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ÉDITORIAL A L'ÉCOLE

Le 42e concours de l'Historien Bernard Cazeau, de Demain : école et écoliers Président du Conseil Général de la p.1 (XVIIIe-XXe siècles). p. 30 A LA UNE

Jacqueline Faure p.2 p. 31 BIOGRAPHIE LE MUSÉE DU PÉRIGORD NOIR A DOMME Périgueux au milieu du XIXe siècle: l'irruption des ingénieurs dans la ville. Jean-Emmanuel Bonnichon p. 3 Luc Joudinaud p.32 ASSOCIATION LE DISCOURS LOI DE LA MÉTHODE du 1" ;uillet La Société Historique Cartographie de la Dordogne. 1901 et Archéologique du Périgord. 2e partie: les cartes anciennes. Jacques Lagrange p. 13 François Bordes p. 36

BIBLIOTHÈQUE DERNIÈRES ENTRÉES 1 ,1 [ Travaux universitaires déposés. , Dominique Grandcoin p. 16 1 Etat d'acctoissement des collections II~ 1 Compte-rendu. des Archives départementales. i Gérard Duhamel p. 17 Jacqueline Faure p. 38 INÉDIT EXPOSITIONS/ ANIMATIONS Le bourg castrai de Montignac : Opération «sceau-vegarde» : les sceaux ses lettres de franchises. des Archives départementales. Bernard Fournioux p. 19 Bernard Reviriego p. 40

PALÉOGRAPHIE DE L'HÉRALDIQUE MUNICIPALE

Un texte ancien et sa transcription. Raymonde Sarlat p. 26 Jean-René Bousquet p. 43 SONOTHÈQUE PAROLE DE LECTEUR

De mémoire d'institutrice. Sylvain Roux p.28 Entrevue avec Louis Grillon. p. 45 Mémoire de la Dordogne

Revue semestrielle éditée par les Archives départementales de la Dordogne N'5 / DÉCEMBRE 1994

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION François BORDES

REDACTEUR EN CHEF Bernard REVIRIEGO

COMITÉ DE LECTURE François BORDES, Joëlle CHEVÉ, Michel COMBET, Patrick ESCLAFER de la RODE, Jacqueline FAURE, Bernard FOURNIOUX Dominique GRAND COIN, Claude LACOM­ BE, Bernard REVIRIEGO. Voici deux ans maintenant que cette Revue des REDACTION Archives départementales existe. Cela fait suffisamment de temps pour tirer un Jean-Emmanuel BONNICHON, François bilan qui s'avère particulièremment positif. BORDES, Jean-René BOUSQUET, Gérard DUHAMEL, Jacqueline FAURE, Bernard Les quelque 320 abonnés, répartis partout en FOURNIOUX, Dominique GRAND COIN, , ainsi qu'à l'étranger, témoignent que la revue a trouvé son public. De Luc JOUDINAUD, Jacques LAGRANGE, même les150 exemplaires vendus en librairie. Bernard REVIRIEGO, Sylvain ROUX, Raymonde SARLAT. La revue s'est imposée comme ce qu'elle voulait TRAVAUX PHOTOGRAPHIQUES être: un outil de formation et d'information, mais aussi de promotion du patri­ Denis BORDAS et Renée HASSE (atelier moine que représentent nos archives. photographique des Archives départemen­ tales) La richesse de ce patrimoine sera d'ailleurs particu­ lièrement à l'honneur cet hiver, grâce à la très belle exposition de sigillographie MAQUETTE, MISE EN PAGE Thierry BOISVERT réalisée par les Archives départementales. et Cathy FRELAND Les techniques les plus modernes seront utilisées, PHOTOGRAVURE puisqu'une banque numérique interactive permettra de mieux apprécier et com­ Imprimerie prendre la qualité et la préciosité des sceaux présentés. Il faut, par ailleurs, noter l'effort fait, en liaison avec le Groupement pour l'Insertion des Handicapés IMPRESSION Imprimerie Fanlac Physiques pour assurer le meilleur accueil aux personnes non-voyantes et mal­ ZAC Pareau Avenue Winston-Churchill voyantes, avec, en particulier, des textes en Braille. 24661 Coulounieix-Chamiers Cette exposition, comme la qualité de cette revue, ABONNEMENTS sont la preuve de la passion avec laquelle l'ensemble de ceux qui travaillent aux Deux numéros par an : 70 F Archives départementales remplissent leur mission. Qu'ils trouvent ici le témoi­ Prix à l'unité: 35 F gnage de nos remerciements et de nos félicitations. Bulletin d'abonnement à l'intérieur de la revue. Bernard CAZEAU Diffusé par D.C.P. 9013 Président du Conseil Général de la Dordogne

ISSN 1241-2228 Dépôt légal à parution

Le contenu des articles n'engage que la responsabilité de leurs auteurs. ---A LA UNE ------l

Créé le 1er janvier 1894, le journal La Plume de Périgueux, mensuel littéraire et commercial, faisait paraître un supplément La Plume sté­ nographique, journal littéraire et scientifique. Le dernier numéro est daté d'octobre 1894.

/,<:'.~\~~I~~+~~ Supplément de "LA PLU:M:E DE PÉRIGUEUX" du 1 er a:o{tr 1894-, t : ~'~r'.}~:t,------=-.::..:..==--=..::.::..

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DIRECTION RÉDACTION & ADMINISTRATION JOURN AL LITTÉRAIRE & SCIENTIFIQUE 2, Cours Montaigne 96, Faubourg d'Angoulême ORGANE DES STÉNOGRAPHES DU CENTRE DE LA FRANCE PÉRIGUEUX

Les Afa?,wscrits devant être insérés dev1'onl pan:enÎ1' à la Rédaction le 20 de chaque niois au plus ta,rd.

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2 BIOGRAPHIE

Périgueux au milieu du XIXe siècle: L'irruption des ingénieurs dans la ville.

Dans les chemins de fer, la fonction occulte sou­ En 1851, le recensement quinquennal (1) enregistre la présence de 3 ingénieurs dans la vent le grade. Hubert Duru, inspecteur princi­ ville : Marrot, qui est dit ingénieur des mines pal de l'Exploitation figure bien sur l'annuaire de (2), Kermaingant (3), ingénieurs en chef, et l'Ecole Centrale, comme ingénieur. Paul Salesse, Fargaudie (4), ingénieur des Ponts et Chaussées. successeur de Lemblée, est désigné par le Calendrier comme chef de la Traction; son titre Dans le quart de siècle qui accompagne d'ingénieur apparaît sur la liste électorale de l'installation du chemin de fer, entre 1853 et 1878. Lassanssâ, inspecteur de l'Exploitation, est 1878, une petite cinquantaine d'ingénieurs exer­ aussi ingénieur, comme J.B. Chaussegros, sous­ cent ou séjournent à Périgueux, certains pen­ chef de la Traction, qui devient chef de ce servi­ dant une ou plusieurs décennies. ce à Orléans en 1878. A aucun moment le titre d'ingénieur n'apparaît pendant son séjour à Dans la période-témoin des années 1860, Périgueux, alors que cet ancien élève de l'école pendant laquelle co-existent les services ordi­ d'Aix (promotion 1844) illustre le processus de naires de l'Etat, les services exceptionnels du réussite individuelle des anciens des Ecoles contrôle du chemin de fer, les services construc­ d'Arts et Métiers, accédant par promotion inter­ teurs de la Compagnie et les trois grands services ne au grade d'ingénieur (9). Son cas nous "Voies et Bâtiments", "Traction" et contraint à réfléchir sur la situation des autres "Exploitation" du chemin de fer, Une vue syn­ cadres du service de la Traction : son successeur, chronique du petit monde des ingénieurs donne un effectif d'une vingtaine au minimum. Révérend, est désigné aussi comme ingénieur. Mais jusqu'à quel niveau de responsabilité trou­ Pourtant les II'mgellleurs ,. "fine 19urent pas dans les Calendriers de la Dordogne parmi les professions ve t-on des ingénieurs? Qu'en est-il de Richard, exercées à Périgueux. Présents aux postes de chef des Ateliers pendant un quart de siècle et commande essentiels, ils sont largement ignorés. ancien élève d'? Ce n'est qu'en 1907 que les Ecoles d'Arts et Métiers obtiendront le droit En fait, à l'époque, comme aujourd'hui, ils de délivrer le titre d'ingénieur. Paul Nizan a souffrent d'une certaine occultation. Ce n'est pas popularisé, avec Antoine Bloyé, la figure du particulier à Périgueux : "les ingénieurs sont une "gadzart" qui parvient au sommet de la hiérar­ catégorie socio-professionnelle mal connue" (5). Les chie industrielle et ferroviaire (10). C'est "dans la sources utilisées pour leur traque sont d'inégale seconde moitié du 19ème siècle qu'intervient pour les précision et conservent souvent un caractère gadzart la vraie percée pour les postes dingénieurs ... à ponctuel (6). L'appellation n'est pas contrôlée: travers la promotion sur le tas"(ll). Suivre l'en­ ainsi que le rappelle G.E. Lami, en 1885, "aucu­ semble des itinéraires individuels conduisant au ne loi n'emPêche le premier venu de se dire ingé­ grade d'ingénieur impliquerait l'existence pour nieur. .. "(7). On peut penser que c'est le cas de la Compagnie d'Orléans - indépendamment de Rougier qui se dit "ingénieur hydroscope". Sa publi­ la série AQ des Archives nationales - d'archives cité dans tEcho de Vésone laisse penser qu'il s'agit comparables à celles que F. Caron a utilisées plutôt d'un sourcier inventif (8). pour la Compagnie du . Malheureusement,

3 comme le rappelle G. Ribeill, "climportants fonds Jusqu'au début de 1865, l'autorisation ministé­ complémentaires cl archives (Compagnie de à rielle préalable à toute installation de machine à Orléans .. .) ont été naguère détruits à toccasion des vapeur est obligatoire. Elle donne lieu à dossier extensions souterraines de quelques gares parisiennes détaillé et plans. C'est à cette procédure que (Austerlitz)" (12). nous devons le très beau plan des Ateliers du . L'histoire de la carte géologique est Plus difficile encore est la quête de ceux inséparable de celle de Marrot (X 1817, Mines qui, sortis d'une Ecole, ont pris la direction 1819) qui, dès 1832, est chargé du sous-arron­ d'une entreprise : ainsi J.B. Dufour (Arts et dissement de Périgueux. Le préfet Romieu , Métiers, Angers 1827), constructeur de voitures en 1837, son action au service des industriels et à la tête de la deuxième entreprise industrielle la création d'un laboratoire départemental. de la ville après les Ateliers du chemin de fer, ou Nommé ingénieur en chef de l'arrondissement encore Desmoutis, patron des tuileries méca­ de , en résidence à Angoulême en 1849, niques du Toulon et participant actif au Congrès il joue sur la nécessité de terminer la carte géo­ Scientifique de 1876, ancien élève de l'Ecole logique (qui sera publiée 6 ans après sa mort) Centrale. Il faut renoncer à toute prétention à l' (15) pour séjourner le plus longtemps possible à exhaustivité, recenser les différentes familles Périgueux. Le 2 avril 1851, il est nommé ingé­ d'ingénieurs, leurs parentés, leurs origines et nieur en chef à Périgueux. C'est là qu'il apprend, tenter de cerner la place qu'ils ont tenue dans la en décembre 1852, sa nomination au grade société périgourdine. Faute de connaître l'em­ d'inspecteur général de 2e classe. C'est là qu'il ploi exact des rares "ingénieurs civils" mis à jour élit domicile pour jouir de sa pension de retrai­ grâce au dépouillement des naissances et te. C'est là, enfin, qu'il meurt le 6 juin 1876, mariages de 1856 à 1870, force est de s'en tenir selon la déclaration faite par son ami Jules aux deux grands employeurs: l'Etat et le che­ Martin, ingénieur de la Compagnie. Ce céliba­ min de fer. Le premier coiffe les Services des taire à la santé fragile, exemple d'un bel enraci­ Mines et des Ponts et Chaussées. nement périgourdin, occupe même pendant quelques semaines, en 1870, le fauteuil de maire. Sous l'autorité de ses successeurs, Harle, Les ingénieurs des Mines: Guillebot de Nerville, Roger (16), le poste d'in­ carte géologique génieur du sous-arrondissement de Périgueux et machine à vapeur reste souvent vacant.

] usqu'en décembre 1876, Périgueux est à la fois chef-lieu d'un arrondissement minéralo­ gique couvrant sept départements et d'un sous­ arrondissement réunissant la Dordogne et les . Au premier correspond l'emploi d'in­ génieur en chef, au second celui d'ingénieur, d'ailleurs souvent non pourvu. Le chef-lieu d'ar­ rondissement est transféré à en 1876. Bère, ingénieur en chef, obtient, à cette date, de rester à Périgueux mais il est contraint de rési­ der à Bordeaux, en 1886, après la catastrophe de (13 bis).

Au quotidien, ce ne sont pas tant les Il en sera de même sous l'administration de • Chemin de mines que les carrières qui prennent de l'impor­ Bère. Ce nouvel ingénieur en chef arrive à fer d'Orléans. Plan des ateliers de tance, sous le double effet du boom de la Périgueux en 1869, précédé d'une réputation Périgueux. 1864. construction lié à l'urbanisation et du déclin de contrastée. Il a à assumer la responsabilité de A.D.24, 70 S 148. la sidérurgie locale (14). Les grandes affaires sept sous arrondissements successifs. Son séjour sont la confection de la carte géologique et la à a dû être écourté: il est chargé d'instrui­ lente introduction de la machine à vapeur. re les dossiers de générateurs à vapeur, alors

4 qu'il a pris lui-même un brevet. Sa partialité sus­ un ingemeur en chef: Kermaingant (1840- cite des plaintes d'industriels. Le préfet du Nord 1854), Andral (1854-1865), Ester (1865-1868), conclut : "Monsieur Bère a agi plutôt dans son inté­ Fargaudie (1868-1879). L'ingénieur en chef est rêt personnel... Sa position est devenue impossible" épaulé dans sa tâche par quatre ingénieurs ordi­ (17). Malgré ses brillantes qualités intellec­ naires dont un en résidence à Périgueux (22). tuelles, cet ingénieur en chef irrite. Ce ne sont Sauf Saleta, les ingénieurs n'ont fait que des pas tant ses origines familiales et religieuses (18) séjours relativement courts, Périgueux étant qui sont en cause que son caractère passionné, pour eux une étape en début de carrière avant agressif, sa maladresse, son goût de la controver­ promotion d'emploi dans l'administration ou se. Lors de la catastrophe de Chancelade, ce n'est pantouflage. Ferrand et, dans des conditions pas le manque de courage qui lui est reproché plus avantageuses, Liebaux, ont choisi cette mais le fait d'avoir dit trop tôt l'impossibilité de seconde voie. Fargaudie, comme ses patrons sauver les victimes (19). Cette affaire précipite Kermaingant et Andral, ont décidé de rester à l'obligation de résidence à Bordeaux suivie d'un l'intérieur du service public mais avec des par­ prompt départ à la retraite mettant fin aux évo­ cours différents. Malgré diverses interventions, lutions de carrière qu'appuyait le sous-secrétaire Andral part à la retraite sans accéder à l'inspec­ d'Etat Wilson. Il est vrai que, de 1881 à 1884, tion générale. Kermaingant y parvient mais Bère avait été au coeur d'une "affaire". Ayant mis après un détour par le Puy-de-Dôme. Fargaudie, au point "une ronce artificielle pour clôtures" qu'il a dont les débuts avaient été sanctionnés, mais qui fait breveter, il la fait fabriquer pour son comp­ avait su rentrer en grâce, dirige son service avec te et, usant de ses fonctions officielles, obtient efficacité et sait mettre à profit ses bonnes rela­ l'exclusivité des fournitures pour les chemins de tions avec le Président du Conseil général (Pierre fer de l'Etat ... L'inspecteur général avait conclu Magne) et sa bonne connaissance de son dépar­ le 12 janvier 1884 : "Bien que ses fonctions le lui tement natal. Il cherche à coiffer, de Périgueux, interdisent, il s'occupait beaucoup moins de celles-ci que l'ensemble des services compétents en matière du placement de ses produits. Monsieur Bère devrait de chemin de fer et parvient à se faire nommer, être considéré comme un malhonnête homme". Ces pra­ en juillet 1876, "ingénieur en chef directeur" avec la tiques, proches de la concussion, font paraître charge de diriger et de centraliser les études de presque vertueux le "pantouflage" (20), particu­ chemin de fer sur un large Centre-Ouest. Ce lièrement développé chez les ingénieurs des dispositif ayant entraîné des difficultés, Ponts et Chaussées. Fargaudie monnaye fort habilement, à 58 ans, en échange de la dissolution du service, sa L'omniprésence des ingénieurs propre accession à l'inspection générale. des Ponts et Chaussées Son collègue, puis collaborateur, Saleta n'a Elle s'inscrit dans trois textes fondamen­ pas la même carrière. Suspect politiquement en taux: les lois de 1850 sur le recrutement des 1851, affecté par une maladie nerveuse qui ne ingénieurs et l'admission des conducteurs, le l'empêche pas d'accomplir un travail considé­ décret du 13 octobre 1851 précisant l'organisa­ rable, il demeure deux décennies en Périgord, tion de l'administration (service ordinaire, servi­ pour l'essentiel au chef-lieu. Soucieux de le voir ce spécial) et définissant le "congé illimité" et le accéder à la Légion d'Honneur avant son propre décret du 30 octobre 1879 qui remplace celui-ci départ à la retraite, son chef Andral écrit au par le "congé renouvelable", plus avantageux pour ministre et rappelle l'oeuvre de Saleta : prolon­ les intéressés. gement de la navigation sur l', défense de la ville contre les inondations, routes agricoles de la Le service ordinaire des Ponts et Chaussées Double et projets d'assainissement de cette s'occupe des routes impériales et départemen­ région, exécution d'un grand pont sur l'Isle et tales, du service hydraulique, de l'assainissement d'un autre sur la . S'il reçoit le ruban de la Double ... (21). En outre il apporte le rouge, Saleta n'en reste pas moins un peu mar­ concours des ingénieurs ordinaires au service ginal. La notice annuelle de 1869 rappelle qu 111il spécial de contrôle de chemin de fer. A sa tête, devrait soigner un peu plus la partie matérielle de son

5 service, voir de plus près les détails et mieux com­ constructions prévues dans la concession, prendre timportance de la règle en toute chose". Mis moyennant une subvention de 72 millions (23). en disponibilité pour raison de santé de juillet Cette double renonciation à la loi de 1842 1870 à mars 1874, il est réintégré dans la contraint la Compagnie à se doter d'un service . Le 2 août 1874, le Secrétaire général de construction et, corrélativement, l'Etat à se du Ministère lui expose le grief (activité insuffi­ doter d'un service de contrôle. sante) qui s'oppose à sa nomination comme A la tête du service de contrôle, un ingé­ ingénieur en chef Saleta réagit dans une longue nieur en chef des Ponts et Chaussées. Pour ceux lettre : "Il s'agit en de briser irrévocablement qui construisent, "c'est teunuque car son rôle consis­ texistence dun homme qui a toujours fait son devoir". te à regarder faire" (24). La charge est attribuée Il terminera néanmoins sa carrière comme ingé­ en octobre 1855 à V Gonnaud. Il l'exercera jus­ nieur en chef de 1ère classe, à la tête du service qu'à sa retraite en 1872. Cet ingénieur en chef, de contrôle du chemin de fer du Midi. célibataire et corpulent, fait l'objet de rapports élogieux. La notice de 1860 indique toutefois: "Ses rapports sont rédigés avec clarté mais quelquefois trop surchargés de dissertations théoriques ou spécula­ tives. Je désirerais qu'il fût dhabitude moins séden­ taire, qu'il se renfermât moins dans son cabinet et ait des rapports personnels plus fréquents avec les ingé­ nieurs de la Compagnie... Les rapports avec la Compagnie seraient moins tendus qu'ils ne le sont aujourdhui". Après son retrait, un service spécial subsiste pour les besoins de la ligne Libourne­ Bergerac. A sa tête, E. N. Lionnet, ingénieur en chef qui a pantouflé pour les frères Péreire pen­ dant près de 15 ans sur le Séville-Cordoue et qui, à la veille de sa retraite en 1877, repart tra­ vailler sur le chemin de fer du Nord de l'Espagne. Il est assisté par Roman qui lui suc­ cède avant de prendre la tête du service ordinai­ re de la Dordogne. Nombreux sont les ingé­ nieurs des Ponts et Chaussées qui, comme • Costume des ingénieurs ordi- Lionnet, ont choisi l'aventure du chemin de fer naires des Ponts et Chaussées au au service des compagnies. XIX' siècle. (extrait de Ponts et viaducs au XIXe Les ingénieurs du rail siècle, de Marcel Prade, , éd. Brissaud, 1988, p. 11). Leur présence est apparente dès 1853 pour le service constructeur du Grand Central. La naissance d'un tel service de contrôle à Dix ans après, parallèlement à la mise en place Périgueux pour le chemin de fer Grand Central, de la quatrième inspection principale chargée de puis le Réseau Central de la Compagnie l'Exploitation, se structurent hiérarchiquement d'Orléans résulte de la volonté de P. Magne, le service des ingénieurs - Voies et Bâtiments et soucieux d'orthodoxie financière, de ne pas le service de la Traction. Implantés à Périgueux, appliquer au réseau secondaire la loi de 1842 ayant compétence sur plus de 1000 km de che­ mettant à la charge de l'Etat les infrastructures min de fer, ils font de notre ville une authen­ du chemin de fer. La Convention de 1853 laisse tique capitale ferroviaire. au Grand Central la charge complète des dépenses prévues dans sa première partie (dont Le service de la construction la ligne Périgueux-Coutras). Les conventions de 1855 chargent la Compagnie de la totalité des c 'est le service Construction de la

6 Compagnie qui offre la moisson la plus abon­ ingemeur, issu du corps des conducteurs des dante d'ingénieurs. Dès 1853, le directeur des Ponts et Chaussées et qui a pantouflé avec lui à travaux de la Compagnie, J.G. Job, est sur le ter­ l'entreprise Lacroix (27) ; à la construction des rain. Sa présence est à nouveau signalée en gares et stations : Michel, ingénieur-architecte 1856, lors des discussions relatives à l'emplace­ auquel succède, avec le même titre, Guérard ; ment de la gare (25). Dès 1853, Gerardin, ingé­ dispositions générales des voies et des stations : nieur des Ponts et Chaussées en congé illimité, de Nomaison, sous-ingénieur (recensé comme ingénieur en 1876) ; construction des lignes : est chargé des premiers travaux. Il fait preuve Partiot, ingénieur des Ponts et Chaussées, d'une grande fermeté sur le problème de l'em­ Tamisier, sous-ingénieur ; service des études : placement de la gare. La Compagnie n'implan­ Moinot, conducteur des Ponts et Chaussées, tera pas à Périgueux les ateliers prévus si son ingénieur. Au passage, sont mis en lumière deux choix n'est pas confirmé. Il est désavoué par le des viviers de recrutement des ingénieurs de la Préfet mais, homme de la Compagnie, il n'a rien Compagnie : soit parmi les conducteurs des à redouter du représentant de l'Etat. Ponts et Chaussées auxquels la promotion est Finalement, la gare s'installe à l'extrémité du massivement refusée dans l'administration, soit faubourg sainte-Ursule, comme le souhaitait le parmi les compétences militaires. Lors du maria­ Grand Central. ge de sa fille en 1862, EL.A. Tamisier décline ses titres: "Sous-ingénieur au Réseau Central dOrléans, Le service est véritablement structuré par ancien caPitaine d artillerie, ancien professeur à t Ecole J.B. Krantz, ingénieur ordinaire de 2e classe, Normale de Tir de Vincennes ... " promu ingénieur en chef du Grand Central puis du Réseau Central d'Orléans, de 1853 à la fin Krantz est remplacé, fin 1863, par 1863. Son oeuvre est considérable. Rentré au Deglin, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées service de l'Etat, et alors que sa nomination d'in­ qui a peu servi l'Etat, ayant pantouflé depuis génieur en chef tarde, il écrit au Secrétaire géné­ 1853, notamment comme directeur général des ral du ministère: ''j'ai construit avec succès 650 km chemins de fer Madrid-Saragosse-Alicante. de chemin de fer, c'est-à-dire une partie notable du L'organisation du service est peu modifiée : un réseau français". Didion, délégué général du avocat-consultant, Roger, apparaît comme si le Conseil d'administration de la Compagnie, temps du contentieux avait relayé celui de la appuie sa démarche et exprime la gratitude de construction. J. Filliol, ancien élève des Arts et celle-ci. Il écrit à son tour : "Depuis sept ans, Métiers, est dit chef de service puis inspecteur Monsieur Krantz a été chargé, comme ingénieur en des ponts métalliques. Royer, sous-ingénieur, a chef, de construire les lignes qui, de Périgueux, rayon­ en charge le service de la voie et du matériel fixe. nent jusqu'à Limoges, , et . Le sous-ingénieur Mercier apparaît tandis que L'ensemble de ces lignes présente un développement den­ Brouville, inspecteur des bois et des traverses, viron 600 km presque partout dans des terrains acci­ est qualifié d'ingénieur du chemin de fer lors dentés qui ont nécessité des ouvrages parmi les plus dif­ d'une déclaration de naissance (1863/no 093). Le ficiles et les plus importants qui ont été exécutés en service semble s'évanouir vers 1870. Un reliquat France. Monsieur Krantz s'est acquitté de sa tâche apparaît toutefois lors du recensement de 1876 avec un véritable succès et à la satisfaction complète de au domicile d'Auguste Liebaux, 58 ans, ingé­ la Compagnie (26)". nieur à la Compagnie d'Orléans (il l'était déjà en 1867 à Vic-sur-Cère lors de l'entrée de son fils à Pour mener ses travaux à bien, Krantz Polytechnique) : A. Liebaux héberge sous son s'équipe de bureaux étoffés. Bloy, le chef du toit, boulevard Tourny, deux garçons de bureau. bureau de la correspondance, conducteur des Ponts et Chaussées qui remplissait des fonctions "Voies et Bâtiments" (VB), similaires dans cette administration, est, semble "Traction", "Exploitation" -t-il, le père de l'écrivain Léon Bloy. Il est secon­ dé par une équipe d'ingénieurs et de sous-ingé­ Au caractère temporaire du service de la nieurs : directement auprès de lui, Paulon, sous- construction s'oppose l'architecture durable des

7 trois grands services : "Voies et Bâtiments", lence hiérarchique ingénieur - inspecteur ou

"]ractlOn '''''EI' , xp oltatlon. '''Le'd:' e a~en rler ueJI. a manifestation d'une promotion dans l'honora­ Dordogne en donne une description détaillée, riat ? ]. Martin, qui fait référence constante à chaque année, à partir de son édition de 1862 son titre d'ingénieur des Ponts et Chaussées, sert et, surtout, après la création de la quatrième ins­ la Compagnie à Périgueux pendant 23 ans. Par pection principale de l'Exploitation qui contrô• sa compétence et son autorité personnelle, il en le, comme les deux autres services, plus de 1000 devient la figure emblématique. Son successeur, km de voies et de trafic. C'est son rôle de capi­ Brière, est, comme lui, issu du corps des Ponts et Chaussées. tale ferroviaire qui assure à Périgueux, durable­ ment, une présence importante d'ingénieurs. Les origines des ingénieurs Nul doute que les chefs de service ont le grade du rail d'ingénieur, même s'ils sont désignés comme inspecteurs principaux ou inspecteurs. Ainsi "En France le chemin de fer est la chasse gar­ Duru, troisième titulaire de la quatrième ins­ dée des ingénieurs des Ponts" (29). Le diagnostic de pection principale Exploitation, après Maublanc G. Ribeill se vérifie pleinement. Si on laisse de et Lamartinière, sort de l'Ecole Centrale. Son côté les ingénieurs des mines, eux aussi poly­ inspecteur, Lassanssâ, est aussi qualifié d'ingé­ techniciens, ce sont 25 "X-Ponts" qui ont exercé nieur au recensement de 1876. De même, à la pendant ces deux décennies à Périgueux, à un Traction, Lemblée, qui suit le transfert de moment ou à un autre. Une quinzaine de dos­ Viviez, se déclare "ingénieur de la Traction au che­ siers de la série F14 des Archives nationales ont min de fer" (mariages 187 O/n 0 086). Il décède en été dépouillés : 8 comportent une ou plusieurs 1875 et est remplacé par P. Salesse, qui figure périodes de pantouflage, et même 9 si l'on tient sur la liste électorale de 1878 avec le titre d'in­ compte du vertueux Gonnaud gui bénéficie, en génieur. Comment, dans cette société hiérarchi­ 1838-39, d'une période de congé illimité. sée, les chefs ne seraient-ils pas ingénieurs alors que les sous-chefs le sont? C'est le cas de ].B. Les dossiers permettent de vérifier les Chaussegros et de Révérend, sous-chefs de mécanismes du pantouflage. Au commence­ Traction. ment il y a l'argent, bien sûr (30), même s'il n'est pas le mobile essentiel. Le pantouflage est Mais l'incertitude demeure pour d'autres parfois légitimé par la nécessité. Ainsi, dans le cadres comme Richard, chef d'atelier pendant cas de Lionnet, les frères Péreire justifient son près d'un quart siècle, ou Flammarion, sous-chef départ par l'insuffisance de ses ressources et la de dépôt, dont la présence est encore vérifiée sur nécessité de soutenir sa nombreuse famille. Le les rôles de la Garde Nationale en 1871. Ancien pantouflage tire parfois sa force et sa fierté de la élève de l'Ecole des Arts et Métiers (Châlons volonté de barrer la route aux ingénieurs civils 1848), il a été dessinateur, sous-chef de dépôt. Il ainsi que l'exprime Job. termine chef de dépôt à Paris, ingénieur ou Le passage au service des Compagnies est non? Ingénieur certainement, mais quand ? au moins, dans un premier temps, encouragé par la hiérarchie de l'Etat. C'est le cas pour les Le service VB ou "service des ingénieurs" ou plus grands, Didion, Solacroup, Sévène, ce "chez Martin", comme l'on dit couramment, même Sévène qui propose Jules Martin pour lui nous a légué fortuitement une liste des per­ succéder à la chaire de chemin de fer de l'Ecole sonnes travaillant au bureau de l'ingénieur en des Ponts et Chaussées au moment où lui-même chef (28). Aucun nom d'ingénieur n'apparaît à devient éphémère directeur de la Compagnie côté de celui de]. Martin et le pluriel ne semble d'Orléans (33). Le ton est donné, dès 1846, par pas se justifier. Pourtant, son collaborateur P. A le Conseil d'administration de la Compagnie du Aviat apparaît dans L'annuaire mondain illustré de Centre qui écrit au ministre pour s'attacher les la Dordogne (1907 - 1908) avec la mention "ingé­ services de Solacroup : "En portant son choix sur un nieur, ancien inspecteur de la Uiie au Chemin de fer ingénieur des Ponts et Chaussées, le Conseil a pour but dOrléans". Simple réaffirmation d'une équiva- de maintenir et de faciliter les bonnes relations qui

8 existent entre ses ingénieurs et ceux de fEtat; il a voulu original ne peut que se sentir à l'étroit dans l'ad­ de plus offrir à f administration et au public la garan­ ministration des Ponts et Chaussées. Le cas de tie de la bonne exécution des travaux". Vision que Krantz est lumineux. En 1849, il lui est repro­ confirme, en 1910, le ministre des Travaux ché "dêtre trop confiant, dun coeur excellent mais publics : "Les fonctionnaires en congé hors cadre ne contre les illusions duquel son jugement nlest pas assez peuvent être attachés qu'à des compagnies chargées de service public". en garde ... ". En 1850, l'inspecteur général Mary note : "M. Krantz ne laisserait rien à désirer si son Mais, parallèlement, et jusqulen 1879, les coeur généreux ne lui avait pas fait adopter jadis) des ingénieurs travaillant pour les Compagnies sont utopies ... " (35). En 1851, Desfontaines, plus per­ "brimés"· dans leur carrière d'Etat. Après 23 ans fidement, écrit: "Trop préoccupé dans !étude des pro­ passés à la Compagnie d'Orléans, J. Martin, jets de faire autrement que ses prédécesseurs". En 1869 appelé par Freycinet pour organiser le réseau de encore, alors qu'il a 'fait preuve de son talent de l'Etat, reprend sa place dans la fonction publique, à 52 ans, comme ingénieur ordinaire constructeur, il a selon moi trop de tendances aux inno­ de 2' classe. Pire, Job, directeur des travaux du vations non seulement dans la disposition des ouvrages Grand Central, est mis à son retour "en disponibi­ à exécuter mais aussi pour les questions administra­ lité sans traitement par défaut demploi". Après le tives". S'il est vrai, comme l'écrit A. Picon, que décret de 1879, G. liebaux poursuit une carriè­ "les ingénieurs dEtat français nlont pas été constam­ re normale jusqulau grade d'ingénieur en chef ment à la pointe du progrès", il est incontestable des Ponts et Chaussées en étant patron du servi­ que Krantz, pantoufleur de génie et homme de ce VB de la Compagnie d'Orléans à Nantes. • Réseau coeur, a puissamment contribué "à !invention de de la Compagnie d'Orléans. 1920. S'ils acceptent de tels risques, les ingé- f ingénieur moderne" (37). A.D.24, 63 S 1. meurs. "pantouJ'eurs ,fi" trouvent dans 1es Compagnies plus que de l'argent, un espace de liberté et de créativité. Pour connaître le prix de la liberté, il faut consulter les dossiers d'ingé­ nieurs de l'Etat et pas seulement sous le Second Empire. Ils sont étroitement surveillés. Ainsi Fargaudie, exilé en début de carrière et qui doit redoubler de conformisme pour se rétablir. Ainsi Saleta, alors à , accusé par le Préfet de ne pas avoir encadré politiquement son person­ nel à la fin de 1851 et qui passait pour "avoir des idées socialistes". Saleta nia pas pantouflé mais il a longtemps végété. Ainsi, sous la République rendue aux républicains, Gaston Liebaux est "barré" par le Préfet en 1880 pour une Légion d'H onneur peut-etreA" prematuree: "TJe ne saurazs. vous taire, écrit le Préfet, les sentiments anti-républi­ cains et cléri~aux de M. Liebaux, ceux de son père ingénieur à la Compagnie, ceux de son beau-père M. de Gomondie. M. Liebaux est considéré ici, comme les divers membres de sa famille, comme un adversaire de nos institutions",

Ce nlest pas seulement sur le plan poli­ tique que la conformité doit être attestée. Les rapports dl inspection générale magnifient le res­ pect de la forme et des règles établies. Un esprit

9 Cette esquisse d'approche des ingénieurs en marge de la société périgourdine même dans les moments de deuil. Relatant le service à Périgueux au milieu du XIXe siècle paraît funèbre en l'église de la Cité à la mémoire de bien longue et pourtant comme elle est incom­ Madame Gerardin, l'épouse du premier ingé­ pIète! Sans doute faut-il renoncer à cerner l'im­ nieur en chef, fEcho de Vésone signale qu'y assis­ pact d'ingénieurs de la trempe de J.B. Krantz tait "tout le personnel de f administration ferroviai­ sur la société périgourdine. Mais il aurait fallu re" ... mais lui seul (40). vérifier leurs origines sociales souvent acces­ Cet isolement tient-il au fait que les ingé­ sibles par leurs dossiers d'Ecole: fils de la petite nieurs appartiennent à cette "noblesse riEtat" bourgeoisie comme J. Martin, de la plus grande dont parle Bourdieu, cité par A. Picon (41) ? Il souvent, d'origine modeste ou fils d'ouvrier est difficile de répondre. Du moins s'inscrivent­ comme Ferrand, rarement. Leur niveau de for­ ils dans la grande tradition napoléonienne. tune est apprécié de manière contradictoire par Chaque ligne construite, chaque ouvrage d'art les notices annuelles. Il est mieux attesté par échafaudé et réussi sont considérés comme leur train de vie. Au recensement de 1876, les autant de batailles gagnées. Ils sont tous - au ménages d'ingénieurs abritent un, voire deux moins ceux qui sortent des Ecoles - légion­ domestiques (38) ; celui de Jules Martin naires : exceptionnellement avant 30 ans, par­ accueille en outre une préceptrice allemande fois entre 30 et 39 ans (Bère, Krantz, pour l'éducation de ses enfants. Cette fortune Liebaux ... ), toujours avant 45 ans. S'ils sont modestes l'excès comme Jules Martin, il faut leur vient souvent - et cela explique les contra­ à attendre 27 ans pour être promu officier de la dictions des notices annuelles - d'un beau maria­ Légion d'Honneur. Miraculeusement, Krantz ge : Ferrand, le prolétaire, épouse une fille de franchit la distance en sept ans puis, grâce à la joailliers, Martin celle d'un magistrat grand pro­ guerre, il devient Commandeur au bout de trois priétaire, Bère la fille d'un banquier, Fargaudie ans. Son parcours est exceptionnel. Seule la pre­ celle du docteur Javersac. Maùot, Gonnaud et mière étape est périgourdine. Il est rare que, sur Saleta demeurent célibataires. Les actes de nais­ place, les ingénieurs dépassent la distinction de sance ou de mariage des enfants d'ingénieurs Chevalier de la Légion d'Honneur. permettraient, s'ils étaient en plus grand nombre, d'évaluer l'insertion sociale des ingé­ nieurs. Les ingénieurs d'Etat, surtout s'ils sont ~ RONCE ARTIFICIELLE POUR CLOTURES du pays ou séjournent assez longtemps, recru­ SYST!:ME Bb:RE

tent conjoints et témoins chez les hauts fonc­ BJ\XVBTl!: (S.G.D.G.) tionnaires et les notables. Ceux du chemin de fer

ont tendance à rester entre eux, à moins que, Cette cl6ture eat formée d'Etoiles métalliques à quatre pointes, qui 80nt traversées par deUx fils de fer ou d'acier galvanisés tordus ensemble. comme chez Jules Martin, la conscience d'ap­ EUe présente sur toutes celles imaginœs jusqu'à ce jour l'avantage inCOD­ testable d'avoir des Pointes dirigées en tous llellll, I!alllIlJue jamail! celles-ci puissent partenance au corps des Ponts et Chaussées se détacher. Les Ètoiles ont encore cet avantage, qu'elles ne blessent pas les animaux. l'emporte. et que, lrês-visib!es pour e~ leur inStinct les en tient éloignés UDe fois qu'ib s'y sont piqués.

Ce genre de clOture constitue aiusi une bal'I'Ü!l'e ÎnfranchÎ8$able pour les Le handicap majeur qui plane sur l'inser­ bestialll: et qui De les expose a aucun danger. Elle dispense dea haies, -des fosé, - économise le terrain ; el comme elle n'exige aucun entretien, tout en étant d'une dlU'ée polU' ainsi·dire indéfinie, tion sociale des ingénieurs, c'est qu'ils ne sont eUe offre sur tous les autres sptèmes de clôtures uue économie considérable. pas d'ici. Le fait d'être d'ailleurs est, selon fEcho En variant la grandeur des Étoiles et eelle des pointes, on peut épIement en raire une clOture tres..d.ifliçiIe à rranchir par les personnes, el applic:ablfl ainsi de Vésone, la raison majeure de l'échec électoral 4 toutes lespropri~ttls. • Réclame d'Andral, ingénieur en chef des Ponts et pour la ronce arti­ PRIX: 25 Cent:j.mes le Mètre. ficielle pour clô• Chaussées, en 1855 (39). Les ingénieurs sont tures. promis au départ. Ils ne fondent ni ne laissent à Archives nationales. Dossier Bère, F 14. Périgueux de patrimoine. Une petite annonce de l'Echo de Vésone a valeur de symbole : "~nte de meubles pour cause de départ appartenant à Mais ce ne sont pas les plus rapides, ni Monsieur Kermaingant, rue du Plantier nO 29". Les ceux qui ont atteint les grades les plus élevés qui ingénieurs, surtout ceux du chemin de fer, sont ont le plus de mérites aux yeux de la société

10 périgourdine. Pour y être admis, il faut durer. dans la carrière ou de gagner de l'argent ou d'ob­ Andral en fait l'expérience avec son échec électo­ tenir nomination ou promotion dans la Légion ral de 1855. Celui-ci ne l'empêche pas de faire d'Honneur - pour marquer durablement la partie quelques temps après - en service com­ société périgourdine. mandé - d'une commission municipale mise en place par le Préfet. Ce sera aussi le sort de Jean-Emmanuel BONNlCHON Fargaudie et Bère, ingénieurs en chefs, au temps de l'Ordre Moral. Le seul ingénieur d'Etat qui soit élu et le demeure jusqu'à sa mort est Marrot. En revanche, Jules Martin, parce qu'il reste au service de la Compagnie à Périgueux pendant 23 ans, parce qu'il apparaît comme l'homme fort des chemins de fer dont il a bâti les Ateliers, parce qu'il déploie des qualités humaines excep­ tionnelles, alliant une forte autorité à un carac­ NOTES tère doux et modeste, est, à partir de 1864 et pour plus de dix ans, élu au conseil municipal de (1) AD 24, 6M273. Recensement de population de 1851, d'après Terty Périgueux. Il trouve progressivement dans cette Shinn, I1Genèse de la profession d'ingénieur: 1750-1920'\ in Revue franfaise de sociologie, XIX, 1978. Cité par Hélène. Verin, La gloire des enceinte une plate-forme de lancement pour ses ingénieurs, A. Michel, 1993, p.38 1I1e titre dingénieur n'apparaît pas dans les recensements avant 1861", Sans doute vise-t-illes récapitulatifs, car le idées novatrices et y fait voter des textes inappli­ recensement de 1851 ne l'ignore pas à Périgueux. Le recensement de qués mais souvent imprimés et largement diffu­ 1876, fréquemment cité, figure aux AD 24, sous la cote 6M244. sés. Il saisit toutes les occasions pour faire avan­ (2) En fait Marrot a été nommé ingénieur chargé des 3 départements du sous-arrondissement de Périgueux en 1832. Le 3 septembre 1848, cer ses idées. A la faveur d'une demande de il devient ingénieur en chef pour l'arrondissement de Nantes en rési­ dence à Angoulême. Il revient à Périgueux en qualité d'ingénieur en bourse pour le jeune Aviat, il propose d'entre­ chef le 2 avril 1851. Nommé inspecteur général de 2" classe en 1852, prendre les démarches tendant à implanter une il se rerire dans notre ville lors de son admission à la retraite en 1859. quatrième école d'Arts et Métiers à Périgueux. Il (3) Nommé à Périgueux au poste d'ingénieur en chef en 1840 (élevé au grade en 1842), il Y demeurera jusqu'en 1854. Muté dans le Puy-de­ obtient, en 1870, un vote sur l'abolition de l'oc­ Dôme, il devi~nt inspecteur général de 2" classe en 1859 er meurt en 1869 (AN FI4/2250/2) troi (dont le pouvoir inhibiteur du développe­ (4) Charles Maurice Fargaudie, ingenieur ordinaire des Ponts et ment économique était écrasant à Périgueux). Chaussées est, à la date du recensement, sur le point d'être éloigné (sur Son rapport est imprimé comme celui qui est le papier) à , en fait à Villeneuve sur , après intervention ferme et bienveillante du Préfet Calvimont. Celui-ci écrivait au consacré, en 1875, aux chemins de fer d'intérêt ministre: "Si Fargalldie avait 50 ans, je VOltS demanderais de tenvoyer allx Iles Marqllise/'. Il rapportait ainsi les paroles de repentance du jeune local. Sa passion pour les problèmes de forma­ ingénieur: "Tollt ce qlle je veux c'est n'être pas suspect et ne pas m'éloigner de tion, qui s'épanouira dans son enseignement à ma mère ... It. Fargaudie revient à Bergerac, sa ville natale, en 1863. Il accède sur place aux fonctions d'ingénieur en chef en 1868 (et accède l'Ecole des Ponts et Chaussées à partir de 1880, à la 2< classe de ce grade en 1869). Pierre Magne était intervenu per­ sonnellement, le 8 juillet 1868, en écrivant au ministre, son collègue: s'exprime à Périgueux dans son engagement au lIPermettez-moi de recommander à votre bienveillante attention, M. Fargalldie, ingénieur des Ponts et Chaussées, qlli désirerait être chargé des fonctions dingé­ service 'de la "société pour le développement de l'ins­ niettr en chef dll département de la Dordogne. Je porte lm vif intérêt à M. truction primaire" et par la création d'une "biblio­ Fargalldie et j'apprendrais avec plaisir qI/il a été possible à votre Excellence de réaliser le voell de cet ingéniellr". L'inspecteur général honoraire Marrot thèque populaire". était intervenu disant qu'il serait "heurellx dune réussite qlli le rapproche­ rait de mot. Fargaudie quitte Périgueux en 1879 comme inspecteur général de 2" classe et prend sa retraite, en 1891, après avoir exercé les plus hautes responsabilités dans l'administration des Ponts et Les ingénieurs de l'Etat comme ceux de Chaussées (AN FI4/11474). la Compagnie - par le biais du pantouflage - sor­ (5) Thepot (André), "L'ingénieur dans la société française", Mouvement tent souvent du même vivier. Ils ont apporté social, Editions ouvrières, Paris, 1985. leur science et leurs techniques à de grands équi­ (6) Les Calendriers de la Dordogne publient, chaque année, la liste des ingénieurs au service de fEtat. Les renseignements sont moins précis pements d'utilité collective : réseau ferré, lutte pour le chemin de fer, le grade d'ingénieur (fut-il "maison") étant par­ fois masqué par la fonction d'inspecteur. Les informations sont inexis­ contre les inondations et construction du nou­ tantes pour les ingénieurs civils ou les chefs d'entreprise issus des Ecoles: on les rencontre au hasard des "chroniques locales" de tEcho de veau port à Périgueux, assainissement de la Vésone, des actes d'état civil (mariages et naissances) dépouillés exhaus­ Double, établissement des grands ateliers du tivement pour la période 1856-1870 ou encore dans le compte-rendu du Congrès Scientifique de 1876. Toulon ... Leur utilité sociale et économique est En revanche pour les ingénieurs issus des écoles d'application évidente. Mais, sauf exception (Marrot, Martin), de Polytechnique: Mines et Ponts, la·série F14 des Archives nationales offre des dossiers complets. Les nombres indiqués constituent les réfé­ ils étaient des hommes trop pressés - d'avancer rences dans la série F14 : ANDRAL (2155')*, BATAILLER (2163'),

11 BRIERE (2182), BUSCHE (2183')*, CAMUS (2185), DEGLIN cède et reste à Périgueux de manière quasi-continue jusqu'en 1870. (2206)*, DIDION (2213')*, DUVAL (2221)*, ESTER (2222'), FAR­ Placé en disponibilité pour raison de santé, il n'est remplacé qu'en GAUDIE (11475)*, FERRAND (2224')*, GERARDIN (2234'), 1873 par Gaston Liebaux, fils d'Auguste, ingénieur à la Compagnie. GOUNAUD (2236')*, JOB (2247')*, KERMAINGANT (2250')*, Liebaux demeure à Périgueux jusqu'en 1883, puis va pantoufler à KRANTZ (2251')*, LIEBAUX (11579)*, LIONNET (2270')*, Nantes à la tête du service VB de la Compagnie d'Orléans. MARTIN (11492)*, MANCEL (11583), MOURET (11592), PAR­ TIOT (2294'), POT (2236), ROMAN (11503)*, SALETA (2318')*, (23) Echo de Virone, 19 avril 1853 ; 27 janvier, 13 février et 11 avril SEVENE (2321')*, SOLACROUP (11614)*, VERGNE (2336). Seuls 1855. les dossiers marqués d'un astérisque ont été exploités de manière approfondie. Dans la même série F14 ont été étudiés les dossiers de (24) Typologie des ingénieurs établie par J acquart (X-POntS 1912) cité BERE (2713') et MARROT (2732'). La référence à F14 n'est pas répé­ par A. Brunot et R. Coquand, Le corps des Ponts et Chatwées. Histoire de tée en cours de rédaction. tadministrationfrançaise, CNRS, 1982, p.545.

(7) Cité par Hélène Verin, La gloire des ingénieurs, A. Michel, 1993, (25) Echo de Vésone, 15 mai 1853 et 17 septembre 1856. p.38. Lfauteur reprend G. Ribeill, "Profils d'ingénieurs civils au 19ème ll siècle. Le cas des Centraux , Ingénieurs et société, Le Creusot, 1980. Le titre d'ingénieur ne sera réglementé que par une loi du 10 juillet (26) Bien qu'incomplet, le dossier de J.B. Krantz est d'une grande 1934, complétée par le décret du 23 mai 1951. richesse. Né en 1817, ce Vosgien a fait preuve d'une longévité excep­ tionnelle : en qualité de sénateur inamovible, il prend parti contre la (8) Acte de mariage. Périgueux nO 1858/068, Echo de Virone, 27 mai corruption dans l'affaire de Panama puis participe à la discussion de la 1854, p.4. loi de finances de 1896. Après son départ de Périgueux, il s'ennuie à et souhaite se rapprocher de Paris. En juin 1865, il devient (9) Liste générale décennale alphabétique et par promotions des anciens élèves directeur des travaux de l'Exposition Universelle de 1867. Il est fait 1 des Ecoles dArts et Métiers dep/ds leur fondation 1922-23, Imprimerie Officier de la Légion d Honneur à ce titre. De retour aux Ponts et Chaix, 1923. Chaussées, il devient responsable du service de navigation de la Seine, 3ème section. Chargé des fortifications de Paris pendant la guerre de (10) Nizan (Paul), Antoine Bloyé, Les cahiers rouges, Grasset, 1933. 1870 et Commandeur de la Légion d'Honneur à ce titre, il devient député puis sénateur inamovible et probablement inspecteur général. (11) Day (Ch. R.), Les écoles dArls et Métiers. L'enseignement techniqtte en France 19ème-20ème siècles, Belin, 1991. (27) Mis en congé illimité en 1853 pour prendre part aux travaux du chemin de fer de Clermont-Ferrand à Lempdes, Krantz a dirigé de son (12) Caron (Fr.), Histoire de texploitation dtln grand réseau: La Compagnie aveu même (lettre écrite de Montauban, du 17 août 1856, au de chemin deferdu Nord, 1846-1937, Mouton, 1973. ministre) l'entreprise Julien Lacroix. Il cite les conducteurs des Ponts Ribeill (G), IIGestion et organisation du travail dans les compagnies de et Chaussées employés chez Lacroix et qui l'ont suivi à la Compagnie chemin de fer des origines à 1860", in Annales ESC, 1987, nO 5, p 999 ; parmi eux, Paulon. L'Echo de Vésone du mardi 18 janvier 1854 signa­ à 1029. lait: llLa Compagnie du Grand Central vient d adjttger plusieurs millions de travaux à exécuter entre Villefranche et Montauban à Monsieur J. (13) L'état civil révèle CH. Moreau en 1857, Combelles père en 1862 ll LACROIX, entreprenettr de Clermont à Limoges • et 1864, CH. E. Poiret originaire de la qui épouse la fille Lapeyre, ex-agent commercial de la Compagnie, lui-même époux (28) AD 24, Archives municipales de Périgueux, série Hl, vol. 6, d'une demoiselle Estignard (l'abbé Estignard, curé de la nouvelle Garde Nationale. paroisse des Barris-Saint-Georges est témoin)~ Sauf omission, le recen­

sement de 1876 donne Godet habitant chez Jules Godard, participant ll (29) Charle (Ch.), ilLe pantouflage en France , article cité. au Congrès Scientifique de 1876, Charvel et Rozier.

(30) Lettre de Jules Martin, du 10 juillet 1855 (il a alors 29 ans) au (13 bis) Carrère O. Cl.), "Catastrophe à Chanceladell, in LimOttsin - magazine, n0276, décembre 1985. ministre, qui lui demandait de préciser la rémunération qui serait la ll sienne au Grand Central. Il répond en substance: "Traitement fixe qui Pommarède (P). IILa catastrophe de Chancelade , in Bulletin de la SHAp, 1988, p.61 à 73. mlest alloué: 8000 francs," traitement normal de mon grade (ingénieur ordi­ naire de 2ème classe) : 2500 francs," augmentation: 5500 francs auxquels (14) Lamy (Y.), Hommes de fer en Périgord ail 19ème siècle, La France /ajoutent des frais fixes de 2000 francs par an". industrielle, La Manufacture, 1987. (31) AN F14 /2270<;'. (15) Carte géologique du département de la Dordogne par Marrot, inspecteur général des Mines ; publiée et revue pour le lias, trias et (33) AN F14. Sévène, comme ses prédécesseurs, percevait un traite­ permien par G. Mouret, ingénieur des Ponts et Chaussées, 1882 (vote ment annuel de 30 000 francs, un inspecteur général resté dans les du Conseil Général du 27 août 1881). cadres de l'administration 12000 francs. Notons au passage que Sévène décède pieusement en 1883. L'émotion doit être si forte à (16) Les années indiquées sont celles où le fonctionnaire apparaît au Périgueux qulune rue du Toulon porte son nom. Il est le seul ingénieur Calendrier de la Dordogne rédigé généralement en septembre de l'année des débuts du chemin de fer avec Forquenot, l'empereur de la précédente, d'où certains décalages. Les ingénieurs en chef successeurs Traction, à avoir ce privilège. de Marrot apparaissent respectivement en 1854, 1862, 1867 ; Bere en 1870, alors que sa nomination date du 1er avril 1869. (34) AN F14 /2318<;, .

(17) Lettre du Préfet du Nord au ministre, 8 décembre 1856. (35) Krantz O. B.), Projet de création dune armée des travaux publics, Librairie Sociétaire, Paris, 1847. Cette publication décrit 11utopie qui (18) Il est fils d'Isaac Bere et d'Aimée Simon Born; Il a épousé la fille ne cessera de lui être reprochée. de M. Levy, banquier à Nancy. Son beau-frère, Théodore Levy, ingé­ nieur en chef des Ponts et Chaussées est membre du Consistoire israê­ (36) C'est le cas de Ferrand, ingénieur ordinaire en 1852-53. Dans la lite de France. lettre adressée au ministre pour l'excuser de ne pas avoir sollicité l'au­ torisation de se marier (Gette obligation disparaîtra en 1872), il écrit: (19) Rapport d'inspection générale du 12 janvier 1884. "Mes bons parents, simples ouvrier/'. (20) CharIe (Ch.), "Le pantouflage en France" (vers 1880- vers 1980), (37) Pican (A.), L'invention de tingénieur moderne, Presses de l'Ecole in Annales ESC, septembre - octobre 1987, n05, p.1115 à 1137. Le dictionnaire date le terme de 1880. Dans l'argot polytechnicien, Nationale des Ponts et Chaussées, 1992. désigne le choix par un élève en fin de scolarité de renoncer aux car­ rières de l'Etat pour un emploi dans le secteur privé. Par extension, (38) CharIe (C), Les élites de la République (1880 - 1900), Fayard, 1987. s'applique à tout agent public qui, pour des raisons financières, va tra­ Et, surtout: Charle (C.), Les hatlts fonctionnaires en France au 1ge siècle, vailler dans le privé. Le terme a pris une connotation injustement péjo­ Gallimard - Julliarr, 1980, Coll. Archives. Donne des aperçus éclai­ rative. rants sur la fortune, le mariage, la domesticité.

(21) Calendrier de la Dordogne, 1866, p 229. (39) Echo de Virom, 5 et 11 août 1955.

(22) A Fargaudie, éloigné à l'approche du 2 décembre 1851, succède (40) Echo de Vésom, 10 août 1955. Ferrand en 1852. Celui-ci est autorisé, dès juillet 1853, à pantoufler auprès du Grand Central. Saleta, précédemment à Nontron, lui suc- (41) Picon (A.), ouvrage cité.

12 LOI du 1"' juillet ASSOCIATION-- 1901

Une jeunesse de cent vingt ans la Société Historique et Archéo­ logique du Périgord.

regrouper les talents propres à vulgariser l'his­ toire locale et à assurer la protection des monu­ ments antiques du département. Le docteur Galy, directeur du musée départemental, sut prendre l'initiative. Le premier mars 1874, il constituait autour de lui ce "grand foyer détudes des forces intellectuelles du Périgord'. Plus de cent cinquante personnes adhéraient à ses voeux : la Société historique et archéologique était fondée. Le 27 mai 1874, elle tenait sa première séance officielle. De suite, la vocation de la S.H.A.P. est proclamée: le goût, l'amour de l'étude du passé, en publiant le résultat de ses travaux sur les hommes et les choses du vieux temps. Sans doute, l'une des chances de notre compagnie fut • Sortie des membres de la de désigner au poste de secrétaire le journaliste S.H.A.P. à Sarra­ Eugène Massoubre, chroniqueur de L'Echo de zac en 1897. Coll. S.H.A.P. Vésone. Avec lui et grâce à ses aptitudes, le Bulletin prenait alors toute l'importance qu'il U ne chose est évidente, la délicate pério­ allait revêtir jusqu'à nos jours. Car, si les séances de de transition de notre histoire, entre le second mensuelles de la Société sont, alors, fréquentées Empire et la IIIe République, fut propice, en Périgord, à l'éclosion d'une brillante vie associa­ par une poignée de membres, une vingtaine tout tive. Certes, dans le domaine de l'esprit, on au plus, les communications publiables affluent. demeurait nostalgique des grands moments du A profusion, d'une exceptionnelle qualité et Cercle de la philologie. De même que la publi­ d'une variété de sujets qui font le succès et l'au­ cation, trop éphémère, du Chroniqueur du torité de l'honorable compagnie. Aujourd'hui, Périgord et du , à Armand de Siorac, dans de nombreuses bibliothèques publiques ou éveilla des vocations d'érudits talentueux. Se privées, les cent vingt tomes du Bulletin sont là manifestaient aussi les recherches sur la noblesse pour en témoigner. entreprises par Matagrin, comme la somme de L'Armorial du Périgord, de Froidefond de Avec des chercheurs qui font autonte, Boulazac. Ces travaux favorisèrent, il est permis comme Maurice Féaux et Michel Hardy, la de le dire, des entreprises toujours plus hardies. Société sait prendre, immédiatement, la place Dans un tout autre genre, la constitution de la qui doit être la sienne dans l'aventure de la pré­ Société d'horticulture et d'acclimatation incita la histoire amorcée aux Eyzies-de-Tayac quelques classe intellectuelle périgordine à se manifester. années auparavant. Le premier jeudi de chaque mois, les séances de travail réunissent les Pour de nombreux savants, il convenait de membres assidus. Même les événements les plus

13 graves, comme les guerres, ne parviennent pas à offre un instrument de travail fort appréciable. interrompre le rite immuable fixé dès l'origine. Puis, reprenant une initiative de Jean Secret, le Des animateurs prestigieux se succèdent, dans Dr Delluc favorise des livraisons spéciales du la salle du Château-Barrière d'abord, pour diri­ Bulletin. Nous avions connu, entre autres, Le ger les travaux. Tous, à l'exemple du marquis de Centenaire de la Préhistoire (1964) et Cent portraits Fayolle, ont une telle connaissance de l'histoire périgourdins (1979). En 1989, pour commémorer locale que le Bulletin demeure la référence le bicentenaire de la Révolution, paraît Le majeure. Le chanoine Roux, grâce au legs du Périgord révolutionnaire. Des auteurs livrent des recherches précieuses sur la période. En 1990, Le Livre du jubilé de consacre la S.H.A.P. comme société savante présente dans la recherche préhistorique internationale. Le cin­ quième centenaire de la découverte des Amériques (1992) apporte des révélations sur les Périgordins aux quatre vents de l'aventure. A plusieurs reprises, le Périgord est retenu par la Fédération historique du Sud-Ouest pour orga­ niser le congrès régional. La S.H.A.P. en assume la responsabilité matérielle tant à Périgueux (1913 et 1978), qu'à Sarlat (1987), puis à Bergerac (1990). De grands noms de la • Sortie des professeur Testut, notre généreux mécène, peut recherche historique ou archéologique en France membres de la S.H.A.P. à la acquérir pour la Société l'ancien hôtel de livrent le point de leurs travaux au Bulletin, à Rigale en 1992. Coll. Bélingard. Fayolle, rue du Plantier. La S.H.A.P. est dans ses l'exemple du professeur de Lumley, directeur du murs dès 1937. Le docteur Charles Lafon, puis Museum d'histoire naturelle, du doyen Joseph Jean Secret, animent les assemblées commémo­ Lajugie, de la Faculté de Bordeaux, du conser­ rant la période du centenaire de l'association. A vateur des Archives de France, Jean-Paul leurs côtés, des administrateurs talentueux, Laurent et tant d'autres. En 1991, le Bulletin de comme l'abbé Riboulet, Jean Maubourguet, ou la S.H.A.P. paraît sur 748 pages sous la forme de encore Géraud Lavergne et Noël Becquart, quatre livraisons. En 1993, le succès est encore poursuivent l'oeuvre entreprise. plus fort : 864 pages. La conception actuelle de chaque livraison retient l'insertion d'un article Le président Gilles Delluc, assurant une par discipline selon les périodes chronologiques: délicate succession, insuffle une jeunesse nouvel­ préhistoire, époque médiévale, temps modernes, le à la vénérable société. L'objet de la S.H.A.P. XIXe siècle, en arrêtant pour l'heure, l'évocation est r(!défini : un but culturel, éducatif, utilitaire de l'histoire à 1970. Plus de 1.600 lecteurs à la recherche, l'étude et la sauvegarde des sites attendent chaque trimestre de lire la centaine et de leur environnement, des monuments, des d'auteurs qui publient régulièrement leurs tra­ documents et des objets de tous âges intéressant vaux. le Périgord et le département de la Dordogne. Le millier d'adhérents est dépassé. De toute la Sous la conduite du P. Pommarède, prési­ France, ceux qui ont dû s'expatrier, rappellent le dent depuis 1992, les séances mensuelles, qui se lien qui les unit à leur pays natal à travers le tiennent à présent le premier mercredi de Bulletin. Depuis vingt années, les communica­ chaque mois, rassemblent plus de cent audi­ tions abondent ; les chercheurs demandent à teurs. La salle du siège, rue du Plantier, est sou­ être publiés tant l'insertion de leurs travaux vent bien exiguë et inconfortable. Mais le char­ dans le Bulletin leur assure la reconnaissance me de l'immeuble, comme les jardins étagés d'une qualité et d'un sérieux. En 1987, paraît en s'étendant jusqu'à la rivière derrière la Maison deux volumes La Mémoire du Périgord. La des Consuls, rendent le cadre incomparable réunion des index alphabétiques et des tables dans ce vieux Périgueux. Chaque trimestre, une analytiques de plus de cent années de Bulletins séance du soir donne la parole à un unique inter-

14 venant, qui peut développer plus longuement le Trésorier: M. Charles Turri sujet retenu. La bibliothèque de la compagnie, Trésorier-adjoint: M. Bernard Fournioux riche de milliers de volumes proposés intelli­ Directeur du Bulletin: M. Jacques Lagrange gemment aux lecteurs, est largement fréquentée Bibliothécaires: M. Gérard Mouillac, M. par les étudiants et les membres, comme par les Michel François CUrIeux. Membres du conseil d'administration : MM. Bélingard, Bitard, Bordes, Delabrousse­ Décidément, "la vieille dame de la rue du Mayoux, Dr Delluc, Mme Miquel. Plantier", comme désignent plaisamment quelques bons esprits l'honorable compagnie se La cotisation annuelle, avec envoi des quatre porte toujours bien. livraisons du Bulletin, est de 220 F. Les étu­ diants sont dispensés de toute cotisation. Bureau de la Société pour 1994 Président: P. Pommarède Pour d'autres renseignements, consulter M. le Vice-Présidents: M. Michel Soubeyran, Mme Président de la S.H.A.P., 18, rue du Plantier - Jeannine Rousset 24000 - Périgueux. Secrétaire général: M. Dominique Audrerie Secrétaire-adjoint: Mme Brigitte Delluc Jacques LAGRANGE

Moulages de sceaux en vente aux Archives départementales de la Dordogne 1 - Sceau du pariage de Saint­ Front. 1297. Sceau en résine: 45 F 2 - Sceau d'Archambaud V, comte de Périgord. 1368. Sceau 1 en résine : 60 F. Le même en 2 étain: 150 F 3 - Sceau de la ville de Périgueux. 1454. Sceau en rési­ ne: 45 F 4 - Sceau de l'abbaye de Sarlat. 1285. Sceau en résine: 55 F 5 - Sceau de Guillaume de La Tour, archidiacre de Périgueux. 3 1297. Sceau en résine: 45 F 4 6 - Sceau d'Hélie Geoffroi, cha­ noine de Périgueux. 1285. Sceau en résine: 45 F 7 - Sceau de la ville de Périgueux. 1426. Sceau en rési­ ne: 35 F 6 8 - Sceau d'Archambaud III, comte de Périgord. 1294. Sceau 5 en résine: 35 F Le sceau de la ville de Périgueux (de 1245) qui figure en page de couver­ 7 8 ture, est aussi disponible, en étain, au prix de 15Q F

15 , BIBLIOTHEQUE

Cette rubrique a pour objet d'établir la liste des travaux universitaires déposés en 1994.

FERNANDEZ (Karine) : et illustrations, planches 268 à 411. (A 1784/1 à Les établissements réguliers dans le diocèse de 4) Périgueux (XIe s.-1317). D.E.A. sous la direction de Françoise Bériac, PAUVERT (Dominique) : Université Michel de Montaigne, Bordeaux III, Le mégalithisme en Périgord. 1994. - 75 p. + bibliographie et annexes: 25 p., D.E.A. d'histoire sous la direction de Louis + 30 cartes (A 1811) Maurin et André Coffyn, Université de Bordeaux III, [l992}. - 138 p. + bibliographie GAUSSEN Uean) : et documents: 80 p. (A 1766) Activité médico-chirurgicale dans les formations mili­ taires du secteur centre de la Dordogne avant la libé­ RAMEIX (Stéphane) : ration. La vie politique en bergeracois sous la quatrième Thèse de médecine, Université de Bordeaux, RéPublique. Faculté de médecine et de pharmacie, 1945- Travail d'étude et de recherche d'histoire poli­ 1946. - 60 p. (A 1778) tique contemporaine sous la direction de Sylvie Guillaume et Bernard Lachaise, Université GUILLABOT Uean-Christophe) : Michel de Montaigne, Bordeaux III, 1992- La vie consulaire à Périgueux 1739-1789. 1993. - 113 p. + annexes: 27 p. (A 1809) Mémoire de maîtrise de lettres et sciences humaines sous la direction de Michel Cassan, RUSINOWSKI (Fabienne) : Université de Limoges, 1993. - 159 p. + Etude de la représentation du mouvement dans les annexes: 23 p. (A 1788) figures animales peintes et gravées de la grotte de Lascaux. MICHEL-DANSAC (Olivia) : Mémoire de licence en histoire de l'art et archéo­ Les peintures murales de la Chapelle du Cheylard à logie, Université de Liège, faculté de philosophie Saint-Geniès (Dordogne) xm siècle. et lettres, 1984-1985. - 199 p. + planches 1 à Mémoire de maîtrise d'art médiéval sous la 78. (A 1790) direction de J.P. Caillet, Université de Parix X­ , 1993. - Tome 1 : 163 p. + bibliogra­ SOUBEYRAN (Maya) : phie : 6 p. ; Tome 2 : illustrations et annexes : Coutumes et remèdes vétérinaires dans le Périgord 95 p. (A 1767/1 et 2) ct autrefois. Thèse de doctorat vétérinaire sous la direction de MOREAU (Pierre) : M. Montastruc, Université Paul-Sabatier, La cité de Clairvivre à (Dordogne) (1931- , 1994.- 117 p. (A 1803) 1933) par t architecte Pierre Forestier (1902-1989). Travail d'étude et de recherche de maîtrise en TURQ (Alain) : histoire de l'art contemporain sous la direction Le paléolithique inférieur et moyen entre les vallées de de Marc Saboya, Université Michel de la Dordogne et du Lot. Montaigne, Bordeaux III, 1993. - Tome l, volu­ Thèse de doctorat spécialité préhistoire, me 1 : 140 p. + annexes: 94 p. ; Tome 2, volu­ Université de Bordeaux l, 1992. - 719 p. + me 2 : plans et illustrations, planches 1 à 148 ; bibliographie et tableaux: 63 p. (A 1768) Tome 2, volume 3 : plans et illustrations, planches 149 à 267 ; Tome 2, volume 4 : plans Dominique GRANDCOIN

16 Compte-rendu

MOREAU (Pierre) : du Poumon et des Chirurgicaux" et portera jus­ La cité de Clairvivre à Salagnac (Dordogne) qu'à son terme ce projet de la Cité de Clairvivre. (1931-1933) par l'architecte Pierre Forestier (1902-1989). Histoire de la construction Il est curieux de découvrir dans notre C'est d'abord sur le programme médico­ département, essentiellement marqué par son social que la Cité sanitaire de Clairvivre s'est patrimoine ancien, l'une des rares traces archi­ construite : Albert Delsuc se référant aux expé­ tecturales laissées par le mouvement moderne riences sanitaires anglaises trouvera en effet un (1). précieux relais médical à son concept grâce au Le travail de maîtrise de Pierre Moreau docteur Robert-Henri Hazemann qui élabore le retrace, de façon très documentée, l'histoire du projet médico-social de Clairvivre (2). projet et de la réalisation de la cité sanitaire des Sur un programme ambitieux d'une cité "blessés du poumon et des chirurgicaux" de Clairvivre de 5000 habitants comprenant autour des ser­ sur la commune de Salagnac dans le canton vices centraux (hôpital, sanatorium, administra­ d' : empreinte de fonctionnalisme, tion, salle des fêtes, magasins, PTT ... ), un hôtel d'humanisme et d'hygiénisme, cette cité "idéale" pour célibataires (150 ch.), une zone résidentiel­ insolite mérite tout notre intérêt. le (500 maisons doubles) avec groupes scolaires, une zone industrielle, des zones de loisirs et une Reprenons les grands thèmes développés infrastructure à créer, l'architecte ou plutôt les par l'auteur. architectes sont choisis sur concours : Clément Laval (qui interrompra vite sa mission) et Pierre La genèse du projet Forestier (qui avait été intéressé très tôt au pro­ jet d'urbanisme de Clairvivre). Elle nous situe dans le contexte de l'entre deux guerres : . la réflexion sur logement et hygiénisme L'urbanisme bat son plein, avec notamment les expériences Ville neuve à la campagne, la Cité de des cités-jardins Clairvivre aura nécessité des champs multiples . la mobilisation nationale contre le fléau d'intervention sciences socio-médicales, de la tuberculose, partagée entre la solidarité sciences de la ville, arts des jardins et du paysa­ reconnaissante pour les gazés de la guerre 1914- ge, architecture, techniques et infrastructures. 1918 et la psychose de la contagion Bien que rapidement réduit dans sa taille, .,l'influence grandissante des thèses huma­ ce projet de "cité idéale" a conservé un grand plan nistes et socialistes confortées par l'expérience d'urbanisme préservant à la fois des liens privi­ soviétique naissante. légiés avec la nature et répondant aux exigences

(1) Soit de ce siècle, Un homme d'origine périgordine, Albert urbaines modernes : dans l'esprit du program­ mais avant la période Delsuc, est au carrefour de ces mouvances: lui­ me, le plan a donc organisé des zones identifiées des !rerente glorieuses!! qui serait plutôt à qua­ même ancien gazé, il sera une cheville ouvrière autour d'un centre symbolique comprenant lifier dtllersatz de modernel!, puis de de la fameuse "Fédération Nationale des Blessés hôtel-sanatorium (pour l'accueil santé), admi- tlpase-moderne!! .

(2) ... A la cité de Clairvivre, le tubercu­ leux, transplanté avec son milieu familial, • Hôtel• produit selon ses capa­ sanatorium, bâti• cités dans un milieu ment sud, axono­ aussi voisin de la nor­ métrie du rez-de­ male que possible et chaussée, publié non tels certains dans Chantiers, Urééduquéstl soutenus n° 7-8, nov.-déc. par la "charité" ! il faut 1993, p. 14 et 15. un travail gui "paye'\ Extrait du travail de c'est le principe essen­ Pierre Moreau, tiel de la cité .... planche 160.

17 nistration (pour la rigueur), magasins (pour souvent innovantes dans bien des domaines : l'échange). Leur répartition préserve des autono­ l'eau potable, l'assainissement, l'électricité pro­ mies respectives (résidences et écoles d'une part, duite et distribuée en réseau enterré, le télépho­ zone industrielle d'autre part ... ) et une harmo­ ne distribué partout ! ... et bien sûr les routes et nie avec une nature paysagée. parkings ... ont fait l'objet d'études à la pointe L'architecture de la technicité. Dans le respect de "l'esprit nouveau" (3), Une architecture militante l'architecture de Pierre Forestier (comme celle de j'ai voulu faire de Clairvivre, un véritable Clément Laval) est la réponse sociale, fonction­ laboratoire de la condition humaine". Cette déclara­ nelle et industrialisée à un programme donné. tion d'Albert Delsuc dénote de l'état d'esprit Quelques concessions seront faites par Pierre militant qui a animé tous les protagonistes. Forestier au régionalisme (toitures) et à la Pierre Moreau a donc insisté dans ce chapitre sur méthode de chantier (ouverte, malgré une cet esprit pionnier et progressiste qui a engendré importante standardisation, au savoir-faire tra­ l'oeuvre de la cité de Clairvivre, témoin unique ditionnel et local). en son genre en France, des mouvances d'une L'architecture est donc remarquable parce époque. qu'elle est emblématique d'une époque où la recherche architecturale porte jusqulau concept Epilogue du mobilier, mais aussi parce qu'elle participe à un ensemble hiérarchisé et signifiant; on notera Ce travail pose en épilogue la question de à cet égard les implantations symboliques des la restauration et de la conservation de bâtiments-phares, l'utilisation sémantique du Clairvivre et ouvre en réalité d'autres question­ verre évoquant clarté, hygiène, modernité et nements (4) : La cité de Clairvivre est-elle à classer dans convivialité. le genre des cités utopiques, du type des Salines Ce chapitre est abondamment illustré de Royales de Chaux d'Arc et Senans de Claude documents graphiques et photographiques. Nicolas Ledoux ou dans le genre des villes neuves telles que les bastides voire les villes nou­ velles? Fondée sur le refus de marginalisation qu'impliquaient les sanatoriums, cette réalisa­ tion avait pour dessein de maintenir l'individu malade ou "blessé" au coeur de sa famille et au contact du travail, préservant ainsi sa dignité au regard des valeurs de la société. Mais aujour­ d'hui, la tuberculose est jugulée et la restaura­

• Esquisse tion de Clairvivre pose en fait le problème de son pour un fauteuil, non daté, non ré­ usage autant que celui de l'intégration même de férencé, archives l' "établissement départemental' dans son contexte (4) L'auteur a d'ailleurs Forestier (I.F.A.). pris le soin de spécifier Extrait du travail (5) ... d'emblée que son de Pierre Moreau, étude se limitait à planche 255. Enfin peut-on reprocher à Clairvivre sa l'analyse du projet à modernité, dont certains disent qu'elle ne fait l'époque de son inau­ guration. pas de belles ruines ? .. Les infrastructures (5) Fernand Braudel Quoiqu'il en soit, le travail de Pierre explique, dans ne telle implantation humaine nécessi­ Moreau constitue un document important et L'identité de la France, U la cohérence du systè­ te plus que des raccordements à des réseaux, précieux, tant au niveau de son analyse qulau me des structures rurales de vie (hameau, souvent inexistants dans la Dordogne de cette niveau de sa description et de son iconographie. village bourg, ville). Nos pays enclavés en époque. C'est pourquoi le projet d'installation de sont encore aujour­ Clairvivre siest appliqué, dans son exigence de Gérard DUHAMEL dthui témoins. Il est si difficile d'y intégrer (3) Selon fexpression qualité et de modernité, à apporter des solutions Architecte Directeur du CAVE même un simple lotis­ de Le Corbusier. sement !...

18 / t------INEDIT--

Le bourg castrai de Montignac: ses lettres de franchises.

• Lettres de franchises de 1470. Début de l'acte. A.D. Pyrénées­ Atlantiques, E 780.

c'est en l'an 1269, le mardi avant la fête ensuite, par la concurrence exercée sur l'autre du Bienheureux Thomas apôtre, que Renaud, rive de la Vézère par le bourg prioral de Brenac: seigneur de Montignac et de Pons, décida de en effet, le potentiel attractif et le degré de concéder à tous les hommes établis au pied de croissance auquel était parvenue cette ville son château leurs premières lettres de franchises murée, placée sous la protection de l'abbé de et de libertés. Il renouvelait le geste d'émanci­ Saint-Amand-de-Coly, avaient de quoi susciter pation esquissé plusieurs années auparavant en quelques inquiétudes auprès de son rival (1). On faveur des habitants de Bergerac (1254). ne peut ignorer, par ailleurs, les antécédents houleux entre ces deux seigneurs, révélés au Cette concession, loin d'être un cas isolé, grand jour en 1251 et 1269. témoignait alors de la tendance à la légalisation des rapports sociaux à l'intérieur du cadre sei­ Ces lettres de franchises, désignées litteras gneurial. De telles initiatives se généralisaient par le scribe, constituèrent pour les habitants de 1 - Arch. dép. dans la province où l'on assistait à la même Montignac une acquisition essentielle, qui Pyrénées Atlantiques, époque, avec plus ou moins d'ampleur, à des explique leur empressement à les faire homolo­ (mercredi avant la fête de la Circoncision, concessions de cette nature. Terrasson, guer par les maîtres successifs du lieu. Elles jetè­ 1251), E 776. Arch. dép. Dordogne, Excideuil, , Bergerac et Sarlat en sont rent les fondements de la future organisation coll. Périgord, t.37, f des exemples parmi d'autres. Quant aux communautaire. C'est à partir de cet embryon 318 (1 Mi 222). Arch. nationales, J mobiles de cet acte, ils semblent avoir été mul­ d'autonomie que devait s'élaborer le lent proces­ 319. Arch. dép. Dordogne, tiples. Il est probable que cette décision résulta, sus de leur émancipation, ponctué jusqu'au cré­ coll. Périgord, t.9, f 193 (1 Mi 97). tout d'abord, de la volonté du maître du sol de puscule du Moyen Age de confirmations et Correspondances consolider l'ancrage de son peuplement, d'ac­ d'amplifications de privilèges à chaque change­ administratives d1Alphonse de Poitiers, croître son potentiel humain et de s'assurer la ment de suzerain. tome 1, p.716, n'1087, lettres du 16- fidélité de ses sujets. Elle put être motivée, Ces lettres, accordées le 18 décembre 17 avril 1269.

19 les lettres de Françoise furent scellées du sceau de son époux et authentifiées par le seing manuel d'un notaire royal, Anthonio Blancherii clerc (2). Hélias Rudelli, qualifié de "miles" et de "Juomznus . "de PM'ons et ontlgnac, approuva, le /" t mardi après l'épiphanie 1276, ces lettres de fran­ _L- chises octroyées naguère par son père Renaud, et -/~"'" \ .....--­ promit de les conserver, ''promissit et juravit eas Il \ .... observare inviolabiliter perpetuo". Cet acte naufragé /1--r---,--:-.;;:;'V.... _--'" rr.-.: :.: ..•, :"'1i"" 1" ····~····U . nous est rapporté dans un document daté de .:',. r'L!:~' '.', 1 1476 (3). " Son petit-fils, Helia Rodeilh, renouvela, le -L'. 1 ---. • ~-r ~'," . 1l. dimanche avant la Saint-Barnabé 1314, les . ..--:- 1/ engagements de ses aïeux et garantit aux habi­ tants de Montignac, après qu'ils lui eussent prêté serment de fidélité, de conserver leurs "bonos usus, libertates, franchesias et consuetudines" (4). La copie la plus ancienne de cet acte aujour­ d'hui disparu remonte au 17 décembre 1470. Une nouvelle promesse de conservation de leur acquis devait avoir lieu en 1338 probablement par Bernard d'Albret présenté alors comme étant le seigneur du lieu. (5).

En 1340, Roger-Bernard, comte de 2 . Arch. dép. Pyrénées Atlantiques, Périgord, devenu le nouveau maître du château, E 783, (1516-1517) ; • Sa muraille 1269, peuvent être considérées aujourd'hui E 780, (1470). et l'une de ses devait à son tour recevoir le serment de fidélité , symboles comme perdues; elles étaient encore entre les des habitants (6). Il faut attendre le lundi avant 3 - Arch. dép. de l'identité villa­ Pyrénées Atlantiques, geoise, encore vi­ mains de la communauté, lors de leur confirma­ la Saint-Hilaire 1367 pour voir à nouveau les E 780, (1476). sibles au siècle tion, le lundi avant la Saint-Hilaire 1367 (10 Arch. dép. Dordogne, dernier dans sa habitants de Montignac réclamer la confirma­ coll. Périgord, t.47, partie méridiona­ janvier 1368), mais ne l'étaient plus le 17 tion de leurs franchises et libertés, cette fois-ci f"26 / 4 (double folio­ le. tation), (1276), Légende: décembre 1470 et, semble t-il, depuis le 27 juin auprès d'Archambaud, comte de Périgord. A Montignac (1 Mi 234). A : l'une des tours 1454. Elles furent transcrites à deux reprises lors Arch. Hist. de la carrées de défen­ cette occasion, les dits habitants devaient lui Saintonge et de se confortant la de leur confirmation : le 10 janvier 1368 par remettre les originaux des actes en leur posses­ l'Aunis, t.9, 1881, p. muraille de la ville 45,47. B : mur de la ville Archambaud comte de Périgord, le 17 décembre sion, soit l'acte de concession originelle de 1269 C : habitat posté­ 4 - Arch. dép. rieur adossé à la 1470. par Françoise de Bretagne qui prétendit et sa confirmation intervenue en 1314. Dordogne (1 Mi 171), muraille f"3, (1314). D : partie du fossé alors agir au nom d'Alain d'Albret, son époux. Si "Instrumento viso per nos inspecto diligenter palpato et asséché de la ville les lettres d'Archambaud demeurent aujourd'hui verbis romanis splicato"... nous dit le comte qui 5 - Arch. dép. ayant eu double Dordogne, coll. fonction, défensi­ introuvables, celles de Françoise, en revanche, ordonna leur transcription et leur insertion dans Périgord, r.47, f"28 ve et économique (1338) 0 Mi 234). (bief du moulin sont toujours accessibles. On peut les consulter sa lettre de confirmation, en approuva le conte­ banal). aux archives des Pyrénées-Atlantiques. Elles 6 - Arch. dép. Dessin de l'auteur, nu et l'authentifia de son sceau (7). Pyrénées Atlantiques, d'après une photo contiennent fort heureusement le vidimus des Par la suite interviennent plusieurs autres E 776, (340). prise en 1889. A.D.24, 2 J 1087. lettres d'Archambaud et, de ce fait, la copie inté­ confirmations de ces privilèges dont celles des 7 - Arch. dép. Pyrénées Atlantiques, grale la plus ancienne des franchises et libertés ducs d'Orléans, Louis et Charles le poète, en E 783, (367). concédées en 1269. Françoise, en effet, les fit 1404 et 1431, celles de Guillaume et Françoise 8 - Arch. dép. transcrire avec celles de son père Guillaume, de Bretagne, le 27 juin 1454 et le 17 décembre Pyrénées Atlantiques, E 780, (1470). datées du 27 juin 1454, après en avoir pris 1470 (8), et, en dernier lieu, celle du cardinal 9 - Arch. dép. connaissance comme elle le spécifie clairement AmanieJl d'Albret, le 25 avril 1517 (9). Cette Pyrénées Atlantiques, dans sa formule "Notum facimus universis et singu­ dernière confirmation devait contenir la copie de E 783, (517). Arch. dép. Dordogne, lis nos recepisse et vidisse licteras". Rédigées sur un l'acte du 17 décembre 1470, sur cahier de papier coll. Périgord, t.47, f"23 (Monrignac) (1 parchemin de grandes dimensions, 138 x 63 cm, folioté de l à xxxv. Elle fit l'objet, ultérieure- Mi 234).

20 ment, de deux copies certifiées par le lieutenant général de la sénéchaussée de Sarlat et conseiller du roi, l'une produite le 21 août 1614 (10), l'autre le 14 février 1654 (11). La Bibliothèque nationale, dans le fonds Périgord, en comporte une transcription du XVIIIe siècle (12).

II nous faut revenir maintenant aux lettres de franchises de 1269, objet principal de cette communication. Nous nous bornerons ici à en commenter la structure diplomatique dans sa globalité et renvoyons pour de plus amples informations à leur traduction communiquée à la fin de ce propos. Tout d'abord, comme nous l'avons évoqué, ces lettres de franchises ont été accordées par Renaud. Celui-ci était le fils de Geoffroy, "dominus" de Pons, Montignac et , et d'Agnès de Luzignan issue des comtes de la Marche et d'Angoulême. De par son alliance contractée avec Marguerite de Turenne, il s'était vu investi du titre de seigneur de Bergerac et figurait ainsi parmi les person­ nages les plus influents de la province (13). Le protocole initial de ces lettres apparaît débarras­ 10 - Archives privées, Th. Du Sorbier. sé de ces attributs emphatiques qui caractéri­ saient antérieurement les actes de cette nature. 11 - Arch. dép. • Les vestiges Dordogne, 2 E Il adopte une forme classique et simplifiée et à la suite de sa capture. Dans ces quatre cas, du château de 1828/15-1 et 2. Montignac et son place d'emblée au début de l'acte adresse et Renaud consent alors à ce que deux hommes de habitat subordon­ 12 - Arch. dép. la ville et deux autres des faubourgs soient élus né. Vers 1895. Dotdogne, coll. salut exprimés en ces termes: "Universis presentes Dessin de l'auteur, Périgotd, t.47, f' 23 et litteras inspecturis Reginaldus dominus" de Pons, et nommés par la communauté villageoise pour d'après une photo­ 24 / 2 (double foliota­ graphie aimable­ tion) (1 Mi 234). Bergerac et Montignac, "salutem et /idem presenti­ procéder à la répartition, la perception et le ment communiquée mandatement des cents livres exigibles par lui par le père Pierre 13 - Atch. dép. bus adhibere". Les dispositions de ces lettres sont Pommarède. Dordogne, 2 E 1828/14-2 et coll. pour l'essentiel contenues et rassemblées dans le dans les cas précités. Périgord, t.52, f'147 L'article suivant notifie qu'hors agglomé­ (1 Mi 247). premier article ; Renaud entendit, dès le début, Arch. dép. Pyrénées frapper les esprits en faisant figurer des prin­ ration de Montignac, "extra territorium Atlantiques, E 776 et E 774. cipes de droit privé relatif à la liberté des per­ Montinhaci", c'est-à-dire dans les manses, borde­ Arch. Nationales, ] 190 A, n016. sonnes. Il décidait de manière irrévocable que ries et autres terres du plat pays alentour inscrits Arch. dép. Dordogne, tous les "homines" de Montignac, habitants tant dans son district, Renaud maintient les rede­ coll. Périgord, t.9, f'193 (1 Mi 97). à l'intérieur des murs de la ville que dans ses vances et obligations qui lui sont dues à savoir la Bibl. Nationale, Manuscrits Chérin, faubourgs, (14) fussent francs, libres et exempts queste, la taille, l'albergue et autres services. t. 79, f' 194. Des conventions sont établies ensuite entre le Bémonr (Ch.), La cam- de queste, taille et exactions. En gage des liber­ pagne de Poitou tés et franchises concédées et de l'exemption de seigneur de Montignac et ses hommes à propos (1242-1243), dans Annales dit Midi, t. 5, toutes redevances foncières il exigeait de ces des biens abandonnés sous la forme d'emphy­ p.189. De Courcelles, Histoire hommes leur participation au paiement de la téose perpétuelle, moyennant un cens annuel des Pairs de France, t. 4, dans le cas où les emphytéotes, les véritables article IIde Pons", somme de cent livres de monnaie courante dans p. 22, Paris, 1824. les quatre cas suivants, selon des modalités et propriétaires, envisageraient de sous-acenser

14 - Les lettres de conditions déterminées : à savoir, lors de la leurs biens. Le seigneur du lieu légalisait ainsi confirmation de ran­ née 1314 précisent en dotation de sa fille aînée, de pérégrinations en une coutume maintenue par la tradition orale. ces termes lItam in cas­ terre lointaine (croisade), à l'occasion de son Dans les clauses finales Renaud réitère les tro seu in villa Mantinhaci quam extra adoubement et de celui de son fils aîné ''fuerit libertés ou immunités , "immunitates seu liber­ viLLam infra matas ejltsd. cammarantes ... Il novus miles" et dans le cas d'une rançon réclamée tates", concédées aux habitants de Montignac à

21 titre de complète donation pure et simple et an no per habitatores dietae villae et suburbiorum irrévocable. La main posée sur les Saints praedietorum, pro negotiis et neeessitatibus dietorum Evangiles, il promet solennellement d'observer villae et suburbiorum exereendis et gerendis", leur inviolabilité, de ne point les enfreindre et y Les représentants de cette communauté, contrevenir. Le protocole final annonce l'apposi­ qualifiés pour la première fois de consuls en tion de son sceau, manifestation tangible de ses 1434-1435, sont invités, avec ceux de la ville de engagements et mentionne la date d'établisse­ Sarlat, à assister au traité de paix conclu entre le ment de l'acte: "Datum die martis ante festum beati comte d'Armagnac et les barons gascons près de Thome Apostoli anno domini millesimo ducentesimo Toulouse (17). Un siècle auparavant, les habi­ sexagesimo nono", On ne saurait rattacher ces tants de Montignac se faisaient représenter par lettres de franchises à un quelconque modèle ou des prud'hommes, comme il ressort d'un acte du à une famille précise, tant elles sont empreintes 22 mai 1312 (18). En effet, "duos probos homines" d'une certaine originalité. des villes de Montignac et de Bergerac avaient été appelés à comparaître devant le commissaire La communauté de Montignac devait Guillaume de Vassinhac à la députation des bénéficier de nouvelles dispositions entre les • Eléments années 1269 et 1404. En effet, selon l'acte d'ap­ d'architecture du XIV· siècle (d'après probation et d'homologation des franchises par P. Garrigou-Grand­ champ) apparte­ le duc d'Orléans le 22 avril après Pâques 1404 nant à l'un des (15), les "habitatores" de la ville et de ses fau­ moulins à blé du barri du Chef du bourgs étaient à cette époque en possession Pont (moulin de Cremirac). immémoriale du droit de chasser et de pêcher, d'aménager garennes et colombiers et pouvaient à leur convenance bâtir ou faire bâtir fours et moulins à blé, "eonstruendi vel- eonstrui faciendi molendina et furnos ad bladum," sous autorisation, "licentia", du seigneur. La présence du moulin bladier de Bonbarrau dans le barri du même nom en est la manifestation tangible. Guillaume de Bretagne, le 27 juin 1454, devait imiter ses pre'd' ecesseurs en d'onnant a son tour aux lib ur- genses et habitatores" de nouveaux privilèges, "novas libertates et nova previlegia", dont la teneur nous est rapportée plus tard, en 1470.

-L'élément décisif contribuant à une pre­ mière émancipation à caractère urbain et à la formation d'une nouvelle catégorie sociale ,"los borgeys", distincte de la plèbe, "plebeis" ou "joea­ 15 - Arch. dép. 17 - Atch. dép. Dordogne, coll. lia", intervient au mois de juillet 1431 (16). "Los principales villes du diocèse de Périgueux pour le Dordogne, Archives Périgord, r.47, f' 27 / de Montignac sont alors autorisés à procès engagé contre les Templiers. de la ville de 3 (double foliotation), habitans" Périgueux, CC 78 (1404), (1 Mi 234). être représentés et gérés par des syndics et un Au XVIIIe siècle, un maire et quatre (1434-1435).

16 - Arch. dép. peu plus tard par des consuls chargés désormais consuls soutiennent alors les intérêts de la com­ 18 - Arch. dép. Dordogne, coll. Dordogne, Archives Périgord, t. 47, f' 27 / de collaborer et de traiter avec le maître du châ• munauté. de la ville de 3 (double foliotation), teau ou avec son représentant le bayle seigneu­ Périgueux, CC 3 (22 (1 Mi 234). A l' des temps modernes, plus préci­ mai 1312) et IV E Arch. dép. Dordogne. rial, "bailivi dieti domini", En effet, à cette date, sément à la date du 25 avril 1517, on peut esti­ 126/3 (1267). Chanoine Brugière, Hardy (Michel), L'ancien et le nOliveall le duc d'Orléans seigneur de Montignac accorde mer que le mouvement d'émancipation amorcé Députation des villes Périgord. Manuscrit, du Périgord pour le XIXe siècle, t. 27, f à l'ensemble de la communauté villageoise, en 1269 pour tous les hommes de Montignac est procès des templiers, 444 (1Mi 424). "nobilibus et plebeis", le droit d'élire deux syndics parvenu à son terme. En tout cas, aucune ampli­ dans le Bulletin de la De Gourgues. Des com­ Société Historiqlte et munes en Périgord. renouvelables chaque année , "duo syndici in fication de leurs acquis ne devait intervenir par Archéologique du Périgueux, 1843, p. Périgord (S.H.A.P.), 23. eadem villae et suburbiis seu barriis eligendi quolibet la suite. 1892, p. 479.

22 Sans doute la charge des représentants de dons, voulons et concédons, à perpétuité que tous les cette communauté, consistant à assurer une par­ hommes, habitant à Montignac, maintenant et dans tie des responsabilités qui incombaient naguère t avenir, "quod omnes homines apud Montinhaci au maître des lieux, fut-elle incomplète. Sans locum nunc et in posterum commorantes", tant à t in­ doute, leurs attributions pouvaient-elles térieur qu'à textérieur des murs, c'est-à-dire dans les paraître modestes par comparaison à d'autres faubourgs et édifices construits, et devant être agglomérations villageoises de même type (19). construits à Montignac, soient francs, libres et dispen­ Il n'en demeure pas moins vrai qu'à la veille de sés de toute quête, taille et levée dimpôts indue, "tam la révolution Montignac figurait parmi les infra clausuram murorum quam extra videlicet in bourgs castraux les mieux dotés et les plus déve­ barriis et edifficiis apud Montinhacum factis et loppés de la province, tant sur le plan écono­ faciendis esse franchos Ziberos et immunes ab omni mique que démographique et topographique. questa talia et exactione indebita nec volumus", et Grâce, il faut en convenir, aux largesses et à la nous voulons qu'en aucun cas une quelconque quête, volonté des maîtres du château. Les plaintes et taille ou levée dimpôt indue soit exigée deux par nous doléances formulées en plein climat révolution­ ou nos successeurs, ni qu'ils soient tenus à des presta­ naire en font foi, en se faisant l'écho d'une cer­ tions. Cependant, dans les quatre cas suivants, tous les taine reconnaissance de la communauté monti­ hommes habitant et ceux qui habiteront dans t avenir gnacoise envers les seigneurs de naguère qui à Montignac devront payer, à nous ou à ceux qui "avoient fait de cette petite ville tobjet de plusieurs seront alors seigneurs de Montignac, en totalité lorsque faveurs particulières et la distinguèrent par les privi­ un de ces cas se présentera, cent livres de monnaie cou­ lèges dun très modique abonnement et par une infini­ rante dans les modes et conditions ci-après, à savoir: tés dexemptions" (20). - pour la dotation dune fille seulement ; de sorte que si, par la suite, nous, ou celui qui sera alors • Lettrine (N) figurant dans seigneur de Montignac en totalité, avons une autre un acte établi par Arnald Bermond, fille ou d autres filles à doter, nous ne pourrons, pour notaire public doter cette autre ou ces autres filles, rien exiger, tirer exerçant dans la châtellenie de ou nous procurer de ces mêmes hommes ou de tun deux, Montignac. 1339. A.D.24, J 1965/6. et eux-mêmes ne seront pas tenus de nous donner ou de payer à nos successeurs quelque chose au-delà des cent livres fixées pour la raison ou à toccasion du cas sus­ exposé; 19 - Gouron (Marcel), - et pour la traversée du seigneur de Montignac, Les Chartes de Franchises de G1tienne et Gascogne, lorsqu'il traversera la mer en personne, ou se prépare­ Société d'Histoire du Droit, Paris, 1935. ra à la traverser pour une expédition lointaine; Biran (Elie de), - et pour un nouveau titre de chevalerie du sei­ Coutumes de la ville d', dans le gneur lui-même et de son fils aîné, quand lui-même ou Bulletin de la S.H.A.P., 1876, p. son fils aîné se préparera à recevoir ce nouveau titre ou 396. sera fait nouveau chevalier, "vel fuerit novus miles". Durand (Charles), Un mot sur les statuts et - et pour la capture du seigneur de Montignac coutumes de la ville de Bergerac, dans le et de chacun de ceux qui à cette époque seront seigneur Bnlletin de la S.H.A.p, 1877, p. 62. LETTRES DE RENAUD DE PONS de Montignac solidairement, si, ce qu'à Dieu ne plai­ Laurent (Jean-Paul), se, il était pris par les ennemis, et qu'il voulut se Les châtellenies périgour­ DU 18 DECEMBRE 1269 dines, (Pour les cou­ racheter de sa capture. tumes d', "Nous, Renaud, seigneur de Pons, Bergerac et Limeuil, Mussidan), 1948. Arch. dép. Montignac, à tous ceux qui verront les présentes Dordogne, A 1404. Alors, dans les quatre cas sus exposés, nous Baudoin (M.N.), lettres, nous offrons salut et foi par les présentes. serons tenus de consentir, de notre propre consentement, Merlin (A), Catalogne des actes de Henri II, Sachent tous présents et futurs que nous, non tromPé, à ce que deux hommes, de la ville de Montignac, et Paris, C.N.R.S., 1986, non poussé ni déterminé par les conseils des autres, 20 - Remontrances, t. II. (03. C 115, 03 C. deux hommes de chaque faubourg de Montignac, "duo plaintes et doléances de ta 50, 03. C. 78.) mais par faveur et après une très grande consultation homines de infra clausuram Montinhaci et duo ville et commrmaltté de Confirmation des pri­ Montignac à présenter vilèges de Sarlat, sur le droit, après examen, et avec certitude, et de notre homines de uno quoque barrio montinhaci"; soient élus aux Etats Généraux. Excideuil, Mont­ 1789, 12 p. Arch. dép. Domme. fait, avec pleine intention et connaissance, nous déci- et nommés par tous ensemble oit par la plus grande Dordogne, AA 447.

23 partie des hommes de Montignac, "eligendos et nomi­ mansis bordariis et alici terris nobis questa talia vel nandes ab omnibus consuitere vel majori parte homi­ albergatia vel aliud servicium deberetur nos in predic­ num Montinhaci". Ces élus devront répartir égale­ tii mansis bordariis et terris". ment, percevoir, inscrire et mandater les cent livres ; si le seigneur le veut, ils jureront convenablement et loya­ En outre, il faut qu'on sache, parce que lorsque lement et en donnant leur parole, de répartir ou man­ nous ne le disions pas, les hommes de Montignac tigno­ dater également la taxe des cent livres sus dites entre raient, ce qui nous {.. .} sur les biens qu'ils tiennent de les hommes du lieu précité; et après cela ils devront par nous, en perpétuelle emphytéose, "in perpetuam emphi­ nos sergents ou nos ministres, "os servientes vel minis­ teosim", inféodés moyennant un cens annuel ou donnés tros dicti domini", lever et collecter (cette taxe) dans le en emphytéose , "sub annuo cens in feudatas vel datas mois et la remettre à nous ou à celui qui sera alors sei­ in emphiteosim", lorsqu'ils cèdent ces biens en sous gneur de Montignac en totalité de la manière suivan­ emphytéose ou sous-accensement, sans notre avis, et te : qu'ils tirent de là de t argent, ils ne nous rendent pas t absol, "nec nobis reddunt absolidum" et, eux absents, - Que si quelqu'un des hommes sus-désignés se temphytéose ne reçoit pas de nous une nouvelle investi­ sera montré désobéissant ou rebelle à payer ce qui lui ture. A notre observation, ils répondaient que, de notre aura été taxé, départi, écrit, les collecteurs des dites temps, et de celui de nos prédécesseurs, ils avaient cou­ cent livres nous remettrons, à nous ou à celui qui sera tume d agir et den user ainsi depuis si longtemps que alors seigneur de Montignac en totalité, ce qu'ils la prescription ou coutume, ''prescriptionem seu consue­ auront collecté et levé comme ils en avaient été requis, tudinem", leur avait donné le droit et le pouvoir de et ils donneront par écrit les noms et la taxe de ceux qui faire les choses ci-dessus exposées. Enfin, entre eux et auront refusé de payer, afin que nous, ou celui qui sera nous, la composition suivante intervenue, à savoir : alors seigneur de Montignac en totalité, nous les contraignions par la saisie dun gage à s'acquitter - si quelqu'un deux, qui tient de nous un bien entièrement ; quant à ceux qui auront payé leur taxe ou le tiendra dans t avenir en emphytéose, inféodé aux députés collecteurs, ils seront libres et dégagés ; et moyennant un cens annuel, veut ou le sous-emphytéoser si nous ou celui qui sera alors seigneur de Montignac ou le sous -accenser et retenir pour lui, à titre de rente en totalité, voulons que un ou plusieurs hommes de annuel et même d acapte, quelque chose {.. .} du cens et Montignac soient pendant quelque temps exemptés et de t acapte qui nous sont dûs, il peut le faire sans nous dispensés de la prestation ou paiement des dites cent le demander; et s'il reçoit ainsi de t argent à titre d en­ livres, cela ne doit s'entendre que de la part qui incom­ be à cet un ou à ces plusieurs hommes ; nous agirons trage ou de paiement nous et celui qui tiendra le bien ainsi sans préjudice des autres, de sorte que la somme de nous et par la suite nous devra le cens, nous divise­ susdite ne soit diminuée que de ce qu'ils (les exemptés) rons par parts égales les capsol, "capsolidum"; à moins étaient tenus de prêter et payer sans exemption et dis­ que par hasard, le cens ou la rente, lequel ou laquelle pense. Et si, dans la suite des temps, il arrive qu'il y sera à lui retenir sur ce que je lui aurai inféodé ou ait après nous deux ou plusieurs seigneurs à emphytéosé ou accensé n'ait une valeur supérieure à la Montignac, nous voulons que les sus dites cent livres somme prise et reçue à ce titre d entrage ou de paiement soient divisées entre eux et que chacun en reçoive une ; car alors sur ce bien, ni nous, ni lui (le sous-accen­ part proportionnelle à ce qu'il percevra dans le domai­ sant) ne devrions avoir ou recevoir de chefs-sols. ne du château de Montignac sus nommé, "in dominio castri Montinhaci superius nominati". Toutes ces choses Le nouvel emphytéote peut lui payer t acapte (au sus dites, ensemble et séparément, nous le consentons et sous accensant) et recevoir de lui, acheteur, t investitu­ concédons aux dits hommes et à leurs biens acquis ; et, re, nous ou celui qui recevra le bien en seconde emphy­ pour en finir ainsi sur ces choses, si hors du territoire téose, mais celui qui le cédera, devra déclarer au sei­ de Montignac, dans les manses, borderies et autres gneur ou aux seigneurs, au prévôt ou au bayle de terres, il nous était dû une quête, taille ou droit de gite Montignac, ''preposito vel balivio Montinhaci", la ou tout autre servitude nous maintenons le droit que vente ou t emphytéose ainsi faite, dans un délai de nous possédons sur les sus dites manses, borderies et quinze jours à partir du jour où le contrat a été passé terres précitées, "extra territorium Montinhaci in ou temphytéose mise en pratiqùe. S'il ne le faisait pas,

24 le seigneur de Montignac prendra et percevra pour devant être publié, aux usages de la coutume locale et cette fois seulement tous les capsols, "omnia capsolida", même générale, et à la réserve dune méchante trompe­ qui proviennent de toPération (sous-emphytéose). rie, et à t action que nous pourrions intenter à cause de cela, et, sPécialement et expressément, au bénéfice de Si des hommes habitant dans la ville de tingratitude et de tous les droits, raisons, lois et excep­ Montignac vendent simplement le fief ou temphytéose, tions sous le prétexte desquels les promesses ou tune des "si aliqui hominum apud viiiam Montinhaci commo­ promesses faites puissent être révoquées ou annulées rantes feudum vel emphiteosim", qu'ils tiennent de dans t avenir, sPécialement et expressément nous renon­ nous directement et sans intermédiaire, de sorte qu'un çons au bénéfice du droit de rendre la justice à moins cens ou une rente ne soit pas retenu par eux en sus de que et il nous a été pleinement exposé ce que signifient la rente qui nous est due, le capsol de cette vente nous les sus dites renonciations. En témoignage de toutes ces reviendra en totalité et intégralement. choses, nous donnons ces présentes lettres aux susdits Nous voulons que les ventes ou accensements et hommes de Montignac et nous leur concédons scellées de les sous-emphytéoses relatives à notre domaine ou notre propre sceau. Donné le mardi avant la fête du emphytéose, "de fundo nostro vel emphiteosi", qui bienheureux Thomas apôtre, en tan du seigneur seront faites et mises en vigueur soient renforcées et 1269. qu'elles durent, autant qu'elles nous concernent par les fermes règles sus-exposées. Ces lettres, ci-dessus transcrites et insérées, et toutes et chacune des choses qui y seront contenues, Quant aux libertés ou immunités, "vero immu­ nous, dit comte, nous promettons de bonne foi de les nitates seu libertates", nous les donnons et accordons, conserver, de les garder et de n'y contrevenir en rien, et pour nous et nos successeurs, aux susdits hommes habi­ nous les concédons fermement et nous réservons, à eux tant de Montignac, "don. et concedimus predicti homi­ et à leurs successeurs, le droit sur ces choses. nibus apud Montinhacum", à titre de complète dona­ tion, pure, simple et irrévocable entre vifs, promettant En foi et en témoignage de toutes et de chacune solennellement, par stiPulation interposée et par ser­ de ces choses sus exposées, nous, dit comte, voulons que ment sur les Saints Evangiles de Dieu, le livre étant notre propre sceau soit apposé sur les présentes lettres, et présent et touché matériellement, d observer inviolable­ que celles que nous accordons de notre volonté soient ment toutes et chacune des choses sus exposées, et de n'y renforcées par t apposition dudit sceau, et nous les fai­ pas contrevenir en fait ou en parole, secrètement ou sons signer par notre notaire et juré par tengagement ouvertement, en aucun temps, en aUcun cas, ou sous de son nom. prétexte dingratitude pour nous compétent ou pour Fait et donné en notre château de Montignac, ceux qui seront compétents renonçant sciemment, en en notre chambre, "Actum et datum in castro nostro prévoyant les conséquences, spontanément et sous la Montinhaci, in camera nostra", le lundi avant la fête force du serment prêté sur toutes les choses sus-exposés et du bienheureux Hilaire, en tan du seigneur 1367." sur ehacune d elles, à t aide et au bénéfice du droit canon et du droit civil écrit et non écrit, publié, et Bernard FOURNIOUX

• Lettres de franchises de 1470. Fin de l'acte. Seing manuel d'An­ thonio Blancherii. A.D. Pyrénées­ Atlantiques. E 780.

25 PALÉOGRAPHIE

Quelques explications pour lire

- Les majuscules La lettre R du titre et l'initiale S sont très soignées et modernes. Les autres majuscules ne présentent aucune difficulté sauf la lettre A ~, ligne 5. Elles ne sont pas toujours employées pour les noms propres et nous paraissent parfois intempestives.

- Les lettres encore archaïques e E toujours en deux parties tout au long du texte, n'est pas escamoté en fin de mot;

c ... n'a pas pris la forme arrondie actuelle: cité, ligne 3, publicque, ligne 4, sainct, ligne 6 ;

v " il est lancé pour se terminer en boucle au début des mots: ville, ligne 3, volunté, ligne 8 ; à l'intérieur du mot advenir, ligne 1, il ne se distingue pas du u ;

d ~ la haste se termine par une boucle pour se ligaturer avec la lettre suivante ;

Y ,?.Y a une hampe importante, arrondie vers la droite ;

s f forme classique pour le XVIe siècle: grande hampe et haste importante se terminant en cros­ se. A la fin des mots l's est souvent bouclé ; moys, ligne 2, après nommés, ligne 5, ou en plusieurs parties 6 tous presens, ligne 1.

- Les abréviations par suspension: la fin du mot manque not .r = notaire, ligne 4, lad "0 = ladicte, ligne 10, le mot finit par un trait plongeant ;

26 ------lI~~11-----

Recognoissance de Jehan Va/brune /'aisné sieur de Laurière.

1 Saichent tous presens et advenir que 2 aujourd huy neufiesme du moys de janvyer tan mil 3 cinq cens trente neuf en la ville et cité de Périgueux 4 par devant moy notaire publicque soubz signé et dez tesmoings 5 ry apres nommés a esté present et personnellement constitué 6 Forthon de Sainct Astier escuyer sieur du Lieu Dieu 7 pour luy et les siens lequel de son bon gré 8 franche et liberalle volunté a receu à investiture 9 et recognoissance Jehan de Valbrune t aisné bourgeois 10 et merchant de ladicte ville sieur de Lauriere present et Il acceptant pour luy et les siens de certain maynement 12 appellé du Cluzel sciz et situé en la paroisse de Boulazac.

A.D. 24, 24] 4, folio 104

par contraction: pns = presens, ligne 1, nommés, devant, maynement, lignes 4, 5, Il, le signe abréviatif, ou tilde, est placé au-dessus du mot ; souvent il ne remplace qu'une lettre m, dans nommés- par exemple.

- Les signes tironiens par ou per çe : périgueux, ligne 3, par devant, ligne 4 ; commencent par çe et comportent une abré­ viation par contraction; personnellement, ligne 5, le mot est pourvu d'un tilde pour la contraction d'un n et d'une suspension finale; paroisse, ligne 12.

? signe pour le son con : constitué, ligne 5.

- L'orthographe z, remplace parfois l's final: dez, ligne 4, sciz, ligne 12 ;

y, pour i dans moy, moys, luy, aujourdhuy, janvyer;

Des lettres supplémentaires par rapport à notre graphie actuelle :

s, dans esté, aisné, tesmoings qui comporte aussi un g comme recognoissance ;

c, intercalé dans sciz, ligne 12.

merchant, forme ancienne de marchand.

publicque, féminin intempestif qui a gardé le c. Raymonde SARLAT

27 --SONOTHÈQUE

De mémoire d'institutrice ...

large a été établi afin de recueillir, auprès des Dans le précédent numéro, la rubrique instituteurs, des témoignages sur l'ensemble de "Parole de lecteur" était consacrée à un entretien leur carrière. Douze instituteurs et institutrices avec Mona Siegel, étudiante américaine qui pré­ ont été enregistrés et nous vous présentons ici pare un Doctorat d'histoire. Ses recherches por­ quelques extraits d'un entretien avec Marguerite tent, notamment, sur le rôle des instituteurs Sudret, réalisé le 2 mars 1994 à Périgueux. dans la propagation des idées pacifistes durant Fille d'instituteurs, elle est née en 1904 en La présence de Mona rentre-deux-guerres. et a fait ses études et sa carrière en Siegel en Dordogne nous a permis de collaborer Dordogne. à ses investigations et un questionnaire plus Sylvain ROUX

Mona Siegel: C'était comment rEcole Normale? M S. : C'était quoi l'uniforme exactement?

Marguerite Sudret : C'était comme un lycée, mais M.S. : C'était pas tellement strict, si vous voulez, plus fermé, plus familial. Nous avions trois promo­ mais enfin c'était bleu marine, c'était surtout le cha­ tions de vingt-cinq. Le brevet supérieur se passait en peau. Il fallait un chignon. Il y en a qui rentrait à deux fois, comme le baccalauréat autrefois. On avait quinze, seize, dix-sept, dix-huit ans, moi, je suis ren­ trois ans; les deux premières années, c'était surtout la trée à dix-sept ans. Beaucoup avaient encore les préparation du brevet supérieur puisque nous n'avions tresses, les cheveux longs ; alors on entrait, naturelle­ pas le droit de passer le bac. Il y a eu, en 1919 ou en ment, il fallait avoir un peu de prestige, on était 1920 - c'était le ministère Léon Bérat - une réforme élève-ma»tresse, il ne fallait pas avoir de tresses pour de renseignement, comme il yen a comme fa souvent, aller faire la classe! D'ailleurs, il y a eu une petite mais enfin cette réforme-là était très importante parce révolution de palais, si on peut dire. On était en troi­ qu'on permettait aux élèves de la filière primaire et sième année, en 1924, il y en a une, une externe primaire supérieure et Ecole Normale de passer dans d ailleurs, qui est arrivée un jour avec les cheveux le secondaire à condition d avoir douze de moyenne au coupés, on appelait fa "la garfonne", et comme le bou­ brevet supérieur. quin "La garfonne" avait fait un scandale, c'est qu'il était question de relations entre un garfon et une fille, Sylvain Roux: Avant, rEcole Normale était séPa­ c'était pas ordinaire! On a déPassé tout fa mainte­ rée? nant! M.S. : Oui, il y avait celle de la Place Hoche, les M S. : Votre premier poste, c'était en 1924 ? filles, et puis, Place Faidherbe, les garfons. M.S. : Oui, c'était à Saint-Léon-dlssigeac. Alors, S.R. : C'était en internat? là-bas, c'étaient les lampes à pétrole, il n'y avait pas M.S. : Oui, il y avait des petites dérogations; dans l'électricité mais fa ne m'a pas choquée parce que, fa ma promotion, il y avait deux externes et, budgétai­ parait drôle, mais, en 1924, en Gironde, aux rement, cela avait permis de faire rentrer une vingt­ Peintures (1), plus évoluée matériellement, si on peut sixième. Autrement, c'était rinternat avec l'uniforme, dire, que certains coins de· Dordogne, nous aVIons le chapeau duniforme ... encore les lampes à pétrole. 1 - Village du canton de Cou-tras.

28 M S. : UJus étiez syndiquée depuis le début? S.R. : Quel est votre sentiment sur votre métier? M.S. : Ah oui, toujours ! J'étais syndiquée, mes M.S. : C'est un métier très attachant; remarquez parents aussi. On considérait fa ... , pas comme une qu'un bon artisan, il travaille sur du bois, il aime obligation, c'était naturel. D'ailleurs, on était infor­ son bois, ou la couturière sur ses tissus, mais enfin, mé, c'était utile.

Jl4âirie e! GrOllpe So~laife

• Mairie et groupe scolaire de . Carte postale. A.D. 24. 2 Fi ne.

S.R. : C'était une voie dinformation avant tout? c'est plus riche sur des enfants. Il y en a qui feront pas grand-chose du point de vue social, ils ne vont M.S. : Oui, ce n'était pas que du point de vue reven­ pas loin mais ce n'est pas les plus mauvais quand dicatif, vouloir qu'on gagne plus,' évidemment fun même, ils sont comme fa. C'est un métier que j'ai va avec f autre, mais enfin c'était surtout pour des aimé, c'est usant, mais c'est un beau métier. méthodes, des améliorations dans le métier. (.. .)

Nous vous informons de la parution du disque "Parfums de bal", produit par le Studio Saint-Amand avec la collaboration de la Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports et la Sonothèque des Archives départementales . .Le répertoire est très varié: valse, passo-doble, java, fox-trot, one-step ... et même un quadrille composé par Elie Dupeyrat, musicien ribéracois (1840-1930). L'interprétation des morceaux a été confiée à des musiciens rompus à la musique de bal et témoins de cette époque héroïque où un seul accordéoniste pouvait faire danser des centaines de gens. Un livret, illustré de photos anciennes des années 1925 à 1955, relate l'histoire de ces bals qui se déroulaient dans les bistrots, les bals-par­ quets, et même dans les granges ou les hangars à tabac !

Vous pouvez acheter ce C.D. aux Archives départementales au prix de 120 F. ou en le com­ mandant au Studio Saint-Amand - 24170 - BELVES (533021 56).

29 / --A L'ECOLE------I

42e concours de l'Historien de demain, 1994-1995. Objet: "Ecoles et écoliers XVW- XXe siècle."

Les participants. membres du personnel des archives, de l'édu­ cation nationale, ainsi que du doyen de l'ins­ Les élèves des enseignements primaire pection générale d'histoire et du président de (CM1-CM2) et secondaire (ler cycle et 2ème cycle) sont invités chaque année à participer au l'association des professeurs d'histoire-géo­ concours de l'histoirien de demain. graphie ou de leurs représetants se réunira le Organisé par la direction des archives 24 mai 1995 sous la présidence du directeur de France en liaison avec les directions de des Archives de France ou de son représen­ l'éducation nationale et avec l'àppui de l'asso­ tant. Il attribuera les prix. ciation des professeurs d'histoire-géographie, Les lauréats du concours, à l'échelon ce concours est aussi ouvert aux stagiaires des national, recevront de nombreux prix instituts universitaires de formation des (voyages, livres, disques, objets d'art...), qui maîtres se destinant à l'enseignement primai­ leur seront remis par le directeur des Archives re, qui peuvent y participer individuellement de France. ou collectivement. Les travaux montreront un travail de recherche original, une synthèse Règlement et contenu détaillé (environ 25 pages) et des annexes. du concours.

Déroulement matériel du S'adresser aux Archives départemen­ concours. tales de la Dordogne, 9 rue Littré 24000 PÉRIGUEUX. téléphone: 53033333. Les concurrents remettront leur dossier au directeur des Archives départementales avant le 30 avril1995. Concours 1995 - 1996. Le sujet retenu pour l'année scolaire Prix nationaux, prix régionaux 1995 -1996 portera sur "Le fait militaire en et départementaux. France". Une circulaire ministérielle précisera A l'échelon national le jury composé de le libellé exact du sujet.

30 FORUM

Perdu de vue ? ... Ecrivez nous Annonce La couverture du dernier numéro de Mémoire Madame Yolande EYCHENIE de la Dordogne était consacrée à une photo de 210 chemin du sorbier "Les carabins" famille prise lors de la célébration de noces 13270 Fos-sur-mer d'or, en 1913. recherche personne ayant un peu de temps Cette photo, achetée par Thierry libre et connaissant bien les Archives départe­ Boisvert dans une brocante, a été identifiée mentales de la Dordogne pour y effectuer par Monsieur LAMBERT, maire de Saint­ ".graCIeusement "1que ques rec herc hes genea-" Georges-de-Monclar, qui a eu la surprise de logiques sur ses ancêtres. Petits frais de pho­ reconnaître ses grands-parents et alliés saisis tocopies, copies intégrales d'actes B.M.S et par le photographe, à Sainte-Alvère, au lieu­ timbres réglés par retour du courrier. Le 1er dit "Les places". décembre 1994.

Bernard REVIRIEGO et François BORDES,

CATALOGUE DES SCEAUX

DES ARCHIVES

DÉPARTEMENTALES

DE LA DORDOGNE

Périgueux, 1994

120 pages, 170 photos

100F

31 / / LE MUSEE DU PERIGORD NOIR A DOMME

C'est le dimanche 26 septembre 1937 qu'a lieu à Domme l'inauguration du Musée du Périgord Noir. Là, en présence de nombreuses personnalités de la région, de l'inspecteur

d'Académie, M. Flottes, et du maire de Domme, CAMERA M. Lasserre, Paul Reclus présente son oeuvre. La première phrase de son exposé est pour son ami, le véritable instigateur de ce projet comme lui oublié: «Le musée du Périgord Noir est dû à l'ini­ PROSPECT. tiative d'un Professeur écossais, le biologiste Patrick Geddes ... »(I)

Patrick Geddes EDINBURGH

Patrick Geddes est né à Ballader, dans la région d'Aberdeen en Ecosse, au mois d'octobre rr rr ,. r-r rr a mm mmm SCOTLAND. 1854. Engagé, en 1870, dans des études de chi­ mie, botanique et géologie il se rend à Londres rr rr trl en 1874, où il intègre bientôt l'Ecole Royale des r rr rr rr rr LANGUAGE Mines. Là, il devient l'assistant personnel de mm m m ~ Thomas Huxley. Chargé du laboratoire de ~ Botanique pratique à la Faculté des Sciences dès rr rr rr mrr [ffirr, 1 1880, il est répétiteur en Histoire naturelle à mm m EUROPE. ~ l'Ecole de Médecine. En 1887, il est nommé titulaire de la chaire de botanique à V niversity r r rr Ë1 College Dundee, puis publie, en 1889, en colla­ rr ;r rr WORLD. boration avec un de ses anciens élèves, J.Arthur mmm Thomson, un ouvrage marquant dans l'étude de

1 - P. Reclus, Discours la sexualité: Evolution of Sex (2). d'inauguration in L'Exposition V niverselle de Paris, en 1nallgltratÎon dit musée du Périgord noir à 1889, est l'occasion pour lui de matérialiser son Domme, 26 sept. 1937. intérêt croissant pour l'éducation. Il y organise • Repré­ 2 - P. Geddes & J.A les premiers échanges d'étudiants entre la France sentation schéma­ Thomson, The evolution sa propre science sociale qu'il s'emploie à ensei­ tique de "Out/oak of Sex, 1889, London, et la Grande-Bretagne et tente, sans succés, de gner, dès 1887, par l'intermédiaire des "Summer Tower, in Cities in Scott. ressusciter l'ancien Collège des Ecossais de Evolution, de Pa­ meetings". Les débuts de sa réflexion sur la ville trick Geddes, 1915. 3 - Ancien Collège des l'v niversité Médiévale de Paris (3). Escossois, rue du se font à travers son travail sur le vieux quartier Cardinal Lemoine à Profondément inspiré par le POSItIvisme Paris. Il joua un rôle de Casde Hill à Edimbourg. Là, en 1892, il met important auprès de la d'Auguste Comte comme par l'oeuvre du grand en place l'Out/ook Tower qui devient alors le Sorbonne au Moyen économiste Frédéric Le Play, il forme les bases de Âge et forma des centre de ses activités et le symbole de ses idées. hommes illustres.

32 1900 et l'Exposition Universelle de Paris partir dune vue locale pour arriver, par élargissement 9 Bertrand Faure, Le professeur Geddes et marquent les débuts de l'Ecole Internationale progressif des cercles de culture, à une vue de l'univers». son Otttlook Tower in Revlte politiqtte et parle­ qui le conduira à organiser ses expositions d'ur­ B. Faure (9). mentaire du 10 avril banisme itinérantes : les Town Planning Située dans la partie la plus ancienne , et 1910, Paris. Exhibitions. A Belfast, Dublin, Edimbourg et surtout la plus élevée, d'Edimbourg, l'Outlook Londres, entre 1910 et 1914, c'est en 1913 qu'il Tower est un ancien observatoire que Patrick obtient le Grand Prix de l'Exposition Universelle Geddes transforme en lieu de mémoire et de de Gand. savoir. Centrée sur la capitale écossaise et sur sa Au cours de l'année 1914, il reçoit du région, son intérêt s'étend jusqu'à l'ensemble du Gouverneur de Madras, une invitation à présen­ monde au fil des étages qui la composent. ter sa grande exposition sur les villes, à effectuer Concue comme un instrument d'éducation de la des études urbaines et à former des administra­ population, elle n'est pas un musée, car elle ras­ teurs sur les questions d'urbanisme. Il débarque semble une documentation qui concerne aussi en Inde, au mois de septembre 1915, où il effec­ bien le présent et le futur que le passé. tue des rapports sur neuf grandes villes hindoues L'Outlook Tower présente donc une vision du dont celle d'Indore. Nommé professeur et direc­ monde qui, si elle est forcément réductrice, n'en teur du département de sociologie qu'il vient de présente pas moins l'intérêt d'être synthétique. créer à l'université de Bombay en 1919, il est Aujourd'hui, plus d'un siècle après sa création aussi chargé par l'Organisation Sioniste par Patrick Geddes, l'Outlook Tower remplit tou­ Mondiale d'une étude pour l'implantation d'une jours sa fonction. Elle est aussi devenue le Patrick Geddes Centre for Planning Studies. université hébraïque à Jérusalem. C'est finale­ • Etat ini­ ment en 1924, son état de santé ne tolérant plus C'est dans cet Outlook Tower comme dans l'in­ tiai du moulin. 1900. la trop forte chaleur, qu'il décide de quitter les fluence de la pensée de Patrick Geddes sur Paul Coll. Service dé­ Reclus qu'il faut chercher les principales raisons partemental de l'Ar­ Indes pour le sud de la France. chitecture de la Installé à , c'est pourtant dès des particularités du Musée du Périgord Noir. Dordogne. le 29 décembre 1924 qu'il achète les parcelles DOl\tME. Vicux Moulill il VCIlt. 4 - Donation de M. n0226, 227 et 228 au lieu-dit le "Château du Patrick Geddes & Collègues à la commu- Roy" sur la commune de Domme à laquelle il en ne de Domme, novembre 1931, fait don le 26 Novembre 1931 (4). Le 14 avril Archives départemen­ 1932, Paul Reclus devient Président du Syndicat tales de la Dordogne. d'Initiative qui a été désigné par Patrick Geddes 5 - Ibid. pour assurer la destination de sa donation (5). 6 - Elie Reclus (1827- 1904). Frère aîné d'Elisée, il collabora à Paul Reclus la plupart de ses ouvrages. Mêlé au gouvernement répu­ Originaire de la bastide girondine de blicain de 1848, il fût Sainté-Foy-la-Grande, Paul Reclus est né le 25 nommé Directeur de la Bibliothèque mai 1858. Fils d'Elie Reclus (6), il est aussi le Nationale par la Commune. neveu du grand géographe Elisée (7). Protestant, il est exilé de France, en 1894, pour 7 - Elisée Reclus (1830-1905). Il est avoir fréquenté les milieux anarchistes, et après déjà célèbre pour la publication des pre­ un séjour de deux années en Angleterre, il se fixe miers volumes de son en Ecosse en 1896. Là, recommandé par son oeuvre magistrale : Nouvelle Géographie oncle, il est recueilli par Patrick Geddes qui Universelle: la Terre et les Hommes qu'il achève en l'emploie à la réalisation de l'équipement carto­ 1894 avec la parution graphique de son « musée-observatoire» (8) à du dix-neuvième volu­ me consacré Edimbourg : l'Outlook Tower. l'Amazonie et l'Amérique du Sud. 8 - Il réalise notam­ L'Outlook Tower ment la maquette d'Edimbourg que l'on retrouve à la Town «L' Outlook Tower illustre clairement l'idée de Planning Exhibition de 1910. son créateur -Patrick Geddes- selon laquelle il faut

33 Le Musée du Périgord Noir ment liée au site, et plus que la présence de Paul Reclus, c'est la qualité exceptionnelle du pano­ Particulier, le Musée du Périgord Noir rama qu'offre les lieux qui décide Patrick l'est dans son principe comme dans sa forme. Geddes à acquérir ces terrains dommois : «la Construit sur la base des restes du vieux Moulin situation rappelle celle de l'Out/ook Tower à O du Roy (parcelle n 227) le musée présente «une Edimbourg, car de ce promontoire naturel il est facile silhouette qui ne manque pas d'originalité et attire les de considérer l'ensemble des caractéristiques du milieu regards» (10). Une extension en béton armé de régional. Le paysage offre une grande lisibilité, il en 8m de diamètre qui vient coiffer un toit conique devient presque schématique» (12). Ainsi, la transi­ recouvre la partie du moulin conservée (dia­ tion entre les maquettes centrées sur Domme mètre 3,5m). Pour l'aménagement intérieur du que contient le musée et le panorama que l'on bâtiment, Paul Reclus s'est aussi largement ins­ entrevoit à travers les ouvertures est-elle large­ piré de l' Out/ook Tower. La grande salle du haut ment facilitée : « on passe ainsi aisément de la vue 10 - Arthur Geddes ouvre sur de vastes panoramas et les étages s'in­ (fils de Patrick panoramique locale et de la carte topographique du téressent successivement à une question sous sa Geddes). Lettre à Périgord méridional aux maquettes en relief de la M. Paul Fenelon, forme locale, régionale, nationale puis interna­ 1950, Bibliothèque de région .. ,» (13) laS.H.A.P. tionale , «de sorte qu'à partir du milieu local l'esprit Outre cette situation topographique privilégiée, peut élargir progressivement son horizon jusqu'à l'ex­ Il - Arthur Geddes, le site de Domme offre, à un niveau plus large, op. cit. trême limite du monde habité» (11). l'avantage de se trouver au coeur d'une région préhistorique réputée. En 1877, nous pouvons déjà lire dans la Nouvelle Géographie Universelle d'Elisée Reclus : «Les noms de Moustier, des Eizies, de Laugerie-Haute, de Laugerie-Basse, de la Madeleine, de Gorge d'Enfer, de Tayac, dont la roche percée dans tous les sens etait une sorte de citadelle ont acquis dans la science un nom impérissable qui s'applique désormais à toute une race d'hommes, ainsi qu'à toute une période de la civilisa­ tion préhistorique» (14).

Le Collège des Ecossais

Principalement axé sur la préhistoire, le Musée du Périgord Noir, s'il est largement ins­ piré de l'Outlook Tower, tire ses origines d'une autre réalisation de Patrick Geddes. En effet, installé à Montpellier depuis son retour des Indes en 1924, il a fondé sur les hauteurs de la cité méditerranéenne un lieu cl' enseignement particulier: le Collège des Ecossais. Paul Reclus y fait partie des enseignants, tout comme M. 12 - Luc Joudinaud, Gecldes, de Domme ait Peyrony, instigateur des recherches au gisement monde, 1994.

moustérien de Combe-GrenaI en 1891, profes­ 13 - Arthur Geddes, seur aux Eyzies, et dont on retrouve plusieurs op. cit.

ouvrages dans la bibliothèque du musée (15). 14 - Elisée Reclus, C'est dans le cadre des cours d'été de ce collège NOllvelle Géographie • Construction Universelle .' la Terre et du Musée. 1937. que les étudiants se retrouvent à Domme dès les Hommes, val.2, La Coll. Service dé­ Un site exceptionnel l'été 1930. Parmi les projets de Patrick Geddes France, 1877. partemental de J'Ar­ chitecture de la à Domme, la construction d'un Institut 15 - Inventaire du Dordogne. fonds Reclus, biblio­ Comme le précise Arthur Geddes, l'idée d'Archéologie et d'un Centre d'Etudes thèque du Périgord Noir in Luc qui préside à l'organisation du musée est forte- Régionales. Il faut enfin rapprocher cet intérêt J oudinaud, op. cit.

34 • Le Musée du Périgord et la maison Pugnère. Vers 1940. Carte postale. Des­ sin de Paul Guion. Coll. Syndicat d'Ini­ tiative de Domme.

particulier des "Summer schools" du Collège des ment lié aux projets les plus représentatifs de son Ecossais pour la préhistoire de l'achat par Patrick époque tels que le projet de globe terrestre à Geddes aux Eyzies d'habitats semi-troglodytes. l'échelle de 1/100.000, le Centre International Enseignant la Géographie Humaine à de Communication ou la Cité Mondiale. Montpellier, et l'Histoire et la Géographie de la vallée de la Dordogne lors des cours d'été en LucjOUDINAUD Périgord (16), c'est en 1930 que Paul Reclus se Architecte D.RL.G. voit confier la direction des études du Collège Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales -Paris. des Ecossais dont il assure le fonctionnement jusqu'à la veille de la seconde guerre mondiale. Achevé à la fin de l'année 1937, le Musée du Périgord Noir sera pillé durant la seconde guer­ re mondiale, et, dès 1947, le conseil municipal prévoit sa démolition. La requête formulée par Bibliographie : l'Excursion Interuniversitaire de Géographie - ]OUDINAUD (Luc), Geddes, de Domme au (17) en 1950 dans le but de maintenir en place monde, Mémoire pour le diplôme d'Architecte, le musée ne peut aboutir. Le musée redevient 1994. bientôt moulin.

Domme, centre du monde.

Construit sur le même principe que l'Out/ook Tower, l'ouvrage Geddes, de Domme au L'auteur souhaite entrer en contact avec monde éclaire la pensée de Patrick Geddes pour 16 - Luc J oudin.ud, toute personne intéressée par ce sujet ou op. cit. nous montrer que le Musée du Périgord Noir détenant des informations sur Patrick 17 - Demande de fait de Domme le centre du monde ... réouverture du musée Geddes. Parcourant le début du XXe siècle, celui des uni­ régional de Domme Monsieur Luc ]OUDINAUD par les membres de versalistes, de l'internationalisme, des grandes l'Excursion Inter- 20, rue Lacépède universitaire de expositions universelles et des premiers urba­ Géographie, adden­ 7500? Paris dum in Lettre à M.Paltl nistes, nous découvrons comment le Musée du Penelon, A. Geddes, op. Tél. (16.1) 43 37 58 71 cit. Périgord Noir, musée régional, est inextricable-

35 ---LE DISCOURS DE LA MÉTHODE--,----t

Cartographie de la Dordogne (2ème partie: les cartes anciennes).

Les nouvelles feuilles à 1/50000. Leur mise au point fut effec­ cartes d'état major. tuée grâce à des levés stéréotopographiques aériens complétés de travaux sur le terrain. Publiées au milieu du XIXe siècle et Toutes les feuilles comportent la mention "Type révisées dans les années 1890, les feuilles à 1922" [1 Fi Dordogne 57 -58 et 1 Fi France 37 à 1/80000 s'avérèrent rapidement trop imprécises 45}. aux yeux des militaires eux-mêmes, dont beau­ Depuis, l'I.G.N. s'est résolument engagé coup plaidaient pour une échelle permettant une dans la production de cartes encore plus meilleure exploitation (1). La nouvelle version de détaillées, à l'échelle de 1/25000, par l'intermé­ la carte d'état major révisée fut donc réalisée, diaire de sa collection "Série bleue", et, plus dans la première moitié de notre siècle, à récemment, "Top 25", dont le but est de prendre 1/50000, à partir des levés au 1/40000 établis au le relais de la Carte d'état major. XIXe siècle. Les feuilles portent la mention "Type 1889" [1 Fi Dordogne 45 à 56}. Les cartes géologiques

La réalisation de la première carte géologique du département de la Dordogne mériterait à elle seule une étude particulière, de par la personnalité même de celui qui, pendant plus de 40 ans, fut chargé de sa réalisation, l'ingé­ nieur des Mines Marrot (3).

L'exécution des cartes géologiques départementales fut prescrite par une circulaire du Directeur général des Ponts et Chaussées en date du 30 août 1835, et le programme détaillé en fut établi le 22 mars 1836. Marrot se mit donc aussitôt 1 - cf. Berthaut au travail, effectuant année après année (Colonel), La carte de des relevés dans tout le département, et France, 17 50-1898, Parallèlement, le Service géographique de Paris, Service géogra­ • Carte tenant consciencieusement le "journal des tour­ phique de l'Armée, topographique, l'Armée travaillait à la conception d'une carte à 1898. «type 1889». nées et des observations" règlementaire. En la même échelle, mais d'un type nouveau qui fut A.D. 24. 1 Fi 1850, il obtenait du Conseil général la décision 2 - cf. La nouvelle carte Dordogne 52. élaboré au début des années 1920 (2). C'est sur de France, Paris, Service Feuille 183, Brive. de réaliser la représentation géologique sur la géographique de ce modèle que l'Institut géographique national l'Armée, 1923. carte d'état major à 1/80000 alors en cours d'éla­ (I.G.N.), successeur civil des institutions carto­ 3 - cf. infra l'article de boration, mais les retards dans la publication de graphiques militaires à partir de 1940, réalisa en ].-E. Bonnichon, ces feuilles reportèrent régulièrement l'opéra­ "Périgueux au milieu couleur, entre 1961 et 1967, les plus récentes du XIXe siècle : l'ir­ tion. Mis en cause lors dela session de l'assem- ruption des ingénieurs dans la ville".

36 blée départementale du 24 août 1859,1. Marrot, alors retraité, publia une justifi­ cation où il maintenait fermement sa position de principe : "une carte géologique qui serait tracée sur une carte topographique mauvaise ou médiocre n'aurait aucune valeur', elle constituerait une véritable déception" (4). Il fallut, en fait, plus de 20 ans encore avant que le travail de Marrot puisse voir le jour. La première utilisation de ses recherches aboutit, en 1882, 6 ans après sa mort, à la publication de la Carte géologique du département de la Dordogne, par Marrot, Inspecteur général des Mines, publiée et revue pour le lias, le trias et le permien par

G. Mouret, ingénieur de Ponts et Chaussées [1 Fi lecture et d'une notice explicative extrêmement • Carte Dordogne 34}, mais dont l'échelle à 1/200000 détaillée. géologique de la France. Feuille en limite l'intérêt. Par contre, l'édition, à partir 183, Brive. A.D. 24. 1 Fi ne. de 1896, des feuilles périgourdines de la Carte François BORDES géologique de la France à 1/80000, se révélait en tout point conforme à ses conceptions: réa­ lisée sur les feuilles originelles de la carte d'état major révisées entre 1888 et 1893, elles offraient une précision d'une réelle utilité. Comme un hommage posthume à cet étonnant ingénieur, toutes ces cartes mentionnent qu'elles purent être établies grâce aux travaux de Marrot (puis de Mouret) [1 Fi France n.c.}. Chaque étage de terrain est représenté par une couleur, une lettre et un indice ou un exposant. Chaque En 1870, 1. Marrot publiait un Tableau des feuille comporte des commentaires bien sûr géo­ communes du département de ta Dordogne (... ) logiques, mais également géographiques (en suivi dune table des coordonnées géographiques des particulier sur la couverture végétale) et écono­ principales localités du département. On y miques; ces derniers s'attachent notamment à apprend entre autres choses que : mentionner les principales "substances utiles", * la plus grande longueur nord-sud du c'est-à-dire les minerais et matériaux exploités. département, depuis l'extrêmité nord de la On trouve également sur cette carte la localisa­ commune de jusqu'à l'extrêmité tion de toutes les usines, fabriques, carrières et sud de celle de Loubéjac, est de 136,115 mines(en activité ou abandonnées), des fours à km.; chaux aussi bien que des ateliers de préparation * la plus grande largeur est-ouest, depuis de la tourbe, etc. C'est dire tout l'intérêt de ces l'extrêmité Est de jusqu'au pont feuilles pour les études sur la vie économique de du Chalaure, commune de Sainte-Aulaye, la Dordogne au XIXe siècle, malgré la difficul­ est de 117,225 km.; té de lecture due à la présence de couleurs par­ * le point le plus élevé du département, fois très foncées. situé sur la commune de Saint-Pierre-de­ Frugié, est de 478 m. de hauteur absolue', 4 - Note sl/r texémtion et la publication de la carte Actuellement, le Bureau de Recherches * le point le plus bas, à l'ouest de La géologiqm dit départe­ ment de la Dordogne. géologiques et minières (B.R.G.M.) édite la Mothe-Montravel, au point de sortie du rédigée par M. Marro/, département, est de 4 m.; Inspecte/Ir général des nouvelle version de la Carte géologique de la Mines en retraite, ... , * quant au point central, il se situe sur la Périgueux, Lith. France, à l'échelle de 1/50000, pour laquelle Dupont et Cie. 1860 chaque feuille est accompagnée d'un guide de commune de Notre-Dame-de-Sanilhac. [A.D.D .• 70 S 12).

37 DERNIÈRES ENTRÉES

Cette rubrique fait le point, d'une revue à l'autre, des entrées de documents achetés ou donnés, classés en série J, et des documents iconographiques.

mentaires, foies d'oies, légumes, fruits à . 1937. [Don des Archives départementales du Nord}. J 2176. - Récit de captivité au camp de Cham en Bavière où il est question de l'abbé Valentin Grillon, curé d'Eymet ; correspondance échangée avec Jacques Delarce, auteur de ce récit. 1984-87. [Don de M. Grillon}. J 2178. - Documents concernant la restauration des églises de Cercles, Chancelade, de la Chapelle sainte-Marthe à Périgueux et du square de la - Papiers concernant des familles de Château• tour de Vésone. 1888-98. [Don anonyme} inté­ l'Evêque et environs. 1696-1821. [Don de P. gré dans 1 T 295-296. Pommarède}. J 2162. - Collection du journal Le Monde (depuis le mois - Scénographie du spectacle son et lumière d'août 1957). [Don de M. Bonnichon}. donné à l'occasion du départ du 5ème Régiment de chasseurs de Périgueux, billets d'entrée, pros­ - Collection du journal Le Montignacois, et Le pectus pour la souscription du livre 'r Armée en Réveil montignacois (1928-39). Coll. incomplète. Périgord' écrit par certains auteurs du spectacle. [Don des Archives départementales de la Mfiche et photographie. [Don de M. Caignard} -Maritime}. J 2171 et Fi. - 4 photographies de la communes de Sainte­ - Diplômes d'Aymard Louis, du Puy-de-Dôme: Foy-de-Longas. [Don de Mme Chevallier} Fi. diplômes de "bachelier ès-sciences complet" et de contrôleur adjoint des contributions directes. 1889, 1892. [Don anonyme}. 2° / ACHATS - Mise au point sur les combats qui eurent lieu le - Papiers famille Dudoignon-Vallade ; en cours 15 août 1944 à Puy-de-Fourches, par M. Canva, de classement. XIXe siècle. J 2163. alias Roland dans la Résistance, commandant le - Ordonnance du roi Charles IX pour le sénéchal groupe maquis n02. 1994. [Don de M. Canva} J du Périgord au sujet des tailles et impositions 2175. (1571). J 2165. - Correspondance de la fabrique de chaussons et pantoufles, feutres et cuirs en tous genres R. - Programme de la soirée de gala organisée, le Panazol à Nontron. 1931-32 ; facture de la mai­ 21 février 1906, par le véloce-club périgourdin son Lapeyronnie fils, négociant en vin du pays, et l'automobile-club pour la distribution des son et avoine à Saint-Jean-de-Côle. 1931 ; fac­ récompenses du concours du tourisme. Fi ne. ture de la maison Jean Ossard, conserves ali- - Compte de tutelle de la comtesse de

38 Campagne pour son fils Edouard Laborie de Périgord, Antoine de Tounens, Bugeaud, Cabet. Campagne. (1820). J 2169. Doc Arch. 22-53. - Papiers de l'Amicale des Amis de Martin, en - Dossiers constitués d'extraits de catalogues de mémoire du groupe FFI Martin (Dordogne­ librairies parisiennes concernant des person­ sud); ont été ajoutés à ce fonds, des documents nages périgourdins ou ayant une relation avec le du groupe FFI et des papiers militaires concer­ Périgord : Lakanal, Fénelon, André Maurois, nant Jean Acquaviva, maréchal des logis. (Ce Rachilde, Romieu, Sartre, Claude Seignolle , fonds nous informe sur les chefs du groupe et Sem, Jean-Guillaume Taillefer. Doc Arch. 54- sur les résistants qui le constituaient : fiches de 55. démobilisation, listes des résistants et certificats - Dossiers constitués sur des communes : d'appartenance aux FFI avec l'activité précise , Vitrac, Périgueux, , dans le groupe. 0921-49). J 2170. Chancelade, St-Seurin de Prats, Brantôme, - 3 bons de 20 francs au porteur pour l'exposi­ Aubrac, Abjat, Saint-Léon-sur-V ézère, tion universelle de 1900. J 2172. Montpon Ménestérol, Bergerac, , - Acense faite par le seigneur Antoine de Sarlat. Doc Arch. 56-57,60-73. Salignac, seigneur de , de Margnac et - Dossiers de documentation concernant : de Léguillac à Bernard de la Rivière dit Richard Trompette de certain manse au village de la La Vicomté de Turenne. Doc Arch. 74 ; Longue, dans les paroisses de et Statistique de la Commémoration du bi-cente­ Coutures. Parchemin de 1463. J 2173. naire de la Révolution. [Don CN.R.S}. Doc - Reconnaissance de Jean de Saint-Fourches, de Arch. 87 ; la Tour Blanche, pour les terres de la Guichardie Le Centenaire de la Révolution de 1889. Doc (paroisse de Cercles) à François de Bourdeille, Arch 75 ; seigneur et baron de , de la Tour Autres séries de dossiers constitués sur des per­ Blanche et de Grésinhac. Parchemin de 1474. J sonnages ayant joué un rôle pendant la période 2174. révolutionnaire : Borie-Combort, Fumel de - Plan encadré du Palais des fêtes de Périgueux Montégut (de), Fournier Lacharmie, La Roque (rue Bodin); projet de façade, Cocula architecte. de Mons, Jean-Baptiste Loys, Jacques Pinet, Fi. Romme, Soulignac-St-Rome, Prunis. Doc Arch. - Diplôme encadré de l'exposition universelle de 76-84 ; 1889 pour les écoles de et de Brantôme. Vainqueurs de la Bastille : Monnote, Aumassip, Fi. Demarque-Duclaud, Duvigneau ou Duvignon, Larénie, Latour. Doc Arch. 85.

3°/ DOCUMENTATION 1 - Etude radiesthésique des souterrains de - Dossiers de documentation constitués dans Périgueux. [Don de M. de la Clergerie}. Doc notre centre sur divers personnages : Arnaut Arch. 86. Daniel, Beaumesnil, Léon Bloy, Cyprien Brard, - Transcription du terrtier de Sainte-Foy-La­ Chaminade, Albert Claveille, Crocé-Spinelli, Grande (1621). [Don de M. Vircoulon}. Doc Delprat, Jean-Baptiste Dezeimeris, Gustave Arch. 88. Eiffel , Emile Fontaine, Foucauld de Saint­ - Pages de titre de traités sur l'hydrophobie et Germain, Fournier-Sarlovèze, Mgr Grossolles de sur la physiologie par ].B.L. et G.L Taillefer Flamarens, La Boëtie, Labrousse de Beauregard, (1783, 1785). [Don de M. Gibert}. Doc Arch. Suzanne Lacorre, Tristan Lacroix, Lasteyrie du 89. Saillant, Eugène Le Roy, Pierre Masse, Paul Mounet, Louis Guilbert, Pasteur, Léo Testut, - Dossier des photocopies des documents de 1 - Série nouvelle constituée par les dons Louis Pimont, Maurice Loupias, Henri-Léon l'Exposition sur la Résistance, tenue à Sarlat en de documents sous forme de photocopie. Rapine, Charles Maurice de Talleyrand- 1994. [Don de M. Rouland}. Doc Arch. 90.

39 EXPOSITIONS / ANIMATIONS

Opération "sceau-vegarde" Les sceaux des Archives départemen­ tales de la Dordogne

jusqu'à nous. N'oublions pas, non plus, les méfaits de la Révolution et de ses suites (2). Le processus de destruction et de dispari­ tion continue, même si la situation s'est considé­ rablement améliorée. Les chiffres parlent d'eux­ mêmes; on estime que 20% des sceaux des Archives nationales ont disparu par rapport aux inventaires qui avaient été réalisés au XIXe siècle. Nous ne disposons pas, pour les collec- tions de la Dordogne de statistiques précises, mais il est admis que 0,5% seulement des sceaux ont traversé les siècles. Toutes ces considérations nous ont conduit à mettre en oeuvre les mesures néces­ saires à une meilleure connaissance de nos col­ lections et à leur sauvegarde.

• Sceau de Seguin Cordahu, seigneur de Cha­ De l'identification à l'inventaire lonha. 1274. Pas de charte sans 2 - DOUËT D'ARCQ sceau ni de sceau La première étape consistait à réaliser (L.-CI), Inventaires et sans charte ... docttments publiés par A.D. 24, J 677. l'inventaire de la totalité de notre fonds. Il fallait ordre de t Empereur JOUS Photo Denis Bor­ commencer par localiser les sceaux dans leurs la dit'ec/ion de M. le das. Comte de Laborde. fonds respectifs, et les en extraire. Cette "mise en Collection de sceaux, Depuis les travaux de Philippe de Paris, 3 vol., 1863- quarantaine", visant à préserver le sceau de tout 1868. Dans sa préface Bosredon et, plus particulièrement, la publica­ (t.l, p.17) Douët écrasement, était la première des mesures d'ur­ tion de la Sigillographie du Périgord (1), la d'Arcq, après avoir 1 - BOSREDON (ph. gence. rapporté les méfaits de) : connaissance des sceaux en Périgord n'a pas des destructions d'ar_ - Sigillographie du La réalisation de notices détaillées (des- chives ordonnées par Périgord, Périgueux, connu d'avancée décisive. Certains des sceaux cription physique du sceau, de son mode d'at­ le gouvernement révo­ 1880. lutionnaire de 1793, - Supplément à la sigillo­ qu'il avait examinés dans des collections privées tache au document, de sa légende, de son icono­ rapporte l'anecdote graphie dll Périgord, sont aujourd'hui déposés aux Archives départe­ suivante nLa pllts Périgueux, 1882. graphie) permettait de faire le point sur chaque considérable (partie des - Sigillographie dtt mentàles de la Dordogne; d'autres sont appa­ pal"chemins) lm SOIIS/raite Périgord, Brive, 1891, sceau en lui attribuant une sorte de carte d'iden­ par des mains avides 2e édition. rus, dont il n'avait pas eu connaissance. tité. (.. .). La pltlpart de ces - "Notes supplémen­ Bosredon, enfin, avait "limité" son travail aux parchemins étaient scellés; taires à la sigillogra­ Le répertoire qui en découle assoCIe la on vendit ces sceaux allx phie du Périgord'\ in sceaux périgourdins. ciriers, et j'ai connu, dans Bttlletin de la Société photo de chaque sceau (et contre-sceau éventuel) ma jellnesse, des amateurs Historiqm et Par ailleurs, la grande fragilité des sceaux qui, ayant remeilfi les et sa notice. Il est complété par un index des Archéologiqm dit et les agissements de certains collectionneurs pl1ls bea/Ix ail risque de Périgord, 1904, p. 72- noms de lieux et de personnes, par une table ico­ manquer de civisme J 75, 145-151, 203- indélicats ont concouru à en faire des objets avo1laient avoir brillé des 216, 293-307, 371- nographique, par des références bibliogra­ bougies rOllges, vertes et 382. rares, dont très peu d'exemplaires sont parvenus jaunes, produit net de ce l1 phiques et par un glossaire. Il constitue en lui- saccage •

40 élastomère de grande précision. Nous réalisions amSI: - une "sauvegarde" de l'original, - une possibilité de duplication de celui-ci et, donc, sa mise à disposition des chercheurs ou, même, sa diffusion commerciale (4), - la possibilité de créer des ateliers de moulage, associés à un travail pédagogique, à l'intention des établissements scolaires.

De l'image numérique à la communication au public

La communication au public des pièces originales, telle qu'elle était pratiquée jus­ qu'alors, n'était plus compatible avec les impé­ ratifs de conservation. La solution adoptée consistait à numériser tous les sceaux: ce traite­

• Revers du même une "mémoire" et un outil de recherche ment informatique de l'image, promis à un bel sceau, en plomb, du Grand Maître indispensable (3). avenir, a été réalisé par Laurent Caignard, info­ des Hospitaliers de Saint-Jean-de­ graphiste de Périgueux. Jérusalem et de De la restauration à la copie La numérisation permet, contrairement l'Ordre Militaire du Saint-Sépulcre. La "mémoire" du sceau étant garantie, la aux procédés photographiques classiques, de 1646. A.D. 24, 2 E "travailler" informatiquement chaque image, 1834/75-10. deuxième étape visait à préserver l'original et, Photo Denis Bordas. éventuellement, à en effectuer une copie. Les jusqu'à obtenir le meilleur résultat possible, sceaux périgourdins, dont on ne connaît, la plu­ L'association de chaque image à la notice part du temps, qu'une seule empreinte, étaient correspondante constitue une base de données les premiers concernés. consultable en salle de lecture. Un logiciel de La préservation de l'original passait par recherche documentaire permet d'effectuer une campagne de restauration, étalée sur deux toutes sortes d'interrogations thématiques et ans. Cette opération de haute technicité a été d'afficher, en temps réel, les sceaux correspon­ confiée à la société Ludimage, de Dun-sur­ dant à la demande. Le consultant peut, alors, Auron, agréée par les Archives nationales. Un visualiser le sceau avec un taux d'agrandisse­ "diagnostic" a été établi pour chaque sceau Les ment et une résolution garantissant la lecture de sceaux fragilisés ont été consolidés; les sceaux tous ses détails. La possibilité de procéder à un brisés ressoudés. Ces opérations sont effectuées tirage en couleur représente un autre grand essentiellement avec de la cire d'abeille, colorée avantage. suivant l'original, avec des colorants d'origine Le programme de recherche et de consul­ minérale, et une pointe chauffante. tation en salle de lecture est le fruit d'un travail La copie est rendue possible après la réali­ de coopération avec le Service Informatique du sation, directement sur l'original, d'un moule en Conseil général.

3 - Bernard REVIRIE­ Les sceaux des Archives départementales, Répartition chronologique: GO et François quelques chiffres : 27 sceaux pour le XIIIe siècle, 29 pour le BORDES, Catalogue des sceallx des Archives 114 sceaux. Un certain nombre présentant un XIVe, 10 pour le XVe (soit 66 pour le Moyen dépat"tementales de la 4 - Des moulages de Dordogne, Périgueux, contre-sceau, c'est-à-dire une seconde em­ Age). Les 48 autres couvrent donc, à part sceaux périgourdins, 1994 (120 pages, 170 en résine ou en étain, photos). Actuellement preinte au verso, ces 114 sceaux générent 169 égale, la période qui va du XVIe au XIXe sont en vente aux disponible en salle de images. siècle. Le plus ancien daté de 1237. Archives départemen­ lecture, ou à la vente, tales (voir page 15 de au prix de 100,00 F. ce numéro).

41 La numérisation permet donc de mémori­ salle permet une pré-orientation. Un catalogue ser, dans un espace très restreint, l'ensemble des des notices en braille est disponible dans la salle données concernant les sceaux, d'en traiter les d'exposition. Des moulages agrandis de sceaux images, de les restituer aux chercheurs. ont été réalisés afin que, par le toucher, les visi­ teurs puissent mieux comprendre la structure d'un sceau et les différents éléments qui le com­ posent. Quelques sceaux de cire et des bulles de plomb sont également disponibles en originaux pour cette connaissance par un contact direct.

• Vue sur l'exposition. Photo Denis Bor- Une exposition das. Cette opération de sauvegarde s'achève par une exposition dont le but est de faire admi­ rer, pour la première fois, des objets connus de tous, tant ils font partie de notre culture, mais • Explo­ rarement montrés. ration tactile des Résolument didactique et pédagogique, agrandissements de sceaux par des elle présente le sceau sous ses différentes formes non-voyants. et applications ; elle nous parle de sa raison Photo Alain Duver­ neuil. d'être, depuis son apparition jusqu'à son apogée au Moyen Age, et de sa quasi disparition. Objet chargé d'histoire, objet d'art, signe Rois, Comtes de Périgord, chevaliers ou de reconnaissance sociale et moyen de commu­ damoiseaux , abbayes ou villes, universités ou nication chargé de symboles, porteur d'une force loges maçonniques, papes ou ordres hospitaliers, de représentation qui nous touche, le sceau nous il n'est aucune catégorie sociale, corporation ou transporte au coeur de la vie du Moyen Age et communauté qui n'ait eu le sien. de l'homme qui en a pensé et élaboré l'image avec le plus grand soin. Les relations que nous avons établies de longue date avec le G.I.H.P (Groupement Bernard REVIRIEGO d'Insertion pour Handicapés Physiques) (5) et son président, M. Duverneuil, ont attiré notre attention sur la nécessité de concevoir cette exposition de façon à intégrer certains para­ mètres propres à en faciliter la visite à des non ou mal-voyants. Le travail en commun nous a conduit au choix de certaines couleurs et maté­ riaux pour les fonds de vitrine et à un lettrage légèrement agrandi pour les notices. Certaines L'exposition "Images de Cire" est ouver­ vitrines ont été conçues pour présenter un mini­ te jusqu'au 10 mars 95, du lundi au ven­ mum d'encombrement au sol. Une aide au che­ 5 - G.I.H.P. 2 cours dredi de 9 h à 12 h et de 14 h à 18 h. Fénelon, 24000 Péri­ minement a été réalisée. Une maquette de la gueux. 53.53.92.32.

42 _____ DE LJHERALDIQUE/ MUNICIPALE __

parlante, objets évoquant les activités de la ville, Dès les temps les plus anciens, lorsque monument caractéristique, etc. des conventions furent établies entre des D'autres cités empruntent à l'écu ou à la groupes d'hommes ou des communautés, les bannière de leur seigneur un meuble, une parti­ chefs apposèrent, en signe d'accord, leurs tion, dont elles ornent le champ de leur sceau. marques particulières au bas de ces traités. Pour Enfin, les combinaisons de plusieurs de ces élé­ une même communauté, ces marques étaient ments ne sont pas rares. différentes suivant les chefs, ce qui pouvait Les premiers sceaux véritablement ornés remettre en question l'accord conclu et être l'ob­ d'armoiries contenues dans un écu n'apparais­ jet de querelles. La communauté se choisissait sent que vers la fin du XIIème siècle. alors un signe, un dessin particulier qui la repré­ senterait, indépendamment de son chef Mais ce dessin pouvait varier avec le temps ou l'habileté de celui qui devait le tracer. REGISTRE Î ,,-,.0, Il fut alors gravé sur un support permettant de le reproduire avec une plus grande fidélité, éloi­ gnant ainsi toute contestation possible. La nature de ce dessin fut bien souvent la représentation stylisée d'un homme, d'un ani­ PAR ORDONNANCE RENDUB mal, d'une plante parfois, auquel la communau­ le 70~' du mois d·t" .J;·';i~~hde l'an 1,'1"., pAr té voulait s'identifier, en raison des qualités Mrs les CommiŒûres Généraux' du 1 Couleil qu'elle lui reconnaissait. déiS'utés fur le fait des Armoiries. Ces objets sur lesquels étaient gravées ces Celles de /~h~!k ,j" .IV!') /<7 c. figurines (sigillum en latin) et qui marquaient la naissance des premiers sceaux des communautés humaines, sont bien antérieurs à la naissance de l'héraldique proprement dite. 'lé/les qu'elles fin! ici feintes è3.figllrées, t1jJrès t1iJ1i,.~!é nCtlës, ont f!é enregtlrees J l'Armoria! Cènt!rc1! dtl/l.! l~ Ré­ Ce n'est qu'après 1070, à la suite de l'af­ g~ïr~ cotit l.riIIjC/~llè,etl co;!fétfllt?ncé' dt; !aytl/leitt et.~btJÙS franchissement des communes par Louis le Gros regles /,ar/es'7al'!lèrArrejl du COnjii/,du2o#deNowlllbr4. (l081 J 1l37), que l'usage des sceaux publics des de hm I(fj6. R11 foi de qutJi~ leIr~nt .Brévd a été dé/ivr; villes et des communes se généralisa. En Europe, A Paris par Nous CHARLES D'HOZIER, Conftiller le plus ancien sceau connu est celui de la ville de du ROI & Carde de l'Armoritl! Gènèrtl! de Franc! ,ère. Cologne, il date de 1149. En France, celui de Cambrai, date de 1185. Celui de Périgueux ~ remonte à 1204. Il représente une aigle, comme A l'origine il ne s'agit que des armes du • Brevet un souvenir, un rappel de l'ancien municipe seigneur, mais, dès 1230-1240, un grand d'armoiries de la romam. ville d'Issigeac. nombre de villes, et, parfois, des plus modestes, 1700. L'emploi des sceaux s'est progressivement Coll. Mairie d'Issi­ se dotent d'armoiries propres, soit en faisant geac. étendu aux communautés, aux institutions, aux entrer dans leur écu leur ancienne marque muni­ personnes morales. cipale ou leur figure sigillaire, soit en adoptant Au XIII' siècle, les sceaux des villes un emblème héraldique nouveau, allusif ou par­ deviennent nombreux dans toutes les régions de lant. l'Occident. Certains sont déjà armoriés, tandis En 1696, les villes et les bourgs possédant que d'autres portent des emblèmes non conte­ des armoiries furent tenus, ainsi que les particu- nus dans un écu : image du saint Patron, figure

43 liers, d'en faire la déclaration, suivant un édit armes d'une famille ayant vécu sur leur territoi­ promulgué par Louis XIV en novembre de la re. Si cette famille a encore des descendants, il même année. En échange de l'enregistrement de est nécessaire d'obtenir l'accord du "chef leurs armoiries et du paiement d'une taxe de d,armes "D'. autres communes peuvent f'aire plusieurs dizaines de livres, il leur était remis un oeuvre nouvelle par la création d'armes propres. brevet d'armoiries. Issigeac est la seule ville de la En voici deux exemples : Dordogne à avoir conservé son brevet. Le but de l'opération étant de récolter le Commune de Sainte-Aulaye plus d'argent possible, de nombreux bourgs et villes se virent attribuer d'office des armoiries, pour l'enregistrement desquelles ils durent acquitter la taxe prévue à cet effet. L'ouragan révolutionnaire qui détruisit la plupart des armoiries des particuliers n'épargna pas celles des communautés. Napoléon, par un décret du 17 mai 1809, autorisa les villes et les corps constitués à demander au Conseil du Sceau des titres et des armoiries. Les villes étaient réparties en trois • Armoiries classes. de Sainte-Aulaye. Création de Jean­ Les 38 villes, dont les maires avaient eu René Bousquet. Dessin de Jean­ l'honneur d'assister au couronnement de Louis Leclair. l'Empereur, étaient qualifiées de "bonnes villes" et avaient rang de duchesses. Elles constituèrent L'ancien maire de Sainte-Aulaye souhai­ les villes de première catégorie. Il leur fut attri­ tait évoquer, dans les armes de sa commune, la bué trois abeilles dans leurs armoiries. famille de Rohan-Chabot, dont l'ancien château Les villes de deuxième catégorie furent est devenu la mairie actuelle. M. Jocelyn de celles dont les maires avaient été nommés par Rohan, chef d'armes de la famille, a donné son l'Empereur. Elles avaient rang de comtesses. accord pour que les armes de sa famille figurent Celles dont les maires avaient été nommés dans celles de Sainte-Aulaye. Une bordure écar­ par les Préfets constituaient la troisième catégo­ telée aux mêmes couleurs constitua une brisure rie. Ces deux dernières furent dotées dans leurs et compléta le tout. armoiries d'un franc quartier chargé d'un N sur­ monté d'une étoile rayonnante, à dextre pour les unes, à senestre pour les autres. Commune de . Le Conseil du Sceau fut définitivement supprimé en 1872. Il existe, aujourd'hui, aux Archives nationales, une commission qui veille à ce que les armoiries nouvelles soient conformes à la règle héraldique. Dans plusieurs départements, dont la Dordogne, existe une commission départemen­ tale d'héraldique municipale qui aide les muni­ cipalités à réaliser leurs blasons en fonction de

divers éléments de l'histoire et de la géographie • Armoiries de leurs communes. de Prigonrieux. Création de Jean­ Cette commission a son siège aux René Bousquet. Dessin de Jean­ Archives départementales. Elle a déjà réalisé Louis Leclair. plusieurs projets d'armoiries. Comme par le passé, les communes peu­ Prigonrieux signifie en occitan: profond vent adopter, pour des raisons diverses, les ruisseau. Ce ruisseau est évoqué par un grand V.

44 La plaine fertile est représentée par la couleur sportifs, ventes d'autocollants, et pin's, etc. verte (sinople) et les branches légèrement cour­ Toutes les communes pour lesquelles des bées du V renforceront cette image de fertilité. armoiries ont été récemment créées, ont reçu un La municipalité souhaitait évoquer les moulins à brevet d'armoiries lors de la remise des prix des nefs sur la Dordogne, et le port, refuge pour les Clochers dor, au mois de janvier 1995. gabares en cas de fortes eaux. Deux anilles, ou croix de moulin, sont là pour rappeler les meules La commission départementale d'héral­ qui tournaient au fil de l'eau, sur des sortes de dique municipale se tient à la disposition de catamarans. L'ancre est le symbole des bâteaux toutes les municipalités qui souhaitent doter au port. Les côteaux boisés de "Peymilou" ne leur commune d'armoiries authentiques et per­ furent pas oubliés. Ils sont évoqués par une sonnalisées. "trangle" qui surmonte le chef. Jean-René BOUSQUET Ces armoiries caractérisent bien l'identité spécifique de chacune de ces communes. Chacun Bibliographie: voir les travaux de H. Gourdon de leurs habitants peut se reconnaître en elles. de Genouillac sur les armoiries, ceux de Philippe Elles les représentent aux cours de diverses de Bosredon sur la sigillographie et ceux de manifestations : félibrées, échanges de fanions Michel Pastoureau sur l'héraldique.

PAROLE DE LECTEUR _

Entrevue avec Louis Grillon.

Bernard Reviriego : La simple consultation des ce moment là). Je l'ai été beaucoup plus par fichiers de bibliothèques est éloquente quand à l'histoire du Moyen Age; quelques prix scolaires votre passion pour l'histoire et à l'ampleur de vos peuvent témoigner de ces préférences. recherches. Comment avez-vous pris goût à B.R.: Et par la suite? l'histoire? 1. G.: C'est surtout au cours des études supé­ Louis Grillon: Mon intérêt pour l'histoire date rieures que, ce qui était jusque-là un intérêt, est de mes plus jeunes années. Sans doute ai-je dû devenu une véritable passion. La préparation d'abord prendre goût aux histoires de l'histoire. d'une licence d'espagnol m'a permis d'aborder Je me souviens parfaitement, par exemple, de tel les civilisations précolombiennes, tandis que le ou tel roman historique dont le récit, adapté à certificat de langues et littératures occitanes m'a mon âge (la B.D. historique n'existait pas enco­ fait plonger davantage mes racines dans le ter­ re), a été dévoré par moi entre sept et douze ans. rOIr. Tout au long de mes études secondaires, ce goût a non seulement perduré mais s'est encore accru. B.R.: C'est pourtant le Moyen Age qui a retenu J'ai été de suite intéressé par le peu que l'on toute votre attention? enseignait alors sur les âges préhistoriques. Je l'ai 1.G.: Les circonstances m'avaient conduit à me été davantage par l'histoire ancienne : égyptien­ pencher sur l'histoire monastique et plus préci­ ne, sumérienne et romaine (non par la grecque à sément cistercienne. Sous la conduite et avec les

45 encouragements constants de mon maître, le professeur Ch. Higounet, j'ai été amené à tra­ vailler à la reconstitution du cartulaire de l'ab­ baye Notre-Dame de , à partir d'une dou­ zaine d'extraits plus ou moins importants d'éru­ dits du XVIIIe siècle. Ce travail a fait l'objet d'un Diplôme d'Etudes Supérieures d'histoire. Il s'est prolongé par une seconde étude sur la vie économique de cette abbaye aux XIIe et XIIIe

siècles, étude couronnée à son tour à la fois par • Louis Grillon lors d'une le Doctorat és-Lettres du 3e cycle et par le prix conférence. 1993. Imbart de la Tour. Coll. part. A la même époque, poussé par l'amitié de Jean Secret, j'ai étudié l'histoire des abbayes de B.R.: Avez-vous des projets de publication? Boschaud et de , ainsi que du prieuré L.G.: Parallèlement aux publications que Je de Saint-Jean-de-Cole. En tant que membre de viens de citer, j'avais engrangé des matériaux en la Société Historique et Archéologique du vue d'un Doctorat d'Etat sur le haut Moyen Age Périgord j'ai fait plusieurs communications, en Périgord que j'ai dû abandonner. J'avais aussi dont certaines ont pris place dans son Bulletin. amassé des renseignements sur les hôpitaux de B.R.: La fréquentation des vieilles chartes ne Périgueux et quantité d'autres sujets concernant vous a pas fait oublier l'homme : votre intérêt notre province. J'en ai actuellement repris le pour les biographies ou la généalogie en classement et l'étude. témoigne. Le Professeur Ch. Higounet m'avait obtenu des L.G.: Oui, j'ai participé pendant une dizaine bourses de participation à divers congrès histo­ d'années à l'édition d'I.B.N. (lisez Index riques en France ou à l'étranger ainsi qu'une aide Biobibliographicus Notorum Hominum) produit en du C.N.R.S. pour un travail aux Archives de Allemagne et dont j'ai assuré la partie médiéva­ Pau concernant le chartrier très abondant et le. Concurremment j'ai collaboré par la confec­ détaillé de la famille de Magnac, travail auquel je n'ai jamais pu ou su mettre la dernière main. tion d'articles à divers dictionnaires biogra­ phiques. Je continue d'ailleurs à en rédiger, en B.R.: Précisément, la publication est-elle, pour ce qui regarde le Périgord, pour le Dictionnaire vous, la conclusion naturelle d'un travail ou une de Biographie Française (1). pesante obligation? Dois-je signaler que j'ai entrepris la monogra­ phie d'un village de l' où j'ai eu une rési­ L.G.: Est-on jamais sûr d'être complet ? La dence et d'un village du Périgord cher à mon rédaction de notes érudites rigoureuses en bas coeur? Je travaille à une généalogie familiale de pages est minutieuse. On souhaite la perfec­ qui, si elle ne peut remonter au delà du XVIIe tion en ce domaine, l'obtient-on? siècle par défaut de documents, s'étale large­ B.R.: Y-a-t-il, à votre avis, un champ de ment dans l'espace du Périgord. Mes ancêtres recherche ouvert pour les médiévistes en ayant été, au moins depuis cette époque, meu­ Périgord, et, si oui, dans quelles directions? niers de père en fils, je suis amené à m'intéresser à la meunerie, aux petits moulins, non seule­ L.G.: En effet, et dans de multiples directions, ment à ceux possédés ou tenus par les miens, l'occupation du sol par exemple. Pour en revenir mais encore à tous ceux que je rencontre dans aux Archives des Pyrénées-Atlantiques, elles les documents que je consulte. contiennent l'histoire du , qui reste Puisque vous m'amenez sur ce terrain, je profite à écrire malgré le bon travail, pour son époque, de Ribault de Laugardière. Maints autres sujets 1 - Ouvrage collectif, de l'occasion pour dire combien, du temps de sous la direction de M. mes recherches place Hoche, les conseils et aides occuperaient de "grands" étudiants. Mais la Prevost, Roman désaffection du latin; et l'une de ses consé­ d'Amat et H. Tribout de Monsieur Becquart et de Mesdames Fangon de Morembert. Paris, quences, la difficulté d'accès aux textes médié- Librairie Let~uzey. et Faure m'ont été précieux.

46 vaux, laissent peu d'espoir, pour le moment du in Congrès interfédéral des Sociétés Savantes: moms. - Deux granges corréziennes de l'abbaye de Dalon, 1964. B.R.: On sent chez vous la jubilation du cher­ - Le couvent et l'église des Jacobins de cheur. Où prend-elle sa source ? Bergerac de 1260 à nos jours. L.G.: Peut-être dans le goût de la vérité. Mais, je in Mélanges Anselme Dimier : dois l'avouer, le chercheur trouve son plaisir en - Un abbé de Cadouin méconnu, Dom Pierre soi-même, qu'il s'agisse de quête du document, Mary (? - 1696). de "traque d'"u tresor, de poursUIte . d' une 1·d' ee. - Dom Louis Quinet, abbé de Barbery (1596- Sans doute est grande la joie de la trouvaille, 1665). in Bull. Soc. Hist. et Arch. du Périgord: mais elle est ponctuelle, fugitive, alors que le - T. LXXXII (1955) plaisir de la recherche est, pour le chercheur exi­ Les abbayes cisterciennes de la Dordogne dans geant, constant. les Statuts des chapitres généraux de l'ordre de Je crois même que j'ai communiqué mon "virus" Citeaux, p. 138-148 et 186-204. à quelques élèves, même s'ils ne se sont pas tou­ - T. LXXXIV (1957) jours distingués dans le Moyen Age ... La compagnie du Saint Sacrement à Périgueux, p. 14-22. B.R.: Estimez-vous que l'histoire soit l'objet L'abbé Th. Mallet et ses «généalogies», p. 52- d'une attention suffisante dans l'enseignement 58. actuel? - T. LXXXV (1958) L.G.: Je regrette qu'on ne fasse pas de l'histoire Un différend monastique, p. 65-67. une discipline privilégiée dans l'éducation. Au Un exemple de procédure ecclésiastique au XIVe siècle : l'annexion du prieuré du Mureau à l'ab­ delà d' "histoires" on doit y trouver matière à baye de Tourtoirac, p. 174-177. réflexion. Que veut dire ce mot? Justement un - T. 1. XXXVI (1959) retour sur soi-même (re-flexio) à partir Une dispense d'irrégularités canoniques ex defec­ d'exemples qui, s'ils ne se reproduisent pas à tu lenitatis christianae au XIVe siècle, p. 188-189. l'identique au cours des âges, p~ésentent tou­ - T. LXXXXVII (1960) jours des analogies fort instructives. Les rites ecclésiastiques de la séparation des lépreux en Périgord à la fin du XVe siècle, p. 187-190. - T. XCII (1965) PRINCIPAUX TRAVAUX ET ARTICLES: Un brantômais méconnu : frère Guillaume Aurelle, dominicain, p. 173-176. - Restitution du cartulaire de l'abbaye cistercienne - T. XCV (1968) N.D. de Dalon, diplôme d'études supérieure La légende de saint Frontaise de Périgueux, p. d'histoire, Bordeaux, 1962 (mémoire principal). 287-289. - Les prêtres Périgourdins exilés en Espagne sous la - T. XCVI (1969) Révolutio.n de 1789 (mémoire secondaire). Réflexions sur l'invention du corps de saint - Le domaine et la vie économique de l'abbaye cister­ Front en 1261, p. 90-93. cienne N.D. de Dalon, doctorat ès-lettres de 3e - T. XCVIII (1971) cycle, Bordeaux, 1965. Du traitement des loupes au XVIIIe siècle, p. 145. Essais: - T. XCIX (1972) - L'abbaye de Boschaud, édit. périgourdine, place Un registre des comptes de l'officialité diocésai­ Francheville, s.d. ne de Périgueux (1681-1728), p. 97-106. - Tourtoirac, l'abbaye, même édit., s.d. Documents sur la Coutume de Limeuil au XIVe - Saint-jean-de-Côle, le prieuré, même édit., siècle, p. 175-185. - T. C. (1973) 1958. Sur les pâtés du Périgord sous l'Ancien Régime, Articles: p. 136-137. in Annales du Midi: Conséquences de l'hiver 1708-1709 à - Le prieuré des Touches et l'exploitation du sel Périgueux, p. 59-60. par l'abbaye du Dalon, 1963. Le Pont de Quinsac, p. 277-285. - Le prieuré périgourdin de St-Cyprien fut-il Autres articles dans la Semaine Religieuse et dans rattaché à Moissac, 1963. le Bull. du Cercle de Généalogie et d'Histoire.

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