Lammerville, Sollicite De L'archevêché, Et Obtient, L'autorisation De Fonder À Ses Frais Sous Le Vocable De Jean-Baptiste Une Chapelle Aux Mesnils
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ISBN 2-86 743 143-3 © Edition Bertout "La Mémoire Normande" A TILLY. PIERRE JAMME UN VILLAGE CAUCHOIS LAMMER VILLE 1992 Manoir de Faguillonde du XVIe siècle étage en faible encorbellement supporté par des consoles légèrement sculptées. Seul le poteau d'angle de l'édifice, bâti sur plan en L, porte une sculpture très achevée représentant une marguerite sur tige avec son feuillage. La façade sur rue est percée de cinq petites fenêtres à l'étage et de trois plus grandes au rez-de-chaussée. La partie côté cour ne diffère guère dans ses structures de la façade extérieure, le tout formant un ensemble très homogène, caractéristique de son époque. Après avoir longtemps appartenu à la famille Biville, cette intéressante construction a été récemment achetée par Mme Christine Kellehar, de nationalité britannique, qui en a entrepris la restauration. Dans les archives de la commune il a été possible de retrouver le nom d'un propriétaire de ce manoir qui l'occupait après la tourmente révolutionnaire, un certain Diel, originaire de Gonneville. Or, les Diel ou Dyel ont tenu dans l'histoire du Pays de Caux une place de tout premier plan. Leur origine se perd dans la nuit des temps et ils se sont divisés en plusieurs branches dont il est difficile, sinon impossible, de préciser les liens de parenté. Ont-elles même une souche commune ? La question est controver- sée. Toujours est-il qu'il existait aux XVIe et XVIIe siècles, précisément à Gonneville, une famille Dyel que l'on appelait Dyel des Hameaux, du nom d'un fief situé à la périphérie de la paroisse. Ce sont ces Dyel qui ont construit le château de Miromesnil. Ne serait-il pas plaisant d'imaginer qu'un obscur descendant de cette illustre famille que l'on croyait éteinte, tout au moins en lignée mâle, dans la première moitié du XVIIe siècle, ait vécu dans ce petit manoir ? Cela lui conférerait des lettres de noblesse mais il serait moins hasardeux et plus vraisemblable de penser qu'il n'a été sans doute que le logis du collecteur des dîmes du prieuré de Bacqueville. Poursuivant notre chemin vers Brachy nous atteignons le hameau des Mesnils situé à l'extrémité de la commune. Là, nous nous trouvons au point de vue historique sur un terrain plus solide puisque nous disposons d'une documentation assez riche axée sur une famille qui a eu le mérite de durer et de se succéder de père en fils pendant près de deux siècles : les Caron ou du Caron. Sans doute issus de la bourgeoisie de Dieppe puisque le Caron qui fit l'acquisition de la terre des Mesnils, Jean Caron, fut conseiller-échevin de cette ville, ces Caron ne devaient pas être nobles d'ancienne souche car lors de la recherche de noblesse de 1669, Charles de Caron fut en 1669 déclaré usurpateur et condamné à 2.000 livres d'amende. Toujours est-il que si leurs titres manquaient de justifications, ils ne s'en conduisaient pas moins en nobles et pour asseoir leurs prétentions ils s'étaient mis en quête d'une terre, faute de laquelle les récents anoblis ne se considéraient pas véritablement comme tels. Dès 1640, Jean Caron, prétextant la distance séparant sa terre des Mesnils de l'église de Lammerville, sollicite de l'archevêché, et obtient, l'autorisation de fonder à ses frais sous le vocable de Jean-Baptiste une chapelle aux Mesnils. Les descendants de Jean Caron ajouteront rapidement une particule à leur nom et se qualifieront écuyers, sieurs des Mesnils. A la fin du XVIIe siècle, une branche de cette famille deviendra seigneurs de Renfeugères (entre Pavilly et Sierville). En 1706, le registre d'état civil de Lammerville mentionne le mariage de Jacques-Charles du Caron, écuyer, sieur de Flumesnil ou Flamesnil, fils de Charles du Caron, sieur de Renfeugères et de dame Marie de Paillard, de la paroisse, avec Geneviève Guérout. Charles du Caron, le père de la mariée, celui même qui sera déclaré en 1669 usurpateur, présentait à la cure de Renfeugères en 1653. Il était fils de Jean de Caron, seigneur de Breteuil, et de Madeleine Le Vasseur. Il épousa Marie Romé qui mourut en 1671 et en deuxièmes noces Marie de Paillard, fille de Charles de Paillard, sieur d'Hardivilliers. Devenue veuve, celle-ci s'était retirée avec ses enfants dont elle avait la garde à Ablemont. En 1706, elle est en procès avec François-Henri Martel, sieur de Frion, au sujet du chemin "tendant du dit Ablemont au bas de Bacqueville". En janvier 1731, Jacques-Charles du Caron, écuyer, sieur des Mesnils et sa femme Marie-Thérèse Aprix de Vimont sont parrain et marraine de Charles-Marie Courtel. L'année suivante a lieu le baptême de leur propre fille par le prieur de Lammerville. En 1761, Charlotte-Angélique du Caron, autre fille de Jacques-Charles du Caron et de Marie- Thérèse Aprix, fait un très beau mariage en épousant Nicolas-Antoine Dandasne, Sieur de Lincourt, chevalier de Saint Louis en 1754, capitaine de vaisseau en 1757. Les Dandasne, ancienne famille des environs de Dieppe, étaient seigneurs de Crosville, de Roquefort et de Gerponville. Ils passaient pour être fort riches. A l'occasion de ce mariage Jacques-Charles du Caron est qualifié sieur des Mesnils et capitaine de la milice garde-côtes à Quiberville. En 1775, meurt sa femme Marie-Thérèse Aprix de Vimont. Son inhumation a lieu à Lammerville en présence de Messire Charles-Louis-Marie Aprix de Vimont, chevalier, de la paroisse de Royville, de Messire Charles-Henri du Caron, major des milices garde-côtes, de la paroisse du Bourg-Dun, de Messire Louis-Charles-Henri de Cuverville, sieur de la Motte et de Messire Louis- Wielfrand-Désiré de Cuverville, capitaine au Régiment provincial de Rouen, de la paroisse de Vénestanville. Charles-Henri du Caron, mentionné comme major des milices garde-côtes, exploitait une ferme au Bourg-Dun. Il était le frère de Jacques-Charles, sieur des Mesnils. Celui- ci ne devait survivre que très peu de temps à sa femme. Il mourut la même année, laissant la seigneurie des Mesnils à son fils, Charles-Marie-Vivien du Caron qui avait épousé Félix-Elisabeth-Catherine Le Vasseur, fille de Jean- Nicolas-David Le Vasseur, chevalier, seigneur et patron de Biville-la-Rivière, de Sassetôt-le-Malgardé et de la paroisse de Saint-Jacques de Neufchâtel. En 1778, avait lieu à Lammerville le baptême de la fille de Charles- Marie-Vivien. Elle fut tenue sur les fonts baptismaux par son grand-père, le seigneur de Biville. Elle répondait au nom de Félix-Alexandrine du Caron. Les événements de 1789 ne semblent pas avoir bouleversé la vie de la famille du Caron, tout au moins dans les premières années de la Révolution. A cette époque les du Caron n'exploitent directement aucune terre. Ils sont portés dans le rôle de taille de cette année là comme exploitant leur "pavillon". Dès lors, ce n'est qu'une demi- surprise de voir Charles-Marie-Vivien officier public de Lammerville en 1793, c'est-à-dire officier de l'Etat civil. Il ne faut non plus s'étonner qu'il ait construit en 1792 - la date est gravée sur l'édifice - une belle demeure de style classique qui répondit à une réelle prospérité matérielle et à l'euphorie qui régnait à cette période dans certains milieux de la petite noblesse campagnarde. La nouvelle construction a certainement remplacé une autre plus ancienne jugée trop exigüe ou trop inconfortable car dans les communs proches du manoir actuel on ne peut s'empêcher de remarquer un mur de briques roses orné de losanges noirs qui, de toute évidence faisait partie d'un bâtiment plus ancien et daterait sans doute du XVIIe siècle. Si l'on examine de plus près l'édifice actuel qui a fort belle allure au bout de son allée de tilleuls, on s'aperçoit qu'il se compose de deux parties distinctes, l'une datant, comme il a été dit de 1792, l'autre du milieu du XIXe. On ne Les Mesnils s'explique guère les raisons de cette double origine si ce n'est par le fait qu'une partie de la demeure aurait été la proie des flammes ou que la construction aurait été interrompue par les événements révolutionnaires et reprise plus tard. En tout cas elle n'altère en rien l'harmonie de l'ensemble. On remarque à la base de la partie ancienne des soupiraux de grés en accolade. La propriété appartient aujourd'hui à Mme Charlety qui en a fait l'acquisition il y a quelques années. Elle provenait de la succession Auvray- Rion-d'Alençon mais n'était plus habitée depuis de longues années. Il existe aussi aux Mesnils une belle maison de ferme tout en briques qui semble avoir été décapée de son revêtement de crépi. Elle pourrait remonter au XVIIIe siècle et appartient actuellement à la famille Mordant. .