3 films réalisés avec des élèves marseillais.Une envie lui vint d’être aimé de Natacha Samuel Sur le chemin de l’école © The Walt Disney Company France et Florent Klockenbring, libre interprétation Dans le cadre du Printemps des Ecoles Lutte jeunesse © Thierry de Peretti du livre Max et les Maximonstres. Terra Nova 2018, le 10 avril à partir de 18h30, à l’Eden Le 20 mars à 20h, le FIDMarseille propose de Marie Lelardoux et Béatrice Kordon, Théâtre de La Ciotat, projection/débat « Du dans ses locaux la projection de Lutte jeunesse jeu de pistes dans un village abandonné. recueil d’initiatives associatives à l’Alliance de Thierry de Peretti. Casting pour le rôle Et Sécurité de Natacha Samuel, plongée éducative » avec le film de Pascal Plisson, principal du filmUne Vie Violente. Des jeunes dans les rêves d’avenir des lycéens en CAP Sur le chemin de l’école. Jackson, Zahira, hommes corses témoignent face caméra du Sécurité du Lycée Ampère. Samuel et Carlos, quatre enfants, vivent l’un rapport qu’ils entretiennent avec leur île. Se au Kenya, l’autre au Maroc, les autres enfin en dessine ainsi le portrait kaléidoscopique d’une Inde et en Patagonie. Tous les quatre, même génération, entre tentation du nationalisme s’ils ne se connaissent pas, sont prêts à relever et rêves d’un nouveau départ, ailleurs. tous les défis pour aller à l’école, espérant que l’éducation leur permettra d’échapper 20 mars à leur destinée. FID, Marseille 04 95 04 44 90 fidmarseille.org 10 avril Sécurité © Natacha Samuel Eden Théâtre, La Ciotat 21 mars 04 88 42 17 60 edencinemalaciotat.com Amour, amours Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org L’Uruguay à La Ciotat Jean Douchet, le passeur d’images Jean Douchet sera au Méliès de Port- de-Bouc et au Renoir de Martigues. Le documentaire de G. Namur, F. Hagege Maestro © 2014 Mandarin Cinema - Rezo Films Nicolas Schu et V. Haasser, Jean Douchet, l’enfant agité, Après Les Amours d’Astrée et de Céladon de trace le portrait de ce critique de cinéma qui Rohmer, à l’occasion de la 16e édition du festival sillonne les cinémathèques du monde entier Otra Historia Del Mundo © Lavorágine Films Mars en Baroque, Les Variétés proposent pour parler des films qui le passionnent. Une Le 22 avril à l’Eden Théâtre de La Ciotat, Maestro. Michael Lonsdale en double d’Eric Carte Blanche lui est donnée au Méliès où il Art et Essai Lumière, en partenariat avec Rohmer y dirige un jeune acteur, plus fan de présentera Une Partie de campagne de Renoir. les 20e Rencontres du Cinéma Sud-Amé- blockbusters que de films d’auteurs. Imaginé ricain, propose Otra historia del mundo de par Jocelyn Quivrin, le Céladon de Rohmer, l’Uruguayen Guillermo Casanova, adapté réalisé par Léa Fazer, Maestro est un récit du roman Alivio de Luto de Mario Delgado d’initiation et un hommage au cinéma français. Aparaín. À Mosquitos, un village imaginaire La projection sera précédée d’un prélude dirigé par le Colonel Werner Suárez, deux musical avec à la viole de gambe, Louise grands amis Gregorio Esnal et Milo Striga Bouedo et au luth, Clément Stagnol. tentent de convaincre le village de se rebel- ler et de retrouver leur liberté perdue… La Jean Douchet © 2017 KIDAM CARLOTTA FILMS projection aura lieu en présence de l’équipe 28 mars 6 avril Cinéma Les Variétés, Marseille Cinéma Jean Renoir, Martigues de l’ASPAS. 08 92 68 05 97 cinemetroart.com 09 63 00 37 60 cinemartigues.com 22 avril 7 avril Eden Théâtre, La Ciotat Cinéma Le Méliès, Port-de-Bouc 04 88 42 17 60 edencinemalaciotat.com 04 42 06 29 77 cinemelies.fr artetessailumiere.fr au programme cinéma bouches-du-rhône var vaucluse hérault 77

Toujours éco-citoyen !

Allemagne, mère blafarde Avant-premières au Sud Suite de la programmation délivrée par Les 8e Rencontres cinématographiques la Cinémathèque allemande à l’invitation du Sud permettent de découvrir des films du Mucem, avec un film d’Helma San- en avant-première à Avignon, suivis d’une ders-Brahms (1980, RFA). L’histoire d’un Human Flow d’Ai Weiwei rencontre avec chacun des réalisateurs. Trois couple formé au début de la Seconde Guerre Contre vents et marées, le cinéma 3 Casino titres sont présentés à l’Utopia : Luna, d’Elsa mondiale, l’homme part au front, la femme de Gardanne sait préserver son attachement Diringer (20 mars), Trois jours à Quiberon survit pendant toutes les années du conflit aux valeurs sociales et citoyennes. Cette année, d’Emily Atef (21 mars) et Une année polaire avec leur enfant. Au retour du mari, Hans, la les rencontres font peau neuve, deviennent de Samuel Collardey (23 mars). vie de famille oppresse sa femme Lena qui Soirées éco-citoyennes, et rendront compte se trouve prise dans un étau. des remuements du monde, avec le soutien des AMAPs et la participation des élèves de BTS du Lycée Valabre, qui proposeront, lors de la présentation du filmL’intelligence des arbres réalisé par Julia Dordel et Guido Tölke, un court-métrage de leur cru, Les mystères de la Sainte-Victoire. À suivre, le documentaire de Damon Gameau, Sugarland, L’enfant de Goa de Miransha Naik, Human flow de Ai © X DR Weiwei. Pour les enfants, le film d’animation Une année polaire de Samuel Collardey © Ad Vitam 23 mars Willy et les gardiens du lac de Zsolt Pálfi. 20 au 24 mars Mucem, Marseille Enfin, un film surprise nous attend… Cinéma Utopia, Avignon 04 84 35 13 13 mucem.org 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org lesrencontresdusud.fr 5 au 10 avril Cinéma 3 Casino, Gardanne 04 42 51 44 93 cinema3casino.fr Paul Carpita Le musée d’Histoire de Marseille, Image Après l’ombre de ville, l’Agam et le Mucem présentent Stéphane Mercurio a suivi la genèse du Le rendez-vous des quais (1950-53) de Paul L’homme qui répare spectacle de Didier Ruiz, Une longue peine Carpita, suivi de deux de ses courts-mé- les femmes (voir P 40). Témoignage d’anciens détenus au trages : Graines au vent (1964) et Adieu Jésus long cours, que le metteur en scène à encou- (1970). Un regard personnel et politique sur ragé à la parole, jusqu’à les mener sur scène le port de Marseille, son économie (sur fond pour raconter leur expérience inimaginable de Guerre d’Indochine), son bouillonnement de dureté. L’histoire d’un apprivoisement social, sa prégnance dans la vie de la ville. mutuel. Projection en avant-première, en Projection suivie d’un débat avec Katharina présence de la réalisatrice. Bellan, chercheuse en études cinématogra- phiques et Jean-Pierre Daniel, cinéaste et collaborateur de Paul Carpita. © X DR En prélude à son dernier spectacle Unwanted (voir P 13), Dorothée Munyaneza présente le beau documentaire de Thierry Michel (2015), qui retrace l’activité et le combat du Docteur Mukwege. Inlassablement et malgré les menaces, il redonne à des milliers de femmes violées durant 20 ans de conflits à l’Est de la République Démocratique du Congo une intégrité physique et morale. Un Le rendez-vous des quais © Les Films de la liane © X DR 8 avril destin exceptionnel. 23 mars Mucem, Marseille Cinéma Utopia, Montpellier 04 84 35 13 13 mucem.org 22 mars 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org Théâtre Liberté - scène nationale de Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr 78 au programme cinéma bouches-du-rhône Jallalla !

es Rencontres du Cinéma Sud-Améri- partenariat avec la Marelle. cain organisées par l’ASPAS ont 20 ans ! Pascal Jourdana cette LUne aventure humaine et politique initiée année fera revivre, comme par Hernan Harispe, poursuivie par Leo- Nicolás Herzog dans nor Harispe sa compagne, épaulée par une Vuelo nocturno, la figure équipe dévouée. Faire connaître un cinéma légendaire de Saint-Exu- qui dénonce les injustices de tous ordres, les péry. Ouverture chilienne dictatures liberticides, défend les solidarités, le 23 mars à 19h30 au entretient et interroge la mémoire, célèbre la Gyptis avec Cabros de vie et l’amour jusque dans la douleur, et rêve mierda de Gonzalo Jus- de possibles meilleurs. Voilà une mission à tiniano, qui suit la jolie laquelle ne dérogera pas cette 20e édition qui Gladys et un photographe

se déroule à la Friche de la Belle de Mai nord-américain dans les Sinfonia para Ana, de Ernesto Ardito et Virna Molina © Ernesto Ardito, Virna Molina et au Gyptis du 23 au 31 mars, se plaçant quartiers défavorisés de sous le cri de ralliement à la Joie, exprimé en Santiago lors des premières manifestations indigène du Chaco. On s’accroche aux rêves langue aymara : Jallalla ! contre Pinochet. C’est l’ombre de la dictature sur les toits de La Havane dans El Techo de Au programme : 10 longs-métrages et 12 argentine qui obscurcit l’adolescence d’Ana, Patricia Ramos ou sur la côte de Guer- courts en compétition, 10 Prix décernés (dont partagée entre deux amours dans Sinfonía rero au Mexique à la recherche d’un trésor le fameux Colibri d’or), 4 jurys, de nombreuses para Ana d’Ernesto Ardito et Virna Molina. caché par Francis Drake dans Tesoros de rencontres avec des réalisateurs-trices, une Les valeurs se confrontent entre les jumeaux María Novaro. La musique devient refuge leçon de cinéma, 4 hommages, une carte séparés de Ley Primera de Diego Rafecas : et échappatoire pour la bande de jeunes mis blanche au FID, une programmation scolaire et l’un élevé aux États-Unis dans le culte de la en scène par Juan Sebastián Mesa dans la traditionnelle séance cinéma-littérature en consommation, l’autre resté dans la culture Los Nadie. Et symbole de liberté, d’échanges

Un Amour de Festival

offre, venus de 32 pays, 43 longs-métrages et 5 courts dont Written/Unwritten de Adrian Silisteanu projeté lors de la Séance spéciale du 8 avril. Entre autres petits bonheurs, on dégustera la noirceur du polar politique Le Caire confidentiel de Tarik Saleh, on suf- foquera dans l’été madrilène sur les traces d’un tueur en série (Que Dios nos perdone de Rodrigo Sorogoyen) et on découvrira le tarantinesque western féministe, sauce indonésienne, Marlina la tueuse en 4 actes de Mouly Surya. Les prima opera nous feront voyager mettant en évidence l’universel sous les particularités : l’Algérie (En attendant les hirondelles de Karim Moussaoui), l’Argentine (Patagonia, el invierno d’Emiliano Torres), l’Iran (Téhéran tabou d’Ali Soozandeh), sans oublier le Caucase avec Dede de Mariam Khatchvani (inédit). À travers le focus sur les premiers films français, on ira vers un cinéma plus social, psychologique voire psychotique Luna, Elsa Diringer © Pyramide Distribution avec par exemple Jusqu’à la garde de Xavier u 3 au 10 avril, Salon-de-Provence vivra le festival, animé par des bénévoles, se place Legrand. Les histoires d’amour finiront mal aux riches heures du Festival des Ren- cette année comme Marseille sous le signe de en général, à cause du destin (In the fade de Dcontres cinématographiques. Créé il y l’Amour. Les chemins de l’amour croiseront Fatih Akin), des tabous sociaux (Moonlight a 28 ans, adoubé par Télérama et par MP2018 d’autres thématiques. La programmation de Barry Jenkins), ou ne seront que rêves pour la qualité de sa sélection, inscrit dans zoome sur le cinéma américain, la comédie, (Corps et âme d’Ildikó Enyedi, Ours d’or le tissu institutionnel et associatif de la ville, le Polar international, les Premiers films. Elle 2017). L’amour sera un combat paternel 79

surprenants dans Charco de Julian Chalde qui nous fait découvrir les chansons du Río de la Plata, entre l’Argentine et l’Uruguay, convoquant 70 musiciens venus de genres différents (Tango, Rock, Candombe, Murga) pour interpréter les plus belles mélodies de la région. Et c’est toujours en musique que se clora la manifestation le 31 mars. En marge de la programmation cinématographique, notons le 29 mars, la Nuit de la Cucaracha, comédie en chansons révolutionnaires proposée par la Cie Meninas, et l’exposition TOURiSTE or not TOURiSTE par l’atelier FáBRiKa de Makala de Emmanuel Gras © Bathyspere productions Valparaiso, qui organise par ailleurs des ateliers de sérigraphie. Le printemps sud-américain Mélomanes, cinéphiles, est prometteur ! ÉLISE PADOVANI tous à Aubagne !

a 19e édition du Festival International compositeur Sébastien Damian ou encore Rencontres du Cinéma Sud-Américain, Marseille du Film d’Aubagne (FIFA), organisé Flying Revolution : The Story of a Lifetime 23 au 31 mars Lpar ALCIMÉ, qui met l’accent sur la Battle, le documentaire de Steve Won sur cinesudaspas.org musique de film, invitant réalisateurs et un groupe de break dance. La Nuit du court compositeurs, se tiendra du 18 au 24 mars, le 23 sera d’abord musicale puis engagée, une programmation toujours aussi foison- sans doute aussi heureuse que la séance nante et aussi intense. 77 courts-métrages Les courts qui rendent heureux, le lende- et 10 longs-métrages en compétition, le main. Évidemment, on pourra croiser ou plus souvent premières œuvres qu’on rencontrer de nombreux invités aussi bien regarde et qu’on écoute, films inédits ou des réalisateurs/acteurs, Laurent Cantet, (Brooklyn Yiddish de Joshua Z Weinstein, en avant-premières. Secret Ingredient Édouard Deluc, Philippe Rebbot que La familia de Gustavo Rondón Córdova) du Macédonien Gjorce Stavreski nous des compositeurs, Éric Neveux, Laurent ou aura disparu dans la déliquescence de dépeint le double combat d’un père et son Perez Del Mar, Alexis Rault, Julie la société post-soviétique (Faute d’amour fils.Az állampolgár du Hongrois Roland Roué et le célèbre Gabriel Yared nous d’Andrei Zvyagintsev). Événements de la Vranik, est un poignant réquisitoire contre invite à (re)découvrir sa création musicale semaine : les rencontres avec les invité.e.s. les politiques du gouvernement Orbán. pour le thriller d’Anthony Minghella, Le Les actrices Daphné Patakia et Elefthe- Maze de Stephen Burke évoque l’évasion talentueux Mr. Ripley. Quant à Stephen ria Komi pour Djam de Tony Gatlif, road de la prison de Maze, surnommée « la Great Warbeck, il dirigera la Master Class de movie musical sur fond de crise grecque. Escape » qui a eu lieu le 25 septembre 1983 composition musicale pour l’image, orga- Elsa Diringer pour l’avant-première de en Irlande du Nord. Ou encore Different nisée avec le soutien de la SACEM, huit son filmLuna . Philippe Van Leeuw pour kinds of rain de l’Allemande Isa Prahl, jeunes compositeurs qui montreront leur Une famille syrienne. Le slameur Loubaki un drame social et familial qui tourne travail en live à la soirée de clôture. Tout Loussalat pour À voix haute : la force de la autour d’une porte fermée, au sein d’un ce beau programme commencera le 19 parole de Stéphane de Freitas et Ladj Ly, foyer et Vent du Nord du Tunisien Walid mars à 20h au cinéma Le Pagnol avec dont il est un des protagonistes. Un débat Mattar, un film drôle et grave sur les Makala, le documentaire d’Emmanuel sera organisé autour de Sami Blood, une délocalisations. Comme chaque année, Gras, Grand Prix de la Semaine de la jeunesse en Laponie d’Amanda Kernell. des « Cartes Blanches » sont données à 4 Critique à Cannes, qui raconte l’odyssée En clôture, le 10 février, la soirée s’ouvrira à festivals internationaux, permettant de d’un jeune Congolais, décidé à connaître un tous pour le partage des deux films primés découvrir la jeune création du Canada, avenir meilleur, qui entreprend un périlleux par le Public et le Jury. de Croatie, de Pologne du Portugal. Sans voyage de son village jusqu’à Kinshasa. ELISE PADOVANI oublier les Regards croisés qui mettent Et c’est le groupe marseillais, Thomas à l’honneur, outre le SATIS d’Aubagne, 3 Laffont Group qui terminera la soirée écoles de cinéma, le Pulse Collège d’Ir- avec son jazz pop électrifiant. lande, le Conservatoire Royal de Mons ANNIE GAVA et le Conservatorio Francesco Venezze. Festival des Rencontres Sont aussi proposées des séances « coup cinématographiques, Salon-de-Provence Festival International du Film d’Aubagne 3 au 10 avril de cœur » comme Vaurien en présence 20 au 25 mars rencontres-cinesalon.org du réalisateur Mehdi Senoussi et du aubagne-filmfest.fr 80 au programme cinéma bouches-du-rhône

À mon âge je me cache encore pour fumer, de Rayhana © Les Films du Losange Sous des horizons africains

Après l’Extrême-Orient Tunisie, qui vivent la délocalisation de leur des plus intéressantes sur l’avenir, les enjeux usine), Olivier Barlet (critique et rédacteur artistiques, culturels et sociaux des cinémas l’année dernière, c’est en chef d’Africulture) donnera une conférence africains. Animée par Mathieu Macheret, l’Afrique qui est à sur les Langages des cinémas d’Afrique. Le journaliste, elle réunira D Chansel, O. Delahaye, e cinéma Algérien sera mis en avant, avec les D. Kouyaté et D. Ouédraogo. l’honneur de la 10 édition projections de Les Bienheureux de Sofia du Panorama des cinémas Djama qui dresse le constat implacable d’une Programme de choix société post guerre civile, et En attendant les Faites vos choix, le champ des découvertes hirondelles de Karim Moussaoui qui raconte est large, le plaisir assuré ! Pourquoi pas, entre our Alain Bombon, directeur artistique une Algérie très contemporaine, présentées autres, À mon âge je me cache encore pour des cinémas de Scènes&Cinés (Istres, par Dominique Chansel, enseignant et fumer, de Rayhana, où confidences entre PMiramas, Fos, Grans et Port-Saint-Louis), formateur en cinéma ; il introduira aussi les femmes s’échangent au hammam sur fond le Panorama « offre une vue d’ensemble de films de Theresa Traore Dahlberg, Ouaga de solidarité ; Enquête au paradis de Merzak la production cinématographique contempo- Girls (formidable documentaire sur le quotidien Allouache qui rend compte de la montée des raine d’un pays, d’un continent, au travers d’un centre de formation féminin à des métiers intégrismes ; I’m not a witch de Rungano de projections, mais également d’éclairages qui leur étaient jusque-là interdits au Burkina) Nyoni, qui interroge les traditions et la volonté donnés par des spécialistes, intellectuels, et d’Emmanuel Gras, Makala, l’histoire de s’en libérer ; L’amour des hommes de chercheurs, journalistes et professionnels d’un jeune charbonnier congolais parti sur Mehdi Ben Attia, qui s’intéresse à la place du cinéma ». les routes en quête d’un avenir meilleur. Dra- de la femme dans la Tunisie aujourd’hui ; La L’Afrique, immense continent de plus de goss Ouédraogo, anthropologue, cinéaste vie de château de Modi Barry et Cédric 50 pays, dont la population est très jeune, et réalisateur, donnera une conférence sur Ido (en sa présence), au cœur du quartier de « est obligatoirement en devenir. Le cinéma l’éducation et la transmission en Afrique de Château-Rouge et de sa diaspora africaine… n’échappera pas à ces mutations. Loin d’être l’Ouest, avant la projection du film de Berni Le public le plus jeune n’est pas oublié, avec un folklore, il offre des œuvres de qualité, abou- Goldblat, Wallay, qui conte le difficile retour le film d’animationAdama de Simon Rouby, ties, aptes à traduire une réalité de façon riche aux sources d’un jeune métis franco-burkinabé. entre rêverie humaniste et road movie ini- et pertinente. » Au programme, 24 films, et de Lui est originaire du Burkina Faso : griot et tiatique, Lamb de Yared Zeleke, Kirikou et nombreux invités. cinéaste, Dani Kouyaté sera présent pour la sorcière de Michel Ocelot… faire partager ses deux passions. Lors d’une DOMINIQUE MARÇON Des soirées particulières même soirée aura lieu un spectacle/causerie La soirée d’ouverture donne le ton : entre autour du conte, où il sera accompagné d’un la projection d’Une saison en France, de musicien, puis la projection de son filmTant Mahamat-Saleh Haroun (un professeur qu’on vit, comédie aux allures de conte pour de Français qui a fui la guerre en Centrafrique un retour « au pays » très inattendu d’une demande le droit d’asile en France et tente mère et son fils, si différents. Un autre de Panorama des cinémas d’Afrique Olivier d’y reconstruire sa vie) et de Vent du nord de ses films,Soleils , coréalisé avec 24 mars au 1er avril Walid Mattar, en avant-première (le parcours Delahaye (road-movie lumineux au cœur Fos, Grans, Istres, Miramas, Port-Saint-Louis de deux ouvriers, l’un en France l’autre en de l’histoire africaine), suivra une table ronde scenesetcines.fr rencontres cinéma 81 Vitrolles en quête de Noir

a particularité du festival de lecteurs et de bibliothécaires. Le goût Polar en Lumières de des mots se retrouvait aussi dans le choix de LVitrolles réside dans la certains films d’anthologie, charpentés autour relation particulière établie d’une œuvre livresque, et présentés avec une entre les grandes réalisations érudite passion par Patrick Bedos, spécialiste du répertoire du cinéma, les du Film Noir et du Polar, programmateur du nouveautés, et l’univers FIRN. Ainsi, il offrit une brillante introduction romanesque. L’édition 2018 à un sommet du polar, L.A. Confidential de adoptait le titre de « Mafia Curtis Hanson avec Kevin Spacey, Russell sous contrat ». D’une belle Crowe, Guy Pearce, Kim Basinger, virtuose richesse éclectique, cette adaptation du roman éponyme du grand maître manifestation proposait James Ellroy. Superbe leçon de cinéma, tant conférences, exposition et par les cadrages, le rythme, l’efficacité des ateliers de BD, (Fumetti), Remise du Prix de la Gachette d’or © Ville de Vtrolles dialogues, du jeu des acteurs, de la mise en pièce de théâtre, le superbe Zoom par la Cie Vitrolles à partir d’une sélection d’ouvrages scène. L’écriture sèche, nerveuse et crue 7e Ciel et mis en scène par Marie Provence proposés aux lecteurs : Un petit boulot (Iain du romancier trouve toute sa saveur et son (voir aussi journalzibeline.fr), une quarantaine Levison), La dame dans l’auto avec des acuité dans la version cinématographique. Le de films souvent en présence du réalisateur lunettes et un fusil (Sébastien Japrisot), festival sait conjuguer formes et discours en (David Grieco, Nader Takmil Homayoun), Commis d’office (Hannelore Cayre), Tony et ouvrant sur des problématiques esthétiques bon nombre de monuments du patrimoine, Susan (Nocturnal Animals, Austin Wright), qui interrogent le monde. mais aussi présentation d’un imposant corpus Avant d’aller dormir (S.J.Watson). C’est ce MARYVONNE COLOMBANI de pistes bibliographiques par la librairie dernier ouvrage, une histoire d’amnésie au L’Alinéa et un Prix littéraire, La Gâchette cœur d’un thriller remarquablement construit, Le festival Polar en Lumières s’est tenu du 3 au d’Or, organisé par les médiathèques de qui recueillit les suffrages du jury composé 11 février au cinéma Les Lumières, Vitrolles

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marseille.rtl2.fr critiques cinéma 83 Des images à la pellicule

evant la salle comble du Cinéma Les Variétés (Marseille) la nouvelle « dream Dteam » du festival La 1ère fois, entièrement composée de bénévoles, se présente. Un discours bref à quatre voix (deux féminines, deux masculines, belle parité), plein d’humour. Les jeunes organisateurs laissent rapidement la place à l’invité d’honneur de cette 9e édi- tion, Jean-Gabriel Périot. Pas de premiers films documentaires ce soir : la soirée est consacrée au cinéaste, dont on projettera huit courts-métrages réalisés entre 2000 et 2017. Le panorama de son œuvre se poursuivra durant tout le festival. Une bonne occasion de plonger dans l’univers expérimental de ce réalisateur atypique et engagé, qui joue, de façon très efficace, très troublante aussi parfois, sur le montage d’images d’archives et sur la musique, véritable fil conducteur de la narration. Périot coupe, condense, étire, 200000 fantômes, de Jean-Gabriel Periot © Envie de Tempête accélère, ralentit l’image comme le son, pour lors de sa master class le lendemain à l’am- acte violent, en ce qu’il découpe le monde déconstruire l’histoire officielle, affûter le phithéâtre La Verrière (Aix-en-Provence) : d’une manière chirurgicale, on fait des images regard. En témoignent magnifiquement The « avec le montage, je procède par un travail sur pour comprendre le monde dans lequel on Devil (consacré aux Black Panthers), Nijuman les harmoniques plus que sur les cadences, vit. Le discours cinématographique, celui No Borei, 200 000 fantômes (sur Hiroshima, même si je commence par faire des marques qui accepte l’intelligence du spectateur est bouleversant dans sa captation de l’invisible) sur temps et contretemps ». Au cours de cet politique. » Ou encore : « Pas de naturalisme et Eût-elle été criminelle…, où le « Marchons, entretien mené par Katharina Bellan, le pourtant, tout est construit, le premier degré marchons » d’une Marseillaise distordue cinéaste aborda sa démarche, son approche est impossible… d’ailleurs, je ne crois pas à la accompagne les femmes que l’on va tondre de technicien du cinéma, grâce à son métier catégorisation entre documentaire et fiction. » en 1944 sous les rires et les applaudissements initial de monteur, son intérêt pour l’image L’émotion sourd des images accumulées. Se de la foule. Glaçant. d’archives, et les questions inhérentes à sa fonde ici une nouvelle poétique. Le dernier film de la soiréeSong for the jungle représentation, qui induisent les manières FRED ROBERT & MARYVONNE COLOMBANI (2017) était une surprise. Pas d’effets cette dont la mémoire est modelée. L’accumula- fois. Juste des silhouettes encapuchonnées tion de photographies concernant un même dans ce qu’il reste de la « jungle » de Calais ; événement, ou un même type d’événement, avec seulement le bruit du vent tempétueux, le laissent entrevoir des codes de représentation vacarme des poids lourds qui filent vers l’An- semblables, quelle que soit la partie du monde gleterre et quelques sirènes policières. Encore où le cliché a été pris : « L’inconscient collectif plus glaçant. « La musique, toujours choisie visuel m’intéresse ». D’autre part, « mettre avant le montage, porte le film, lui apporte des éléments hétérogènes ensemble, fait Le festival La 1ère fois s’est tenu à Aix-en-Provence émotion et énergie soulignera le réalisateur question ». Si « prendre des images est un et Marseille du 20 au 24 février

Ecoutez, on est bien ensemble francebleu . fr

FB_encartGenerique_200x70.indd 1 12/03/2018 09:52 84 au programme arts visuels bouches-du-rhône

Denis Brun Denis Brun pratique le « freestyle » depuis de nombreuses années et s’autorise toute forme de création, sans échelle de valeur. Ainsi se télescopent, s’agrègent, se superposent, s’additionnent toutes sortes d’objets, d’images, de formes, de matières, de films, faisant de Vidéochroniques une « auberge espagnole » peu commune. Mais ne nous y trompons pas, ce chaos est pensé, équilibré et harmonieux. M.G.-G.

How creep is your love jusqu’au 14 avril Vidéochroniques, Marseille 09 60 44 25 58 videochroniques.org

© Denis Brun 100% numérique L’institution scolaire, les artistes se retrouvent pour cette édition consacrée à La part du numérique dans la création contemporaine. 16 établissements marseillais, autant de créateurs, d’expositions et de rencontres tout au long de ces quatre mois. Entrées libres et gratuites. C.L.

L’Art Renouvelle le Lycée, le Collège, la Ville et l’Université 17 mars au 22 juin Divers lieux, Marseille, La Ciotat Marc Chostakoff : Le bateau rouge- Chenal de Caronte, 2002 © Musée Ziem, Martigues passagedelart.free.fr

Illustrateurs Dans le cadre de la manifestation L’illustration jeunesse au musée, les planches originales de Alibeu, Carrier, Chardonnay, Crausaz, Ducros, Fortier, Perrin et Sara s’enrichissent d’un focus sur le Ziem peintre, dessinateur et aquarelliste. Nombreuses manifestations complémentaires dont les ateliers tous publics et gratuits. C.L.

jusqu’au 27 mai Musée Ziem, Martigues 04 42 41 39 60 ville-martigues.fr

Max Ducos, L’Ange disparu © 2008, éditions Sarbacane, Paris

Rencontres du 9e Art 10 expositions, 10 lieux, des créations et des résidences, des artistes internationaux, des workshops et des performances : la 15e édition des Rencontres du 9e art s’aventure vers des terrains d’expérimentations graphiques innovants. Parmi les figures imposées, leBlack Medecine Book du suisse Helge Reumann, l’univers onirique de l’allemand Atak, ou le dernier ouvrage du français Yann Kebbi à découvrir dans l’atelier de Cézanne. M. G.-G.

7 avril au 19 mai divers lieux, Aix-en-Provence 04 42 16 10 91 bd-aix.com

Black Medecine Book © Helge Reumann au programme arts visuels bouches-du-rhône vaucluse var 85

Alfred Latour Peintre, aquarelliste, photographe, graveur, illustrateur, relieur... il est de ces artistes aux multiples talents, épris de la Provence et des Alpilles : Alfred Latour (1888-1964) avait installé son atelier à Eygalières. Hommage lui est rendu et son œuvre est à redécouvrir entre son village d’adoption et Arles, avec un catalogue chez Actes Sud. C.L.

Les gestes d’un homme libre 29 mars au 2 mai musée Réattu, et Espace Van Gogh, Arles Maison des Consuls, Eygalières alfred-latour.org

Alpilles et nuages blancs, 1954, huile sur toile, 115x146cm © Musée Cantini, Marseille

Hilary Dymond De grands, de très grands formats. De la peinture. Et une représen- tation qui se joue de la mimesis, des codes, des apparences autour d’un unique sujet. Le paysage est pour Hilary Dymond comme une obsession, un motif à épuiser au fil du temps long de séries qui structurent la forme même de cette rétrospective. C.L.

Landscape (Paysage) jusqu’au 17 juin Campredon centre d’art, L’Isle-sur-la-Sorgue 04 90 38 17 41 campredoncentredart.com

Winter Paths, 2015, huile sur toile, 130 x 200 cm, Courtesy Galerie Claire Gastaud.

Edward Steichen En 1979, la ville de Toulon faisait l’acquisition de plus de 80 œuvres d’Edward Steichen, photographe américain d’origine luxembourgeoise, co-fondateur du groupe Photo Secession avec Alfred Stieglitz. À la Maison de la Photographie, sa créativité polymorphe explose : paysage, nu, portrait, nature morte, mode, spectacle, publicité, photographie de guerre, photographie aérienne, graphisme, typographie… M.G.-G.

jusqu’au 28 avril Maison de la photographie, Toulon 04 94 93 07 59 toulon.fr

Edward Steichen, Agnes Meyer, 1910, collection du musée d’art de Toulon © The estate of Edward Steichen/ADAGP, Paris 2018 L’eau en lumière L’ancienne maison du peintre néo-impressionniste Théo Van Rys- selberghe, dénommée « Villa Théo », est le nouveau centre d’art du Lavandou, situé sur le chemin des peintres. Un bel ensemble d’une trentaine de photographies issues de la collection de l’Hôtel des arts est actuellement exposé autour du thème de l’eau et de la lumière : Basi- lico, Bourret, Desplats, Millet, Plossu, Salmon et Sluban. M.G.-G.

jusqu’au 24 mars Villa Théo, Le Lavandou 06 06 58 45 02 le-lavandou.fr

Zéro l’infini, 130 x 180 cm, 2014 © Éric Bourret 86 au programme arts visuels alpes-maritimes hérault

Eglé & Ieva Babilaité L’une vit à Carros, l’autre à Vilnius. Leurs pratiques artistiques, leurs conceptions esthétiques, leurs techniques sont différentes et leurs regards complémentaires. Le Centre international d’art contemporain fait dialoguer leurs univers dans une exposition en forme de point d’interrogation, Twins ?, pour « rappeler le caractère incertain et toujours mouvant de l’art contemporain ». M.G.-G.

Twins ? jusqu’au 20 mai Bon rêveur, 2018, 100 cm x 200 cm, technique mixte, huile, papier, or sur toile © Églé Babilaité Centre international d’art contemporain, Carros 04 93 29 37 97 ciac-carros.fr

Lee Bae « J’exprime les images vitales avec de la matière morte : le charbon ». Pourtant l’art de Lee Bae incorpore la nature, la vie, l’énergie, la symbolique et l’immatérialité du noir. Pour cette exposition, pein- tures, sculptures, installations sont conçues en fonction de l’espace architectural et de la lumière de la fondation. C.L.

Plus de lumière 24 mars au 17 juin Fondation Maeght, Saint-Paul de Vence 04 93 32 81 63 fondation-maeght.com

Issu du feu, 2000. Troncs de charbon de bois attachés par des fils élastiques. © Lee Bae

Évasions, l’art sans liberté En présentant des œuvres et travaux plastiques produits dans des espaces de privation des libertés, l’exposition pose l’expression artistique comme dernière des libertés de l’homme. Elle s’organise autour de trois sections : Territoires imaginaires (camps et campements de migrants), Dehors imaginaires (prisons), Festins imaginaires (carnets de recettes de cuisine illustrés, imaginés et rédigés dans les camps de concentration). M.G.-G.

7 avril au 23 septembre MIAM, Sète 04 99 04 76 44 miam.org © Hafiz el Sudani

Lubaina Himid Lauréate auréolée du prestigieux Turner Prize en 2017, Lubaina Himid se voit offrir sa première exposition personnelle en Europe. Dans les 450 m2 d’exposition, on rencontrera des œuvres histo- riques comme les plus récentes. Un parcours sur trente années de création qui interroge les multiples connexions entre Afrique et art occidental. C.L.

Gifts to Kings 7 avril au 16 septembre Musée régional d’art contemporain, Sérignan 04 67 32 33 05 mrac.laregion.fr

Lubaina Himid, Le Rodeur (The Pulley), 2017. Acrylique sur toile, 183 x 244 cm. Courtesy de l’artiste et Hollybush Gardens, Londres. Photographie par Andy Keate. critiques arts visuels 87 La vie au naturel

a montagne des nuées à La Compagnie, elle est aux manettes pour le puis Giornata au Gallifet Art Center, tournage de Port de Bouc, on Let enfinQue se passe-t-il encore ? à la sent sa présence, on entend galerie Béa-Ba, la plasticienne et vidéaste en off ses consignes aux Raphaëlle Paupert-Borne « déplie son modèles. Elle est là, tout travail » comme on agite un éventail, avec près, terriblement vivante. doigté et sensualité. Dans les grands formats Exhibitionniste, peut-être… accrochés à La Compagnie, on plonge dans Généreuse, certainement, les paysages comme elle-même s’y est fondue nous offrant simplement auparavant, parfois à peine vêtue, dans un des moments de vie, de corps à corps avec les couleurs nuageuses, bonheur, avec les acteurs, la matière, une « acrylique très mate pour la famille ou les amis. Des que cela sèche vite ». Dans une relation à souvenirs communs embués l’intime : « Je regarde le paysage différemment, de nostalgie. je rentre dedans comme les impressionnistes MARIE GODFRIN-GUIDICELLI qui découvraient le grand air. J’aime cette Vue de l’exposition La montagne des nuées, La Compagnie, 2018 © Sébastien Arrighi sensation ». À notre tour, on sent le vent tout autant que du film tourné en super 16, , Marseille sur sa peau, l’herbe rare et folle, l’air vif des La montagne des nuées, produit par Film La montagne des nuées La Compagnie jusqu’au 14 avril cimes entre Sisteron et Grenoble, le plaisir Flamme. Un documentaire sur sa manière de 04 91 90 04 26 la-compagnie.org du pinceau sur la toile tendue à même la peindre que l’artiste souhaitait réaliser « pour terre. Dans les dessins sur papiers peints montrer au public sa relation au paysage et les Giornata Gallifet Art Center, Aix-en-Provence exécutés d’un geste rapide, le noir incruste allers-retours entre peinture et image ». Sous 17 mars au 5 mai les plis, joue à cache-cache avec le fond : la l’œil du cameraman, la voici, seule, qui trace 09 53 84 37 61 hoteldegallifet.com figure combat les motifs, la main de l’artiste et ébauche et recouvre la toile. Nuages, vent, Que se passe-t-il encore ? Galerie Béa-Ba, Marseille saisit l’instant. Cette contagion du plaisir pierre, ciel, brume : la force des éléments se 4 mai au 9 juin de peindre et dessiner sourd de l’ensemble mêle à la douceur des formes. Même quand 09 67 25 68 89 galerie-bea-ba.com

Qualité des tirages, poésie des images

es photographies de Véronique Ellena ses choix, elle offre, autour d’une recherche grignotent les murs de la Rue des arts à commune, une grande diversité de regards, de LToulon, tandis que les cimaises de l’Hôtel styles et de techniques, l’exposition venant en des arts accueillent la collection Florence contrepoint faire émerger des tendances. D’où et Damien Bachelot. Une collection « his- son découpage séquentiel qui fait fi de la chro- torique » qui compte, parmi ses quelque 650 nologie (La rue, L’automobile, La photographie spécimens, justement, San Luca e Martino témoin, La trace de l’homme) et permet de de Véronique Ellena prise en 2002 lors de sa faire apparaître à plusieurs reprises un même résidence à la Villa Médicis à Rome. Œuvre auteur si nécessaire (on pense à Doisneau ou qui, selon Damien Bachelot, « prend du sens à Boubat). Petits formats à vivre de près ou dans la collection car il y a ce corps, cou- clichés majestueux, en noir et blanc ou en ché, une présence, une trace humaine qui couleur, les images font sens et dialoguent, est suggérée et non imposée ». Le credo de comme les différents thèmes s’enchevêtrent l’artiste de « donner à voir ceux que l’on ne ou se recoupent pour composer le canevas voit plus » pourrait, presque, être partagé par de l’exposition. tous les photographes réunis sous la bannière M.G.-G. muséale Des villes et des hommes. Clin d’œil au roman de Steinbeck, mais surtout, San Luca e Martino © Véronique Ellena Des villes et des hommes - Regard sur la au regard humaniste et documentaire porté américains pour la plupart : Bruce Davidson, collection Florence et Damien Bachelot Hôtel des arts, Toulon par les photographes sur le paysage urbain, la Robert Frank, Saul Leiter, Marvin Newman… ville habitée. La collection Florence et Damien Et français : Édouard Boubat, Brassaï, Robert Pendent ce temps, Véronique Ellena Bachelot compte essentiellement des pièces Doisneau, Sabine Weiss, Henri Cartier-Bresson, Rue des Arts, Toulon rares, « des tirages vintage » comme ils les nom- Janine Niépce, Stéphane Couturier, Philippe jusqu’au 22 avril ment, réalisés entre 1910 et 2017 par des auteurs Chancel, Luc Delahaye… Classique dans 04 83 95 18 40 hda.var.fr les arts et traditions populaires italiennes Le rideau se lève et espagnoles. Car Picasso se réjouissait du théâtre de rue et des marionnettes, s’impré- gnait de la gestuelle simple des affiches et des ex-votos, remarquait les drapeaux et les sur Picasso bannières brandis à l’occasion des fêtes votives et des processions. Des images profondes, amusantes, qu’il façonnait ensuite à sa guise ! L’impact des villes vivantes et « théâtrales » se manifeste dans ses créations pour les ballets de Diaghilev aux couleurs chatoyantes, aux compositions savamment orchestrées. Mise en scène comme une pièce de théâtre, l’exposition Picasso et les Ballets russes, Entre Italie et Espagne explique combien les spectacles de danse et sa vie amoureuse ont compté dans ses recherches (on reconnaît ses muses), combien ses collaborations avec des artisans d’art experts dans chaque discipline ont été fructueuses. On perçoit la perspicacité de son regard face à la transformation du corps du danseur en mouvement, notamment dans ses projets de costumes pour Le Tricorne : des tenues traditionnelles espagnoles agrémentées d’ornements audacieux révélatrices de l’âme des personnages (œuvres graphiques prêtées par le Musée national Picasso-Paris). La scène fut un espace de création formidable pour Picasso, un moment-clef de son œuvre et de sa vie personnelle. Comme un immense espace de jeu. Entre souvenirs de voyages et itinéraires fictifs À la Vieille Charité, Picasso Voyages imaginaires touche du doigt le paradoxe d’un artiste qui a vampirisé toutes les cultures du monde pour les intégrer dans son œuvre sans les avoir connues. Il a su recréer un monde en soi, un monde infini dans lequel l’exposition donne envie de se plonger une Scénographie Picasso Mucem S. Massot, Février 2018 © François Deladerriere fois encore. Par son cheminement limpide, elle Les âmes chagrines rouspètent à l’idée d’un énième noue des dialogues visuels et formels entre ses peintures, sculptures, assemblages, dessins, évènement sur Picasso dont elles croient tout et des œuvres maitresses des collections du Mucem et des musées de Marseille. Cinq connaître ! Réjouissons-nous, au contraire, des itinéraires nous guident dans ce dédale de 100 nouvelles expositions du Mucem et du Centre de la œuvres et plus de 200 documents d’archives qui, par leur conversation muette, racontent Vieille Charité qui éclairent l’œuvre du génial créateur de manière intelligible l’inextinguible soif de Picasso pour les objets extra-occidentaux. e ses voyages en Espagne et en Italie à ses transfigurées, dans les décors, les rideaux de Depuis ce jour d’octobre 1900 où il représente voyages imaginaires, Picasso s’est nourri scène et les costumes créés pour les ballets de l’Espagne à l’Exposition universelle avec Les Ddes cultures ancestrales et des traditions Serge Diaghilev entre 1916 et 1921 : Parade, Derniers moments, jusqu’aux années 60 où artisanales, des rites et des coutumes. Il a Le Tricorne, Pulcinella, Cuadro flamenco. En il peint Femme nue au bonnet turc dont les toujours tout concepté et transformé comme collaboration avec le Museo e Real Bosco formes girondes ne sont pas sans évoquer si les sources populaires se fixaient dans di Capodimonte de Naples, le Mucem met celles d’une statuette acéphale d’Ishtar Inanna son œil à tout jamais. Elles ressurgissent, en perspective son œuvre théâtrale avec du IIIe millénaire av. J.-C. « Bohême bleue » raconte son épopée parisienne au Bateau-La- voir quand ses premières toiles sont encore L’alphabet de l’amour influencées par Murillo et Goya. Sa série sur les saltimbanques et son célèbre Le Repas frugal représentent une humanité déchue, a Salle des collections au Fort Saint-Jean est désormais consacrée exténuée, écrasée par l’alcool et la misère. à la mise en valeur des fonds du Mucem. Tous les six mois, une nouvelle Dans la séquence « Afrique fantôme » ponctuée Lexposition abécédaire y sera présentée, concoctée à partir des riches d’huiles et d’études mises en regard avec des possessions du musée, iceberg dont on ne voit souvent émerger qu’une statues du Gabon, on imagine l’électrochoc infime partie. C’est la thématique de MP2018 qui a inspiréL’amour de A provoqué par le musée d’Ethnographie du à Z, première de ces expositions, inaugurée le jour de la Saint-Valentin, et Trocadéro, qui le plongea « dans une recherche en place jusqu’au 27 août. Julia Ferloni, sa commissaire, a sélectionné une intérieure proche de l’exorcisme ». Voici que série d’objets, répartis dans les 130 m2 de la salle en un parcours circulaire. celui qui écrivait « l’Afrique, connaît pas ! » Les visiteurs ont ainsi la possibilité de découvrir d’étonnantes reliques d’un allait être bouleversé par les arts premiers passé pas si lointain. La lettre G, comme Gage d’amour, dévoile une paire au point d’en faire la synthèse dans son art de sabots à la pointe fort virile. Dans la vallée de Bethmale (Pyrénées), il cubiste, notamment dans Les Demoiselles était encore d’usage il y a moins d’un siècle que les soupirants offrent à d’Avignon… « Amour antique » entre pour leur promise cette marque de leur affection... d’autant plus longue qu’elle partie en résonance avec l’exposition du était intense. En retour, la demoiselle leur remettait une bourse, toute aussi Mucem et ses nombreux portraits d’Olga, symbolique. Mention spéciale aux parents de jeunes enfants : il convient de la ballerine à la beauté classique. En 1917, sauter la lettre K, comme Kamasutra. La commissaire, avec un sourire, précise Picasso s’arrête à Pompéi avec Cocteau, et les qu’à l’origine, il s’agissait d’un manuel à destination des jeunes filles, dans idoles cycladiques en marbre de 2500-2400 lequel la sexualité tenait une place mineure, mais l’image sélectionnée est av. J.-C. se superposent aux traits stylisés explicite. Au fait : « le Mucem possède la plus grosse collection de préservatifs de L’Homme à la pipe de 1923. Dora Maar au monde ». Mais on pourra mener les plus jeunes sans crainte pour leur est à ses côtés dans « Soleil noir », période pudeur jusqu’à la lettre R, comme rupture, avec ses badges ludiques aux où l’Espagne s’enfonce dans la terreur et mentions cruelles : « Ne reviens plus » ou « Il embrasse mieux » ! sa palette dans la noirceur. Ses sculptures Rappelons que les fonds du musée dit « de société » qu’est le Mucem sont et objets se nimbent alors du même pouvoir énormes : 350 000 objets du quotidien collectés depuis 130 ans* et plus d’un mystérieux que l’art égyptien, amérindien million de cartes postales, affichettes, disques, photographies, enregistrements... ou néolithique. Après le décès de son ami Ils s’enrichissent chaque année d’acquisitions provenant désormais plus Matisse en 1954, Picasso s’empare du thème particulièrement de l’espace méditerranéen. La rotation semestrielle qui se de l’odalisque en le dénuant de tout exotisme, met en place dans la Salle des collections est prometteuse. Elle permettra empruntant au vocabulaire arabo-andalou au public, selon la jolie formule de Zeev Gourarier, directeur scientifique l’arabesque et la calligraphie. Son « Orient et des collections, de se promener « comme avec une lampe de poche dans rêvé » puise dans le geste artisanal et non l’immense grenier de la société française ». La prochaine exposition, au dans le phantasme occidental. second semestre 2018, s’intitulera Les animaux de A à Z. L’appétence de Picasso pour le monde n’est GAËLLE CLOAREC pas un vain mot, donc, qui a collectionné plus * Le Mucem a hérité des collections du Musée national des arts et de 700 cartes postales écrites par ses amis, traditions populaires, qui était situé à Paris, fermé en 2005. ses admirateurs et ses marchands. Quelques spécimens nous accompagnent dans cette traversée du monde unique. L’Amour de A à Z MARIE GODFRIN-GUIDICELLI jusqu’au 27 août Mucem, Marseille jusqu’au 24 juin 04 84 35 13 13 mucem.org Picasso Voyages imaginaires Centre de la Vieille Charité, Marseille 04 91 14 58 80/56 marseille.fr

Picasso et les Ballets russes, Entre Italie et Espagne Mucem, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

Sabots de la Vallée de Bethmale, Pyrénées, Picasso et les Ballets russes, 19e siècle Entre Italie et Espagne © Mucem Coédition Mucem et Actes sud, 25 €

Picasso voyages imaginaires Coédition Musées de Marseille et RMN, 39 € Portrait de l’avenir L’exposition Jeunes-Générations brosse le portrait d’une jeunesse inattendue et émouvante

ls sont 15, lauréats de la commande photographique nationale « La jeunesse en France ». Si les expositions collectives sont souvent Ifrustrantes, celle-ci est suffisamment importante pour qu’on l’appré- hende comme 15 expositions monographiques. Car chacune des séries témoigne d’une vision personnelle, loin des clichés, sur une jeunesse particulière. Pourtant un point de vue global émerge, un témoignage précieux susceptible de fabriquer une nostalgie future : une génération diverse, inventive, festive, révoltée, en souffrance ou en joie, ironique ou à terre, fidèle à sa façon au passé, invente aujourd’hui l’avenir. Les photographes approchent tous leur sujet de front, de face, cherchant les regards et donnant à voir les êtres qu’ils accrochent à l’éternité. De

façon assez formelle, Chimène Denneulin place sur ses sujets des © Géraldine Millo, Idaline – donner le bain au nourrisson, CAP petite enfance, lycée Camille Claudel (Mantes-La-Ville) aplats étranges qui obstruent le réel, et Gilles Coulon compose ses portraits, comme un pointilliste, de petites photos couleur ; poétique, Alexandra Pouzet accole image et texte (de Bruno Almosnino), humain rural et végétation symbolique ; d’autres attrapent la jeunesse dans ses plaisirs, comme Guillaume Herbaut et sa série de geeks Superhéros en Picardie ; Pablo Baquedano, ses Night-Clubs et leurs coulisses, Lola Reboud, ses jeunes filles et leurs étreintes. Mais la plupart des œuvres, directement militantes, donnent à voir des JR au J1 invisibles, des marginaux, des exceptions. Avec un regard d’ethnologue comme Stéphane Lavoué qui compose des portraits, très picturaux, n jour à Clichy-Montfermeil, au Brésil, au Kenya, un autre à Ellis de jeunes Bigouden ayant choisi de rester au bout du pays breton, ou Island, au Louvre ou à Los Angeles pour son documentaire Visages, Patrice Terraz qui s’approche de l’hostilité ambigüe des jeunes kanaks. UVillages co-réalisé avec Agnès Varda, nominé aux Oscars… Plus sociologiques Claudine Doury, qui cherche à capturer la trans- Aujourd’hui JR est à Marseille, une ville qu’il connaît bien pour s’être formation en artistes de jeunes du dispositif Premier acte* ; Gabrielle intéressé à l’identité du quartier La Belle de Mai, son histoire et ses Duplantier qui a retrouvé les enfants d’une école ZEP devenus de habitants, dans le cadre de son projet au long cours Unframed*. jeunes adultes ; son noir et blanc, tout autant que les couleurs éclatantes Invité par MP2018, l’artiste français s’installe au hangar du J1 de Yohanne Lamoulère (voir Zib’ 115) donnent de la dignité et pour lequel il a imaginé une installation monumentale, Amor Fati, de l’effronterie aux classes populaires. Les séries remarquables de mise en scène et en images de l’amour porté par la cité phocéenne Marie-Noëlle Boutin sur les jeunes agriculteurs du Nord, ou de à la mer et aux voyages. Déjà, en 2013, en collant le portrait d’une Géraldine Millo sur les nouvelles Vestales, apprenties du soin à la inconnue sur le mur emblématique de la corniche du Président personne, qui donnent à voir des visages lumineux, comme sortis d’un John Fitzgerald Kennedy, là où s’imposait avant celui de Zidane, il autre temps, d’une autre exploitation de classe. rappelait « l’éternelle ouverture de Marseille sur le monde ». Cette Enfin, deux photographes s’attachent au traitement de l’actualité directe, fois il en souligne sa force - « terre d’accueil, point de passage ou lieu et de la marge légale : Myr Muratet photographie les réfugiés sans de départ » - à travers un parcours ouvert à de multiples circulations refuge, les errants du Grand Paris, et Klavdij Sluban les jeunes détenus mentales et physiques. Chacun y cheminera au gré de ses impulsions de Fleury-Mérogis : les visages adolescents disparaissent, en contrejour et de ses réactions aux images exposées. Car JR développe un ou sous les couches de tissus protégeant du froid. Ils resteront dissimulés, travail d’imagier par la photographie, le collage et l’affichage, dans loin de la visibilité offerte aux autres jeunes par les photographes. un jeu avec les supports. Photos d’archives croisées avec des photos AGNÈS FRESCHEL documentaires, personnelles, voire intimes, JR nous invite à regarder *Cycle d’ateliers du Théâtre National de Strasbourg destiné à promouvoir autrement notre vie, notre ville, et plus largement le monde. la diversité, et à lutter contre la discrimination des acteurs racisés. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Le très beau catalogue de la commande nationale (texte de *Unframed, Belle de Mai / Marseille, éd. Alternatives, décembre 2013. Christian Caujolle) est édité chez Bec-en-l’air (28 €)

Jeunes-Générations Amor Fati – Carte blanche à JR jusqu’au 3 juin jusqu’au 13 mai La Friche, Marseille J1, Marseille lafriche.org mj1.fr Leur Muse Charles Sandison m’a-Muse ! fell in love with Aubagne

u’est-ce qui motive l’artiste et le pousse à créer ? Sa mmersive mais pas interactive, l’installation lumineuse The Nature of Love Muse…, nouvelle exposition du Musée Regards de Charles Sandison aux Pénitents noirs à Aubagne est une œuvre Qde Provence questionne le regard de l’artiste sur Iambitieuse. Fruit d’un long processus de repérage des espaces, de la ville et son modèle. Les deux commissaires, Adeline Grane- de son environnement, de recherche historique et de travail plastique, et d’un reau et Bernard Muntaner, interrogeant l’Histoire réel challenge technique. Une œuvre de commande conçue pour la chapelle de l’Art, se sont étonnés de l’absence d’une Muse (l’artiste écossais a modélisé l’architecture), éphémère (temps d’exposition de la peinture et du dessin. Pourtant la femme inspi- calé sur celui de MP18) et évolutive ! Spécificité particulièrement troublante ratrice ou adorée est présente dans les peintures, ne pour le public qui ne verra jamais la même œuvre, et pour cause, puisqu’elle serait-ce que dans les représentations de Vénus ou de est générée et régénérée par la combinaison de 12 systèmes d’algorithmes la Vierge… mais il est certain que ce sont les poètes différents. Au-delà de la prouesse technique, les effets d’optique obtenus par romantiques qui ont développé amplement cette notion. « l’artiste geek », comme il se définit lui-même, produisent une constellation Les commissaires se sont donc appliqués à en chercher mouvante où s’entrecroisent, se superposent, défilent et s’animent extraits les différentes expressions. Amoureuse, inspiratrice, conso- d’une encyclopédie de 1911, chiffres et pixels. Un vocabulaire visuel lumineux latrice. Au XXe siècle elle change de forme, de profil et en flux continu qui interroge l’amour. L’amour, vraiment, mais comment ? même de sexe. Dans cette exposition nécessairement En réfléchissant sur les émotions. Pour Charles Sandison, ses recherches non-exhaustive, elle devient idole ou diva, renversant scientifiques, ses lectures philosophiques et les mille et une expressions de en cela les critères classiques et se rapprochant de la l’amour sont des pistes infinies qu’il explore et dontThe Nature of Love est problématique contemporaine. Cela donne un ensemble le suc. À charge pour le public d’être réactif et de vibrer à l’unisson : « Je assez disparate qui peut laisser perplexe. Sans chronologie, propose de [vous] cuisiner un délicieux repas composé d’images digitales, d’une œuvre à l’autre on passe à des styles, des techniques de lumières et d’expériences, et en retour, si je le mérite, j’aurai bénéficié et des points de vue très différents. Quelques sculptures, de votre intérêt au moins un moment ». L’amour est ainsi, une connexion mais surtout des peintures fauves et frontales (Manguin, infinie de milliers de cellules vivantes projetées en étoiles qui transforment Lebasque ou Carrera), discrètement raffinées (Katia le plafond de la chapelle en voûte céleste. Bourdarel, qui montre son modèle de dos). Des œuvres MARIE GODFRIN-GUIDICELLI où l’image de la femme est multipliée comme dans la pièce de Surian, caricaturée comme avec les Barbies The Nature of Love, Charles Sandison er photographiées par Rebufa, désacralisée avec les pho- jusqu’au 1 septembre Centre d’art Les Pénitents noirs, Aubagne tos repeintes de Chostakoff…Des œuvres où c’est un 04 42 18 17 26 aubagne.fr homme qui est au centre comme dans la très belle photo de Preljocaj par Nicole Tran Ba Vang ou l’immense toile de Marie Ducaté. L’exposition questionne aussi la notion du genre avec les photos de Philippe Ordioni qui joue sur l’ambiguïté des hommes parés et maquillés ou celle de Michèle Sylvander, un autoportrait qui © Nathalie Ammirati vous regarde droit dans les yeux et montre des poils fournis dans l’échancrure de son corsage. Le travail de Sabine Pigalle mérite une attention particulière avec la reprise très fidèle duPortrait d’une princesse d’Este de Pisanello, lui donnant une modernité déconcertante, et des miniatures façon Cranach. Des photos d’ORLAN insistent sur l’aspect narcissique que prend le culte de la Muse, ici reflet ou miroir. On remarque aussi la présence des idoles des jeunes, et des moins jeunes, avec des clichés de Sylvie Vartan, Jane Birkin… les Muses se démocratisent ! CHRIS BOURGUE

Sa Muse… jusqu’au 26 août Musée Regards de Provence, Marseille museeregardsdeprovence.com 92 critiques arts visuels Retrouvailles au Pavillon

935. Deux jeunes françaises arrivent dans l’Est algérien, à la lisière du Sahara, dans la 1région des Aurès. Elles sont ethnologues. Dans la lignée des grandes missions menées au nom du futur Musée de l’Homme (il s’appelle encore musée d’ethnographie du Trocadéro), après Michel Leiris et Marcel Griaule en Afrique sub-saharienne (1931-33), puis Claude Lévi- Strauss en Amazonie (1934), Thérèse Rivière et Germaine Tillion pénètrent cette région berbère, où les quelques 60000 habitants conservent une relative indépendance vis- à-vis du gouvernement colonisateur. Seuls une vingtaine de français vivent dans les Aurès, dans cette partie de l’Algérie qu’on appelle « montagne rebelle ». 150 clichés, choisis parmi les milliers de documents qu’elles ont rapportés, constituent le premier volet des trois expositions consacrées au rapport entre Histoire et photographie par le Pavillon Femme portant un tatouage sur le front, population Ouled Abdi, août 1937 © Thérèse Rivière populaire (Montpellier) au long de l’année 2018. matérielles et l’économie domestique ; Ger- emporter ses notes d’Algérie à Ravensbrück, Aurès, 1935 présente un double regard, maine Tillion commençait sa réflexion sur les finalement perdues. L’autre s’est débattue exposé pour la première fois conjointement, relations de parenté et de pouvoir. Les aléas de avec une lourde pathologie psychiatrique, et celui de ces deux chercheuses aventurières l’Histoire, justement, et de la vie, ont fait que après la présentation de son travail en 1943 de « terrain » parties avec carnets, caméras, ces matériaux recueillis n’avaient jamais été au Musée de l’Homme, elle ne put continuer appareils de photos, micros. Thérèse Rivière réunis. L’une s’est engagée dans la résistance ses activités. observait plus particulièrement les activités et fut déportée : Germaine Tillion avait réussi à Christian Phéline, commissaire de l’exposition

La Panacée révise ses matières

référence sociale, voire humaine. Travailler le réel à son niveau moléculaire. Dans l’élégant catalogue*, trois textes, pointus et inspirants, bâtissent les contours de cette réflexion émer- gente ; on y trouve des mots qui réunissent la chimie et la poésie (pulvérisation, solution, précipité), des formules qui ouvrent vers des contrées mystérieuses (« peut-être que les extrêmophiles, (…), sont-ils ce que nous avons de plus proche en tant que forme de vie étrangères ou extra-terrestres »), des pistes troublantes (la poussière intelligente, développée dans les laboratoires de recherche militaire). Vue de l’exposition avec, au premier plan, les termitières réalisées par Agnieszka Kurant. Courtesy Tanya Bonakdar Gallery, New York Crash Test Certaines des œuvres présentées provoquent ls sont 25, ils sont jeunes, beaucoup d’entre matière. Rien de nouveau à priori. Mais l’angle une émotion spontanée, quelque chose qui eux sont des elles, ils vivent un peu partout qu’a choisi le curateur pour faire sens entre justement échappe à la théorie, aux mots, aux Idans le monde – et ils sont tous blancs. Ils les œuvres s’inscrit dans la volonté de déceler références artistiques. Search, 2018 (Caroline représentent ce courant artistique que Nicolas une approche radicalement nouvelle dans le Corbasson), sur fond sonore de vent balayant le Bourriaud, directeur du MoCo à Montpellier, rapport entre culture et nature. Il s’agirait d’un désert d’Atacama au Chili, montre des paysages a réuni à La Panacée pour sa nouvelle expo- véritable retour aux sources, de décrire notre filmés avec un microscope électronique : la sition Crash Test. Ces plasticiens manient la monde actuel en s’affranchissant de toute matière qui préexiste largement à l’humain, Picasso-Zibeline-100x280.pdf 1 02/02/2018 09:30

montpelliéraine (direction artistique Gilles Mora) fait donc dialoguer enfin ces deux visions, restituant ainsi l’approche ethnologique d’un monde « indigène » sur le point de disparaître, et l’enrichissement mutuel des esthétiques des deux photographes. Tillion investiguait son terrain à travers le cadre carré (6 x 6) du Rolleiflex. Rivière préférait le Leica (24 x 36). Ce détail géométrique n’est pas un détail artistique. Le mode de visée des deux appareils diffère également : regard vertical avec des temps de pause longs pour le Rolleiflex, et cadrage à hauteur d’œil, prises de vue en rafale avec celui de Rivière. L’une observe, l’autre s’implique et invite à la confrontation physique dans l’image. Tillion archive, Rivière propose une histoire chaque fois qu’elle déclenche l’obturateur. Les tirages présentés dans la grande salle du Pavillon, parfois regroupés par auteure, souvent mélangés, montrent à quel point tout est affaire de subjectivité, en sciences humaines comme en art. On reconnaît le langage et la sensibilité de chacune, dans un flou, un regard baissé, un hasard capturé (Rivière), dans une composition documentaire et centrée (Tillion). Les vies renaissent, les sourires, les quotidiens, les familles, les rues de villages, les chemins montagneux, tout s’exprime à nouveau, et l’Histoire s’impose. La vie triomphe aussi, souvent : lorsque les personnages, bord cadre, en mouvement, bousculent l’arrêt sur image. Lorsqu’on perçoit le plaisir de ces deux femmes à se photographier l’une l’autre. On remarque d’ailleurs que les mères et les filles sont plus déliées, plus libres dans leur posture et leur regard que les hommes, contraints, timides. Alors on comprend C que les chercheuses ont trouvé : une rencontre a réellement eu lieu. ANNA ZISMANM

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CM

Aurès, 1935 MJ jusqu’au 15 avril Pavillon Populaire, Montpellier CJ

04 67 66 13 46 montpellier.fr CMJ

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scrutée et réinterprétée via les synapses de nos cerveaux sociaux du XXIe siècle. Un tas de poussière grise, si fine qu’on voudrait y passer la main : c’est ce qui reste d’un moteur d’avion pulvérisé par Roger Hiorns (Sans titre, 2008) ; matière première. Au sol encore, une flaque Puddle,( Faint Green, 2014, Marlie Mul), un extrait du dehors en trompe-l’œil : de l’eau, des résidus, sur du bitume (sable et résine). Les deux magnifiques pièces de résine époxy et fibre de verre de Estrid Lutz et Émile Mold réunissent tout un imaginaire très contemporain, couleurs, images puisées sur internet, disruption des échelles, apparition/disparition des sujets, rêve à portée de main, fake-réalité. D’autres s’appuient plus sur la sacro-sainte médiation, qui décrypte et invite au voyage. Alors l’humain reprend le dessus. A.Z.

* Crash Test, La Révolution moléculaire, Nicolas Bourriaud, Noam Segal, Stefanie Hessler, bilingue franco-anglais, La Panacée – MoCo Montpellier Contemporain, 27 €

Crash Test, La Révolution moléculaire jusqu’au 6 mai La Panacée, Montpellier lapanacee.org 94 critiques livres Western à l’irlandaise

ort Laramie, la guerre de Sécession, les rendu la parole en faisant de lui le narrateur jambes grandit. On dirait les offrandes d’un bisons des grandes plaines de l’Ouest de ce roman. Sans préjugés, Thomas McNully abominable boucher. » La force de supporter Faméricain évoquent les westerns. Or, dans relate les événements avec une candeur sur- l’indicible, Thomas la puise dans les valeurs ce roman, si le décor y est, le héros n’a rien de qui le meuvent : l’amour, l’amitié et la part de John Wayne. Thomas McNully est un migrant féminité qu’il porte en lui : « Je me sens plus irlandais, un orphelin qui a fui son pays ravagé femme que je ne me suis jamais senti homme, par la famine. À ses côtés, son amour, son alors que j’ai été soldat la plus grande partie « galant » comme il dit, John Cole. Engagés de mon existence. Je finis par croire que ces tous deux dans l’armée, ils se battent avec Indiens vêtus de robes m’ont montré la voie. » bravoure contre les Sioux et les Sudistes. Avec cette épopée romanesque à la fois grave Thomas décrit l’engrenage de la violence et poétique, Sebastian Barry rend magnifique- qui les saisit lors des batailles exécutant les ment hommage aux victimes des guerres et ordres autant que les adversaires, comme génocides d’Amérique et d’ailleurs. s’ils étaient des machines à tuer : « même CAROLINE GÉRARD les gens “bien” peuvent s’engager corps et âme dans un massacre. » Puis, ce couple devient une famille avec Winona, l’orpheline sioux qu’ils adoptent. Inspiré par la vie d’un arrière-grand-oncle (portrait en couverture) racontée par son grand- père lorsqu’il était enfant, Sebastian Barry a mis cinquante ans à se la réapproprier, tout prenante. Pourtant aucun détail des horreurs en prenant des distances avec la mythologie de ces massacres n’est épargné : « Au bout Des jours sans fin Sebastian Barry familiale. Il a fait revivre cet ancêtre et lui a de la table du chirurgien, la pile de bras et Joëlle Losfeld, 22 €

Sans trône ni couronne

inar Már Guðmundsson ouvre son énormité. Une construction en emboîtement occupé des postes politiques sans aucune roman par l’arrivée à l’école d’une petite qui donne un peu le vertige, à laquelle on qualification. Parfois ruinés après avoir trempé Eville islandaise d’un nouveau professeur, soupçonne l’auteur d’avoir pris beaucoup dans des trafics louches, ils rebondissent pour « un homme qui ressemblait à un maffioso de plaisir. Avec un narrateur qui intervient la plupart avec panache. tout droit sorti d’un film ». C’est Arnfinnur Au passage, Guðmundsson règle quelques Knudsen, qu’on peut considérer comme le comptes avec les politiciens de cette répu- personnage principal de ce roman qui vient blique longtemps sous la coupe du Danemark, d’être traduit en français. Personnage haut indépendante seulement depuis 1944. Son en couleurs, tout comme les membres de humour caustique s’en donne à cœur joie en sa famille, ses amis et ses adversaires. Le caricaturant les partis politiques, notamment narrateur, un ancien élève, campe le décor : Le Parti, celui de tous les Knudsen, qui n’a de un petit port de pêche entouré de champs démocratique que le nom, ou en parlant du de lave et occupé par des conserveries de conflit de la guerre de 39-40 avec désinvolture. harengs et des séchoirs de morues. Le sujet Une saga savoureuse, même si on finit par de son récit : Les Knudsen, une lignée de se lasser des rebondissements en chaine pêcheurs enrichis, grands buveurs et coureurs de ce récit. de jupons, souvent menteurs, un peu bandits, CHRIS BOURGUE et leurs femmes qui n’ont pas froid aux yeux. Tout cela sur deux siècles et dans un joyeux désordre, sans aucune chronologie ; les anec- dotes se succèdent et, si au début le lecteur s’accroche pour retenir le grand nombre de personnages, leurs fonctions et leurs liens régulièrement et mène le jeu de ces marion- familiaux, il finit par y renoncer pour se laisser nettes. Ces descendants des vikings qui se Les rois d’Islande Einar Már promener d’une époque et d’une aventure croient de grand lignage ont exercé tous les Guðmundsson, traduction Éric Boury à l’autre, goûtant leurs cocasseries et leur métiers, ont gagné beaucoup d’argent et Éditions Zulma, 21 € 95 L’apprentissage du bonheur

oyez heureux ! » Le récit d’Ivan « archives de soi » : le journal de bord qu’il ajoute des notices de contextualisation afin Jablonka commence par cette tenait lors des voyages et les multiples petits d’esquisser le portrait d’une époque, dans «Sinjonction hurlée par le père à ses objets rapportés en souvenir qui dorment dans laquelle se déroulaient ces voyages. fils lors d’un séjour au Maroc en camping-car. En restant à mi-chemin entre le récit d’ap- Durant les vacances et souvent accompagnée prentissage et la socio-histoire sur les années d’amis, la famille avait l’habitude de sillonner 80, Ivan Jablonka exprime la gratitude qu’il les routes avec un Combi VW. Dans sa bulle nourrit envers ses parents qui lui ont offert itinérante, elle bivouaquait dans des « spots ces étés de liberté. « Le camping-car a été de rêve » hors des sentiers battus, de Corse en pur sentiment d’exister, droit au bonheur. » Turquie, du Portugal en Italie, de la Grèce au écrit-il. En lisant cela, son père, celui dont Maroc ou en Sicile. Robinsonnades, baignades l’enfance avait été broyée par la mort de ses dans la tiédeur de la Méditerranée, parties de parents en déportation et qui hurlait à ses tarot, visites de vestiges antiques et autres propres fils « Soyez heureux ! » est sans doute lieux culturels étaient son quotidien durant rassuré aujourd’hui. la parenthèse estivale. C.G. « Historien de l’enfance, j’ai voulu évoquer la mienne en historien » confie Jablonka. En effet, l’originalité de ce récit réside en partie dans sa construction. L’auteur ne fait pas appel uniquement à ses souvenirs comme s’il s’agissait une autobiographie mais il bâtit son ouvrage à la façon d’un essai his- un tiroir comme, par exemple, trois bonbons torique. Il interroge les témoins, les acteurs en verre de Murano ou des fioles remplies En camping car Ivan Jablonka de ces périples en camping-car, consulte ses de sable de diverses plages. Enfin, l’auteur Le Seuil, 17 €

Les Marseillais n’aiment pas tous le foot

es Mexicains ne sont pas tous des - de la ville, comme les vingt-deux arcanes du avocats, capitaines d’industrie et même trafiquants. Les Mongols ne vivent pas tous célèbre jeu divinatoire. Ainsi se succèdent bandits…Sarah Soilihi y incarne La Force, Ldans des yourtes… « Briser les murs et les les portraits-interviews –chacun suivi d’un Robert Vigouroux L’Empereur, et Le Pape clichés », tel est l’objectif que se sont fixé les point plus général sur tel ou tel aspect de la bien sûr, c’est Pape Diouf. ateliers Henry Dougier, en créant la collection Les deux auteurs le reconnaissent, ces pages Lignes de vie d’un peuple, une collection « sont à l’image de Marseille, incomplètes, « nourrie d’enquêtes où un peuple exprime imparfaites, contestables ». Mais elles ont sa mémoire, ses valeurs, son imaginaire, sa le mérite de proposer une entrée, forcément créativité », riche de nombreux titres déjà. subjective mais souvent éclairante, dans le Le dernier en date s’intitule Les Marseillais. « grand puzzle en désordre » de Marseille et Rien à voir (heureusement) avec l’émission de mettre en lumière les sentiments contra- de téléréalité éponyme, même si les auteurs dictoires que la ville suscite, même chez ses sont amenés à y faire allusion. plus ardents défenseurs. À lire donc, pour Y a-t-il un peuple marseillais ? C’est la ques- sortir des clichés rebattus. tion que se sont posée Patrick Coulomb et FRED ROBERT François Thomazeau, tous deux écrivains, journalistes… et marseillais. Pour entrer dans la réalité complexe d’une ville composée de communautés disparates, d’une ville « d’ici et d’ailleurs », dont les habitants « ont pris l’habitude et le goût de vivre côte à côte en se foutant la paix » mais dont on ne sait pas au juste s’ils vivent « ensemble ou seulement dans ville- de celles et ceux qui font Marseille : Les Marseillais Patrick Coulomb la même ville », les deux auteurs ont emprunté politiques, syndicalistes, militants associatifs, et François Thomazeau le biais du tarot de Marseille. Et interrogé personnalités du monde de la culture, de Ateliers Henry Dougier Collection vingt-deux personnalités emblématiques l’éducation, de la recherche, des médias, Lignes de vie d’un peuple, 14 € 96 critiques livres À rebours

ls meurent tous avant quarante ans. Une poignante. Pas de misérabilisme pour autant des jalousies, des passions : avidité de pouvoir malédiction semble avoir frappé les habitants dans cette saga aux couleurs naturalistes destructrice, alliances, complots… Malgré Idu petit village dit des Trois Patronymes, que vient éclairer parfois l’éclair d’images à les échecs répétés, l’espoir subsiste, au plus aux fins fonds de la province du Henan dans fort de la famine, des solutions sont tentées, la zone montagneuse des Balou. Le premier jusqu’au renoncement à tout sentiment humain, roman de Yan Lianke, La Fuite du Temps l’essentiel étant la survie. En filigrane, des (sorti en France en 2014 et réédité aujourd’hui notes de fin de chapitre donnent des réponses en poche) brosse une fresque magistrale de la objectives, notes historiques, économiques destinée de ce village, et esquisse l’histoire de et politiques, terrifiantes, ainsi, le « mal de la la Chine communiste, Grand Bond en avant, gorge obstruée » qui tue les villageois est lié Révolution culturelle, Quatre Modernisations, (entre autres) au taux de fluor excessif contenu à travers cinq livres qui remontent progressi- dans l’eau et la terre, mais aucun déplacement vement le temps, sur une trame qui semble se de population ni aucun traitement n’a jamais répéter : l’amour qu’éprouvent depuis l’enfance été mis en œuvre ! De la mort de Sima Lan la douce Sishi et Sima Lan, toujours contrarié, à sa naissance, le roman foisonnant de Yan les efforts de chaque chef de village pour Lianke brosse un portrait bouleversant de lutter contre la mort précoce, en diversifiant notre humanité, dans laquelle on vient quand les cultures, en creusant un canal, la récolte même au monde avec « un petit rire léger terrifiante des fonds, qui poussent à vendre, les et brillant comme une aiguille d’argent ». hommes leur peau au dispensaire des grands MARYVONNE COLOMBANI brûlés, les femmes leur corps. Tragique saga où tout est voué à l’échec, la destruction : l’intense poésie. La construction à rebours du La fuite du temps Yan Lianke, traduit nuées de sauterelles, famines, eaux polluées, roman ajoute à sa puissance, remonte le fil des du chinois par Brigitte Guilbaud terres impropres… et une ténacité collective inimitiés, des haines familiales, des rivalités, éditions Picquier poche, 11 €

Des saumons et des hommes

onnaissez-vous la Gaspésie, dont le nom en Amérique (Brautigan est devenu célèbre politique, touristique…Dans Taqawan, on vient de Gespeg, « la fin des terres » en avec La pêche à la truite en Amérique, paru en croise également Céline Dion, Cléopâtre, le Clangue autochtone ? Connaissez-vous la 1974), ce serait plutôt le saumon en Gaspésie. Chieftain 1976 (un modèle de camping-car), Ristigouche ? Éric Plamondon, bien qu’il Car Taqawan, c’est le nom qu’on donne, en la recette de la Miskwessabo (ou soupe aux ait passé toute son enfance au Canada, ne huîtres) ; on en apprend énormément sur connaissait pas non plus cette péninsule, l’histoire de la région (depuis la plus lointaine berceau du débarquement de Jacques Cartier préhistoire jusqu’aux affrontements violents de au Nouveau-Monde, ni cette rivière, jusqu’à 1981). Tout cela sous-tendu par un fil narratif ce qu’il y fasse un voyage en 2012. Il en est -en mode thriller et en pointillés- qui met en revenu habité de l’histoire de cette région, scène des personnages attachants : Océane, et des luttes (perdues d’avance ?) du peuple une adolescente indienne violentée, Yves, autochtone des Mi’gmaqs pour conserver un garde-chasse, Caroline, une institutrice ses traditions, ses territoires de pêche et de française, William, un autochtone dont l’animal chasse, malgré la sédentarisation, malgré les totémique est justement le taqawan… Drôle réserves dans lesquelles on le parque. Il nous de genre, mais vrai plaisir de lecture, et belle livre aujourd’hui Taqawan, un drôle de texte leçon d’humanité. fragmenté en une succession de « courts FRED ROBERT chapitres qui nous baladent dans la réserve indienne », comme le déclarait ce Québécois *Éric Plamondon était invité à la librairie L’histoire de Bordeaux lors d’une passionnante rencontre de l’œil (Marseille) le 19 janvier, avec Anthony Poiraudeau, venu parler de Churchill, Manitoba à la librairie L’Histoire de l’œil*. Pour lui, (éditions Inculte). Une rencontre sous le signe comme pour l’un de ses écrivains de référence, de l’ailleurs et du voyage « loin de tout ». Richard Brautigan, la littérature doit rester langue mi’gmaq, au saumon qui revient dans « une zone de liberté absolue » où dessiner le sa rivière natale pour la première fois. De monde de façon éclatée. Histoire d’en rendre saumon, il est ici beaucoup question. Car il Taqawan Éric Plamondon toutes les nuances ? Lui ce n’est pas la truite est un enjeu de taille dans la région. Culturel, Quidam éditeur, 20 € pub zibeline.indd1 www.scenesetcines.fr Toute laprogrammation sur PANO D’AFRIQUE en présence de nosinvitésdans vos sallesdecinéma 9 JOURS avril au mars du Les Cinémas 2018 1 24 er

de projections, derencontres, dedébats, desoiréesconviviales RAMA

© pablito zago - grégory quittard - service communication ville d’avignon Miramas || Port-Saint-Louis-du-RhôneMiramas Fos-sur-Mer ||Istres ||Grans 09/03/18 08:46

Licence 3-1064783 98 critiques livres L’Afrique plurielle

uand la Fondation Dapper et la Fondation ordonnancement classique. Le catalogue partie consacrée aux arts anciens privilégie Clément œuvrent ensemble à promouvoir ne cherche ni à innover graphiquement, ni à les approches historique, mythologique et eth- Qla création africaine d’hier et d’aujourd’hui, bouleverser les codes éditoriaux mais à rendre nographique qui permettent de décrypter les leur collaboration prend la forme d’une expo- us et coutumes liés aux sièges, aux statuettes, sition et d’un catalogue d’autant plus précieux aux figures et autres masques. La seconde, que l’exposition a lieu sur la commune du dédiée à l’art contemporain, introduite par François en Martinique. Sous la direction Françoise Monnin, interroge l’histoire à de Christiane Falgayrettes-Leveau, travers l’œuvre d’Ousmane Sow, la diaspora commissaire de l’exposition et Présidente sénégalaise à travers celle du photographe de la Fondation Dapper, l’ouvrage réunit 13 Omar Victor Diop, la négritude à travers le contributeurs dont Patrick Chamoiseau. « faiseur de mondes » qu’est Hassan Musa, etc. Dans sa préface, l’écrivain martiniquais D’autres artistes bénéficient d’une approche évoque les « rapports entre l’Afrique et nos circonstanciée à l’œuvre choisie, notamment Antilles », leurs retrouvailles, citant le Cahier Chéri Samba, Barthélémy Toguo, Soly Cissé, d’un retour au pays natal d’Aimé Césaire, Joana Choumali ou Freddy Tsimba… le roman Le Quatrième siècle d’Édouard MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Glissant et la vie de Frantz Fanon qui « ne sera rien d’autre qu’une rencontre entre l’Afrique et les Antilles dans un passage à l’acte contre la colonisation ». Une fois posée l’existence d’une Afrique plurielle (« Afriques ! compréhensible la signification des pièces, Afriques, artiste d’hier et d’aujourd’hui Préface Patrick Chamoiseau e Afriques ! »), les doubles pages textuelles depuis « l’objet » du début du XX siècle à Éditions Chopin / Fondation Clément et iconographiques se déroulent selon un l’œuvre d’art contemporaine. La première / Fondation Dapper, 28,50 €

Tous les oiseaux de l’Ouest

ans un très bel album, traversé par le ailes du monde », à la suite de cet homme est condamnée à disparaître, observe avec vol de milliers d’oiseaux, ponctué de « happé » par l’ampleur et « la folie de [s]a dégoût les hécatombes de bisons des chas- Dpaysages grandioses, le scénariste tâche ». Dans une Amérique encore vierge, seurs blancs. Plus qu’un simple naturaliste, il Fabien Grolleau et le dessinateur Jérémie Audubon découvre les horreurs de l’esclavage, apparaît ainsi comme un pionnier de l’écologie, Royer retracent l’existence extraordinaire, témoin précieux d’un monde fragile que la et somme toute assez méconnue, de Jean- fièvre « civilisatrice » n’épargnera pas. Un Jacques (John James) Audubon. Né français personnage hors-normes, tout à fait digne et mort américain, cet aventurier des sciences de figurer dans cette fiction dessinée, qui naturelles entreprit, au début du XIXe siècle, sait lui rendre hommage. La reproduction de peindre et de répertorier tous les oiseaux de quelques planches à la fin de l’album d’Amérique. Rien que cela ! Abandonnant les permet de mesurer le talent de celui que les affaires familiales (pour lesquelles il n’était médias contemporains surnommaient avec pas très doué), laissant derrière lui femme et condescendance The American Woodman. Et enfants, il s’en alla, du Kentucky au Mississipi, si l’on veut en savoir plus, les auteurs proposent de la Nouvelle-Orléans au Missouri, tirant, également une bibliographie sélective. dépeçant, naturalisant et peignant les espèces FRED ROBERT rencontrées sur sa route. Essayant toujours, dans une approche très romantique, de saisir L’album est en lice pour le Prix littéraire la vie… ce qui lui valut de ne pas être reconnu des Lycéens et Apprentis PACA. Les deux auteurs étaient invités le 1er février à la par les scientifiques de son temps. Trop artiste, librairie La Réserve à Bulles (Marseille). trop nouveau. La BD s’appuie essentiellement sur les récits d’Audubon, histoires sans doute enjolivées, mais qu’importe. Les auteurs ne contemple « la vision idyllique d’une race Sur les ailes du monde, Audubon Fabien cherchent pas à livrer une biographie minu- humaine en osmose avec la nature » (les Grolleau (scénario) et Jérémie Royer (dessin) tieuse. Ils nous emportent plutôt « sur les tribus autochtones), dont il pressent qu’elle éditions Dargaud 21 € L’ a m o u r de A Un abécédaire des collections à Z

Exposition 14 février Mucem —27 août 2018

Mécènes fondateurs Partenaire ART DES NOUVEAUX MÉDIA DU 31 MARS AU 3 JUIN PLANÈTE LABORATOIRE Exposition HeHe (Helen Evans et Heiko Hansen) ©design EDIS 2018