BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) DOSSIER 5 NOUVELLE-CALÉDONIE / FORÊTS DE MONTAGNE

Les forêts de montagne de la Nouvelle-Calédonie

Même si ses sommets ne dépassent guère 1 600 m, la Nouvelle-Calédonie possède des forêts de montagne, en raison de conditions écoclimatiques insulaires. Malgré leur faible extension, ces forêts sont d'un grand intérêt pour la biodiversité et la compréhension de la phytogéographie et phylogénie de certains groupes, tels les gymnospermes ou les genres Metrosideros (Myrtaceae) et Cunonia (Cunoniaceae).

Robert Nasi Cifor PO Box 6596 JKPWB 10065 Jakarta Indonésie

Tanguy Jaffré IRD BP A5 Nouméa Cedex Nouvelle-Calédonie

Jean-Michel Sarrailh Cirad-forêt Station de Mon Caprice 7, chemin de l’IRAT Ligne Paradis 97410 Saint-Pierre-Réunion

Xeronema moorei et Dicranopteris linearis (fougère) dans le maquis de la montagne des Sources, à 900 m d’altitude. Xeronema moorei and Dicranopteris linearis (fern) growing in maquis on the Montagne des Sources, at 900 m above sea level. Photo R. Nasi. BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) 6 DOSSIER Robert Nasi, MONTANE FORESTS / Tanguy Jaffré, Jean-Michel Sarrailh

RÉSUMÉ ABSTRACT RESUMEN

LES FORÊTS DE MONTAGNE MONTANE FORESTS LOS BOSQUES DE MONTAÑA DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE IN NEW CALEDONIA DE NUEVA CALEDONIA

L’existence d’un gradient local de Higher local temperature gradients La existencia de un gradiente local de température plus prononcé près des near isolated mountains (inselbergs) temperatura más pronunciado cerca montagnes isolées abaisse l’altitude result in continuous cloud cover at de las montañas aisladas, reduce la moyenne de formation des masses below normal elevations, creating the altitud media de formación de las nuageuses, créant ainsi des condi- right conditions for the development masas nubosas creando así condicio- tions propices au développement des of montane forests in New Caledonia nes propicias para el desarrollo de los forêts de montagne en Nouvelle- at altitudes below 1 600 m. These bosques de montaña en Nueva Calédonie à des altitudes inférieures forests are especially important for Caledonia a altitudes inferiores a à 1 600 m. Ces forêts sont d'une biodiversity and to improve our 1 600 m. Estos bosques son de una grande importance pour la biodiver- understanding of the phytogeogra- gran importancia para la biodiversi- sité et la compréhension de la phyto- phy and phylogeny of groups such as dad y la comprensión de la fitogeo- géographie et phylogénie de certains conifers or genera such as Metrosi- grafía y filogenia de algunos grupos, groupes, comme celui des conifères deros (Myrtaceae) and Cunonia como el de las coníferas o los de los ou ceux des genres Metrosideros (Cunoniaceae). They provide vital géneros Metrosideros (Myrtaceae) y (Myrtaceae) et Cunonia (Cunonia- refuge areas for endangered fauna Cunonia (Cunoniaceae). Constituyen ceae). Elles constituent aussi des and play a significant role in water también refugios para la fauna ame- refuges pour la faune menacée et regulation. These forests are rela- nazada y desempeñan una función de jouent un rôle de régulateur hydrolo- tively well protected, with few threats regulador hidrológico nada desdeña- gique non négligeable. Relativement from logging though slightly more ble. Relativamente bien protegidos, bien protégées, elles sont peu mena- from mining activities. The main están poco amenazados por la explo- cées par l’exploitation forestière, un threat seems to be the global warm- tación forestal y un poco más por las peu plus par les activités minières. Le ing phenomenon, which could cause actividades mineras. Sin embargo, el plus grand risque semble, toutefois, the disappearance of the very specific mayor riesgo parece venir del reca- être le réchauffement climatique glo- ecological conditions that are vital to lentamiento climático global, que bal, qui pourrait entraîner une dispa- their survival. podría acarrear la desaparición de las rition des conditions écologiques par- condiciones ecológicas particulares ticulières nécessaires à leur exis- Keywords: montane forest, biodiver- necesarias para su existencia. tence. sity, ecology, New Caledonia. Palabras clave: bosque de montaña, Mots-clés : forêt de montagne, biodi- biodiversidad, ecología, Nueva versité, écologie, Nouvelle-Calédonie. Caledonia.

Forêt du mont Panié. Forest on Mont Panié. Photo J.-M. Sarrailh. BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) DOSSIER 7 NOUVELLE-CALÉDONIE / FORÊTS DE MONTAGNE

Introduction Écologie Les Nations unies ont proclamé écoclimatiques spéciales qui préva- et conditions l'an 2002 « Année internationale de lent dans les écosystèmes insulaires, la montagne », afin de promouvoir la Nouvelle-Calédonie possède bien d’existence une meilleure prise de conscience, à des forêts de montagne (carte 1). Il l'échelon international, de l'impor- était donc intéressant de faire un En Nouvelle-Calédonie, dont les tance des écosystèmes de montagne bilan rapide de l'état des connais- plus hauts sommets avoisinent pour l'ensemble de la planète. Les sances sur ces formations végétales. 1 600 m, les formations végétales travaux, à une échelle globale, sur les Malgré leur faible extension géogra- montagnardes se développent généra- forêts tropicales de montagne ont phique, elles sont d'une grande lement au-dessus de 900-1 000 m débuté dans les années 1990 par la importance pour la biodiversité et la mais se trouvent aussi à partir de 700- publication d'ouvrages de synthèse compréhension de la phytogéogra- 800 m d’altitude, notamment sur les (Stadtmuller, 1987 ; Hamilton et al., phie et phylogénie de certains façades orientales les plus arrosées. 1995 ; Aldrich et al., 1997) et la tenue groupes comme celui des conifères Dans certains cas particuliers, on de diverses réunions : Neotropical ou ceux des genres Metrosideros observe même des formations de tran- Montane Forest Biodiversity and (Myrtaceae) et Cunonia (Cunonia- sition (enrichies en orophiles vraies) Conservation Symposium (1993, à ceae). dès 500 m (Virot, 1956). L’existence New York), International Symposium de formations végétales de type mon- « Biodiversity of Tropical Montane tagnard au-dessous de 1 200 m est Forests » (1994, à Amsterdam), etc. liée à l’effet de « Massenerhebung » Selon les « normes » internationales, (Grubb, 1971 ; Bruijnzeel et al., la Nouvelle-Calédonie ne possède 1993), à savoir l’apparition sur les pas vraiment de forêts de montagne massifs, ou les pics isolés, de forma- puisque celles-ci sont censées appa- tions montagnardes à des altitudes raître au-dessus de 2 000 m et que nettement inférieures à celles rencon- les plus hauts sommets du territoire Carte 1. trées dans les grands massifs monta- dépassent à peine 1 600 m. Forêts d’altitude gneux. Cet effet initialement décrit Cependant, en raison des conditions en Nouvelle-Calédonie. dans les Alpes au début du siècle est Montane forest in New Caledonia. BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) 8 DOSSIER MONTANE FORESTS / NEW CALEDONIA

particulièrement bien illustré en Océanie. Ainsi, à Kosrae (Micronésie), les forêts oro-néphéliphiles1 se déve- loppent dès 500-600 m sur les monts Finkol et Mutunte, alors que dans les monts Arfak (Papua, Indonésie) elles apparaissent généralement au-dessus de 2 000 m (Merlin, Juvik, 1995). Au Vanuatu, situé à environ 400 km au nord-est de la Grande Terre, Schmid (1975) signale des formations néphéli- philes (« forêts basses de crêtes et sommets ») au-dessus de 500 m, et à des altitudes encore plus basses sur Metrosideros nitida dans la forêt des monts Dzumac, à 1 000 m d’altitude. Metrosideros nitida in the forests of the Dzumac range, at 1 000 m above sea level. l’île d’Anatom. Photo R. Nasi. Ce phénomène semble lié à l’existence d’un gradient local de tem- pérature plus prononcé près des mon- des précipitations annuelles supé- ▪ Le développement de la masse tagnes isolées (0,8 °C par 100 m au rieures à 10 m), et au sud, dans le mas- de nuages dans le cours de la journée lieu de 0,6 °C en moyenne) qui abaisse sif du Humboldt. Tous deux sont situés augmente l’humidité atmosphérique l’altitude moyenne de formation des sur la côte est au vent. Les brouillards jusqu’à saturation, provoquant des masses nuageuses, lesquelles prédo- fréquents sont une caractéristique des précipitations « occultes » impor- minent alors entre 600 et 1 500 m au conditions climatiques entre 600 et tantes qui représentent l’équivalent cours de la journée et créent les condi- 1 500 m d’altitude, en Nouvelle- de plusieurs centaines de millimètres tions propices au développement des Calédonie. Ils sont d’une grande de pluie par an (Bruijnzeel, Proctor, formations végétales oro-néphéli- importance pour plusieurs raisons : 1995), en fonction de la couverture philes (Flenley, 1995). ▪ La présence quasi permanente nuageuse et du vent. Les massifs montagneux néo- des nuages peut réduire de 10 à 50 % ▪ La composition chimique de calédoniens sont nettement plus arro- l’insolation moyenne. ces précipitations occultes est géné- sés que les parties basses. Cela se ▪ La présence le matin d’une mer ralement différente de celle de la vérifie pour les massifs miniers de la de nuages autour des pics isolés crée pluie directe. Les gouttelettes nua- côte ouest, sous le vent, qui reçoivent un phénomène de réflexion quasi geuses sont plus acides et plus riches des quantités annuelles de pluie totale du rayonnement solaire dans la en nutriments que les gouttelettes de dépassant probablement 3,5 m dans bande des UV-b. Celle-ci peut aussi pluie (Ashbury et al., 1994). la plupart des cas. Ce phénomène est être le fait d’une réflexion sur la sur- Les températures minimales des exacerbé au nord-est du territoire, face de la mer pour certains massifs mois les plus froids (juillet et août) dans le massif du Panié (où le pluvio- insulaires de petite taille (Flenley, peuvent approcher voire descendre mètre totalisateur a déjà enregistré 1995). sous 0 °C au-dessus de 1 000 m, comme cela a été enregistré à 1 100 m dans le massif du Boulinda (Latham, Jaffré, 1976). Elles réduisent l’acti- Metrosideros humboldtiana. Metrosideros humboldtiana. vité photosynthétique et la crois- Photo T. Jaffré. sance pendant plusieurs mois, de mai à septembre, où elles sont inférieures à 15 °C. Sur la base d’expérimentations en phytotron (Bruijnzeel, Venek- laas, 1998), ces conditions hyperhu- mides et globalement peu enso- leillées devraient conduire à l’existence de plantes « étiolées », hautes avec de longs entre-nœuds et de grandes feuilles fines et pâles. Or l’observation montre le contraire, la

1 Le terme oro-néphéliphile est utilisé pour caractériser les forêts de montagne situées dans des zones à forte couverture nuageuse (équivalent des mountain cloud forests, Nebelwald, bosque de ceja montaña, etc.). BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) DOSSIER 9 NOUVELLE-CALÉDONIE / FORÊTS DE MONTAGNE

Les différentes formations végétales végétation étant généralement montagnardes rabougrie, avec des entre-nœuds courts et des feuilles coriaces forte- ment pigmentées. Plusieurs auteurs Les formations sur roches ont essayé d’expliquer cette contra- ultrabasiques diction apparente en fonction des caractéristiques de sol (Bruijnzeel et Les roches ultrabasiques occu- al., 1993), du taux d’UV-b reçu pent toute la partie sud de la Grande (Flenley, 1995), etc. Aucun facteur ne Terre, formant le « Grand Massif du semble, cependant, à même d’expli- Sud », qui compte plusieurs sommets quer parfaitement le phénomène et il au-dessus de 1 000 m d’altitude et un semblerait qu’il faille en fait invoquer point culminant à 1 618 m au mont tout un ensemble de facteurs plus ou Humboldt. Ces roches sont, par moins interdépendants dont le rayon- ailleurs, représentées par des mas- nement UV, les variations brutales de sifs isolés, le long de la côte ouest et température et d’éclairement, la dans la partie centrale de la Grande richesse des litières en composés Terre, dont plusieurs sommets culmi- phénoliques, etc. (Bruijnzeel, nent à plus de 1 000 m d’altitude (Me Veneklaas, 1998). Maoya, 1 508 m, Tchingou 1 330 m, En Nouvelle-Calédonie, on Boulinda, 1 330 m, etc.). Tous ces trouve les formations montagnardes, massifs sont caractérisés par une encore appelées « forêts oro-néphéli- végétation et une flore très particu- philes » (Virot, 1956), ou « forêts lières (Jaffré, 1980). Les sols d’alti- denses sempervirentes humides d’al- tude peuvent être grossièrement titude » (Morat et al., 1981), sur deux séparés en deux groupes : sols ferral- grands types de substratums : des litiques ferritiques2 entre 650 et roches plus ou moins acides conte- 1 400 m et rankers à mor3 au-dessus atham Araucaria laubenfelsii dans la forêt nant une forte proportion de silice et de 1 200 m (L , 1975 a et b). sommitale du mont Do, à 900 m d’altitude. d’alumine et des roches ultraba- Araucaria laubenfelsii in the forest crowning siques relativement pauvres en silice Sur les sols ferrallitiques ferri- Mont Do, à 900 m above sea level. et en alumine, qui donnent des sols tiques se développent des forêts Photo R. Nasi. particuliers, extrêmement pauvres en denses mixtes riches en gymno- certains éléments majeurs et anorma- spermes et Myrtaceae. Les formes lement enrichis en certains métaux non dégradées montrent une végéta- Schefflera sp. (Araliaceae), et les gym- (nickel, manganèse et chrome). tion très dense avec un sous-bois nospermes : Callitris neocaledonica, La physionomie de la végéta- totalement ligneux et quasi impéné- Decussocarpus comptonii, Podocar- tion, quoique assez constante, varie trable. La canopée se situe entre 8 et pus sylvestris, Prumnopitys ferrugi- cependant en fonction de l’altitude, 15 m de hauteur, en fonction des noides. La présence d'une strate du type de roche mère (acide ou ultra- contraintes édaphiques locales, et est dominante d’Araucaria permet de basique) et de la nature du sol, plus généralement surcimée par une strate définir trois faciès forestiers distincts : ou moins humifère, sur roches ultra- dominante constituée majoritaire- faciès à Araucaria laubenfelsii (massif basiques. En outre, bien qu’on puisse ment d’Araucaria. Parmi les ligneux du Sud entre 800 et 1 100 m), faciès à noter des points de convergence flo- les plus fréquents dans la canopée, A. humboldtensis (massif du Sud ristique à l’échelon familial et géné- nous pouvons citer les angiospermes, entre 1 100 et 1 400 m), faciès à rique dans les diverses forêts de Apiopetalum velutinum (Araliaceae), A. montana (massifs miniers de la montagne, des différences impor- Austrobuxus brevipes (Euphorbia- côte ouest au-dessus de 900 m). Cer- tantes interviennent dans la composi- ceae), Endiandra neocaledonica (Lau- taines espèces particulières sont tion spécifique de la flore en fonction raceae), Hibbertia baudouinii (Dille- strictement inféodées à ces forêts ; de l’altitude et de la nature géolo- niaceae), Metrosideros engleriana, M. c’est le cas de Canacomyrica monti- gique et pédologique du substrat. humboldtiana, M. punctata (Myrta- cola, seule représentante de la famille ceae), Rapanea sp. (Myrsinaceae), des Myricaceae en Nouvelle-Calédo-

2 Sols ferrallitiques présentant une accumulation relative du fer dans le profil. 3 Qui sont en fait des sols constitués par une accumulation (> 30 cm) de matière organique peu évoluée sur un substrat varié, horizon d’altération ou profil ferrallitique plus ou moins tronqué et cuirassé. BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) 10 DOSSIER MONTANE FORESTS / NEW CALEDONIA

bullata (Cunoniaceae), Hibbertia alti- Les formations d’altitude gena, H. baudouinii, H. nana (Dille- sur roches acides niaceae), Metrosideros humboltiana, M. tetrasticha (Myrtaceae), Logania Ces formations n’existent prati- imbricata (Loganiaceae), etc., et deux quement que dans la chaîne du gymnospermes rares, Libocedrus Panié-Colnett-Ignambi-Ouaième, chevalieri et Podocarpus gnidioides. dans le nord-est du territoire. Dans la région centre, seuls quelques mas- Les rankers organiques au-des- sifs atteignent 1 000 m d’altitude sus de 1 200 m sont constitués par (Aoupinié). Les sols appartiennent à une accumulation de matière orga- la classe des sols peu évolués d'éro- nique peu évoluée sur un substrat sion sur roches métamorphiques et varié qui peut être soit un horizon sont fréquemment associés à des d’altération, soit un profil ferrallitique sols ferrallitiques rajeunis. La pluvio- plus ou moins complet pouvant sité est très élevée et les sols sont contenir de très nombreux blocs de quasi hydromorphes dès la surface. cuirasse ferrugineuse (Latham, Entre 900 et 1 200 m, la forêt est 1975 a). L’épaisseur de l’horizon de composition floristique relative- Araucaria laubenfelsii dans le maquis dégradé organique est d’au moins 20 cm. Sur ment variée, comprenant des du mont Do, à 900 m d’altitude. ces sols se développe une formation Cunoniaceae (Cunonia pulchella, Araucaria laubenfelsii growing in degraded maquis végétale particulière. Elle a été C. aoupiniensis, Weinmannia dicho- on Mont Do, at 900 m above sea level. Virot Photo R. Nasi. décrite sur le Humboldt par toma), des Lauraceae du genre (1956) et par Latham et Jaffré (1976) Endiandra, des Araliaceae du genre dans le massif du Boulinda. Et bien Schefflera, des Euphorbiaceae du nie, de Strasburgeria robusta, unique qu'il soit plutôt étonnant de caractéri- genre Austrobuxus. À cette altitude, représentant de la famille endémique ser une forêt par des végétaux herba- Agathis montana est présent mais ne des Strasburgeriaceae et de Platy- cés, la dénomination forêt « à forme pas encore de véritables peu- spermation crassifolium, espèce mousses » ou « à lichens, bryophytes plements. Le caractère le plus remar- demeurée longtemps énigmatique, et hyménophyllacées » est une assez quable de cette forêt est l'abondance d’un genre endémique monospéci- bonne description de la réalité. Cette des palmiers : Basselinia gracilis, fique de la famille des Escalloniaceae. forêt, qui ne dépasse pas une dizaine B. velutina, Brongniartikentia lanugi- Par le passé, ces forêts ont énor- de mètres de hauteur, se développe nosa, Chambeyronia lepidota. mément souffert des effets de l'ex- dans les zones sommitales relative- Au-dessus de 1 200 m, Agathis ploitation minière et des incendies ment abritées et plongées dans des montana domine très largement dans répétés, et elles n'existent plus qu'à brouillards quasi permanents. La la canopée, au point que celle-ci l'état relictuel ou sous des formes végétation et le sol sont totalement paraît monospécifique. Le sous-bois dégradées très ouvertes dans bien recouverts de manchons d’hyméno- riche en Myrtaceae, Metrosideros des zones. phyllacées, de lichens et de bryo- brevistylis, M. paniensis, M. cacumi- Ces formes dégradées (maquis phytes. La flore ligneuse est relative- num est floristiquement plus proche miniers) ne doivent pas être confon- ment pauvre. des formations homologues sur dues avec certaines formations som- L'étage dominant est souvent roches ultrabasiques que des forêts mitales particulières aux maquis oro- constitué d'une strate de Metroside- de moyenne altitude sur roches philes à caractère climacique. Ces ros à racines-échasses, plus ou moins acides. La présence de bouquets derniers (Virot, 1956 ; Jaffré, 1980), épiphytes (M. brevistylis, M. doli- d'Araucaria schmidii au-delà de là où ils existent encore, montrent chandra, M. oreomyrtus), dominant 1 400 m permet de définir un faciès aussi des traces de dégradation et de un sous-bois riche en Freycinetia sommital particulier. Les forêts d’alti- secondarisation indiquées par la pré- (Pandanaceae) et Dracophyllum (Epa- tude sur roches acides sont générale- sence d’espèces secondaires des cridaceae) où les espèces Cunonia ment plus hautes que celles sur maquis miniers. Ces formations pulchella, Weinmannia dichotoma roches ultrabasiques, et ne possè- ligneuses basses se développent (Cunoniaceae), Quintinia minor (Saxi- dent pas de faciès à lichens, bryo- essentiellement sur les crêtes et dans fragaceae) sont relativement com- phytes et hyménophyllacées typi- les situations les plus exposées. Elles munes. Les épiphytes véritables sont ques, même si les espèces apparte- se caractérisent par une abondance abondantes, comprenant de nom- nant à ces trois groupes sont locale- de nanophanérophytes4 à port breuses ptéridophytes, quelques ment plus abondantes qu’à moyenne ombelliforme ou prostré, Apiopeta- orchidées et une liliacée robuste : altitude. lum velutinum (Araliaceae), Cunonia Astelia neocaledonica. 4 Phanérophytes (plantes à bourgeons dormants aériens à plus de 50 cm de la surface du sol) de 2 à 4 m de hauteur. BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) DOSSIER 11 NOUVELLE-CALÉDONIE / FORÊTS DE MONTAGNE

Conservation : Ces formations réduisent aussi l’éro- Les formations végétales de intérêt et statut sion grâce à la forte capacité d’infiltra- montagne de Nouvelle-Calédonie se tion des sols (Hamilton et al., 1995) et caractérisent souvent par une domi- Fonctions écologiques à l’interception des précipitations nance des gymnospermes dans la directes. L’abondance des mousses et strate supérieure. Cette strate émer- Les forêts de montagne jouent un autres épiphytes augmente la capacité gente, sous forme de bouquets ou rôle important dans la régulation des de stockage de l’eau pendant les d’arbres isolés, constitue une carac- phénomènes hydrologiques. Les forêts périodes humides et permet la restitu- téristique structurale particulière qui oro-néphéliphiles, en particulier, « cap- tion de cette eau lors des périodes augmenterait la capacité d’intercep- turent » dans la couverture nuageuse sèches (Bruijnzeel et al., 1993 ; tion des brumes et brouillards une eau qui serait autrement perdue. Penafiel, 1995). (Mueller-Dombois, Fosberg, 1998).

Tableau I. Conifères néo-calédoniens, distribution altitudinale et roche mère.

Espèce Famille Végétation Altitude Roche mère Min Max Grande amplitude écologique Falcatifolium taxoides Podocarpaceae Forêt dense humide 100 1 400 Ultrabasique Dacrydium balansae Podocarpaceae Maquis et forêt dense humide 150 900 Indifférente Neocallitropsis pancheri Cupressaceae Maquis 150 950 Ultrabasique Araucaria muelleri Araucariaceae Maquis et forêt dense humide 150 1 000 Ultrabasique Parasitaxus ustus Podocarpaceae Forêt dense humide 150 1 100 Ultrabasique Agathis ovata Araucariaceae Maquis et forêt dense humide 150 1 150 Ultrabasique Araucaria rulei Araucariaceae Maquis et forêt dense humide 150 1 200 Ultrabasique Podocarpus sylvestris Podocarpaceae Forêt dense humide 150 1 200 Ultrabasique Prumnopitys ferruginoides Podocarpaceae Forêt dense humide 150 1 400 Ultrabasique Agathis lanceolata Araucariaceae Forêt dense humide 200 1 000 Ultrabasique Dacrydium araucarioides Podocarpaceae Maquis 200 1 000 Ultrabasique Podocarpus lucienii Podocarpaceae Forêt dense humide 200 1 100 Ultrabasique Agathis moorei Araucariaceae Forêt dense humide 250 1 000 Ultrabasique Araucaria biramulata Araucariaceae Forêt dense humide 250 1 150 Ultrabasique Araucaria subulata Araucariaceae Forêt dense humide 300 1 000 Ultrabasique Grande amplitude écologique mais plutôt orophiles Araucaria montana Araucariaceae Maquis et forêt dense humide 300 1 350 Ultrabasique Araucaria laubenfelsii Araucariaceae Maquis et forêt dense humide 400 1 300 Ultrabasique Orophiles vraies Austrotaxus spicatus Taxaceae Forêt dense humide 500 1 350 Autre Podocarpus gnidioides Podocarpaceae Maquis 600 1 600 Ultrabasique Podocarpus polyspermus Podocarpaceae Forêt dense humide 650 950 Ultrabasique Libocedrus austrocaledonica Cupressaceae Forêt dense humide 700 1 300 Ultrabasique Nageia comptonii Podocarpaceae Forêt dense humide 750 1 450 Ultrabasique Podocarpus decumbens Podocarpaceae Maquis 800 1 000 Ultrabasique Araucaria humboldtensis Araucariaceae Maquis et forêt dense humide 800 1 550 Ultrabasique Dacrydium lycopodioides Podocarpaceae Forêt dense humide 900 1 400 Ultrabasique Callitris neocaledonica Cupressaceae Maquis et forêt dense humide 950 1 350 Ultrabasique Agathis montana Araucariaceae Forêt dense humide 1 000 1 600 Autre Podocarpus longifoliolatus Podocarpaceae Forêt dense humide 1 100 1 200 Ultrabasique Libocedrus chevalieri Cupressaceae Maquis 1 450 1 600 Ultrabasique Araucaria schmidii Araucariaceae Forêt dense humide 1 500 1 600 Autre BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) 12 DOSSIER MONTANE FORESTS / NEW CALEDONIA

que sur les sommets les plus élevés Tableau II. du massif du Humboldt (monts Distribution des espèces orophiles du genre Metrosideros Humboldt et Kouakoué) ; Agathis (Myrtaceae) de la flore de Nouvelle-Calédonie. montana et Araucaria schmidii sont restreints aux sommets de la chaîne Espèces Formations végétales Altitude (m) Substrats du Panié-Colnett ; les formations M. brevistylis F 600-1 600 U, A montagnardes sur sols ferrallitiques M. cacuminum F, M 700-1 200 U, A ferritiques entre 700 et 1 000 m abri- tent l’unique gymnosperme parasite M. cherrieri M 950 A connue, Parasitaxus ustus, dont la M. dolichandra F 550-1 400 U plante hôte est une autre gymno- M. engleriana M, (F) 750-1 150 U sperme, Falcatifolium taxoides, etc. M. humboldtiana M 850-1 600 U Le genre Metrosideros (Myrta- ceae), omniprésent dans la flore mon- M. longipetiolata F, M 700-900 A tagnarde du Pacifique, est un élément M. microphylla F, M 700-1 400 U floristique et structural essentiel des M. nitida F, M 150-1 400 U, A forêts de montagne néo-calédo- M. operculata F, M, R 80-1 200 U, A niennes (tableau II). Bon nombre d’es- pèces néo-calédoniennes débutent M. oreomyrtus F 900-1 200 U, A leur vie comme épiphytes et dévelop- M. paniensis F, M 800-1 500 A pent des enchevêtrements de racines- M. porphyrea F, M 650-1 600 U, A échasses qui constituent des zones épaisses d’accumulation de matières M. punctata F, M 500-1 200 U organiques facilitant ainsi la forma- M. rotundifolia F, M 700-900 A tion des rankers à mor sur lesquels se M. tetrasticha M 1 300-1 600 U développe la forêt à lichens, bryo- M. whitakeri M 640-970 A phytes et hyménophyllacées. Parmi les espèces quasi exclusi- Formations végétales vement orophiles, Metrosideros doli- F : forêt dense humide chandra, M. engleriana, M. humbold- M: maquis tiana, M. microphylla, M. punctata et R : formation rivulaire M. tetrasticha croissent sur substrats ultrabasiques alors que M. cherrieri, Substrats M. longipetiolata, M. paniensis, U: roches ultrabasiques M. rotundifolia et M. whitakeri sont A: autres roches (principalement acides) inféodéees aux substrats acides ; M. brevistylis, M. cacuminum, M. oreo- myrtus et M. porphyrea semblent indif- férentes. Certaines de ces espèces, toutes endémiques, ne sont connues que Refuges Flore d’une seule récolte ou d’une seule La flore orophile de Nouvelle- localité. On citera, à ce propos, la Les forêts de montagne consti- Calédonie est caractérisée par un très richesse en espèces rares de la Roche tuent aussi des refuges importants fort taux d’endémisme et par sa Ouaième, où se trouvent les seuls peu- pour la flore et la faune. Elles sont richesse spécifique en quelques plements connus de M. cherrieri, riches en espèces endémiques et groupes originaux. M. longpetiolata, M. rotundifolia et espèces particulières (encore que, Parmi les 43 conifères néo-calé- M. whitakeri. pour la Nouvelle Calédonie, cela soit doniens, 33 peuvent être trouvés Il serait d’ailleurs possible de vrai pour l’ensemble de la végétation) dans les formations montagnardes – continuer, pour d’autres familles ou et, lorsque les forêts situées à des espèces à large amplitude altitudi- genres, cette énumération de plantes altitudes inférieures ont été détruites nale ou vraies orophiles (tableau I). orophiles connues d’une seule loca- ou dégradées, les espèces de faune Toutes ces espèces sont des endé- lité : Austrobuxus montis do menacées trouvent souvent refuge miques et certaines comptent parmi (Euphorbiaceae), Cunonia alticola dans les forêts de montagne. les gymnospermes les plus rares du (Cunoniaceae), Hibbertia moratii monde. Libocedrus chevalieri n’existe (Dilleniaceae), Scaevola macropyrena BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) DOSSIER 13 NOUVELLE-CALÉDONIE / FORÊTS DE MONTAGNE

Tableau III. Distribution des espèces orophiles des genres Cunonia et Weinmannia (Cunoniaceae) de la flore de Nouvelle-Calédonie.

Espèces Formations végétales Altitude (m) Substrats C. alticola F, M 1 450 U C. aoupiniensis F 500-1 400 A C. atrorubens M 500-1 450 U C. balansae F, M 150-1 000 U C. bernieri F 1 000-1 200 U C. bullata F, M 850-1 600 U C. lenormandii M 800-1 500 U C. macrophylla M 150-1 150 U C. montana F 200-1 300 U, A C. nervosa F 950 A C. pseudoverticillata M 850-1 300 U C. pterophylla F, M 100-1 250 U C. pulchella F 500-1 610 U, A C. rotundifolia M 1 000-1 400 U C. rupicola M 700-900 A C. schinziana M 1 000-1 200 U C. varijuga F, M 250-1 200 U, A C. vieillardii F, M 100-980 U Oxera sp., plante parasite dans la forêt W. dichotoma F 400-1 550 U, A sommitale de la montagne des Sources, W. ouaiemensis F 700-1 150 A à 1 000 m d’altitude. Oxera sp., a parasite in the forest W. paitensis F 500-1 300 U, A crowning the summit of the Montagne des Sources, at 1 000 m above sea level. Formations végétales Photo R. Nasi. F : forêt dense humide M: maquis R : formation rivulaire

Substrats fréquentes sont Cyathea alata, U: roches ultrabasiques C. albifrons, C. vieillardii et Dicksonia A: autres roches (principalement acides) baudouini, qui contribuent à l’origi- nalité physionomique de ces forêts. La répartition des palmiers en et S. racemigera (Goodeniaceae), tana, C. nervosa, C. rotundifolia, fonction des conditions écologiques a Syzygium boulindaensis (Myrtaceae), Weinmannia ouaiemensis, tandis que fait l’objet de plusieurs études (Jaf- Rauvolfia spathulata (Apocynaceae), Cunonia aoupiniensis, C. atrorubens, fré, Veillon, 1989 ; Pintaud et al., Xylosma boulindae (Flacourtiaceae)… C. pulchella, C. pterophylla, C. vari- 1999, 2001). Quatre des espèces du La famille des Cunoniaceae joue juga, Weinmannia dichotoma, W. pai- genre Basselinia se comportent en aussi un rôle important dans la phy- tensis ont une distribution altitudi- orophiles strictes (Basselinia Hum- sionomie des forêts de montagne, en nale plus large. boldtiana, B. sordida, B. tomentosa et raison du nombre et de l’abondance Plusieurs espèces de la famille B. vestita). Deux autres espèces, Bas- des espèces représentées (tableau des Cyatheaceae (fougères arbores- selinia porphyrea et Brongnartikentia III), appartenant principalement aux centes) sont représentées dans les lanuginosa, ne se rencontrent pas en genres Cunonia et Weinmannia. Aux forêts de montagne mais une seule, dessous de 700 m d’altitude et se orophiles strictes appartiennent Cyathea cicatricosa, serait cantonnée développent préférentiellement à des Cunonia bernieri, C. bullata, C. mon- à ces formations orophiles. Les plus altitudes plus élevées. Deux espè- BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) 14 DOSSIER MONTANE FORESTS / NEW CALEDONIA

misme sont élevés (environ 86 % des reptiles et 34 % des oiseaux sont Tableau IV. endémiques). Distribution des palmiers orophiles de la flore Les invertébrés terrestres sont de Nouvelle-Calédonie. généralement mal connus, à l’excep- tion de certains groupes comme les Espèces Altitude (m) Substrats gastéropodes ou les lépidoptères. Le nombre d’espèces d’invertébrés Actinokentia divaricata 10-1 100 U décrites avoisine les 4 500, mais ne Actinokentia huerlimannii 700-900 U constitue qu’une sous-estimation de Alloschmidia glabrata 10-1 200 A la richesse réelle. Les taux d’endé- misme sont généralement élevés : Basselinia deplanchei 400-1 500 U 100 % chez les psocoptères et éphé- Basselinia gracilis 50-1 600 U, A mèroptères, quelques familles de Basselinia humboldtiana 800-1 000 U coléoptères comme les psélaphides, Basselinia iterata 970-1 080 A 80 % chez les blattes, 70 % chez les phasmes, et près de 40 % chez les Basselinia pancheri 50-1 000 U lépidoptères (Richier de Forges et Basselinia porphyrea 700-980 U al., 1998). Basselinia sordida 1 000-1 500 U Même pour les groupes les Basselinia tomentosa 1 000-1 100 A mieux étudiés, la connaissance de l’écologie ou de la distribution géo- Basselinia velutina 400-1 620 U, A graphique est souvent imprécise. Basselinia vestita 900-1 000 U Dans la plupart des cas, il est difficile Brongniartikentia lanuginosa 700-1 250 A de dire si telle ou telle espèce est Brongniartikentia vaginata 100-1 000 U inféodée aux forêts d’altitude ; cependant, une grande partie des Burretiokentia vieillardii 300-1 250 U, A oiseaux et des reptiles endémiques Campecarpus fulcitus 10-1 000 U n’existe que dans les forêts denses Chambeyronia lepidota 400-1 500 A humides, dont font partie les forêts de montagne. Chambeyronia macrocarpa 500-1 000 U, A Parmi les oiseaux « terrestres Clinosperma bracteale 20-1 200 U, A indigènes » néo-calédoniens (Barré, Cyphosperma balansae 400-1 000 U, A Dudson, 2000), plusieurs sont mena- cés et leurs populations déclinantes Substrats trouvent refuge dans les formations U: roches ultrabasiques de montagne. Tel est le cas du cagou A: autres roches (principalement acides) (Rhynochetos jubatus), unique repré- C: roches calcaires sentant d’une famille d’oiseaux cou- reurs (Rhynochetidae) endémique du territoire, menacé par les chiens ces (Burretokentia grandiflora et Faune errants, ou du carpophage géant ou Kentiopsis piersoniorum) ont de larges La faune mammalienne de notou (Ducula goliath), victime de la amplitudes altitudinales mais demeu- Nouvelle-Calédonie est naturellement chasse. Une autre espèce, l’égothèle rent plus fréquentes en forêt monta- pauvre. Avant l’arrivée des Européens calédonien (Aegothelues savesi), gnarde qu’en forêt de moyenne alti- (apportant cochons, cerfs, chiens, semblait avoir disparu, mais des indi- tude. Enfin, cinq espèces sont chats, etc.), les plus gros mammifères vidus ont été récemment observés également représentées dans les étaient des chauves-souris frugivores dans une zone montagneuse à l’ouest forêts montagnardes et dans les forêts (roussettes) et il n’existe pas vrai- du massif du Kouakoué. de basse et moyenne altitudes : Bas- ment de mammifères inféodés aux La plupart des 71 espèces de selinia deplanchei, B. gracilis, B. velu- formations d’altitude. reptiles endémiques, dont les plus tina, Burretiokentia vieillardii et Cham- Les autres groupes vertébrés remarquables sont les geckos, se beyronia lepidota. Ce sont donc 13 des (amphibiens, reptiles, oiseaux) sont trouvent uniquement en forêt 37 espèces de palmiers, soit plus du plus ou moins bien connus. Le humide. De nombreuses espèces font tiers, qui se développent dans les nombre total d’espèces est relative- preuve d’un degré remarquable de forêts de montagne (tableau IV). ment faible mais les taux d’endé- micro-endémisme, de sorte qu’un BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) DOSSIER 15 NOUVELLE-CALÉDONIE / FORÊTS DE MONTAGNE

Tableau V. Liste des aires protégées des montagnes néo-calédoniennes.

Aire protégée en montagne UICN Superficie (ha) Coordonnées Date Réserve spéciale botanique du mont Panié IV 5 000 20,37’S - 164,47’E 1950 Réserve spéciale de faune de l’Aoupinié 5 400 21,10’S - 165,17’E 1975 Réserve spéciale de faune et de flore de Nodela 935 21,26’S - 165,20’E 1996 Réserve spéciale de faune et de flore du mont Do IV 300 21,45’S - 165,59’E 1981 Réserve spéciale botanique du pic Ningua 350 21,45’S - 165,08’E 1970 Réserve spéciale botanique du mont Humboldt IV 3 200 21,53’S - 166,25’E 1950 Réserve spéciale botanique du mont Mou IV 675 22,04’S - 166,20’E 1970 Réserve naturelle intégrale montagne des Sources Ia 5 870 22,07’S - 166,33’E 1950 Réserve spéciale de faune et flore Haute Pourina 4 480 22,30’S - 166,40’E 1995 Réserve spéciale de faune et flore du mont Kouakoué 7 480 21,57’S - 166,32’E 1995

même type d’habitat peut héberger, De larges et précieuses éten- dans différentes zones du territoire, dues de formations de montagne ne des associations très différentes de bénéficiant d’aucune protection reptiles. Certaines espèces (Bavayia légale subsistent en Nouvelle- validiclavis et Bavayia sp. nov. Calédonie. Une amélioration considé- Ignambi) ont leur répartition limitée à rable du réseau existant de réserves la forêt des étendues montagneuses et de la gestion de celles-ci est du nord-est, alors que d’autres (telles requise : nécessité d’une meilleure Graciliscincus shonea, Sigaloseps représentativité de la diversité floris- deplanchei, Rhachodactylus sarasi- tique et faunistique, simplification de norum et Bavayia septuiclavis) sont la classification des aires protégées, trouvées seulement dans la forêt meilleur contrôle du feu, etc. humide à sol ultrabasique du sud (Bauer, Sadlier, 2000). Vue du mont Krape. Menaces View of Mont Krape. Protection, statut Photo J.-M. Sarrailh. La plus grande menace directe Il existe trente réserves ter- semble être la déforestation pour restres en Nouvelle-Calédonie, toutes l’exploitation minière. Des zones n’est pas non plus une menace pour situées sur la Grande Terre dont dix comme le mont Panié ou le mont les forêts de montagne de Nouvelle- en montagne (tableau V). Ainsi s’ex- Humboldt, bien que situées dans des Calédonie. Compte tenu de la faible plique le fait que de nombreuses aires protégées, ne sont pas à l’abri pression anthropique et de l’absence espèces orophiles aient été classées d’une exploitation minière future. Les de gros mammifères indigènes, le « LRcd » (espèce rare à faible risque formations sommitales des massifs braconnage ne semble pas un danger d’extinction, car protégée dans une miniers de la côte ouest (Boulinda, pressant. La plupart des espèces réserve), selon les critères de l’Union Koniambo, Kopéto, Mé Maoya, etc.) chassées (cochon, cerf) ont été intro- mondiale pour la nature (Jaffré et al., comme du sud (Poro, Humboldt, etc.) duites ou bien (roussette, notou, 1998). Cependant, ce classement ne ont déjà été fortement dégradées ou pigeon vert) ne sont pas véritable- doit pas faire illusion car une seule de détruites par l’exploitation à ciel ment inféodées aux formations végé- ces réserves (le parc provincial de ouvert du nickel. tales d’altitude bien qu’elles puissent Rivière Bleue) bénéficie d’une gestion L’exploitation forestière de bois y trouver refuge. continue. Beaucoup d’aires proté- d’œuvre n’est pas une menace L’invasion par des animaux exo- gées ne bénéficient pas d’une véri- directe, sauf peut-être pour quelques tiques semble un danger plus sérieux, table surveillance et certaines ne font sites particuliers (peuplements en particulier pour la faune qui est l’objet d’aucune protection légale vis- d’Agathis lanceolata du massif de Ni- directement menacée par les chiens à-vis de la menace causée par d’éven- Kouakoué, en limite supérieure de errants (le cagou est particulièrement tuelles activités minières. son aire de distribution). L’agriculture vulnérable) et les rats. Lorsque leur BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) 16 DOSSIER MONTANE FORESTS / NEW CALEDONIA

densité dépasse un certain seuil, mal Quel futur connu, cerfs et cochons ont aussi un pour les forêts effet destructeur sur la régénération des ligneux. Cependant, leur pré- de montagne Il convient aussi de noter que sence se limite souvent aux altitudes de Nouvelle- les orophiles strictes sont le plus sou- inférieures à 1 000 m. À notre vent des espèces très localisées, connaissance, il n’y a pas de plantes Calédonie ? n’existant que dans des sites peu exotiques invasives dans les forma- nombreux et de faible superficie qui, tions de montagne néo-calédo- de ce fait, mériteraient des mesures niennes (contrairement aux forêts L’exploitation forestière ne de protection très strictes. Mais elles des altitudes inférieures dont les s’exerce que sur une faible partie de ne sont pas les seules, car il est pro- trouées sont souvent envahies par leur superficie, sans grand projet bable que les individus « orophiles » Lantana camara sur substrat non d’extension. L’exploitation minière – des espèces à plus large distribution ultrabasique). actuelle ou future – est plus préoccu- altitudinale ou édaphique constituent Les changements climatiques pante. De ce fait, on peut regretter des écotypes particuliers que des globaux paraissent, par contre, être que les aires protégées (parcs et études génétiques moléculaires une menace plus sérieuse pour les réserves) ne représentent pas suffi- devraient permettre de caractériser. forêts de montagne de Nouvelle- samment la variabilité floristique des Le plus grand risque nous Calédonie (et du reste du Pacifique). milieux concernés. Au-delà de la pro- semble une modification possible, De par leur écologie très particulière, tection de quelques espèces mena- due au réchauffement climatique glo- les formations montagnardes cées, c’est bien évidemment la bal, du délicat équilibre entre climat seraient particulièrement vulnérables conservation des écosystèmes qui et rayonnement UV qui crée les condi- au réchauffement climatique global. doit faire l’objet de mesures de pro- tions nécessaires à l’existence de ces Une augmentation de la température tection, non pas simplement sous formations végétales fascinantes que risquerait de créer un relèvement de forme de décrets mais sous forme de sont les forêts tropicales humides de la hauteur de formation des plafonds véritable gestion de ces réserves. montagne. nuageux, limitant ainsi l’épaisseur de la zone propice au développement des forêts néphéliphiles. Et ce d’au- Forêt d'altitude à Araucaria humboldtensis et Callitris neocaledonica du mont tant plus que les montagnes sont peu Humboldt, à 1 350 m d’altitude. élevées en Nouvelle-Calédonie et que Montane forest with Araucaria humboldtensis and Callitris neocaledonica on ces forêts se développent déjà dans Mount Humboldt, at 1 350 m above sea level. une bande étroite entre 1 200 et Photo J.-M. Sarrailh. 1 500 m. Un autre phénomène global, représentant un risque réel pour les formations de montagne (et pour la plupart des formes de vie en général), est l’augmentation de la quantité de rayons UV qui atteignent le sol du fait de la réduction de la couche d’ozone. Selon certains auteurs, les forêts à mousses et Hymenophyllaceae sont relativement jeunes et n’existaient pas au pléistocène, car à cette époque les conditions (température et rayonnement UV) n’étaient pas adéquates. L’augmentation des UV dans des zones qui en reçoivent déjà de fortes doses (montagnes de l’hé- misphère Sud) peut aussi induire un déclin de certains groupes sensibles (le déclin global des amphibiens est ainsi souvent lié à cette augmenta- tion du rayonnement UV). BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2002, N° 274 (4) DOSSIER 17 NOUVELLE-CALÉDONIE / FORÊTS DE MONTAGNE

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Synopsis

MONTANE FORESTS New Caledonian montane forests exist on elevations. The montane flora is charac- IN NEW CALEDONIA both ultrabasic soils (poor in silica) and terised by its richness in species belong- acidic soils (rich in silica). Although the ing to the genera Cunonia and Metrosi- general physiognomy of the forests is sim- deros, in Gymnosperms (33 out of the 43 Robert NASI, ilar on both substrates, there are impor- New Caledonian gymnosperms are found Tanguy JAFFRÉ, tant differences in their flora as well as in montane forests), in palms (13 out of 37 Jean-Michel SARRAILH specific structural features linked to each species) and in tree ferns. The fauna is not substrate. very well known, but rich in endemic rep- tiles (geckos), birds (especially the cagou, The United Nations has Montane vegetation an endemic flightless bird which has been declared 2002 as the International Year of Two main types of tropical montane taken as the emblem of the Territory) and Mountains to increase international forests can be found on ultra-alkaline invertebrates. awareness of the global importance of soils, depending on soil characteristics. mountain ecosystems. At global level, Ferralitic soils support dense mixed Of the 30 existing protected areas, 10 are research on tropical montane forests forests with abundant gymnosperms and located in mountains. Most species, there- began in the 1990s with a series of synop- Myrtaceae. Vegetation is very dense and fore, seem only marginally threatened and tic publications and international semi- mostly ligneous. The canopy, rising to 8- montane forests are, in theory, among the nars (New York, Amsterdam). 15 m, is often dominated by emergent best-protected ecosystems in New gymnosperms (Araucariaceae and Caledonia. However, few reserves are Strictly speaking, New Caledonia has no Podocarpaceae). These forests are home properly managed and several are poten- real montane forests since its highest to very distinctive species belonging to tially threatened by mining activities. mountains are below the conventional endemic genera or families. Having been There is a need to review the network of 2 000 m limit. However, because of spe- severely degraded by open-cast mining in protected areas to fill gaps by adding new cific eco-climatic conditions, tropical mon- the past, most only exist nowadays as reserves, and to improve the management tane forests do occur in New Caledonia. relict fragments. Locally, the forest has of existing ones. These ecosystems are characterised by a been replaced by low-growing vegetation high level of endemism and are of great (maquis), which is not a degraded form Threats value for conservation. but true climacic vegetation. Organic The main threat seems to be mining, as rankers above 1 200 m are covered in some of the protected areas could be Ecology moss forest characterised by an abun- opened up to mining under existing legis- In New Caledonia, montane forests flour- dance of bryophytes, lichens and ferns lation. As mentioned earlier, in the past ish above 900 m but can be found as low covering the trunks and stilt-roots of trees mining was the main cause of destruction as 500 m. Their existence is directly linked belonging to the Metrosideros. of montane forests on ultra-alkaline soils. to the Massenerhebung effect, which is Logging per se does not seem to be a real characterised by the presence on isolated Montane forests on acidic soils are found threat, as, generally speaking, these or island mountains of dense, continuous only on the north-eastern range. Between forests have little economic value except cloud cover at elevations below those of 900 and 1 200 m, forests are structurally for some very specific populations of large or continental mountain ranges. This similar to those on ultra-alkaline ferralitic Agathis. Agriculture is absent and the low phenomenon seems to be linked to an soils, rich in Cunoniaceae and Lauraceae population density does not encourage accentuated temperature gradient that and characterised by an abundance of people to climb high to plant crops. lowers the average elevation of cloud palm trees. Above 1 200 m, the canopy is Hunting remains marginal and focused on cover formation. dominated by gymnosperms (Araucaria- large introduced mammals (deer and feral ceae) and very rich in small Metrosideros pigs), although some large birds may be New Caledonian mountains receive more in the understorey. threatened. Invasive alien species can be rainfall than lowlands and are frequently a serious threat. Feral dogs and cats covered in fog or cloud. The presence of Conservation value and status destroy birdlife and if densities are too fog has various effects on ecosystems. Fog Montane forests play an important role by high, deer and feral pigs hinder forest provides extra hydrological input (“hori- regulating hydrological regimes and regeneration. Climate change could also zontal” or “occult” precipitation) which reducing erosion. Moss forests in particu- be a threat, as global warming could may amount to several hundred millime- lar fix water from clouds that would other- destroy the delicate balance that sustains tres of water per year, depending on cloud wise be “lost”. Abundant mosses and the ecological conditions allowing mon- characteristics, wind speed and vegeta- ferns store moisture and release it during tane forests to survive. tion structure. Fog also contributes dis- dry periods. tinct types of chemical input, since cloud droplets generally have higher acid and They are also ecological refuge areas for nutrient concentrations than rain. Finally, flora and fauna. With an abundance of fog can reduce irradiance by 10-50% com- endemic plant species, they remain the pared to levels in sunny conditions. only safe place for animals that are threat- ened by disturbance in forests at lower