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LES ATELIERS D’ARTISTES ATELIERS LES DOSSIER N°026-027

Avril 2018 | N° 026 027

Dossier LES ATELIERS D’ARTISTES

Varia L’AMÉNAGEMENT INTÉRIEUR DE L’IRPA ENTRETIENS DU PATRIMOINE CULTUREL IMMATÉRIEL DOSSIER ProFESSEUr À L’UNIVErSITÉ dE GANd dE ÀL’UNIVErSITÉ ProFESSEUr LINDA VAN SANTVOORT VAN SANTVOORT LINDA À BRUXELLES DU XIX D’ARTISTES LES ATELIERS CHEZ SOI L’ART D’ÊTRE ARTISTE rue de Nancy 6-8 à Bruxelles, arch. L. Sneyers (A. de Ville de Goyet, 2018 ©BUP/BSE). 2018 Goyet, de Ville de (A. Sneyers L. arch. àBruxelles, 6-8 Nancy de rue (1900), Cortvriendt Albert peintre du maison-atelier la de Façade E SIÈCLE SIÈCLE COMME CAPITALE D’UNE JEUNE NATION, BRUXELLES CONNAÎT, DANS LE COURANT DU XIXE SIÈCLE, UNE FORTE PROSPÉRITÉ ÉCONOMIQUE ET CULTURELLE. CETTE PÉRIODE FASTE POUR LES ARTS VIT DE NOMBREUX ARTISTES VENIR S’Y ÉTABLIR ET PARTICIPER AU FLEURISSEMENT D’UNE DYNAMIQUE ARTISTIQUE. À la Belle Époque furent réalisées quelques habitations d’artistes spectaculaires qui pouvaient rivaliser avec des exemples de renommée internationale. Les ateliers d’artistes du XIXe siècle qui subsistent encore aujourd’hui à Bruxelles, ne sont qu’une infime fraction de ce qu’a connu jadis la Capitale en tant que métropole de l’art. Cet article issu du travail doctoral de l’auteure1 se focalise sur les habitations et/ou ateliers d’artistes construits par et pour ces derniers. L’accent est ainsi mis sur l’architecture et sur la spécificité du programme architectural afin de rappeler le souvenir de cette richesse et de dresser un cadre pour le patrimoine préservé.

« Il y a deux manières d’être artiste tait l’illustre artiste pour contempler dant de la revue The Studio, Fernand chez soi... La seconde consiste à cette minuscule chose. Je ne me Khnopff connaissait bien la scène demander conseil à un architecte rendais pas compte que cette dis- artistique londonienne. Il n’y visita ayant du goût, mais la première proportion n’existait que pour moi pas seulement la Leighton House, consiste à en avoir soi-même »2. La et non pour ceux qui accordaient à mais fut surtout impressionné par culture de l’atelier est propre à la un tableau de Meissonier, quel qu‘en la maison-atelier de l’artiste fri- période de faste artistique du XIXe fût le format, l’importance des son Lawrence Alma-Tadema, éga- siècle. Les métropoles artistiques plus vastes toiles des plus grands lement établi à Londres. Dans une telles que Paris, Londres, Munich et artistes des siècles précédents. »4 série de conférences données à Vienne donnaient le ton. Paris fas- l’Académie Royale des Beaux-Arts cinait les artistes belges. Une visite Le luxe des ateliers de Londres5 de Bruxelles, Khnopff apporte un à la capitale française faisait, pour était encore plus imposant que celui témoignage au sujet de cette mai- eux, partie intégrante de leur for- de Paris. Holland Park était entouré son : « Ce qui charmait surtout, mation, et cela comprenait égale- d’une colonie d’artistes tels que c’était l’harmonie de l’ensemble et ment des visites à domicile chez des Frederic Leighton et bien d’autres. ce sentiment de composition qui se artistes. Dans sa jeunesse, en 1884, Ici, l’architecture allait de pair avec remarque chez l’artiste autant pour rendit ainsi visite un mode de vie artistique. La maison l’arrangement des objets familiers à l’incomparable atelier3 de l’ar- de Leighton – construite et transfor- que pour le choix des éléments de tiste français Jean-Louis Ernest mée d’après les plans de George ses œuvres. Ce sentiment de la par- Meissonier, où il s’étonna de la dis- Aitchison6 – réunissait l’atelier avec faite mise en scène »7. Khnopff se

proportion entre l’œuvre minus- une fonction d’accueil. En guise de sentait touché par la mise en scène, 2018 AVRIL - N°026-027 cule de l’artiste et les dimensions cerise sur le gâteau, lui fut adjoint si propre à la culture de l’atelier, et incroyables de l’atelier. Van de Velde l’Arab hall, dans lequel Leighton a qu’il a également savamment orga- exprima son indignation à ce sujet intégré sa collection de carreaux nisée dans sa propre maison d’après dans ses mémoires et s’interrogea d’après un projet de Walter Crane. un projet de l’architecte Édouard d’emblée aussi sur les excès – à son La maison était également une Pelseneer8. Mais Khnopff fut inspiré sens – de cette culture d’atelier. « Il attraction du vivant de l’artiste, surtout par la villa de l’artiste muni- m’avait donc fallu traverser le hall qui accueillait tant la bourgeoisie chois Franz von Stuck, dont il pos- imposant, l’escalier monumental et que des artistes anglais et étran- sédait lui-même une œuvre exposée

les grands salons du palais où habi- gers. En sa qualité de correspon- dans son atelier. La maison person- BRUXELLES PATRIMOINES

007 L’art d’être artiste chez soi

Fig. 1a et 1b Villa-atelier de l’artiste peintre Fernand Khnopff (1900 - démolie en 1938), angle de l’avenue Jeanne et de l’avenue des Courses, Bruxelles-Extension Sud (adresse initiale), arch. E. Pelseneer. Fig. 1a : façade (L’Émulation, 1927, n° 3, p. 39) et fig. 1b: intérieur (extrait de LAILLET, H., « The home of an artist: M. Fernand Khnopffs villa at », in The Studio , vol. 57, n° 237, 1912, p. 205).

nelle de Khnopff se voulait une sym- sont, en effet, les principaux ingré- d’exposition où visiteurs et clients biose de toutes ces impressions et dients dans la construction de l’es- pouvaient admirer l’œuvre d’art en sur le plan architectural, elle était pace de travail d’un artiste11. La toute quiétude. À la fin du XIXe siècle, fortement inspirée de la Sécession manière dont un atelier est organisé certains artistes disposaient égale- viennoise et du travail de l’architecte et aménagé est déterminée par l’art ment d’une chambre noire, parce Josef Hoffmann, à qui l’artiste vouait qui y est exercé. Il existe une diffé- qu’ils utilisaient la photographie une grande admiration (fig.1a et 1b)9. rence notable entre les ateliers des comme « outil » dans le processus peintres et ceux des sculpteurs. de création. Ces derniers sont confrontés à de LA TYPOLOGIE DE grands défis en termes d’acces- L’atelier se développa de la sorte en L’ATELIER D’ARTISTE sibilité, d’apports de matériaux et un programme complet. La com- d’organisation. Les sculpteurs se binaison entre travail et habitation Dans une étude relative à la vie voyaient ainsi contraints d’instal- était à cet égard une préoccupation quotidienne de l’artiste français au ler l’atelier au rez-de-chaussée, qui qui jouait un rôle important, surtout XIXe siècle, Jacques Lethève livre était souvent séparé de l’habitation. à la fin du XIXe siècle: les artistes une description de l’atelier qui cor- Les peintres, en revanche, optaient recherchaient un équilibre entre respond à l’image que nous nous plus souvent pour un atelier com- la vie privée et la vie publique et en faisons souvent spontanément : biné, voire même intégré dans la jouaient très consciemment de cette « L’atelier est une grande pièce rec- partie habitation. Dans les ateliers frontière, parfois très mince. Le tangulaire, au plafond beaucoup du XIXe siècle, il était plus que cou- statut social de l’artiste s’accrut et plus élevé que dans un logis ordi- tumier de prévoir toute une série le mythe du génie créatif fut ainsi naire. L’éclairage y vient de fenêtres de fonctions annexes autour du lieu conservé, voire délibérément mis hautes, situées d’un seul côté ou de travail proprement dit, comme en scène12. Les études sur l’archi- encore d’une verrière oblique d’où un espace de toilette pour les tecture des habitations et ateliers tombe le jour froid venu du nord ; modèles, un espace de rangement d’artistes doivent tenir compte de le soleil ne doit pas pénétrer pour pour les toiles achevées et inache- cette propension à la représenta- éviter les reflets et les taches de vées et pour les modèles en plâtre, tion qui joue un grand rôle dans les lumière. »10 Lumière et espace une petite (ou parfois grande) pièce sources iconographiques, telles les

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Fig. 2

Société Palladio, projet de concours pour une habitation d’artiste, 1844, arch. Frédéric Vander Rit (© AVB, Plans Portefeuilles 2214). BRUXELLES PATRIMOINES

009 L’art d’être artiste chez soi

Fig. 4 Habitation du sculpteur Louis Jéhotte (1840, démolie), avenue des Arts 51 à Fig. 3 Saint-Josse-ten-Noode, arch. E. Lavergne (© archives communales de Saint-Josse- Maison-atelier de l’artiste peintre François-Joseph Navez (1824 - démoli en 1874), ten-Noode, Service d’Urbanisme, permis rue Royale 35 à Bruxelles, arch. T.-Fr. Suys (© AVB, TP 20815). d’urbanisme n°28, 1840).

peintures et les photos d’ateliers. était abordé sous un angle « aca- dérait cet aspect comme subal- Les plans de construction – qui ont démique ». Libérés des entraves terne. Il n’existe aucun doute quant une fonction purement adminis- budgétaires ou autres, les jeunes au fait que tous ces projets visaient trative, mais qui ne sont hélas pas créateurs laissèrent libre cours à un concept néoclassique idéal, dont toujours disponibles – dévoilent en leur imagination dans leurs pro- l’ampleur et la finition étaient très revanche les circonstances réelles positions. L’habitation (côté rue) éloignées de la réalité (fig. 2). de l’organisation des ateliers et du était, dans tous les cas, associée à programme d’habitation et sont ici un atelier dans le jardin (à l’arrière Il ne faut pas s’étonner que Tilman- d’une valeur inestimable. de la parcelle) ; la liaison entre François Suys ait pris l’initiative les deux parties était l’objet d’une d’un tel concours sur le programme grande attention. Dans les propo- d’une habitation d’artiste. Vingt ans L’APPROCHE ACADÉMIQUE sitions, l’atelier – parfois plus d’un plus tôt – en 1824 –, il construisit, DE LA PREMIÈRE MOITIÉ – était entouré de différentes fonc- rue Royale, une habitation et un DU XIXE SIÈCLE tions annexes, comme un vestiaire, atelier en style néoclassique pour une bibliothèque, un espace d’ex- François-Joseph Navez. La maison En 1842, Tilman-François Suys position, un espace de rangement, et atelier de Navez fut qualifiée de fonda la Société Palladio, desti- etc. Aucun projet ne prévoyait dans « grandiose » par l’architecte Jean- née à ses élèves de l’Académie la façade une référence claire au Pierre Cluysenaar14. La collabora- de Bruxelles. Celle-ci organisait statut d’artiste de l’habitant. Tous tion entre des artistes qui jouaient annuellement un concours qui, en les projets montrent une structure un rôle prépondérant dans l’Acadé- 1844, eut pour sujet une « habitation axiale (symétrique) du plan et de la mie de Bruxelles, Navez en tant que pour artiste peintre ». L’habitation façade, une architecture imprégnée directeur à partir de 1835 et Suys d’artiste trouva ainsi une place d’un esprit classique avec une pré- en tant que chargé de cours à partir parmi d’autres sujets traités pré- férence marquée pour les portiques, de la même année, ne peut qu’avoir cédemment, comme une école les colonnades et les frontons et une inspiré maint artiste, d’autant que communale (1842) ou une caserne tendance à la monumentalité tant à l’atelier fut également utilisé par de gendarmerie (1843). Les pro- l’extérieur qu’à l’intérieur. Les pro- son beau-fils Jean Portaels, qui y jets soumis au concours13 donnent jets du concours ne mettent pas installa, à l’arrière, son légendaire ainsi idée de la manière dont le pro- en lumière la façade de l’atelier, ce atelier libre où furent formées des gramme d’une habitation d’artiste qui semble indiquer que l’on consi- générations d’artistes (fig. 3).

010 HABITATIONS ET ATELIERS D’ARTISTES AVEC UNE IMAGE « BOURGEOISE »

Au cours de la première moitié du XIXe siècle, les artistes entendaient surtout se profiler en tant que bour- geois et mirent tout en œuvre pour ne pas se distinguer de ce milieu dont ils recherchaient les faveurs. Ils démontraient ainsi vouloir s’intégrer délibérément dans la culture urbaine « bourgeoise ». Par une signature souvent néoclassique de leurs habi- tations, ils se fondent ainsi « en toute discrétion » dans le paysage urbain.

Lorsque le sculpteur Louis Jéhotte – professeur à l’Académie de Bruxelles de 1835 à 1863 – construi- sit, en 1840, sa maison sur l’avenue des Arts en bordure du nouveau et prestigieux quartier Léopold, il opta pour une majestueuse façade néo- classique d’une largeur de 14 m, percée d’une porte cochère cen- trale. Rien sur la façade, signée E. Lavergne15, n’indique que cette mai- son est celle d’un sculpteur. L’atelier est tapi dans le jardin, derrière la maison, comme on peut le voir sur une carte Popp, et n’était accessible que par le portail. Louis Jéhotte connut un grand succès surtout au début de sa carrière. Son habita- tion était connue comme un impor- tant lieu de rencontre. Saintenoy y fait référence dans sa biographie Fig. 5 de Jéhotte : « Il mourut à Bruxelles Maison-atelier du peintre paysagiste François-Xavier Roffiaen (1862, démolie), rue du en 1884, délaissant son atelier, son Financier 12 (plus tard rue Godecharle 16) à Ixelles, arch. Antoine Trappeniers (© archives hôtel avenue des Arts, dont le salon communales d’Ixelles, Travaux publics, 1862). était devenu un centre, entouré de la sympathie du monde des sirent successivement des habita- peignit avec une précision photogra- 16 artistes. » (fig. 4). tions bourgeoises néoclassiques, la phique des paysages alpestres qui lui 2018 AVRIL - N°026-027 dernière d’après un projet d’Antoine valurent un succès international. Les Dans les années 1860, une colonie Trappeniers, frère de loge de l’ar- ateliers de la rue Godecharle étaient d’artiste prospéra à un jet de pierre tiste et concepteur de la place du situés en façade arrière orientée vers du quartier Léopold, dans la rue Luxembourg toute proche (1854). Le le nord avec vue sur la voie ferrée du Financier (plus tard rebaptisée peintre paysagiste Roffiaen rejoignit et garantie de lumière. Le passant rue Godecharle). Les artistes Henri dans cette colonie son ami Adolphe ne pouvait absolument rien soup- Sterckx (1861), Émile Bouillot (1861), Dillens avec qui il avait déjà colla- çonner de l’activité artistique qui se Adolphe Dillens (1861) et Francois- boré par le passé. Dans son grand déployait derrière les façades d’ap- 17

Xavier Roffiaen (1862) y construi- atelier recouvert de verre, Roffiaen parence bourgeoise (fig. 5). BRUXELLES PATRIMOINES

011 L’art d’être artiste chez soi

L’HABITATION D’ARTISTE EN TANT QU’EXPRESSION ARTISTIQUE

L’atelier d’Antoine Wiertz bénéficia d’un large intérêt dans la presse. L’illustration, Journal Universel d’août 1852, lui consacra un impo- sant article intitulé Paestum à Bruxelles18. L’illustration utili- sée est sans conteste la première de la bâtisse, et fut réalisée alors qu’elle n’était en fait pas encore terminée19. L’atelier que Wiertz fit

Fig. 6 construire d’après un projet per- Atelier d’Antoine Wiertz (1850), dessin de C. Vanderhecht (L’Illustration, Journal Universel, 1852). sonnel est exceptionnel à tous égards. Il dépasse en taille tous les ateliers bruxellois, à l’exception de celui d’Eugène Verboeckhoven à , qui était encore plus vaste. Ce qui frappait le plus les imaginations était la reconstitution de la ruine du temple de Paestum que Wiertz fit élever comme une sorte d’écran contre l’atelier aux allures de hangar et avec laquelle il suscita l’étonnement, l’admiration, mais parfois aussi l’aversion des visiteurs. Le fait qu’il soit parvenu à faire construire cette ruine aux frais de l’État témoigne de sa force de persuasion, comme il ressort d’une de ses lettres au ministre : « mais le gouvernement souffrirait-il que cette somme ser- vit à élever un édifice d’un si misé- rable aspect? Laisserait-il perdre à l’architecture – si fatiguée dans notre pays des murailles nues et des maisons en manière de cages d’oiseaux – l’occasion de placer une pauvre colonne, une saillie archi- tecturale quelconque? Ne préfère- ra-t-il pas dépenser deux ou trois fois la somme indiquée plus haut à l’érection d’un édifice qui fût à la fois grand et monumental, objet d’art et d’utilité? »20. La solennité de l’extérieur contrastait vivement avec l’intérieur : le sol était en terre Fig. 7 battue et les murs inachevés, le Projet d’Antoine Van Hammée pour sa maison-atelier (1875), rue de Locht 26 à mortier gris étant encore visible Schaerbeek (extrait de « Kunstenaarsateliers », in Openbaar Kunstbezit in Vlaanderen, jg. 25, nr. 1, 1987, p. 8) (fig. 6).

012 Fig. 8a et 8b Maison-atelier d’Émile Wauters (1874, démolie en 1955), angle rue de la Loi et rue Froissard à Bruxelles, arch. É. Janlet. Fig. 8a : élévation de la façade (© AVB, TP 11722) et fig. 8b : façade de la rue Froissard en 1893 (L’Émulation, 1893, Pl. 20).

L’habitation de l’artiste Antoine « orientaliste ». Certains de ses mental des Musées royaux d’Arts Van Hammée, à Schaerbeek (rue contemporains l’ont aussi asso- décoratifs et industriels de l’époque De Locht 1875), était d’un calibre cié à Alma Tadema22. Dans le pro- (aujourd’hui les Musées royaux bien plus modeste, mais non moins jet de son habitation, Van Hammée d’Art et d’Histoire)23. Si la façade de originale. Du point de vue des avait prévu une façade entière- son habitation était effectivement dimensions, le bâtiment s’inscrit ment peinte, avec une polychromie hors du commun, son aménage- dans une enfilade de maisons ordi- qu’on l’associait à cette époque aux ment intérieur, en revanche, diffé- naires, mais possède néanmoins reconstructions archéologique des rait à peine de celui de la maison

une façade qui se démarque d’em- antiques. Bien qu’inhabituelle – et mitoyenne classique. Tout porte à 2018 AVRIL - N°026-027 blée. La superposition des ordres qu’il soit improbable que cette poly- croire que Van Hammée travaillait et le fronton confèrent à l’archi- chromie ait été réellement réalisée dans une grande pièce au rez-de- tecture de cette maison un carac- – elle coïncidait avec les intérêts chaussée (fig. 7). tère monumental, qualifiée de de cet « artiste-archéologue ». En « Pompéienne »21, constituant un 1877, il fut nommé à l’Académie de L’amorce du troisième quart du XIXe cas unique dans l’histoire de l’ar- Bruxelles, où il enseigna l’archéo- siècle est allée de pair avec une chitecture bruxelloise. Antoine Van logie et l’histoire de l’art ; en 1891, percée du pluralisme stylistique et Hammée peignait des scènes his- il devint conservateur du départe- de l’éclectisme en architecture. Le

toriques et est aussi connu comme ment Arts décoratifs et Art monu- choix du style d’une habitation était BRUXELLES PATRIMOINES

013 L’art d’être artiste chez soi

La circulation séparée permettait à l’artiste (et à ses hôtes), et à son modèle, de ne pas se croiser systé- matiquement dans un même esca- lier. Lucien Solvay fut à ce point impressionné lors d’une visite qu’il y consacra un article complet dans La Revue Artistique (1879), où il ne tarit pas de superlatifs au sujet de l’architecture et de la décora- tion intérieure : « (…) une maison princière du XVIe siècle (…) du plus pur flamand »24. L’appréciation par les cercles d’architecture se fit attendre. Ce n’est que près de vingt ans après sa construction qu’une photo de la façade latérale (!) parut dans la revue L’Émulation (1893)25. Pour l’architecte Émile Janlet, la maison-atelier de Wauters consti- tua une étape précoce et décisive dans le développement du style néo-Renaissance flamande, un style qui allait lui permettre de percer vraiment et de récolter un joli succès avec le pavillon belge de l’Exposition universelle de Paris en 1878 (fig. 8a et 8b).

DES ATELIERS À LA MESURE DE L’ARTISTE

Tous les artistes ne se préoccu-

Fig. 9a et 9b paient pas de donner un lustre par- Atelier du sculpteur Charles Samuel (1898), rue Washington 36 à Ixelles, arch. E. Van ticulier à leur atelier. Parfois, c’est Humbeeck. Fig. 9a : extérieur (L’Émulation, 1900, pl. 46) et fig. 9b : plan du rez-de-chaussée la fonctionnalité qui primait et l’ate- (L’Émulation, 1900, pl. 46). lier était approché sur une base très modeste et avec une menta- rarement gratuit, mais au contraire grande fenêtre de l’atelier au deu- lité simple et directe. Le travail bien conscient. Pour le peintre xième étage se prolongeait jusque doit être organisé, surtout dans un d’histoire et de portraits Émile dans le toit, ne laissant aucun doute atelier de sculpteur. La création Wauters, la construction d’une sur le fait que cette maison était d’une statue se fait en plusieurs maison-atelier en style néo-Renais- celle d’un artiste. Ce genre de roof- étapes : du concept – sur la table sance flamande, d’après un pro- top studio était populaire surtout à dessin – à l’exécution en passant jet de l’architecte Émile Janlet, se à Paris et à Londres et fut aussi par le modèle. La sculpture est situait dans le prolongement de ses prisé à Bruxelles par les peintres. une activité poussiéreuse et sur- aspirations artistiques. Construite L’atelier était desservi par une tout bruyante. Le moulage de sta- en 1874 sur le rond-point de la rue entrée particulière – une modeste tues pouvait être sous-traité. À cela de la Loi, cette maison d’angle, porte dans la façade latérale, côté s’ajoute le besoin de se retirer de entièrement élevée en briques par- rue Froissart – et accessible par un temps à autre de l’agitation de l’ate- semées de pierre bleue, constituait escalier en colimaçon séparé, logé lier, afin de réaliser une ébauche une attraction à tous les égards. La dans la pittoresque tour d’angle. dans un endroit plus tranquille, de

014 recevoir des convives ou d’exposer une œuvre dans un environnement plus « serein ».

Xavier Mellery attachait peu d’im- portance à l’atelier qu’il construisit (1879) dans le jardin de sa maison parentale à Laeken26. Édifié selon un plan rectangulaire, avec une grande fenêtre dans la façade nord, il n’abri- tait qu’une unique pièce de travail.

Jacques de Lalaing habitait un impo- sant hôtel particulier rue Ducale et l’atelier qu’il fit construire (1884) à un jet de pierre de là, dans le quartier Léopold, était un bâtiment simple, avec un unique grand espace de 150 m², dans lequel il combinait pein- ture et sculpture. Une coexistence dont il allait progressivement s’aper- cevoir qu’elle n’était guère pratique, de sorte qu’en 1908, il transforma son atelier en duplex pour y aména- ger une galerie en mezzanine27.

L’architecte Ernest Van Humbeeck, qui avait été lui-même un élève de Portaels et qui connaissait donc bien la pratique artistique, a pu puiser dans cette expérience au moment de concevoir les ateliers des sculp- teurs Guillaume Charlier et Charles Samuel. Dans les deux cas, l’atelier fut conçu comme un bâtiment auto- nome et l’espace de travail en lui- même fut protégé contre le monde extérieur par une série d’espaces Fig. 10a et 10b annexes qui faisaient fonction de Maison-atelier du sculpteur Guillaume De Groot (1885, démoli après 1922), avenue Louise, « tampon ». Samuel poussa même Bruxelles Extension-Sud, arch. É. Janlet. Fig. 10a : coupe longitudinale (© AVB, TP14543) et fig. 10b : vue de l’atelier « d’exposition » (L’Émulation, 1895, Pl. 20) plus loin l’organisation des volumes et prévit également un espace d’ex- position comme sas entre un grand et se sortir du travail « salissant » et C’est surtout l’intérieur de son ate-

un petit atelier, ce qui lui permettait de de déplacer l’attention vers la pré- lier – qui a l’apparence d’un salon – 2018 AVRIL - N°026-027 gérer le contact avec les commandi- sentation28. En tant que sculpteur, qui soulève certaines questions. La taires et les clients (fig. 9a et 9b). Guillaume de Groot pratiquait surtout coupe de l’atelier29 montre qu’il y la sculpture monumentale. Son nom avait, sous celui-ci qui se situait dans Les artistes répugnaient à dévoiler et est lié à quelques édifices impor- le prolongement de son espace de à exhiber une œuvre d’art en cours de tants à Bruxelles (Bourse, Maison du vie, un second atelier où travaillaient réalisation. Une distinction était sou- Roi, Musées Royaux des Beaux-Arts, les « praticiens ». Cet espace de tra- vent faite entre un atelier « d’exposi- parc du Cinquantenaire). Les plans et vail était toutefois jalousement sous- tion » et un atelier « de travail ». Cela une photo de son habitation et atelier trait au regard des visiteurs (fig. 10a

permettait surtout aux sculpteurs de sont parus dans L’Émulation (1895). et 10b). BRUXELLES PATRIMOINES

015 L’art d’être artiste chez soi

Fig. 11 Jef Lambeaux et Jules Lagae dans l’atelier de la rue Creuse à Saint-Gilles (© KIK-IRPA, Bruxelles, cliché B192843).

Les photos de sculpteurs au tra- n’existe pas toujours une corrélation lisation de l’atelier de Godefroid vail dans leur atelier, montrant sans entre la signification artistique des Devreese se situe dans la péri- ambages la pratique de la sculpture, artistes et celle de l’architecture de phérie de ces projets « majeurs ». sont extrêmement rares. Dans le leur maison-atelier. Certaines annotations dans l’agenda contexte bruxellois, Jef Lambeaux, de 1894 de Horta laissent à penser qui s’est fait photographier jusqu’à qu’il réalisa les plans en toute hâte deux fois dans son « modeste » Victor Horta avait noué très tôt des et qu’il fit assurer le suivi du tra- atelier, constitue à cet égard une liens d’amitié avec le sculpteur vail par son collaborateur et dessi- exception (fig. 11). Godefroid Devreese. Ils se connais- nateur Charles Patris.31 L’atelier de saient déjà depuis leur formation à Devreese est incontestablement une l’Académie de Bruxelles et collabo- des réalisations les plus modestes L’A R T N O U V E AU, raient à l’époque sur différents pro- de Horta. La façade frappe par son APOTHÉOSE DE LA jets. En 1888, ils organisèrent une caractère presque industriel, déter- CULTURE DE L’ATELIER exposition commune dans l’atelier minée surtout par la grande fenêtre de Devreese, à l’époque encore répartie en tronçons de vitres étroits Parmi les commanditaires de situé rue du Marché30. Devreese col- entre des croisillons, probablement superbes habitations labora également au premier chef- en fer. La coupe montre que Devreese figurent bon nombre d’artistes d’œuvre de Horta, l’hôtel Tassel pouvait disposer d’un grand espace aujourd’hui totalement oubliés ; (1893). La réputation de ce dernier de travail séparé de la rue par deux Bartholomé, Janssens, de Saint- commença à prendre forme et les pièces d’habitation surmontées par Cyr, Cortvriendt… ne sont pas des commandes affluèrent. En sep- un volume en duplex donnant sur le noms ronflants dans l’histoire de tembre 1894, il signa les premiers grand atelier, où il pouvait présenter l’art. Cela illustre bien le fait qu’il projets pour l’hôtel Solvay. La réa- ses œuvres (fig. 12a et 12b).

016 Fig. 12a et 12b Atelier du sculpteur Godefroid Devreese (1894, transformé en 1965), rue des Ailes 71 à Schaerbeek, arch. V. Horta. Élévation de la façade et coupe longitudinale (© archives communales de Schaerbeek, DS-7-71).

En 1901, Horta se mit au travail d’atelier par la réalisation de sa des entités clairement séparées qui pour deux sculpteurs : pour Pieter propre habitation et atelier dans la fonctionnaient tout à fait indépen- Braecke, il construisit une modeste rue Américaine à Saint-Gilles (1898). Il damment l’une de l’autre et entre habitation dans le quartier Nord- associa son habitation à un immeuble lesquelles n’était prévue aucune Est32 et, pour Fernand Dubois, une de bureau-atelier où l’espace de tra- communication. De la sorte, l’artiste maison-atelier plus somptueuse à vail était fortement souligné dans la manifestait clairement la volonté de Forest. Pour cette dernière, Horta façade par une grande fenêtre d’ate- montrer son existence vis-à-vis du prévit dans un premier projet une lier ; car les architectes ont, eux monde extérieur et l’autonomie de façade en brique adaptée aux moyens aussi, besoin d’un espace de travail l’atelier en était indiscutablement financiers du sculpteur. Un héritage bien éclairé. Les caves de son bureau l’expression. Durant tout le XIXe siècle permit toutefois subitement à Dubois abritaient même un atelier de mou- et même au début du XXe siècle, la une dépense supplémentaire ce dont lages où travaillaient ses collabora- position des artistes féminines avait Horta tira avantageusement parti33. teurs, sculpteurs et modeleurs, et où été relativement secondaire et la pos- La composition du premier projet Horta pouvait suivre de près l’évo- session d’un atelier était un signe fut conservée, mais le travail plas- lution plastique de ses créations34. évident d’émancipation. L’atelier de tique de la pierre bleue – si typique de Pour bien éclairer l’atelier dans les Louise de Hem reste néanmoins un l’œuvre du maître – devint une impor- caves, la fenêtre du rez-de-chaussée exemple exceptionnel, peu imité par tante caractéristique de cette façade fut prolongée sous le niveau de la rue la suite (fig. 14). tout en équilibre. La porte d’entrée ne et dans l’épaisseur du mur ; le même se situe pas au centre, mais marque système fut d’ailleurs utilisé pour Paul Hankar un axe vertical clair dans la composi- éclairer les cuisines-caves. Une fine La biographie de l’architecte Paul tion. À sa droite se situe la partie der- structure de fils protège la fenêtre de Hankar révèle les éléments expli-

rière laquelle se trouvent les ateliers, l’atelier sans compromettre l’apport quant pourquoi il se profila comme 2018 AVRIL - N°026-027 accessibles par une entrée séparée, de lumière. l’architecte des artistes. Hankar était le portail à l’extrême droite. Le grand le petit-fils d’un tailleur de pierre atelier de sculpteur se traduit dans La formule appliquée par Horta fit wallon, son père directeur d’une car- la façade par la haute fenêtre. Les école. Ernest Blerot eut sans aucun rière. À l’Académie de Bruxelles, où pièces de vie se situent dans la partie doute cet exemple devant les yeux il fit ses études dès l’âge de 13 ans, de gauche (fig. 13a et 13b). lorsqu’il construisit une habita- il suivit alternativement les cours tion avec atelier (1905) pour l’artiste des sections architecture, sculp- Horta prouva son attachement par- Louise de Hem à Forest. L’atelier et ture et ornementation et dessin. Il se

ticulier au thème de l’architecture l’habitation étaient en l’occurrence perfectionna entretemps en sculp- BRUXELLES PATRIMOINES

017 L’art d’être artiste chez soi

Fig. 13a et 13b Maison-atelier du sculpteur Fernand Dubois (1901), avenue Brugmann 80 à Forest, arch. V. Horta. Fig. 13a : projet avec façade en briques (© KIK-IRPA, Bruxelles, cliché B232355) et fig. 13b : projet exécuté avec façade en pierre naturelle (© archives communales de Forest, ACFUrb. 1846 -1901).

ture dans les ateliers de Georges Houtstont et aussi chez Charles Van der Stappen, mais c’est surtout dans l’atelier de l’architecte Henri Beyaert que Hankar se profila comme un sta- giaire plus que doué. La collaboration avec les artistes revêtait une grande importance dans l’atelier de Beyaert. En 1893, Hankar fut cofondateur du groupe d’artistes Le Sillon35. Ce n’est donc pas un hasard si Hankar construisit une maison ou un atelier lui-même prêt à mettre à disposition et surtout à Londres et à Paris. On pour la plupart des artistes apparte- un terrain à Westende. Le concept ne trouve qu’un seul exemple digne nant à ce groupe. C’est sur la base de comprenait un prestigieux hôtel de ce nom à Bruxelles : les ate- son implication dans le milieu artis- où les artistes et leur famille pou- liers mis à disposition, à l’initiative tique qu’il se révéla comme l’archi- vaient se retirer pour s’y détendre du commerçant Félix Mommen, à tecte des artistes par excellence. Il et y travailler (fig. 15). Le projet Saint-Josse-ten-Noode37. ressort de l’étude de François Loyer capota toutefois par le manque d’in- que Hankar réalisa au total quatorze térêt affiché par les membres de Hankar fit preuve d’une grande projets et missions à la demande la Société Coopérative Artistique36. modestie, surtout dans certaines d’artistes. C’est une preuve supplémentaire de ses premières commandes. Les que les programmes d’ateliers col- ateliers pour les sculpteurs Alfred Durant la période 1894-1896, il fut, lectifs ne connurent pas de succès Crick (1891), Félix Coosemans (1896) entre autres, à la base de la création en Belgique, alors qu’ils étaient et pour le peintre Jean Gouweloos d’une Cité des Artistes à la côte belge. très en vogue, au tournant du siècle (1896) touchent par leur simplicité. Un projet soutenu par Paul Otlet, dernier, dans les pays avoisinants, La fonctionnalité de l’atelier prime

018 architecture témoigne encore d’une forte filiation avec la néo-Re- naissance flamande de son maître à penser Beyaert. Hankar utilisa de la brique appuyée sur une plinthe en pierre bleue. Les encadrements de porte et de fenêtre sont constitués de chaînages en pierre d’Euville. La menuiserie de la maison-ate- lier de Janssens est typique pour Hankar, du géométrique avec des accents ludiques et, chaque fois, des variations différentes sur le thème du rectangle ou du carré. Paul Hankar a produit un Art nou- veau modéré, avec de forts accents traditionnels, répondant ainsi aux goûts de l’artiste et commandi- taire René Janssens, dont on a dit qu’il n’était en fait pas favorable au « modernisme » de son habitation. Gustave Vanzype exprime son éton- nement à ce sujet après une visite à l’atelier Janssens : « Dans la vaste salle {atelier} où le caprice de Hankar a dessiné, pour ce peintre de vieilles choses, des aspects de modernisme voisinant étrangement avec les cuivres anciens, les vieilles statues de saints, les lambeaux d’étoffes aux éclats fanés, les vieux livres aux reliures poudreuses »39. Il conclut par ailleurs que Hankar avait ici déployé son « modernisme » avec mesure, avec discrétion et sur- tout avec bon goût40. René Janssens n’avait manifestement guère été Fig. 14 convaincu par les qualités de l’ar- Maison (droite, 1902) et atelier (gauche, 1905) de Louise De Hem, rue Darwin 15-17 à Forest, arch. E. Blerot (A. de Ville de Goyet, 2018 © BUP/BSE). chitecture et de l’aménagement de Hankar, puisqu’en 1904, il confia une transformation et un réamé- sur son rayonnement architectural. situent au sein du cercle artis- nagement des lieux à l’architecte On peut même, dans certains cas, tique Le Sillon, dont ils faisaient Maurice Van Ysendyck41. Ce dernier

parler d’un concept minimaliste. Ce tous deux partie. Janssens était un suréleva le bâtiment de l’atelier d’un 2018 AVRIL - N°026-027 n’était pas un hasard si les ateliers intimiste qui représentait de pré- étage, faisant ainsi disparaître la les plus intéressants construits par férence des intérieurs bourgeois fenêtre de l’atelier, au même titre Hankar étaient ceux réalisés pour où l’accent était mis sur l’évo- d’ailleurs que le « caractère d’ate- les artistes les plus fortunés : Albert cation d’ambiance. L’habitation lier » de cette habitation d’artiste. Ciamberlani, René Janssens et Léon de Janssens (1898)38 é t a i t Van Ysendyck transforma égale- Bartholomé. reconnaissable en tant qu’atelier ment l’intérieur en un style Louis d’artiste. La présence de l’ate- bourgeois et très en vogue et ne Les contacts entre l’artiste peintre lier était trahie par un oriel pro- conserva pour ainsi dire rien du

René Janssens et Hankar se longé par une haute lucarne. Son « modernisme » de Hankar (fig. 16). BRUXELLES PATRIMOINES

019 L’art d’être artiste chez soi

Fig. 15 Cité des artistes, projet de 1896 de l’arch. P. Hankar pour une résidence d’artistes à Westende, 1896 (© MRAH, coll. Arts décoratifs du XXe siècle, FH.005.96-1.07)

Fig. 16 Projet de la maison-atelier de René Janssens (1898), rue Defacqz 50 à Ixelles, arch. P. Hankar (© MRAH, coll. Arts décoratifs du XXe siècle, FH.006.98-1.01).

020 Sans doute Hankar trouva-t-il dans la personnalité de l’artiste peintre Léon Bartholomé un admirateur bien plus convaincu et bien plus enthousiaste de son architecture. Tous deux faisaient également par- tie du cercle artistique Le Sillon. Différents avant-projets furent élaborés en à peine cinq mois de temps, dont différentes formules d’atelier – habitation et atelier côte à côte ou autonomes. Deux bâti- ments furent finalement construits sur l’avenue de Tervueren, dont le 151 fit fonction d’atelier. L’atelier de l’artiste peintre Léon Bartholomé (1898)42 fut une des créations les plus audacieuses de Hankar. Les restrictions financières n’y jouèrent aucun rôle. Bartholomé était riche et très mondain, du moins si l’on peut en croire l’ar- tiste Alfred Bastien, qui le décrit comme suit dans ses mémoires : « C’était le plus Parisien de nos compagnons [Le Sillon], très amu- sant par ses boutades, son chic parfumé, sa coquetterie surveil- Fig. 17 lée, très dépaysé par les gros de la Maison-atelier de l’artiste peintre Léon Bartholomé (1898, démolie) avenue de troupe ! Il était riche, possédait une Tervueren 147 à Woluwe-Saint-Pierre, arch. Paul Hankar (extrait de REHME, W., admirable maison à lui tout seul, Die Architektur der Neuen Freien Schule, Leipzig, 1902, pl. 73). avenue de »43. Un portrait similaire a été dressé par un auteur anonyme en 1904, qui décrit l’ar- et de ses cadreurs zélandais, lui de la chambre à coucher du pre- tiste et sa maison en ces termes : révèle mieux, sitôt qu’il pénètre mier étage au balcon et à la grande « Rien ne pouvait mieux s’harmo- chez ces pauvres, toute la noblesse fenêtre de l’atelier situés à l’étage niser aux goûts du simpliste raf- pittoresque de cette pauvreté supérieur. La grande fenêtre finé qu’est Léon Bartholomé, que magnifique (...) »44. Entre les lignes, de l’atelier était carrée, mais la la sobre fantaisie novatrice de Paul nous lisons l’étonnement de l’au- menuiserie intègre un cercle joux- Hankar, le bâtisseur moderniste teur au sujet du grand contraste tant la porte du balcon. Hankar qui édifia avenue de Tervueren, à entre le style de vie exclusif de l’ar- rechercha un équilibre subtil entre Bruxelles, un home idéalement tiste et le misérabilisme de son art. formes droites et rondes, entre ‘néo-stylé’ à ce peintre (élégant et Art nouveau géométrique et floral,

mondain) des pauvres et rustiques L’habitation de Bartholomé est la tant dans la composition architec- 2018 AVRIL - N°026-027 et sombres intérieurs. L’antithèse plus emblématique de l’œuvre de turale que dans la décoration45. Il est moins qu’on ne pourrait croire Hankar. La grande et complexe créa ici le prototype de l’habitation une antinomie. Peut-être bien que fenêtre de l’atelier domine l’en- d’artiste où l’atelier était posé par- le contraste entre le décor luxueu- semble du concept et confère un dessus l’habitation tel un pavillon. sement esthétisé où cet artiste vit, cachet très spécifique à l’archi- La grande fenêtre de l’atelier est et les décors de ces cabanes de tecture. Hankar rompt les règles plus qu’un simple moyen de faire pêcheurs remaillant leurs vieux de composition traditionnelles entrer la lumière dans l’espace de filets de leurs vieilles mains tan- aux premier et deuxième étages. travail ; elle s’affirme comme l’œil

nées et des humbles dentellières Il regroupa en un tout les fenêtres de l’artiste sur le monde (fig. 17). BRUXELLES PATRIMOINES

021 L’art d’être artiste chez soi

sgraffiteur Adolphe Crespin46. La façade et l’intérieur de cette mai- son-atelier furent ornés de sgraf- fites et de décors muraux par Crespin. Le programme de la mai- son-atelier combine la vie de tous les jours et le travail, mais préserve leur autonomie. L’atelier possède sa propre entrée. Sur les plans de la demande de permis de bâtir47, on remarque qu’un espace, bap- tisé chambre noire, est prévu à côté de l’atelier. La collaboration entre Sneyers et Crespin déboucha en 1902 sur une participation à l’expo- sition des arts décoratifs de Turin avec un studio d’artisan rappelant étroitement le décor de l’atelier de Cortvriendt. La maison de la rue de Nancy est un exemple d’école de collaboration artistique entre architecte et décorateur, mais on n’a pas encore pu déterminer à ce jour où se situait l’artiste dans ce rapport de collaboration particulier (fig. 18).

LA CULTURE DE L’ATELIER SOUS PRESSION

La culture de l’atelier souleva déjà des critiques très tôt dans le XIXe siècle. Certains artistes voyaient l’atelier comme un environnement artificiel, un obstacle à la recherche de la vraie vie et de la vraie nature. La culture de l’atelier, en tant que représentante de l’académisme, se trouva sous pression et fut rejetée Fig. 18 Plan de l’atelier d’Albert Cortvriendt (avec indication d’une chambre noire) (1900), rue de par les pleinairistes qui, partout Nancy 6-8 à Bruxelles, arch. L. Sneyers (© AVB, TP 24600). en Europe, se détournèrent de la ville et cherchèrent le salut dans la nature « inviolée ». Mais cette L’architecte Gustave Strauven s’est Léon Sneyers dernière tendance est également à inspiré du travail d’Hankar pour Toujours en 1901, Léon Sneyers prendre avec une certaine réserve ; Bartholomé lorsqu’en 1901, il conçut conçut pour l’artiste peintre Albert de nombreux artistes entretenaient pour l’artiste peintre Georges de Cortvriendt une remarquable mai- une relation ambiguë avec leur Saint-Cyr dans le quartier Nord- son avec atelier dans le Pentagone atelier. Même ceux qui recher- Est une maison avec atelier dans bruxellois. L’année du décès de chaient délibérément la nature ne le style flamboyant qui lui est si Hankar, le jeune Sneyers reprit le pouvaient pas toujours fonction- caractéristique. flambeau de son maître et pour- ner sans atelier. Gustave Vanaise suivit la collaboration avec l’artiste recherchait le réalisme, mais au

022 Fig. 19 Plans de la maison de Rik Wouters (1913), place de la Citadelle (aujourd’hui place Rik Wouters) à Watermael-Boitsfort (© archives communales de Watermael-Boitsfort).

lieu de partir dans la nature, il fit dence, Alfred Verwee à Knokke, Rik Wouters déménagea en 1907 à provisoirement aménager son ate- Léon Frédéric et Jules Lagae à La Watermael-Boitsfort, où il trouva lier en « étable ». Firmin Baes Panne,49 Fernand Dubois à Sosoye, une petite maison à louer – avec construisit, en 1907, sur la presti- dans le Bruxelles urbanisé, les par- l’aide de Jacques de Lalaing pour gieuse avenue Molière à Uccle, une celles sont devenues plus petites qui sa femme Nel posait – qui répon- habitation bourgeoise d’après les et plus chères. À la veille de la dait totalement à ses besoins. Son plans d’Albert et d’Alexis Dumont. Première Guerre mondiale, bien épouse Nel écrivit ceci à ce sujet : Sa maison en style Beaux-Arts souvent, les artistes ne peuvent plus “Ons huisje is charmant en heel ruim. parée d’un joli intérieur – suffi- se permettre qu’une habitation avec Het is ons ideaal. We hebben twee samment moderne pour méri- atelier de modestes dimensions. ruime kamers beneden, een mooie ter deux photos dans L’Émulation Des maisons-ateliers discrètes (ave- grote nette kelder (wat uitzonderlijk (1910) – était aussi en vogue que les nue Giraud, arch. J. Coppieters pour is), twee kamers boven en een grote innombrables portraits de femmes Henri Van Haelen, 1908 ; rue Anatole zolder die geschikt is voor het atelier

qu’il peignit. Firmin Baes fut égale- France, arch. Joseph Diongre pour van Henry, een ruime koer (…) dat alle- 2018 AVRIL - N°026-027 ment l’auteur de natures mortes et Jean Lecroart, 1911) se construisent maal voor 18 frank per maand”50. Six de scènes bucoliques, qui virent le dans l’extension nouvellement amé- ans plus tard, le temps serait venu jour dans la « petite ferme » qu’il fit nagée de Schaerbeek qui, par leur pour une maison personnelle, qu’il construire en guise de décor dans langage esthétique, annoncent l’Art construisit en 1913-1914 à l’extrême son jardin48. Déco. limite de Watermael-Boitsfort avec l’argent qu’il emprunta à la Si les artistes bruxellois suffi- La nouvelle génération d’artistes société de logement Eigen Huis et samment nantis pouvaient se per- n’accorde plus qu’une importance un emprunt supplémentaire sans

mettre le luxe d’une seconde rési- minime aux apparences extérieures. intérêt contracté auprès de l’artiste BRUXELLES PATRIMOINES

023 L’art d’être artiste chez soi

Philippe Wolfers51. La nouvelle mai- NOTES 14. CLUYSENAAR, F., Une famille d’artistes. Les Cluysenaar, Bruxelles, son était encore plus petite, deux 1928, p. 69. pièces au rez-de-chaussée, une 1. Cet article est basé sur la thèse de doctorat, actualisée, de Linda 15. Il se peut qu’il s’agisse d’Édouard cave et une grande pièce comme Van Santvoort : « Het 19de-eeuwse Lavergne (1815-1878), avec une « atelier » sous les toits. Dans les kunstenaarsatelier in Brussel - een œuvre néoclassique surtout dans la région de Louvain, où il fut quelques rares mois qui lui res- corpus met dossiers betreffende 95 ateliers van schilders en beeldhouwers architecte de la ville de 1849 à 1877. tèrent – avant sa mobilisation durant gebouwd in het Brusselse Gewest 16. SAINTENOY, P., « Notice sur Louis laquelle il s’éteindrait des suites tussen 1824 en 1914 ». Thèse de Jehotte », in Annuaire de l’Académie d’une longue maladie –, il y travailla doctorat non publiée (promoteur Royale de Belgique, 1942, p. 151. Pr Jeanine Lambrecht), Histoire de encore dans le jardin ou au grenier l’art et Archéologie, Vrije Universiteit 17. Archives des travaux publics de (fig. 19). Brussel, 1995-1996. la commune d’Ixelles, dossiers des demandes de permis de bâtir. 2. « Maurice du Seigneur, L’art d’être Lire aussi : VAN SANTVOORT, L., Les habitations et ateliers d’ar- artiste chez soi (I) », in La Construction « François Roffiaen in de Brusselse Moderne, Paris, 1887. tistes qui furent construits à la rand: van de kunstenaarskolonie aan de Charleroisesteenweg veille de la Première Guerre mon- 3. MILNER, J., The Studios of Paris. The Capital of art in the Late Nineteenth naar de kunstenaarskolonie in de diale illustrent une tendance qui Century, Londres, 1988, p. 175. Godecharlestraat », in François allait se perpétuer par la suite. Roffiaen (1820-1898), Stedelijke 4. VAN DE VELDE, H., Récit de ma musea Ieper, 2009, p. 204-207. Les artistes se distancient de la vie, dl. I 1863-1900, Texte établi et culture de l’atelier, souvent litté- commenté par Anne Van Loo, avec 18. DU PAYS, A. J., « Paestum à la collaboration de Fabrice van de Bruxelles », in L’Illustration, Journal ralement en s’établissant dans des Kerckhove, Bruxelles, 1992, p. 77. Universel, août 1852. endroits plus retirés. La simplicité 5. Une étude récapitulative sur 19. Idem. L’auteur témoigne du fait mise en avant par les modernistes l’architecture des habitations et que l’atelier est encore vide, Wiertz dans l’entre-deux-guerres inci- ateliers d’artistes londoniens : habitait à l’époque encore dans la fabrique de la « rue du Renard » qu’il tera les artistes à plus de sobriété. WALKLEY, G., Artist’s houses in London 1764-1914, Cambridge, 1994. utilisait déjà comme atelier depuis Néanmoins, l’atelier en tant que quelques années. 6. Lire à ce sujet : ROBBINS, D., typologie architecturale reste un SULEMAN, R., Leighton House 20. COLLEYE, H., « Comment Wiertz défi et les mêmes préoccupations Museum, Holland Park Road, donna un musée à Bruxelles », (extrait de La Renaissance du Livre) continuent à dominer le programme Kensington, (Londres), 2005. in La Revue de Bruxelles, novembre de l’atelier. L’architecte Alfred 7. KHNOPFF, F., « Des souvenirs 1957, p. LX-LXI. Les lettres originales à propos de Sir Lawrence Alma Courtens construisit, en 1922, pour n’ont pas été retrouvées, pas Tadema », séance du 4 mars 1915, davantage dans la correspondance son frère et artiste Antoine un ate- in Bulletin de l’Académie Royale de personnelle du ministre Charles lier (Saint-Josse-ten-Noode, rue Belgique, 1915-1916. Rogier qui est conservée dans les Braemt 97-99) en style Art Déco 8. VAN SANTVOORT, L., « De mise- Archives du Royaume et inventoriée dans : BOUMANS, R., Inventaires des d’inspiration classique dans le sil- en-scène van het 19de-eeuwse kunstenaarsatelier », in Gentse papiers de Charles Rogier, Bruxelles, e lage de la tradition du XIX siècle. bijdragen tot de interieurgeschiedenis, A.R.A., 1958, Inv. 124. Les ateliers du sculpteur Oscar vol. 32, 2003, p. 123-125. 21. LAVALEYE, J., « Antoine Van Jespers (arch. Victor Bourgeois, 9. KHNOPFF, F., « Josef Hoffmann - Hammée », in Biographie nationale, 1928, Woluwe-Saint-Lambert) et architect and decorator », in The Studio , supplément Tome VII, 1969, p. 337- 1901, p. 264. 338. du peintre Jacques Lenglet (L.H. 22. ENAULT, L., « Exposition de Lyon », De Koninck, 1926, Uccle) sont 10. LETHÈVE, J., La vie quotidienne des artistes français au XIXe siècle, 1968, in Le Constitutionnel, 21 février 1872. des exemples exceptionnels d’un p. 14. 23. LAVALEYE, J., op. cit. modernisme résolu et ne sont pas 11. VAN SANTVOORT, L., « L’atelier 24. SOLVAY, L., « Les ateliers - Émile situés par hasard dans l’extrême d’artiste – La lumière et l’espace Wauters », in La Revue Artistique, 15 périphérie résidentielle de la Région au cœur de la création », in Lumière février 1879, p. 371-377. et éclairage, Région de Bruxelles- de Bruxelles-Capitale. Capitale, Monuments et Sites, 2007, 25. L’Émulation, 1893, col. 189, PL. 20. p. 67-95. Maison, rue Froissard, à Bruxelles. 1874 (Architecte M. E. Janlet). Traduit du néerlandais 12. Lire à ce sujet : ESNER, R., KISTERS, S., LEHMAN, A.-S., Hiding making, 26. Archives de la Ville de Bruxelles, showing creation. The Studio from Travaux publics, (Laeken) dossier, Turner to Tacita Dean, Amsterdam REG.P.V. NR 24/1879 University Press, 2013. 27. Archives de la Ville de Bruxelles, 13. Cinq projets ont été conservés. Travaux publics, dossiers 6574, Archives de la Ville de Bruxelles, Plans 37197 Portefeuilles, 2214-2218.

024 28. VAN SANTVOORT, L., « De mise-en- 49. VAN SANTVOORT, L., Ateliercultuur The art of being an artist. scène .. », op. cit., p. 127. versus plein-airisme. Brusselse kunstenaars trekken naar de 19th century artists’studios 29. Archives du Royaume, Bruxelles, kust, extra editie De Panne leeft, Fonds Janlet. in Brussels. septembre 2002. 30. AUBRY, F., « Victor Horta, Architecte 50. « Notre petite maison est de Monuments civils et funéraires », As the capital of a young nation, charmante et très spacieuse. in Bulletin de la Commission Royale Brussels experienced a strong C’est notre idéal. Nous avons des Monuments et des Sites, tome 13, deux vastes pièces en bas, une economic and cultural boom in 1986, p. 45. belle cave bien propre (ce qui the course of the 19th century. It 31. [31 janvier] « Visite à Devreese à son est exceptionnel), deux pièces was also the overriding reason terrain (...) », [2 février] « remis à en haut et un grand grenier qui Devreese premiers croquis pour son convient pour l’atelier d’Henry, une for artists to settle in Brussels atelier (approuvés par celui-ci) » [5 vaste cour (…), tout cela pour 18 and thus help kindle the artistic février] « les plans sont terminés ». francs par mois. » Lettre de Nel dynamic. This contribution Ibidem. Wouters à Maria Joris, Boitsfort, focusses on artists’ residences 32. Voir article de Marcel Celis, p. 056. 14 juillet 1907. BERTRAND, O., HAUTEKEETE, S., Rik Wouters. and/or studios purposely built by 33. GOSLAR, M., Victor Horta 1861-1947. Kroniek van een leven, Anvers, 1994, and for artists. The emphasis is L’homme-l’architecte-l’Art nouveau, p. 15. Fonds Mercator, Bruxelles, 2012, p. 305. therefore on architecture and on 51. Idem, p. 90. 34. LOYER, F., Paul Hankar, La naissance the specificity of the architectural de l’Art Nouveau, A.A.M., Bruxelles, programme as the art form 1986, p. 120. that was to be carried out was 36. Idem, p. 142-143. Paul Otlet fut undoubtedly instrumental in the à l’origine du développement de Westende-bains, un projet qui expression of this programme and fut réalisé d’après un projet de the typology of the artist’s house l’architecte Octave Van Rysselberghe. associated with it. 37. Voir l’article de Paula Dumont, p. 116. The article gives an overview of the 38. Plans conservés dans le Fonds evolution of the artists’ houses in Hankar (MRAH), Inventaire A.A.M., Brussels, from the early examples dossier 1898-6. that show an academic approach, 39. VANZYPE, G., Nos Peintres (dl. II), Bruxelles, 1904, p. 91 et 93. via the bourgeois artist’s houses, the studios in which 40. Ibidem. artists expressed their artistic 41. L’architecte Paul Hankar était entre- temps décédé en 1901. preferences and the workshops in which functionality took 42. Plans conservés dans le Fonds Hankar (MRAH), Inventaire A.A.M., centre stage, to the Art Nouveau dossier 1898-8. ateliers that formed the summit 43. [Alfred Bastien], « Mémoires d’Alfred of studio culture around the turn Bastien - Au temps du Sillon », in La of the century. Of the numerous Revue de Bruxelles, 1958, p. 168. artists’ studios that were built 44. de MARTRIN-DONOS, Ch., th BREUER, A., Nos Contemporains : in Brussels in the 19 and early portraits et biographies des 20th century and which testified personnalités belges ou résidant en to the role the city played as an Belgique, connues par l’œuvre littéraire, artistique ou scientifique, ou par l’action art metropolis, only a fraction politique par l’influence morale ou remains. This article illustrates sociale, Bruxelles, 1904, p. 480. their architectural wealth and the 45. VANDENBREEDEN, J., AUBRY, F., historical context in which they 2018 AVRIL - N°026-027 Art Nouveau in België. Architectuur & came into existence. Interieurs, Lannoo, Tielt, 1991, p. 70-

71. 46. SCHOONBROODT, B., Aux origines de l’art nouveau. Adolphe Crespin (1859- 1944), Antwerpen, 2005, p. 52-53. 47. Archives de la Ville de Bruxelles, Travaux publics, 24600. 48. NAEGELS-DELFOSSE, G., Firmin Baes, Bruxelles, 1987. BRUXELLES PATRIMOINES

025 COLOPHON

COMITÉ DE RÉDACTION ÉDITEUR RESPONSABLE Stéphane Demeter, Paula Dumont, Bety Waknine, directrice générale de Murielle Lesecque, Griet Meyfroots, Bruxelles Urbanisme et Patrimoine/ Cecilia Paredes et Brigitte Vander Région de Bruxelles-Capitale, Brugghen CCN – rue du Progrès 80, 1035 Bruxelles. Les articles sont publiés sous la RÉDACTION FINALE EN FRANÇAIS responsabilité de leur auteur. Tout droit Stéphane Demeter de reproduction, traduction et adaptation RÉDACTION FINALE EN NÉERLANDAIS réservé. Paula Dumont et Griet Meyfroots CONTACT SECRÉTARIAT DE RÉDACTION Direction des Monuments et Sites - Murielle Lesecque Cellule Sensibilisation CCN – rue du Progrès 80, 1035 Bruxelles COORDINATION DE L’ICONOGRAPHIE http://patrimoine.brussels Julie Coppens et Griet Meyfroots [email protected]

COORDINATION DU DOSSIER CRÉDITS PHOTOGRAPHIQUES Griet Meyfroots Malgré tout le soin apporté à la recherche des ayants droit, les éventuels AUTEURS / COLLABORATION bénéficiaires n’ayant pas été contactés RÉDACTIONNELLE sont priés de se manifester auprès de la Marie Becuwe, Laurence Brogniez, Direction des Monuments et Sites de la Marcel M. Celis, Victoire Chancel, Région de Bruxelles-Capitale Tatiana Debroux, Paula Dumont, Jacinthe Gigou, Coralie Jacques, LISTE DES ABRÉVIATIONS Harry Lelièvre, Judith Le Maire, AML - Archives et Musée de la Isabelle Leroy, Gertjan Madalijns, Littérature, Bruxelles (Belgique) Dominique Marechal, AVB – Archives de la Ville de Bruxelles Griet Meyfroots, Christian Spapens, BUP/BSE – Bruxelles Urbanisme et Iwan Strauven, Linda Van Santvoort, Patrimoine/Brussel Stedenbouw en Francisca Vandepitte, Brigitte Vander Erfgoed Brugghen, Tom Verhofstadt CIDEP – Centre d’Information, de Documentation et d’Étude du Patrimoine TRADUCTION CIRB – Centre d’Informatique pour la Gitracom, Ubiqus NV/SA Région bruxelloise RELECTURE CRMS – Commission royale des Martine Maillard et le comité de Monuments et des Sites rédaction KBR – Bibliothèque royale de Belgique KIK-IRPA – Koninklijk Instituut voor het GRAPHISME Kunstpatrimonium / Institut royal du Polygraph’ Patrimoine artistique MRBAB – Musées royaux des Beaux- CRÉATION DE LA MAQUETTE Arts de Belgique The Crew communication sa MRAH – Musées royaux d’Art et IMPRESSION d’Histoire IPM printing ISSN DIFFUSION ET GESTION DES 2034-578X ABONNEMENTS DÉPÔT LÉGAL Cindy De Brandt, D/2018/6860/022 Brigitte Vander Brugghen. [email protected] Dit tijdschrift verschijnt ook in het Nederlands REMERCIEMENTS onder de titel « Erfgoed Brussel ». Cathy Clarisse, Chantal d’Udekem, Anne Macebo, Mary Peterson, Linda Van Santvoort, Menno de Boer Déjà paru dans Bruxelles Patrimoines

001 - Novembre 2011 008 - Novembre 2013 015-016 - Septembre 2015 Rentrée des classes Architectures industrielles Ateliers, usines et bureaux

002 - Juin 2012 009 - Décembre 2013 017 - Décembre 2015 Porte de Hal Parcs et jardins Archéologie urbaine

003-004 - Septembre 2012 010 - Avril 2014 018 - Avril 2016 L’art de construire Jean-Baptiste Dewin Les hôtels communaux

005 - Décembre 2012 011-012 - Septembre 2014 019-020 - Septembre 2016 L’hôtel Dewez Histoire et mémoire Recyclage des styles LES ATELIERS D’ARTISTES ATELIERS LES Hors série 2013 013 - Décembre 2014 021 - Décembre 2016 Le patrimoine écrit notre histoire Lieux de culte Victor Besme

006-007 - Septembre 2013 014 - Avril 2015 DOSSIER Bruxelles, m’as-tu vu ? La Forêt de Soignes

Derniers numéros

022 - Avril 2017 023-024 - Septembre 2017 025 - Décembre 2017 Art nouveau Nature en ville Conservation en chantier N°026-027

20 €

ISBN 978-2-87584-163-6