Los Rocaires N° 19 - Septembre-Décembre 2015 Page de couverture Ornementation en faux bois de la Villa Thérèse-Rose, à Neffiès(photo Frédéric Mazeran) Ci-contre Jour de cueillette dans le jardin de l’Abelanier (photo Guilhem Beugnon)

Éditorial

e département de l’Hérault possède, et cela L -

constitue une spécificité par rapport1. Deà ses Lattes voi sins, un maillage dense de services éducatifs s’inscritdédiés à dansl’éducation le cadre au d’un patrimoine site majeur de l’An- à Ensérune, de Pézenas à Lodève, leur action-

tiquité, d’un Pays ou d’une Ville d’Art et d’His toire. A , Saint-Pons-de-Thomières- rantet bientôt Sites et Gignac, paysages avec de l’Hérault le soutien, ils du proposent Conseil départemental, par le biais de son service itiné

deau jeunecommunes. public A la ce découverte réseau s’ajoute d’un patrimoine celui, tout varié, décliné à l’échelle d’une communauté

Dansaussi Laspécifique, légende des Camisardscentres de ressources mis- en place par la DSDEN. « sensibilité au passé »2 , l’historien Phi lippe Joutard a montré à quel point la grande des Cévenols tenait à- une articulation étroite entre le savoir érudit du récit historique et des récits oraux de mé- moire familiale inscrits dans le paysage. Les services éducatifs, comme les centres de res sources, permettent aux élèves de réaliser cette concrèteexpérience et uniquesensible d’un des contact traces directdu passé avec per des- éléments du patrimoine. L’approche à la fois-

met en effet d’enrichir l’enseignement de l’his toire mais aussi d’appréhender les esthétiques connaissance,propres à chaque l’éducation période ouau civilisation. patrimoine per- Au-delà de l’indispensable transmission de la LOS ROCAIRES Bulletin de liaison du Centre de Ressources Développement durable de met de susciter la curiosité de chacun pour son- N° 19 - Septembre-Décembre 2015 mentenvironnement. de l’éducation C’est artistique à ce titre qu’elleet culturelle, prend 1, chemin du Château - 34320 Vailhan - 04 67 24 80 11 aujourd’hui toute sa place dans le développe [email protected] - www.crpe-vailhan.org Responsable de la publication : Guilhem Beugnon. Equipe de rédaction : Micheline Blavier, pour former des citoyens attentifs aux marques Claude Buard, Véronique Delattre, Jean Fouët, Frédéric Mazeran, Muriel Palaysi, Pascale de l’histoire dans leurs lieuxRocaires de vie, soucieux de Théron, Patricia Tisserand-Campana. Conseil scientifique : Ghislain Bagan (archéologie), leur préservation, et acteurs de la diffusion du savoir. Ce numéro des y contribue de Jérôme Ivorra (SVT), Philippe Martin (écologie), Sylvie Desachy (archives), Sylvain Olivier façon marquante. (histoire). Conception maquette et PAO : Steen, Guilhem Beugnon. Crédit photo : Céline Pierre Laurence Allué, Luc Bazin, Guilhem Beugnon, Louise Brochu, Jean Claude Delboeuf, André Diguet, Chef du service patrimoine Etienne Dumont, Catherine Ferras, Marc Lugand, Frédéric Mazeran, M.-G. Richard Conseil départemental de l’Hérault

1. Je me limite ici au patrimoine culturel, auquel il faut ajouter l’environnement. 2. Sous-titre de l’ouvrage. Sommaire

 PAGE 4 PROJET DE CLASSE

L’arbre à bonbons Un jardin potager, un composteur, des imagi- nations fertiles et sur les arbres les bonbons ne de l’école de tarderont pas à pousser.  PAGE 6 VIE COMMUNAUTAIRE

Le jeu des avant-monts Plasticienne, Annie Meharg est aussi créatrice de jeux au parfum de terroir. Elle nous dévoile ici dans les pas d’une communauté celui des Avant-monts du Centre Hérault.  PAGE 9 JARDIN SECRET

Les cucurbitacées De la pastèque à la courge en passant par le concombre et le melon, la grande famille des sacrée famille ! cucurbitacées ne manque pas d’atouts.  PAGE 20 NATURE

La garrigue Haut lieu de biodiversité caractéristique des régions méditerranéennes, la garrigue est me- un pur produit de la Méditerranée nacée par l’urbanisation et la déprise agricole.  PAGE 33 PATRIMOINE faux bois et rocaille Contemporaine de la IIIe République, l’ornemen- tation en faux bois et rocaille mérite largement dossier spécial d’être redécouverte.

Garden Cucumber, Cucumis sativus (Elizabeth Blackwell, A Curious Herbal Contai- ning Five Hundred Cuts of the most useful Plants which are now used in the Practice of Physick, vol. 1, London 1737, pl. 4) PROJET DE CLASSE L’ARBRE à bonbons Les méridionaux connaissent bien l’arbre aux fraises, alias arbousier, dont les baies récoltées en automne sont à la base de savoureuses confitures et gelées. Sous les tropiques, le fruit de l’arbre à pain se consomme cuit au feu de bois, en ragout, braisé, en salade ou de mille autres façons. Les écoliers de Magalas ont découvert de leur côté la culture de l’arbre à bonbons. Vous êtes sceptiques ?

En octobre 2013, l’école élémen- taire de Magalas s’est dotée d’un l’ombre d’un mur pour que le com- jardin potager et d’agrément que En contact direct avec le sol, à organismes transforme ensuite le compostdu potager. frais en un compost mûr, post ne se dessèche pas, notre richeAu mois en humus de quiseptembre fera le bonheur 2014, les élèves de la CLIS entretiennent composteur s’est vite peuplé de avec soin. La première année, petitsnotamment, animaux mais aussi décomposeurs, de micro- fleurs et légumes ont bien voulu y des vers de terre et des insectes- l’écoledessinée a reçu organisé une affichepar l’association invitant à pousser mais un peu maigrichons.- participerL’Hippocampe à un concoursdans le cadrede bande du D’une visite des animatrices du organismes (bactéries, champi SICTOM est venu le souhait d’ins gnons...) friands de déchets verts. taller un composteur. Nourri de Un nouveau métier a vu le jour festival international d’Angoulême. déchets « verts » du jardin et de la- dans la classe, celui de « La main- Sansse passent hésitation, dans lesle jardin élèves : ontcelles eu maison (épluchures, marc de café, verte » responsable de la poubelle l’idéede l’escargot de deux petitesgourmand histoires et quide herbes,du jardin, feuilles les rendre mortes...), plus il saines pour des biodéchets et de l’alimenta ra à son tour nourrir les plantes tioncœur de du tout compost ce petit : elle monde. a augmenté Nous magie du potager grâce au avons mesuré la température au l’arbren’a pas àmanqué bonbons. Et la etorganique plus résistantes naturel, le aux plus maladies, équili- que le compostage se passe en compost. Ce fertilisant jusqu’à 50°C puis diminué. C’est- gène, les bactéries décomposent la d’opérer. Allez bré de tous les engrais, renforce deux temps. En présence d’oxy vite voir en pa- l’aptitudeplante. S’il dupermet sol à ainsiretenir des l’eau écono et- température : c’est le processus de Sylviege suivante. Gélardo lesmies nutriments d’engrais, indispensablesde terreau et d’eau, à la matière organique fraîche à haute et ses élèves de la CLIS il économise aussi les transports - ce.0340423A@ac-.fr - dégradationdation moins amenant soutenue les menée résidus par à l’état de compost frais. Une dégra jusqu’à la déchetterie pour se dé barrasserlos rocaires n° des 19 déchets verts. des champignons [4] et des macro-

VIE COMMUNAUTAIRE

, Annie Meharg a élu domicile en 2001 dans le village de . Passionnée d’éducation et amoureuse de son territoire d’adoption, elle a conçu une poignée de jeux qui sont de véritables produits du terroir. Le dernier en date Plasticiennemet en lumière les richesses anglaise culturelles et environnementales de la communauté de communes des Avant-Monts du Centre Hérault.

LE JEU DES AVANT-MONTS dans les pas d’une communauté

los rocaires n° 19 [6] los rocaires n° 17 Pierre Ferran et al.1 comme étant ou devant être un jeu amusant, décrivent dis- et crapaudine romaine, poivre letrayant, jeu éducatif oublieux « de contraintes des murailles et arbousier, truffe- laborieuses tout en apprenant et en et chanterelle, permet aux- formant l’enfant joueurs de découvrir la ri chesse floristique d’une des ré ». C’est dans cet- gions les plus « biodiverses » esprit que, depuis une quinzaine duD’une monde : communauté la nôtre ! d’années,dans la réalité j’ai conçu de monet réalisé territoire plu à l’autre sieursd’adoption jeux :volontairement celui de la région ancrés Lan-

Lorsque je me suis installé à guedoc-Roussillon. En 2006, un- Pouzollesde la communauté en 2001, de le villagecommunes travail mené avec les élèves d’une faisait partie depuis trois ans - classe de CE2 de l’école Les Oli vierssur la création de Béziers, des Echelles leur enseignant de la vie Coteaux et Châteaux. En parcou le barrage et l’infirmièreles serpents scolaire, paresseux a débouché rant chacune des huit communes- du jeu traditionnel Snakes and lad- quinière la de composaient, Fos, l’aqueduc j’ai romain découvert et la des Olivettes à- ders, il a permis d’intégrer. les Inspiré des- avec enchantement la charbon Vailhan et de nombreuses autres- richesses architecturales et envi- résidence des Evêques à , le ronnementales. De cet émerveille sins et les phrases imaginés par les châteaula grotte et de les Caramaou banastes surde Margon, la com- ment est né le jeu Coteaux et Châ enfants au cours d’un programme- l’églisemune de Saint-Michel Montesquieu, de le Paders moulin et teauLa mise où l’oieen applicationdu jeu éponyme de la s’est ré- detion sensibilisation sur la santé. aux enjeux de transformée en dragon. - l’activité physique et de l’alimenta de Julien à Neffiès, la colline de forme des collectivités territo- Celui des plantes et champignons Pech Fario à Pouzolles, le prieuré riales a entraîné la dissolution de la garrigue, entre asphodèle de Cassan à , le Castelas et de Coteaux et Châteaux, le 31 dé

[7] los rocaires n° 19 cembre 2012, C’est à vous !

et à la naissance de- tout un jeu de stratégie où c l’avancée du joueur. la communauté des Avant-Monts Le jeu des Avant-Monts est avant UnHérault appel pour est proposer dès lors leurs lancé ques aux- du Centre Hérault riche de 18 vil haque- élèves des Avant-Monts du Centre lages et près de 15 000 habitants. joueur tente de former sa chaîne Un nouveau jeu s’imposait ! Une- dela sienne.pions tout Mais en ilessayant pourrait d’empê s’enri- tions/réponses et faire du jeu une première version a vu le jour avant cher le joueur adverse de former oeuvre collective de partage des Annie Meharg l’été qui ne demande qu’à être en - connaissances. [email protected] vous de jouer ! richiede la communauté. et pourra être modifiée dans chir de questions sur chacun des anniemeharg.wordpress.com la perspective d’un élargissement- villagesrépondre de au la moment communauté de poser aux Notes quelsleur pion. les joueurs Le questionnement essayeraient deet 1. Pierre Ferran, François Mariet, Louis Porcher, A L’hexagoneFrance, il est y estaussi la figureprésent géomé dans la curiosité étant le coeur battant l’école du jeu, Bordas, Paris 1978. triquela nature, dominante. des orgues Symbole basaltiques de la de l’éducation, l’absence de bonne auxpétales alvéoles soudés d’abeilles de la jonquille. en passant réponse ne devra parAu coeurle tube du que plateau, constituent le soleil les quisix toutefois pas être un frein à rend la région si attrayante est entouré des chaussures de marche indispensables pour découvrir- toutes les richesses patrimoniales, environnementalessont ici représentées etpar gastronoune capi- miques de notre collectivité. Elles telle,la tapenade un poisson et par (de un la dessin Peyne propre ou de la Thongue ?), du miel, du vin et de la communauté, d’ et son à chacun des dix-huit villages de barrage. église moderne à Vailhan et son

Le jeu se joue à deux et la règle enoranges est très (les simple. petits Chaquejetons de joueur loto dispose de treize pions, verts ou sont parfaits pour un tirage A4 du plateau). A tour de rôle, il place un pion sur l’un des hexagones non occupé dans le but de relier deux côtés opposés du plateau- (vert ou orange selon sa couleur) par unenécessairement chaîne ininterrom puerectiligne. d’hexagones, non

Pour obtenir un pdf au format A3 ou A4 du jeu des Avant-Monts, un simple mail suffit : [email protected] los rocaires n° 19 JARDIN SECRET

, concombres et melons, courges et courgettes, gourdes et calebasses… la grande famille des cucurbitacées a plus d’un tour dans son sac pour séduire les jardiniers. Avec ses 125 genres, quelque 825 espèces et peut-être 10 000 Pastèquesvariétés au monde, et elle coloquintes offre une incroyable diversité de fruits.

LES CUCURBITACÉES sacrée famille !

los rocaires n° 19 [9] los rocaires n° 17 E xit les fraisiers. Trop envahis par- lecalisés liseron dans et lal’un menthe des carrés sauvage, pota ils- avaient triste mine. Les voici délo gers aménagés il y a deux ans par- lesbitacées, écoliers mais de lesNeffiès. belles A ont leur du place mal prospèrent aujourd’hui les cucur

àoreilles tenir en d’ours place. (Stachys Rampant byzantina entre les agrumes,s’agrippent elles au romarin,se faufilent enjambent sous les ), le canal maçonné pour installer confortablementelles. Semés en godets au pied en du mars, mur mis en pierre des fruits trop lourds pour- tèques, courgettes, citrouilles et en place en avril, concombres, pas- potironsne supportent boucleront pas leleur gel cycle -, après pen dant la belle saison - car ces frileux - avoir offert des fruits étonnants de formes et de couleurs dont cer Destains sefrileuses conserveront acclimatées tout l’hiver. des plantes tropicales dont les re- Lesprésentants cucurbitacées spontanés sont sont avant rares tout en méditerranéenne connaissent tous Europe.le Concombre Les enfants d’âne, dealias la campagne l’automne, dissémine sa cornichon semence d’âne ou concombre explosif, qui, à - avec vigueur. Mis en surpression - 6 bars, bien plus qu’un pneu de voi ture -, le fruit éclate brutalement lorsqu’on le touche, projetant ses graines jusqu’à 10 m en à peine Deux cucurbitacées spontanées : le concombre d’âne Ecballium elaterium une seconde. Qui dit mieux ? Autre et la Bryone dioïque Bryonia dioica (photos Jean-Claude Delboeuf et Gino Cherchi) cucurbitacée sauvage, commune dans les haies d’une grande partie de l’Europe, la Bryone dioïque était jadis associée à la magie blanche.- Cucumis et Citrullus... Coupésait pour avec augmenter du vinaigre, la tolérance le jus de « navet du diable », sa racine, pas melon (Cucumis melo - Originairestèque (Citrullus d’Afrique latanus australe, le- répandreLe concombre en Afrique (Cucumis du Nord sativus et en à l’alcool. Mais c’est bien sous la ) et la pas Inde après une culture assyrienne. forme d’espèces cultivées que la- ) ont en ), familletin cucurbita des cucurbitacées, « courge ». Si nous le mot, est suite été cultivés par les anciens lui, apparaît domestiqué dans le familière. Elle tire son nom du la Egyptiens dans la vallée du Nil : la nord de l’Inde avant 2000 av J.-C. en 1721 dans la seconde édition tombe de Toutânkhamon décédé On le retrouve chez les anciens sousdu Dictionnaire sa forme adjectivale, universel apparaîtfrançois verspastèque. 1327 Le av. melon J.-C. a notammentconsommé Egyptiens et le peuple Hébreu, et latin - le célèbre Dictionnaire livré de nombreuses graines de durant son exode dans le désert du de Trévoux été connu par les Grecs et les Ro- Sinaï, parlera avec nostalgie des - mûr, sucré et aromatique, n’aurait- concombresgastronome Apicius de l’Egpyte.1 recommande Sous les qui rayonne alors sur- - règnes d’Auguste et de Tibère, le l’Europe des Lumières Ces légumes -, il n’entre sont mains qu’au début de l’ère chré ra qu’en 1762 dans celui de l’Aca tienne.(Citrullus Originaire colocynthis des régions dé de le consommer avec du garum, démie française. sertiques d’Afrique, la coloquinte un condiment à base de restes de alorslos rocaires largement n° 19 cultivés en . [10] ) allait se poissons, pour éviter les rots et les ballonnem - ents. Parmi la liste des 94 plantes que Charlemagne en tend(cucumeres voir cultiver dans les jardinspe- royauxpones figurent les cucurbitas concombres les coloquintes), les ( pastèquescoloquentidas ( 2. Dès 1397,), les gourdesdes poupons ( ) et ) (melons) d’origine italienne sont taxés à la gabelle d’Avignon, mettant à malmelon la »tradition en France. qui Duvoudrait Comtat, faire ils de Charles VIII « l’inventeur du de Serres3 émigrent ene siècle Languedoc « naturalisés où Olivier de nos prochains les rencontrepères-grands, à la là toute au- finparavant du XVI incogneus ». La culture du melon se généralise alors dans le Midi au point que, durant l’été

1659,jour4 maitre Recollis, sa femme et sa fille en consomment quatre par- . On en cultivera à Pézenas des variétés sucrées et divinement par fumées. Lors des fêtes de la Charité de 1839, « les enfants de Pomone: etCe dequi Flore fait » notrejuchés honneur,sur le char notre des5 jardiniersgloire / Ce chantent sont de nos à l’unisson melons le goût et la bonté. Le catalogue gé- - oposera pas moins de néral de graines de Vilmorin-An drieux ne pr 65Lagenaria... variétés en 1883. - basse (Lagenaria siceraria Il semble que la gourde ou cale ) soit originairesa domestication d’Afrique dans maistoutes l’onles trouve des traces très anciennes de zones tropicales - Pérou, Mexique, Thaïlande et Egypte - entre 13 000 et 1 800 av. J.-C. Comme la noix de- coco, ses graines peuvent encore Colloquintida - Quegourdes de turquie. Peinte au tout début du XVIe siècle, cette miniature est la première germer après une année de flot- représentation connue du genre Cucurbita en Europe. H. S. Paris et al.6 y ont récemment reconnu une tagesémination des fruits de dansla plante. l’eau deApicius mer, sous-espèce de citrouille (Cucurbita pepo subsp. texana), non comestible (Grandes Heures d’Anne de Bretagne, cepropose qui a de largement consommer facilité les la cale dis- illustrations de Jean Bourdichon, Tours, 1503–1508, Bibliothèque nationale de France, Ms. Latin 9474, f° 161r) et Cucurbita basses bouillies, frites ou en purée, Domestiquées pour la première et aromatisées en abondance avec Cucur- cumin, livèche, poivre ou vinaigre, bita pepo en 1535, les Iroquois cultivent du pour cacher sans doute l’amertume fois(C. maxima en Mésoamérique ( maïs, des courges et des haricots.- naturelle du fruit. Elles servaient ) et en Amérique du Sud L’Europe les verra débarquer à aussi,Les pèlerins une fois de évidées, Saint-Jacques-de- à conserver pour leurs ) grainesentre 8 000oléagineuses, et 1 500 la suite des expéditions de Chris l’eau et divers liquides alimentaires. ans av. J.-C., sans doute d’abord tophetomate, Colomb, les piments tout comme et le tabac. le maïs, La - la pomme de terre, le haricot, la Compostelle sont le plus souvent les courges vont se répandre dans représentés une gourde fixée à leur tout le continent américain : à l’ar révolution est en marche dans le bâton de marche. rivée de Jacques [11] Cartier au Canada, monde des potagers…los Arocaires la fin n° du 19 e, la cougourde est encore un

XVI - produit de luxe dans legros Midi person de la- Francenage de mais,jardin, peu plat à de peu, cuisine se vulga pay- risesanne pour et méditerranéenne, devenir un « matière première à soupes et à confitures, et même pâturage pour les vaches, au XVIIIe siècle7

». Faciles à cultiver et à conserver, d’une grande variété de formes et de couleurs liée à leur étonnante variabilité génétique, les oignons, courges figurentles carottes, alors les parmi lai- lestues légumes et les concombres. les plus cultivés, L’idée avec de

C. consommerpepo avant maturité une variété brillante et aqueuse de reviendrait aux Italiens, ainsi inventeurs de la courgette (leC. termepepo n’apparaîtra qu’en 1929, dans le dictionnaire Larousse). semblede près êtrepar C.la maximapremière puis espèce C. mos de- courgechata introduite en France,e suivieC. ficifolia e, quand l’usage (au alimentaire milieu du XVIIIdu Lagenaria s.) et (au début du XIX n’est plus mentionné). Symboles de fertilité, associées à la magie de- Noël,deur, les aux courges sorcières sont d’Halloween, incontesta- mais aussi à la bêtise ou à la lour les plus impressionnants légumes blement, à Vailhan comme ailleurs, de nos jardins, ceux dont on goûtera Guilhem Beugnon l’hiver durantCentre les subtiles de ressources saveurs. de Vailhan [email protected] Notes 1. Apicii librorum x qui dicuntur De re coquinaria quae extant, ediderunt C. Giarratano et Fr. Vollmer, in aedi- bus B. G. Teubneri, Lipisae 1922, Lib. III/IV. 2. Capitulare de villis vel curtis imperii, fin VIIIe-début IXe siècle, art. 70 (Bibliothèque de Wolfenbüttel, Allemagne). 6. Le Roy Ladurie 1966, op. cit., p. 67. 3. Olivier de Serres, Le Théâtre d’Agriculture et més- nage des champs, Jamet Métayer, Paris 1600, liv. VI, chap. IX. 4. Archives départementales de l’Hérault, G 963, 14 août 1659 (cité par Emmanuel Leroy Ladurie, Les Paysans de Languedoc, Ecole Pratique des Hautes Etudes, Paris 1966, vol. 1, p. 66). 5. Claude Alberge, Alain Baudière, Jardins et jardi- niers du Midi et en particulier de Pézenas en Langue- doc, Domens, Pézenas 1998, p. 105. 6. Harry S. Paris et al., « First Known Image of Cucur- bita in Europe, 1503-1508 », Annals of Botany, vol. 98.1, 2006, p. 41-47.

Giuseppe Arcimboldo, L’Eté et L’Automne, 1573 une courgette pour nez, une courge pour crâne (Musée du Louvre, Paris) los rocaires n° 19 [12] Sources Francis Hallé, Pierre Lieutaghi (dir.), Aux origines des plantes, Fayard, Paris 2008, 2 vol. Harry S. Paris, “History of the cultivar-groups of Cucur- bita pepo”, in Jules Janick (éd.), Horticultural Reviews, vol. 25, 2001, p. 71–170. Danielle Musset, Sylvie Grange, Espèce de courge : cultures et usages des cucurbitacées, Ed. Alpes de Lu- mière / Equinoxe / Musées et Patrimoine de Cavaillon, Forcalquier 2000. Jean-Marie Pelt, Des légumes, Fayard, Paris 1993. Michel Pitrat, Claude Foury, Histoires de légumes : des ori- gines à l’orée du XXIe siècle, INRA, Paris 2003. Jean-Baptiste Prades, Nicole Prades, Victor Renaud, Le Grand livre des courges, Rustica, Paris 1995. Remerciements Marie-Christine Daunay, INRA, Unité de Génétique & Améioration des Fruits et Légumes, Montfavet

Fruits de Cucurbita pepo (haut) et Cucurbita maxima (bas) peints par Raphael Sanzio entre 1515 et 1518 sur des fresques de la Villa Farnesina, à Rome. Il s’agit là du plus ancien témoignage connu de l’introduction de Cucurbita domestiquées en Europe. (Jules Janick, Harry S. Paris, « The Cucurbit Images (1515–1518) of the Villa Farnesina, Rome », Annals of Botany, vol. 97.2, 2006, p. 165–176)

Retour du jardin Lacroux, à Pézenas, pendant la Grande Guerre (coll. particulière, photo parue dans Claude Alberge, Alain Baudière, Jardins et jardiniers du Midi et en particulier de Pézenas en Languedoc, 1998)

[13] los rocaires n° 19 en cuisine Calebasse : jeunes fruits cuits ; graines en huile Coloquinte : graines en huile, farine ou grillées Concombre : fruit cru en salade, râpé, tranché, en dés, farci, poêlé, sauté au beurre Cornichon : conservé par fermentation ou dans la saumure Courge d’hiver : fruit cuit en soupe, gratin, purée, quiche, flan, cake, confiture, chutney… ; graines rôties et salées, en huile ; fleurs en salade, farcies ou panées puis frites, en beignets Courgette : fruit cru en salade, sauté, farci, frit, en gratin, en ratatouille, en soupe ; fleurs en salade, farcies ou panées puis frites, en beignets Gourde : jeunes fruits préparés comme des courgettes Melon : fruit cru Pastèque : fruit cru, en confiture, confit (immature)

François Pierre de La Varenne, Le Cuisinier fran- çois, Pierre David, Paris 1651, p. 156 morceaux choisis pour leur intérêt alimentaire et leur croissance en climat tempéré, au cœur des 125 genres, 825 espèces et 10 000 variétés de la grande famille des cucurbitacées. Certains noms usuels peuvent désigner des variétés appartenant à des espèces différentes. Les cucurbitacées se distinguent par une longue tige pouvant ramper sur le sol ou grimper grâce à des vrilles. Les espèces sont pour la plupart monoïques et pollinisées par les insectes. Leur classification se base essentiellement sur l’appareil reproducteur mâle.

NOM FRANCAIS SYNONYMES NOMS OCCITANS FRUIT CHAIR Cucumis Cucumis melo (285 variétés au catalogue officiel) Melon Melon ovale ou rond, jaune à côtelé, vert à orangé, jaune juteuse sucrée et parfumée

Cucumis sativus (53 variétés au catalogue officiel) Concombre Cocombre allongé et vert pâle, très Codombre charnu, aqueuse Cogombre rugueux, vert Colombre à blanc Cojon Cornichon Cojon vert, récolté ferme, cro- Cornisson avant maturité quante, pimentée ou douce

Cucurbita 1. Feuilles molles et calice très court ; pédoncule marqué par des côtes, élargi nette- ment à la base Cucurbita moschata Musquée Muscade écorce vernis- orange vif, de Provence sée couleur ferme, épaisse, terre cuite légèrement sucrée et mus- quée Sucrine du Berry forme de orange, poire, vert sucrée, un peu foncé qui aqueuse devient jaune

Butternut forme de jaune oran- cloche, peau gée, ferme lisse, ocre à mais tendre, maturité goût de beurre noi- sette NOM FRANCAIS SYNONYMES NOMS OCCITANS FRUIT CHAIR 2. Feuilles rigides et à long calice campanulé 2. a. Pédoncule cylindrique, d’aspect spongieux, sans côtes marquées Cucurbita maxima (24 variétés au catalogue officiel) Potiron Bauja rond, légère- jaune, très ment aplati aqueuse, assez au sommet fade et à la base, côtelé, orange rougeâtre à vert foncé Giraumon Potiron calotte à trois ferme et fari- turban bosses sur la neuse, sucrée partie infé- rieure, gris ou vert, souvent bariolé Potimarron en forme de orange, poire, lisse farineuse, légèrement sucrée, goût de châtaigne Courge ovale, côtelée épaisse, de Hubbard et bosselée, serrée, jaune couleur zinc orangé

Buttercup forme de tam- orangée, fine bour, vert très et sucrée sombre, rayé

2. b. Pédoncule anguleux, dur et fibreux, ne s’élargissant pas au point d’intersection Cucurbita pepo (24 variétés au catalogue officiel) Courgette Courge à la Cogorleta longue ou consommée moëlle Cocordeta ronde, verte, immature Zucchini Cogordeta blanche ou Cocozelle Corgeta jaune Courgeron Citrouille Pumpkin Cocorda,Cogorda volumineux, filandreuse Cogorla, Cogièr rond, orangé Coja, Cojon, Citra Citrolha, Tuca Tuquièr Patidou petit, côtes fine, goût arrondies très prononcé de marquées, châtaigne blanc ponctué de vert Patisson Pastisson Carchòfa aplati et fes- blanc laiteux, d’Espanha tonné, sou- ferme, goût vent blanc d’artichaut Courge ovoïde, jaune clair, spaghetti blanchâtre à filamenteuse jaunâtre mais peu parfumée à la cuisson NOM FRANCAIS SYNONYMES NOMS OCCITANS FRUIT CHAIR Coloquinte Coloquinelle couleurs (nom abusif) Cougour- et formes dette variées, écorce très dure à maturité, décoratif 3. Grandes feuilles découpées en lobes (comparables aux feuilles de figuier) Cucurbita ficifolia Courge de Siam Melon Sphérique blanche de Malabar ovoïde, vert et tendre, Courge à à maturité, filamenteuse feuille de taches claires à la cuisson, figuier graines noires

Citrullus Citrullus colocynthis Coloquinte Coloquinta sphérique, légère, spon- officinale vert panaché, gieuse, jaune jaune à matu- orangé, rité très amère et toxique, graines comestibles Citrullus latanus (26 variétés au catalogue officiel) Pastèque Melon d’eau Pastèca gros, lisse rouge ou à chair sucrée Citrolha plus ou moins jaune, graines Melon d’aiga oblong, vert noires foncé souvent marbré de blanc Pastèque Citre allongé, vert verdâtre, non à confiture Gigérine pâle avec ou sucrée, graines Barbarine sans tâche rouges Méréville plus claire

Lagenaria Lagenaria siceraria (3 variétés au catalogue officiel) Gourde Calebasse Calabassa, Cara- sphérique fade, amère Gourde bassa, Carbassa, ou allongé, pèlerine Cojon, Gorda, péricarpe dur Tuca,Tuquièr comme du bois à matu- rité dans les jardins de Vailhan Dans le jardin de l’Abelanier 1. Courgettes Blanche d’Egypte dans le canal maçonné 2. Le coin des cucurbitacées 3. Courgette Bou Tozzina au milieu des Stachys byzantina Dans le jardin Fouët 4. Pastèque à chair sucrée Dans le jardin Ollier 5. Melon 6. Fleur femelle de citrouille : la plupart des cucurbitacées sont monoïques ; elles possèdent des fleurs mâles et des fleurs femelles sur le même pied. La fécondation se fait par l’entremise d’insectes butineurs. 7. Citrouilles Dans le jardin Pageon 8. Fleur femelle de concombre 9. Concombre (photos Jean Claude Delboeuf) 1

2 los rocaires n° 19 [18] 4

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[19] los rocaires n° 19 NATURE

LA GARRIGUE un pur produit de la Méditerranée

los rocaires n° 19 [20] los rocaires n° 17 (la route) traversait le Gardon ; c’était la Palestine, la Judée. Les bouquets des cistes pourpres ou blancs chamarraient la rauque garrigue, que les lavandes embaumaient. «Il soufflait Au pont par là-dessusSaint-Nicolas un air sec, hilarant, qui nettoyait la route en dépoussiérant l’alentour. (…) Aux abords du Gardon croissaient des asphodèles et, dans le lit même du fleuve, presque partout à sec, une flore quasi tropicale. » André Gide, Si le grain ne meurt, 1926

L - quis ce que la communauté scien- - a garrigue compose avec le ma tielles à la survie des plantes de la nom espagnol de matorral : une garrigue. Les stratégies morpholo tifique appelle aujourd’hui du- giques et physiologiques qu’elles nant, en milieu méditerranéen, de développent pour économiser formation végétale basse prove l’eau, limiter les pertes ou trouver des solutions de stockage sont des la dégradation de la forêt primitive plus performantes. deelle chênes. sur les Si terrains le maquis calcaires, pousse secs sur Lesbouclent végétaux en lesquelques plus radicaux, semaines à sols siliceux, la garrigue s’établit l’image de la Ptérothèque de Nîmes, - - et filtrants. Elle est associée à des leur cycle biologique. Après avoir paysages fracturés aux reliefs rui prisau printemps, soin de se ils développer ne laissent à enla saiété niformes parsemés de lapiaz, de son froide, de fleurir et de fructifier- grottesmares ettemporaires d’avens, de etdépressions que l’on garniesnomme d’argiledolines. où se forment des quegermeront des graines au retour déshydratées des pluies. dis persées à la surface du sol. Elles-

Brûlée par un soleil sans voile, la- L’Asphodèle porte-cerises, les or garrigue est née il y a 8000 ans du- chidées, les iris et les narcisses défrichage conduit par les agri disparaissent en surface pour culteurs et les éleveurs du Néoli se reposer tout l’été à l’état thique.ont alors Gourmandes pu s’installer de lumière,sur les de bulbes, de rhizomes ou de des espèces végétales endémiques tubercules gorgés de réserve. - Ce sont des plantes géophytes. terrainscents. Dolmens, jusqu’alors murets couverts et capi de- La survie pérenne des arbres,- Chênestelles, anciennes verts et de drailles Chênes bordées pubes arbustes et arbrisseaux qui- de clapas, bergeries en ruine sou- fontmence la par garrigue la mise est en autreplace - ment difficile. Elle com - lignent la longue occupation hu d’un système racinaire de maine de ces lieux aujourd’hui dé surface qui permet de capter laissés. Flore et faune y sont d’une l’eau de pluies faibles avant richesseDes trésors remarquable. d’adaptation son infiltration dans le sol, et d’un système racinaire profond - - permettant de s’approcher de Avec ses 2 300 plantes, la zone- la nappe phréatique. Les spéléolo de l’Olivier, définie par le bota gues ont ainsi pu rencontrer à des niste montpelliérain Charles Fla dizaines de mètres sous terre des Page précédente hault,se rencontrent se montre nulle la plus par variée ailleurs, de chevelus de racines de Chêne vert. Ciste cotonneux, Cistus albidus France. 700 espèces végétales ne Mais c’est au niveau de la feuille, en (photo Guilhem Beugnon) contact direct avec l’atmosphère- Ci-dessus justifiant au bassin méditerranéen desséchante, que s’est développée Lavande aspic, Lavandula latifolia de figurer parmi les 34 hotspots la plus grande richesse d’adapta- (points chauds) de biodiversité- tions.néenne Près spontanée de la moitié de France des arbres pos- identifiés dans le monde. - etsèden arbustes de la flore méditerra La résistance à la sècheresse esti vale est l’une des conditions essen t un feuillage [21] persistant. En los rocaires n° 18 1 2

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7 1. Ptérothèque de Nîmes, Crepis sancta (photo Cédric Dentant) 2. Asphodèle porte-cerises, Asphodelus cerasiferus (photo Gertjan van Noord) 3. Olivier d’Europe, Olea europaea (photo Bulbocode909) 4. Buis commun, Buxus sempervirens (photo Leteil1403) 5. Thym commun, Thymus vulgaris (photo Ferran Turmo Gorte) 6. Romarin officinal,Rosmarinus officinalis (photo Jean-Guy Huot) 7. Chêne vert, Quercus ilex (photo Maite Santisteban Rivero)

los rocaires n° 19 [22] 1 2

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7 1. Brachypode rameux, Brachypodium ramosum (© Station Alpine Joseph Fourier) 2. Pin d’Alep, Pinus halepensis (photo Leif & Anita Stridvall) 3. Genévrier cade, Juniperus oxycedrus (photo Valeia Rando) 4. Chêne kermès, Quercus coccifera (photo Lubomír Klátil) 5. Genêt d’Espagne, Spartium junceum (photo Guilhem Beugnon) 6. Aphyllanthe de Montpellier, Aphyllanthes monspeliensis (photo Angela Llop) 7. Orpin des rochers, Sedum reflexum (photo Guilhem Beugnon)

[23] los rocaires n° 19 gardantplus de leurquatre feuillage ans pour (et nonles plus pas leurs feuilles, qui ne vivent guère tenaces et finissent par tomber), ces espèces peuvent au cours des belles journées d’hiver assurer leuront interdite. mission de photosynthèse que lesLa cuticulelongues périodesépaisse, cireusede sècheresse et im- perméable qui protège l’épiderme

- de la face supérieure des feuilles du Chêne vert et de l’Olivier d’Eu- rope préserve ces plantes du froid- hivernal tout en entravant l’évapo ration estivale. Brillante, elle ren voie par ailleurs les rayons solaires et la chaleur à l’image d’un miroir. La face inférieure est tapissée d’un feutrage dense de poils qui permet- Capitelle au coeur de la garrigue (photo André Diguet) dement réfléchir de l’arbre. une bonne partie de la lumière et réduire ainsi l’échauffe

Les stomates, orifices de petite - rom - taille présents à la surface des- à la garrigue son parfum enivrant, herbes médicinales (Crapaudine feuilles, permettent les échanges semblent aussi limiter l’évapora aine, Sauge officinale, Ger gazeuxils sont etaussi participent le siège de ainsi la àtrans l’in- tion en formant un écran contre- mandrée petit-chêne, menthes…) dispensable photosynthèse. Mais les rayons solaires à la manière de etsec planteset très ensoleillé, mellifères la (romarin,garrigue réflecteurs. Les Crassulacées (or lavande, thym, badasse…). Espace piration. Afin de limiter les pertes- pins, sedums, umbilicus…), enfin, d’eau en période de sécheresse- savent accumuler dans leurs tiges est peu favorable à la pousse sans entraver la fonction chloro- eten leurs été. feuilles l’eau précieuse qui, des champignons mais dans les- phyllienne,mates que pendant un système la nuit, de réguplus de la sorte, ne leur fera pas défaut combes plus humides les amateurs- lation permet de n’ouvrir les sto Petits et grands profits saurontrotes du débusquer panicaut, quelquesamanites chan des ambiant par encastrement (buis, La terelles,Césars, trompettes lactaires délicieux, de la mort pleu et, fraiche. Leur protection du milieu- garrigue est un vaste potager où ces amoureuses des sols calcaires genévrier, Daphné garou), à l’inté les hommes ont su puiser pendant- pourperméables les plus chanceux,et des boisements des truffes, rieur de cryptes (romarin), par des- des millénaires. Il y pousse salades clairsemés. poils (thym, olivier, Chêne vert) ou sauvages (Chicorée sauvage, Uros unlimiter enroulement la transpiration de la feuille en créant (Bra perme de Daléchamps, Crépis à- - chypode rameux) permet aussi de- feuilles de pissenlit ou arrucat,- Le monde du textile a puisé dans la- Crépis saint ou herbe rousse, Sal garrigue le kermès du chêne épo un microclimat foliaire. La réduc sifis sauvage, Laitue vivace, Rei nyme,rouge écarlate une cochenille très résistante qui, dessé : le tion de la surface foliaire par mise chardie faux-picris ou terre-grièpe, chée et broyée, livre une teinture en place de feuilles aciculaires (pin, Diplotaxe vulgaire ou roquette,- - genévrier, asperge), longues et Pissenlit…),pareille pour légumesses jeunes (l’Asperge pousses, vermillon.rine, ce rouge De parla racine trop éclatant de Garance des étroites (romarin, lavande, olivier), sauvage pour ses turions, la Salse des teinturiers on a tiré l’aliza petiteselle aussi (Chêne de ces vert, stratégies Chêne kermès) d’adap- e ou minuscules (thym) participe le Chardon-Marie des pieds à la pantalonsnos poilus deau l’infanteriedébut de la française Grande tête, l’Asphodèle ramifié pour ses- à la fin du XIX siècle et ceux de tation à la sècheresse. - rhizomes…),tite pimprenelle, condiments Sumac des (Sédum cor- Chez le Genêt d’Espagne, le Genêt âcre ou poivre des murailles, Pe Guerre. Certains lichens riches en- scorpion et l’Aphyllanthe de Mont colorants ont aussi servi de base à pellier, ce sont les tiges vertes qui royeurs, Ail rose, Epine noire ou- diverses teintures. Le Genêt d’Es assurent la photosynthèse, les prunellier, Genévrier commun…),- pagne, quant à lui, a longtemps- feuilles pouvant alors disparaître fruits (Azérolier, Arbousier, Cor fourni des fibres textiles utilisées très vite. - nouiller mâle, Eglantier, Mûrier, Fi pourd’inus la fabrication de draps, ser Les essences volatiles présentes guier…), aromates (thym, romarin, viettes, chemises et robes qualifiés- chez le thym, le romarin, la la sarriette, fenouil… qui fournissent ables, tandis que les rouleaux vandelos rocaires ou n°les 19 cistes, et qui donnent aussi des huiles [24] essentielles), épineux des fleurs de Cardère sau 1 2

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7 1. Crépis à feuilles de pissenlit, Crepis vesicaria (photo Jean Tosti) 2. Asperge sauvage, Asparagus acutifolius (photo Guilhem Beugnon) 3. Salsepareille d’Europe, Smilax aspera (© www.stridvall.se) 4. Sumac des corroyeurs, Rhus coriaria (photo Dan Century) 5. Azérolier, Crataegus azarolus (© Association Garrigue Gourmande) 6. Arbousier commun, Arbutus unedo (photo Guilhem Beugnon) 7. Crapaudine romaine, Sideritis romana (photo Wolfgang Katz)

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7 1. Badasse sauvage, Dorycnium pentaphyllum (photo Pedro Fructuoso) 2. Cardère sauvage, Dipsacus fullonum (photo Jacques Diegojack) 3. Corroyère à feuilles de myrte, Coriaria myrtifolia (photo 11299883) 4. Bruyère arborescente, Erica arborea (photo Karl Hauser) 5. Pistachier lentisque, Pistacia lentiscus (photo Patrick Nicolas) 6. Santoline petit-cyprès, Santolina chamaecyparissus (photo Stoplamek) 7. Myrte commun, Myrtus communis (photo Filippo N.)

los rocaires n° 19 [26] - ret d vage, alias chardon à foulon, caba- der laes laine. oiseaux, baignoire de Vénus ou peigne à loup servaient à car

Côté cuir, l’écorce du Chêne vert, les feuilles du Sumac des corroyeurs et- celles de la Corroyère à feuilles de myrtela tannerie. ont fourni les matières pre mières astringentes nécessaires à - On pourrait encore évoquer les rhizomesdes pipes, dela racine la Bruyère de la arboresdiscrète cente utilisés pour la fabrication

Aphyllante de Montpellier pour celledes balais, des brosses, le bois lesdu rameauxmicocoulier de bruyères et de genêts pour celle- - pour celle de fourches et de cra- vaches, la résine du Pistachier len tisque pour la confection de mas- tic, le bois du Genévrier cade pour celleRajoutons, d’une pourhuile clore aux vertus ce rapide derma tour tologiques avérées. - d’horizon végétal, les atouts déco- ratifs de la Santoline petit-cyprès, du Myrte commun, du Ciste coton neux et de tant d’autres plantes de la garrigue devenues reines des jardins secs. Et terminons avec le- petittaire comme gibier cher le lapin à Giono, de garenne, Pagnol et Max Rouquette, qu’il soit séden passage comme la b lemusicienne lièvre et laet perdrixla palombe. rouge ou de écasse, la grive Une vie qui grouille

- A l’image de la flore, la faune de la garrigue est d’une extraordi naire diversité dont voici quelques- Le Sphynx de l’euphorbe, Hyles euphorbiae (photo André Diguet) exemples.nides attirent particulièrement Parminotre attention les invertébrés, : trois arach  - gnée-loup, une tarentule qui pour- suit la ses Lycose proies de auNarbonne sol et promène ou arai le plus grand de nos gastéropodes, terre. Comme les adultes, elles gée, se nourrit d’excréments. C’est- Leurs larves vivent 4 années sous  l mètre, souvent ses jeunes sur le dos, pouvant l atteindre 6 cm de dia sucent la sève des végétaux. Seuls a Mygale maçonne qui, comme perd toujours les dernières spires les mâles chantent. toutescreusé lesdans mygales, la terre, possède quatre de sae coquille. Bulime tronqué, carnivore, Côté papillons, si la chenille du poumons le Scorpion et vit languedocien dans un terrier pou-  l Sphinx de l’euphorbe se nourrit de - cettede l’arbousier plante toxique, ne mange celle du que Jason, des e Cyclostome élégant respire- Pacha à deux queues ou Nymphale vant atteindre 6 cm et dont la pi par une branchie et possède un qûreescargots est désagréable. de la garrigue sont nom- pied divisé en 2 par un sillon longi feuillesalors que de les cetpapillons, arbuste. en général, L’adulte Malgré la sécheresse du milieu, les tudinalDe tous quiles insectes,lui permet les d’avancer cigales sont la boit les liquides excrémentiels  le Zonite peson, espèce proté- moitiésans doute droite les puis plus la emblématiques. moitié gauche. Familière de la garrigue, la Mante breux et des plus curieux : absorbent le nectar des fleurs. los rocaires n° 19 [27] los rocaires n° 19 1 2

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7 1. Lycose de Narbonne, Lycosa narbonensis (photo Denis Jevtic) 2. Mygale maçonne, Atypus affinis (photo Jaco Visser) 3. Scorpion languedocien, Buthus occitanus (photo Aitivamon) 4. Zonite peson, Zonites algirus (photo Paul Wanco) 5. Bulime tronqué, Rumina decollata (photo Filippo N.) 6. Cyclostome élégant, Pomatias elegans (photo naturgucker.de / enjoynat) 7. Jason, Charaxes jasius (photo André Diguet)

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7 1. Mante religieuse, Mantis religiosa (photo Denis Dumculin) 2. Tarente commune, Tarentola mauritanica (photo Alejandro Jimenez) 3. Seps strié, Chalcides striatus (photo frkSorin) 4. Orvet, Anguis fragilis (photo nockocinco) 5. Lézard ocellé, Lacerta lepida (photo Rosa Gambóias) 6. Couleuvre de Montpellier, Malpolon monspessulanus (photo Gabri Mtnez) 7. Guêpier d’Europe, Merops apiaster (photo Antonio Benítez Paz)

[29] los rocaires n° 19 1

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4 1. Environs du cirque dolomitique de Mourèze (image composite de Philippe Martin, 1859 clichés) 2. Rollier d’Europe, Coracias garrulus (photo José Luís Barros) 3. Musaraigne étrusque, Suncus etruscus (photo Roberto Sindaco) 4. Molosse de Cestoni, Tadarida teniotis (photo Paolo Taranto)

los rocaires n° 19 [30] religieuse possède des pattes

se nourrit de serpents et de lézards ravisseuses repliées et chasse à et l’Aigle de Bonelli, symbole des l’affûtentonnoir-piège tandis que de lasable, larve attend de la espèces menacées de la garrigue. Il fourmi-lion, enfouie au fond d’un habite les falaises et se nourrit de lapins et de perdrix, ce que ne lui- ses proies bien camouflée. pardonnent pas les chasseurs... - Parmi les reptiles, de nombreux- Parmi les mammifères, deux es lézardstiellement sont nocturne, remarquables le Seps strié, : la pèces sont méridionales : le Pa Tarente commune, un gecko par- chyuremonde ne ou dépassant Musaraigne pas étrusque, 4 cm de unlong des pour plus un petits poids mammifères de 2 g, et dule pourvu de pattes arrière minus Molosse de Cestoni, une lourde cules et l’Orvet qui n’en a pas, le - magnifique Lézard ocellé, et bien sûr la Couleuvre de Montpellier,- chauve-sourisMenacée par quila dépriseloge dans agricole les fis symbole du patrimoine naturel de sures des falaises. laest garrigue. capable deCet se extraordinaire dresser au-dessus ser pent pouvant atteindre 2 m de long etde ladisparition. densification La protection de l’habitat, de ce la garrigue est aujourd’hui en voie de la végétation à la manière d’un - cobra. Il possède deux crochets hauttoriales, lieu associations de la biodiversité et usagers. est bien venimeux mais placés au fond de l’affaire de tous : collectivités terri sa gorge, ce qui le rend inoffensif André Diguet pour l’homme. - Président de la Société d’Etude Les oiseaux sont bien représentés- des Sciences Naturelles de Béziers par le Guêpier d’Europe et le Rol [email protected] lier d’Europe au plumage somp tueux, le Circaète Jean-le-Blanc qui L’Aigle de Bonelli, Aquila fasciata (photo Dorian)

[31] los rocaires n° 19 les mots nous parlent

avaus, agarrús, garric ou garrolha On ne saurait refermer l’article d’André Diguet sans évoquer plus longuement le Chêneiceberg kermès, de l’la garrigue - chernaire à qui Max autorise Rouquette une etrepousse à Jean Fouët, rapide notre après jardinier-randonneur. les incendies. De petite Il doit son surnom d’ à un important réseau raci- bartassègent, autre- taille et couvert d’un feuillage persistant coriaceUna barba et épineux, d’avaus , l’arbris seaunous sedit plaît Josiane à griffer Ubaud les1 ,mollets n’appelle des pas enfants le baiser qui sur la joue, et mentquelqu’un dit qui d’ agradiucoupent coma à travers un avaus les buissons. -

, agréablesa cara... comme tota espinhosa un ker de mès,barba n’est dura. pas Somiava d’un commerce a las fuòlhas agréable. d’abauces, Max cada Rouquette còp que dresse lo potone - lejava portrait savoureux d’un vieillard : «

» (son visage... tout hérissé d’une barbe dure. Il songeait aux feuilles de kermès, chaque fois qu’il l’embrassait). - Le garric n’a pourtant pas que des défauts. Ses glands, de belle taille et bien qu’amers, assurent en automne et en hiver une importante res- source de nourriture aux troupeaux. Son écorce, très riche en tanins, étaitl’arbrisseau autrefois doit très son recherchée utilisation pour la plus le originale.tannage des La pelliculecuirs. Son dure bois proté pou- vait servir pour le chauffage. Mais Kermesc’est à un illicis parasite qu’il nourrit que- e geant les oeufs de cette cochenille ( vermèu,) a été vermet, utilisée vermelhon, de l’Anti quitévermelhada, jusqu’à grana la fin du ou XIX graneta siècle, desséchée et broyée, pour préparer une teintureque l’arbrisseau rouge très doit pure son appelée nom latin vermillon de Quercus ( coccifera tandis que ker- De haut en bas mès al qirmiz en occitan et selon les lieux). A cet usage Le Chêne kermès, Quercus coccifera, dessiné par Pancrace Bessa (Henri-Louis Duhamel du Monceau et al., Traité des arbres nous vient de l’arabe qui a donné par ailleurs les adjectifs et arbustes que l’on cultive en pleine terre en Europe..., vol. 7, carmin et cramoisi. La cochenille est rare de nos jours, ayant souffert des- Roret, Paris s.d., pl. 46) produits de traitement des vignes, mais à tendance à réapparaître loin La cochenille du kermès, Kermes illicis de toutes surfaces cultivées comme l’observe Dominique Cardon, cher Ordonnance de police, portant fixation du jour de cheuse au CNRS sur les plantes tinctoriales. A l’approche du mois de mai, l’ouverture de la récolte du Kermès ou Vermillon, temps de la récolte, femmes et de enfants « graines se laissaientécarlates »pousser les ongles dit Vermeou, sur les terres non closes dans le territoire pour attraper plus facilement les précieuses gales à raison d’un demi-kilo- de cette ville d’Aix, 22 avril 1805 par jour et par personne. 5 kg fournissaient 50- (Bibliothèque Méjanes, Aix-en-Provence) 55 g de pigment pur. L’apparition sur le marché internationale siècle. de la coche nille du nopal, ungarric cactus et mexicaindans garrigue plus connu sous le nom de figuier de- Barbarie,péenne kar- a sonné / gar- le glas du kermès dans le courant du XIX On trouve dans la même racine pré-indo-euro- attachée à l’idée de rocher. Le nom 2de. Jacques l’arbre Astora-t-il précédé celui de la formationet voir végétale dans garrica nourrie prégaulois de calcaire un ? dérivéLouis-Fer évo- dinandquant un Flutre type deet végétationle chanoine » tandisNègre quepensaient « garric que a désigné oui préfèrel’arbre caractéristique croire l’inverse de « cette végétation, le chêne kermès, le petit chêne à feuilles de houx (par la suite)

». Le débat sera-t-il un jour tranché ? Guilhem Beugnon

Notes 1. Société d’Horticulture et d’Histoire naturelle de l’Hérault. 2. Louis-Fernand Flutre, Recherches sur les éléments prégaulois dans la toponymie de la Lozère, Les Belles Lettres, Paris 1957 ; Ernest Nègre, Toponymie du canton de Rabastens (Tarn), Éditions D’Artrey, Paris 1959. 3. Jacques Astor, Dictionnaire des noms de familles et noms de lieux du midi de la France, Editions du Beffroi, les incontournables de la garrigue

Hervé Harant, Daniel Jarry, Guide André Diguet, René Cahuzac, La Pierre Rutten, Propositions pour la Clément Martin, La garrigue et ses du naturaliste dans le Midi de la petite flore de la garrigue, 3 fasc., garrigue : plaidoyer pour une forêt hommes : une société tradition- France, 2 vol., Delachaux et Niest- Centre régional de documenta- tolérante au feu, Groupement nelle, Espace Sud editions, Mont- lé, Neuchâtel/Paris 1967 (rééd. tion pédagogique, Montpellier gardois pour le développement pellier 1996 (rééd. 2011). 1973-1987). 1977 (rééd 1988). forestier de la garrigue, Bourdic 1993 (rééd. 2014).

Philippe Martin, Les Ecologistes Alain Renaux, Le savoir en herbe : Hubert Delobette, Alice Dorques, Jean-Claude Rameau, Dominique de l’Euzière, La nature méditer- autrefois, la plante et l’enfant, Trésors retrouvés de la garrigue, Le Mansion, Gérard Dumé, Christian ranéenne en France, 2 vol., Dela- Nouvelles Presses du Languedoc, Papillon rouge, 2003. Gauberville, Flore forestière fran- chaux et Niestlé, Paris 1997 (rééd. Montpellier 1998 (rééd. 2011). çaise : guide écologique illustré, 3, 2005-2015). Région méditerranéenne, Institut pour le développement forestier - CNPPF, Paris 2008.

Luc David, Points de vue sur la Benoît Garrone et al., Stratégies Philippe Martin, Hyper Nature : Le Collectif des Garrigues, Atlas garrigue : 30 panoramas du Gard végétales : petits arrangements et une révolution de l’image natura- des garrigues : regards croisés entre et de l’Hérault, Les Ecologistes de grandes manœuvres, Les Ecolo- liste, Biotope Editions, Mèze 2011. vallée de l’Hérault et vallée de la l’Euzière, Prades-le-Lez 2011. gistes de l’Euzière, Prades-le-Lez Cèze, Les Ecologistes de l’Euzière, 2011. Prades-le-Lez 2013. PATRIMOINE

sur de romantiques ponts en béton, chaises et bancs moussus en faux bois, façades tapissées de rondins factices, cascades jaillissant de grottes hérissées de stalactites armées de fer... Héritière de Branchesl’Antiquité, l’architecture enlacées en faux en bois, garde-corps souvent associée à la rocaille, a vécu sous la IIIe République une heure de gloire aujourd’hui méconnue. l’ornementation en faux bois et rocaille dans le département de l’Hérault

los rocaires n° 19 [34] Dans le second acte du Triomphe des Dames dans la misère mais d’autres feront paru en 1676, Thomas fortune en utilisant ses brevets… Corneille, frère cadet du grandun tout en oubliant de lui en payer les grandPierre, bassin campe de le rocaille jardin ; ledu tout baron orné : redevances. Car l’arttier de de la rocailleur. rocaille – deau fondcoquilles, d’une lapis, grotte nacre se cache de perles, « ou du rusticage - vient de renaître et pierres de coloris1 ». La rocaille et avec lui le mé désigne alors ces « petits cailloux, Ouvertancienne à l’carrièreoccasion dede l’expositioncalcaire, le coquillages et autres choses qui universelle de 1867 sur le site d’une- servent à orner une grotte, à faire des rochers2 » imitant la nature et parcenlacées des Buttes-Chaumonten garde-corps vasur s’or de nerromantiques de tout un ponts attirail en de béton, branches de - ses reliefs. Chaque bassin baroque imitant tantôt le bois tantôt le roc, duest labyrinthedécoré3 tandis de Versailles que les aménajardins montagnesde cascades peupléesjaillissant de de cavernes grottes gédu parpalais Le Nôtres’ornent à partir de grottes de 1668 arti en- - hérissées de stalactites armées de- ficielles en ciment, lieux de recueil fer, de chaises et de bancs moussus lement et de rêverie. - en faux bois… Il s’agit là du pre Ci-dessous Cette architecture dite rustique, mier parc utilisant à grande échelle- Femme au chapeau rouge devant la rotonde remisede l’Antiquité. au goût Dansdu jour son par Histoire la Re la technique du rusticage, dans une des Buttes-Chaumont à Paris, naturellenaissance maniériste, nous vient rencontre paradoxale du roman vue stéréoscopique, vers 1930 (Bibliothèque nationale de France) pierres rongées qu’on suspend dans tisme et de la technologie. D’autres les édifices, Pline appelés l’Ancien musées, parle pour des si «- suivront : Montsouris, Monceau, Page suivante, de haut en bas muler artificiellement des grottes ». puis les jardins privés de demeures Paris, parc des Buttes-Chaumont - bourgeoises,balustrades, notammentponts, guinguettes, des villas (photo Catherine Ferras) semblance de la nature, l’intérieur balnéaires. Fontaines, belvédères,- Paris, parc Montsouris (photo Thomas Collins) Pour qu’il ne manque rien à la res Paris, Champ de Mars (photo Alexis Grandblaise) kiosques et chalets rustiques fleu deest celle garni aménagée d’un rang dans de un pierres vieux rissent ici et là, témoignant d’un poncesplatane recouvertes de Lycie, en de Asie mousse mineure,4 ». rêve d’exotisme pas seulement « Au siècle des Lumières, l’art de la rocaille témoigne d’une connais- - sance approfondie de la nature ins pirée par le mythe du bon sauvage.- Cette idéalisation de l’homme à l’étatconquérants de nature de la Renaissance. trouve ses fonDès dations chez les explorateurse siècle, etla - laland seconde moitié du XIX mise5 sur le marché du ciment Port- et le développement de la- sidérurgie vont permettre le déve loppement d’une architecture nou vellejardinier : celle de du son faux état, bois dépose ciment. le bre- En 1867, lesystème Gardois de Josephcaisses-bassins Monier, mobiles en fer et ciment applicable àvet l’horticulture d’un « - teur du béton armé ne se limitera ». Ce génial inven il réalise le premier pont en ciment pas à des pots à oranger. En 1875,- armé. Orné d’un garde-corps imi tant le bois, il permet aujourd’hui- encore de franchir les douves du château de Chazelet, dans le dépar tement de l’Indre. Monier meurt [35] los rocaires n° 19 naturaliste. Les cimentiers italiens s’en s’ont fait une spécialité que reprennent des artisans français, àsurprenant l’image de catalogue la maison propose Couchoud, des fondée à Lyon en 1846, dont le

« rocailles,les nomme rocailleurs, pièces d’eau rustiqueurs, et tous genresspécialistes-rocailleurs, de travaux rustiques ». rocailleurs- On paysagistes,artistes en ciment, cimentiers-rocailleurs, cimentiers-na- artistes-rocailleurs, rocailleursturistes, l’appellation n’est guère contrôlée . 6 e bois se répand largement et sort du Acadre la fin des du jardins XIX siècle, pour l’art s’appliquer du faux dans le département de l’Hérault, notammentdes éléments aux plus façades. ou moins Ici etbien là, - ment pour cet art qui a perduré conservés témoignent de l’engoue plus7 jusqu’aux années 1920, rarement- , avant de tomber dans l’oubli, voire être dénigré. Puisant son ori ginalité dans un retour à la nature, il apparaît à la même période que l’Art Nouveau et disparait avec lui. Cette observation troublante peut- elle permettre d’assimiler ces deux formesL’introd uction d’art, oude dula rocaille moins deet lesdu rapprocher ? Le débat est engagé. fauxinstallés bois dansdans notrela région département de Mar- seraitseille leet faitconsidérés des maçons comme italiens les

La tradition orale ou les sources promoteurs de ce nouveau style. cas cet apport italien. Ainsi, l’an- écrites confirment dans certains cienque Marianne café de alias Saint-Thibéry Mariano Matéo, est-il attribué au maçon Salvetti tandis

établiGermaine. à Caux, semble être l’auteur desGagnés balcons par en l’engouement faux bois de la pourVilla - cettepuisant forme sans d’art, doute les dans maçons l’abon lo- caux prennent très vite le relais, l’ornementation des parcs et jar- dante documentation consacrée à- tinguer par l’originalité de leurs dins. Mais ils savent aussi se dis interventions,abouties. allant jusqu’à créer de véritables œuvres artistiques los rocaires n° 19 [36] Carte de localisation des éléments en faux bois recensés dans le cadre de cet article

Edifices remarquables 27. Lieuran-lès-Béziers 1. 28. Lignan-sur-Orb 2. Fontès 29. 3. Neffiès 30. Il serait illusoire de vouloir citer 4. Saint-Thibéry 31. Montady tousbois ciment les exemples et de la témoignant rocaille dans de 5. 32. Montpeyroux la richesse ornementale du faux 33. Murviel-lès-Béziers - Croix de mission 34. Neffiès lesentation département dans certains de l’Hérault. secteurs On 6. 35. notera cependant une forte repré 7. Roujan 36. 37. Pézenas géographiques comme le Biterrois,- 38. Pomérols Eléments divers le Piscénois, La Moyenne vallée de 39. 8. l’Hérault, les Avant-monts, le Bas 40. Roujan Neffiès, la Grange de Cassou 9. sin de Thau et le Montpelliérain. 41. Saint-André-de-Sangonis (photo Guilhem Beugnon) 10. Béziers 42. Saint-Etienne-d’Albagnan 11. Capestang 43. Saint-Guilhem-le-Désert 12. Causses-et-Veyran 44. Saint-Jean-de-Fos 13. Caux 45. Sète 14. Cazouls-lès-Béziers 46. 15. Celles 47. Thézan-lès-Béziers 16. Cessenon-sur-Orb 48. Vailhan 17. 49. 18. Clermont-l’Hérault 50. Vias 19. Combes 51. Villeveyrac 20. 21. Florensac 22. Fontès Rocailles remarquables 23. Gignac 52. Béziers 24. Lamalou-les-Bains 53. Corneilhan 25. La-Tour-sur-Orb 54. Montpellier 26. Le-Bousquet-d’Orb 55. Sète

[37] los rocaires n° 19 De l’art et de la technique « Paradoxalement, le rusticage ne cherche jamais à être parfaitement sont constitués d’une armature de réaliste : aussi belle soit l’imitation, Les éléments de décor en faux bois- elle doit toujours laisser voir qu’elle n’est pas réalisée en vrai bois ! C’est fer (fer à béton et grillage) recou tout l’aspect sociologique de cet verte de ciment. Le revêtement art : le promeneur doit se sentir est ensuite façonné à l’outil pour en osmose avec la nature, mais en y dessiner les veines et nœuds aucun cas oublier qu’il est civilisé ! du bois. Le faux bois ainsi obtenu De même que le lampadaire au mi- peutselon êtrel’essence parfois de traitébois dedésirée. façon lieu du parc rappelle au citadin qu’il lissée, à la brosse sur ciment frais, n’est pas perdu à la campagne, de les plus aboutis, une utilisation du même en s’appuyant à une balus- On note aussi, pour certains cas trade bétonnée, il s’émerveille du paysage tout en se rassurant sur la ciment frais teinté dans la masse capacité humaine à maîtriser le pro- afin de donner l’illusion du vrai grès technique. Paradoxe omnipré- bois. Chaque ouvrage est ainsi une sent dans l’art et la littérature de la œuvreauteur d’artd’un unique. garde-corps encore période romantique… » Fils du maçon Raoul Villaret, Laure Mestre « Rusticages : faux bois, vraies œuvres visible à Saint-Guilhem-le-Désert, d’art », A tous les étages, le blog, Paul Villaret a aidé son père sur 20 novembre 2011 des chantiers de faux bois ciment- alorsdiale :qu’il « Il fallaitavait 13 courber ou 14 des ans, barres juste avantde fer (doux), la Seconde diamètre Guerre au choix mon des chutes, la barre horizontale étant d’un diamètre plus important. Les relier entre elles avec du fil de fer (doux) appelé fil à ferrailler. Il fal- lait ensuite entourer ces barres avec du grillage assez fin, souvent de récupération, type cage à lapins. Les couches successives donnent l’épaisseur de la future branche. L’ensemble est garni de ciment, en petit quantité au départ avec un ajout de ciment prompt. Une ron- delle plus ou moins grosse imite la taille de coupe. Pour la finition, un ciment plus liquide déposé avec un sac dit bourasse imite très bien l’écorce de l’arbre. Mon père teintait le ciment avec un ocre dit terre de Sienne. La soudure électrique n’exis- tait pas à ce moment-là, du moins à Saint-Guilhem. L’exécution était très longue et délicate. Quant au prix de revient ! » Le département de la Creuse

- s’est spécialisé dans la formation aux techniques de la rocaille au jourd’hui dispensée au lycée des Métierset de l’Artisanat. du Bâtiment de Felletin, au GRETA et à la Chambre des Métiers La maison Couchoud Le Progrès illustré, n° 405, 18 septembre 1898 (Bibliothèque municipale de Lyon) Catalogue de la maison Couchoud, à Lyon, fin XIXe siècle (coll. particulière)

los rocaires n° 19 [38] A E

B C F

D

De l’art et de la technique A, B, C : Béziers, armatures de l’escalier sud-est du Plateau des Poètes (photo Frédéric Mazeran) A : fers plats B : remplissage intérieur d’un faux tronc avec mortier de ciment, agrégats et armature C: armature grillagée du type grillage à poule permettant de dresser l’enduit ciment et de le façonner D : Caux, armatures de type câbles métalliques dans le calvaire (photo Frédéric Mazeran) E : Béziers, traitement décoratif d’un faux tronc de pin servant de support au pigeonnier du Plateau des Poètes (photo Frédéric Mazeran) F : Neffiès, détail de bas de façade en rondins de ciment teinté dans la masse à la Grange de Cassou (photo Guilhem Beugnon)

[39] los rocaires n° 19 Une histoire de cimenteurs -

L’identification des maçons spé- cialisés en rocaille et faux bois- nécessiterait une recherche do cumentaire approfondie. L’exa men détaillé des œuvres permet- cependantprise. C’est denotamment retrouver le certaines cas au signatures ou cartouches d’entre l’un des escaliers donnant accès Plateau des Poètes, à Béziers, où A. Bergé àTravaux la partie de nord-est ciment du parc porte un cartouche indiquant « e ». A Pézenas, unede « étonnanteGarreau travaux citerne édifiéeen ciment au débutNeffiès duHérault XX siècle ». D’origine révèle leborde nom- laise, cet artisan est aussi l’auteur - quable Grange de Cassou pour àlequel Neffiès l’ancienne de l’habillage propriétaire de la remar a précieusementle cimenteur spécialiste conservé enla «facture déco- desration travaux. de parcs Elle etnous jardins, apprend grottes, que cascades, rochers, rivières, ponts, chalets, kiosques, troncs d’arbres, travaux en ciment de toute na- ture… » est titulaire d’une médaille diale. d’argent gagnée lors d’un salon

à Montpellier en 1896. D’autres noms apparaissent ici ou là, ainsi à Fontès où le maçon Bonnet de Saint-Thibérysorti tout droit appose d’une sa publication signature sur un kiosque de parc qui semble le cimenteur Marianne Matéo au- lui ayant servi de modèle. A Caux, teur des cuves de vinification de laLa Villatradition Germaine orale l’estpermet sans d’attri doute- aussi des balcons en faux bois. buer à l’entreprise Destresses, alors située rue du Puits de la Courte, à Béziers, la réalisation de certains ouvrages en faux bois du Plateau des Poètes et au maçon Salvetti- l’ornementation de la façade d’un ancien café de Saint-Thibéry. Ga brielJean-de-Fos, Ranchou est qui aussiréalisera l’auteur en 1932 en le nouveau Pont du Diable de Saint--

1927 d’une villa sur la même com bois - mune, 8, avenue du Monument aux Facture de « Confection de la façade rustique Morts,8 avec garde-corps en faux faite en ciment au chalet de Trignan », . Raoul Villaret, établi lui aus alias Grange de Cassou ou Toit rouge si à Saint-Jean-de-Fos, est l’un des (coll. Christiane Cassou) derniers maçons à avoiruerre pratiqué mon- l’ornementation en faux bois, à la veillelos rocaires de n° la 19 Seconde G [40] A D

E

B

F

C

De l’art et de la technique A : Pézenas, cartouche d’Elie Garreau sur une citerne d’eau (photo Frédéric Mazeran) B : Béziers, plaque en ciment de A. Bergé sur un escalier du Plateau des Poètes (photo Frédéric Mazeran) C : Fontès, plaque émaillée de Henri Bonnet sur un kiosque de jardin (photo Frédéric Mazeran) D : Caux, plaque en mosaïque de Marianne Matéo sur une cuve en ciment de la Villa Germaine (photo Guilhem Beugnon) E : Fontès, kiosque de jardin (photo Frédéric Mazeran) F : Caux, balcon attribué à Marianne Matéo dans la Villa Germaine (photo Frédéric Mazeran)

[41] los rocaires n° 19 Pour démêler le vrai...

De gauche à droite et de haut en bas Pin parasol Chêne Cyprès Bambou Bouleau

du faux

De gauche à droite et de haut en bas Béziers, pigeonnier du Plateau des Poètes Neffiès, Grange de Cassou Neffiès, Villa Thérèse-Rose Maureilhan, avenue Jules Ferry Pézenas, château d’eau privé De parcs en jardins

Le parc du Plateau des Poètes à Béziersrelier l’ancienne résulte d’un promenade projet lancé (les par la municipalité en 1861 afin de - allées Paul Riquet) à la gare. Il est confié aux célèbres frères paysa gistes Denis et Eugène Bühler déjà- auteurs du parc de la Tête d’Or à Lyon, du square Planchon à Mont pellier et du jardin du Champ de- Juillet à Limoges. Le fort dénivelé du terrain les dirige vers la réali- sation d’un parc à l’anglaise. Dédié aux poètes Biterrois, il serae inaue guré en 1867. A la charnière des XIX et XX siècles, suite au fort engouement- des visiteurs, un second projet vient compléter les premiers amé nagements. Confié au sculpteur Antonin Injalbert, Grand Prix de Rome et Biterrois d’origine, il verra la réalisation d’une de ses œuvres majeures : la fontaine du Titan (1892). Parallèlement, le sculpteur- agrémente la terrasse haute d’une série de bustes figurant les person nages illustres de Béziers. - C’est en périphérie et en contrebas du secteur du Titan que va être lan cé après 1892 une série d’ouvrages en faux bois ciment comprenant deux escaliers à garde-corps côté nord-est,ainsi qu’une une rigole niche centrale à canard s’écou et un- pigeonnier sur faux tronc de pin,- rection du lac central. La création lant du bassin bas du Titan en di - d’unpléter petit cet aménagement. pont à garde-corps Un seul et plancher en faux bois vient com- - nomgine ded’entreprise la conception a pu etêtre de conser la réa- vé sur les lieux : A. Bergé, à l’ori tradition orale signale aussi le nom lisationde l’entreprise des deux Destresses. escaliers, mais la

- A Neffiès, la Villa Thérèse Rosee siècle. et son jardin sont la propriété de la fa mille Villaret au début du XX Plan de la ville de Béziers, 1898 (Archives départementales de l’Hérault, 4 N 60-3) Béziers, la fontaine du Titan, oeuvre du sculpteur Antonin Injalbert, dans le Plateau des Poètes (coll. Frédéric Mazeran)

[43] los rocaires n° 19 A D

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Le Plateau des Poètes A, B, D, E, F : escaliers d’accès, oeuvres de A. Bergé (photos Frédéric Mazeran) C : à la rencontre du vrai et du faux (photo Guilhem Beugnon)

los rocaires n° 19 [44] A D

E B

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Le Plateau des Poètes A-F : Jeux d’eau et de ponts (photos Frédéric Mazeran)

[45] los rocaires n° 19 A C

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B

Le Plateau des Poètes A, C : pigeonnier et détail du traitement du tronc en faux pin (photos Frédéric Mazeran) B, D : niche à canards avec fausses charnières à vis et toiture en ciment armé imitant des bardeaux de bois (photos Guilhem Beugnon)

los rocaires n° 19 [46] Un dessin en perspective cavalièree antérieur à 1912 nous montre une- maison de la seconde moitié du XIX sièclegrand àjardin laquelle établi est sur adossée une parcelle latéra lement une remise, au-devant d’un- trapézoïdale.uniquement certains On ne sait éléments si ce docu ont mentété réalisés, concerne ou bienun avant-projet si les autres dont ont notamment le bassin central. Seule été modifiés ou détruits par la suite, - certitude : le projet a été prévu en deuxplace campagnes.les aménagements La première du jardin. cam pagne,La seconde, réalisée postérieure avant 1912, de quelques a mis en années, a permis de positionner un ensemble en rocaille ainsi que l’or- nementation en décor de faux bois surconstruite la façade entre de la 1921 remise. et 1923 sur La Villa Rolande de Sète a été le versant sud-ouest du Mont Saint- Clair sur une parcelle peut-être déjà en partie aménagée au niveau du jardin. Comme à Neffiès, on retrouve surbois ciment. cet exemple Les premiers une association prennent d’aménagements en rocaille et faux - la forme d’une fausse grotte à la Vierge et d’un enrochement avec ef fet retombant de stalactites ciment. Les seconds d’un superbe exemple de banc en faux pin d’Alep, dernier élément conservé d’un ensemble de mobilier en faux bois ciment.

Neffiès, laVilla des Roses avant 1912. Elle deviendra Villa Thérèse-Rose, du nom d’une des filles de Marie-Rose et Jean Villaret, après l’ornementation en faux bois de la façade de la remise (coll. Guilhem Beugnon)

[47] los rocaires n° 19 A D

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Jardins de faux bois A-E : Neffiès, aménagements de la Villa Thérèse-Rose ; le bassin n’a pas été conservé (photos et coll. Guilhem Beugnon) F : Capestang, niche religieuse de l’ancien presbytère, rue Paul Bert (photo Frédéric Mazeran)

los rocaires n° 19 [48] A

B C

Jardins de faux bois A : Béziers, jardinière du musée Fayet (photo Frédéric Mazeran) B : Sète, banc en faux bois de la Villa Rolande (photo Marc Lugand) C : Neffiès, banc en faux bois de la maison d’Elie Garreau (photo Guilhem Beugnon)

[49] Des kiosques de bonne manière e siècle, l’art d’aménager les parcs et Durant le premier quart du XX jardins en rocailles et faux bois a- parfois été étendu à la création de kiosquesRéalisés sur pouvant la base s’inspirer d’une ossature de l’ar chitecture des pagodes. ciment, ils se caractérisent par leur métalliquepetite taille habilléeet leur plan en fauxgénérale bois- ment octogonal.

Faisant le pendant à leur échelle aux grands kiosques urbains réalisés en matériauxsur « l’art d’aménager traditionnels, un ils jardin sont de le plusbonne souvent manière issus ». de publications Le département de l’Hérault conser- ve deux exemples remarquables de ces kiosques édifiés à l’intérieur de parcs privés : l’un à Sussargues, petiteLe premier localité a perdu proche de Castries, l’autre à Fontès, au nord du Biterrois.- sa charpente et- sa couverture d’origine, probable ment traitées sous la forme d’une os saturemoulé. en faux bois ciment couverte par de fausses canottes en ciment soigné dans le traitement de l’écorce Le kiosque de Fontès s’avère plus métalliques. et le détail e dessiècle faux tandis assemblages que celui Il pourrait remonter au- débutrait des du années XX 20. de Sussargues, assez rustique, date - Une plaque émaillée porte à Fontès le nom d’Henri Bonnet, entrepre neur à Saint-Thibéry spécialisé en cuves et ciment armé.

Fontès, le kiosque et sa plaque émaillée (photo M.-G. Richard) En arrière-plan, une des six maisons en faux bois remarquables du département (photo Guilhem Beugnon) los rocaires n° 19 [50] A C

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Le kiosque de Sussargues

A, B : le kiosque (photo Frédéric Mazeran) C : détail d’un collier de serrage en faux bois (photo Frédéric Mazeran) D : kiosque en bois rustique du Traité de construc- tions civiles de l’architecte Etienne Barberot, Paris 1912 (éd. Paris 1912) E : kiosque en bois rustique de l’architecte V. Petit (Edouard André, L’art des jardins : Traité général de la composi- tion des parcs et jardins, G. Masson, Paris 1979, p. 853, fig. 503)

[51] los rocaires n° 19 Le club des six Le département de l’Hérault con- - serveprincipale au moins est en six totalité exemples ornée d’édi de fices remarquables dont la façade e - faux bois ciment : quatre villas du- début du XX siècle à Neffiès, Fon tès et Sauvian, une maison vigne ronne à Florensac et un ancien café àces Saint-Thibéry. cas de réels projets d’aménage- On peut parler pour l’ensemble de- ment exécutés sur la base d’un pro- grammenement deornemental. dessins d’état Ils sont projetés issus d’une réflexion préalable et certai que nous n’avons pu retrouver. On peut noter sur ces exemples une complexité de décors en relief avec des décrochements de plans de façades ou des déports nécessitant uneartistiques. indéniable Le maîtrise positionnement technique alliéedes armatures à de réelles conditionnant performances ces reliefs ont dû faire l’objet de plans- d’exécution. En dépit de leur caractère remar quable, parfois même exceptionnel, cesd’aucune six ouvrages publication restent ni méconnus, d’aucune n’ayantprotection fait au jusqu’à titre des ce Monuments jour l’objet et donc en danger de disparition, Historiques. Ce patrimoine fragile, mériteraite siècle » acréé minima par le d’être ministère retenu de aula Culture titre du et labelde la Communication. « Patrimoine du XX dans l’ancien canton de Roujan. LeComme petit villagebon nombre de Neffiès de localitésse situe - de la plaine viticole, il se caracté riseancien par conduite une importante entre le extensionmilieu du urbainee siècle périphérique et les années à son 1930. centre La

XIX présence de maisons de maître, petits immeubles ou grosses villas- témoigne d’une période faste liée à la prospérité viticole du Biter- rois. Parmi cet ensemble bâti se distinguent deux édifices remar quables que l’on peut à juste titre

Neffiès, la Villa Thérèse-Rose (photos Frédéric Mazeran)

los rocaires n° 19 [52] considérer comme de véritables œuvresgénéral et architecturales le mas dit Grange : lade VillaCas- Thérèse-Rose située rue du Conseil direction de Cabrières, en bordure sou édifié à la sortie du village en du chemin de Caylus. La Villa Thérèse-Rosee siècle par doitson pro son- originalité au projet envisagé au début du XX priétaire, Jean Villaret, pharmacien à Pézenas. Il porte au départ sur l’aménagement d’un jardin faux bois et rocaille au-devante d’une maisonune raison de maître indéterminée, édifiée durant il s’est la seconde moitié du XIX siècle. Pour

étendu à l’habillage de la façade- d’un bâtiment adjacent, confié à Joseph Bonnafous, cimenteur ori ginaire de Nages (Tarn) installé à Neffiès vers 1904. - Cette façade à travée unique élevée sur deux niveaux va devenir le sup port d’un décor en relief tout à fait original, voir exceptionnel. Sans- modifier les ouvertures en place, le maçon plaque deux faux arbres la téralement dont la ramure s’élève jusqu’à l’attique sous toiture. La présence d’un axe de composition passant par les deux ouvertures, celle de la cave viticole au rez-de-- chaussée et celle de la fenêtre du- premier étage, va devenir fonda mentaleparti de danscaler laun nouvelle balcon au compo pre- sition.mier étage Le maçon-artiste permettant de prend donner le dul’entrelacement relief à son aménagement et la montée toutas- en intégrant le porte-à-faux dans- tement particulier de l’enduit per- censionnelle des branches. Le trai met aux faux arbres de se détacher du mur de fond. On notera aussi latémoignages volonté de du conserver bâtiment les anté deux- chaines d’angle à bossage, derniers rieur qui permettent de définir un- cadre à la nouvelle composition. La présence de vrais marron niers en premier plan empêche aujourd’hui de mesurer à sa juste valeur cette œuvre remarquable, l’une des plus représentatives de l’architecture Neffiès,de l’étrange. la Villa Thérèse-Rose (dessin et photo Frédéric Mazeran)

[53] los rocaires n° 19 Un second exemple du même type se situe à l’extérieur du village, connu sous le nom de Toit rouge ou Grange de Cassou. Il se présente sous la forme d’une petite maison édifiée sur quatre niveaux dont un en comble. Le bâtiment figure déjà sur le cadastre napoléonien de 1833, en bordure du chemin de Trignan aujourd’huie siècle nous chemin le montre de Caylus. Une photographie du tout débutpierres du apparentes XX d’un seul étage sous les traits d’un mazet en - couvert par un toit à pente unique. En 1902, Eugène Montagnac, pro priétaire des lieux, confie au maçon neffiessois Elie Garreau, originaire de Bordeaux et installé au village depuis dix ans, le soin de décorer en faux bois la façade principale du « chalet de Trignan » entre-temps- surélevé, percé de trois nouvelles fenêtres et d’un œil de bœuf et cou vert d’une toiture à pente double.- La facture du cimenteur en date du 14 décembre détaille les 38 jour nées d’ouvrier à 5 franc s et 25 journées de manœuvre à 3 francs 50, les 119 sacs de ciment à 3 francs 50, 8 sacs de chaux du Teil à 1 franc 50, les 25 litres de fixatif pour couleur à 1 franc 50 et les 10 francs de couleur nécessaires pour exécuter la « façade rustique et le dallage intérieur du chalet , entre le 4 août et le 13 septembre 1902. La force évocatrice de l’œuvre de Garreau tient à sa conception reprenant extérieurement celle d’un chalet que l’on aurait conçu avec une vraie ossature bois. Deux arbres latéraux s’élevant sur une- hauteur de 7,50 m tiennent lieu- de chaînes d’angle. Horizontale ment, la structure de faux plan chers se lit également en façade. De haut en bas : Neffiès, la Grange de Cassou (cercle rouge) et la Grange des Pauvres (cercle vert) sur le plan cadastral napoléonien de 1833 (Archives départementales de l’Hérault, 3 P 3609) La Grange de Cassou (à gauche) et la Grange des Pauvres (à droite) avant 1902. On distingue en haut à droite un four à chaux aujourd’hui démolli (coll. Christiane Cassou) Eugène Montagnac en famille devant la Grange de Cassou avant sa transformation en 1902 (coll. Christiane Cassou)

los rocaires n° 19 [54] Elle se caractérise par la présence de deux grandes branches à partir- desquelles s’élèvent verticalement de petites ramures servant d’enca drementsétage. aux 3 baies du premier étageLe réalisme et à la baiede cette unique construction du second clôture de l’ossature par la pose en faux bois va jusqu’à simuler la- de fausses planches disposées ver ticalement sur les deux niveaux médians de la façade et à 45° sous le pignon de l’avancée de toiture.- L’originalité de l’œuvre tient aussi à la présence rare d’un haut sou bassement de 4,00 m de hauteur constituéCette maison de faux unique demi-rondins en son genre de boisa été plaqués mise en à teintela façade. sur le ciment ornemental se caractérise par un frais moulé. L’exceptionnel détail travail esthétique de fausse écorce- desemblage chêne réalisé des bois, à l’outil la présence sur ciment de frais. Il va jusqu’à simuler un as nœuds et celle de bois morts avec- piqûresconnue dud’insectes. grand public, la Grange Véritable œuvre d’art cachée et mé deremarquables Cassou peut en terme être considéréede réalisa- comme un des exemples les plus tion en faux bois ciment armé.

Neffiès ,la Grange de Cassou (dessin et photos Frédéric Mazeran)

[55] los rocaires n° 19 La Grange de Cassou Détails de l’ornementation en faux bois (photos Guilhem Beugnon)

los rocaires n° 19 [56] -

Le village de Fontès, à six kilo mètres de Neffiès, témoigne d’un- intérêt local pour l’ornementation en faux bois. En retrait du boule vard Jules Ferry, l’une des avenues périphériques au centre ancien, et à proximité d’un kiosque sur lequel nous reviendrons, une villa- de taille modeste (10 m x 10 m- environ) affiche elle aussi la phy- sionomietuée d’une d’un galerie chalet. supportée Son origi par nalité tient à une avancée consti de faux troncs en bois. Le maçon,- dont nous n’avons pas retrouvé le nom, a choisi de faire porter le der nier niveau de la maison par cette galerie habillée en faux bois tout- commegramme le AA, balcon initiales à garde-corps du proprié du- troisième niveau figurant le mono dénombrements de population le tairementionnent : Abel Alicot,entre 1901 vigneron. et 1911. Les

Dede la faux galerie, troncs et en d’arbres encadrement présents de latéralement à la façade, au droit baies, viennent simuler une fausse- ossature traitée de façon rustique. De fausses planches disposées ver- ticalementsants de toiture au dernier en demi-rondins, niveau, et le traitementsoulignent del’originalité rives des deuxde cette ver

œuvre que renforce la teinte brun orangé apposée sur le ciment frais- de la façade principale. L’interventionpourrait souligner sur leune secteur émulation, Nef fiès-Fontès de plusieurs maçons terme de réalisations. voire une course à l’originalité en

La villa de Fontès avec détail du garde-corps du second étage (dessin et photos Frédéric Mazeran)

[57] los rocaires n° 19 -

Le quatrième exemple remar quable nous conduit à Sauvian, avenue Paul Vidal, en marge du- centre ancien. L’édifice de 6 mètre de long sur 7,50 m de haut envi ron se présente de façon isolée par rapport à l’alignement urbain. Il- conserve deux niveaux d’élévation,- uncoup à rez-de-chausséeplus large et débordant formant sur sou la bassement, et un à l’étage, beau - voirie. La partie haute de la façade se présente sous la forme d’un pi gnonbâtiment à toiture permet débordante de le dater à deux des versants. L’analyse typologique du- années 1910-1915. Le nom du ma çon et le contexte de la réalisation n’ont pas été retrouvés. La présence au niveau du rez-de- chausséeancienne boutique d’une grande que l’originalité ouverture pourrait indiquer l’existence d’une de la façade ornée en totalité de faux bois ciment rendait attractive.- Comme à la Grange de Cassou, le- décor simule une fausse construc tionses encadrements à ossature bois, de avec baies ses et mon son tantssoubassement, verticaux enl’ensemble faux bois traité brut, de façon rustique. La partie haute de la façade comprend une fausse fermebas du apparente premier étage dont eston distingueconstitué les deux arbalétriers. Le plancher- - d’un faux arbre disposé à l’hori zontale. La clôture des murs péri- phériques est composée, comme dans les deux exemples précé- dents, par un décor de fausses planches assemblées verticale ment. Là encore, la mise en teinte- des faux bois traités dans le ciment frais renforce l’illusion : l’ossa ture - troncs et branches - apparait ainsi plus foncée sur le ton paille des planches. Quelques touches de couleurs vives simulent de fausses briques qui couvrent les linteaux des ouvertures du premier étage. - Cette œuvre remarquable n’est probablement pas due à un ma çon de Sauvian car aucun autre exemple, même d’emploi ponctuel de faux bois ciment, n’a pu être identifié dans le village.La villa de Sauvian (dessin et photo Frédéric Mazeran)

los rocaires n° 19 [58] De conception plus simple que les

- exemples précédents, la maison de Florensac est située avenue Jean Jau rès. Son caractère vigneron semble confirmé par la présence d’une clé de porte ornée d’un motif de grappe de raisin accompagné de feuilles de vignes. L’édifice, dont le principal intérêt réside dans la façade côté avenue, se trouve en alignement- d’autres immeubles.e siècle. En Son l’absence auteur d’archives, nous le daterons du pre mier quart du XX et le contexte de sa construction nous sont inconnus. Il pourrait être attribué au maçon Bonnet établi à Saint-ThibéryFlorensac. si l’on se réfère à la proximité de ce village avec celui de

Elevé sur 3 niveaux, le bâtiment- s’étend sur une longueur de 8,50m pour une hauteur de 6,50m envi ron. L’ornementation de la façade en faux bois est cantonnée aux parties latérales adjacentes aux mitoyens (chênes plaqués à la façade et dont la dernière branche semble servir de(pièces console simulant support àun la génoiseassemblage sous toiture), aux encadrements de baies

à mi-bois allant jusqu’à figurer de fausses chevilles), à la présence d’un balcon ouvragé et au soubassement de bas de façade (demi-rondins- semblables à ceux de la Grange de Cassou). L’œuvre doit son origina lité à la simplicité de sa composition tripartite : porte / fenêtre / portail balcon et fenêtre / porte / fenêtre. La travée axiale se trouve magnifiée par un balcon central à garde-corps ouvragé.

La maison vigneronne de Florensac avec détails de la façade (dessin et photo Frédéric Mazeran)

[59] los rocaires n° 19 -

Le dernier exemple de maison re marquable se situe à Saint-Thibéry, avenue de Pézenas. L’édifice est ornéD’après en totalitél’actuel de propriétaire, faux bois ciment des- sur les deux niveaux de ses façades. - cendantblement desd’origine maîtres italienne, d’ouvrage, en seun- maçonrait l’auteur. du nom de Salvetti, proba

Situé à la sortie du village et à proximité de l’ancienne gare, le bâtiment aurait autrefois abrité un café. L’examen des parties hautes- et des profils de corniche révèle un édifice plus ancien equ’il siècle, ne ilpa a rait. Probablement édifié durant la seconde moitié du XIX fait l’objet d’une modification de façades avec mise en place d’un décor faux bois certainement entre 1915 et 1920 comme le montre le style du décor, et notamment le traitement esthétique de la fausse écorce. On note la présence d’un- escalier extérieur situé en partie basse d’une des façades. Refait pos térieurement à la mise en place du décor, il devait posséder un garde- corpsles autres ouvragé bâtiments en faux boisdécrits ciment. pré- Le décor des façades, comme pour cédemment,un traitement simulerustique uned’ensemble fausse ossature de maison en bois, avec - mettant en avant le bois naturel- nonnant titre équarri. d’ossature Il reprend d’angle un et une en semble de montant verticaux te - traverse formant bandeau d’étage constituée de deux arbres dispo sés horizontalement. Le détail du décor figure aussi les assemblages desencadrements fausses pièces de baies de bois. sont traités Comme pour d’autres exemples, les - endénature faux bois. de l’écorce La finition ne permet sommaire pas àde l’outil reconnaitre sur ciment l’essence frais de de la boismo copiée.

passants : une Clin d’œil fait aux- maine émerge faussede l’intérieur tête hu d’un tronc.

L’ancien café de Saint-Thibéry et son clin d’oeil (dessin et photos Frédéric Mazeran) los rocaires n° 19 [60] Ornementation ponctuelle Com -

me on vient de le voir, cer tains projets ont conduit à réaliser un décor faux bois sur la totalité d’une façade. Ils ont porté à la fois surles balcons,les plinthes les ouencadrements soubassements de de façade, les chaînes d’angle, toitures. Mais on peut aussi trou- baies ou les parties en rives sous ver chacun de ces détails de façon isolée, employés sur des façades decentres bâtiments anciens. divers Le recensement implantés le long des avenues en dehors des bois ciment de notre département sommaire des œuvres en faux montre qu’il s’agit là de la majorité des exemples.garde-corps de tous On peut souligner une grande diversité de types, tout en mettant en évidence desréalisation. différences notoires de formes Garde-corps d’escaliers de souvent liées àe des périodes de - maisons à Thézan-lès-Béziers, diaires et de mains courantes. Ils Cazouls-lès-Béziers comprennent le plus souvent plu et Maureilhan Au début du XX siècle et jusqu’aux (photos Frédéric Mazeran) années 1910-1915, les garde-corps sieurs travées, pouvant mettre en- en faux bois ciment se distinguent évidence une travée principale ou par un emploi de formes courbes,- des travées d’angle. On note par propres à l’esprit Art Nouveau fois la présence de monogrammes en vogue à cette époque. Ils évo réalisés à partir d’un assemblage luent progressivement à partir des- ouau domaine d’une composition de la Grande de Canague fausses années 1920-1925, adoptant des branches. C’est notamment le cas- formes plus orthogonales, inté grant parfois des lignes directrices- à Montady (garde-corps de ter à 45°, plus simples, voire beaucoup rasseCertains de citernegarde-corps d’eau) introduisent ou à Fontès plus épurées. Cette évolution pour (garde-corpsdes courbes etde contre-courbesvilla). si- raitl’ensemble correspondre semble àl’emporter l’influence sur du stylele détail Art Déco.ornemental L’aspect et formel l’illusion de mulant des torsions de branches en lien avec un tronc principal ou d’un vrai bois déterminé par un- des troncs latéraux tenant titre travail esthétique de l’écorce. La de montants verticaux. Toutes les finition des montants, lisses, tra- formes sont ainsi possibles. On verses,coup moins le plus soignée. souvent brossée sur noted’un garde-corps parfois, comme de terrasse à Cessenon repre- ciment frais ou lissée, reste beau (maison rue du Pont), la présence e siècle montre un L’examenparti ornemental des nombreux et une exemplesimagina- nantnotamment une forme d’escaliers, d’arbres palissés.témoigne du début du XX L’originalité de certains exemples,- tion sans limites des maçons de- aussi de la virtuosité des cimen- l’époque, le décor pouvant aller teurs. On citera celui, remarquable, jusqu’à copier une essence pré d’uneCes garde-corps maison àseront Thézan-les-Bé remplacés cise d’arbre avec coloration dans le ziers, avenue Georges Clémenceau.- ciment frais. Chaque cas témoigne - d’uneLes garde-corps originalité adaptéese caractérisent à la mise dans les années 1930 par un sys engénéralement valeur d’un lieu.par la présence tèmedu moulage de panneaux et des ajourés gabarits en perpré- fabriquémettant alors ciment de gagner armé, en l’évolution rapidité basses, de - de montants verticaux, de lisses traverses intermé et en efficacité. [61] los rocaires n° 19 Montady, domaine de La Grande Canague, D11 Montady, domaine de La Grande Canague, D11 (dessin Frédéric Mazeran) (photographie Frédéric Mazeran)

Fontès, boulevard Jules Ferry Fontès, boulevard Jules Ferry (dessin Frédéric Mazeran) (photographie Frédéric Mazeran)

Florensac, avenue Jean Jaurès Florensac, avenue Jean Jaurès (dessin Frédéric Mazeran) (photographie Frédéric Mazeran)

Caux, Villa Germaine, avenue de la Gare Caux, Villa Germaine, avenue de la Gare (dessin Frédéric Mazeran) (photographie Guilhem Beugnon) los rocaires n° 19 [62] Baillargues, rue de la République Baillargues, rue de la République (dessin Frédéric Mazeran) (photo Frédéric Mazeran)

Baillargues, rue des Commerçants Baillargues, rue des Commerçants (dessin Frédéric Mazeran) (photo Frédéric Mazeran)

Combes, villa Le Ruisselet, route des Cambous Combes, villa Le Ruisselet, route des Cambous (dessin Frédéric Mazeran) (photo Etienne Dumont)

Gignac, rue Jeanne d’Arc Gignac, rue Jeanne d’Arc (dessin Frédéric Mazeran) (photo Frédéric Mazeran)

[63] los rocaires n° 19 Aniane, avenue de Gignac Béziers, avenue Rhin et Danube (photo M.-G. Richard) (photo Frédéric Mazeran)

Caux, calvaire, avenue du Calvaire Caux, Villa Germaine, avenue de la Gare (photo Guilhem Beugnon) (photo Guilhem Beugnon)

Cazouls-lès-Béziers, boulevard Molière Celles (photo Frédéric Mazeran) (photo Louise Brochu)

Cessenon, avenue du Pont Ceyras, angle de la rue de la Pompe et de la rue de la Chicane (photo Frédéric Mazeran) (photo Frédéric Mazeran) los rocaires n° 19 [64] Clermont-l’Hérault, boulevard Malafosse Fontès, rue de l’Hôpital (photo Frédéric Mazeran) (photo Frédéric Mazeran)

Lamalou-les-Bains, avenue des Anciens d’Indochine Le Bousquet-d’Orb, avenue Jean Bringuier (photo Frédéric Mazeran) (photo Etienne Dumont)

Montpellier, avenue de l’Ecole d’Agriculture Montpeyroux, hameau du Barry (photo Frédéric Mazeran) (photo Luc Bazin)

Saint-Guilhem-le-Désert, portant les initiales de Fernand Capion Vaihan, route de Fournols (photo M.-G. Richard) (photo Guilhem Beugnon)

[65] los rocaires n° 19 Les supports de balcons

en faux bois apparaissent souvent comme- éléments isolés, sans liens avec une ornementation complète de fa çade. Ils se présentent sous forme- d’encorbellements reliés à de faux troncs d’arbres positionnés en fa çade, ou en simples supports, ainsi à Puisserguier, rue Vauban. Les balcons peuvent être aussi traités ensur structure un immeuble mixte du alliant centre faux ancien bois et garde-corps en fonte. C’est le cas Les plinthes et soubassements de Pomérols,façades rue de la Pompe. - - font l’objet dans cer tainsessentiellement cas d’un traitementprésent au esthédébut tique particulier.e Ce type de décor du XX siècle perdure jusqu’aux- années 1910-1920. Il peut être employéde Montagnac, sur des ou maisonssur de simples de vil lages, comme à Villeveyrac, route- murs de clôture comme à Montpel lier, avenue Jean Mermoz et avenue Bouisson Bertrand, probablement- du même artisan. L’originalité de ces trois exemples réside dans le ni veau de détail ornemental, avec un ensemble d’éléments en faux bois se détachant sur un faux appareil de pierre en ciment (Villeveyrac) ou de fausses concrétions en ciment (Montpellier).les essences d’arbres On note imités. là encore une originalité dans les formes et

A droite, de haut en bas : Supports de balcon à Puisserguier, Pomérols et Neffiès(photos Frédéric Mazeran) Ci-dessus : Détail de l’ornementation en faux bois du soubassement de la Villa Hygie, avenue Bouisson Bertrand, à Montpellier (photo Frédéric Mazeran)

los rocaires n° 19 [66] De haut en bas : Montpellier, Villa Marie, avenue Jean Mermoz (photo Frédéric Mazeran) Murviel-lès-Béziers, maison de la rue Raynard Bernadou (photo Céline Allué) Montpellier, Villa Hygie, rue Bouisson Bertrand (photo et dessin Frédéric Mazeran) Villeveyrac, maison de la route de Montagnac (photo et dessin Frédéric Mazeran)

[67] los rocaires n° 19 C

A

D

Les encadrements de portes et fenêtres A : Neffiès, rue Molinier (dessin Frédéric Mazeran) B B : Baillargues, rue du Picachou (photo et dessin Frédéric Mazeran) C : Lignan-sur-Orb, rue Louis Bernard (photo Frédéric Mazeran) D : Lamalou-les-Bains, villa La Cerise, avenue du Moulin (photo Etienne Dumont)

los rocaires n° 19 [68] -

Nous termineronspiliers cette d’entrée présenta or- tion par les exemples, assez peu nombreux, de nés en faux bois ciment. On citera notamment l’exemple remarquable d’une villa des années 1920 située avenue Paul Vidal à Sauvian, celui du domaine de Fontaines à Lieuran-- les-Béziers, en faux tronc de pins parasols, et celui de la D15, à la sor tie de Roujan, probablement dû au cimenteur Elie Garreau.

De haut en bas : Sauvian, avenue Paul Vidal Lieuran-lès-Béziers, domaine Les Fontaines, D909 Roujan, D15 Saint-Jean-de-Fos, rue de la Coopérative (photos Frédéric Mazeran, Guilhem Beugnon, M.-G. Richard)

[69] los rocaires n° 19 Ouvrages hydrauliques -

Laune publicitéindication retrouvée sur la nature d’Elie des Gar in- reau, cimentier à Neffiès, nous donne- terventions qu’un entrepreneure siècle. spé La cialiste en travaux de ciment pouvait mener au début du XX diversification de ses réalisations pouvait l’amener à créer des cuves viticoles en ciment, mais aussi des citernes ou châteaux d’eau destinés- àtères des propriétairesou monotones, privés. certains de Afin d’éviter des édifices trop aus- ces maçons, dont Garreau vont pro poserintroduisant aux propriétaires une ornementation de petits en bâtiments tout à fait originaux, en - faux bois. C’est le cas d’un château d’eau de Pézenas, actuellement pro priété de la famille Sanet, au lieu-- dit l’Amandier ou Pontil de Conas. L’ouvrage remarquable, voire excep tionneloctogonal pour présentant son aspect l’aspect formel d’une et son décor, est un petit édifice à plan ruche géante. - D’une hauteur approximative de- 7,00m, il présente une fausse ossa ture bois dont les montants verti caux composés de troncs d’arbres bruts supportent une charpente couverte par une toiture à ressauts. Toutes deux sont réalisées en ciment armé, le maçon-artiste ayant pris le soin d’imiter une fausse paillote en couverture. Chaque face extérieure de l’octogone et de détail de décor. Cinq essences a fait l’objet d’un soin particulier en Photos et dessin matière de traitement esthétique- Frédéric Mazeran - d’arbres sont ainsi imitées à la -per fection :présenter pin, des chêne, parties micocoulier, de bois ceri sier et bouleau, allant jusqu’à- re sectes. La mise en teinte mort avec piqûres d’in surtoiture ciment est couronnée frais renforce par une l’illusion. La partie haute de la- - amorce de tronc évidée inté rieurement servant de ventila- tion à l’intérieur de la citerne.- Cet édifice totalement mécon nud’art. et nonUn actevisible notarié de la voiepermet pu blique est une véritable œuvre de le dater d’avant 1913. los rocaires n° 19 [70] - - - Un second exemple tout aussi re- pourlier sont les chaînesréalisés d’angle. en ciment Seule armé, la ter et marquable se trouve au domaine de rasse et l’emmarchement de l’esca La Grande Canague, à Montady,e siècle et com d’un posé d’une maison de maître de la bien sûr le décor traditionnel en faux e secondesiècle. moitié Un du parc XIX d’agrément est bois. On note que les parois externes La réserve d’eau de Montady ensemble viticole avec cave du début- de la citerne d’eau étaient autrefois (dessin et photo Frédéric Mazeran) du XX revêtues d’un enduit ciment avec alorseau, il aménagé est établi au-devant un projet de citernela mai décor de planches assemblées à une son, côté ouest. Pour l’alimenter en- fausseparois ossature.latérales de Certaines l’édicule. parties de ce décor sont encore visibles sur les qui doit son originalité à son inté gration et à sa mise en scène dans le parc. Le parti pris par le maçon- (non connu) est celui d’un édifice à la fois fonctionnel et servant de bel- védère pour apprécier le parc. De formed’une terrasselégèrement reliée pyramidale, au jardin l’édi par cule est couronné en partie haute unen rocaille.escalier en faux bois avec garde- corps supporté par un enrochement par une taille plus petite que celui Cet ouvrage exemplaire se distingue - deriques Pézenas en moellons mais aussi et pierres par son de mode taille de construction avec murs périphé

[71] los rocaires n° 19 Les croix de mission - - L’ornementation en faux bois ci ment est souvent associée au reli gieux. L’inventaire sommaire des croix de missions du département de l’Hérault révèle ainsi la présence d’éléments ornés de ce type sur un territoire géographique restreint :- à Roujan et Abeilhan, dans l’ancien cantonconception de Pézenas.et leur ornementation. Ces deux cal vaires sont très proches de par leur

Ilsprésence se caractérisent d’un support par une de élévationbase en de la croix en faux bois ciment et la enrochement de type rocaille. La croix de mission de Roujan a été- érigée en 1920 à la sortie du village en direction de Gabian. D’une hau teur de 8,00m pour une largeur de 4,00m environ, elle repose sur un enrochement orné d’une plaque en marbre qui rappelle le : « Souvenir- detin, laérigé mission par Mprêchéeme à Roujan par- les RP Capucins Anselme et Mar Guerre. 2 mai 1920 Azéma ». Le monument en recon naissance de l’heureuse issue de la ne mentionne aucun nom de maçon.- Degée dimensions en 1913 non similaires loin du àcimetière, celles de Roujan, la croix d’Abeilhan fut éri

à la sortie du village en direction de Servian, à la jonction des avenues Guynemer et Jean-Moulin. Le faux troncconstitué d’arbre par une faisant rocaille office en de sco fût- prend racines sur un enrochement ries basaltiques incluant une fausse- grotte. Un livre très érodé tient lieu de plaque commémorative et men tionne le contexte de la mission : « Mission de 1913 prêchée par les … RR P Anselme-Valentin - A. Duffart curé ». La croix conserve le nom de son maçon, probablement d’origine italienne : « Ch Gatto – Cimentier ».

De haut en bas : Roujan, croix de mission et sa plaque en marbre (photos Frédéric Mazeran) Abeilhan, croix de mission et cartouche de l’artisan (photos Frédéric Mazeran)

los rocaires n° 19 [72] Les croix de Roujan et d’Abeilhan et détail de l’enrochement de la croix d’Abeilhan (dessins et photo Frédéric Mazeran)

los rocaires n° 19 [73] L’architecture funéraire -

L’art du faux bois ne s’est pas canton né à l’ornementation des façades de villas ou à la réalisation d’éléments- décoratifs de jardins ou de parcs. La diversification des entreprises spé- cialisées en « travaux de ciment » a- introduit cette forme d’art à l’inté rieur des cimetières. L’examen som maire de certains d’entre eux montre lad’aménagement présence de simples de tombes croix enen faux ro- boiscaille mais,qui se parfois, distinguent de réels des projetsmonu-

- ments élevés à la même période. La1920 vogue permet du fauxde constater bois dans la l’archi pré- tecture funéraire entre 1890 et sence concomitante d’œuvres en fauxdétaillé bois de sculptées ces dernières, dans la pierrerapide et- d’autres en ciment moulé. L’examen- mentde modèles exécutées, disponibles révèle une sur produc catalo- tion intensive, certainement à partir dans notre département dont les gues. On en relève cinq ou six types - exemples les plus remarquables se rencontrent à Montpellier (Saint-La zare et Celleneuve) et Saint-Georges- d’Orques.aménagements Il est àde noter tombes que cesdétermi croix- sont le plus souvent associées à des- nant un ensemble homogène : sup- portbale et de parties croix reproduisant latérales traitées un faux en enrochement en pierre, pierre tom - pierre froide. Les plus beaux exemples d’aménage mentle cimetière de monuments de Florensac funéraires où quatre en faux bois ciment sont visibles dans tombes ont été identifiées qui ont sansdocumentaire, doute fait leur l’objet concepteur d’un dessin n’a préalable. En l’absence de recherche - pu être identifié mais l’entreprise devait être locale, peut-être le ma çon Bonnet établi dans le proche village de Saint-Thibéry. L’originalité de ces monuments à cette période témoigne de l’ouverture d’esprit de leur commanditaire pour une forme d’art totalement novatrice.De haut en bas : Montpellier, alignement et détail de croix en faux bois au cimetière Saint-Lazare (photos Frédéric Mazeran)

los rocaires n° 19 [74] A D

E

B C

Le faux bois funéraire A : Montpellier, vue générale d’une des quatre tombes en faux bois du cimetière de Celleneuve (photo Frédéric Mazeran) B : Montpellier, tombe de Mgr Benjamin Cabanel au cimetière Saint-Lazare ; il s’agit ici d’une croix « rustique » en pierre sculptée (photo Frédéric Mazeran) C : croix rustique en fonte tirée de l’Album des fontes de la société Simon Perret frères à Lyon : la vogue du faux bois s’est étendue à d’autres types de matériaux que le ciment, notamment la pierre et la fonte (coll. particulière) D : Caux, tombe en faux bois du cimetière (photo Guilhem Beugnon) E : Montpellier, détails de signatures d’entreprises au cimetière Saint-Lazare : Bonnet, V. Joussen et Rousset (photos Frédéric Mazeran)

[75] los rocaires n° 19 Le cimetière de Florensac (photos Frédéric Mazeran)

los rocaires n° 19 [76] L’art de la rocaille A

Plusieurs exemples dans l’Hérault confirment l’emploie concomitant de laannées rocaille 1920-1930, et du faux labois. rocaille En vogue est au début du XX siècle et jusqu’aux des aménagements de jardins, sou- dans de nombreux cas intégrée à vent associée à une thématique religieuse : la fausse grotte abritant la statue de la Vierge Marie ou d’un saint. Plus rares sont les projets de grandele plus envergureremarquable : buffets est celuid’eau duou grottes de type nymphées. L’exemple ses grottes situées en contrebas de Plateau des Poètes, à Béziers, avec la fontaine du Titan. Constituées d’enrochements de type rocaille avec concrétions, elles reproduisent B certains exemples italiens auquel leur auteur, Antonin Injalbert (1845- 1933),intéressants a voulu jardins faire référence. d’agrément du Ladépartement ville de Sète de conserve l’Hérault un : ledes jardin plus dutrès Château apprécié d’Eau. par la Sapopulation. situation enLe limite du centre-ville en fait un lieu e jardin est conçu à partir de la fin du XIX siècle sur un vaste espace resté libre de toute e urbanisation.siècle. Il fait l’objet de nouveaux aménagements au début du XX Il doit aujourd’hui sa notoriété à l’exceptionnelle rocaille située sur- sa partie haute. Elle se présente sous la forme d’une fausse grotte tapis séeL’ensemble de fragments recomposé de stalactites constitue et disposant d’un passage traversant. extérieurementbassin. La rocaille un et enrochementson passage C D valorisésont accompagnés par la présence de garde-corps d’un grand en faux bois de fonte. L’emploi de la rocaille en architecture funéraire reste quant à lui marginal.- On citera cependant le remarquable monument visible à l’intérieur du ci metièrerocaille Saint-Lazarerepose préalablement de Montpellier. sur La technique de montage d’une un choix de pierres, généralement trouées et choisies pour leur effet- esthétique. Différentes tailles sont utilisées, jusqu’à des cailloux desti nés à simuler de fausses concrétions.

[77] los rocaires n° 19 E

F G H

C

L’art de la rocaille

A : Béziers, grottes en rocaille du Plateau des Poètes (photo Frédéric Mazeran) B : Sète, passage traversant de la grotte en rocaille du jardin du Château d’Eau (photo Frédéric Mazeran) C : Neffiès, grotte en rocaille de la Villa Thérèse-Rose(photo Guilhem Beugnon) D : Sète, grotte en rocaille de la Villa Rolande (photo Marc Lugand) E : Corneilhan, rocaille associée à l’escalier d’accès à la chapelle Sainte-Cerrone et détail (photo Frédéric Mazeran) F : Capestang, grotte en rocaille associée à une niche en faux bois ciment dans le jardin de l’ancien presbytère (photo Frédéric Mazeran) G, H : monuments funéraires en rocaille du cimetière Saint-Lazare de Montpellier (photo Frédéric Mazeran)

los rocaires n° 19 [78] Et demain ? la Renaissance maniériste puis le Puisant ses racines dans l’Antiquité, mythe du bon sauvage, l’architecture en faux bois, souvent associée à la rocaille, a trouvé son heure de gloire- sous la Troisième République. Rares étaientartisanat alors contemporain les communes de l’Art qui noun’of- fraient au moins un exemple de cet- veau dans lequel il puisait l’esthé tiquedans le des mépris courbes. alors Le qu’il faux témoigne bois est depuis tombé dans l’oubli, parfois- d’uncombien indéniable d’autres, savoir-faire. très abimés, Com sont bien d’ornements ont déjà disparu, endans passe le département de suivre la mêmede l’Hérault voie ? Plusieursmériteraient exemples pourtant remarquables un classe- des cimentiers marseillais, Les Editions générales, Marseille 1999. Michel Racine, Jardins au naturel : rocailles, gro- ment à même d’en assurer la survie. tesques et art rustique, Actes Sud, Arles 2001. Puisse cet article y contribuer.Frédéric Mazeran Michel Racine, Créateurs de jardins et de paysages en Architecte du patrimoine France de la Renaissance au XXIe siècle, 2 vol., Actes Conseil départemental de l’Hérault Sud/Ecole Nationale Supérieure du Paysage, Arles/ [email protected] Versailles 2001-2002. avec la collaboration de Guilhem Beugnon Sitographie Centre de ressources de Vailhan Site d’Alexis Grandblaise, cimentier rocailleur https://sites.google.com/site/ducimentaunaturel/home Notes Blog de Jean-Michel Chesné 1. Thomas Corneille, Le Triomphe des dames, come- http://jmchesne.blogspot.fr/2011/07/rocailles-fin-de-siecle- die meslee d’ornemens…, Chez Jean Ribou, Paris et-poesie-des.html 1676, p. 10. 2. Le dictionnaire de l’Académie françoise, dédié au Remerciements Roy, vol. 2, Chez Jean Baptiste Coignard, Paris 1694, Nous remercions chaleureusement toutes les per- vol. 2, p. 414. sonnes qui ont répondu à notre appel de recense- 3. Charles Perrault, Isaac de Benserade, Le Labyrinte ment des éléments en faux bois dans le départe- de Versailles, Imprimerie royale, Paris 1677. ment de l’Hérault, et tout particulièrement Céline 4. Emile Littré (trad.), Histoire naturelle de Pline, J. J. Allué (Office de tourisme des Pechs à Murviel-les- Dubochet, Le Chevalier et Comp., Paris 1848-1850, Béziers), Alix Audurier-Cros (professeur émérite de liv. XXXVI, XLII et liv. XII, V. l’université Paul-Valéry Montpellier 3/ENSAM, Saint- André-de-Sangonis), Luc Bazin (Conseil départe- 5. Liant composé principalement de silicates de cal- mental de l’Hérault, Montpellier), Claude Buard Ci-dessus : lettrage en faux bois de cium hydrauliques qui font prise et durcissent par (Caux), Françoise Buard (Association des Amis du l’ancien cinéma Appolo de Vias, hydratation, selon un brevet déposé en 1824 par le Clocher et du Patrimoine de Caux), Christiane Cas- avenue d’ britannique Joseph Aspdin. sou (Neffiès), Angélique Cocordano (responsable (photo Frédéric Mazeran) 6. Michel Racine, Architecture rustique des rocailleurs, patrimoine de la communauté de communes Orb Page suivante : à Roujan, vers 1912 Ed. du Moniteur, Paris 1981, p. 76. et Jaur, Olargues), Yvon Comte (DRAC Languedoc- (coll. Marcelle Jammes) 7. Raoul Villaret, maçon à Saint-Jean-de-Fos, réalise Roussillon, Montpellier), Etienne Dumont (conseil- au début des années 1940 les garde-corps en faux ler municipal, ), Catherine Ferras (Conseil bois d’un balcon et de la terrasse d’une maison de départemental de l’Hérault, Montpellier), Alain Saint-Guilhem-le-Désert (communication de Paul Gensac (ancien architecte de la ville de Montpellier), Villaret, son fils, transmise par Jean-Claude Richard). Jean-Marie Guilhaumon (maire de Neffiès, arrière- 8. Communication de Jean-Claude Richard. petit-fils d’Elie Garreau), Serge Ivorra (Pézenas), Marc Lugand (Conseil départemental de l’Hérault, Bibliographie Villa Rolande de Sète), Denis Nepipvoda (Pézenas), Jean-Louis Requena, Jean-Claude Richard Ralite (di- Jacques Degenne, Bernard Marrey, Joseph Monier recteur de recherche émérite au CNRS, Saint-Guil- et la naissance du ciment armé, éd. du Linteau, Paris hem-le-Désert), Alain Robert (Boujan-sur-Libron), 2013. Lionel Rodriguez (responsable des collections du Françoise Lombaers, Gabriel Pirlet, Rocailles, Direc- Musée des Beaux-Arts de Béziers), Joël Roure (Puis- tion des Monuments et des Sites de la Région de serguier), M. et Mme Sanet (Pézenas), Gilda Vicart Bruxelles-Capitale, Bruxelles 2004. (responsable de l’administration des cimetières de Michel Racine, Architecture rustique des rocailleurs, Montpellier), Paul Villaret (Brax), les propriétaires coll. Les Bâtisseurs inspirés, Editions du Moniteur, de la Villa Germaine à Caux, les propriétaires de Paris 1981. l’ancien presbytère de Capestang. Michel Racine, Les rocailleurs : architecture rustique

[79] los rocaires n° 19 Roujan Un exemple d’escalier en faux bois ciment aujourd’hui disparu