Histoire Des Bourses De Valeurs 1 Histoire Des Bourses De Valeurs
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Histoire des bourses de valeurs 1 Histoire des bourses de valeurs L'histoire des bourses de valeurs s'est faite progressivement, par la réunion de plusieurs conditions nécessaires: existence de sociétés par actions, connexions entre places internationales, accumulation du capital par la dette publique ou le négoce de matières premières, grands projets d'infrastructures pilotés par l'État: Banque centrale, marine, barrage, canaux. Autres étapes importantes, les spéculations successives sur des marchés en émergence ou des technologies : épices des Indes, commerce dans le Pacifique, Mississippi, mines en profondeur, chemin de fer, électricité, télécoms, informatique. Les bourses étaient mondialisées et opéraient en symbiose bien avant l'invention du télégraphe. Depuis plusieurs siècles, elles sont sophistiquées (options, ventes à terme). L'augmentation du nombre de sociétés cotées n'a vraiment eu lieu qu'au premier tiers du XIXe siècle, et l'arrivée de sociétés industrielles dans son dernier quart, alors que la révolution industrielle est déjà largement engagée. La plupart des krach ont eu lieu au XIXe siècle et les principaux grands marchés boursiers haussiers au XXe siècle (années 1920, années 1950 et années 1990), grâce de fortes croissances économiques, que symbolisent ensuite Petrobras, Gazprom, Mittal et Petrochina, les nouveaux géants des Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud (BRICS). XIIIe et XIVe siècles Les moulins du Bazacle, première société par actions C'est en 1250 que Toulouse a vu naître la première société dont les actions pouvaient s'échanger, leur prix variant en fonction de la conjoncture économique. La Société des moulins de Bazacle regroupait 60 moulins flottants, dits à « nef », sur la Garonne. Ces moulins étaient répartis entre trois lieux distincts : "La Daurade", "Le Château narbonnais" et "Le Bazacle". La chaussée du Bazacle, faite de pieux de chêne, traversait en biais la Garonne, sur une longueur d’environ 450 mètres. Toulouse, qui comptait entre 30 000 et 60 000 habitants, assurait les débouchés commerciaux de ces moulins flottants. La chaussée du Bazacle aujourd'hui Chaque associé recevait un papier notarié, en contrepartie de sa participation dans la société. En fin d’année, il touchait en nature, c’est-à-dire en farine, sa part des bénéfices. Les rendements pouvaient atteindre entre 10 % et 25 % par an[1]. Les actions étaient échangées sur un marché libre comparable à la Bourse[2]. Chaque année, une assemblée était organisée pour élire les administrateurs, le trésorier et le receveur des grains[3]. La Société des moulins de Bazacle est restée cotée jusqu'en 1946, sous le nom de Société toulousaine d'électricité de Bazacle. Histoire des bourses de valeurs 2 Venise, première place pour l'échange de parts dans des navires À Venise, le quartier du Rialto était proche d'une vraie bourse des valeurs, selon l’historien Fernand Braudel. Les marchands du grand commerce mondial y échangeaient des participations dans les galères vénitiennes, divisées en « carats », et mises aux enchères. Ce système de l’Incanto des galées du marché[4] a permis à Venise d'entreprendre à partir du XIVe siècle des aventures maritimes à très grande échelle. À son apogée, au milieu du XVe siècle, la ville armait une flotte évaluée à 6 000 galères vénitiennes, lui permettant de prendre des risques, sous forme de convois réguliers, pour régner sur la Méditerranée, au détriment des grands rivaux comme Gênes, Bruges et Anvers. Ce système est créé dès 1283, sous régie d'État, deux ans après la difficile victoire militaire de Chioggia contre Gênes. L'État vénitien veut alors acquérir une taille suffisante pour assurer la sécurité de la Lagune de Venise. Il faut attendre 1315 pour les deux premières enchères, à but clairement commercial, concernant les lignes menant à l'Angleterre et aux Flandres[5]. Le canal de Porta Nova, entrée de l'Arsenal de Venise L'État vénitien créé en 1347 une troisième ligne menant à Alexandrie, en 1374 une quatrième vers Beyrouth, en 1402 une cinquième vers Aigues-Mortes, puis en 1436 une ligne reliant les ports de la côte africaine à l'Espagne. La création de cette "Bourse du Rialto" stimule la construction des flottes marchandes, qui nécessite, entre 1303 et 1325, le quadruplement de la superficie de l'arsenal de Venise, protégé par une enceinte secrète de 25 hectares, qui devient le premier site industriel du monde. Bruges, première place européenne, relie Baltique et Méditerranée Bruges était le grand partenaire commercial de Venise, au moment où la cité italienne a étendu son rayonnement, mais aussi un précieux partenaire financier. La première Bourse moderne aurait ainsi été créée au XIIIe siècle à Bruges[6], lorsque les représentants des comptoirs implantés dans la ville prirent l'habitude de se réunir devant l'hôtel de la famille Van der Buerse[7]. Les principaux comptoirs, appelés « nations », se partageaient les maisons sur la place Ter Buerse. Une nation était une association de marchands étrangers, qui louait le plus souvent ses propres bâtiments. Les marchands y échangeaient les monnaies de toute l’Europe et fixaient les prix futurs des marchandises, ce qui nécessitait d'anticiper l'évolution de l'offre et de la demande aux quatre coins du monde connu. « Des Espagnols, des Italiens, des Anglais, des Allemands, des Orientaux s’y rendent, bref, toutes les nations ensemble », racontent les carnets de voyage d’Hieronymus Muenze, un médecin allemand de Nuremberg en 1495. Bruges a joué un rôle majeur dans la naissance du marché des valeurs[8]. Sur fond de déclin des foires de Champagne, elle a facilité aux Italiens l'accès à l’Europe du Nord, au croisement des empires commerciaux italiens et du réseau de villes commerciales de la Hanse[9]. Histoire des bourses de valeurs 3 XVe et XVIe siècles Anvers, première place mondiale, relie l'Inde à l'Amérique Le port de Bruges s'ensabla et Anvers prit le relais grâce à son port sur l'Escaut, alors principale artère fluviale des Flandres et du Hainaut, les deux régions de l'Europe les plus actives. Anvers devient la capitale de l'imprimerie Plantin, après l'invention de la presse à imprimer par Gutenberg. En 1508[10], la couronne du Portugal décide d'y installer la Feitoria de Flandres, pour ses navires qui reviennent chargés d'épices des Indes. Anvers leur fournit l'argent des mines autrichiennes du Tyrol, puis celui du Mexique, car elle appartient à l'Empire espagnol. Anvers n'a pas de vraie banque[11], ni même de flotte de commerce, et il n'est pas question comme à Venise d'écrire les dettes dans un seul livre de comptes. La place flamande développe alors les lettres de change qui peuvent être escomptées[11]. L'achat à terme se développe : il arrivait « de plus en plus fréquemment » que la date des livraisons soient reportées, l'écart de temps « permettant d'escompter la hausse ou la baisse » du cours des marchandises[12]. Vers le début du XVIe siècle, les transactions se concentrèrent à Anvers, qui devient une place pour les négociants de tous les peuples et toutes les langues. La Bourse d'Anvers est un bâtiment, aujourd'hui disparu, de grande taille où se retrouvent marchands et financiers, espagnols et flamands, allemands et portugais, italiens et suédois. En 1592 apparut la première cote publiant la liste des produits cotés[13]. Très vite, les Espagnols amènent des marchandises de toute l'Amérique latine, en particulier du Potosi péruvien après 1560 et les convois portugais poussent jusqu'au Japon, convertissant au catholicisme la La Casa de la Moneda, où était frappé l'argent de région de Nagasaki. Potosí, convoyé à travers l'Océan jusqu'à Anvers Lyon, première place des emprunts publics à long terme Lyon fut en 1540 la première des bourses des valeurs régionales françaises, qui ont d'abord été des bourses de commerce. Toulouse remonte à 1549 et Rouen à 1566. Viendront ensuite Bordeaux, Lille, Marseille, Nancy et Nantes. « Création des marchands italiens » comme Laurent Capponi, venu de Florence, Lyon centralise les nouveaux échanges sur les effets de commerce et l'escompte[14], qui font le succès d'Anvers à la même époque. Spécialiste du commerce de gros, grande organisatrice de foires depuis 1463[15], Lyon est « censée donner la loi à toutes les autres places d'Europe[16] ». Vers 1550, c'est une grande ville de soyeux la capitale de l’imprimerie européenne, avec près de 100 ateliers dans la rue Mercière et ses voisines, même si nombre de marchands français s'établiront ensuite à Anvers, nouvelle rivale[17]. Les banques italiennes de Florence et Lucques, implantées à Lyon, fusionnent : la Banque Gadagne est absorbée par les Capponi[18]. Elles prêtent aux souverains espagnols et français qui se combattent. Le banquier Albisse Del Bene, issu d'une famille d'exilés La Rue Mercière et ses voisines réunissaient une florentins est munitionnaire des armées et contrôle la levée des impôts centaine d'imprimeurs de Lyon dans toutes les régions de France[19]. Histoire des bourses de valeurs 4 Henri II lance à Lyon en 1555 le Grand Parti de Lyon, un emprunt de deux millions d'écus sur 11 ans, à intérêt de 16 %, « taux très supérieur aux précédents », de 12 % en moyenne[20]. Les trois-quarts de l'emprunt sont d'anciens crédits, rassemblés et refondus. Jusque là, le déficit royal était comblé par des emprunts à trois mois, renouvelés à l'échéance. La plupart des créanciers suisses le boudent, jugeant l'échéance trop longue: ils envoient seulement 29000 écus à Lyon[21]. La nouvelle créance séduit cependant par sa clarté et sa visibilité. Pour souscrire, « des femmes vendirent leur bijoux, des domestiques engagèrent leurs économies » des « marchands turcs souscrivirent par l'intermédiaire de leurs hommes de paille 500 000 écus[20] ».