Contribution À L'étude Des Idées Politiques Des Jansénrbfes F Rançais
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Contribution à l'étude des idées politiques des jansénrbfesf rançais de | 640 à la révolution francaise Philippe SUEUR Assistdnt à fUniversité d'Amiens Déterminer quelle fut l'influence du fait religieux sur le fait politique, tenter de dégager les attitudes politiques des Jansénistes,tel est llobjet-de cette éttrde; sous une autre formulation, nous limitons le suiiet dt cet article aux. id-ées.politiques des Jansénistes français. C'est notre préoccupa- tion première qui, néanmoins, ne méconnaît pas un autre moyen d,inveiti- gatjon- pour évaluer les rapports politico-religieux, à savoir i,analyse des attitudes morales, des réactions passives ou aètives aux persécutions dans lesquelles les Jansénistesoffrent une image dont les composantes leur sont souvent inconscientes.Au xvrru siècle et encore davantage au xvur" siècle, iI étêi,t'de bon ton pour un courtisan de dépeindre les iansénistes comme des républicains. Des im,prudents frrent de pascal un républicain, comme d'aucuns verront dans les Jansénistes des conspirateuri et des factieux qui amenèrent la révolution française(l). Sans noirs lier à de telles affirma- tions dont nous examinergns les fondements, il importera de répondre à la question suivante: le Jansénismeétait-il lié à î,esprit libéral, le Quiétis'mepouvait l'être à I'esprit patriotique ? (2) Lbpposition soulevée"oÀ-" au xvrrf contre la bulle Unigenitus participait-elle-Constitution aux prémices de la révolution ? Peut-on aussi prétendre que la ôivile du Clergé soit d'inspiration janséniste? Discernef le mythe de la réalité, tel est ;;i;" objet qui demeurera dans le domaine déjà trop vaste des idéês politiques ; nous ne sous-esti,monspas pour , autant les problernes sociologiquei qui dépenderrt toujours étroitemènt des rapports entre le 'p_olitique. fait rAig]eux eiie fait Nous serons d'ailleurs arnênesà y faire allusion poîr éctairir nos thèses. Le Jansénisme est un domaine très étudié, trop peutétre pour faire une synthèse globale du mouvement, mais notre secteùr-bénéficie-de recherchés non I*:lt",r spécialiséesdans les idées politiques, excepté l,exceltente syn- thèse de_travai,l que nou,s offre René Taveneàux(3). Lès travaux récerits, tant_en France qu'aux Etats-Unis, utilisa,nt bien souvent les méthodes struc- turaliste ou sociologique, ou la méthode historique tradition""ff" o"i *it à jour des aspects .s-oc1aux,diplomatiques, politiques et prrilàsùrrique;;;- veaux qui, joints à nos- propres recherchês, dôivent nous pèrniettr,e de présenter un panorama des idées politiques de 1640à lzgl ionformémenr aux centres d'intérêt que se réserve la discipline de l?ristoi,redes idées poli- tiques da,ns nos faculiés. Créquy,Mémoîres, t- 10: ch. V : . On ne que revolutlon_,_.111.\9lqli|9 .a" saurair nier la trancaise 1 {té priparée, produite et soutenue par les Jansénistej. i - Gusta (Francesi:o),,Deil' i"fùèn;à' a;i Gîà;t;;i;i;';;ti; Tâ,otuzione di Francia, Ferrara, 1794,p. 123-167. ^ !3191é.gqire (Abbé He^n1i),.Les Ruines de port-Royal, paris, 1801,p. tS-22-23._ ourrn (Léo),conférence faite à la Faculté deDroit de-paris,-le 11'jânvier 1972. (3) Taveneaux(René), Iansénisme et potitique, paris, Armand colin, 1965. Philippe SUEUR Qu'est-ceque le Jansénisme? Il n'est pas de problème plus complexe; et sans entrer dans les subtilités théologiques qui ne peuvent avoir place ici, il nous faut, au niveau des idées politiques, dégager une vision suf' fi.samment claire pour comprendre les conséquencesidéologiques et poli- tiques d'un tel mouvement aux xvlr€ et xvrrre siècles. Jean Orcibal (4) tente de répondre à cette question en soulignant l'immense comp'lexité des déû- nitions, et surtout en admettant plusieurs Jansénismes,non seulement une disseulb,lanceentre celui du xvrre siècle et celui du xvrrr", ce que Sainte- Beuve avait noté depuis longtemps, mais aussi en admettant au xvrre siècle un éolatement dans le Jansénisme glorieux, longuement considéré comrne monolithique. Nous développerons p,lus loin comment trois et rnême quatre courants, étudiés récemment(5) eurent politiquement des expressions difié- rentes. Potrr donner néanmoins une esquisse explicative du Jansénis,rneconsi- déré globalement, nous dirons que c'est u,n mouvement religieux qui appa- raît vers 1640 dans ltristoire du Catholicis,me (Ie mot janséniste apparais- sant pour la première ,fois en 1641).C'est à la fois une théologie et une morale, la première est l'æuvre de deux hommes liés par l'amitié et une mêrne orientation augustinienne : Corneille Jansen, évêque d'Ypres, ancien professeur à l'U'niversité de Louvain, auteur de l'Augustinus, et Jean Duver- gier de Hauranne, abbé de Saint{yran. Quant à la morale, sévère et rigoriste en général, elle est, pouvons-nous dire, l'ceu,vre d'une magnifique pléiade avec De Barcos, les Pascal, les Arnauld, Nircole,etc. Nous aurons I'occasion de revenir sur les conséquences socialesde cette morale (6). De la théologie janséniste dont nous avons tout oublié, sauf I'idée de prédestination, qu'en est-il et pourquoi entraîna-t-elle un déchirement aussi profond ohez les Catholiques, querelle multi-séculaire, dont les plaies ne sont pas toutes fermées aujourd'hui. Jansen rédigea l'Augustinus(7) pour justifier contre les Jésuites l'en- seignement qu'il diffusait à Louvain. Il y reprenait des thèses émises au xvre siècle par Baïus, sur la grâce et la prédestination, auxquelles avait répondu le Jésuite Molina qui, à l'époque, fut violemment condamné par les Dominicains. La querelle du xvr! siècle fut vive et faillit même être dramatique pour I'Eglise; apaisée, cependant elle renaît sous une forme similaire qui allait opposer farouche.ment Jansénistes et Jesuites jusqu'en 1762.Le Molinisme était la thèse officielle des Jésuites ,qui s'immiscaient, ouvertement ou di'scrètement,à tous les niveaux d'éducation et de com'man- dement de la France. Cette théologie ne contestait.pas le dogme du péctté originel mais en minimisait les effets; lhomme restait seulement privé de dons surnaturels, mais Dieu y suppléait par la grâce suffisante offerte à tous: Dieu donnant aux hommes la liberté d'agir. Le Molinisme (4) Orcibal (Jean), Qu'est-ce que le jansénisme 2 in Cahiers de I'association internationale des études françaises, juillet 1953. (5) Goldmann (Lucien), le Dieu caché, Paris, 1956.- Namer (Gérard), l'abbé Le Roy et ses amis, Essai sur le Jansénismeextrémiste intramondain, Paris, s.E.v.P.E.N.,1964. (6) Preclin (Edmond), les Conséquences sociales du fansénisme, in Revue historique de l'Eglise de France, juillet-septembre 1936. (7) Jansenius (Cornelius) Augustinus, 1639. (l publication du traité est posdhirme,Jansenius étant mort èn 1638.Il fut publié par ses amis Calenus et Froidmont.) Cette somme de plus de 1 000pages en deu4 volumes sur la pensée de saint Àugustin rouvrait l'inépuisable querelle du Pélagianisme. /ANSEN/SrES FRANÇAIS DE 1640A LA REVOLUTION FRANÇAISE sbpposait à la vision tragique du Jansénismequi donnait le primat à I'initiative divine agissant dans I'homme par la grâce efficace.La querelle de la grâce effcace et de la grâce suffisante était là, ou, pour systématiser avec outrance cette opposition, pouvons-nousposer ainsi le prob,lème: y a-t-il un déterminisme divin, une prédestination ? ou bien pouvons-nous dire : Jésus4hrist est-il mort pour tous les hommes (chacun ayant sa chance de salut) ou est-il mort pour une élite choisie de toute éternité ? S'appuyant constamrnentsur saint Augustin, les Jansénistesdevenus anti-molinistes(8), c'estàdire anti-Jésuites furent rapidement condamnés, à travers cinq pro. positions extraites de I'ouvrage dé Jansen interdit en 1653.Telles soit- les bases de la queretrle. Pourquoi Ie Jansénismes'est-il installé si facilement en France ? Parce qu'il s'ins'crivait dans Ie mouvement de la contre-ré'forrne, se décrivant même connme en étant l'aile marchante ; citons le père Lucien ceyssens: " Je considère Ie Jansénisme comme un mouvement de réforme théorique et- pratique, issu de la contre-réforme septentrionale (do,nt par ailleurs- il fait partie) réactionnaire visà-vis de l'anti-Jansénismà,lequel m'apparaît comme un mouvement semblable, né plutôt de lhumanis,lne méridional > (9). Mais aussi parce que sa pensée, o synthèse à la fois augustinien"", ràie- sienne et bérulienne qui r-ejoignaitles lignes de force dJtoute la contre- 1éfoane française, explique-l'a--udienceae-saint-cyran d.ansles milieux de Port-Royal ... et à travers eux, dans toute Ia so,ciétéparisienne, (10). port-Royal ^ Est<ce que par-ce que demar:dait u le respect des dogmes fondamentaux de la giâce toute-puissantede Jésus€hriit, et de la"pré- destination gratuite et antérieure à tous les mérites ,, (il), qu,elle fut persécutée ? Pourquoi la querelle devint-elle politique lusqu'a un point t-el que- l9s partisa,ns, notamment au xvrrr" siecte, ignoraient toui du d.og--g (12). ? considérant que le Jansénismen'a lamâis eu d,unité substan- tielle (13), qu'il s'est affirmé en fonction d'éléments de nature politique et sociale - I'antagonisme avec les résuites entre autres - nous sommes amenés à considérer deux grandes périodes: la première allant de 1640 à 1713,c'està-dire 'del'Auguslinus jusqu'à la bulle unigenitus, c,est la grande qrrf. p.ouy.1ii _:-Y"n.,|" ^lbn quatifiei d;intempoiàrr", â-etirtocratique sîrtout Jusqu'en 1690; mais. déjà en 1695,il ne reitait pratique.mentpîus de Jan- sénistes-qui aient été ên contaci avec ceux des orisinés.-càii" èp"q"", malgré J'opposition des courants internes, sera la pius intéressante au niveau idéologique et politique par ron oiigi.alité d une part, m,ais aussi parce y -qu'il avait .com-batpouf une idéol&ie, four une-y attitude de vie. qériode, aé tztg à la révôirriiô", il u.rru perte pureté..Dans..la 9e.co1{e de la originelle(14).