page_1.pdf 1 2015-07-07 10:50

C

M

Y

CM

MY 1

CY

CMY

K 2

La Société historique du Madawaska inc. reçoit l’appui du gouvernement du Nouveau-Brunswick pour la publication de sa Revue. The Société historique du Madawaska Inc. is supported by the Government of New Brunswick for the publication of its Review. Revue de la Société historique du Madawaska

Rédaction Secrétaire des réunions Jacques G. Albert Alonzo Doiron

Bureau de direction de la Société Secrétaire à la correspondance historique du Madawaska André Leclerc

Présidente Agent d’information Hélène Martin Roland Cyr

Vice-président Directeurs Jacques G. Albert Jacques G. Albert Christian Michaud Trésorier Pierrick Labbé André Leclerc Jeff Ouellette Lynne Beaulieu Picard 3

ISSN: 9926-6156 Sans publicité

Cotisation Membres adultes...... 25,00 $ Membres adultes (couples: deux droits de vote et un abonnement à la Revue)...... 35,00 $ Membres de soutien (association, groupes, bibliothèques)...... 50,00 $ Membres à vie...... 250,00 $ Membres à vie (couples)...... 300,00 $ Membres à vie (corporations)...... 400,00 $

Faire vos chèques ou mandats-poste à La Société historique du Madawaska inc. 165, boulevard Hébert Edmundston, N.-B. E3V 2S8 4 Volume XLIII, Nos 3-4 - juillet-décembre 2015

Sommaire / Contents

Mot du rédacteur ...... 6 Editor’s Note Mot du directeur du Musée historique du Madawaska...... 8 A Note from the Director of the Musée historique du Madawaska Mot du directeur général de la Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata...... 10 A Note from the Director/CEO of the Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata

Enracinés - Musée du Témiscouata Au rythme de la nature ...... 12 Working to the Nature’s Rhythms Au rythme du travail...... 18 The Rhythms of Work Au rythme de l’industrie...... 24 The Rhythms of Industry 5 Se réveiller, s’organiser, se mobiliser...... 29 Wake up, Stand together, Rise up S’éduquer, s’impliquer, se faire reconnaître...... 36 Get Educated, Get Involved, Get Recognized Se remémorer, se tourner vers l’avenir, se livrer...... 40 Remembering, Looking Forward, Sharing Stories Notes...... 42

Enracinés - Musée historique du Madawaska Texte de la commissaire invitée...... 44 Guest curator’s text Artéfacts de la collection du Musée historique du Madawaska...... 50 Artifacts from the Musée historique du Madawaska collection

Collectif d’artistes / The Artists Joël Boudreau...... 56 Luc A. Charette...... 60 Gabrielle Gendron...... 64 Réjean Toussaint...... 68

Vue d’ensemble de l’exposition / Overall view of the exhibition...... 72 Crédits et remerciements / Credits and Thanks...... 74 Mot du rédacteur

Nous sommes heureux de vous présenter le Volume XLIII, os n 3-4, juillet-décembre 2015 de la Revue de la Société historique du Madawaska. Depuis 43 ans, il nous arrive souvent de réaliser la publication d’un numéro avec la collaboration et le partenariat avec un autre organisme ou la participation d’un chercheur. Cette revue spéciale, intitulée « Enracinés », est le résultat d’une collaboration entre le Musée historique du Madawaska, le Musée du Témiscouata, la Galerie Colline et la Société historique du Madawaska.

La Revue est préparée également comme catalogue d’exposition. Son contenu comprend deux volets, soit une partie de l’exposition du Musée du Témiscouata, basée sur la culture forestière au Grand Madawaska, exposition permanente du Musée du Témiscouata inauguré lors du CMA 2014, et une exposition d’œuvres d’artistes contemporains.

6 La Société historique du Madawaska veut remercier sincèrement monsieur Christian Michaud, directeur du Musée historique du Madawaska, l’instigateur de ce projet d’exposition. C’est en partenariat avec monsieur Samuel Moreau, directeur général de la Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata que le tout a été possible. Un merci spécial à Samuel Moreau pour son travail.

Nous voulons rendre hommage à toutes celles et tous ceux qui ont contribué à la réussite de cette exposition et de la publication, aux artisans qui ont monté l’exposition et aux artistes qui ont créé les œuvres contemporaines.

Bonne lecture à tous nos membres et à toutes celles et ceux qui auront en main cette publication. Nous vous invitons à venir visiter l’exposition à la Galerie Colline au Musée historique du Madawaska de juillet à novembre 2015.

- Jacques G. Albert - Enracinés

Editor’s Note

We’re pleased to present Volume XLIII, issues 3-4, July-December 2015 of the Revue de la Société historique du Madawaska. In the 43 years we have been publishing, we have frequently published an issue in co-operation and in partnership with another organization or the participation of a guest researcher. This special issue, entitled Enracinés / Rooted, has been produced as a co-operative venture involving the Musée historique du Madawaska, the Musée du Témiscouata, Galerie Colline, and the Société historique du Madawaska.

This issue of the Revue also serves as an exhibition catalogue. It includes two sections: one which is part of an exhibition at the Musée du Témiscouata based on the forest culture of the Grand Madawaska area, a permanent exhibition at the Musée du Témiscouata which opened at the 2014 World Acadian Congress, and the other, an exhibition of visual artists in the field of contemporary art.

The Société historique du Madawaska would like to extend its sincere thanks to Mr. Christian Michaud, Director of the Musée historique du Madawaska 7 and the instigator of this exhibition. The project would not have been possible without the partnership of Mr. Samuel Moreau, Director/CEO of the Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata. Special thanks are owed to Samuel Moreau for his work.

We would like to recognize all those who contributed in one way or another to the success of this exhibition and the publication, the curatorial and exhibition staff who put the exhibition together, and the artists who created the contemporary artwork it features.

We hope our members and all those who read this publication will enjoy it, and invite all of you to view the exhibition at the Galerie Colline in the Musée historique du Madawaska. It will be on display from July until November 2015.

- Jacques G. Albert - Mot du directeur du Musée historique du Madawaska

On peut d’entrée de jeu se réjouir du chemin parcouru ces dernières années par le Musée historique du Madawaska. La valorisation de notre patrimoine culturel et artistique a été soutenue de manière assez exceptionnelle par la conception et la présentation d’expositions dont le contenu reflète notre attachement à notre histoire régionale et à notre patrimoine culturel.

C’est bien dans ce même esprit de raconter notre attachement à un même territoire que nous avons invité le Musée du Témiscouata à partager avec nous cette lecture tout à fait singulière et respectueuse du mode de vie du travailleur forestier en Acadie des terres et forêts que nous donne à voir l’exposition Enracinés. À notre tour, nous avons invité 8 quatre artistes en art contemporain à produire une œuvre qui reflète la qualité de la relation qu’ils entretiennent avec leur propre territoire de création. Le catalogue qui accompagne cette exposition permet justement de créer un regard croisé entre le passé et le moment actuel, entre la création artistique et notre patrimoine culturel. L’équipe du Musée historique du Madawaska tient à remercier la Galerie Colline, la Société historique du Madawaska, le Musée du Témiscouata et notre commissaire invitée, madame Maryse Grondin, pour cette belle réalisation que nous sommes extrêmement fiers de partager avec notre population.

- Christian Michaud - Enracinés

A Note from the Director of the Musée historique du Madawaska

To begin with, we cannot help but celebrate the path the Musée historique du Madawaska has taken over the last several years. Our cultural and artistic heritage has been valued and supported to an exceptional extent through its exhibition program. The organization and presentation of exhibitions reflect, in their choices and contents, our attachment to our regional history and our cultural heritage.

It is in this spirit of sharing our attachment to a common territory that we invited the Musée du Témiscouata to join us in this exhibition, Enracinés / Rooted, to present a unique and respectful interpretation of the lifestyle and work of workers in this area of Acadia of Lands and Forests. Our contribution was to invite four artists working in contemporary art to create works which reflect the quality of the relationship they have with their own territory, the place where they create. The catalogue accompanying this exhibition makes it possible to build a dialogue between the past and the 9 present moment, between artistic creation and our cultural heritage. Those from Musée historique du Madawaska who are involved in this project would like to thank their partners at the Galerie Colline, the Société historique du Madawaska, the Musée du Témiscouata, and our guest curator, Ms. Maryse Grondin, for this beautiful exhibition, which we are extremely proud to be able to share with our population.

- Christian Michaud - Mot du directeur général de la Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata

C’était en 2011. La Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata prenait les rênes d’un projet ambitieux, celui de devenir gestionnaire du Musée du Témiscouata, de réviser son mandat et de le doter d’une nouvelle exposition permanente en vue de sa réouverture au BeauLieu Culturel du Témiscouata, à temps pour le Congrès mondial acadien.

La discussion sur le thème de cette exposition fut rapide. Nous voulions un sujet représentatif de notre région, mais surtout, un sujet qui permettrait aux régions du Témiscouata, du Nord-Ouest du Nouveau-Brunswick et de l’Aroostook de se rallier. Déjà à nos premières rencontres, les réserves et centres de documentations de nos voisins du Nouveau-Brunswick et du Maine se sont ouvertes à notre 10 recherche.

Enracinés. Nous sommes un peuple forestier. Et nous sommes attachés à notre territoire. Notre histoire est celle de ceux qui se sont battus pour vivre de leur forêt, pour vivre chez eux, dignement. J’aime dire que par chez nous, on ne vit pas de l’industrie forestière, mais de la culture forestière. Une culture, car nous cultivons notre forêt. Une culture, car nous avons fait de cette forêt un lieu de ressourcement, d’inspiration et d’espoir. Icitte, on joue du pis on twich de la pitoune. Et on en est fier.

- Samuel Moreau - Enracinés

A Note from the Director/CEO of the Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata

It was in 2011. The Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata had just taken on an ambitious project, that of becoming the managers of the Musée du Témiscouata, of modifying the organization’s mandate, and of committing to have a new permanent exhibition ready for the museum’s opening in a new location, the BeauLieu Culturel du Témiscouata, in time for the World Acadian Congress.

The discussion on the theme of the exhibition did not take long. We wanted to choose a subject which would be representative of our region, and especially, one which would inspire the regions of Témiscouata, northwestern New Brunswick, and Aroostook, so we could all work together. From the first time we contacted them, the archives and information centres of our neighbours in New Brunswick and Maine opened their doors to us, encouraging us in our research. 11 Rooted. We are a people of the forest. We are steadfastly attached to our land and territory. Our history is the story of people who have struggled to make a living from the forest, to live in their land where they were born, with dignity. I like to put it this way: here, people don’t live off forest industries, but in forest culture. Culture, because we cultivate our forests. Culture, because we experience the forest as a source of renewal, inspiration, and hope. Here, we play the bucksaw and twitch out the logs. And we are proud of what we do!

- Samuel Moreau - SHAT. Fonds Castonguay.

Lorsqu’il commence son métier, le jeune bûcheron travaille avec ambition et innocence, malgré le contexte difficile de l’époque. Le travail se fait à la main, avec les chevaux, au rythme de la nature.

Working to the Nature’s Rhythms – When he began his trade, the young worked with ambition and innocence, despite the difficult conditions of his times. Work was done by hand, with horses, according to nature’s rhythms.

12 SHAT. Fonds Renaud et Louise Castonguay. Fonds SHAT. Enracinés

Pourquoi devenir bûcheron?

Apprendre à travailler dès le jeune âge était une sorte d’idéal pour cette jeunesse courageuse. Ces jeunes descendaient de grosses familles, et pour cette raison, après quelques années à la petite école, s’ils en avaient la chance, ils apprenaient à travailler, soit sur la ferme, dans les moulins, ou dans les chantiers et à la drave. Comme la majorité avait du cœur au ventre, ils devenaient des travailleurs habiles, sachant manier la hache, le rabot, la scie et le « pivy ». [...] Leur ambition était de devenir le plus habile de son équipe dans son genre de travail. Lorsqu’on disait qu’un tel était le meilleur bûcheur, scieur ou draveur, cela était pour lui-même une sorte de réalisation de son rêve, et en quelque sorte, une récompense en elle-même.

- Oneil Couturier -1

Why Become a Logger? – Learning a trade at a young age was held up as an ideal among these brave young people. They came from large families, so after a few years of school, if they were lucky enough, they set out to work on farms, at mills, in lumber camps chopping or driving timber. Since most of them were strong and weren’t afraid of hard work, they became good workers, learning quickly how to handle their , , planer and peavy, a type of , with ease and skill. [...] Their ambition was to become the most skilled worker on their team, the best at the work they were doing. When someone told a young man he was the best woodcutter, sawyer or driver, it was like a dream come true, and a reward in itself. 13

Après le dîner assis près d’un bon feu pour faire After dinner, sitting near a warm fire to thaw out our dégeler notre pain, mon père m’expliqua qu’il bread, my father explained that he had to chop down fallait couper trois gros arbres, c’était des merisiers three big trees, yellow birches that produced logs 35 to d’environ 35 à 40 pouces à l’abattage. Il fallait les 40 inches thick. He had to chop them into firewood to heat the camp once it was built, and burn all the couper en bûches pour le chauffage du camp quand branches to clear space for the construction. I can still il serait bâti et faire brûler toutes les branches pour picture myself sitting near those giants of the forest. faire place à la construction. Je me revois encore I said, “They must make a lot of noise when they fall, près de ces géants de la forêt. J’ai demandé : eh?” He told me he didn’t know, because he had never « ça doit faire du bruit quand ça tombe ? ». Il me cut any down. That didn’t reassure me much. All he répondit qu’il ne savait pas, car il n’en avait jamais knew was that a tree always falls in the direction it is coupé. Ça ne me rassurait pas beaucoup. Tout ce leaning. qu’il savait c’est qu’un arbre tombe toujours du côté où il penche.

- Jean-Claude Labrecque -2 Fin/End of 1930. SHAT, Fonds Johanne Strong.

La drave

Cela consistait à faire flotter sur des rivières ou tout autre étendue d’eau des billots jusqu’à un point où ce bois allait enfin s’arrêter dans un « boom »; c’est-à-dire à la réunion de plusieurs longues pièces de bois qu’on avait étendues sur le lac; qui après avoir été percées dans des bouts et avoir été liées les unes aux autres, avec des chaines, épousaient une forme presque circulaire. [...] Très souvent on avait bâti de petites écluses plus haut, ce qui en augmentait considérablement le volume quand on laissait échapper l’eau accumulée. Tout se déroulait assez bien quand le cours d’eau était assez droit; par contre la présence de certains obstacles comme des courbes le long du cours d’eau ou bien des arbres situés trop proches pouvaient causer des embâcles qui atteignaient parfois plus de vingt pieds de hauteur; que l’on faisait sauter la plupart du temps avec de la dynamite ce qui était une opération extrêmement dangereuse. Parfois avec l’aide de « poles », qui étaient placés au devant de l’embâcle essayaient de la libérer en poussant des billots qui 14 retenaient et qui pouvaient céder brusquement et libérer ceux-ci d’un seul coup.3

Timber Driving – Driving timber meant making logs float down rivers or any other body of water until they reached the “boom,” the place where several long pieces of wood had been stretched out across the water. To make the boom, the ends of the logs were pierced and they were attached together with chains, in an almost circular shape. [...] Very often there were locks made upriver, which meant there was a much higher volume of water when they opened them and the water flooded out. Everything went pretty well when the flow of the water was straight and smooth enough, but when there were obstacles like bends in the river or trees too close to the edge, the logs could jam and pile up, sometimes twenty feet high. Most of the time we blew them apart with dynamite. Obviously, that was a really dangerous operation. Sometimes we used poles placed on top of the log jam to try to push the logs apart to clear the jam. That could cause the jam to break up all at once, and the water would suddenly surge.3 Enracinés Vers/About 1940. SHAT. Fonds Johanne Strong. Johanne Fonds SHAT. 1940. Vers/About

15

Pendant l’hiver 1929, la compagnie a décidé de bâtir encore une autre scierie, la dernière à Baker Brook, tout près de l’île Daigle. À l’époque, on avait construit une jetée où les billots et le bois à pâte qui venaient de la concession du Maine et de la terre forestière que louait Davis Eaton s’entassaient à la crue printanière. Mais ce barrage a cédé et tous les billots et le bois à pâte ont passé à travers, mais ont tous dérivé dans la retenue de Quisibis. J’ai vu à faire installer des barrages de dérivation le long de la rivière. Ç’a été bien utile; on n’a pas perdu de bois pendant cette opération. Le seul problème, c’est qu’à côté de nos billots et de notre bois à pâte, on s’est retrouvé avec cinq ou six millions de billots d’Edward LaCroix mélangés avec le bois de la compagnie. Il y a eu des grosses discussions avec Antoine LaCroix, mais avec le barrage, on a pu récupérer tout le bois de M. LaCroix à temps. En fin de compte, la seule chose qu’on a eu à payer est l’employé qui faisait les vérifications pour LaCroix.

- Thomas Matheson -4

In the year 1929 winter season, the company decided to build yet another sawmill, the last one at Baker Brook at the foot of Daigle island. A jam pier was installed to hold lumber and pulpwood coming from Maine lease hold property and Davis Eaton’s lease hold woodland, in spring freshet. This pier gave way and all logs and pulpwood passed through, but was all sheared into Quisibis holding ground. I took the precautions to have shear booms placed along river. This precaution served its purpose as no wood was lost in this operation. Our only trouble here was we now had besides our own logs and pulpwood some five or six millions of Edward LaCroix wood mixed with company wood. Had considerable wrangling with Antoine LaCroix, but we got all of Mr. LaCroix’ wood through our boom in time he demanding the only item we had to pay was man he had on our slip checking for LaCroix. SHAT. Fonds Zoel Bossé.

Les loisirs

En plus de ces tours il y avait de bonnes farces et c’était à qui raconterait la meilleure histoire. Dans chaque équipe, il y en avait qui faisait un peu le bouffon pour faire rire les autres. Les vieilles habitudes des chantiers se manifestaient encore par des tours de force physique et [...] par de la lutte (tiraillage) qui disparut avec le temps à cause des dangers d’accidents corporels. C’est ainsi qu’ils passaient le temps libre, et parfois, durant les heures de travail à l’insu du « boss ».

- Oneil Couturier -5

Free Time – As well as playing tricks, they told some pretty good jokes. People would compete to see who could tell the best stories. On each team, there were guys who clowned around to make the other team laugh. They kept up the old traditions of lumber camps, too, testing each other out with physical feats and [...] wrestling. Eventually the wrestling disappeared, 16 because of the danger of injuries. That’s how they spent their free time, and even some of their working hours when the boss didn’t notice. Vers/About 1945. SHAT. Fonds Johanne Strong. Johanne Fonds SHAT. 1945. Vers/About Enracinés

Mais dans les premières années ça contait des histoires. Les fins de semaine, ça faisait des essaies, ça levait des poids et puis des affaires de même. Et puis le monde jouait de la musique. Un jouait de la musique et puis l’autre dansait des gigues. Tu sais, tu passes le temps des fins de semaine.

- Michel Volpé -6

But in the early years, we told stories. On weekends, we played games, lifted weights and that kind of thing. And people played music. One guy would play and another would dance jigs. You know, that’s how you passed the time on the weekend.

Après ça il avait été chercher un poêle aux forges After that he went and got a stove at the blacksmith’s de Saint-Maurice. [...] Il avait apporté ça sur in Saint-Maurice. [...] He carried it on his back all son dos à partir de Trois-Rivières. Il avait fait les the way from Trois-Rivières. He did the portages on 17 portages à pied et le reste par bateau. Ça pesait pas foot and the rest by boat. It weighed no less than three hundred pounds. moins de trois cents livres (136.4 kg). It was a huge rock; it weighed 419 pounds when I La roche pesait 419 livres (190.5 kg) quand je l’ai weighed it thirty years ago. He picked it up, lifted it pesée trente ans passés. Il l’a prise, l’a montée sur up on his shoulder, and then he walked four hundred son épaule, pis a marché quatre cents pieds avec. feet with it. He had wagered his horses against Uncle Il avait gagé ses chevaux contre ses bœufs, à mon God’s cattle, but he never took the cattle. The men who oncle God, mais n’a jamais pris les bœufs. Ceux were the best at lifting up the rock, later on, were Pius qui ont mieux réussi à soulever cette roche, par St-Onge, who could lift it up to his knees, and Philippe la suite, furent Pius St-Onge qui la monta sur Bérubé, who lifted it up to his waist. ses genoux et Philippe Bérubé, qui lui, la monta In a lumber camp, he took two four-inch peavies of jusqu’à sa ceinture. solid, thick hardwood, handmade, and broke them at the same time, using them like a lever to lift up the Dans un camp de bûcheron, il prit deux « pivé » camp. de quatre pouces de gros bois franc solide, fait à la main, puis les cassa du même coup en s’en servant de levier pour soulever le camp.

- Léo Saint-Onge -7 SHAT, Fonds Castonguay

À maturité, le bûcheron doit faire face à ses responsabilités familiales. Les techniques de travail évoluent. Le rythme du travail s’accélère. L’homme doit produire plus. Il est bon d’être travaillant.

The Rhythms of Work – When he became an adult, a logger had to deal with family responsibilities. and techniques used in the course of their work were changing. The rhythms of work accelerated. Men had to produce more. It was a good thing if they could work hard.

18 SHAT, Fonds Renaud et Louise Castonguay Fonds SHAT, Enracinés

Au camp

Ces « camps » de bûcheron étaient dépourvus de toilettes et d’eau courante et ne disposait [sic] pratiquement d’aucun espace pour le séchage des vêtements. Les matelas des « beds » se composaient ordinairement de branches de sapins et on pouvait voir même de la « glace » sur les murs intérieurs due à un manque d’isolation. Malgré le surpeuplement du camp, on y entassait des harnais pour les chevaux. Ces derniers habitaient dans une écurie en attendant d’être utilisés pour le hallage du bois. Pour se rendre au chantier il fallait parfois marcher plus d’une heure avec tous ses « outils » et la boîte à « lunch » dans une « trail » qui dépendant des conditions du sol, surtout après des périodes de pluie, devenait très difficile due à l’épaisseur de la boue parfois jusqu’aux genoux. Comme il fallait dîner dans le bois, on devait allumer un feu avec des éclats de bois pour ensuite placer au-dessus une chaudière qu’on avait suspendue à un bâton pour bouillir, ensuite y ajouter du thé.8

At the Camp – Lumber camps didn’t have toilets or running water, and didn’t have practically any room for clothes to dry. The mattresses on the so-called beds usually consisted of evergreen branches. It was common to have ice on the inside walls because of a lack of insulation. Despite the overpopulation of the camp, they also stored harnesses for the horses inside. Horses were kept in a stable while they waited to be used to haul wood. To get to the camp, workers sometimes had to walk for over an hour, carrying all their tools and their lunch pail down a trail than was more or less passable depending on the conditions. After rainy periods, it was often very difficult to walk through the mud, which 19 could be knee-deep. Since they had to eat in the woods, the men had to light fires with kindling and bits of wood, and place a pot of water hung on a stick over the fire to boil, then add tea to it.8

On dormait là-dessus là, sur une branche de sapin That's where we slept, on an evergreen branch. That's et puis c’est tout. On se dégraillait seulement pas. it. You couldn't get comfortable at all. We took off our On ôtait nos bottes et puis on gardait nos bas boots and kept our socks on. It got so it smelled of et puis. Ça venait que ça sentait le bas je peux te socks pretty bad, let me tell you. If you wanted to shave, dire ça. Si tu voulais te shaver, tu te shavais avec de you shaved with cold water. And lots of times you just didn't shave. You let your beard grow until you got out. l’eau froide. Puis bien des fois qu’on ne se shavait pas là. On laissait ça pousser jusqu’à ce qu’on ressorte au bord. - Théophile Therrien -9

On mangeait toutes sortes d’affaires. Des bons We ate all kinds of things. Nice roasts. Yes, there was rôtis, il y avait une bonne nourriture. Des cookies good food. All different kinds of cookies, all different de toutes sortes, des gâteaux de toutes sortes kinds of cakes, […] tons of meat. There was always lots […] de la viande il y en avait en masse. Il y en of meat. Jim Irving used to say: “it takes something avait toujours de la viande. Jim Irving disait : « ça robust […] to make a man robust.” […] And that's true. […] If you only ate cornflakes for breakfast, well, [...] prend de quoi de solide […] pour faire un homme you sure wouldn't have toughed out the whole day. solide ». […] Et c’était vrai. […] Si tu mangeais seulement du cornflake pour déjeuner ben là [...] tu aurais pas toughé la journée. - Sylvio Ouellette -10 Vers/About 1950. SHAT. Fonds Fraser Cie Ltd.

Au moulin

Le moulin de Cabano érigé en 1899 fabriquait une large variété de produits incluant des longues pièces de bois, des lattes, des bardeaux, des dormants, du « clapboard » de quatre pieds de longueur qui était expédié aux États-Unis et sur le marché canadien. Cependant, le principal but de ses propriétaires était le commerce transatlantique. Les livraisons à destination de l’autre continent étaient expédiées par le chemin de fer Témiscouata, construit en 1899, à Rivière-du-Loup, sur le fleuve Saint-Laurent, d’où elles étaient chargées sur des barges pour être rechargées sur le bateau à vapeur ancré au large.11

At the mill – The Cabano mill was built in 1899. A wide variety of products were made there, including long wooden boards, pallets, shingles, frames, four-foot long clapboards that were shipped to the United States and the Canadian market. However, the main objective of the mill owners was Transatlantic trade. Deliveries to the European continent were shipped by the 20 Témiscouata railway, built in 1899, to Rivière-du-Loup, on the St. Lawrence River, where they were loaded onto barges to be loaded again onto steamboats anchored on the open sea.11 SHAT. Fonds Fraser Cie Ltd. Fraser Fonds SHAT. Enracinés

La Fraser Company Limited possède à Cabano une scierie de grande capacité. L’usine [est] située sur le bord du Lac Témiscouata et à proximité de la gare. L’établissement fonctionne depuis 1900 et emploie plus de 300 hommes travaillant 6 mois par an. Pendant cette période, le moulin produit à pleine capacité. Des commerçants de gros américains achètent une bonne partie de la production. En 1937, la compagnie a vendu aux Etats-Unis 9,000,000 de p.m.p. de bois de sciage, 2,700,000 lattes, 8,900,00 bardeaux et 22,800 traverses de chemin de fer. La compagnie vend à ses clients canadiens 4,000,000 de p.m.p. de bois de sciage, 7,000,000 de lattes et 16,900,000 bardeaux. Depuis trois ans, la production a augmenté de 22%.

En 1937, on estime que 69,800 cordes de bois à pâte ont été coupées puis transportées à Edmundston pour y être transformées en pâte à papier. Sur ce total 26,500 cordes proviennent des réserves de la compagnie, 30,600 cordes ont été achetées des colons et des cultivateurs et 12,700 cordes ont été coupées sur les terres de la Couronne. Ces chiffres nous font voir l’importance de cette industrie qui est la plus considérable du Témiscouata.12

The Fraser Company Limited owned a large sawmill in Cabano. The factory [was] located on the shore of Témiscouata 21 Lake, near the train station. The company had operated since 1900 and employed more than 300 men 6 months out of the year. During that period, the mill operated at high capacity. American wholesale dealers bought a large portion of the production. In 1937, the company sold 9,000,000 fbm of sawn lumber, 2,700,000 of pallets, 8,900,000 shingles and 22,800 railway ties in the United States. The company sold 4,000,000 fbm of sawn lumber, 7,000,000 of pallets, and 16,900,000 shingles to its Canadian customers. In the next three years, its production increased by 22%.

In 1937, an estimated 69,800 cords of pulpwood were chopped and transported to Edmundston to be made into paper pulp. Out of this total, 26,500 cords came from land held by the company, 30,600 cords were bought from settlers and farmers, and 12,700 cords were cut on Crown land. These figures show the importance of the lumber industry, which was the largest industry in the Témiscouata region.12 SHAT. Archives du Fort Ingall.

À la maison

Nous autres les femmes on s’est dit bon les femmes, il faut faire quelque chose pour appuyer nos hommes. On a pris conscience nous autres là […] de notre valeur en tant que femme, en tant qu’épouse, en tant que mère et la conjointe d’un bûcheron. Ça avait pas de valeur ça quasiment aux yeux des autres dans les sociétés ici, là.

- Marie-Paule Thériault -13

At Home – For us women, well, we figured women had to do something to support our men. That’s when we started to become aware […] of our value as women, as wives, as mothers and partners of loggers. We hardly had any value in the eyes of other people in society around here.

22 Il partait longtemps, quatre mois, cinq mois, des fois six mois parce qu’il partait l’automne, des fois il descendait pour les fêtes, quelquefois pas du tout, il revenait au mois de janvier. C’était assez long… On savait que c’était ça qui nous attendait.

- Géraldine Bossé -14

He left for a long time, four months, five months, sometimes even six months because he left in the fall. Sometimes he came home for Christmas and sometimes he didn’t come home until January. It was pretty long... We knew what was in store for us. Enracinés SHAT. Fonds Renaud et Louise Castonguay. Fonds SHAT.

23

Fallait être débrouillarde, fallait tout savoir faire! You had to be resourceful, had to make do, had to know Mais on s’en faisait pas une gloire, on s’glorifiait how to do everything! But we didn’t think we deserved pas de ça! C’était tout normal, la voisine elle faisait a medal or anything. It was just normal. The neighbour ça aussi! was doing the same thing!

- Marie-Paule Thériault -15

Le territoire que l’Association [des Forestiers The territory of the Association [des forestiers du du Nouveau-Brunswick et du Québec] couvre Nouveau-Brunswick et du Québec] covered all est tout le Témiscouata et quelques paroisses des the Témiscouata region and a few parishes in the comtés environnants. On y retrouve environ 1,100 surrounding counties. There were approximately 1,100 loggers living there, of whom only 20 to 25% worked bûcherons, dont seulement 20 à 25 % travaillent à within the region; 15% worked in the Côte-Nord area; l’intérieur de la région; 15 % travaillent sur la Côte 22% in New Brunswick and 37% in Maine.16 nord [sic]; 22 % au Nouveau-Brunswick et 37 % au Maine.16 Vers/About 1950. SHAT. Fonds Zoël Bossé.

Le bûcheron expérimenté est productif. Il utilise des machines et des équipements modernes pour répondre à la pression du marché. Avec la technologie, ce qui se faisait de manière naturelle nécessite maintenant des normes. L’homme contrôle la nature.

The Rhythms of Industry – An experienced logger was productive. He used modern equipment and machines to keep up with the pressure of the market. With the growth of technology, ways of working that used to be natural now required standards. Man controlled nature. 24 SHAT. Fonds Renaud et Louise Castonguay. Fonds SHAT. Enracinés

Du danger à la sécurité

Une des « guides » cassa et le convoyeur renversa et se balança quelques secondes et l’autre « guide » céda aussi. Le tout tomba ne laissant que le câble d’acier avec boutons suspendu en l’air, supporté que par la tour. Le petit Honoré Collin lui eut la présence d’esprit de saisir ce câble et resta suspendu en l’air, mais eut donc la vie sauve grâce à son sang froid [sic] et à ses réflexes. Sur terre, les gars couraient en tout sens et criaient ne sachant qui secourir, car une dizaine d’hommes gisaient par terre morts ou blessés gravement. L’un de ces hommes, Willie Nadeau, voulant se relever après sa chute, eut une épaule coupée par une plaque d’acier (plate) tranchante qui se détacha du haut. Il expira instantanément.

- Oneil Couturier -17

From Danger to Safety – One of the guides broke and the conveyer backed up and wobbled for a few seconds. Then the other guide gave way as well. Everything fell down. Only a steel cable with buttons was left, dangling in the air, held up only by a tower. Little Honoré Collin had the presence of mind to grab the cable and stayed hanging in the air, but at least his life was saved, thanks to his composure and his quick reflexes. On the ground, guys were running around, all over the place, unable to decide whom to help. A dozen men were lying on the ground, dead or seriously injured. One of the men, Willie Nadeau, tried to get up after his fall, and his shoulder was cut by a sharp plate of steel above him that became detached. He died instantly. 25

Bûcher du bois, ça épuise son homme Chopping wood will do a man in Les compagnies affirment que les chicots (bois mort Companies insisted that snags (stubs of dead wood) encore debout) constituent la cause principale des were the main cause of accidents in the forest. That’s accidents en forêt. Il s’agit là d’une ruse de la part deceit on the part of the companies. The real cause of the injuries was the speed at which loggers had to do des compagnies. La vraie cause des accidents est their work. Loggers were paid by the job, by the amount attribuable à la rapidité avec laquelle les bûcherons of work they produced. Paying “on time” or paying doivent effectuer leur travail. En effet, les bûcherons instalments meant they had to work fast. It was the sont payés à la job, c’est-à-dire d’après la quantité only way they could afford to buy the machinery they de travail produit. Les paiements à terme, ça oblige needed to do their job. At forty, a lumberjack was “done à travailler vite. C’est nécessaire afin d’acheter la in,” physically exhausted, and had to find another job machinerie pour bûcher. A quarante (40) ans, un that was less strenuous, or, if he couldn’t, had to go on bûcheron est physiquement épuisé et ceci l’oblige social assistance.18 à se chercher un autre travail moins difficile ou encore, à défaut d’ouvrage, d’aller quémander de l’assistance sociale.18 SHAT. Fonds Hermel Lebel.

De l’homme à la machine

Si l’on considère le chiffre élevé de la production forestière du Témiscouata, on peut se demander avec appréhension si la matière première nécessaire à l’industrie du bois ne fera pas bientôt défaut. Une chose est certaine, c’est qu’au rythme actuel (124,000,000 p.m.p. en 1937) cette industrie ne saurait durer encore bien des années. Outre les coupes intensives qui dévastent la forêt et ne laissent même pas les jeunes arbres, des incendies ont à diverses reprises ravagé d’immenses étendues de terrain.19

From Man to Machine – If you consider the high quantity of forest production in the Témiscouata region, you can’t help but wonder, apprehensively, whether the raw material necessary for the lumber industry would hold out much longer. One thing was certain: at the current rhythm (124,000,000 fbm in 1937), the industry would not be sustainable for very 26 long. Besides the intensive cuts that devastated the forest and did not even spare young trees, forest fires had ravaged immense spans of the territory on a number of occasions.19 1950-1960. SHAT. Fonds Adélard Després. Adélard Fonds SHAT. 1950-1960. Enracinés

Au Madawaska, la solidarité continue Lors d’un festival du bûcheron à Edmundston, une bûcheuse s’avance sur le terrain pour donner une démonstration. 225 bûcherons conscients que ces sortes de machines sont cause de mise à pied et qu’ils détruisent davantage leur gagne-pain prennent position et ordonnent d’évacuer le plus tôt possible le terrain et en cas de refus, les représailles suivront. Sans trop de réticence on retire ce requin d’emploi et de destruction sans que la démonstration soit faite.20

Solidarity in Madawaska During a lumberjack festival in Edmundston, a drove onto the site to give a demonstration. Some 225 loggers who were well aware of the fact that these machines were causing layoffs and destroying their livelihood took a stand and ordered them off the grounds. If they refused, there would be consequences. Without much hesitation, the shark that consumed jobs and destroyed forests was taken away before the demonstration could take place.20

27

Les noms des deux chevaux qui étaient utilisés The names of the two horses used for this purpose in the à cette fin en hiver étaient « King » et « Joe ». winter were “King” and “Joe.” They were large animals C’étaient des bêtes de près de 2000 livres et qui that weighed nearly 2000 pounds and could pull as much pouvaient tirer comme des petits tracteurs. Joe weight as small tractors. Joe wasn’t very handsome; he was red and black and had long, wooly hair, but he was n’était pas beau à voir; il était d’un noir roux et avait slow, steady and strong as they come. Unfortunately, le poil long comme de la laine, mais d’une lenteur people seemed to take pleasure in mistreating him. et d’une capacité sans égale. Malheureusement, All of these beautiful creatures – except for Joe I’d call des gens se plaisaient à le maltraiter. Toutes ces them all beautiful – weighed between 1600 and 2000 belles bêtes – excepté Joe quand je dis belles bêtes pounds. At noon and six o’clock in the evening, I had – pesaient de 1600 à 2000 livres. Je me plaisais à fun watching from the Wood Room as the big horses midi ou à six heures du soir, à regarder de la Wood returned, often by themselves, to the stable. No worries: Room, ces gros chevaux retourner souvent seuls they could find their way home. à l’étable. N’ayez crainte, ils savaient où était leur demeure. My brother René told me that when they were cutting wood in the forests and far from their camp, and wanted to find a short cut through the forest without Mon frère René me racontait à ce sujet que parfois getting lost, he used to let his horse loose in the woods en coupant du bois dans les chantiers et lorsqu’ils and follow it. “Believe it or not,” he told me, “the horse étaient éloignés du camp, mais voulant prendre un always got me back to the camp, and always by the raccourci à travers la forêt pour ne pas perdre la shortest route.” direction, il suivait son cheval qu’il lâchait dans le bois. « Incroyable, mais vrai » me disait-il, « le cheval ne manquait jamais le camp et par le chemin le plus court ». - Oneil Couturier -21 1950-1960. SHAT. Fonds Renaud et Louise Castonguay.

Du normal au normé

L’exploitation forestière des grosses compagnies se pratique par la coupe à blanc. Cette méthode est la plus avantageuse pour les compagnies car elle permet une concentration des machines et des hommes dans une aire restreinte. De cette façon les compagnies réduisent au minimum leur frais d’opération ce qui leur permet d’augmenter leur marge de profit.

Aujourd’hui la mécanisation et l’automatisation sont plus poussées mais si les formes ont changées [sic], l’exploitation continue.23

From Natural to Standard – The forestry operations of large companies usually took the form of clear cutting. It was the most advantageous method for the companies, because it made it possible to have a high concentration of men and machines in a small area. Companies reduced 28 their operating costs to a minimum and increased their profit margin.22 Today, mechanization and automation are further advanced. While the specific tools have changed, though, the nature of the problem continues.23 SHAT, Fonds Hermel Lebel Fonds SHAT, Enracinés

1970. SHAT. Fonds Cartonnerie populaire.

Les forestiers se révoltent contre leurs conditions de travail. La population se soulève face à la dépossession de leur territoire et de leurs ressources. Ensemble, ils s’insurgent et s’organisent collectivement pour faire respecter leurs droits.

Wake up, Stand together, Rise up rebelled against their working conditions. The population rose up against the expropriation of their territory and resources. Together, they staged protests and organized in a collective movement to defend their rights. 29

Le temps de la colère

La vie syndicale commença dans cette scierie en Rage Erupts – The union movement reached the 1943 après la formation du « Syndicat National sawmill in 1943, when a lumber workers’ union, the de l’Industrie du Bois de Cabano Inc. » affilié à Syndicat National de l’industrie du Bois de Cabano, Inc., la C.T.C.C. (qui deviendra plus tard la C.S.N.). was formed. It was affiliated with the Confédération des À l’époque, on travaillait 59 heures par semaine travailleurs catholiques du Canada, C.T.C.C. (which pour une moyenne de .33¢ l’heure; ceci incluait later became the C.S.N., Confédération des syndicats nationaux, labour congress). At the time, employees were les employés dans la « cour ». Vers 1952, on working 59 hours a week for an average of $0.33 an hour; introduisit la semaine de 55 heures, pour ensuite this included employees who worked in the mill yard. en arriver en 1966 à la semaine de 50 heures, avec Around 1952, a work week of 55 hours was introduced, un salaire moyen de $1.50 l’heure.24 and then, in 1966, a 50 hour week with an average salary of $1.50 an hour.24 Le temps de la colère

Comme la plupart des personnes avec qui il travaille son instruction se résume à une septième année. En moyenne, il doit parcourir 30 milles par jour pour se rendre à son travail. Certains font jusqu’à 300 milles par semaine pour gagner leur vie, Trois bûcherons sur dix passent la semaine dans les chantiers et retournent seulement chez-eux en fin de semaine.

Le salaire hebdomadaire normal, dans les meilleurs mois de 72 se chiffrait aux alentours de $130.00. La moitié des autres bûcherons faisait à peine plus de $120.00 par semaine. En 72, une moitié des bûcherons retira $3,650.00 et l’autre moitié toucha $3,100 pour sept mois et demi de travail. A ça, il fallait ajouter entre $1,000.00 et $1,500.00 dollars en prestations d’assurance chômage. On ne devient pas riche avec un salaire annuel variant entre $4,550.00 et $5,000.00.

Règle générale, le bûcheron ne jouit pas de congés de maladie, de plans de pension et médical spéciaux, de boni de travail, de représentation syndicale valable ou de sécurité d’emploi. Il défraie toutes les dépenses occasionnées par son travail. Les conditions de travail, les insectes, la température, le bruit, la fumée de sa scie, l’effort physique et la monotonie de ce qu’il fait rendent sa tâche difficile. 30 - Romain Landry -25

Rage Erupts – Like most people he worked with, he had a Grade 7 education. On average, he had to walk 30 miles every day to get to work. Some people travelled 300 miles a week to earn their living. Three loggers out of every ten spent the work week in the camp and only came home on the weekend.

The usual weekly salary, in the best months of 1972, amounted to about $130. Half of the other loggers made barely more than $120 a week. In ‘72, half of the loggers made $3,650 and the other half made $3,100, for seven and a half months of work. To that amount, $1,000 to $1,500 in unemployment insurance was added. No one got rich on a salary of $4,550 and $5,000.

As a general rule, loggers did not benefit from sick days, pension plans, health insurance, bonuses, effective union representation or job security. They paid all the expenses related to their work. Working conditions, insects, temperature, noise, smoke from their , strenuous physical labour, and monotony all made their work difficult. Enracinés

31 1970. SHAT. Fonds Cartonnerie populaire. Fonds SHAT. 1970. 1970. SHAT. Fonds Cartonnerie populaire.

Le désir de survivance

15 août 1971 - Opération Dignité II voit le jour Lors de l’assemblée du 15 août, l’église était pleine à craquer n’a pu accueillir tout le monde qui était présent. Elle était si pleine que le plancher s’est affaissé de près de trois pouces avant que de courageux citoyens de l’endroit ne se précipitent au sous-sol pour installer des poutres afin d’éviter la catastrophe. Les gens sont demeurés calme [sic] malgré la menace, déterminés qu’ils étaient à maintenir l’occupation des lieux.26

The will to survive – August 15, 1971 - Opération dignité II is born - During the gathering on August 15, the church was filled to the rafters and didn’t have room for everyone. It was so full that the floor boards sank almost three inches before some courageous citizens from the community hurried down to the basement to erect posts in order to avoid a catastrophe. People remained calm in the face of danger, determined to 32 continue their occupation of the building.26 1970. SHAT. Fonds Cartonnerie populaire. Fonds SHAT. 1970. Enracinés

Les bûcherons se prennent en main L’assemblée annuelle de l’Association des Forestiers du Nouveau-Brunswick et du Québec s’est tenue à Ville Dégelis, le 3 avril dernier. 200 bûcherons se sont présentés; il y en avait du Nouveau-Brunswick, du Maine et de tous les villages du Témis.27

Loggers organizing The Annual General Meeting of the Association des forestiers du Nouveau-Brunswick et du Québec took place in Ville Dégelis on April 3rd. 200 loggers were present, from New Brunswick, Maine and every village in Témis.27

Les activités des Femmes Actives et Forestières The activities of women foresters in the Femmes Actives ont pris fin mercredi soir le 6 juillet par leur et Forestières association ended on Wednesday evening, th 33 dernière tournée dans le J.A.L. C’était la 5ème the 6 of July, with their last visit to the J.A.L. It was th tournée après avoir été à Ville Dégelis, Packington, their 5 presentation, following visits to Ville Dégelis, Packington, Cabano, and St-Honoré. Cabano, St-Honoré. At all these meetings, the women presented the results Au cours de ces réunions, les femmes forestières of their survey of the situation of women foresters in ont présenté les résultats de leur sondage sur la the region. They met with approximately one hundred situation des femmes forestières de la région. Plus women, who actively participated in the discussions.28 d’une centaine de femmes ont été rencontrées et ont eu une participation très active.28

Chez Raoul Guerette Inc., une 1ère victoire des travailleurs en forêt Le 29 août, après 5 mois de lutte, les travailleurs forestiers et les opérateurs de tracteurs de chez Raoul Guérette inc. à Ville Dégelis ont vu leurs efforts se concrétiser en recevant leur accréditation au Syndicat Canadien des Travailleurs du Papier.29

A victory for forest workers at Raoul Guerette, Inc. On August 29, after a five-month fight for recognition, the efforts of forest workers and tractor operators at Raoul Guérette, Inc., in Ville Dégelis, were finally rewarded when they were certified by the Canadian Paperworkers Union.29 SHAT. Fonds Cartonnerie populaire.

La volonté populaire

Somme toute, il est généralement convenu que la retombée la plus significative de l’opération aura été la naissance d’un phénomène qui est de l’ordre des valeurs et de la culture, la naissance d’une conscience régionale élargie à l’ensemble du territoire de l’Est du Québec. Cet héritage culturel est associé à l’expérience d’animation sociale du BAEQ et est toujours perceptible aujourd’hui.

Ainsi, le pouvoir régional de l’Est se traduit par les O.D., les SER, le JAL, le comité mixte Basques-Neigette, mais il réfère également à des organisations comme : la Coopérative agricole du Bas-Saint-Laurent, l’Union des producteurs agricoles, les Pêcheurs-Unis, l’Union des producteurs de bois; Radio-Gaspésie, l’Étoile filante, Radio-JAL, la troupe Des gens d’en bas, le théâtre en rang, la Grande Ourse, la Culturelutte, la Voix du peuple, le Groupe de recherche interdisciplinaire en développement de l’Est du Québec; de même qu’à des initiatives telles : les bases de plein air de Pohénégamook, de Saint-Damase et de Trinité des Monts; les huiles essentielles Jalles, les Maraîchers populaires à Les Hauteurs, la Coopérative d’aménagement des ressources du Transcontinental, la scierie de St-Léon-Legrand, l’imprimerie autogérée Les Associés de Rimouski, le projet de conserverie de St-Charles, Les Ateliers de menuiseries d’Esprit-Saint inc. Toutefois, plusieurs de ces expériences sont aujourd’hui disparues.30 34

The Will of the People – All in all, it is generally agreed that the most significant outcome of the operation was the birth of a phenomenon in the domain of values and culture, the birth of a broader regional consciousness that extended to the territory of eastern Québec. This cultural legacy can be linked to the experience of social activism of the BAEQ and can still be felt today.

The regional power of the eastern part of the province has translated into the creation of O.D., SERs, JAL, and the joint Basques-Neigette committee, but it also refers to organizations like farm co-ops and producers’ unions such as Coopérative agricole du Bas-Saint-Laurent, l’Union des producteurs agricoles, Pêcheurs-Unis, l’Union des producteurs de bois; community radio stations and cultural organizations such as Radio-Gaspésie, l’Étoile filante, Radio-JAL, Des gens d’en bas, Théâtre en rang, la Grande Ourse, la Culturelutte, la Voix du peuple, le Groupe de recherche interdisciplinaire en développement de l’Est du Québec; and initiatives like the outdoor activity centres in Pohénégamook, Saint-Damase and Trinité des Monts; the Jalles company, which produces essential oils, les Maraîchers populaires at Les Hauteurs, the Transcontinental regional development co-operative, the sawmill in St- Léon-Legrand, the employee-run printing company Les Associés de Rimouski, the St-Charles cannery project, Les Ateliers de menuiseries d’Esprit-Saint, Inc., and many more. However, many of them have now disappeared.30 Enracinés

La décision est unanime. La priorité, c’est la mise The decision was unanimous. Our priority is the en place du groupement forestier. La forêt est la establishment of a forestry association. The forest principale de nos ressources; il est urgent de la is our principal resource; it is urgent that we value it valoriser et, par là, de créer le plus rapidement and, by valuing it, create jobs for our forestry workers. At the same time, it is important to form a resource possible de l’emploi pour nos travailleurs forestiers. management society or a mother-cell which could Simultanément, il est important de constituer la lead development in the region and co-ordinate efforts société de gestion des ressources ou cellule-mère related to forestry. qui devrait chapeauter tout le développement de la région et coordonner toutes les actions. Indeed, the letters patent of the Groupement forestier de l’est du lac Témiscouata were signed, sealed and Effectivement, les lettres patentes du Groupement delivered in Quebec City on May 22, 1973, and forestier de l’est du lac Témiscouata sont données registered on June 7, 1973. The founding meeting took et scellées à Québec le 22 mai 1973 et enregistrées place on July 26, 1973. On August 28, fifty shareholders le 7 juin 1973. L’assemblée de fondation a lieu le 26 engaged 56 lots for a surface area of 4312 acres. The first grant from the ministry responsible for lands and juillet 1973. Le 28 août, cinquante actionnaires ont forests (MTF), in the amount of $37,000, enabled engagé 56 lots pour une superficie de 4312 acres. forest development to begin on the territory and put 35 Une première subvention de 37 000 $ du ministère 25 forestry workers to work for three months. These des Terres et Forêts (M.T.F.) permet l’amorce de were the first economic outcomes of the JAL project. travaux sylvicoles dans le territoire et met à l’oeuvre Nothing could have helped the population understand 25 travailleurs forestiers pendant trois mois. Ce what solidarity and the determination of a community sont les premières retombées économiques du could achieve better than that.31 projet JAL. Rien de mieux pour faire comprendre à la population ce que peut donner la solidarité d’un milieu et la détermination de ses habitants.31 Gabriel Gagnon-Lussier. 2014. SHAT. Le forestier instruit.

La foresterie entre dans une époque de transition. Le métier des forestiers se transforme, leur implication dans la société gagne en importance et on reconnaît davantage leur valeur.

Get Educated, Get Involved, Get Recognized Forestry is entering a transition period. The work of foresters is undergoing a transformation, their involvement in society is gaining importance, and people are recognizing their value more fully.

36

Le forestier instruit

Après les années 1930 et surtout aux années 1940, on exigea une certaine instruction de la part de celui qui allait devenir contremaitre. Ce fut alors qu’on discontinua le choix du plus robuste de l’équipe pour en faire un foreman. Alors le choix de celui qui avait le plus d’aptitudes de leader se fit, tout en ne négligeant pas de sa part une connaissance générale de ses futures responsabilités.

- Oneil Couturier -32

Educated Foresters – Starting in the 1930s and especially in the 1940s, some education was required for a to become a foreman. It was at this time that the practice of choosing the strongest man on the team disappeared. Instead, the man chosen was the one who had the best leadership qualities, although having a sound knowledge of his future responsibilities was also necessary. Enracinés Gabriel Gagnon-Lussier. 2014. SHAT. Le instruit. forestier SHAT. 2014. Gabriel Gagnon-Lussier.

37

La sylviculture est l’art et la science de cultiver les forêts. Elle a pour objectif de faire évoluer les forêts en fonction des besoins de son propriétaire. Le sylviculteur veille principalement à l’établissement d’une régénération ainsi qu’à l’entretien et l’exploitation de la forêt. Il prend régulièrement des mesures sur l’âge, la composition, la densité et la vigueur des peuplements composant la forêt pour établir un diagnostic et identifier les interventions qui visent à améliorer son état ou développer le plein potentiel du boisé.33

Silviculture is the art and science of cultivating forests. Its objective is to contribute to the evolution of forests according to the needs of their owner. The forest manager’s main concern is to ensure regeneration of his woodlot, as well as maintaining and operating his forestry business. He conducts regular assessments of the age, composition, density and vitality of the stands comprising his forest in order to diagnose and identify treatments aimed at improving its health and developing its full potential.33 Le forestier impliqué

Dans la région, suite à des conditions de vie particulières des femmes de bûcherons et de gars de moulin ont décidé de se regrouper pour voir collectivement leur situation. Quatre années de cheminement ont permis une prise de conscience que leur rôle social s’étendait au delà de la cuisine et des chaudrons. […] Aujourd’hui plusieurs sont engagés dans leur milieu, d’autres se débrouillent pour faire valoir leurs droits; droit au travail, droit à l’égalité...34

Activist Foresters – Because of the particular living conditions they experienced, some of the wives of loggers and mill workers decided to join together to examine their collective situation. Four years of working together led to their awareness that their social role extended beyond kitchens and kettles. […] Today, many of these women are involved in their communities, while others successfully defend their rights. The right to work. The right to equality.34

38 On sait que l’opinion publique des forestiers n’est pas très bonne, puis je me dis : si on l’attaque à la base probablement qu’un moment donné on va finir par la changer. La forêt c’est bon de l’aménager, ce n’est pas si mauvais de la couper, à condition de bien la couper. Ce n’est pas parce qu’on voit passer un camion de bois qu’il vient d’y avoir de la déforestation. Il faut relativiser les choses.

Fait que la forêt, moi c’est mon milieu de vie, c’est mon gagne-pain. Je chasse, je pêche, je coupe des arbres, je vais dans des parcs et puis je vis très bien avec tout ça, parce que je sais que la forêt n’est pas dilapidée. Il y a des gens qui l’exploitent comme il le faut, que ce soit le gouvernement, que ce soit le propriétaire, il ne s’organisera pas pour détruire son gagne-pain.

- Martin Bélanger -35

We know that public opinion is not very favourable towards foresters. I say, if the base is being attacked, probably we’ll manage to change it some day. It’s good to develop the forest, and it’s not bad to cut it, as long as the cut is being managed well. Just because you see a lumber truck going down the highway, it doesn’t mean deforestation has just taken place. Everything is relative. We have to keep things in perspective.

The forest is my environment, my living. I hunt, I fish, I chop trees, I go to parks and I live very well with all that. I know that the forest is not being ravaged. There are people using it properly. The government, the owners, they aren’t going to do things in a way that they destroy their own livelihood. Enracinés

Le forestier reconnu

Mérite forestier du Bas-Saint-Laurent Ce concours vise à reconnaître l’implication des propriétaires dans l’aménagement de leur forêt et à promouvoir l’aménagement durable de la forêt privée. Les propriétaires qui consacrent temps et énergie à améliorer leur boisé ont de quoi être fiers puisqu’ils contribuent au développement social et économique de leur milieu.36

Valued Foresters – The Mérite forestier du Bas-Saint-Laurent prize This contest is designed to recognize the involvement of owners in the development of their forests and to promote sustainable development in private forests. Owners who dedicate time and energy to improving their woodlots have lots to be proud of. They are contributing to the social and economic development of their environment.36

« On voit ça des hommes qui ont bûché aujourd’hui, 39 ça [ne] marche plus la tête basse. »

- Marie-Paule Thériault 37-

“When we look at men who have worked in forests today, they’re no longer walking with their heads down. Now they hold them high.” Parce qu’il faut dire une chose, le Témiscouata, puis la forêt, c’est non seulement une histoire d’amour, mais c’est une histoire de compétences, d’expertises et puis de connaissances, et puis c’est encore vrai aujourd’hui. Je pense comme population, comme groupe, on n’a qu’à se féliciter à l’intérieur de ça. Mais faut pas s’asseoir sur nos lauriers, parce que les défis sont incroyables. Il nous reste quelques sauts à faire, de transformations, qui vont venir dans les prochaines années pour qu’on conserve notre position de leadership à l’intérieur de ça. L’industrie forestière, malgré tous les problèmes qu’elle a vécus, malgré tout ce qu’elle vit, reste qu’elle a un potentiel de création de richesse incroyable pour le Témiscouata, et c’est peut-être l’élément le plus important. On croit à la forêt, ça a réuni des gens qui ont travaillé ensemble parce qu’ils y croyaient. Le passé, c’est important parce que ça établit la base, la structure de base, mais je vois qu’il faut qu’on pense aussi à ce qui s’en vient, pis vous allez être surpris.

- Roger Robitaille -38 40 Remembering, Looking Forward, Sharing Stories – One thing needs to be said: Témiscouata, and the forest, is not only a love story, but a story of skills, expertise, and knowledge, and that’s even more true today. I think that as a population, as a group, we have ourselves to thank for that, and can pat ourselves on the back. But we can’t just rest on our laurels, either, because the challenges ahead of us are daunting. We still have to make some big changes, transformations, in the next few years. Making them is how we will keep our position as leaders in the field. The forestry industry, despite all its problems, despite all it has gone through and is still going through, has an incredible potential to create prosperity in Témiscouata, and that might be its most important element. We believe in the forest. The forest has brought people together to work because they all believe in it. The past is important because it laid the foundations, but I know that we have to think ahead, as well, see what’s going to happen in the future. And I think it will surprise you! Enracinés

Je pense que c’est des gens qui ont fait l’histoire I think it’s the people who have made history with the avec l’étape qu’ils ont vécue, puis ils vont toujours times they lived in, and there will always be these people être dans l’histoire, pis en passant, ils ont créé une in history. And by living the way they did, they created a culture, une culture populaire. Je veux dire, nous culture, stories, popular culture. What I mean is that we leave and go somewhere else in Québec and we realize autres on va ailleurs au Québec pis on réalise qu’au that in Témiscouata, there’s a determination, a fight that Témiscouata, il y a une combativité qu’il y a pas doesn’t exist anywhere else, a creative spirit in the way ailleurs, il y a une créativité avec qu’est-ce qui se vit we live here that other people don’t have. It stems from ici qui a pas ailleurs. Ça, c’est né de tout ce besoin the need to survive, to stand up for ourselves, to get de survivre, de se démarquer, de se faire respecter respect: to have our dignity. Well, at any rate, that’s what : d’être digne. Bien moi je pense que c’est ça qui I think is left, something a little intangible, our pride. reste, c’est un peu intangible, puis il y a une fierté We can say, “I helped build our region!” After that, we de ces gens-là aussi. On dit : « on a participé à le continued in a different way, we didn’t just resist, we faire cette région-là ». Et ça a continué autrement, created something. That’s an important distinction. We on a pas juste résisté, on a créé, ça c’est important. didn’t just resist, we were resilient. You know, we left our mark. Something that will always be there. On a pas juste résisté, on a aussi été résilients. Tu sais, on a laissé quelque chose. Il y a quelque chose 41 qui va toujours être là. - Nikole Dubois -39

Conclusion

Tous ces gens-là, en arrière-plan, qui posent pour la postérité, sont ce que j’appelle des héros ordinaires. Un jour, ils en ont eu assez d’être traités comme des indésirables sur la terre qui les a vus naître, d’être oubliés dans les replis de l’histoire. Alors, en David modernes, ils ont tenté de se lever pour affronter les Goliath prédateurs de leur air, de leur rivière ou de leur forêt.

– Maryse Pelletier – Extrait de Cabano, P.Q. / Extract from Cabano, P.Q.

All those people in the background, who are posing for posterity, are what I’d call everyday heroes. One day, they had enough of being treated like persona non grata in a place they had watched grow from its beginnings. Enough of being left behind in the hiding places of history. Like modern Davids, they’re standing up to the Goliaths that are threatening their air, their river, or their forest. Notes

1Oneil COUTURIER, « L’histoire de l’ancienne wood room chez 25Romain LANDRY, « Le Secteur forestier du Nouveau- Fraser 1917-1970 », Revue de la Société historique du Madawaska, Brunswick est dans un état lamentable », L’Acayen, vol. 3, no 1, vol. XXVIII, nos 3-4, Partie 2, 2000, p. 44-45. 1976, p. 25. 2Jean-Claude LABRECQUE, J’ai vu naître une paroisse, c’est-à-dire 26Centre de mise en valeur des Opérations, Opération Dignité II Auclair, édition privée, 1995. voit le jour, Communiqué de presse, en ligne, 15 août 1971, http:// 3 e operationdignite.com/15-aout-1971-Operation-dignite-II.html À la recherche du Témiscouata, 2 éd., sans lieu, Édition du Réseau populaire du Témiscouata, 1977, p. 177. 27Association des forestiers du Nouveau-Brunswick et du Québec, 4 « Les bûcherons se prennent en main », Chronique populaire, vol. 1, Thomas MATHESON, sans titre, Edmundston, Centre d’Études no 5, 1976, p. 11. Madawaskayennes, Fonds Fraser Companies Ltd., 1958, p. 39-40. 28 5 Association des forestiers du Nouveau-Brunswick et du Québec, Oneil COUTURIER, « L’histoire de l’ancienne wood room chez « Les femmes s’unissent », Les bûcherons s’organisent, no 8, 1977, p. 15. Fraser 1917-1970 », Revue de la Société historique du Madawaska, vol. XXVIII, nos 1-2, Partie 1, 2000, p. 31. 29Association des forestiers du Nouveau-Brunswick et du Québec, ère 6 « Chez Raoul Guerette Inc., une 1 victoire des travailleurs en Philippe VOLPÉ, Entrevue avec M. Michel Volpé, transcription forêt », Les bûcherons s’organisent, no 10, 1977, p. 5. d’un enregistrement sonore, Université de Moncton, 2010. 30 7 Centre de mise en valeur des Opérations, Histoire du peuplement Jules BOSSÉ, Entrevue avec Léo St-Onge, « Les hommes forts de « l’arrière-pays » du Bas du Fleuve, en ligne, http://operationdi- du Madawaska, Les légendes seraient-elles véridiques? », Revue de o gnite.com/IMG/pdf/histoire-arriere-pays.pdf la Société historique du Madawaska, vol. XIX, n 4, 1991, p. 10. 31 8 Marc-André DESCHÊNES et Gilles ROY, « Le JAL : Trajec- À la recherche du Témiscouata, op.cit., p. 179. toire d’une expérience de développement local », Témoignage et 42 9 Philippe VOLPÉ, Entrevue avec Théophile Therrien, transcription analyses, Numéro 5, Groupe de recherche interdisciplinaire sur le d’un enregistrement sonore, Université de Moncton, 2010. développement régional de l’Est du Québec, UQAR, 1994. 10Philippe VOLPÉ, « La drave et les draveurs au Madawaska : 32Oneil COUTURIER, op. cit., Partie 2, p. 46. 1940-1960 », Revue de la Société historique du Madawaska, vol. XL, 33 o Fédération des producteurs forestiers du Québec, « Comment n 3-4, 2012, p. 12. Pratiquer la Sylviculture? », en ligne, http://www.foretprivee.ca/ 11À la recherche du Témiscouata, op.cit., p. 141-142. jamenage-ma-foret/sylviculture/ 12Québec (Province), ministère des Affaires municipales, de 34Association des forestiers du Nouveau-Brunswick et du Québec, l’Industrie et du Commerce, Inventaire des ressources naturelles cahier inséré à l’intérieur de Chronique populaire, vol. 3, no 2, 1978, p. 3. et industrielles, 1938 : Comté municipal de Témiscouata, Montréal, 35Etienne FRENETTE et Gabriel GAGNON-LUSSIER, Entre- Office de Recherches économiques, 1938, p. 62. vue avec M. Martin Bélanger, président de l’Association forestière 13Lucile DARD, Entrevue avec Marie-Paule Thériault, transcrip- bas-laurentienne, transcription d’un enregistrement vidéo, Musée tion d’un enregistrement sonore, Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata, 2014. du Témiscouata, 2013. 36Fédération des producteurs forestiers du Québec, Le Mérite 14Lucile DARD, Entrevue avec Géraldine Bossé, transcription forestier du Bas-Saint-Laurent, en ligne, http://www.foretprivee. d’un enregistrement sonore, Société d’histoire et d’archéologie du ca/?salle-de-presse=le-video-des-laureats-du-merite-forestier-au- Témiscouata, 2013. bas-saint-laurent 15Lucile DARD, op.cit. 37Lucile DARD, Entrevue avec Marie-Paule Thériault, transcrip- 16À la recherche du Témiscouata, op.cit., p. 169. tion d’un enregistrement sonore, Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata, 2013. 17Oneil COUTURIER, op.cit., Partie 1, p. 52. 38Louis-Robert BEAULIEU-GUAY, Entrevue avec Roger Robi- 18 Louis SIMARD, « Les compagnies jouent au fou avec les bûche- taille, transcription d’un enregistrement sonore, Société d’histoire o rons », L’Acayen, vol. 2, n 4, 1975, p. 19. et d’archéologie du Témiscouata, 2013. 19 Québec (Province), ministère des Affaires municipales, de l’Indus- 39Lucile DARD, Entrevue avec Roger Robitaille, transcription trie et du Commerce, op.cit., p. 40. d’un enregistrement sonore, Société d’histoire et d’archéologie du 20Association des Forestiers du Québec et du Nouveau-Brunswick, Témiscouata, 2013. Les bûcherons s’organisent, no 10, 1977, p. 11. 21Oneil COUTURIER, op.cit., Partie 1, p. 19. 22À la recherche du Témiscouata, op.cit., p. 172. 23Ibid., p. 178. 24Ibid., p. 145-146. Enracinés

Notes

1Oneil COUTURIER, “L’Histoire de l’ancienne wood room chez 22 À la recherche du Témiscouata, op. cit., p. 172. Fraser 1917-1970”, Revue de la Société historique du Madawaska, 23 Ibid., p. 178. vol. XXVIII, nos 3-4, Partie 2, 2000, p. 44-45. 24 Ibid., p. 145-146. 2 Jean-Claude LABRECQUE, J’ai vu naître une paroisse, c’est-à- dire Auclair, private edition, 1995. 25 Romain LANDRY, “Le secteur forestier du Nouveau- Brunswick est dans un état lamentable’’, L’Acayen, vol. 3, no 1, 3 À la recherche du Témiscouata, 2nd Edition, Édition du Réseau 1976, p. 25. populaire du Témiscouata, 1977, p. 177. 26 Centre de mise en valeur des Opérations, “Opération Dignité 4 Thomas MATHESON, untitled, Centre d’Études Madawas- II voit le jour”, press release, Aug. 15, 1971, online, http://opera- kayennes. Fonds Fraser Companies Ltd., 1958, p. 39-40. tiondignite.com/15-aout-1971-Operation-dignite-II.html 5 Oneil COUTURIER, “L’histoire de l’ancienne wood room chez 27 Association des forestiers du Nouveau-Brunswick et du Qué- Fraser 1917-1970”, Revue de la Société historique du Madawaska, os bec, “Les bûcherons se prennent en main”, Chronique populaire, vol. XXVIII, n 1-2, Partie 1, 2000, p. 31. o vol. 1, n 5, 1976, p. 11. 6 Philippe VOLPÉ, Interview with Michel Volpé (in French), 28 Association des forestiers du Nouveau-Brunswick et du Transcription of audio recording, Université de Moncton, 2010. o Québec, “Les femmes s’unissent”, Les bûcherons s’organisent, n 8, 7 Jules BOSSÉ, Interview with Léo St-Onge.“Les hommes forts 1977, p. 15. du Madawaska, Les légendes seraient-elles véridiques?” Revue de 29 o Association des forestiers du Nouveau-Brunswick et du Qué- la Société historique du Madawaska, vol. XIX, n 4, 1991, p. 10. ère bec, “Chez Raoul Guerette Inc., une 1 victoire des travailleurs 8 À la recherche du Témiscouata, op. cit., p. 179. en forêt”, Les bûcherons s’organisent, no 10, 1977, p. 5. 9 30 43 Philippe VOLPÉ, Interview with Théophile Therrien (in Centre de mise en valeur des Opérations, Histoire du peuple- French), Transcription of audio recording, Université de Monc- ment de « l’arrière-pays » du Bas du Fleuve, online, http://opera- ton, 2010. tiondignite.com/IMG/pdf/histoire-arriere-pays.pdf 10 Philippe VOLPÉ, “La drave et les draveurs au Madawaska: 31 Marc-André DESCHÊNES and Gilles ROY, “Le JAL: Tra- 1940-1960”, Revue de la Société historique du Madawaska, vol. jectoire d’une expérience de développement local”, Témoignage XL, nos 3-4, 2010, p. 12. et analyses no 5, Groupe de recherche interdisciplinaire sur le 11 développement régional de l’Est du Québec, UQAR, 1994. À la recherche du Témiscouata, op. cit., p. 141-142. 32 12 Oneil COUTURIER, op. cit., Partie 2, p. 46. Office de Recherches économiques, ministère des Affaires municipales, de l’Industrie et du Commerce, Inventory of natu- 33 Fédération des producteurs forestiers du Québec, “Comment ral and industrial resources in Témiscouata municipal county in Pratiquer la Sylviculture?”, online, http://www.foretprivee.ca/ 1938, Montréal, p. 62 jamenage-ma-foret/sylviculture/ 13 Lucile DARD, Interview with Marie-Paule Thériault (in 34 Association des forestiers du Nouveau-Brunswick et du Qué- French), Transcription of audio recording, Société d’histoire et bec, insert, Chronique populaire, vol. 3, no 2, 1978, p. 3. d’archéologie du Témiscouata, 2013. 35 Etienne FRENETTE, and Gabriel GAGNON-LUSSIER, 14 Lucile DARD, Interview with Géraldine Bossé (in French), Interview with Martin Bélanger, president of Association Transcription of audio recording, Société d’histoire et d’archéo- forestière bas-laurentienne (in French), Transcription of video logie du Témiscouata, 2013. recording, Musée du Témiscouata, 2014. 15 Lucile DARD, op. cit. 36Fédération des producteurs forestiers du Québec, “Le Mérite 16 forestier du Bas-Saint-Laurent’’, online, http://www.foretprivee. À la recherche du Témiscouata, op. cit., p. 169. ca/?salle-de-presse=le-video-des-laureats-du-merite-forestier- 17 Oneil COUTURIER, op. cit., Partie 1, p. 52. au-bas-saint-laurent 18 Louis SIMARD, “Les compagnies jouent au fou avec les 37 Lucile DARD, Interview with Marie-Paule Thériault, Trans- bûcherons”, L’Acayen, vol. 2, no 4, 1975, p. 19. cription of audio recording, Société d’histoire et d’archéologie 19 Québec (Province), ministère des Affaires municipales, de du Témiscouata, 2013. l’Industrie et du Commerce, op. cit., p. 40. 20 Association des Forestiers du Québec et du Nouveau- Brunswick, Les bûcherons s’organisent, vol. 8, no 10, 1977, p. 11. 21 Oneil COUTURIER, op. cit., Partie 1, p. 19. Enracinés

L’exposition Enracinés réunit patrimoine et art contemporain. Elle présente le travail de quatre artistes visuels du Nouveau-Brunswick et du Témiscouata au Québec. Elle met également en scène une sélection d’artéfacts en lien avec le travail en forêt provenant de la collection du Musée historique du Madawaska, des objets témoins d’une époque révolue, qui ont contribué d’une certaine façon à façonner notre territoire.

Initiée et portée par le Musée historique du Madawaska, la présente exposition, fruit d’une collaboration avec le Musée du Témiscouata, la Société historique du Madawaska et la Galerie Colline, fait écho à l’exposition permanente du Musée du Témiscouata situé à Témiscouata-sur-le-Lac. Cette exposition ethnohistorique basée sur la culture forestière au Grand Madawaska était lancée à l’été 2014 dans le cadre du Congrès mondial acadien.

Quatre artistes en art contemporain ont été invités à soumettre une proposition reflétant la relation qu’ils entretiennent avec leur propre territoire de création : Joël Boudreau de la Péninsule acadienne, Luc A. Charette originaire du Nord-Ouest mais installé dans la région de Moncton, Gabrielle Gendron de Dégelis au Témiscouata et Réjean Toussaint de Saint-Joseph-de-Madawaska. Quatre artistes aux horizons et 44 pratiques variés qui nous proposent quatre variations sur un même thème.

Luc A. Charette est natif d’Edmundston. Il vit dans la région du Sud-Est du Nouveau-Brunswick depuis la fin des années 1980. Artiste multidisciplinaire, il explore l’installation, la performance artistique, les espaces virtuels (Internet), la peinture ainsi que les images, en particulier celles de la culture populaire qu’il s’approprie et recrée. Dans cette exposition, l’artiste soulève des questions d’ordre philosophique.

D’une part, Charette aborde la notion de trace. Deux œuvres imposantes par leur format font face au spectateur lorsqu’il entre dans l’espace de la galerie. MOUVANCE, paradigme Nature est composée de trois images, une grande photo numérique où l’on aperçoit des traces de pas au bord de la mer, et de deux plus petites images sur lesquelles apparaissent des traces de pieds nus sur l’une, de chaussures sur l’autre. MOUVANCE, paradigme Culture reprend la même composition en laissant voir cette fois des traces de pneus laissées par le va-et-vient d’un véhicule, ainsi que l’image d’un pneu Michelin et son empreinte. Sur chacune des photos numériques, une boussole (image du iPhone) permet au « voyageur » de se situer géographiquement.

Cette notion de trace est à la fois simple et complexe. La trace n’est pas une entité autonome, elle n’existe que par autre chose qu’il faut arriver à « déchiffrer ». Laisser sa marque, c’est également une façon de s’approprier le territoire, de signifier sa présence.

Les deux œuvres abordent d’autre part ce rapport nature/culture qu’on entretient avec le territoire. L’artiste pose-t-il le problème dans une perspective antagoniste ou ne présente-t-il qu’une juxtaposition de deux concepts? Par ces propositions artistiques, il nous invite peut-être à repenser ce rapport (où commence la culture?, où s’arrête la nature?) et à mettre en doute les façons dont on s’approprie le territoire. Enracinés

Originaire de Dunlop au Nouveau-Brunswick, l’artiste Joël Boudreau nous propose Territoire de l’imaginaire, une installation composée de planches de bois brut avec leur écorce, communément appelées de la « slab ». Les planches sont déposées les unes contre les autres à la verticale et se dressent dans un coin de la salle d’exposition. L’œuvre, qui atteint 2,8 mètres de hauteur, reprend la forme d’une vague dont la crête se termine par douze petites maisons. Ces dernières ont été découpées à même la planche, sur place lorsque l’artiste procédait à l’installation de sa pièce.

Avec cette œuvre, Boudreau retrouve une matière qui fut témoin de ses premières expériences artistiques vers l’âge de 12 ans. Cette croûte de bois dans laquelle il sculptait était utilisée comme bois de combustion pour chauffer leur demeure. Cette matière atteste ce qui reste de la coupe du bois et renvoie au vide laissé par cette action. L’artiste fait un parallèle entre ce par quoi un certain territoire se dessine, les frontières se définissent, et l’évolution de son propre univers artistique qui s’est caractérisé au fil des ans.

La maison est un thème récurrent dans l’œuvre de Boudreau. Dans une exposition intitulée Casa présentée en 2011, il explorait la maison sous différentes formes. La maison est un symbole universel. Elle symbolise le centre du monde. Elle représente également l’être intérieur. 45

Avec une économie de matériaux et de moyens techniques, l’artiste nous fait réfléchir au sens du mot « territoire » et à tout ce qu’il évoque. Pour l’artiste, il relève davantage de l’imaginaire, de l’inconscient et suggère que l’imaginaire est en fait un territoire sans frontières.

Réjean Toussaint est un peintre originaire de Saint-Joseph-de-Madawaska dans le nord-ouest du Nouveau- Brunswick. Sa pratique picturale remonte à près de trente ans. Ses tableaux racontent d’étranges histoires et intriguent par leur foisonnement de personnages et d’animaux, souvent présentés dans des situations ambigües.

Toussaint s’intéresse à l’expérimentation et à l’exploration sur le support, le mélange des couleurs, souvent chaudes, la composition, les textures, ainsi que les moyens d’application de différents médiums, les pigments, les vernis, les gels. Pour lui, c’est dans ce processus que « l’image » se révèle. Dans ses tableaux, la figuration cohabite avec l’abstraction, cette dernière permettant aux éléments à peine figuratifs de mieux rendre l’atmosphère d’une imagerie tantôt inspirée de ses souvenirs d’enfance, tantôt de la vie onirique.

L’œuvre présentée s’intitule Chemin Toussaint et est un triptyque s’étalant sur plus de trois mètres, dont chaque élément est lui-même composé de trois petits tableaux à la verticale organisés en une espèce de topographie. Les tableaux sont peints dans un style expressionniste sur des tablettes de contreplaqué d’une vieille étagère. Déposée au sol et appuyée contre l’élément central du triptyque, une énorme scie ronde provenant d’un vieux moulin à bois qui a appartenu à son arrière-grand-père. On peut y lire : « ... l’enfance est une forteresse imprenable contre laquelle s’éreintent les civilisations ancestrales, contemporaines, qui déposent heaumes et armes. » Deux éléments qui contrastent par leur forme, mais aussi par les idées qu’ils sous-tendent : la limite, le tracé, c’est-à-dire le début et la fin; la rotondité, la spirale, l’idée d’infini. Dans cette œuvre, l’artiste souligne son attachement profond au territoire qui l’a vu naître et grandir, « un territoire ancestral grouillant de vie ».

Si, comme Réjean Toussaint, Gabrielle Gendron puise dans ses souvenirs d’enfance pour créer, c’est surtout pour soulever les rapports ambigus que l’humain entretient avec l’animal. Cette jeune artiste de Dégelis au Témiscouata a passé son enfance entourée d’animaux de la ferme, tout en étant en contact étroit avec la nature sauvage grâce à un père chasseur et trappeur. Elle nous présente deux tableaux où cohabitent le dessin et la peinture.

Impermanence I est un autoportrait. Le personnage de femme qui se détache d’un fond presque noir gît par terre. Son corps est fait de cartes topographiques de la région du Témiscouata. Son cou montre les muscles à vif. Le geste de l’artiste est habile et contrôlé. Dans Impermanence II, le corps des personnages et des animaux reprend aussi le motif des cartes topographiques. L’artiste dit vouloir souligner leur disparition sur le territoire. L’utilisation de patrons rappelle la fabrication de vêtements avec la peau des animaux.

46 À l’instar d’Élisabeth de Fontenay dont les écrits l’inspirent, Gabrielle Gendron veut déboulonner le mythe selon lequel l’homme serait supérieur à l’animal. Ils sont égaux, surtout dans leur qualité d’êtres éphémères.

Quoiqu’elle utilise des moyens fort différents, on peut dire que la volonté de Gendron à vouloir réduire l’opposition entre nature et culture rejoint celle de l’artiste allemand Joseph Beuys (1921-1986) dont l’approche métaphorique l’intéresse particulièrement. La performance que ce dernier réalisa à la galerie René Block à New York en 1974 - I Like America and America Likes Me ( J’aime l’Amérique et l’Amérique m’aime) - en est un exemple. Beuys avait passé trois jours en compagnie d’un coyote sauvage dans l’espace de la galerie, enroulé dans du feutre et jouant de sa canne, tentant ainsi de réconcilier l’homme et l’animal.

À travers le parcours de l’exposition Enracinés, on note que malgré l’apparente disparité des propositions, chaque œuvre soulève à sa façon l’idée de la trace, qu’elle soit matérielle, une empreinte tangible, un vestige, un tracé, ou bien une marque psychique inscrite dans la mémoire ou l’imaginaire. De nos jours, si c’est un cliché de dire que l’art contemporain questionne plutôt qu’il n’apporte de réponses, une chose est certaine, c’est que les œuvres de cette exposition nous offrent une occasion de réfléchir à notre propre rapport que nous entretenons avec le territoire.

- Maryse Grondin - Commissaire invitée Enracinés

Enracinés

Enracinés / Rooted combines heritage and contemporary art. The exhibition presents the work of four visual artists from New Brunswick and the Témiscouata region in Québec. It also features a selection of artifacts related to forestry work from the collection of the Musée historique du Madawaska, objects which witnessed an era in our past and contributed to shaping our territory.

Designed and organized by the Musée historique du Madawaska and developed in collaboration with the Musée du Témiscouata, the Société historique du Madawaska, and the Galerie Colline, Enracinés / Rooted echoes the permanent exhibition of the Musée du Témiscouata, located in Témiscouata-sur-le-Lac. This ethnohistorical exhibition, based on the forest culture of the Grand Madawaska area, premiered in the summer of 2014, during the Acadian World Congress.

Four artists working in contemporary art were invited to submit a proposal reflecting the relation they have with their own territory, the place where they create their art: Joël Boudreau, from the Acadian Peninsula, Luc A. Charette, originally from the North-West but living in the Moncton area, Gabrielle Gendron, from Dégelis, in the Témiscouata region, and Réjean Toussaint from Saint-Joseph-de-Madawaska. Four artists who have a variety of horizons and practices have created four variations on a theme.

Luc A. Charette is a native of Edmundston. He lives in the Southeast New Brunswick region since the late 1980s. 47 A multidisciplinary artist, he explores installation, performance art, virtual spaces (Internet), painting as well as images, particularly those of popular culture which he appropriates and re-creates. In this exhibition, the artist raises philosophical questions.

First, Charette approaches the notion of tracks or traces. Two imposing works by their size face the viewer when he enters the gallery space. MOUVANCE, paradigme Nature (MOVEMENT, Nature paradigm) consists of three images: a large digital photo where we can see footprints by the sea, and two smaller images on which appear imprints of bare feet on one, and of shoes on the other. MOUVANCE, paradigme Culture (MOVEMENT, Culture paradigm) uses the same composition revealing this time tire tracks left by the comings and goings of a vehicle, and the image of a Michelin tire and its track. On each digital photo, a compass (picture from iPhone) allows the “traveler” to be located geographically.

This notion of tracks or traces is both simple and complex. A track or trace is not an autonomous entity, it exists only as another thing that one must “decipher”. Leaving one’s mark, it’s also a way of appropriating the territory for oneself, to signify one’s presence.

Both works address on the other hand this nature/culture relationship one maintains with the territory. Is the artist posing the problem in an antagonistic perspective or is he only presenting a juxtaposition of two concepts? Through these artistic proposals, he might invite us to rethink this relationship (where does culture begins?, where does nature stops?) and to question the ways in which we appropriate the territory. Originally from Dunlop, New Brunswick, artist Joël Boudreau’s work Territoire de l’imaginaire (Territory of the Imaginary) is an installation composed of boards of raw wood with the bark still on, commonly referred to as wood “slabs” in both French and English. The slabs are placed against each other, vertically, and mounted in a corner of the exhibition space. This piece, which reaches 2.8 m in height, reproduces the form of a wave, on the crest of which are perched twelve little houses. The houses were carved directly in the wood, on site, at the time the artist began his installation.

With this work, Boudreau reconnects with a material that was core to his first experiences with art, when he was about 12. The type of wood he carved at that time was used as firewood to heat their house. The material he chose also attests to what remains from and is a reference to the emptiness that results. The artist shows the parallel between the means used to outline a particular territory and to define its borders, and the way his own artistic universe has evolved over the years.

The house is a recurrent theme in Boudreau’s work. In an exhibition entitled Casa, in 2011, he explored houses in different forms. A house is a universal symbol. It symbolizes the centre of the world. It also represents the inner being. With an economy of means and techniques, the artist invites us to reflect on the meaning of the word “territory” and everything it evokes. For Boudreau, it refers to the imaginary, the unconscious, and suggests that the imaginary is, in 48 fact, a territory without borders.

Réjean Toussaint is a painter from Saint-Joseph-de-Madawaska in northwestern New Brunswick. His pictorial practice dates back nearly thirty years. His paintings tell strange, intriguing stories, and are bursting with people and animals often depicted in ambiguous situations.

Toussaint is interested in experimenting with and exploring the surface, the mix of (often warm) colours, composition, textures, and methods of applying different media, pigments, finishes, and gels. For him, it is in the process that an “image” reveals itself. In his paintings, the figurative cohabits with the abstract, with abstraction enabling elements that are just slightly figurative to better convey the atmosphere of imagery which is sometimes inspired by childhood memories, and sometimes by his dream-life.

The work presented here is entitledChemin Toussaint (Toussaint Road), and is a triptych that extends over more than three metres. Each element is itself composed of three small, vertical paintings organized over a kind of topography. The paintings are done in an expressionist style, on plywood shelves from an old bookcase. Placed on the floor and leaning against the central element of the triptych is an enormous circular saw from an old lumber mill that had belonged to his great-grandfather. On it, we can read (in French): “childhood is an invincible fortress, against which ancestral, contemporary civilizations struggle to the point of exhaustion, then lay down their helmets and their weapons.” Two elements contrast both in their form and in their underlying ideas: limits, tracks, in other words beginning and end, versus roundness, spiral, the idea of infinity.

In this work, the artist emphasizes his deep attachment to the territory which watched him being born and growing up, “an ancestral territory on which life in every form was part of the buzz and hum.” Enracinés

While Gabrielle Gendron, like Réjean Toussaint, delves into childhood memories for her creations, in her case she is interested in raising questions about the ambiguous relationships humans have with animals. This young artist from Dégelis, in the Témiscouata region, spent her childhood years surrounded by farm animals, while maintaining close ties with wilderness through her father, who was a hunter and a trapper. She offers two pieces which combine drawing and painting.

Impermanence I is a self-portrait. The figure of the woman, emerging from an almost black background, is lying on the ground. Her body is composed of topographical maps of the Témiscouata region. Her neck shows exposed muscles. The artist’s gesture is skilful and controlled. InImpermanence II, the bodies of people and animals continue the motif of topographical maps. The artist has said she wants to emphasize the fact that they have disappeared from the territory. The use of patterns reminds us of clothing made out of animal skins.

Following the approach of Élisabeth de Fontenay, whose writings have inspired her, Gabrielle Gendron’s intention is to demolish the myth that man is superior to animals. Instead, she shows that they are equal, especially in their quality of ephemeral beings.

Although she uses very different techniques, we could say that Gendron’s desire to reduce the opposition between nature and culture is similar to that of the German artist Joseph Beuys (1921-1986), whose metaphorical approach is 49 of particular interest to her. The performance of Beuys at the René Block Gallery in New York in 1974 – I Like America and America Likes Me – is one example. Beuys spent three days in the company of a wild coyote inside the gallery space, wrapped up in felt and playing with a shepherd’s staff in an attempt to reconcile man and animal.

Moving through the Enracinés / Rooted exhibition, we sense that despite the apparent disparity among the works, each one raises, in its own way, the idea of traces, whether material – a tangible footprint, a vestige, tracks, a line – or a psychic mark imprinted on memory or the imaginary. Today, it has become a cliché to say that contemporary art offers questions rather than answers. Regardless, one thing is certain: the artworks in this exhibition offer us an opportunity to reflect on our own relationship with place or territory.

- Maryse Grondin - Guest Curator Artéfacts de la collection du Musée historique du Madawaska

9 2

1

3 50 4 5

6

8

7 Enracinés

Artifacts from the Musée historique du Madawaska collection

10

13

11 12 14

51

17

16 15

18 Artéfacts de la collection du Musée historique du Madawaska

1. Crochet à main 6. Godendard Petit crochet à main, utilisé pour tirer sur les billots. Cette scie a besoin de deux personnes pour être manipulée. Lors de la drave, le bois était jeté dans les cours d’eau Outil utilisé pour abattre les arbres et pour débiter et suivait le courant. Les draveurs déplaçaient les billes les troncs en billes. Ce godendard a appartenu à Norbert amoncelées ou échouées sur la rive avec divers outils, p. Pelletier de Saint-François-de-Madawaska. ex. des crochets. Don : Oneil Couturier, Edmundston Don : Yvon Cloutier, Edmundston 7. Racloir 2. Hache à double tranchant En menuiserie, outil servant à polir le bois et à enlever Hache à deux tranchants. Outil très utilisé par les les inégalités que le rabot a laissées. Ce racloir a été défricheurs pour abattre un arbre et l’ébrancher. Pouvait utilisé par un menuisier. Il est composé d’un manche de aussi servir aux bûcherons pour faire une entaille dans bois ouvragé et d’une lame de fer, et a servi à gratter ou le tronc. Cela permettait de faire tomber l’arbre où on racler le bois. le voulait. Hache reçue d’Ernest Charest, Saint-Jacques. Don : J.M. Lafontaine, Edmundston Don : Oneil Couturier, Edmundston 52 8. Compas de forestier 3. Herminette Compas de forestier, encore appelé bastringue, doté Outil servant à creuser dans le bois, notamment les d’une double graduation d’un côté de la verge pour pavés dans les camps de bûcherons. L’herminette était le diamètre, et de l’autre côté pour la circonférence. utilisée pour aplanir les planchers de bois ronds dans les L’instrument de mesure permet de mesurer le diamètre camps, c’est-à-dire faire sauter les nœuds en aplanissant d’un arbre. un plancher. Don : J.M. Lafontaine, Edmundston Don : Allen Martin, Iroquois 9. Picois 4. Sciotte La courte gaffe de métal est faite à la forge. Le bout du Outil utilisé pour scier les billes après l’abattage des long manche est plus rond, afin de servir de poignée. arbres. Cette sciotte a été achetée en 1930 par la famille Outil utilisé dans les opérations forestières, pour trier ou Allain d’Edmundston. Elle a servi à couper du bois remuer les billes ou les billons de bois. franc sur la ferme des Rice, à Verret Office. Don : J.M. Lafontaine, Edmundston Don : Oneil Couturier, Edmundston 10. Départoir 5. Godendard Long couteau en fer pour fendre le bardeau. Le bardeau est taillé à l’aide du départoir et d’un maillet de bois qui Cette scie à tronçonner était maniée par deux personnes. frappe dessus, pour réaliser la coupe à l’épaisseur désirée. Elle est vite devenue populaire après son apparition, à la e Outil utilisé vers 1840 par François Ouellet, Saint- fin du XIX siècle. Elle permettait d’abattre deux fois André-de-Madawaska, arrière-grand-père de Marcellin plus d’arbres que deux bûcherons utilisant la hache. Ouellet. Don : J.M. Lafontaine, Edmundston Don : Oneil Couturier, Edmundston Enracinés

11. Couteau à foin 16. Scie à bûches Scie utilisée dans les tasseries pour couper le foin et Scie à cadre. Composée d’une lame dentelée, rattachée à l’empêcher de chauffer. Le coupe-foin a aussi un usage un cadre en forme de « H » courbé. Le côté le plus long polyvalent. On peut s’en servir pour tailler des haies; sert de poignée. Une tige de métal solidifie l’ensemble. couper de petites branches d’arbres; ou percer un trou Utilisé pour scier le bois, en général avec un chevalet de dans la glace d’une rivière lors de la drave. sciage. Don : Oneil Couturier, Edmundston Don : Oneil Couturier, Edmundston

12. Hache à simple tranchant 17. Tourne-bille Hache en forme de demi-lune, munie d’un manche en Levier à éperon employé pour la drave. Servait à bois. Outil utilisé pour équarrir une pièce de bois. En soulever, pousser et déplacer les rondins qui s’enlisaient plus de prendre moins d’espace que les billes rondes en eau peu profonde, s’enchevêtraient sur des rochers ou lors du transport, le bois équarri était prêt à être scié et s’échouaient sur les berges. Pouvait aussi servir à charger transformé en bois de construction. et à décharger les rondins aux quais de chargement Don : Allen Martin, Iroquois forestier. Don : Nom pas disponible 53 13. Tourne-bille Levier en bois à crochet articulé en métal, servant 18. Scie à glace à la manutention du bois en grume. A révolutionné le transport par flottage (drave). Contrairement aux outils La scie servait à percer un trou dans la glace d’un cours d’avant, l’éperon pouvait immobiliser la bille dont les d’eau en hiver. On pratiquait ensuite la pêche au bois mouvements imprévisibles causaient des chutes. pour récupérer les billes restées au fond d’une rivière lors de la drave. La glace découpée pouvait aussi servir Don : J.M. Lafontaine, Edmundston à réfrigérer et conserver les aliments dans un camp de bûcheron. 14. Crochet à main Don : Oneil Couturier, Edmundston Gros crochet de fer, avec extrémité largement courbée et poignée en forme d’anneau ovale. Outil utilisé lors de la drave pour ramasser les chaines. Don : J.M. Lafontaine, Edmundston

15. Scie à châssis Scie à cadre. Deux côtés plus longs servent de poignées. Au centre du cadre, une fine lame dentelée. Outil utilisé pour découper les planches dans le sens du grain. Un modèle muni d’une lame plus large aurait servi à séparer les grosses poutres, en étant manié par deux hommes. Don : Oneil Couturier, Edmundston Artifacts from the Musée historique du Madawaska collection

1. Grab hook 6. Two-handed saw Small grab hook used to pull logs. During the log drive, Two people were needed to use this saw, which was used wood was thrown into the water and followed the current. to cut down trees and chop the trunks into logs. This The log drivers moved the logs which were heaped up or two-handed saw belonged to Norbert Pelletier, of Saint- washed up on the river bank with various tools, such as François-de-Madawaska. hooks. Donation: Oneil Couturier, Edmundston Donation: Yvon Cloutier, Edmundston 7. Scraper 2. Double-bladed axe In cabinet-making, this was used to polish the wood A tool frequently used by loggers clearing forests to fell and remove any rough or uneven spots left by the planer. a tree and remove its branches. It could also be used by This scraper was used by a cabinetmaker. It consisted of a to make a notch in the trunk so that the tree carved-wood handle and an iron blade, and could scratch would fall in the direction they preferred. Axe received or scrape the wood until it was smooth. from Ernest Charest, Saint-Jacques. Donation: J.M. Lafontaine, Edmundston Donation: Oneil Couturier, Edmundston 54 8. Tree caliper 3. Adze A logger’s or tree caliper has rulers or sets of measurements Tool used to cut into wood, especially the pavement etched on two arms, one for the diameter and one for in lumber camps. An adze was used to flatten round the circumference. This tool was used to measure the floorboards in the camps, in other words to remove knots diameter of a tree. in the wood when planing the boards. Donation: J.M. Lafontaine, Edmundston Donation: Allen Martin, Iroquois 9. 4. The short, metal pick was forged at the blacksmith’s shop. This tool was used to saw logs after trees were chopped The end of the long handle is rounder, so it can be used as down. This bow saw was purchased by the Allain family a grip. This tool was used in logging to drag logs or bolts of Edmundston in 1930. It was used to cut hardwood on (short logs) or to comb them down from a pile. the Rice farm in Verret Office. Donation: J.M. Lafontaine, Edmundston Donation: Oneil Couturier, Edmundston 10. 5. Two-handed saw A long, iron knife to cut shingles. Loggers cleaving wood This cross-cut saw was held by two men. It became would use a froe and a wooden mallet to hammer it, in popular soon after making its appearance at the end of order to produce as thick a shingle as desired. This tool the 19th century. The tool made it possible for twice as was used c. 1840 by François Ouellet, Saint-André-de- many trees to be chopped down as when two loggers Madawaska, great-grandfather of Marcellin Ouellet. used . Donation: Oneil Couturier, Edmundston Donation: J.M. Lafontaine, Edmundston Enracinés

11. Hay knife 16. Bucksaw Saw used in a hay barn to cut or saw a stack of hay and Saw with a frame. It consists of a serrated blade, attached prevent it from heating up. The hay knife had many other to the frame in the shape of a curved “H.” The longer side uses; it could be used to prune hedges, cut twigs, or pierce acts as a handle. A metal rod strengthens the device. Used holes in the ice during the log drive. to saw wood, generally with a sawbuck or saw horse. Donation: Oneil Couturier, Edmundston Donation: Oneil Couturier, Edmundston

12. Single-bladed axe 17. Peavey Axe with a half-moon blade and a wooden handle. This A lever with a hook used during the log drive. The peavey tool was used to square pieces of wood. As well as taking could lift up, push, or move the logs stuck in shallow up less space than round logs when they were transported, water, on rocks, or on the shore. It could also be used to squared timber was ready to be sawed and processed into load and unload logs on the cargo wharves. lumber for building. Donation: Name unavailable Donation: Allen Martin, Iroquois 13. Peavey 18. Ice saw 55 Wooden lever with a metal hook used for handling This saw was used to pierce holes in the ice surface of timber. This tool revolutionized log-driving. Unlike the water courses in the river. People also “went fishing” to tools of earlier times, the hook could hold the log in place recover logs that had sunk to the bottom of the river and prevent it from causing accidents or falls. during the log drive. The blocks of ice could then be used to keep food cold in lumber camps. Donation: J.M. Lafontaine, Edmundston Donation: Oneil Couturier, Edmundston 14. Grab hook Large grab hook, with a curved tip and a handle in the shape of an oval ring. This tool was used during the log drive to gather and pull chains. Donation: J.M. Lafontaine, Edmundston

15. Frame saw Saw with a frame. The two longer sides act as handles. In the middle of the frame, a thin, serrated blade. This tool was used to cut boards along the grain. A model with a larger blade would have separated or cut through large beams of wood when held by two men. Donation: Oneil Couturier, Edmundston Joël Boudreau

Joël Boudreau sculpte depuis l’âge de 12 ans. Originaire de Dunlop, N.- Joël Boudreau has been sculpting B., il commence sa carrière en sculptant le bois. Par la suite, il complète and carving since he was 12 years un baccalauréat en arts visuels à l’Université de Moncton et poursuit old. Originally from Dunlop, N.B., des études en dessin par ordinateur au Cégep de Sainte-Foy. Son he started his career as a wood carver. Later, he completed a cheminement artistique le mène à Paris en 1997, où il approfondit sa bachelor’s degree in visual arts at recherche en conception d’images par ordinateur dans une compagnie the Université de Moncton and de design. En 2000, il se rend en Afrique où il explore les rudiments continued his studies in computer des techniques anciennes du coulage de bronze. Il apprend également à aided drafting and design at the forger et suit des cours en joaillerie, sculpture et patines. Parallèlement, Cégep de Sainte-Foy. His interest il réalise des illustrations pour in art took him to Paris in 1997; des livres pour enfants. there, he pursued his exploration of digital and computer-aided Récipiendaire de plusieurs graphic design in a design firm. bourses du Conseil des arts In 2000, he went to Africa, where he was introduced to traditional du Nouveau-Brunswick et du bronze casting methods. He also 56 Conseil des arts du Canada, learned forging techniques and il crée de nombreuses œuvres took courses in jewellery, sculpture sculpturales et installatives en and patina application. At the same utilisant le bois, le métal, la pierre time, he illustrated children’s books. et autres matériaux et objets recyclés. Ses œuvres font partie The recipient of several New de la Banque d’œuvres d’art du Brunswick Arts Board and Canada Nouveau-Brunswick et de la Council for the Arts grants, he has Galerie d’art Louise-et-Reuben- created numerous sculptural and installation pieces using wood, metal, stone and other materials and recycled objects. His work can be found in the New Cohen. Il expose au Nouveau- Brunswick Art Bank and the Galerie d’art Louise-et-Reuben-Cohen. He has Brunswick ainsi qu’au Québec exhibited in Quebec and in France as well as in New Brunswick. In 2010, he et en France. En 2010, il reçoit was awarded the Prix Éloizes for New Brunswick’s Artist of the Year in Visual le Prix Éloizes, artiste de l’année Arts. In 2013, he created a monumental work for the Université de Moncton en arts visuels au Nouveau- on the relationship between the doctor, the patient and the environment. Brunswick. En 2013, il crée une œuvre monumentale sur la relation médecin, patient et environnement pour l’Université de Moncton. Enracinés

Mon territoire est d’ordre imaginaire. Il est défini et limité par son vécu et ses expériences.

Cette sculpture symbolise cette pensée. Ma première expérience artistique a débuté lorsque j’ai sculpté dans la « slab » de bois vers l’âge de 12 ans - bois que nous utilisions pour chauffer la maison. Cette matière a pour moi une grande symbolique. Elle est non seulement la première matière avec laquelle j’ai fait de la sculpture, elle est la matière témoin des coupes de bois. Elle représente à la fois le défrichage des terres de nos ancêtres et la limite du territoire. Mon univers artistique actuel se caractérise par l’utilisation de plusieurs matières. Mon territoire de connaissances avec de nouvelles matières et d’expériences de vie s’est agrandi et mon territoire imaginaire s’est défini.

Plusieurs «slabs» sont disposées contre le mur comme une vague qui propulse des éléments, et ces éléments sont de petites maisons qui forment un village. Ces petites maisons sont la représentation de nous-même et du territoire où nous habitons.

My territory is in the realm of the imaginary. Its lived history and its experiences define it and form its borders. 57 This sculpture symbolizes this idea. My first artistic experience took place when I carved a slab of wood when I was about 12 years old. It was wood that we used to heat our house. This material is extremely symbolic for me. Not only is it the first material I used to make sculpture, it is also the material that bears witness to logging. It represents both the clearing of our ancestors’ lands and the borders around our territory. My artistic universe today is characterized by the use of several different materials. The territory of my knowledge, incorporating new materials and new life experiences, has grown, and the territory of my imaginary has become better defined.

Several slabs are placed against the wall, like a wave propelling elements: little houses which form a village. The little houses are representations of us and the territory we inhabit.

Détail / Detail Territoire de l’imaginaire / Territory of the Imaginary, 2015 Joël Boudreau

58

Territoire de l’imaginaire / Territory of the Imaginary, 2015

Planche de bois brut avec écorce / Wood slab 2,8 x 3,3 x 2,6 m Enracinés

Détail / Detail

59 Luc A. Charette

Né à Edmundston en 1952. Diplômé de l’Université de Moncton, où il Born in Edmundston in 1952. a obtenu un baccalauréat ès arts (1976) et un baccalauréat en éducation Graduate of the Université de (1978). Titulaire d’un certificat en photographie publicitaire de la School Moncton, where he completed of Modern Photography (Montréal, 1974) et d’un diplôme d’études bachelor’s degrees in Arts (1976) and Education (1978). Completed supérieures en technologies de l’information de l’UdeM (1998). Il a a certificate program in advertising étudié les arts visuels à l’Université du Québec à Montréal et à l’UdeM photography at the School of (BAV, 1985). En 1990, il a suivi un stage de formation en marketing dans Modern Photography (Montreal, les industries culturelles auprès de l’Agence de coopération culturelle et 1974) and a graduate diploma technique, à l’École internationale de Bordeaux, France. Il a par la suite in information technology at obtenu une maîtrise ès arts avec Université de Moncton (1998). He distinction (arts médiatiques) studied visual arts at the Université de l’École des arts visuels de du Québec à Montréal and at the l’Université Laval (2003). Université de Moncton (BFA, 1985). In 1990, he did an internship Il œuvre dans le domaine des arts in marketing for cultural industries 60 visuels depuis 1973. Depuis janvier at the Agence de coopération 2011, il s’est consacré uniquement culturelle et technique, at the École à la création artistique, œuvrant internationale, in Bordeaux, France. He then obtained a Master of Arts principalement en peinture with distinction, specializing in contemporaine. En 2012, il media arts, at the École des arts présente sur invitation du visuels at Laval (2003). conservateur Terry Graff, une installation de 32 peintures He has been working in visual arts dans le cadre de l’exposition de since 1973. Since January, 2011, he has devoted himself to his arts practice groupe Hot Pop Soup, Galerie on a full-time basis, working primarily in contemporary painting. In 2012, he d’art Beaverbrook, Fredericton. was invited by Terry Graff, the curator, to take part in the group exhibition Sur invitation du conservateur Hot Pop Soup, at the Beaverbook Art Gallery in Fredericton; he presented an Bernard Riordon, il présente installation of 32 paintings. At Bernard Riordon’s invitation, he also presented a public sculpture as part of the Whirligigs: Going with the Wind exhibition, at également une sculpture publique the Beaverbrook. dans le cadre de l’exposition Whirligigs : Going with the Wind, Solo exhibitions at the FAVA festival (Caraquet, 2012), the Capitol Theatre Galerie d’art Beaverbrook. (Moncton, 2012), the Musée du Madawaska (Edmundston, 2012) and the Centre des Arts et de la Culture de Dieppe in 2015. Expositions en solo dans le cadre du FAVA (Caraquet, 2012, Awarded the Prix Éloizes 2014, Artist of the Year in Visual Arts. Théâtre Capitol (Moncton, 2012), Musée du Madawaska (Edmundston, 2012) et Centre des Arts et de la Culture de Dieppe en 2015.

Remporte le Prix Éloizes 2014, Artiste de l’année en Arts visuels. Enracinés

La littérature académique de langue française fait un usage très abondant des notions d’ancrage et d’enracinement quand elle traite de l’habiter et des pratiques résidentielles.1 Enraciné implique le mot « territoire » [...] l’analyse d’espaces terrestres humanisés, occupés, appropriés, gérés, aménagés par des groupes sociaux, et appréhendés à plusieurs niveaux d’échelle.2

Mon approche pour cette exposition oscille autour de la notion de traces. L’idée de laisser une empreinte, vestige d’une trajectoire et de la mouvance. L’idée s’apparente aussi à la délimitation du territoire, à la manière des animaux, qui laissent une trace (olfactive)…

Lors de la mission Apollo 11, c’est l’empreinte du pied de Neil Armstrong, le premier homme à s’être « enraciné » sur la Lune, qui officialise la conquête de ce territoire par les Américains le 21 juillet 1969.

Ce travail s’intègre également dans le rapport Nature ( : empreintes de pieds) et Culture ( : empreintes de pneus) que nous entretenons avec le territoire.

Francophone academic literature makes abundant use of the notions of anchoring and rootedness when dealing with dwelling 61 and residential practices.1 Being rooted implies the term “territory [...] the analysis of landscapes which have been humanized, occupied, appropriated, managed, developed by social groups, and dealt with on various levels and scales.2

My approach to the work in this exhibition revolves around the notion of tracks or traces. The idea of leaving an imprint, a vestige of one’s passage or movement. The idea is also related to marking a territory, the way animals do when they leave an olfactory trace (their scent)…

During the Apollo 11 mission, it was the imprint of Neil Armstrong’s footstep; as the first man to put down “roots” on the Moon, these tracks marked the official conquest of the territory by the Americans on July 21, 1969.

This work is integrated into another relationship we have with territory, as well: that of Nature (: foot prints) and Culture (: tire tracks).

1 http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=EG_431_0068 2 http://media.eduscol.education.fr/file/lycee/72/2/LyceeGT_Ressources_Geo_1_01_NotionTerritoire_184722.pdf Luc A. Charette

62

MOUVANCE, paradigme Nature / MOVEMENT, Nature paradigm, 2015

Photo numérique, impression aux jets d’encre sur toile et acrylique sur toile / Digital photo, ink jet print on canvas and acrylic on canvas 2,13 x 3,54 m Enracinés

63

MOUVANCE, paradigme Culture / MOVEMENT, Culture paradigm, 2015

Photo numérique, impression aux jets d’encre sur toile et acrylique sur toile / Digital photo, ink jet print on canvas and acrylic on canvas 2,13 x 3,54 m Gabrielle Gendron

« J’ai grandi entourée de chevaux, de chiens, de chats, de moutons, de “I grew up surrounded by horses, chèvres, de dindons et d’hirondelles des granges. Mon père, trappeur, dogs, cats, sheep, goats, turkeys and chasseur et pêcheur, animait mon enfance de contacts avec des peaux et barn swallows. My father, a trapper, des carcasses animales. Ces présences faisaient partie de mon quotidien hunter and fisherman, enlivened my childhood with contact with skins et étaient une opportunité de m’approcher d’un univers sauvage et and animal carcasses. Their presence fascinant. Vies et morts, enfants et animaux devenaient pour moi was part of my everyday life and normalité, simplicité du jeu, vision du monde. » was an opportunity to connect with the fascinating and wild universe Gabrielle Gendron termine un baccalauréat en arts visuels de around me. Life and death, child l’Université Laval en 2009. and animal were, for me, what was Depuis, elle vit et travaille à a normal, pure and simple vision of Dégelis, au Témiscouata. Elle the world.” décroche sa première exposition solo à la Galerie Colline en 2012, Gabrielle Gendron graduated in 2009 from Laval University with puis au Musée du Bas-Saint- a bachelor’s degree in visual arts. 64 Laurent en 2013. En 2014, elle Since that time, she has lived reçoit une bourse aux artistes and worked in Dégelis, in the professionnels des Arts visuels, Témiscouata region. She had her Volet : Projet de recherche, first solo exhibition at the Galerie de création et d’exploration Colline in 2012, and her next one du Conseil des arts et des at the Musée du Bas-Saint-Laurent Photo : La Fabrique culturelle La Fabrique Photo : lettres du Québec (CALQ). Ce in 2013. In 2014, she received a printemps 2015, elle a présenté grant for professional artists in the sa première exposition duo au visual arts category in the Research, Creation and Exploration program of the Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ). This spring (2015), centre d’artistes Caravansérail she presented her first duo exhibition at the Caravansérail artist-run centre, de Rimouski, De l’homme in Rimouski. It was entitled De l’homme animal à l’animal social (from the animal à l’animal social. Le Human Animal to the Social Animal). Gabrielle Gendron is represented by travail de Gabrielle Gendron est Galerie Bloom in Montreal. représenté par la Galerie Bloom de Montréal.

D’un point de vue philosophique, je me questionne sur notre rapport avec l’animal sauvage. Les relations à la fois de puissance et de protection que nous entretenons avec ce dernier nous permettent tour à tour de l’abattre ou de le protéger. Je découvre à quel point cette question de l’animal exprime un malaise collectif qui dure depuis des millénaires. Plusieurs questionnements demeurent sans réponse : « Les animaux pensent- ils? Sont-ils doués de la raison? Ont-ils la même sensibilité que nous? Faut-il s’interdire de les manger? Mais pourquoi donc restent-ils silencieux? »1 C’est donc en m’inspirant des rapports que nous entretenons avec les bêtes sur notre territoire que ces deux peintures sont nées.

1Elisabeth de Fontenay, Le Silence des Bêtes «La philosophie à l’épreuve de l’animalité», France, Fayard, 784 p. Enracinés

From a philosophical point of view, I examine questions of our relationship with wild animals. Our power relations with wild animals as well as our protective relationships towards them justify both slaughtering them and protecting them, going from one view to the opposite. I am discovering how important this issue is as an expression of a collective malaise which has existed for millennia. Several questions remain unanswered: “Do animals think? Are they capable of reason? Do they have the same kind of emotions and sensitivity as we do? Should we refuse to eat them? Why do they remain so silent?”1 Thus, the relationships we have with animals on our territory are the source of inspiration for these two paintings.

Impermanence I, 2014 / Impermanence II, 2015 Autoportrait et portraits qui démontrent notre Self-portrait and portraits which show the nature impermanente, passagère. Cette condition impermanent, fleeting nature of our existence. This éphémère est le rappel de l’égalité de l’Homme et ephemeral condition serves to remind us of the equal de l’Animal. La finalité de la vie nous relie l’un status of Man and Animal. Life’s finality connects us to à l’autre en faisant fi d’une relation hiérarchique. each other, overturning any hierarchy. Further, Animals De plus, Animaux et Hommes habitent, and Men have lived, transformed and travelled the earth since the beginning of time. We don’t really have transforment et parcourent la terre depuis an impact on this territory; rather, we act on ourselves. 65 toujours. Nous n’avons pas vraiment d’impact sur We are this territory. ce territoire, nous agissons plutôt sur nous. Nous sommes ce territoire.

Impermanence I, 2014

Acrylique, crayons et collage de patrons et de cartes topographiques sur bois / Acrylic, crayons and collage of patterns and topographical maps on wood 61 x 118 cm Gabrielle Gendron

66 Enracinés

Impermanence II, 2015

Acrylique, encre, crayons et collage de patrons et de cartes topographiques sur bois / Acrylic, ink, crayons and collage of patterns and topographical maps on wood 91,44 x 182,88 cm

67 Réjean Toussaint

Mes principales activités artistiques sont la peinture et le dessin. Depuis My artistic practice is primarily in plusieurs années, je suis chargé de cours en peinture à l’Université de the media of painting and drawing. Moncton, campus d’Edmundston. En 1989, je terminais un baccalauréat For a number of years, I taught en arts visuels. Par la suite, en 2014, je terminais un baccalauréat ès painting at the Université de arts multidisciplinaire (concentrations en études françaises et en Moncton’s Edmundston campus. In 1989, I completed my bachelor’s philosophie). degree in visual arts. I then completed a multidisciplinary B.A. J’ai participé à plusieurs expositions collectives dont la plus récente in 2014, majoring in French studies Dialogues imaginés en 2014 à la Galerie Colline. La même année, and philosophy. j’exposais à la Galerie Louise- et-Ruben-Cohen : 50||50||50 I have taken part in several group qui célébrait le 50e anniversaire shows, the most recent of which is du département d’Arts visuels Imagined Dialogues (2014) at the de l’Université de Moncton, à Galerie Colline. The same year, I Moncton. En 2004, je participais exhibited at the Galerie Louise- à une exposition canadienne et-Ruben-Cohen: 50||50||50, a 68 th en Chine : The Magnificient celebration of the 50 anniversary of the Department of Visual Arts 7, Taikoo Place, Hong Kong, et at the Université de Moncton. In en 2001, je participais au Festival 2004, I took part in a Canadian des arts visuels de Saint-Jean. J’ai exhibition in China: The Magnificent aussi exposé en solo à la Galerie 7, at Taikoo Place, Hong Kong; in Louise-et-Ruben-Cohen de 2001, I presented my work at the Moncton et à la Galerie Colline Saint John Visual Arts Festival. d’Edmundston. I have also had solo exhibitions at the Galerie Louise-et-Ruben-Cohen, in Moncton, and at the Galerie Colline.

Nous pourrions dire que tout se confondait : territoire, jeux et corvées. Un territoire ancestral dans lequel grouillait la vie sous toutes ses formes, et que nous examinions parfois de si près, ou parfois de si loin. Car l’arrière-fond était une chaîne de montagnes qui disparaissait dans les lointaines brumes, bleutées et violacées. Par-delà, commençait l’Afrique, selon ce qu’un enfant avait déclaré à ses frères et à ses sœurs, captivés par ses récits de mangeurs d’hommes et de bêtes sauvages, et que l’on ne connaissait pas en deçà de cette chaîne de montagnes.

Mon travail est une réminiscence de cette enfance heureuse, percée de toutes parts par les préoccupations des adultes. Et un territoire où abonde une multitude de formes, de couleurs, de textures en perspective sur un horizon qui rejoint les rouges et les bleus du ciel, et qui produisent de célestes nuances. En fait, il commence sur le chemin Toussaint, et se poursuit dans l’imaginaire d’une cohorte d’enfants qui vieillissent doucement. Enracinés

We could say that everything was mixed together: territory, games, and chores. An ancestral territory on which life in every form was part of the buzz and hum. Sometimes we looked at it so closely, and sometimes from such a distance. Because the background was a mountain range that disappeared in the fog and the distance, bluish and violet-toned. Beyond the mountains, there was Africa, according to the child who told his brothers and sisters captivating tales of head hunters and wild beasts, when none of them knew anything about the world beyond the mountains.

My work is a reminiscence of this happy childhood, pierced through in many spots with the worries of adults. And a territory abounding with a multitude of shapes, colours, textures in a perspective on a horizon that meets the reds and blues of the sky, and produces heavenly nuances. In fact, it begins on Toussaint Road, and continues into the imaginary world of a cohort of children who are gently growing up.

69

Détail / Detail Chemin Toussaint /Toussaint Road, 2015 Réjean Toussaint

70 Enracinés

Chemin Toussaint / Toussaint Road, 2015

Techniques multiples sur contreplaqué, métal et scie ronde / Mixed media on plywood, metal and round saw 193,67 x 366 cm

71 Vue d’ensemble de l’exposition

72 Enracinés

Overall view of the exhibition

73 Crédits et remerciements

L’exposition Enracinés est organisée par le Musée historique du Madawaska, en collaboration avec le Musée du Témiscouata et la Galerie Colline. Elle est rendue possible grâce au soutien de l’Université de Moncton, campus d’Edmundston, de la Direction du patrimoine du Nouveau-Brunswick (Renouvellement des expositions et soutien aux activités muséales) et de la Direction des arts et des industries culturelles du Nouveau-Brunswick (Fonds des initiatives stratégiques et Programme de coopération culturelle Nouveau- Brunswick/Québec) du ministère du Tourisme, du Patrimoine et de la Culture.

L’exposition Enracinés au Musée du Témiscouata Équipe de réalisation : Louis-Robert Beaulieu-Guay, Lucile Dard, Étienne Frenette, Samuel Moreau

Président du Musée du Témiscouata : Louis Caron Présidente de la Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata : Raymonde Gratton 74 Merci à la Société historique du Madawaska qui a rendu possible la publication de ce catalogue, par l’entremise de la Revue de la Société historique du Madawaska.

L’exposition Enracinés au Musée historique du Madawaska Coordonnateur du projet : Christian Michaud Commissaire invitée : Maryse Grondin Graphisme : Jacques Rousseau, Productions Rouj inc. Photographies des œuvres : Michel Carrier, maître photographe, Studio Michel Carrier Photographies des artistes : Contribution des artistes (sauf la photo de Gabrielle Gendron – La Fabrique culturelle)

© Maryse Grondin, texte de la commissaire invitée

Un merci spécial : Aux membres du conseil d’administration de la Galerie Colline, à toute l’équipe du Musée historique du Madawaska ainsi qu’à France Smyth pour sa précieuse collaboration.

Société historique du Madawaska Enracinés

Credits and Thanks

The Enracinés exhibition was organized by the Musée historique du Madawaska, in co-operation with the Musée du Témiscouata and Galerie Colline. It was made possible by financial contributions from the Université de Moncton’s Edmundston campus, from the New Brunswick Heritage Branch (Exhibit Renewal and Museum Activities Support Program) and from the New Brunswick Arts and Cultural Industries Branch (Strategic Initiatives Fund and New Brunswick/Quebec Cultural Cooperation Grant Program) of the Tourism, Heritage and Culture Department.

The Enracinés exhibition at the Musée du Témiscouata Production Team: Louis-Robert Beaulieu-Guay, Lucile Dard, Étienne Frenette, Samuel Moreau

President of the Musée du Témiscouata: Louis Caron President of the Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata: Raymonde Gratton

Thanks to the Société historique du Madawaska who made possible the publication of this catalogue, through the Revue de la Société historique du Madawaska. 75 The Enracinés exhibition at the Musée historique du Madawaska Project coordinator: Christian Michaud Guest curator: Maryse Grondin Graphic design: Jacques Rousseau, Productions Rouj inc. Photographs of the artworks: Michel Carrier, maître photographe, Studio Michel Carrier Photographs of the artists: Artists’contribution (with the exception of Gabrielle Gendron’s picture – La Fabrique culturelle)

© Maryse Grondin, guest curator’s text

Special Thanks: To the Galerie Colline’s board of directors, the entire team of the Musée historique du Madawaska as well as France Smyth for her valuable collaboration.

MUSÉE HISTORIQUE DU MADAWASKA inc. Université de Moncton Campus d’Edmundston Membres honoraires de la Société historique du Madawaska

† M. Jean-Louis BOUCHER † Sœur Georgette DESJARDINS, rhsj M. Robert PICHETTE, Moncton NB M. Normand CARRIER, Edmundston NB † Mgr Ernest LANG † Mgr J. Aurèle PLOURDE † M. Oneil COUTURIER † Rév. Gérard LEBEL, C.Ss.R. † M. Marcel SORMANY Mgr Eymard DESJARDINS, Edmundston NB † M. Claude PICARD Membres à vie de la Société historique du Madawaska (au 10 mars 2015)

Ms. Bernette ALBERT, Madawaska ME M. J. François DRAPEAU, Notre-Dame-du-Lac QC Ms. Lisa ORNSTEIN, Portland OR † Dr et † Mme D.J. ALBERT M. Carmon DUBÉ, Edmundston NB M. Léopold OUELLET, Edmundston NB Mme Fabienne ALBERT, Saint-Léonard NB M Edward G. DUBÉ, Edmundston NB M. Pierre OUELLET, Edmundston NB M. Jacques ALBERT, Edmundston NB Mme Jeanine FERRAN - SAINT-ONGE, Edmundston NB Dr Benoît OUELLETTE, Lac-Baker NB Mme Anne ALBERT-LEVESQUE, Tracadie NB Mme Marie-Élisa FERRAN, Edmundston NB † Mme Marie-Anna OUELLETTE M. Adjutor BEAULIEU, Saint-Jacques NB M. Charles FOURNIER, Edmundston NB Mme Annette (Serry) PELLETIER, Fredericton NB Mme Lynne BEAULIEU-PICARD, Edmundston NB Mme Léoncie FOURNIER, N.-D. de l'Ile-Perrot QC † M. Gilles PELLETIER M. Adrien BÉRUBÉ, Edmundston NB † M. Pierre FOURNIER M. J. Normand PELLETIER, Verret NB M. Benoît BÉRUBÉ, Ottawa ON M. Richard FOURNIER, Edmundston N.B. M. Philippe PELLETIER, Saint-Basile NB M. Jules BOSSÉ, Saint-Jacques NB M. Jean-Yves FRANCOEUR, Edmundston NB Mr. Rudolph T. PELLETIER, Madawaska ME Mme Rina BOSSÉ, Saint-Joseph N.-B. M. Aimé GAGNON, Matane QC M. Jacques PICARD, Edmundston NB M. Guy E. BOUCHARD, Edmundston NB † Rév. Narcisse GAGNON M. Jerry PICARD, Edmundston NB M. Paul G. BOURGOIN, Fredericton NB Ms. Yvonne GAGNON, Buckfield ME M. Louis M. PICARD, Edmundston NB Me Maurice BOURQUE, Edmundston NB M. Marcel GARVIE, Bertrand NB † Mme Germaine PICHETTE Caisse populaire Madawaska Ltée, Edmundston NB † M. Ernest HÉBERT M. Jacques PICHETTE, Edmundston NB Caisse populaire Trois Rives Ltée, Edmundston NB Mme Ann JOHNSON-ANDERSON, Cocagne NB † Dr Louis-Philippe PICHETTE M. Normand CARON, Edmundston NB M. Réjean LABRIE, Edmundston NB † Rév. Armand PLOURDE Dr Jeannot CASTONGUAY, Edmundston NB † Mgr Fernand LACROIX † M. Delbert PLOURDE Centre acadien–Université Sainte-Anne, Pointe-de-l'Église NÉ Mme Claire LAFLAMME, Edmundston NB Mme Huguette PLOURDE, Saint-Léonard NB † Me Guy G. CHAREST † M. Jean-Marc LAFONTAINE Mme Monique PLOURDE, Edmundston NB Mrs. Géraldine CHASSÉ, Madawaska ME † M. Léon LAFOREST M. Jean-Guy POITRAS, Edmundston NB † M. Réginald CHASSÉ † Mme Gloria LAJOIE M. et Mme Léo et Rita POITRAS, Siegas NB † Mme Jeanne CHIASSON M. Lionel H. LAJOIE, Lac-Baker NB M. et Mme Pius R. POWERS, Nepean ON † M. Léandre CHIASSON M. Gérard D. LANDRY, Edmundston NB Religieuses hospitalières Saint-Joseph, Bathurst NB † M. Oneil CLAVET † M. Léopold LANG † M. Francis RICE Mme Denise CLAVETTE, Saint-Jacques NB M. et Mme Ludger et Colette LANG, Clair NB Mme Marie-Ange RICE, Sainte-Foy QC 76 M. Jacques L. CLAVETTE, Sept-Iles Qc Mme Nicole LANG, Saint-Basile NB M. Marc RIOUX, Saint-Basile NB M. le sénateur Eymard CORBIN, Ottawa ON † Mgr Urbain LANG, Grand-Sault NB Mme Diane ROBINSON, Saint-Jacques NB Dr Jacques CORBIN, Edmundston NB M. Hugo Tryggve LARSSON, Fredericton NB Mme Colette ROUSSEL, Edmundston NB Mme Lucie-Anne CORMIER, Campbellton NB M. Bert LAVOIE, Edmundston NB Mme Huguette ROUSSEL, Frenchville ME † M. Mathieu CORMIER M. Eudore et Mme Janelle LAVOIE, Saint-Basile NB M. Jean ROUSSELLE, Saint-Léonard QC M. Normand CORNO, Edmundston NB M. Jean Rock LAVOIE, Saint-Basile NB Mme Gilberte ROY, Edmundston NB Mme Lisa COTÉ, Edmundston NB M. Jean-Baptiste LAVOIE, Edmundston NB † Mme Yvette RUET M. et Mme Gilles et Denise COUTURIER, Edmundston NB M. Roger J. LAVOIE, Saint-Léonard NB M. Armand A. SAINTONGE, Moncton NB M. J. Marco Daniel COUTURIER, Saint-Joseph NB M. Raymond LEBLANC, Saint-Basile NB Mme Monique SAUCIER, Edmundston NB M. Jacques Paul Couturier, Saint-Jacques NB Mme Jocelyne LEBEL, Edmundston NB † Dr Alexandre J. SAVOIE † Mme Rollande COUTURIER M. André LECLERC, Saint-Jacques NB Sr Anne-Marie SAVOIE rhsj, Montréal QC Mme Béatrice CRAIG, Ottawa ON † Mgr Camille V. LECLERC † M. le sénateur Jean-Maurice SIMARD † Mme Almida CYR † M. Maurice A. LÉGER † Mme Claire Sirois-Monkley M. et Mme Alphée et Jeannine CYR, Saint-Basile NB M. Pierre LEGRESLEY, Coleys Point NFL M. Gilmen SMYTH, Lac Baker NB † M. et Mme Arthur CYR, Saint-Basile NB Mme Aurore LEVESQUE, Edmundston NB Société Généalogique du N.-B., Fredericton NB M. Ernest-Léo CYR, Montréal QC † Rév. Claude LEVESQUE † Mme Vicky SORMANY M. Georges CYR et Mme Lise Nadeau-CYR, Saint-Hilaire Rév. Lucien LEVESQUE, Saint-André NB † M. Conrad SOUCY M. Georges U. CYR, Edmundston NB M. Gilles LONG, Québec QC Mme Donata THÉRIAULT, Edmundston NB M. Gérard CYR, Saint-Basile NB M. Marc LONG, Edmundston NB M. Gaston THÉRIAULT, Edmundston NB Me Jean-François CYR, Baker Brook NB Mme Patsy-Ann LYNCH, Edmundston NB M. Léo R. THÉRIAULT, La Luz NM Mme Patricia CYR, Saint-André NB Mme Marguerite MAILLET, Moncton NB M. Lévio et Thérèse THERIAULT, Edmundston NB M. Roland CYR, Edmundston NB Mr. Albert MARTIN, Pasadena CA M. Michel THÉRIAULT, Edmundston NB Mme Ursule CYR, Saint-Basile NB M. Berthier MARTIN, Saint-Basile NB † M. Yves THÉRIAULT Mme Yvette CYR, Baker-Brook NB Dr Gérald MARTIN, Ville Ile-Perrot QC † M. Clément THERRIAULT M. Jean-Claude D'Amours, Edmundston NB Mme Hélène MARTIN, Edmundston NB M. et Mme Michel et Odette THERRIAULT, M. Jean DAIGLE, Moncton NB Mme Rinette MARTIN, Saint-Basile NB Saint-Louis-de-Kent NB M. Jérôme DAIGLE, Baker-Brook NB M. Julien MASSICOTTE, Edmundston NB M. Adrien THERRIEN, Fredericton NB † Rév. Lionel DAIGLE Restaurant McDonald, Edmundston NB M. Roy THERRIEN, Saint-Basile NB † M. Péa A. DAIGLE Mme Cécile MICHAUD, Edmundston NB Mgr François THIBODEAU, Edmundston NB Mme Bernadette DAIGLE-RYAN, Ottawa ON † M. Georges MICHAUD Mme Georgette THIBODEAU, Edmundston NB M. Éloi DEGRACE, Edmonton AB M. Guy MICHAUD, Edmundston NB Dr Jean-Louis THIBODEAU, Edmundston NB M. Gérard DESJARDINS, Dieppe NB Mme Marie Claude MICHAUD, Edmundston NB M. et Mme Gary et Margaret THORNE, Edmundston NB Mgr Gérard DIONNE, Saint-Basile NB † Rév. Napoléon MICHAUD University of Maine, Fort Kent ME Mme Lucille DIONNE, St-Jacques NB † M. Raymond MICHAUD Mme Rita VALLILLÉE, Grand-Sault NB Rév. Roger DIONNE, Edmundston NB † Mme Vitaline MICHAUD M. Daniel VIOLETTE, Saint-Basile NB † M. Victor DIONNE M. Ghislain MORIN, Saint-Hilaire NB M. François VIOLETTE, Edmundston NB M. Zoël R. DIONNE, Moncton NB Musée historique du Madawaska, Edmundston NB M. Allen J. VOISINE, Caribou ME M. Alonzo DOIRON, Saint-Basile NB M. Bertin NADEAU, Saint-François NB M. Philippe VOLPÉ, Saint-Joseph de Madawaska NB † M. Richard DOIRON Rév. Laurent NADEAU, Edmundston NB M. et Mme Rino et Jo-Anne VOLPÉ, Saint-Jacques NB † Mr. Francis G. DOUCETTE M. Simon NADEAU, Verret NB

† La Société historique du Madawaska honore ses membres décédés en marquant leurs noms d’une croix.