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LE GRAND- POINT DE DEPART D'UNE GRANDE AGGLOMERATION?

par Robert ANDRE, * s Bruxellensis ILO Professeur extraordinaire à l'Université Libre de Bruxelles, Directeur du Centre d'Economie régionale de l'Institut de Sociologie. 1^ 081 n25/2 L'objet de cet article est de tenter une analyse du projet ministériel qui a abouti i'35 à la naissance du Grand-Mons, d'aborder à travers cette critique le problème de la réorganisation de l'espace régional polarisé et d'examiner le tout dans le cadre législatif nouveau créant les grandes agglomérations, et lesHdéiations de communes.

La proposition ministérielle

Le projet baptisé « Grand­Mons » présenté par le montoise qui s'étoffe et qui s'étire le long de la route Ministre de l'Intérieur délimitait une agglomération de Tournai, une zone vide dans la plaine et un nou­ montoise groupant plus de 80.000 habitants sur une veau parc industriel au pied du versant, le long du superficie de l'ordre de 9.000 hectares, ce qui se tra­ nouveau canal. duisait par une densité de 900 habitants au km" (1). Au sud­ouest, la proposition ministérielle intéres­ Ce nouvel ensemble était formé par la fusion de neuf sait trois communes qui appartiennent au Borinage c'jmmunes et par l'appoint d'une partie de territoire traditionnel : deux, Flénu et à l'agglomé­ de cinq autres (carte n° 1). ration boraine au sens le plus strict, la troisième, ^Les communes reprises en totalité dans ce projet Cuesmes, à la même agglomération dans son sens dessinaient un croissant géographique enserrant large (2). Mons par l'ouest. Au nord, on y trouvait et Ce secteur est le plus peuplé puisque les trois com­ , deux communes autrefois unies administra­ munes réunies groupaient 30.372 habitants au 31 dé­ tivement, qui se situent dans la plaine de la cembre 1969 plus que la commune de Mons qui en au nord de la voie ferrée Mons­Charleroi et de part comptait 27.704 à la même date, Cuesmes et Jemappes et d'autre du double axe du Canal du Centre et de touchent à Mons et une partie de leur territoire con­ l'autoroute de Wallonie. Cette concentration humaine, stitue indiscutablement un faubourg de Mons ; à Je­ excroissance montoise dont l'épine dorsale est la route mappes, il s agissait du Quartier du Pont­Canal situé de Bruxelles forme à Nimy un faubourg de Mons et sur la route de Valenciennes à sa sortie de Mons et à Maisières une banlieue résidentielle proche de la à Cuesmes du Quartier de l'Arsenal qui s'est constitué ville. en fonction des deux axes routiers Mons­ Au nord­ouest, le projet englobait la commune de , unité complexe qui s'étend sur la plaine de la Haine et sur son versant septentrional boisé. On y (2) De nomb:eux auteurs ont analysé les limites du Bobinage. distingue un noyau central très peuplé, une banlieue Le Borinage le plus strict défini par J. JACQUEMYNS (a) comporte les neuf communes suivantes : Flénu, F­ameries, Hornu, Jemappes, La Bouveiie, Pâturages, Quaregnon, Wasmes et Wasmuël. (1) Au moment de la présentation du projet, les dernières don­ M. L. LHOTE (b) définit un Borinage plus large composé nées démographiques connues, celles arrêtées au 31­12­1969, de quatorze communes ; il reprend les neuf communes ci ées accordaient au Grand­Mons 82.146 hab tants pour une su­ et ajou'e Boussu, Cuesmes, Dour, Sa nt­Ghis'ain et War­ perficie de 9.056 hectares donc une densité de 907 habitants quign'es. au km­. Ce te valeur est assez faible pour une entité urbaine Nous avons donné dans un travail antérieur (e) une critique même dans le cadre de la région industrielle wallonne. En de ces diverses conceptions. effet, la c'ensité communale la plus forte, les 1.869 habitants (a) JACQUEMYNS, J., La vie sociale dans le Borinage au km^ de Jemappes, n'atteignent pas 2.000 ha^ifants au houitler, Bruxelles, Librairie Fa'k et Fils, 1939, 490 p. km''^, niveau dépassé par toutes les communes nm trophes à Charle oi, ville ayant de plus une densité supérieure à (6) LHOTË, L., La démographie du Borinage, Le Hainaut 6.000 habitan's au km­. Economique, 1950, n° 3, pp. 239 à 270. Voir ANDRE R., La démographie du Hainaut, tome 1, (c) ANDRE, R., Flénu, Analyse démographique d'une com­ « Charleroi et son agglomération •, Editions de l'Insiitut de mune boraine, Mons, Sorié'é des Sciences, des Arts et Sociologie de l'Université Libre de Bruxelles, 1970, 250 p. des Lettres du Hainaut, 1961­196,2, 176 p.

41 Athis A Flénu Fl Maisières Ma Saint-Symphorien St S Baudour Ba Frameries Fr Masnuy-Saint-Jean M St J S Boussu Bo Genly Ge Me Teitre T Boussoit B Ghlin , Gh Mons Mo Villerot V Casleau Ca ' Har Nimy Ni Villers-Saint-Ghislain V St G Ci Havré Hv Noirchain N Ville-sur-Haine V s H Cuesmes C Hornu Ho No Warquignies W Elouges El Hyon Hy O Wasmes We Erbaut Et Jemappes Je Pâturages P Wasmuël Wu Erbisœul El Jurbise Ju Quaregnon Qa Eugies Eu La Bouverie LE Saint-Ghislain St Gh et Mons-Maubeuge. Les deux noyaux de Cuesmes et deux ensembles géographiques intéressant au total de Jemappes sont nettement séparés de Mons par des cinq communes. Au nord-ouest, le territoire repris terres sans habitat en partie encore sous exploitation appartenait à la commune de Baudour et incluait dans rurale. Les installations du chemin de fer ont été le projet la partie occidentale de la zone industrielle l'obstacle principal au développement résidentiel mon- nouvelle de Ghlin-Baudour, cette annexion était donc tois dans ces secteurs, l'autoroute avec l'amorce d'une sans effet démographique au contraire de celle réalisée route annexe rapide va à Jemappes doubler cet obstacle. au nord. Celle-ci réunissait des morceaux détachés des Enfin, Flénu n'est pas limitrophe à Mons, la localité communes de Casteau, de Masnuy-Saint-Jean, de Jur- se situe à l'écart de la plaine de la Haine, sur le bise et d'Erbisœul attribuant ainsi au Grand-Mons revers du plateau houiller des Produits. toutes les installations du S.H.A.P.E. y compris des logements situés hors du site ainsi que la zone résiden• Au sud, trois communes, Ciply, Hyon et Mesvin tielle développée dans la zone boisée ou à proximité. étaient reprises dans le concept ministériel ; seule Hyon borde le territoire de Mons, mais les deux autres L'objectif fondamental de ce projet était de donner sont proches. Cet ensemble communal était le secteur à la région un centre urbain à même de devenir le le mois peuplé puisque les trois réunissaient seulement pôle catalyseur et créateur d'un renouveau économi• 5.413 habitants au 31 décembre 1969, c'est-à-dire que (3). Le découpage proposé visait à doter la ville moins de 7 % de la population des onze communes. de Mons d'un certain nombre de moyens, lui permet• Hyon forme un faubourg montois intégré à la ville tant de jouer avec efficacité son rô'e de capitale régio• alors que les deux autres localités sont restées plus nale. Pour atteindre ce but, le projet accordait à la rurales tout en appartenant à la banlieue résidentielle nouvelle entité des possibilités de recettes grâce à montoise. Les communes de Ciply et de Mesvin étaient l'absorption de la totalité de la zone industrielle de les deux seules parmi les seize concernées par le projet Ghlin-Baudour, par l'apport des industries métallur• à compter moins de 1.000 habitants. giques de Jemappes et de Cuesmes, et des cimenteries d'Obourg. En outre, la proposition ministérielle es• Au nord-est, le projet absorbait Obourg, commune sayait de donner à Mons un prestige international en formée par la fusion récente d'Obourg et de Saint- lui permettant d'être le siège du S.H.A.P.E. Enfin, Denis. La partie habitée se situe au nord du canal du le projet tentait de dessiner une ville au territoire Centre et du chemin de fer de Mons à Charleroi et administratif plus conforme à la réalité urbaine englo• comporte le noyau très peuplé de l'ancienne commune bant la cité et ses faubourgs. L'ensemble urbain ainsi d'Obourg qui s'effiloche au nord en direction du petit réalisé pourrait permettre un aménagement plus effi• noyau rural de l'ancienne commune de Saint-Denis. cient de la région. Cette zone résidentielle est très nettement séparée de Mons par le double obstacle du canal et de la voie ferrée ; lieu où s'est implanté le complexe des cimen• teries. (3) Dans sa dépêche du 7 avril 1970, M. Harmegnies, ministre de l'Intérieur s'en expliquait clairement, il soulignait que 9 Les parties de communes annexées se trouvent • Mons a un rôle prédominant à jouei dans la reconversion toutes au nord et au nord-ouest de Mons et constituent actuellement en cours de la région ».

Le concept de la région

Cette vue prospective, objectif fondamental de cette du passé et du présent est l'analyse démographique (5). entreprise de fusion peut servir de point de départ à Cet instrument de recherche est très souvent négligé quelques réflexions dégageant le rôle des analyses et les enquêtes préparatoires se bornent à un chapitre géographique et démographique dans l'aménagement sur la population souvent sommaire et plus descriptif du territoire. La géographie décrit et explique ; la géo• qu'explicatif. graphie appliquée (4) ajoute une recherche prévision• En effet, on croit en général à la primauté de l'éco• nelle et tente de concevoir la transformation d'un nomique sur le démographique, faisant de l'évolution ensemble spatial sous l'effet des modifications d'un démographique une variable dépendante des fluctua• ou de plusieurs de ses éléments, se permettant ainsi d'établir à la fois le diagnostic et le remède. Ainsi tions économiques alors que la réciprocité existe et conçue, l'analyse géographique, support d'un plan que la population conditionne aussi l'évolution écono• mique. Ainsi, un fait démographique, comme le vieil• d'aménagement doit au-delà du diagnostic prévision• lissement d'une population, peut être un obstacle à nel, tracer les lignes de force du nouvel ensemble. la rénovation économique. Nous pensons qu'un des moyens permettant au géographe de préparer l'avenir d'une région à partir

(5) ANDRE R., Démographie régionale et aménagement du ter• ritoire : application à l'agglomération carolorégienne. Coi- (4) Sur le rôle de la géographie appliquée, voir PHILIPPON- loque internai ional de géographie appliquée. Les Congrès NEAU M., Géographie et action, Paris, A. Colin, 1960, et Colloques de l'Université de Liège, 1968, volume 48, 227 pages. pp. 285-291.

43 En ce moment de l'évolution de nos structures poli• encore une partie de la surface terrestre caractérisée tiques internes, une option très prônée et de plus en par un même paysage et ainsi, la Hesbaye est le pays plus suivie se dessine en faveur d'un développement du limon sur la craie, la région des champs ouverts, économique et humain lié à une autonomie régionale des grosses fermes à cour fermée et de l'habitat con• renforcée. Cet esprit de décentralisation se dresse centré. Or, dans les pays à haut niveau de vie, le partout en Occident, face à l'emprise jugée excessive paysage correspond de moins en moins à la réalité des capitales grandes métropoles urbaines. régionale et il convient dès lors de se tourner vers d'autres critères de cohésion et de les chercher dans En ces circonstances, il convient donc de s'arrêter les relations humaines. Ces liens entre les hommes un instant au contenu du concept de la région, objet se traduisent par des caractères communs, facteurs de même de la géographie telle que la concevait l'école cohésion qui, coordonnés, produisent une unité régio• française (6) et son fondateur Vidal de la Blache. En nale. décrivant, en saisissant, en expliquant la logique in• terne complexe d'une partie de la surface terrestre, L'élément organisateur de cet espace à l'homogénéité fragment répété dont l'identique n'existe nulle part, complexe et subtile, ce responsable créateur de l'unité le géographe définit une région et tente d'en établir régionale, c'est la ville ! Les villes structurent l'espace les limites. en régions hiérarchisées dont les traits communs n'ap• paraissent guère dans l'aspect du paysage. Il faut d'ailleurs remarquer que la région est sou• vent conçue comme un cadre préliminaire justifié de A notre époque, la nécessité d'aménager le territoire manière simple par une certaine homogénéité souvent à partir des pôles urbains s'affirme. Le territoire pola• physique, parfois ethnique et quelquefois économique. risé par les villes ressemble à un champ magnétique Si les limites d'une région paraissent stables donc multiple dont les lignes de force convergent en se aisées à déterminer, il est clair que cette région est resserrant vers des nœuds privilégiés, les villes. Le un ensemble statique qui fut une entité vivante dans renforcement de ces nœuds permet l'intensification du le passé et qui, dans le présent, est proche de sa désin• réseau de lignes de force et une extension de l'aire tégration donc de sa fin. Autrefois, dans le cadre d'une polarisée. Une erreur fondamentale est donc de con• société à évolution lente, il n'en était pas ainsi, et les cevoir la région comme un espace délimité définiti• pays régionaux se dégageaient avec une précision due vement et non comme une aire d'extension variable à un immobilisme généralisé. Aujourd'hui, la remise liée à la puissance du centre urbain. Une autre erreur en cause est de tous les instants, tant pour les hommes tout aussi fondamentale est de vouloir délimiter la que pour leurs créations, et dès lors la limite d'une ville dans sa région ; comme elles vivent en symbiose, entité régionale varie de manière permanente et ap• les isoler l'une de l'autre est leur nuire à toutes deux. paraît, non pas unique, mais multiple.

Ainsi le dynamisme actuel a changé les termes du fait régional. Dès lors, comment concevoir la région ? Comment la déterminer dans son présent et la saisir dans son mouvement ? Pour certains, la région reste Ces quelques réflexions permettent de conclure qu'une fusion de communes urbaines est à la fois un phénomène local et régional et qu'elle ne peut se con• (6) Voir JULLIARD E., La région : essai de définition, An• cevoir que dans un cadre géographique assez vaste, nales de géographie - septembre-octobre 1962, pp. 483 à en ayant présent à l'esprit, l'impératif de l'organisa• 499, et LABASSE, La portée géographique des programmes d'action régionale français. Annales de géographie, juillet- tion d'une agglomération cohérente et d'un aménage• août 1960, pp. 371 à 393. ment du territoire polarisé.

La complexité géographique du bassin industriel

Revenons au problème du Grand-Mons en étudiant trois constituent des agglomérations qui se différen• brièvement, par le biais de la géographie et de la cient par la structure urbaine. Dans une vue syn• démographie, les structures régionales du bassin minier thétique, on peut qualifier le Pays noir, région de hennuyer de manière à dégager les aménagements pos• Charleroi, comme une agglomération fermée à forte sibles. Il est classique de compartimenter cette zone densité humaine qui entoure une forteresse du XVIF industrielle en trois agglomérations, Mons-Borinage, siècle, petit centre urbain qui la coordonne et qui le Centre et Charleroi. s'efforce de devenir une grande ville. Dans la même Ces trois entités sont fondamentalement à la fois optique, on peut affirmer que l'agglomération du semblables et différentes. Toutes trois sont nées du Centre a vu naître une commune industrielle nouvelle, développement industriel ; chacune forme une agglo• La Louvière issue de Saint-Vaast, germe urbain qui mération au tracé interne incohérent, résultat de domine l'agglomération et tente de rassembler sur son l'union plus ou moins achevée des noyaux ruraux, territoire les éléments impérativement nécessaires pour phénomène spontané qui débute au XVIIP siècle et son avenir de ville. Enfin, toujours dans un esprit de qui s'éteint à la grande crise des années 30. Toutes synthèse, il faut souligner que l'agglomération de

44 Mons-Borinage recouvre une dualité ; Mons vieille centres commerciauax nés à l'intérieur du Borinage et capitale médiévale a manqué la révolution indus• de dégager le rôle de Mons. (9) trielle (7) laissant se développer à côté d'elle une On peut envisager un premier échelon d'attraction, agglomération à noyaux multiples qui n'a pu, vu la le village-centre qui peut être considéré comme le relais proximité de Mons et malgré l'intensité de son peu• avant la ville pour les services de fréquentation quo• plement, susciter en son sein l'apparition d'un foyer tidienne. Les tableaux n"'' 1, 2 et 3 reproduits ci-après urbain ; on peut hélas écrire que Mons est une ville donnent les résultats obtenus sous la forme d'un pour• sans agglomération et que le Borinage est une agglo• centage calculé par rapport au total des réponses mération sans ville. reçues et d'un indice comparatif. (10) Les tableaux L'analyse démographique dégage ce contraste des n°'^ 1 à 3 dégagent deux situations différentes ; Je• comportements évolutifs de Mons et du Borinage. (8) mappes monopolise ses habitants au niveau des services quotidiens, fait qui se reproduit à Quaregnon alors De 1831 à 1866, période de développement indus• qu'il est moins net à Flénu déjà attiré à cet échelon triel intense du bassin minier wallon, la population par Jemappes. montoise diminuait alors que celle du Borinage dou• blait. En 1930, au moment de la crise, le nombre Le deuxième échelon retenu dans l'enquête se situe d'habitants avait plus que quadruplé en un siècle à à un niveau intermédiaire entre le village-centre et la Boussu, à Cuesmes, à Jemappes-Flénu, et à Quare- petite ville. A cet échelon, on constate dans le cas de gnon mais il ne s'était accru que de 20 % à Mons. Flénu que l'attraction boraine l'emporte sur l'attirance montoise et que Flénu tout en ayant encore un poten• L'évolution démographique récente crée un nouveau tiel important à ce niveau est dans l'orbite de Jemappes contraste entre Mons et le Borinage. La carte n° 2 (tableau n° 4). (11) Pour Jemappes, on peut conclure ci-après traitant du dynamisme démographique de la qu'à l'étage considéré, la localité se suffit à elle-même période quinquennale 31-12-1964 à 31-12-1969 le avec le correctif de l'apparition d'une attirance mon• dégage dans ses grands traits puisque sept des neuf toise (tableau n° 5). Enfin, la commune de Quaregnon communes du Borinage au sens le plus strict perdaient se suffit aussi à elle-même avec une attirance montoise des habitants alors que les deux autres connaissaient plus faible qu'à Flénu et Jemappes (tableau n" 6). un accroissement positif très faible. Mons bénéficiait d'un bilan annuel positif d'un peu plus de 5 %o, les Enfin, on s'est intéressé à un dernier échelon, celui communes limitrophes au nord, à l'est et au sud béné• des petites villes, définies dans l'enquête nationale ficiaient de taux d'accroissement toujours supérieurs citée, comme des « centres des équipements de base à 5 %o et dans la majorité des cas à 10 %o- Que signi• pour les soins et services élémentaires et le com• fie ce fait nouveau ? Il reflète d'abord les effets de la merce». (12) Dans le cas flénusien, la commune , crise économique désastreuse qui a liquidé la totalité s'inscrit dans la zone d'influence de deux localités, du potentiel productif minier du vieux Borinage. Il Jemappes et Mons et pour la première fois, l'attirance résulte ensuite de l'implantation du S.H.A.P.E. sur le de Mons l'emporte (tableau n° 7). (13) Dans le cas plateau de Casteau puisque si le personnel militaire jemappien, l'attraction montoise reste secondaire (ta• est dispensé de toute inscription dans les registres bleau n° 8) et il en va de même pour Quaregnon (ta• communaux, les membres du personnel civil et les bleau n° 9). Jemappes et Quaregnon exercent sur leurs personnes à charge des militaires et des civils sont habitants respectifs une attirance du type petite ville ; inscrits dans la commune de résidence. Il correspond on observe que ce rayonnement urbain de Jemappes enfin à une expansion hors des murs de la ville de s'étend à une aire régionale restreinte puisqu'il s'exerce Mons, phénomène récent, rendu aisé par l'importance sur Flénu et un peu sur Quaregnon. des territoires ruraux disponibles à proximité de la ville tant à l'est, à Saint-Symphorien, qu'au sud, à Hyon.

L'enquête réalisée en juin 1970 dans les communes (9) Pour l'établissement du questionnaire, on s'est inspiré en de Flénu, de Jemappes et de Quaregnon a tenté de partie d'une enquête réalisée par les Instituts de géographie préciser quelles étaient pour leurs habitants les loca• des Universités rie Bruxelles, de Gand, de Liège, de Lou- lités attractives, afin de mesurer l'importance des vain et de la Faculté Universita're de Namur. Voir SPORCK J.-A., Hiérarchie des villes et options pos• sibles pour une restructuration de l'espace régional dans le Hainaut, Bulletin Economique du Hainaut, 1969, n" 3, pp. 10 à 15 et ANNAERT ]., Le réseau urbain du Hai• naut dans « Le Hainaut français et belge •, A.E.D.E., Mons, Maison Losseau, 1969, pp. 81 à 93. (10) Afin de pouvoir comparer les résultats, on a calculé un indice. Pour cela, on a considéré que le maximum de possi• (7) PIERARD C, Le développement territorial de Mons et ses bilités d'être cité était de 100 par question puisque 100 per• virtualités économiques ou les occasions manquées, dans sonnes étaient interrogées. Dès lors, le maximum possible • Le Hainaut français et belge •, A.E.D.E., Mons, Maison pour l'ensemble des 13 questions s'élevait à 1.300 et on a Losseau, pp. 45 à 61. calculé le pourcentage obtenu pour chaque localité par rap• (8) ANDRE R., Démographie régionale et fusion de communes. port à ce total limite de 1.300. Pour les c'é'ails des ques• Le cas montois. Revue de l'Institut de Sociologie, 1971, tionnaires, voir, R. ANDRE, Le Grand-Mons, op. cité, n" 1, pp. 135 à 150. tomes II, A, B et C. Le lecteur trouvera dans cet article des données statistiques (11) Les indices des tableaux n° 4 à n° 6 sont calculés sur la détaillées extraites pour la plupart de ANDRE R., Le base d'un maximum possible de 1.100. Grand-Mons, Réflexions sur un projet de fusion, Centre de démographie de l'Institut de Socologie, Rapport stencilé, (12) SPORCK J.-A., op. cit. tome I, 120 pages ; tome II a, 48 pages, B 50 pages, (13) Le Indices des tableaux n" 7 à n° 9 sont calculés sur la C 52 pages ; tome III 26 pages. base d'un maximum possible de 1.200.

45 y// 35 100

10 25

5 à 9,9 TAUX D'ACCROISSEMENT

ANNUEL MOYEN 0 à 4,9

31.12.1964 _ 31-12.1969. EU] Taux négafifs La réalité régionale de Mons et du bassin industriel les deux agglomérations industrielles lui donnait un du Couchant de Mons se caractérise par l'incohérence atout géographique qu'elle n'a pas tenté de valoriser. au niveau de l'ensemble. Ceci se traduit par l'impuis• 11 s'ensuit que le Centre s'est replié sur lui-même et sance de Mons à polariser l'espace géographique cor• s'est créé La Louvière, carrefour dominant ; il en respondant dans les normes habituelles à une cité de résulte que le Borinage se repliant de même a vu sa qualité. En réalité, Mons, est par sa position géo• naître quelques foyers à rayonnement local. Il est dès graphique, le pôle urbain qui aurait dû inclure dans lors réaliste de penser qu'aborder dans le concret, par son aire d'influence tout le bassin de la Haine, donc Mons, le problème de la création par fusions d'une à la fois le Centre et le Borinage. Sa situation entre grande ville était à la fois une gageure et un impératif.

Ville élargie ou grande agglomération ?

A partir du projêt ministériel, on pouvait envisager envisageait d'agrandir Mons en lui attribuant ses deux formules : la solution restreinte correspondant faubourgs, c'est-à-dire en enlevant aux communes voi• à une ville élargie à ses faubourgs et la grande agglo• sines des territoires qui, sur le plan du peuplement, mération. sont des extensions de Mons. Cette première proposi• tion ne constituait pas la création par fusions d'une La proposition ministérielle n'était ni l'une ni l'autre nouvelle commune, mais une adaptation des limites. et il est nécessaire de le montrer, car la solution fina• lement retenue était légalement liée à l'option géo• La deuxième solution, toujours dans le cadre géo• graphique du projet initial. graphique restreint consistait à dessiner Mons avec ses faubourgs et sa zone d'expansion résidentielle urbaine. Le projet ministériel correspondait à une solution Cette optique, qui correspond à la réalité de l'avenir, restreinte géographiquement imparfaite. En effet, le imposait l'annexion d'un ensemble sud-est formé par ministre prévoyait une auréole territoriale englobant Hyon, Mesvin, Saint-Symphorien et Spiennes, englobait Mons au Nord, à l'Ouest et au Sud mais absente à la zone résidentielle de Nimy au-delà du canal, absor• l'Est. Or, la commune de Saint-Symphorien, située à bait les communes de Ghlin, de Cuesmes ainsi que le l'Est sur la route de Charleroi, constitue une des deux quartier extérieur du Pont-Canal à Jemappes. Une telle zones dynamiques de progression résidentielle périphé• solution excluait la bordure résidentielle du nord de rique de Mons (carte n" 2), l'autre étant Hyon. Du Casteau à Erbisœul, les installations du S.H.A.P.E., 31-12-1947 au 31-12-1969, Hyon augmentait sa popu• Obourg, Ciply et les deux communes boraines de Flénu lation de 43,6 % et Saint-Symphorien de 45,7 % ; le et de Jemappes. déséquilibre spatial du projet était donc évident. Dans le cadre plus ambitieux de la création d'une Cependant, le projet ministériel révélait aussi une grande agglomération, nous excluions, vu les réalités tentative de grande agglomération puisqu'il intégrait géographique et sociologique, la possibilité de créer à Mons, diverses zones industrielles assez éloignées une agglomération d'un seul tenant avec Mons comme du centre, l'ensemble international du S.H.A.P.E., le foyer directeur. Le choix dans la constitution d'une front résidentiel de la banlieue du nord et une partie grande agglomération Mons-Borinage implique, non de de la vieille agglomération boraine sociologiquement et rejeter les réalités difficiles mais de les utiliser. géographiquement étrangère à Mons. Dans la concep• tion « grande agglomération >•, la proposition apparais• Ainsi, dans le cadre de la conurbation inorganisée sait à nouveau déséquilibrée puisque le Grand Mons du Borinage, il faut aménager le territoire à partir des proposé réunissait une population de 80.000 habitants foyers attractifs disséminés dans l'espace aggloméré. alors que l'agglomération boraine est à elle seule une Ces noyaux attractifs, Jemappes pour Flénu, devien• entité de 90.000 à 140.000 habitants selon les défini• draient les centres de districts qui devraient s'unir pour tions géographiques retenues. Il apparaît qu'une grande former une seule agglomération. agglomération Mons-Borinage géographiquement com• plète grouperait environ 200.000 habitants et s'éten• drait à l'ouest jusque la région de Dour (carte n° 1). Dès lors, la solution que nous avancions, dans le cadre limité déterminé par le projet ministériel, était Sur la base des deux options ci-dessus, nous avons de créer par le moyen des fusions, le district de Mons présenté diverses solutions pour le compte des com• et d'amorcer la constitution d'un premier dictrict munes de Flénu et de Jemappes. borain, à compléter dans une phase ultérieure, en Dans l'optique restreinte et sans sortir des limites unissant Jemappes et Flénu, communes qui ne furent géographiques du projet initial, la première solution séparées qu'en 1870.

Le 21 avril 1971, le Moniteur belge publiait une loi 91 et 92 de la loi du 14 février 1960 d'expansion du 9 avril 1971 portant ratification d'une quatrième économique, de progrès social et de redressement série d'Arrêtés royaux pris en exécution des articles financier. Cette loi ratifiait deux Arrêtés royaux du

47 18 février 1971 portant, l'un, sur la fusion des com• La décision gouvernementale maintenait hors de munes de Mens, Cuesmes, Ghlin, Hyon, Nimy et Mons les communes de Ciply, de Maisières et de Mes- Obourg et, l'autre, sur celle des communes de Je- vin qui subsistaient ; elle abandonnait l'idée d'attribuer mappes et de Flénu. à Mons le secteur du S.H.A.P.E. et les zones résiden• tielles proches. Le nouveau Mons était donc formé par la fusion de six communes, par l'annexion d'une partie de Je- mappes située entre Mons et l'autoroute et constituant le Quartier du Pont-Canal, ainsi que par la prise de possession de la totalité de la zone industrielle de La décision retenue est donc assez éloignée du projet Ghlin-Baudour par l'adjonction d'une portion de ter• initial. Elle représente pour Mons une solution res• ritoire de Baudour. treinte qui lui accorde presque tous ses faubourgs et La nouvelle commune de Jemappes était réalisée par qui lui attribue plusieurs zones industrielles. Cepen• la fusion des anciennes communes de Flénu et de dant, elle est aussi une amorce de solution boraine Jemappes et par la perte du quartier du Pont-Canal puisqu'elle réalise dans cette agglomération une pre• cédé à Mons. mière fusion en unissant Jemappes et Flénu.

Point final ou point de départ ?

Ces réalisations nouvelles peuvent être l'amorce d'un sur 7 à 10 entités fédérées qui pourraient se trans• réaménagement général de la région grâce aux possi• former en 7 à 10 districts communaux, résultats des bilités ouvertes par la loi promulguée le 26 juillet 1971 fusions internes. A ce stade, il resterait à ces districts qui organise les agglomérations et les fédérations de de consentir l'effort ultime de se fédérer entre eux et communes. de créer ainsi la grande agglomération Mons-Borinage.

L'article 2, paragraphe 4, de cette loi prévoit : « A partir du 1" janvier 1975 et avant le l" janvier 1976, le Roi désigne la fédération' à laquelle appartient toute Pour conclure, il faut souligner d'abord que les commune du Royaume qui ne fait partie d'aucune circonstances ont placé Mons dans une situation géo• agglomération ou fédération ou qui, même après fusion, graphique périphérique par rapport aux parties agglo• ne constitue pas une entité suffisante ». mérées. Il est donc important, si on poursuit l'objectif d'une grande agglomération centrée sur Mons, de créer Cette loi permet la relance de l'idée de la création deux fédérations de communes flanquant la ville au d'une grande agglomération Mons-Borinage, car elle nord-est (Havré, Vil)e-sur-Haine) et au sud-est (Har- convient pour un ensemble aussi inorganisé. Il faut en mignies, Saint-Symphorien). effet aménager le territoire à partir des foyers attrac• tifs disséminés dans l'espace aggloméré. Ces nœuds Il faut constater ensuite que les solutions intervenues deviendraient les centres des fédérations nouvelles ont abouti à la création d'un premier district, celui de selon l'esprit de la loi qui prévoit dans son article 2, Mons, et à l'amorce d'un deuxième, celui de Jemappes- paragraphe 3 qu'« à l'initiative du Ministre de l'Inté• Quaregnon. rieur, les Députations permanentes dressent la liste des Si la volonté de réaliser un premier district borain communes aptes à devenir le noyau de futures fédé• se matérialise, la solution du Grand-Mons aura été rations >. le point de départ de la grande agglomération, espoir Mais le progrès serait faible si on en restait là. En d'un renouveau. effet, une agglomération ou une fédération de com munes formée par un trop grand nombre de cellules TABLEAU 1 communales distinctes serait difficilement gouvernable, Réponses aux questions du niveau « village-centre » car elle serait l'objet de trop de pressions particulières de l'échantillon interrogé à Flénu et ce d'autant plus que la composition du Collège est (% par rapport au total des réponses et indices) déterminée, mis à part le cas du président, par un système proportionnel. (14) Localités % Indices Il s'ensuit que le système, si on le veut efficace, ne peut .être envisagé que comme une étape permettant Flénu 71,1 65,5 de susciter des fusions au sein de chaque fédération Jemappes 17,1 15,8 avec, comme objectif final, une fusion totale de l'en• Quaregnon 4,9 4,5 semble fédéré. Dans la réalité montoise, une agglo• Frameries 2,4 2,2 mération couvrant toute la région devrait s'appuyer Mons 2,2 2,0 Cuesmes 1,4 1,3 Autres communes 0,9

100 (14) Par application des articles 167 et 168 du Code électoral (1.198) (article 38, paragraphe 2 de la loi).

48 TABLEAU 2 TABLEAU 6 Réponses aux questions du niveau « village-centre » Réponses aux questions du niveau intermédiaire de l'échantillon interrogé à Jemappes « village-centre — petite ville » (% par rapport au total des réponses et indices) de l'échantillon interrogé à Quaregnon (% par rapport au total des réponses et indices) Localités % Indices I ocalités % Indices

Jemappes 90,2 83,6 Quaregnon 74,5 67,4 Mons 4.8 4,5 Mons 9,5 8,6 c: f\ Quaregnon 2,2 2.1 Jemappes 5,5 0,U Flénu 1,8 1,7 Wasmes 2,0 1,8 Autres communes 1,0 Saint-Ghislain 1,8 1,6 Frameries 1 ,o 1 ^ 100 Pâturages 0,8 0,7 (1.206) Flénu 0,8 0,7 Boussu 0,6 0,5 Autres localités arrond. Mons 0,8 TABLEAU 3 0,9 Bruxelles 1,4 1,3 Réponses aux questions du niveau < village-centre » Autres localités 0,6 0,5 de l'échantillon interrogé à Quaregnon hors de l'arrond. de Mons (% par rapport au total des réponses et indices) ICO (996) Localités % Indices TABLEAU 7 Quaregnon 90,0 83,3 Réponses aux questions au niveau de la petite ville Pâturages 2,1 1,9 de l'échantillon interrogé à Flénu Jemappes 1,8 1,7 (?4> par rapport au total des réponses et indices) Wasmes 1,3 1,2 Flénu 1,1 1,0 Localités % Indicés Autres communes 3,7 Mons 42,9 26,4 100 Jemappes 29,1 17,9 (1.203) Flénu 8,3 5,1 Baudour 6,2 3,8 Frameries TABLEAU 4 5,1 3,2 Quaregnon 3,2 2,0 Réponses aux questions du niveau intermédiaire Bruxelles 2,2 1,3 « village-centre — petite ville » Autres localités 3,0 1,8 de l'échantillon interrogé à Flénu 100 (% par rapport au total des réponses et indices) (739)

Localités % Indices TABLEAU 8 Réponses aux questions au niveau de la petite ville Flénu 38,7 36,3 de l'échantillon interrogé à Jemappes Jemappes 28,0 26,3 (% par rapport au total des réponses et indices) Mons 13,9 13,0 Quaregnon 7,9 7,5 Localités % Indices Frameries 3,4 3,2 Cuesmes 1,3 1,2 Jemappes 55,3 37,6 Saint-Ghislain 0,8 0,7 Mons 33.5 22,8 Baudour 2,8 Autres localités arrond. Mons 1,2 1,1 1,9 Bruxelles 1,7 1,6 Quaregnon 2,0 1,3 Autres localités 3,1 2,9 Flénu 0,2 0,2 hors de l'arrond. de Mons Bruxelles 1,2 0,8 Autres localités 5,0 3,4 100 100 (1.031) (1.100) ICO (816) TABLEAU 5 TABLEAU 9 Réponses aux questions du niveau intermédiaire Réponses aux questions au niveau de la petite ville « village-centre — petite ville » de l'échantillon interrogé à Quaregnon de l'échantillon interrogé à Jemappes (% par rapport au total des réponses et indices) (% par rapport au total des réponses et indices) Localités % Indices Localités Indices % Quaregnon 38,9 23,9 Mons 28,2 17,3 Jemappes 79,0 75,4 Baudour 13,3 8,2 Mons 12,2 11,6 Jemappes 7,3 4,4 Quaregnon 1,9 1,8 Boussu 2,6 1,6 Flénu 1,3 1,3 Frameries 2,3 1,4 Autres localités arrond. Mons 1,4 1,4 Hornu 1,9 1,2 Bruxelles 2,1 2,0 Wasmes 1,8 1,1 Autres localités 2,1 2,0 Bruxelles 1,8 1,1 hors de l'arrond. de Mons Autres localités 2,9 1,8

100 lOO (1.049) (738)

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