The Salvation Hunters»
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2017 20:00 04.03.Grand Auditorium Samedi / Samstag / Saturday Ciné-Concerts «Sternberg: The Salvation Hunters» Brad Mehldau piano Joris Roelofs clarinette Michael Wilson violoncelle Film: The Salvation Hunters (1925) Josef von Sternberg scénario, réalisation George K. Arthur, Georgia Hale, Bruce Guerin… acteurs Brad Mehldau musique (2015) ~ 65’ sans pause Restoration by UCLA Film & Television Archive. Restoration funded by The Stanford Theatre Foundation. Scan and Digital Restoration (2015) by the Austrian Film Museum. Coproduction Cinémathèque de la Ville de Luxembourg et Philharmonie Luxembourg « Aux damnés de la terre » Stéphane Benaïm « Rapidement, je montai le film bout à bout et écrivit le texte des intertitres. Dans ma hâte, et dans les affres de l’épuisement, j’écrivis des choses qui me font encore frissonner maintenant. Un texte annonçait : « Les filles bien ne fument pas ». Mais à tout prendre, je trouvais le film réussi par rapport à ce que j’avais prévu. Au générique, je mentionnai que c’était le premier film que je réalisais et le dédiais « aux damnés de la terre ». Josef von Sternberg à propos de The Salvation Hunters, in De Vienne à Shanghai, les tribulations d’un cinéaste, Flammarion, 1989 The Salvation Hunters est la première œuvre de Josef von Sternberg comme réalisateur. Elle témoigne déjà de toute l’originalité du cinéaste qui, dès ses premiers pas, marque sa singularité dans un paysage hollywoodien assez uniforme et déjà très codifié. À l’inverse des autres productions de l’époque, The Salvation Hunters possède un rythme assez lent, presque contemplatif, à l’image de toute la www.mercedes-benz.lu première partie qui se déroule dans le port et qui se complaît à montrer le va-et-vient incessant des mâchoires d’acier des chalands Consommation de carburant cycle urbain/extra-urbain/mixte : 7,6 – 6,3/5,1 – 4,4/5,9 – 5,1 l/100 km qui creusent le fond des eaux boueuses pour tenter de les nettoyer. Émissions de CO en cycle mixte : 144 - 125 (g/km) 2 Malgré un casting de comédiens inconnus du grand public, à l’instar de Georgia Hale, le film suscite l’enthousiasme du public et provoque l’intérêt des professionnels qui admirent la direction La nouvelle Classe E. d’acteurs et la mise en scène. Par la suite, l’héroïne de ce drame interprétera le rôle principal de La Ruée vers l’or (The Gold Rush), Masterpiece of intelligence. de Charles Chaplin. 3 60151-MER-ANNONCE_PHILHARMONIE_CLASSE_E_115x175_PROD.indd 1 29/07/2016 09:40 Quelque part dans un port, sur un chaland à boue amarré à un quai, un garçon paumé (George K. Arthur) traîne sa carcasse et son ennui. Dans ce paysage de fin du monde où échouent les cargos au milieu du ballet incessant des grues géantes qui labourent les fonds vaseux et pollués, il tente de séduire une fille aussi perdue que lui (Georgia Hale). Non loin de là, le patron du bateau, la « brute » (Olof Hytten), malmène un enfant pour le plaisir. Choquée par la violence des coups que porte l’homme sur le petit, la fille pousse le garçon à s’interposer. Les deux hommes s’affrontent. Désormais réunis dans l’adversité, le garçon, la fille et l’enfant, décident de s’extirper de ce milieu sordide pour gagner la ville, lieu de tous les espoirs. Sans argent, sans travail et sans toit, cette improbable famille fait la rencontre d’un couple qui leur prête un taudis. Mais cette attention dissi- mule en réalité de sombres desseins : le duo cynique espère amener la fille désespérée à se prostituer. Pour parvenir à ses fins, l’homme tente de séduire la jeune femme ; il décide de l’emmener passer une journée à la campagne. Lors de cette sortie, l’homme gêné par la présence de l’enfant tente à son tour de le battre. Une fois encore, le garçon s’interpose. Après une violente bagarre, le garçon, la fille et l’enfant, de nouveaux seuls, livrés à eux-mêmes, partent ensemble pour une vie meil- leure, la tête haute. Pour la première fois de leur existence, ils ont leur destin entre leurs mains et comme l’annonce le dernier intertitre, ces Chasseurs de salut sont désormais devenus Les enfants du soleil (Children of the sun !). Comme il le confirmera par la suite dans ses autres films, Sternberg montre déjà tout son intérêt pour les décors qui occupent une place centrale dans son récit et tiennent même un rôle à part entière. Parmi les effets qui ne quitteront plus le cinéaste et qui en feront aussi sa marque de fabrique, on peut relever le soin que l’artiste apporte à la construction de son image, notamment pour agencer son cadre. Sternberg accorde une attention maniaque aux perspectives et à la profondeur de champ qu’il souligne en plaçant des objets en amorce entre l’objectif et les personnages. Ce film est le seul avec The Saga of Anatahan, son dernier long- métrage, à être réalisé en toute indépendance. Tourné en un temps record, à peine trois semaines, et avec des moyens dérisoires – 4255 dollars – il propulse son auteur au rang de célébrité : « J’en assurai la production avec mes modestes économies et fut remboursé en une seule 4 The Salvation Hunters photo: © Collection Austrian Film Museum soirée et dans une seule salle. » La United Artists achète les droits du film pour la somme de dix mille dollars. Sur la base de ce succès, de prestigieux studios tels que la M.G.M ou encore la Paramount vont alors s’intéresser au jeune réalisateur. C’est avec ce studio, que, par la suite, il signera quelques-uns de ses plus grands succès avec Marlène Dietrich. Au-delà d’être la première œuvre de Josef von Sternberg, la curiosité de The Salvation Hunters réside dans ses décors naturels. En effet, ce film est, avec The Sea Gull (une œuvre de commande aujourd’hui disparue), le seul à avoir été tourné dans des décors naturels, fait rare pour l’époque, où sont privilégiées les reconstitutions en studios. Les marécages de San Pedro et les quais des docks de Los Angeles vont cependant lui permettre d’instaurer dès sa première œuvre des éléments récurrents comme l’eau, les ports et de développer le thème fondateur de l’attraction vers un ailleurs meilleur. The Salvation Hunters en 1925, A Woman of the Sea en 1926, The Dragnet et The Docks of New York en 1928, Der Blaue Engel en 1930, Shanghai Express en 1932, Blonde Venus en 1932, The Devil is a Woman en 1935, The Shanghai Gesture en 1941, Macao en 1952 et enfin The Saga of Anatahan en 1953, sont autant de films où s’entremêlent les images de ports et d’eau, qu’il 5 s’agisse de ruisseaux comme dans la séquence de la baignade de Blonde Venus, de ports comme dans The Salvation Hunters, Macao, ou bien d’océans comme dans The Saga of Anatahan. Cet élément est souvent synonyme de purification, de départ, mais aussi une façon esthétique de jouer avec les reflets pour introduire la notion de double ou d’image négative. On retrouve d’ailleurs en ouverture de The Salvation Hunters ce procédé avec trois silhouettes dont les reflets sont troublés par les remous. Dès ce premier film, on découvre un univers cinématographique très riche où prédomine l’appel au voyage. Ce monde où se mélange réalisme et onirisme happe le spectateur et l’entraîne dans un espace clos ou vivent des personnages qui souhaitent partir pour un ailleurs qu’ils espèrent forcément meilleur. Mais le salut n’est pas dans la destination, mais dans la notion de déplacement. Dans ces aventures introspectives où les individus se cherchent, il y a la quête de l’autre, mais surtout la quête de soi. Les personnages, déjà blessés par leur passé trouble, comme c’est également le cas dans The Salvation Hunters, évoluent toujours en milieu hostile et menaçant. Si les prédateurs qui rôdent autour des héros sternbergiens échouent dans ce premier film, une erreur de jeunesse selon leur propre auteur, ils auront par la suite le dessus, livrant ainsi des œuvres bien plus sombres. Sternberg, ses premiers pas dans la cinématographie En 1908, à quatorze ans, Jonas et sa famille émigrent aux États- Unis. Adolescent, le futur cinéaste effectue de nombreux petits métiers, il connaît le chômage, la faim et la misère. De 1909 à 1911, il travaille dans un magasin de mode, puis dans une dentel- lerie de la Cinquième Avenue. Une rencontre fortuite le met en contact avec la pellicule cinématographique. Tout d’abord livreur de bobines, puis nettoyeur et monteur de ce fameux ruban de celluloïd, Sternberg devient responsable d’un service de restauration de pellicules à la World Film Corporation de William A. Brady. Durant la Première Guerre mondiale, Sternberg réalise des films d’entraînement et d’instruction pour le Signal Corps et le Medical Corps. Une fois la guerre finie, il rejoint la World Film Corpora- tion. En 1918, il fait la rencontre d’un cinéaste français : « l’homme 7 8 The Salvation Hunters photo: © Collection Austrian Film Museum 9 était non seulement très qualifié pour la mise en scène mais savait égale- ment l’enseigner avec bienveillance et ne manquait jamais d’expliquer dans le détail ce qu’il faisait et pourquoi il le faisait. Il s’appelait Émile Chautard. » Ce dernier lui propose le poste d’assistant pour le film Le Mystère de la chambre jaune, d’après le célèbre roman poli- cier de Gaston Leroux. Sternberg quitte alors son laboratoire dans lequel il était confiné. Jonas Sternberg devient Joe Stern.