DIAGNOSTIC DE CONFLITS – RÉGION | JUILLET 2015 1

RAPPORT DE DIAGNOSTIC DE CONFLITS

RÉGION ANOSY DISTRICT DE TAOLAGNARO – Commune Mandromondromo- tra et Commune DISTRICT D’– Commune

Projet d’appui a la reconciliation nationale et la consolidation de la paix (PAPRECOP)

JUILLET 2015

SEARCH FOR COMMON GROUND Avec le soutien du PNUD et en étroite collaboration avec les organisations de la société civile de la Région d’Anosy

Rédigé par RANDRIANARISOA Panarivo Mamy Harijaona

CONTACT:

Hilde DEMAN Koloina RANDRIAMIARY Directeur Pays Chargé de suivi-évaluation Email: [email protected] Email: [email protected] Tél: +261 20 22 493 40 Tél: +261 20 22 493 40

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TABLE DES MATIÈRES 1. RÉSUMÉ EXÉCUTIF 4 2. CONTEXTE 5 2-1- Introduction 5 2-2- Objectif d’un diagnostic de conflit 6 2-3- Méthodologie 6 3. EVOLUTIONS RÉCENTES DES CONFLITS ET DE L’INSÉCURITÉ COMMUNAUTAIRE 7 3-1- Contexte local 7 3-2- Les conflits les plus récurrents 9 3-3- Analyse des acteurs et leurs niveaux d’influence 12 4. MÉCANISMES POUR LA PAIX 13 4-1- Capacités en résolution de conflits 13 4-2- Perception des différents acteurs sur la résolution des conflits 15 4-3- Espaces de dialogue 17 4-4- Pistes d’interventions pour la sécurité communautaire et pour la consolidation de la paix 17 5. MÉCANISMES D’ALERTE PRÉCOCE 18 5-1- Mécanismes existants 18 5-2- Connaissance des mécanismes d’alerte précoce par la population 18 5-3- Perceptions de l’utilité et de l’accessibilité des mécanismes d’alerte précoce 19 6. RECOMMANDATIONS 19 6-1- Pour la communauté 19 6-2- Pour SFCG et le projet PAPRECOP 19 6-3- Pour les PTF et pour les autres intervenants : ONG, OSC, etc. 20 6-4- Pour l’Etat malagasy 20 7. BIBLIOGRAPHIE 21

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LISTE DES GRAPHES

GRAPHE 1 : Perception de la population à Anosy sur le niveau de sécurité au niveau national et au niveau communautaire 8

GRAPHE 2 : Perception des gens sur les conflits qui se manifestent les plus souvent au sein de la communauté 9

GRAPHE 3 : Principales recommandations de la communauté pour instaurer la cohésion sociale et la sécurité communautaire 18

LISTE DES TABLEAUX

TABLEAU 1 : Tableau des zones d’études 7

TABLEAU 2 : Les conflits les plus récurrents – causes et impacts 10

TABLEAU 3 : Analyse des acteurs et leurs niveaux d’influence 12

TABLEAU 4 : Niveau de satisfaction de la population 15

GLOSSAIRE

DINA Le « dina » est une convention collective des membres d’une communauté ayant pour finalité de vivre en harmonie. Un « dina » s’applique aux membres ayant adhéré et peut avoir l’homologation du Tribunal dans son application

LONAKA, OLOBE Ce sont les plus aînés dans la communauté qui jouent les rôles des autorités traditionnelles. Ils sont toujours consultés par la communauté pour la résolution des conflits sociaux

DAHALO Bandes armées et organisées qui sont principalement des voleurs des zébus

FOKONTANY C’est une circonscription administrative la plus proche de la communauté. Un Fokontany est composé de plusieurs secteurs et c’est l’ensemble de plusieurs Fokontany qui forme la commune

MAGNEKE Evènement connecteur de la Région pendant les périodes de récolte durant lequel la communauté s’entraide tout en festoyant

KALONY Ce sont les dahalo convertis devenus des sortes de quartier mobile assurant la sécurité communautaire

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1. RÉSUMÉ EXÉCUTIF

SFCG met en œuvre le « Projet d’Appui au Processus de Réconciliation nationale et à la Consolidation de la Paix » dont l’objectif est de contribuer à la prévention des conflits et la sécurité communautaire à travers l’identification participative des sources de conflit, la facilitation du dialogue, des sensibilisations ciblées et un renforcement du système d’alerte précoce local. Ce rapport relate les résultats de diagnostic de conflits de la Région d’Anosy plus spécifiquement dans les Communes de : Tranomaro (District d’Amboasay Sud), Mandromondromotra et Manantenina (District de Taolagnaro). La collecte de données a été menée au mois de juillet 2015. Le présent rapport dégage les tendances générales au sein de la Région en matière de paix et de sécurité

Les conflits les plus récurrents sont :

• les conflits fonciers (Commune de Mandromondromotra et de Tranomaro),

• les conflits de générations qui se manifestant par la divergence d’opinions des jeunes et des notables sur le mode de pêche,

• les conflits liés à l’accès aux ressources naturelles,

• et les conflits domestiques et de voisinage.

Dans la Commune de Manantenina (Fokontany de Manantenina haut, Ambalateza et Ankaramania), c’est le conflit foncier entre les autochtones (Antavaratra) et les immigrés (Merina, Betsileo) qui constitue le principal conflit. L’alcoolisme, l’adultère ont provoqué aussi des conflits domestiques.

En ce qui concerne la Commune de Tranomaro d’après les informations collectées au niveau des Fokontany de Tranomaro Centre, Tsilamaha I, Ankazoabo et Andranolava, les types des conflits mis en exergues sont les conflits liés aux vols causés par la sècheresse. Afin de subvenir à leurs besoins alimentaires, certains volent les biens de leurs voisins (vol des récoltes) et cambriolent des maisons ; ceci ne fait que nourrir la source de scission entre voisins.

Face à ces différents conflits, les mécanismes de résolution de conflits utilisés par la communauté sont :

• les discours sous le tamarinier dirigés par les notables (olobe, lonaka1) ; cette structure traditionnelle est menée par des aînés leaders d’opinions,

• les dialogues en vue de la réconciliation dirigés par le chef Fokontany,

• les dialogues facilités par les autorités (maire, conseillers communaux),

• les enquêtes diligentées par la gendarmerie pour trouver la vérité et le coupable,

• et l’application de la loi par le tribunal et les décisions prises sur peines pour les coupables.

Pour le maintien de l’ordre et de la sécurité, la communauté travaille avec la gendarmerie et aussi avec la police communale. Spécifiquement pour la Commune de Tranomaro et ses Fokontany, qui sont réputées comme étant une zone rouge pour l’acte de banditisme des dahalo2 (voleurs des zébus organisés et armés), une structure d’auto-défense existe composée par des dahalo convertis appelés kalony3.

Dans ces Fokontany, il n’y a pas de mécanisme d’alerte précoce structuré sauf pour la Commune de Mandromondromotra où il y a la convention conjointement signée par la communauté avec les Communes riveraines (Ampasy Nampoina, Soanierana), le projet Qit Mineral Madagascar (QMM) et les autorités locales (Région, Commune et District) afin de prévenir les conflits fonciers. Mais en général, dans ces communes, il y a le comité de vigilance et la police communale qui ont averti les communautés pour tout éventuel danger menaçant la paix et la sécurité communautaire. A Tranomaro, ce sont les kalony qui sont les gardiens de la paix

1 Les aînés ou notables dans la société traditionnelle 2 Voleur des zébus organisés et armés 3 Voleurs des zébus convertis après l’opération coup d’arrêt de la gendarmerie

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et assurent la sécurité contre les voleurs des zébus.

En vue de pérenniser la sécurité et de renforcer la cohésion sociale, les recommandations de la communauté sont basées sur :

• la création d’emplois pour les jeunes dans le but éradiquer l’oisiveté, source de la délinquance et de conflits liés aux vols,

• l’éducation citoyenne sur les droits et liberté de vote pour éviter la manipulation par les politiciens,

• le renforcement de la collaboration avec les forces de l’ordre et les autorités locales pour la lutte contre les dahalo,

• et, pour prévenir le conflit foncier, la mise en place de guichet foncier dans le cadre de la décentralisation foncière.

2. CONTEXTE 2-1- Introduction

Le « Projet d’Appui au Processus de Réconciliation Nationale et à la Consolidation de la Paix » (PAPRECOP) est mis en œuvre par SFCG avec le soutien du PNUD, sous tutelle du Ministère de la Communication et des Relations avec les Institutions (MCRI), en étroite collaboration avec les organisations de la société civile et les médias malgaches pour une durée de 27 mois. Le projet PAPRECOP propose de répondre aux besoins en consolidation de la paix identifiés durant la transition et après les élections de 2013, pour prévenir la résurgence d’une crise politique, économique et sociale. Le projet est démarré par la réalisation de diagnostic de conflits au niveau des Communes d’intervention et le présent rapport concerne les Communes de Tranomaro d’Amboasay Sud), Mandromondromotra et Manantenina

La Région d’Anosy est géographiquement localisée dans l’extrême sud- est de la Grande Ile. Elle est délimitée au nord par la Région d’Atsimo Atsinanana avec Ihorombe et au sud et à l’est par l’Océan Indien. La partie occidentale de cette Région est délimitée par les Régions d’Androy et Atsimo Andrefana4. Même si la Région d’Anosy est réputée pour ses potentialités économiques et touristiques, la population y est majoritairement rurale (87%). Carte de localisation des trois communes Deux Districts sont concernés par ce diagnostic de conflits. Il d’intervention s’agit du District de Taolagnaro où se trouvent la commune de Mandromondromotra et Manantenina ainsi que le District d’Amboasary Sud avec la commune de Tranomaro. Peuplée par 5 983 habitants, la Commune de Mandromondromotra est située à 17 km de Taolagnaro. Elle est limitée au nord par la Commune rurale de , au sud par la Commune rurale d’Ampasy Nahampoana, à l’ouest par la Commune rurale de l’Isaka et à l’est par l’Océan Indien. Dans cette commune, la population vit pour sa subsistance sur des produits de la pêche tels que les langoustes, crevettes, poissons mais aussi de la riziculture. La commune dispose des potentialités touristiques grâce aux sites comme Lokaro et elle a bénéficié de la retombée socio-économique du projet QIT MINERALS MADAGASCAR (QMM). Ce sont les Antambolo et les Antatsimo (groupes formant l’ethnie Antanosy) qui constituent principalement les habitants de cette commune.

Spécifiquement, le Fokontany de Mandromondromotra est majoritairement constitué par des agriculteurs

4 Ministère de l’Agriculture, monographie de la Région Anosy, juin 2013

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tandis que les Fokontany d’Itapera et Hovatraha sont dominés par des pêcheurs. En général, cette catégorisation socio-économique des habitants de ces trois Fokontany explique pourquoi les conflits identifiés dans ces communautés apparaissent sous deux formes différentes.

En effet, dans le Fokontany de Mandromondromotra, les principales activités de la population sont liées à la terre tandis que l’exploitation des ressources halieutiques caractérise la vie de la communauté dans le Fokontany de Hovatraha et Itapera.

La commune de Manantenina est localisée dans la partie extrême sud-est de la Grande Ile dans le District de Taolagnaro. Elle est délimitée au nord par la Région d’Atsimo Atsinanana à côté du District de Vangaindrano, au sud par la Commune d’Iakoboho près de Mahatalaky, à l›ouest par la Commune de et sa partie orientale est bordée par la mer de l’Océan Indien. En 2001, à titre estimatif, la commune compte 19 000 habitants avec un pourcentage élevé de l’ethnie Antanosy appelée aussi Antavaratra, né de l’alliance entre Tanosy et Tesaka. Dans cette commune, la population vit essentiellement des produits halieutiques associés aux activités agricoles (riziculture).

La troisième commune d’intervention est Tranomaro qui est une commune rurale géographiquement localisée dans le centre sud du District d’Amboasary Sud. Elle se trouve à 52 km du chef-lieu du District. La commune est habitée d’environ 11 000 habitants qui sont majoritairement composés par des Antandroy et d’autres ethnies immigrantes tels que les Bara. Dans cette commune, sur les 28 Fokontany existants, 4 Fokontany ont été ciblés pour le diagnostic des conflits à savoir Tranomaro centre, Tsilamaha I, Ankazoabo et Andranobe. 2-2- Objectif d’un diagnostic de conflit

L’objectif du PAPRECOP est de contribuer à la prévention des conflits et la sécurité communautaire à travers l’identification participative des sources de conflit, la facilitation du dialogue, les sensibilisations ciblées et le renforcement du système d’alerte précoce local. Pour ce faire, SFCG introduit pour la première fois à Madagascar l’outil de diagnostic de conflits. Ceci est une approche et un outil spécifique d’analyse des conflits. Cette activité sera réalisée régulièrement pendant la mise en œuvre du projet pour (i) comprendre l’évolution et la dynamique des conflits et des opportunités de paix ; (ii) planifier ou adapter les activités du projet sur la base des spécificités du contexte et la dynamique changeante ; (iii) recueillir des informations sur les pistes de solutions en faveur d’une paix durable dans la commune ; (iv) veiller à ce que SFCG et/ou d›autres acteurs ne font aucun mal en exacerbant des conflits et tensions latents (l’approche « Ne pas nuire ») ; (v) et promouvoir le dialogue, la réflexion et la réduction des tensions au sein des communautés. 2-3- Méthodologie

Le diagnostic de conflits été réalisé à travers 12 Focus Group Discussions (FGD), 26 Entretiens Individuels (EI) et 90 Questionnaires Individuels (QI) dans quelques Fokontany qui sont proposés par les autorités locales. Pour les FGD, des représentants des femmes ainsi que des hommes et des jeunes étaient invités à y participer séparément. Les EI ont vu la participation des autorités locales au niveau des Fokontany et de la Commune, des fonctionnaires de services techniques déconcentrés (Centre de Santé de Base, instituteurs et directeurs d’établissement scolaire), des représentants des forces de l’ordre dont la gendarmerie. Les notables ainsi que les leaders religieux avec des simples citoyens ont également pris part à ces entretiens individuels. L’identification de ces participants a été réalisée avec le concours des chefs Fokontany et aussi grâce à la collaboration avec les sociétés civiles locales.

La méthodologie de ce diagnostic de conflits présente quelques limites :

• L’étude a été effectuée sur quelques Fokontany au niveau des 2 Districts seulement ;

• La récolte des données a été effectuée dans un contexte pré-électoral5 ;

• La méthodologie est principalement qualitative.

5 Élection communale prévue le 31 juillet 2015 à Madagascar

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TABLEAU 1 : Tableau des zones d’études

RÉGION DISTRICT COMMUNES FOKONTANY

Mandromondromotra Mandromondromotra Hovatraha Itapera Taolagnaro Manantenina haut Anosy Manantenina Manantenina bas Ankaramania

Tsilamaha I Amboasary Sud Tranomaro Tranomaro centre Ankazoabo

3. EVOLUTIONS RÉCENTES DES CONFLITS ET DE L’INSÉCURITÉ COMMUNAUTAIRE 3-1- Contexte local

Les types des conflits et la forme de l’insécurité dans les Districts d’Amboasary Sud et de Taolagnaro sont différents dans leur contexte. Cette différence est remarquée dans les trois communes cibles de notre diagnostic des conflits.

Pour Amboasary Sud qui est une zone défavorable à l’agriculture et fréquemment frappée par la sècheresse depuis 2014, les vols des récoltes constituent le principal conflit. En effet, l’insécurité alimentaire a poussé les gens à commettre des vols de manioc, patate et maïs qui sont les aliments de base de la population locale. Dans la Commune de Tranomaro, l’historique de l’insécurité est liée aux vols des zébus. Si initialement, le vol des zébus fait partie de l’us et coutume de la population locale comme étant entre autres une démonstration de force prouvant la virilité pour les jeunes hommes préparant l’entrée dans la vie matrimoniale, depuis le début de la crise politique et sociale qui a déstabilisé Madagascar en 2009, le vol des zébus est devenu un crime générant des conflits violents dans la société et les communautés du District d’Amboasary Sud.

En 2014, d’après les forces de l’ordre locales, 1 000 têtes des zébus ont été volés et la population a abandonné les villages par peur d’être tués par les dahalo. Des maisons furent saccagées et brûlées.

« Depuis l’année 2009 jusqu’en 2014, chassés par les dahalo, nous nous enfuyons dans la forêt de cactus en abandonnant la maison, les biens et les vieillards. Il y a même des femmes qui se sont accouchées dans cette forêt » selon une épicière du Fokontany de Tranomaro.

Actuellement, grâce à « l’opération coup d’arrêt » de la gendarmerie de Taolagnaro dont l’objectif est de chasser les dahalo et de les encourager à rendre les armes et de se réintégrer dans la société, actuellement la population vit dans la sérénité. Ce sont ces kalony ou les dahalo convertis, militairement formés par les forces de l’ordre qui assurent actuellement la sécurité communautaire à Tranomaro.

Dans la Région d’Anosy, on a constaté que la terre arable est insuffisante par rapport au nombre de la population qui est majoritairement rurale. Soit la zone est dominée par des montagnes, soit la terre est infertile selon sa structure pédologique surtout dans le District d’Amboasary Sud. C’est dans ce cadre que l’accès aux terrains, pour l’agriculture ou l’élevage, constitue des problèmes pour la communauté et qui sont souvent à la

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source des conflits fonciers. La superficie agricole moyenne exploitée par ménage est petite d’environ 1,7 ha6 et la majorité des ménages agricoles (63%) cultivent moins de 1,5 ha de terre. Dans ce cas, l’absence de sécurité foncière est un véritable problème.

Dans le District de Taolagnaro, l’installation de QMM (Qit Minéral Madagascar) dans la commune de Mandromondromotra a fait déclencher des mésententes entre ce projet et ceux qui possèdent des terres actuellement délimitées dans les zones d’extraction de la compagnie RIO TINTO, opératrice de ce projet minier. La population rapporte que l’abus de confiance et la corruption du service de domaine et de la topographie expliquent également le conflit foncier qui apparaît dans la société si on prend le cas de la Commune de Manantenina.

Les graphes suivant montrent la perception de la communauté sur la sécurité au niveau local et national. Les données sont collectées à partir des enquêtes individuelles effectuées uprèsa des 90 personnes. On a constaté que les hommes se sentent beaucoup plus en sécurité par rapport aux femmes. Des recherches plus approfondies sont recommandées pour comprendre ces différences et formuler des réponses adéquates. En général, les hommes qui sont des chefs de famille sont membres de comité de vigilance mise en place au niveau Fokontany. Dans la Commune de Tranomaro, les kalony sont exclusivement constitués par des hommes. Les hommes ont donc plus facilement accès aux informations concernant la situation sécuritaire. Mais en général, la difficulté liée à la réception des émissions radiophoniques ne permet pas à la communauté de s’informer sur les actualités nationales et la situation sécuritaire au niveau national.

GRAPHE 1 : Perception de la population à Anosy sur le niveau de sécurité au niveau national et au niveau communautaire

PERCEPTION DE LA SÉCURITÉ PERCEPTION DE LA SÉCURITÉ AU AU NIVEAU NATIONAL NIVEAU COMMUNAUTAIRE

50% 80%

40% 60%

30%

40%

20%

20% 10%

0 0

1 PAS DE 99 PAS DE 1 PAS DE SÉCURITÉ 2 SÉCURITÉ SÉCURITÉ RÉPONSE MOYENNE SÉCURITÉ2 SÉCURITÉMOYENNE SÉCURITÉ 4 EN SÉCURITÉ 4 EN SÉCURITÉ 3 ASSEZ BONNE 3 ASSEZ BONNE

Femme Homme

6 Projet Pôle Intégré de Croissance (PIC), évaluation de l’impact environnemental et social du pôle de Fort Dauphin, vol 2, chapitre 4 et 5, version finale 2005

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3-2- Les conflits les plus récurrents

Les focus group ainsi que les entretiens individuels réalisés dans les 3 communes ont permis de recenser les différents conflits qui y existent à savoir :

• les conflits fonciers,

• les conflits domestiques et de voisinage,

• les conflits politiques,

• les conflits liés à l’insécurité alimentaire,

• les conflits de génération,

• et les conflits liés aux ressources.

GRAPHE 2 : Perception des gens sur les conflits qui se manifestent les plus souvent au sein de la communauté

60%

50%

40%

30%

20%

10%

0

7 CRIME 8 AUCUNE 3 IMPUNITÉ

99 PAS DE RÉPONSE 2 ABUS DE POUVOIR AUTRES À SPÉCIFIER 5 CONFLITS FONCIERS 1 CONFLITS POLITIQUES

4 CONFLITS DOMESTIQUES 6 ACCÈS AUX RESSOURCES

Manantenina Tranomaro

D’après le graphe ci-dessus, ce sont les conflits domestiques, les conflits fonciers ainsi que les conflits liés à l’accès aux ressources et à l’abus de pouvoir qui caractérisent les 3 communes ciblées par notre diagnostic de conflits. Le conflit foncier est manifesté d’une part par les différends caractérisant la relation entre la population de Mandromondromotra et le projet QMM et d’autre part ce conflit est expliqué par les problèmes entre les autochtones et les immigrés (Betsiléo et Merina7). L’insécurité alimentaire et l’alcoolisme sont souvent cités comme facteurs aggravants des conflits domestiques et de voisinage (vol des récoltes, disputes entre voisins). Dans le Fokontany d’Ankazoabo (Tranomaro), l’extraction des micas est devenue un terrain de mésentente entre la population locale et les mineurs venant de l’extérieur de la commune.

7 Groupes ethniques de Madagascar qui sont originaires de la haute terre

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TABLEAU 2 : Les conflits les plus récurrents – causes et impacts

Le tableau ci-dessous détaille les conflits qui ont été relatés par la communauté ainsi que leurs causes et impacts sur la cohésion sociale et la sécurité. Une explication plus détaillée sera donnée ensuite. TYPES DE CAUSES DE CONFLITS IMPACT DE CONFLITS CONFLITS

Une historique de litige foncier existe à Mandromondromotra entre ceux ayant perdu leurs terres • Cohésion sociale brisée au sein des familles et au et le projet Qit Minéral Madagascar (QMM). Dès le début de la mise en œuvre du projet QMM sein des communautés en 2005, d’après un membre de l’administration du Fokontany, des conflits et frustrations sont nés • au sein de la communauté. Certains ont perdu leur terrain dans le cadre de la délimitation des Manque de crédibilité des agents de l’Etat et des surfaces depuis l’installation de l’usine et dès le début de l’extraction proprement dite. Ce problème autorités locales diminuée concerne 286 utilisateurs traditionnels des terres, originaires de la Commune et du Fokontany de • Développement de la culture de vengeance, Mandromondromotra. Ces gens-là ne sont pas satisfaits de l’indemnisation pécuniaire octroyée violence physique par le projet. En vue de prévenir et de résoudre ces problèmes d’ordre foncier, une convention collective ou dina8 a été signée entre le maire de Mandromondromotra et les Communes voisines, et les responsables des services techniques locaux (eaux et forêts). Cette convention a mis en place un système de co-gestion par les communautés des ressources naturelles au sein de la concession minière. Cela concerne les droits d’utilisation (usufruitiers) à la fois pour les zones de conservation et CONFLIT de production. Un comité de gestion (COGE) chargé d’assurer la compréhension et l’appropriation FONCIER communautaire gère actuellement le dina. Pourtant, malgré cette mesure préventive, les conflits fonciers sont devenus latents dans la Commune de Mandromondromotra.

A Manantenina, le désaccord entre la population autochtone, ou Antavaratra, et les immigrés dont les Merina et les Bestileo se trouve au cœur du litige foncier en se référant aux propos de quelques hommes réunis dans le focus group à Manantenina haut. Traditionnellement dans cette zone, lors des évènements rituels malheureux ou heureux, chaque membre de la famille doit payer obligatoirement quelques sommes d’argent, à titre de cotisation pour la bonne réalisation de ces évènements rituels. Mais pour celles ou ceux qui sont partis pour trouver des activités de subsistance en dehors de leur village natal, leurs familles ont vendu la part de leurs terres aux Merina ou Betsileo afin de réunir de l’argent pour le paiement de ce devoir familial. En revenant aux villages, ces émigrés volontaires n’étaient pas contents de voir leurs biens entre les mains des nouveaux propriétaires et ils sont rentrés en conflit avec les nouveaux propriétaires en voulant récupérer vainement leurs terres car même si l’affaire est arrivée jusqu’au service de domaine et de la topographie ou au niveau du tribunal, la corruption de ces services a rendu impuissants ces anciens propriétaires dans le processus de la résolution de ce problème.

8 Pacte sociale

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Dans le Fokontany d’Hovatraha, Commune de Mandromondromotra, le mode de pêche • Dispute entre les aînés et les jeunes pêcheurs constitue un conflit entre les jeunes et les aînés. Ces derniers, pour souci de sécurité, n’acceptent • pas de voir ces jeunes aller pêcher la nuit. Alors que selon ces jeunes expliquent lors du focus Diminution de l’autorité des notables CONFLIT DE group organisé à Hovatraha, la pêche nocturne est beaucoup plus fructueuse. Au sein de GÉNÉRATION la communauté, l’intransigeance des jeunes a remis en question la place et la notoriété de ces notables (to-teny, lonaka) en tant que leaders d’opinions et gardien de la paix au sein de la communauté. Malgré des rencontres fréquentes entre les deux parties, les notables n’ont pas réussi à trouver des solutions à ce différend. Ils se contentent actuellement de convaincre leurs progénitures respectives. Ce conflit est devenu un problème latent entre ces deux générations.

Dans la Commune de Tranomaro, il y a le gisement des micas dans le Fokontany d’Ankazoabo. • Conflit latent entre la communauté locale Actuellement, cette extraction minière artisanale a créé des conflits entre les autochtones et ceux d’Ankazoabo et les miniers immigrants qui sont venus en masse de l’extérieur du Fokontany attirés par cette carrière. Les autochtones ne sont pas contents de voir ces étrangers travailler dans cette mine qu’il considère la leur car elle se trouve sur leur territoire. Dans cette situation, l’explosion de conflit violent est une menace CONFLIT pour la communauté comme ce qui s’est passé à Andranondambo et Ambatotsivala. La lutte LIÉ À pour l’appropriation d’un gisement minier constitue également un terrain des conflits entre L’ACCÈS AUX ces deux communautés. Dans la zone d’Andranondambo, il y a un gisement de saphirs et de RESSOURCES micas comme ce qui existe à Ankazoabo (Commune Tranomaro) qui n’était plus exploité depuis longtemps. Mais récemment, des habitants d’Andranondambo ont recommencé à l’exploiter de façon artisanale. Pour les gens d’Ambahitsivala, ces richesses sous-sols se trouvent sur leur territoire et ils sont mécontents de voir leurs voisins d’Andranondambo travailler dans cette carrière. Ce n’est pas la raison principale de l’attaque du mois de mai de cette année 2015, mais cela a exhorté les habitants d’Ambatotsivala poussés par les Dahalos, à s’attaquer au village voisin. Le calme là-bas n’est pas revenu sans l’intervention de la gendarmerie locale.

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3-3- Analyse des acteurs et leurs niveaux d’influence

Les focus group et les entretiens individuels nous ont permis grâce à l’utilisation de la matrice d’influence de ressortir le tableau ci-dessous relatant les différents acteurs impliqués dans les conflits et leur niveau d’influence dans ces conflits.

Cette catégorisation d’acteurs est obtenue à partir de l’outil d’ « analyse des acteurs » utilisé durant les sessions FGD. Les « vulnérables » sont les personnes qui sont victimes de la situation conflictuelle. Les « spectateurs » sont des acteurs qui ne prennent aucune responsabilité pour aider la communauté dans la gestion des conflits. Les « acteurs qui peuvent faire la différence » sont des personnes (physique ou morale) importantes et influentes dans le processus décisionnel et peuvent jouer un grand rôle dans la résolution de conflits. Les « personnes à suivre » sont ceux ou celles qui ont des rôles et attributions importants dans la gestion des conflits, mais qui n’accomplissent pas leurs rôles efficacement (soit faute de moyens ou/et manque de volonté dans l’accomplissement de leur travail). Cette catégorisation est tirée de la matrice d’influence (Cf. Annexe) utilisée lors des focus group de discussion et ce sont les personnes présentes durant ces focus qui ont sortis ces différents acteurs. TABLEAU 3 : Analyse des acteurs et leurs niveaux d’influence

Le schéma de l’influence et importance pour la sécurité communautaire.

ACTEURS NIVEAU D’INFLUENCE OBSERVATIONS CONFLIT FONCIER

Ménage jugé vulnérable à la Vulnérables L’abus de confiance, la corruption pauvreté et le trafic d’influence sont très présents dans la communauté. Les voisins Spectateurs Notables, leaders religieux Personnes qui peuvent faire la Le manque de connaissances de différence la population vulnérable sur leurs droits fonciers favorise aussi ces Autorités locales, forces de l’ordre Personnes qui peuvent faire la actes d’abus et de corruption. différence CONFLIT DE GÉNÉRATION

Les jeunes pêcheurs Vulnérables Dans le Fokontany de Hovatraha, les notables n’ont pas réussi à Notables (olobe, lonaka) Personnes qui peuvent faire la résoudre les problèmes sur le différence conflit avec les jeunes pour la Autorités locales Personnes qui peuvent faire la pêche nocturne. différence Leaders religieux Personnes à suivre CONFLIT LIÉ À L’ACCÈS AUX RESSOURCES

Les miniers locaux Vulnérables La société civile pourrait jouer le rôle d’interface entre les Notables (olobe, lonaka), autorités Personnes qui peuvent faire la autorités locales et la communauté locales (maire, chef quartier), différence pour faire le plaidoyer en vue force de l’ordre, état central de réglementer selon cette Société civile Personnes à suivre extraction minière selon la loi en vigueur. L’objectif est d’empêcher l’extraction illicite qui a engendré de conflit entre les miniers locaux et les miniers qui ne sont pas originaires de la commune. CONFLIT DOMESTIQUE ET DE VOISINAGE

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Mères de famille Vulnérables L’intervention de cette entité est efficace dans la mesure où Notables (olobe, lonaka), chef Personnes qui peuvent faire la la réconciliation des notables Fokontany différence pourrait essayer de résoudre dans le cas de conflits conjugaux ou aider les victimes à chercher une Forces de l’ordre (gendarmerie) Personnes qui peuvent faire la aide professionnelle. différence La présence des forces de l’ordre Société civile et leaders religieux Personnes à suivre pourrait prévenir la recrudescence des vols et de violence domestique.

Les leaders religieux pourraient éduquer et sensibiliser la communauté dans leur paroisse.

4. MÉCANISMES POUR LA PAIX 4-1- Capacités en résolution de conflits

Le processus de résolution quelques soit le type de conflits suit les étapes suivants :

Discours sous le tamarinier dirigé par les notables (lonaka, olobe). Généralement, cette structure traditionnelle est respectée par la communauté comme elle est très efficace dans le processus de la réconciliation. Le discours sous le tamarinier contribue également à la consolidation de la solidarité communautaire.

Dialogue en vue de la réconciliation au niveau du Fokontany et au sein de la Commune. Ces instances sont considérées par la communauté comme étant protectrices en tant que représentants de proximité de l’Etat dans le cadre de la politique de la décentralisation qui donne au maire le pouvoir de représenter le Ministère de la décentralisation et au chef Fokontany de représenter le Ministère de l’Intérieur.

Dans le cas où les conflits ne sont pas résolus à ce niveau de réconciliation et de réparation pour les victimes, l’affaire est portée au sein des forces de l’ordre et du tribunal surtout quand il y a des violences physiques tels que pour les conflits conjugaux

Mais pratiquement, la communauté préfère de ne pas apporter l’affaire jusqu’à ces niveaux administratifs pour les raison suivantes ;

• Le droit à payer pour les parties adverses augmente au fur et à mesure des étapes de résolution des conflits (10 000Ar au niveau Fokontany, 20 000Ar au niveau de la Commune et allant jusqu’au plus de 40 000Ar si les problèmes ne sont pas résolus au niveau communautaire jusqu’à la Commune). Les montants sont versés au fonctionnement du Fokontany ou la Commune selon les cas.

• La communauté ne fait plus confiance aux forces de l’ordre et au tribunal qui, à ses yeux, sont les services administratifs les plus corrompus dans le processus de la résolution de conflits. D’habitude, la communauté dit trouver l’intérêt de régler ses différends au niveau de la réconciliation des autorités traditionnelles, du Fokontany et de la Commune pour éviter de payer cher aux autres instances de résolutions des conflits mais surtout par peur d’encourir la peine d’emprisonnement pour ceux qui n’ont pas de moyens financiers.

Pratiquement, la résolution des conflits communautaires se fait d’une manière hiérarchique selon l’illustration schématique ci-dessous :

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APPLICATION DE LA LOI DIAGNOSTIC DE CONFLITS – RÉGION ANOSY | JUILLET 2015 14 APPLICATION DE LA LOI TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE OUTIL UTILISE Lois

FORCE DE L’ORDRE Gendarmerie OUTIL UTILISE Enquête

COMMUNE Maire, Conseillers OUTIL UTILISE Communaux Dialogue de réconciliation RECONCILIATION

FOKONTANY Chef quartier, OUTIL UTILISE quartiers mobiles Dialogue de réconciliation

COMMUNAUTAIRE Notables, autorités OUTILS UTILISES traditionnelles Discours sous le tamarinier, DINA

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4-2- Perception des différents acteurs sur la résolution des conflits

Les focus group, les entretiens individuels et les enquêtes individuels ont permis de ressortir le tableau ci-dessous relatant les différentes perceptions de la population sur l’intervention des forces de l’ordre, des autorités locales, des organisations de la société civile, les politiciens, les autorités religieuses et les médias. L’illustration graphique suivante est la traduction en pourcentage de la perception des personnes qui ont participé aux questionnaires individuels dans quelques Fokontany des 3 Communes d’intervention. TABLEAU 4 : Niveau de satisfaction de la population

INTERVENANTS DANS LA RÉSOLUTION DES NIVEAU DE SATISFACTION DE LA POPULATION PERCEPTION COMMUNAUTAIRE SUR CES INTERVENTIONS CONFLITS

80% 69% Dans la Région Anosy, le niveau de satisfaction sur les interventions des 65% forces de l’ordre est de 66,67%, avec 69% femmes et 65% hommes. 60% Individuellement, la communauté a dit être satisfaite de l’intervention des Femme forces de l’ordre mais les données qualitatives collectées à partir de focus INTERVENTION DES 40% FORCES DE L’ORDRE DANS group ont justifié qu’elle n’a pas confiance aux prestations de la gendarmerie. 25% Toutefois, les forces de l’ordre n’ont pas joué leurs rôles en tant que LA COMMUNAUTÉ 21% Homme 20% protectrice des personnes et de leurs biens, gardiennes de l’application des 10% 6% lois : droits de l’homme non respectés, corruption, abus de pouvoir (cas de la

0 Commune Tranomaro, Manantenina), selon la communauté. JE NE SAIS NON OUI PAS

98% Dans la Région Anosy, le niveau de satisfaction sur les interventions des 100% 90% autorités locales est de 93%, avec 98% femmes et 90% hommes.

80% La collaboration avec les chefs quartiers est fructueuse selon la communauté de tous les Fokontany. Les chefs Fokontany sont toujours INTERVENTION DES 60% Femme impliqués dans la résolution de conflits communautaires (conflit de AUTORITÉS LOCALES DANS voisinage, conflit conjugal). Avec les autorités au niveau de la commune, COMMUNAUTÉ 40% Homme la relation est essentiellement marquée par la régularisation des questions administratives (état civil, légalisation des documents administratifs…) La 20% 8% commune prend ses responsabilités surtout dans la résolution de conflits 0% 2% 2% 0 fonciers. JE NE SAIS NON OUI PAS

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Dans la Région Anosy, le niveau de satisfaction sur les interventions 80% des OSC est de 56 %, avec 69% femmes et 44% hommes. Les femmes, 69% plus motivées à entrer dans des associations sont les plus sensibles aux

60% interventions des OSC. 48% 44% Femme Les ONGs présentes dans la zone ne sont pas impliquées directement dans INTERVENTION DE LA 40% la résolution des conflits mais elles focalisent leur intervention dans le cadre SOCIÉTÉ CIVILE 26% de développement socio-économique (sécurité alimentaire, agriculture, Homme 20% hygiène et assainissement…) D’après les autorités locales, SFCG est la 8% 5% première organisation qui travaille dans ce domaine de prévention et gestion de conflits dans leurs communes. 0 JE NE SAIS NON OUI PAS

Perception de la population sur la participation des citoyens

Pratiquement, les femmes ainsi que les jeunes n’ont pas de place leur permettant de s’exprimer dans les questions liées à la résolution des conflits. La place des notables est toujours réservée aux sexes masculins les plus âgés pour un mandat à vie. Les femmes ne sont pas consultées dans la prise de décision et elles sont rarement présentes à des réunions ou assemblées organisées dans le Fokontany.

Perception de la population sur l’intervention des politiciens

Les politiciens ne sont pas impliqués dans la résolution de conflits qui existent dans la société. Par contre, dans le but de gagner à l’élection, ils attisent la scission au sein de la communauté en profitant l’ignorance et la pauvreté des gens pour acheter leur liberté de choix durant la période électorale Ce sont les jeunes qui sont les plus victimes de cette manipulation politicienne.

Perception de la population sur l’intervention des autorités religieuse

L’intervention des leaders religieux est limitée seulement à leur paroisse et leurs disciples. Ils ne sont pas intégrés dans la société surtout dans la résolution des conflits.

Perception de la population sur l’intervention des médias

Il existe des Fokontany qui ne sont pas couverts par des émissions radiophoniques telles que Manantenina et Tranomaro. Pour les autres, avec la radio, la communauté est branchée habituellement sur l’actualité nationale et des programmes récréatifs (feuilleton, chanson). Dans la Commune de Tranomaro, l’installation de relais pour la réception des émissions radiophoniques est une priorité dans le but d’améliorer la sécurité.

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4-3- Espaces de dialogue

Le discours sous le tamarinier, qui est toujours utilisé par la communauté, est un espace traditionnel d’échange et de résolution des conflits et de réconciliation. Durant ce discours, les notables olobe,( lonaka) invitent les parties en conflit à s’exprimer librement en essayant plutôt de trouver un terrain d’entente que d’aggraver la situation. Pour ce faire, les notables dans leur décision poussent celles ou ceux qui sont en conflit à se pardonner en dédommageant les victimes selon la pratique traditionnelle (exemple : sacrifice des zébus pour la réconciliation). Habituellement, le conflit conjugal et les conflits fonciers sont résolus à ce niveau. Cette structure est très respectée et utilisée par la communauté dans le cadre de renforcement de la cohésion sociale.

Les évènements ci-dessous créent également une occasion pour la communauté de se rencontrer et d’animer des débats, des discussions relatives à la vie de la communauté en général :

• Fêtes rituelles telle que la circoncision

• Travaux de Haute Intensité de Mains d’œuvre (HIMO) proposés par des organismes intervenant dans la Commune et Fokontany (PAM, FAO…)

• Travaux d’entraide dans les champs rizicole (magneke) 4-4- Pistes d’interventions pour la sécurité communautaire et pour la con- solidation de la paix

Les participants aux différentes sessions du diagnostic de conflits et les répondant(e)s au QI partagent des propositions convergentes pour résoudre le conflit et pour la consolidation de la paix et de la sécurité communautaire. Le graphe suivant résume les recommandations ayant trait aux facteurs sociaux que la population recommande. Les différentes actions pour la consolidation de la cohésion sociale, la paix et la sécurité communautaire sont relatées dans le graphe ci-dessous.

Les axes suivants sont cités par la communauté :

• l’amélioration de la collaboration avec les autorités locales,

• l’amélioration de la collaboration avec les forces l’ordre,

• l’appui au développement socio-économique,

• la création d’emplois,

• la lutte contre les dahalo,

• la mise en place de dina,

• le renforcement de la cohésion sociale,

• le renforcement de la structure traditionnelle,

• et l’éducation civique et citoyenne.

Mais les pistes d’action les plus suggérées par la communauté sont :

• le renforcement de la cohésion sociale,

• la création d’emploi pour les jeunes,

• l’appui au développement socio-économique,

• et l’amélioration de la collaboration avec les autorités locales et les forces de l’ordre.

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GRAPHE 3 : Principales recommandations de la communauté pour instaurer la cohésion sociale et la sécurité communautaire

30% 28.89% 27.78%

25%

20%

15%

10% 8.89% 7.78% 7.78% 6.67%

4.44% 4.44% 5% 2.22% 1.11%

0

PAS DE RÉPONSE TRADITIONNELLE

CRÉATION D’EMPLOI SOCIO-ÉCONOMIQUE MISE EN PLACE DE DINA

APPUI AU DÉVELOPPEMENT LUTTE CONTRE LES DAHALO AVEC LES FORCES DE L’ORDRE AVEC LES AUTORITÉS LOCALES

RENFORCEMENT DE LAÉDUCATION STRUCTURE CIVIQUE ET CITOYENNE

AMÉLIORATION DE LAAMÉLIORATION COLLABORATION DE LA COLLABORATION RENFORCEMENT DE LA COHÉSION SOCIALE

5. MÉCANISMES D’ALERTE PRÉCOCE 5-1- Mécanismes existants

Dans ces 3 Communes, la prévention des conflits et le renforcement de la sécurité sont assurés par le comité de vigilance, la police communale, les kalony et les forces de l’ordre. Par exemple, pour la menace d’attaque des dahalo, les kalony en collaboration avec la force de l’ordre ont monté la garde pour avertir la population par des cris d’alerte (koike). A Tranomaro, les kalony travaillent toute la nuit pour maintenir la sécurité de la population.

5-2- Connaissance des mécanismes d’alerte précoce par la population

Le Comité d’Alerte Précoce (CLAP) n’est pas encore une structure mise en place dans les communes Fokotany où nous avons effectué le diagnostic de conflits malgré le fait que certaines communes telle que Tranomaro sont classées comme étant des zones rouges pour des actes de banditisme.

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5-3- Perceptions de l’utilité et de l’accessibilité des mécanismes d’alerte pré- coce

Vu la fragilité de la sécurité dans cette Commune, le CLAP s’avère une structure durable pour le maintien de l’ordre et de la sécurité. Cette difficulté de connexion aux réseaux téléphoniques constitue aussi un problème pour la communauté de Manantenina. A Tranomaro, le doute plane encore sur la réintégration sociale des dahalo convertis. La communauté est rassurée seulement grâce à la présence omniprésente des forces de l’ordre.

« Nous avons peur de la vengeance des dahalo après l’intervention spéciale des forces de l’ordre selon un employé de service étatique local. »

La mise en place de CLAP est ressentie en termes de besoins de sécurité de la communauté mais le problème de couverture téléphonique est un défi à relever pour son fonctionnement non seulement à Tranomaro mais aussi à Manantenina.

6. RECOMMANDATIONS 6-1- Pour la communauté

Les communautés ont argumenté que la pauvreté se trouve au cœur des problèmes d’insécurité. C’est ainsi qu’elles ont proposé comme solutions :

• La collaboration avec des organismes d’appui au développement socio-économique (agriculture, élevage, santé)

• L’intensification de la lutte contre les dahalo

• La lutte contre l’alcoolisme

• La création d’emplois pour les jeunes

• L’amélioration de la collaboration avec les forces de l’ordre 6-2- Pour SFCG et le projet PAPRECOP

• Renforcement des capacités de la structure traditionnelle de résolution de conflits

• Appui à la mise en place de dina ou pacte social (homologation)

• Appui à l’éducation civique des citoyens pour prévenir la manipulation politique

• Renforcer la sensibilisation et l’éducation des jeunes et de leur donner un espace de dialogue leur permettant de s’exprimer et de se comprendre (création des infrastructures sportives en tant que terrain d’entente pour les adversaires)

• Renforcer la sensibilisation sur la bonne gouvernance au niveau des autorités locales (Fokontany, Commune, District, Région) afin de garantir la transparence et la redevabilité en tant qu’outil susceptible de prévenir les conflits inhérents à la corruption, impunité et aux abus de pouvoir

• Renforcer la collaboration avec les médias et les autorités locales dans l’objectif de sensibilisation et d’éducation (production des émissions radiophoniques sur les thématiques telles que la résolution des conflits, lutte contre la corruption, consolidation et maintien de la paix)

• Capitaliser et mettre à l’échelle District l’approche « Common Ground » pour améliorer la gestion et prévention de conflits

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6-3- Pour les PTF et pour les autres intervenants : ONG, OSC, etc.

• Résorber les problèmes liés à l’insécurité alimentaire

• Créer des opportunités d’emplois pour les jeunes pour diminuer le taux de la délinquance juvénile et ses conséquences sur la sécurité communautaire 6-4- Pour l’Etat malagasy

• Pour le conflit foncier, mettre en place une structure décentralisée des services de domaines et topographiques qui pourrait aider la communauté à connaître les droits fonciers et aussi de savoir les procédures relatives au bornage et titrage de terrain

• Développer une politique de désenclavement des zones à haut risque d’insécurité par l’amélioration de système de communication (réseaux téléphoniques, réception radio, infrastructure routière)

• Mettre en place une stratégie pérenne pour la lutte contre les dahalo dans le respect des droits de l’homme

• Intensifier la lutte contre la corruption

• Développer le partenariat avec les partenaires techniques et financiers, organismes non gouvernementaux de développement socio-économique

• Développer de politique d’éducation citoyenne et de la culture de démocratie à Madagascar

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7. BIBLIOGRAPHIE

• Ministère de l’Agriculture de l’Elevage et de la Pêche, UPDR Monographie de la Région Anosy, juin 2003

• Projet Pôle Intégré de Croissance (PIC), évaluation de l’impact environnemental et social du pôle de Fort Dauphin, vol 2, chapitre 4 et 5, version finale 2005

• Monographie de la monographie commune Tranomaro

• Monographie commune Mandromondromotra

• Monographie commune Manantenina

• Guidance note for the conflict scan methodology – ILT SFCG –march 2015l

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