Rapport d’expertise :

Appui à la police de l’eau

Examen de la pollution en tétrachloréthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller et de Sélestat (67)

BRGM/RP-63355-FR Février 2014

Cadre de l’expertise :

Appuis aux administrations ❑ Appuis à la police de l’eau 

Date de réalisation de l’expertise :

Février 2014

Localisation géographique du sujet de l’expertise :

Département du Bas-Rhin, communes de Scherwiller (67) et de Sélestat (67)

Auteurs BRGM :

F. CRASTES DE PAULET, D. HUBE

Demandeur : DREAL

Examen de la pollution en tétrachloréthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller et de Sélestat (67)

L’original du rapport muni des signatures des Vérificateurs et Approbateurs est disponible aux Archives du BRGM. Le système de management de la qualité du BRGM est certifié AFAQ ISO 9001:2008. Ce rapport est le produit d’une expertise institutionnelle qui engage la responsabilité civile du BRGM.

Ce document a été vérifié et approuvé par :

Approbateur :

D. MIDOT Date : 18/03/2014

Vérificateur : J-R MOSSMANN Date : 06/03/2014

Mots clés : expertise, appui à la police de l’eau, nappe d’Alsace, Alsace, Sélestat, Scherwiller, COHV, tétrachloroéthylène, PCE, trichloroéthylène, TCE.

En bibliographie, ce rapport sera cité de la façon suivante :

F. CRASTES DE PAULET, D. HUBE (2014) – Rapport d’expertise : Appui à la police de l’eau. Examen de la pollution au tétrachloroéthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller et de Sélestat (67) BRGM/RP-63355 -FR. 36 p., 12 fig., 3 tab., 3 ann.

© BRGM, 2014, ce document ne peut être reproduit en totalité ou en partie sans l’autorisation expresse du BRGM.

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Synthèse

Contexte :

Date de la formulation de la demande d’expertise au BRGM : 17/12/2013 Demandeur : DREAL Alsace Nature de l’expertise : analyse des études antérieures, interprétation des données disponibles dans les bases de données (BSS, ADES, BASOL, BASIAS et APRONA) et rédaction d’un avis pour la mise en évidence de la pollution ainsi que pour les techniques de dépollution Situation du sujet : communes de Schwerwiller (67) et de Sélestat (67) Date d’occurrence ou de constat : février 2013 Nature de l’intervention du BRGM : niveau II, rassembler des connaissances existantes (avec avis) ou diagnostique simple.

Faits constatés / dossier examiné :

Sur la demande de la DREAL Alsace, un Appui à la Police des Eaux Souterraines a été réalisé par le BRGM afin d’examiner une pollution des eaux souterraines au tétrachloroéthylène constatée dans le Haut-Rhin, sur les communes de Scherwiller et de Sélestat (zone nord). La mission du BRGM a consisté dans un premier temps à interpréter les résultats d’analyse des inventaires transfrontaliers 2003 et 2009 de tétrachloréthène et de trichloréthylène mis à disposition par l’APRONA, puis dans un second temps, de compléter ces observations par une recherche bibliographique des pollutions en PCE et TCE déjà détectées sur le secteur, ainsi qu’une recherche de données dans la Banque de données du Sous-Sol (BSS), ADES et BASOL. Ces recherches ont fait l’objet d’une interprétation et d’une synthèse, pour être ensuite confrontées aux études antérieures réalisées par le CAR et le BURGEAP pour le compte du SDEA.

Diagnostic du BRGM :

Une partie des documents fournis comportent des pièces manquantes et/ou sont des versions temporaires. La liste des principaux constats doit donc être considérée comme sujette à une validation ultérieure :  Des valeurs supérieures à la CMA pour le tétrachloroéthylène (PCE) ont été relevées sur différents secteurs des communes de Scherwiller et de Sélestat depuis 2001. Au niveau du captage AEP 03077X0097/F, la teneur en PCE a augmenté jusqu’à dépasser 80 µg/L. La pollution en trichloroéthylène (TCE) est nettement plus restreinte (< 5 µg/L). Le régime hydraulique libre de la nappe limite la dégradation du PCE et du TCE.  Au regard des données géologiques, l’existence de lentilles argileuses compartimentant l’aquifère apparaît comme possible, mais non confirmée.  La piézométrie présente encore des incertitudes impactant les conclusions des études : la carte piézométrique de 2006 fait apparaître que le gradient hydraulique au sud-ouest de la zone industrielle semble anormalement plus fort (≈7‰) que sur tout le reste de la zone d’étude (≈1‰). Le nivellement de plusieurs piézomètres semble insuffisant, les profondeurs des ouvrages sont parfois inconnues, la profondeur d’installation des crépines est souvent

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manquante… En l’état, il est difficile de proposer un modèle conceptuel cohérent afin de comprendre les flux souterrains : la distinction entre les eaux - probablement proches de la surface - provenant de la nappe du Giessen (orientée E-O) et celles - peut-être plus profondes - de la nappe d’Alsace (orientée S-N) apparaît comme insuffisamment étudiée. Pour les mêmes raisons, il est possible que les teneurs relevées dans certains forages ne soient pas représentatives de la pollution sur toute la colonne aquifère au droit de ces forages ;  L’interprétation d’un marquage chimique de la partie superficielle de l’aquifère au niveau du forage AEP 03077X0097 repose sur un seul essai de mai 2003. Celui-ci a été réalisé sans packer (système permettant d’isoler différentes parties d’un forage) et en plaçant une des pompes dans le tubage – l’autre en face des crépines. Ce test n’est pas renforcé par des essais au moulinet (qui auraient permis de mettre en évidence les contributions des différentes parties de l’aquifère) ou par des mesures chimiques voire isotopiques plus poussées (qui auraient pu éventuellement distinguer une contribution de la nappe du Giessen par rapport à celle de la nappe d’Alsace). De cet essai, il a été conclu que la recherche des COHV pouvait se limiter à la partie supérieure de l’aquifère, ce qui semble être une conclusion hâtive à ce stade des études.  Le panache de pollution principal semble avoir une forme relativement étroite (< 500 m de large) et d’axe presque parfaitement S-N correspondant au sens d’écoulement global de la nappe du Rhin. Cette configuration est cohérence avec le retour d’expérience concernant la typologie des panaches COHV en milieu alluvial à vitesses d’écoulement élevée. Le panache pourrait se trouver par conséquent dans une partie de la nappe peu ou pas influencée par le déversement de la nappe du Giessen, c’est-à-dire plus en profondeur. Il ferait partie de la partie la plus australe de l’aire d’alimentation du captage AEP 03077X0097 de Scherwiller. Néanmoins, il est nécessaire de rappeler la présence de PCE sur la décharge proche de l’A35 (incluse dans l’aire d’alimentation du captage de Scherwiller) et au nord-est de la sablière LEONHART (son appartenance à l’aire d’alimentation du captage d’Ebersheim devrait être étudiée) ;  Plusieurs sources potentielles de pollution (au minimum 2, probablement 3) semblent avoir été mises en évidence par le bureau d’étude BURGEAP, confirmant les résultats obtenus par le CAR en 2003. Les sources identifiées sont situées dans la zone industrielle nord, où les ouvrages des ateliers municipaux de Sélestat, et de différentes installations dans le périmètre de cette zone, tant au nord qu’au sud (Daramic, Cuisines Schmidt…) présentent des concentrations dépassant 50 voire 100 µg/L. Avec moins de certitude, une troisième source concernerait le secteur du garage Citroën ou de la société Freiss. La présence de PCE dans les ouvrages de ces sociétés ne préjuge pas de leurs responsabilités en ce qui concerne l’origine de ces pollutions.

Recommandations du BRGM :

Afin de répondre à des objectifs d’amélioration 1) de la qualité des milieux et 2) de la connaissance des impacts sur la ressource en eau et ses usages, le BRGM recommande d’engager des actions graduées et progressives permettant d’apporter des éléments tangibles d’expertise et de connaissance concernant la nature et l’origine du marquage de la nappe phréatique d’Alsace au PCE et TCE dans la partie aval de Colmar. Il s’agit en particulier :  d’identifier si le marquage résulte d’une ou plusieurs émissions polluantes en nappe,  le cas échéant, de préciser la nature, la typologie et les positions plausibles de ces sources.

Le BRGM propose une approche progressive d’approfondissement des connaissances du marquage de la nappe par les solvants chlorés : 1) ETAPE 1 : consolidation des connaissances actuelles par la collecte et l’exploitation de données existantes (hydrogéologie, hydrogéochimie, points d’accès à la nappe),

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2) ETAPE 2 : création (ou approfondissement) de piézomètres exploratoires (à minima trois) de reconnaissance ciblée dans des zones d’incertitudes et si possible le long de l’axe probable du panache, et explorant l’ensemble de l’épaisseur de l’aquifère. 3) ETAPE 3 : campagne d’échantillonnage et d’analyses au laboratoire du PCE et du TCE, ainsi que d’isotopes permettant de déterminer l’âge et l’origine des eaux. Le programme analytique standard sera consolidé par des analyses de vérification par CPG/MS (recherche systématique des liaisons organiques par empreinte chromatographique) afin de déterminer leur signature chimique. 4) ETAPE 4 : Mise en œuvre d’un échantillonnage sélectif multi niveaux SPT (« Separative Pumping Technique ») sur des ouvrages ciblés afin d’explorer la stratification chimique des eaux selon une approche tridimensionnelle. L’objectif est l’identification de la distribution en COHV en nappe (un seul panache mono source ou un panache multi sources, voire plusieurs panaches multi sources). Ces quatre étapes permettront de caractériser l'émission (mono- ou poly source) l’hydrogéologie locale (mélange entre la nappe d’Alsace et celle du Giessen), et de mener une discussion circonstanciée sur le caractère conclusif ou sur les incertitudes de l’étude eu égard à la localisation de la ou des sources. Elles permettront d’effectuer des recommandations en termes de connaissance et gestion de ces pollutions.

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Sommaire

1. Contexte de l’étude ...... 9

2. Situation du site et données disponibles ...... 9

2.1 DONNEES RECUEILLIES ...... 9

2.2 CONTEXTES GEOGRAPHIQUE, GEOLOGIQUE ET HYDROGEOLOGIQUE 10

2.3 RAPPEL SUCCINCT SUR LES SOLVANTS CHLORES ...... 10

3. Faits constatés et interprétations ...... 11

3.1 DONNEES HYDROGEOLOGIQUES ...... 11 3.1.1 Sens d’écoulement de la nappe...... 11 3.1.2 Variations piézométriques ...... 13 3.1.3 Caractéristiques hydrauliques de la nappe ...... 14 3.1.4 Captage AEP 03077X0097 ...... 14 3.1.5 Ouvrages souterrains ...... 14 3.1.6 Rejets ...... 15

3.2 COUPE GEOLOGIQUE DU SECTEUR ...... 17

3.3 VULNERABILITE DE LA NAPPE ...... 17

3.4 SITES NON REFERENCES ...... 17

3.5 SITES BASIAS ...... 18

3.6 SITES BASOL ...... 18

3.7 DONNEES BANCARISEES SOUS ADES ...... 20 3.7.1 Interprétation des teneurs en COHV pour le captage AEP 03077X0097 20 3.7.2 Cartographie des teneurs en PCE sur la zone d’étude ...... 21

3.8 DONNEES DE L’APRONA (INVENTAIRE 2003-2009) ...... 23

3.9 RECHERCHE DE LA SOURCE DE POLLUTION ...... 25 3.9.1 Prélèvements sur le terrain ...... 25 3.9.2 Influence de la profondeur ...... 26 3.9.3 Enquête auprès des entreprises ...... 26

3.10 MODELISATION ...... 31

4. Diagnostic et recommandations ...... 31

5. Bibliographie ...... 35

6. Annexes ...... 36

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LISTE DES FIGURES

Figure 1 - Carte piézométrique de juillet 2006 et emprises théoriques du captage AEP 03077X0097 de Scherwiller (Source: BURGEAP) ...... 12 Figure 2 - Chronique piézométrique du forage 03077X0238 de 1977 à 2013 (Source: ADES) ...... 13 Figure 3 - Chronique piézométrique du forage 03078X0014 de 1955 à 2013 (Source: ADES) ...... 13 Figure 4 - Emplacements des ouvrages souterrains déclarés en BSS, situés entre le captage AEP et la zone industrielle (Source: BSS et IGN) ...... 16 Figure 5 - Emplacements des anciennes décharges, sites BASIAS et sites BASOL par rapport aux cartes piézométriques de 1991 et 2009 (Sources: BURGEAP, BASIAS, BASOL, BRGM, IGN et APRONA) ...... 19 Figure 6 - Concentration (µg/L) en tétrachloroéthylène au niveau du captage AEP 03077X0097 de Scherwiller (Source: ADES) ...... 21 Figure 7 – Concentration (µg/L) en trichloroéthylène au niveau du captage AEP 03077X0097 de Scherwiller (Source: ADES) ...... 21 Figure 8 - Moyenne des concentrations en PCE [ en µg/L - supérieures au seuil de détection/quantification] pour plusieurs forages de la zone d’étude (Sources: ADES, BRGM et IGN) ...... 22 Figure 9 - Cartographie des mesures en PCE (en µg/L) effectuées par l'APRONA en 2003 et 2009 (Sources: APRONA, BRGM et IGN)...... 24 Figure 10 - Concentrations en PCE suite aux prélèvements réalisés en 2006 par le BURGEAP (Source: BURGEAP/Rst1132) ...... 28 Figure 11 - Concentrations en PCE suite aux prélèvements réalisés par le BURGEAP entre 2008 et 2010 (Source: BURGEAP/RMNNE0011) ...... 29 Figure 12 - Répartition des concentrations mesurées au droit de la zone industrielle de Sélestat (Source: BURGEAP/Rst1132) ...... 30

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1. Contexte de l’étude

Depuis 2001, une pollution aux solvants chlorés a été mise en évidence dans les eaux souterraines sur les communes de Scherwiller et de Sélestat, en aval hydraulique de la ville de Colmar (Haut-Rhin). Un captage d’adduction d’eau potable (AEP) est nettement impacté : la concentration maximale en tétrachloroéthylène (PCE) mesurée en mai 2012 est de 88 µg/L (sachant que la concentration maximale admissible est de 10 µg/L). Dans le cadre des actions du BRGM d’appui technique à la Police des Eaux Souterraines, la Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement d’Alsace (DREAL) a demandé à la Direction Régionale Alsace du BRGM d’effectuer une étude de la pollution constatée. Cette requête porte sur la recherche de données disponibles (BSS, ADES, BASOL, BASIAS…), la synthèse des études communiquées (CAR, BURGEAP…), ainsi que la formulation de recommandations quant à la recherche et à la gestion de la pollution.

2. Situation du site et données disponibles

2.1 DONNEES RECUEILLIES

Pour cette étude, le BRGM s’est appuyé sur les données extraites des bases de données en ligne de la BSS, d’ADES, de BASOL, de BASIAS, sur les résultats d’analyse de l’inventaire transfrontalier 2003 et 2009 communiqués par l’APRONA, ainsi que sur des rapports BRGM préexistants dont la liste figure en fin de rapport. La DREAL a fourni les documents suivants : - Pollution du captage par du tétrachloroéthylène – Mise au point d’un traitement visant à retrouver la qualité de l’eau distribuée (CAR / référence : I0308/A – mai 2003) ; - Traitement de la pollution du captage AEP – Bilan du 1er trimestre de fonctionnement (CAR / référence : I0319/A - octobre 2003) ; - Recherche de l'origine d'une pollution du captage d'eau potable par du tétrachloroéthylène - Bilan des travaux réalisés en 2003(CAR / référence : I0325/A –décembre 2003) ; - Puits 03077X0097 de Scherwiller – Diagnostic de pollution par les COHV / Rapport de phase 1 - Analyse de la situation actuelle et proposition de programme de travaux (BURGEAP/ référence : Rst1004 - 2006) ; - SDEA Syndicat des Eaux de Chatenois - Scherwiller (67) - Puits 03077X0097 de Scherwiller (67) - Diagnostic de la pollution par les COHV - Rapport des phases 2, 3 et 4 – Investigations de terrain et modélisation (BURGEAP / référence : Rst 1132 - 2009) – INCOMPLET et VERSION PROVISOIRE ; - SDEA Syndicat des Eaux de Chatenois - Scherwiller (67) - Puits 03077X0097 de Scherwiller (67) - Diagnostic de la pollution par les COHV - Rapport de l’étude complémentaire (BURGEAP / référence : Rst 1548 - 2009) - INCOMPLET ; - SDEA Périmètre de L’Ill-au-Vignoble – Scherwiller (67) – Puits AEP 03077X0097 – Diagnostic de la pollution par les COHV de Scherwiller (BUREGAP / référence : REMNNE00111-02 – décembre 2011).

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2.2 CONTEXTES GEOGRAPHIQUE, GEOLOGIQUE ET HYDROGEOLOGIQUE

La commune de Scherwiller compte 3074 habitants (recensement INSEE de 2011) pour une superficie de 18,08 km2, soit une densité de 170 hab./km². La ville est située dans la plaine d’Alsace, à des altitudes comprises entre 170 m et 519 m NGF (en prenant en compte le Rittersberg). La ville est traversée d’ouest en est par la rivière l’Aubach, se jetant dans le Holzgiessen près d’Ebersheim – commune limitrophe à l’est. La commune de Sélestat compte environ 19000 habitants. Elle est située au sud-est de Scherwiller, de l’autre côté de l’autoroute A35, et comporte une zone industrielle à proximité d’une ancienne gravière. La zone étudiée se situe dans la partie occidentale de la plaine alluviale du Rhin en Alsace, en rive gauche de l’Ill. Elle est bordée à l’ouest par le Massif cristallin des Vosges. Si la nappe d’Alsace peut atteindre 200 m d’épaisseur au niveau du Rhin, cette dernière est moins importante sur le bord occidental, de l’ordre de 40 à 80 m. Son écoulement est orienté suivant une direction S-N voire SSO / NNE. De façon générale, il est considéré que la transmissivité augmente d’ouest (≈5.10-3 m²/s) en est (≈10-1 m²/s). Sur le secteur de Scherwiller et de Sélestat, le dépôt des alluvions du Giessen a une forme conique et a été favorisé par l’élargissement et la faible pente (par rapport à la partie amont du Giessen). Leur épaisseur est évaluée à environ 60 m (d’après la coupe du forage 03078X0021/GT à Ebersheim). Ils sont constitués d’un mélange de sables, graviers et galets (jusqu’ à 15 cm environ et formés plus de 90 % de roches pré-triasiques), avec des intercalations argileuses permettant la coexistence de 2 aquifères (dont les échanges entre eux sont non quantifiables). Ces alluvions reposent sur les formations imperméables des marnes de l’Oligocène. En surface, il est possible de trouver 1 à 2 m d’alluvions limoneuses récentes, voire 1 m de lœss. En période de fonte de neige, le gradient SSO-NNE de la nappe d’Alsace peut être fortement perturbé par la nappe accompagnant le Giessen (régime pluvio-nival) dont le gradient est plutôt ouest-est.

2.3 RAPPEL SUCCINCT SUR LES SOLVANTS CHLORES

Le tétrachloréthène et le trichloréthylène appartiennent à la famille des composés organo- halogénés volatils (COHV). Ils ont été utilisés principalement et massivement comme agent dégraissant et solvant à bas point d’ébullition dans l’artisanat et dans l’industrie. Bien que volatils, ces produits liquides peuvent atteindre les aquifères lorsqu’ils sont déversés accidentellement à la surface du sol, et migrer rapidement au travers de la zone saturée en raison 1) de leur solubilité, 2) de leur faible viscosité (inférieure à celle de l’eau) et 3) et de leur forte densité (supérieure à celle de l’eau). Les solvants chlorés s’adsorbent de façon significative sur les sols riches en matières organiques, et ils peuvent par ailleurs, comme tous les liquides mouillants, être retenu par capillarité à saturation résiduelle dans la porosité des sols et/ou aquifères. Ces phénomènes entrainent une rémanence de la pollution sur une longue période, car la remise en mouvement des solvants se fait continuellement (solvant au sein de la nappe) et/ou (pour les solvants des sols) à chaque lessivage (précipitations, variations du niveau piézométrique). Cette dualité entre tendance à migrer rapidement (en générant des corps d’imprégnation étroits) et la sorption facilitée par la présence de matière organique ou par capillarité fait qu’il est difficile de prévoir la répartition des COHV dans le milieu poreux. Ces COHV peuvent par ailleurs migrer en phase gazeuse et être à l’origine de pollution des gaz du sol, de l’air ambiant, voire des eaux souterraines par dissolution en phase gazeuse. Enfin, les COHV peuvent, dans certaines conditions physico-chimiques et microbiologiques, se biodégrader, possiblement jusqu’à la minéralisation (en H2O, CO2, chlorure), en passant par des stades et molécules intermédiaires (métabolites, en l’occurrence, pour le PCE [tétrachloréthylène, perchloréthylène], ce sont le trichloréthylène, puis le Cis-1,2-dichloréthylène et le chlorure de vinyle, se transformant en éthylène).

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La Concentration Maximale Admissible (CMA) en est de 10 µg/l pour la somme des concentrations en tétrachloréthène et trichloréthylène dans les eaux destinées à la consommation humaine (Arrêté n° 2007-49 du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation humaine mentionnées aux articles R. 1321-2, R. 1321-3,R. 1321-7 et R. 1321-38 du code de la santé publique).

3. Faits constatés et interprétations

3.1 DONNEES HYDROGEOLOGIQUES

3.1.1 Sens d’écoulement de la nappe

Les différentes cartes piézométriques consultées par le BRGM pour le secteur d’étude datent de 1975, 1991 et 2009 (APRONA), et s’accordent pour donner un sens d’écoulement des eaux souterraines globalement orienté SSO-NNE. Néanmoins, des différences notables existent localement sur le tracé des isopièzes dans le secteur compris entre Schwerwiller, Sélestat et Ebersheim : présence d’un axe de drainage orienté SSO-NNE (lié à une augmentation de la perméabilité ?) sur celle de 1975, gradient orienté SO-NE sur celle de 1991, fort gradient clairement orienté O-E sur celle de 2009… Toutes trois semblent avoir été tracées en faisant une interpolation entre une dizaine de points de mesure. Leur utilisation ne saurait suffire pour la recherche d’une source de pollution ; des cartes piézométriques à plus grande échelle ont donc été réalisées par les différents bureaux d’étude. Des cartes piézométriques réalisées par le CAR, en mars 2004 et en août 2005, sont disponibles en annexe 7 du rapport BURGEAP/Rst 1004. Réalisées par interpolation à l’aide du logiciel Surfer®, elles se concentrent sur le captage AEP et la zone industrielle et quartier Maison rouge de Sélestat (en bordure du Giessen). La densité de points de mesure dans la zone industrielle (au sud) est plus importante que sur le reste de la zone cartographiée. Les valeurs piézométriques mesurées sur le terrain sont absentes. Le tracé des isopièzes laisse penser qu’elles ont été réalisées par une interpolation automatique (en sélectionnant une des méthodes proposées par défaut : krigeage, inverse des distances…). Deux cartes piézométriques ont réalisées par le BURGEAP (rapport REMNNE00111-02) : l’une dite « générale » en juillet 2006 ; l’autre « locale » en mars 2011. Toutes deux ont été tracées à l’aide de 7 mesures de terrain, et tendraient à démontrer un changement d’orientation du gradient hydraulique (alors que le niveau piézométrique resterait aux alentours de 166 m NGF dans la zone industrielle de Sélestat). Une carte piézométrique locale (2x3 km) est également disponible pour la commune d’Ebersheim (fig. 1 du rapport). Le gradient y apparaît comme relativement faible (1‰) et orienté SSO-NNE. Une autre carte piézométrique est disponible pour la même période de juillet 2006 (rapport Rst 1132). Tracée sur la base d’une vingtaine de points (dont les mesures figurent sur la carte), elle met en évidence le rabattement lié au pompage de dépollution sur le site de DARAMIC (cf. Figure 1). Le gradient apparaît clairement comme étant SSO-NNE. Bien que les isopièzes supérieures à 166,5 m NGF soient absentes (alors que des relevés existent – le gradient serait alors proche de 7‰), elle représente la carte piézométrique locale la plus aboutie réalisée dans le cadre de ces études sites/sols pollués. D’après les différentes études réalisées, la vitesse d’écoulement de la nappe serait comprise entre 1 et 7 m/jour. Localement, les écoulements peuvent être influencés par les pompages réalisés par l’entreprise DARAMIC (forage 03077X0133 : 80 m3/h) et l’entreprise WANZL (forage 03078X0140 : 10 à 50

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Examen de la pollution en tétrachloréthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller et de Sélestat (67) m3/h) situées dans la zone d’activité au nord de Sélestat, ainsi que par le niveau de la gravière (plus à l’est) qui pourrait être considérée comme une zone à charge hydraulique imposée.

Figure 1 - Carte piézométrique de juillet 2006 et emprises théoriques du captage AEP 03077X0097 de Scherwiller (Source: BURGEAP)

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3.1.2 Variations piézométriques

Deux piézomètres dont les chroniques sont bancarisées dans ADES sont disponibles non loin de la zone d’étude. Il s’agit des piézomètres 03077X0238 et 03078X0014, situés respectivement en amont hydraulique (rive droite du Giessen, ouest de la zone industrielle de Sélestat) et en aval hydraulique (dans le centre d’Ebersheim) par rapport au captage AEP 03077X0097.

Tous deux disposent de chroniques de longue durée (> 30 ans) relativement bien corrélées entre- elles : les variations piézométriques liées à un cycle hydrologique intra-annuel présentent des fréquences et des amplitudes similaires - de l’ordre 1 m entre les périodes de basses et hautes eaux (cf. Figure 2 et Figure 3). Les hautes eaux sont relativement courtes et concentrées sur le mois de janvier (voire de février) ; alors que les basses eaux ont une durée plus variable, courant de septembre à novembre en fonction des années.

Figure 2 - Chronique piézométrique du forage 03077X0238 de 1977 à 2013 (Source: ADES)

Figure 3 - Chronique piézométrique du forage 03078X0014 de 1955 à 2013 (Source: ADES)

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Une faible tendance baissière à l’échelle interannuelle semble également apparaître (-1 m en 30 ans environ pour le piézomètre en amont hydraulique). Les mesures piézométriques pour 1991 et 2009 sont tout à fait cohérentes avec les cartes piézométriques déjà établies (ces forages ont probablement été mesurés durant les différentes campagnes).

3.1.3 Caractéristiques hydrauliques de la nappe

Le rapport BURGEAP/Rst 1004 cite les résultats obtenus en 1999 par ANTEA suite à un essai de pompage d’une durée de 34h46 avec un débit considéré comme constant (300 m3/h) dans le captage AEP 03077x0097 : T≈0,08m²/S et S≈5%. Ces résultats sont néanmoins à prendre avec précaution puisque des documents en annexe indiquent que le débit est passé par paliers de 300 à 350 m3/h.

3.1.4 Captage AEP 03077X0097

Profond de 46,5 m et traversant une alternance de terrains graveleux et sableux, le captage AEP 03077X0097/F dispose d’une crépine entre 20 et 43 m de profondeur. En mai 2003, un test a été réalisé (rapport CAR I0308/A) : celui-ci a mis en évidence une stratification verticale de la concentration en tétrachloroéthylène. Ayant installé 2 pompes, situées respectivement à -13,25 m/sol (7 m au-dessus de la crépine) et -34,9 m/sol (au milieu de la crépine), des valeurs proches de 5 µg/L ont été mesurées pour la pompe la plus profonde, contre des valeurs comprises entre 19 et 28 µg/L dans la pompe supérieure. Suite à cet essai, il a été estimé que la pollution provenait de la partie supérieure de l’aquifère (sans que celle-ci soit clairement identifiée) et que les 2 pompes devraient être installées définitivement : la 1ère étant censée capter la majorité de la pollution en PCE/TCE (≈80 m3/h), tandis que la 2nde servirait à l’AEP (≈160 m3/h). Il faut remarquer que ce type d’essai permet de confirmer que l’on peut retrouver des COHV dans la partie supérieure de l’aquifère, il ne permet pas d’exclure la présence de COHV dans sa partie inférieure : les hétérogénéités du milieu couplées à une répartition hétérogène de COHV dans le profil peuvent conduire à des transferts du polluant selon des voies différentes. Considérer le transfert du polluant comme se limitant uniquement à la partie supérieure de l’aquifère semble abusif à ce stade de connaissance. Une différence de concentration entre les deux niveaux peut également s’expliquer par des débits de pompages différents, conduisant à solliciter des proportions différentes d’eau provenant du panache de pollution et d’eau non impactée. De plus, il est à noter que le dossier BSS du captage AEP 03077X0097 indique un problème d’étanchéité suite à l’installation du bouchon d’argile sur la partie supérieure de la crépine, ainsi qu’une mauvaise cimentation (réalisée de façon gravitaire au lieu d’une injection par le fonds ou avec des cannes). Bien que le rapport BURGEAP/Rst 1004 indique également que le tubage est encore en bon état (suite à une inspection vidéo), un tel forage ne saurait être protégé de façon efficace contre une pollution dans son périmètre immédiat.

3.1.5 Ouvrages souterrains

En excluant le sondage profond 03078X0021/GT (inutile dans le cadre de l’étude considérée), seuls 7 ouvrages souterrains ont une profondeur supérieure à 30 m, voire équivalente à celle du captage AEP 03077X0097 (cf. Figure 4). Seuls le forage 03077X0019 et le triple-piézomètre 03078X0049 disposent d’informations (beaucoup plus fiables pour le 2nd que pour le 1er) quant à la profondeur d’installation des crépines. La majorité des piézomètres réalisés depuis 2003 par les bureaux d’études CAR et BURGEAP ne dépassent pas 20 m de profondeur (cf. § 3.9.2). Etant donné que le tétra- et le trichloroéthylène déversés à la source ont une densité supérieure à celle de l’eau, il paraît possible qu’une partie du

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Examen de la pollution en tétrachloréthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller et de Sélestat (67) panache de pollution ait pu échapper aux observations réalisées dans des piézomètres pas assez profonds, ou dont la crépine n’intercepte pas la partie la plus concernée par la pollution. Enfin, indépendamment des effets densitaires, des différences verticales de charges hydrauliques entre les niveaux productifs et/ou la dispersion verticale des masses avec la distance à la source, peuvent également contribuer à accroitre l’extension de l’impact vertical des COHV sur la trajectoire du panache.

3.1.6 Rejets

Sans traitement, l’eau captée par la pompe supérieure du captage AEP 03077X0097 est envoyée dans l’Aubach. Des mesures étaient effectuées par le CAR en différents points : au niveau de la pompe de rejet, dans le Giessen au point de sortie de la conduite de rejet, puis 2 km en aval sur le Giessen (cf. Tableau 1).

TCE (µg/L) TCE (µg/L) 15/07/2003 11/09/2003 Captage - Eau distribuée 8,7 4,5 Captage - Eau rejetée 38,9 15,7 Aubach - aval direct du rejet 23,6 12,8 Aubach - 2km du rejet 0,3 0,3 Tableau 1 - Concentrations en TCE (µg/L) en différents points du rejet du captage AEP 03077X0097 (Source: CAR rapport I0319/A) Le CAR en déduisait une « volatilisation du solvant » au fil de l’eau, sans pour autant aborder l’importance que pouvait avoir la dilution de la pollution dans le cours d’eau. Après un traitement (échange sur des résines), l’eau captée par le forage industriel de DARAMIC 03077X0133 est rejetée dans le réseau d’eaux pluviales, puis va rejoindre le Giessen.

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Figure 4 - Emplacements des ouvrages souterrains déclarés en BSS, situés entre le captage AEP et la zone industrielle (Source: BSS et IGN)

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3.2 COUPE GEOLOGIQUE DU SECTEUR

Le captage d’indice BSS 03077X0097, implanté sur la commune de Scherwiller, est profond de 46 m et possède une coupe géologique détaillée. De la terre végétale et un silt sableux (2 m) recouvrent 2 m de sable grossier ainsi qu’une épaisseur de 42 m d’un mélange de graviers/galets à passées sableuses. Deux intervalles sableux (granulométrie moyenne) sont observables entre - 15 et -17, ainsi qu’entre -33 et -35 m de profondeur. Situé au sud-ouest vers Scherwiller, le forage géothermique 03077X0548 indique une passée argileuse entre -22,6 et -24,2 m de profondeur. Quant au multi-piézomètre 03078X0349 d’Ebersheim (vers le sud-est), son log ne fait pas référence à des passées argileuses mais à l’absence de galets à différentes profondeurs. Ces exemples soulignent l’hétérogénéité des dépôts alluviaux dans la zone étudiée (cf. §2.2). Les profils de ces ouvrages sont disponibles en annexe 2.

3.3 VULNERABILITE DE LA NAPPE

Les formations de couverture sont semi-perméables. La faible épaisseur de limon et la présence du toit de la nappe à faible profondeur entrainent une vulnérabilité importante des eaux souterraines. Une pollution peut migrer rapidement vers la nappe. Seule la présence du niveau argileux entre 25 et 30 m de profondeur, dont la continuité n’est pas assurée, pourrait permettre une préservation potentielle de la tranche aquifère la plus profonde.

3.4 SITES NON REFERENCES

Plusieurs décharges sont listées dans le rapport BURGEAP/Rst1004. Deux d’entre elles sont situées en amont hydraulique de la zone d’étude :  l’ancienne décharge municipale de Sélestat, située environ 2km au sud-ouest du captage AEP – en bordure de l’A35. Ouverte de 1950 à 1980 (environ), elle contiendrait des résidus, des déchets verts, voire peut-être des déchets d’activité ;  la décharge privée, aujourd’hui reconvertie en étang, d’une ancienne filature située au sud du Giessen, à plus de 3 km du captage AEP. Celle-ci contiendrait des déchets d’activité. Deux autres décharges sont situées à proximité de la zone d’étude, tout en apparaissant comme décalées par rapport à la position du captage AEP sur l’axe principal d’écoulement souterrain (cf. Figure 5). Les données concernant ces anciennes décharges, en particulier la nature des matériaux stockés et la qualité de l’eau, sont disparates. Des traces de PCE (0,2 à 5 µg/L) auraient été mesurées d’après le rapport BURGEAP/Rst 1004, mais celui-ci est imprécis concernant la désignation de la décharge (« sur la commune de Sélestat » d’après la p. 17, sur celle de l’échangeur autoroutier de l’A35 d’après la figure 4). Dans ce même rapport, des fiches descriptives de l’inventaire-diagnostic départemental des décharges brutes sont disponibles en annexe 11. Celles-ci contiennent assez peu d’informations valorisables pour l’étude actuelle, en dehors de l’épaisseur estimée d’ordures ou des objets visibles en surface. Le rapport CAR/I0325/A indique une concentration en PCE de l’ordre de 1,1 µg/L dans la décharge proche de l’A35.

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3.5 SITES BASIAS

Seuls 7 sites BASIAS sont référencés au nord du Giessen, la majorité d’entre eux occupent la zone industrielle au nord de Sélestat (cf. Figure 5). Dans cette dernière, 4 sites sont enregistrés comme ICPE (Installations Classées pour la Protection de l’Environnement) : les sociétés DARAMIC, SALM, WANZL et la carrière LEONHART (cf. Figure 5).

3.6 SITES BASOL

Les sites BASOL référencés sur les communes de Sélestat et Scherwiller ont été recherchés dans le cadre de cet appui. Les 3 sites BASOL les plus proches et potentiellement situés en amont hydraulique de la zone d’étude sont situés sur la commune de Sélestat (cf. Tableau 2 et Figure 5).

Nom Géoréférencement (L2E) (Code Coord. Coord. Activité Adresse Pollution Précision BASOL) X Y 25 rue production COV et Westrich, DARAMIC Adresse d'éléments de hydrocarbures 980491 2377260 Parc d'Activité (67.0017) (numéro) batteries pour (accident de Nord, voitures recyclage en 1982) Sélestat ancienne PCB SOCIETE filature 24 rue de la (renversement d'un SIMON Adresse accueillant 979684 2375903 filature, transformateur BIGART (rue) désormais de Sélestat contenant du (67.0077) multiples petits pyralène en 1994) entrepôts.

Hydrocarbures 9 route de (présence liée à TOTAL Adresse 979360 2374983 relais pétrolier , l'activité du site (67.0146) (numéro) Sélestat mais sans accident répertorié)

Tableau 2 - Description succincte des sites BASOL répertoriés à proximité de la zone d'étude (Source: BASOL) Suite à un arrêté préfectoral de 1994, le site de DARAMIC a fait l’objet d’une dépollution avec une extraction forcée des gaz (arrêtée en 1995) et un pompage des eaux souterraines de 80 m3/h suivi d’un traitement (toujours en cours – les eaux sont traitées puis rejetées dans le Giessen).

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Figure 5 - Emplacements des anciennes décharges, sites BASIAS et sites BASOL par rapport aux cartes piézométriques de 1991 et 2009 (Sources: BURGEAP, BASIAS, BASOL, BRGM, IGN et APRONA)

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3.7 DONNEES BANCARISEES SOUS ADES

Un export ADES des piézomètres présentant des analyses en tétra- et du trichloroéthylène sur le secteur d’étude Scherwiller - Sélestat a été réalisé dans le cadre de cet appui. Ces données d’analyse ont été bancarisées dans le cadre des campagnes de bancarisation des données ICSP menées par la DREAL Alsace, le BRGM et l’Agence de l’Eau Rhin-Meuse, depuis le début des années 1990. Les données disponibles ont été exploitées et interprétées dans le cadre de cette étude, afin de déterminer les maximums de concentration en tétra-et trichloréthylène mesurés sur la période de bancarisation disponible. Les résultats de cette analyse sont récapitulés dans les paragraphes 3.7.1 et 3.7.2. Il est important de noter que ces données ne représentent pas les valeurs mesurées à un moment donné, mais sur une échelle de temps de 18 ans (1995 – 2013). Néanmoins, elles contribuent donc potentiellement à la localisation des sources éventuelles de pollution.

3.7.1 Interprétation des teneurs en COHV pour le captage AEP 03077X0097

Au niveau du captage AEP de Scherwiller, la concentration en tétra- et trichloroéthylène ont suivi deux évolutions différentes (cf. Figure 6 et Figure 7). Pour rappel, les seuils de détection/quantification pour ces deux molécules sont respectivement de l’ordre de 0,2 µg/L et 0,3 µg/L. La CMA (concentration maximale admissible) est de 10 µg/L pour la somme de ces deux composés. La concentration en PCE au captage 03077X0097 a connu une croissance quasi-continue (avec cependant une stabilisation entre 2004 et 2006) depuis sa détection. Deux phases de croissance plus importantes semblent apparaître : l’une durant le 1er semestre 2003, l’autre durant l’année 2009. Le maximum atteint est de 88 µg/L en mai 2012. L’analyse de cette tendance mériterait d’être approfondie notamment en évaluant : 1) d’éventuelles évolutions du débit d’exploitation de l’AEP, 2) les flux massiques extraits en PCE en fonction du temps, 3) si, notamment depuis 2007, un changement de conditions hydrologiques ou hydrogéologiques locales (pluviométrie, nouveaux pompages, etc.) aurait permis d’accroître l’émission à la source et/ou de modifier l’orientation du panache par rapport à l’AEP. Quant au TCE, sa concentration affiche rarement des valeurs supérieures ou égales à 1 µg/L. En excluant les pics « solitaires » (2004 et 2009) présents sur le graphique, la concentration atteint un maximum de 0,8 µg/L lors du premier semestre 2003. La dégradation du tétrachloroéthylène en trichloroéthylène est vraisemblablement négligeable dans les conditions des aquifères concernés. Les valeurs en dichloroéthylène et en chlorure de vinyle (considérés comme de possibles produits de dégradation) mesurées sur le même captage restent inférieures au seuil de détection (non reprises dans ce rapport). En 2003, le rapport CAR/I0325/A indiquait que la valeur d’automne 2001 serait synonyme d’un premier pic de pollution (le second étant celui de 2003). En prenant plusieurs hypothèses, les auteurs du rapport en venaient à avancer que, en 2003, le pic de pollution était atteint, ou était sur le point de l’être, et que cette pollution était peut-être issue du déversement de 300 à 400 kg de PCE, répartie en plusieurs endroits (conditionnement de 30 kg par exemple).

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Limite CMA

Limite de détection

Figure 6 - Concentration (µg/L) en tétrachloroéthylène au niveau du captage AEP 03077X0097 de Scherwiller (Source: ADES)

Limite de détection

Figure 7 – Concentration (µg/L) en trichloroéthylène au niveau du captage AEP 03077X0097 de Scherwiller (Source: ADES)

3.7.2 Cartographie des concentrations en PCE sur la zone d’étude

Dans ADES, des mesures de PCE sont disponibles pour la période 1995-2013. Une partie conséquente d’entre elles correspond aux analyses faites sur le puits 03077X0097 (captage de Scherwiller, cf. Figure 6).

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Figure 8 - Moyenne des concentrations en PCE [ en µg/L - supérieures au seuil de détection/quantification] pour plusieurs forages de la zone d’étude (Sources: ADES, BRGM et IGN)

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Les autres ouvrages souterrains ayant fait l’objet d’un suivi régulier sont concentrés dans une zone industrielle, située dans la partie occidentale de Sélestat (cf. Figure 8 – Remarque : seules les valeurs dépassant le seuil de détection ont été retenues, et sont reportées sous forme d’une moyenne). Les cartes piézométriques de 1991 et 2009 laissent penser que les écoulements souterrains provenant de cette zone ne peuvent atteindre l’aire d’alimentation du captage AEP 03077X0097. Dans la zone d’étude, 4 sites (en dehors du captage AEP 03077X0097) présentant des moyennes comprises entre 0,2 et 10 µg/L sont répertoriés. Celui le plus à l’ouest correspond à un piézomètre de contrôle de la pollution sur un site industriel d’enrobage. Les 3 autres sont concentrés dans et autour de la zone industrielle Nord de Sélestat (WANZL, carrière LEOHNART et un forage de particulier). Le peu de mesures bancarisées ne permet pas d’évaluer ou de préciser l’(les) origine(s) possible(s) de la pollution en COHV.

3.8 DONNEES DE L’APRONA (INVENTAIRE 2003-2009)

L’APRONA a mis à disposition du BRGM les résultats des teneurs en PCE et TCE mesurées lors des inventaires 2003 et 2009. Ces données sont synthétisées dans le Tableau 3 et sur la Figure 9 ; le forage 03077X0051 est le point le plus au sud. La profondeur est issue des informations disponibles en BSS.

Date de PCE TCE Profondeur de Indice BSS Commune prélèvement (µg/L) (µg/L) l’ouvrage (m) 03077X0097/F Scherwiller 11/09/2003 14,4 - 46,5 03078X0042/F Sélestat 31/08/2009 4,5 - 11 02/10/2003 59,1 0,4 03077X0051/F Sélestat - 23/09/2009 38 -

Tableau 3- Concentrations en PCE et TCE par l’APRONA dans 3 forages de la zone d’étude pour les années 2003 et 2009 (Source: APRONA)

Aucune donnée sur le trichloréthylène ne figure pour 2009. Les principales observations et interprétations de ces valeurs sont les suivantes :  les valeurs mesurées en tétrachloroéthylène sont supérieures à elles seules à la valeur de CMA pour les deux ouvrages 03077X0097/F et 03077X0051/F. Ces valeurs sont cohérentes avec celles relevées sur le terrain par les bureaux d’étude, et celles disponibles dans ADES ;  les concentrations relevées au forage 03077X0051/F sont en diminution entre les années 2003 et 2009 ;  le piézomètre 03078X0042/F au nord-est de la gravière, bien que moindrement touché par la contamination, n’apparaît pas dans les autres documents consultés. Un rapport BRGM (Schomburgk et al., 2008) exploite également des valeurs relevées en 1996/1997 et 2003 par l’APRONA en proposant une définition du panache de pollution (cf. Annexe 3). Le contour du panache a été défini à partir de cartes piézométriques calculées avec un modèle hydrodynamique régional construit par l’APRONA. Le tracé indique que la pollution serait à rechercher plus au sud-ouest, vers le centre de Scherwiller.

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Figure 9 - Cartographie des mesures en PCE (en µg/L) effectuées par l'APRONA en 2003 et 2009 (Sources: APRONA, BRGM et IGN)

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3.9 RECHERCHE DE LA SOURCE DE POLLUTION

Remarque : En raison de la transmission de documents incomplets (rapports Rst1132 et 1548), l’analyse des méthodes de recherche de pollution utilisées par le BURGEAP n’a pu être réalisée correctement dans le cadre de ce rapport. Deux bureaux d’étude ont travaillé l’origine de la pollution en COHV : le CAR (Centre d’Analyse et de Recherche) jusqu’en 2003, puis le BURGEAP. Le site de DARAMIC étant connu pour une pollution en COV, les recherches se sont rapidement dirigées vers la zone industrielle Nord de Sélestat.

3.9.1 Prélèvements sur le terrain

Durant l’année 2003, 2 campagnes d’échantillonnage ont été menées par le CAR. Aucune information n’est actuellement disponible pour connaitre le mode de prélèvement (débit et durée du pompage, matériel utilisé…) et d’analyse (conservation, délai de traitement, seuil de détection…). Les prélèvements ont été réalisés dans une zone rectangulaire étroite d’axe nord- sud. Ces campagnes ont permis les constats suivants :  la zone au sud du Giessen serait exempte de pollution au PCE ;  la zone ouest du captage AEP (dans un rayon de 500-750 m autour de celui-ci) serait exempte de pollution au PCE ;  des concentrations de plus de 50µg/L ont été retrouvées le long d’un axe passant par la zone industrielle et le captage AEP ;  des concentrations comprises entre 50 et 70 µg/L ont été mesurées au droit des sites de DARAMIC et SALM (plus faibles vers WANZL)  des concentrations supérieures à 100 µg/L ont été découvertes dans la partie sud de la zone industrielle (non loin du lieu-dit Maison rouge). Il est à noter que, à ce stade de l’étude, les zones ouest et est (en dehors de la zone de recherche du CAR) restaient insuffisamment investiguées. En juillet et octobre 2006, des prélèvements ont été effectués par le BURGEAP (rapport BURGEAP/ Rst1132– cf. Figure 10). Le document fourni étant incomplet, il est difficile de connaître les normes d’analyse (figurant probablement en annexe 6 du rapport Rst1132) ; le corps du rapport indique que les prélèvements ont été effectués à l’aide « des pompes en place, d’une pompe agricole de surface et d’une pompe de prélèvement de type Whale » sans préciser les modalités de pompage. La profondeur et le type d’équipement (tubage, crépine…) des piézomètres récemment dans le cadre de l’étude sont indiquées. Les profondeurs varient entre 13 et 25 m ; les crépines ont une longueur comprise entre 8 et 23 m. L’échantillonnage se concentre sur la zone ouest et l’axe sud-nord. Il en ressort que :  La zone ouest depuis le lieu-dit Maison rouge jusqu’au lieu-dit Brenden (800 m à l’ouest du captage AEP) serait exempte de pollution au PCE ;  des concentrations supérieures à 100 µg/L ont été retrouvées au nord de la zone industrielle et à proximité de l’A35. Ces analyses ont été partiellement complétées par des analyses en août 2008 et en avril 2009 (rapport BURGEA/Rst1548 – cf. Figure 11). Les conditions de réalisation des prélèvements et des analyses n’y sont pas décrites en détails : seules les profondeurs (comprises entre 8 et 10,5 m) et la position des crépines (5 à 7 m de longueur) des nouveaux piézomètres sur la commune d’Ebersheim y figurent. A partir des résultats, il apparaît que :

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Examen de la pollution en tétrachloréthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller et de Sélestat (67)

 La zone à l’est et au nord-est du captage AEP (aval du captage AEP 030077X0097) serait exempte de pollution au PCE ;  La zone au sud-est du captage (rive gauche de l’Aubach) serait exempte de pollution en PCE. Suite à la réalisation de nouveaux piézomètres, de nouvelles analyses ont été décidées en août et décembre et 2010 (cf. Figure 11). L’annexe 6 du rapport indique que les analyses ont été effectuées suivant la norme ISO 10 301 (procédé Headspace/GC/MS). De nouveaux piézomètres ont été réalisés dans la zone industrielle, leur profondeur est comprise entre 11 et 23 m (les coupes techniques étant disponibles en annexe). Les résultats montrent que :  La zone au sud-est du captage (de part et d’autre de l’Aubach) serait exempte de pollution en PCE ;  Le bord sud-ouest de la zone industrielle serait exempte de pollution en PCE ;  L’existence de plusieurs sources serait confirmée : Malgré les données collectées, il est difficile d’identifier des tendances (baisse, stabilité, hausse) des concentrations en tétrachloroéthylène dans les forages ayant fait l’objet de plusieurs prélèvements.

3.9.2 Influence de la profondeur

En 2006, le BURGEAP a fait forer 2 piézomètres Pz262 et Pz349, situés sur l’axe principal supposé du panache (cf. Figure 10), sur lesquels un échantillonnage passif du PCE et du TCE a été réalisé. D’une profondeur de 25 m, ils mettent en évidence :  L’absence de stratification verticale des teneurs en PCE et TCE u pour le Pz262 (interprétée comme le résultat d’une homogénéisation lié au pompage de DARAMIC) ;  L’existence d’une couche plus riche en PCE à partir de 20 m de profondeur au droit du Pz349. En 2010, le BURGEAP a relevé une concentration en PCE plus forte dans le forage Pz526 (119µg/L) que dans le forage Pz228 (83 µg/L) alors que leur profondeur respective est de 22 et 10,8 m.

3.9.3 Enquête auprès des entreprises

Une première enquête a été réalisée en 2003 par le CAR (rapport I0325/A) et la gendarmerie de Sélestat (instruction suite à un dépôt de plainte). Après une sélection, 10 sites ont été visités : seule l’entreprise Selest’Pressing utilise du tétrachloroéthylène, mais l’inspection n’a révélé aucun indice de fuite. Une seconde enquête a été conduite en 2006 par le BURGEAP (rapport Rst1004). 40 sites ont été répertoriés, classés en 2 catégories : « utilisation très probable de solvants organochlorés volatils » (11) et « susceptible d’utiliser des solvants organochlorés volatils » (29), sans préciser ’il s’agit de perchloréthylène ou d’autres solvants chlorés. Les 10 sites de la première enquête sont répartis dans ces 2 catégories. Un nombre important d’entreprises identifiées sont situées dans la zone industrielle nord de Sélestat (annexe 10 du rapport Rst1004). L’enquête du BURGEAP a été reprise en 2009 (rapport Rst1548), incluant une nouvelle visite de terrain et l’envoi d’un questionnaire établi avec l’aide du SDEA et de la DDASS. Sur 50 entreprises sollicitées, seules 25 d’entre elles ont répondu. La foration de nouveaux piézomètres et l’analyse de leurs eaux ont été menées parallèlement, permettant de limiter la liste des entreprises considérées comme « sources potentielles » au nombre de 7. Ces entreprises sont : les Services

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Examen de la pollution en tétrachloréthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller et de Sélestat (67) municipaux de Sélestat, le garage Freiss, le garage Citroën, la Menuiserie Taglan, Pneumax, Heidrich, et l’ancienne occupation sur le site de Techlase (cf. Figure 12).

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Examen de la pollution en tétrachloréthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller

et de Sélestat (67)

Pz349 Pz262

Figure 10 - Concentrations en PCE suite aux prélèvements réalisés en 2006 par le BURGEAP (Source: BURGEAP/Rst1132)

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Figure 11 - Concentrations en PCE suite aux prélèvements réalisés par le BURGEAP entre 2008 et 2010 (Source: BURGEAP/RMNNE0011)

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Examen de la pollution en tétrachloréthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller et de Sélestat (67)

Figure 12 - Répartition des concentrations mesurées au droit de la zone industrielle de Sélestat (Source: BURGEAP/Rst1132)

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3.10 MODELISATION

Remarque : En raison de la transmission de documents incomplets (rapports Rst1132 et 1548), l’analyse du modèle hydrodynamique permettant de simuler la propagation du panache de pollution depuis la zone industrielle Nord de Sélestat, ainsi que le test des scénarios d’exploitation future entre les captages de Scherwiller et d’Ebersheim, n’ont pu être réalisés correctement dans le cadre de ce rapport. Le modèle hydrodynamique a été réalisé avec le logiciel Visual MODFLOW 4.1 et du module MT3DMS (version 4.5) pour le transport en solution. D’une surface proche de 52 km², le modèle utilisé est bi-couche, bien que les différentes conductivités hydrauliques utilisées pour le calage (5.10-5 m/s dans le piémont et 3.10-3 m/s en plaine) soient les mêmes pour les 2 couches. Le BURGEAP a choisi de simuler une piézométrie « moyenne » à partir des cartes du CAR et des relevés du BURGEAP (en particulier pour la zone d’Ebersheim). L’écart entre la piézométrie observée sur le terrain et la piézométrie générée par le modèle est compris entre -2,14 et +3,09 m. Le BURGEAP indique que l’écart sur la « majorité des points suivis » est inférieur à 30 cm (en valeur absolue). Or, avec les données fournies (tableau 10), la moyenne des écarts est de 54 cm, et seulement 16 écarts sur 27 sont compris entre -30 et +30 cm. Une différence liée à la taille des mailles, entre autres raisons, pourrait être invoquée pour expliquer cette différence. Ces écarts soulignent des défauts dans le calage du modèle et fragilisent la fiabilité des conclusions issues des simulations. Pour simuler la pollution, une concentration en PCE de 3 mg/L est imposée au niveau des sources. Sans clairement les identifier, le texte renverrait au § 5.2 du dernier rapport BURGEAP dans lequel 3 sources sont décrites : 1 au droit du garage Citroën ou de la société Freiss, 1 sur le site des ateliers municipaux et 1 dans la partie nord de la zone industrielle. En 2011, le modèle a été repris pour inclure le captage d’Ebersheim (03078X0075/F2), passant ainsi à une surface de 56 km². Les résultats de cette nouvelle modélisation montrent que, quel que soit le scénario retenu, le captage d’Ebersheim ne serait pas impacté par l’actuelle pollution en PCE/TCE en provenance de Scherwiller (le panache passant à l’ouest de celui-ci). Selon la même étude, le scénario le plus intéressant pour limiter l’extension de la pollution vers l’aval correspondrait à une augmentation du pompage de la société DARAMIC.

4. Diagnostic et recommandations

Sur la demande de la DREAL Alsace, un Appui à la Police des Eaux Souterraines a été réalisé par le BRGM afin d’examiner une pollution des eaux souterraines au tétrachloroéthylène constatée dans le Haut-Rhin, sur les communes de Scherwiller et de Sélestat (zone nord). La mission du BRGM a consisté dans un premier temps à interpréter les résultats d’analyse des inventaires transfrontaliers 2003 et 2009 en tétrachloréthène et trichloréthylène mis à disposition par l’APRONA, puis dans un second temps, de compléter ces observations par une recherche bibliographique des pollutions en PCE et TCE déjà détectées sur le secteur, ainsi qu’une recherche de données dans la Banque de données du Sous-Sol (BSS), ADES et BASOL. Ces recherches ont fait l’objet d’une interprétation et d’une synthèse, pour être ensuite confrontées aux études antérieures réalisées par le CAR et le BURGEAP pour le compte du SDEA. Une partie des documents fournis comportent des pièces manquantes et/ou sont des versions temporaires. La liste des principaux constats doit donc être considérée comme sujette à une validation ultérieure :

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 Malgré des obligations légales, une partie des forages recensés n’a pas été déclarée ou enregistrée en BSS. Toutes les données chimiques n’ont pas été centralisées dans la banque ADES ;  Des valeurs supérieures à la CMA pour le tétrachloroéthylène (PCE) ont été relevées sur différents secteurs des communes de Scherwiller et de Sélestat depuis 2001. Au niveau du captage AEP 03077X0097/F, la concentration en PCE a augmenté jusqu’à dépasser 80 µg/L. La pollution en trichloroéthylène (TCE) est nettement moins significative (< 5 µg/L). Le régime hydraulique libre de la nappe limite la dégradation du PCE et du TCE.  Au regard des données géologiques, l’existence de lentilles argileuses compartimentant l’aquifère apparaît comme possible, mais non confirmée.  La piézométrie peut encore présenter des zones d’incertitude : la carte piézométrique de 2006 fait apparaître que le gradient hydraulique au sud-ouest de la zone industrielle est plus fort (≈7‰) que sur tout le reste de la zone d’étude (≈1‰). Le nivellement de plusieurs piézomètres semble insuffisant, les profondeurs des ouvrages sont parfois inconnues, et l’indication de la profondeur d’installation des crépines est souvent manquante… En l’état, il est difficile de proposer un modèle conceptuel cohérent afin de comprendre les flux souterrains : la distinction entre les eaux - probablement proches de la surface - provenant de la nappe du Giessen (orientée E-O) et celles - peut-être plus profondes - de la nappe d’Alsace (orientée S-N) apparaît comme insuffisamment étudiée. Pour les mêmes raisons, il est possible que les concentrations relevées dans certains forages ne soient pas représentatives de la pollution sur toute la colonne aquifère au droit de ces forages ;  L’interprétation d’un marquage chimique de la partie superficielle de l’aquifère au niveau du forage AEP 03077X0097 repose sur un essai de mai 2003. Celui-ci a été réalisé sans packer (système permettant d’isoler différentes parties d’un forage) et en plaçant une des pompes dans le tubage – l’autre en face des crépines. Ce test n’est pas renforcé par des essais au moulinet (qui auraient permis de mettre en évidence les contributions des différentes parties de l’aquifère) ou par des mesures chimiques voire isotopiques plus poussées (qui auraient pu éventuellement distinguer une contribution de la nappe du Giessen par rapport à celle de la nappe d’Alsace).  Le panache de pollution principal semble avoir une forme relativement étroite (<500 m de large) et d’axe presque parfaitement S-N correspondant au sens d’écoulement global de la nappe du Rhin : le panache pourrait se trouver par conséquent dans une partie de la nappe peu ou pas influencée par le déversement de la nappe du Giessen, c’est-à-dire plutôt en profondeur. Il ferait partie de la partie la plus australe de l’aire d’alimentation du captage AEP 03077X0097 de Scherwiller. Néanmoins, il est nécessaire de rappeler la présence de PCE sur la décharge proche de l’A35 (inclus dans l’aire d’alimentation du captage de Scherwiller) et au nord-est de la sablière LEONHART (son appartenance à l’aire d’alimentation du captage d’Ebersheim devrait être étudiée) ;  L’enquête de terrain, puis par courrier, auprès des entreprises susceptibles d’être situées au droit d’une source de pollution, a eu un taux de réponse de 50%.  Plusieurs sources de pollution (au minimum 2, probablement 3) semblent avoir été mises en évidence par le bureau d’étude BURGEAP, confirmant les résultats obtenus par le CAR en 2003. Les sources identifiées sont situées dans la zone industrielle nord, où les ouvrages des ateliers municipaux de Sélestat, et de différentes installations dans le périmètre de cette zone, tant au nord qu’au sud (Daramic, Cuisines Schmidt…) présentent des concentrations dépassant 50 voire 100 µg/L. Avec moins de certitude, une troisième source concernerait le secteur du garage Citroën ou de la société Freiss. La présence de PCE dans les ouvrages de ces sociétés ne préjuge pas de leurs responsabilités concernant l’origine des pollutions constatées.

Afin de répondre à des objectifs d’amélioration 1) de la qualité des milieux et 2) de la connaissance des impacts sur la ressource en eau et ses usages, le BRGM recommande

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Examen de la pollution en tétrachloréthylène constatée dans les eaux souterraines du secteur de Scherwiller et de Sélestat (67) d’engager des actions graduées et progressives permettant d’apporter des éléments tangibles d’expertise et de connaissance concernant la nature et l’origine du marquage de la nappe phréatique d’Alsace au PCE et TCE sur les communes de Sélestat et Scherwiller. Il s’agit en particulier :

 d’identifier si le marquage résulte d’une ou plusieurs émissions polluantes en nappe,

 le cas échéant, de préciser la nature, la typologie et les positions plausibles de ces sources.

Concernant les propositions faites par le bureau d’étude BURGEAP (rapport REMNNE00111-02), le BRGM souhaite indiquer que :

a. A moins que le panache de pollution soit réellement limité à la partie supérieure de l’aquifère, ce qui ne semble pas être certain au vu des documents examinés, l’arrêt du pompage de surface au niveau du captage 03077X0097 devrait avoir théoriquement peu d’influence sur la concentration en PCE/TCE puisque ces composés sont plus denses que l’eau. Une augmentation du débit au niveau du forage 03077X0133 semblerait plus approprié ;

b. La réalisation de mesures isotopiques sur des produits de dégradation du PCE (TCE, cis-DCE, trans-DCE, etc) semblent peu pertinentes au regard des faibles concentrations mesurées et des conditions environnementales défavorables à l’installation d’une biodégradation significative des produits (nappe libre, milieu oxique, etc) ;

Remarque : Les effets densitaires dans le transport des composés organiques ne jouent qu’en présence de phase organique dense et, en moindre mesure aux très fortes concentrations ; ces deux conditions ne semblent pas être réunies dans le proche environnement de l’AEP. Aussi l’argumentaire avancé par le BURGEAP en a) n’est pas recevable.

Le BRGM propose ainsi l’approche suivante :

1) ETAPE 1 : consolidation des connaissances actuelles par la collecte et l’exploitation de données existantes (géologie, hydrogéologie, réseau d’accès à la nappe accessible, historique, etc.) et par la spatialisation 3D des résultats analytiques disponibles. A l’issue de cette étape un premier bilan sera dressé. Ce Bilan 1 se concrétisera par la consolidation d’un programme d’investigations ciblées sur les ouvrages existants. L’ensemble des informations collectées pour le compte du SDEA devra être versée dans des bases de données (profondeur du forage, profondeur des crépines, analyses chimiques...) ;

2) ETAPE 2 : création (ou approfondissement) de 3 piézomètres exploratoires jusqu’à 45 m de profondeur. Ces ouvrages seront forés par carottage par battage à sec afin de reconnaître finement la géologie. Le diamètre et la profondeur de ces ouvrages permettent la réalisation d’essais dynamiques originaux visant à explorer sur la hauteur captée la qualité des eaux souterraines. Un premier échantillonnage exploratoire à différentes profondeurs pourrait en préliminaire être effectué durant la foration (pour valider ou non la stratification chimique des eaux et justifier ou pas les essais multiniveaux),

3) ETAPE 3 : campagne d’échantillonnage et d’analyses au laboratoire sur un ensemble de 15 points accessibles ; mise en œuvre de protocoles standards normalisés pour l’échantillonnage des eaux souterraines. Le PCE et le TCE seront analysés, ainsi que différents isotopes afin d’étudier l’âge et l’origine des eaux.

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4) ETAPE 4 : mise en œuvre d’un échantillonnage SPT (« Separative Pumping Technique ») sur, au moins, 3 ouvrages afin d’explorer la stratification chimique des eaux selon une approche multiniveaux. Ce dispositif permet d’identifier si la distribution en COHV en nappe est homogène (1 seul panache monosource) ou hétérogène (1 panache multisource ou plusieurs panaches multisources). L’échantillonnage sélectif multiniveaux est contrôlé on-site par un laboratoire mobile réalisant l’analyse ou la mesure en temps réel des COHV, T°C, conductivité électrique, pH, redox, O2 dissous, sur les 3 pompes immergées. Ces essais sont couplés à la mesure des débits entrant par hydrométrie, permettant ainsi d’évaluer non seulement la stratification des concentrations mais aussi des masses en COHV véhiculées en nappe offrant une vision dynamique des pollutions. A l’issue de ces investigations, un nouveau bilan (Bilan 3) de la qualité des eaux sera dressé avec une vision 3D de la distribution des COHV dans l’axe pollué : cartographies des COHV en 1) concentrations / 2) signatures chimiques (fractions des différents COHV dans les COHV totaux) / 3) au regard de l’hydrodynamique locale en flux massique transitant en nappe (kg PCE, TCE / jour au niveau des points d’observation. Au terme de l’étape 4, le BRGM pourra proposer :

 une synthèse des connaissances portant sur l’hydrogéologie locale (mélange entre la nappe d’Alsace et celle du Giessen) et la caractérisation de l'émission (mono- ou polysource),

 une discussion circonstanciée sur les incertitudes sur le caractère conclusif ou non de l’étude eu égard à la localisation de la ou des sources,

 des recommandations en termes de connaissance et gestion de ces pollutions.

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5. Bibliographie

BRGM (1997) – Recherche des principales causes de pollution accidentelle des eaux souterraines par les solvants chlorés. Rapport BRGM R 39786. DELPORTE B. (1993) Déplacement du champ captant de la ville de Sélestat (67). Rapport BRGM/RR-36959-FR, 10 p. KREBS G. (1992) Impact hydrogéologique du projet de contournement de Chatenois (67). BRGM/RR-35180-FR, 18 p. SCHOMBURGK S., GUIGNAT S. (2008) – Suivi de la qualité des eaux souterraines en aval des installations classées situées en Alsace (67 et 68). Bancarisation des analyses 2006. Rapport final BRGM/RP-56565-FR SCHOMBURGK S., ELSASS P., NOEL Y., GUIGNAT S. (2008) Exploitation de l'Inventaire historique régional Alsace des anciens sites industriels et activités de service. Risques d'impact sur les eaux souterraines. Rapport final. BRGM/RP-56102-FR, 216 p. SIMLER L. (1976) Nappe phréatique de la plaine d'Alsace, secteur Strasbourg Sélestat. Piézométrie 1975. Rapport BRGM/76-SGN-324-SGAL URBAN S., (2010) - Suivi de la qualité des eaux souterraines en aval des Installations Classées situées en Alsace (67 et 68). Bancarisation des analyses 2007. Rapport final BRGM/RP-58191-FR URBAN S., GUIGNAT S. (2010) - Suivi de la qualité des eaux souterraines en aval des Installations Classées situées en Alsace (67 et 68). Bancarisation des analyses 2008. Rapport final BRGM/RP-59121-FR

Sites internet : ADES, Portail national d'Accès aux Données sur les Eaux Souterraines, site producteur, http://www.ades.eaufrance.fr/ BASOL, Base de données Basol sur les sites et sols pollués ou potentiellement pollués appelant une action des pouvoirs publics, à titre préventif ou curatif, http://basol.ecologie.gouv.fr/ InfoTerre, portail géomatique d’accès aux données géoscientifiques du BRGM (BSS), http://infoterre.brgm.fr/

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6. Annexes

ANNEXE 1 : fiche navette

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ANNEXE 2 : coupes géologiques du captage AEP 03077X0097, du forage géothermique 03077X0548/PAC et du multi-piézomètre 03078X049, implantés respectivement sur les communes de Scherwiller et d’Ebersheim.

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ANNEXE 3 : Extrait du rapport BRGM RP-56102-FR

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Centre scientifique et technique BRGM Direction Régionale Alsace 3, avenue Claude-Guillemin Parc Activités Porte Sud BP 36009 Rue Pont du Péage – Bâtiment H1 45060 Orléans Cedex 2 - France 67118 Tel. 02 38 64 34 34 Tél.: 03 88 77 48 90