Histoire De L'île De Sein 1
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Calligraphie de la couverture : Solange Mansillon - Grasse. D’après un des plus ancien alphabet oncial gaélique du type du livre de Kells, VIIème siècle. HISTOIRE DE L’ILE-DE-SEIN Compilation chronologique de tous les documents - cartes, textes, légendes, dessins et photos - trouvés sur l’île et ses environs. 3 photos Jean-Michel Keroullé 4 Preambule L’île-de-Sein, aujourd’hui île et commune à la fois, déroule derrière elle un long passé empli d’histoires légendaires, tragiques, romanesques et de tous les jours. Aucun autre endroit de France et peut-être du monde aussi petit par ses dimensions ne peut s’enorgueillir d’avoir tout à la fois charmé par ses nombreux atouts d’île entourée d’éléments sauvages et beaux, sauvé autant de vies menacées par les éléments déchaînés, participé à l’effort de guerre aussi massivement et, plus récemment, recherché une autonomie la plus importante possible dans la mesure de ses tout petits moyens. Comme le reste du monde, Sein a évolué, s’est transformée de nombreuses fois, ses côtes se sont déchirées, amoindries, rognées, enfoncées, au point qu’elle devient de plus en plus vulnérable face à ces éléments qui la fragilisent et la rendent encore plus attachante à celui qui la découvre comme à celui qui y vit. Ce livre, un de plus dans la longue collection des ouvrages consacrés à ce tout petit bout de terre rocheuse (ou l’inverse), n’a pas pour vocation de donner de nouvelles pistes ou réinventer une histoire truffée de points d’interrogation. Il n’a pour ambition, et c’est déjà beaucoup, que de retracer son histoire chronologique à travers les écrits, dires, dessins, événements, photographies, chansons, en bref toutes traces que ceux et celles qui l’ont foulée ont laissé derrière eux. Tout au long de mes recherches sur le passé de l’île, je me suis efforcé de glaner partout des documents et croiser les informations pour offrir au lecteur le plus d’éléments que j’ai pu trouver. Evidemment, ce sera toujours incomplet et il manquera encore des milliers de ces petits ou plus gros événements de tous les jours qui, mis bout à bout, font LA GRANDE HISTOIRE de Sein (vous êtes remercié par avance de tout manque important dans ce livre ou inexactitude que vous pourriez signaler). Mais du moins ce qui est consigné dans les pages suivantes aura été couché sur le papier lorsque Cenæ, Senæ, Sena, Senisse, Seyn, Seidhun, Sizun, Saints, Saint, Sein ou quel que soit le nom qui lui restera finalement, aura succombé à l’océan qui la frappe et la maltraite depuis autant de siècles. Pourquoi ce petit bout de Bretagne qu’on a si souvent qualifié dans le passé de milieu ingrat, inhospitalier, incultivable et aride fascine-t-il toujours autant que par le passé ? Je vous le laisse découvrir dans les pages suivantes... Bonne traversée ! Henri ROYER (1869-1938) Une jeune îlienne de Sein, 1906 Huile sur toile 65 x 53 cm 5 Table de Peutinger avec traduction des noms de villes bretonnes nommées. Bibliothèque nationale d’Autriche 6 Chapitre I Formation du Massif Armoricain Préhistoire UN LIEU SACRÉ Senæ sort des limbes, le lieu est isolé, à l’écart du continent mais non des routes maritimes... Idéal pour les druides, prophètes, druidesses. La légende commence. 7 Naissance du massif armoricain 1-vers 300 millions d’années: mise en place des granites sl (qui constituent le soubassement de l’ile) lors de la formation de la chaine hercynienne; il existe une similitude entre ce que l’on sait de cette chaine et la chaine himalayenne actuelle, en particulier des reliefs dépassant plusieurs milliers de mètres (j’utilise personnellement une image à ce propos; je dis à mes interlocuteurs que si l’homme avait existé à cette époque il y aurait certainement eu des remontées mécaniques et des tire-fesses à Quimper et à Vannes, entre autres !). * carte géologique de la Bretagne (auteurs: Jean Plaine, conservateur du musée de Géologie de l’Université de Rennes et Pierre Jégouzo, Maître de Conférences (er) Universite de Rennes) 2-épisode éémien (vers -110 000 ans) remontée marine (à environ 4m au dessus du niveau actuel) après la glaciation de Riss qui se traduit dans l’île par le dépot des levées de sables et galets du bourg et de Goulenez *“quaternaire”, “glaciation” “et inlandsis” 3-glaciation du Wurm (la dernière, qui s’est terminée il y a 15 à 20 000 ans) au cours de laquelle le niveau marin est descendu à une cote moyenne d’une centaine de mètres en dessous du niveau marin actuel - document “bathymétrie” trouvé sur la toile Pendant cette glaciation, Sein était partie intégrante du continent; la remontée du niveau marin a du conduire à isoler Sein du continent il y a plusieurs milliers d’années si l’on considère que les fonds dépassent 20m entre la pointe du Raz et l’ile. Ce domaine de la géologie n’est pas tout à fait ma spécialité mais je ne pense pas qu’à l’époque gauloise l’île ait pu être reliée au continent, l’argument précédent le rend difficilement plausible. En ce qui concerne le devenir de l’île vis à vis d’une remontée du niveau marin, les données altimétriques montrent un soulèvement de l’ouest de la Bretagne de l’ordre de 1mm/an qui viendrait donc compenser approximativement cette remontée marine (document “soulèvement”) Pierre Jégouzo - Maître de conférences - Université de Rennes Vice-président Société Géologique et Minéralogique de Bretagne Epoque mégalithique Les “ Causeurs ”, mégalithes posés sur un tertre devant l’église de Sein en sont presque les derniers et uniques témoignages. Orientés nord-sud, à 80 cm l’un de l’autre, ils mesurent 2,80m et 2,30m. Classés monuments historiques depuis 1901. Un sentier balisé de pierres verticales (voie sacrée), dit-on, partait des mégalithes pour rejoindre le tumulus du Nifran (C.I.M.H. 1901). Il n’en reste aujourd’hui aucune trace. Sur ces pierres dressées, quelques signes plus ou moins vagues indiqueraient une orientation par rapport aux étoiles et directions essentielles. L’île occupant une place de choix sur le parcours des phéniciens se rendant en mer Baltique chercher l’ambre, on suppose qu’ils s’arrêtaient dans le port de Sein qui était juste sur leur route. Aucune trace 8 cependant ne permet de l’affirmer Ar Brigourien - Les Causeurs. avec force. L’île était certainement beaucoup plus grande et rien ne permet d’affirmer également qu’elle n’était pas reliée au continent tout proche. D’où la légende de la ville d’Ys dans les pages suivantes... Extraits d’article de M. le Carguet, Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, tome XXIV, 1897 : L’île de Sein est composée d’une assise granitique recouverte de roches sédimentaires. Le granit qui forme le sous-sol profond n’est pas homogène. Tantôt, en grosses masses compactes, presque sans fissures, il émerge : tels, les kornog, roches ou îlots de la Chaussée ; ou bien, ces blocs, en avancée sur toutes les pointes de l’île, s’opposent à l’action érosive de la mer. ... Le sol de l’île subit des modifications continuelles en surface et en hauteur. Son étendue s’amoindrit par suite de l’érosion de la mer. Là où le granit, en assises plates, était seulement couvert de terre végétale (Bré-a-rog, Nivran, Pour-Ton, Guiveur), les embruns et les raz-de-marée le dénudent. Partout où la roche, émergeant à pic, ne s’est pas opposée à l’action de la mer, celle-ci a creusé des anses à fond de sable (Go-ster, Aber-bras, Aber-bian, Gribinoc-vras, Por-Denver), ou bordés de cailloux roulés, désagrégés de leur gangue ou tombés sur place. ... Un affaissement lent se détermine aussi, par suite de la désagrégation des roches du sous-sol, de la corrosion et de l’entraînement des roches superficielles par les eaux pluviales et les embruns surchargés d’acide carbonique. Cette corrosion est plus active depuis que l’industrie de la soude s’est développée : l’incinération des varechs exhalant, dans l’air humide qui entoure l’île, une plus grande masse de carbone. Cet affaissement est remarquable, surtout au Rojou. La pyramide, construite en 1817, par M. l’ingénieur Beautemps-Beaupré, laquelle s’élevait, alors, à 32 mètres, n’a plus qu’une vingtaine de mètres de hauteur. ... L’île de Sein était donc, autrefois, en étendue et en hauteur, bien différente de ce qu’elle est aujourd’hui. ... par ailleurs, dans les éboulis de la côte, on rencontre fréquemment, des haches polies, des poteries. Il est donc probable que l’espace de mer qui se trouve, aujourd’hui, entre cette ligne de roches et la terre, était comblée par une terre d’alluvion, s’étendant vers l’île de Sein. L’île devait en être séparée par un passage étroit, encore appelé Canol-Guéor, le chenal du géant, ou mieux, du Gaulis. C’est sur cette pentière que les riverains placent la légendaire ville d’Is, dont l’île de Sein était l’extrémité. Mais laissons les légendes. En résumant ces données, on peut admettre que l’île de Sein, si elle n’était pas attachée à la terre ferme, s’étendait, du moins, sur la chaussée, de plusieurs kilomètres, et sur le raz-de-Sein de un kilomètre. Son profil, aussi, était bien différent. Des élévations, au Guiveur et à Bec-a-C’halé, séparaient le Len, de la mer. Le Len, partie basse de l’île, recevait les eaux pluviales des sommets qui l’entouraient, et formait étang, en hiver.