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Kistjoirçe Régionale

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par

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Conseiller à la. Cour b'2(pftt be Paris

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Epigraphes

L'histoire seule est la réalité, il n'y a d'autre logique, d'autre vérité que la sienne ; la nature humaine ne peut être connue en dehors d'elle.

Oswald Spengler.

D'âge en âge les êtres font la chaîne, on ne vit, on ne pense, qu'après avoir recueilli le long hé- ritage des siècles d'histoire. Estaunié.

Nous sommes les enfants de tout ce qui met en nous un principe de vie. Donc de la famille d'abord, et de la patrie nous sommes les en- fants. Em. Faguet.

Tous les siècles d'une nation sont les feuillets d'un même livre. E. Renan. Du même auteur

De la vente des biens de mineurs. L'action de la en Tunisie. Essai sur quelques réformes. La Justice Française en Algérie. Les Institutions et la Condition Sociale.

Poésies :

Sous un ciel Bleu. Rimes Nouvelles. Tlemcen. Stances Viriles. Angoisse et Vie.. Derniers Reflets. PRÉFACE

oint n'est besoin d'inspiration pour écrire une Histoire p locale, qui ne saurait être une fiction nuancée d'idées. Dans cette étude, simple agrégat d'observations, nous avons dé- veloppé sur des données substantielles, un thème auquel nous avons tenté d'attribuer une forme concrète. Nous nous sommes surtout attaché à traduire, sans dogmatisme, mais avec homo- généité, la biographie des personnages et le mouvement, au cours des années, d'une population, qui travaillait, qui souf- frait et se battait, sans avoir des lueurs de libération. Pour donner l'impression de la sincérité et plus qu'un reflet du passé, nous avons décrit les origines de la race, les domi- nations successives, le culte, la langue, les coutumes et les hos- tilités. Soucieux de cristalliser les réalités objectives, nous avons pénétré et commenté Tes convulsions, les trahisons et les destructions sanglantes, qui souillèrent nos annales, sans que l'on puisse accabler la mémoire de nos ancêtres. Dans l'état actuel de nos connaissances, il est prudent de prévoir des réfutations ; néanmoins les faits caractéristiques, attestés par des relations, lettres ou rapports de gens avertis, et confirmés par des témoignages mutuels, constituent des infor- . mations dignes de confiance, qui déterminent une conviction. Afin d'établir un plan, il nous a semblé primordial de fouil- ler à Paris, en province, ou en Belgique, les coutumiers, manus- crits, recueils, chartes, mémoires, traités, monographies et au- tres pièces probantes. Nous nous sommes intéressé à la recherche d'écrits révéla- teurs, sur les modalités de la vie intime des populations qui, depuis l'époque légendaire, après avoir évolué, se sont arrêtées et confondues sur cette terre, où reposent les dernières généra- tions qui nous ont légué des traditions du terroir. N'écrivant ni une œuvre d'imagination, ni une compilation, nous avons dû puiser des éléments contrôlés dans les bibliothèques natio- nales. Ainsi que pour tous les travaux historiques, nous avons em- prunté à des textes ,et noté, ce qui nous semblait idées origina- les, ou remarques judicieuses, sur le caractère des habitants et sur les transformations sociales. De la poussière des dossiers, nous avons essayé de dégager et de stabiliser ce qui s'avérait choses exactes, et non simples conjectures sur des impressions inquiètes. Cependant, avec le recul du temps, les façons de constater et d'apprécier ce qui semble être vérités, varient à l'infini. A défaut d'index bibliographique, comme références, nous ci- terons les précurseurs, car notre ville a déjà sa biographie locale : Les Annales d'Yvois du Chanoine Delahaut, publiées par l'abbé de Prémontrés Lecuy. Toutefois cet ouvrage date de 150 ans et ses auteurs ont surtout exposé la chronologie des faits et développé l'Histoire Ecclésiastique. Nous rendons hommage à ces devanciers ; de même au Père Norbert, à l'abbé Prégnon et au Capucin Fulgence, car ils ont rédigé leurs précieux manuscrits après avoir compulsé les parchemins justificatifs, qui existaient alors, dans les Prieu- rés et Monastères, mais que la Révolution a détruits ou dis- persés. Nous avons consulté les Chroniqueurs, restés attachés au pays d'origine, et dont les travaux sont une véritable éma- nation du culte qu'ils gardaient à notre petite ville. Nos principales sources ont été les ouvrages de MM. Bouil- let, Philippot, Hannedouche, Pelletier, Duvivier, Berthelet, Jean- tin, Goffinet, Hubert, Paul Collinet, Scheret-Pelletier, Meyrac, Delame, Dr. Masson, l'abbé Nicole, l'Oratorien Dom Lelong, Flodoard, Dom Calmet, Courtépé, Guillot, Tandel, Pierrot ; mais à notre regret, nous n'avons pu feuilleter les casiers du Baron Gourgeaut, conservés à Sedan ; toutefois nous avons consulté les publications de Paul Laurent, l'éminent archiviste qui a tout exploré de notre histoire Ardennaise. Nous oublions bien d'autres Annalistes, animés de l'esprit Régional, et dont les découvertes, du plus haut intérêt, ne pouvaient nous rester étrangères. Ce sont nos garants. Enfin, nous avons compulsé les archives départementales et nous avons exploité la serviable courtoisie du Conservateur M. Massiet du Biest, que son érudition de Chartiste autorise à guider, avec indulgence, les profanes. Là nous avons puisé des éclaircissements qui nous ont permis d'orienter et de canaliser des recherches un peu brèves. Avant que d'étoffer d'un commentaire des éléments parfois confus, nous avons dû les comparer, souvent les interpréter, sans fausser les évènements, ce qui nous a amené à négliger certaines versions qui ne résistent pas à l'esprit critique. Bien des récits populaires et des traditions diffuses, contien- nent, néanmoins, une dose de vérité dont on parvient à déga- ger des données irrécusables, par des observations confirmati- ves. Fallait-il nous en tenir, uniquement, à dresser un répertoire des faits, gestes, dates et récits, comme agglomérat fondamen- tal sur la continuité des guerres et sur leurs rapports avec les institutions, c'est-à-dire, relatif à la vie même des Comtes de Luxembourg et de Chiny ? Nous avons estimé qu'un tel exposé, dans l'aridité de sa concision, serait d'une lecture pénible et qu'il aurait l'incon- vénient de ne présenter qu'une suite d'annales fragmentaires ; nous nous sommes donc permis quelques échappées, aussi loin que le permettent les sciences géologiques et biologiques, précédant les évocations historiques, de manière à embrasser et à décrire, dans un cadre d'ensemble, la succession des dis- sensions intestines et leurs rapports avec l'engrenage social, tout en les faisant suivre de commentaires, suggérés par les événements qui frappent et constituent un héritage commun, doublé d'un enseignement. Nous rendant compte que cette étude ardue, comporte bien des lacunes, nous nous sommes demandé s'il est vraiment pos- sible d'être complet, quand on envisage des phases mémorables qui s'étendent de la Révolution jusqu'aux temps Héroïques ? Pour atteindre la clarté absolue, il nous manque la subtile sagacité qui fait discerner l'utile dans les travaux de tous les devanciers ; il nous faudrait encore connaître une bibliographie presque sans fin... Nous reculons devant cette énorme entre- prise, car nous aurions à vaincre le temps, alors que l'avenir ne nous appartient plus. Nous nous sommes inspiré de l'étude de maints dossiers, sans savoir peut-être, résorber certains développements fasti- dieux d'événements périmés ! Dans cette suite d'exposés, nous n'avons pas présenté une véritable trame de faits se succédant, soudés rigoureusement, par ordre de dates, avec une liaison étroite ; ce ne sont que des monographies d'époques. Il faudrait une singulière facilité d'assimilation, doublée d'une forme pénétrante, pour échap- per aux erreurs ; aussi avec une accomodante béatitude, nous sommes résigné à subir l'anathème des Mandarins, cette habi- tuelle rançon des ouvrages profanes, sans beauté grammati- cale. Bien des textes, nébuleux ou complexes, ne donnent qu'une compréhension imprécise ; partant, ?ans recourir à l'intuition, il convenait de les associer pour dissiper ce qui voile les origines vingt fois centenaires de Carignan. Il nous fût même prudent d'éliminer les légendes qui s'im- posent à l'esprit, mais qui s'écroulent devant les réalités, car si elles gardent ce charme indicible des vieilles choses, ce ne sont que des souvenirs émouvants. Pour parvenir d'abord à scruter, puis à fixer ce qui se cache, rien ne vaut, évidemment, une analyse et une révision inté- grale des textes, afin de suppléer à leur insuffisance ; mais cette méthode scientifique, reste le domaine de quelques Patriciens des Lettres ; elle échappe à notre compétence. Préoccupé d'atteindre tous apaisements, nous avons groupé des faits isolés, mais concordants ; rapprochés ils nous ont li- vré bien des secrets des temps lointains ; ils ont ressuscité, en quelque sorte, une époque assoupie, et fait surgir d'une am- biance troublante, des êtres, des attitudes, des analogies qui offrent des garanties de parenté et dégagent le curriculum so- cial, et l'activité féconde d'une ville frontière, par la peinture de l'esprit national actuel, comparé avec l'état originel dont il est sorti. Notant des épisodes, en corrélation étroite avec des traits pittoresques, sans trop subir l'empreinte d'une conception per- sonnelle ,toujours fragile, nous croyons avoir mieux élucidé les circonstances, autant que l'existence inquiète et douloureuse de nos ancêtres, à travers des stades de violences et d'arbitraire. Notre narration, pour rester fidèle, ne devait pas se borner à célébrer les vertus guerrières, la naissance ou la mort des Princes... Nous nous sommes attaché aux personnages mar- quants comme aux faits considérables. Loin de voir, unique- ment, dans la société, l'Aristocratie, nous avons décrit l'orga- nisation de la masse des hommes et des classes obscures dont la psychologie ne doit pas être méconnue. Par une sorte d'examen clinique de l'âme d'une race, c'est l'histoire économique et so- ciale des siècles disparus, que nous prétendons esquisser. Sou- vent, on a négligé la vie intérieure, les causes de bien être et les épreuves du peuple. Les auteurs ont toujours été portés à explorer les manifestations extérieures de la force et les actes valeureux ; mais, suivre par étapes, la situation matérielle et la condition des classes rurales, ou des artisans, présente un autre intérêt que les succès, ou les défaites d'un grand Sei- gneur. Nous avons éclairé notre sujet de quelques digressions, où paraissent les caractères, les passions, les préjugés, et l'état d'esprit du vulgaire. L'idée dominante qui a présidé à l'élabo- ration de notre travail, fut d'observer, de noter et de réfléchir ; puis d'édifier notre rédaction, en cantonnant dans le sillage des » années vécues, ies particularités des diverses époques. Toutefois, nous avons dû restreindre ou souvent effleurer, les questions non entièrement élucidées qui divisent les Augu- res. Notre dessein a été de mettre en relief, un relevé des tradi- . tions, conservées au milieu des agitations et des troubles. Ce mémorial, simple écho des temps passés, constitue un registre intime des actes, des intérêts, des monuments comme des as- pects immuables des lieux, associés Ù la vie des habitants ; enfin de tout ce qui forme continuité, et, dans notre pensée intime, survit des générations successives, constituant un lien d'union, et un témoignage de notre attachement, à ces mille riens qui ont enchanté notre enfance. Nous avons voulu pénétrer le développement de la condition; et les destinées des gens d'Yvois, petite Patrie à laqùelle nous devons les impressions captivantes d'une adolescence insou- ciante ; petite Cité des « voix chères qui ne sont plus ». En vérité, la génération nouvelle, sans renoncer à ses rêves d'action et de réalités massives, pourrait avec nous, faire révi- vre cette humanité qui nous a précédés en . S'orienter vers l'his.wire des foyers d'activité localisés, n'est pas incompatible avec ce qui caractérise l'esprit moderne, porté à devancer l'avenir. Trop peu nombreux sont les hommes ayant, même au ralenti, le souci de leurs origines et le goût de ce qui symbolise l'objec- tivité du passé. Nous avons encadré notre thème de remarques suggestives, qui ponctuent le sens des actions, et conditionnent les servitudes ou les tares des régimes successifs, dans l'ordre des études historiques. Notre méthode d'analyse nous a fait décanter de l'évolution contemporaine, nos propres impressions, à l'aide d'un défilé de fresques mémorables, destinées a projeter un peu d'enthousias- me 'dans notre vie terre à terre. Il ne nous sera pas fait grief d'avoir cru opportun d'élargir, pour les Folkloristes, les hori- zons de la pensée. Un échange de sentiments, demeurés latents et confus, se manifeste à l'automne de la vie, même chez les indifférents, par une sorte de reflexe moral et une fraternité qui font associer à nos conceptions, comme à nos sympathies, ceux qui ont connu, avec nous, les débuts d'une même communauté d'existence, dans une même petite ville, encore imprégnée des premières tendresses. A l'âge des souvenirs, ayant conscience que la vie s'échap- pe, avant de nous endormir, avec sénérité, dans la cendre de l'oubli, nous avons pensé que notre tâche serait accomplie, en apportant une simple contribution à l'histoire générale des Ardennes, qui tentera, sans doute, quelque jour, un véritable érudit. Etymologie. - La Ville. - Traits d'ensemble

1 y a près de cent ans le Président Jeantin écrivait : « amants 1 des vieux souvenirs, -pèlerins des horizons lointains, allez ri Carignan, ville qui présente des titres de noblesse vingt fois séculaires )J,

A l'heure où le crépuscule estompe les hauteurs de Vaux ; quand les marronniers centenaires, comme leurs frères de Bla. gny, sculptent et profilent dans l'ombre, leurs contours touffus, de doyens, au tronc mordu par le vent, Carignan que la diver- sité de son paysage rend plus séduisant, le voici : La rivière, striée de reflets métalliques, rampe sur un fond de cultures, cernées d'arbres, le long du parc ; ses méandres, ayant formé plusieurs ilôts dans le faubourg, elle s'étend sous le pont Alix, tandis qu'une dérivation des eaux, retenues par les écluses, se déverse jusqu'aux usines, aux abords de l'ancienne muraille d'enceinte qu'elles ne baignent plus. De la croupe des coteaux de Mouzon, depuis les bois de Blanc-Champagne jusqu'au sommet de Baïbel, la route suivant une descente rapide et sinueuse, conduit vers le pont Sept, en- cadré de prairies en bordure, qui s'étendent, fertilisées et noyées de brume, parmi les saules. Précédant la ligne ondulée des collines, et enchâssées dans les replis de terrains, émergent de divers côtés : Tétaigne, le Vieux Castel de Lombut, et Malandry, les quatre filles d'Yvois. Les courbes de la route longent la rivière et fuient dans la vallée. Au delà de cette vaste étendue des premiers plans, tout au bas et sur les flancs plantureux du Montilleul, qui commande la ville de son dôme boisé, le groupement des maisons étagées escalade la montée et s'harmonise avec les toits d'un bleu ver- dâtre... puis encore vers l'horizon du nord, l'impression se poursuit, le regard se promène, à travers le site, et nous trans- porte sur la courbe des ondulations de la frontière, dont la perspective reposante s'aligne, s'élargit et se perd, aux confins de la bande frangée des forêts, voilées dans les profondeurs du lointain. Comment, par qui, notre ville fût-elle édifiée sur les bords de la Chierre ? Quels éléments de population s'y installèrent ? Nous n'avons pas, sur les débuts, la ressource des textes et nous ne saurions nous appuyer sur des présomptions. Par ail- leurs, il ne s'est pas perpétué de traditions orales, pouvant di- vulguer quelques évènements de cette période obscure, et sus- ceptibles de constituer un ensemble historique. Dans ses transformations successives, depuis les temps fabu- leux, notre ville, fort ancienne, connut des appellations diverses que nous ne saurions négliger dans une étude de Carignan Les dénominations multiples révèlent sa grande antiquité, sdh origine ayant précédé l'occupafion Romaine. De nombreuses controverses sur la genèse et les altérations à travers les âges, du nom d'Yvois, (peut-être dérivé d'un mot Celtique) ont tenté les étimologistes. Pour ne pas sortir de notre domaine, nous nous gardons d'improviser (en invoquant la philologie) une étude destinée à aboutir à une déduction tendancieuse. Il nous suffit de retenir en fait, l'existence d'une agglomé- ration à l'époque Gauloise, connue sous l'appellation d'ipsch, ou Eibus, d'après des documents Tudesques, avérés probants ; nom qui, au surplus, a été cité 44 ans avant le Christ. Ce poste retranché, était alors une simple station de protec- tiop, à la lisière des monts Ardennais. Peu de villes connurent une telle variété de noms. Avec les Gallo-Romains, sur l'itinéraire dressé sous les aus- pices d'Antonin, elle est dite : Epoissom — Epossio — et Sépois- sum. D'après une notice de l'Empire, c'est Epusum, colonie mi- litaire des Loeti, au croisement des voies. 9 Au temps de Charlemagne et par Grégoire de Tours, elle est dénommée Yvosium — ou Eposium Castruim (après 585). Suivant un manuscrit de Munich : Bibliographie sur Saint- Géry, elle était appelée Ebosium. L'Evêque de Trêves Lupus, dans la vie de Saint-Maximin, la désigne : Evoivium. Elle était connue, aux termes d'une Charte d'Otton (974) com- me étant Evotium Un diplôme de donation à l'Abbaye de Mouzon, par Henry l'Oiseleur, daté de 1026, cite : Evodium ^ Suivant plusieurs auteurs anciens, le nom se présente avec diverses formes. Au XIe siècle, Robert, archevêque de Trèves, écrivait Evotium et l'abbé de Gembloux, Ivosium Dans une chronique du monastère de Mouzon on lit : Ino- dium ; puis c'est Evusium, dans une vie de Saint-Géry par Bal- déric au Xe siècle. Les annales de Trèves portent Epulense Castrum ; un autre manuscrit relate : Epusio, La Charte de Hillin (1153) et la Charte du Comte de Chiny adoptent Ivodium qui a prévalu avec la variante : Ivosium. Au moyen âge apparaît l'orthographe Yvoix, Yvois. Yvois n'a donc été qu'une altération du dernier Yvosium. Cependant au XVIe siècle, Messire de la Marche, en -ses mé- moires (1560) désigne la ville d'Yvis. Les Ardennes accidentées, couvertes d'une végétation touf- fue, dont Polybe et Dio-Cassius parlent comme d'une zône fabu- ieuse, de même que J. Al'moriquc — peuplée de Bretons, frères des Gaëls d'Irlande — gardaient leurs traditions Celtiques, qui ne furent altérées qu'après bien des siècles. Les conquérants dédaignèrent d'abord ces Gaulois, groupés par clans, qui continuaient à parler la langue Celtique, comme les peuples Germains (au dire de Tacite), dont ils subissaient les débordements périodiques. • Epossum, position de défense (Oppidum), sur le chemin le plus fréquenté de la province de Belgique-Première, à la sortie de l'immense forêt, au passage d'un gué sur la Chierre, vit circuler les armées Romaines, les invasions, les chefs civils ou militaires et le Clergé, venu pour convertir les Tréviri après les Rémi. Elle réunissait les deux grandes Métropoles de Trèves et de Reims, cette première piste importante de la Gaule, qui figure sur l'itinéraire d'Antonin, l'an 138 du Christ. On la retrouve sur la carte de Peutinger, table Théodorienne dressée au IVe siècle : Evodium ou Eposio s'y trouve mentionné. Par Louis XIV, érigée en Duché, l'an 1662, en faveur d'Eu- gène Maurice de Savoie, Comte de Soissons et Prince de Cari. gnan, la ville prit ce nom qu'elle a définitivement garde. Le Carignan d'Italie est une importante ville de la Province de Turin. Elleudevint l'apanage de Thomas de Savoie, d'Esté, de Modène. Fait Prince de Carignan, il entra, d'abord, au ser- vice de l'Espagne, puis il s'allia à la France et fut nommé, par Louis XIII, Lieutenant Généralissime des armées. Il mourut en 1656. De la branche cadette est issue la Maison Royale régnante d'Italie. Son plus jeune fils fût Eugène Maurice de Savoie - Carignan, Comte de Soissons, père du Prince Eugène, devenu l'ennemi implacable de Louis XIV. Eugène Maurice avait épousé, en 1657, Olympe Mancini, nièce de Mazarin, et il s'était établi en France, après le traité des Pyrénées de 1659. C'est lui qui avait décidé, sur l'emplacement actuel, la cons- truction d'un château dont on édifia seulement les deux ailes.

Epoisum ou Evosium (Yvois) près de Mozomum (Mouzon) dont parlent quelques auteurs, ainsi que le Pagus (Canton), Evodiensis, dépendaient du pays des Tréviri. Le gué de la Chierre était protégé par une redoute, avec camp retranché, occupé par la légion des Laeti-Asti. Choisi par les Romains, 50 ans avant notre ère, ce poste ne fût vraiment for- tifié qu'au bout d'un siècle. La Citadelle (lieu dit Tripotrix) était devenue importante, comme des murs de substruction fort épais l'ont révélé. Une pierre de taille, découverte en 171D, dans la cave d'une maison bourgeoise, comprise dans l'enceinte et sur l'alignement du 2e bastion, qui subsiste entre les immeubles Launois et Lu- cien Collin, rappelle le séjour de la Xe légion. X DVX ROMANORUM

La Cité, malgré plusieurs incursions barbares, était encore sous la domination Latine, au début du Ve siècle, après la dé- faite des légions par le Chef des Francs Clovis (486). Au temps de Saint-Maximin (IVe siècle) la population était devenue Chré- tienne. Il est à noter que l'emplacement de la ville, autrefois, englobait le plateau nord, en dehors des vieilles murailles qui s'effondrent, chargées de souvenirs historiques. Le Castrurn comportait un retranchement d'où les soldats pouvaient veiller à la garde de la voie de Reims à Trèves, par Arlon, d'après l'itinéraire dressé 138 ans après le Christ. Cette position de défense (Prefectus Laetorum Astorum Epuso) dé- pendait de la Belgica-Prima. Sous Dioclétien et sous Maximi- lien, un Préfet, qualifié Duc, gouvernait la place et le territoire. Eumène le signale. Deux mots Celtiques : AR-HAR ou ARD signifient, comme le mot DVN, élévation, colline, hauteur. Le substantif DEAN — DEEN ou VEN (l'U et le V sont em- ployés indifféremment) signifie forêt, dont on tire ARDUEN. Dans le pays de Galles et au Nord de l'Ecosse, où cette lan- gue est encore parlée, les bois se nommeraient Adenn ? Le Paladin Ogier (originaire d'Ardennes) est appelé par les Chroniqueurs, l'Ardennois. La Diane, sœur d'Apollon, Déesse des bois, pour les Gallo- Romains, était Deanae Arduinae. Le nom des cours d'eau se perpétue à travers les àges ; en ce qui concerne notre rivière Chierre on relève dans le manus- crit d'Adalgisile — 634 (le plus ancien connu), que cette rivière était appelée Charus ou flumen Chirfus. En 871 au Concile de , elle fût nommée Charis. D'après l'historien Flodoard, en 947, Chara ou Charum. Le noète For- tunatus, au VIe siècle, l'écrit Charus. Dans les annales de Trê- ves, c'est Charès et Cherreus. Donc à l'origine Kar, Cara, Cha- re, Cirfus, Cherre, Chierre, puis enfin Chiers. Sous Louis XIII on a écrit Cher. Cette rivière, entre en France par la vallée de Longw-y, jus- qu'à Longuyon d'où elle descend vers Montmédy. Après avoir contourné la colline de Saint-Walfroi, elle atteint les prairies qui terminent les pentes du Montilleul. Sous la monarchie, la frontière suivait précisément le cours de la Chierre, depuis le Luxembourg jusqu'à l'ancien domaine des Carlovingiens : Douzy. C'est au sommet du Nieder-Korn que ce cours d'eau prend sa source, Il est grossi par la Marche, sortie des taillis de Mer- lanvaux, près d'Orval ; il forme la ligne de partage des eaux de la Moselle et de la Meuse ; après avoir baigné Yvois et parcouru 150 kilomètres, il se jette dans la Meuse. La Semois qui sort des terrains schisteux d'Arlon, s'écoule vers Chiny, passe à Florenville (Villa Florent), puis à Bouillon et va se perdre dans la Meuse à Monthermé. Par son histoire, comme par sa nature, le territoire d'Yvois appartient aux Ardennes, dont l'immense forêt s'étendait du pays des Nerviens (Hainaut) jusqu'à la Moselle. Sans approfondir la faune et la flore, rappelons que les essences forestières y sont multiples : ormes, bouleaux, trem- bles, sapins, noyers, tilleuls se rencontrent ; mais chênes et hê- tres demeurent les Rois de cette forêt où ils atteignent une taille impressionnante. et Vaux conservent encore quelques beaux marron- niers trois fois centenaires. Il est vrai que les bois de haute fu- taie sont dépeuplés ; il n'existe plus que de rares types de ces chênes vigoureux, tant réputés. On rencontre, toujours abon- dants, des sangliers, des chevreuils et de rares cerfs. La chaîne des coteaux forme un rideau boisé qui s'étend au delà de Sedan et de ; elle porte comme principales désignations : Forêt d'Anlier, de Rulles, de Suxy, de Chiny, de Ste Cécile, de Muno, des Amerois, d'Orval. La Semois, après avoir traversé les bois de Ste Cécile, avec mille détours, au pied des rochers schisteux, va se jeter dans la Meuse. Toujours station militaire jusqu'au Xe siècle, devenueYvois, Seigneurie Féodale, appartint à l'Archevêque de Trèves en 955, puis aux Comtes de Chiny qui cédèrent la ville et les dépen- dances de ce fief patrimonial, aux Ducs de Luxembourg. Au XVe siècle, Yvois était passée sous la souveraineté des Ducs de Bourgogne. A la mort de Charles le Téméraire, elle de- vint fief de la Maison d'Autriche. Pendant les rivalités de François Ier et de Charles Quint, la ville fut plusieurs fois assiégée, prise et reprise. A Yvoix, comme à'Mouzon et DOllzy, se tinrent plusieurs Conciles. Dans des conférences Royales, on agita le sort des ha- bitants de la contrée, qui ne sortit de la barbarie qu'avec la prédication chrétienne. Dans cette zône dominèrent les grands Feudataires : Comtes d'Ardennes, de Bouillon, de Chiny, de Luxembourg. En 1559, le traité de Cateau Cambrésis attribua à l'Espagne la ville d' Yvois qui fût démantelée. Il existe encore des souter- rains voûtés, non loin du relais Quarème et près du fossé de l'ancienne porte. Ils permettaient une retraite dans la campa- gne, en cas de siège. Le Comte de Soissons, l'an 1635, après avoir infligé une vé- ritable déroute aux troupes Impériales, fit rétablir les fortifica- tions par des ouvrages importants, avec terrasses, demi-lunes, bastions et contre-escarpes. Il subsiste quelques-unes des case- mates qui se trouvaient derrière les murailles. Le Gouverneur Espagnol d'alors, était le Comte Quarème qui donna son nom à une butte du rempart nord. Deux ans plus tard, autre siège ; la place, après une vive résistance' fut prise. La ville avait, paraît-il, facilité le retour des Espagnols ? Aussi le Maréchal de Châtillon l'attaqua de nouveau, l'emporta d'assaut, et fit tout abattre, sous les yeux de Louis XIII. L'Eglise même fût, en partie, détruite a coupa de canon. Par deux fois, en 1636, les Français avaient occupé la ville. ' C'est seulement par le Traité des Pyrénées qu'elle fût, irrévo- cablement, acquise à la France. En 1681, sur de nouveaux plans de Vauban, Louis XIV fit relever les remparts ; il accorda des privilèges aux habitants de la ville de Carignan, dont il fit don au Prince Eugène Mau- rice de Savoie-Carignan. Sur les anciennes fondations et dans le style Médiéval, en 1661, Notre-Dame avait été reconstruite. Une cloche, bénite en 1663, portait en inscription les noms de ses parrain et marraine. Les trois cloches, de bon accord et de bonne harmonie, épargnées en 1870, furent volées et fon- dues, au cours de la dernière guerre. Le Domaine d'Yvois, convoité par les Princes voisins, avait été maintes fois envahi ; mises à sac et destructions, s'étaient succédées entre ceux qui se disputaient la suzeraineté. En der- nier lieu, elle passa à la Maison d'Orléans. La forteresse d'origine avait eu titre de Cité, parce qu'elle tirait son importance de sa situation de camp retranché, sur la chaussée Romaine, et près du gué de la Chierre ; elle eût plus tard un grand rôle comme poste frontière. Nos ancêtres, au cours des siècles, ne connurent guère la vie tranquille. L'industrie des drapiers dans la ville, les travaux des champs, l'élevage dans la prairie, les coupes dans les fo- • rêts, étaient fréquemment interrompus par des rivalités san- glantes, entre Châtelains relevant de diverses suzerainetés. La lourde charge des iconstructions d'ouvrages fortifiés, les multi- ples servitudes, imposées par les Seigneurs, ne permettaient pas de jouir d'un état prospère ; la menace de pillages restait la hantise des habitants, aussi malheureux, sous la Royauté que sous le régime Féodal ! La partie centrale du Château d'Orléans-Penthièyre, com- mencée en 1682, nè fût pas achevée, on s'en tint à deux pavil- lons. Les constructions devaient occuper l'emplacement du castel féodal, flanqué de tours, détruit au XVe siècle. L'enceinte des fortifications était percée de quatre portes : là plus importante, dite de Saint-Georges, puis de Bourgogne, par laquelle on allait chez les sujets du Roy d'Espagne, subsis- tait encore il y a trente ans. La porte basse, détruite après la Révolution, se nommait porte 'de France. Au moyen àge, l'entretien des leurs était à la charge des Seigneurs-vassaux, propriétaires des manoirs, dits filles et pe- tites-filles d'Yvois. Pendant près de dix siècles, Yvois fût une forteresse i-é-i)L) tée. Les remparts actuels, délabrés, ne peuvent donner une idée de l'enceinte primitive, dont les ouvrages englobaient une su- perficie considérable, que des jardins occupent en partie. Sous Louis XIV, la ville rasée, avait été entourée d'un sim pie retranchement ou remblai, dont les habitants s'étaient peu à peu emparés ; ensuite on l'encercla d'un mur crénelé, flanqué dans son pourtour de dix bastions, mais les particuliers au bout de quelques années, avaient occupé les fossés jusqu'au pied des remparts. Le moulin banal et le four appartenaient au Seigneur, ce four banal pouvait cuire 5.000 rations militaires et le moulin, en 24 heures, devait produire 50 sacs. Chacun était tenu d'y faire moudre son grain et cuire son pain. Les moulins sont toujours au même emplacement sur le Ca- nal. A l'extrémité du faubourg, le pont sur la Chierre est appelé Calice, par une déformation du nom Alix. Il a été soutenu que le véritable nom était Pont aux lices (les jeux et tournois se déroulaient dans la plaine voisine) ainsi qu'il résulterait d'un compte de la Prévôté, daté de 1628 « Payé à Pierre Herbin, pour transport au bout de la Chaulcey proche du Pont (lUX lices,.. » Nous pensons que l'argument tiré de cette unique pièce, ne saurait prévaloir contre l'autorité qui s'attache aux nombreuses Chartes officielles, où figure l'orthographe : Pont Alix.

L'idiome dit Pays où l'on est né, demeure dans le cœur et dans l'esprit, comme dans la langue. LA ROCHEFOUCAULT.

Le langage populaire des Ardennes, vallées de la Meuse, de la Chierre et de la Semoy, subsiste dans bien des villages, c'est avec des modalités, une survivance du dialecte Wallon, usité au Moyen Age, dans la partie nord de l'Ancienne Gaule Ro- maine. Sans doute les déplacements, de nos jours facilités, tendent à faire disparaître des campagnes cet idiome qui subsiste en- core. chez les anciens, avec des termes variables, suivant le canton. Rares sont ceux qui, n'ayant pas quitté le pays, gar- dent la tradition du parler Wallon. Ce qui subsiste plus ou moins marqué, bien que toujours nostalgique, même dans les villes, c'est l'accent de terroir, le ton chantant et trainard, l'emploi de l'U pour l'O. A celà, ceux qui ont été initiés dès leur enfance, ne se trompent jamais, pour reconnaître un compa- triote. La plupart des mots, dans les campagnes, ne varient que par la prononciation, ils reproduisent le terme Français équi- , valent, après une légère corruption, par exemple : NIN. pour NON, MIE pour PAS, DON pour DU, etc. A la vérité, le Wallon moderne n'est qu'un. Roman rustique, ayant fait des emprunts aux langues Gauloises et Romaines, comme à la langue mater- nelle des Francs. C'est dans le patois qu'on retrouve l'idiome primitif, dont il n'est qu'une dégénérescence. Le parler paysan de nos contrées, ;conseive certaines racines d'origine Celtique. Le radical per- -siste dans les noms des lieux. Dans les vieilles Chartes et sur quelques inscriptions tumu- laires, on peut reconnaître des types de la langue originelle, jargon, fait de Gallo-Celte et de Latin, qui se maintint plus ou moins altéré, au milieu d'un amalgame d'idiomes, pour abou- tir à l'alliage Roman, puis à un Français qui s'est dégagé, d'âge en âge, épuré. Ce dialecte, de langue d'Oil, sans littéra- ture, est d'un simple usage oral. Nous ne savions traduire le ton, ni la façon de prononcer -contre les dents, les ..Ièvres rapprochées ; Ei.us-si nous semble-t-il difficile de fixer un récit par L'écriture. Quoiqu'il en soit, nous avons pensé que rien n'était plus sug- jgestif que le patois, aussi, nos efforts conjugués et quelques sondages dans nos réminiscences, à défaut, d'un glossaire de .locutions, nous ont amené à improviser une composition bur- lesque en langage vulgaire, encore compris dans la région, bien qu'il tende à disparaître. L'orthographe fantàisiste adoptée, a pour objet d'articuler l'accent, avec sa couleur et son intona- tion locales, ayant leur cachet d'originalité. 1Vouaite d'un l'vérat y l'es cô touci pourtin... taisaive lu « Vla qui bauque pa d'zou ; si fait, Vsaibin, com, l'aut jou -qui passot. <( J'en vauro pon qui vin marner cheu nou. « M'nafan pa d'ou qu'valez ?... à la robine ? t'vin cri t'Pâ- cach ? « Nun ten voi goute, d< nnai ve en miette edpin? ave d'liau, dal siau ? « A ouet m'fieu t'peu ten raller, pa dlé majon d'ton p'pa, Jauro bin, j'avan pu rin, toucy. u J'en saro mi, jàmarone qui disot, vavez don péchun ,.a min- gé, dé cabus, dé crétuns, dé canadas, dé blosses et pi du chnick j)ou tertous, t'voi bin in vla co... oh catou. u A'steur j'y dis, t'en naro pon, této moult malin, t'vouro l'poulicher... c'est d'!a caboulé et pi dé ralach.. t'en van pon l'cord pout pinde... Ben là, y l'avo les yeu pu grin que l'pinse... et pi non dézot pisqui n'éto my vouiHe,' ftu l'y ai foutu eune berlaf, pa d'zu l'marchi... c'étot l'dr'in,ttel. « Suilà pou zavoir en raouette y dépiotro in pou, savève. La vie locale des cités comme Yvois, se développait, sui- vant que le milieu était hostile, ou favorable ; elle fut l'œuvre génératrice des individus, comme aussi de la nature. Carignan, petite bourgade assoupie sur la rive d'un cours d'eau, où campèrent les légions Romaines, proche des bois qui, vers le nord, se superposent au flanc des collines, fournit bien des matériaux de rédaction, pour un travail d'ensemble métho- dique et documentaire. Cette Prévôté de l'antique : « Ager Eposiensis », n'ayant plus que les écroulements de ses bastions et deux ailes dénatu- rées du Château, conçu par le Duc de Savoie-Carignan, et d'une construction ébauchée par le Duc de Penthièvre, sans le moindre vestige de l'ancien Prieuré, demeure néanmoins, ville historique. De la Seigneurie, de la Collégiale, du Donjon moyen âge, rien. n'est resté, pas même la porte de Bourgogne, dressée par Vauban. Yvois, ayant aussi perdu son nom d'origine, est une agglo- mération de chef-lieu qui, sous les Comtes cle Chiny, avec les Ducs de Luxembourg, sous la maison de Bourgogne, au temps des Valois et des Bourbons; a subi les pires destructions, après avoir souffert de tous les conflits entre Grands. Ce que nous remarquons sur les plans vétustés, ces monu- ments, épaves de choses bàties, mais disparues au cours des sièges sans merci, ces ultimes vestiges de temps subversifs, mais héroïques, s'effondrent. Ce qui nous ouvrait les secrets d'un autre âge, ce langage des ruines n'existe plus, et cependant le passé garde, sur cha- cun de nous, son emprise. Un sentiment de mélancolie, se dégage des bastions et des pans de remparts qui s'effritent, habillés de racines et de feuil- lage parasite. Des briques, des corniches rongées, sont toujours des témoins muets qui entretiennent la mémoire d'une suite d'Autocrates féodaux. A peine peut-on suivre un sentier, ménagé dans les fossés, que dominent de rares bastions et remparts croulants, qui enserrent, étroitement, le vieux bourg. Ces ouvrages militaires cependant ne remontent pas au-delà du XVIIe siècle. On ne ren- contre aucune trace de ces édifices Gothiques ou Renaissance qui, dans bien des villes, impressionnent les admirateurs des choses qui personnifient les âges révolus. Yvois, terre d'Empire, hors de France, trop longtemps fut PlO butte aux incursions des Magnats Féodaux ; cette oppression se poursuivit, au cours de la Guerre de Cent Ans, puis durant la Fronde. Les batailles incessantes, dont son territoire fut le théâtre au XVIIe siècle, entre Espagnols et Français, dépeu- plaient les campagnes. Combats de partisans, venus en armes pour se disputer les villes, et rançonner des populations rurales, qui n'avaient d'autre ressource que l'enceinte d'Yvois, seule forteresse où, derrière crénaux et meurtrières, elles pouvaient se défendre. Notre ville, adossée aux massifs, contigus à la forêt, acca- blée par sa position frontière, subit l'épreuve des guerres ci- viles, allumées par les ambitions confuses des Souverains, et parfois entretenues par le fanatisme et les rivalités de popula- tions voisines, comme Mouzon et Yvois. Retenons que des boule- versements successifs compromirent, à travers les siècles, l'exis- tence de ces générations Ardennaises, dont nous sommes les fils, On ne saurait les comprendre, par la seule étude des faits -et des caractères, il faudrait pouvoir se reporter aux époques, pour pénétrer la pensée de ces victimes de drames poignants. Un pouvoir envahisseur, rarement bienfaisant, souvent des- potique, accumulait les misères et les ruines. Ces luttes conti- nues, sans longues alternatives de paix, ne permettaient à la cité, ni de se développer, ni de rester un centre d'activité. A peine quelque libertés étaient-elles concédées, que les siè- ges lui faisaient perdre ses prérogatives. Bourgeois et Rustres s'agitaient, âprement, pour créer une protection de leurs inté- rêts. Certes, il fallut à cette sorte de famille collective, une abnégation et une vitalité persistantes, ' pour maintenir, sous tant de dominations étrangères, sa personnalité, laquelle par les origines, le passé, la langue, la race et les aspirations, s'af- firmai t Française. Utilisant, surtout des traditions, dont la concordance sou- ligne ou résume un temps, une époque, notre horizon est- très limité.

Yvois-Carignan ne comporte que deux rues principales, qui la traversent perpendiculairement. Les halles, de construction ancienne, avec l'Eglise qui sépare et domine les deux places, sont les seuls Edifices qui nous parlent des aïeux, sans remonter cependant au-delà de trois siècles. Nos compatriotes précédents, peuvent se reprocher de n'a- voir pas eu, assez vivace, la préoccupation de sauvegarder intacts : château, tourelle, fontaine monumentale, clocher Fla- mand, portes et certains remparts, alors que chaque édifice se fait l'écho de la continuité des temps écoulés. Mouzon (Moza-Médicicum) que nous pouvons jalouser,, a su conserver, fidèlement, sa porte de Bourgogne qui faisait partie des dernières fortifications et que ni je temps, ni le vandalisme des hommes n^ont pu détruire encore. A l'extérieur de cette entrée de ville, restaurée en 1782, se trouve, immuable, une statue de la Vierge. Il est peu de cités ayant vu, comme Yvois, l'ennemi la rui- ner systématiquement, parce que propriété des Comtes de Chi- ny, elle était hors de France. Histoire lamentable que celle de Yios pères : invasions ou anarchie profonde, ils voyaient leur territoire tiraillé et ravagé par d2s maîtres différents, en guerre avec leurs voisins, le plus puissant voulant dominer les autres ! Comment ont-ils su garder l'équilibre moral et physique,, malgré les durs contacts avec de grandes aventures désespé- rantes ? Leur stoïque résistance reste un digne exemple, parce qu'ils ont vieilli, accablés d'angoisses, sans avoir connu de stades heureux, dans leur vie de souffrance ; parce que, néan- moins, ils ont accompli un immense labeur. Ayant l'intuition de la vitalité superbe qui les animait, il nous semble qu'ils se sont ennoblis. Par cette appréciation, nous confessons une ten- dance à donner certain relief au pays d'affection. Par la saine logique des choses, et même en vertu du prin- cipe des Nationalités, ce canton limite des Ardennes, enfin dé- livré au XVIIe siècle, s'est incorporé à sa véritable patrie. Yvois-Carignan, jadis protégée par des tours massives, sup- porta bien des assauts ; Décadence ou évolution, ses tronçons de murailles, débris croulants échappés à la ruine, portent de glorieuses blessures. Ses rares créneaux surgissent à nos yeux comme les fantômes des siècles disparus. Dans l'ambiance des foules réalistes, le culte des traditions garde, malgré tout, ses fidèles. Avec eux, nous nous improvisons dépositaire éphémère, de cette poésie ancestrale, à la grâce austère, faite de baucoup d'illusions et de choses fugitives, qui doivent être sauvées de l'oubli, parce que, parfois, elles envahissent la mémoire de- douces émotions qui consolent. Il nous a été réconfortant de glaner et d'agréger pieuse- ment des trouvailles qui reculent les limites du cadre d'une histoire locale, car c'est une résurrection prestigieuse, des dra- mes de divers âges, parce qu'il se dégage, du néant, ce charme évocateur, qui infuse toute l'attirance des ivresses du cœur, comme un fabliau Médiéval de Ronsard. A quelques indifférents de notre hfstoire, cependant issus d'une même lignée, tous fils de la glèbe Ardennaise, nous voulons donner conscience des modalités du temps, et faire une matière vivante de ce qui relate et coordonne les évènements, ayant un rapport direct avec le travail fécond, d'une population, à travers cette atmos- phère de siècles convulsés. Nous voulons faire concevoir cette loi mystérieuse d'un atavisme qui incarne l'âme du terroir et, sans cesse, avive la pure flamme du souvenir. Nous avons trouvé un charme ineffable à rappeler, par une sorte de dévotion innée, des faits recueillis avec probité, afin de pénétrer des cœurs et des cerveaux imprégnés d'une confiance incoercible en leur destinée. Nos regards se sont aussi portés, avec une déférence émou- vante vers les années d'activité et de servage de ces frères loin- tains, spoliés aux époques brutales de la Chevalerie mais qui, néanmoins, se recueillaient dans leurs foyers misérables sur lesquels planait l'espérance d'un ordre nouveau, et l'idée sainte d'un affranchissement qui s'épanouirait enfin ? Ces générations d'êtres humbles, animés d'une foi virile en l'heure libératrice, nous apparaissent toujours admirables, par leur attachement mystique à cette entité de la terre natale. A l'heure présente, de la petite cité qui a su ne pas mourir, émane pour nous un véritable envoûtement de la pensée, car le souffle des années n'a rien effacé de notre ferveur.

4 Forêt d'Ardennes Silhouette accidentée et Légendes

adis la fi)l""I d'Ardennes — « Ilf plus importante de la J G/ialu, dhait Jules C'ùsav »,, — avec ses aspects sévères, ' ses valions sinistres, aux solitudes impénétrables, causait un sen- timent de curiosité craintive, car les massifs compacts qui se déploient sur des coteaux ravinés, encadrant les méandres fleu- ris de la Semois, apparaissaient, à noks primitifs aïeux, comme un monde fabuleux, longtemps inexploré. L âpre relief des rochers de Chiny et de Bouillon, surplom- bant des contours verdoyants, envahis par une folle végétation de bruyères et de genêts épineux, sous des voûtes sombres de feuillage. les ravins escarpés, les hautes futaies aux arbres séculaires, encadraient les abords d'Orval, de Muno, du Banel et des Amerois, estompés de vapeurs grises. Les sommets d'Herbeumont et d'autres sites magiques, gar- daient alors la beauté captivante des paysages ténébreux, ré- veillant le charme des légendes de la vieille Gaule, sur cet asile mystérieux1 où s'égarait la pensée. Lorsque, 200 ans avant le Christ, Annibal traversa le midi de la Gaule, nos contrées étaient inconnues, n'ayant été abor- dées que par de rares, mais audacieux commerçants. En dehors de la zone Narbcnnaise, les notions géographi- ques des anciens étaient fort confuses ; elles ne devinrent moins vagues qu'après les explorations d'Apollodore chez les Eduens. Quelques Romains avaient, il est vrai, remonté le cours du Rhône, mais ce ne fut qu'après .les victoires de Marius, que les Latins s'établirent définitivement, et s'approprièrent des terri- toires. Les écrivains de Rome n'ont été vraiment documentés, sur le Nord et l'Est, que vers le siècle de l'ère chrétienne. Yvois, sur la rive droite de la Chierre à l'orée des bois qui s'étendent, depuis Sedan par Francheval, Muno, Florenville, vers Arlon, conserve dans la zône, à cheval sur ies limites Bel- ges, sa ceinture de clairières et de pâturages verdoyants. Le long des pentes tapissées de buissons et de myrtiliers qui s'étagent jusqu'au confluent, la Semois torrentueuse, sil10ne des ravins abrupts et déroule ses sinuosités, à travers 'les ro- chers. à fleur d'eau, qu'elle baigne d'un courant rapide. Tout dénonce Lien l'antique Aryenne, avec sa parure de hal- liers. qui ne sont plus peuplés de hêtres imposants, ni de châ- taigniers touffus. Les derniers vestiges des forêts ancestrales, qui ont connu nos lointains aïeux ; forêts où les Druides, à la conquête du gui sacré, venaient interroger les Dieux, n'ont pins leurs arbres centenaires. Depuis le moyen âge, des hécatombes imprévoyantes ont déboisé not-re majestueuse futaie Celtique. L'arête principale de l'Ardenne (l'Oestling en Tudesque), entamée par la Semois, va de Bouillon à Neufchâteau, par - Bertrix, Corbillon, Rochehaut, Behant ; son point culminant atteint 558 mètres ; elle se dirige ensuite vers les hauts pla- teaux, landes marécageuses : les Fagnes. L'Ardenne, cette forêt noire de la Gaule, est un pays de con- trastes ; les vallées se perdent sous les rideaux de verdure qui couvrent partie des pentes rocheuses, surplombant les eaux vives des sources qui vagabondent flaneuses. Ce territoire, dans une acception restreinte, représente des étendues pittoresques, d'une rudésse sauvage et variable d'as- pects, que délimitent, au sud, la Chierre et la Meusç ; il. em- brasse les vallées, creusées par la Liesse et la Semois. A cheval > aujourd'hui sur les pays Belge et Français, l'Ardenne, jadis farouche * et pleine d'enchantements, nous la voulons décrire, en explorant le bassin de la Semois (Sesmarus- Fluvius), et le bassin de la Chierre (Carus Fluvius), alimentés par des sources, ruisselant des crêtes arides du plateau de la Famène ; c'est la terre ancestrale. A la suite de larges et multiples trouées, .pratiquées dans le massif Ardennais, il ne subsiste plus de l'antique forêt, que des tronçons ou lambeaux, moins morcelés aux abords de la fron- tière Belge, quoique dépouillés des chênes gigantesques, que les déboisements, d'une pénétration millénaire, ont fait tomber , sous la cognée. Des forges furent créées, au cœur des taillis. afin de mieux s'alimenter de combustible. Pour de multiples profits, grâce aux routes, commença l'explpitation des plus belles futaies, par des populations habituées à vivre des bois, et qui sacrifièrent, a leur besoins immédiats, une parure sécu- laire de chênes vénérables, rois de la forêt.

« Escoute bûcheron, arreste un peu le, bras, « Ce ne sont pas des'bois que tu jettes t7 bas « Ne vois-tu pas du sang, lequel dégoutte à force « Des nymphes qui t)ivaiént dess,ous la dure écorce.

RONSARD.

Pour du charbon, pour des constructions, on a défriché, par- fois même brûlé cëtte verdoyante armature forestière, dont la zone nous. enserre. Une végétation opulente, remontant à plus de dix siècles, fut détruite ; les massifs saignés à blanc, dans ces désastres incalculables, nous laissèrent trop de coteaux dégradés ou dénudés. Cette, magnificence des arbres, maîtres du sol, le feuillage absorbant la rosée et les pluies, le lierre enlaçant les branches pour atteindre les sommets, une sensa- tion de fraîcheur parfumée, et tout ce qui fait la séduction de notre prestigieuse forêt d'Ardenneg, parait ne plus être qu'un souvenir ! Amoindrie, elle nous assure encore, sous un climat rigou- reux, une salubrité vivifiante ; cette région demeure toujours le décor et l'attrait de nos campagnes, vers les marches du nord. Le modelé du massif des Ardennes émerge, et la Meuse vers Montliermé, Fépin et , s'engage à travers des plisse- ments tranchés dans les parois de grès schisteux ; gainée par les dédales concaves des gorges, où ses eaux rasent et rongent les rochers qui affleurent, la rivière s'enfonce et suit le mouve- ment des sinuosités qui se succèdent brusquement. L'impression rude de ces courbes accidentées, obsède la vue. évoquant l'as- pect féodal des donjons, hérissés sur les cimes, dont l'érosion se détache, verdoyante, malgré les déboisements de Philistins ! Ces forêts domaniales, ayant un caractère de grandeur sans égale, furent conservées en bien des endroits, avec un soin ja- loux jusqu'à Philippe d'Espagne. Pendant des siècles, notre pays resta essentiellement fores- tier ; l'âpreté de son climat était pénible aux Latins, qui redou- taient en outre ces épais fourrés, au plus profond desquels les clans indigènes trouvaient asile. Pour se défendre des soldats de Labienus, les Belgae mettaient le feu dans les parties touf- fues où s'aventurait l'ennemi ; de même les Romains portaient la flamme dans ces dangereuses retraites, afin d'en chasser les farouches Gaulois, réputés les plus barbares des Provinces sou- mises. Une végétation somptueuse, néanmoins, persistait à cette époque, grâce au respect religieux que les Celtes et les Francs avaient pour les forêts mystérieuses. D'autre part, les Seigneurs défendirent longtemps l'abattage, parce qu'ils avaient la pas- sion de la chasse. Au temps Médiéval, cette immense étendue de bois, repaire de fauves, gardait son aspect impressionnant. On s'explique pourquoi les Troubadours situèrent leurs fables et les Mythes, au cœur des forêts d'Ardenne, soit dans la chan- son de Roland, soit dans d'autres poèmes de geste. L'Ardenne des Druides, aux chênes imposants, apparaissait toujours, dans leurs récits, comme la région redoutable et ténébreuse, que la légende emplissait de monstres et de dan- gers effrayants. Fourrés abandonnés aux Elfes et aux sorciers, ravins que parcouraient les êtres infernaux, seul le passage sur la Chaussée Romaine des Cortèges de moines, d'Evêques, de Princes et d'hommes d'armes, y troublaient le silence. Aux yeux des voyageurs, assez hardis pour pénétrer dans ses pro. fondeurs, c'était toujours la forêt d'effroi où ils s'égaraient et passaient des heures d'angoisse, comme dominés par une force mystique ! L'Evangile fut des années sans prise sur des peuplades attachées à leurs divinités sylvestres ; elles ne cédèrent que graduellement, à la parole réconfortante des Ermites, qui cré- aient des Oratoires, au sein des parties montueuses les plus inaccessibles. Un Concile tenu à Arles, en 452, dût prononcer l'anathème contre les Ardennais et ceux qui rendaient le culte à des arbres. Il en fut de même, pour lutter contre ces croyan- ces, au Concile de Tours, en 576. Charlemagne, dans le même . sens, signa un édit en 789. Par la suite, pour se procurer des revenus, les Suzerains féodaux de Chiny concédèrent des. droits d'abattage, à titre onéreux. Les populations serves commencèrent les coupes des- tinées à fournir des matériaux de construction, et les moines, pour leurs couvents, dès le XIIe siècle, se firent les plus grands défricheurs. En sorte que religieux et manants, abattaient, mê- me pour créer des prairies. C'est ainsi que les bords de la Chierre et de la Semois, peu à peu convertis en terres laboura- bles, avaient été gagnés à la culture. I.a cognée des bûcherons . poursuivant son œuvre, la forêt recula ! Seul, vers Je nord-est, le plateau de Bastogne, dénué de vé- gétation, apparaît d'une aridité désolante : schiste et quartz du sol, autant que les brouillards et le froid, laissent stérile cette lande rocailleuse, couverte de maigres bruyères, quoique. encastrée dans la plus riche contrée forestière. Au VIe siècle, l'Ardenne était sauvage. De rares sentiers tra- versaient d'immenses fourrés, peuplés de pâles bouleaux, de hêtres et de chênes noueux. En ces lieux de vertige, l'auroch (buffle barbu) existait encore. Peu d'agglomérations ; les serfs misérables élevaient des cabanes éparses dans ces contrées, souvent dévastées par des brigands sans foi, qui se réfugiaient dans les vallons peu accessibles de la Semois, après avoir dé- pouillé paysans et voyageurs. Telle fut aussi l'attitude de bien des Châtelains, qui détroussaient et semaient l'épouvante, mais qui durent, à leurs titres de noblesse, d'être mués en héros, pour la postérité. Jules César s'était lancé dans ces taillis, à la poursuite d'Am- biorix, chef des Eburons, qui s'échappa et disparut vers l'Es- caut. Ce pays était peu abordable ; des vallées cachées et des sentiers se perdant sous ie couvert, des ramées, allaient de la province des Rèmes aux bnrds du Rhin. Les . Romains furent les premiers à pratiquer des éclaircies dans la forêt, pour construire la route de Trèves. Les soldats, recrutés dans cette Belgica, servaient en Italie comme troupe d'élite : la Garde Prétorienne. C'est dans ces bois d'Ardenne que fut déterré, il y a moins d'un siècle, un autei Romain, avec une dédicace votive : -

TITVS. JVLIVS • vœu à la Déesse des Ardennes. Ayant couru un grand danger en traversant la forêt, un chef de légion avait, par reconnais- sance, élevé un autel aux génies des lieux. Au XIVe siècle, Pé- trarque, en ses Epi très, raconte que, revenant de Cologne, « il dut passer par cette forêt, horrible et hideuse à voir ». Les chroniqueurs-poètes, dans leurs Cantilènes, exaltant la beauté, la force ou la vertu des héros, traduisaient la terreur inspirée par ces gouffres boisés, où tout se tait ; terreur dont ne sut se défendre Froissard, en 1350, lorsqu'il rapporte qu'il a traversé : c. L'Ardenne qu'aucun chevalier ou Seigneur d'armes, de mé- moire d'homme, n'a chevauchée sans péril ». La masse la plus compacte de l'immense forêt d'Ardennes, se trouvait entre la Moselle et la Meuse, en bordure de la Chier- re et de la .Semois, avec de vastes clairières qu'elle longeait. Une population des plus turbulentes habitait ces contrées ; son plateau culminant, feutré de bruyères, semé de pins sylvestres et de genêts épineux, est resté terre agreste, sévère, et d'une désolation infinie. On y rencontrait l'importante tribu des Poe- mani. Après le village de St-Hubert seulement, aux génévriers succède un paysage dénudé, mouvementé de vallons estompés dans la brume, et de rocs en saillies heurtées. Des chênes torses et des bouleaux de tonalité claire, s'étagent et plongent jus- qu'aux profondeurs des ravins, où ruissellent : la Liesse, l'Or- chimont, la Semois ; puis bientôt on découvre, par une échap- pée, confondues dans des froissements de la futaie, après des détours, les crètes de Rochehaut et de Botassart qui surplom- bent les halliers de Vresse et de Bnhan, où règne l'ombre. Rochers géants d'une sauvagerie donnant l'effroi ; forêts des Lutins et des maléfices du Diable ; domaine de la féerie, d'où l'imagination de nos ancêtres faisait surgir la magie délirante des génies ! Antre des superstitions où les esprits flottaient à travers un chaos fantastique, avec la ronde éperdue des revenants, dans un sabbat d'épouvanté !... et ces hallucinantes fictions, œuvres extravagantes d'une obsession dix fois séculaire, se transmet- taient en tremblant, ! C'était le temps des chimères et des illusions berceuses, qui leurraient et enchantaient à la fois. Folle hantise du passé, drames secrets qu'idéalisaient, au moyen âge, les Troubadours, lorsqu'ils situaient le dernier refuge et les pratiques persistantes des Druides, dans ces épais rideaux d'arbres, qu'ils peuplaient de Dragons et de Lions ! Rochers abrupts prenant, dans leur esprit, des formes étran- ges, quand Charlemagne, dans sa puissance incontestée, voyant fuir et disparaître les révoltés, ces quatre chevaliers re- belles, d'un coup de sa longue épée, faisait jaillir une source... et c'était l'infernal galop des félons maudits, à travers la forêt, pour y trouver un éternel asile. Votre terre d'Ardenne. autant que la Bretagne, est fort riche en légendes. Le silence impressionnant des forêts profondes, à l'époque Médiévale, inspirait l'éclosion de récits fantastiques et l'imagination de populations, ayant encore le cuite des divinités et des Mythes, entretenait ces traditions, dont le caractère dra- matique et fabuleux hantait la mémoire à travers les âges. Qui ne connaît nos contes du pays natal, localisés d'après des souvenirs populaires, parce qu'ils s'inspiraient d'événements réels en partie historiques, quoique déformés. Bien des auteurs ont relaté, avec ou sans variante, la conversion de Saiiù Hubert, l'histoire de Geneviève de Brabant et l'épopée des quatre fils Aymon. Des versions remaniées ou différentes, ont été reproduites par de nombreux écrivains, s'appuyant sur des fragments de manuscrits du XIIe siècle, sur des chansons de geste, comme aussi sur des récits, colportés et transmis dans le pays. Du temps de Grégoire de Tours furent transcrits ces poèmes, que les générations retenaient de mémoire, et que les Paladins ' -batailleurs; se faisaient chanter par les Troubadours, dans leurs castels. Homélies et contes naïfs, que les pélerins colpor- taient, d'étape en étape, et qui divertissaient la basoche, les clercs et les moines des abbayes ; romans de chevalerie qui nous émeuvent encore à travers lés siècles, après avoir inspiré l'imagination des sculpteurs et des Maîtres verriers... récits et fabliaux, appréciés sons les rois Capétiens, par ces chevaliers, surtout sensibles aux grands coups d'épé.e. Les chansons de geste, gloire littéraire du moyen âge, étaient écrites en Roman. alors que nôtre langue se composait avec régularité. Les récits populaires, rimés par les Trouvères, sont l'œuvre du XIIIe siè- cle. Ces poètes ont renouvelé les traditions et les anciennes ges- tes. Ils ont reproduit la pensée originale, transformée un peu. Le manuscrit ayant servi de guide à notre thème des fils d'Ay- mon, est un in-folio du XIIIe siècle. Le texte est rapporté par Dom Brial, Bénédictin de St-Maur ; le récit des aventures des quatre fils Aymon compte 8.000 vers. Le nom véritable de ces Seigneurs (nom de leur fief) était : Girard *de Roussillon, Beuve d'Aigremont, Othon de "Montreuil, Aymon de Dordon. Il commence ainsi : « Saignour oïez chançon de grand nobilité « Toutes de vieille estoire, faicte san fauceté, « Jamais n'estoil meillor ; oïez doncq mon pensé « Lors commence a canter... Nous nous laissons donc tenter et nous résumons la plus notoire : *

LES QUATRE FILS AYMON Il y de ça longtemps Le Duc Aymon de Dordone vivait avec ses quatre fils Allait, Renaut, Guichart et Richart, Son frère, Seigneur d'Aigremont, - avait refuse de faire hommage de Vassalité, devant ie tout puissant Empereur Chariemagne qui, pour se venger, entre- prit une guerre acharnée contre ce rebelle, qu'il battit et fit assassiner. Le Duc Aymon, malgré cette offense cruelle, parut se rési- gner, et c'est accompagné de ses fils, qu'il se présenta devant l'orgueilleux S'.uvt'rain. Charlemagne qui l'attendait sous sa tente, non loin de la Chierre, à Douzy, le reçut avec joie, mais Iieriaut, provoqué par le neveu de l'Empereur, le tua. Les quatre frères, après avoir ainsi tiré raison de la mort de leur oncle, prirent la fuite et se réfugièrent, d'abord, dans un château que-Charlemagne assiégea. Parvenus à s'échapper et bien que n'ayant d'autre cheval que le courtier réputé Bayart, ils gagnèrent le Donjon paternel, près de Montauban. Après avoir lutté contre les Sarrazins, ils pensaient avoir enfin trouva le repos, mais Charlemagne qui avait découvert cette retraite, les attaqua. Leur résistance ne put se prolonger, ils durent fuir la colère de l'Empereur, traqués par l'armée Im- périale. Après une course folle, les fils Aymon, exténués et toujours poursuivis, Sf: trouvaient dans la région d'Ardennes, quand, au coucher du soleil, ils atteignirent le sommet d'un rocher aplati, surplombant la Meuse. Mille lances de chevaliers s'approchaient par derrière... devant eux c'était l'abîme ! « Vive Dieu, criait Charlemagne, je les tiens ces louvetaux, je veux les faire tondre pour les déshonorer ; dans un couvent, loin des femmes, ils vivront gras et vieux ». Ensemble les quatre frères enfoncèrent leurs éperons dans les flancs de leur unique monture. Baïart, le fidèle coursier de Renaud se mit à hennir, puis ramassé sur les reins et s'enle- vant des quatre pieds, il bondit d'un saut prodigieux, ainsi qu'un cheval ailé, pour retomber de l'autre côté de la Meuse. Les fils Aymon se signèrent, remerciant Dieu. Les sabots de Baïart laissèrent sur la pierre, très visible, l'empreinte incrustée des fers. Cet endroit, aux environs de Château-Renaud, est dénommé : Pas de Baïart, soit Saut de Roland, soit la Roche Aymon. Ci-après copie littérale de la strophe finale :

« Baïars ly dict Renau ma teste va crollant « Su s'en allé s an nos, blasme il auron moult grans, (( Renau lâche les règne et sa lance tenans, (t TJr('ars oï Renau, cy hanist cléremens, « y fonce a col tendust. lé piès harpes devans, <, EscllUpé en fores! d'A..rdenru.' g l'a bï,t,tialit ». GENEVIÈVE DE BRABANT Il était autrefois, dans le pays de Trèves, un Paladin valeu- reux, du nom de Siegfried, qui venait d'épouser Geneviève, tille du Duc de Brabant. Apprenant que les Sarrazins d'Espagne envahissaient l'A- quitaine, il se résigna, peu de jours après ses noces, à laisser sa jeune femme dans le Castel, dont il avait fait sa demeure, pour rejoindre les armées de Charles Martel, dont il était le Féal. Parmi ses gens, il comptait un intendant appelé Golo, dont il avait éprouvé le dévouement ; aussi n'hésita-t-il pas à le charger, en toute confiance, de la garde de sa jeune femme. Golo s'éprit bientôt de Geneviève qui était d'une grande beauté, il tenta de la séduire, mais elle le repoussa, ne voulant pas manquer à ses devoirs. Dans son dépit, Golo, scélérat et perfide, résolut de se rendre auprès de son maître qui guer- royait, mais il attendit la naissance d'un enfant. Ayant rejoint Siegfried, il lui raconta que Geneviève s'était montrée infidèle -et qu'il n'était pas le père du nouveau-né. Indigné, le Chevalier renvoya Golo dans son domaine, avec ordre de faire mourir sa femme adultère. De retour, Golo fit emmener Geneviève et son fils dans la partie la plus sauvage de la forêt d'Ardennes. La malheureuse épouse, abandonnée, dût se réfugier dans une caverne, où., elle vécut, misérablement, de racines et d'eau, en compagnie d'une biche qu'elle avait apprivoisée, et dont "le lait servait à nourrir son jeune fils. A quelques années de là, vers l'an 754, Siegfried avait rega- gné son château. Un jour qu'il chassait dans la forêt, il fût en- traîné à la poursuite d'une biche qui s'arrêta près de la grotte où vivait Geneviève, qu'il reconnut. Sa femme lui fit savoir quelle avait été l'infâme attitude de Golo et Siegfried joyeux la ramena, ainsi que son enfant. - Les privations avaient altéré la santé de Geneviève qui suc- comba peu après. Le traître Golo fut écartelé. Le corps de Geneviève de Brabant fut inhumé dans une cha- pelle qui est restée, depuis, un lieu de pélerinage fréquenté.

SAINT HUBERT

Autre pieuse légende, glorifiée par les croyants qui firent de ce héros religieux, l'apôtre des forêts. Le culte des arbres et des génies resta longtemps vivace dans l'Ardenne, devenue pays Franc, où les Chevaliers vaillants étaient honorés. D'origine illustre. Hubert, fils de Bertrand, Duc d'Aquitaine, était de la lignée des Mérovingiens ; sa renommée s'était répan- due. Présenté à la Cour de Metz, le roi Thierry l'avait fait Comte, malgré son jeune âge. Cavalier infatigable, réputé dans le métier des armes, il chassait le loup dans les profondeurs de la forêt bruissante, qui s'étendait jusqu'aux limites de i Aus- trasie. Entraîné par son ardeur et entouré de ses chiens, qui menaient grand tapage, il était parvenu en un ravin téné- breux ; son escorte de veneurs n'avait pu le suivre.

Soudain, il s'arrèta épouvanté, devant lui venait de surgir un cerf d'une taille démesurée ; entre ses ramures étincelait une croix d'or resplendissante. Impressionné déjà par cette vision miraculeuse, il entendit une voix mystérieuse lui dire : 'c Hu- bert, ta passion pour la chasse te ferait-efle oublier ion slIlnt? Ne crains-tu pas les flammes éternelles de l'Enlc}' ? ».

Frappé par la grâce divine, il descendit de -a i:iitntu'r< . cette apparition majestueuse devenait à ses yeux propitetique. Il s'agenouilla et resta longtemps ju'osterné, décidé à se convertir.

Abandonnant sa jeune femme Fleurfcsnne. et renonçant aux armes, aux chevaux, à la cotte de mailles, au costume séculier, ' Hutert résolut de suivi-»- le destin du Ciel et dt, consacrer sa vie à Dieu.

J.'Evêque I.amhert le baptisa et de ce jour. en un ermitage d'Audange, il vécut dans la prière, au milieu des tribus qui sui- vaient encore les cultes païens ; pour toute nourriture il se con- îentail de racines et d'eau.

Après une longue épreuve de privations, il se rendit à Home, O¡'I le Pape le sacra Evèque. Dans ia région de 1-iège, trente ans durant, il exerça son Episcopat. l.e Saint Prélat accorda des franchises et il s'efforça d'assurer la justice. Il mourut vénéré, en S17, après avoir Evangélisé cette contrée d'Austrasie, où il s'était affirmé seconrablG, et d'une vertu fer\enle.

Sa dépouille, transférée dans l'Abbaye de St Hubert, devint un lieu de pèlerinage, en mémoire de ses bienfaits. Son culte millénaire persiste, parce qu'il eut le don des miracles. Il est devenu le grand Saint de la vénerie et des chasseurs. Un ma- nuscrit de 1106 est ainsi conçu : « Saint Hubert de noble lignaige, sacri.fioit aux i/dolles. Il advint que lit 'il l'stans en la foi-esi d'A l'lleine, son païs, ung cerf tous blan se monstra aveg le sjgne de la Sllincte Croix relui- sant coin chandelle, il se pi-iiist a lui/ regarder ([uS!! il ogt ceste vOII.r qui lui dist, etc...... De son rr/lue incrédule, vetiill(-iiit Dieu cognoislre il se fit féal, Chrcstien. (( L'Evestjue de Treeh (Trêves <'.

FABLE ARDENNAISE

Au temps jadis, l'an mil, frémissants d'enthousiasme et de piété, les trois fils d'un Seigneur de haut lignage, mariés aux filles du Comte de , étaient partis pour la Croisade avec Gotilefroy de Bouillon. Tandis que ces nobles héros luttaient et triomphaient en Pa- lestine, leurs jeunes femmes trahirent leur serment et se laissè- rent aimer par des Chevaliers iélons et couards, qui n'avaient pas quitté leur Castel. Le jour où le tombeau du Christ, en Terre Sainte, fut délivré par les vaillants guerriers Francs, le très Haut pour punir les épouses infidèles les mua en trois rochers, qui dominent tou- jours le fleuve sous le nom de Dames de Meuse....

Nous rappelons, succintement, cette autre LÉGENDE, parce qu'elle date du 1er établissement des Francs dans la Gaule Bel- gique. Aux temps Mérovingiens, vers l'an 500, non loin de Trèves, et à droite de la Moselle, dans la mémoire des populations sub- sitait une fisction Epique, inspirée de la Mythologie Nordique : les Nibelungen. Sigurd, fils de Sigmund, Roi des Francs, après avoir tué le Dragon, s'était emparé de son trésor. Intrépide guerrier, il traversa des murs de flamme pour délivrer la Walkyrie Bru- nylde, sœur du roi des Huns, qui l'accepta comme fiancé. Après'maintes aventures, ce héros qui avait bu le philtre de l'oubli, repoussa l'amour de Brunylde qui, dans sa jalousie implacable, le fit assassiner ; mais, désespérée, elle se perça le sein pour rejoindre le bien-aimé. Ce poème héroïque, tableau de mœurs effroyables, n'est pas sans beauté. Vértable Iliade barbare ,il traduit la sagacité intuitive et la douceur insinuante qui subjugue la force ; il chante les terribles caprices et les sanglots d'une femme éprise.

LE CHASSEUR MAUDIT (1)

CONTE TRÈS ACCRÉDITÉ EN ARDENNES C'était au retour de la diète, l'an 938, Othon, Duc de Mosel- lane, fils de Ricuin d'Ardennes, possédait des domaines gibo-

(1) .4 serai de sujet à Berlioz pour sa symphonie. yeux dans ce fief. Grand chasseur, incarnant la race, il vivait en païen, ne respectant pas le jour du Seigneur. Par un beau Dimanche, monté sur un coursier rapide, Othon suivi de ses piqueurs et d'une meute ardente, au galop gravis- sait les coteaux. La vaste forêt retentissait de fanfares et de cris d'une joie exaltée, que l'écho répétait au lointain. En un carrefour, le Paladin aperçut deux cavaliers. L'un, monté sur une haquenée blanche qu'il manœuvrait avec dexté- rité, portait une armure sous sa dalmatique de brocard. Ses traits étaient d'une douceur extrême, ses yeux limpides ; sa chevelure blonde flottait en boucles sur ses épaules. Le second faisait contraste, sur son cheval, d'un noir luisant, qui piaf- fait sous le frein. Son maître était vêtu d'un manteau de pour- pre, recouvrant une cotte métallique. De forme athlétique, aux cheveux crépus, dans son rire sardonique on lisait la haine. Son ensemble gardait quelque chose de démoniaque. « Soyez les bienvenus, s'écria Othon, prenez part à nos ébat- « tements, tout présage une chasse heureuse, les fauves tombe- « l'ont sous nos pics. — J'en doute, répondit je jeune écuyer, la « journée ne tient pas les promesses de l'aurore. D'ailleurs six « jours suffisent au plaisir, j'entends des cloches qui nous « appellent au service divin... ne craignez-vous pas le courroux « du ciel ? n. • Par le Christ, repartit Othon, vous prêchez comme un moine, mais je suis peu disposé aujourd'hui à écouter un sermon. En avant, s'exclama le cavalier de sombre armure, le Royal plaisir de la chasse nous appelle. Bien parlé, s'écria le Comte, en avant, Taïaut-Taïaut... et crispant ses talons éperonnés con- tre le flanc de sa monture, il s'élança..., les chasseurs se préci- pitaient franchissant les ravins, mais Othon le's devançait, escorté par les deux cavaliers. Voici que soudain parut un cerf bondissant ; chacun tres- saillit, le tumulte redoublait, piqueurs et chiens s'élançaient pour harceler la bête. C'était une trombe qui dispersait les troupeaux ,renversant tout comme un fléau dévasteur. Le cerf ralentissait sa course, bientôt atteint par les chiens acharnés, la gueule souillée d'écume. Il allait succomber, quand derrière un fourré, on distingua un Oratoire, vers lequel le cerf pousuivi alla s'abattre, sur le parvis sacré, s'offrant aux coups des veneurs. L'hallali fut sonné, aux aboiements de la meute et aux hourras des chasseurs. Tout à coup, du Saint Lieu la porte s'ouvrit ; un vénérable Ermite, à la voix suppliante, intercéda, abjurant le Comte de ne pas profaner l'asile, et d'épargner le pauvre animal, tombé sous sa protection. BREVET DE NOMINATION d'un Magistrat Munie,ipal décerné par Son Altesse LOUIS-PHILIPPE d'ORLÉANS DUC DE VALOIS - COMTK DE SOISSONS (dit PHILIPPE BOALITÉi décapité en 1793

AKKIÈHK-NKVEI, UK 1.0VlS xit - 1'F.TI1"-FILti DU RtGI!;l\j'f. PÉRIS nE I.OUIS-PHtLH'PK, KOI DE FRANCS

M!K!«Rt< SEIO\FUK n!YVO»S-CA.KIOXAN .

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