Le Monde De Weather Report
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dossier LE MONDE DE Airto Moreira Peter Erskine Jaco Pastorius Wayne Shorter Joe Zawinul Manolo Badrena Dom Um Romao Miroslav Vitous Victor Bailey Alphonso Johnson Mino Cinelu Le clap de fin de Weather Report a eu lieu il y a plus de trente ans, mais la musique de Dossier réalisé par ce groupe emblématique d’une époque où tout Michel Benita semblait possible n’a pas pris une ride, et son Franck Bergerot Peter Cato pouvoir de fascination est toujours aussi grand. Doc Sillon Il était donc temps d’explorer à nouveau Lionel Eskenazi les richesses du monde de Weather Report, Julien Ferté Frédéric Goaty où l’on croise quelques-uns des meilleurs Stéphane Ollivier musiciens de ces cinquante dernières années. Jean-Pierre Vidal PHOTOS : X/DR 16 Jazz Magazine Numéro 691 Février 2017 Février 2017 Numéro 691 Jazz Magazine 17 dossier Le monde de Weather Report sommaire repères 1970 Le 10 1981 Jaco décembre, Joe Pastorius et 20 Joe Zawinul 32 Peter Erskine Zawinul annonce Peter Erskine (1966-1970) Silence, Le maître du temps dans Downbeat s’en vont. on tourne : naissance qu’il s’associe 33 d’un univers Joe Zawinul avec Wayne 1985 Joe Zawinul (1985) Shorter et Miroslav enregistre 22 La parole à la musique Wayne Shorter Vitous pour créer “Dialects” et Montreux, 1976 : (1969-1970) un nouveau Wayne Shorter Wayne Shorter et Joe Atmosphères, 34 The Zawinul Zawinul, l’insécable groupe dont “Atlantis”. atmosphères... : Syndicate duo créatif de le batteur sera les temps changent Les tournées du patron 1986 Juin : Weather Report. Alphonse Mouzon. sortie de l’ultime UN MOUVEMENT album de 24 Galerie photo 36 Wayne Shorter 1971 Mai : sortie Weather Report dans (1985...) Retour vers du premier album, Weather Report, tous ses états d’autres futurs PERPETUEL “Weather Report”. “This Is This”. 26 Miroslav Vitous 1974 Avril : A cause du funk Miroslav Vitous est remplacé 27 Airto Moreira, Qui sait si le plasticien Alexander Calder a un jour écouté par Alphonso Dom Um Romao, un disque de Weather Report ou entendu leur musique à la radio ? Johnson. Manolo Badrena Janvier : & Mino Cinelu Les Mais s’il est un groupe qui incarne à la perfection la notion de mou- 1976 hommes de mains premières séances vement – et l’on serait presque tenté d’ajouter perpétuel –, c’est avec Jaco 28 Jaco Pastorius bien celui que Joe Zawinul et Wayne Shorter ont dirigé de 1971 Pastorius. L’homme qui faisait la à 1986. Les pages qui suivent ne s’attardent pas seulement sur 1977 Tournée pluie et le beau temps ces quinze années d’existences, un mot qu’il est impossible de ne mondiale, disques d’or… : 30 Alphonso pas mettre ici au pluriel, tant Weather Report a su constamment se le groupe atteint Johnson & remettre en question. Ainsi, la première partie de ce dossier se fait des sommets de Victor Bailey popularité. Les autres voix graves l’écho de quelques préludes et postludes décisifs de la saga Wea- ther Report : le séjour de Joe Zawinul dans le Quintet de Cannonball Adderley, Wayne Shorter chez Blue Note ou aux côtés de Milton Nascimento, les débuts fracassants de Jaco Pastorius, les albums cultes de Miroslav Virous ou de Dom Um Romao, les pépites à (re) découvrir du Zawinul Syndicate, les aventures de Peter Erskine, etc. etc. Pour chacun d’entre eux, une discographie sélective vous permettra d’approfondir votre lecture en musique(s). Autour du sorcier autrichien des claviers disparu en 2007 et du poète américain du saxophone, dont le quartette est l’une des for- mations majeures de ce début de siècle, des musiciens venus de tous les horizons – Brésil, Pérou, Tchécoslovaquie, France, Porto- Rico... – ont chacun à leur manière apporté leur pierre à l’édifice. Certains n’ont fait que passer, d’autres sont restés plusieurs années. En studio ou sur scène, tous ont permis à Weather Report de bien mériter son nom qui, faut-il le rappeler, signifie Bulletin Météo. Les hommes de Weather Report forment bien la plus belle des familles recomposées, et grâce à eux, le temps, les temps n’ont jamais cessé de changer au sein de ce groupe majeur, toutes musiques Autour du sorcier autrichien confondues, de la fin du XXe siècle. • des claviers et du poète américain du saxophone, des musiciens venus de tous les horizons ont chacun à leur manière apporté leur pierre à l’édifice.” GIUSEPPE PINO 18 Jazz Magazine Numéro 691 Février 2017 Février 2017 Numéro 691 Jazz Magazine 19 dossier Le monde de Weather Report JOE ZAWINUL Silence, on tourne : naissance d’un univers Dès 1970, on perçoit dans Cinq ans avant la création de Weather Report, par le pianiste au séances de Miles de l’automne 1968 les retrouvailles avec Vienne, à l’occasion (Ascent) à l’hiver 1969-1970 (Orange Lady, Double les compositions Image), autant de compositions mises en pièces par le de la tournée européenne de Cannonball trompettiste, en cours de séance ou en post-produc- de Zawinul et Adderley au printemps 1966, constituent un tion, voire consfiquées sans crédit d’auteur : atmos- tournant dans l’œuvre de Joe Zawinul. phères mélodico-harmoniques ou simples grooves qui les sonorités de font dire à Joe Zawinul, en désaccord avec la nature anarchique des séances, que la plupart des lignes de Fender Rhodes Alors qu’il ne jure que par le jazz funky, tant pour son potentiel com- basse de l’époque sont de sa plume (ce que conteste mercial que pour ses qualités rythmiques (cf. “Money In The Pocket”, Dave Holland). Une pièce tranche sur l’ensemble de sa un fil continu titre de son premier album pour Atlantic, ou Mercy, Mercy, Mercy, son production de l’époque, Directions, rock énergique en entre la musique premier grand tube), Joe Zawinul renoue avec son enfance viennoise, Mi (tonalité de guitariste) qui servira à Miles de géné- le folklore, le piano et les formes de la musique classique ; il retrouve rique de début de concert et sera repris lors des pre- de Miles Davis et dans sa ville natale son ami Friedrich Gulda et rencontre le compositeur miers concerts de Weather Report. Quant aux frères américain William Fischer, venu composer un opéra dans la capitale au- Adderley, Joe Zawinul leur offrira d’autres tone poems : celle, à venir, de trichienne. Celui-ci l’oriente vers des formes plus sophistiquées que le Early Minor à Nat (“You Baby”) et Yvette à Cannonball chorus de 32 mesures des standards, ce que les jazzmen commencent (“Whay Am I Treated So Bad”). Et dès 1970, à l’écoute Weather Report. à appeler extended forms et auxquelles Cannonball songe de son côté. de “The Price You Got To Pay To Be Free” de Cannon- Ce qui incitera Zawinul à faire des compositions de Fischer la matière ball, on perçoit dans les compositions de Zawinul, les de son album “The Rise & Fall Of The Third Stream”. C’est encore traits et les sonorités de Fender Rhodes un fil continu Fischer qui attire son attention sur le potentiel du piano électrique que entre la musique de Miles et celle, à venir, de Weather Zawinul commence à utiliser fin 1966 et dont il va bientôt découvrir les Report, qui perdure sur l’album “Black Messiah” de extensions et les fonctions parasites (Ring Modulator, saturation…), l’altiste, alors que George Duke a pris place au piano. de même qu’il aimait jeter un tambourin ou quelque autre objet sur • FRANCK BERGEROT les cordes de son piano (74 Miles Away sur l’album de Cannonball du même titre ou sur The Soul Of A Village de Fischer). En outre, une nuit d’insomnie, de passage à Vienne pour Noël 1967, regardant la neige tomber sur la statue de Johann Strauss, gagné par la nostalgie, il compose In A Silent Way, premier d’une longue série de pièces d’inspiration pastorale, de tone poems (le terme, synonyme de “poème symphonique”, fait alors fureur dans le monde du jazz, pour désigner l’abandon du découpage cyclique des standards, au The Cannonball Adderley Miles Davis : Quintet : “Mercy, Mercy, “Bitches Brew” (Columbia, profit d’atmosphères à forte charge descriptive). C’est Nat Adderley Mercy ! Live At The Club” 1969-1970) (Capitol, 1966) qui en trouve le titre (« C’est beau comme un chemin silencieux. ») et Miles Davis : “The les deux frères s’en disputeront la primeur, mais c’est à Miles Davis The Cannonball Adderley Complete Bitches Brew – dont il est devenu le confident – que le pianiste réserve sa compo- Quintet : “74 Miles Away” Sessions” (Columbia, (Capitol, 1967) 1969-1970) sition. Ce dernier la dépouillera de toute son architecture harmonique The Cannonball Adderley Miles Davis : “Big Fun” (restituée sur “Zawinul” où l’on retrouve une autre pièce abandonnée Quintet : “The Price You Got (Columbia, 1969-1972) FRED SELIGO par Miles, His Last Journey). Il en sera ainsi de tout le matériel apporté To Pay To Be Free” (Capitol, 1970) Joe Zawinul : “Money In The Pocket” (Atlantic, 1966) The Cannonball Adderley “The Rise Quintet : “The Black Mes- Joe Zawinul : siah” (Capitol, 1971) And Fall Of The Third Stream” (Vortex, 1967) Nat Adderley : “You Baby” (A&M, 1968) Joe Zawinul : “Zawinul” (Atlantic, 1970) Miles Davis : “Directions” (Columbia/Legacy, 1960- 1970) Miles Davis : “In A Silent Way” et “The Complete In A Silent Way Sessions” (Columbia, 1968-1969) 20 Jazz Magazine Numéro 691 Février 2017 Février 2017 Numéro 691 Jazz Magazine 21 dossier Le monde de Weather Report WAYNE SHORTER Atmosphères, atmosphères... : les temps changent Les trois derniers disques que Wayne Shorter a enregistrés pour Blue Note entre 1969 et 1970 apparaissent avec le recul comme une étape essentielle dans sa maturation esthétique.