Hydroécol. Appl. (2000) Tome 12 Vol. 1-2, pp. 135-146

Répartition du genre Megerle von Mühlfeld ( : ) en France à l'aube du XXIe siècle

Distribution of Corbicula Megerle von Mühlfeld (Bivalvia : Corbiculidae) in France at the beginning of the 21 st century

Jacques Mouthon Cernagref, 3 bis quai Chauveau, CP 220, 69336 Lyon cedex 09, France. E-mail :jacques. rnouthon Ocernagref.fr

Résumé. - a été découvert pour la première fois en France en 1980 dans l'estuaire de la Dordogne. Depuis cette date, ce bivalve a colonisé un grand nombre de cours d'eau appartenant aux quatre grands bassins hydrographiques de la Garonne, du Rhône, de la Loire et de la Seine ainsi que la partie française du bassin Rhénan. Les canaux ont joué un rôle prépondérant dans la propagation des Corbicula comme ce fut le cas pour Dreissena polymorpha au cours du XIXe siècle.

Mots-clés. - Corbicula, répartition, France.

Abstract. -The freshwater bivalve Corbicula fluminea was introduced in France in 1980 in the Dordogne estuary. Since that time, this has succeeded in colonizing a large number of rivers belonging to four main drainage basins: the Garonne, the Rhone, the Loire and the Seine, as well as the French part of the Rhine basin (see Figure 2). Ca- nals have played an important role in the spreading of Corbicula, as was the case for Dreissena polymorpha in the 19th century.

Key words. - Corbicula, distribution, France.

1 INTRODUCTION tralie (Zhadin, 1952 ; Morton, 1986). Mais dans les années 1920, des spé- cimens appartenant à l'espèce Corbi- Jusqu'au début du XXesiècle, l'aire cula fluminea (Müller, 1774) furent de répartition du genre Corbicula comprenait l'Afrique, l'Asie et I'Aus- découverts en Colombie britannique 136 Jacques Mouthon

(Counts, 1981). Depuis, ce bivalve hydrographique français et compte s'est largement répandu sur le conti- tenu de l'impact économique que nent Nord Américain (voir Counts, peut avoir ce bivalve, il était opportun 1986), puis en Amérique du sud de dresser un état de sa répartition (Ituarte, 1981 ; Cataldo & Boltovskoy, actuelle. Toutefois, le but de ce travail 1999). n'est pas d'établir une cartographie Des Corbicula ont été découverts détaillée de cette dernière, ce qui né- dans des dépôts tertiaires et quater- ce~~iteraitI'utilisation d'une échelle naires jusqu'au dernier interglaciaire plus fine que celle employée ici, mais I'Eémien, en Angleterre, en France, plutôt de donner un aperçu général en Belgique, en Allemagne et en Italie de à Ilaube du (Zhadin, 1952). Au cours de ces pé- XXIesiècle. riodes, ce bivalve était donc large- ment répandu en Europe occidentale. Mais après la dernière période gla- RÉsuL~~TS ciaire du Würm, les Corbicula ont to- talement disparu de la faune de ces 2.1 Taxonomie - une ou deux pays. Cependant, en 1980 des bival- de Corbicula? ves appartenant à l'espèce Corbicula fluminea sont signalés en France et Aux Etats-Unis, Hillis & Patton au Portugal dans les estuaires de la (1982) ont distingué deux formes et du Tage (Mouthon, dans les populations de Corbicula :

1981)~puis aux Pays-Bas (Blanken, 1- (a forme c< blanche )) (white form lgg0)> en Allemagne ou light colored shell morph ou form 19911, en Espagne (Ara@ et al., A) à périostracum de couleur jaune à 199319 en Belgique (Swinnen et al., brune et à nacre blanche ornée de re- lgg8) et au Uni (Jenner et flets bleus clairs, roses ou pourpres; al.,l998). 2- la forme << pourpre )) (purple form Dotés d'un taux de croissance ou dark-colored shell morph ou form élevé, de capacités reproductives et 6) à périostracum vert sombre à noir de dispersion passive importantes et à nacre uniformément bleue (McMahon, 1983 ; 2000 ; Prezant & sombre à pourpre. Toutefois, Morton Chalermwat, 1984), les Corbicula qui (1 987) a signalé l'existence en Chine sont susceptibles de constituer des de populations présentant des carac- populations très denses ont déjà cau- téristiques intermédiaires entre ces sé de nombreuses nuisances aux uti- deux formes et Tsoi et al. (1991) ont lisateurs d'eau aux Etats-Unis (Isom, montré à partir d'une étude du poly- 1986), mais également dans le Sud- morphisme enzymatique de ces Ouest de la France (Khalanski, 1997; populations qu'il n'existe pas de Jenner et al., 1998). Depuis leur dé- différenciation génétique entre forme couverte, en 1980, les Corbicula ont << blanche ,) et c< pourpre ),. Néan- entrepris la colonisation du réseau moins, pour McMahon (1991), la Répartition du genre Corbicula Megerle von Mühlfeld en France 137

forme << pourpre ), pourrait être une < pourpre ., elle n'a pas encore été espèce distincte de C. fluminea. répertoriée dans notre pays. En France, la famille des Corbicu- Une forme de Corbicula de plus lidae est essentiellement représentée petite taille et à stries d'accroisse- par Corbicula fluminea (Müller). La ment plus serrées que les spécimens grande majorité des spécimens ren- que I'on rencontre généralement en contrés possède un périostracum de France a également été recensée couleur brune et, à l'intérieur de la co- dans la Moselle (Bachmann et al., quille, une nacre à reflets pourpres 1995), le canal de Roanne et la (figs. 1A, B, C). Toutefois, dans le Saône, entre la confluence du Doubs bassin du Rhône, principalement en et ChâlonISaône (figs. 1G, H, 1). Les amont de Lyon, on rencontre essen- proportions HauteurILongueur de sa tiellement des individus à périostra- coquille, proches de 1 (0,97 I 0,04 cum jaune et à nacre blanchâtre pour les individus du canal de (figs. ID, E, F). A l'aval de cette ag- Roanne'), la différencient également glomération, ces deux formes qui se des autres spécimens de Corbicula distinguent facilement par la morpho- (H/L=0,92 f0,02 pour les populations logie et la couleur de la coquille de la Saône à Lyon et 0,88 I0,03 coexistent mais la proportion des in- pour celles du Haut Rhône à Creys- dividus de couleur jaune décroît au Malville'). La position systématique fur et à mesure que I'on descend le de cette forme est toujours discutée. fleuve. La coexistence de ces deux Différents auteurs l'ont élevée au formes a également été observée rang d'espèce sous le nom de Corbi- dans un secteur du cours inférieur du cula fluviatilis (Kinzelbach, 1991 ; Doubs, récemment colonisé et dans Den Hartog et al., 1992 ; Boschert et le canal du Centre. D'après McMahon al., 1996) ou de Corbicula cf. flumina- (1 991), les deux formes rencontrées lis (Blanken, 1990 ; Haesloop, 1992 ; en France appartiennent à la forme Bij de Vaate, 1993). Morton (1 997) et

<< blanche ,) décrite aux Etats-Unis. Britton & Morton (1979) ont montré En ce qui concerne la forme que le polymorphisme pouvait être

(1) Moyennes et écart types obtenus à partir de populations comprenant 114 individus.

Fig. 1. - Corbicula fluminea de la Saône, vues externe, intérieure et de profil de la coquille (A, B, C), longueur 27,6 mm ; Corbicula fluminea du Haut Rhône, vues externe, intérieure et de profil de la co- quille (D, E, F), longueur 23 mm ; Corbicula cf. fluminalis du canal de Roanne, vues externe, inté- rieure et de profil de la coquille (G, H, I), longueur 17,6 mm. Fig. 1. - Corbicula fluminea from the Saone River: external, internal and shell profile views (A, B, C), length 27.6 mm; Corbicula fluminea from the Upper Rhone, external, internal and shell profile views (D, E, F), length 23 mm; Corbicula cf. fluminalisfrom the Roanne canal, external, internal and shell profile views (G, H, I), length 17.6 mm. 138 Jacques Mouthon

(Bl Corbicula fluminea - Sabne

;- - ... - (G) - (H) -(Il ---h . --m.--. t2%t&&d.~-Cane)cLa,mne.;-;T ---- Répartition du genre Corbicula Megerle von Mühlfeld en France 139 très important chez C. fluminea et Gers, la Séoune, le Tarn, l'Agout, la qu'il existe dans les populations de ce Save, dans I'Adour et la Nive. Grâce bivalve aux Etats-Unis une grande au programme annuel de surveil- variation à la fois dans le ratio Hau- lance de la qualité biologique des teurllongueur et dans le nombre de cours d'eau, Fontan et Meny (1995) stries d'accroissement par unité de ont pu suivre sa progression dans les surface des coquilles. Toutefois, I'uti- bassins de la Garonne, de la Dor- lisation par les populations de I'es- dogne et de I'Adour. C. fluminea s'est tuaire du Rhin appartenant à cette également installé dans les plans forme d'une stratégie de reproduction d'eau aquitains, lacs de Cazaux et différente de celle adoptée par C. flu- Sanguinet, de Biscarosse et Parentis minea (Rajagopal et al., 2000) plaide et dans l'étang d'Aureilhan ainsi que en faveur de l'existence de deux es- dans plusieurs lacs réservoirs (Che- pèces distinctes. Dans ce cas, il reste vallier, 2000). à expliquer pourquoi et comment les - Bassin de la Charente et de la populations de Sèvre Niortaise aui se reoroduisent à l'aide de larves Plancton/ques en Asie (Morton, ,982) Corbicula fluminea a été signalé ont choisi, en Europe, d'incuber leurs dans la Charente en l995 où il est ~ufsdans leurs branchies internes présent de son estuaire jusqu'à comme C. fluminea. Mansle, mais il est très probable que son installation dans ce fleuve soit plus ancienne. II a également coloni- 2.2 Répartition des Corbicula en sé le cours inférieur de deux de ses France affluents la Boutonne et la Seugne ainsi que les marais de Rochefort et de Brouage. Plus récemment, au - Bassin de la Garonne cours de l'année 2000, ce bivalve a C'est au cours d'une campagne été observé dans le cours inférieur de d'échantillonnage de la faune de la la Sèvre Niortaise. La colonisation Dordogne, en septembre 1980, que de ces deux fleuves côtiers s'est des Corbicula furent découverts pour semble-t-il effectuée via leur zone es- la première fois dans l'estuaire fluvia- tuarienne. tile de cette rivière via, sans doute, la zone portuaire de Bordeaux sur I'es- - Bassin du Rhône tuaire de la Garonne. Depuis cette L'existence de canaux (canal laté- date, ce bivalve a progressivement ral à la Garonne, canal du Midi, canal colonisé la plupart des cours d'eau du du Rhône à Sète) reliant le bassin de Sud Ouest (fig. 2). En effet, C. flumi- la Garonne à celui du Rhône via le nea est présent dans la Dordogne, et Languedoc a très probablement favo- ses affluents I'lsle, la Dronne, la Vé- risée une rapide propagation des zère, dans la Garonne et ses af- Corbicula vers l'Est et le Nord (fig. 2). fluents le Dropt, l'Aveyron, le Lot, le En effet, ces bivalves apparaissent Flg. 2. - Répartition de Corbicula en France métropolitaineà la fin de l'année 2000. Les cours d'eau et canaux navigables sont en gras, Le sens probable de la colonisation est indiqué par des flèches et l'année d'apparition des Corbicula dans chacun des grands bassins hydrographiques est men- tionnée. Fig. 2. - Distribution of Corbicula in France at the end of the year 2000. Navigable rivers and canal! are in bold. The most probable directions of colonization are shown by arrows and the year of thc first record in each main drainage basin is indicated. dans la SaBne puis dans le Rhdne en Lyon en 1992 à I'occasion du suivi amont de Lyon autour des annees 90 hydrobiologique de la centrale nu- (Roger et Ginot, 1991 ; Khalenski, cletaire de Saint Alban (Frugst et 1997). Des spkimens sont decou- a1.,1999). La colonisation du Haut- verts pour la première fais à I'aval âe Rhône a && grandement facilit& par RBpartition du genre Corbicula Megerle von Mühlfeld en France 141 les travaux d'aménagements du - Bassins côtiers et canaux du fleuve et la création de plans d'eau Languedoc-Rousillon comme la retenue de Villebois néces- La colonisation des fleuves côtiers saire aux besoins de la centrale de comme l'Hérault (1994), l'Orb (1 998) Creys-Malville et plus propice au dé- I'Aude (1999 ?) est plus tardive que veloppement de ce bivalve que le celle du Rhône. Le réservoir du Sala- Rhône avant son endiguement et gou dans lequel on trouve Corbicula son exploitation hydroélectrique. Plu- fluminea, jusqu'à une profondeur de sieurs affluents du Bas-Rhône ont été 10 mètres, explique sans doute la colonisés plus récemment; c'est le présence de ce bivalve jusque dans cas des cours inférieurs de l'Ardèche la moyenne vallée de l'Hérault. On le et du Gard en 1998, de la Durance en trouve également dans I'Orbieu et la 1999 et de I'Eyrieux en 2000. Penne affluents respectivement de Corbicula fluminea est également I'Aude et de l'Hérault. présent dans la plupart des affluents de la Saône, la Chalaronne, la Reys- - Bassins côtiers du Var, des souze, la Veyle, la Seille, la Grosne, Alpes-maritimes et de la Corse Le Doubs, la Dheune et l'Ognon. Ce bivalve n'a pas encore été si- Dans ce dernier, la présence de gnalé dans les cours d'eau de ces dé- C. fluminea est restée longtemps li- partements. mitée à sa zone de confluence avec la Saône mais au cours des années - Bassin de la Loire 1999 et 2000, cette espèce a rapide- La première découverte de Corbi- ment colonisé tout le cours inférieur cula fluminea dans l'estuaire de la de la rivière probablement à partir Loire a été effectuée en 1990 (Gruet, d'anciennes gravières (Marnay), au- 1992). Par conséquent, la colonisa- jourd'hui aménagées en zone touris- tion de ce fleuve peut être considérée tique, car on ne la trouve pas en comme contemporaine de celle du amont de celles-ci. Dans le Doubs, Rhône. La progression de l'espèce principal affluent de la Saône, C. flu- dans la basse vallée de la Loire a no- minea est présent dans son cours in- tamment été suivie par Chouin férieur au moins depuis 1997, ainsi (1997). Parmi les affluents de la rive que dans la plupart des secteurs ca- gauche, la Vienne et le Cher sont co- nalisés du cours d'eau (canal Rhin- lonisés sur une grande partie de leur Rhône) jusqu'en aval de Besançon. cours. En revanche, et curieusement, En revanche, il semble, encore en C. fluminea est absent de I'lndre. En l'an 2000, absent des secteurs navi- rive droite, il est présent dans la gués mais non endigués de la rivière. Maine et de rares exemplaires ont été trouvés en octobre 2000 dans le cours inférieur de la Mayenne (Mon- treuil-Jugné) et de la Sarthe (amont d'Ecouflant). En revanche, les re- 142 Jacques Mouthon

cherches effectuées dans le Loir se les affluents français du fleuve. sont, jusqu'ici, révélées négatives. Récolté dans les environs de Bâle Les canaux qui bordent le cours (Kinzelbach, 1991) et dans le Rhin al- moyen de la Loire (canal de Roanne lemand (Boschert et al. 1996), la pré- et canal latéral à la Loire) sont en sence de Corbicula cf. fluminalis communication avec le bassin de la dans la partie française du Rhin est Saône via le canal du Centre qui les probable. rejoint à Digoin. Ces canaux qui sont Des Corbicula furent découverts largement envahis par les Corbicula pour la première fois dans la Moselle étant eux mêmes en communication en 1994 (Bachmann et al. 1995). Ce avec le cours d'eau par I'intermé- bivalve, également recensé au diaire de déversoirs, on peut s'at- Luxembourg, est présent jusqu'à tendre à une colonisation prochaine l'amont de Toul où des spécimens ont de cette partie du fleuve. Quelques été récoltés en 1998 à Tonnoy. La spécimens de Corbicula ont été trou- Moselle étant en communication vés dans le cours moyen de la Loire avec le bassin de la Saône via le ca- en aval de Digoin (1 997) et en aval de nal de l'Est (branche sud), la partie Roanne (2000). française de ce cours d'eau a sans - Bassins côtiers et canaux de doute été colonisée par des popula- Bretagne tions provenant du secteur aval et (ou) du canal de l'Est. En revanche, Corbicula fluminea a été recensé les Corbicula n'ont pas encore été si- dans le canal de Nantes à Brest (envi- gnalés dans le principal affluent de la ron de NortIErdre, octobre 2000) Moselle, la Meurthe ni dans la Meuse. mais on ignore si l'espèce est pré- sente en Bretagne; les canaux et le - Bassin de la Seine cours inférieur de la Vilaine notam- ment, qui sont des systèmes poten- Les multiples voies de communica- tiellement favorables à l'installation tion que le bassin de la Seine pré- de ce bivalve n'ayant pas été pros- sente avec le bassin de la Saône, pectés. toutes colonisées par Corbicula, ont largement facilité la progression de - Bassin du Rhin et de la Meuse ce bivalve vers le Nord du pays (fig. Les Corbicula sont apparus dans 2). Les voie les plus directes sont re- le cours inférieur du Rhin au Pays- présentées par le canal de la Saône à Bas en 1987 (Kinzelbach,l991), puis la Marne, les canaux de Bourgogne et en Allemagne en 1990 (Bij de Vaate, du Nivernais qui rejoignent l'Yonne et 1991). La partie française de ce le canal de Briare qui, via le canal la- fleuve ainsi que le vieux Rhin sont co- téral à la Loire, double le cours du lonisés depuis 1992. C'est également Loing. Dans le bassin de la Seine, le cas du canal de Colmar qui ali- des spécimens de Corbicula ont été mente en eau l'III. Toutefois, C. flumi- signalés pour la première fois en nea n'a pas encore été signalé dans 1977 dans l'Yonne à Sens et dans le Répartition du genre Corbicula Megerle von Mühlfeld en France 143 canal d'Orléans à Paris. Au cours des sés comprennent : - la partie septen- deux dernières années, il s'est rapi- trionale de la France représentée par dement propagé notamment dans la Bretagne, la Basse Normandie, le l'Yonne, où on le trouve de Clamecy Nord Pas-de-Calais, la Somme et le jusqu'à sa confluence avec la Seine, département des Ardennes; - la dans la Marne et dans I'Aisne. Dans Savoie et la Haute-Savoie ; - les ré- la Seine, on rencontre C. fluminea de gions Auvergne, Limousin et Alpes- Bray/S. jusqu'à l'aval de Paris (Mous- Côte d'Azur à l'exception des dépar- son), puis à l'amont de Rouen. Toute- tements limitrophes du Rhône : le fois, compte tenu de ses capacités de Vaucluse et les Bouches-du-Rhône ; dispersion, il est sans doute sporadi- - les départements des Hautes Pyré- quement présent dans le fleuve entre nées, de l'Ariège et des Pyrénées- ces deux agglomérations. C. flumi- Orientales ; - la Corse. nea a également été signalé dans la Apparue dans le Nord de la France plupart des canaux du Nord-Est de la en 1838 (Fisher, 1867), puis dans le France (canal latéral à la Marne, ca- Rhône en 1852, dans la Loire en 1864 nal de l'Aisne à la Marne, canal latéral (Mabille, 1867) et dans la Garonne en à I'Aisne, canal latéral à I'Oise, canal 1866 (Germain, 1931) Dreissena po- de I'Aisne à I'Oise). lymorpha (Pallas) a mis un peu moins - Bassins côtiers et canaux du de trente ans pour se propager du Nord, du Pas-de-Calais et de la nord au sud de la France. Signalée Somme dans l'estuaire de la Dordogne en 1980, dans les bassins du Rhône et Corbicula n'a pas encore été re- de la Loire en 1990, dans la partie censé dans les cours d'eau et les ca- française du bassin du Rhin en 1992, naux de ces départements. puis dans le bassin de la Seine en 1997, 11 n'aura donc fallu qu'une ving- taine d'années à Corbicula fluminea 3 CONCLUSIONS pour accomplir le même chemin, mais du sud au nord cette fois. Au cours des vingt dernières an- Bien que ce ne soit sans doute pas nées, les Corbicula sont parvenus à la seule voie de propagation utilisée, coloniser les quatre grands bassins cette étude montre le rôle essentiel hydrographiques français de la Ga- des canaux dans la dispersion des ronne, du Rhône, de la Loire et de la Corbicula à l'intérieur du pays, Seine, la partie française du Rhin ain- comme cela avait été observé pour si que différents fleuves côtiers Dreissena polymorpha au XIXe siècle comme l'Aude, l'Hérault, l'Adour, la (Kinzelbach, 1992). Compte tenu des Charente et la Sèvre Niortaise. Ce bi- communications qui existent entre la valve est aujourd'hui présent dans 57 Loire et la plupart des canaux bretons des 94 départements de la métro- d'une part, le bassin de la Seine et les pole. Les secteurs non encore coloni- canaux du Nord d'autre part, ces 144 Jacques Mouthon deux régions sont directement mena- de Biologie marine, Nantes; Jourde P., céeç. C'est également le cas des Romegoux; Loiseau J. Hydrosphère, Pontoise ; Marteaux C., Diren Lorraine ; grands lacs Maupas D,, Agence de Loire-Bre- get et Annecy dans lesquels une tagne; Meny J. Diren Aquitaine, Bor- autre espèce invasive Dreissena po- deaux ; ~~~l~~Y, ~i~~~ poitou-charente ; lymorpha s'est déjà installée avec Origny R., Tours; Paillard L., Diren Lan- succès. guedoc-Rousillon ; Peeters V. Diren Bour- Les observations réalisées au gogne; Raca~eY. Diren champagne- Ardenne ; Royer C., Diren Pays de Loire ; 'Ours de Ont également Soulard B., DDAF du Morbihan, Vannes; montré le rôle important des plans Vincent T., Muséum d'Histoire Naturelle d'eau créés par l'homme (lacs réser- du Havre. Je remercie vivement toutes voirs, gravières) dans l'expansion ces personnes pour les informations des Corbjcula. En effet, la présence qu'elles Ont bien voulues me cornmuni- de ces milieux artificiels a largement que'. Merci également à Rougeot J.C., 17installationde ce bivalve Université de Besançon qui a contribué à l'iconographie de ce travail. dans des secteurs qui auparavant ne lui était pas favorables et ils consti- tuent actuellement d'importants ré- servoirs d'alimentation en Corbicula RÉFÉRENCES des cours d'eau dans lesquels ils se BIBLIOGRAPHIQUES déversent (cas du Haut-Rhône, de ''Ognon, de Ces aménage- Araujo R,, D, Moreno & Ramas A, ,993. ments peuvent, par conséquent, être The Asiatic clam Corbicula fluminea directement à l'origine des nuisances (Müller, 1774) (Bivalvia : Corbiculidae) occasionnées par les Corbicula aux in Europe. Am. Malacol. Bull. 10 (1) : établissements industriels utilisa- 39-49. teurs d'eau situés en aval. Bachmann V.E., Cegielka E., Wagner P., Usseglio-Polatera P. & Moreteau J.C. 1995. Installation de l'Amphipode Co- rophium curvispinum et de la palourde REMERCIEMENTS asiatique Corbicula sp. Dans la partie française de la Moselle. Hydroécol. 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