Mean Streets
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Fiche pédagogique Mean Streets Cinémathèque suisse projections scolaires du 7 au 11 mars 2016 Résumé payé de retour parce qu'il a la Film long-métrage de fiction, ferme intention de se faire USA, 1973 A New York, à la fin des respecter pour gagner sa place années 60, les immigrés italiens parmi les durs du quartier. Réalisation et scénario : Martin Scorsese occupent plusieurs quartiers de L'histoire se gâte doublement Manhattan, plus connus sous le pour Charlie, puisque, dans sa Interprétation : toponyme Little Italy. Ils y ont volonté de faire le bien, il éprouve Harvey Keitel (Charlie Cappa) constitué une économie telle des sentiments pour Teresa (Amy Robert De Niro (John "Johnny qu'elle peut vivre en quasi- Robinson), qui n'est autre que la Boy" Civello) autarcie. Cette semaine, elle cousine du bad boy Johnny. David Proval (Tony DeVienazo) célèbre la San Gennaro, Saint Considérée comme folle par sa Amy Robinson (Teresa) Janvier, aussi patron de la ville de communauté superstitieuse, parce Richard Romanus (Michael) Naples. qu'elle souffre d'épilepsie, Teresa Cesare Danova (Giovanni Cappa) Un de ses habitants désœuv- s'attache à Charlie et lui demande Victor Argo (Mario) rés, le jeune Charlie (Harvey de faire le grand saut en George Memmoli (Joey) Keitel), se tourmente car il est partageant un appartement dans David Carradine (l'ivrogne) partagé entre deux ambitions : un quartier moins étouffant, où ils Robert Carradine (l'homme au faire le bien (sous l'influence de seraient plus libres de leurs pistolet) sa foi religieuse et de sa foi en mouvements. Son parrain Zio Harry Northup (le soldat) l'homme) ou adhérer au système Giovanni enjoint effectivement son … mafieux qui régit Little Italy. La neveu de ne pas s'impliquer ni seconde option lui permettrait de avec elle ni avec l'indomptable Production : Warner Bros, Taplin-Perry- recevoir de son oncle Zio Johnny Boy : "Les hommes res- Scorsese Productions Giovanni, sorte de parrain de ce pectables se tiennent avec des microcosme, la gérance d'un hommes respectables". Version originale anglaise et restaurant dans le quartier. Charlie a beau mettre en garde italienne, sous-titrée français Seulement voilà, Charlie traîne Johnny Boy contre son principal avec Johnny Boy (De Niro), une créancier : Michael perd patience Durée : 110' tête de mule que personne ne et décide de lui régler son compte. parvient à maîtriser. Non content Après une énième provocation, le Age légal : 16 ans de faire éclater des pétards, ce je-m'en-foutiste Johnny Boy n'a Age conseillé : 16 ans jeune-là ment, jure et emprunte à d'autre choix que de fuir et, là tout le monde, si possible sans encore, son ami Charlie se jamais rembourser ses dettes. dévoue. Et voici les deux jeunes Ceci vaut pas mal de soucis à gens et Teresa en cavale à Charlie, qui s'est improvisé son Brooklyn, où Michael et son tueur ange-gardien. En effet, son ami les retrouvent plus tard pour Michael, exige absolument d'être venger son déshonneur. ___________________________________________________ Disciplines et thèmes Commentaires concernés Pas un film de gangsters Histoire et Géographie : Flux migratoires italiens ; Qu'on se rassure, Mean Streets n'est pas un film de gangsters ni occupation de l'espace un film sur la mafia et l'âge légal d'admission fixé à sa sortie (16 ans) citadin ; spécificité paraît relativement sévère par rapport l'ultra-violence des images économique du quartier d'aujourd'hui (téléjournaux, films, jeux). Les deux ou trois bagarres new-yorkais de Little Italy ; dans les pubs, soutenues par une musique à contre-emploi, système mafieux ; paraissent aujourd'hui bien gentillettes. Le film décrit en fait, de construction de New York… manière réaliste mais pas crue, le quotidien de la vie que Martin Langues anglaise/italienne : Scorsese affirme avoir vécu jeune homme dans la Little Italy des Analyse de textes critiques années 60, quartier où il lui est arrivé de croiser le jeune Robert De en anglais ; utilisation de Niro, lui aussi immigré de deuxième génération. L'histoire n'est donc l'italien et de l'anglais selon pas filmée du point de vue d'un mafieux et ne décrit pas des les générations ; cultures et règlements de compte entre gangs, avec mitraillettes et exécutions. traditions italiennes (famille, Voilà pour le contexte. sprezzatura, superstition…); fonctions de l'incipit… Mean Streets traite surtout d'un jeune homme aux prises avec une crise de foi, qui se demande quelle est la voie la plus juste pour vivre Citoyennetés et Sociologie, en accord avec sa culture (d'origine italienne), tout en intégrant celle éthique et cultures des Etats-Unis, plus libertaires (dans ces années-là du moins). religieuses : Valeurs familiales et italien- Le film est intéressant pour cela, parce que Martin Scorsese jeune nes ; racisme ; parole a, un temps, hésité à devenir prêtre (il ne tourne La dernière tentation donnée et honneur ; du Christ qu'en 1988). Et aussi parce qu'il s'interroge sur la place que perception de la guerre du doivent occuper les émigrés en Amérique (c'est aussi le sujet de son Vietnam ; importance de la Gangs of New York (2002) et de son documentaire Italianamerican foi, distinction Eglise-foi (1974).) individuelle ; le pardon, le péché et la culpabilité ; la Quand on a été élevé dans Little Italy, que devenir sinon gangster ou fête religieuse de San prêtre ? Or je ne pouvais être ni l'un ni l'autre. Physiquement, je ne pouvais faire un gangster acceptable. Je me faisais toujours tabasser [son Gennaro ; la violence ; le asthme y était aussi pour quelque chose, ndlr] […]. Au fond de moi, j'ai rôle de la femme… toujours désiré être un saint. Mais comment le devenir ? Commencer comme missionnaire ? A huit ans, je voulais m'occuper des lépreux dans Arts visuels, Musique et les îles. (Cieutat 81, cf. bibliographie infra). Education aux médias : Notions de montage ; musi- Finalement, faire du cinéma a permis à Marty de ne pas choisir que additionnelle, utilisation entre le bon et le truand : il peut y faire l'un et l'autre (Les Affranchis intra/extradiégétique, voix (1990), Les Infiltrés (2006), Shutter Island (2010).) over vs voix off ; la ville au cinéma… Méchantes rues : une origine autobiographique A la base du scénario, Scorsese dit s'être inspiré d'une histoire vraie, qui lui est arrivée quand il était jeune. La fois où lui et un ami ont échappé à la mort parce qu'ils sont descendus d'une voiture peu avant que son chauffeur et un de ses passagers se fassent tirer dessus dans le véhicule, à la suite d'une provocation. On aurait pu se faire tuer aussi, dira Scorsese. J'ai fait Mean Streets parce que j'étais dans cette voiture cette nuit-là. Je suis parti de là. Comment ce gosse s'est retrouvé dans une situation pareille. On ne connaissait même pas ces types. Et je me suis dit : "C'est ça, l'histoire à raconter". (Shone 24) La vie à Little Italy n'était pas un long fleuve tranquille. 2 Il s'agit de la seconde génération d'immigrés italiens, celle des fils, et ils sont tous prisonniers de l'écheveau complexe que tissent leurs problè- mes personnels dans l'univers fermé des bas quartiers de l'East Side. J'ai construit mon film […] sur le modèle des drames sociaux produits par la Warner dans les années 30. Il n'y manque même pas le tragique accident de voiture qui se termine par l'éclatement d'une bouche d'incendie dont jaillira un véritable geyser. (extrait du dossier de presse du film, à sa sortie en octobre 1973) Du coup, les personnages scorsésiens se demandent tous comment survivre. Angoissé, Martin Scorsese [à travers ses avatars Charlie, Travis Bickle dans Taxi Driver ou Jake La Motta dans Raging Bull] veut sauvegarder la foi dans une Amérique décadente, victime de ses excès. (Cieutat 34) New York-Los Angeles, aller et retour entre anges et démons Après son premier film Who's That Knocking at My Door (1967), Scorsese signe un contrat avec Hollywood pour tourner y plusieurs films. Mean Streets est d'ailleurs tourné pour l'essentiel à Los Angeles, tandis que les scènes d'extérieur sont tournées à New York pendant une seule semaine. Son mentor à Hollywood, Roger Corman, roi de la série B et des films à bas coûts, s'était proposé pour produire son film, mais à la condition qu'il soit tourné dans le Bronx et avec des acteurs noirs. Inutile de dire que Scorsese refusa de dénaturer son projet. Filmer les rues new yorkaises telles qu'elles sont, dans toute leur réalité, leur vie, sans mise en scène (autre que les angles de vue) imprègne également les plans de Taxi Driver (1976) et Raging Bull (1980). On y voit aussi – et Scorsese ne s'en est jamais caché - l'influence du style quasi documentaire du réalisateur John Cassavetes (Shadows, Faces, Une Femme sous influence, mais surtout les improvisations dans la rue de Husbands). A tel point que la ville revêt, pour le réalisateur de New York, New York, un statut très important. Dans sa première réplique des Infiltrés (2006), Jack Nicholson dit : "I don't want to be a product of my environment. I want my environment to be a product of me." C'est donc contre la ville et ses excrétions que le personnage scorsésien doit se construire. Et d'ailleurs, le titre du film – en France comme aux USA - n'est-il pas Mean Streets ? On ne s'attardera pas sur la période cocaïnomane de Marty, entre Taxi Driver (1976) et Raging Bull (1980), si ce n'est pour dire que la rue, il l'a aussi consommée, métonymiquement comme littéralement.