Avant-Garde Et Tradition Dans Les Arts Du Décor En France. Lectures Critiques Autour De Guillaume Janneau
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Avant-garde et tradition dans les arts du décor en France. Lectures critiques autour de Guillaume Janneau. Rossella Froissart To cite this version: Rossella Froissart. Avant-garde et tradition dans les arts du décor en France. Lectures critiques autour de Guillaume Janneau.. Art et histoire de l’art. Université de Provence - Aix-Marseille I, 2011. tel-02336495 HAL Id: tel-02336495 https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-02336495 Submitted on 28 Oct 2019 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. 1 UNIVERSITE DE PROVENCE AIX-MARSEILLE I Département d’Histoire de l’Art et d’Archéologie Rossella Froissart Pezone AVANT-GARDE ET TRADITION DANS LES ARTS DU DECOR EN FRANCE Lectures critiques autour de Guillaume Janneau Marcel Gromaire, L’Automne ou Les Flandres, Tapisserie des Gobelins, 3m10 x 4m40 Habilitation à diriger des recherches soutenue le 18 novembre 2011 devant un jury composé de : M. Alain Bonnet, Professeur, Université de Nantes M. Jean-Marie Guillon, Professeur Université de Provence M. Rémi Labrusse, Professeur, Université de Paris -Nanterre (Rapporteur) M. Emmanuel Pernoud, Professeur, Université Sorbonne Paris 1 (Rapporteur) M. Pierre Wat, Professeur, Université Sorbonne Paris 1 (Garant) 2 À Cyrille, Aurélien, Raphaël 3 Remerciements Ma plus grande reconnaissance va ici à M. Pierre Wat, à qui je dois d’avoir tenté cette entreprise ; sans sa confiance et ses encouragements elle se serait arrêtée en chemin. Que M. Xavier Lafon et Jean-Marie Guillon trouvent ici l’expression de ma profonde gratitude. Leur soutien et celui de Mireille Nys (directrice du Département d’Histoire de l’art) et d’Olivier Bonfait a créé les conditions matérielles indispensable à un travail serein. Le climat d’estime et d’amitié qui nourrit mes rapports avec les collègues et le personnel de mon Université d’appartenance a été déterminant dans ma décision de m’engager dans l’Habilitation. L’aide que m’ont apportée Joelle Menant et Christine Douce, responsables de la section Histoire de l’art de la Bibliothèque universitaire, a été aussi extrêmement précieuse. Mes recherches au Mobilier national ont été grandement facilitées par M. Jean Vittet, Inspecteur de la création artistique, et par Mme Viviane Lerable, archiviste. Ils m’ont aimablement accueillie et m’ont dirigée par leurs conseils amicaux et toujours utiles. Arnauld Brejon de Lavergnée, Directeur des collections, m’a, le premier, ouvert les portes de cette institution. De même Mmes Guillemette Delaporte et Béatrice Krikorian, respectivement archivistes et bibliothécaires à la Bibliothèque du musée des Arts décoratifs de Paris, ont mis à ma disposition les documents conservés dans leur institution. À la bibliothèque de l’INHA, Mmes Sabine Rolleau et Emilie Vabre ont bien voulu m’accorder les égards et les privilèges dont tout chercheur pressé rêve. Enfin MM. Jean-Paul Bouillon et Pierre Vaisse ont bien voulu continuer à me prodiguer leurs précieux conseils, avec la générosité que je leur connais depuis longtemps et dont tout étudiant - même candidat à l’habilitation – a constamment besoin. Les exhortations affectueuses de mes amis et collègues de toujours – Catherine, Annie, Laurent, Yves, Katherine, Sylvie, Sophie – m’ont rassurée dans les moments de doutes. Mais je dois surtout à Cyrille, Aurélien et Raphaël d’avoir pu persévérer dans l’effort. Ce travail intense et les moments difficiles qu’il a comportés ont été supportés avec patience et bonne humeur par tous les trois. Ils ont accepté de bon gré un « service minimum ». Merci à Cyrille d’avoir résisté 4 malgré tout, à Aurélien d’avoir accepté de mettre (parfois) la sourdine et à Raphaël de m’avoir cédé sa belle chambre d’enfant. Je leur dédie ce travail, avec la promesse de prochaines longues vacances. 5 Introduction Le pays est encore si peu exploré que les voyageurs qui partent à l’aventure voient souvent plus de choses que ceux qui sont munis d’un plan et d’une boussole. (Louis Hourticq1) Cette recherche est issue du désir de mettre à profit, dans l’étude des arts du décor, les avancées considérables qui ont été accomplies ces dernières années dans des domaines de l’histoire et de l’histoire de l’art proches du mien. Si les publications sur l’Art déco sont pléthore, il est rare qu’on aille au-delà d’une contemplation extatique de ces années « folles », comprises comme celles d’une sorte d’innocence moderniste, et on fnit volontiers par se laisser séduire par les formes « pures » et les élans fonctionnalistes. À l’opposé, on peut aussi être tenté de découvrir dans la moindre ligne droite la propagande subtile des horreurs mécanisées proches. Or la voie de la modernité est tortueuse qui parfois chemine entre confiance en un futur radieux et retours inattendus. C’est précisément le cas de cette peu prévisible « renaissance de la tapisserie » qui a été, dans la première moitié du XXe siècle, l’une des manifestations les plus importantes de « retour au métier ». Comment a pu se réaliser cette conciliation extraordinaire du camp moderniste - depuis Maillol et jusqu’à Le Corbusier en passant évidemment par Lurçat - avec des valeurs qu’on désignerait instinctivement comme conservatrices ? Pour tenter de répondre il faut alors sortir du domaine stricte des arts décoratifs et aborder les débats esthétiques dans leurs ensemble, en puisant aux sources de l’histoire des idées, de celle de la peinture ou des institutions. La publication de ma thèse en 2004, à défaut d’être un aboutissement, me paraissait ouvrir sur ce type de questionnement2. Il me semblait avoir à peine commencé à comprendre le passage de l’idée d’objet d’art unique et destiné à une clientèle choisie, à celle d’objet industriel ou semi-industriel, intégré dans un système de production et de marché touchant un public de masse. En qualifiant cet 1 Louis HOURTICQ, « La méthode en histoire de l’art », Revue de synthèse historique, 1914, 1e semestre, p. 19. 2 L'Art dans Tout : les arts décoratifs en France et l'utopie d'un Art nouveau, préface de Jean-Paul Bouillon, Paris, CNRS Éditions, 2004. 6 art de « nouveau » il fallait bien admettre que quelque chose de l’ordre de la consommation – combien différente de la « délectation » - s’était introduit dans le champ anciennement séparé de l’art, quelque chose qui affectait l’intemporalité de l’objet d’art et qui en décrétait donc potentiellement le vieillissement et la mort. Walter Benjamin l’explique bien qui rappelle, à propos du Blumeshof de ses grands-parents : « Le mobilier de ses nombreuses pièces ne ferait aujourd’hui honneur à aucun brocanteur. Car, même si les productions des années soixante-dix étaient bien plus sérieuses du style 1900, elles se distinguaient par l’espèce de négligence par laquelle elles abandonnaient les choses au cours du temps, et ils s’en reportaient uniquement, pour ce qui était de leur avenir, à la solidité du matériau, et jamais au calcul rationnel. La misère ne pouvait avoir aucune place dans ces pièces où la mort elle-même n’en avait pas. Il n’y avait pas dans ces pièces de place pour mourir ; aussi leurs occupants mouraient-ils dans les sanatoriums, mais les meubles allaient chez les marchands à la première succession. La mort n’était prévue en eux. C’est pour cette raison qu’ils semblaient si “confortables” le jour, et devenaient la nuit le théâtre de mauvais rêves3. » Cet art « nouveau » en était pourtant bien un, puisque les artistes s’en voulaient les créateurs et que la critique s’acharnait à le considérer comme tel, en le chargeant au passage des valeurs les plus progressistes : sociales, tout d’abord, suivant l’utopie qui en désirait la diffusion pour « tous », esthétiques aussi, dans la mesure où l’idée de beauté, si longtemps associée à l’art classique, était censée revêtir les mécanismes parfaits de la machine et ses fonctions bien prosaïques, liées aux besoins matériels de la vie. Certes cette mutation avait touché le champ artistique tout entier à différents degrés mais c’est dans le domaine des arts « décoratifs », de l’intérieur et du décor que les effets étaient les plus sensibles. Là la confrontation avec les réalités de la fabrication et de la clientèle était la plus directe et la nécessité pressante de trouver des formes appropriées à des fonctions nouvelles et à des goûts sans cesse changeants prenait l’allure d’un défi lancé par le monde moderne aux prophètes et démiurges qu’architectes et décorateurs 3 Walter BENJAMIN, « 12, Blumeshof », in : Sens unique, précédé de Enfance Berlinoise, trad. de l’all. par Jean Lacoste, Paris, 10/18, 2000, p. 43. 7 prétendaient être. Les artistes ayant œuvré dans les quelques années du tournant du XIXe siècle avaient été les premiers à proposer un répertoire de formes prenant en compte ces données mais ils s’étaient heurtés à l’hostilité conjointe de la critique savante, de l’industrie, du marché et du public. Le nouveau siècle s’était ouvert sur l’échec cuisant de l’Exposition universelle de 1900 et sur le spectacle décourageant d’artistes contraints à présenter leurs créations en rangs dispersés, mêlés au disparate des stands industriels. Mais le sentiment de faillite marquait surtout la tentative volontariste de créer un style « moderne » dans lequel l’époque, tout en se reconnaissant pleinement, pût sublimer son histoire, ses goûts et ses mœurs comme cela avait été le cas pour les grandes époques de l’art.