La Démocratie Chrétienne En France. Le Mouvement Républicain Populaire
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Robert BICHET Couverture Ecusson du M.R.P. LA DEMOCRATIE CHRETIENNE EN FRANCE, le M. R. P. DU MÊME AUTEUR ESSAIS : L'information est-elle une propagande ? (Editions du Mail, 1946). La Décentralisation. Commune. Région. Département ? Faut-il supprimer le Conseil Général ? (Persan-Beaumont, 1977). Epuisé. HISTOIRE ET FOLKLORE COMTOIS : La chapelle de Saint-Hilaire (Jacques et Demontrond, 1941). Épuisé. Histoire de Rougemont (Persan-Beaumont, 1973). Épuisé. Contes de Mondon et d'autres villages comtois (Jacques et Demontrond, 1975). Épuisé. Un Comtois musulman. Le Docteur Philippe Grenier. Prophète de Dieu. Député de Pontarlier (Jacques et Demontrond, 1976). Prix Louis Pergaud, 1977. Racontottes de Franche-Comté (Jacques et Demontrond, 1978). Épuisé. Un Village Comtois au début du siècle (Cêtre, Besançon, 1979). ROBERT BICHET LA DEMOCRATIE CHRÉTIENNE EN FRANCE LE MOUVEMENT RÉPUBLICAIN POPULAIRE BESANCON JACQUES ET DEMONTROND 26, rue Ernest-Renan 1980 Il a été tiré de cet ouvrage sur offset Centaure ivoire trente exemplaires hors-commerce numérotés de HC I à HC XXX deux cent soixante exemplaires numérotés de 1 à 260 AU LECTEUR Ce livre est un témoignage sur le M.R.P. et la IV République. Il est le « témoignage » d'un homme qui a été un des acteurs de ce Mouvement Républicain Populaire, de ce parti de la Démocratie Chrétienne en France, qui a joué pendant quinze ans, après la Libération, un rôle essentiel dans la politique française, et qui reste méconnu. Jusqu'ici peu de livres ont été consacrés au M.R.P. A ma connaissance, il n'a fait l'objet que de trois thèses dont une, celle du professeur E. F. Caillot, a été publiée, et d'un livre, très général, de Barthélémy Ott. Je ne donne bien entendu, sur la vie politique, sur les événe- ments et sur les hommes que ma propre interprétation, mais elle en vaut d'autres. Elle vient d'un militant qui a vécu à l'Association Catholique de la Jeunesse Française (A.C.J.F.), à la Confédération des Travailleurs Chrétiens (C.F.T.C.), au Parti Démocrate Popu- laire (P.D.P.), aux « Amis de l'Aube » et aux Nouvelles Équipes Françaises (N.E.F.), dans la Résistance, les origines du M.R.P. ; qui a été de surcroît, aprés la Libération, Secrétaire Général du Mouvement et Président des Nouvelles Équipes Internationales (Union internationale des démocrates chrétiens). Certains trouveront excessifs les détails relatifs aux structures et à la vie interne du M.R.P., ils m'ont paru nécessaires pour montrer ce qu'était l'organisation d'un parti démocratique. En bref, mon témoignage n'a d'autre ambition que d'apporter ma contribution à l'histoire, tant décriée, d'un Mouvement poli- tique et d'une époque. Je tiens à remercier le Président Georges Bidault, Louis Bour, Robert Lecourt, Jean Letourneau qui ont lu, tout ou partie de mon manuscrit, et qui m'ont encouragé et conseillé. R. B. LES ORIGINES DU M. R. P. Le 21 octobre 1945, les Français qui depuis 1936 n'avaient pas voté pour des parlementaires, étaient appelés à élire leurs députés. C'est, à double titre, une date unique dans l'histoire poli- tique de la France. Pour la première et la dernière fois, communistes et socialistes avaient ensemble la majorité absolue, 302 députés sur 586, tandis qu'un parti, inconnu un an avant, le Mouvement Républicain Populaire (M.R.P.) faisait une entrée fracassante. Il enlevait d'emblée 151 sièges, talonnant le parti communiste et devançant le parti socialiste. Les anciens et puissants partis d'avant guerre étaient écrasés. Les radicaux sauvaient à grand- peine quelques sièges et les modérés reculaient partout devant la poussée des démocrates chrétiens. Le M.R.P. qui, pendant quinze ans, allait jouer un grand rôle dans l'histoire de notre pays, le M.R.P. qui était, comme nous disions, « issu de la Résistance » n'était pourtant pas né d'une génération spontanée. Il était l'héritier d'une longue tradition, d'une tradition vieille d'un siècle et demi. Les précurseurs. L'origine remonte à la Révolution. Des hommes appartenant aux trois ordres revendiquèrent la liberté et prirent position contre les injustices et les privilèges. Ils accueillirent avec faveur les idées nouvelles en les imprégnant d'esprit chrétien. Le vocable de « démocratie chrétienne » apparaît, semble-t-il, pour la première fois dans un discours prononcé le 21 novembre 1791 à l'Assemblée législative par LAMOURETTE, évêque constitutionnel de Lyon. Il n'avait pas alors un sens politique, mais signifiait : « christianisme populaire », « Eglise des humbles », « fraternité chrétienne » (*). Pourtant, le même LAMOURETTE, le 7 juillet 1792, prononçait un nouveau et pathétique discours, celui-là bien « démocrate chrétien » puisqu'il demandait déjà le rapprochement de la droite et de la gauche. Il avait été si éloquent, si émouvant qu'à la fin de son discours, les membres de l'Assemblée législative se levèrent pour l'applaudir et les adversaires s'embrassèrent. Cette réconci- liation ne dura pas et ces embrassades sont restées célèbres sous le nom de : baisers Lamourette. Cette tentative de rapprocher l'Eglise du peuple et de la démocratie, font de LAMOURETTE et de ceux qui l'entouraient, notamment l'abbé Henri GRÉGOIRE, qui fit voter l'abolition de l'esclavage et qui déclarait : « La rage de nos ennemis n'a pu nous arracher et ne nous arrachera jamais l'amour de la religion et de la république », des précurseurs de la « démocratie chrétienne ». L'avenir et l'ère nouvelle : de Lamennais à Ozanam. Pendant l'époque napoléonienne et la Restauration il n'est plus question de démocratie et donc de démocratie chrétienne. En 1830, l'idée, sinon le vocable, est reprise par LAMENNAIS et l'équipe de l'Avenir. Les thèses et l'idéologie qu'ils défendent sont d'esprit démocrate chrétien. Curieuses figures que celles de LAMENNAIS et de LACORDAIRE dont l'amitié fut si profonde mais aussi si tragique dans ses consé- quences et sa rupture. LAMENNAIS exerçait déjà son ministère alors que LACORDAIRE, étudiant en droit, s'acharnait contre les idées religieuses. Disciple de VOLTAIRE, il s'affirmait libéral et contestait la société qui lui apparaissait mesquine et sans idéal. Suivant sa propre expression : (*) Le M.R.P., thèse pour le doctorat en science politique, présentée et soutenue en 1975 par Pierre LETAMENDIA. « il demande au ciel et à la terre une grande cause à servir par un grand dévouement ». Et voilà qu'à vingt-cinq ans, stagiaire au barreau de Paris, il abandonne la toge pour entrer au séminaire de Saint-Sulpice. C'est là qu'il rencontre l'abbé de LAMENNAIS. On est en 1830. La Révolution de Juillet a créé un malaise politique et religieux, on conteste à la fois le pouvoir politique et l'autorité religieuse. Pour beaucoup de catholiques la religion a besoin d'un renouveau pour reprendre l'influence compromise par la chute des Bourbons. Pour LAMENNAIS et son équipe ce renou- veau sera « la liberté », la reconquête des esprits par la liberté. Le 17 octobre 1830, trois mois après la révolution, LAMENNAIS, avec les abbés LACORDAIRE, GERBET, SALINIS, ROHRBACHER et les laïcs DE CAUX, DE MONTALEMBERT, HAREL DE TARNEREL font paraître le premier numéro de l'Avenir. Ils prennent pour devise : « Dieu et Liberté » avec en sous-titre : « Le pape et le peuple ». Tout en se ralliant à la monarchie constitutionnelle, ils critiquent certaines de ses décisions et réclament : la liberté de l'enseignement, la décentralisation du pouvoir, la séparation de l'Eglise et de l'Etat. Rome s'inquiète de l'audace de l'équipe de l'Avenir. Alors que le journal a cessé de paraître depuis le 15 novembre 1831, le Pape, le 15 août 1832 condamne l'attitude de ses rédacteurs. Tous les disciples de LAMENNAIS se soumettent. LAMENNAIS lui, après avoir hésité, choisit la démocratie contre Rome. En 1848, on retrouve certains des disciples de LAMENNAIS autour d'OZANAM et de l'abbé MARET. La « Démocratie Chrétienne » prend alors un sens vraiment politique et définit un gouvernement démocratique inspiré par le christianisme. C'est la thèse défendue abondamment dans les colonnes de l'Ere Nouvelle qui connaît d'avril 1848 à avril 1849 un étonnant succès. Son tirage atteint en effet 20 000 exemplaires ce qui est alors considérable. C'est à cette époque, le 17 juillet 1848 que MARET écrit à BASTIDE, ministre de CAVAIGNAC : « La Démo- cratie Chrétienne, voilà l'avenir ». La Révolution de 1848, où l'on voit le peuple et le clergé planter ensemble les arbres de la liberté, n'est-elle pas d'inspiration démocratique et chrétienne ? L'avènement du Prince Napoléon marque l'échec de la II République et la Démocratie Chrétienne disparaît jusqu'aux années 1890. Rerum novarum. Les abbés démocrates. Le premier parti démocrate chrétien. La publication par le pape Léon XIII, le 15 mai 1891, de la fameuse encyclique Rerum novarum, sur la condition ouvrière et sa lettre du 16 février 1892 au clergé et aux catholiques français leur conseillant le ralliement à la République vont déclencher un véritable bouillonnement, un jaillissement d'initiatives diverses, éparses, qu'il faudra beaucoup de temps pour contrôler, coordonner, organiser. Les Abbés démocrates sont des francs-tireurs qui mènent la lutte en ordre dispersé, chacun à sa façon avec son noyau d'amis et de disciples. Un des plus célèbres, l'abbé LEMIRE, député d'Hazebrouck, est à la fois individualiste et familial. Il fut le grand promoteur des jardins ouvriers ( La plupart des autres écrivent et diffusent d'innombrables brochures et livres et créent de multiples organes de presse. Des quotidiens d'abord comme le Monde de l'Abbé NAUDET, qui paraît de 1894 à 1896 et se saborde faute de lecteurs ; Le Peuple Français de l'Abbé GARNIER ; la France libre à Lyon.