Les Midnight Movies: Une « Espèce » Cinématographique Disparue ?
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
Université de Lyon Université lumière Lyon 2 Institut d'Études Politiques de Lyon Les Midnight Movies: une « espèce » cinématographique disparue ? Mémoire de Séminaire Préparé par Camille Durand Sous la direction de Jean-Michel Rampon Soutenu le : 6 septembre 2010 Table des matières Epigraphe . 5 Introduction . 6 Partie 1: Origines et contexte d'apparition des midnight movies . 13 A. Les années 1390 : l'incubation des midnight movies . 13 1/ les mouvements fondateurs: L’expressionnisme allemand et le surréalisme. 13 2/ L'exemple de Freaks: la matrice des Midnight Movies . 16 B. Les sixties et seventies aux Etats-Unis : un fourmillement créatif . 18 1/ Un climat de contestation propice aux avant-gardes cinématographiques . 18 2/ Une culture urbaine foisonnante : l’exemple du cinéma Elgin comme haut lieu d’épanouissement d’une culture underground . 20 Partie 2 : Que sont les midnight movies . 22 A. Une tentative de définition par le genre. 22 1/ Le genre expérimental . 22 2/ Le genre fantastique . 26 3/ Le mélange des genres . 27 B. Une convergence thématique : La perversion. 29 C. Un midnight movies est un film culte, produit de son audience. 30 1/ Description d’un public singulier . 30 2/ Le film culte : définition et analyse . 31 Partie 3 : Les midnight movies : une tradition obsolète? . 36 A. Les midnight movies : chronique d'une mort annoncée. 36 1/ Les raisons économiques d’un déclin . 36 2/ Les raisons culturelles : Hollywood récupère l’esthétique de minuit . 38 B .La télévision : un rôle néfaste pour la culture de minuit. 39 1/ La culture vidéo :l’entrée dans la postmodernité et le non public de la télévision . 39 2 / Les talks shows : de l’horreur au voyeurisme . 41 3/ La série télévisée culte : Twin Peaks , fille de l’esthétique de minuit . 41 C. The big LEBOWSKI : La résurection du phénomène des midnight movies. R . 43 1/The big Lebowski : un parcours similaire aux midnight movies . 43 2/ Analyse de la séquence d’ouverture . 44 3/ Conclusion : Une « critique postmoderne du rêve hollywoodien »: . 48 4/ L’ adoption du film par une grande communauté de fans . 49 D. Une nouvelle approche des fans : une coproduction d'objet de culte. 51 1/Les nouvelles formes de participation des fans , fanfictions :des formes de coproduction du sens . 51 Conclusion générale . 57 Bibliographie . 60 Ouvrages . 60 Articles . 60 Issus de revues . 61 Issus de la presse . 61 Annexes . 62 Epigraphe Epigraphe « Cinéma est un nom de l'art dont la signification traverse les frontières de l'art. » Jacques Rancière DURAND Camille_2010 5 Les Midnight Movies: une « espèce » cinématographique disparue ? Introduction A minuit, la dernière heure, heure mystique s'il en est, plusieurs événements très différents prennent place: minuit est l'heure de la messe traditionnelle des catholiques la veille du vingt-cinq décembre où une grande célébration prend place pour fêter la naissance de Jésus. C'est aussi le moment, au réveillon de la Saint Silvestre, où l'on s'embrasse et l'on fête le passage à la nouvelle année, dans le calendrier chrétien. Dans la littérature, les contes et croyances populaires, minuit est le moment magique de l'irrationnel où les sabbats de sorcière, sortes d’assemblées nocturnes, prennent place, où les vampires s’éveillent, les loups garous s’animent, où Mr Jekyll laisse place à Mr Hide, et enfin, dans les romans policiers, c'est la traditionnelle heure du crime. C'est une heure qui fait fonctionner l'imaginaire collectif, qui suggère un affranchissement du domaine du rationnel, et donc du réel. Cette folie inhérente à l'heure de minuit est le vecteur d'une culture underground, choisissant l'obscurité pour satisfaire les attentes d'un public avide de produits marginaux, allant à contre courant de la culture dominante ; parmi ceux là, des films à petits budgets, parfois dits « peu recommandables » devenus aujourd'hui des films culte grâce à leur diffusion à minuit dans les années 1970: les « Midnight Movies ». En France , l'expression n'a pas d'équivalent qui puisse désigner aussi bien ce qui est devenu un genre à part entière aux Etats Unis, c'est pourquoi j'utiliserai l'expression américaine tout au long de ce mémoire. L'idée première de ce mémoire m'est venue par la mise en relation de deux réalisateurs que j'admire beaucoup au nom de leur rejet des conventions hollywoodiennes et de leur capacité à créer dans leurs films un univers cinématographique très personnel et pourvu de ses propres codes esthétiques déviants: il s'agit de Alejandro Jodorowsky_ le réalisateur chilien, créateur avec Fernando Arrabal et Roland Topor du mouvement Panique, scénariste de bandes dessinées, essayiste et poète_ et de David Lynch , un réalisateur américain bien difficile à classer. Le caractère « protéiforme » de son art m'intéressait tout particulièrement, car cet artiste passa de peintre à réalisateur de films, puis de séries, à designer, photographe et plasticien, musicien, producteur de publicités et inventeur d'une méthode de méditation transcendantale destinée à lutter contre la violence dans les écoles. Cette sorte d'universalité artistique, le procédé de recyclage qu'il utilise pour utiliser d'un art à un autre les mêmes figures et obsessions me plaisaient et m'ont encouragé à approfondir mes connaissances. Le pont qu'il construit entre les arts m'intéressait particulièrement, la question de la transversalité dans son esthétique a d’abord monopolisé mon attention. Ces deux artistes, très influencés par le mouvement surréaliste auquel je me suis toujours intéressée, et tout particulièrement en littérature, m'ont guidé vers les Midnight Movies. Eraserhead étant le film que j'estime le plus, je me suis tournée vers ses particularités esthétiques ; ce premier film de Lynch est quasiment expérimental, fait de manière artisanale (Lynch assume durant la durée du tournage, soit 5 ans, tous les rôles, de décorateur à chargé de bruitage, tout comme Jodorowsky, dans El topo, est à la fois acteur, réalisateur, musicien, décorateur, peintre et costumier) avec un petit budget, et très influencé par l'esthétique surréaliste. En 2004, Eraserhead a été « déclaré » culte dans l'histoire du film américain, classé comme tel par le National Film Registry , ce qui suggère qu'il a été sélectionné pour son « importance culturelle, historique ou esthétique » . 6 DURAND Camille_2010 Introduction Ce film fait figure d’OVNI dans le paysage du film, et j'ai donc étudié, en mettant en relation les premiers courts métrages de Lynch « the Alphabet », « The grandmother », « six men getting sick » avec ses peintures (que j'ai pu analyser grâce au catalogue de l'exposition de la fondation Cartier qui lui était dédiée en 2007), les principales figures, obsessions lynchiennes. Dès lors il m'a fallu me questionner sur la forme du travail que je souhaitais accomplir sur Lynch: était-ce l'esthétique du cinéma de Lynch, ou, d'un point de vue plus externe, l'impact de son film le plus culte sur les spectateurs (c’est à dire une analyse plus tournée sur la réception). Il m'est apparu évident que l'esthétique n'allait pas être l'objet de ce mémoire, mais que l'enjeu se trouvait justement dans le lien entre les films et le contexte culturel et social dans lequel ils s’ancraient. J'ai pensé qu'il était intéressant de se focaliser sur le contexte de réception d'une telle œuvre et me suis dirigée ainsi vers les conditions qui ont été celles de la sortie du film: j'ai alors découvert que le film Eraserhead, dont le financement avait été interrompu en cours par L'American Film Institute en raison de sa singularité, de sa « bizarrerie », de son caractère hybride dans le style de l'époque , avait été diffusé à petite échelle dans des conditions uniques: à minuit, et sans aucune publicité , tout comme l'avait été, six ans auparavant le film de Jodorowsky, El Topo. A ce moment précis, mes intérêts premiers se sont donc retrouvés unis dans un même cadre de réception. Le documentaire de Stuart Samuels, « Midnight Movies 1 » a véritablement achevé de fixer mon sujet, car il m'a aidé à problématiser ce sujet. Sans l'avoir trouvé d'une très bonne qualité, il a levé le voile sur la singularité du dispositif de réception du premier long métrage de Lynch: Eraserhead fait partie d'un ensemble de films connus sous le nom des « midnight movies » qui ont fait date dans l'histoire du cinéma américain, devenus des films culte. Ces films au contenu généralement « subversif », ont rassemblé des foules dans les cinémas de grandes agglomérations comme à Manhattan dans la ville de New York. Le documentaire se limite à l'étude de six des plus marquants de ces midnight movies : The night of the living dead, de George Romero, Pink Flamingos, de John Waters, Eraserhead, de Lynch The Harder they come, de Perry Henzell, The Rocky Horror Picture Show, de Jim Sharman et El Topo , de Jodorowsky. Ces six films, restant souvent des mois à l'affiche, vus et revus des dizaines voir des centaines de fois pour certains, rapportant aux cinémas des millions de dollars, avaient donc un statut unique. Aux Etats Unis, ils ont été l'objet d'étude de plusieurs critiques de cinéma et de journalistes qui ont voulu se pencher sur un phénomène étonnant, concomitant d'une période de libération des moeurs. L' apparition des midnight movies L'expression « Midnight Movies », apparaît dans les années 50 aux Etats Unis, désignant à l'origine une pratique courante de quelques chaînes de télévision locale : diffuser les films de genre à petits budgets, les fameux films de série B, à une heure avancée dans la nuit, l'heure où l'audience chute, l'heure où une audience différente de celle de la journée allume sa télévision, prête à y voir plus que de simples émissions de divertissement.