polyphonies de la Renaissance

samedi 8 et dimanche 9 mars 1997 cité de la musique François Gautier, président Brigitte Marger, directeur général polyphonies de la Renaissance

Ces quatre concerts consacrés aux polyphonies espagnoles, franco- flamandes et italiennes de la Renaissance et du premier Baroque témoignent tous d'une fascinante période de transition. A travers toutes ces œuvres pourtant si diverses, on voit apparaître peu à peu une brisure esthétique, une rupture de plus en plus radicale avec un sys­ tème de pensée et des traditions d'écriture hérités de la mentalité symbolique médiévale. Pour l'ensemble des artistes de cette époque, quel que soit leur champ d'étude ou leur nationalité, l'œuvre d'art ne doit plus, comme cela était la règle précédemment, représenter, par des proportions idéales dictées par la symbolique des nombres, cette réalité supérieure qui nous est cachée par les apparences trompeuses du monde. La Renaissance triomphante préfère se référer à Aristote pour énoncer une nouvelle fois cette règle qui va régir les trois siècles de création artistique à venir : l'art doit être à l'imitation de la nature. Les arts plas­ tiques se doivent ainsi d'être figuralistes, tandis que la musique va devenir le médium idéal pour évoquer toute la profondeur mysté­ rieuse de la nature humaine. « Peindre les passions », movere gli affetti : tels vont être les nouveaux mots d'ordre des compositeurs. Ainsi, la conception du « beau en musique », qui s'était orientée durant tout le Moyen-Age vers le contrepoint et la superposition de voix différentes pourtant équivalentes en intérêt, mais qui prônait aussi l'indissocia- bilité du traitement vocal et instrumental, changea progressivement : sa dimension symbolique s'estompa dès lors au profit d'une nouvelle dimension humaniste, pour ne pas dire humaine. Denis Morrier samedi 8 mars - 16h30 / amphithéâtre du musée

musique profane du Siècle d'or

Juan del Encina Triste Espana sin ventura - Antonilla es desposada Tan buen ganadico - Pues que tu, Reina del cielo

Francisco Guerrero Si tus penas no pruevo (texte Lope de Vega) Huyd, huyd - Todo quanto pudo dar

Juan Vásquez Con qué la lavaré - En la fuente del rosel Si no os uviera mirado

Mateo Romero « Maestro Capitán » A quién contaré mis quejas ? (texte Lope de Vega)

anonyme début XVIIe siècle En Belén están mis amores - Como suele el blanco zisne Soberana Maria

Juan Vásquez Soledad tengo de ti - O dulce contemplación (texte Garci- Sanchez) - De los álamos vengo, madre

La Colombina Maria Cristina Kiehr, soprano Claudio Cavina, alto Josep Benet, ténor et direction Josep Cabré, baryton

(concert sans entracte - durée : 55 minutes) polyphonies de la Renaissance

musique profane du Siècle d'or

Des points de vue économique, politique et artistique, le XVIe siècle espagnol mérite son qualificatif de « Siècle d'Or ». Régénérée par les richesses arrachées aux populations du Nouveau Monde, l'Espagne était alors devenue la nation la plus puissante d'Europe. Succédant aux Rois Catholiques et héritier des maisons de Castille, d'Aragon, de Bourgogne et de Habsbourg, Charles Quint mena cette domination à son apogée, en régnant sur un immense empire « où le soleil ne se couchait jamais ». Cette puissance et cette richesse favorisèrent tout naturellement les arts, comme en témoigne l'extraordinaire floraison de la production musicale, qu'elle soit religieuse ou profane. Parallèlement aux chefs- d'œuvre sacrés de Morales, Guerrero, puis Victoria, on vit en effet se développer un répertoire profane d'une grande qualité, révélant un art de cour raffiné, encore entaché de traditions courtoises médiévales. Le célèbre Juan del Encina (1469-1529) est le musicien et le poète le plus fréquemment rencontré dans les cancioneros espagnols (Palacio, Medinacelli...), ces précieux manuscrits constituant les principales sources du répertoire profane et courtisan de l'époque des Rois Catholiques. Reconnu comme l'un des écrivains les plus importants du Siècle d'or (il est considéré comme « l'inventeur » du théâtre hispanique), il est égale­ ment l'un des principaux maîtres du villancico, genre poético-musical le plus abondamment cultivé dans les Cancioneros avec les romances et les canciones. Ces trois formes relèvent encore de l'art de la glose médié­ vale, puisqu'elles reposent sur un principe de commentaire conceptuel et musical d'après un thème initial, donné ou proposé. L'inspiration poétique des villancicos de Juan del Encina est très variée : certains textes relèvent de la dévotion mariale (pues que tu, Reina del cielo), d'autres sont des poèmes de circonstance (comme celui évoquant la mort de l'infant Juan, en 1497, dans Triste España sin ventura). Certains appar­ tiennent au genre pastoral (Antonilla es desposada, Ta buen ganadico), un genre très prisé qui évoque l'illusion bucolique et transpose le monde obsédant de l'amour courtois dans le cadre prétendument naturel et paradisiaque des bergers.

Le renom de Francisco Guerrero (1528 - 1599) s'étendit au-delà des Pyrénées, puisqu'il fut abondamment publié, tant en Espagne qu'à Venise. Après avoir été chanteur à la Cathédrale de Séville, il étudia à Tolède auprès de Cristobal de Moralès, puis fut nommé suc-

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cessivement maître de chapelle des cathédrales de Jaen, de Malaga et enfin de Séville. Il légua un impressionnant corpus de près de cinq cents compositions, d'une grande variété d'écriture, passant du strict contrepoint en style josquinien à trois ou quatre voix, aux plus exu­ bérantes compositions polychorales, dans la mouvance moderne vénitienne. Ses villancicos furent publiés dans son recueil de Canciones y Villanescas espirituales. Ecrits en langue castillane, ils font pour la plupart référence à des sujets religieux (comme la rédemption pour Todo quando pudo dar) : ils suivent en cela l'évolution du genre, qui tend à devenir paraliturgique au cours du XVIe siècle. Leur style peut être défini par une dévotion douce et sereine, à rapprocher d'un certain mysticisme espagnol (celui de Sainte Thérèse d'Avila ou d'Ignace de Loyola) ainsi que Guerrero le rappela lui-même dans la préface d'un de ses livres : « Je n'ai jamais prétendu caresser les oreilles des per­ sonnes pieuses avec mes chansons, mais au contraire inciter leurs âmes à la contemplation dévote des mystères sacrés. » JuanVasquez (1510 - 1560), né à Badajoz, reçut sa première éduca­ tion musicale dans la cathédrale de cette ville, dont il devint Maestro di Capilla en 1545. En 1550, il part pour Séville et entre au service du gentilhomme Don Antonio de Zuñiga. S'il nous a légué une impor­ tante production religieuse, il excellait aux yeux de ses contempo­ rains dans le domaine profane. Il publia trois volumes de chansons, dont deux seulement nous sont intégralement parvenus, constitués aux trois quarts de villancicos. On y décèle une influence des formes ita­ liennes plus modernes, soulignée par la présence de nombreux madri- galismes. Certaines de ses oeuvres obtinrent une grande popularité, comme De los alamos vengo, Madre, qui fut absorbé par la tradition populaire espagnole, et inspira maints compositeurs (Manuel de Falla cite en effet cette mélodie dans le premier mouvement de son Concerto pour clavecin). Mateo Romero (1575 - 1647), né Mathieu Rosmarin dans les Flandres alors sous domination espagnole, partit à la mort de son père pour Madrid, pour entrer dans la Maîtrise de la Chapelle Royale. Il y gravit progressivement tous les échelons de la hiérarchie avant d'être nommé Maestro di Capilla en 1598, poste qu'il conservera jus­ qu'en 1534. Romero favorisa l'introduction du stile nuovo en Espagne, en particulier dans ses 53 villancicos où l'on décèle une influence du style madrigalesque italien. D. M.

notes de programme / 3 polyphonies de la Renaissance

Juan del Encina Pleure, pleure, car tu perdis celui qui devait t'exalter. Dans sa tendre jeunesse Triste Espana sin ventura, Dieu voulut te l'enlever. Todos te deven llorar, Despoblada d'alegria, para nunca en ti tornar. Antonilla es desposada hagotele Juan saber, Tormentos, penas, dolores Jur'a diez, no puede ser ! te vineron a poblar. Sembróte Dios de plazer No seas ten rebelado porque naciesse pesar. que yo la vi desposar y mucho de su cantar Hizote la mas dichosa vi el lugar regocijado. para mas te lastimar. Y a Toribio el desposado, Tus vitorias y triunfos vi atestado de plazer. ya se hovieron de pagar : Jur'a diez, no puede ser !

Llora, llora, pues perdiste A los grandes brinquejones quien te havia de ensalçar. que davan en el portal, En su tierna juventud nos encontrammos yo y Pascual, te lo quiso Dios llevar. por medio de los garzones.

Pauvre Espagne Comimos picatostones sans fortune, y diéronnos a beber, Tous doivent te pleurer, jur'a diez, no puede ser ! La joie t'a désertée, pour ne jamais retourner. Antoinette est épousée Jean te le fait savoir, Tourments, peines, douleurs Parbleu, cela ne se peut ! vinrent te peupler. Dieu sema en toi plaisir Ne sois pas si retourné pour que naquît regret. car je l'ai vu prendre époux et grand part de son chant Il te fit la plus heureuse j'ai vu l'endroit régaler. pour mieux te blesser. Et ceToribio l'épousé Tes victoires et tes triomphes j'ai vu enflé de plaisir. ont dû cher se payer : Parbleu, cela ne se peut !

4 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance

Face aux grandes secousses Un si bon p 'tit bétail, qu'ils donnaient au portail, surtout en tel val nous nous trouvâmes moi et Pascal, c'est plaisir de le garder. au milieu des amoureux. Bétail d'altitude et d'une telle caste, Nous mangeâmes des brochettes, très vite se gâte en mauvaise pâture. l'on nous donna à boire, Mais en bonne verdure, surtout en parbleu, cela ne se peut ! tel val, c'est plaisir de le garder.

Tan buen ganadico, Il est bon de garder cette chose pré­ y mas ganadico, y mas en tal valle, cieuse plazer es guardalle. qui, convoitée, finit par être dérobée. Bétail infaillible, surtout en tel val, Ganada d'altura y mas de tal casta, c'est plaisir de le garder. muy presto se gasta en mala pastura. Y en buena verdura, y más en tal valle, Berger qui s'enferme en val sûr, plazer es guardalle. les loups, j'te jure, le laissent en paix. Bétail de montagne, amené en tel val, Conviene guardalla la cosa preciosa c'est plaisir de le garder. qu'en ser codiciosa procuran hurtalla. Ganado sin falla, y màs en tal valle, Berger de bon gré toujours serais, plazer es guardalle. car tant de joie me donne ce troupeau que j'ai soin de ne jamais le quitter, Pastor que s'encierra en valle seguro, mais toujours le garder. los lobos te juro que no le den guera. Ganado de sierra, traspuesto en tal Pues que tu, valle, Reina del cielo, plazer es guardalle. tanto vales, da remedio a nuestros males. Pastor de buen grado yo siempre Tu que reinas con el Rey seria, de aquel reino celestial, pues tanta alegria me da este ganado tú lumbre de nuestra ley, que tengo cuidado de nunca dexalle, ley del linaje humanal : más siempre guardalle. pues para quitar el mal tanto vales, da remedio a nuestros males.

notes de programme | 5 polyphonies de la Renaissance

Tú, Virgen que mereciste toi qui est odeur d'odeurs, ser Madre de tal Senor, toi qui donnes gloire très certaine : tú que cuando le pariste si contre la mort très morte le pariste sin dolor, tu ne nous vaux, pues con nuestro Salvador il n'y a remède à nos maux. tanto vales, da remedio a nuestros males.

Tú que eres flor de las flores, tú que del cielo eres puerta, tú que eres olor de olores, tú que das gloria muy cierta : si de la muerte muy muerta no nos vales, no hay remedio en nuestro males.

Puisque toi, Reine des cieux, tu vaux tant, donne remède à nos maux. Toi qui règnes avec le Roi de ce règne céleste, toi lumière de notre loi, loi du lignage humain : puisque pour ôter le mal tu vaux tant, donne remède à nos maux.

Toi, Vierge qui mérita d'être Mère d'un tel Seigneur, toi qui en le mettant au monde le fit sans douleur, puisque avec notre Sauveur tu vaux tant, donne remède à nos maux.

Toi qui es fleur des fleurs toi qui du ciel es porte,

6 | cité de la musique samedi 8 mars - 20h / salle des concerts

le gothique franco-flamand

Nicolas Gombert Media vita, motet à 6 voix Je prens congie, chanson à 8 voix

Pierre de Manchicourt Reges terrae, motet à 6 voix

Matthias Pipelare Vrai Dieu d'amours, chanson à 4 voix entracte Antoine Brumel Messe « Et ecce terrae motus » à 12 voix

Paul Van Nevel, direction Huelgas Ensemble

Paul van Nevel et l'ensemble Huelgas sont ambassadeurs culturels de la Flandre et leurs concerts sont donnés sous les auspices du gouvernement flamand polyphonies de la Renaissance

le gothique franco-flamand

La vie fort aventureuse de Nicolas Gombert (c. 1495 - 1560) reste aujourd'hui encore emplie de zones d'ombres. Né probablement dans le village de La Gorgue, dans les Flandres méridionales, il aurait été l'élève de Josquin avant d'entrer en 1526 comme chanteur dans la Chapelle Impériale de Charles Quint. Il en gravit progressivement les échelons hiérarchiques pour atteindre le titre honorifique de Maître des Enfants de la Chapelle Impériale. Il semble cependant que Gombert ait été condamné aux galères après 1540 pour avoir violé un des enfants placés sous son autorité. Ayant obtenu le pardon de l'Empereur, Gombert revint ensuite finir ses jours à Tournai. Quelques 160 motets lui sont attribués, parmi lesquels Media Vita, au texte si sombre et dra­ matique. Ils forment la part la plus représentative de son style, révélant une expressivité mélodique et un souci d'intelligibilité du texte anti­ cipant sur beaucoup de préoccupations d'auteurs postérieurs : on ne s'étonnera donc pas que Monteverdi ait choisi une mélodie empruntée à un motet de Gombert (in illo Tempore) pour former le cantus firmus de sa messe à six voix publiée en 1610 (Sanctissime Missa senisVocibus...ac Vespere). La chanson à huit voix Je prens congie tient une position par­ ticulière dans la production profane de Gombert, qui compte plus de 70 chansons. Malgré son exceptionnelle ampleur polyphonique, c'est une composition intimiste fondée sur un subtil jeu contrapuntique d'imitations, dont le caractère nostalgique est accentué par une excep­ tionnelle cadence conclusive mineure. Le parcours de Pierre de Manchicourt (1510 -1564) peut être rap­ proché de celui de Mateo Romero, puisque leurs carrières respec­ tives les menèrent des Flandres à la cour d'Espagne. Manchicourt étudia à la Cathédrale d'Arras, puis œuvra successivement à Tours et à Tournai, où il fut nommé Maître de Chapelle en 1545. En 1559, il succéda à Nicolas Payen au poste de Maître de la Chapelle royale de Philippe II, à Madrid, poste qu'il conservera jusqu'à sa mort. L'examen chronologique des motets de Manchicourt fait apparaître une considérable évolution stylistique : au début de sa carrière, il demeure fidèle à des modèles déjà considérés comme archaïques, intégrant par la suite les innovations techniques apportées par Josquin (équilibre de texture, contrepoint imitatif rigoureux...), comme le révèle son motet à six voix Reges Terrae.

8 / cité de la musique polyphonies ds la Renaissance

Matthias Pipelare (c. 1450 - c. 1515) est également flamand d'origine. Il a travaillé à Anvers avant de devenir maître des chœurs à Hertogenbosch, la capitale du Nord-Brabant. Sa renommée fut telle qu'il est encore mentionné, dans le traité Ornitoparchus, traduit par John Dowland en 1609, parmi les auteurs dont les œuvres « coulent de la vrai fontaine de l'Art ». Sa chanson à quatre voix Vrai Dieu d'Amour, qui nous est parvenue dans deux versions, fait apparaître un style homophonique moderne, proche de celui de Pierre de la Rue. Le joyau du programme proposé par Paul van Nevel est sans conteste l'impressionnante Messe à 12 voix « Et ecce Terrae motus » d'Antoine Brumel (c. 1460 - ap 1510). Né à Chartres, il œuvra tout d'abord dans la somptueuse cathédrale de sa ville natale, avant d'être appelé à Genève, puis à Notre-Dame de Paris. Il partit ensuite pour l'Italie, comme Maestro di Capella à la cour d'Alfonso I d'Este à Ferrare : une cour res­ tée fameuse pour l'intérêt que la dynastie d'Este porta à la musique moderne tout au long du XVIe siècle. C'est pour Alfonso I que Brumel composa sa Messe à 12 voix, qui compte parmi les compositions les plus exceptionnelles du répertoire franco-flamand. Sa conception poly­ phonique reste sans équivalent pour l'époque, puisqu'elle fait appel à quatre groupes de trois voix égales, avec pour « axe névralgique » les six voix médianes. Techniquement, les exigences vocales sont extrêmes à toutes les voix, chacune d'entre elles participant d'une manière égale au discours polyphonique. Celui-ci exploite un cantus firmus, une mélo­ die de référence empruntée au début de l'antienne pascale « Et ecce Terrae motus », qui vient irriguer toute la composition. Cette messe dut marquer les esprits, puisque Roland de Lassus la fit exécuter à Munich, plus de cinquante années après la mort du compositeur. Il copia de sa propre main la partition, précisant en marge les noms de chaque chanteur requis pour l'occasion, lui-même assurant la partie de Tenor secundus : un hommage des plus révélateurs ! D.M.

notes de programme | 9 polyphonies de la Renaissance

Nicolas Gombert Pierre de Manchicourt

Media vita Reges terrae Media vita in morte sumus ; Reges terrae congregati sunt quem quaerimus adiutorem, nisi te Convenerunt in unum dicentes : Domine ? « Eamus in Judeam et inquiramus Qui pro peccatis nostris iuste irasceris. ubi est qui natus est Rex Magnus Sancte Deus, Sancte fortis, Sancte et Cuius stellam vidimus. Alleluia. » misericors Salvator noster, amarae morti ne tra- Et venientes invenerunt puerum das nos. Cum Maria matre eius Et procedentes adoraverunt eum Au milieu de la vie nous sommes Offerentes ei aurum, thus et myr- dans la mort ; rham. Alleluia. Qui invoquons-nous pour nous aider, sinon toi, Seigneur ? Toi, qui t'irrites à juste raison de nos Matthias Pipelare péchés. Dieu Saint, Sainte Puissance, notre Vray Dieu d'amours Saint et Miséricordieux Sauveur, Vray dieu d'amours confortez Ne nous livre pas à la mort amère. l'amoureux traduction Jacques Fournier Qui nuit et jour vit en tresgrant martir Pour la belle au gent corps et gracieux Qui ne me veult de joye ou jeux nantir Je prens congie Pour vray vous dis sans en rien mentir Si vous requiers que j'aye allegement Je prens congie de mes amours Joye et soulas au lieu de grief tour­ desquelles me fault partir. ment Hellas ! nul ne me vient donner secours Donnés scours ne soyés esgaree dont dois plourer et bien gémir, Car j'ay douleurs plains de gemisse­ si suis ie mis en plus décent martire. ment Je dis adieu a mes amours Dueil angoisseux rage desmesuree soudainement men voye morir. S'il advenoit que fusse il heureux Qu'à mon désir peusisse parvenir Oncques amant ne fust si vertueux S'amour vouloit à mon faict convenir Mais il me faict angoisse soustenir

10 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance

N'avoir ne puis repos aulcunement Gloria Pour la belle qui me point ardamment Gloria in excelsis Deo, Et enflambit jouant a desperee et in terra pax Pour elle j'ay desconfort asprement hominibus bonae voluntatis. Dueil angoisseux rage desmesuree Laudamus te, benedicimus te, adoramus te, glorifcamus te. Son doulx regard tresplaisant et Gratias agimus tibi joyeux propter magnam gloriam tuam, Et son gent corps me font grant des­ Domine Deus, Rex caelestis, plaisir Deus, Pater omnipotens, Domine Fili Quant je la voys je suis assez songneux unigenite, Jesu Christe. De l'honnourer pour luy faire plaisir Puis la servy quant j'ay temps et loisir Domine Deus, Agnus Dei, Je vueil mais suis sans quelque esba- Filius Patris, tement Triste pensif dolent entierement qui tollis peccata mundi Qui me point fort c'est dure destinee miserere nobis, O dieu d'amour ostés moy briefve­ suscipe deprecationem nostram. ment Dueil angoisseux rage desmesuree Qui sedes ad dexteram Patris, miserere nobis, Prince d'amours je requiers humble­ quoniam tu solus sanctus, ment tu solus Dominus, Qu'on voit priant que ma tres destree tu solus altissimus, Jesu Christe. Vueille enchasser de moy hastivement Dueil angoisseux rage desmesuree. Cum sancto spiritu in gloria Dei Patris. Amen. Antoine Brumel Credo Messe « Et ecce terrae Credo inunum Deum, motus » Patrem omnipotentem, factorem caeli et terae, Kyrie visibilium omnium Kyrie eleison. et invisibilium. Christe eleison. Kyrie eleison. Et in unum Dominum, Jesum Christum,

notes de programme | 11 polyphonies de la Renaissance

Filium Dei unigenitum, Confiteor unum baptisma et ex Patre natum in remissionem peccatorum, ante omnia saecula, et expecto resurrectionem mortuo- Deum de Deo, lumen de lumine, rum Deum verum de Deo vero, et vitam venturi saeculi. genitum non factum, Amen. consubstantialem Patri, per quem omnia facta sunt, Sanctus qui propter nos homines Sanctus, sanctus, sanctus et propter nostram salutem Dominus Deus Sabaoth ! descendit de caelis. Pleni sunt caeli et terra Et incarnatus est de Spirito Sancto gloria tua. ex Maria virgine, et homo factus est. Hosanna in excelsis.

Crucifixus etiam pro nobis Benedictus sub Pontio Pilato, qui venit in nomine Domini. passus et sepultus est, et resurrexit tertia die Hosanna in excelsis. secundum scripturas, et ascendit in caelum, Agnus Dei sedet ad dexteram Patris. Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, miserere nobis ;

Et iterum venturus est cum gloria Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, judicare vivos et mortuos, miserere nobis ! cujus regni non erit finis. Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, Et in Spiritum Sanctum, dona nobis pacem ! Dominum et vivificantem, qui ex Patre Filioque procedit, Missa « Et ecce terrae motus » qui cum Patre et Filio simul adoratur et conglorificatur, Kyrie Seigneur, prends pitié. qui locutus est per prophetas, O Christ, prends pitié. et unam Sanctam Catholicam Seigneur, prends pitié. et Apostolicam ecclesiam.

12 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance

Gloria le Fils unique de Dieu, Gloire à Dieu, au plus haut des cieux, né du Père et paix sur la terre avant tous les siècles ; aux hommes qu'il aime. il est Dieu, né de Dieu, lumière, né Nous te louons, nous te bénissons, de la lumière, nous t'adorons, nous te glorifions. vrai Dieu, né du vrai Dieu, Nous te rendons grâce, engendré non pas créé, pour ton immense gloire, de même nature que le Père Seigneur Dieu, Roi du ciel, et par lui tout a été fait. Dieu le Père tout-puissant, Pour nous les hommes, Seigneur, Fils unique, Jésus-Christ. et pour notre salut, il descendit du ciel. Seigneur Dieu, Agneau de dieu, le Fils du Père, Par l'Esprit Saint, il a pris chair de la Vierge Marie, toi qui enlèves le péché du monde, et s'est fait homme. prends pitié de nous, reçois notre prière ; Crucifié pour nous sous Ponce Pilate, toi qui est assis à la droite du Père, il souffrit sa passion et fut mis au prends pitié de nous. tombeau. Car toi seul es saint, Il ressuscita le troisième jour, toi seul es Seigneur, conformément aux Ecritures, toi seul es le Très-Haut : Jésus-Christ. et il monta au ciel ; il est assis à droite du Père. Avec le Saint-Esprit dans la gloire de Dieu le Père. E reviendra dans la gloire, Amen. pour juger les vivants et les morts ; et son règne n'aura pas de fin. Credo Je crois en un seul Dieu, Je crois en l'Esprit Saint, le Père tout-puissant, qui est Seigneur et qui donne la vie ; créateur du ciel et de la terre, il procède du Père et du Fils ; de l'univers visible avec le Père et le fils, et invisible. il reçoit même adoration et même gloire; Je crois en un seul Seigneur, Jésus- il a parlé par les prophètes. Christ, Je crois en l'Eglise,

notes de programme | 13 polyphonies de la Renaissance une, sainte, catholique et apostolique.

Je reconnais un seul baptême pour le pardon des péchés. J'attends la résurrection des morts, et la vie du monde à venir. Amen.

Sanctus Saint, saint, saint, le Seigneur, Dieu de l'univers !

Le ciel et la terre sont remplis de ta gloire.

Hosanna au plus haut des cieux.

Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur.

Hosanna au plus haut des cieux.

Agnus Dei Agneau de Dieu, qui enlèves le péché du monde, prends pitié de nous ! Agneau de Dieu, qui enlèves le péché du monde, prends pitié de nous ! Agneau de Dieu, qui enlèves le péché du monde, donne-nous la paix !

14 / cité de la musique dimanche 9 mars - 15h / amphithéâtre du musée

Claudio Monteverdi Non m'è grave il morire (Secondo libro) La bocca onde l'asprissime parole (Secondo libro) Cruda Amarilli (Quinto libro) 0 Mirtillo (Quinto libro)

Luca Marenzio Cruda Amarilli Vezzosi augelli Dolorosi martir

Girolamo Frescobaldi Giunt'è pur Lidia il mio (prima parte) Ecco l'hora (seconda parte) Lidia ti lasso (terza parte) Fortunata per me felice aurora

Luzzasco Luzzaschi Il tene mie querele Il vedervi e lasciarvi 1 tene a volo Ahi cruda sorte mia

Concerto Italiano : Rinaldo Alessandrini, direction Rossana Bertini, Elisa Franzetti, sopranos Claudio Cavina, alto Sandro Naglia, Giuseppe Maletto, ténors Sergio Foresti, basse

(concert sans entracte - durée : 40 minutes) polyphonies de la Renaissance

maniérisme musical des cours de Ferrare et de Mantoue

Dans la seconde moitié du XVIe siècle, le genre du , devenu « laboratoire expérimental » de l'expression musicale, entre rapide­ ment en contradiction avec ses propres ambitions. Les auteurs ita­ liens, en particulier ceux appelés par les ducs d'Este à la cour de Ferrare (Vicentino, Marenzio, Luzzaschi, Gesualdo...) ont vite com­ pris qu'une exécution polyphonique, avec plusieurs chanteurs décla­ mant ensemble, ne pouvait que nuire à l'intelligibilité du texte. De plus, « l'expression des passions » se voit compromise par la lourdeur de l'effectif, la complexité de l'écriture musicale et les perpétuels entre­ lacs des voix : comment rendre crédible la plainte d'un amant, telle celle du madrigal de Luca Marenzio (c. 1553 - 1599) Cruda Amarilli, lorsque cinq chanteurs sont présents pour l'énoncer ? Une première réponse semble être trouvée dans la mise en évidence d'une voix pré­ dominante, en général le soprano. Ainsi, entre le 1er Livre et le IXe Livre de Madrigaux de Marenzio, on peut remarquer que la fonction de la partie de basse évolue considérablement : elle ne participe plus au discours contrapuntique au même titre que les autres voix. Elle est désormais « fonctionnelle » et a pour tâche principale de soutenir et de libérer les voix supérieures, auxquelles sont confiées les fonctions mélodiques et expressives principales. C'est là le premier pas vers la polarisation du discours polyphonique autour du couple dessus/basse, ce principe d'écriture caractéristique du langage tonal, et plus parti­ culièrement du début de l'ère baroque. Cette réflexion fut encore menée plus loin par (c. 1545-1607), un des musiciens attachés à la cour de Ferrare, en par­ ticulier sous le règne du dernier duc d'Este, Alfonso II. Ce dernier était un grand amateur de musique, et avait appelé à son service - outre Luzzaschi - trois chanteuses virtuoses (Laura Peperara, Lucrezia Bendido et Tarquinia d'Arco) pour former avec quelques instru­ mentistes un concerto privé. Celui-ci donnait des concerts « secrets » tous les vendredis, dans la salle des miroirs du palais de Ferrare, aux­ quels seuls la famille d'Este et quelques invités privilégiés pouvaient assister. Ces concerts de musica reservata impressionnèrent forte­ ment tous ceux qui purent les entendre, tant par la hardiesse des

16 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance musiques « d'avant-garde » qui y étaient exécutées que par l'épous- touflante maîtrise technique des chanteuses et des instrumentistes. Luzzaschi publia sept livres de madrigaux à cinq voix, au style très par­ ticulier, que certains musicologues qualifient de « maniériste » : la partie de basse y est nettement fonctionnelle, le contrepoint hardi (en particulier grâce à l'emploi du chromatisme), et l'expression du texte parfois aux limites de l'emphase. Ce style expressionniste et moderne marqua fortement les auteurs italiens qui fréquentèrent la cour des Este, et en premier lieu Don , qui avait épousé en seconde noce une fille du Duc de Ferrare. La cité de Ferrare vit naître Girolamo Frescobaldi (1583-1643), auteur passé à la postérité pour avoir livré les monuments fonda­ teurs de la littérature pour clavier. Son premier recueil fut pourtant un livre de 19 madrigaux à cinq voix (Anvers, 1608), composés sans doute lors du séjour du compositeur à Bruxelles à la fin de l'année pré­ cédente. Ils présentent une influence assez évidente du style manié­ riste forgé par les maîtres ferrarais. C'est Claudio Monteverdi (1567-1643) qui, dans ses huit livres de madrigaux, tira les ultimes conséquences de toutes les expérimentations de ses prédécesseurs. Son Deuxième Livre (1590) contient vingt-et- une pièces, dont dix exploitent des poèmes deTorquatoTasso (1544- 1595), le « poète maudit » auteur du plus fameux récit héroïque du XVIe siècle italien, la Gerusalemme liberata (1580). Dans ce livre, l'écri­ ture contrapuntique se fait de plus en plus hardie (fulgurants croise­ ments vocaux de La Bocca Onde l'asprissime parole) et révèle un souci de renouvellement de la structure par le jeu de répétitions et de retours (Non m'è grave il morirè). Le Veme livre de Madrigaux (1605) inaugure la « nouvelle manière » d'écrire de Monteverdi, ce que ce dernier nomme lui-même sa « seconda prattica ». La deuxième partie du recueil fait apparaître pour la première fois une partie de basse continue, tandis que la première s'ouvre par Cruda Amarilli et O Mirtillo, les deux madrigaux qui ont déchaîné la fameuse polémique avec le chanoine Artusi. Monteverdi justifia les licences qu'il avait prises avec les règles du contrepoint par les exigences impérieuses de l'expression : une expres­ sion d'une profondeur et d'une justesse dramatique qui paraît aujour­ d'hui encore d'actualité. D. M.

notes de programme | 17 polyphonies de la Renaissance

Claudio Monteverdi

Non m'è grave il morire, Mourir ne me pèse point, ma bien- Donna, per aquetar vostro desire, aimée, car en mourant je comblerai vos désirs ;

Anzi il viver m'annoia, vivre au contraire m'ennuie, Sapendo esser voler vostro ch'io moia. sachant que vous voulez ma mort.

Ben morrei più contento, Mais je mourrais heureux, S'io fossi inanzi a voi di vita spento, si, étendu sans vie devant vous,

E vi vedessi a sorte je pouvais voir par bonheur Lagrimar per pietà de la mia morte. des larmes de pitié sur votre visage Bartolomeo Gottifredi

La bocca onde l'asprissime parole La bouche, qui souvent prononçait Solean uscir, ch'ir mi facean dolente, des mots acerbes, me menait sur Vie più di quante mai fur sotto il sole, les chemins les plus douloureux qu'ait Or nutre l'alma mia soavemente éclairé le soleil, D'odor di fresche rose e di vïole à présent elle nourrit mon âme des Cui cede ogn'altro che l'Arabia délicieux sente; parfums de fraîches roses et E d'ambrosia e di nettare si pasce, de violettes, Ché tra le perl'e i bei rubini nasce. plus suaves que ceux d'Arabie ; Ercole Bentivoglio elle vit de l'ambroisie et du nectar qui naît parmi les perles et les plus beaux rubis

Cruda Amarilli, che col nome ancora, Cruelle Amaryllis, qui par ton nom d'amar, ahi lasso ! amaramente inse- encore enseignes, gni; hélas, d'aimer l'amer tourment ; Amarilli, del candido ligustro Amaryllis, et plus blanche et plus belle più candida e più bella, que n'est le blanc troène, ma de l'aspido sordo mais plus que la sourde vipère e più sorda e più fera e più fugace : et sourde et cruelle et fugace ; poi che col dir t'offendo, puisqu'en parlant te fais offense,

18 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance i' mi morrò tacento. je mourrais en silence. Gian Battista Guarini - Il Pastor Fido

O Mirtillo, Mirtillo, anima mia, Ô Myrtil, Myrtil, toi que j'aime, se vedessi qui dentro si tu voyais au fond de moi corne sta il cor di questa comme il languit, le cœur de celle che chiami crudelissima Amarilli, que tu nommes cruelle Amaryllis, so ben che tu di lei pour elle, je sais, tu montrerais quella pietà, che da lei chiedi, avresti. cette pitié que d'elle tu réclames. Oh anime in amor troppo infelici ! Hélas, dans leurs amours cœurs trop Che giova a te, cor mio, l'esser amato ? infortunés ! Che giova a me l'aver si caro amante ? Que te sers, ô mon cœur, d'être aimé Perché, crudo destino, de la sorte ? ne disunisci tu, s'Amor ne strigne ? Et que me sert, à moi, un amant si e tu, perché ne stringi, chéri? se ne parte il destin, perfido Amore ? Pourquoi, destin cruel, Gian Battista Guarini - Il Pastor Fido veux-tu nous désunir lorsqu'Amour nous rassemble ? Et toi, pourquoi nous rassembler, perfide Amour, si le sort nous sépare ?

Luca Marenzio

Cruda Amarilli, che col nome ancora, Cruelle Amaryllis, qui par ton nom d'amar, ahi lasso ! amaramente encore enseignes, hélas, d'aimer insegni; l'amer tourment ; Amarilli, del candido ligustro Amaryllis, et plus blanche et plus più candida e più bella, belle ma de l'aspido sordo que n'est le blanc troène, e più sorda e più fera e più fugace : mais plus que la sourde vipère poi che col dir t'offendo, et sourde et cruelle et fugace ; i' mi morrò tacento. puisqu'en parlant te fais offense, Gian Battista Guarini - Il Pastor Fido je mourrais en silence.

notes de programme | 19 polyphonies de la Renaissance

Vezzosi augelli, in fra le verdi fronde, Les charmants oiselets parmi les temprano a prova lascivette note ; verts bocages mormora l'aura e fa le foglie e l'onde font entendre à l'envi leurs délicieux garrir, ché variamente ella percote ; concerts ; quando taccion gl'augelli alto ris- la brise en murmurant fait chanter le ponde, feuillage quando cantan gl'augei piu lieve et l'onde, en des accents que son scote : souffle module ; sia caso od arte, hor accompagna ed elle répond plus haut quand les hora oiseaux se taisent, alterna i versilor, la music'ôra. et murmure plus douce au bruit de Torquato Tasso - Gerusalemme liberata leurs concerts : est-ce science ou hasard ? Tantôt elle accompagne, tantôt chante pour eux, la brise musicienne.

Girolamo Frescobaldi

Giuntè pur Lidia il mio (prima parte) Le temps est venu pour toi, Lydie, Non so se deggia dire, de partir, ou bien de mourir, O partire, o morire. je ne sais comment il vaudrait mieux Lasso, dirò ben io, dire. Che morte è la partita, Hélas, en réalité, je dirai Poichè, iin lasciando te, lascio la vita. que ce départ est égal à ma mort, car en m'éloignant de toi, je quitte la vie.

Ecco l'hora, ecco ch'io (seconda parte) Voici l'heure, voici l'instant, A pena il posso dire : où je puis dire, péniblement : « Son costretto a partire. « Je suis obligé de partir. Dammi, Lidia, cor mio, Donne-moi, chère Lydie, mon trésor, L'ultimo bacio ormai, l'ultimo le dernier baiser désormais, le der­ addio. » nier adieu. » Cosi dico in partendo : Voilà ce que je dis tout en partant : Ella tace piangendo, elle se tait en pleurant, Ella piange et io piango, elle pleure, et moi de même,

20 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance

Elle vien meco, et io seco rimango. elle se rapproche de moi, et je reste auprès d'elle. Lidia, ti lasso, ahi lasso, (terza parte) Ma chère Lydie, je te quitte, hélas ! Ma in pegno il cor ti lasso. Mais je te laisse mon cœur en gage. Ma, se nel cor scolpita Et pourtant, ô bonheur de ma vie, Sei tu dolce mia vita, si tu es gravée au fond de mon cœur, Corne senza il cor mio comment pourrais-je donc vivre Viver dunque poss'io ? privé de ce même cœur ? O Dio, se tu potessi Ô mon Dieu, si seulement tu pouvais Meco venire, o ch'io teco mi stessi. venir Che, se'l mio cor tu sei, auprès de moi, et que je pouvais rester Meco il mio core havrei. auprès de toi ! Marino - Lira II Car s'il est vrai que tu es mon cœur, alors, ce cœur, je l'aurais toujours auprès de moi.

Fortunata per me felice aurora, Bienheureuse, ravissante aurore, Fortunata per me, ch'apri quel giorno bienheureuse pour moi, car elle a Ch'io aspersi in voi quest'occi, idolo inauguré le jour mio. où j'ai porté sur vous mon premier Ma più felice l'ora regard d'amour. Che voi, ch'al mio bel foco riardeste, Mais plus heureux encore est le "Si, ch'io t'amo" diceste. moment Felicissima vista, arder beato, où vous avez répondu à l'ardeur de la Se pur dal ciel m'è dato flamme, Che non discordi mai quel si del core, en disant "Oui, je t'aime". Ma del cor mio viva eterno il vostro Vision de bonheur, sentiment de joie amore. ardente, Marino - Lira II si toutefois le ciel m'accorde de ne jamais voir s'éloigner ce "oui" surgi de votre cœur, et que votre amour vive éternelle­ ment à travers mon cœur.

notes de programme / 21 dimanche 9 mars - 1u6h30 / salle des concerts

portrait de l'Italie de la Renaissance

le trecento : l'esprit de l'aventure

Matheus de Perusio Ave sancta mundi salus

anonyme du XIVe siècle Cum martelli

Matheus de Sancto Johanne Science n 'a nul annemi

le jugement dernier

Vincenzo Ruffo Sequenza de morti (Falso bordone)

anonymes du XVe siècle Signor per la tua fe - Alma che scarca

l'héritage de Pétrarque

Giaches De Wert Mia Benignuea fortuna

Spirito l'Hoste da Reggio

Dolc'ire e dolci sdegni

Nicolà Vicentino L'aura che'l verde lauro l'humanisme italien

Cipriano de Rore Calami sonum ferentes Se ben il duol

Pomponio Nenna La mia doglia s'avanza

Paul Van Nevel, direction Huelgas Ensemble

concert présenté par Jean-Pierre Derrien

(concert sans entracte - durée : I heure 10 minutes)

Paul van Nevel et l'ensemble Huelgas sont ambassadeurs culturels de la Flandre et leurs concerts sont donnés sous les auspices du gouvernement flamand polyphonies de la Renaissance

portrait de l'Italie de la Renaissance

Le portrait musical proposé par Paul van Nevel semble esquisser les traits d'une Italie à deux visages. La musique italienne des origines, celle du Trecento (le XIVe siècle) et des Laude, côtoie ici l'univers du madrigal, ce genre emblématique de la Renaissance triomphante. Le Trecento vit la première floraison musicale de l'Italie. En effet, il ne nous est pratiquement pas parvenu de musique polyphonique ita­ lienne antérieure à cette époque. Le premier genre spécifiquement italien qui se soit développé semble être la lauda. Il s'agit de musiques de caractère souvent populaire, à une puis à plusieurs voix, exploi­ tant des textes spirituels ou de dévotions, qui étaient chantées à l'oc­ casion des confréries de laudesi, appelés aussi Disciplinati di Gesu Cristo. Ces confréries, créées en 1258 à Perugia par Ranieri Fasani, rassem­ blaient de simples artisans, et s'étaient structurées à la manière des « guildes » allemandes. Alma che scarca, composition strophique à trois voix, incarne à la perfection la beauté simple et hiératique des pre­ mières laudes. Celles-ci, comme maints chants de prosélytisme inci­ tant à la conversion, abondent en images macabres ou funèbres et offrent une des premières déclinaisons musicales du thème des Vanités : en témoignent Alma che scarca, chant de deuil destiné à l'enterrement d'un membre d'une confrérie florentine, et la Sequenza de Morti qui dépeint le jugement dernier dans le style du faux-bourdon (polypho­ nie homosyllabique fondée sur des accords parfaits parallèles). On opposera à ces humbles laudes les compositions plus hardies de la fin du Trecento, qui relèvent de cet art raffiné et quelque peu céré­ bral de l'Ars subtilior (une terminologie forgée au XXe siècle par la musicologue Ursula Gunther). Ces œuvres, telle l' Ave sancta Mundi Salus de Mattheus da Perusio, révèlent une extraordinaire complexité rythmique, et abondent en énigmes et autres gageures composition- nelles. Ce sont là les derniers témoignages de ce goût typiquement médiéval pour l'abstraction et la spéculation intellectuelle. Les six madrigaux qui concluent le programme relèvent d'une toute autre esthétique. Durant la seconde moitié du XVIe siècle, la poésie subtile deTasso, de Guarini, et l'attachement fidèle à celle de Pétrarque (dont témoignent les trois compositions de Giaches de Wert, Spirto l'Hoste da Reggio et Nicola Vicentino), furent à l'origine du renouveau du madrigal, genre apparu au Trecento et tombé en désuétude au XVe

24 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance siècle. C'est à l'origine une composition polyphonique, à quatre ou cinq voix, alternant des sections d'écriture harmonique où la décla­ mation simultanée du texte à toutes les voix est privilégiée pour une meilleure compréhension du sens des mots, et des sections contra- puntiques où le dialogue des voix rend le texte difficilement intelligible. Le genre du madrigal devint rapidement un véritable « laboratoire expérimental » pour la recherche (parfois scientifique, comme en témoignent les traités et les œuvres deVincentino), d'une « nouvelle musique », laquelle se voit attribuer une nouvelle fonction, inconce­ vable au Moyen-Age : exprimer les sentiments humains, et surtout émouvoir. Cette quête de l'expression fit considérer tout naturellement la musique comme un véritable langage. Articulée sur le modèle des langues humaines, la musique envisageait de dépeindre chaque sub­ tilité d'un texte au moyen d'effets sonores devenus très vite stéréo­ typés : les fameux « figuralismes » (ou « madrigalisme »). Cette nouvelle volonté d'illustration sonore des mots déboucha sur la création d'une véritable « rhétorique musicale ». Les six œuvres proposées sont révé­ latrices de cette évolution du genre : on peut ainsi opposer les com­ positions de facture « classique » de Cyprien de Rore (1511-1565), tels son madrigal Se ben il duol et Calami Sonum ferentes (qui traite du conflit dramatique entre le duc Ercole II de Ferrare et son fils) à la composition plus tardive, emplie de rudes chromatismes, de Pomponio Nenna (c. 1550-1613). D. M.

notes de programme | 25 polyphonies de la Renaissance

Matheus de Perusio Tu tu tu... fatavimus se no. Ave sancta mundi salus Tu tu tu... Ave sancta mundi salus in fra Gubio e Agmone nulo panis vivus immortalis host'é'gnaro sacrosancta hostia. che per lo nostro marillo chi faççono Ave cibus spiritalis bon chalor. cibus bonus et regalis celi pandens hostia. Tu es panis angelorum Matheus de Sancto Johanne factus cibus viatorum ducens ad celestia. Science n 'a nul annemi Tu es panis filiorum Science n'a nul annemi mundi vita spes reorum Se non ceulz qui sont ignorant. donans vera gaudia. Envieuz sont, je le vous di, Duc nos tecum ad superna Souvent sur ceulz qui sont sachant tu virtutum o pincerna Et vont mélodie abatant ubi pax et gloria. Tout voulentiers per leur haut cry. Qui plus haut crie : « hay avant, » Amen. C'est trop bien fait, disons ainsy.

ténor : Ilz n'ont mesure ne demi, Agnus Dei qui tollis peccata mundi, Ny ton n'a on (ne) peu ne grant, miserere nobis Ne proportion ; et je qui Agnus Dei qui tollis peccata mundi, Vois leur haut cry bien escoutant miserere nobis Dy aux compaignons maintenant : Agnus Dei qui tollis peccata mundi, Escoutés, seignours, je vous pri ; dona nobis pacem. Qui plus haut crie : « Hay avant, » (C'est trop bien fait, disons ainsy).

anonyme du XIVe siècle Vincenzo Ruffo Cum Martelli La mantachassera tu Sequenza de morti Cum martelli incrudena tu tu tu lo Giorno orrendo ch'in faville primo farà disfarà campagne e ville Lo servo ti ti farà e la trove spacca. scrive'l Re con le Sibille tu tu tu lo primo farà. Aime che gran terrore

26 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance darà'l Guidice'n furore Signor la vita haime tu ponesti per me giudicando con rigore. Onde la mia per ciò Ti presento e ti do Racorà l'orribile Tromba Et o bella... tutti i morti d'ogni tomba al Giudizio con gran romba Signor habbi pieta di chi l'alma ti da Stupirà Morte e Natura Che contento non ho se da te lontan nel resurger Creatura sto dall' antica sepoltura Et o bella... O tremenda Maestade che l'uom salvi per bontade Et de quest'hora che Io diedi l'alma a salva me per tua pietade te Signor altro non fo Che sospirando vo Tribunal di punizione Et o bella... dona à me remissione nanzi al di', di far ragione Quando sara quel di ch'io partiro di Maddalena tu assolvesti qui al Ladron pietate avesti Quanto giubilero Quando a te ne et à me speranza desti verro Condennati i maladetti Et o bella... et al fuoco eterno stretti chiama me fra' Benedetti Ch'io non sia all'eterno danno Giaches De Wert condennat'in tanto affanno quando i morti surgeranno Mia Benigna fortuna et in quel giorno angoscioso Mia benigna fortuna e '1 viver lieto, O Giesù giusto e pietoso i chiari giorni et le tranquille notti dona à lor pace e riposo. e i soavi sospiri e '1 dolce stile che solea resonare in versi e 'n rime, vòlti subitamente in doglia e'n anonymes du XVe siècle pianto, odiar vita mi fanno et bramar morte. Signor per la tua fe Signor per la tua fe morir voglio per te Crudele, acerba, inexorabil Morte, E se questo farò piu beato sarò cagion mi dài di mai non esser lieto, Et o bella faccia d'oro che'n cielo ma di menar tutta mia vita in pianto, contemplerò e i giorni oscuri et le dogliose notti. Quando ch'io vederò tua divina mercè I mei gravi sospir' non vanno in rime, e '1 mio duro martir vince ogni stile.

notes de programme | 27 polyphonies de la Renaissance

Spirito l'Hoste da Reggio sanno, senza l'honeste sue dolci parole. Dolc'ire e dolci sdegni Dolci ire, dolci sdegni et dolci paci, dolce mal, dolce affanno et dolce La brise peso, dont l'haleine délicieuse dolce parlare, et dolcemente inteso, agite le vert laurier et l'or de la belle or di dolce òra, or pien di dolci faci : chevelure fait, par ses jeux gracieux et nou­ aima, non ti lagnar, ma soffra et taci, veaux, et tempra il dolce amaro, che n'à émigrer les âmes de leurs corps. offeso, col dolce honor che d'amar quella ai C'est une rose candide éclose parmi preso de cruelles épines ! a cui io dissi :Tu sola mi piaci. Quand trouvera-t-on sa pareille en ce monde ? C'est la gloire de notre âge ! O vivant Nicola Vicentino Jupiter, je t'en supplie, ordonne mon trépas Uaura che 'I verde lauro avant le sien ; L'aura che'l verde lauro e l'aureo crine Afin que je ne voie pas cette grande soavemente sospirando move, et publique calamité, fa con sue viste leggiadrette e nove et le monde privé de son soleil, l'anime da' lor corpi pellegrine. ainsi que mes yeux qui n'ont pas Candida rïsa nata in dure spine, d'autre lumière ; quando fia chi sua pari al mondo trove, Et mon âme, qui repousse toute autre Gloria di nostra etate ? O vivo Giove, pensée, manda, prego, il mio in prima che'l et mes oreilles qui ne savent écouter suo fine ; que ses chastes et douces paroles. si ch'io non veggia il gran publico danno, e'1 mondo remaner senza '1 suo sole, Cipriano de Rore né li occhi miei, che luce altra non hanno, Calami sonum ferentes né l'alma che pensar d'altro non vile, Calami sonum ferentes siculo levem né gli oreccchie, ch'udir altro non numero

28 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance

Non pellunt gemitus pectore ab imo Che mi face manchar forza e ardi- nimium graves mento Nec constrepente sunt ab Aufido Tal che per tener chiuso il mio tor- revulsi mento Musa, quae nemus incolis Sirmionis amor a doppio mi distrugge e coce. amœnum, Reddita qua lenis Lesbia dura fuit. Ben voi a più di mille segni Me adi recessu principis mei tristem, Conoscerlo potete e aita darmi Musa, deliciae tui Catulli, Quantunque taccia l'aspra doglia mia. Dulce tristibus bis tuum iunge car- men avenis. Però non seno più che Circe ria Cedano l'ire alla pietà e gli sdegni Les chalumeaux produi­ E piacciavi di duol si acerbo trarmi. sant une légère musique Les chalumeaux produisant une légère musique de rythme sicilien Pomponio Nenna Ne peuvent pas chasser le lourd cha­ grin du fond de mon coeur. La mia doglia s'avanza Pas plus que ne peut l'emporter dans La mia doglia s'avanza ses flots le mugissant Aufidus, Quanto più la speranza Retourne là où la douce Lesbia fut Ohimé, vien meno ; insensible. Il desio si rinfranca Reviens à moi, triste que je suis du Quant'ella manca, départ de mon prince. E ne l'aspro martire Muse, toi qui fais les délices de ton Il soverchio dolor non fa morire. Catulle, Joins ton suave chant aux tristes sons Ma douleur ne fait que croître de mes chalumeaux. Ma douleur ne fait que croître traduction française c 1992 Jacques Fournier alors que l'espoir, hélas, s'évanouit ; mon désir se fait plus fort Se ben il duol quand elle est absente Se ben il duol che per voi donna sento et en cet affreux martyre Non vi fo manifesto con la voce l'excès de douleur ne parvient pas à Questo m'avien perchè lasso pavento faire mourir. La luce de' begli occhi che mi noce.

Poi ne' miei danni Amor è si feroce traduction française c 1992 Jacques Fournier

notes de programme | 29 polyphonies de la Renaissance biographies gnie des musiques de d'Amsterdam. Il est France ou d'Italie. l'auteur de nombreux La Colombina Depuis sa création, La articles sur la notation Quatre chanteurs, Colombina se produit et l'interprétation des solistes réputés dont en concert en France, sources de musique les chemins se croi­ Belgique, Espagne, ancienne, sujets qu'il sent en diverses pro­ Italie, Suissel... est amené aussi à ductions, aborder lors de nom­ madrigalistes dans Paul Van Nevel, breuses conférences. Il l'âme, décident de spécialiste réputé de la a signé plusieurs livres fonder leur ensemble musique polypho­ dont un sur la vie et en novembre 1990 : nique du Moyen-Age l'œuvre de Johannes La Colombina, du et de la Renaissance, Ciconia. Comme col- nom du recueil de porte un intérêt parti­ laborateur de la mai­ musique de la fin du culier aux « Codices » son d'édition XVe siècle conservé à inédits ainsi qu'aux Barenteiter de Kassel, la bibliothèque premières éditions et à il a réalisé des trans­ Colombine de Séville. l'histoire de la nota­ criptions de polypho­ L'ensemble cosmopo­ tion musicale. Ses nie ancienne et une lite d'obédience forte­ études ont été publication sur l'inter­ ment latine est appuyées par de nom­ prétation de la nota­ composé d'une Argen­ breuses bourses de tion polyphonique. tine, d'un Italien et de recherche en Espagne, deux Catalans. La en Italie et en France. Huelgas Colombina se dédie à Fondateur et directeur Ensemble la musique de la de l'Ensemble Fondé en 1970 par Renaissance et des Huelgas depuis 1970, Paul Van Nevel (alors débuts du baroque, il est également chef membre de la Schola tant religieuse que invité du Nederlands Cantorum profane, le plus sou­ Kamerkoor pour la Basiliensis), vent a capella. Si les polyphonie ancienne, l'Ensemble Huelgas répertoires de prédi­ et travaille régulière­ est un des groupes lection de l'ensemble ment avec le européens les plus sont souvent hispa­ Collegium Vocale réputés dans le niques, on ne saurait Gent. Il enseigne la domaine de la pas pour autant musique ancienne au musique polypho­ renoncer à quelques Conservatoire nique du Moyen-Age « voyages » en compa­ Sweelinck et de la Renaissance.

30 | cité de la musique polyphonies de la Renaissance

Depuis 1972, année expression d'une bassus où l'ensemble est époque et d'une Willem Ceuleers primé lors du société. Dans cette Stephan Macleod concours international démarche, qui tend Lieven De Roo de musique ancienne vers l'interdisciplina­ de Bruges, il s'est pro­ rité, l'ensemble s'est Rinaldo duit en l'Europe et est penché sur des Alessandrini, apparu sur toutes les sources telles que né à en 1960, grandes chaînes de l'œuvre d'Albertus fait des études de radio-télévision (il a Magnus, Ciulio piano et d'orgue avant notamment obtenu un Camillo, Jacobus de se consacrer prix de la radio cana­ Publicius et divers presque exclusivement dienne en 1981 et de courants littéraires en à la musique de la télévision tchèque Europe. Cette rigueur l'époque baroque. Il en 1988). Le succès dans la recherche de occupe le devant de la de l'Ensemble la musicalité la plus scène en musique Huelgas s'explique en authentique a valu à ancienne depuis près grande partie par sa l'Ensemble Huelgas de 15 ans en tant que démarche investiga­ de devenir une réfé­ chef de l'ensemble trice qui l'amène à rence internationale et Concerto Italiano et explorer des réper­ d'influencer la pra­ en tant que claveri- toires inconnus, et ce tique de nombreux niste-organiste-piano- dans le plus grand res­ autres groupes. fortiste. Son pect des pratiques répertoire de concer­ d'exécution d'époque. tiste privilégie tout cantus L'ensemble travaille naturellement la Els Van Laethem au départ sur la nota­ musique italienne, Marie-Claude Vallin tion originale, indis­ sans pour autant KatelijneVan pensable pour la délaisser les composi­ Laethem compréhension de la teurs plus nordiques Cécile Kempenaers composition et du tels que Buxtehude, style. Au fur et à Jean Sébastien et Carl ténor mesure de son déve­ Philip Emmanuel Harry Van Berne loppement, l'en­ Bach ou encore Marius Van Altena semble démontre une Boehm. Abordant des Stéphane Van Dijck attention croissante œuvres italiennes, Eitan Sorek pour la musique Rinaldo Alessandrini Eric Mentzel ancienne comme tente dans ses inter­ MatthewVine

notes de programme I 31 polyphonies de la Renaissance prétations toutes guistiques et stylis­ celle. Le Concerto méditerranéennes, de tiques de ce réper­ Italiano s'est triom­ retrouver les qualités toire, le Concerto phalement produit de cantabile et de Italiano est parvenu à dans les hauts lieux mobilité expressive une théâtralisation du musicaux les plus qui furent propres au madrigal inégalable de prestigieux : Utrecht, style italien des XVIIe raffinement tout en Anvers, Beaune, et XVIIIe siècles. Son sachant respecter une Ambronay, Innsbruck, amour de ce réper­ certaine spontanéité. Paris, Schola toire et du chant en L'effectif du Concerto Cantorum général l'ont vite Italiano est éminem­ Basiliensis... amené à créer l'en­ ment variable : des semble Concerto duos vocaux avec Italiano. Il est réguliè­ continuo à la grande rement invité, comme formation orchestrale concertiste ou comme et chorale pour la chef du Concerto musique sacrée du Italiano, dans des fes­ XVIIIe siècle, l'en­ tivals prestigieux, tant semble est à même de en Europe qu'en rendre justice à un Amérique du Nord ou répertoire très vaste. Il technique au Japon. Il est aussi s'appuie cependant salie des concerts un chef très demandé sur plusieurs musi­ Noël Leriche et dirige de nom­ ciens fidèles : côté régie générale breuses productions chanteurs, Rossana Jean-Luc Prétrement du répertoire baroque Bertini, Elisa régie plateau dans nombre de salles Franzetti, Gloria Roland Picault et festivals : Sémélé au Banditelli, Claudio régie lumières Festival de Spoleto, Le Cavina, Sandro Couronnement de Naglia, Giuseppe amphithéâtre Poppée au Welsh Opera Maletto, Daniele Olivier Fioravanti etc. Carnovich, Sergio régie générale Foresti ; côté instru­ Frédéric Coudert mentistes, Mara Concerto Italiano régie plateau Galassi à la harpe, Entièrement composé Guillaume Ravet Andréa Damiani au de musiciens italiens, régie lumières théorbe, Maurizio maîtrisant de ce fait Gérard Police Naddeo au violon­ tous les aspects lin­ régie son

32 | cité de la musique prochains concerts

réservations : 0 144 844 484

Claude Debussy - Michel Béroff jeudi 13 et samedi 22 mars à 20h dimanche 23 mars à 16h30 intégrale de la musique pour piano

Robert Schumann John Eliot Gardiner samedi 15 mars - 20h Symphonies n° 1 et n° 4 Concerto pour violon Thomas Zehetmair, violon

dimanche 16 mars - 16h30 Ouverture, Scherzo et Finale, op 52 Symphonie n° 4 - Concerto pour piano Robert Levin, piano Orchestre Révolutionnaire et Romantique

Conservatoire de Paris mercredi 19 mars - 15h concert pour les enfants Maurice Ravel : L'enfant et les sortilèges jeudi 20 mars - 20h Maurice Ravel - Claude Debussy Pascal Rophé, direction Orchestre et département chant du Conservatoire de Paris individuels 01 44 84 44 84 groupes 01 44 84 45 71 visites groupes musée 01 44 84 46 46

3615 citemusique (1,29F TTC la minute)

renseignements 01 84 : 45

cité de la musique 221, avenue Jean Jaurès 75019 Paris M porte de Pantin