Du Réalisme Et De Son Illusion : La Méditerranée De Guy De Maupassant Entre Représentation Réaliste Et Penchants Surnaturels
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Du réalisme et de son illusion : la Méditerranée de Guy de Maupassant entre représentation réaliste et penchants surnaturels À Ester, qui m’a accompagnée pendant les neuf derniers mois de rédaction de ce travail 1 Table des matières Éditions de référence citées et liste des abréviations……………………………. p. 4 Introduction………………………………………………………….…………… p. 5 Chapitre I : D’un réalisme vraiment visionnaire à une vision surnaturelle du réel : quelques réflexions théoriques sur l’art de Guy de Maupassant……………………………p. 24 Du "réalisme" et de son "effet"…………………………………… ……... p. 25 Pour une esthétique du regard chez Maupassant disciple de Flaubert…… p. 33 Vérité prétendue et illusion du vrai : les genres de prose abordés………. p. 39 D’un inconnu vraiment explorable : le fantastique au croisement du contingent..…………………………………………………………………p. 52 Chapitre II : Voyage autour de la Méditerranée entre peinture réaliste et élan fantastique….. p. 68 Départs. Anecdotes sur la matière qui suit………………………………. p. 69 Premières approches visuelles, ou l’objet en mirage……………………. p. 78 La Corse à la dérive dans la suite du « Bonheur »………………………. p. 89 Autres dissonances : « En voyage », « Notes d’un voyageur », « Blanc et bleu »…………………………………………………………………….. p. 99 Excursus solaires………………………………………………………… p. 114 Du témoignage historique à l’expérience de l’ineffable : gros plan sur l’Afrique du Nord…………………………………………………………………….p. 131 L’entre-deux vies : Méditerranée et maladie…………………………….. p. 149 Une idylle perturbante : vers un discours du fantastique dans les pays du soleil………………………………………………………………………..p. 170 Répartition des textes de Maupassant traités au chapitre II……………… p. 190 Conclusion………………………………………………… …………………….. p. 193 2 Appendice 1 : Compte-rendu des voyages de Guy de Maupassant dans les pays du soleil……... p. 204 Appendice 2 : Maupassant source de lui-même: la représentation de la Corse entre remaniement et réécriture. L’exemple des chroniques, d’Une vie et d’ « Histoire corse »………..p. 205 Introduction………………………………………………………………. p. 205 Du côté du descriptif : un paysage antinomique…………………………. p. 209 Du côté du narratif : le banditisme et la loi de la vengeance…………….. p. 219 Conclusion……………………………………………………………….. p. 223 Bibliographie…………………………………………………………………….. p. 226 3 Éditions de référence citées et liste des abréviations Contes et Nouvelles, éd. Louis Forestier, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », volumes I et II, 1974 et 1979. Abrégés I et II. Romans, éd. Louis Forestier, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1987. Abrégé R. Contient : - Une vie, abrégé UV ; - Bel-Ami, abrégé BA ; - Pierre et Jean, abrégé PJ. Chroniques. Anthologie, éd. Henri Mitterand, Le Livre de Poche, 2008. Abrégé Chro. Carnets de voyage, Au soleil, Sur l’eau, La vie errante, éd. critique présentée par Gérard Delaisement, Paris, Rive Droite, 2006, Abrégé Carnets. Contient : - Au soleil, abrégé AS ; - Sur l’eau, abrégé SE ; - La vie errante, abrégé VE. 4 Introduction Depuis 1850 environ l’empreinte romantique que possédait la littérature de voyage, ayant comme apogée la parution, en 1851, du Voyage en Orient de Gérard de Nerval, subit de grands changements. Les écrivains-voyageurs s’écartent progressivement des excès descriptifs et des élans égotiques qui avaient dominé leurs récits jusqu’à cette époque. L’enthousiasme pour le pittoresque et l’exotique acquiert de nouvelles formes et des interprétations inédites. Regardés par les romantiques d’autrefois avec une énergie descriptive, visionnaire et créatrice, les pays orientaux, qui coïncident désormais, pour la plupart, avec les territoires colonisés, deviennent l’objet d’une analyse lucide de la part de l’Occident conquérant et se laissent étudier pour la première fois par celui-ci du point de vue social, politique, culturel. Non que l’attrait pour le soi- disant rêve d’Orient disparaisse : le sentiment d’étrangeté qu’il inspire grâce à l’individuation des différences issues de la mise en parallèle avec le paradigme occidental, non seulement continue à être la base d’une sensation de surprise et d’enchantement, mais constitue une véritable matière d’investigation scientifique. C’est au nom de cette nouvelle approche que le soi-disant monde "oriental" se voit attribuer un suffixe en "-isme" contribuant à faire de celui-ci une vraie branche d’étude voire un modèle, doué de certains traits particuliers, le distinguant de l’Occident lointain qui l’observe pourtant de près. Après Nerval, on assiste donc à une dissolution graduelle du point de vue romantique sur les terres étrangères, à l’effacement de cette approche qui accordait aux rêveries et aux légendes liées à un certain lieu une position de primauté soulignant le potentiel fantaisiste que celui-ci était censé dégager. Au reportage journalistique, les romantiques privilégiaient, en effet, la description d’une atmosphère dictée par la sensation subjective et par l’imagination – source première d’inspiration et de création –, ainsi qu’une dimension de l’espace qui jouait le rôle de miroir exclusif et privé de l’âme. D’où une reproduction toute intime du paysage visant à la construction d’un imaginaire spatial, voire d’un lieu rêvé ou songé, plutôt qu’à la peinture réaliste des endroits visités et des expériences vécues. La disparition de cette conception est accompagnée par la diffusion, dans les milieux artistes, d’un jugement de mépris vis-à-vis de la littérature de voyage, considérée par les générations suivantes, comme un genre mineur, presque insignifiant et négligeable. Barbey D’Aurevilly, en la qualifiant comme « quelque chose de plus facile que la "littérature facile" », précise qu’il n’entend pas discréditer les textes ayant comme objet des déplacements « scientifiques », mais ceux qui se fondent sur des « voyages pittoresques, individuels, artistiques 5 ou littéraires de ces dilettanti quelconques qui ont, sur tout, une phrase qu’on a vue quelque part au service de leurs impressions ou de leurs souvenirs »1. D’où la déclaration, de la part de l’écrivain, de la crise d’une époque affectée, selon lui, d’une « hydropsie de description et de peinture, mais qui adore sa maladie »2. Dans la même direction, un jeune Gustave Flaubert se refuse de publier son ouvrage Par les champs et par les grèves (1847), écrit à quatre mains avec Maxime du Camp, et inspiré par le voyage effectué en Bretagne avec ce dernier. L’expérience du voyage en Orient, constituant pour les romantiques une étape incontournable de leur initiation artistique, se traduit, pour Flaubert, dans un ouvrage qui, comme le dit Claudine Gothot-Mersch3, n’a jamais été véritablement rédigé et dont la publication tardive – sa première édition chez Conard remonte à 1910 – lui a empêché de jouer un rôle important dans l’histoire du genre, tout en étant, aujourd’hui, parmi les textes de voyage les plus cités à côté de l’Itinéraire de Paris à Jérusalem de François-René de Chateaubriand et des Voyage en Orient d’Alphonse de Lamartine et de Gérard de Nerval. Les manuscrits du Voyage en Orient de Flaubert consistent, en effet, en des carnets de route, de petit format, que l’auteur composait « parfois au moment même de ses visites (description de monuments par exemple), parfois le soir, parfois quelques jours plus tard »4. Et la prise de distance à l’égard de la littérature de voyage – attitude d’ailleurs très courante à l’époque – est renforcée par ce souvenir que nous laisse Du Camp à propos du refus de la part du romancier de prendre au sérieux un projet d’écriture ayant comme sujet leur voyage en Grèce : « l’œuvre pouvait être courte, intéressante et offrir un bon terrain de début – suggère Du Camp – Il rejeta mon conseil ; il me répondit que les voyages comme les humanités ne devaient servir qu’à "corser le style", et que les incidents recueillis en pays étranger pouvaient être utilisés dans un roman, mais non pas dans un récit ; écrire un voyage ou rédiger un fait divers, pour lui c’était un tout un, c’était de la basse littérature et il avait des inspirations plus élevées »5. La position que revêt la littérature de voyage au sein de la deuxième moitié du XIXe siècle doit tenir compte des grandes transformations en cours en Europe occidentale sur le plan 1 B. D’Aurevilly, Voyageurs et romanciers, Paris, Lemerre, 1908, p. 100. 2 Ivi. 3 C. Gothot-Mersch, Pour une édition du Voyage en Orient de Flaubert, Bruxelles, Académie royale de langue et littérature françaises de Belgique, 1991. En ligne disponible sur : < www.arllfb.be >, date de la dernière consultation : le 26 juillet 2014. 4 Ibid., p. 2. 5 M. Du Camp, Souvenirs littéraires, Paris, Hachette, 1892, t. II, p. 9. Voir aussi Flaubert : un regard photographique contre la photographie, dans Marta Caraion, Pour fixer la trace. Photographie, littérature et voyage au milieu du XIXe siècle, Genève, Droz, 2003, p. 250-268. 6 matériel comme sur le plan idéologique. Du point de vue technique, deux innovations significatives ont sans aucun doute contribué à changer la manière de s’approcher au voyage : l’amélioration des conditions liées à des moyens de transport comme le bateau à vapeur et le train, d’une part ; d’autre part, l’emploi de plus en plus répandu de l’appareil photographique, suite à son invention de la part de Daguerre en 1839. Des pèlerinages culturels accomplis par quelques élus pendant les premières décennies du siècle, on passe à la création d’itinéraires réalisables par une quantité grandissante de personnes, l’accès au bateau et au train étant devenu possible grâce à la diminution des coûts de transport. C’est en accord avec