Passion Fish Maurice Elia
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Document generated on 09/27/2021 2:40 p.m. Séquences La revue de cinéma Passion Fish Maurice Elia Number 164, May 1993 URI: https://id.erudit.org/iderudit/59535ac See table of contents Publisher(s) La revue Séquences Inc. ISSN 0037-2412 (print) 1923-5100 (digital) Explore this journal Cite this review Elia, M. (1993). Review of [Passion Fish]. Séquences, (164), 54–55. Tous droits réservés © La revue Séquences Inc., 1993 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ peu de mon interprétation suspense peut saliver avec des gueules un mince plaisir que de voir évoluer personnelle, tout en tenant compte de ensanglantées. ce duo de choc et d'amitié. l'univers de notre réalisatrice. Elle La première partie est menée semble aimer les âmes en proie au montage battant avec une énergie Janick Beaulieu vertige. Son Noir et blanc logeait à aussi visuelle que sonore. On se l'enseigne d'une douleur exquise demande où la caméra prend le temps MAX ET JEREMIE — Réal.: Claire Devers — Scén.: Bernard Stora, Claire Devers, d'après le couvant un oeuf de vipère masochiste. de respirer entre deux séquences roman Les Lamentations de leremiah de Teri Ici, Devers nous offre une version d'apprivoisement face au vieux pro à White — Phot.: Bruno de Keyser — Mont.: grand public de son Noir et blanc la retraite dorée sur tranche d'argent et Marie Castro — Mus.: Philippe Sarde — Son: avec couleurs et vedettes. Et son polar Jean-Paul Mugel — Dec: Carlos Conti — Cost.: au novice ringard en mal Catherine Leterrier — Int.: Philippe Noiret se targue d'amitié. d'avancement. La deuxième partie (Robert «Max» Maxendre), Christophe Lambert En bon petit voyou, Jérémie mène s'étire au soleil du Midi et des (lérémie Kolachowsky), |ean-Pierre Marielle longueurs. La caméra semble tourner (inspecteur Almeida), Christophe Odent (Jacky une vie terne entre télé et TGV Cohen), Feodor Chaliapin Jr. (Sam Marberg), imaginaire. Fauché comme les blés, en rond. Claire Devers qui se montre Thierry Gimenez (Richard), lean-Pierre Miquel ses explosions d'automobiles très à l'aise dans un univers masculin (Maubuisson), |osé Quaglio (Eugène Agopian) semble avoir raté quelques occasions — Prod.: Alain Sarde — France — 1992 — 115 n'arrivent même plus à payer son minutes — Dist.: Malofilm. minable loyer. Il est aussi naïf de nous laisser sur une fin ouverte. qu'imprudent et il souffre d'une Une fin ouverte, ce n'est pas une fin logorrhée agaçante. Sans oublier le qu'on regarde la bouche ouverte. Passion Fish fait qu'il n'a jamais su déguster un bon C'est une fin qui laisse au spectateur Le cinéma américain a toujours cognac. Il l'ingurgite au lieu de le le loisir d'imaginer des avenues privilégié la moralité des humer. Malgré tout cela, il rêve de suggérées par un film. Ici, il y en avait comportements et des oeuvres au sujet devenir un Crésus comme dans les plusieurs. des représentations collectives et de la feuilletons télés. Pour ce faire, il est Dans ce polar de facture inégale, mythologie nationale. Mais comment prêt à tout. Jusqu'à faire clamser à ce sont les acteurs qui m'ont le plus transmettre subrepticement à un droite, à gauche et dans le milieu. fasciné. lean-Pierre Marielle en flic qui public cultivé, sous couleur de Tuer un vieux parrain de la mafia, ça n'a pas encore réussi à coincer Max divertissement, des messages rapporte gros et ça vous fait devenir fait merveille. Almeida n'a pas idéologiques à la fois politiques et important. Dans le milieu concerné, la l'humanité en odeur de philanthropie. moraux ? John Sayles a su le faire chose semble urger. D'autant plus C'est lui qui nous assène les répliques depuis le début de sa carrière. Il a qu'un peu de sang jeune à la tête des les plus tordantes. Dire que Philippe toujours voulu amener le spectateur à mafieux paraît être plus que Noiret joue bien, c'est devenu avec accepter un autre système de valeurs souhaitable. Et voilà qu'un hasard plus les années une sorte de pléonasme. La que celui que Hollywood a mission de ou moins organisé met Jérémie en richesse de son timbre qui affectionne diffuser. Si, par tradition, le cinéma contact avec Max. Ils sont très le ton d'une psalmodie est différents, mais ils ont en commun un irremplaçable. Il a une façon de jouer goût certain pour la marginalité. avec des bémols et des dièses qui Commence alors un jeu n'appartient qu'à lui. On pourrait d'apprivoisement entre notre colibri et même le surprendre en train le sédentaire crocodile. Un colibri qui d'interrompre une période lyrique sur devient un olibrius à force de un bécarre. Noiret doublé par un autre s'imposer à la manière d'un importun. que lui dans une langue étrangère, D'une part, le trouble s'installera à c'est plus qu'une trahison, c'est une demeure quand on comprendra que contre-performance. Dans Max et lérémie a pour mission d'effacer Max Jérémie, il ne joue pas à être Max. Il en pleine jouissance de sa plantureuse est Max. C'est à prendre ou à laisser. retraite. D'autre part, Max, emmuré Et on se laisse prendre avec allégresse. Quant à Christophe Lambert, des Alfre Woodard, dans une solitude aussi complaisante David Strathairn qu'ennuyeuse, peut se payer le luxe petites bouches avaient susurré qu'il et Mary d'un suicide par Jérémie interposé. On jouait à côté de ses baskets et qu'il McDonnell dans Passion Fish voit d'ici le jeu cruel des épées qui se faisait un pois chiche devant un Noiret croisent tout en invoquant une virile d'une autorité écrasante. Il n'en est américain s'adresse à l'illustre « classe tendresse entre marginaux apprivoisés. rien. Lambert donne l'impression de moyenne », les films de John Sayles Au royaume des grandes amitiés, ce se délecter dans le rôle d'un pierrot ont essayé de conquérir le plus grand genre de relation risque des ratés. Et le solaire de la gâchette. Et ce n'est pas nombre de spectateurs, en accréditant 54 Séquences l'idée qu'il n'y a qu'une seule société, Cependant, malgré ses longueurs, sans classe, presque homogène. Passion Fish se laisse voir sans ennui, Avec Passion Fish, le sujet abordé parce que sous le simple conteur lorgne dangereusement vers (Sayles est aussi le monteur et le Hollywood. Mais dans la confusion scénariste de son film) perce le fin qui règne actuellement dans le créateur. La direction d'acteurs est domaine du cinéma américain, d'une rare précision, tout comme la l'arrivée de ce film a quelque chose qualité de la photographie et la de salutaire. En effet, après avoir concision des dialogues, nombreux réalisé des portraits plus ou moins sans doute, mais jamais pompeux. réalistes de gens qui vivent leur siècle Contrairement à ses films précédents, à leur manière (Return of the celui-ci a la particularité de ne pas Secaucus Seven, The Brother from s'écarter des normes, et bien qu'à cinéaste s'arrange pour que nous nous Vincent Lindon Another Planet, Matewan et le plus l'abri des facilités, il semble proche dans La Crise identifions à des personnages qui récent City of Hope), Sayles s'attaque d'une souterraine intimité. À partir paradoxalement devaient rester loin au récit d'une paraplégique face à sa d'une fiction mélodramatique banale, de nous. Quel dilemme! destinée. Sans doute le film le plus Sayles a réussi à mettre de l'avant des Coline Serreau a réglé cette intimiste de son auteur (mis à part thèmes sous-jacents intelligents et question en imaginant un protagoniste Lianna), Passion Fish se lit comme une subtils. Sans doute le film est-il plus qui n'agit presque pas. La plupart du étude psychologique certes, mais intéressant que réussi et peut-être un temps, il est un témoin. Il assiste possédant des relents d'analyse peu trop habile pour être tout à fait impuissant à la vie décousue de ses sociale, grâce à la présence d'Alfre sincère, mais les symboles de semblables. Au début, il ne voit rien, Woodard (l'excellente comédienne l'angoisse permanente et d'une vie à et, petit à petit, il se rend compte qu'il noire qui fut déjà d'ailleurs la continuer en dépit des obstacles sont n'est pas différent des autres. Comme partenaire de Mary McDonnell dans présents dans presque toutes les la femme du médecin, il court après Grand Canyon). C'est son personnage séquences. une réussite sociale qui ruine sa vie qui replace le film dans la tradition personnelle. Il critique une famille des études sociales de )ohn Sayles. Par Maurice Elia reconstituée à laquelle lui et les siens opposition à May-Alice, la star des risquent de ressembler, car sa femme mélodrames télévisés qui se morfond PASSION FISH - Réal.: |ohn Sayles - Scén.: l'a peut-être quitté pour de bon. Il dans son immobilisme forcé, Shantelle |ohn Sayles — Phot.: Roger Deakins — Mont.: reproche à la meilleure amie de sa |ohn Sayles — Mus.: Masson Daring — Son: est la prolétaire qui a déjà vu sa vie |ohn Sutton — Dec: Dan Bishop, Dianna Freas femme, qui a cassé son violon à traversée de soubresauts (problèmes — Cost.: Cynthia Flynt — Int.: Mary McDonnell quelques jours d'un concert, de ne pas de drogues, abandon de l'éducation (May-Alice), AI f re Woodard (Chantelle), David vouloir l'écouter.