Les Violences Sexuelles Dans Les Conflits Du Monde Arabe : Objectifs, Conséquences Et Réponses À Apporter À Une Arme De Guerre Martin Chave
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Les violences sexuelles dans les conflits du monde arabe : objectifs, conséquences et réponses à apporter à une arme de guerre Martin Chave To cite this version: Martin Chave. Les violences sexuelles dans les conflits du monde arabe : objectifs, conséquences et réponses à apporter à une arme de guerre. Science politique. 2018. dumas-02530281 HAL Id: dumas-02530281 https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02530281 Submitted on 2 Apr 2020 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. Université de Grenoble-Alpes Sciences Po Grenoble Master « Méditerranée et Moyen-Orient » Martin CHAVE Les violences sexuelles dans les conflits du monde arabe : Objectifs, conséquences et réponses à apporter à une arme de guerre Mémoire professionnel réalisé sous la codirection d’Imad KHILLO, Maître de Conférences à Sciences Po Grenoble et de Céline BARDET, Fondatrice et Présidente de We Are Not Weapons of War Année 2017-2018 Université de Grenoble-Alpes Sciences Po Grenoble Master « Méditerranée et Moyen-Orient » Martin CHAVE Les violences sexuelles dans les conflits du monde arabe : Objectifs, conséquences et réponses à apporter à une arme de guerre Mémoire professionnel réalisé sous la codirection d’Imad KHILLO, Maître de Conférences à Sciences Po Grenoble et de Céline BARDET, Fondatrice et Présidente de We Are Not Weapons of War Année 2017-2018 Sommaire : INTRODUCTION : _____________________________________________________ - 6 - I) Les violences sexuelles en conflit, une stratégie pensée et planifiée : étude des situations dans le monde arabe ________________________________________ - 10 - A) Le viol, comme instrument de répression politique et de terreur en Syrie et en Libye __ - 10 - 1. Répression de l’opposition et assise du pouvoir : le viol en Syrie _________________________________ - 10 - 2. Outil de vengeance et d’effacement de l’opposition à Mouammar Kadhafi : le viol en Libye __________ - 29 - 3. Un outil de répression et de terreur très répandu : autres cas d’utilisation de la violence sexuelle dans le monde arabe ________________________________________________________________________________ - 39 - B) Le viol en Irak : outil du jihad et instrumentalisation de l’islam ____________________ - 42 - C) L’arme de tous contre tous : violences sexuelles et détention au Yémen _____________ - 53 - II) Conséquences des violences sexuelles dans les sociétés musulmanes et réponses juridiques __________________________________________________________ - 62 - 1. Sexualité, viol et islam : les conséquences des violences sexuelles dans les sociétés musulmanes ______ - 63 - 2. Violences sexuelles et droit international : les réponses juridiques au viol de guerre ________________ - 72 - CONCLUSION _______________________________________________________ - 83 - ANNEXES : _________________________________________________________ - 86 - Sources et bibliographie : _____________________________________________ - 90 - Liste des sigles, abréviations et acronymes : _____________________________ - 101 - - 5 - INTRODUCTION : « Le viol comme arme de guerre, c’est le crime parfait »1. C’est par ces mots que Céline Bardet parle des violences sexuelles en conflit et du phénomène qu’est le viol de guerre. C’est convaincue par ces mots qu’elle crée également son ONG, We Are Not Weapons of War, en 2014. Les violences sexuelles accompagnent les conflits depuis longtemps et partout dans le monde. Dans les conflits actuels que compte le monde arabe, c’est un phénomène qui est bien visible également. Phénomène et fléau qui remonte en effet aux plus jeunes âges de l’histoire2. Déjà dans la mythologie romaine, le rapt des Sabines évoquait cet enlèvement des jeunes filles de régions voisines par des jeunes hommes de Rome qui souhaitaient les épouser. Sans refaire toute l’histoire, l’on peut dire que de nombreux conflits ont vu le viol comme une variable incontournable des combats. Pendant très longtemps, les femmes violées étaient vues comme un « butin de guerre » légitime, comme une récompense des combattants. Presque comme une justification, on parlait du « repos du guerrier » pour souligner les besoins naturels des combattants qui méritaient d’être récompensés pour leur bravoure. Dès lors, on a longtemps considéré le viol comme une variable inévitable de la guerre, comme un phénomène purement contingent. Si l’on s’intéresse aux périodes plus proches de nous, on remarque que cette variable ne disparaît pas. Les terribles viols des femmes chinoises durant le massacre de Nankin (1937-1938) nous le rappellent tristement, les soldats Japonais abusant de leurs victimes, avant de les tuer. Durant la Seconde Guerre Mondiale, plusieurs phénomènes sont particulièrement révélateurs. L’Italie se rappelle toujours des crimes de Ciociarie d’avril à juin 1944, dans les régions du Lathium, de la Toscane et de la Ciociarie : les corps expéditionnaires français, composés de soldats algériens, marocains, tunisiens et sénégalais avaient violé et massacré en masse les populations de ces régions. Du côté asiatique, le terme de « femmes de réconfort » correspondait au système de prostitution mis en place pour assouvir les besoins des soldats japonais durant la guerre, avec une exploitation de femmes japonaises, chinoises ou encore coréennes. Ce système ressemble en partie aux « BMC », les « Bordels Militaires de Campagne » de l’armée française, déployés en Indochine ou en Algérie par exemple. Un BMC existait d’ailleurs toujours à Djibouti en 2003. L’Allemagne nazie avait quant à elle mis en place un système déjà organisé de naissances : les Lebensborn étaient ces fameuses « maisons à bébés » qui voulaient permettre de multiplier les individus de la race aryenne, dans une campagne de purification des races. Des soldats allemands triés et choisis pour leur physique y venaient pour avoir des relations 1 « Je ne suis pas une arme de guerre. Et vous ? – Céline Bardet », TEDx Paris, Théâtre du Châtelet, 05/10/2014, Disponible sur <www.youtube.com> 2 BRANCHE Raphaëlle, VIRGILI Fabrice, Viols en temps de guerre, Payot, 2013 - 6 - avec des jeunes femmes elles aussi choisies en fonction de leur physique. Si certaines d’entre elles étaient de ferventes militantes du nazisme, d’autres furent contraintes et forcées de donner naissance dans ces centres. On peut donc bien parler ici de viol, avec un aspect purement ethnique. L’Allemagne elle-même souffrit en outre de nombreux viols lors de l’entrée des troupes alliés dans le pays, et en particulier à Berlin. Episode en partie oublié de l’histoire, il convient ici de rappeler que les troupes américaines, françaises et britanniques se sont livrées à des viols sur les civiles allemandes3. Ces- dernières ont également beaucoup souffert des offensives de l’Armée russe : on estime que 100 000 Berlinoises auraient été violées4. Il s’agissait là d’actes de vengeance et d’opportunisme qui profitait d’un chaos général dans Berlin, et d’un droit de la guerre absolument absent. On pourrait enfin mentionner la guerre du Vietnam où les viols furent aussi nombreux. Néanmoins, un tournant majeur apparaît à partir des années -90. En effet, les cas de violences sexuelles mentionnées jusqu’ici sont de l’ordre de l’opportunisme et lié à l’anarchie des normes dans un contexte de conflit. Cela n’enlève absolument rien au caractère horrible de ces actes, et ce papier ne tâchera jamais de faire de classement des horreurs perpétrées. Mais en termes de compréhension de ces actes, il semble que ces-derniers étaient dus au chaos de la guerre, et en étaient une variable contingente. Si cette lecture du viol comme un « dommage collatéral » ou comme un « à côté » de la guerre peut semblait juste pour les conflits mentionnés jusqu’ici, les choses changent dans les années - 90. Dans les Balkans, le viol devient une arme stratégique. Il est dès lors pensé, réfléchi, organisé et planifié dans un objectif précis5. Il est massivement utilisé par les soldats Serbes pour terroriser les soldats Bosniaques et assoir leur pouvoir. Des ordres clairs ont été donnés dans ce conflit, et une véritable logique entourait ces actes. Des campagnes de viols ont par ailleurs été ordonnées dans des objectifs ethniques. Le massacre de Srebrenica ou la mise en place de camps de viols à Foca témoignent d’une volonté d’épuration ethnique des Serbes sur les Bosniaques, minorité musulmane de Bosnie6. De même, l’aspect ethnique et stratégique se retrouve dans le conflit au Rwanda où le viol a massivement été utilisé contre les Tutsi, de façon organisé et stratégique7. Le viol est alors devenu une véritable arme. Elle est pensée et ordonnée en haut lieu. Elle vise des objectifs précis et met en place des méthodes particulières pour les atteindre. De façon plus actuelle, on a pu voir cette stratégie utilisée dans les années 1990-2000 au Tchad, en Sierra Leone, au Liberia, ou encore en Angola. L’Afrique a été massivement touchée, avec des conflits au Kenya et au Zimbabwe à la fin des années 2000. Encore aujourd’hui, le viol, pensé comme une arme, est présent 3 Ibid. BRANCHE Raphaëlle 4 Ibid. 5 BARDET Céline, Zones sensibles, une femme