UN ÉTÉ LYRIQUE Québec, un Salzbourg des Amériques ? ICI, à Radio-Canada, les captations, c’est fi ni ! Le Parc Sohmer : l’art lyrique à l’air libre Boulez et les maisons d’opéra

NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015

ENTRETIEN AVEC ANA SOKOLOVIĆ une compositrice de l’universel

10 $ Revue L’Opéra 04 PUCCINI STRAUSS

19 au 26 septembre 2015 21 au 28 novembre 2015

présente OTE LLO VERDI

30 janvier au 6 février 2016 21 au 28 mai 2016

PRODUCTION : PRODUCTIONS ODM INC.

4 opéras pour le prix de 3

ABONNEZ-VOUS ! operademontreal.com SOMMAIRE

ÉTÉ 2015

ÉDITORIAL 5 ICI, à Radio-Canada, les captations, c’est fi ni !

ACTUALITÉS 6 ENTRETIEN 12 Ana Sokolović, une compositrice d’une fébrilité créatrice

DOSSIER 17 L’Opéra souligne les cinq ans d’existence du Festival d’Opéra de Québec et son ambition de devenir le Salzbourg des Amériques

PORTRAITS 20 L’Opéra présente Myriane Bourgeois de Montréal, Hugo Laporte de Québec et Simon Landry de Sherbrooke

PROFIL 25 Les Jeunes associés de l’Opéra de Montréal

12 17 MÉMOIRE 26 Ana Sokolović Le parc Sohmer de Montréal : l’art lyrique à l’air libre 3 CRITIQUES 28 Opéras, concerts, récitals, festivals, CD/DVD, livre

BANDE DESSINÉE 44 Wilfrid et Léo • Acte IV

CALENDRIER 45 PAMPHLET 50 26 50 Faut-il faire sauter les maisons d’opéra ? La terrasse au Parc Sohmer Pierre Boulez

L’Opéra • Revue québécoise d’art lyrique 100, rue Sherbrooke Est, bureau 1000, Montréal (Québec) H2X 1C3 Téléphone : 514 664-4642 – sans frais 1 888 256-2946 – revuelopera.org – [email protected] Fondée en 2014 ABONNEMENTS Tous droits réservés 4 numéros par année © CLEF • Centre lyrique d’expression française, 2015 L’Opéra • Revue québécoise d’art lyrique est (septembre, décembre, mars et juin) publiée sous l’égide du CLEF • Centre lyrique Prix régulier * : Toute reproduction, adaptation ou traduction est d’expression française, un organisme sans but lucratif. 4 numéros (1 an) : 60 $ • 8 numéros (2 ans) : 100 $ 12 numéros (3 ans) : 144 $ interdite sauf avec accord de la direction. Tous Abonnement institutionnel (1 an) : 100 $ les efforts ont été faits pour obtenir l’autorisation * Frais de poste et taxes inclus des titulaires des droits d’auteur. Dans le cas revuelopera.org/abonnement d’un document utilisé par inadvertance ou dans l’hypothèse où il s’est avéré impossible de retrouver TPS : 841 744 576 RT 0001 le titulaire des droits d’auteur, la reconnaissance TVQ : 122 028 9288 TQ 0001 La revue L’Opéra est un outil d’information d’un tel droit se fera dans un numéro ultérieur de Impression : L’Empreinte sur la vie lyrique au Québec et le rayonnement la revue. de ses artistes à travers le monde. Elle se veut Dépôt légal un instrument de communication, d’échange Bibliothèque et Archives nationales du Québec et de dialogue avec toutes les personnes qui se Bibliothèque et Archives Canada passionnent pour l’art total qu’est l’opéra. ISSN 2368-3104 Distribution : Messageries Dynamiques

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 L’ÉQUIPE DE L’OPÉRA

DIRECTION ET RÉDACTION CONCEPTION GRAPHIQUE Directeur : Daniel Turp ET NUMÉRIQUE Rédactrice en chef : Graphisme et typographie : Lorraine Drolet Infographie I-Dezign Secrétaire de rédaction : Direction numérique : Justin Bernard François Xavier Saluden Révision : Serge Lamarre Correspondance : Mercedes Roy Critiques : Pascal Blanchet MARKETING ET De gauche à droite : François Xavier Saluden, Lorraine Drolet, Justin Bernard, Mémoire : Pierre Vachon COMMUNICATIONS Daniel Turp, Serge Lamarre, Pierre Vachon, Mercedes Roy, Frédéric Cardin, Portraits : Frédéric Cardin Directrice : Florence Troncy Florence Troncy et Pascal Blanchet

AVEC LA COLLABORATION DE André Greusard André Mireille Barrière Luc Bellemare Marie-Hélène Benoit-Otis Louis Bilodeau Éric Champagne Jean-Philippe Marc-Olivier Laramée Chercheuse indépendante Musicologue Musicologue Musicologue Compositeur Côté-Angers Journaliste Musicologue

4

Hugo Lévesque Florence Leyssieux Guy Marchand Jean-Jacques Nattiez Marie-Claude Perron Simon Rivard Rémy Simard Musicologue Musicologue Musicologue Musicologue Musicienne (altiste) Chef d’orchestre Bédéiste

CORRESPONDANCE COUVERTURE La photo de couverture est une réalisation de Pierre-Étienne Bergeron et a été captée à l’atelier CHERS LECTEURS, COMMENTAIRES REÇUS de M. Glen Lemesurier, de Van Horne Terminal Iron CHÈRES LECTRICES, SUR NOTRE PAGE FACEBOOK Works, rue Van Horne à Montréal. Nous remercions M. Lemesurier de son accueil. Nous vous savons passionnés. Ces courriels Heureuse et douce découverte que je fais ce p.m. et ces lettres que vous nous adresserez, nous Accompagnement agréable en ce dimanche. disant ce qui vous fait vibrer dans le monde de Merci pour tant de grâce et de beauté ! l’art lyrique au Québec et partout ailleurs où Carmen Bergeron nos artistes rayonnent, apporteront une valeur ajoutée à notre revue, à votre revue. Magnifi que revue. Belle présentation, papier de qualité. articles fort intéressants. longue vie à L’OPÉRA. À vos plumes ! Claude Richard

Mercedes Roy Magnifique Revue ! Enfin une publication [email protected] québécoise d’art lyrique. Je m’abonne. Micheline Paquette

ERRATUM ABRÉVIATIONS L’Opéra – Revue québécoise d’art lyrique tient à remercier AN : Animation AV : Accompagnement vocal CC : Chef de chœur madame Jacqueline Desmarais pour son soutien fi nancier. Dans la critique de Lakmé, page 35 du numéro 3, DM : Direction musicale INT : Interprète INS : Instrumentiste MS : Mise en scène ORG : Organiste PIA : Pianiste printemps 2015, la source de la photo aurait dû être NDLR : Dans la revue, le pluriel masculin englobe parfois les attribuée à Christian Quezada plutôt qu’à Pierre- deux genres, dans le seul but de ne pas alourdir le texte. Étienne Bergeron. Toutes nos excuses. Les opinions exprimées par les auteurs dans cette revue Le logo L’Opéra a été conçu ne refl ètent pas nécessairement celles de la rédaction. par Melissa Jean-Brousseau.

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Musique, résulte d’une transformation majeure de la radio d’État et n’a pas été à l’abri de ICI, À RADIO-CANADA, griefs du milieu culturel et musical et, de son auditorat. Au lendemain de l’annonce de la création d’Espace Musique, un Mouvement LES CAPTATIONS, C’EST FINI… pour une radio culturelle au Canada voyait le jour. Initié par le professeur Jean Portugais, ce mouvement publiait un argumentaire et présentait une plainte au Conseil de radio- LA LENTE AGONIE DE RADIO-CANADA télévision canadienne (CRTC) tant en ce qui concerne la musique classique que la ET L’URGENT BESOIN D’UNE RADIO-QUÉBEC littérature, la philosophie, les beaux-arts, la par Daniel Turp danse, le cinéma et les sciences. La pétition lancée à l’automne 2004 allait recueillir 30 000 signatures. près la disparition de la Chaîne culturelle d’accorder au milieu une précieuse aide A au profit d’Espace Musique et son financière, mais aussi et surtout de faire Quelques années plus tard et à la suite de remplacement par ICI Musique, la mise à découvrir, mieux connaître et apprécier nouveaux changements érodant encore l’écart d’une génération de grands animateurs les artistes d’ICI. La présence de la radio davantage la place de la musique classique sur et de réalisateurs et le récent Requiem pour d’État et de ses équipes d’animateurs et Espace Musique, le Mouvement Radio-Québec L’Opéra du samedi, la Société Radio-Canada de réalisateurs était aussi une marque de émergeait et proposait en 2007 la création a maintenant décidé de mettre fin, le 1er reconnaissance à l’égard des musiciens et d’un service public de radiodiffusion pour le avril 2015, aux captations de concerts et musiciennes et conférait aux événements un Québec. Ce mouvement suscitait également d’autres événements musicaux. Comme nous prestige certain. La fi n des captations, c’est une adhésion et surtout de l’espoir. l’apprenaient les musiciens de l’Orchestre pour les artistes, un message d’abandon. Métropolitain dans un texte collectif publié Plutôt que de s’acharner sans succès sur sous le titre « Radio-Canada doit reculer » Doit-on se surprendre d’une telle décision ? Radio-Canada dont la direction fait la sourde 5 dans Le Devoir du 30 mai 2015, c’est Yannick Après le saccage de la Chaîne culturelle, dont oreille à tous les griefs formulés depuis la Nézet-Séguin, avec l’accord de Laurent la mise en ondes remontait à 1997, Radio- disparition de la Chaîne culturelle, n’est-il pas Major, le réalisateur de l’émission Soirées Canada n’a cessé de diminuer l’importance enfi n temps de faire naître Radio-Québec ? Ne classiques, qui leur a annoncé cette nouvelle de la place dédiée aux diverses expressions s’impose-t-il pas désormais d’offrir, comme le de vive voix après un concert, le 29 mars 2015. de la musique savante, qu’il s’agisse de la fait Télé-Québec, une programmation destinée Trois concerts captés avant le 1er avril ont été musique classique, de l’art lyrique ou du à « développer le goût du savoir, de favoriser diffusés en mai et une captation du concert répertoire contemporain. Présenté lors de l’acquisition de connaissances, de promouvoir de l’Ensemble contemporain de Montréal sa création en septembre 2004 comme « une la vie artistique et culturelle et de refl éter les (ECM+) semble avoir été faite après cette radio unique dans le marché [qui] privilégiera réalités régionales et la diversité de la société date-butoir, soit le 30 avril, et diffusée ce sur ses ondes la diversité musicale », Espace québécoise ». À cette fin, Radio-Québec, en 27 mai 2015. Une lecture du programme des Musique marginalisait la musique savante collaboration d’ailleurs avec Télé-Québec Soirées classiques pour le mois de juin 2015 dans une programmation axée dorénavant et, pourquoi pas une Toile-Québec, pourrait permet de constater que l’ère des captations sur plusieurs grands styles musicaux. Au proposer une programmation en enregistrant, semble bel et bien fi nie. classique, et jazz, s’ajoutaient dorénavant captant et produisant un nombre signifi catif la chanson et la musique du monde. Depuis, des concerts donnés par les orchestres et Cette décision est inacceptable et constitue le nombre de concerts faisant l’objet de ensembles nationaux, régionaux et locaux un nouvel affront au milieu et au public de captations au Québec et au Canada, diffusées du Québec, présentés par les conservatoires la musique au Québec. Depuis ses débuts, en direct ou en différé, s’est vu réduire comme et facultés de musique et organisés dans le le 2 novembre 1936, le service public de une peau de chagrin. Un examen attentif cadre des nombreux festivals de musique radiodiffusion de Radio-Canada avait de la programmation des dernières années se déroulant sur l’étendue du territoire du décidé de conférer à la musique classique révèle d’ailleurs que la vaste majorité des Québec. Radio-Québec pourrait aussi devenir une place de choix dans sa programmation. concerts diffusés lors des Soirées classiques, ce que n’a jamais été ESPACE Musique et Il s’était aussi fait un devoir de soutenir les n’occupant d’ailleurs plus que trois soirées ce que n’est pas non plus ICI Musique : une ensembles orchestraux, les compagnies par semaine, viennent d’Europe et de l’Union institution enracinée dans le milieu musical. lyriques, les festivals d’été et les jeunes européenne de radiodiffusion. artistes en enregistrant leurs concerts et en Ainsi, à la lente agonie de Radio-Canada, assurant leur diffusion à travers le pays. Ce Ce virage effectué par les dirigeants d’Espace correspond aujourd’hui l’urgent besoin d’une partenariat avait d’ailleurs pour conséquence Musique, et qui se poursuit par ceux d’ICI Radio-Québec.

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TRENTE-SEPTIÈME SAISON DU FESTIVAL INTERNATIONAL DU DOMAINE FORGET 20 juin au 23 août 2015

our sa 37e saison, le Festival international du Domaine Forget présentera Pen guise d’ouverture, Les Violons du Roy et la soprano Karina Gauvin sous la direction du chef anglais Paul Goodwin, dans un programme consacré à Mozart, le 20 juin à la salle Françoys-Bernier. Outre plusieurs LES LAURÉATS DU CONCOURS pièces instrumentales mettant en vedette le fl ûtiste Philippe Bernold, le hautboïste Pedro Diaz, le bassoniste Daniel Matsukawa et le corniste Louis- MUSICAL INTERNATIONAL DE Philippe Marsolais, quelques-uns des plus beaux airs d’opéra et de concert du compositeur seront au programme. Karina Gauvin chantera certaines pièces MONTRÉAL DE 2015 de son dernier disque, où elle est accompagnée par l’Orchestre de chambre u terme de la fi nale d’une compétition qui avait débuté le 25 mai 2015, de Québec (Atma Classique, 2014). A le Concours musical international de Montréal (CMIM) a annoncé le 3 juin les lauréats de sa 15e édition dédiée au chant. Le premier prix a été Le Festival pourra à nouveau compter sur Marie-Nicole Lemieux. attribué au ténor coréen Keonwoo Kim, le deuxième prix à la soprano Ambassadrice du festival pour une quatrième année, la contralto Hyesang Park et le troisième prix à la soprano québécoise France québécoise offrira un concert le 4 juillet, entourée des musiciens d’I Musici Bellemare. Le Concours a rassemblé 24 chanteurs venus de neuf pays sous la direction de Jean-Marie Zeitouni, dans un programme axé sur le qui ont participé à l’épreuve quart de fi nale tenue les 25, 26 et 27 mai. thème de la nuit. Elle interprétera entre autres les Nuits d’été de Berlioz. Douze jeunes artistes de six pays avaient accédé à l’épreuve demi-fi nale qui s’est déroulée les 29 et 30 mai. Le Concours s’est ensuite déplacé à Dans la série « Fougue et passion », un premier concert aura lieu le la Maison symphonique de Montréal où six candidats ont eu l’occasion 5 juillet à 15 h. L’Orchestre de la Francophonie, sous la direction de chanter avec l’Orchestre symphonique de Montréal sous la direction de Jean-Philippe Tremblay, accompagnera la soprano Measha de Johannes Debus lors de l’épreuve finale tenue les 2 et 3 juin. La Brueggergosman dans les Wesendonck Lieder de Wagner, avant de remise offi cielle des prix poursuivre avec des pièces instrumentales de Mozart et de Beethoven. a eu lieu lors du Concert- 6 gala qui s’est déroulé à la Le 15 août, pour clore la série Maison symphonique de « Les grands rendez-vous », les Montréal le 5 juin. Les barytons François Leroux et épreuves demi-finale, Russell Braun seront réunis, finale et le concert-gala aux côtés des pianistes ont fait l’objet d’une Michel Béroff et Olivier Godin webdiffusion qui a été ainsi que des chanteurs en archivée à l’adresse résidence au Domaine Forget. concoursmontreal.ca/fr/ Au programme, des mélodies Antoine Saito webdiffusion et peut être Hyesang Park, Keonwoo Kim et France Bellemare de Debussy, Fauré, Finzi, Lalo,

ainsi réécoutée. Concours international musical de Montréal – Mendelssohn et Brahms. Genevieve Lesieur/ Bleu Outremer www.cmim.org Chant 2015 domaineforget.com Marie-Nicole Lemieux

FESTIVAL ORFORD 2015 DEUXIÈME ÉDITION DU 27 juin au 15 août 2015 GALA LYRIQUE DE LAVAL 14 juin 2015 Le directeur artistique du Festival Orford Jean-François Rivest a prévu quelques événements à saveur lyrique durant l’édition 2015 du Opéra bouffe du Québec (OBQ) présente festival. L’Abbaye Saint-Benoît-du-Lac recevra le 4 juillet le Studio L’ la deuxième édition du Gala lyrique de de musique ancienne de Montréal et son chef Christopher Jackson Laval le dimanche 14 juin 2015 à 15 h à la dans un programme de musique italienne du XVIe siècle. Accompagné Maison des Arts de Laval. Sous la direction par quelques instrumentistes, le baryton Hugo Laporte, lauréat du de Simon Fournier, ce gala permettra concours OSM Standard Life 2014 présentera un récital Bach le 1er août. d’entendre les plus beaux airs d’opéras et festivalorford.ca d’opérettes dans une mise en espace de Simon Fournier Frédéric-Antoine Guimond. Seront réunis sur scène dans des duos, trios et quatuors les solistes Dominique Côté, Étienne Cousineau, Sophie de Cruz, Simon Fournier, Anick Pelletier, Martin Pilon, Charles Prévost-Linton, Chantal Scott et Éric Thériault. Le Chœur de l’OBQ et la pianiste Valérie Grenier accompagneront les solistes. Le gala sera placé sous la présidence d’honneur du directeur de L’Opéra- Revue québécoise d’art lyrique… Daniel Turp. operabouffe.org

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LES CONTES D’HOFFMANN DES ARTISTES LYRIQUES AU À L’OPÉRA-THÉÂTRE DE RIMOUSKI FESTIVOIX DE TROIS-RIVIÈRES 26 au 28 juin 2015 28 juin et 3 juillet 2015

our souligner le 135e anniversaire de ette année, le Festivoix de Trois- P la mort de Jacques Offenbach, l’Opéra- C Rivières donnera une belle place Théâtre de Rimouski présente Les contes aux jeunes artistes lyriques du d’Hoffmann. Le dernier opéra de ce Québec. Le 28 juin, à la Maison de la compositeur reconnu pour ses opérettes est culture de Trois-Rivières, la mezzo- une œuvre dite sérieuse qui fait par ailleurs soprano Maude Brunet et le ténor appel au registre fantastique. Elle raconte Jacques-Olivier Chartier offriront Samantha Louis-Jean l’histoire du poète allemand, à travers un récital de mélodies françaises et trois époques de sa vie sentimentale. Trois de lieder allemands. Autour du thème des rencontres amoureuses, ils Claude Robin-Pelletier Directeur général et artistique époques et trois femmes : Olympia, Antonia interpréteront L’amour et la vie d’une femme de Schumann, sur un Opéra-Théâtre de Rimouski et Giulietta. Appartenant à l’imaginaire recueil de poèmes d’Adelbert von Chamisso. Accompagnés au piano par poétique d’Hoffmann, celles-ci connaîtront Marie-Ève Scarfone, ils chanteront ensuite un fl orilège de mélodies de toutes un destin tragique. La production annuelle de l’Opéra-Théâtre de Gabriel Fauré, dont les Poèmes d’un jour et Cinq mélodies de Venise. Rimouski donnera lieu à trois représentations à la salle Desjardins-Telus les 26 et 27 juin à 19 h 30 et le 28 juin 2015 à 13 h 30. Le 3 juillet, toujours au même endroit, la soprano Samantha Louis-Jean operarimouski.com présentera un récital composé d’airs d’opéras italiens. Le 4 juillet, c’est la soprano Marianne Fiset que l’on pourra entendre en récital dans cette même salle. festivoix.com

TRENTE-HUITIÈME ÉDITION SIXIÈME ÉDITION DU FESTIVALOPÉRA DU FESTIVAL DE LANAUDIÈRE DE SAINT-EUSTACHE 7 4 juillet au 2 août 2015 10 au 12 juillet 2015

our sa 38e saison, le Festival de a sixième édition du FestivalOpéra de Saint-Eustache aura lieu du PLanaudière présentera dans L 10 au 12 juillet 2015 et la directrice artistique Leila Chalfoun a conçu l’Amphithéâtre Fernand-Lindsay un programme destiné à mettre en valeur la relève lyrique québécoise. une programmation riche en Un concert intitulé « Ménage à trois » sera présenté le samedi 11 juillet événements à caractère lyrique. 2015 au Centre d’art de la Petite Église à 20 h avec le sopraniste Étienne L’Orchestre Métropolitain et Cousineau et son invitée Geneviève Charest. Accompagnés par le son chœur ouvriront le Festival le pianiste Pierre McLean, ils chanteront des airs d’opéras, d’opérettes 4 juillet à 19 h 30 et interpréteront et de comédies musicales. Un grand concert extérieur gratuit sera la Messe nº 3 en fa mineur de présenté à la Promenade Paul-Sauvé le dimanche 12 juillet à 14 h 30. Bruckner, œuvre sacrée dans On y entendra le ténor et lauréat du Concours OSM-Standard Life 2014, laquelle les voix sont à l’honneur. Hugo Laporte, qui interprétera des airs d’opéra et partagera la scène Le chef Yannick Nézet-Séguin avec les Jeunes ambassadeurs lyriques Karine Boucher, Sarah Vardy, a choisi comme solistes quatre Armine Kassabian, Kristin Hoff, Steeve Michaud, Hwanjoo Chung et Ute Lemper jeunes artistes qui font ou ont fait Marc-Antoine d’Aragon. Jérémie Pelletier les accompagnera au piano. leur marque à l’Atelier lyrique de Ces deux événements seront Montréal, Karine Boucher, Stéphanie Pothier ainsi que Jean-Michel précédés d’une classe de maître Richer et Cairan Ryan. Le 11 juillet, Karina Gauvin et Frédéric publique donnée par la directrice Antoun, auxquels se joindront Andréanne Brisson-Paquin, Michèle du festival Leila Chalfoun destinée Losier et Alain Coulombe interpréteront Le pèlerinage de la rose à dix jeunes artistes lyriques, et de Schumann. Dans un registre plus profane, l’actrice et chanteuse qui aura lieu le vendredi 10 juillet allemande Ute Lemper présentera le 24 juillet à 20 h un concert- 2015 au Centre d’art de la Petite cabaret intitulé « Dernier tango à Berlin ». Elle interprétera des Église de Saint-Eustache à 17 h. Le mélodies de Kurt Weill (Yukali, Sourabaya Johnny, Chanson de Festival se prolongera le 1er octobre Bilbao), de Jacques Brel (Dans le port d’Amsterdam, Ne me quitte prochain avec la présentation pas) et d’Astor Piazzolla (Yo soy Maria, Pajaros perdidos), aux d’une nouvelle production et d’une côtés de grands classiques des cabarets berlinois et de la chanson première québécoise et canadienne française (Édith Piaf). Enfi n, le 1er août, l’Orchestre symphonique de de l’opéra Cendrillon de la Montréal et son chœur, sous la direction de Kent Nagano, présentent compositrice française Pauline la Missa solemnis de Beethoven avec, comme solistes, Aline Kutan, Viardot. Leila Chalfoun Michèle Losier, Michael Schade et Christian Immler. festivaloperasteustache.com Directrice générale et artistique lanaudiere.org FestivalOpéra de Saint-Eustache

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CINQUIÈME ÉDITION DU FESTIVAL D’OPÉRA DE QUÉBEC 23 juillet au 5 août 2015

e Festival d’opéra de Québec, sous la direc-

L tion artistique de Grégoire Legendre, offre KytoharjuMaarit pour son édition de 2015 une riche program- Kaija Saariaho mation. Parmi les événements majeurs de ce cinquième Festival, mentionnons d’abord le troubadour du XIIe siècle, Jaufré Rudel, concert d’ouverture officielle, le 25 juillet à et d’une comtesse de Tripoli. Philip Addis 20 h au Palais Montcalm. Les Violons du Roy chantera le rôle principal, Erin Wall incarnera proposent un programme lyrique au cœur Clémence, tandis que Tamara Mumford sera le Michael Schade de la période baroque française, de Lully à Pèlerin. L’Orchestre symphonique de Québec Rameau. Accompagné par le Chœur de l’Opéra et le Chœur de l’Opéra de Québec seront de Québec, l’orchestre de chambre sera placé dirigés par le chef catalan Ernest Martinez- ORCHESTRE sous la direction de Martin Robidoux et sera Izquierdo. Quatre représentations sont SYMPHONIQUE DE joint par quatre solistes québécois de grand prévues : le 30 juillet ainsi que les 1er, 3 et 5 talent : Samantha Louis-Jean, soprano, Michèle août 2015 à 20 h au Grand Théâtre de Québec. MONTRÉAL : UNE VIRÉE Losier, mezzo-soprano, Antonio Figueroa, CLASSIQUE EN MODE ténor et Marc Boucher, baryton. Plusieurs autres événements sont au programme : • « Diva by night » avec Natalie Choquette ; LYRIQUE La production de l’opéra L’amour de loin • un grand concert sous les étoiles sur 7 et 8 août 2015 de Kaija Saariaho, sur un livret de Amin le thème « De Bernstein à Plamondon » Maalouf, sera l’événement-phare de cette avec Marc Hervieux, Marie-Josée Lord et cinquième édition. La mise en scène a été Gino Quilico ; a nouvelle saison estivale de l’Orchestre 8 confi ée à Robert Lepage et la conception des • « Rossini à l’apéro » avec Tempêtes et L symphonique de Montréal (OSM) sera décors, au scénographe Michael Curry. Il s’agit passions ; marquée par la tenue de la « Virée classique » d’une coproduction entre le Festival d’opéra • l’opéra jeunesse Arthur de Nathalie Magnan ; les 7 et 8 août 2015. En prélude, une version de Québec, la compagnie de production • Les Grands feux Loto-Québec et la abrégée de Carmen de Bizet sera présentée à Ex Machina et le Metropolitan Opera de New célébrissime Brigade lyrique. l’Esplanade du Stade olympique de Montréal York. L’opéra raconte l’histoire d’un prince festivaloperaquebec.com le 5 août à 19 h. Cette soirée en plein air avec chanteurs et danseurs sera animée par le comédien André Robitaille. Sous la direction de Kent Nagano, l’OSM et son INSTITUT CANADIEN D’ART VOCAL chœur partageront la scène avec plusieurs interprètes solistes, notamment Marianne ET FESTIVAL D’ART VOCAL DE MONTRÉAL Fiset dans le rôle de Micaëla. La « Virée 27 juillet au 18 août 2015 classique » accueillera Michael Schade, ce réputé ténor canadien, le vendredi 7 août dans le cadre d’un récital ; il interprétera des airs a prochaine session de l’Institut canadien d’art vocal (ICAV) se déroulera à la Faculté de d’opéras allemands et des lieder en compagnie L musique de l’Université de Montréal du 27 juillet au 14 août et se prolongera au Domaine de la pianiste Emily Hamper. L’événement Forget du 16 au 18 août. Elle rassemblera des stagiaires qui estival de l’OSM sera la création d’un cycle pourront parfaire leur formation auprès de Joan Dornemann, de mélodies du compositeur Régis Campo Judith Forst et Sherill Milnes. Ces artistes offriront à tour de dans le cadre d’une commande de l’OSM rôle des classes de maître les 27, 29 et 31 juillet ainsi que les mélodies que chantera la soprano Marie-Ève 17 et 18 août 2015. En cours de session, l’ICAV présentera son Munger le samedi 8 août à 15 h 45 à la Maison Festival d’art vocal de Montréal : un récital-compétition « La symphonique de Montréal. En seconde Voix est juste » (5 août à 19 h 30 – UdM, salle Serge-Garant), un partie de ce concert, l’OSM interprétera la récital de chant (7 août à 19 h 30 – UdM, salle Serge-Garant), Symphonie nº 5 de Beethoven. un récital « Cordes sensibles : Perspectives sur la joie et les amours perdus » avec le Quatuor Turovsky (9 août à 15 h – Chalet du Mont-Royal à Montréal), une soirée d’opéra 1 : L’elisir d’amore de Donizetti (10 août à 19 h 30 – UdM, salle Claude-Champagne), une soirée d’opéra 2 : Zanetto et L’Amico Fritz de Mascagni (14 août à 19 h 30 – UdM, salle Claude- Champagne), et un concert-Gala (14 août à 15 h – Domaine Forget, salle Françoys-Bernier). icav-cvai.ca Judith Forst

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ARTISTE À DOMICILE Marie-Ève Munger PARADIS PERDU

a soprano colorature Marie-Ève Munger Marie-Ève Munger a complété ses études à L aura fait fl èche de tout bois en cette saison l’École de musique Schulich à l’Université lyrique 2014-2015 qui s’achève ! Après la McGill et effectué des formations au Centre des sortie de son premier disque solo Colorature arts à Banff ainsi qu’à l’Opéra Glimmerglass paru chez Analekta au début de l’automne dans le cadre du « Young American Artist 2014 (L’Opéra, numéro 2, p. 42), elle a Program ». En 2012, le Prix Choquette-Symcox Bernard Richter enfi lé productions, concerts et récitals à un de la Fondation des Jeunesses Musicales du rythme endiablé. Au Wexford Opera Festival Canada, lui était décerné. ORCHESTRE en Irlande, on a pu l’entendre en octobre et novembre 2014 dans l’opéra Don Bucefalo Pendant l’été 2015, elle sera à domicile… au SYMPHONIQUE DE d’Antonio Cagnoni qui a été diffusé en direct Québec. Deux occasions seront ainsi données MONTRÉAL : PELLÉAS sur plusieurs radios à travers le monde ! pour l’entendre durant la saison estivale. Elle Marie-Ève Munger y chanta le grand rôle de participera d’abord à la « Virée classique » de ET MÉLISANDE Rosa. Elle a joué dans Le Pré aux clercs de l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) en ouverture de Louis Ferdinand Hérold à l’Opéra-comique et créera le cycle de mélodies Paradis perdu de Paris en mars et avril 2015. Elle a fait les de Régis Campo. Dirigé par son chef Kent la saison 2015-2016 rôles du Feu et du Rossignol dans L’enfant Nagano, l’Orchestre symphonique de Montréal et les sortilèges de Maurice Ravel, en 2012 à l’accompagnera dans cinq mélodies pour elléas et Mélisande, l’opéra de Debussy, Aix-en Provence/Tour in Morocco et en mai soprano colorature et orchestre sur des textes P a été choisi par le chef Kent Nagano pour 2015, elle a repris ces mêmes rôles dans une de Baudelaire, Saint-Denys Garneau, Nelligan, inaugurer la saison 2015-2016 de l’Orchestre version de concert présentée par l’Orchestre Rimbaud et Vivier commandées par l’OSM au symphonique de Montréal (OSM). Il s’agit symphonique de Chicago et son chef Esa- compositeur lyrique français. Cet événement 9 d’une version de concert qui mettra en vedette Pekka Salonen. En fi n d’année 2014, elle a aura lieu à la Maison symphonique de Montréal Bernard Richter et Hélène Guilmette dans les participé au Gala de l’Opéra de Montréal le samedi 8 août 2015. Marie-Ève Munger rôles-titres. L’OSM fait appel à Philippe Sly chantant dans le Messiah et l’oratorio Saül sera ensuite dans son coin de pays pour les dans le rôle de Golaud et à Nicolas Testé dans de Georg Friedrich Haendel à New York sous « Destinations lyriques » de la Société d’art celui du roi Arkel. La contralto Marie-Nicole la direction de Julian Wachner. Et en prime, lyrique du Royaume, dont elle fut directrice Lemieux incarnera le rôle de Geneviève, mère les lyricomanes du Québec ont pu apprécier artistique de 2007 à 2009, et elle y présentera de Pelléas et de Golaud. Florie Valiquette ses talents de récitaliste à la Société d’art un récital le 13 août 2015 dans le Jardin des (Yniold) et Hugo Laporte (un médecin) vocal de Montréal le 30 novembre 2014 et à Vestiges / Bâtiment 1912, à Saguenay. Un bon complètent la distribution. Les solistes seront la Société Pro Musica le 19 avril 2015. été lyrique à notre colorature nationale ! accompagnés par les musiciens de l’Orchestre et le Chœur de l’OSM, dirigés par Kent Nagano. Deux représentations auront lieu les 8 et 9 septembre 2015 à la Maison symphonique de Montréal. osm.ca

Marie Lenormand (La reine) et Marie-Ève Munger Rôle de Rosa dans Don Bucefalo de (Isabelle) dans Le Pré aux clercs de Hérold Cagnoni à Wexford Opera Festival Hélène Guilmette à l’Opéra-c omique – Paris en 2015 en 2014

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NOS ARTISTES… SUR LA ROUTE

Le baryton Jean-François Lapointe interpré- le 18 juin 2015, à la Brandeis University, à 16 juillet 2015 au Théâtre du Jeu de Paume. tera le rôle de Ford dans Falstaff de Verdi les Waltham, Massa chusetts. Elle présentera le Deux artistes lyriques du Québec prendront 4, 6, 9, 11 et 14 juin à l’Opéra municipal de même programme le 19 juin au Bard College également part à cette production, Florie Marseille. Le Grand Théâtre de Genève lui fait à Annandale-on-Hudson, dans l’État de New Valiquette dans le rôle de Milica et Mireille l’honneur de lui confier le rôle de Guillaume York, et au Bard College at Simon’s Rock, à Lebel dans celui de Ljubica. Tell dans l’opéra éponyme de Rossini les 11, 13, Great Barrington, Massachusetts le 20 juin. 15, 17, 19 et 21 septembre 2015. Elle participera également au Carmel Bach Le chef Yannick Nézet-Séguin dirigera Festival en Californie les 18, 19, 24, 25, 26 Le nozze di Figaro de Mozart les 16 et 19 juillet Le ténor Frédéric Antoun sera le narrateur et 30 juillet et 1er août 2015 et y interprétera au Festspielhaus de Baden-Baden dans le cadre dans Le Paradis et la Peri de Schumann à la des œuvres de Bach et Haydn. Elle y tiendra du festival de Baden-Baden. Basilique Saint-Denis de Paris le 4 juin 2015. également le rôle de Papagena dans l’opéra Die À la rentrée d’automne, il tiendra le rôle de Zauberfl öte (La fl ûte enchantée) de Mozart Nora Sourouzian sera la Principessa d’Eboli Thespis dans Platée de Jean-Philippe Rameau les 21 et 28 juillet 2015. dans une production de Don Carlo de Verdi à à l’Opéra de Paris les 7, 9, 11, 12, 14, 17, 20, 23, Gars am Kamp, (Oper Burg Gars) en Autriche 27 et 29 septembre. La soprano Aline Kutan participera le 28 les 17, 19, 22, 24, 26 et 30 juillet ainsi que les juin 2015 au concert des Chœurs éternels 1er, 5 et 8 août 2015. Dans le cadre du Festival de musique de à Boiscommun en l’Église Notre-Dame-de- Dresde, la soprano Karina Gauvin partici- Boiscommun en France. L’Opera de Colombia a invité la mezzo- pera à un concert à la Frauenkirche le 5 juin soprano Julie Boulianne à chanter avec le Venice Baroque Orchestra dans des Le contre-ténor Daniel Taylor chantera dans Charlotte dans une production de Werther œuvres de Vivaldi. la Passion selon Saint Matthieu de J. S. Bach de Massenet au Teatro Bellas Artes en au 63e Tilford Bach Festival et au St. John’s Colombie les 23, 25 et 30 juillet ainsi que le Au Wuppertal Opernhaus en Allemagne les 5, Smith Square à Londres les 14, 15 et 16 juin 1er août 2015. 6 et 7 juin 2015, la soprano Marianne Fiset 2015. Dans un programme intitulé « Amour et interprétera le personnage de Donna Elvira dans trahison », il participera au Festival « Musique Le tandem Barbe & Doucet livrera une 10 une production de Don Giovanni de Mozart. et autres mondes » d’Ottawa avec la soprano production de Turandot de Puccini les 25, 29 Dominique Labelle le 5 juillet 2015 ainsi qu’à et 31 juillet au Music Hall de Cincinnati. L’Opéra de Lyon confi e à la soprano Hélène un concert de son Theatre of Early Music le Guilmette l’important rôle de Mélisande 6 juillet 2015. Comme Dominique Labelle, La soprano Suzie Leblanc chantera dans le dans une nouvelle production de Pelléas il participera également au Carmel Bach Messiah de Haendel dans le cadre du Festival et Mélisande de Debussy les 8, 10, 12, 14, Festival, en Californie, du 18 au 30 juillet 2015, international baroque de Lamèque à l’église 16 et 18 juin. Elle fera aussi ses débuts aux où il sera d’ailleurs professeur en résidence. Sainte-Cécile de la Petite-Rivière-de-l’Île le Chorégies d’Orange dans le rôle de Frasquita Il présentera également avec son Theatre 25 juillet 2015. dans Carmen de Bizet les 8, 11 et 14 juillet au of Early Music un concert sur le thème du Théâtre Antique d’Orange. Elle y chantera aux « Couronnement du roi George II » avec la Marie-Nicole Lemieux prendra part, comme côtés de Jonas Kaufman qui sera le Don José musique de Gibbons, Purcell, Tallis et Haendel Hélène Guilmette, aux Chorégies d’Orange de cette production. au Stratford Summer Music, à Stratford en et incarnera Azucena dans une production Ontario, le 6 août 2015. d’Il trovatore de Verdi le 1er août 2015 à la Le baryton-basse Philippe Sly sera le Figaro Cours Saint-Louis d’Orange. dans Le nozze di Figaro les 14, 18, 21, 24, 27 L’opéra Svadba pour six voix de femmes a et 29 juin ainsi que les 3 et 5 juillet 2015 au cappella d’Ana Sokolovic (voir l’entretien Étienne Dupuis tiendra le rôle de Ramiro War Memorial Opera House de San Francisco. avec la compositrice dans le présent numéro) dans L’heure espagnole ainsi que ceux du Chat connaîtra sa création européenne en version et de l’Horloge dans L’enfant et les sor tilèges Dominique Labelle chantera dans un pro- scénique au Festival international d’art lyrique de Ravel les 8, 11, 13, 16, 18, 21, 23, 26, 28 et 30 gramme intitulé « Monumental Monteverdi » d’Aix-en-Provence les 3, 5, 9, 10, 11, 13, 14 et août 2015 au Festival d’opéra de Glyndebourne. Lino Alvares Lino Oron Aryeh Dominique Labelle Aline Kutan Daniel Taylor Nora Sourouzian

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ARTISTE D’ICI AILLEURS ARTISTE D’AILLEURS, ICI JEAN-FRANÇOIS LAPOINTE

Jean-François Lapointe est l’un des artistes lyriques québécois les plus sollicités sur la scène internationale. Son agenda a été fort chargé au cours du printemps 2015 et un autre rôle important l’attend pour terminer sa saison 2014-2015.

En mars, il a chanté le rôle de Valentin, aux côtés de Piotr Beczala, sous la direction de Michel Plasson, dans une production de Faust de Gounod à l’Opéra national de Paris (Bastille). Il a également fait partie ROLANDO VILLAZÓN en avril de la distribution de La traviata de Verdi au Deutsche Oper de Berlin, y Pour clôturer sa saison 2014-2015, l’Orchestre Métropolitain et son incarnant le rôle de Giorgio chef Yannick Nézet-Séguin ont invité le ténor Rolando Villazón. Cet Germont. Et en mai, il événement aura lieu le dimanche 21 juin 2015 à 15 h à la Maison tenait le rôle-titre de l’opéra symphonique de Montréal. Lors de cette première visite au Québec, Hamlet de Thomas à l’Opéra l’artiste lyrique franco-mexicain interprétera des mélodies et des airs d’Avignon. Le baryton d’opéra de Massenet, Mozart et Verdi. Il s’agira de sa première visite québécois interprétera par au Québec. ailleurs le rôle de Ford dans Falstaff de Verdi les 4, 6, Né à Mexico en 1972, Rolando Villazón a été l’élève du baryrton 11 9, 11 et 14 juin à l’Opéra mexicain Arturo Nieto et a complété sa formation au Conservatorio municipal de Marseille. Nacional de Música à Mexico avec le professeur Enrique Jaso. Il a également étudié avec Gabriel Mijares et a pris part à des classes de Le chanteur ajoutera un maître de Joan Sutherland alors qu’il participait au Merola Program au rôle fort important à son San Francisco Opera en 1992. Il obtint son premier rôle d’importance répertoire au début de la dans cette dernière compagnie en incarnant Alfredo dans La saison prochaine. Le Grand traviata. Sa carrière internationale prit un véritable élan lorsqu’il Théâtre de Genève lui confi e interpréta le rôle de Des Grieux dans Manon à l’Opera di Genova en le rôle de Guillaume Tell 1999 et fut consacré par sa prestation avec Anna Netrebko dans la dans l'opéra éponyme de production de La traviata au Festival de Salzbourg en 2005. Rossini les 11, 13, 15, 17, 19 et 21 septembre 2015. Il s’est distingué depuis lors dans un répertoire très vaste, allant de Interprète réputé du répertoire français, autant pour les opéras et l’opéra baroque jusqu’aux grandes œuvres de Wagner, en passant opérettes du XIXe siècle que pour les œuvres du début du XXe siècle et par l’opéra français et italien. Parmi ses autres rôles de prédilection, le répertoire mélodique, Jean-François Lapointe s’est fait notamment on compte ceux de Don Carlos, Faust, Hoffman, Rodolfo, Roméo et connaître dans le rôle-titre de Pelléas et Mélisande de Debussy, Tristan. Rolando Villazón a par ailleurs prêté sa voix au personnage dans plusieurs productions de L’enfant et les sor tilèges de Ravel et de Nikolaus Sprink, ténor à l’opéra de Berlin, dans le fi lm Joyeux d’Hamlet de Thomas. Parmi les enregistrements à son actif, il y a lieu Noël du réalisateur français Christian Carion. Ce fi lm est d’ailleurs à de citer La jolie fi lle de Perth de Massenet (EA 1998) et Benvenuto l’origine de l’opéra Silent Night de Kevin Putts qui a clôturé la saison Cellini de Berlioz (Virgin Classics (2003). Il fi gure également sur 2014-2015 de l’Opéra de Montréal. deux DVD d’opéras : Le Mage de Massenet (Palazzetto Bru Zane, La discographie et vidéographie de Rolando Villazón est imposante. 2013) et Ciboulette de Reynaldo Elle comprend notamment plusieurs intégrales d’opéra, mais Hahn (Fra Musica, 2014) – voir la également des récitals : Airs d’opéras italiens et Airs d’opéra de critique de ce dernier DVD dans Gounod et Massenet parus chez Virgin Classics (2004 et 2005). Chez le présent numéro. Il a égale- Deutsche Grammophon, il a gravé The Berlin Concert avec Plácido ment enregistré pour l’étiquette Domingo et Anna Netrebko en 2005 et Duets avec Anna Netrebko en québécoise Analekta les CD 2007. Il a en outre fait partie de la distribution de l’opéra Roméo et Poètes maudits de la mélodie Juliette de Gounod paru en DVD sur étiquette Deutsche Grammophon française et Poème de l’amour en 2008 et de celle des opéras Don Giovanni et Così fan tutte et de la mer (Chausson-Duparc) enregistrés en CD sur la même étiquette en 2012 et 2013, sous la en 2006. direction musicale, dans ces trois cas, de Yannick Nézet-Séguin !

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 ENTRETIEN ANA SOKOLOVIĆ Une compositrice de l’universel

La compositrice Ana Sokolović a opté pour l’opéra comme l’une de ses formes privilégiées d’expression artistique. Née à Belgrade et diplômée de grandes institutions musicales de Serbie, l’artiste a choisi le Québec comme terre d’adoption en 1992 et y est devenue depuis lors l’une de ses compositrices les plus sollicitées. Pour souligner sa contribution à la vie musicale du Québec, la Société de musique contemporaine du Québec (SMCQ) lui consacrait une Série hommages en 2011-2012. Ana Sokolović a signé à ce jour la musique de trois opéras, et notamment de Svadba. Après avoir été créée à Toronto et jouée à Edmonton et Philadelphie, cette œuvre lyrique pour six voix féminines a cappella connaîtra sa première européenne au Festival d’Aix-en-Provence en juillet 2015 et fera l’objet d’une tournée méditerranéenne et européenne. Elle vient par ailleurs de recevoir une commande de la Canadian Opera Company pour mettre en musique la pièce de théâtre Christine, la Reine-Garçon de Michel-Marc Bouchard. L’Opéra vous propose une entrevue avec une femme d’exception dont les mots réconfortants nous ont fait découvrir

une compositrice de l’universel. Lefort Alain

’opéra occupe une place de plus en la musique ? Pour toutes sortes de raisons, 15 minutes cette fois ; j’ai alors composé, sur L plus importante dans votre vie de j’ai choisi la musique, mais j’ai vécu une un texte de Nathalie Mamias, Six voices for compositrice. Comment devient-on grande frustration, celle de ne pouvoir faire sirens / Six voix pour six reines. Ainsi, une 12 compositrice lyrique ? des études en théâtre et en musique à la longue collaboration naissait ! fois. Je souffrais de ne pas faire de théâtre. Le parcours des personnes qui écrivent Jalouse des artistes sur scène et ayant À la suite de cette pièce, ils m’ont immédia- pour l’opéra est très atypique. On n’apprend souhaité être à leurs côtés, j’ai évité d’y aller tement commandé un opéra de chambre. pas comment écrire un opéra dans les pendant plusieurs années. Mais comme je J’étais très excitée par le projet. Je n’avais institutions musicales. Ce n’est sans doute m’ennuyais tellement, j’ai fi nalement renoué jamais écrit d’opéra. Hop ! Il fallait que je me pas parce qu’on ne veut pas le faire, c’est avec le théâtre et j’y ai retrouvé mes liens. lance. Sur un livret rédigé par Paul Bentley, plutôt parce que le processus de composition J’ai travaillé dans un théâtre de jeunes j’ai commencé à composer la musique de d’un opéra est complexe. L’on ne peut guère en devenant l’assistante de l’un de mes Midnight Court. Je me sentais totalement à envisager de préparer un musicien ou professeurs qui était aussi metteur en scène. l’aise. J’étais en terrain connu. Ma connais- une musicienne à la composition lyrique J’ai ainsi enseigné le théâtre aux jeunes et j’ai sance du théâtre était un atout. En fait, je dans le cadre d’études. Il y a d’ailleurs écrit de la musique de théâtre. C’était là pour n’ai pas pensé au livret d’un point de vue de tellement de choses à apprendre lorsque moi une consolation. Mais ce fut également la musicien, mais plutôt de celui d’une personne l’on choisit la filière « composition » dans voie qui m’a menée à l’opéra. issue du théâtre. Et plus j’y travaillais, plus je les conservatoires et universités. On s’y me sentais inspirée. Je comprenais que c’était intéresse à la voix comme on s’intéresse Pourriez-vous nous parler de vos vraiment comme au théâtre. Je commençais à tout autre instrument. Et l’accent est premières œuvres à caractère vocal et à comprendre pourquoi Richard Wagner avait mis essentiellement sur la technique lyrique et du sentiment qui vous animait qualifi é l’opéra « d’œuvre totale ». Et j’ai pris vocale. Mais l’opéra est bien plus qu’une lors de ces premières expériences en conscience du fait que mes deux passions, technique vocale. C’est aussi une technique composition ? le théâtre et la musique, se rencontraient. théâtrale. Et ces deux techniques ne sont Je réalisais que ce que je faisais était ce que jamais enseignées simultanément dans les La première commande que j’ai reçue pour une j’avais toujours voulu faire. Je concrétisais institutions musicales. œuvre vocale était une courte pièce dont la ce qu’il m’avait toujours semblé impossible durée devait être de trois minutes commandée à réaliser : faire à la fois du théâtre et de la Serait-ce alors le théâtre qui vous a par l’Ensemble contemporain de Montréal musique. conduite à l’opéra ? (ECM+). J’ai accepté avec un grand plaisir et j’étais très contente de pouvoir expérimenter Est-ce que l’on doit croire que ce fut le Absolument. Je me suis toujours grandement pour la première fois la composition vocale. début de votre vocation lyrique ? intéressée au théâtre et j’en ai fait de En 1996, j’ai ainsi pu écrire Pesma, une pièce façon poussée dans mon enfance et mon pour mezzo-soprano, fl ûte, deux clarinettes, Pendant la composition de ce premier opéra, adolescence. Au moment de m’inscrire à piano, violon, alto et violoncelle. Trois ans j’ai vécu une véritable fébrilité créatrice. Je l’université, il fallait choisir : est-ce que je plus tard, la compagnie Queen of Puddings me suis découvert, en effet, une vocation veux aller en théâtre ou devrais-je choisir Music Theatre me commandait une œuvre de lyrique. Ce genre musical reliait ainsi mes

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J’ai le sentiment qu’un tel message a reçu un écho favorable depuis la création de Svadba au Berkeley Street Theatre de Toronto en 2011 et lorsqu’il a également été présenté dans la même version scénique aux opéras d’Edmonton et de Philadelphie en 2013. Cet opéra de chambre se prête également bien à des versions de concert. Deux d’entre celles-ci ont eu lieu en Amérique du Nord, à Calgary et Vancouver. Des versions de concert de Svadba ont également été présentées dans le cadre d’une tournée européenne qui a fait connaître l’œuvre aux publics de Belgrade, Dublin, Orléans et Paris.

Et c’est le Festival international d’art lyrique d’Aix-en-Provence qui présentera maintenant Svadba durant l’été 2015. Comment avez-vous réagi lorsque le directeur Bernard Foccroulle vous a Guntar Kravis Guntar

John LauenerJohn invitée à son prestigieux festival ? Krisztina Szabó dans The Midnight Court, Shannon Mercer – en studio pour Love songs, 2010 au Harbourfront Centre à Toronto, 2005 Je me suis sentie honorée. C’est à l’occasion deux passions les plus chères. D’ailleurs, commandé The Queen of Puddings Music du passage de Bernard Foccroulle à Montréal je me rappelle d’avoir téléphoné à Dáirine Theatre (qui a été présenté récemment à en octobre 2013, et plus particulièrement à Ní Mheadhra qui avait été à l’origine de Montréal et dont vous pouvez lire la critique l’Université de Montréal qui lui décernait un la commande de Midnight Court pour la dans le présent numéro à la page 31), que doctorat honoris causa, que les premiers remercier. Et elle m’a demandé : « Pourquoi j’ai approfondi ma connaissance de cet échanges ont eu lieu. Il avait entendu parler de me remercies-tu ? ». Et je lui ai répondu : « Je instrument. Tout d’abord, l’écriture pour une Svadba par le directeur d’Opera Philadelphia viens de comprendre ce que je cherche dans la voix seule et le travail étroit avec l’interprète David B. Devan qui avait inclus Svadba dans 13 musique. Je cherche la dramaturgie théâtrale m’a permis de chercher dans les profondeurs la programmation de sa saison 2013-2014. Et le dans tout ce que je fais, de la musique la technique, l’expressivité mais aussi les directeur d’Aix m’a tout simplement demandé instrumentale à l’art lyrique ». J’ai compris que limites de la voix humaine. Après avoir réalisé de lui faire parvenir la partition. Et, peu de je ne voudrais plus arrêter d’écrire des opéras. une première ébauche sur cette pièce, je me temps après, j’apprenais, que l’opéra serait suis rendu compte que les explications de la présenté durant l’été 2015 et qu’il s’inscrivait Et qu’en est-il de cette matière première technique vocale étaient trop détaillées, et dans le cadre du projet méditerranéen de son de l’opéra qu’est la voix ? que fi nalement, l’interprète aurait pu fi nir par festival. Cet événement propose un dialogue se perdre. Il fallait simplifier la partition et interculturel en favorisant la rencontre Plus on écrit pour l’opéra, plus on découvre faire plus confi ance au chanteur. Le travail de d’artistes issus de différents horizons, les la voix, plus on la compare aux instruments préparation et de répétition avec les artistes coproductions, la circulation des œuvres et d’orchestre. Et l’on doit se demander : est-ce lyriques fait d’ailleurs partie de ce que j’aime des talents émergents. que l’on compose pour la voix comme on le plus. Il ne faut pas oublier que derrière compose pour l’orchestre ? L’écriture pour la voix, il y a un homme ou une femme qui La création européenne en version scénique les instruments d’orchestre, comme pour la peut parler. Et j’aime entendre les interprètes aura lieu le 3 juillet 2015. La chef Dáirine voix, peut être complexe. Mais la particularité parler de leur voix et m’aider à découvrir leurs Ní Mheadhra assurera la direction musicale des voix est dans leurs emplacements, dans couleurs et leurs nuances, et mieux encore, de la production et la mise en scène a été le corps humain. Les paramètres acoustiques leur beauté. Cela est absolument passionnant. confiée à Ted Huffman et Zack Winokur. Je exigent des compositeurs d’avoir un type me réjouis du fait que l’une des chanteuses de contact différent avec les chanteurs Ce sont six voix, a cappella, que vous avez de la première production, la soprano qu’avec les autres instrumentistes. La voix, réunies dans Svadba, le dernier-né de vos torontoise Andrea Ludwig, fera partie de cet instrument dont chaque être humain est opéras ? la distribution d’Aix et que deux artistes pourvu, est si difficile et si simple à la fois. lyriques du Québec, Mireille Lebel et Florie Mais il est aussi fragile, très fragile. Et c’est Des voix lyriques, en effet, pour des chants Valiquette, seront également associées à cette un instrument fascinant, le plus fascinant. Ma folkloriques de Balkans en différents dialectes nouvelle production de Svadba. Trois autres recherche de ces possibilités n’est donc pas et d’époques distinctes, dont je me suis chanteuses européennes, Jennifer Davis, terminée ! inspirée pour composer un opéra racontant Liesbeth Devos et Pauline Sikirdji feront partie un rituel marial. Ce rituel en sept scènes, et de la distribution et j’ai bien hâte de découvrir Est-ce que plus on compose pour la voix, une seule soirée précède le mariage, il en est le leurs voix. J’anticipe le plaisir d’entendre ces plus on apprend sur la voix ? prélude. À travers une histoire locale serbe, j’ai nouvelles interprètes de Svadba et de tomber voulu raconter une histoire universelle. Sans amoureuse, comme cela m’arrive toujours, de Oui. C’est en composant Love songs, ce mono- doute, suis-je à la recherche de la beauté, je leurs voix, de ces voix qu’elles prêtent aux opéra pour voix féminine seule, que m’avait veux la dire et la décrire à travers la musique. personnages de l’opéra.

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Après le festival, Svadba fera l’objet d’une tournée européenne et méditerranéenne à laquelle j’espère pouvoir participer. De plus, trois autres de mes pièces, et notamment les Love songs, seront interprétées dans le cadre des travaux de l’Académie européenne de musique. Être jouée ainsi à Aix, c’est un rêve, un si beau rêve !

Un autre opéra est maintenant en chantier car vous venez de recevoir une commande du Canadian Opera Company pour créer avec Michel-Marc Bouchard, La Reine-Garçon. Comment comptez-vous traduire en musique cette fascinante histoire de la jeune et audacieuse monarque de Suède ?

Lorsque le directeur du Canadian Opera Compagny Alexander Neef est venu me rencontrer à Montréal pour me présenter cette commande d’un grand-opéra (main stage opera) je lui ai demandé : « Voulez- vous vraiment dire un grand-opéra ? ». Il a dit : « OUI ». Et j’ai répondu : « WOW ! ». Cette commande est un grand défi. Après trois opéras de chambre, l’on me demande ainsi de composer une œuvre lyrique d’une durée de deux heures et demie, pour plusieurs 14 solistes, chœur et orchestre. Je suis prête à relever le défi et cette commande arrive à un bon moment. Quand Alexander Neef m’a proposé d’écrire de la musique sur un livret que rédigerait l’écrivain et homme de théâtre Michel-Marc Bouchard sur la base de sa pièce Christine, la reine-garçon, j’ai aussi dit oui. Si je connaissais la reine à travers les écrits

de René Descartes, je n’avais ni vu, ni lu par LauenerJohn ailleurs la pièce de Michel-Marc Bouchard. Shannon Mercer, Krisztina Szabó, Jacqueline Woodley, Carla Huhtanen, Laura Albino et Andrea Ludwig dans Svadba, au Berkeley Street Theatre à Toronto, 2011 Opera Philadelphia Opera Jacqueline Woodley dans Svadba au Berkeley Street Virginia Hatfield, Laura Albino, Jacqueline Woodley (en bas), Shannon Mercer (en haut), Krisztina Szabó Theatre à Toronto, 2011 et Andrea Ludwig dans Svadba à Opera Philadelphia, 2013

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 J’ai pris connaissance de la pièce avant de ANA SOKOLOVIĆ EN QUELQUES DATES ET ŒUVRES…. LYRIQUES ! rencontrer celui qui deviendra le librettiste Dates Études, oeuvres et prix et j’ai constaté que l’on était en présence d’un vrai sujet dramatique, d’une histoire. Cette 1986-1991 Premières études en composition en Yougoslavie auprès de Dusan Radić à Novi Sad et Zoran histoire inspirera ma musique, et la guidera. Erić à Belgrade Je crois déjà savoir ce qu’il me faut pour qu’elle 1995 Obtention d’une maîtrise en composition de l’Université de Montréal auprès de José puisse me guider. Le synopsis est d’ailleurs Evangelista rédigé. Je l’ai lu, il est clair. S’il est clair à la lecture, il devrait être clair en musique. Alors, 1995 Lauréate du concours des jeunes compositeurs de la Fondation de la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN) la grande aventure est commencée ! 1996 Pesma, pour mezzo-soprano, flûte, deux clarinettes, piano, violon, alto et violoncelle Et y a-t-il d’autres œuvres vocales et 1999 Grand prix, toute catégorie et Premier prix du concours des jeunes compositeurs de Radio- lyriques sur lesquelles vous travaillez Canada, catégorie Musique de chambre actuellement ? 2000 Six voix pour six reines, pour six voix féminines En acceptant le Prix de compositeur du Centre 2001 Shower Song, pour soprano, guitare électrique et percussion national des arts en 2009, je m’engageais à composer quelques œuvres. Et l’une d’entre 2004 Tanzer lieder, mélodies pour soprano, flûte, violoncelle et piano elles, pour contre-ténor, chœur et orchestre, intitulée Golden slumbers kiss your eyes, 2005 • The Midnight Court, opéra de chambre pour dix voix et six instruments pourra être entendue les 19 et 20 novembre • Prix Joseph S. Stauffer du Conseil des arts du Canada 2015 à Ottawa. Dédiée au chef Mario Bernardi, 2007 • Pesma (version prolongée) la pièce que j’ai composée se présente sous • Prix Opus pour le compositeur de l’année forme de berceuses et en plusieurs langues. Elle sera interprétée par le contre-ténor David 2008 • In paradisum, pour soprano et orgue DQ Lee. Je dois également donner suite à une • Love Songs, mono opéra pour voix féminine seule commande du Canadian Art Song Project • Prix Jan-V-Matejcek de la SOCAN (en 2012 et 2013 également) (CASP) et composer un cycle de mélodies pour une à quatre voix et piano. Cette première 2009 Prix de compositeur du Centre national des arts grande incursion dans le domaine de la 15 mélodie devrait se traduire par la présentation 2010 Dring, dring, pour 2 sopranos, 1 mezzo, 1 baryton a capella d’un concert par les membres de l’Ensemble 2011-2012 Série Hommage de la Société de musique contemporaine du Québec (SMCQ) Studio du Canadian Opera Compagny en 2017. 2012 • Prix Dora dans la catégorie Outstanding New Musical/Opera Vous avez choisi l’art lyrique comme • Nomination à titre de professeure agrégée à la Faculté de musique de l’Université forme privilégiée d’expression artistique. de Montréal Mais, pour qui, en définitive, composez- • ASAP 4 SATB, pour choeur (As soon as possible for soprano, alto, tenor, bass) vous de la musique d’opéra ? 2011-2013-2015 Svabda, Opéra pour six voix féminines a cappella Si, comme je le pense et agis en ce sens, j’aime 2016 Golden Slumber kiss your eyes, pour contre-ténor, chœur et orchestre profondément l’être humain, je crois écrire pour ces enfants, ces femmes et ces hommes, 2017 Cycle de mélodies, pour une à quatre voix et piano qui forment l’humanité. (Commande du Canadian Art Sound Projet (CASP)) Propos recueillis par Daniel Turp 2019-2020 La Reine-Garçon, opéra sur un livret de Michel-Marc Bouchard et Lorraine Drolet Commande de la Canadian Opera Company © Joe Pinelli, 2014 Affi che de Svadba du Festival d’Aix-en-Provence, 2015

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16 Louise Leblanc Louise

The Tempest (Thomas Adès) LE FESTIVAL D’OPÉRA DE QUÉBEC : PEUT-IL DEVENIR LE SALZBOURG DES AMÉRIQUES ? par Daniel Turp

orsque le directeur général et artistique de l’Opéra de Québec, éditions. Mais pour atteindre cet objectif, il lui faudra à l’avenir L Grégoire Legendre, annonçait la création du Festival d’Opéra de emprunter certaines avenues incontournables. Québec en 2010, il ne cachait pas son ambition de faire de Québec le « Salzbourg des Amériques ». Il affi rmait d’ailleurs que « si Salzbourg Le succès indéniable des premiers festivals avait son Wolfgang Amadeus Mozart, Québec avait son Robert Lepage. » En cette année où sera présentée la cinquième édition de C’est au lendemain des célébrations du 400e anniversaire de fondation l’événement, qu’en est-il de cette ambition légitime et que nous avions de la Ville de Québec, en 2008, que naît chez Grégoire Legendre partagée à la suite d’une visite au Festival de Salzbourg durant l’été l’idée de créer un festival d’opéra dans la capitale nationale. L’accueil 2008 pour voir le chef Yannick Nézet-Séguin y faire ses débuts en enthousiaste du public de Québec pour les trois manifestations lyriques dirigeant Roméo Juliette de Charles Gounod1 ? Si l’objectif n’est pas du 400e, qu’il s’agisse de la création de Starmania, l’opéra (et ses encore atteint, le Festival d’Opéra de Québec est certainement sur quatre supplémentaires), de la tenue du concours Opéralia de Plácido la bonne voie, comme en fait foi le succès de ses quatre premières Domingo et de la première mise en scène d’opéra de Robert Lepage avec Edwartung et Barbe-Bleue, n’est sans doute pas étranger à la volonté

1 Festival Salzbourg 2008 – Le triomphe de Nézet-Séguin et l’avenir de l’opéra et de la musique au du directeur de l’Opéra de Québec de créer un événement lyrique Québec, Le Devoir, 3 septembre 2008, p. A-7. estival d’envergure. Cet accueil révèle aussi le potentiel économique

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l’Agora. Par ailleurs, le concert d’airs d’opéra pour orgue à quatre mains des frères Robert-Patrick et Claude Girard a été donné quatre fois et la représentation unique du conte Musica Decameron par l’Ensemble Anonymus ont fait salle comble à la chapelle du Musée de l’Amérique francophone, laquelle compte 200 places. La direction du Festival évalue à environ 300 à 350 personnes par concert les spectateurs qui ont pris part aux quatre concerts de la série « Musique en plein air ». Une foule et touristique d’une nouvelle manifestation culturelle proposée aux évaluée à 150 personnes aurait suivi chacune des 15 prestations des responsables politiques de la Capitale comme un « ajout lyrique » à la vie quatre jeunes artistes de La Brigade lyrique dans les parcs et autres festivalière à Québec, susceptible d’enrichir son « volet international ». lieux publics de la capitale. Le premier Festival d’Opéra de Québec aura donc attiré plus de 16 000 personnes. Au plan artistique, un nouveau festival pourrait aussi devenir le banc d’essai des productions auxquelles est associé Robert Lepage, et Les trois éditions suivantes du Festival ont connu des succès analogues. l’occasion de collaborer avec les autres festivals et maisons lyriques de En 2012, non seulement le concert d’ouverture de Karina Gauvin la planète. L’extension de la saison lyrique de l’Opéra de Québec durant accompagnée par Les Violons du Roy de Bernard Labadie et les quatre l’été est aussi vue comme un moteur de développement du public qui ne représentations de l’opéra The Tempest de Thomas Adès dans la trouve certainement pas son compte avec deux productions annuelles mise en scène de Robert Lepage ont-ils affi chés complet, mais l’opéra et un gala. L’ajout de nouvelles productions, de concerts et de récitals romantique Nelligan d’André Gagnon et Michel Tremblay a eu droit à pourrait en outre agir comme facteur de rétention des talents à Québec une supplémentaire. Les spectacles TangOpéra et Le jeu de Robin et mettre un terme à leur exode. et Marion par l’ensemble Anonymus de Claude Bernatchez ainsi que les concerts de « Musique en plein air » et de La Brigade lyrique ont Ayant ces objectifs à l’esprit, Grégoire Legendre et les membres de son attiré les opéraphiles en plus grand nombre (18 500) que lors du premier équipe préparent donc le terrain pour la tenue d’un premier festival de Festival. Seule déception de cette deuxième édition : la Soirée lyrique à 2008 à 2010 et cherchent à obtenir le soutien de la communauté. Un l’Agora a dû être interrompue, car, comme conclut le journal Le Soleil, tel appui est de toute évidence acquis lorsque le directeur de l’Opéra « la pluie et le vent ont eu le dernier mot ». Le succès a donc été de de Québec annonce en mars 2011 la création du Festival lors d’une nouveau au rendez-vous grâce à la collaboration de Robert Lepage et conférence de presse au Grand Théâtre de Québec. Mentionnons aussi de son équipe d’Ex-Machina pour lesquels l’événement est devenu un la présence du fi ls de Plácido Domingo, lequel représente son père, qui véritable banc d’essai. Et quel banc d’essai ! The Tempest est destiné au a tenu à accorder son support à Grégoire Legendre. Pour inaugurer le Metropolitan Opera (Met) de New York et est co-produit avec une autre Festival, il annonce une première production dont la mise en scène est célèbre maison lyrique, le Wiener Staatsoper (Opéra d’État de Vienne). 17 signée Robert Lepage : Le rossignol et autres fables d’Igor Stravinsky. Le directeur du Met, Peter Gelb, était d’ailleurs présent à Québec à Les dés sont jetés et le premier Festival s’étendra sur une période de la première de The Tempest. Après le spectacle, il n’a pu cacher son deux semaines, du 25 juillet au 6 août 2011. admiration devant le travail de Robert Lepage et de l’équipe du Festival et il dira d’ailleurs à Grégoire Legendre, au sujet de cette collaboration La première édition du Festival connaît un succès retentissant. D’une naissante : « I could not be more happy » (Je ne peux être plus heureux). qualité remarquable tant au plan vocal qu’au plan de la mise en scène, les deux principaux spectacles, Le rossignol et autres fables d’Igor Le Festival de 2013 fait de nouveau appel à la collaboration de Robert Stravinsky dans une scénographie de Robert Lepage et Une flûte Lepage. Il s’agit cette fois d’une production de La damnation de Faust enchantée de Mozart dans une adaptation de Peter Brook, sont donnés à d’ qui a déjà fait le tour de la planète et qui a pu être guichet fermé. Pour chacune des quatre représentations de chacune de ces apprécié par les opéraphiles de Tokyo, Paris et New York… mais pas productions au Grand Théâtre de Québec, les 510 sièges de la salle Octave- encore par ceux du Québec. Ce public est au rendez-vous et il peut Crémazie et les 1 545 places de la salle Louis-Fréchette trouvent preneur. constater que Robert Lepage est un grand metteur en scène lyrique qui sait moderniser un opéra romantique du XIXe siècle. La mezzo-soprano Aux 8000 personnes qui assistent à ces deux moments forts du festival, québécoise Julie Boulianne, a donné quant à elle une nouvelle identité il faut ajouter les 3500 mélomanes venus entendre le ténor Marc à cette production. L’événement-phare de ce troisième Festival a affi ché Hervieux et la soprano Marie-Josée Lord dans Une soirée lyrique à un taux d’occupation de 97 % et les deux dernières représentations © Julie Perreault Robert Lepage Le rossignol et autres fables La damnation de Faust

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ont été données à guichet de Philippe Soldevilla. Une distribution d’artistes et d’artisans fermé. Pour cette troisième presque exclusivement québécoise, avec notamment Julie Boulianne, édition, le directeur du Marie-Ève Munger et Pascale Beaudin, a séduit les opéraphiles de Festival a aussi joué Québec. Le quatrième Festival proposait aussi une autre création, celle d’audace en programmant de l’opéra pour la jeunesse La plus belle fl eur du jardin impérial de l’opéra-cabaret Powder Nathalie Magnan. Celle-ci fi t appel à des artistes lyriques en devenir de Her Face de Thomas Adès, 11 à 15 ans qui ont donné trois spectacles affi chant complet. Les autres ce qui n’a pas été sans événements du Festival, qu’il s’agisse de « Wagner à l’apéro » organisé causer la controverse – en en collaboration avec Tempêtes et Passions et son directeur artistique raison du contenu sexuel Guy Lessard, La Grande histoire chantée de la musique avec explicite – lorsqu’il a tenu l’ensemble « Les cinq octaves », le retour de « Musique en plein air », l’affiche au New York City des Grands Feux Loto-Québec et de La Brigade lyrique témoignaient Opera. Cette audace a de l’étendue de l’offre artistique. Avec une participation de 17 500

© Pavel Antonov été récompensée par amateurs d’opéra, cette quatrième édition connaissait ainsi un autre Powder Her Face (Thomas Ades) une grande performance succès de fréquentation. d’acteurs et d’actrices. À ces deux succès se sont ajoutés le spectacle de la soprano Marie-Josée Après la réussite des quatre premières éditions du Festival, de grands Lord avec le quatuor montréalais Quartango, les Randolyriques et son défi s attendent Grégoire Legendre. S’il veut faire de Québec une capitale « ténor nature » Vincent Karche, et l’Apéro-concert à la magnifique lyrique des Amériques et rivaliser avec Salzbourg sur notre continent, chapelle du Musée de l’Amérique francophone. Il ne faut pas non plus de nouvelles avenues méritent d’être explorées. oublier les concerts de « Musique en plein air » et les mini-concerts de La Brigade lyrique qui ont sillonné les lieux publics de la capitale pour Des avenues incontournables pour les futurs festivals une troisième année consécutive. Par ailleurs, les Grands Feux Loto- Québec se sont associés au Festival en jumelant des extraits des opéras Le Festival d’opéra de Québec a dorénavant fait ses preuves et il les plus connus et le spectacle de feux d’artifi ces, auquel ont assisté pas doit prendre l’élan qui lui permettra de devenir une destination moins de 5 000 personnes. Au terme du troisième Festival, Grégoire incontournable. Ses concurrents des Amériques, et principalement Legendre évaluait à tout près de 20 000 le nombre de personnes qui se les festivals de Glimmerglass et de Sante Fe, celui de Spoleto auquel sont déplacées pour la troisième édition. aime se référer Grégoire Legendre, attirent non seulement le public américain, mais des lyricomanes des quatre coins du monde qui 18 Si la réussite des trois premiers festivals reposait indéniablement sur organisent même leur vie et leurs vacances estivales autour de ces la collaboration de Robert Lepage et de son équipe d’Ex-Machina, la festivals d’opéra et de musique. quatrième et plus récente édition devenait la première qui allait devoir démontrer que l’événement pouvait vivre sans le grand scénographe C’est de toute évidence le cas du Festival de Salzbourg qui attire à québécois. La présentation d’une grande fresque lyrique et visuelle, chaque été les habitants d’une Autriche si mélomane, mais également une première production et la diversité de la programmation de 2014 ceux de son voisin allemand, des autres pays européens et même allaient faire la preuve que le Festival pouvait voler de ses propres d’ailleurs dans le monde. Ce festival connaît une bonne fréquentation ailes. Même si la Messa da Requiem de Giuseppe Verdi mise en scène chaque année et sa programmation comprend neuf opéras et un par l’Italien Paolo Michele sous le titre « Le jugement dernier » fut plus opéra en version concert, en plus de concerts et récitals, de classes spectaculaire qu’opératique, il a su plaire au public mélomane de la de maîtres, de projections cinématographiques et d’une kyrielle capitale nationale. Les impressionnantes projections des fresques de la d’autres activités. C’est aussi le cas du Festival d’Aix-en-Provence Chapelle Sixtine suscitèrent l’émerveillement recherché et donnèrent qui fait le plein de son public en France, mais attire des amateurs à la musique de Verdi un réel vernis fl orentin. Par ailleurs, le Festival d’outre-frontières. Ce dernier festival présente en 2015 sept opéras, offrait sa première création originale avec L’enfant et les sor tilèges et une foule d’autres activités, et notamment celles organisées de Maurice Ravel dans une mise en scène aussi lyrique que fantaisiste par l’Académie européenne de musique. L’inventivité du directeur Bernard Foccroulle a valu au Festival, comme Jean-Jacques Nattiez l’a rappelé dans les pages de notre revue (L’Opéra, numéro 3, p. 10), d’être sacré « meilleur festival d’opéra au monde » par l’Opera Awards de Londres en 2014.

Pour rejoindre Salzbourg et en s’inspirant des formules gagnantes d’Aix- en-Provence, il est nécessaire d’enrichir davantage la programmation. Même si le gabarit de la salle Louis-Fréchette ne semble pas se prêter à la présentation alternative de deux opéras, il importe d’user d’imagination pour qu’une deuxième production d’envergure soit offerte. Le Festival devrait en outre continuer d’offrir au public la possibilité d’apprivoiser une œuvre lyrique dans la salle Octave-Crémazie du Grand Théâtre de Québec, notamment des œuvres en langue française comme L’enfant et les sortilèges ou des œuvres québécoises, comme on l’a fait avec Nelligan. D’autres opéras québécois existent et mériteraient d’avoir leur place lors des prochaines éditions du Festival. Et ses dirigeants innoveraient s’ils commandaient pour le Festival, comme le fait particulièrement Bernard Foccroulle à Aix-en-Provence, des opéras

Louise Leblanc Louise à des compositeurs et librettistes d’ici ou à des compagnies de création L’enfant et les sortilèges (Ravel) lyrique comme Chants libres.

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Grégoire Legendre et Gaston Déry Nelligan (Gagnon/Tremblay) Le jugement dernier / La brigade lyrique de l’Opéra de Québec Messa da Requiem (Verdi) Photographie : Steve Deschênes, Le Soleil, 2012

Un opéra en version concert pourrait aussi contribuer à un tel des partenariats seraient envisageables avec l’Orchestre symphonique enrichissement et pourquoi ne pas penser à monter un opéra baroque de Montréal qui programme des concerts lyriques dans le cadre de la dans la magnifi que salle Raoul-Jobin du Palais-Montcalm. Québec et Virée classique, manifestation qui suit immédiatement le Festival et Montréal ont leurs baroqueux qui se distinguent ici et ailleurs dans le avec d’autres orchestres symphoniques du Québec, notamment celui de monde et méritent à coup sûr une tribune dans le cadre du Festival. Trois-Rivières dirigé par le chef « lyrique » Jacques Lacombe. Les concerts d’ouverture avec Les Violons du Roy ont connu un grand succès, mais il est nécessaire d’exploiter le plein potentiel de cette salle Si de nouvelles productions et collabo rations se concrétisaient hors du commun qui est sous-utilisée pendant le Festival. effectivement dans le cadre du Festival, celui-ci pourrait se classer parmi les grands festivals d’opéra et devenir, comme le souhaite son Ne serait-il pas aussi envisageable d’offrir une série de récitals qui directeur, le Salzbourg des Amériques. Grégoire Legendre continue de mettraient à contribution les artistes nationaux et internationaux dans monter une marche à la fois et il lui faut maintenant obtenir les moyens cette salle Raoul-Jobin ou dans des lieux et édifi ces historiques offrant fi nanciers nécessaires pour propulser le Festival d’Opéra de Québec. l’intimité nécessaire à un récital de mélodies, de lieder ou de songs. Ces Avec un budget de 2 millions $ par festival, il a réussi des miracles artistes pourraient aussi offrir des cours de maître pendant la durée du jusqu’à maintenant. Avec l’aide de nouveaux partenariats d’affaires, ce Festival, entre autres à de jeunes artistes lyriques, comme cela se fait à budget devrait être quintuplé d’ici les cinq prochaines années de façon Salzbourg, Aix, Glimmerglass et Santa Fe. Les membres de La Brigade à lui donner les ressources, et en particulier les ressources humaines, lyrique pourraient constituer le noyau de cet atelier, mais d’autres jeunes pour placer le Festival d’Opéra de Québec sur la trajectoire des plus artistes du Québec et d’ailleurs, aspirant à poursuivre une carrière grands festivals lyriques du monde. lyrique, pourraient faire de Québec leur lieu de formation, le temps d’un 19 été. À cette fi n, le Festival pourrait du reste s’associer avec les institutions du milieu, qu’il s’agisse du Conservatoire de musique de Québec, de la Faculté de musique de l’Université de Laval et d’Ex Machina.

Et a-t-on pensé par ailleurs à ajouter un volet « Opérette » au Festival qui rassemblerait ceux et celles qui apprécient ce genre ? Il y a des La fondation du Festival d’Opéra de Québec repose déjà sur des piliers compagnies qui n’hésiteraient pas à offrir leurs productions au Festival, solides. Le retour en 2015 de Robert Lepage au Festival et avec la telles que la Société d’art lyrique du Royaume, l’Opéra bouffe du Québec présentation d’une nouvelle production de l’opéra L’amour de loin ou le Théâtre lyrique de la Montérégie, dont les succès mériteraient de de la compositrice fi nlandaise Kaija Saariaho, la prochaine édition est dépasser les frontières de leur région. prometteuse. Cet opéra sera d’ailleurs repris durant la saison 2016-2017 au Metropolitan Opera de New York et offrira au Festival une tribune pour Si la pérennité et l’excellence du Festival ne reposent pas seulement se faire connaître et préparer une grande offensive américaine. L’Europe sur les épaules du grand scénographe et metteur en scène québécois devrait être une autre cible privilégiée et des co-productions avec Robert Lepage, il ne faudrait quand même pas se priver du talent de quelques maisons et festivals lyriques français, comme l’Opéra de Lyon ce créateur de génie qui continue d’être sollicité par toutes les grandes et le Festival d’Aix-en-Provence pourraient contribuer au rayonnement maisons lyriques du monde. Grégoire Legendre rappelait, après la du Festival en Europe. Mais, comme Grégoire Legendre aime le répéter, première édition du Festival, qu’il y avait « quelqu’un à Québec qui est son Festival doit d’abord continuer de s’enraciner dans son milieu, et au sommet mondial dans son domaine, quelqu’un qui aurait pu décider de conquérir le cœur et l’esprit du public de la capitale nationale et du de s’installer n’importe où sur la planète, [qui] a choisi sa ville, Québec, Québec tout entier. Il devrait aussi permettre de faire apprécier la beauté pour la faire profi ter de son talent et de son infl uence ». Il faut encore et de l’art lyrique qu’a si bien servi à ce jour le Festival d’Opéra de Québec. plus que jamais « capitaliser sur ce talent » et exaucer le souhait exprimé par Robert Lepage lui-même de voir ses réalisations d’opéra présentées LE FESTIVAL D’OPÉRA DE QUÉBEC… EN QUELQUES DATES ET CHIFFRES à Québec. À cette fi n, il pourrait bénéfi cier de l’amphithéâtre lyrique qui sera aménagé dans le théâtre Diamant et dont on a annoncé récemment, DATE ÉVÉNEMENTS PRINCIPAUX ASSISTANCE après une remise en question injustifi ée, la mise en chantier. An 1 : Le rossignol et autres fables (Stravinsky) 2011 16 250 et Une flûte enchantée (Mozart)

L’enrichissement de la programmation du Festival pourrait aussi résulter 2012 An 2 : The Tempest (Adès) et Nelligan (Gagnon/Tremblay) 17 825 d’une collaboration avec les autres grands festivals de musique classique An 3 : La damnation de Faust (Berlioz) du Québec, et en particulier avec le Festival international du Domaine 2013 18 450 Forget, le Festival international de Lanaudière et le Festival Orford. Ces et Powder her Face (Adès) trois festivals incluent généralement dans leur programmation un ou An 4 : Vivaldi à l’opéra, Le jugement dernier / Requiem (Verdi) 2014 17 750 plusieurs événements lyriques qui pourraient trouver leur place dans le et L’enfant et les sortilèges (Ravel) programme du Festival. Si le succès des prochains festivals continuera 2015 An 5 : Lully, Rameau et L’amour de loin (Saariaho) de reposer sur l’association avec l’Orchestre symphonique de Québec,

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NOUVELLE GÉNÉRATION : une visite à l’Université Laval de Québec, l’Université de Sherbrooke et l’Université du Québec à Montréal (UQÀM) L’Opéra propose trois rencontres avec autant d’interprètes dont la jeune carrière laisse présager des lendemains qui chantent. Le chemin les menant à la pleine maturité pourra certes varier, mais on peut d’ores et déjà considérer que les augures leur sont favorables. Propos recueillis par Frédéric Cardin MYRIANE BOURGEOIS

lle a toujours aimé la musique Pourquoi avoir choisi le chant classique ? Eclassique et la nature semble lui Le chant pop vous intéressait-il moins ? avoir tout donné pour devenir soprano colorature. Laissez-nous vous présenter J’aime beaucoup la musique classique. La Myriane Bourgeois. pratique du piano m’a permis de connaître le répertoire classique dont l’esthétique

Myriane, vous m’avez donné rendez-vous me touche. Puis, grâce à la chorale, c’est LeducDale dans un Presse Café rue Sainte-Catherine, le répertoire vocal qui s’est ajouté à mon tout près de l’Université du Québec à bagage. Il faut dire que j’ai toujours préféré Avez-vous des modèles vocaux, des Montréal (UQÀM). Que pensez-vous du chanter du répertoire classique. Lorsque chanteuses professionnelles que vous milieu urbain dans lequel vous évoluez ? j’étais plus jeune, la légèreté de ma voix se admirez ? prêtait moins au style populaire, ma voix J’apprécie l’ambiance du centre-ville et la brillait beaucoup plus dans les notes aigües Comme presque tout le monde, j’imagine, diversité de l’offre en restauration. Mais je et était plus faible dans les graves. Il semble il y a Maria Callas que je considère être une n’ai malheureusement pas eu la chance d’en que j’aie un penchant « naturel » pour cette très grande chanteuse et interprète. J’ai aussi 20 profi ter beaucoup, car j’étais concentrée sur musique ! beaucoup d’admiration pour Nathalie Dessay. mes études. J’aime énormément son jeu scénique. J’admire Quelle vision de l’opéra aviez-vous avant de bien entendu ma professeure Colette Boky, et, Commençons par le commencement. D’où mieux le connaître ? il n’y a pas longtemps, j’ai découvert la voix venez-vous et qu’est-ce qui vous a incitée à de Barbara Bonney. Quelle superbe voix ! Son faire de la musique ? Je n’ai jamais eu l’impression qu’il s’agissait répertoire est inspirant et ses interprétations d’un milieu qui m’était étranger, car je côtoie des lieder de Schubert sont magnifi ques. J’aime les arts depuis que je suis petite. À de façon assidue des chanteurs qui ont cette l’âge de 8 ans, j’ai assisté pour la première formation, ainsi que le répertoire musical Être colorature, est-ce seulement une fois à un concert, dans lequel un pianiste correspondant, depuis que j’ai 14 ans. question de technique ? Diriez-vous que interprétait un concerto pour piano de l’attitude et le caractère comptent également ? Rachmaninov. C’est à ce moment que j’ai Pourquoi avoir choisi l’UQÀM ? Et pourquoi ? décidé que je voulais apprendre le piano. J’ai suivi quelques cours, mais ce n’est J’ai choisi l’UQÀM pour étudier avec Colette En effet, être colorature n’est pas seulement une qu’à 14 ans que j’ai approfondi mon étude Boky, c’est la professeure avec laquelle question de technique. Dans mon cas, je dirais de l’instrument avec Michel Brousseau, je voulais travailler. Je me suis sentie en que c’est inné. Ma voix est naturellement légère, chef d’orchestre né dans les Laurentides et confiance immédiatement avec elle, et la comme je l’ai dit plus tôt, mais je constate que je très actif dans le domaine choral. J’ai alors communication s’est établie très naturellement possède une facilité à vocaliser et à atteindre les commencé à travailler plus sérieusement, à entre nous. contre-notes. Je suis soprano léger colorature, il monter plus de répertoire, à faire davantage n’y a pas de doute. Bien sûr, le caractère compte de représentations publiques et à participer Parlez-moi du programme de l’UQÀM. aussi, car il faut pouvoir jouer des personnages à des concours, etc. Comment le comparez-vous à ceux de jeunes et parfois assez colorés. l’Université de Montréal ou de l’Université Et le chant est arrivé peu après ? McGill ? Parlez-moi de Colette Boky. Quelles sont ses principales qualités comme professeure ? Oui, vers mes 16 ans, je suis devenue la plus C’est difficile de comparer, car je n’ai jeune choriste des chanteurs de Sainte- pas étudié dans ces universités. Je pense Colette Boky est très attentionnée et fait Thérèse, là où j’ai véritablement découvert ma que chaque institution a ses points forts preuve d’une grande générosité. Elle a passion pour le chant. À presque 17 ans, j’ai et ses faiblesses et que c’est à chacun de mis beaucoup de temps à me former, à me pris quelques cours avec Maria Knapik pour décider ce qui lui convient. La classe de transmettre autant que possible tout son savoir. me préparer aux auditions du Collège Lionel- l’UQÀM est beaucoup plus petite que celle Je lui en suis immensément reconnaissante. Groulx afi n d’étudier en chant classique. C’est des deux autres institutions, mais il y a en à partir de ce moment que j’ai commencé contrepartie une très belle complicité au Découvrez en page 23 quelques aspects de la l’étude du chant plus sérieusement. sein du groupe. personnalité lyrique de Myriane Bourgeois.

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de Sillery pour voir si je serais attiré par un Concours de musique du Canada, et, ensuite, instrument. C’est le violon qui m’a interpellé. le Concours OSM Standard Life. J’ai dit à ma mère : « Je veux faire ça ! ». Par la suite, j’en ai joué jusqu’au début du Ressentiez-vous lourdement la pression des secondaire, où j’ai changé pour la trompette. événements ?

À quel moment s’est présenté l’apprentissage Cela s’est manifesté vers la fin, mais je dois du chant ? être honnête, je ne suis pas quelqu’un de très angoissé dans la vie. Tout ce que j’avais Plusieurs années après ! C’est au moment fait jusqu’à ce moment, je l’avais fait dans d’avoir à prendre une décision sur mon une optique de plaisir et de découverte. cheminement au cégep de Sainte-Foy que je me Je dois avouer que j’ai ressenti une suis retrouvé devant un dilemme important. Je véritable pression lors du Concours OSM. savais vouloir poursuivre en musique, mais je Je me rappelle que, pour les finales, ma ne savais pas quel instrument privilégier. La première entrée sur la scène de la Maison trompette ? Mmm, non, pas vraiment. J’aimais symphonique fut un tantinet intimidante. cela, mais pas suffisamment. Retourner au J’ai soudainement pris conscience de la violon ? Ce n’était pas une option viable. C’est grandeur de la chose. La salle, le public, à ce moment que ma première professeure, Kent Nagano dans le jury ! J’ai, comme qui celle qui m’avait appris le violon, m’a suggéré dirait, réalisé que cette fois-ci c’était on ne de considérer la voix. Je chantais juste, j’avais peut plus vrai ! un beau timbre (me disait-elle) et il y aurait moins de compétition aux auditions d’entrée ! Vous avez donné un concert à la maison J’ai tout simplement dit : « Pourquoi pas ? ». symphonique avec l’OSM le 14 avril 2015. Comment avez-vous vécu cet engagement Avez-vous aimé le chant lyrique professionnel de haute stature ? immédiatement ou bien le véritable déclic s’est-il produit un peu plus tard ? Ce fut marquant, c’est indéniable. C’est la première fois que je chantais autant et devant 21 Oui, j’ai aimé cela dès le début, mais avec autant de monde. Oui, j’étais stressé, mais, en cette sorte d’esprit de découverte qui même temps, j’avais tellement hâte d’entrer m’animait toujours depuis que je pratiquais la en scène et de faire ce pourquoi j’ai travaillé musique. Je dirais que le véritable déclic s’est si fort ! manifesté quand j’ai participé à la production

Hugo LaporteHugo du Fantôme de l’Opéra à la fi n du parcours Vous n’aimez pas le mot « idole », je crois. Dites-moi alors s’il y a des modèles vocaux que vous admirez ? HUGO LAPORTE Pour le moment, il s’agit de deux Québécois, Étienne Dupuis et Jean-François Laporte. l a joué du violon, puis de la trompette collégial. J’ai adoré être sur scène et c’est à ce Leur voix ressemble à la mienne, et, comme I avant d’en arriver au chant. Il a moment que je me suis dit que j’aimerais bien moi, ils ont une certaine facilité dans les aigus. aussi étudié en musicologie, mais en faire une carrière. l’interprétation lyrique semble être sa Quel est votre répertoire privilégié ? destinée, car à peine débutées ses études Vous vous êtes pourtant inscrit en musicologie à temps plein dans ce domaine, voilà qu’il à l’Université Laval, à Québec ! Même si j’adore l’opéra, je dois avouer remporte deux importants concours. Petit que la mélodie française me remue plus entretien avec Hugo Laporte. Oh, mais j’ai beaucoup hésité. Cependant, profondément encore. Duparc, Fauré, l’analyse et la compréhension historique de Saint-Saëns, Ravel, tous ces compositeurs Bonjour Hugo. Vous semblez avoir pris la musique m’attiraient énormément. Qui plus me touchent énormément. Je ne me goût à la musique dès votre plus jeune âge, est, même en musicologie, je me devais de passerais pas de l’opéra, mais mon « cocon c’est vrai ? suivre quelques cours d’interprétation, si bien bienfaisant » sera probablement toujours que je me sentais dans le meilleur des deux celui du répertoire français de la mélodie J’ai en effet été mis en contact avec la mondes. Mais mes professeurs ont fi ni par me du tournant du XXe siècle. musique dès ma petite enfance. Mes parents convaincre de migrer vers l’interprétation avaient pour habitude de m’emmener tout court et maintenant je sens que je suis Écoutez sur notre site web le récital de Hugo écouter des concerts d’orchestre à Québec solidement engagé dans cette voie. Laporte lors de la finale du Concours OSM (d’où je suis originaire) dans le cadre de la Standard Life youtube.com/watch?v= programmation Famille. Je manifestais déjà Et, du coup, tout s’est mis à aller très vite, non ? 4RKJggvVoC8 beaucoup d’intérêt à ce moment. Puis, vers 6 ou 7 ans, ils ont profité d’une « journée En effet. J’ai participé à deux concours Découvrez en page 23 quelques aspects de la portes ouvertes » au Centre musical Uni-Son importants que j’ai remportés ! D’abord, le personnalité lyrique de Hugo Laporte.

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l’université. Il faut dire que ma famille ne leur tombe sur la tête ! Comme disait Coluche, voyait pas de façon très enthousiaste que je si voter changeait vraiment quelque chose, ça poursuive des études en musique…. ferait longtemps qu’on l’aurait interdit !

À partir de ce moment, c’est donc un sentier Parenthèse : si vous étiez élu, que feriez-vous particulièrement sinueux et, disons, inhabituel pour la musique ? que vous amorcez ? J’offrirais aux musiciens un salaire au-dessus Oh oui ! Il y a d’abord eu la grève étudiante du seuil de la pauvreté. Ah oui, et je de 2005, que les gens oublient un peu depuis nationaliserais Céline Dion, ainsi sa fortune celle de 2012, mais elle a été assez corsée deviendrait celle de tous ! celle-là aussi. J’ai alors reconsidéré mon choix de carrière (je terminais mon baccalauréat On peut rêver (rires) ! Mais encore, votre précisément à ce moment !). arrivée au chant classique n’est toujours pas élucidée ! Curieusement, la politique a quand même fait partie de votre lancée définitive sur la voie (Rires)… Grâce au slam, je me suis mis à faire musicale ? du théâtre, à la demande d’un ami, puis, là, j’ai rencontré un comédien qui, en plus d’une Oui, c’est vrai. Alors que je me remettais en formation en chant classique, faisait partie d’un question et que je revenais à la case départ, quatuor vocal de type « barbershop ». C’était en pour ainsi dire, la musique m’appelait de réalité un trio, car il manquait un membre. Il plus en plus fort ! J’ai à ce moment conjugué m’a demandé si je voulais en faire partie, car je celle-ci avec mon nouveau bagage en politique chantais déjà juste. Comme je suis un touche- et je me suis mis à écrire des chansons plutôt à-tout, j’ai dit oui. Avec le temps, les autres engagées que je chantais en m’accompagnant m’ont convaincu de perfectionner ma technique à la guitare (oui, j’oubliais de dire que j’ai vocale en suivant des cours classiques. Je me également appris un peu de guitare !). suis inscris au programme Diplôme d’études supérieures spécialisées à l’Université de 22 Et ensuite ? Sherbrooke, un cours de pré-maîtrise.

Eh bien, fi gurez-vous qu’un ami m’a alors initié Vous vous y êtes bien intégré ?

Marianne DeschênesMarianne au slam ! C’est une discipline dans laquelle on Oui, très bien. Je manquais de familiarité avec le répertoire, mais je dois dire que lorsque j’ai touché à la musique moderne, c’est-à- SIMON LANDRY dire Ravel et les suivants, j’ai véritablement accroché ! C’est la période que je préfère, et vant d’amorcer des études en chant celle qui me nourrit le plus ! Une véritable Alyrique, il a joué du violon, puis de doit déclamer des textes poétiques. C’est un art révélation. la trompette, il a obtenu un baccalauréat oratoire complexe qui mêle poésie et théâtre, en sciences politiques, a été candidat aux bien qu’il y ait des règles qui limitent les gestes. Faites-vous référence au répertoire d’opéra élections fédérales de 2008 et 2011 sous la ou plutôt à celui du récital ? bannière du Parti Rhinocéros, puis a été Tout à fait fascinant ! Et vous êtes même champion du monde de slam (on vous dit devenu champion du monde, non ? Les deux m’intéressent, bien entendu, mais ce que c’est ci-dessous) et a chanté dans je suis plus familier avec celui du récital. un quatuor « barbershop ». Ouf ! Voici le Oui, lors de la Coupe de monde à Paris en 2013 ! J’aime son intimité et sa portée souvent surprenant ténor Simon Landry, diplômé Mais depuis, j’ai quelque peu laissé cela de côté. plus « philosophique ». Cela dit, je serais de l’École de musique de l’Université de très heureux de monter sur scène. Je le ferai Sherbrooke. Et pendant ce temps, la politique vous d’ailleurs le 12 juin, car je chanterai dans la accompagnait néanmoins ? comédie musicale Dracula qui sera présentée Bonjour Simon. Ce n’est pas le chant, mais par la compagnie LAGAM de Sherbrooke. bien le violon qui vous a lancé sur les chemins Imaginez, j’ai été candidat pour le Parti de la musique, n’est-ce pas ? Rhinocéros (un parti rigolo qui dénonce Vous avez un modèle parmi d’autres que vous les travers de la politique par l’absurde) admirez particulièrement ? Oui, en effet, j’ai commencé à jouer du violon lors des élections fédérales de 2008 et 2011 alors que je fréquentais la maternelle. Cela a où j’ai promis à chaque fois de faire de ma Je dirais Peter Schreier. J’aime beaucoup duré quelque temps. Arrivé au secondaire, j’ai circonscription un pays indépendant (rires) ! l’aisance de sa ligne vocale. Il semble fl otter eu envie d’essayer la trompette, puis, quand J’ai vécu cette expérience comme une au-dessus des notes. est venu le temps de choisir mon orientation au catharsis de mes études en politique, les cégep, j’ai bifurqué vers les sciences humaines, élections étant le grand spectacle dans lequel Découvrez en page 23 quelques aspects de la qui m’ont amené aux sciences politiques à on fait croire aux gens qu’ils ont choisi ce qui personnalité lyrique de Simon Landry.

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 PORTRAITS

LES QUESTIONS LYRIQUES DE FRÉDÉRIC

MYRIANE BOURGEOIS HUGO LAPORTE SIMON LANDRY

Un air, un rôle ou un opéra que vous L’Exsultate Jubilate de Mozart. Non Le Barbier de Séville de Rossini ! C’est un Trois poèmes de Stéphane Mallarmé de imaginez chanter le reste de votre seulement je l’aime beaucoup, mais ça rôle qui me permet d’utiliser mes aigus Ravel. C’est une œuvre magique ! La vie sans vous lasser ? me rend de bonne humeur ! avec aisance. Et puis la musique est si poésie est sublime et l’harmonie éclatée. belle, et ce, sans arrêt ! On ne peut jamais deviner ce qui s’en vient.

Un rôle ou un air que vous n’êtes pas Le rôle de Zerbinetta dans Ariadne auf Le rôle de Rodrigo dans Don Carlo Wozzeck d’Alban Berg. C’est un défi aussi prêt(e) à chanter à ce stade de votre Naxos. Il me reste du travail à faire de Verdi. Chez Verdi, ce type de bien musical que théâtral. La musique carrière ? car c’est assez exigeant. J’ai appris l’air personnage exige une voix plus mature de cet opéra est comme un tourbillon « Grossmächtige Prinzessin », mais je peux que la mienne, tout simplement. déstabilisant. encore me perfectionner.

Un air ou une mélodie que vous Quando m’en vo, de La bohème de Eh bien voici une autre jolie colle ! Tenho tantas saudades de Francisco chanteriez pour conquérir l’être Puccini. Que dire de plus ? C’est tellement Je ne sais pourquoi, mais Duparc Lacerda. Y a-t-il quelque chose de aimé ? beau et absolument irrésistible ! refuse de quitter mon esprit ! Je pense plus mélancolique que la saudade, ce spontanément à Phydilé, l’une de ses style populaire portugais ? Et puis, une plus magnifiques mélodies. chanson triste, ça fait toujours du bien à l’âme.

Un air ou une mélodie pour calmer Lippen schweigen (de La veuve joyeuse) de Voilà une très bonne question. J’en Ferry me across the water de Ned Rorem. bébé ou pour consoler une âme en Franz Léhar. Quand j’étais toute petite, reviens à la mélodie, qui m’habite Quand j’écoute cette pièce, je m’imagine peine ? ma mère me chantait Au clair de la lune constamment : Chanson triste d’Henri sur les rives du Mississippi dans un sur cette mélodie. J’en suis certainement Duparc, un air qui est si poignant et bateau à aube. Cela fait vibrer mon resté marquée. touchant. sentiment d’américanité.

Une œuvre lyrique, un opéra, Il y a la Messe solennelle de Saint-Remi de La Jeune fille et la Mort (le lied, pas le Je reviens à mon premier choix : les un air méconnu qui mériterait Théodore Dubois. Elle a été enregistrée quatuor !) de Schubert. On y retrouve Trois poèmes de Stéphane Mallarmé, 100 000 mentions « J’aime » en 2009 sous étiquette Atma avec Michel la même progression harmonique de Maurice Ravel. On y entend même e e sur Facebook ? Brousseau et Les chanteurs de Sainte- que dans le 2 mouvement de la 7 quelques inflexions jazz ! Thérèse. symphonie de Beethoven. Fascinant. Rendez-vous sur notre site Internet (revuelopera.org) afi n d’entendre les choix musicaux de nos jeunes artistes. 23

L’Institut canadien d’art vocal présente Co-direction artistique L’ELISIR D’AMORE de DONIZETTI, lundi 10 août, 19h30

GALA Joan Dornemann mercredi 12 août, 19h30 ZANETTO & L’AMICO FRITZ Paul Nadler de MASCAGNI, vendredi 14 août, 19h30

Du 27 juillet au 18 août 2015 Salle Claude-Champagne : classes de maître, récitals de chant, opéras, concert gala. www.icav-cvai.ca/festival Informations (514) 554-8822 Étienne Dupuis

12e Baryton

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PROFIL

LES JEUNES ASSOCIÉS DE L’OPÉRA DE MONTRÉAL Des jeunes s’impliquent dans la promotion de l’opéra

os institutions artistiques ne sauraient se priver du soutien de N généreux donateurs qui contribuent à l’essor d’organismes de prestige, participent au développement des artistes d’ici, soutiennent la formation de la relève grâce aux abonnements, aux dons, aux commandites ou à des événements-bénéfi ces.

Dorénavant, ces partenaires cohabitent avec une nouvelle génération d’associés qui, en plus de s’impliquer fi nancièrement, participent au rayonnement de ces institutions. Par exemple, pour l’Opéra de Montréal (OdM), ce sont les Jeunes associés de l’Opéra de Montréal (JAOM).

Ce groupe de jeunes s’est donné comme mission d’appuyer la direction de l’Opéra de Montréal dans la réalisation de ses objectifs d’élargissement et de rajeunissement du public.

Lors de leur création en 2009, les JAOM étaient l’un des seuls organismes De plus, une fois par année, un événement-bénéfice est organisé et de jeunes, avec celui du Club des Jeunes ambassadeurs de l’Orchestre s’accompagne d’une levée de fonds. Plus de 600 personnes y participent. symphonique de Montréal, à être associé à une institution artistique. Dans le passé, ces soirées ont eu lieu au Musée des beaux-arts de À la suite d’une participation à un événement organisé par les Young Montréal, dans l’atelier des costumes de l’Opéra de Montréal ou dans Associates of the Metropolitan Opera de New York, un trio formé de les décors mêmes de l’Opéra. Les fonds recueillis par les JAOM, s’élevant jeunes professionnels, Joanie Lapalme, Guillaume Marion et Jean- à 50 000 $ environ, sont versés chaque année à l’Atelier lyrique de l’opéra François Séguin, a créé un modèle similaire en collaboration avec Pierre et servent également à la mission éducative de l’organisme. Dufour et Pierre Vachon de l’Opéra de Montréal. Un membre des jeunes siège dorénavant au Comité de l’Opéra de Montréal et un membre de Cette année, les JAOM ont créé un legs annuel, s’alignant sur l’objectif de l’Opéra fait de même au Comité des jeunes. pérennité de l’institution montréalaise. Les fonds amassés sont destinés 25 cette fois à l’atelier de costumes de l’opéra, un des plus imposants Parmi les trois fondateurs, seule Joanie Lapalme possède des d’Amérique du Nord. connaissances en musique, mais cela ne freine en aucun cas la passion des autres et leur enthousiasme à œuvrer à l’essor de l’OdM. Le Comité L’échange entre jeunes amateurs lyriques est contagieux. Des rencon- qu’ils ont formé se compose de 13 personnes de toutes provenances : tres avec des groupes de jeunes d’autres maisons d’opéra ont lieu depuis fi nance, droit, médecine, entrepreneuriat, etc. Ce sont généralement 2013, comme avec l’équipe Aria, rattachée à l’Opéra de Los Angeles. Un des jeunes qui se distinguent dans leur domaine et sont impliqués dans groupe de six jeunes d’ici a pu assister à une représentation là-bas et leur milieu. vice-versa. La même collaboration sera organisée avec le Florida Opera de Miami en décembre prochain. Enfi n, Montréal sera l’hôte de Opera La mission que se donnent les JAOM ne se limite pas au seul aspect America, un congrès sur l’opéra, portant plus particulièrement sur sa financier. Ils ont à cœur d’élargir la diffusion de l’opéra; ils le font promotion auprès des jeunes, du 17 au 21 mai 2016. Dans le cadre du 375e grâce à diverses activités : réseautage, cocktails, rencontres avec la anniversaire de Montréal, en mars 2017, les jeunes associés collaboreront direction de l’Opéra ou avec des artistes, promotions ciblées etc. On avec l’Opéra à un événement dont les détails seront connus sous peu. espère ainsi renouveler le public en bâtissant une relève. En organisant des événements-bénéfi ce, les JAOM soutiennent les projets de l’OdM. Les comités jeunesse sont des plus fl orissants. À Montréal seulement, Leur travail bénévole permet aussi aux jeunes d’approcher cet art de il existe plus de 15 de ces comités de jeunes ou de la relève d’affaires façon plus concrète, de le démystifi er, de l’apprécier et de s’impliquer en art1. Ils sont associés à la musique, la danse, le théâtre ou bien à fi nancièrement. des musées. Ces jeunes forment les futurs mécènes de notre société et assurent la préservation des organismes culturels tout en constituant Depuis bientôt six ans, les événements qu’ils ont organisés refl ètent leur une relève pour les années à venir. engouement pour l’opéra. À chacune des productions, la représentation du jeudi est précédée d’un cocktail opéra. Quatre-vingt jeunes se DATES CLÉS rassemblent pour échanger entre eux, assister à la représentation 2009 Création des Jeunes associés de l’Opéra de Montréal et entendre la conférence de Pierre Vachon, musicologue de l’Opéra de Montréal. Ces représentations se déroulent à guichet fermé ! La 2013 Collaboration avec des groupes de jeunes associés d’autres conférence et le cocktail se tiennent au salon vert, puis à l’entracte, maisons d’opéra l’échange se poursuit avec les donateurs de l’Opéra de Montréal, et la 10 juin 2015 Programmation des JAOM et remise du premier legs soirée se termine par une rencontre avec des artistes. Nous sommes 17 au 21 mai 2016 Congrès Opera America à Montréal. donc loin du simple chèque envoyé au casier postal d’une fondation, Mars 2017 Création d’un événement pour le 375e anniversaire de la avec pour seul retour un reçu d’impôt ! Cette formule fi nit par créer fondation de la ville de Montréal un public qui revient à plusieurs reprises. Ces soirées sont offertes au prix de 80 $ avec siège au parterre. Le tout est rendu possible grâce au Marc-Olivier Laramée soutien fi nancier de la Banque Nationale qui appuie l’Opéra de Montréal depuis plus de 25 ans. 1 Brigade Arts-Affaires de Montréal

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et interprète de la musique sacrée ou LE PARC SOHMER DE MONTRÉAL : d’inspiration religieuse, entre autres l’Ave Maria de Gounod, l’« Inflammatus » du Stabat Mater de Rossini et Les rameaux L’ART LYRIQUE À L’AIR LIBRE de Jean-Baptiste Faure. Le 4 janvier 1893, la par Mireille Barrière mezzo-soprano Laure Mounier crée Dalila à La Nouvelle-Orléans, dans la première version e samedi 1er juin 1889, le mauvais temps Montréal, donne deux concerts chaque jour scénique aux États-Unis de l’opéra de Saint- n’empêche pas cinq mille personnes de se sur une estrade couverte. Saëns. Lorsqu’elle débarque au Sohmer pour L précipiter à l’inauguration du parc Sohmer deux semaines au mois de mars suivant, elle de Montréal. En effet, une publicité effi cace Le prix modique de l’entrée – 10 cents pendant est déjà bien connue grâce aux chroniqueurs et de nombreux communiqués ont attisé la trente ans – ouvre les portes du parc à tous, artistiques locaux. C’est pourquoi elle curiosité d’une population impatiente d’en mais surtout à une nouvelle petite classe chantera « Mon cœur s’ouvre à ta voix » à découvrir les merveilles. L’initiateur de ce moyenne composée de marchands, de petits plusieurs reprises et « à la demande générale ». projet innovateur s’appelle Ernest Lavigne, cadres, d’artisans, de commis de banque ou Montréal attendra deux ans avant de découvrir un personnage peu banal. En août 1868, de magasin et d’ouvriers spécialisés, comme l’opéra en entier, dans une version de concert il n’a que 16 ans quand il s’embarque pour ma grand-mère, Helena Paré, couturière au dirigée par Guillaume Couture. Rome dans un régiment canadien de zouaves magasin S. Carsley. Accompagnée de sa sœur pontifi caux. Cornettiste virtuose, il fait partie Alexina, elle se paye à l’occasion une soirée Mais, en janvier 1893, Lavigne et Lajoie du corps de musique des zouaves et, plus ou un dimanche après-midi d’été au parc. rentrent d’un voyage à La Nouvelle-Orléans tard, d’un orchestre de 20 musiciens invité Toutes deux se promènent sur la terrasse ou et rêvent d’établir à Montréal une troupe à jouer lors de soirées données par quelques s’installent à une table pour déguster une glace d’opéra permanente comme en Louisiane. dames nobles. Mais, en septembre 1870, le roi ou boire une limonade bien fraîche. Victor-Emmanuel II menaçant d’envahir la Mais dès les premières mesures Ville sainte pour en faire la capitale de l’Italie de la pièce d’ouverture, elles unifi ée, il part pour Naples et parcourt ensuite accourent devant l’estrade pour l’Europe où il gagne sa vie comme musicien. ne pas manquer le concert ! C’est Il observe attentivement ces nouveaux lieux mon aïeule qui m’a fait connaître d’amusement qui diffusent de la « bonne le nom de Lavigne, un musicien 26 musique » dans le peuple, comme les cafés- « tellement capable », disait-elle, concerts en plein air et les parcs musicaux, bien avant que je m’intéresse à dont Les jardins de Tivoli qu’il visite à l’histoire musicale de Montréal. Copenhague. Après une année aux États-Unis, il rentre défi nitivement au Canada en1874. Il Sachant qu’il fait face à un public passe plus d’un an au magasin de musique largement novice, Lavigne élabore que son frère Arthur a ouvert à Québec. Il se ses programmes en conséquence. familiarise alors avec le métier d’éditeur, de Par exemple, la fanfare attaque commerçant de musique et d’instruments. d’abord une marche et poursuit Parc Sohmer – Intérieur du pavillon – Carte postale Vers 1877, il ouvre son propre commerce sur ensuite avec une ouverture BAnQ, CP 5453 CON. la rue Notre-Dame à Montréal ; le comptable d’opéra, une pièce de musique Louis-Joseph Lajoie deviendra son associé à imitative, une valse, un galop ou une polka, L’immense pavillon qui avait été bâti en 1891, partir de 1881. Les deux partenaires louent pour passer à une page plus classique, dans le vain espoir d’y installer un orchestre d’abord puis achètent ensuite un vaste terrain comme la Sérénade de Schubert ou Rêverie symphonique et un conservatoire de musique, dans le but de créer un lieu de divertissement de Schumann. S’ajoutera petit à petit un serait transformé en théâtre d’opéra. Cet populaire. L’emplacement occupe un vaste mouvement d’une symphonie de Beethoven édifice assez sommaire qui comprend 7 000 quadrilatère délimité par les rues Notre-Dame, ou d’un concerto pour violon de Mendelssohn, sièges – plutôt des chaises plates et dures, au Panet et Plessis, pour s’ouvrir au sud sur la Vieuxtemps ou Wieniawski. Or, l’art lyrique dire du journaliste André de La Chevrotière falaise qui surplombe le fl euve Saint-Laurent. ne demeure pas en reste. La Bande de la cité – permet au Sohmer de poursuivre quelques interprète régulièrement des « réminiscences », activités en hiver. Mais le groupe de citoyens Rebaptisé par les étudiants « le parc à sa sorte de pots-pourris composés des principaux pressentis comme actionnaires rejette cette mère », le Sohmer ressemble, dira l’historien airs de Gounod, Donizetti, Auber, Verdi, solution vouée à l’échec. Le secteur occupé par Andrew Collard, à un tableau d’Auguste Audran, Offenbach et bien d’autres. le parc, disent-ils, est encore trop excentrique Renoir, avec ses tables et ses bancs dispersés à Montréal et se confond presque avec la sous des arbres majestueux et sa belle terrasse Mais place à la voix ! En tant qu’imprésario, campagne; le transport pose problème, d’autant aménagée du côté de la falaise où déambulent Lavigne fait partie d’un réseau d’agents plus que la moindre pluie transforme ses rues des messieurs coiffés de canotiers et des américains qui mettent à sa disposition non pavées en champ de boue. Le projet voit dames portant des chapeaux fleuris. Les les artistes en vogue aux États-Unis. Dès donc le jour rue Sainte-Catherine, au théâtre attractions à l’honneur tiennent à la fois du le mois d’août 1889, Ida Klein, soprano au Empire (rebaptisé Théâtre français), sous le cirque, du vaudeville et du théâtre de variétés, Metropolitan Opera depuis 1885, régale nom d’Opéra français de Montréal. La première de quoi satisfaire tous les goûts. Cependant, les amateurs de mélodies et d’airs du saison s’ouvre le 2 octobre 1893 avec La fi lle du Lavigne tient à la vocation musicale de son Prophète et des Huguenots de Meyerbeer tambour-major d’Offenbach. Mais, le 11 février parc. De mai à octobre, la Bande de la cité, et de L’éclair d’Halévy. Elaine Gryce, du 1896, fi ni le beau rêve ! Les chanteurs refusent fanfare qu’il dirige depuis son retour à D’Oyly Carte Opera de Londres, lui succède de jouer Le barbier de Séville de Rossini

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parce qu’ils n’ont pas été payés depuis 40 jours. La faillite de la compagnie les jette à la rue. Lavigne leur offre immédiatement le pavillon pour monter un festival d’adieu à leur bénéfi ce. Un public élargi, dont la plupart n’avaient sans doute jamais mis les pieds à l’Opéra français, applaudit ses grandes vedettes, la soprano Berthe Conti-Bossy, les ténors Armand Mary et Adrien Barbe, la basse Geoffray, Mlle Cléry et tous leurs camarades. Les chanteurs costumés jouent le mariage de Roméo et Juliette, la scène fi nale de la prison de Faust et celle des Saintes- Maries-de-la-Mer de Mireille, ainsi que le duo tragique de Jean de Leyde et Fidès dans le dernier acte du Prophète.

Deux ans plus tard, des rumeurs courent sur une relance possible de l’Opéra français, mais la mésentente entre les actionnaires pressentis tue le projet dans l’œuf. Le parc en profi te pour organiser une saison d’opérettes « burlesques » en versions abrégées, de juillet à septembre 1898. On fait appel à des comédiens de Montréal qui passent aisément de la comédie à la scène lyrique. Ils chantent en costumes; un chœur et un corps de ballet les assistent. Ils choisissent le même répertoire que le défunt Opéra français. Deux compositeurs dominent : Offenbach Vue depuis la promenade, parc Sohmer, Montréal, Qc, 1890, copié vers 1910 avec La fi lle du tambour-major, La grande- Carte postale — Cumming & Brewis © Musée McCord, MP-0000.827.4 duchesse de Gérolstein et La Périchole et 27 Lecocq avec La princesse des Canaries, La fi lle de madame Angot, Le petit duc et Girofl é-Girofl a. L’épithète « burlesque » qui qualifi e ces productions laisse entendre que les interprètes prennent des libertés avec Notes d’humour le texte en y ajoutant des réparties de leur crû et, peut-être, quelques Avec le chroniqueur, critique musical et collectionneur, allusions à l’actualité politique, au grand plaisir des spectateurs ! Claude GINGRAS À l’été de 1904 et de 1905, l’opéra fait un retour remarqué. Il ne s’agit plus uniquement de grands airs, mais de scènes complètes. Lavigne Un événement portopéra engage à New York la soprano Gina Ciaparelli et le baryton Victor Occelier, et deux artistes de Montréal, le ténor Charles Gauthier et la au bénéfice de la Société mezzo, Madame Demanthe. Les habitués du parc les applaudissent dans d’art vocal de Montréal un trio et le « Miserere » du Trouvère, des « fragments » du dernier acte Mardi 16 juin 2015 à 18 h d’Aida et des trois actes de La traviata. Mais la scène de la prison de Faust rallie tous les spectateurs, surtout l’apothéose de Marguerite Témoin privilégié de l’histoire de la musique qui déclenche chaque fois des tonnerres d’applaudissements. Enfi n, classique au Québec, le chroniqueur et le concert du 31 juillet 1905 donné au bénéfice des musiciens du critique musical de La Presse, Claude Sohmer réunit de nouveau ces quatre voix devant un auditoire de Gingras, est invité par la Société d’art vocal 10 000 personnes. Au programme, le trio de Jérusalem de Verdi, le de Montréal à animer une soirée au bénéfice quatuor de Rigoletto et le sextuor de Lucia di Lammermoor adapté de ses activités. Venez échanger avec cette pour quatre voix. personnalité mythique de notre monde musical qui ne laisse personne indifférent. Ernest Lavigne meurt en 1909, mais ses successeurs poursuivent son idéal Une occasion unique de découvrir le conteur musical jusqu’à ce qu’un incendie détruise ce lieu mythique dix ans plus et humoriste qu’est l’auteur de Notes paru aux Éditions La Presse. Dégustation de tard. Pendant trois décennies, pour des millions de visiteurs, les concerts portos accompagnés de bouchées du Sohmer ont constitué une immense initiation à la musique, et à l’art gastronomiques. lyrique en particulier, pour une nouvelle classe moyenne qui n’avait à peu près que ce seul moyen pour se familiariser avec de grandes œuvres, Billet : 150 $ (avec reçu d’exemption fiscale) même avec Falstaff de Verdi dont l’orchestre du parc exécute des extraits pour la première fois à Montréal, et ce vingt-cinq mois seulement après sa création milanaise ! À ma connaissance, ma grand-mère n’est jamais Café d’art vocal de la Société d’art vocal de Montréal allée au théâtre après son mariage. Par contre, elle avait acquis au Sohmer 1223, rue Amherst Montréal (Québec) H2L 3K9 un bagage musical, éclectique sans doute, mais qu’elle reconnaîtra avec Information : 514 397-0068 [email protected] artvocal.ca plaisir quand les 78 tours et la radio s’installeront dans son salon.

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Opéra de Montréal SILENT NIGHT : NUIT MAGIQUE

Silent Night Opéra en deux actes de Kevin Puts, livret de Mark Campbell Production : Opéra de Montréal / Commande et production du Minnesota Opera Salle Wilfrid-Pelletier Place des Arts, Montréal 16, 19, 21 et 23 mai 2015

INT : Marianne Fiset (Anna Sorensen), Joseph Kaiser (Nikolaus Sprink), Phillip Addis (Audebert), Alexander Hajek (Gordon), Daniel Okulitch (Horstmayer), Alexandre Sylvestre (Ponchel), Thomas Goerz (père Palmer), Jeremy Bowes (général Audebert) DM : Michael Christie, Orchestre Métropolitain, Chœur de l’Opéra de Montréal MS : Eric Simonson

Disons le sans détour, Silent Night est une réussite totale !

uréolée d’un prix Pulitzer, la partition de l’Américain Kevin Puts est Renaud Yves A d’une grande effi cacité dramatique et d’une inventivité réjouissante. Joseph Kaiser et Marianne Fiset Puisant parmi divers styles et usant autant de pastiches (chants et marches militaires, opéra classique, musique liturgique…) que d’effets couleur chatoyantes. De la distribution des solistes, on pourrait résumer contemporains (polyrythmie, cluster, glissandos de masse à la Xenakis), qu’il s’agit d’un parcours sans fautes ! Peut-être que la voix de Marianne le compositeur réussit à amalgamer tous ces éléments hétéroclites avec Fiset est un peu trop légère pour le rôle d’Anna Sorensen, mais son une grande habileté. Vocalement, il use principalement d’une prosodie jeu théâtral est naturel et investi. Phillip Addis campe un Audebert qui permet de mieux comprendre les mots, mais il choisit aussi des très humain et très attachant, tout en usant d’une voix chaude et bien épisodes clés pour y insuffl er un lyrisme tendre et généreux, surtout placée. Thomas Goerz en Père Palmer et Daniel Okulitch dans le rôle dans les scènes chorales – uniquement masculines –, dont la berceuse d’Horstmayer ressortent aussi du lot tant pour leurs qualités vocales du premier acte (Sleep) et la lecture des correspondances de guerre que pour leur jeu convaincant. De plus, Alexandre Sylvestre brille par 28 au second acte qui sont des moments mémorables et émouvants. sa composition comique de Ponchel, personnage certes secondaire, mais Esthétiquement, l’œuvre s’inscrit dans la mouvance de la musique de qui réussit à alléger l’atmosphère à quelques reprises. Le chef d’orchestre création typique de ce début de siècle chez nos voisins du sud : c’est Michael Christie a transmis sa vision très claire et directe de cette moderne, mais pas trop, et ça demeure ancré d’une quelconque façon musique à un Orchestre Métropolitain réceptif et expressif. dans la tonalité traditionnelle. Mais il faut se rendre à l’évidence en ce qui concerne Silent Night : le métier du compositeur, sa sensibilité, son L’opéra américain connaît un beau succès à l’Opéra de Montréal qui y sens du théâtre et son bon goût lui permettent de créer un opéra qui se puise une grande partie de son répertoire moderne et contemporain. On démarque admirablement du lot. pense aux récents Dead Man Walking de Heggie, The Consul de Menotti, Porgy and Bess de Gershwin ou encore la mémorable, bien que plus Ajoutons que le livret est d’une grande qualité. Très cinématographique lointaine, Susannah de Floyd. Pourquoi ne pas regarder vers le répertoire dans sa conception, voire un peu trop calqué sur le fi lm Joyeux Noël de contemporain européen qui regorge d’œuvres tout aussi pertinentes ? Christian Carion dont il s’inspire, le texte de Mark Campbell exploite à Pourquoi ne pas proposer, par exemple, l’œuvre coup-de-poing Angels merveille toute l’humanité qui émane de cette anecdote historique et in America de Peter Eötvös, ou encore le mélancolique et enivrant Au pose en ce sens des questions fondamentales. L’esprit très (trop) critique monde de Philippe Boesmans ? Et à quand la présentation d’un opéra pourrait se plaindre du peu de profondeur de certains personnages québécois, que ce soit une nouvelle production d’une œuvre existante secondaires, ou encore de la rapidité des changements scéniques (que (quand réentendrons-nous La princesse blanche de Bruce Mather ?) parasite un décor un peu bruyant, quoiqu’ingénieusement conçu), mais ou encore une création originale d’un compositeur d’ici ? Espérons que le propos de l’œuvre ainsi que sa valeur artistique sont si puissants que ce succès incitera à d’autres propositions aussi innovantes et originales, ces détails deviennent vite caducs. porteuses du renouvellement de l’art lyrique autant que de son public. Éric Champagne Quant à la production – celle de la création au Minnesota Opera, mais avec une distribution vocale locale –, elle demeure très traditionnelle dans sa représentation des tranchées et des champs de bataille de la Première Guerre mondiale. Avec un tel sujet, il serait difficile de faire autrement, mais c’est ici créé avec goût et intelligence. Il faut admettre que l’utilisation des projections (bien dosées et peu envahissantes) ajoute grandement à l’atmosphère des lieux.

Vocalement, la grande révélation vient du

chœur d’hommes qui s’est montré d’une Renaud Yves Renaud Yves grande dextérité, d’une souplesse et d’une Alexandre Sylvestre Phillip Addis, Joseph Kaiser et Alexander Hajek

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Opéra de Québec TOSCA À L’OPÉRA DE QUÉBEC : UNE FIN DE SAISON REMARQUABLE

Tosca, opéra en trois actes, musique de Giacomo Puccini, livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica, d’après La Tosca de Victorien Sardou Le chœur, dont la partition est plutôt pauvre Production : Opéra de Québec. salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec, les 16, 19, 21 et 23 mai 2015 dans cet opéra, a tout de même su se faire remarquer avantageusement, surtout lors INT : Gianna Corbisiero, soprano (Tosca), Thiago Arancam, ténor (Cavaradossi), James Westman, baryton (Scarpia), Marc-Antoine d’Aragon, baryton (Angelotti), Bruce Kelly, baryton (le sacristain), Keven Geddes, ténor (Spoletta), de sa splendide intervention au début du Patrick Mallette, baryton (Sciarrone), Hugo Laporte, baryton (le geôlier), Elizabeth Veilleux, mezzo-soprano (le berger) deuxième acte. Dans cette scène où l’on DM : Giuseppe Grazioli, Orchestre symphonique de Québec et Chœur de l’Opéra de Québec entend le chœur et Tosca chanter hors scène MS : Jacqueline Langlais pendant que Scarpia interroge Cavaradossi en mode récitatif, Puccini a mélangé un peu tout ce qu’il y a de meilleur dans cet opéra, de Opéra de Québec fermait sa saison l’intimité et du drame, du chant inspiré et des L’ 2014-2015 avec un grand classique du couleurs orchestrales chaudes et originales. répertoire italien, Tosca de Puccini, pour lequel il avait recruté une distribution solide et L’Orchestre symphonique de Québec a d’ail- convaincante. Les chanteurs se sont très bien leurs été excellent du début à la fi n, rendant acquittés de leur tâche à tous points de vue, ce fi nement toutes les nuances souhaitées par le qui nous a valu sans doute l’un des meilleurs compositeur. On sait aussi gré à Grazioli, en opéras de la saison régulière de la Compagnie plus d’avoir maintenu une direction inspirée, ces dernières années. d’avoir lié l’action et la musique avec autant d’efficacité. Chaque ponctuation musicale Gianna Corbisiero et Thiago Arancam d’un geste sur scène tombait toujours très ont été impeccables sur le plan vocal, exactement. appuyant juste ce qu’il fallait aux moments 29 plus intenses et demeurant naturels et La scénographie était assurément parmi les intimes dans le reste de leurs échanges, et meilleures, sinon la meilleure, des dernières notamment lors d’un duo de premier ordre. saisons de l’Opéra de Québec. Chaque acte Leur jeu a paru un peu gauche en certaines était doté d’une signature visuelle très occasions, notamment lors d’un baiser assez nette en fonction de son caractère, tant sur mal engagé au premier acte, mais c’est là le plan des décors que des costumes. De l’or tout ce qu’on peut leur reprocher. Corbisiero brillant de l’église Sant’Andrea au premier était très en contrôle sur toute l’étendue de acte jusqu’au bleu blafard de la scène fi nale son registre, peu importe le volume et le de l’échafaud, en passant par le rouge sombre caractère de sa partie; Tosca méritait bien et lourd des quartiers du baron Scarpia au sa réputation de grande cantatrice. Quant à deuxième acte, on se trouvait chaque fois dans Arancam, son timbre frais et énergique lui une ambiance toujours plus lourde, soutenant a permis de rendre héroïquement toute la à merveille le caractère dramatique de passion qui anime le peintre Cavaradossi, l’ouvrage. À l’excep tion peut-être du couteau Louise Leblanc Louise Gianna Corbisiero et Thiago Arancam tant dans l’amour que dans la souffrance, en à beurre, du moins à ce qui y ressemblait, particulier dans l’air « E lucevan le stelle », avec lequel Tosca poignardait Scarpia – c’est au début du troisième acte. sans doute un détail, mais qui surgit à un moment trop critique pour passer inaperçu –, Le baron Scarpia est un personnage dépravé tout semblait avoir été soigneusement étudié pour lequel il est impossible d’avoir la moindre pour produire un effet concentré. Les rares sympathie et dont la présence funeste donne effets de projection vidéo, à la fi n des premier une couleur plus sombre à l’opéra à mesure et troisième actes en particulier, étaient très qu’il progresse. James Westman a su rendre réussis, de même que les jeux d’éclairage du le personnage tout à fait détestable grâce à un troisième acte. jeu toujours juste et à son timbre de baryton bien mordant. On aurait seulement souhaité Il s’agissait vraiment d’une excellente produc- qu’il soit un peu plus sonore, puisqu’il se tion pour l’Opéra de Québec, qui s’attaquera perdait quelquefois dans l’orchestre, même d’ailleurs encore à Puccini avec La Bohème si Giuseppe Grazioli n’a jamais forcé la en 2015-2016. On ne peut que lui souhaiter la dynamique outre mesure. Dans l’ensemble, même réussite. Westman n’en tenait pas moins le rôle le plus Jean-Philippe Côté-Angers mémorable de la soirée. Louise Leblanc Louise Bruce Kelly (le Sacristain)

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Koralie Deetjen Woodward L’Orchestre symphonique de Montréal

L’Aiglon Opéra en 5 actes d’Arthur Honegger et de , L’ENVOL DE L’AIGLON livret d’Henri Cain d’après Edmond Rostand, donné en version concert Aiglon devait être un grand événement avec une fi nesse accrue et un sens de l’effet Production : Orchestre symphonique de Montréal (OSM) Maison symphonique de Montréal L’ et il l’a été ! Première nord-américaine de dramatique des plus effi caces. Et comment ne 17, 19 et 21 mars 2015 cette œuvre méconnue écrite à quatre mains, pas jubiler en écoutant les musiciens de l’OSM INT : Anne-Catherine Gillet, soprano (L’aiglon) ; l’œuvre, donnée trois soirs, était de plus qui nous démontrent hors de tout doute que Marc Barrard, baryton (Flambeau) ; Étienne Dupuis, 30 enregistrée en prévision d’un disque à paraître la musique française trouve en leur mains un baryton (Prince de Metternich) ; Philippe Sly, baryton (Marmont) ; Pascal Charbonneau, ténor (attaché chez Decca, marquant ainsi le grand retour écrin pratiquement parfait. militaire) ; Isaiah Bell, ténor (Frédéric de Gentz) ; de l’OSM à l’étiquette qui a fait sa renommée Marianne Fiset, soprano (Thérèse de Lorget) ; internationale. Finalement, ces concerts n’ont Cet opéra possède néanmoins quelques Julie Boulianne, mezzo-soprano (Fanny Elssler et été rien de moins qu’un incontournable de la petites faiblesses. Le livret comporte certaines Marie-Louise), Kimy McLaren, soprano (Comtesse saison musicale montréalaise. répliques vieillottes qui ne manquent pas Camerata). DM : Kent Nagano de faire sursauter l’oreille francophone CC : Andrew Megill, Chœur de l’OSM et Gilbert Patenaude, Cette réussite repose sur une distribution contemporaine. Par ailleurs, le grand nombre Les Petits Chanteurs du Mont-Royal vocale vraiment excellente. Le rôle-titre était de personnages secondaires a pour effet confié à la soprano belge Anne-Catherine d’étirer inutilement l’action. Quoique, de ce Gillet qui possède une voix légère et fragile, côté, il ne se passe pas grand-chose, en fait. compositeurs aient créé leur musique dans parfaite pour l’incarnation de cet adolescent De la pièce d’Edmond Rostand en six actes, le but évident de fl atter la fi bre nationaliste hors du commun, fi ls de Napoléon, sur qui pèse les compositeurs et le librettiste ont réussi d’un public français (à coups d’hymnes un destin en cul-de-sac. Son interprétation à résumer l’essentiel du propos en cinq nationaux et populaires, ainsi que de mélodies entièrement investie était particulièrement actes sur à peine plus de 100 minutes. Cette folkloriques), il faut souligner l’habileté quasi touchante et empathique. À ses côtés concision dramatique est habile, mais il aurait cinématographique que démontrent Honegger évoluaient de (trop) nombreux personnages été facile de faire encore d’autres coupures et Ibert à enchaîner les scénettes avec un secondaires, tous chantés par des interprètes sans perdre au change. Il apparaît évident naturel et un sens du rythme aiguisé. L’acte 2 de choix, bien que certains rôles soient très que le cœur théâtral de cet opéra se situe du fait place à une confrontation entre Metternich minces, voire inutiles. Le petit rôle de Thérèse côté du drame psychologique et politique. et l’aiglon qui tient du grand théâtre, tandis de Lorget, incarné par une Marianne Fiset C’est probablement dans cette optique que que l’acte 4 – à l’élan patriotique survitaminé – toute en douceur et en candeur, se démarquait l’œuvre peut rejoindre le public d’aujourd’hui, est très impressionnant. L’inspiration musicale pourtant du côté féminin. De la distribution puisqu’elle aborde les sujets de la filiation, est généreuse (et étonnamment unifiée masculine, on retient le baryton français Marc de l’héritage et du legs d’un père à un fils. pour un tel projet), et l’orchestration brille Barrard qui incarnait avec une tendresse Malgré le contexte historique, on ne peut d’inventivité et de savoureuses couleurs. quasi paternelle le rôle de Séraphin Flambeau, qu’être touché par ce jeune homme qui désire faux valet aux ambitions démesurées quant à aller aussi loin, sinon plus loin que son père, L’Aiglon, ce beautiful loser (merci à Leonard l’avenir de l’Aiglon. La performance d’Étienne mais qui en est incapable. Cette tragédie d’un Cohen pour l’expression !) connaît une Dupuis en Prince de Metternich, farouche anti- double destin inachevé peut toucher un public renaissance totalement justifi ée qui dépasse bonapartiste (le « méchant » de l’histoire), était nord-américain, malgré les apparats pompeux la simple curiosité. On félicite l’OSM pour ce toute en nuance et en intelligence, grâce à un des cours d’Europe du XIXe siècle, plus loin projet éloquent et audacieux et on attend avec timbre de voix profond et inquiétant. de nous. impatience le plaisir de réécouter cette œuvre au disque. À cela s’ajoutait la direction de Nagano, fl uide Les grandes qualités de la partition sont Éric Champagne et théâtrale, qui permettait de suivre l’action évidentes : bien qu’il soit clair que les

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Chants libres et ses Chants du Capricorne Chants du Capricorne (Canti del Capricorno) Musique de Giacinto Scelsi Production : Chants libres UNE PERFORMANCE SPECTACULAIRE Usine C 12, 13 et 14 mars 2015 eul sur scène pendant une heure, un vivant et évocateur du propos imaginé par la Capricorne, bête mystique, mue et se metteure en scène, où musique et arts visuels INT : Marie-Annick Béliveau, mezzo-soprano S MS : Pauline Vaillancourt métamorphose en femme. Ce résumé, fusionnent adéquatement. Il en résulte un succinct et forcément réducteur, représente la spectacle certes exigeant, car nourri de dramatisation qu’a faite Pauline Vaillancourt plusieurs couches de références, d’inspirations des Canti del Capricorno, une suite de et d’interprétations, mais à la logique et à chants abstraits, usant abondamment de l’unité impérissables. l’écriture micro-tonale, qui sont chantés sur des phonèmes et autres sonorités vocales Cela dit, l’incontournable de cette reprise (cris, murmures, borborygmes, etc.). Le (Chants Libres avait présenté la première compositeur italien Giacinto Scelsi les avait version de ce spectacle en 1995) est créés expressément pour sa muse Michiko l’interprétation spectaculaire et éblouissante Hirayama. Il ne s’agit pas d’une musique de Marie-Annick Béliveau. Rarement a-t-on originalement conçue sous forme d’opéra. entendu une chanteuse aussi inspirée et

Pourtant, dans la vision développée par impliquée face à cette partition remplie Dupuis Mathieu Pauline Vaillancourt, l’œuvre présentée d’embûches. Le simple défi de l’apprendre par comme un opéra-performance possède un cœur est ici relevé avec un sérieux exemplaire. attendrissante. Au fi nal, cette femme délivrée étonnant pouvoir dramatique. Mais non contente de livrer une partition si de son costume nous bouleverse et nous touche complexe avec une dextérité et une musicalité d’une étrange et mystérieuse façon. Il faut ici comprendre le terme performance innées, Marie-Annick Béliveau incarne, vit, se dans sa définition propre au monde de l’art transforme et transmet l’émotion primale de Reprise essentielle de ce spectacle hors visuel contemporain. Le décor-installation son personnage avec un naturel déconcertant. du commun, exigeant mais extrêmement ainsi que le costume conçu par Massimo D’étrange « bibitte », ce Capricorne quasi nourrissant, ces Chants du Capricorne feront Guerrera, couplé à la vidéo de Michel Giroux et monstrueux se transforme sous nos assurément date dans notre histoire lyrique. Jean Décarie, participent à un tout organique, yeux et nous rend la bête de plus en plus Éric Champagne 31

Fondation Arte Musica Production : Fondation Arte Musica, salle Bourgie, 17 avril 2015 LOVE SONGS : LA VIE ET L’AMOUR Ana Sokolović, Love Songs, opéra pour voix féminine seule INT : Kristin Hoff, mezzo-soprano D’UNE FEMME… (Représentation précédée d’un entretien de Claire Marchand avec Ana Sokolović) est devant un public Dans cet opéra, Ana Sokolović touche à C’majoritairement l’essence même des sentiments amoureux, à féminin qu’Ana Sokolović leur saveur première, rehaussée par la sobriété dynamique ou de la variété mélodico-rythmique a présenté son opéra Love du décor et des éclairages et exacerbée par la des langues utilisées, la trame narrative se tisse Songs, dans le cadre de la force expressive de l’interprète, dont la gestuelle et donne à l’œuvre son unité. série Cordes et discorde accompagne et prolonge un texte tantôt chanté, de la Fondation Arte tantôt déclamé, crié ou murmuré. Kristin Hoff, jeune mezzo ayant fait Musica. Commande du ses débuts à Carnegie Hall, livre une Queen of Puddings Music Écrire un opéra pour voix seule représente performance impressionnante, presque Theatre, l’œuvre a été moins un défi artistique que technique, selon athlétique, qui atteint son apogée à la fin créée en 2008 à Toronto la compositrice, car il faut penser à l’interprète de la pièce. L’évocation de l’être perdu est et a depuis été jouée avec qui devra réaliser physiquement la prestation. incontestablement le moment fort de l’opéra. succès tant au Canada En effet, Love Songs sollicite non seulement la Que ce soit lors de la déclamation des vers

Grégoire Mabit qu’en Europe. virtuosité vocale de la mezzo, mais également d’Éluard ou de ceux de Catulle, la jeune femme ses habiletés de comédienne pour donner vie à dévoile son véritable talent de tragédienne, sa Dix textes soigneusement choisis – chantés en une œuvre intense et riche d’invention. voix chaude et timbrée s’élevant en une français, anglais, serbe, gaélique et latin – sont mélopée aux accents poignants et véridiques. regroupés en cinq parties symbolisant l’amour Jouant de sa voix et de son corps, Kristin pur, tendre, enfantin, mûr ou dédié à l’être Hoff s’empare de l’œuvre, l’habite et tient Où va l’opéra aujourd’hui ? De l’avis d’Ana disparu. L’ensemble est assorti d’interludes le public en haleine durant quarante-cinq Sokolović, l’opéra va survivre tant qu’il y aura où les mots « je t’aime » sont déclinés en cent minutes, entrecoupées de silences rares mais des chanteurs mais, depuis Monteverdi, il langues : de Popa à Catulle, en passant par éloquents. Tour à tour mère, enfant, amante change et va continuer à changer. Love Songs, Éluard, Shakespeare, Nelligan ou Browning. ou se remémorant l’être perdu, elle personnifi e rencontre du théâtre musical et de l’opéra, Love Songs nous transporte – au propre comme l’universalité des émois amoureux qui ponctuent trace l’une des voies où il s’engage. au fi guré – de l’Antiquité à notre époque pour la vie d’une femme. Ainsi, fruit d’une écriture Florence Leyssieux mettre en scène l’intemporalité de l’Amour. savamment diversifiée, de changements de

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Théâtre lyrique de la Montérégie La vie parisienne, opéra-bouffe en 4 actes de Jacques Offenbach, sur un livret de et Ludovic Halévy Production : Théâtre lyrique de la Montérégie, salle Pratt & UNE BELLE ÉNERGIE MALGRÉ TOUT Whitney Canada. Théâtre de la Ville de Longueuil, 7, 8, 9 et 10 mai 2015

nombreux solistes, il faut d’abord retenir le nom INT : Martin-Michel Boucher, baryton (baron de Gondremarck), Élyse Charlebois, soprano de la soprano Jessica Lessard-Paradis, dont la (Métella), Jessica Lessard-Paradis, soprano délicieuse Gabrielle nous offre de superbes (Gabrielle), Richard-Nicolas Villeneuve, ténor envolées lyriques, et le solide baryton Martin- (Raoul de Gardefeu), Luc Major, baryton (Bobinet), Michel Boucher, qui campe un inoubliable Dany Leclerc, ténor (le Brésilien), Diane Hirsh, soprano (la baronne), Michel Huard, baryton (Frick), baron de Gondremarck. La Métella d’Élyse Patricia Weber, soprano (Pauline), Sébastien Comtois, Charlebois possède une voix puissante, qu’elle ténor (Prosper), Christian Filion, ténor (Urbain) devrait toutefois essayer d’alléger et de rendre DM : Donald Lavergne plus souple. À noter également Patricia Weber, MS : François Racine exquise Pauline, et le jeune ténor Sébastien Comtois, qui réussit à donner beaucoup de relief au rôle secondaire de Prosper. À la à rendre vivants des dialogues qui s’étirent tête d’un orchestre de dix musiciens, Donald en longueur, il ne parvient pas davantage à Lavergne propose une lecture parfois enlevée, faire bouger avec naturel les 35 choristes, qui mais le plus souvent un peu trop sage, de la semblent terriblement à l’étroit sur la scène partition d’Offenbach, qui nécessiterait en pourtant spacieuse de la salle Pratt & Whitney.

Guy Rochette Guy général des tempos plus vifs, comme dans le Essentiels dans ce type d’ouvrage, la gestuelle Élyse Charlebois et Martin-Michel Boucher numéro normalement endiablé du Brésilien. et les mouvements des chanteurs s’avèrent en général peu originaux et dépourvus de ruit d’un travail que l’on devine immense, Quelques mois après sa décevante Veuve subtilité. Ainsi, on a le regret de devoir dire F cette Vie parisienne impressionne joyeuse à l’Opéra de Québec, François Racine que c’est seulement de façon sporadique que d’abord par des costumes d’un luxe étonnant nous prouve avec cette Vie parisienne à pointe timidement dans ce spectacle la douce et l’enthousiasme d’une équipe de chanteurs quel point mettre en scène une opérette est folie du « Mozart des Champs-Élysées ». semi-professionnels éprouvant un plaisir une entreprise périlleuse qui repose sur un Louis Bilodeau 32 manifeste à se produire sur scène. Parmi les équilibre d’une fragilité extrême. Peu habile

Opéra du Saguenay-Lac-Saint-Jean Aïda, opéra en quatre actes, livret d’Antonio Ghislanzoni, musique de Giuseppe Verdi Production : Opéra du Saguenay-Lac-Saint-Jean, salle AÏDA AU PAYS DE LA FABULEUSE Pierrette-Gaudreault, Centre culturel du Mont-Jacob, 8, 9 et 10 mai 2015 our sa première production, l’Opéra du grande qualité visuelle du spectacle : décors INT : Marie-Claude Fortin (Aïda), Jean-Yves Morneau Saguenay-Lac-Saint-Jean a vu grand en monumentaux en aluminium, grand soin (Radamès), Francine Gagnon (Amnéris), Dominique P Émond (Ramfi s), Christian Bradette (Amonasro), présentant rien de moins qu’Aïda de Verdi, apporté aux costumes, tous superbes, et belle Alexandre Dufour (Roi d’Égypte), Élisabeth sur la petite scène de la salle Pierrette- place réservée aux jeunes danseurs de l’école Boudreault (Grande prêtresse), Réjean Wilson Gaudreault. D’entrée de jeu, on doit saluer Florence-Fourcaudot. (Messager) l’audace de la jeune compagnie qui s’attaquait DM : Alexandre Malenfant, Orchestre et chœur de l’Opéra à un gros morceau du répertoire, avec Chez les solistes, qui tous proviennent du Saguenay-Lac-Saint-Jean MS : Patrice Gagnon et Lily Bouchard l’implication totale de ses artisans, mais de la région, la nervosité était palpable, sans les moyens techniques et fi nanciers des particulièrement dans la première moitié du grandes maisons. Mentionnons d’abord la spectacle. Dans le rôle-titre, Marie-Claude était quelque peu restreint, ce qui ne facilitait Fortin, très à l’aise sur scène, joue Aïda avec pas les changements de décors, parfois naturel et parvient à émouvoir, malgré les chaotiques et qui allongeaient de beaucoup défi s techniques que le rôle impose. Jean-Yves la durée de la représentation. De plus, le Morneau et Francine Gagnon, en Radamès valeureux ensemble instrumental composé et Amnéris, semblaient tous deux gagner en en grande partie de membres du Régiment confiance tout au long de la soirée. Quand à du Saguenay, bien que constitué de bons l’imposant chœur, bien préparé, il faut souligner éléments, souffrait du déséquilibre entre les la solidité des pupitres des sopranos et des altos. cuivres et les cordes, ces dernières en nombre nettement insuffi sant. On reste néanmoins perplexe devant le choix de l’opéra. L’idée était intéressante sur le Malgré ces quelques réserves, on sort ravi plan pédagogique du fait qu’Aïda mobilise de cette soirée devant l’enthousiasme et la un nombre impressionnant d’amateurs d’art générosité de ces passionnés d’opéra et de lyrique désireux de s’impliquer dans un projet spectacles à grand déploiement. collectif. Cependant, il s’agit d’un spectacle Marie-Claude Perron

Roger Gauthier Roger qui oblige au gigantisme alors que l’espace Francine Gagnon, Alexandre Dufour et Jean-Yves Morneau

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 CRITIQUES OPÉRAS CONCERTS RÉCITALS FESTIVALS CD / DVD LIVRES Pierre Belhumeur Opéra Immédiat Carmen, de , livret d’Henri Meilhac et Ludovic Halévy CARMEN SAUVÉ Production : Opéra immédiat Monument national, Montréal, 11 avril 2015

INT : Ioanna Touliatou (Carmen), Éric Thériault (Don José), PAR CARMEN Sophie de Cruz (Micaëla), Julien Horbatuck (Escamillo) DM : Philippe Ménard, Orchestre philharmonique des our sa seconde production de la saison, Opéra musiciens de Montréal, Chœur d’Opéra immédiat, Pimmédiat présentait à guichet fermé un autre Chœur d’enfants Les Petites Voix du Plateau incontournable du répertoire lyrique, Carmen, MS : Frédéric-Antoine Guimond de Bizet, au Monument national. La capacité de cette salle de spectacle était à la hauteur de l’événement et le public avait répondu présent. prestation, notamment grâce à son lyrisme et à L’occasion de réentendre une musique qui a sa très forte émotion. Sophie de Cruz a incarné bercé tant de générations, de réentendre des airs Micaëla de belle manière, exprimant bien les vocale se retrouve à chanter aux côtés de devenus des classiques, de se laisser à nouveau sentiments refoulés de son personnage. Julien Carmen. C’est lui faire beaucoup d’honneur, charmer par des numéros d’ensemble teintés par Horbatuck a aussi fait bonne fi gure, si ce n’est au risque de compromettre la représentation. l’exotisme de la musique espagnole. qu’il semblait trop penser à la qualité de la projection de sa voix et pas assez au rôle du Enfi n, il y avait de quoi rester incrédule devant Cette production de Carmen a été portée sur toréador qu’il était censé incarner. la tête de taureau en peluche, brandie par scène par un excellent duo formé par Ioanna Escamillo avant que les rideaux ne tombent. Touliatou et Éric Thériault. Par sa gestuelle La soirée avait plutôt mal débuté. Certaines Nous venions pourtant d’assister au meurtre et son charisme, la mezzo-soprano a su voix discordantes se sont fait entendre dès sanglant de Carmen. Parmi toutes les idées communiquer tout le charme de la bohémienne. la première scène. La justesse s’est révélée originales d’Opéra immédiat, nous préférons Sa voix langoureuse s’est particulièrement bien un défi pour plusieurs d’entre elles. Parfois retenir le choix des interprètes de premier plan, illustrée dans « L’amour est un oiseau rebelle » même de gros décalages sont apparus avec Ioanna Touliatou et Éric Thériault ayant été, avec et « Près des remparts de Séville ». Dans le rôle l’orchestre. Difficile aussi de comprendre Sophie de Cruz, les garants de cette production. du brigadier, Éric Thériault a fait une très belle qu’un interprète sans véritable technique Justin Bernard

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Cousin Cousine, opérette en trois actes, musique de Gaston Productions Belle Lurette Serpette, livret de et Henri Kéroul Productions Belle Lurette, Théâtre Rouge du Conservatoire de musique et d’art dramatique de Montréal, COUSIN COUSINE, 13, 14 et 15 mars 2015 INT : Frédérike Bédard (Mme Tapenôtre), Benoît Godard SUR FOND DE QUIPROQUOS RÉUSSIS (M. Tapenôtre), Sylvain Paré (Pomerol), Philippe Gobeille (Jolivet), Eugénie Préfontaine (Thérèse Courtalin), epuis 2004, les productions Belle Lurette concourent à la redécouverte d’un répertoire léger Marie-Josée Corneau (Véronique), Michel Métayer qui fait la part belle à Offenbach, mais aussi à d’autres compositeurs pour la plupart tombés (baron de Bellefontaine), Jocelyne Cousineau D (Mme Moutonnet), Marie-Philippe Bois (Henriette dans un oubli presque total, tels , Raoul Moretti ou Maurice Yvain. Cette année, de Bellefontaine) la troupe a jeté son dévolu sur Gaston Serpette (1846-1904) et sa désopilante opérette Cousin PIA : Pierre McLean Cousine (1893), dont l’intrigue passablement enchevêtrée mène au triomphe de l’amour entre MS : Étienne Cousineau la jeune Thérèse Courtalin et son cousin, l’offi cier Edgar de Pomerol. Sur fond de quiproquos multiples et de travestissements, on y trouve notamment un vieux baron libidineux, un notaire musicien titillé par l’adultère, son chœur de clercs aux interventions intempestives et de jolies pensionnaires qui font se pâmer de désir tout un régiment à la gestuelle bien peu militaire, mais follement amusante. C’est dans ces scènes chorégraphiées avec beaucoup de précision qu’Étienne Cousineau se révèle particulièrement doué pour conférer rythme et drôlerie à un spectacle un peu longuet qui dure près de trois heures.

Au sein d’une distribution de 17 chanteurs semi-professionnels qui prennent tous un plaisir manifeste à endosser leurs rôles respectifs, il faut noter Eugénie Préfontaine et Marie-Philippe Bois, dont le potentiel vocal ne laisse aucun doute et qui sont parfaitement crédibles en pensionnaires ingénues découvrant la passion amoureuse. Leurs prétendants, joués par Sylvain Paré et Philippe Gobeille, de même que le notaire de Benoît Godard et le baron de Michel Métayer se révèlent très à l’aise sur scène, tout comme Marie-Josée Corneau, plus parigote que nature, et les excellents clercs (et soldats) de Ludovic Jean et Nathan Lelièvre. Frédérike Bédard et Jocelyne Cousineau nous réservent le moment peut-être le plus hilarant de la soirée lorsqu’elles entonnent le chant du carême de deux béguines qui s’aperçoivent à leur stupéfaction du caractère scabreux des paroles qu’elles chantent depuis des lustres avec une Jean-René Beaupré grande dévotion... Au piano, Pierre McLean sert au mieux une partition qui recèle quelques joyaux Michel Métayer, Ludovic Jean, Serge Turcotte, de tendresse et surtout de cocasserie. Philippe Bolduc, Nathan Lelièvre, Benoît Godard Louis Bilodeau

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 L’Opéra Bouffe du Québec présente le Gala lyrique de Laval 2015

SIMON FOURNIER, DIRECTEUR ARTISTIQUE

Solistes et chœur de l’OBQ vous offrent un événement musical joyeux et printanier.

14 juin à 15h00 MAISON DES ARTS DE LAVAL 1395, boul. de la Concorde Ouest, Laval

Billets 35 $ / VIP 60 $ (reçu wscal de 25 $) Réservations : 450 667-2040 • Informations : 514 903-1980 www.operabouffe.org CRITIQUES OPÉRAS CONCERTS RÉCITALS FESTIVALS CD / DVD LIVRES

Les Violons du Roy Zémire et Azor, opéra-ballet en quatre actes, livret de Jean-François Marmontel, musique d’André-Ernest-Modeste Grétry Production : Les Violons du Roy et l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal, UNE CHARMANTE Maison symphonique, Montréal, 23 mai 2015, Palais Montcalm, Québec, 27 mai 2015 INT : Florie Valiquette, soprano (Zémire), Jean-Michel Richer, ténor (Azor), RÉSURRECTION Christopher Dunham, baryton (Sander), Jacques-Olivier Chartier, ténor (Ali), Cécile Muhire, soprano (Lisbé), Pascale Spinney, mezzo-soprano (Fatmé) Cet article rend compte de la repré sentation donnée à Montréal. DM : Mathieu Lussier, Les Violons du Roy MS : Denys Arcand e ne sont pas les noms des rôles-titres, Zémire et Azor, ou ceux de C leurs créateurs, Marmontel et Grétry, qui auront d’abord attiré le public à cette production des Violons du Roy, mais bien celui du cinéaste limbes et d’inviter le cinéaste, qui avait utilisé l’un de ses airs dans son Denys Arcand, dont cette variation sur La Belle et la bête allait être sa film L’Âge des ténèbres, à en faire la mise en scène. C’est aussi lui qui première mise en scène d’opéra. aura décidé de transformer en récitatifs les dialogues, à l’origine parlés, qu’Arcand avait condensés pour ramasser l’action. Enfin, c’est Lussier Résultat ? Charmante soirée. Mais la première personne à féliciter est le qui assumait la direction d’orchestre et, à part quelques brefs problèmes chef Mathieu Lussier. C’est lui qui a eu l’idée de sortir cette œuvre des d’intonation chez les cors et le diffi cile dialogue entre la fl ûte et la voix dans l’air de Zémire, il sut maintenir la coordination entre l’orchestre alerte qu’il avait devant lui et les chanteurs qu’il avait derrière lui ou loin sur les côtés.

Pour ce qui est de la mise en scène de Denys Arcand, compte tenu des moyens limités qu’il avait à sa disposition, ce fut dans l’ensemble un premier essai concluant. Plusieurs bonnes idées, en commençant par le

Catherine Charron-Drolet Catherine découpage de l’espace scénique en deux aires de jeu, de part et d’autres de l’orchestre formant un triangle. Ces deux aires correspondaient aux deux lieux de l’action, le palais d’Azor et celui du père de Zémire, et un « chemin », traversant le triangle de l’orchestre entre les cordes et les vents, permettait aux personnages de « voyager » de l’un à l’autre. Par la façon dont ces derniers interagirent entre eux tout au long du spectacle, il était clair qu’Arcand, sans chercher à faire de l’esbroufe, avait aussi porté une bonne attention au jeu d’acteur, sans nuire aux chanteurs qui 35 ont tous fait preuve d’une belle tenue vocale et scénique. Guy Marchand Jean-Michel Richer et Florie Valiquette

La Compagnie Baroque Mont-Royal Actéon, pastorale en musique en un acte de Marc-Antoine Charpentier sur le livret d’un auteur inconnu Production : La Compagnie Baroque Mont-Royal, salle de concert du Victoria Hall, Westmount, ACTÉON, UN JOYAU OUBLIÉ 25 et 26 avril 2015 INT : David Menzies, ténor (Actéon), Chelsea Mahan, soprano (Diane), Marie-Andrée Mathieu, mezzo-soprano (Junon), Kristi Bryson, soprano (Aréthuse), Kripa Nageshwar, soprano epuis sa fondation en 2011 par David Menzies et Susan Toman, (Daphné), Meagan Zantingh, mezzo-soprano (Hyale) Dla Compagnie Baroque Mont-Royal poursuit sa mission de mieux DM : Rona Nadler faire connaître l’univers de l’oratorio et de l’opéra baroques. En plus de MS : Jonathan Patterson nombreux concerts consacrés à des compositeurs comme Purcell, Haendel, Zelenka ou Mondonville, la troupe a notamment donné des représentations et Jonathas (1688) et Médée (1693), Actéon comprend des moments de Pygmalion de Rameau (2012) et de L’Europe galante de Campra musicaux très contrastés, comme les chœurs pleins d’allégresse des (2013). Cette année, les artistes – issus de l’École de musique Schulich de chasseurs, le charmant babillage des nymphes, l’expression de la rage l’Université McGill – ont porté leur choix sur la courte pastorale Actéon infl exible de Diane ou la poignante déploration fi nale. de Marc-Antoine Charpentier. L’intrigue présente le destin du malheureux chasseur, qui, coupable d’avoir contemplé Diane au bain, est transformé en En dépit de la modestie des effectifs, soit sept musiciens et douze chanteurs cerf par la chaste déesse avant de se faire dévorer par ses propres chiens. en tout et pour tout, la partition de Charpentier est remarquablement Composé selon toute vraisemblance avant les grands chefs-d’œuvre David servie par une équipe dans l’ensemble homogène. David Menzies campe un Actéon solide vocalement et s’avère émouvant dans la scène de sa Meagan Zantingh, Kathrin Welte, Kristi Bryson (au centre), Chelsea Mahan et métamorphose. La distribution féminine est dominée par la splendide Kripa Nageshwar Junon de Marie-Andrée Mathieu, dotée d’un opulent timbre de mezzo, et l’exquise Aréthuse de la soprano Kristi Bryson. Si Chelsea Mahan joue avec beaucoup de panache le rôle de Diane, son émission vocale manque de

Elisa Pentillä souplesse et sa diction française est perfectible. Simple mais parfaitement en situation, la mise en scène de Jonathan Paterson rend justice à l’œuvre et intègre avec bonheur les danses de Shauna Feldman. Après avoir donné en première partie des sonates de François Couperin et de Marin Marais, Rona Nadler et ses instrumentistes confi rment dans l’opéra de Charpentier leurs affi nités profondes avec un répertoire injustement négligé. Louis Bilodeau

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Atelier d’opéra et Orchestre symphonique de la Faculté de musique de l’Université Laval ON A CHANTÉ SUR LA LUNE !

et pour l’un de ses complices la main des deux Il mondo della luna, dramma giocoso en trois actes, musique fi lles de Bonafede. Au deuxième acte, celui-ci de Joseph Haydn, livret de Carlo Goldoni se réveille dans ce qu’il croit être le monde Production : Atelier d’opéra et Orchestre symphonique de la lunaire. Les fi lles du vieillard et sa servante Faculté de musique de l’Université Laval, Théâtre de la Cité universitaire, 10, 12 et 13 mars 2015 se joignant à la supercherie, il tombe dans le panneau, jusqu’à ce qu’on essaie de lui INT : Hugo Laporte, basse (Bonafede), David Souza, ténor soutirer son argent « terrestre ». Réalisant (Ecclitico), Marie-Chantal Lemieux mezzo-soprano (Ernesto), Roxanne Bédard, soprano (Clarice), qu’on s’est payé sa tête, il fi nit tout de même Fanny Grenier, soprano (Flaminia), Marie-Claire par permettre le mariage de ses filles et de Drolet, mezzo-soprano (Lisetta), Louis-Charles leurs prétendants. Gagnon, ténor (Cecco), Jonathan Gagné, baryton et Keven Larouche, ténor (disciples d’Ecclicito) Pour cette œuvre exigeante sur tous les plans, DM : Airat Ichmouratov MS : Jean-Sébastien Ouellette on remarquera d’emblée qu’une attention particulière a été accordée à l’interprétation du style de l’époque classique. Sous la direction

Catherine Charron-Drolet Catherine d’Airat Ichmouratov, l’orchestre livre une solide Hugo Laporte, lauréat du dernier concours David Souza, Hugo Laporte et Keven Larouche prestation qui dépasse assurément pour les de l’Orchestre symphonique de Montréal, en interprètes le simple exercice pédagogique. totale maîtrise de sa voix, campe un Bonafede ualifié de premier opéra de science- enthousiaste, plein de candeur et attachant. Q fiction, Il mondo della luna de Joseph La mise en scène simple et vivante de Jean- Le reste de la distribution, de très bon niveau, Haydn, sur un livret de Carlo Goldoni, était Sébastien Ouellette, qui transforme un décor était parfois couvert par l’orchestre, placé présenté par l’Atelier d’opéra de l’Université de cour extérieure en surface lunaire fl eurie et proche des spectateurs. Mentionnons les Laval au début mars de cette année. Cette colorée, exploite habilement le contraste entre performances de Marie-Chantal Lemieux, histoire loufoque raconte le « voyage dans le texte drôle de Goldoni et la rigueur musicale touchante dans le rôle d’Ernesto et de 36 l’espace » du vieux et naïf Bonafede, à qui le de Haydn. On rit encore au souvenir de l’air Roxanne Bédard dans l’air virtuose « Ragion faux astronome Ecclitico fait croire qu’il peut « Ho veduto una ragazza », magnifiquement nell’alma siede ». voir sur la lune avec son télescope. En usant de rendu par Bonafede... avec ses clins d’œil à Marie-Claude Perron ce stratagème, il tente d’obtenir pour lui-même Tintin et à E.T.!

Opéra McGill fi lle-mère confi née dans un couvent. Le rôle- titre est solidement incarné par la soprano DEUX PUCCINI QUI VALENT LE DÉTOUR déjà bien établie Gianna Corbisiero (venue à McGill parfaire sa formation, elle ira une Suor Angelica et Gianni Schicchi, deux opéras en un acte, n raison du nombre élevé de rôles qu’offrent fois sa session terminée chanter le rôle-titre musique de Giacomo Puccini, livret de Giovacchino Forzano E Suor Angelica et Gianni Schicchi, tirés de Tosca à l’Opéra de Québec !). À ses côtés, Production : Opéra McGill, Le Festival Black Box Lisl Wirth, en du célèbre Tryptique (Il trittico) – complété Anna Bond (mezzo-soprano), en abbesse du collaboration avec l’Orchestre de chambre McGill, à l’École de par Il tabarro –, ces deux œuvres de Puccini couvent, et Veronica Navarro (mezzo-soprano), musique Schulich, salle Pollack, 19 et 21 mars 2015 sont presque plus fréquemment montées par les en tante accablante, ont livré chacune une INT : Suor Angelica : Gianna Corbisiero, soprano (Angelica), Veronica Navarro, mezzo (Tante Zia), Anna Bond, ateliers d’opéra que par les compagnies établies. performance à la hauteur des attentes. Un mezzo (Abesse), Micaela Dickey, mezzo (Sorella L’historienne Mireille Barrière souligne d’ailleurs chœur d’une douzaine de religieuses les infi rmiera) ; Gianni Schicchi : Dimitri Katotakis, que l’Opéra du Québec ne les a produits qu’une entourait adéquatement. baryton (Schicchi), Aaron Shepherd, ténor (Rinuccio), seule fois en 1971, tandis que l’Opéra de Montréal Chelsea Rus, soprano (Lauretta) DM : Boris Brott les a présentés, par fragments, entre 2006 et Changement complet de ton avec Gianni MS : David Gately 2010. Ces deux ouvrages proposent, dans des Schicchi, comédie dépeignant une famille registres contrastés, un traitement du thème de bourgeoise cupide, prête à tout pour la mort, tragique dans Suor Angelica, comique s’accaparer d’un héritage. Rappelant par dans Gianni Schicchi. moment l’opérette, le fouillis délibéré de la mise en scène et le comique des faux sanglots Pour cette production, l’Opéra McGill a eu le du clan Donati font mouche. Le baryton Dimitri privilège de retenir les services du metteur Katotakis interprète avec aplomb le rôle-titre, en scène d’expérience David Gately, reconnu tant sur le plan vocal que scénique. Le ténor depuis des années tant aux États-Unis qu’au Aaron Sheppard se distingue dans le rôle du Canada, et notamment, à l’Opéra de Montréal. jeune Rinnucio, tandis que la soprano Chelsea La sobriété de la mise en scène de Suor Rus éblouit en Lauretta, surtout dans l’air que Angelica assurait tout le respect commandé tout le monde attend, « O mio babbino caro ». par le sujet religieux sans toutefois occulter Luc Bellemare

Amanda Poole, Samantha Pickett, Dimitri Katotakis Schicchi_Tam Lan Truong le drame humain vécu par cette jeune et Irem Ince

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Orchestre et Chœur de l’Orchestre Métropolitain certains passages pianissimo pouvaient être un peu trop en retrait, mais en général, la UN MAGNIFIQUE ET TROP RARE STABAT MATER masse sonore était adéquate, particulièrement l est étonnant que le Stabat Mater de Dvořák dans le dernier mouvement où, dans les I ne soit pas plus présent dans le répertoire quelques rares passages a cappella, le chœur choral d’ici. L’œuvre a une beauté intrinsèque fit entendre une couleur et une puissance qui la démarque avantageusement des mille enivrantes. et un Requiem et autres œuvres religieuses programmées à satiété durant le temps pascal. La sonorité généreuse de l’Orchestre On ne peut que saluer avec enthousiasme ce Métropolitain correspond parfaitement au choix de l’Orchestre Métropolitain pour son style de Dvořák et cette plénitude sonore a été concert du dimanche des Rameaux. entièrement mise au service de cette musique du cœur. L’équilibre entre les voix solistes, le Les quatre solistes ont chanté admirablement chœur et l’orchestre était exemplaire. Yannick leur partition. On notera la grâce et la douceur de Nézet-Séguin insuffla à cette partition un la soprano Layla Claire qui illumina de ses aigus sentiment de piété et de retenue, jusqu’au angéliques cette partition tout en introspection. dernier mouvement où sa direction prit un La basse John Relyea impressionna par son envol salvateur, une exubérance libératrice.

François Goupil timbre rond et profond. La mezzo-soprano Karen ANTONÍN DVOŘÁK : STABAT MATER, OP. 58 / B. 71 Cargil et le ténor Garrett Sorenson (ce dernier Ce magnifi que concert offrit une occasion rare Production : Orchestre Métropolitain appelé à remplacer un autre ténor initialement d’entendre cette œuvre monumentale d’un Maison symphonique de Montréal programmé) étaient tout à fait dans le ton. compositeur dont le répertoire symphonique 29 mars 2015 et chambriste est bien établi, mais qui reste INT : Layla Claire, soprano ; Karen Cargill, mezzo- Ce Stabat Mater n’est pas une œuvre très à découvrir pour son apport à la musique soprano ; Garrett Sorenson, ténor ; John Relyea, exigeante pour le chœur sur le plan technique. chorale et lyrique. Quand pourrons-nous, par basse ; Chœur de l’Orchestre Métropolitain Ainsi, il y a place à un travail sur la couleur et exemple, entendre son grandiose Requiem ? (dir. : François A. Ouimet et Pierre Tourville) la fi nesse que releva adéquatement le Chœur L’appel est lancé ! DM : Yannick Nézet-Séguin de l’Orchestre Métropolitain. Peut-être que Éric Champagne 37 Les Violons du Roy et le chœur Dido and Aeneas, opéra en trois actes, musique de Henry ombrageux de Henk Neven faisait aussi La Chapelle de Québec Purcell, livret de Nahum Tate; extraits de The Fairy Queen d’Énée un parfait vis-à-vis à Röschmann, et King Arthur de Henry Purcell tous deux croulant pareillement sous le Production : Les Violons du Roy, sur invitation de poids de leur destin. L’OPÉR A Carnegie Hall, Salle Raoul-Jobin du Palais Montcalm, Québec, 9 avril 2015 ; Maison symphonique, Montréal, À SON MEILLEUR… 10 avril 2015 ; Carnegie Hall, New-York, 12 avril INT : Dorothea Röschmann, soprano ; Henk Neven, MÊME SANS THÉÂTRE baryton ; Hélène Guilmette, soprano ; Les Violons du Roy et La Chapelle de Québec Cet article rend compte de la représentation DM : Richard Egarr donnée à Québec.

es Violons du Roy et le chœur La Chapelle de Les deux grands airs incombant à Dorothea LQuébec présentaient à Québec, à Montréal Röschmann, « O let me weep » et « When I am laid et à New York, en avril, une version concert du in earth », marquaient les deux sommets de la seul opéra de Henry Purcell, Dido and Aeneas, soirée. Dans le premier, le soprano enveloppant et des extraits de deux de ses semi-operas. de Röschmann s’élevait avec aisance au-dessus Loin de perdre à l’absence de costumes et de d’un accompagnement, assuré simplement par le décors et à la simplicité de la mise en scène, ce violon solo, le clavecin et l’archiluth. Les pauses spectacle aura comblé son public du début à la splendidement ménagées par Egarr vers la fi n fi n grâce à la qualité de ses interprètes, dans de l’air ont achevé de couper le souffl e au public. une musique pleine de surprises. Dans le second, apogée de la passion d’une Le Soleil, Yan Doublet Dorothea Röschmann Didon véritablement royale, Röschmann en a On connaît les qualités du chœur de chambre fait un drame d’une rare intensité grâce à son Le jeu irréprochable des instrumentistes, de La Chapelle de Québec, mais on ignore à quel vibrato à l’allure fantomatique et à la variété de guidés avec assurance par Egarr à partir point certains des chanteurs qui le composent ses nuances. du clavecin, a aussi joué un rôle-clé dans la sont aussi de très bons solistes. Mentionnons qualité du spectacle. La mention d’honneur en particulier l’enchanteresse malfaisante Face à la forte gravité de Didon, Hélène de ce côté revient aux cordes pincées – à souhait de Vicki St. Pierre dans Dido and Guilmette offrait un contraste de légèreté clavecin, guitare baroque et archiluth – dont Aeneas, avec son timbre nasillard et mordant, adorable. La constance du ton emprunté les interventions en formation restreinte à et l’habileté de Stefanie True, en tant que par chacune des deux chanteuses, quelques reprises ont compté parmi les nymphe dans King Arthur, à ensorceler l’oreille l’une représentant la fatalité et l’autre moments les plus émouvants de la soirée. simplement par la délicatesse avec laquelle elle l’optimisme, donnait beaucoup de corps à Jean-Philippe Côté Angers aborde les ornements et la dynamique. cet opéra à l’envergure limitée. Le baryton

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 15 SALLEBOURGIE.CA 16 514-285-2000

La Fondation Arte Musica présente 5e SAISON

CAMILLA NYLUND NOTRE AUTOMNE LYRIQUE soprano L’OPÉRA EN EFFERVESCENCE AU QUÉBEC NOTRE HISTOIRE LYRIQUE A-T-ELLE 400 ANS ? ( ;;%();549c46ž5 CHAOS ET MERVEILLES AU FESTIVAL D’AIX

Œuvres de MAHLER, R. STRAUSS, NUMÉRO 1 • AUTOMNE 2014 SIBELIUS et DEBUSSY

La soprano finlandaise, nous présente son premier récital au Québec ! ENTRETIEN AVEC YANNICK NÉZET-SÉGUIN UN CHEF LYRIQUE ORLANDO CONSORT Grande-Bretagne "2 44ē+( "(;549c46ž5

Matthew Venner, contreténor

Mark Dobell, ténor UN HIVER À L’OPÉRA Angus Smith, ténor La grande séduction… de Dalila ANNE SOFIE VON OTTER soprano Quarante ans d’art lyrique à Glimmerglass Donald Greig, baryton La compositrice Luna Pearl Woolf Une mort de Klinghoffer... controversée ! Ce concert témoigne de la suprême ANDREAS SCHOLL contreténor "(!(" 47% ;549c46ž5 NUMÉRO 2 • HIVER 2015 aisance mélodique qui caractérise le puissant génie du chanoine poète Philharmonia Baroque Orchestra et musicien du XIVe siècle Nicholas McGegan, chef Guillaume de MACHAUT. Airs et duos de HANDEL et d’Arvo PÄRT

Présenté par

ENTRETIEN AVEC HÉLÈNE GUILMETTE la voix lumière

UNE SIGNATURE LYRIQUE VIOLI ONSDUROYR .COM Le retour du Roi Arthus Le CMIM – Chant 2015 Rodolphe Plamondon, un ténor oublié MOZART, LES GRANDS Qui écoute à l’Opéra de Montréal? LES CONCERTOS POUR PIANO NUMÉRO 3 • PRINTEMPS 2015 24 SEPTEMBRE 20 H QUÉBEC VIOLONS 26 SEPTEMBRE 19 H 30 MONTRÉAL DU ROY ROBERT ROBERT D. LEVIN, CHEF ET PIANISTE D. LEVIN LA CHAPELLE DE QUÉBEC ÉVÉNEMENT MOZART – SAISON 2015/2016 GRANDE MESSE ET REQUIEM

10 ET 11 FÉVRIER 20 H QUÉBEC 12 FÉVRIER 19 H 30 MONTRÉAL ENTRETIEN AVEC BERNARD LABADIE, CHEF LYDIA TEUSCHER, SOPRANO BARBE & DOUCET ET LA CHAPELLE DE QUÉBEC des mercenaires de l’opéra

BERNARD 10 $ Revue L’Opéra 03 LABADIE LA PASSION SELON SAINT MATTHIEU

9 ET 10 MARS 20 H QUÉBEC 12 MARS 19 H 30 MONTRÉAL BERNARD LABADIE, CHEF MARIE-NICOLE LEMIEUX, CONTRALTO KARINA GAUVIN, SOPRANO ET LA CHAPELLE DE QUÉBEC ABONNEZ-VOUS !

MARIE-NICOLE LEMIEUX GARCÍA ALARCÓN www.revuelopera.org ABONNEZ- DIRIGE WATER MUSIC [email protected] VOUS DÈS 19 MAI 20 H QUÉBEC 21 MAI 19 H 30 MONTRÉAL Une publication du /#+06'0#06šБ LEONARDO GARCÍA ALARCÓN, CHEF JOÉLLE HARVEY, SOPRANO Palais Montcalm Maison symphonique Salle Bourgie du 1 877 / 418 641-6040 de Montréal Musée des beaux- 1 866 / 514 842-2112 arts de Montréal Et de nombreuses autres 514 285-2000 LEONARDO TGPEQPVTGUKPQWDNKCDNGUšБ option 4 GARCÍA ALARCÓN CRITIQUES OPÉRAS CONCERTS RÉCITALS FESTIVALS CD / DVD LIVRES

L’Orchestre lyrique de Montréal Maurice Ravel : Shéhérazade Ernest Chausson : Poème de l’amour et de la mer, op. 19 UN PROGRAMME TOUT FRANÇAIS : Symphonie en do majeur Production : Orchestre lyrique de Montréal Salle Claude-Champagne 18 avril 2015

INT : Julie Boulianne, mezzo-soprano DM : Simon Rivard et Ben Kepes

Dans la première partie, dirigée par Simon Rivard, le passage d’un « son Ravel » à un « son Chausson », tout à fait différents l’un de l’autre, était époustouflant ; Poème de l’amour et de la mer surtout permettait d’admirer une sensibilité et une richesse de timbre qu’on entend rarement dans ce répertoire, et qui convient parfaitement à la musique de Chausson. Il est regrettable cependant que dans ces deux œuvres vocales, remarquablement interprétées par la mezzo-soprano Julie Boulianne, le volume sonore de l’orchestre ait parfois noyé la voix, rendant le texte difficile à saisir. Une nuance orchestrale un peu plus douce aurait davantage rendu justice au travail de cette excellente soliste avec laquelle, dans les notes de programme, les directeurs

Pierre-Étienne Bergeron artistiques de l’Orchestre se félicitaient – à juste titre – de partager la scène. 39 our le troisième concert de son existence, choix aussi ambitieux que rafraîchissant pour P le tout jeune Orchestre lyrique de Montréal célébrer un compositeur dont, trop souvent, La deuxième partie, exclusivement consacrée a rassemblé un programme entièrement on n’entend que le célébrissime poème à la symphonie de Dukas, a fourni à Ben campé dans la France du tournant du symphonique L’apprenti sorcier (1897). Kepes l’occasion d’explorer une sonorité plus XXe siècle : en première partie, les cycles de incisive et d’une grande précision. Dirigeant mélodies avec orchestre Shéhérazade (1903), Ce programme bien équilibré conjuguait donc entièrement de mémoire, il a effi cacement mis de Maurice Ravel, et Poème de l’amour œuvres connues et moins connues, tout en en valeur les sommets d’intensité de l’œuvre, et de la mer (1892), d’Ernest Chausson; permettant de découvrir plusieurs facettes de livrant ainsi une fi nale percutante pour cette en deuxième partie, la Symphonie en do la sonorité particulièrement polyvalente de première saison d’un nouvel orchestre dont majeur (1896) de Paul Dukas, présentée à cet orchestre placé sous la double baguette on attend déjà le retour avec impatience. l’occasion du 150e anniversaire de naissance des directeurs artistiques et chefs d’orchestre Marie-Hélène Benoit-Otis du compositeur (1865-1935). Il s’agit là d’un Simon Rivard et Ben Kepes.

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Fondation Arte Musica – L’intégrale des cantates de J. S. Bach à la salle Bourgie du MBAM – Fin de l’an 1 DU PLUS AU MOINS GRAND RAFFINEMENT

Production : Fondation Arte Musica

Sixième concert, 22 février 2015

Cantates funèbres Gottes Zeit ist die allerbeste Zeit, « Actus tragicus », BWV 106 Prélude et fugue pour orgue en si mineur, BWV 544 Laß, Fürstin, laß noch einen Strahl, « Trauerode », BWV 198

INT : Monika Mauch, soprano, Maude Brunet, mezzo- soprano, Hermann Oswald, ténor, Clayton Kennedy, basse, Jean Willy Kunz, orgue DM : Matthias Maute, Ensemble Caprice

Septième concert, 29 mars 2015

Cantates pour le dimanche des Rameaux et Pâques Himmelskönig, sei willkommen, BWV 182 Christ lag in Todesbanden, BWV 4 Brich dem Hungrigen dein Brot, BWV 39

INT : Agnes Zsigovics, soprano, Daniel Taylor, alto, Philippe Gagné, ténor, Normand Richard, basse

Huitième concert, 26 avril 2015

Cantates sur des livrets de la poétesse Christiane Marianne von Ziegler

INT : Emily Gibson, soprano, Veronica Mariana Algie, Cara Search, Nicholas Burns, altos, Jan van der Hooft, ténor, Christian Carpino, Jared Levin, Zainen Suzuki, 40 basses DM : Valerie Kingslow, Chœur Cappella Antiqua de McGill Hank Knox, Ensemble de la Fondation Arte Musica Crédits photo de gauche: David Boily, à droite La Presse, Theatre of Early Music, Robert Etcheverry, Pierre Charbonneau Jean Willy Kunz, Daniel Taylor, Geneviève Soly et Hank Knox

e sixième concert de l’intégrale des cantates Pour le septième concert, confié aux Idées le plus grand des orgues de la salle Bourgie, L de Bach avait été confié à l’Ensemble Heureuses, la publicité avait été centrée sur celui avec pédalier, pour soutenir tout cela au Caprice. Étant donné le programme Daniel Taylor, haute-contre montréalais de continuo, ce que fit avec aplomb Geneviève juxtaposant deux cantates funèbres, on ne réputation internationale, qui nous a plus Soly, codirectrice des Idées Heureuses. pouvait s’attendre à de grands éclats festifs d’une fois enchanté. Mais cette fois-ci, il fut Résultat ? Depuis le début de cette intégrale, comme dans les concerts précédents. D’autant étonnamment l’élément le plus faible, avec une ce fut le concert dans lequel le contrepoint, en plus qu’il s’agit de deux œuvres intimes, voix présentant toutes sortes de faiblesses, particulier dans les chœurs concertants, sera faisant appel à une instrumentation raréfi ée, que l’on espère n’être le fait que d’une méforme ressorti avec le plus de clarté. aux timbres fi ns et délicats : deux fl ûtes à bec, passagère. Mise à part cette déconvenue, Les deux violes de gambe et continuo pour l’Actus Idées Heureuses auront eu pour ce concert Le huitième et dernier concert de cet An 1 Tragicus ; deux flûtes traversières, deux d’autres idées plus heureuses. D’abord, celle avait été confié à la Cappella Antica de hautbois d’amour, deux luths, deux violes de d’inviter pour les diriger Florian Heyerick, l’Université McGill, selon le programme, « un gambe, un quatuor à cordes et continuo pour directeur d’Ex Tempore, chœur et orchestre ensemble de douze chanteurs soigneusement la Trauerode. Le contraste avec les concerts de chambre que ce musicien belge a fondé sélectionnés parmi les fi nissants du programme précédents aura peut-être déconcerté en 1994 et fait connaître à travers le monde d’interprétation en chant », plus un orchestre quelques auditeurs. Mais ceux qui savaient à par une cinquantaine d’enregistrements d’une vingtaine de musiciens dits de la quoi s’attendre auront été ravis, car ces deux remarquables, dont plusieurs de cantates Fondation Arte Musica, dans lequel on pouvait œuvres méditatives, par la façon dont Bach a de divers contemporains de Bach. Voilà un reconnaître les membres de divers groupes de poussé très loin, mais tout en demi-teintes, les chef pour qui la rhétorique musicale baroque musique ancienne montréalais. Le tout était rapports entre texte et musique, représentent ne semble plus avoir de secrets et qui sait sous la direction de Hank Knox, entre autres deux sommets dans le corpus de ces cantates. comment la faire pleinement vivre en concert. cofondateur de l’ensemble Arion et directeur de Et Matthias Maute, le directeur et fondateur Ensuite, celle d’utiliser des effectifs en parfaite l’orchestre baroque de McGill. Tout cela sonnait de l’Ensemble Caprice, avait manifestement adéquation avec les limites acoustiques de la avec puissance, mais sans grand raffi nement. bien saisi la portée symbolique de tous ces salle : un chœur de huit voix, deux chanteurs Se sont toutefois distingués les instrumentistes choix singuliers du compositeur et il a su par sections comprenant les solistes, et, en qui avaient de magnifi ques obligati dans les faire ce qu’il fallait pour que les quatre solistes plus des deux fl ûtes à bec et des deux hautbois airs, comme la fl ûtiste Nathalie Michaud et le vocaux et les quelques instrumentistes en que demandaient les cantates au programme, hautboïste Matthew Jennejohn. fassent ressortir avec expressivité jusqu’aux un ensemble de cordes réduit à deux violons, Guy Marchand plus subtils détails. deux altos et violoncelle. Enfi n, celle de choisir

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Ensemble baroque Pallade Musica SAVOIR SE FAIRE ANGE OU DÉMON

our la journée internationale des droits dix concerts préférés de la saison 2014-2015. P des femmes, la soprano Andréanne Avant de monter sur scène, ces superbes Brisson-Paquin et l’ensemble Pallade musiciennes et leur collègue masculin ne Musica proposaient un beau programme s’étaient manifestement pas contentés de d’œuvres baroques, dont certaines par de quelques lectures ; chaque phrase musicale talentueuses compositrices, évoquant des avait été mûrement réfl échie et répétée jusqu’à Elizabeth Delage figures emblématiques de résistance et de pouvoir rendre en concert l’effet dramatique révolte féminines tirées de l’antiquité judéo- voulu avec une fougue rare. nous émouvoir aux larmes en chantant chrétienne et gréco-romaine. Ce concert le drame biblique de l’angélique Susanne s’inscrira très haut dans le palmarès de nos On comprend pourquoi Pallade Musica s’est résistant à l’ostracisme de lubriques vieillards, récemment illustré dans les plus prestigieux ou nous faire frémir face aux fureurs concours internationaux de musique baroque. endiablées de la mythique Médée. Production : Ensemble baroque Pallade Musica, Chapelle De Jean-Marie Leclair, premier virtuose Notre-Dame-de-Bon-Secours (Vieux-Montréal), 6 mars 2015 Guy Marchand Rosa Giacinta Badalla : Motet Non piangete (pour soprano français du violon, et de son collègue italien et continuo) Locatelli, un chroniqueur de l’époque écrivit Adam Jarzębski : Susanna videns (pour violon et continuo) que tous deux étaient d’un égal talent, mais Élisabeth Jacquet de la Guerre : Susanne (cantate pour soprano et continuo) et Sonate pour violon et basse continue que le premier jouait comme un ange et le en sol majeur second comme un diable. Mais la violoniste John Eccles : Oh, Take Him Gently from the Pile (pour Tanya LaPerrière et ses partenaires au soprano et continuo) continuo font encore mieux : ensemble, ils Jacques Duphly : Médée (pièce de clavecin) démontrent que l’interprète n’a pas à être tout Louis-Nicolas Clérambault : Médée (cantate pour soprano, violon et continuo) l’un ou tout l’autre, mais doit plutôt savoir se faire ange ou démon selon les exigences de INT : Andréanne-Brisson Paquin, soprano la musique. La soprano Andréanne Brisson- INS : Tanya LaPerrière, violon ; Elinor Frey, violoncelle ; Mylène Bélanger, clavecin ; Esteban La Rotta, théorbe. Paquin est de la même trempe et aura trouvé

dans cet ensemble le parfait complice pour Pierre-Étienne Bergeron 41 Andréanne Brisson-Paquin

Ladies’ Morning Musical Club Œuvres de Tchaïkovski, Chostakovitch, Korngold et R. Strauss CHRISTIANNE STOTIJN : UN RÉCITAL Salle Pollack, dimanche, 12 avril 2015 INT : Christianne Stotijn TOUT EN SOBRIÉTÉ ET EXPRESSIVITÉ PIA : Julius Drake

our sa 123e saison, le Ladies’ Morning Musical Le public espérait sans doute retrouver la PClub (LMMC) avait réinvité la mezzo-soprano même sensibilité dans les Four Shakespeare néerlandaise Christianne Stotijn pour le Songs de Korngold, ce mélodiste qui mérite récital lyrique de sa programmation 2014- d’être plus connu. S’il est plus difficile 2015. Il s’agissait de la deuxième visite de d’atteindre un tel objectif quand on a la l’artiste au LMMC où elle avait fait ses débuts partition devant soi, l’artiste a tout de même le 4 décembre 2011. Ce récital était de nouveau rendu l’austère beauté de ces mélodies, consacré à des lieder allemands, auxquels terminant le cycle de façon spectaculaire s’ajoutaient cette fois des mélodies russes. avec When birds do, qui révélait pleinement le talent mélodique du compositeur. C’est d’ailleurs avec six mélodies de Piotr Ilyich Tchaïkovski que Christianne Stotijn Le plus beau moment du récital aura été sans a commencé son récital. D’une sobriété qui doute l’interprétation de sept mélodies de contrastait parfois avec l’accompagnement Richard Strauss, qui ont permis d’apprécier de

énergique de Julius Drake, la mezzo-soprano nouveau la haute tenue vocale de Christianne Stephan Vanfleteren se révéla fort expressive dans chacune des Stotijn et sa grande musicalité. Dans cette mélodies choisies. Elle a d’ailleurs obtenu le dernière partie, la chanteuse a aussi démontré à l’accompagnement du pianiste Julius Drake, BBC Music Magazine Award for voice en 2010 sa capacité à communiquer avec le public ; sa coloriste remarquable au jeu raffi né. pour ces mélodies russes. Puis, après avoir gestuelle, tantôt sobre, tantôt dramatique, présenté au public la genèse des Six poèmes gardait toujours la même élégance. La L’an prochain, le programme lyrique du de Marina Tsvetaeva de Chostakovitch, la communication aurait pu sans doute se LMMC sera assuré par le baryton-basse récitaliste réussissait à traduire la sensibilité poursuivre si le public avait eu droit à un Philippe Sly qui ouvrira la saison avec un et la complexité de cette musique contrastée. rappel. La force de ce récital revenait également récital. À ne pas manquer. Daniel Turp

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LOVE BLOWS AS INT : Étienne Dupuis, baryton Quatuor Claudel-Canimex Éditeur : Atma Classique THE WIND BLOWS Sortie : mars 2015 ACD 22701

tienne Dupuis lance au pays son premier Éalbum. Accompagné par le Quatuor Claudel- Canimex, le baryton interprète des mélodies et cycles de mélodies britanniques : Love Blows as the Wind Blows de George Butterworth, Dover Beach, op. 3, de Samuel Barber, Farewell, Earth’s Bliss de Geoffrey Bush et « Danny Boy », la douceur requise les poèmes de William Ernest des pièces, Étienne Dupuis parvient à chant traditionnel irlandais (Londonderry Henley, mis en musique par ce compositeur exécuter remarquablement des pianissimos Air). Samuel Barber est américain, mais la mort trop jeune. Le volume sonore du Quatuor d’une grande diffi culté, tout en gardant une nature évoquée dans le poème de Matthew Claudel-Canimex n’est parfois pas de taille intonation parfaite. Pour preuve, mentionnons Arnold est celle des côtes de l’Angleterre. devant la puissance vocale du baryton. Un Fear no more the heat o’ the sun de Une pièce instrumentale figure également meilleur équilibrage des sonorités aurait peut- Shakespeare et Fair pledges of a fruitful sur l’album : le quatuor à cordes joue un être été souhaitable. Lorsqu’Étienne Dupuis tree de Robert Herrick. Nous ne pourrions arrangement, par Daniel Desaulniers, du célèbre recouvre le quatuor à cordes, comme dans Life fi nir cette critique sans signaler dans un tout adagio tragique de ce même compositeur. Pour in her Creaking Shoes, il le fait avec un vibrato autre répertoire « Danny Boy », chanté avec compléter son enregistrement, Étienne Dupuis qui nous semble parfois trop prononcé. beaucoup de maîtrise et d’entrain. rend hommage au compositeur québécois Réjean Coallier, dont il chante quatre mélodies Dans l’œuvre de Geoffrey Bush, l’interprète Love Blows as the Wind Blows est un premier sur des poèmes de Sylvain Garneau. met en évidence sa grande compréhension album réussi pour Étienne Dupuis, justifi ant des textes, au point même de nous donner ainsi son statut de baryton incontournable sur Dans le cycle de mélodies de Butterworth, le sentiment de se les approprier. Le baryton la scène internationale. On espère qu’il y en qui donne son nom à l’album, Étienne Dupuis communique très bien la joie et le réconfort aura beaucoup d’autres. fait preuve d’emblée d’une grande flexibilité qui se dégagent de certaines mélodies, Justin Bernard dans l’interprétation, capable de résonner comme Do not fear to put thy feet, sur un 42 puissamment et, aussitôt, de chanter avec toute poème de John Fletcher. À travers l’ensemble

UNIQUE CIBOULETTE…

Cette version de Ciboulette, disponible sur Ciboulette, opérette en trois actes de Reynaldo Hahn, livret de et Francis de Croisset Internet (seulement en format européen) est en fait la seule qui existe sur le marché. On INT : Julie Fuchs (Ciboulette), Jean-François Lapointe (Duparquet), Julien Behr serait donc mal venu de faire la fi ne bouche, (Antonin), Eva Ganizate (Zénobie), Bernadette Lafont (Mme Pingret), etc. DM : Laurence Equilbey, Chœur Accentus et Orchestre symphonique de l’Opéra de d’autant que tous, de la chef d’orchestre Toulon jusqu’au plus modeste des figurants, MS : Michel Fau (Opéra-Comique, 2013) s’investissent à fond dans l’entreprise. Ils DVD FRA Musica FRA 009. prennent même l’œuvre un peu trop au sérieux ; il nous manque alors ce côté un peu canaille qui fait toute la force et la saveur du genre. Parmi tous ces interprètes bien chantants mais un peu appliqués, pas besoin d’être chauvin pour admirer le baryton québécois Jean-François Lapointe. Dans le iboulette est créée en 1923, à un moment Reynaldo Hahn est donc le premier de ces rôle de Duparquet, Lapointe, par son chant et C charnière de l’histoire de l’opérette. musiciens à aborder le genre, avec tout par son jeu d’une aisance inégalée, semble né S’éloignant progressivement de l’opérette son génie fait de suprême élégance et d’un pour chanter ce répertoire. Rappelons que le classique, le genre prend deux tangentes très sourire malicieux. Ces qualités se retrouvent créateur de Duparquet, Jean Périer, avait aussi différentes : d’un côté, les comédies musicales à chaque page des aventures de la jeune été, vingt ans plus tôt, le premier Pelléas – rôle influencées par les nouveaux rythmes marchande de légumes des Halles à Paris. où s’illustre aussi Jean-François Lapointe. syncopés arrivés des États-Unis à la fi n de la La musique, qu’on est habitués d’entendre guerre, où s’illustrent Maurice Yvain et Henri sur de vieux enregistrements, ou lors de Voici donc un DVD que tout amateur d’opérette Christiné notamment ; de l’autre, ce qu’on spectacles d’amateurs, peut ici s’épanouir – ou de Ciboulette, ce qui n’est pas toujours appelle parfois « l’opérette des musiciens », enfi n pleinement. L’intrigue bien fi celée et équivalent – voudra se procurer d’urgence, soit les œuvres qu’écrivent pour s’amuser les paroles finement ciselées font encore pour Lapointe et pour la merveilleuse musique des compositeurs dits sérieux, tels Arthur mouche, comme le confi rment les nombreux de Reynaldo Hahn, toujours jeune et exquise. Honegger avec Le roi Pausole ou Albert rires des spectateurs de ce spectacle fi lmé Pascal Blanchet Roussel avec Le testament de tante Caroline. sur le vif.

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Kent Nagano et Inge Kloepfer, Erwarten Sie Wunder ! Expect the Unexpected, Berlin, Berlin Verlag, 2014, 316 p.

Kent Nagano À LA DÉFENSE DE LA MUSIQUE CLASSIQUE

rwarten Sie Wunder ! (Attendez-vous à des miracles !) / Expect E the Unexpected : ce double titre ne refl ète pas un contenu bilingue, mais plutôt la nature hybride de l’ouvrage conçu par Kent Nagano et rédigé par la journaliste allemande Inge Kloepfer. Hybride, ce livre paru à Berlin en octobre dernier et dont on attend d’éventuelles traductions anglaise et/ou française ne l’est pas seulement en raison du « transfert culturel » qui s’opère entre un chef américain et son public germanophone. Le contenu de l’ouvrage est également multiple : en six chapitres et six interludes, ce sont en réalité trois livres différents qui se développent, chacun poursuivant (avec un bonheur variable) des objectifs distincts.

Le premier (et le plus intéressant) de ces fils rouges est autobiographique. De son enfance musicale à Morro Bay (Californie) à ses engagements à l’Orchestre symphonique de Montréal et à l’opéra de Munich, Nagano explore son parcours artistique, abordant au passage des épisodes fascinants comme sa collaboration étroite avec 43

le compositeur Olivier Messiaen (notamment en vue de la création de l’opéra Saint François d’Assise en 1983). Cet aspect, que seul Nagano pouvait traiter, aurait mérité d’être développé davantage, sans craindre d’entrer dans des détails musicaux dont l’absence est parfois frustrante pour le lecteur.

Car – et c’est là le deuxième fi l rouge qui traverse l’ouvrage – Nagano s’adresse à des mélomanes sans aucune formation musicale, pour lesquels il fait de grands efforts de vulgarisation. Avec des mots très simples (souvent trop), il cherche à expliquer le pouvoir de la musique, sa structure, ses effets sur le cerveau humain : ce sont là de vastes sujets auxquels il est diffi cile de rendre justice en quelques pages qui se veulent accessibles à tous.

Mais aussi bien l’élément de vulgarisation que le volet autobiographique sont subordonnés au troisième fil rouge de l’ouvrage, qui prend un caractère nettement politique. L’objectif principal de Nagano est en effet de livrer un vibrant plaidoyer pour la musique classique, forme d’art qu’il juge essentielle à la société occidentale contemporaine et qui, selon lui, devrait faire l’objet d’une diffusion beaucoup plus large. Voilà un noble message auquel musiciens comme mélomanes ne manqueront pas de souscrire ; il ne reste plus qu’à espérer qu’il sera entendu au-delà du cercle des admirateurs de Nagano, dont on peut supposer qu’ils n’ont pas besoin d’être convaincus de l’importance de la musique dite classique. Marie-Hélène Benoit-Otis

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CALENDRIER CHRONOLOGIQUE

Le calendrier couvre la période du 1er juin au 26 septembre 2015.

Pour inscrire une activité au calendrier du numéro d’automne 2015, veuillez faire parvenir les informations au plus tard le 1er août 2015 à [email protected].

JUIN 2015 JUILLET 2015 AOÛT 2015 DATE COMPAGNIE ÉVÉNEMENT DATE COMPAGNIE ÉVÉNEMENT DATE COMPAGNIE ÉVÉNEMENT 1er, 8 Opéramania I Capuleti e I Montecchi 3FestiVoix de Les voix lyriques 1er, 2 Festival d’opéra La brigade lyrique (Bellini) Trois-Rivières de Québec 2, 3 Concours musical Finale – Chant 4 Festival Orford A cappella 1er, 3, 5 Festival d’opéra L’amour de loin international de 4Festival Messe n°3 en fa mineur de Québec (Kaija Saariaho Montréal (CMIM) international de (Bruckner) et Amin Maalouf) 4Société d’art L’Italiana in Algeri Lanaudière 1er Festival Orford Passion et Cantates vocal de Montréal (Rossini) 4Festival « Prélude à la nuit » de Bach (SAVM) international du 1er Festival Missa solemnis 4Tempêtes et Conférence « Bel Canto Domaine Forget international de (Beethoven) passions et Verismo, pistes 4FestiVoix de Trois-Les voix lyriques Lanaudière d’interprétation » Rivières 1er Festival d’opéra La brigade lyrique 5OpéramaniaBoris Godounov 5Festival « Fougue et passion » de Québec (Moussorgsky) international du 1er Festival d’opéra Feux d’artifice 5CMIMGala Domaine Forget de Québec 5Association « L’amour, la poésie » 6Festival « Visions du Sacré » 5Orchestre Carmen (Bizet) lyrique de international de symphonique de Beauport Lanaudière Montréal (OSM) 6Tempêtes et Classe de maître de 9Société d’art Concert – Chœur 5 Institut canadien Récital – Compétition passions Richard Margison lyrique du de la SALR d’art vocal (ICAV) La Voix est juste 7 Fondation Arte « Carnets d’Orient » Royaume (SALR) 5 Institut italien Tosca (Puccini) Musica 10 FestivalOpéra de Classe de maître de de culture de 7 SAVM Récital Jean-Philippe Saint-Eustache Leila Chalfoun Montréal Fortier-Lazure (FOSE) 7ICAVRécital de chant 8, 9, Académie de Épreuves demi-finales 11 Festival Le pèlerinage de la rose 7 OSM Récital Michael Schade 10, 11, musique du et finale international de (Schumann) De Mozart à Wagner 12 Québec (Prix Lanaudière 8OSM Paradis perdu 45 d’Europe) (ADMQ) 11 FOSE « Ménage à trois » 8Festival classique Croque-musique 11 Ballet-Opéra- The Burning Fiery 12 FOSE Grand concert des Hautes- Pantomime Furnace (Britten) extérieur gratuit – Airs Laurentides 12 Opéramania La bohème (Puccini) d’opéra 8 Concerts aux îles Soirée lyrique Contes 13 Compagnie La flûte enchantée 17 Festival Le fantôme de l’opéra du Bic - Festival des bois baroque Mont- (Mozart) international de – 1925 (Rupert Julian) de musique de Royal Lanaudière chambre (BIC) 14 ADMQ Concert-gala 23, 24, Festival d’opéra La brigade lyrique 9 ICAV Récital « Cordes 14 Opéra bouffe du Gala lyrique de Laval 25, 26, de Québec sensibles : Perspectives Québec 30, 31 sur la joie et les 15, 22 Opéramania Der Freischütz (Weber) 23 Festival d’opéra Diva by Night amours perdus » de Québec 16 SAVM Notes d’humour 10 ICAV Soirée d’opéra 1 : L’elisire 24, 26, Festival d’opéra Arthur (Nathalie d’amore (Donizetti) 19 Opéramania Elektra (R. Strauss) 27, 29, de Québec Magnan) 13 BIC Grandeur nature 20 Festival Récital d’airs d’opéra 31 13 SALR Récital « Destinations international du 24 Festival Concert-cabaret Domaine Forget lyriques » international de Dernier tango à Berlin 14 ICAV Concert-Gala 21 Orchestre Récital Rolando Lanaudière 14 ICAV Soirée d’opéra 2 : métropolitain Villazon 25 Festival d’opéra De Lully à Rameau 26 Opéramania Don Pasquale Zanetto et L’Amico Fritz de Québec (Mascagni) (Donizetti) 27, 28, Festival d’opéra Rossini à l’apéro 26, 27, Opéra-théâtre de Les contes d’Hoffmann 15 BIC Voix céleste, harpe 29, 30 de Québec et compagnie 28 Rimouski (Offenbach) 27 Institut canadien Classe de maître 28 FestiVoix de Trois- Récital Schumann 15 Festival Les grands rendez-vous d’art vocal (ICAV) de Sherill Milnes international du Rivières et Fauré (Rencontres 28 Festival d’opéra « De Bernstein amoureuses) Domaine Forget de Québec à Plamondon » 17, 18 ICAV Classes de maître de 29 ICAV Classe de maître de Joan Dornemann Joan Dornemann 19 Festival de Femmes 30 Festival d’opéra L’amour de loin (Kaija musique de de Québec Saariaho et Amin chambre de Maalouf) Montréal 19 Institut italien Madama Butterfly de culture de (Puccini) Montréal SEPTEMBRE 2015 DATE COMPAGNIE ÉVÉNEMENT 8, 9 OSM Pelléas et Mélisande (Debussy) – version de concert Note : Pour des raisons indépendantes de notre volonté, il se peut que la parution de la revue et les dates des événements énumérées, 19, 22, Opéra de Madama Butterfly dans le présent calendrier, soient décalées. Veuillez nous en excuser. 24, 26 Montréal (Puccini) Merci de votre compréhension.

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CALENDRIER ÉVÉNEMENTIEL

ACADÉMIE DE MUSIQUE CONCERTS AUX ÎLES DU BIC FESTIVAL D’OPÉRA DU QUÉBEC (PRIX D’EUROPE) – FESTIVAL DE MUSIQUE DE QUÉBEC CP 818, Succursale C DE CHAMBRE 1220, avenue Taché Montréal (Québec) H2L 4L6 88, place de l’Église Québec (Québec) G1R 3B4 Téléphone : 514 528-1961 Rimouski (Québec) G0L 1BO Téléphone : 418 529-4142 prixdeurope.ca Téléphone : 418 736-0036 festivaloperaquebec.com CONCOURS PRIX D’EUROPE • 104e ÉDITION bicmusique.com La brigade lyrique Soirée lyrique Contes des bois Épreuves demi-finales et finale 23 au 26, 30, 31 juillet et 2 août, 12 h et 17 h 8 août, 20 h (Église Sainte-Cécile-du-Bic) 1er août, 12 h (Lieux divers à travers la Ville 8 au 12 juin (Chapelle historique du Bon-Pasteur) INT : Alexander Dobson, Nathalie Paulin de Québec) er Concert-gala PIA : Julien Leblanc 1 août, 21 h (Vieux-Port de Québec) 14 juin, 14h 30 (Salle Bourgie du Musée des INT : Judith Bouchard, Marie-Andrée Mathieu, Grandeur nature Beaux-Arts de Montréal) Keven Geddes, Dominic Veilleux 13 août, 20 h (Église Saint-Fabien) PIA : Jean-François Mailloux, Claude Soucy INT : Claudine Ledoux ASSOCIATION LYRIQUE Diva by Night INS : Mélanie Bourassa, Yukari Cousineau, DE BEAUPORT James Darling, Étienne Lafrance, 23 juillet, 20 h (Salle Octave-Crémazie du Grand Théâtre de Québec) Téléphone : 418 666-3349 David Thies-Thompson, Olivier Thouin, INT : Natalie Choquette cbculture.qc.ca/Association/lyrique.htm Quatuor Saint-Germain PIA : Dominic Boulianne L’amour, la poésie Voix céleste, harpe et compagnie Arthur (Nathalie Magnan) 5 juin, 20 h (Centre de loisirs Monseigneur-de- 15 août, 10 h 30 (Chapelle Notre-Dame-des- 24, 27, 29, 31 juillet, 19 h ; 26 juillet, 15 h Laval de Québec) Murailles) (Maison Jaune) INT : Catherine-Élizabeth Loiselle, David Souza, INT : Claudine Ledoux INT : Jeunes artistes lyriques de 11 à 17 ans Ève-Amélie Dufour INS : Olga Gross, Étienne Lafrance, Mathieu Lussier, Olivier Thouin DM : Béatrice Cardin 46 MS : Richard Paquet BALLET-OPÉRA-PANTOMIME CONCOURS MUSICAL De Lully à Rameau 633, rue Gounod 25 juillet, 20 h (Salle Raoul-Jobin du Palais Montréal (Québec) H2R 1C3 INTERNATIONAL DE Montcalm) Téléphone : 514 229-2259 MONTRÉAL – CHANT bopbop.ca INT : Samantha Louis-Jean, Michèle Losier, 305, avenue du Mont-Royal Est Antonio Figueroa, Marc Boucher Montréal (Québec) H2T 1P8 The Burning Fiery Furnace (Britten) DM : Martin Robidoux, Les Violons du Roy, Téléphone : 514 845-4108 11 juin, 20 h (Salle Bourgie du Musée des Beaux- Chœur de l’Opéra de Québec Arts de Montréal) concoursmontreal.ca Rossini à l’apéro INT : Dan Curran, Andrew Bogard, Andrew Finale 27 au 30 juillet, 14 h (Musée de la Chapelle de Fuchs, David Tinervia, Nathan Keoughan, 2 au 3 juin, 19 h 30 (Maison symphonique de l’Amérique francophone) Chad Sloan, Nelleke Dagher, Émilie Claire Montréal) Le Ménédeu, Alexis Charette INT : Tempêtes et passions DM : Hubert Tanguay-Labrosse, Chœur des Gala AN : Georges Nicholson courtisans 5 juin, 19 h 30 (Maison symphonique de Montréal) De Bernstein à Plamondon MS : Marc Béland INT : Finalistes 28 juillet, 20 h (Cour du Vieux-Séminaire de Québec) DM : Johannes Debus INT : Marc Hervieux, Marie-Josée Lord, COMPAGNIE BAROQUE Gino Quilico MONT-ROYAL FESTIVAL CLASSIQUE DES DM : Stéphane Laforest, Sinfonia de Lanaudière 705, rue Saint-André HAUTES-LAURENTIDES L’amour de loin (Kaija Saariaho et Montréal (Québec) H2L 5C2 15, rue Émard, bureau 240 Amin Maalouf) – en co-production avec Téléphone : 514 803-6646 Lac-du-Cerf (Québec) J0W 1S0 le Metropolitan Opera de New York et en cbmroyal.com Téléphone : 855 776-4080 collaboration avec Ex Machina er La flûte enchantée (Mozart) –version de concert– concertshautes-laurentides.com 30 juillet, 1 , 3 et 5 août, 20 h (Salle Louis- Fréchette du Grand Théâtre de Québec) 13 juin, 19 h 30 (Cathédrale Christ Church de Croque-musique INT : Philip Addis, Erin Wall, Tamara Mumford Montréal) 8 août, 19 h 30 (Église Notre-Dame-de-Pontmain) DM : Ernest Martinez-Izquierdo, Orchestre INT : Valérie Bélanger, Leticia Brewer, INT : Raphaëlle Paquette symphonique de Québec, Chœur de Stephanie Manias, Chantale Nurse, PIA : Jérémie Pelletier l’Opéra de Québec Rebecca Woodmass, Geneviève Lévesque, David Menzies, Xavier Vivier-Julien, Marc- MS : Robert Lepage, Sybille Wilson Antoine d’Aragon, François Dubé, Jean- Pierre Primiani (narration) INS : Geneviève Jalbert (piano et direction musicale), Joanna Marsden (fl ûte)

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PRESTATION PYROMUSICALE CONSACRÉE À Le pèlerinage de la rose (Schumann) FESTIVALOPÉRA L’OPÉRA (LES GRANDS FEUX LOTO-QUÉBEC) 11 juillet, 19 h 30 (Amphithéâtre DE SAINT-EUSTACHE Fernand-Lindsay) La brigade lyrique INT : Karina Gauvin, Andréanne Brisson-Paquin, 239, rue Saint-Marc er 1 août, 21 h (Vieux-Port de Québec) Anna-Sophie Neher, Michèle Losier, Saint-Eustache (Québec) J7P 1T2 Téléphone : 514 241-7226 Feux d’artifice Rachèle Tremblay, Frédéric Antoun, Alain Coulombe festivaloperasteustache.com 1er août, 22 h (Vieux-Port de Québec) DM : Jean-Marie Zeitouni, Orchestre et Classe de maître de Leila Chalfoun ensemble choral du Festival FESTIVAL ORFORD 10 juillet, 17 h (Centre d’art de la Petite église de Le fantôme de l’opéra – 1925 (Rupert Giulan) Saint-Eustache) 3165, chemin du Parc – Présentation sur écran géant Ménage à trois – Airs d’opéras, d’opérettes et de Orford (Québec) J1X 7A2 17 juillet, 20 h (Amphithéâtre Fernand Lindsay) comédies musicales Téléphone : 819 843-3981 INT : Gerda Findeisen arts-orford.org 11 juillet, 20 h (Centre d’art de la Petite église de DM : Gabriel Thibaudeau, Orchestre des Saint-Eustache) A cappella concerts cinématographiques de Montréal INT : Étienne Cousineau, Geneviève Charest 4 juillet, 14 h (Abbaye Saint-Benoît-du-Lac) Concert-cabaret Dernier tango à Berlin PIA : Pierre McLean INT : Studio de musique ancienne de Montréal 24 juillet, 20 h (Salle Rolland-Brunelle du Centre Grand concert extérieur gratuit – Airs d’opéra DM : Christopher Jackson culturel de Joliette) 12 juillet, 14 h 30 (Promenade Paul-Sauvé) Passion et Cantates de Bach INT : Ute Lemper INT : Hugo Laporte, Lauréats des Jeunes 1er août, 14 h (Abbaye Saint-Benoît-du-Lac) PIA : Valérie Gierig Ambassadeurs Lyriques : Karine INT : Hugo Laporte Missa solemnis (Beethoven) Boucher, Sarah Vardy, Armine Kassabian, Kristin Hoff, Steeve Michaud, ORG : Luc Beauséjour 1er août, 19 h 30 (Amphithéâtre Fernand-Lindsay) Hwanjoo Chung, Marc-Antoine D’Aragon INT : Aline Kutan, Michèle Losier, Michael PIA : Jérémie Pelletier FESTIVAL DE MUSIQUE DE Schadet, Christian Immler CHAMBRE DE MONTRÉAL DM : Kent Nagano, Orchestre symphonique de Montréal, Ensemble choral du Festival FESTIVOIX DE TROIS-RIVIÈRES 2064, avenue Marlowe CC : Andrew Megill 800, rue du Fleuve Montréal (Québec) H4A 3L5 Trois-Rivières (Québec) G9A 5L2 Téléphone : 514 489-7444 47 Téléphone : 819 372-4635 festivalmontreal.org FESTIVAL INTERNATIONAL festivoix.com Femmes DU DOMAINE FORGET Récital Schumann et Fauré 5, rang Saint-Antoine 19 août, 20 h (Salle Bourgie du Musée des Beaux- Rencontres amoureuses Arts de Montréal) Saint-Irénée (Québec) G0T 1V0 28 juin, 20 h 30 (Maison de la culture de INT : Marie-Josée Lord Téléphone : 418-452-3535 / 1-888-DFORGET (336-7438) Trois-Rivières) PIA : Nathalie Tremblay domaineforget.com INT : Maude Brunet, Jacques-Olivier Chartier PIA : Marie-Ève Scarfone FESTIVAL INTERNATIONAL Récital d’airs d’opéra Les voix lyriques DE LANAUDIÈRE 20 juin, 20 h (Salle Françoys-Bernier) INT : Karina Gauvin 3 juillet, 20 h 30 (Scène Port de Trois-Rivières) 1500, boulevard Base-de-Roc DM : Paul Goodwin, Les Violons du Roy INT : Samantha Louis-Jean Joliette (Québec) J6E 0L2 Téléphone : 450-759-7636 Prélude à la nuit Les voix lyriques lanaudiere.org 4 juillet, 20 h (Salle Françoys-Bernier) 4 juillet, 20 h 30 (Scène Port de Trois-Rivières) INT : Marianne Fiset Messe n°3 en fa mineur (Bruckner) INT : Marie-Nicole Lemieux DM : Jean-Marie Zeitouni, I Musici de Montréal 4 juillet, 19 h 30 (Amphithéâtre Fernand-Lindsay) INT : Karine Boucher, Stéphanie Pothier, Fougue et passion FONDATION ARTE MUSICA Jean-Michel Richer, Cairan Ryan 5 juillet, 15 h (Salle Françoys-Bernier) 1339, rue Sherbrooke Ouest DM : Yannick Nézet-Séguin, Orchestre et INT : Measha Brueggergosman Montréal (Québec) H3G 2E8 Chœur métropolitain DM : Jean-Philippe Tremblay, Orchestre de la Téléphone : 514 285-2000 CC : Pierre Tourville, François A. Ouimet Francophonie mbam.qc.ca/musique

Visions du Sacré Les grands rendez-vous Carnets d’Orient 6 juillet, 20 h (Église de Sainte-Mélanie) 15 août, 20 h (Salle Françoys-Bernier) 7 juin, 14 h (Salle Bourgie du Musée des Beaux- Arts de Montréal) INT : Studio de musique ancienne de Montréal INT : François Leroux, Russell Braun, DM : Christopher Jackson Les chanteurs en résidence au INT : Pascale Beaudin, Pierre-Étienne Bergeron Domaine Forget PIA : Olivier Godin PIA : Michel Béroff, Olivier Godin

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 CALENDRIER

INSTITUT CANADIEN INSTITUT ITALIEN DE Les contes d’Hoffmann (Offenbach) D’ART VOCAL CULTURE DE MONTRÉAL 26, 27 juin, 19 h 30 ; 28 juin, 13 h 30 (Salle Desjardins-Telus) icav-cvai.ca 1200, avenue du Docteur-Penfi eld INT : Marcel Beaulieu, Benoît Boutet, Montréal (Québec) H3A 1A9 Classe de maître de Sherill Milnes Robert Huard, François-Olivier Jean, Téléphone : 514 849-3473 Marie-Andrée Mathieu, Dion Mazerolle, 27 juillet, 19 h 30 (Salle Serge-Garant de iicmontreal.esteri.it Steeve Michaud, Raphaëlle Paquette, l’Université de Montréal) OPÉRA SOUS LES ÉTOILES 2015 Chantal Parent, Anik St-Louis Classe de maître de Joan Dornemann DM : Hughes Laforte-Bouchard 29 juillet, 19 h 30 (Salle Serge-Garant de Tosca (Puccini) – production de 2002 MS : Claude-Robin Pelletier l’Université de Montréal) 5 août, 20 h 30 (Jardin de l’Institut) INT : Raina Kabaivanska, Plàcido Domingo, FESTIVAL D’ART VOCAL DE MONTRÉAL OPÉRAMANIA Sherrill Milnes AN : Michel Veilleux Récital-compétition La Voix est juste DM : Gianfranco De Bosio, New Philharmonia Orchestra calendrier.umontreal.ca 5 août, 19 h 30 (Salle Serge-Garant de l’Université de Montréal) MS : Bruno Bartoletti LES MATINÉES D’OPÉRAMANIA

Récital de chant Madama Butterfly (Puccini) – production de Université de Montréal l’Arena di Verona (1983) Campus de Longueuil 7 août, 19 h 30 (Salle Serge-Garant de l’Université 101, Place Charles-Le Moyne de Montréal) 19 août, 20 h 30 (Jardin de l’Institut) INT : Raina Kabaivanka, Nazzareno Antinori, Édifi ce Port-de-Mer, Rez-de-chaussée, salle 16 Récital Cordes sensibles : Eleonora Jankovic, Lorenzo Saccomani Longueuil (Québec) J4K 4Z1 Perspectives sur la joie et les amours perdus Téléphone : 450 651-4777 DM : Maurizio Arena, Orchestre et Chœur de 9 août, 15 h (Chalet du Mont-Royal de Montréal) l’Arena de Vérone I Capuleti e I Montecchi (Bellini) – Festival Soirée d’opéra 1 : L’elisir d’amore (Donizetti) MS : Giulio Chazalettes della Valle d’Itria, Martina Franca (2005) er 10 août, 19 h 30 (Salle Claude-Champagne de 1 , 8 juin, 13 h 30 l’Université de Montréal) OPÉRA BOUFFE DU QUÉBEC Der Freischütz (Weber) – Film-opéra de Jens Concert-Gala operabouffe.org Neubert (Hunter’s Bride) (2010) 15, 22 juin, 13 h 30 14 août, 15 h (Salle Françoys-Bernier du Domaine Gala lyrique de Laval 48 Forget) 14 juin, 15 h (Maison des Arts de Laval) LES SOIRÉES D’OPÉRAMANIA Soirée d’opéra 2 : Zanetto et L’Amico Fr itz INT : Dominique Côté, Étienne Cousineau, Université de Montréal (Mascagni) Sophie de Cruz, Simon Fournier, Campus de la Montagne 14 août, 19 h 30 (Salle Claude-Champagne de Anick Pelletier, Martin Pilon, 200, avenue Vincent-d’Indy l’Université de Montréal) Charles Prévost-Linton, Chantal Scott, Montréal (Québec) H2V 2S9 Éric Thériault Classes de maître de Joan Dornemann DM : Simon Fournier, Chœur de l’Opéra-Bouffe Boris Godounov (Moussorgsky) – Opéra de 17 et 18 août, 13 h 30 (Domaine Forget) du Québec Munich (2013) PIA : Valérie Grenier 5 juin, 19 h 30 MS : Frédéric-Antoine Guimond La bohème (Puccini) – Palau de les Arts Reina Sofia, Valence (2012) OPÉRA DE MONTRÉAL 12 juin, 19 h 30 260, boulevard de Maisonneuve Ouest Elektra (R. Strauss) – Festival d’Aix-en-Provence Montréal (Québec) H2X 1Y9 (2013) Téléphone : 514 285-2250 19 juin, 19 h 30 Les somptueuses productions de l’Opéra operademontreal.com national de Paris reviennent sur grand écran! Don Pasquale (Donizetti) – Festival de Venez découvrir des opéras et des ballets Madama Butterfly (Puccini) Glyndebourne (2013) retransmis en haute définition sur grand écran 19, 22, 24, 26 septembre, 19 h 30 26 juin, 19 h 30 avec sous-titres français au Cinéma Beaubien et INT : Melody Moore, Alexey Dolgov, sous-titres anglais au Cinéma du Parc. Morgan Smith, Allyson McHardy ORCHESTRE MÉTROPOLITAIN L’HISTOIRE DE MANON DM : James Meena, Chœur de l’Opéra de Dimanche 14 et jeudi 18 juin 2015 Montréal, Orchestre Métropolitain 486, rue Sainte-Catherine Ouest, bureau 401 Inspiré par les héros mythiques de l’abbé Prévost, Kenneth MS : François Racine Montréal (Québec) H3B 1A6 MacMillan exprime sa fascination pour les personnages égarés et Téléphone : 514 598-0870 les sujets dramatiques. Le chorégraphe suit fidèlement la trame OPÉRA-THÉÂTRE DE RIMOUSKI orchestremetropolitain.com du roman et restitue l’histoire tragique de cet être sensuel et Récital Rolando Villazón ingénu, moins responsable que victime de son propre sort. Opéra-Théâtre de Rimouski 305, rue Elzéar-Sasseville 21 juin, 15 h (Maison symphonique de Montréal) Rimouski (Québec) G5L 2W3 INT : Rolando Villazon Téléphone : 418 722-1985 DM : Yannick Nézet-séguin, Orchestre avec sous-titres français avec sous-titres anglais operarimouski.com Métropolitain

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 CALENDRIER

ORCHESTRE SYMPHONIQUE Paradis perdu , cinq mélodies de Régis Campo Récital Jean-Philippe Fortier-Lazure DE MONTRÉAL pour soprano colorature et orchestre (création, 7 juin, 15 h (Salle du Conservatoire de musique de commande de l’OSM) Montréal) 1600, rue Saint-Urbain 8 août, 15 h 45 (Maison symphonique de Montréal) INT : Jean-Philippe Fortier-Lazure Montréal (Québec) H2X 0S1 INT : Marie-Ève Munger PIA : Francis Perron Téléphone : 514 842-9951 DM : Kent Nagano, Orchestre symphonique Notes d’humour osm.ca de Montréal SAISON 2015-2016 (CONCERT D’OUVERTURE) 16 juin, 18 h SOCIÉTÉ D’ART LYRIQUE AN : Claude Gingras, chroniqueur, critique Pelléas et Mélisande (Debussy) – version de musical et collectionneur concert DU ROYAUME 8, 9 septembre, 20 h (Maison symphonique de 960, boulevard Saguenay Est TEMPÊTES ET PASSIONS Montréal) Chicoutimi (Québec) G7H 1L5 INT : Bernard Richter, Hélène Guilmette, Téléphone : 418 545-2787 170, rue Gérard-Morisset, bureau 305 Philippe Sly, Nicolas Testé, Marie-Nicole salr.ca Québec (Québec) G1S 4X3 Lemieux, Florie Valiquette, Hugo Laporte Téléphone : 418 569-4901 DESTINATIONS LYRIQUES tempetesetpassions.com DM : Kent Nagano, Orchestre et Chœur de l’Orchestre symphonique de Montréal Concert – Chœur de la Société d’art lyrique du Conférence Bel Canto et Verismo, pistes d’interprétation VIRÉE CLASSIQUE Royaume 9 juillet, 20 h 30 (Jardin des Vestiges / Bâtiment 4 juin, 19 h (Conservatoire de musique de Carmen (Bizet) 1912) Québec) 5 août, 10 h (Esplanade du Stade olympique de AN : Pierre Vachon Récital Montréal) 13 août, 20 h 30 (Jardin des Vestiges / Bâtiment Classe de maître de Richard Margison INT : Michèle Losier, Marianne Fiset, Joseph 1912) 6 juin, 9h 30 (Local d’orgue du Conservatoire de Kaiser, Gregory Dahl, Florie Valiquette, musique de Québec) Christianne Bélanger, Hugo Laporte INT : Marie-Ève Munger DM : Kent Nagano, Orchestre et Chœur de l’Orchestre symphonique de Montréal SOCIÉTÉ D’ART VOCAL CC : Andrew Megill DE MONTRÉAL MS : Alain Gauthier 49 Café d’art vocal ABRÉVIATIONS : Récital Michael Schade De Mozart à Wagner 1223, rue Amherst AN : Animation 7 août, 20 h 15 (Piano Nobile, Place des Arts) Montréal (Québec) H2L 3K9 CC : Chef de chœur INT : Michael Schaede Téléphone : 514 397-0068 artvocal.ca DM : Direction musicale PIA : Emily Hamper INT : Interprète L’Italiana in Alger i (Rossini) – Festival de Pesaro (2013) INS : Instrumentiste MS : Mise en scène 4 juin, 18 h 30 ORG : Organiste PIA : Pianiste

L’OPÉRA • NUMÉRO 4 • ÉTÉ 2015 PAMPHLET

BOULEZ : FAUT-IL FAIRE SAUTER LES MAISONS D’OPÉRA ? par Jean-Jacques Nattiez

e 26 mars dernier, le monde musical a L souligné les quatre-vingt-dix ans de naissance de Pierre Boulez. Une revue consacrée à l’opéra doit-elle s’arrêter à quelqu’un qui n’en a écrit aucun ? La question est d’autant plus pertinente lorsqu’on relit dans une entrevue de 1967 les propos tenus par Boulez et publiés le 25 septembre 1967 sous le titre « Sprengt die Opernhäuser in die Luft » (« Il faut faire sauter les maisons d’opéra »).

Quels opéras du XXe siècle trouvent grâce à ses yeux ? « Depuis Wozzeck et Lulu d’Alban Berg, il n’y a plus aucun opéra produit aujourd’hui qui ne soit discutable. Et Berg savait probablement qu’il avait clos un chapitre. » Et le succès des opéras de Hans Werner Henze ? « Les productions de Henze ne sont vraiment pas des opéras modernes. Je pense à un coiffeur bien gominé entiché d’un modernisme superfi ciel. Pour ne prendre

qu’un exemple, son Prince de Hombourg Magazine Limelight est une copie malheureuse du Don Carlos 50 de Verdi – sans parler de tous ses autres hors du commun ». Il cite encore Peter Brook, lorsqu’il prendra les rênes de l’Opéra de Paris opéras. Henze est comme de Gaulle : il peut avec qui il réalisera un Pelléas et Mélisande (1973-1980) où il invitera Boulez à diriger la produire n’importe quelle ordure (Boulez (1992) axé sur la cruauté de Golaud. Quels première mondiale de la version intégrale de utilise ici le mot allemand « Mist » qui signifi e autres opéras Boulez dirigerait-il ? Wagner la Lulu de Berg (24 février 1979). aussi « fumier » et « excréments »), il se prend en premier lieu (On se souviendra de sa toujours pour le roi. » Et Kagel, et Ligeti ? Tétralogie avec Patrice Chéreau). Mozart ? Une solution ? À l’époque, elle est radicale. « [Ils] n’ont pas assez de connaissance du Moussorgski ? Il avait espéré travailler à un « On devrait faire venir un cortège de Gardes- théâtre et chez eux, le côté musical est parfois Don Giovanni et à un Boris Godounov que Rouges. Ne l’oubliez pas : la Révolution française assez mince. » Quant aux œuvres choisies la mort de Wieland Wagner ne lui permit pas a cassé bien des choses et ce fut très sain. par Rolf Liebermann, directeur de l’opéra de réaliser. Pas question d’aborder Verdi : Quand la pression sanguine est trop forte, il n’y de Hambourg, lui-même un compositeur « Si on me proposait de diriger La force du a qu’une solution : drainer le sang. La solution la d’opéra bien connu à l’époque : « Il ne fait que destin, je préfèrerais sortir pour aller me plus radicale serait de les faire sauter. » composer par l’intermédiaire des autres. […] promener. » Dans l’ensemble, « l’opéra se L’intendant d’un opéra ne doit pas cultiver et compare à un placard qui sent le renfermé. institutionnaliser ses goûts petits-bourgeois. » […] L’opéra de Paris est plein de poussière et de merde. » (Ici, Boulez utilise délibérément Alors, comment conçoit-il la composition d’un le mot allemand « Scheiße »). Les amateurs opéra moderne ? « Il faudrait que le texte soit d’opéra sont des touristes qui se croient conçu pour le théâtre musical, et en même obligés de visiter l’Opéra de Paris « comme les Si l’on peut toujours se demander pourquoi temps que la musique. Je travaillerais en Folies Bergères et le Dôme des Invalides où Boulez n’a pas composé d’opéra, on peut collaboration étroite avec un écrivain capable Napoléon est inhumé ». Un seul public valable par ailleurs constater que sa conception de sentir la musique à chaque mot qu’il écrit, selon Boulez, celui qui est « très connaisseur des rapports entre livret et musique si bien que le texte ne devrait son existence de l’art théâtral ». « L’opéra n’a pas été sauvé mérite toujours réflexion. Son exigence qu’en relation avec la musique. » Pour cela, par les chanteurs ni les chefs d’orchestre, mais de dépoussiérage des mises en scène s’est il envisagea de demander à Jean Genet de par les metteurs en scène, dira-t-il plus tard. imposée comme une nécessité. Reste réécrire pour lui Les Paravents, projet Par la suite, on s’est rebellé contre leur toute- l’institution-opéra elle-même. Elle préoccupa interrompu par son décès. puissance et leurs inventions hors contexte, Boulez, impliqué dans une tentative avortée mais c’est cela qui a fait revenir une certaine de réforme des théâtres lyriques français, Et les mises en scène ? « Franco Zeffi reli est jeunesse à l’opéra1. » Et, ô ironie, c’est à mais la construction de l’Opéra-Bastille en le Henze des metteurs en scène. Wieland Liebermann que l’on devra ce renouveau fut la conséquence indirecte. Au-delà d’un Wagner est le seul metteur en scène d’opéra vocabulaire révolutionnaire et néo-marxiste que j’aie connu qui m’ait poussé à une désuet, les volontés réformistes de Boulez ne collaboration. » Boulez accepta l’invitation 1 « Wagner, Boulez et la recherche de soi », entretien de Pierre se sont jamais démenties. Voilà sans doute ce Boulez avec J.-J. Nattiez, in La pensée de Pierre Boulez à travers à diriger Parsifal (1966 à 1968 et 1970), car ses écrits, textes réunis et présentés par J. Goldman, J.-J. Nattiez que l’on peut retenir des interventions positives « les conditions de travail à Bayreuth sont et F. Nicolas, Sampzon, Delatour France, 2010, p. 253. de Boulez dans le monde de l’art lyrique. 5e

Direction générale et artistique Grégoire Legendre 23 juillet au 5 août 2015

L’Amour de loin Saariaho / Maalouf Robert Lepage, mise en scène 30 juillet, 1, 3 et 5 août à 20 h Grand Théâtre de Québec

De Bernstein à Plamondon Marie-Josée Lord, Marc Hervieux, Gino Quilico Photo : Jocelyn Michel / Consulat (leconsulat.ca) 28 juillet à 20 h La Cour du Vieux-Séminaire de Québec

Les Violons du Roy De Lully à Rameau 25 juillet à 20 h, Palais Montcalm

Arthur Nathalie Magnan quebec.com 24, 26, 27, 29 et 31 juillet à 19 h La Maison jaune

Diva by Night Natalie Choquette 23 juillet à 20 h, Grand Théâtre de Québec

Rossini à l’apéro opera 27, 28, 29 et 30 juillet à 16 h Chapelle du Musée de l’Amérique francophone

La Brigade lyrique 23 au 26 juillet et du 30 juillet au 2 août à 12 h et à 17 h Divers lieux dans la ville de Québec Les Grands Feux Loto-Québec 877 643-8131 er festival 1 août à 22 h, Vieux-Port de Québec billetech.com